Subversion Du Sujet

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Subversion du sujet et dialectique du dsir

LACANSubversion du sujet

1960

Ce document de travail a pour source principale:

Subversion du sujet... document internet non identifi. Subversion du sujet... (Lectures de Lacan) de Christian FIERENS

Ce qui sinscrit entre crochets droits [ ] nest pas de Jacques LACAN.Les rfrences bibliographiques privilgient les ditions les plus rcentes. Les schmas sont refaits.

N.B.

Ce texte reste difficilement lisible sans la police de caractres spcifique, dite LACAN, disponible ici:

http://fr.ffonts.net/LACAN.font.download (placer le fichier Lacan.ttf dans le rpertoire c:\windows\fonts)

Les pages de ldition des crits [793 827]sont indiques en bleu, en gras et entre crochets : [795] (dbut de la page 795)

[793] [794] [795] [796] [797] [798] [799] [800] [801] [802] [803] [804] [805] [806] [807] [808] [809] [810] [811] [812] [813] [814] [815] [816] [817] [818] [819] [820] [821] [822] [823] [824] [825] [826] [827]

[793] Ce texte reprsente la communication que nous avons apporte un Congrs runi Royaumont par les soins des Colloques philosophiques internationaux , sous le titre de La dialectique, Jean WAHL nous y invitant. Il se tint du 19 au 23 septembre 1960. C'est la date de ce texte - antrieur au Congrs de Bonneval, dont ressortit celui qui lui succde - qui nous le fait publier : pour donner au lecteur l'ide de l'avance o s'est toujours tenu notre enseignement par rapport ce que nous pouvions en faire connatre.

Le graphe ici produit a t construit pour notre Sminaire sur Les formations de l'inconscient. Il s'labora spcialement sur la structure du mot d'esprit, prise comme dpart, devant un auditoire surpris. C'en fut le premier trimestre, soit le dernier de 1957. Un compte rendu avec la figure donne ici, en a paru dans le Bulletin de psychologie l'poque.

Une structure est constituante de la [praxis] qu'on appelle la psychanalyse.

[Aristote distingue:

les sciences thortiques: (: observation, contemplation): mathmatiques, physique,thologie dont la finest la vrit, la connaissance descauses qui gouvernent les choses. Sciences dsintresses, elles constituent la fin ultime de la pense. les sciences de lagir: , de laction authentique (o la fin estimmanente lacteur): accomplissement de soi, recherche du Bien: la laction proprement dite. Pour quil y ait, au sens propre, action, il faut en effet que lactivit ait en elle-mme sa propre fin, et quainsi lagent, dans lexercice de son acte, se trouve bnficier directement de ce quil fait. Par exemple, dans lactivit morale, lagent, s informant lui-mme, produit une valeur dont il a en mme temps lusage. [J.P. Vernant Aspects psychologiques du travail dans la Grce ancienne in La Pense, 66 (1956), p. 80-84.]

les sciences de la production: () o laction est imparfaite car subordonne des fins extrieures lagent, o luvre- - devient extrieure lui: la limite le travail artisanal apparat comme pure routine, application de recettes empiriques pour rendre un matriau conforme un modle dont la nature se fait connatre du dehors par les indications ou les ordres de lusager. Soumise autrui, tendant vers une fin qui la dpasse, comment la de lartisan serait-elle sentie comme une vritable conduite daction ? Pour la distinguer de lactivit authentique, de la , Aristote lappelle le simple mouvement : . Mouvement qui implique une imperfection : courant aprs une fin qui est au del de lui, il ne possde pas en soi : lacte. (op. cit.)] Cette structure ne saurait tre indiffrente une audience comme celle-ci, suppose tre philosophiquement avertie.Qu'tre un philosophe veuille dire s'intresser ce quoi tout le monde est intress sans le savoir, voil un propos intressant, d'offrir la particularit que sa pertinence n'implique pas qu'il soit dcidable, puisqu'il ne peut tre tranch qu' ce que tout le monde devienne philosophe.

[En 1920 le programme de Hilbert propose que les mathmatiques soient compltement formules en formalisations logique. En 1931,lethorme d'incompltude de Gdeldmontre que tout systme formel non-contradictoire et suffisamment complet pour inclure au moins l'arithmtique, ne peut dmontrer sa cohrence en s'appuyant sur ses axiomes: tout systme formel, aussi rigoureux quil soit, peut engendrer du bruit, cest--dire des non-sens qui ne parlent plus des objets que le systme formel est cens dcrire, do lindcidabilit.

Premier thorme dincompltude: Si T est une thorie du premier ordre cohrente, rcursivement axiomatisable et contenant larithmtique de Robinson, alors T est incomplte, en ce sens quil existe une formule close G dans le langage de T telle quaucune des formules G et G nest consquence des axiomes de T .Second thorme dincompltude: Si T est une thorie du premier ordre cohrente, rcursivement axiomatisable et contenant larithmtique de Peano, alors la formule ConsT (qui dans le langage de T exprime la cohrence de la thorie T) nest pas une consquence des axiomes de T.

Dans Ltourdit, douze ans aprs Subversion du sujet Lacan dveloppera les 4 formes dimpossibilit logique (le mur de limpossible ) propre chacun des quatre discours, montrant quoi aboutit le rapport du semblant lAutre: discours du matre (M): incompltude, discours de la science (H): inconsistance, discours universitaire (U): indmontrable, discours analytique (A): indcidable.]

Je dis : sa pertinence philosophique, puisque tel est au bout du compte le schma que HEGEL nous a donn de l'Histoire dans la Phnomnologie de l'esprit. Le rsumer ainsi a l'intrt de nous prsenter une mdiation aise pour situer le sujet : d'un rapport au savoir. [Hegel situe le sujet dans son rapport au savoir et lhistoire du savoirmdiation aise]

[794] Aise aussi dmontrer l'ambigut d'un tel rapport. [le savoir implique le non-savoir, le savoir absolu est une fiction fantasmatique]La mme ambigut que manifestent les effets de la science dans l'univers contemporain [la technologie et ses capacits de destructions: militaires(nous sommes en 1960 premier essai nuclaire franais) ou environnementales (pollution par les dchets et rebuts)]. Le savant qui fait la science est bien un sujet lui aussi, et mme particulirement qualifi dans sa constitution [de sujet divis: S], comme le dmontre:

que la science n'est pas venue au monde toute seule [comme le sujet, elle sinsre dans le symbolique qui la prcde], que l'accouchement n'en a pas t sans vicissitudes [comme pour le sujet divis, il en rsulte nvroses psychoses et perversions], et qu'il a t prcd de quelques checs, avortements, ou prmaturations. [alchimie, etc.]

Or ce sujet qui doit savoir ce qu'il fait - du moins on le prsume - ne sait pas ce qui dj, en fait, dans les effets de la science intresse tout le monde [les consquences scientifiques,technologiques, et sociales, des dcouvertes scientifiques]. Du moins en appert-il ainsi dans l'univers contemporain o tout le monde se trouve donc son niveau - sur ce point - d'ignorance. Ceci tout seul mrite qu'on parle d'un sujet de la science.

[Le sujet de la science est un sujet divis : le savoir scientifique contient en lui-mme le non savoir, comme le montrent les remises en cause radicales des rvolutions scientifiques, et la mconnaissance des retombes des technologies quil induit : militaires (e.g. hausse de la radioactivit ambiante, dite naturelle et ses effets sur la sant publique), industielle (e.g. pollution gnralise de lair, des sols, des ocans), sociales (e.g. les technologies permettent un contrle social renforc)Le sujet de la science est un sujet divis dans sa constitution (cf. supra), et comme tel il rencontre chaque instant le rel comme impossible, le mur de limpossible : inconsistance, incompltude, indmontrable, indcidable. Chaque avance du savoir nest pas une rsorption du non savoir (vers un savoir absolu) mais un cheminement le long du mur de limpossible]

Propos quoi entend s'galer une pistmologie dont on peut dire qu'elle y montre plus de prtention que de succs.

D'o - qu'on l'apprenne ici - la rfrence toute didactique que nous avons prise dans HEGEL pour faire entendre aux fins de formation qui sont les ntres ce qu'il en est de la question du sujet, telle que la psychanalyse la subvertit proprement.

Ce qui nous qualifie pour procder dans cette voie est videmment notre exprience de cette [praxis]. Ce qui nous y a dtermin - ceux qui nous suivent en tmoigneront - c'est une carence de la thorie, double d'abus dans sa transmission qui, pour n'tre sans danger pour la elle-mme, rsultent l'une comme les autres, dans une absence totale de statut scientifique. Poser la question des conditions minimales exigibles pour un tel statut, n'tait peut-tre pas un dpart malhonnte. Il s'est avr qu'il mne loin.

Ce n'est pas l'ampleur d'une mise en cause sociale que nous nous rapportons ici nommment au dpt des conclusions que nous avons d prendre contre les dviations notoires en Angleterre et Amrique, de la qui s'autorise du nom de psychanalyse.c'est proprement la subversion que nous allons tenter de dfinir, en nous excusant auprs de cette assemble, dont nous venons d'invoquer la qualit, de ne pouvoir faire plus en sa prsence qu'en dehors d'elle, savoir la prendre comme telle pour pivot de notre dmonstration, charge pour nous d'y justifier ce peu de marge son endroit.

[795] Usant pourtant de sa faveur pour tenir pour accord que les conditions d'une science ne sauraient tre l'empirisme.[Cf. sa Thse de Doctorat De la psychose paranoaque dans ses rapports la personnalit: Cest le postulat qui cre la science, et la doctrine le fait]De second temps, se rencontrant ce qui s'est dj constitu d'tiquette scientifique, sous le nom de Psychologie - que nous rcusons [ltiquette scientifique] - prcisment de ce que nous allons dmontrer que la fonction du sujet, telle que l'instaure l'exprience freudienne, disqualifie la racine ce qui sous ce titre ne fait - de quelque forme qu'on en rhabille les prmisses - que perptuer un cadre acadmique.

[Cadre acadmique fait rfrence au conservatisme acadmique de la Psychologie, fonde sur lunit du sujet, vhicule par lUniversit et lAcadmie de Platon, pour qui le sujet se conoit comme lunit dun cocher dirigeant un attelage dyadique. Cf. Platon: Phdre ou De la beaut : Comparons l'me aux forces runies d'un attelage ail et d'un cocher. Les coursiers et les cochers des dieux sont tous excellents et d'une excellente origine ; [246b] mais les autres sont bien mlangs. Chez nous autres hommes, par exemple, le cocher dirige l'attelage, mais des coursiers l'un est beau et bon et d'une origine excellente, l'autre est d'une origine diffrente et bien diffrent : d'o il suit que chez nous l'attelage est pnible et difficile guider. [trad. Victor Cousin] , , , . . , [246b] . , , .

En commenant ce discours nous avons distingu dans chaque me trois parties [253d] diffrentes, deux coursiers et un cocher : conservons ici la mme figure. Des deux coursiers, avons-nous dit, l'un est gnreux, l'autre ne l'est pas ; mais nous n'avons pas expliqu quelle tait la vertu du bon coursier, le vice du mauvais ; nous allons maintenant l'expliquer. Le premier, d'une noble contenance, droit, les formes bien dgages, la tte haute, les naseaux tant soit peu recourbs, la peau blanche, les yeux noirs, aimant l'honneur avec une sage retenue, fidle marcher sur les traces de la vraie gloire, obit, sans avoir besoin qu'on le frappe, aux seules exhortations [253e] et la voix du cocher. Le second, gn dans sa contenance, pais, de formes grossires, la tte massive, le col court, la face plate, la peau noire, les yeux glauques et veins de sang, les oreilles velues et sourdes, toujours plein de colre et de vanit, n'obit qu'avec peine au fouet et l'aiguillon. , , [253d] , . , , , , , . , , , , , , , , [253e] , , , , , , , , , , , , .]

Le critre en est l'unit du sujet qui est fond sur des prsupposs de cette sorte de psychologie, y tant mme prendre pour symptomatique que le thme [unit du sujet] en soit toujours plus emphatiquement isol, comme s'il s'agissait du retour d'un certain sujet de la connaissance, ou s'il fallait que le psychique se ft valoir comme doublant l'organisme.

Il faut ici prendre talon de l'ide o conflue toute une pense traditionnelle, d'habiliter le terme non sans fondementd'tat de la connaissance. Qu'il s'agisse:

des tats d'enthousiasme dans PLATON,

[Cf. les allusions de Platon aux tats denthousiame des rites corybantiques:

Platon, IonSocrate - Je le vois, Ion, et je vais t'exposer ma pense [533d] l-dessus. Ce talent que tu as de bien parler sur Homre n'est pas en toi un effet de l'art, comme je disais tout l'heure : c'est je ne sais quelle force divine qui te transporte, semblable celle de la pierre qu'Euripide a appele Magntique, et qu'on appelle ordinairement Hraclenne. Cette pierre non seulement attire les anneaux de fer, mais leur communique la vertu de produire le mme effet, et d'attirer d'autres [533e] anneaux ; en sorte qu'on voit quelquefois une longue chane de morceaux de fer et d'anneaux suspendus les uns aux autres, qui tous empruntent leur vertu de cette pierre. De mme la muse inspire elle-mme le pote ; celui-ci communique d'autres l'inspiration, et il se forme une chane inspire. Ce n'est point en effet l'art, mais l'enthousiasme et une sorte de dlire, que les bons potes piques doivent tous leurs beaux pomes. Il en est de mme des bons potes lyriques. Semblables aux corybantes, [534a] qui ne dansent que lorsqu'ils sont hors d'eux-mmes, ce n'est pas de sang-froid que les potes lyriques trouvent leurs beaux vers; il faut que l'harmonie et la mesure entrent dans leur me, la transportent et la mettent hors d'elle-mme. Les bacchantes ne puisent dans les fleuves le lait et le miel qu'aprs avoir perdu la raison; leur puissance cesse avec leur dlire ; ainsi l'me des potes lyriques fait rellement ce qu'ils se vantent de faire. Ils nous disent que c'est [534b] des fontaines de miel, dans les jardins et les vergers des Muses, que, semblables aux abeilles, et volant a et l comme elles, ils cueillent les vers qu'ils nous apportent; et ils disent vrai. En effet le pote est un tre lger, ail et sacr : il est incapable de chanter avant que le dlire de l'enthousiasme arrive : jusque l, on ne fait pas des vers, on ne prononce pas des oracles. Or, comme ce n'est point l'art, mais une inspiration divine qui dicte au pote ses vers, et lui fait dire sur tous les sujets toutes sortes de[534c] belles choses, telles que tu en dis toi-mme sur Homre, chacun d'eux ne peut russir que dans le genre vers lequel la muse le pousse. L'un excelle dans le dithyrambe, l'autre dans l'loge; celui-ci dans les chansons danser, celui-l dans le vers pique ; un autre dans l'ambe; tandis qu'ils sont mdiocres dans tout autre genre, car ils doivent tout l'inspiration, et rien l'art ; autrement, ce qu'ils pourraient dans un genre, ils le pourraient galement dans tous les autres. En leur tant la raison, en les prenant pour ministres, [534d] ainsi que les prophtes et les devins inspirs, le dieu veut par l nous apprendre que ce n'est pas d'eux-mmes qu'ils disent des choses si merveilleuses, puisqu'ils sont hors de leur bon sens, mais qu'ils sont les organes du dieu qui nous parle par leur bouche.// Quelques uns sont possds d'Orphe et lui appartiennent; d'autres de Muse ; la plupart d'Homre. Tu es de ces derniers, Ion ; Homre te possde. Lorsqu'on chante en ta prsence les vers de quelque autre pote, tu sommeilles, et ne trouve rien dire : mais entends-tu les accents d'Homre, tu te rveilles aussitt, ton me entre en danse, pour ainsi dire, les paroles s'chappent de tes lvres ; [536c] car ce n'est point en vertu de l'art ni de la science que tu parles d'Homre, comme tu fais, mais par une inspiration et une possession divine; et de mme que les corybantes ne sentent bien aucun autre air que celui du dieu qui les possde, et trouvent abondamment les figures et les paroles convenables cet air, sans faire aucune attention tous les autres; ainsi, lorsqu'on fait mention d'Homre, les paroles te viennent en abondance, tandis que tu restes muet sur les autres potes. [536d] Tu me demandes la cause de cette facilit parler quand il s'agit d'Homre, et de cette strilit quand il s'agit des autres : c'est que le talent que tu as pour louer Homre n'est pas en toi l'effet de l'art, mais d'une inspiration divine.

Platon: CritonSocrate Je crois entendre ces accents, mon cher Criton, comme ceux que Cyble inspire croient entendre les fltes sacres : le son de ces paroles retentit dans mon me, et me rend insensible tout autre discours. (Les Corybantes, prtres de Cyble, avec des cymbales et surtout avec des fltes, troublaient la raison de ceux qui prenaient part leurs ftes, et les rendaient insensibles toute autre impression que celle de la flte)

Platon: BanquetAlcibiade Mais que l'on t'entende ou toi-mme ou seulement quelqu'un qui rpte tes discours, si pauvre orateur que soit celui qui les rpte, tous les auditeurs, hommes, femmes ou adolescents, en sont saisis et transports. Pour moi, mes amis,n'tait la crainte de vous paratre totalement ivre, je vous attesterais avec serment l'effet extraordinaire que ses discours [215e] m'ont fait et me font encore. En l'coutant, je sens palpiter mon cur plus fortement que si j'tais agit de la manie dansante des corybantes, ses paroles font couler mes larmes, et j'en vois un grand nombre d'autres ressentir les mmes motions. Pricls et nos autres bons orateurs, quand je les ai entendus, m'ont paru sans doute loquents, mais sans me faire prouver rien de semblable; toute mon me n'tait point bouleverse; elle ne s'indignait point contre elle-mme de se sentir dans un honteux esclavage, tandis qu'auprs du Marsyas que voil, [216a] je me suis souvent trouv mu au point de penser qu' vivre comme je fais ce n'est pas la peine de vivre. Tu ne saurais, Socrate, nier qu'il en soit ainsi, et je suis sr qu'en ce moment mme, si je me mettais t'couter, je n'y tiendrais pas davantage, et que j'prouverais les mmes impressions.

Platon: PhdreSocrate //les plus grands biens nous arrivent par un dlire inspir des dieux. C'est dans le dlire que la prophtesse de Delphes et les prtresses [244b] de Dodone ont rendu aux citoyens et aux tats de la Grce mille importants services ; de sang-froid elles ont fait fort peu de bien, ou mme elles n'en ont point fait du tout. Parler ici de la sibylle et de tous les prophtes qui, remplis d'une inspiration cleste, ont dans beaucoup de rencontres clair les hommes sur l'avenir, ce serait passer beaucoup de temps dire ce que personne n'ignore. Mais ce qui mrite d'tre remarqu, c'est que parmi les anciens ceux qui ont fait les mots n'ont point regard le dlire () comme honteux et dshonorant. [244c] En effet, ils ne l'auraient point confondu sous une mme dnomination avec le plus beau des arts, celui de prvoir l'avenir, qui dans l'origine fut appel . C'est parce qu'ils regardaient le dlire comme quelque chose de beau et de grand, du moins lorsqu'il est envoy des dieux, qu'ils en donnrent le nom cet art ; et nos contemporains, par dfaut de got, introduisant un dans ce mot, l'ont chang mal propos en celui de . Au contraire, la recherche de l'avenir faite sans inspiration d'aprs le vol des oiseaux ou d'aprs d'autres signes, et essayant d'lever l'aide du raisonnement l'opinion humaine la hauteur de l'intelligence et de la connaissance, fut appele d'abord ; dont les modernes [244d] ont fait , changeant l'ancien en leur emphatique . Les anciens nous attestent par l qu'autant l'art du prophte () est plus noble que celui de l'augure () pour le nom comme pour la chose, autant le dlire qui vient des dieux l'emporte sur la sagesse des hommes. Il est arriv quelquefois, quand les dieux envoyaient sur certains peuples de grandes maladies ou de grands flaux en punition d'anciens crimes, qu'un saint dlire, s'emparant de quelques mortels, les rendit prophtes [244e] et leur fit trouver un remde ces maux dans des pratiques religieuses ou dans des vux expiatoires ; il apprit ainsi se purifier, se rendre les dieux propices, [245a] et dlivra des maux prsents et venir ceux qui s'abandonnrent ses sublimes inspirations. Une troisime espce de dlire, celui qui est inspir par les muses, quand il s'empare d'une me simple et vierge, qu'il la transporte, et l'excite chanter des hymnes ou d'autres pomes et embellir des charmes de la posie les nombreux hauts faits des anciens hros, contribue puissamment l'instruction des races futures. Mais sans cette potique fureur, quiconque frappe la porte des muses, s'imaginant force d'art se faire pote, reste toujours loin du terme o il aspire, et sa posie froidement raisonnable s'clipse devant les ouvrages inspirs. [245b] J'aurais encore citer beaucoup d'autres effets admirables du dlire envoy par les dieux.

des degrs du samadhi dans le Bouddhisme,

[Le terme sanskrit samadhi dsigne la concentration de l'esprit sur un seul objet, sans se laisser distraire par aucune pense adventice. Il est fait mention de seize sortes de contemplations, dont chacune a une signification spciale:

La samadhi dhvajagrakeyura (marque de l'tendard sublime) se rfre une croyance ferme et inbranlable que le Sutra du Lotus est le cur de tous les enseignements du Bouddha. La samadhi saddharmapundarika (lotus du Dharma merveilleux) se rfre une croyance profonde dans les enseignements du Sutra du Lotus et sa mise en pratique sans en tre dtourn par quoi que ce soit. Cette samadhi est considre comme emblmatique car toutes les autres en drivent. La samadhi vimaladatta (pure vertu) se rfre l'tat mental d'une personne possdant la pure vertu mais qui n'en est pas consciente. Une personne qui entre dans cette samadhi n'est ni arrogante ni gocentre, et ses paroles ainsi que sa conduite influencent naturellement ceux qui l'entourent. La samadhi nakshatra-rajavikridita (plaisirs du Roi des Constellations) se rfre la concentration sur le dsir de devenir un bouddha ou un grand bodhisattva dot de vertus de ses vies prcdentes et capable de guider les autres vers la bodhit, tout en la recherchant fermement pour soi.La samadhi anilambha (sans condition) signifie se consacrer au salut des proches mais galement de ceux avec lesquels on n'a pas de relation. La samadhi jnanamudra (sceau, mudra de sagesse) c'est se concentrer sur la comprhension profonde d'une personne afin d'avoir sur elle une influence bnfique. La samadhi sarvarutakaushalya (comprhension des langages de tous les tres) est un tat mental o l'on est capable de discerner les dsirs de tous les tres vivants et de mditer sur le moyen de leur prcher des enseignements adapts leurs capacits. La samadhi sarvapunyasamukkaya (rassemblement de tous les mrites) c'est se concentrer sur l'ide que les mrites-bienfaits (kudoku) de tous les enseignements quivalent un seul kudoku, savoir que nous-mmes et les autres deviendront des bouddhas.La samadhi prasadavati (puret ; celle qui est favorable) c'est consacrer son cur et son me une seule chose par laquelle on limine toutes les illusions et grce laquelle on garde la puret du corps. La samadhi riddhivikridita (jeu dans les pouvoirs mystiques) c'est s'efforcer maintenir un tat mental libre dans toutes les circonstances. La samadhi jnananolika (torche de la science : comprhension de la triple vrit), c'est dsirer diriger la lumire de la sagesse vers son entourage comme une torche projette au loin sa lumire. La samadhi viaharaja (Roi des Ornements ou de la Construction) c'est dsirer tre une personne ayant une vertu telle qu'elle influence les autres.La samadhi vimalaprabha (Pure Clart ou Splendeur sans tache) c'est dsirer purifier son entourage en mettant de son corps pur un clat. La samadhi vimalagarbha (Pur-Rceptacle) c'est se concentrer sur le dsir de remplir son esprit de puret. La samadhi apkritsana (exclusivit ou qui enlve toute l'eau) c'est avoir comme idal d'atteindre le mme tat d'esprit que le Bouddha et de pratiquer les enseignements qui mnent cet idal. La samadhi suryavarta (Rvolution solaire) c'est arrter les penses adventices et laisser advenir toute chose, comme le soleil brille sur tout.]

ou de l'Erlebnis, exprience vcue de l'hallucinogne,

[Des plantes telles que lepeyotl, lEchinopsis pachanoi, laSalvia divinorum, leschampignons psilocybe, laTabernanthe iboga ont des proprits hallucinognes qui sont utilises par de nombreuses socits traditionnelles pour engendrer des transes, dans des rites chamaniques. Le chaman accde alors un tat de connaissance du monde des esprits qui lui confre des pouvoirs divinatoires ou de gurison.]

il convient de savoir ce qu'une thorie quelconque [par exemple: scientifique] en authentifie, en authentifie dans le registre de ce que la connaissance comporte de connaturalit [cf. expliquer ou comprendre: si lobjet est de mme nature (e.g. connaturalit du semblable), il peut y avoir possibilit de connaissance (co-naissance) hors discours: comprendre con-prendre. Cf lordre de connaissance de lEinfhlung de Dilthey: le ressenti intuitif dun voir ].

[Le propos de Lacan est de montrer que la prtention de tout discours (y compris le discours scientifique) un savoir exhaustif sur son objet,est non fonde: il y a un reste, une perte, une bance. Le symbolique gnre une coupure dans le rel (Le rel est ce qui ptit du symbolique): larticulation de S1 S2 (articulation discursive minimale) engendre un a, et naboutit jamais la vrit du sujet. Dans le discours scientifique, le sujet S interroge le signifiant S1,produit un savoir S2, mais sans jamais pouvoir acceder sa vrit: a].

Il est clair que le savoir hglien - dans l'Aufhebung logicisante sur lequel il se fonde - fait aussi peu de cas de ces tats comme tels, que la science moderne, qui peut y reconnatre un objet d'exprience en tant qu'occasion de dfinir certaines coordonnes, mais en aucun cas une ascse qui serait, disons : pistmogne ou noophore.

[Laufbehung logicisante consiste en un processus dialectique dun tat A sa ngation : A ni, contradiction rsolue par son dpassement-conservation (sans perte) en B. Do: Tout ce qui est rationnel est rel ; tout ce qui est rel est rationnel (Hegel, Prface de laPhilosophie du Droit). Paraufhebennous entendons d'abord la mme chose que parhinwegrumen(abroger),negieren(nier), et nous disons en consquence, par exemple, qu'une loi, une disposition, etc., sontaufgehoben(abroges). Mais, en outre,aufhebensignifie aussi la mme chose que aufbewahren(conserver), et nous disons en ce sens, que quelque chose est bienwohl aufgehoben(bien conserv). Cette ambigut dans l'usage de la langue, suivant laquelle le mme mot a une signification ngative et une signification positive, on ne peut la regarder comme accidentelle et l'on ne peut absolument pas faire la langue le reproche de prter confusion, mais on a reconnatre ici l'esprit spculatif de notre langue, qui va au-del du simple ou bien-ou bien propre l'entendement.Hegel,Encyclopdie des sciences philosophiques ]

C'est bien en quoi leur rfrence [la rfrence Hegel et la science] est pour nous pertinente. Car nous supposons qu'on est assez inform de la praxis freudienne pour saisir que de tels tats [hallucinatoires, hypnodes] n'y jouent aucun rle, mais ce dont on n'apprcie pas le relief c'est le fait que cette prtendue psychologie des profondeurs ne songe pas en obtenir une illumination par exemple, ne leur affecte mme pas de cote sur ce qu'elle dessine de parcours.

Car c'est l le sens [: le parcours] - sur lequel on n'insiste pas - de cet cart dont FREUD procde l'endroit des tats hypnodes quand il s'agit d'en expliquer mme seulement les phnomnes de l'hystrie, c'est l le fait norme : qu'il y prfre le discours de l'hystrique.

[796] Ce que nous avons appel moments fconds , dans notre reprage de la connaissance paranoaque, n'est pas une rfrence freudienne. [rfrence de Lacan sa Thse de Doctorat De la psychose paranoaque dans ses rapports la personnalit: les moments de lvolution o se cre le dlire, les points fconds de la psychose, constituent des moments de discontinuit ]

Nous avons quelque mal faire entendre - dans un milieu infatu du plus incroyable illogisme - ce que comporte d'interroger l'inconscient comme nous le faisons, c'est--dire jusqu' ce qu'il donne une rponse qui ne soit pas de l'ordre du ravissement ou de la mise au sol, mais plutt qu'il dise pourquoi .[Cf. crits p. 409, La chose freudienne: Moi la vrit, je parle.. Le pourquoi napparat que si linconscient parle : lapsus, rves, symptmes]Si nous conduisons le sujet quelque part, c'est un dchiffrement [rbus, nigme] qui suppose dj dans l'inconscient cette sorte de logique : o se reconnat par exemple une voix interrogative, voire le cheminement d'une argumentation.

Toute la tradition psychanalytique [le dispositif analytique: association libre, interprtation des rves] est l pour soutenir que la ntre [voix] ne saurait y intervenir qu' y entrer au bon endroit, et qu' anticiper sur elle [modles prconstruits dinterprtation, archtypes], elle n'en obtient que la fermeture.En d'autres termes, la psychanalyse qui se soutient de son allgeance freudienne, ne saurait en aucun cas se donner pour un rite de passage une exprience archtypique [Platon(Ides), Jung(archtypes)] ou d'aucune faon ineffable : le jour o quelqu'un y fera entendre quelque chose de cet ordre - qui ne sera pas un minus - ce serait que toute limite y aurait t abolie. Ce dont nous sommes encore loin[footnoteRef:1]. Ceci n'est qu'approche de notre sujet. [1: Mme tenter d'intresser sous la rubrique des phnomnes Psi la tlpathie, voire toute la psychologie gothique qui puisse se ressusciter d'un Myers, le plus vulgaire batteur d'estrade ne pourra franchir le champ o Freud l'a contenu d'avance, poser ce qu'il retient de ces phnomnes comme devant tre au sens strict : traduit, dans les effets de recoupement de discours contemporains. La thorie psychanalytique, mme se prostituer, reste bgueule (trait bien connu du bordel). Comme on dit depuis Sartre, c'est une respectueuse : elle ne fera pas le trottoir de n'importe quel ct (note de 1966).]

Car il s'agit de serrer de plus prs ce que FREUD en sa doctrine lui-mme articule de constituer un pas copernicien.Y suffit-il qu'un privilge soit relgu, en l'occasion celui qui met la terre la place centrale ? La destitution subsquente de l'homme d'une place analogue par le triomphe de l'ide de l'volution [Darwin], donne le sentiment qu'il y aurait l un gain qui se confirmerait de sa constance.

Mais est-on si sr que ce soit l gain ou progrs essentiel ? [797] Rien fait-il apparatre que l'autre vrit - si nous appelons ainsi la vrit rvle - en ait pti srieusement ? [Cf. la condamnation de Galile: [Il est paru Florence un livre intitulDialogue des deux systmes du monde de Ptolme et de Copernicdans lequel tu dfends l'opinion de Copernic. Par sentence, nous dclarons que toi, Galile, t'es rendu fort suspect d'hrsie, pour avoir tenu cette fausse doctrine du mouvement de la Terre et repos du Soleil. Consquemment, avec un cur sincre, il faut que tu abjures et maudisses devant nous ces erreurs et ces hrsies contraires lglise. Et afin que ta grande faute ne demeure impunie, nous ordonnons que ceDialogue soit interdit par dit public, et que tu sois emprisonn dans les prisons du Saint-office.22 juin 1633]

Ne croit-on pas que l'hliocentrisme n'est pas - d'exalter le centre - moins leurrant que d'y voir la terre, et que le fait de l'cliptique [: incomplet, imparfait] donnait sans doute modle plus stimulant de nos rapports avec le vrai, avant de perdre beaucoup de son intrt de n'tre plus que terre opinant du bonnet ?

En tout cas, ce n'est pas cause de DARWIN que les hommes se croient moins le dessus du panier d'entre les cratures, puisque c'est prcisment ce dont il les convainc. L'emploi du nom de COPERNIC une suggestion langagire [rvolution copernicienne], a des ressources plus celes qui touchent justement ce qui vient dj de glisser de notre plume comme rapport au vrai : savoir le surgissement de l'ellipse [, l: intrieur, leipsis:manque, insuffisance] comme n'tant pas indigne du lieu dont prennent leur nom les vrits dites suprieures [ sens gomtrique: cercle imparfait, et sens littraire: omission dune partie de lnonc].

[une ellipse deux foyers (S1, S2) est lensemble des points M tels que MS1 + MS2 = constante, un foyer solaire (plein) reprsentant ici le savoir: S2, un foyer vide reprsentant la vrit: S1, o S1 est un savoir sans sujet (donc non su), et o S2 est le savoir du sujet de la science (donc sans accs la vrit)]

La rvolution n'est pas moindre de ne porter que sur les rvolutions clestes . Ds ce moment s'y arrter n'a plus seulement le sens de rvoquer une sottise de la tradition religieuse qui - on le voit assez - ne s'en porte pas plus mal, mais de nouer plus intimement le rgime du savoir celui de la vrit. Car si l'ouvrage de COPERNICcomme d'autres l'ont fait remarquer avant nous [Cf. A. Koyr: Du monde clos lunivers infini, PUF 1962 ]n'est pas si copernicien qu'on le croit, c'est en ceci que la doctrine de la double vrit [footnoteRef:2] y donne encore son abri un savoir qui jusque-l - il faut le dire - donnait toute l'apparence de s'en contenter. [2: Quune mme thse peut la fois tre vraie pour la foi et fausse pour la raison et que pourtant la foi et la raison sont vraies en mme temps.]

Nous voil donc ports sur cette frontire sensible de la vrit et du savoir dont aprs tout l'on peut dire que notre science, d'un premier abord, parat bien avoir repris la solution de la fermer [fermer la frontire: le savoir scientifique se ferme la vrit, mais aussi, familirement, la fermer: Cf. la dernire proposition du Tractaus de Wittgenstein: Ce qui ne peut se dire (la vrit), il faut le taire].

Si pourtant l'histoire de la Science [la science moderne dont Lacan dsigne le dbut avec Descartes (1596-1650)], son entre dans le monde, nous est encore assez brlante [Cf. la condamnation au bcher de Giordano Bruno (1548-1600), pour avoir dvelopp les thses de Copernic (1473-1543)] pour que nous sachions qu' cette frontire quelque chose alors a boug [notre rapport la vrit ], c'est peut-tre l que la psychanalyse se signale de reprsenter un nouveau sisme y survenir.

Car reprenons de ce biais le service que nous attendons de la phnomnologie de HEGEL: c'est d'y marquer une solution idale, celle - si l'on peut dire - d'un rvisionnisme permanent o la vrit est en rsorption constante dans ce qu'elle a de perturbant, n'tant en elle-mme que ce qui manque la ralisation du savoir. [798] L'antinomie que la tradition scolastique posait comme principielle [la double vrit], est ici suppose rsolue d'tre imaginaire. La vrit n'est rien d'autre [pour Hegel] que ce dont le savoir ne peut apprendre qu'il le sait qu' faire agir son ignorance. Crise relle o l'imaginaire se rsout - pour employer nos catgories - d'engendrer une nouvelle forme symbolique.[la crise est relle de ce que la vrit touche au rel (symbolico-relle, la vrit ne peut qutre mi-dite), ce conflit rel trouve son dpassement-conservation (aufbehung) par la rsolution imaginaire (symbolico-imaginaire) et la chute du rel ] Cette dialectique est convergente et va la conjoncture dfinie comme savoir absolu. Telle qu'elle est dduite, elle ne peut tre que la conjonction du symbolique avec un rel dont il n'y a plus rien attendre [o le rel ne figure plus que comme absence, manque, trou combl par limaginaire].

Qu'est ceci ? Sinon un sujet achev dans son identit lui-mme. quoi se lit que ce sujet est dj l parfait et qu'il est l'hypothse fondamentale de tout ce procs. Il est en effet nomm comme tant son substrat, il s'appelle le Selbstbewusstsein, l'tre de soi conscient, tout-conscient.

Plt au ciel qu'il en ft ainsi, mais l'histoire de la science elle-mmenous entendons de la ntre et depuis qu'elle est ne, si nous plaons sa premire naissance dans les mathmatiques grecquesse prsente plutt en dtours qui satisfont fort peu cet immanentisme, et les thoriesqu'on ne se laisse pas tromper l-dessus par la rsorption de la thorie restreinte dans la thorie gnralise [Einstein]ne s'emmanchent en fait nullement selon la dialectique thse, antithse et synthse.

D'ailleurs quelques craquements se donner voix fort confuse dans les grandes consciences responsables de quelques changements cardinaux dans la physique [Cf. les remises en cause de la physique quantique], ne sont pas sans nous rappeler qu'aprs tout, pour ce savoir comme pour les autres, c'est ailleurs que doit sonner l'heure de la vrit.

Et pourquoi ne verrions-nous pas que l'tonnant mnagement dont bnficie le battage psychanalytique dans la science, peut tre d ce qu'elle indique d'un espoir thorique qui ne soit pas seulement de dsarroi ?Nous ne parlons pas, bien entendu, de cet extraordinaire transfert latral, par o viennent se retremper dans la psychanalyse les catgories d'une psychologie qui en revigore ses bas emplois d'exploitation sociale. Pour la raison que nous avons dite, nous considrons le sort de la psychologie comme scell sans rmission.

Quoi qu'il en soit, notre double rfrence au sujet absolu de HEGEL et au sujet aboli de la science [le sujet hgelien (prvalence imaginaire) et le sujet de la science (prvalence symbolique), excluent la vrit comme extrieure eux-mmes: ex-sistence] donne l'clairage ncessaire[799] formuler sa vraie mesure le dramatisme de FREUD : rentre de la vrit dans le champ de la science, du mme pas o elle s'impose dans le champ de sa praxis : refoule, elle y fait retour.[Cf. principe dincertitude dHeisenberg, thormes dincompltude de Gdel, les 4 impossibles: incertitude, indmontrable, incompltude, inconsistance],

Qui ne voit la distance qui spare le malheur de la conscience dont si puissant qu'en soit le burinement dans Hegel, on peut dire qu'il n'est encore que suspension d'un savoir du malaise de la civilisation dans FREUD, mme si ce n'est que dans le souffle d'une phrase comme dsavoue qu'il nous marque ce qui - le lire - ne peut s'articuler autrement que le rapport de travers - en anglais on dirait skew [oblique] - qui spare le sujet du sexe [soit ce que Lacan noncera: il ny a pas de rapport sexuel].

Rien donc, dans notre biais pour situer FREUD, qui s'ordonne de l'astrologie judiciaire o trempe le psychologue. [astrologie des tiquettes nosographiques, que les expertises judiciaires sont recquises de produire]Rien qui procde de la qualit, voire de l'intensif, ni d'aucune phnomnologie dont puisse se rassurer l'idalisme.

Dans le champ freudien, malgr les mots, la conscience est trait aussi caduc fonder l'inconscient sur sa ngation cet inconscient-l date de saint THOMAS que l'affect est inapte tenir le rle du sujet protopathique, puisque c'est un service qui n'y a pas de titulaire.

L'inconscient, partir de FREUD, est une chane de signifiants qui quelque part, sur une autre scne - crit-il - se rpte et insiste pour interfrer dans les coupures que lui offre le discours effectif [a a] et la cogitation qu'il informe.

Dans cette formule [Linconscient est structur comme un langage: une chane de signifiants ]qui n'est ntre que pour tre conforme aussi bien au texte freudien qu' l'exprience qu'il a ouvertele terme crucial est le signifiant, ranim de la rhtorique antique [stociens] par la linguistique moderne, en une doctrine dont nous ne pouvons marquer ici les tapes, mais dont les noms de Ferdinand De SAUSSURE [1857-1913] et de Roman JAKOBSON [1896-1982] indiqueront l'aurore et l'actuelle culmination, en rappelant que la science pilote du structuralisme en Occident [la linguistique donc] a ses racines dans la Russie o a fleuri le formalisme. Genve 1910 [Saussure], Petrograd 1920 [Jakobson], disent assez pourquoi l'instrument en a manqu FREUD.

Mais ce dfaut de l'histoire ne rend que plus instructif le fait que les mcanismes dcrits par FREUD comme ceux du processus primaire, o l'inconscient trouve son rgime, recouvrent exactement les fonctions que cette cole tient pour dterminer les versants les plus radicaux des effets du langage, nommment la mtaphore et la mtonymie, autrement dit les effets de substitution et de combinaison du signifiant dans les[800] dimensions respectivement synchronique [mtaphore] et diachronique [mtonymie] o ils apparaissent dans le discours.

La structure du langage une fois reconnue dans l'inconscient, quelle sorte de sujet pouvons-nous lui concevoir ?On peut ici tenter, dans un souci de mthode, de partir de la dfinition strictement linguistique du Je comme signifiant : o il n'est rien que le shifter ou indicatif qui dans le sujet de l'nonc dsigne le sujet en tant qu'il parle actuellement. C'est dire qu'il dsigne le sujet de l'nonciation, mais qu'il ne le signifie pas.[le je nest ni le signifiant, ni le signifi du sujet de lnonciation, ce dernier est ex-sistence au discours et ne sy manifeste que dans un dire, dans les coupures, les ruptures, les lisions, les non-sens: lapsus, oublis, mots desprit]

Comme il est vident au fait que tout signifiant du sujet de l'nonciation peut manquer dans l'nonc, outre qu'il y en a qui diffrent du Je, et pas seulement ce qu'on appelle insuffisamment les cas de la premire personne du singulier, y adjoignt-on son logement dans l'invocation plurielle [1re personne du pluriel], voire dans le Soi de l'auto-suggestion.

Nous pensons par exemple avoir reconnu le sujet de l'nonciation dans le signifiant qu'est le ne dit par les grammairiens[footnoteRef:3] ne expltif, terme o s'annonce dj l'opinion incroyable de tels parmi les meilleurs qui en tiennent la forme pour livre au caprice. [3: Cf. Damourette et Pichon : Des mots la pense, essai de grammaire de la langue francaise, Vrin 2001.]

Puisse la charge que nous lui donnons, les faire s'y reprendre, avant qu'il ne soit avr qu'ils n'y comprennent rien:retirez ce ne, mon nonciation perd sa valeur d'attaque, Je m'lidant dans l'impersonnel.

Mais je crains ainsi qu'ils n'en viennent me honnir: glissez sur cet n' et son absence ramenant la crainte allgue de l'avis de ma rpugnance une assertion timide, rduit l'accent de mon nonciation me situer dans l'nonc.

Mais si je dis tue pour ce qu'ils m'assomment, o me situ-je sinon dans le tu dont je les toise ?

[Limage au miroir (a), lautre o je me reconnais, est diffrente (inversion droite-gauche) et suscite en cela mon agressivit: le tu est un tue]

Ne boudez pas, j'voque de biais ce que je rpugne couvrir de la carte force de la clinique [nosographie]. savoir la juste faon de rpondre la question Qui parle ?, quand il s'agit du sujet de l'inconscient. Car cette rponse ne saurait venir de lui, s'il ne sait pas ce qu'il dit, ni mme qu'il parle, comme l'exprience de l'analyse tout entire nous l'enseigne [la chane signifiante inconsciente comme savoir sans sujet].

Par quoi la place de l'inter-dit, qu'est l'intra-dit d'un entre-deux-sujets, est celle mme o se divise la transparence du sujet classique pour passer aux effets de fading qui spcifient le sujet freudien de son occultation par un signifiant toujours plus pur : [801] que ces effets nous mnent sur les confins o lapsus et mot d'esprit en leur collusion [Cf. famillionnaire, sminaire 5] se confondent, ou mme l o l'lision est tellement la plus allusive rabattre en son gte laprsence, qu'on s'tonne que la chasse au Dasein n'en ait pas plus fait son profit.[Lintra-dit, soit le discours courant entre a et a, est aussi le lieu de linter-dit: trous dans le dicours courant causs par lirruption de lapsus-mots desprit (famillionaire), mais aussi dlisions (cf. supra le ne expltif), o le sujet classique - transparent lui-mme, Selbstbewusstsein - ne sait plus ce quil dit, et laisse fugacement surgir un autre sujet, vanescent (fading), illusion de la transparence du sujet lui-mme et division du sujet (spaltung freudienne) ]

Pour que ne soit pas vaine notre chasse, nous analystes, il nous faut tout ramener la fonction de coupure dans le discours, la plus forte tant celle qui fait barre entre le signifiant et le signifi. L se surprend le sujet qui nous intresse puisque, se nouer dans la signification, le voil log l'enseigne du prconscient.

Par quoi l'on arriverait au paradoxe de concevoir que le discours dans la sance analytique ne vaut que de ce qu'il trbuche [lapsus, oublis, witz] ou mme s'interrompt, si la sance elle-mme ne s'instituait comme rupture dans un faux discours, disons dans ce que le discours ralise se vider comme parole [Cf. moulin parole], n'tre plus que la monnaie la frappe use dont parle MALLARM, qu'on se passe de main main en silence [footnoteRef:4]. [4: Cf. crits p. 251 et p. 801. Mallarm use de la mtaphore de la pice de monnaie use pour dsigner le langage: Narrer, enseigner, mme dcrire, cela va et encore qu' chacun suffirait peut-tre pour changer la pense humaine, de prendre ou de mettre dans la main d'autrui en silence une pice de monnaie, l'emploi lmentaire du discours dessert l'universel reportage dont, la littrature excepte, participe tout entre les genres d'crits contemporains. Stphane Mallarm: Crise de vers, Divagations.]

Cette coupure de la chane signifiante est seule vrifier la structure du sujet comme discontinuit dans le rel. [discontinuit dans le rel: effet de la coupure signifiante le rel est ce qui ptit du signifiant]

Si la linguistique nous promeut le signifiant y voir le dterminant du signifi, l'analyse rvle la vrit de ce rapport, faire des trous du sens les dterminants de son discours. C'est la voie o s'accomplit l'impratif que FREUD porte au sublime de la gnomique prsocratique : Wo Es war, soll Ich werden, que nous avons plus d'une fois comment et que nous allons tout de suite faire comprendre autrement.

Nous contentant d'un pas dans sa grammaire : l o ce fut..., qu'est-ce dire ? Si ce n'tait que a, qui et t ( l'aoriste), comment venir l mme pour m'y faire tre, de l'noncer maintenant ?

Mais le franais dit : L o c'tait usons de la faveur qu'il nous offre d'un imparfait distinctL o c'tait l'instant mme, l o c'tait pour un peu, entre cette extinction qui luit encore et cette closion qui achoppe, je peux venir l'tre de disparatre de mon dit.

nonciation qui se dnonce [Cf. le ne expltif de Je crains quil ne vienne.], nonc qui se renonce [Cf. le dsir de millions dans famillionnaire], ignorance qui se dissipe, [Cf. infra: Il ne savait pas quil tait mort] occasion qui se perd, [L o c'tait jaurai pu advenir l'tre]qu'est-ce qui reste ici sinon la trace de ce qu'il faut bien qui soit, pour choir de l'tre ?[Quelles quen soient les occurrences (dnonciation, renoncement) le sujet ne vient ltre (comme trace vanescente, vision fugace, fantme de la vrit)qu disparatre de son dit, qu en choir.]

Un rve rapport par FREUD dans son article: Formulations sur [802] les deux principes de l'vnement psychique [footnoteRef:5], [5: S. Freud: Formulierungen ber die zwei Prinzipien des psychischen Geschehens.]

nous livre, lie au pathtique dont se soutient la figure d'un pre dfunt d'y tre celle d'un revenant, la phrase : Il ne savait pas qu'il tait mort. Dont nous avons dj pris prtexte illustrer la relation du sujet au signifiant, par une nonciation dont l'tre tremble de la vacillation qui lui revient de son propre nonc.

Si la figure ne subsiste que de ce qu'on ne lui dise pas la vrit qu'elle ignore, qu'en est-il donc du Je dont cette subsistance dpend ?Il ne savait pas... Un peu plus il savait... Ah ! que jamais ceci n'arrive ! Plutt qu'il sache... queJe meure. Oui, c'est ainsi que Je viens l, l o c'tait : qui donc savait que J'tais mort ?

tre de non-tant, c'est ainsi qu'advient Je comme sujet qui se conjugue de la double aporie:

d'une subsistance vritable qui s'abolit de son savoir, [la figure ne subsiste que de ce qu'on ne lui dise pas la vrit qu'elle ignore] et d'un discours o c'est la mort qui soutient l'existence. [la dcadence du narratif, ce qui se vhicule au champ de lAutre]

[Lacan, dans la sance du 11-05-60 (Lthique), propos de limparfait de lindicatif -il ne savait pas, L o ctait - citait dj Gustave Guillaume: Je vous prie ici de vous rappeler l'ambigut que rvle l'exprience linguistique au sujet de cet imparfait, qu'en franais quand on dit Un instant plus tard, la bombe clatait , ceci peut vouloir dire deux choses opposes: ou bien qu'effectivement elle a clat, ou bien que prcisment, quelque chose est intervenu, ce qui fait qu'elle n'a pas clat.Gustave Guillaume distinguait dans limparfait de lindicatif du franais lambigit dun momentdincidence et dun moment de dcadence, une action sur le point de saccomplir et une action qui sest accomplie. Limparfait cursif (narratif) comporte une part daccompli non nulle (dcadence) et limparfait perspectif une part daccompli proche de zro (incidence): une chose non arrive vite de justesse (Gustave Guillaume: Leons de linguistique 1948-1949, A, vol.1, Paris, Klincksieck 1971, p.78). Cf. supra: entre cette extinction qui luit encore et cette closion qui achoppe]

Mettrons-nous cet tre en balance avec celui que HEGEL comme sujet a forg, d'tre le sujet qui tient sur l'histoire le discours du savoir absolu ? On se souvient qu'il nous tmoigne en avoir prouv la tentation de la folie. Et notre voie n'est-elle pas celle qui la surmonte, d'aller jusqu' la vrit de la vanit de ce discours.

N'avanons pas ici notre doctrine de la folie. Car cette excursion eschatologique n'est l que pour dsigner de quelle bance se sparent [ces folies] la freudienne de l'hglienne, ces deux relations du sujet au savoir.Et qu'il n'en est pas de plus sre racine que les modes dont s'y distingue la dialectique du dsir.

Car dans HEGEL c'est au dsir, la Begierde qu'est remise la charge de ce minimum de liaison qu'il faut que garde le sujet l'antique connaissance, pour que la vrit soit immanente la ralisation du savoir. La ruse de la raison veut dire que le sujet ds l'origine et jusqu'au bout sait ce qu'il veut.[lesclave, m par son dsir de reconnaissance, ralise par son travail laccomplissement du savoir absolu o doit se rsorber entirement la vrit]

C'est l que FREUD rouvre la mobilit d'o sortent les rvolutions, le joint entre vrit et savoir. En ceci que le dsir s'y noue au dsir de l'Autre, mais qu'en cette boucle gt le dsir de savoir. [De lespace homogne du savoir (la possibilit S1 S2) la vrit est exclue, elle ex-siste au savoir et ny fait retour que par les trbuchements de la parole, les fugitifs accidents du discours (ouverture du joint entre vrit et savoir) o le dsir se fait reconnatre: le dsir rside dans le non-savoir. Do en cette boucle gt le dsir de savoir: aucune intersection entre reconnaissance du dsir (Freud) et dsir de reconnaissance (Hegel)]

[803] Le biologisme de FREUD n'a rien faire avec cette abjection prcheuse qui vous vient par bouffes de l'officine psychanalytique. Et il fallait vous faire vivre l'instinct de mort qu'on y abomine, pour vous mettre au ton de la biologie de FREUD. Car luder l'instinct de mort de sa doctrine, c'est la mconnatre absolument.[Le biologisme de Freud est sans rapport avec le physiologisme des auteurs de La psychanalyse daujourdhui (titre du livre publi aux PUF par Nacht, Bouvet, Diatkine, Lebovici, la p.d.a. dans les crits). Lacan interroge Freud sur linstinct de mort et les processus luvre dans la vie de ltre parlant. Cf. supra: tre de non-tant, c'est ainsi qu'advient Je comme sujet // d'un discours o c'est la mort qui soutient l'existence.

De l'abord que nous vous y avons mnag, reconnaissez dans la mtaphore du retour l'inanim dont FREUD affecte tout corps vivant, cette marge au-del de la vie que le langage assure l'tre, du fait qu'il parle, et qui est juste celle o cet tre engage en position de signifiant, non seulement ce qui s'y prte de son corps d'tre changeable [les 4 objets partiels: sein, scybale, voix, regard, comme objets(a)], mais ce corps lui-mme. O apparat donc que la relation de l'objet au corps ne se dfinit nullement comme d'une identification partielle qui aurait s'y totaliser, puisque au contraire cet objet est le prototype de la signifiance du corps comme enjeu de l'tre [Cf. et la fonction phallique].

Nous relevons ici le gant du dfi qu'on nous porte traduire du nom d'instinct ce que FREUD appelle Trieb :ce que drive traduirait assez bien en anglais mais qu'on y vite, et ce pour quoi le mot drive serait en franais notre recours de dsespoir, au cas o nous n'arriverions pas donner la btardise du mot pulsion son point de frappe.Et de l nous insistons promouvoir que, fond ou non dans l'observation biologique, l'instinctparmi les modes de connaissance que la nature exige du vivant pour qu'il satisfasse ses besoinsse dfinit comme cette connaissance qu'on admire de ne pouvoir tre un savoir.

Mais autre chose est ce dont il s'agit chez Freud, qui est bien un savoir, mais un savoir qui ne comporte pas la moindre connaissance [ni le moindre sujet de la connaissance] en ce qu'il est inscrit en un discours dont - tel l'esclavage-messager de l'usage antique - le sujetqui en porte sous sa chevelure le codicille qui le condamne mortne saitni le sens, ni le texte, ni en quelle langue il est crit, ni mme qu'on l'a tatou sur son cuir ras pendant qu'il dormait.[un discours non su qui dtermine la vie et la mort, soit: le destin]

Cet apologue force peine la note du peu de physiologie que l'inconscient intresse. On l'apprciera la contre-preuve de la contribution que la psychanalyse a apporte la physiologie depuis qu'elle existe : cette contribution est nulle, ft-ce concernant les organes sexuels. Aucune fabulation ne prvaudra contre ce bilan.

[804] Car la psychanalyse implique bien entendu le rel du corps, et de l'imaginaire de son schma mental. Mais pour reconnatre leur porte dans la perspective qui s'y autorise du dveloppement, il faut d'abord s'apercevoir que les intgrations plus ou moins parcellaires [les 4 objets(a)] qui paraissent en faire l'ordonnance, y fonctionnent avant tout comme les lments d'une hraldique, d'un blason du corps.

Comme ceci se confirme l'usage qu'on en fait pour lire les dessins d'enfant. L est le principe, nous y reviendrons, du privilge paradoxal, qui reste celui du phallus dans la dialectique inconsciente, sans que suffise l'expliquer la thorie produite de l'objet partiel.

Nous faut-il dire maintenant que:

si l'on [Jean Wahl] conoit quelle sorte d'appui nous avons cherch dans HEGEL pour critiquer une dgradation de la psychanalyse si inepte qu'elle ne se trouve d'autre titre l'intrt que d'tre celle d'aujourd'hui [footnoteRef:6], [6: Cf. Nacht, Bouvet, Diatkine, Doumic, Favreau, Held, Lebovici : La psychanalyse daujourdhui, PUF 1956.]

il est inadmissible qu'on [J. Wahl] nous impute d'tre leurr par une exhaustion purement dialectique de l'tre, et que nous ne saurions tenir tel philosophe[footnoteRef:7] pour irresponsable quand il autorise ce malentendu. [7: Il s'agit de l'ami qui nous a convi ce colloque, aprs avoir quelques mois auparavant, laiss paratre les rserves qu'il prenait de son ontologie personnelle contre les psychanalystes son gr trop ports sur l'hglianisme, comme si quelqu'un d'autre que nous y offrait prise dans cette collectivit. Ceci dans le bton rompu de pages de son journal jetes aux vents (de hasard sans doute) qui les lui avaient arraches. Sur quoi nous lui fmes tenir que, pour y intresser cette sienne ontologie des termes mmes divertissants dont il l'habille en des billets familiers, nous en trouvions le procd, srement pas, mais peut-tre destin garer les esprits. ]

Car loin de cder une rduction logicisante l o il s'agit du dsir, nous trouvons dans son irrductibilit la demande le ressort mme de ce qui empche aussi bien de le ramener au besoin. Pour le dire elliptiquement [Cf. supra: ellipse]: que le dsir soit articul [dans et par le symbolique], c'est justement par l qu'il n'est pas articulable [le rel en chute insignifiable division du sujet. Larticulation S1 S2 ne produit que des a, et natteint jamais la vrit du sujet : S1 S2 a S (formule du fantasme)] . Nous l'entendons : dans le discours qui lui convient, thique [divis: S] et non psychologique[sujet classique].

Il nous faut ds lors pousser beaucoup plus loin devant vous la topologie que nous avons labore pour notre enseignement dans ce dernier lustre [5 ans], soit introduire un certain graphe dont nous prvenons qu'il n'assure qu'entre autres l'emploi que nous allons en faire, ayant t construit et mis au point ciel ouvert pour reprer dans son tagement la structure la plus [805] largement pratique des donnes de notre exprience. Il nous servira ici prsenter o se situe le dsir par rapport un sujet, dfini de son articulation par le signifiant.

Voici ce qu'on pourrait dire en tre la cellule lmentaire:

Graphe 1 S'y articule ce que nous avons appel le point de capiton par quoi le signifiant arrte le glissement - autrement indfini - de la signification. La chane signifiante est cense tre supporte par le vecteur S S.

Sans mme entrer dans la finesse de la direction rtrograde o se produit son croisement redoubl par le vecteur S - que seulement en ce dernier l'on voie le poisson qu'il croche, moins propre figurer ce qu'il drobe la saisie en sa nage vive que l'intention qui s'efforce le noyer dans le flot du pr-texte, savoir la ralit qui s'imagine dans le schma thologique du retour du besoin.

Ce point de capiton, trouvez-en la fonction diachronique dans la phrase, pour autant qu'elle ne boucle sa signification qu'avec son dernier terme, chaque terme tant anticip dans la construction des autres, et inversement scellant leur sens par son effet rtroactif.

Mais la structure synchronique est plus cache, et c'est elle qui nous porte l'origine. C'est la mtaphore en tant que s'y constitue l'attribution premire, celle qui promulgue le chien faire miaou, le chat faire oua-oua , par quoi l'enfant d'un seul coup, en dconnectant la chose de son cri, lve le signe la fonction du signifiant, et la ralit la sophistique [: fallacieux] de la signification, et par le mpris de la vraisemblance, ouvre la diversit des objectivations vrifier, de la mme chose.

[806] Cette possibilit exige-t-elle la topologie d'un jeu quatre coins ?

?

Voil le genre de question qui n'a l'air de rien et qui peut donner pourtant quelque tintouin, si doit en dpendre la construction subsquente. Nous vous en pargnerons les tapes en vous donnant tout de go la fonction des deux points de croisement dans ce graphe primaire:

l'un, connot A, est le lieu du trsor du signifiant, ce qui ne veut pas dire du code, car ce n'est pas que s'y conserve la correspondance univoque d'un signe quelque chose, mais que le signifiant ne se constitue que d'un rassemblement synchronique et dnombrable o aucun ne se soutient que du principe de son opposition chacun des autres.

L'autre, connot s(A), est ce qu'on peut appeler la ponctuation o la signification se constitue comme produit fini.

Observons la dissymtrie: de l'un qui est un lieu [A] - place plutt qu'espace, l'autre qui est un moment [s(A)] - scansion plutt que dure. Tous deux participent de cette offre au signifiant que constitue le trou dans le rel: l'un comme creux de recel [A: lieu du trsor des signifiants, caverne dAli Baba du conte enfantin], l'autre comme forage pour l'issue. [signication du message (discours courant) o un trou (lapsus, lision) peut montrer autre chose]

La soumission du sujet au signifiant, qui se produit dans le circuit qui va de s(A) A pour revenir de A s(A), est proprement un cercle pour autant que l'assertion qui s'y instaurefaute de se clore sur rien que sur sa propre scansion, autrement dit faute d'un acte o elle trouverait sa certitudene renvoie qu' sa propre anticipation dans la composition du signifiant, en elle mme insignifiante.

La quadrature de ce cercle, pour tre possible, n'exige que la compltude de la batterie signifiante installe en A, symbolisant ds lors le lieu de l'Autre. quoi l'on voit que cet Autre n'est rien que le pur sujet de la moderne stratgie des jeux, comme tel parfaitement accessible au calcul de la conjecture, pour autant que le sujet rel, pour y rgler le sien, n'a y tenir aucun compte d'aucune aberration dite subjective au sens commun, c'est--dire psychologique, mais de la seule inscription d'une combinatoire dont l'exhaustion est possible.[la compltude de lAutre permettrait la compltude du sujet (non divis) et lexhaustion du savoir, but ultime du sujet de la connaissance (savoir absolu)]

Cette quadrature est pourtant impossible, mais seulement du fait que le sujet ne se constitue qu' s'y soustraire et la dcomplter [S(A)] [807] essentiellement pour la fois devoir s'y compter [sujet de la combinatoire] et n'y faire fonction que de manque [ se soumettre au signifiant quelque chose chot (non signifiable) S(A) division subjective: entre un sujet de la connaissance (sans la vrit), et un sujetde linconscient: savoir non su de la vrit qui ne peut que se mi-dire].

L'Autre comme site pralable du pur sujet du signifiant, y tient la position matresse, avant mme d'y venir l'existence, pour le dire avec HEGEL et contre lui, en Matre absolu. Car ce qui est omis dans la platitude de la moderne thorie de l'information, c'est qu'on ne peut mme parler de code que si c'est dj le code de l'Autre, or c'est bien d'autre chose qu'il s'agit dans le message, puisque c'est de lui que le sujet se constitue, par quoi c'est de l'Autre que le sujet reoit mme le message qu'il met [Tu es celui qui] et sont justifies les notations A et s(A).

Messages de code et codes de message se distingueront en formes pures dans le sujet de la psychose, celui qui se suffit de cet Autre pralable. Observons entre parenthse que cet Autre distingu comme lieu de la Parole, ne s'impose pas moins comme tmoin de la Vrit. Sans la dimension qu'il constitue, la tromperie de la Parole [: phallus imaginaire]ne se distinguerait pas de la feinte qui, dans la lutte combative ou la parade sexuelle, en est pourtant bien diffrente.

Se dployant dans la capture imaginaire, la feinte s'intgre dans le jeu d'approche et de rupture constituant la danse originaire, o ces deux situations vitales trouvent leur scansion et les partenaires qui s'y ordonnent, ce que nous oserons crire leurs dansits [imagos]. L'animal au reste s'en montre capable quand il est traqu, il arrive dpister en amorant un dpart qui est de leurre. Cela peut aller aussi loin qu' suggrer chez le gibier la noblesse d'honorer ce qu'il y a dans la chasse de parade. Mais un animal ne feint pas de feindre. Il ne fait pas de traces dont la tromperie consisterait se faire prendre pour fausses, tant les vraies, c'est--dire celles qui donneraient la bonne piste. Pas plus qu'il n'efface ses traces, ce qui serait dj pour lui se faire sujet du signifiant.

Tout ceci n'a t articul que de faon confuse par des philosophes pourtant professionnels. Mais il est clair que la Parole ne commence qu'avec le passage de la feinte l'ordre du signifiant, et que le signifiant exige un autre lieu le lieu de l'Autre, l'Autre tmoin, le tmoin Autre qu'aucun des partenairespour que la Parole qu'il supporte puisse mentir, c'est--dire se poser comme Vrit.

[808] Ainsi c'est d'ailleurs que de la Ralit qu'elle concerne, que la Vrit tire sa garantie : c'est de la Parole. Comme c'est d'elle qu'elle reoit cette marque qui l'institue dans une structure de fiction.Le dit premier dcrte, lgifre, aphorise, est oracle [Tu es celui qui], il confre l'autre rel son obscure autorit.

Prenez seulement un signifiant pour insigne de cette toute-puissance, ce qui veut dire de ce pouvoir tout en puissance, de cette naissance de la possibilit, et vous avez le trait unaire qui, de combler la marque invisible que le sujet tient du signifiant, aline ce sujet dans l'identification premire qui forme l'Idal du moi.Ce qu'inscrit la notation I(A) que nous devons substituer ce stade l' S, S barr du vecteur rtrograde, en nous le faisant reporter de sa pointe son dpart. (cf. graphe 2).

Graphe 2Effet de rtroversion par quoi le sujet chaque tape devient ce qu'il tait comme d'avant et ne s'annonce il aura t qu'au futur antrieur. [le sujet ne peut tre saisi quex-post, le parcours se clt dans la trace: laction de parole naboutit qu I(A) et non S (il ne peut se saisir lui-mme): il naura donc t la toute fin de son actequ I(A) trait unaire, seule trace du sujet]

Ici s'insre l'ambigut d'un mconnatre [S i(a) m I(A)] essentiel au me connatre [S A s(A) I(A)]. [deux parcours sont possibles: celui qui passe par la parole et la signification agre par lAutre: S i(a) A s(A) m I(A)et le court-circuit imaginaire du moi-idal, limage au miroir (avec lassentiment de LAutre limage au miroir) : S i(a) m I(A)] Car tout ce dont le sujet peut s'assurer, dans cette rtro-vise, c'est venant sa rencontre l'image - elle anticipe - qu'il prit de lui-mme en son miroir.

Nous ne reprendrons pas ici la fonction de notre stade du miroir, point stratgique premier dress par nous en objection la faveur accorde dans la thorie au prtendu moi autonome, dont la restauration acadmique justifiait le contresens propos de son renforcement dans une cure dsormais dvie vers un succs adaptatif [ego-psychology]: phnomne d'abdication mentale, li au vieillissement du groupe dans la diaspora de la guerre, et rduction d'une pratique minente [809] un label propre l'exploitation de l'American way of life [footnoteRef:8]. [8: Nous ne laissons ce paragraphe qu'en stle d'une bataille dpasse (note de 1962 : o avions-nous la tte ? ).]

Quoi qu'il en soit, ce que le sujet trouve en cette image altre de son corps [i(a)], c'est le paradigme de toutes les formes de la ressemblance [i(a) i(a): ce nest pas a] qui vont porter sur le monde des objets une teinte d'hostilit en y projetant l'avatar de l'image narcissique qui, de l'effet jubilatoire de sa rencontre au miroir, devient dans l'affrontement au semblable, le dversoir de la plus intime agressivit.

C'est cette image qui se fixe [i(a)], moi idal, du point o le sujet s'arrte comme Idal du moi. Le moi est ds lors fonction de matrise, jeu de prestance, rivalit constitue. [Cf. Hegel et la lutte mort de pur prestige]

Dans la capture qu'il subit de sa nature imaginaire [le court-circuit imaginaire du moi-idal : S i(a) m I(A)], il masque sa duplicit, savoir que la conscience o il s'assure d'une existence incontestablenavet qui s'tale dans la mditation d'un FNELON ne lui est nullement immanente, mais bien transcendante puisqu'elle se supporte du trait unaire [I(A) symbolique ] de l'Idal du moi (ce que le cogito cartsien ne mconnat pas[footnoteRef:9]). Par quoi l'ego transcendantal [Cf. Descartes] lui-mme [9: Les parenthses ici des rajouts, pinglant des dveloppements sur l'identification, postrieurs (1962). ]

se trouve relativ, impliqu qu'il est dans la mconnaissance o s'inaugurent les identifications du moi.

Ce procs imaginaire qui de l'image spculaire va la constitution du moi sur le chemin de la subjectivation par le signifiant, est signifi dans notre graphe par le vecteur i(a) m sens unique, mais articul doublement:

une 1e fois en court-circuit [imaginaire] sur S I(A) [S i(a) m I(A) avec assentiment de lAutre: Tu escelui qui ],

une 2e fois en voie de retour sur s(A) I(A) [qui passe par la signification agre par lAutre: S i(a) A s(A) m I(A) ]

Ce qui montre que le moi ne s'achve qu' tre articul non comme Je du discours, mais comme mtonymie de sa signification (ce que DAMOURETTE et PICHON prennent pour la personne toffe qu'ils opposent la personne subtile, cette dernire n'tant autre que la fonction plus haut dsigne comme shifter).

La promotion de laconscience comme essentielle au sujet dans la squelle historique du cogito cartsien, est pour nous l'accentuation trompeuse de la transparence du Je en acte aux dpens de l'opacit du signifiant qui le dtermine [S1], et le glissement par quoi le Bewusstsein sert couvrir la confusion du Selbst, vient justement [810] dans la Phnomnologie de l'esprit dmontrer - de la rigueur de HEGEL - la raison de son erreur.

[Limitation de laltrit la relation imaginaire de deux moi aa: parade de rivalit, et progression (via la ruse de la raison) vers le savoir absolu, avec une vrit qui se rsorberait intgralement, sans reste(aucun rel ne chuterait l) ]

Le mouvement mme qui dsaxe le phnomne de l'esprit vers la relation imaginaire l'autre l'autre, c'est--dire au semblable connoter d'un a [le cout circuit: S i(a) m I(A)]met au jour son effet, savoir l'agressivit qui devient le flau de la balance autour de quoi va se dcomposer l'quilibredu semblable au semblable [rapport imaginaire lautre sur le mode dual, qui ne laisse possible que le duel (parade)], en ce rapport du Matre l'Esclave, gros de toutes les ruses par o la raison va y faire cheminer son rgne impersonnel.

Cette servitude inaugurale des chemins de la libert [Cf. la ruse de la Raison] - mythe sans doute plutt que gense effective - nous pouvons ici montrer ce qu'elle cache prcisment de l'avoir rvl comme jamais auparavant.La lutte qui l'instaure, est bien dite de pur prestige, et l'enjeu - il y va de la vie - bien fait pour faire cho ce danger de la prmaturation gnrique de la naissance, ignor de HEGEL et dont nous avons fait le ressort dynamique de la capture spculaire. Mais la mort, justement d'tre tire la fonction de l'enjeu pari plus honnte que celui de PASCAL, quoiqu'il s'agisse aussi d'un poker puisqu'ici la relance est limite[relance limite car la parade guerrire de pur prestige ne peut aboutir la mort relle: lesclave ne doit pas mourrir]montre du mme coup ce qui est lid d'une rgle pralable [cest un jeu] aussi bien que du rglement conclusif [gagnant-perdant].

Car il faut bien en fin de compte que le vaincu ne prisse pas pour qu'il fasse un esclave. Autrement dit le pacte est partout pralable la violence avant de la perptuer, et ce que nous appelons le symbolique domine l'imaginaire, en quoi on peut se demander si le meurtre est bien le Matre absolu.

Car il ne suffit pas d'en dcider par son effet : la Mort, il s'agit encore de savoir quelle mort[footnoteRef:10], celle que porte la vie [10: L aussi rfrence ce que nous avons profess dans notre sminaire sur L'thique de la psychanalyse (1959-60) sur la seconde mort. Nous voulons bien avec Dylan Thomas qu'il n'y en ait pas deux. Mais alors le Matre absolu [la mort relle] est-il bien la seule qui reste ? ]

ou celle qui la porte. [La mort relle ou la mort de la chose par le symbolique. Cf. sminaire Lthique: lentre deux morts ]Sans faire tort la dialectique hglienne d'un constat de carence, ds longtemps soulev[footnoteRef:11], sur la question [11: Freud posait dj la question et rpondait : dans la socit des Matres le lien est homosexuel.]

du lien de la socit des matres, nous ne voulons ici qu'y souligner ce qui, partir de notre exprience, saute aux yeux comme symptomatique, c'est--dire comme installation dans le refoulement.

C'est proprement le [811] thme de la ruse de la Raison dont l'erreur plus haut dsigne n'amoindrit pas la porte de sduction. Le travail, nous dit-il, auquel s'est soumis l'esclave en renonant la jouissance par crainte de la mort, sera justement la voie par o il ralisera la libert. Il n'y a pas de leurre plus manifeste politiquement, et du mme coup psychologiquement. La jouissance est facile l'esclave et elle laissera le travail serf [dans la servitude].

La ruse de la Raison sduit par ce qui y rsonne d'un mythe individuel bien connu de l'obsessionneldont on sait que la structure n'est pas rare dans l'intelligentsiamais pour peu que celui-ci [l'obsessionnel] chappe la mauvaise foi du professeur [Hegel], il ne se leurre qu'assez difficilement de ce que ce soit son travail qui doive lui tendre l'accs la jouissance. Rendant un hommage proprement inconscient l'histoire crite par HEGEL, il trouve souvent son alibi dans la mort du Matre.

Mais quoi de cette mort ? Simplement il l'attend. En fait c'est du lieu de l'Autre o il s'installe, qu'il suit le jeu, rendant tout risque inoprant - spcialement celui d'aucune joute - dans une conscience de soi pour qui il n'est de mort que pour rire. Ainsi: que les philosophes ne croient pas pouvoir faire bon march de l'irruption que fut la parole de FREUD concernant le dsir.

Et ce, sous le prtexte que la demande - avec les effets de la frustration - a tout submerg de ce qui leur parvient d'une pratique tombe une banalit ducative que ne relvent mme plus ses mollesses.Oui, les traumatismes nigmatiques de la dcouverte freudienne, ne sont plus que des envies rentres La psychanalyse se nourrit de l'observation de l'enfant et de l'infantilisme des observations. pargnons-en les comptes-rendus - tous, tant qu'ils sont - si difiants. Et tels que l'humour n'y est plus de mise jamais.

Leurs auteurs sont dsormais trop soucieux d'une position d'honorables, pour y faire encore la moindre part au ct irrmdiablement saugrenu que l'inconscient entretient de ses racines linguistiques. Impossible pourtant ceux qui prtendent que ce soit par l'accueil fait la demande, que s'introduit la discordance dans les besoins supposs l'origine du sujetde ngliger le fait qu'il n'y a de demande qui ne passe quelque titre par les dfils du signifiant.

Et si l' [anank] somatique de l'impuissance de l'homme se mouvoir [812], a fortiori se suffire, un temps aprs sa naissance, assure son sol unepsychologie de la dpendance, comment liderait-elle le fait que cette dpendance est maintenue par un univers de langage, justement en ceci: que par et travers lui, les besoins se sont diversifis et dmultiplis au point que la porte en apparat d'un tout autre ordre, qu'on la rapporte au sujet ou la politique [rapports de la structure de langage et de la structure sociale] ?

Pour le dire : au point que ces besoins soient passs au registre du dsir, avec tout ce qu'il nous impose de confronter notre nouvelle exprience, de ses paradoxes de toujours pour le moraliste [contradiction du dsir et du solen], de cette marque d'infini qu'y relvent les thologiens, [o linfini rejoint lternel, cf. le dsir indestructible] voire de la prcarit de son statut, telle qu'elle s'annonce dans le dernier cri de sa formule, pouss par SARTRE : le dsir, passion inutile[prcaire: du latinprecari: prier, demander en priant].

Ce que la psychanalyse nous dmontre concernant le dsir dans sa fonction qu'on peut dire la plus naturelle puisque c'est d'elle que dpend le maintien de l'espce, ce n'est pas seulement qu'il soit soumis dans son instance, son appropriation, sa normalit pour tout dire, aux accidents de l'histoire du sujetnotion du traumatisme comme contingencec'est bien que tout ceci exige le concours d'lments structuraux qui, pour intervenir, se passent fort bien de ces accidents, et dont l'incidence inharmonique [la clocherie], inattendue, difficile rduire [symptmes], semble bien laisser l'exprience un rsidu [le futur (a)] qui a pu arracher FREUD l'aveu que la sexualit devait porter la trace de quelque flure peu naturelle [Cf. le Il ny a pas de rapport sexuel].

On aurait tort de croire que le mythe freudien de l'dipe en finisse l-dessus avec la thologie [de Dieu au Pre]. Car il ne se suffit pas d'agiter le guignol de la rivalit sexuelle [lenfant, rival du pre]. Et il conviendrait plutt d'y lire ce qu'en ses coordonnes FREUD impose notre rflexion, car elles reviennent la question d'o lui-mme est parti :

Qu'est-ce qu'un Pre?

C'est le Pre mort, rpond FREUD. [Celui qui ferme les yeux]

Mais personne ne l'entend, et pour ce que LACAN en reprend sous le chef du Nom-du-Pre, on peut regretter qu'une situation peu scientifique le laisse toujours priv de son audience normale [footnoteRef:12]. [12: Que nous ayons port ce trait cette poque, ft-ce en termes plus vigoureux, en ce dtour, prend valeur de rendez-vous de ce que ce soit prcisment sur le Nom du Pre que nous ayons trois ans plus tard pris la sanction de mettre en sommeil les thses que nous avions promises notre enseignement, en raison de la permanence de cette situation.]

[813] La rflexion analytique a pourtant tourn vaguement autour de la mconnaissance - problmatique chez certains primitifs - de la fonction du gniteur, voire y a-t-on dbattu - sous le pavillon de contrebande du culturalisme - sur les formes d'une autorit dont on ne peut mme pas dire qu'aucun secteur de l'anthropologie y ait apport une dfinition de quelque ampleur.

Faudra-t-il que nous soyons rejoints par la pratique qui prendra peut-tre en un temps force d'usage, d'insminer artificiellement les femmes en rupture du ban phallique, avec le sperme d'un grand homme, pour tirer de nous sur la fonction paternelle un verdict? L'dipe pourtant ne saurait tenir indfiniment l'affiche dans des formes de socit o se perd de plus en plus le sens de la tragdie.

Partons de la conception de l'Autre comme du lieu du signifiant. Tout nonc d'autorit n'y a d'autre garantie que son nonciation mme, car il est vain qu'il le cherche dans un autre signifiant, lequel d'aucune faon ne saurait apparatre hors de ce lieu. Ce que nous formulons dire qu'il n'y a pas de mtalangage qui puisse tre parl, plus aphoristiquement : qu'il n'y a pas d'Autre de l'Autre. [il ny pas de garant en dernier recours - ni Dieu, ni Matre - de lAutre du langage]

C'est en imposteur que se prsente pour y suppler, le Lgislateur (celui qui prtend riger la Loi).Mais non pas la Loi elle-mme, non plus que celui qui s'en autorise.

Que de cette autorit de la Loi, le Pre puisse tre tenu pour le reprsentant originel, voil qui exige de spcifier sous quel mode privilgi de prsence il se soutient au-del du sujet qui est amen occuper rellement la place de l'Autre, savoir de la Mre. La question est donc recule.[le pre, comme Autre au-del de la mre, nest que le reprsentant de lAutre: vouloir faire la loi (lgislateur) comme Autre de lAutre cest un imposteur. La question - de lautorit de la loi - est donc recule]

Il paratra trange que, s'ouvrant l l'espace dmesur qu'implique toute demande : d'tre requte de l'amour, nous n'y laissions pas plus d'bat ladite question, mais la concentrions sur ce qui se ferme en de, du mme effet de la demande, pour faire proprement la place du dsir.

C'est en effet trs simplement - et nous allons dire en quel sens - comme dsir de l'Autre que le dsir de l'homme trouve forme, mais d'abord ne garder qu'une opacit subjective pour y reprsenter le besoin.Opacit dont nous allons dire par quel biais elle fait en quelque sorte la substance du dsir.

[814] Le dsir s'bauche dans la marge o la demande se dchire du besoin : cette marge tant celle que la demande[lobjet du besoin mute en objet du dsir ( a) et la demande mute en demande inconditionnelle damour ( S)]dont l'appel ne peut tre inconditionnel qu' l'endroit de l'Autreouvre sous la forme du dfaut possible qu'y peut apporter le besoin, de n'avoir pas de satisfaction universelle (ce qu'on appelle angoisse) [ce qui, de la satisfaction du besoin, ne comble pas la demande: entre lnonciation de la demande et lnonc qui en rsulte quelque chose a ch (S). La satisfaction du besoin rpond lnonc mais ne peut faire univers homogne et plein: il y a un manque, un trou, une bance].

Marge qui, pour linaire [structure de bord] qu'elle soit, laisse apparatre son vertige [cette bance est aussi celle du sujet], pour peu qu'elle ne soit pas recouverte par le pitinement d'lphant du caprice de l'Autre. C'est ce caprice nanmoins qui introduit le fantme de la toute-puissance non pas du sujet, mais de l'Autre o s'installe sa demandeil serait temps que ce clich imbcile ft une fois pour toutes - et pour tous - remis sa place [la toute puissance est celle de lAutre et non du sujet: le caprice de lAutre tout puissant qui se veut comme satisfaisant toute la demande]et avec ce fantme la ncessit de son bridage par la Loi. [la mre doit se soumettre la loi du pre, lui-mme reprsentant de la Loi]

Mais nous nous arrtons l encore pour revenir au statut du dsir qui se prsente comme autonome par rapport cette mdiation de la Loi, pour la raison que c'est du dsir qu'elle s'origine, en le fait que par une symtrie singulire, il renverse l'inconditionnel de la demande d'amour, o le sujet reste dans la sujtion de l'Autre, pour le porter la puissance de la condition absolue (o l'absolu veut dire aussi dtachement). [lamour assujettit lAutre exclusif, mais le dsir universalise le choix dobjet]

Pour le gain obtenu sur l'angoisse l'endroit du besoin, ce dtachement est russi ds son plus humble mode, celui sous lequel tel psychanalyste [Winnicott] l'a entrevu dans sa pratique de l'enfant, le dnommant l'objet transitionnel, autrement dit : la bribe de lange, le tesson chri que ne quittent plus la lvre, ni la main.

Disons-le: ce n'est l qu'emblme. Le reprsentant de la reprsentation dans la condition absolue, est sa place dans l'inconscient, o il cause le dsir selon la structure du fantasme que nous allons en extraire.Car l se voit que la nescience o reste l'homme de son dsir est moins nescience de ce qu'il demande - qui peut aprs tout se cerner - que nescience d'o il dsire.

Et c'est quoi rpond notre formule que l'inconscient est discours de l'Autre, o il faut entendre le de au sens du de latin (dtermination objective) : de Alio in oratione (achevez : tua res agitur) [dans le discours de lAutre cest de toi quil sagit]. Mais aussi en y ajoutant que le dsir de l'homme est le dsir de l'Autre, o le de donne la dtermination dite par les grammairiens subjective [gnitif subjectif] savoir que c'est en tant qu'Autre qu'il dsire (ce qui donne la vritable porte de la passion humaine) [cf. les trois passions: lamour, la haine, lignorance]. [Le gnitif objectif indique l'origine, le gnitif subjectif indique la possession: Un dsir denfant: lenfant est cause du dsir (gnitif objectif) Un dsir denfant: lenfant est sujet du dsir (gnitif subjectif ]

[815] C'est pourquoi la question de l'Autre qui revient au sujet de la place o il en attend un oracle, sous le libell d'un Che vuoi?[footnoteRef:13], Que veux-tu ? [13: Cf. Jacques Cazotte : Le diable amoureux.]

est celle qui conduit le mieux au chemin de son propre dsir, s'il se met, grce au savoir-faire d'un partenaire du nom de psychanalyste, la reprendre - ft-ce sans bien le savoir - dans le sens d'un : Que me veut-il ?.

C'est cet tage surimpos de la structure qui va pousser notre graphe, (cf. graphe 3) vers sa forme complte, de s'y introduire d'abord comme le dessin d'un point d'interrogation plant au cercle du grand A de l'Autre, symbolisant - d'une homographie droutante - la question qu'il signifie. Graphe 3

De quel flacon est-ce l l'ouvre-bouteille ? De quelle rponse le signifiant [est-il] clef universelle ?

Remarquons qu'un indice peut tre trouv dans la claire alination qui laisse au sujet la faveur de buter sur la question de son essence, en ce qu'il peut ne pas mconnatre que ce qu'il dsire se prsente lui comme ce qu'il ne veut pas,[le graphe complet situe le dsir dans ltage suprieur: linconscient (ce dont le sujet ne veut rien savoir)]

forme assume de la dngation o s'insre singulirement la mconnaissance de lui-mme ignore, par quoi il transfre la permanence de son dsir un moi pourtant videmment intermittent, et inversement se protge de son dsir en lui attribuant ces intermittences mmes. [le moi qui semble permanent est en fait intermittent, et le dsir qui semble intermittent est permanent]

Bien sr peut-on tre surpris de l'tendue de ce qui est accessible la conscience de soi [le court circuit: i(a) m], condition qu'on l'ait appris par ailleurs [d Sa] . Ce qui est bien ici le cas.

Car pour retrouver de tout ceci la pertinence, il faut qu'une tude assez pousse - et qui ne peut se situer que dans l'exprience analytique - nous permette de complter la structure du fantasme [Sa] en [816] y liant essentiellement quelles qu'en soient les lisions occasionnelles la condition d'un objet [a]dont nous n'avons fait plus haut qu'effleurer par la diachronie le privilgele moment d'un fading ou clipse du sujet [S], troitement li la spaltung ou refente qu'il subit de sa subordination au signifiant.

C'est ce que symbolise le sigle Sa que nous avons introduit, au titre d'algorithme dont ce n'est pas par hasard qu'il rompt l'lment phonmatique [aucun phonme en Sa: des lettres] que constitue l'unit signifiante jusqu' son atome littral. Car il est fait pour permettre vingt et cent lectures diffrentes, multiplicit admissible aussi loin que le parl en reste pris son algbre.

[Lacan, dans la sance du 16-11-1966 du sminaire 1966-67: Logique du fantasme, explicite les diffrentes acceptions du (poinon):

S > a : S est dominant et dterminant, a relve dune production determine. S < a : a est dominant, le sujet S reste sous la domination de lobjet. S a : S et a sont en union logique: la fois S et a (conjonction rciproque) S V a : S et a sont en disjonction logique: soit S, soit a (vel: exclusion rciproque)]

Cet algorithme et ses analogues utiliss dans le graphe ne dmentent en effet d'aucune faon ce que nous avons dit de l'impossibilit d'un mtalangage. Ce ne sont pas des signifiants transcendants, ce sont les index d'une signification absolue, notion qui, sans autre commentaire, paratra - nous l'esprons - approprie la condition du fantasme. [le fantasme est la structure absolue au fondement de toute dtermination, symptmatiques individuelle ou sociale]

Graphe complet

Sur le fantasme [Sa] ainsi pos, le graphe inscrit que le dsir [d] se rgle, homologue ce qu'il en est du moi au regard de l'image du corps [d Sa et i(a) m], ceci prs qu'il marque encore l'inversion [spculaire] des mconnaissances [d et m: mconnaissance du dsir inconscient qui se rgle sur le fantasme, et mconnaissance du moi qui se rgle sur limage du corps] o se fondent respectivement l'un et l'autre. Ainsi se ferme [sur elle-mme] la voie imaginaire, [i(a) d Sa m] par o je dois dans l'analyse advenir, l o s'tait l'inconscient [stait: le s fait rfrence au sujet et au es en allemand je d].

Disonspour relever la mtaphore de DAMOURETTE et PICHON sur le moi grammatical en l'appliquant un sujet auquel elle est mieux destineque le fantasme est proprement l' toffe de ce Je qui se trouve primordialement refoul, de n'tre indicable que dans le fading de l'nonciation.

Voici maintenant en effet notre attention sollicite par le statut subjectif de la chane signifiante dans l'inconscient [Jouissance S(A) SD Castration], ou mieux dans le refoulement primordial (Urverdrngung).

On conoit mieux dans notre dduction qu'il ait fallu s'interroger sur la fonction qui supporte le sujet de l'inconscient [Sa], de saisir qu'il soit difficile de le dsigner nulle part comme sujet d'un nonc - donc comme l'articulant - quand il ne sait mme pas qu'il parle. D'o le concept de la pulsion [SD] o on le dsigne d'un reprage organique, oral, anal, etc. [les 4objets(a): oral, anal, scopique, vocal] qui satisfait cette exigence d'tre d'autant plus loin du parler que plus il parle.

[817] Mais si notre graphe complet nous permet de placer la pulsion comme [homologue du] trsor des signifiants, sa notation comme SD maintient sa structure en la liant la diachronie.

Elle est ce qui advient de la demande quand le sujet s'y vanouit [les non sens du discours: lapsus, oublis, witz SD D].

Que la demande disparaisse aussi, cela va de soi, ceci prs qu'il reste la coupure [SD D ], car celle-ci reste prsente dans ce qui distingue la pulsion de la fonction organique qu'elle habite : savoir son artifice grammatical [footnoteRef:14], [14: S. Freud : Triebe und Triebschicksale (1915) : Pulsions et destin des pulsions in mtapsychologie , Gallimard, coll. ides, 1968. ]

si manifeste dans les rversions de son articulation la source comme l'objet (Freud l-dessus est intarissable).[manger et tre mang,voir et tre vu Fr