Partage de matériel d'autocontrôle glycémique, risque d'hépatite B

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Actualit6s 000 Si me patient se contamine en manipulant de la viande de singe contamine, les proches aussi, mais en lui donnant des soins rapproches alors qu'il se trouve dans la phase hemorragique et diarrheique tres contagieuse. Le scenario est le meme pour les deux maladies. Isolement pour les soignants aussi La maladie de Marburg est pour les Euro- peens un mauvais souvenir. C'est sur notre continent que cette nouvelle maladie emer- gea en 1967, premiere maladie emergente, bien avant le sida (1981 ) mais le terme n'exis- tait pas & I'~poque. EIle fit 7 deces dans un laboratoire de recherche allemand, & Marburg precisement, des medecins conta- mines par des singes verts importes d'Ouganda sans precautions veterinaires et sanitaires particuli~res (imposees depuis), des laboratoires de Francfort et de Belgra- de (ex-Yougoslavie) en touchant un lot. II y eut au total 25 cas humains. Des resurgences se sont produites en 1975 en Afrique du Sud, en 1980 et en 1987 au Kenya, en 1998-2000 au Congo (128 dbces sur 154 cas, 83 O/ode mortalite). La flambbe actuelle aurait debute en octobre 2004 & Uige. La maladie-fievre hemorragique de Marburg est donc encore aujourd'hui une maladie virale severe, grevee d'un fort taux de leta- lite, mais pour le continent africain il faut tenir compte de la penurie d'infrastructures de rbanimation-isolement-rehydratation. Virus de Marburg et virus d'Ebola sont des agents de la meme famille, les Filovirus, et sont pratiquement indistincts I'un de I'autre, formes de longs filaments parfois enroules en ,< formes ~tranges ,, (dixit I'OMS). Agents infectieux parmi les plus virulents connus chez I'homme, ils dbclenchent des epide- mies qui ne se revelent que par I'accumu- lation des deces (1). Quarante ans apres 1'emergence, malgre des recherches intensives, on ne sait pas qui est le vecteur du virus Marburg, le singe n'btant qu'un relais de I'infection, constituant une population elle aussi vulnerable & I'infection. Tous tes animaux infectes meurent rapidement, trop vite pour permettre la survie du virus.., qui a donc un hete different ? L'homme n'est qu'un hSte accidentel et n'est pas un vec- teur : I'infection secondaire (entourage, personnel de sante) tient & I'absence de precautions vis-&-vis du patient hemor- ragique. La maladie n'est pas transmissible PartJcules virus-like de Marburg obtenues par ultracentrifugation du surnageant de virions (MARk/), Un colorant r#v~le leur ultra-structure. Grossissement 40 O00x. In : Vaccine 22 (2004) 3495-3502 : Marburg virus-like particles protect guinea pigs from lethal Marburg virus infection, Kelly L. Warfield et coil (Editions Elsevier). Iors de I'incubation (3 A 10 jours). Apres contamination, le deces peut survenir en 8 eu 9 jours. J.-M. M, m Sources : OMS, INVS, Vaccine 22 (2004) 3495-3502, (1) Le minist#re de la Sant~ met un site d'information & la disposition des voyageurs : http://www.france.diplo- matie.fr/voyageurs/etrangers/avis/conseils/default2.asp mmmamm • m • n • mmmmm • m m m m m m m • i ! m la m m m | i • i I n • m m m Partage de materiel d'autocontr61e glycemique, risque d'hepatite B Uusage collectif de materiel de surveillance glycemique de sujets diabbtiques peut favo- riser la transmission par voie sanguine du virus de I'hbpatite B (VHB). Plusieurs cas ont et6 rapportes ces dernieres annees, en Amerique du Nord et en Europe, y compris en France. Ulnspection generale de la sante d'Anvers rapporte 4 cas d'hepatite dans 2 maisons de retraite mbdicalisees en 2004. En cause les dispositifs de prelevement de sang capil- laire au bout du doigt chez des diabetiques. Les services de sante publique flamands ont mene une etude sero-epidbmiologique chez 94 residents et 47 membres du personnel paramedical apres un cas d'hepatite fulminante chez un patient &g& Cinq des residents etaient porteurs du VHB, dont 2 decederent. Aucun soignant n'etait seropositif. On a pu etablir que les patients diabetiques qui partagent le dispositifde prblevement de sang capillaire ont 8,7 fois plus de risque de contracter une hepa- tite (autrefacteur de risque : par- rage d'un rasoir).I 'apparition d'hepatites B a cesse avec des mesures anti-infectieuses et la vac- cination des residents vulnbrables. La Beigique a connude tels cas en 2002 et 2003, les E~tats-Unis en 2003 et 2004 &trois reprises. H6patite et erreur de soins Aux Etats-Unis, le premier des trois cas rep6- res en maisonde soins pour sujets &gbs concer- nait un patient decbd6 d'hepatite B. I'etablis- sement n'avertit pas les autoritbs sanitaires ni n'entreprit une enquete interne. Au deces d'un second patient par hepatite aigue puis au dia- gnostic d'hepatite chez un troisieme, un test sanguin chez les 158 residents en revela 15 cas. Parmi les 38 patients avec glycemie quotidienne, 14 etaient au stade aigu d'hepati- te. Uenquete a revele un usage en commun du dispositif de scarification (changementd'aiguille 000 1 2 Revue Francophone des Laboratoires, mai 2005, N° 3"73

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Actualit6s

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Si me patient se contamine en manipulant de la viande de singe contamine, les proches aussi,

mais en lui donnant des soins rapproches alors qu'il se trouve dans la phase hemorragique et diarrheique tres contagieuse. Le scenario est

le meme pour les deux maladies.

Isolement pour les soignants aussi

La maladie de Marburg est pour les Euro-

peens un mauvais souvenir. C'est sur notre continent que cette nouvelle maladie emer- gea en 1967, premiere maladie emergente,

bien avant le sida (1981 ) mais le terme n'exis-

tait pas & I'~poque. EIle fit 7 deces dans un laboratoire de recherche allemand, &

Marburg precisement, des medecins conta- mines par des singes verts importes

d'Ouganda sans precautions veterinaires et

sanitaires particuli~res (imposees depuis), des laboratoires de Francfort et de Belgra-

de (ex-Yougoslavie) en touchant un lot. II y eut au total 25 cas humains.

Des resurgences se sont produites en 1975 en Afrique du Sud, en 1980 et en 1987 au

Kenya, en 1998-2000 au Congo (128 dbces sur 154 cas, 83 O/o de mortalite). La flambbe

actuelle aurait debute en octobre 2004 & Uige.

La maladie-fievre hemorragique de Marburg est donc encore aujourd'hui une maladie virale severe, grevee d'un fort taux de leta-

lite, mais pour le continent africain il faut tenir compte de la penurie d'infrastructures de rbanimation-isolement-rehydratation.

Virus de Marburg et virus d'Ebola sont des agents de la meme famille, les Filovirus, et sont pratiquement indistincts I'un de I'autre, formes de longs filaments parfois enroules

en ,< formes ~tranges ,, (dixit I'OMS). Agents infectieux parmi les plus virulents connus

chez I'homme, ils dbclenchent des epide- mies qui ne se revelent que par I'accumu-

lation des deces (1).

Quarante ans apres 1'emergence, malgre des recherches intensives, on ne sait

pas qui est le vecteur du virus Marburg, le singe n'btant qu'un relais de I'infection,

const i tuant une populat ion el le aussi vulnerable & I'infection. Tous tes animaux

infectes meurent rapidement, trop vite pour permettre la survie du virus.., qui a

donc un hete different ? L'homme n'est

qu'un hSte accidentel et n'est pas un vec- teur : I'infection secondaire (entourage,

personnel de sante) tient & I'absence de precautions vis-&-vis du patient hemor-

ragique. La maladie n'est pas transmissible

PartJcules virus-like de Marburg obtenues par ultracentrifugation du surnageant de virions (MARk/), Un colorant r#v~le leur ultra-structure. Grossissement

40 O00x. In : Vaccine 22 (2004) 3495-3502 : Marburg virus-like particles protect guinea pigs from lethal Marburg virus infection, Kelly L. Warfield et coil

(Editions Elsevier).

Iors de I'incubation (3 A 10 jours). Apres

contamination, le deces peut survenir en

8 eu 9 jours. J.-M. M,

m

Sources : OMS, INVS, Vaccine 22 (2004) 3495-3502,

(1) Le minist#re de la Sant~ met un site d'information & la disposition des voyageurs : http://www.france.diplo- matie.fr/voyageurs/etrangers/avis/conseils/default2.asp

mmmamm • m • n • mmmmm • m m m m m m m • i ! m la m m m | i • i I n • m m m

Partage de materiel d'autocontr61e glycemique, risque d'hepatite B Uusage collectif de materiel de surveillance

glycemique de sujets diabbtiques peut favo- riser la transmission par voie sanguine du

virus de I'hbpatite B (VHB). Plusieurs cas ont et6 rapportes ces dernieres annees, en

Amerique du Nord et en Europe, y compris en France.

Ulnspection generale de la sante d'Anvers

rapporte 4 cas d'hepatite dans 2 maisons de retraite mbdicalisees en 2004. En cause

les dispositifs de prelevement de sang capil- laire au bout du doigt chez des diabetiques.

Les services de sante publique flamands ont

mene une etude sero-epidbmiologique chez 94 residents et 47 membres du

personnel paramedical apres

un cas d'hepatite fulminante

chez un patient &g& Cinq des residents etaient porteurs du

VHB, dont 2 decederent. Aucun soignant n'etait seropositif.

On a pu etablir que les patients

diabetiques qui partagent le dispositif de prblevement de sang

capillaire ont 8,7 fois plus de risque de contracter une hepa- tite (autre facteur de risque : par-

rage d'un rasoir). I 'apparition d'hepatites B a cesse

avec des mesures anti-infectieuses et la vac-

cination des residents vulnbrables. La Beigique a connu de tels cas en 2002 et 2003, les E~tats-Unis en 2003 et 2004 & trois reprises.

H6patite et erreur de soins

Aux Etats-Unis, le premier des trois cas rep6-

res en maison de soins pour sujets &gbs concer- nait un patient decbd6 d'hepatite B. I'etablis-

sement n'avertit pas les autoritbs sanitaires ni

n'entreprit une enquete interne. Au deces d'un

second patient par hepatite aigue puis au dia- gnostic d'hepatite chez un troisieme, un test

sanguin chez les 158 residents en revela 15 cas. Parmi les 38 patients avec glycemie

quotidienne, 14 etaient au stade aigu d'hepati- te. Uenquete a revele un usage en commun du dispositif de scarification (changement d'aiguille 0 0 0

1 2 Revue Francophone des Laboratoires, mai 2005, N ° 3"73

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mais sans desinfection) et du lecteur de glyc& ~ @ mie, ainsi que la disponibi l i te de f lacons @ d'insuline non nominatifs des patients, a usage @

aleatoire. Une surveillance discrete revela qu'on reutilisait les aiguilles ou qu'on ne changeait

pas de gants entre deux prelevements chez ~ deux patients. @ @ Second cas ; 4 hepatites B au stade aigu. Sur @

25 residents, 22 ont accept@ la recherche du @ VHB : 4 autres sujets en etaient porteurs. Le

personnel soignant mesurait chaque jour la @ @

glycemie des 8 positifs. Chaque resident avait @ son propre scarificateur, mais les infirmieres @ ont admis ufiliser le meme lecteur de glycemie pour plusieurs patients & la suite. Le port de @

gants n'etait pas encourage et I'hygiene des @ @

mains etait pauvre. @

Tmisi~me cas • une hepatite B a justifie le test @ chez 192 residents, permettant d'en decouvrir @ 11 au stade aigu. Sur 45 patients testes chaque @

jour pour la glycemie, 8 avaient une hepatite @ aigu& L& encore, I'enquete a montre que les @

@ equipes soignantes utilisaient une seule aiguille ® et un seul flacon par patient mais un seul appa- @

reil de mesure de la glycemie pour tous, sans chart- @ ger de gants entre deux patients.

Le VHB, tres stable & rair ambiant, est hautement @ @

transmissible par le sang, dont des traces peu- @ vent subsister sur le scarificateur : aiguille, emba- @

se (support du doigt pour la piqOre), corps de @

I'appareil, sur le lecteur de glycemie, les gants @ du personnel, des surfaces diverses. Un VHB- @

positif peut 6tre asymptomatique, et transmet- ~ @

teur non reper& La pratique de glycemies non @ justifiees augmente le risque de contaminations @

en maison de retraite medicalisee.

J.-M. M. @ @

Source : Eurosurveillance Weekly, mars 2005. @ @

@ @ @@@@ @@ @ ® @@ @ ~ ~ @ @~ @ @@

o. rn @

!L

l HH La revue Pediatric Critical Care Medicine

(prise en charge de cas p~diatriques au stade critique) a publi~ 4 observations dramatiques d'adolescents

diab~tiques de type 2 (~mergence 6pid#.mique m~connue en France), admis pour une pr#.sentation inhabituelle :

/e syndrome hyperg/yc#.mique hyperosmotaire n o n c~tosique (HHS ou HHNS), en soins intensifs

(intensive care unit) au Centre hospitalier universitaire de Chapel Hill (Caroline du Nord)o

D eux des patients n'ont pas survecu, le

premier apres choc hypovolemique, le second & la suite d'une rhabdomyolyse et

d'une defaillance multiviscerale, malgre les

soins intensifs. Le H H NS, rappellent les auteurs de ces obser- vations (1), possede un taux de letalite elev6

(10 a 50 %) et peut entrafner diverses com- plications. Les strategies therapeutiques ne

sont pas clairement etablies.

La frequence du HHNS a augment@ de plus de 10 fois dans la population pediatrique am&

ricaine ces dernieres annees. II est decrit dans

la litterature medicale, mais c'est ici la pre- miere fois qu'est envisage le traitement en pediatrie.

,, Nous pensons que le HHS deviendra plus courant dans la population pediatrique en

raison du caractere 6pid#mique recent de I'obesit~ chez les enfants, disent les auteurs.

L'ob#sit~ est un facteur de risque majeur

du diabete de type 2. Le HHS peut #tre la

premiere presentation d'un diabete de type 2 p#diatrique comme c'etait le cas pour nos

[quatre] patients ,~. IIs ont regu un serum iso-

tonique et de I'insuline. Du fait du taux eleve de letalite et du risque de

complications, il est essenflel que les pediatres, les urgentistes et les services de medecine

et de biologie en unites de soins intensifs (la

biologie peut aussi repondre & I'urgence) connaissent le HHNS, soulignent les memes

auteurs. II est egalement important qu'ils repE- rent la deshydratation des patients et le trai-

tent de fagon intensive. Le risque d'oedeme

cerebral associe a la rehydratation intensive n'est

pas completement evalu&

Triade biologique

Le HHNS presente la triade: hyperglycemie

severe : > 6 g /L ; hyperosmola l i te :

> 320 mOsm/L ; acidose : pH > ?,3 sans cetose. Les patients sont tres deshydrates :

perte de 15 & 20 % de I'eau corporelle (soif

intense). Neanmoins, nombre de ces patients ne presentent pas ces valeurs biologiques,

d'oQ risque de confusion entre HHS et

acidocetose.

Le t ra i tement propose repose sur une rehydratation rapide, pour eviter le choc

hypovolemique dO & la diurese osmotique,

ce risque etant, semble-t-il, superieur & celui

d'oedeme cerebral. La rhabdomyolyse dolt etre recherchee : elle peut Etre cause de

defaillance renale. Ces propositions sont extrapolees de ce que

donne la litterature medicale du HHNS de

I'adulte : on n'y trouve encore pas de strat& gie precise pour reduire la mortalit& Le risque

letal semble augmenter chez I'adolescent avec

une forte oh@site et le diabete de type 2. Des

enquetes en population pediatrique, tenant

compte des differences ethniques, sont neces- saires, et des essais therapeutiques pour

mettre fin.., aux controverses sur le mode et le contenu des traitements proposes.

L'incidence du HHS va augmenter, avertis-

sent reanimateurs, pediatres et diabetologues de cette etude americaine.

J.-M. M.

(1) Pediatric Critical Care M#decine 6 (2005) 20-24 (janvier 2005) : www.pccmjournaLorg.

Revue Francophone des Laboratoires, mai 2005, N ° 373 13