Post on 13-Sep-2018
Pneumopathies Aigues
Communautaires (PAC) graves
Quelles problématiques ?
Elodie Blanchard
Service des Maladies Respiratoires
CHU Bordeaux
Introduction
• Pneumonie = 3ème cause de mortalité dans le monde selon
l’OMS (3,2 millions / an) en 2011 1
• « Communautaire » = acquise hors de l’hôpital
– ≠ nosocomiale
– ≠ liée aux soins
• 10% des admissions en « ICU » 2
• Mortalité des PAC hospitalisées en réa 20-50% 3
• PAC hospitalisée = surmortalité dans les années suivantes
pour les survivants même jeunes sans comorbidité ! 4
1.WHO 2013, 2. Renaud CMI 2007, 3. De Castro AmJRespMed 2003, 4. Waterer AJRCCM 2004
Plan
• Qui sont ces patients « communautaires »?
• Quels germes dans les PAC ?
• Quand dire qu’il s’agit d’une PAC grave ?
• Quels prélèvements réaliser ?
• Quand et comment traiter ?
• Comment prévenir une transmission éventuelle ?
• Cas cliniques
Qui sont ces patients ?
Ceux qui ne répondent pas à ces critères
ATS/IDSA AJRCCM 2005
Nosocomiale
Acquise lors d’une
hospitalisation
ou
« Liée aux soins »
Hospitalisation 2j ou + dans les 3 mois précédents
Vie dans un établissement de soins
Perfusion à domicile (dont antibiotique)
Hémodialyse dans les 30 jours
Soins de plaies cutanées
Membre de la famille colonisé à BMR
Maladie ou traitement immunosuppresseur
Quels germes dans les PAC ?
Quels germes dans les PAC ?
47%
5%15%
2%
2%
1%
7%
5%
10%
6%
StreptococcuspneumoniaeLegionella pneumophila
Haemophilus influenzae
Pseudomonas aeruginosa
Staphylococcus aureus
Entérobactéries
Mycoplasma pneumoniae
Chlamydia sp.
Virus
Autres
Données AFSSAPS 2005
Quels germes dans les PAC
hospitalisées en réanimation ?
Georges, BMC Infect Dis 2013
63%7%
11%
2%
5%
12%
Streptococcus pneumoniae
Legionella pneumophila
Haemophilus influenzae
Pseudomonas aeruginosa
Staphylococcus aureus
Entérobactéries
17% sont PSDP
Données 2005-2010 sur 175 patients
Données de résistance 2012
Streptococcus pneumoniae
• Péni G (I + R): 23.9%
– R = CMI > 1
– I = 0.125 < CMI < 1
• Erythromycine: 26.1%
• Fluoroquinolones: 0.5%
• Tendances depuis 2002:
– Diminution des souches R Péni (47%)
– Diminution des souches R érythro (46%)
• Evolution des sérotypes circulants depuis la vaccination des
enfants (↑ non couverts par vaccin)
InVS, CNR Streptococcus pneumoniae, Burgos J Clin Microb Infect 2013
Facteurs de risque d’acquisition
d’un PSDP
• Hospitalisation dans les 3 mois précédents
• Prescription β-lactamines dans les 3 mois précédents
• Antécédent d’otites moyenne aigües
• Antécédent de pneumonie
• Infection VIH
• Autre immunodépression
Pilly 2012
Risque de bactéries MDR ?
• Etude prospective observationnelle sur 12 ans
• Patients > 65 ans hospitalisés pour PAC
• Objectifs: comparer dans les tranches d’âge
65-74 ans, 75-84 ans, > 85 ans
– Présentation clinique
– Comorbidités
– Sévérité à l’admission
– Enquête microbiologique
– Traitement instauré, « outcome »…
Cilloniz Chest 2013
• Résultats
– 2149 patients
– Documentation microbiologique pour 856 (39.8%)
– Pas de différence microbiologique entre les tranches
d’âge mais selon l’existence ou non de comorbidités
0 5 10 15 20
Streptococcuspneumoniae
Staphylococcusaureus
Entérobactéries
Pseudomonasaeruginosa
Atypique
Sans comorbidités
Avec comorbidités
Cilloniz Chest 2013
« MDR potentiels »
S.aureus, Pyo, entérobactéries
Quand faut il prendre une PAC
en réanimation ?
Quand faut il prendre une PAC en réa ?
• Jugement clinique
– Sous-estimation de la gravité 1
– Surestimation de la gravité 2
• Déterminants de l’admission en réanimation
– Comorbidités 3
– Ressources et systèmes de soins
� Proportion et profil variable de patients admis en réanimation
1. Woodhead Thorax 2003, 2. Marrie JAMA 2000, 3. Rello ERJ 2006
Quand faut il prendre une PAC en réa ?
• Plusieurs scores mis en place
– Fine ou Pneumonia Severity Index (PSI)
– CURB 65 (BTS)
– CRB 65
– American Thoracic Society (ATS)
• Construits dans des buts différents
– Prise en charge extra hospitalière (PSI)
« A partir d’un score PSI III, la prise en charge doit être
hospitalière »
– Prise en charge en réanimation: score ATS
Fine ou
Pneumonia Severity Index
Fine, NEJM 1997
Fine, NEJM 1997
AFSAAPS 2006 révisé 2010
Considérer l’hospitalisation
Fine ou PSI
CURB 65: British Thoracic Society
Lim, Thorax 2003
ATS
Ewig, AJRCCM 1998
ATS modifié: 9 critères
Niederman, AJRCCM 2001
ATS simplifié version 2014 ?
Salih, ERJ 2013
Quand dire qu’il s’agit d’une PAC grave
les enjeux:
• Etude comparative reprenant les données de 4 études de
cohortes prospectives multicentriques:
Pneumonia Patient Outcome Research Team, EDCAP,
Pneumocom-1 et 2
• Objectif: comparer mortalité à 28j et la durée de séjour des
patients � n= 453 patients
– admis d’emblée en ICU � n = 315
(dont 33% avait un critère « évident » de réa)
– admis en ICU dans les 3j suivants leur hospitalisation en
service de médecine � n = 138
Renaud Crit Care Med 2009
• Résultats:
• En enlevant les 33% de patients présentant un critère évident
de réanimation
Renaud Crit Care Med 2009
<0.0010.55137Durée de séjour
(j)
0.022.31 23.411.7Mortalité à 28j
(%)
pORTransfert
différé
Transfert
direct
<0.0010.54149Durée de séjour
(j)
0.0034.8822.75.7Mortalité à 28j
(%)
pORTransfert
différé
Transfert
direct
• Les patients transférés dans les 48-72h d’un service de
médecine en réanimation pour PAC sévère meurent plus que
les patients hospitalisés en réanimation d’emblée
• Les patients admis directement avait d’emblée une ou
plusieurs défaillances d’organe
• Les patients admis secondairement présentaient plus de
comorbidités et développaient secondairement une ou
plusieurs défaillances d’organe
• Critères ATS probablement trop “restrictifs”
• Le jugement du clinicien est aussi très important !
Prise en charge des infections des voies respiratoires
basses de l’adulte immunocompétent15ème conférence de consensus mars 2006
• Le PSI permet de confirmer une prise en charge extra-hospitalière (Recommandation grade A)
• Scores CURB-65, CRB-65, ATS plus pertinents dans l’aide à la décision d’une prise en charge en réanimation
AFSAAPS 2006 révisé 2010
Quels prélèvements réaliser ?
Quels prélèvements réaliser ?
• Patients hospitalisés hors réanimation
– ECBC
– Hémocultures
– Aguries non recommandées d’emblée sauf si signes cliniques
évoquant légionellose
• Patients hospitalisés en réanimation
– ECBC, aspirations trachéo-bronchiques
– Hémocultures
– Aguries légionnelle au moins
– Aspiration nasopharyngée pour PCR multiplex virale ?
– PCR Mycoplasma pneumoniae sur prélèvement oropharynx ?
AFSAAPS 2006 révisé 2010
Problématique des antigénuries (1)
antigénurie pneumocoque
• Détection d’antigènes solubles dans les urines
• Différents kits utilisés
• Au CHU de Bordeaux en 2012: 3966 demandes dont 108
positives (2.72%)
COMmission des Anti-Infectieux CHU Bordeaux 2013:
→ 1. En situation d’urgence, pas d’intérêt en termes de prise en charge
thérapeutique, il faut privilégier hémoculture(s) et ECBC
→ 2. Lors de la réévaluation à 48h, dans le cadre d’un diagnostic étiologique
« semi-urgent » et en cas d’ECBC non contributif ou d’hémoculture(s) toujours
négative(s), alors l’antigénurie pourra être réalisée
→ 3. Prescription motivée « séniorisée », toujours possible et ce quel que soit le
contexte
Problématique des antigénuries (2)
antigénurie légionnelle
• Sérogroupe 1 (90% des légionelloses en France)
• Faux négatifs jusqu’à 25%, à répéter dans les 48h si suspicion
• Au CHU de Bordeaux en 2012: 3966 demandes dont 8
positives (0.2%)
COMmission des Anti-Infectieux CHU Bordeaux 2013:• Signes extra-respiratoires (céphalées, confusion, diarrhée, myalgies, hyponatrémie)
et/ou
• Sévérité clinique imposant l’hospitalisation en surveillance continue ou en
réanimation
et/ou
• Contexte épidémiologique (voyage, exposition à une aérosolisation d’eau)
et/ou
• Echec d’une première ligne antibiotique par bêta-lactamines
COMmission des Anti-Infectieux CHU Bordeaux 2013:• Signes extra-respiratoires (céphalées, confusion, diarrhée, myalgies, hyponatrémie)
et/ou
• Sévérité clinique imposant l’hospitalisation en surveillance continue ou en
réanimation
et/ou
• Contexte épidémiologique (voyage, exposition à une aérosolisation d’eau)
et/ou
• Echec d’une première ligne antibiotique par bêta-lactamines
Pourquoi ?
Car une légionellose sévère nécessite une bi-antibiothérapie !
Quels prélèvements réaliser ?
Wunderink NEJM 2014
Mandell, ATS/IDSA CID 2007
Le « point of care »
une solution ?
• « mini labo » proche des services d’urgences/réanimation
• Techniques non opérateur-dépendantes (pas de microscope,
pas de Gram)
• Développé CHU Marseille
• « Kits » pour le clinicien « PAC »
– Aguries pneumocoque / légionnelle
– Aspi nasopharyngée pour PCR multiplex viral
– Hémocultures pour GenXpert
– PCT
• Résultats rendus par SMS sur mobile du médecin < 90 min
Drancourt, Lancet Inf Dis 2013
Quand et comment traiter ?
Quand traiter ?
• Dès que le diagnostic est posé
– Toux avec ou sans expectoration
– Douleur thoracique
– Dyspnée
– Fièvre
– Examen clinique : crépitants, souffle tubaire, syndrome de condensation, frottement pleural
– Radiologie: opacités alvéolaires et/ou interstitielles
• Dans l’idéal < 4h
…….mais pas avec n’importe quoi !
Comment traiter ?
• L’antibiothérapie doit prendre en compte:
– Les germes les plus fréquemment retrouvés dans les PAC : pneumocoque !!!
– Le patient et ses comorbidités
– Les caractéristiques PK/PD des antibiotiques
• Bi-antibiothérapie obligatoire pour les PAC sévères
– Intra-veineuse
– Pneumocoque
– Germes dit « atypiques » et légionnelle
BiAB vs monoAB ?
• Etude française prospective multicentrique
• Patients hospitalisés en réanimation pour PAC entre 1997 et 2010
Adrie Crit Care 2013
• Antibiothérapie initiale adaptée associée à une meilleure
survie
• Plus marquée pour les PAC documentée à pneumocoque et
/ou bactériémique
• L’antibiothérapie initiale est plus souvent « adaptée » dans le
groupe biAB vs monoAB
• La mortalité à 60j est identique dans les 3 groupes
• Pas de différence en terme d’émergence de bactéries
résistantes entre les 3 groupes
BiAB vs monoAB: résultats
Adrie Crit Care 2013
Recommandations 2006
Actualisation 2010
AFSAAPS 2006 actualisé 2010
Macrolides ou Fluoroquinolones ?
• Méta-analyse d’études évaluant la mortalité:
– βlactamines + macrolides vs
– βlactamines + Fluoroquinolones
• 28 études observationnelles prospectives et rétrospectives mais aucun essai clinique randomisé contrôlé…
• 9850 patients considérés
• Mortalité 21% (macrolides) vs 23% (FQ)
• Biais d’hétérogénéité inhérents aux méta-analyses…
Sligl, Crit Care Med 2014
Sligl, Crit Care Med 2014
Recommandations 2006
Actualisation 2010
AFSAAPS 2006 actualisé 2010
Recommandations 2010
Contexte grippal
AFSAAPS
Bactéries à considérer: Pneumocoque, S. aureus, H. influenzae, Strepto A
Recommandations 2010
Contexte grippal
AFSAAPS révision 2010
Bactéries à considérer: Pneumocoque, S. aureus, H. influenzae, Strepto A
Désescalade thérapeutique
Durée de traitement
• Toujours si documentation !!!
• PAC à pneumocoque
Amoxicilline 1g x 3/j pendant 7 à 14jours
• PAC à légionnelle
FQ + macrolides
FQ + rifampicine
Macrolides + rifampicine
21 jours au total pour formes graves
• Association initiale à maintenir si pas de documentation et
évolution favorable
AFSAAPS révision 2010
Posologie des principaux AB
AFSAAPS révision 2010
Comment prévenir une
transmission éventuelle ?
Isolement
C: enfantS ou CHaemophilus influenzae
G: si proximité de
patients
immunodéprimés
S ou GPneumocystis jiroveci
SLegionella pneumophila
SMycoplasma pneumoniae ou
Chlamydia
G: si proximité de
patients fragilisés
S ou GPneumocoque
Jusqu’à guérisonGNon identifiéPneumonie
7 j après début des
symptômes
Vaccination
GMyxovirus influenzaeGrippe
DuréeIsolementgermePathologies
Fiche IN-HYG 118, Hygiène hospitalière CHU Bordeaux
Cas cliniques
M. R… 54 ans
• Viticulteur, ATCD hernie inguinale, pas de voyage, vaccins obligatoires à jour
• 1er janvier : Sd grippal
• 13 janvier : fièvre, dyspnée motivant une consult SAU Langon
- Hypoxémie pO2 56 mmHg
- Insuffisance rénale
- Acidose lactique (lactatémie 9 mmol/l)
- CIVD
�BiAB Rocéphine/Rovamycine
�Transfert Réanimation médicale
En réanimation
• Défaillances
– Respiratoire : PaO2 / FiO2 = 110
– Rénale : anurie
– Hémodynamique : amines
– Hématologique : CIVD
– Hépatique
• Ajout Oseltamivir
• Enquête microbiologique
– 4 Hémocultures (Langon) + Staphylococcus aureus
Qui s’avèrera Meti-S
– Aspi naso-pharyngées: PCR Grippe B +
• Adaptation AB
– Linézolide + Genta
puis
– Oxacilline + ofloxacine
– poursuite oseltamivir
Envoi souche S.aureus au CNR (Lyon)
�SAMS sécréteur de leucocidine de Panton-Valentine
Leucotoxine
5% (en augmentation) S.aureus
+ fréquente SARM ? Clone USA300
Inf cutanées nécrosantes
Pneumonie nécrosante adulte sain
Surexpression de la protéine A staphylococcique
Implication TLR2/CD14
Wunderink, NEJM 2014
Aspects thérapeutiques
• Sensibililité à Méticilline ?
• Diffusion pulmonaire des antibiotiques
– Mauvaise si tissus nécrosés
– Linézolide > Vancomycine
• Action synergique linézolide /clindamycine
• Modulation de l’expression de la toxine
– Production en phase de croissance stationnaire donc faible activité
des β-lactamines
– AB inhibiteurs de la synthèse protéique
• Linézolide
• Clindamycine
• Place de la daptomycine ? Tigécycline ?
Tout est bien qui finit bien …
• Amélioration lente …
• Transfert en maladies infectieuses
6 mois + tard …
M.G 58 ans
• Dyspnée aigüe fébrile depuis 24h motivant une
consultation aux urgences
• Antécédents:
– BPCO post tabac stade II
– Pacemaker pour BAV III
• Habitus:
– Tabac 40 PA non sevré
– Agent administratif, originaire des Antilles
• Examen:
– T°C 39.5°C, TA 9/4, fc 120/min fr 32/min
– Crépitants et ronchi diffus
– Céphalées, douleurs abdominales diffuses
• Biologie:
– GB 16200/mm3 dont 11000 PNN
– Créat 162 µmol/l, urée 14 mmol/l, Na 129 mmol/l
– CRP 312 mg/l
– GDS en AA: pO2 57 mmHg, pCO2 43 mmHg, pH 7.35, HCO3- 22 mmol/l lactates 3 mmol/l
AFSAAPS 2006 révisé 2010
Considérer l’hospitalisation
Fine ou PSI58
+20
+10
+20
+20
+10
= 138
CURB 65: British Thoracic Society
Lim, Thorax 2003
ATS modifié: 9 critères
Niederman, AJRCCM 2001
• Examens complémentaires:
– Hémocultures négatives
– ECBC : 104 S.aureus
– Antigénurie pneumocoque: négative
– Antigénurie légionnelle: positive
• Modification AB
– Lévofloxacine + Rifampicine
– 21 jours
• Déclaration obligatoire !
Conclusion
• Qui sont ces patients « communautaires »?
non nosocomiaux non « health-care » mais potentiellement avec comorbidités
• Quels germes dans les PAC ?
Pneumocoque, Haemophilus, Mycoplasme, Légionnelle, Staph, entérobactéries, virus …!
• Quand dire qu’il s’agit d’une PAC grave ?
S’aider des scores et de votre jugement clinique en se souvenant que le caractère approprié du site de prise en charge initiale améliore la survie et l’utilisation des ressources
• Quels prélèvements réaliser ?
ECBC, prélèvements trachéobronchiques, hémoc, nasopharynx, Aguries
• Quand et comment traiter ?
< 4h, après avoir intégrer les paramètres germe/patient/PK-PD, selon les recommandations AFSSAPS 2010
• Comment prévenir une transmission éventuelle ?
Isolement approprié
Merci de votre attention !