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Mémoire en réplique TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE LYON
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Mémoire en réplique Dossier n° 1006089-7
POUR :
L’association « La Ville à Vélo »
Représentée par son Président en exercice, M. Nicolas IGERSHEIM
c/o Pignon sur Rue
10 rue Saint-Polycarpe
69001 LYON
CONTRE :
M. le Maire de la Ville de Lyon
1 place de la Comédie
69205 LYON CEDEX 01
A L’ATTENTION DE :
Tribunal administratif de Lyon
184 rue Du Guesclin
69433 LYON CEDEX 03
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A MONSIEUR LE PRESIDENT
A MESDAMES ET MESSIEURS LES CONSEILLERS DU TRIBUNAL
I. Rappel des faits et de la procédure
1. Le décret n°2008-754 du 30 juillet 2008 portant diverses dispositions de sécurité
routière (JORF n°0178 du 1er
août 2008, page 12314) a modifié l’article R. 110-2 du Code de la
route. L’article 1er
du décret a notamment modifié la définition de la zone 30 en agglomération,
en tant que zone de circulation particulière :
« Zone 30 : section ou ensemble de sections de voies constituant une zone affectée à la
circulation de tous les usagers. Dans cette zone, la vitesse des véhicules est limitée à 30
km/h. Toutes les chaussées sont à double sens pour les cyclistes, sauf dispositions
différentes prises par l'autorité investie du pouvoir de police. Les entrées et sorties de cette
zone sont annoncées par une signalisation et l'ensemble de la zone est aménagé de façon
cohérente avec la limitation de vitesse applicable. »
L’article 13 du décret précité prévoit, quant à lui, que « Les dispositions du seizième alinéa de
l'article R. 110-2 du code de la route relatives à la circulation des cyclistes sur les chaussées à
double sens des zones 30 sont rendues applicables, en ce qui concerne les zones 30 existantes,
par arrêté de l'autorité investie du pouvoir de police de la circulation qui devra intervenir au plus
tard le 1er
juillet 2010. »
Ces dispositions obligeaient donc le maire, en tant qu’autorité investie du pouvoir de police de
la circulation, à instituer des double sens cyclables (ci après, « DSC ») dans les zones 30 avant le
1er
juillet 2010.
2. C’est ainsi que le Maire de Lyon a pris un arrêté en date des 17, 20 et 21 mai 2010 et
publié au Bulletin Municipal officiel de la Ville de Lyon le 14 juin de la même année, afin de se
conformer à cette obligation.
(Pièce n°1 – arrêté du Maire de Lyon en date des 17, 20 et 21 mai 2010)
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A cet effet, le Règlement Général de la Circulation du 6 janvier 1999 a été modifié afin de
réglementer les DSC dans la zone 30 du centre-ville de Lyon, savoir dans les 1er
, 2ème
, 4ème
et
5ème
arrondissements.
3. Afin de contester la légalité de cet arrêté municipal, l’association La Ville à Vélo a
exercé auprès du Maire de Lyon un recours gracieux en date du 23 juin 2010 et reçu le 25 juin à
la Ville de Lyon, demandant à celui-ci de revoir les critères ayant conduit à exclure 84% des rues
de la zone 30 du bénéfice du DSC, soit 241 rues sur 287 !
4. Par lettre envoyée en recommandé avec demande d’accusé de réception le 26 juillet
2010 et reçue le 10 août 2010, la Ville de Lyon a rejeté expressément le recours gracieux
formulé par la Ville à Vélo.
En substance, la Ville de Lyon met en avant comme arguments la sécurité des usagers et
des circonstances locales afin de refuser de réviser son arrêté des 17, 20 et 21 mai 2010.
5. Face au refus de la Ville de Lyon de réviser cet arrêté, la Ville à Vélo a décidé de
défendre la sécurité des cyclistes, et donc celle de tous les usagers de la route en demandant au
Maire de Lyon d’étendre les DSC dans la zone 30 du centre de Lyon afin de se conformer à
l’esprit et à la lettre du décret de 2008 précité.
Conformément à son objet social et à ses statuts, l’association La Ville à Vélo entend contester
devant votre tribunal l’arrêté municipal en date des 17, 20 et 21 mai 2010 en tant qu’il modifie
le Règlement Général de la Circulation modifié en date du 6 janvier 1999. C’est le présent
arrêté qui est aujourd’hui soumis au tribunal de céans.
6. C’est ainsi que l’association La Ville à Vélo a déposé, le 24 septembre 2010, un recours
pour excès de pouvoir contre l’arrêté en question. Face à l’incurie de la Ville de Lyon, votre
tribunal a mis le défendeur en demeure, le 28 février 2011, de produire ses conclusions en
réponse sous 30 jours. La Ville de Lyon n’a pourtant produit ses conclusions que par un mémoire
en défense en date du 31 août 2011, le dernier jour avant la clôture de l’instruction.
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7. C’est à ces écrits que le présent mémoire entend répondre, afin de prouver que les
allégations avancées par la Ville de Lyon sont sans fondements et ne pourront, par conséquent,
prospérer.
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II. Discussion
L’arrêté municipal en date des 17, 20 et 21 mai 2010 encourt inévitablement
l’annulation. Alors que le DSC en zone 30 est le principe, en vertu du décret du 30 juillet 2008 et
de l’article R. 110-1 du Code de la route, et son interdiction l’exception, la Ville de Lyon a fait le
choix de poser le DSC en exception et son exclusion en principe…
Il appert que l’intérêt à agir du requérant ne fait aucun doute (A), tout comme le dépôt
de la présente requête introductive d’instance (B).
Les nombreux griefs d’annulation, en droit comme en fait, doivent justifier l’annulation
de l’arrêté déféré à votre tribunal (C).
A. Concernant l’intérêt à agir du requérant
L’association « La Ville à Vélo » a pour but de promouvoir le mode de transport cycliste dans
l’agglomération lyonnaise.
Conformément à ses statuts approuvés lors de l’assemblée générale ordinaire (AGO) en date du
2 février 2009, son objet social (article 2), notamment, est le suivant :
« Elle soutient ou initie toute action, toute démarche ou toute expérience en vue de
défendre les droits, les intérêts et les besoins des usagers des circulations douces. »
(Pièce n°2 – statuts de l’association La Ville à Vélo tels que modifiés par l’AGO du 2 février 2009)
Contrairement à ce que peut prétendre la Ville de Lyon, ces statuts sont bien ceux déposés en
préfecture, comme le confirme le procès-verbal de l’AGO en date du 2 février 2009.
(Pièce n°2-1 – procès-verbal de l’AGO en date du 2 février 2009)
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L’article 24 des statuts régit les modalités de l’action en justice de la part de l’association. Ainsi,
conformément à ses statuts et particulièrement à son objet social, la Ville à Vélo a un indéniable
intérêt à agir en vue de demander l’annulation de l’arrêté municipal en cause.
L’article 24 alinéa 3 des statuts de La Ville à Vélo précise en effet :
« L’action en justice est conduite par le / la Président(e) qui est mandaté(e) et autorisé(e)
par le conseil d'administration « à ester en justice » au nom de l'association, tant en
demande qu'en défense. »
La Ville de Lyon tente de jouer sur les mots pour dénier à l’association La Ville à Vélo le droit de
défendre les cyclistes. En effet, l’extrait de l’article 24 des statuts susmentionné est on ne peut
plus clair : le conseil d’administration autorise bien le président à ester en justice au nom de
l’association. Un recours pour excès de pouvoir, tel que celui qui a été déposé par l’association
dans la présente affaire, entre parfaitement dans ce cadre. Les alinéas 1er
et 2 de l’article 24 des
statuts ne font que reprendre et préciser l’objet social de l’association :
« L’association pourra, conformément à l’article 6 de la loi du 1er
juillet 1901, se
constituer partie civile en son nom, ou de manière solidaire, pour faire valoir le droit des causes
qu’elle défend dans son objet.
L’association peut, par conséquent, engager des actions en justice pour appuyer et
défendre sa position et ses actions en vue d’atteindre les objectifs définis dans l’article 2 des
présents statuts (…). »
L’ordre des alinéas est, de plus, on ne peut plus logique : l’association peut engager des actions
en justice, c’est-à-dire ester en justice, et pour cela le Conseil d’administration mandate le
Président de l’association.
Ainsi, au cours de sa réunion du 21 septembre 2010, le Conseil d’administration de La Ville à
Vélo a mandaté son Président pour engager la présente action.
(Pièce n°3 – mandat du Conseil d’administration en date du 21 septembre 2010)
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Le mandat donné au Président par le Conseil d’administration vaut pour l’arrêté municipal dans
son entier, formant un tout indivisible puisque publié en un seul bloc au Bulletin municipal
officiel de la Ville de Lyon le 14 juin 2010.
Le mandat donné par le Conseil d’administration ne saurait ainsi valoir pour une partie de
l’arrêté en cause : il vaut pour l’arrêté en date des 17, 20 et 21 mai dans sa globalité, puisque
formant un tout indivisible.
Pour preuve, le Bulletin municipal officiel, en ses pages 1384 à 1388, fait apparaître une
catégorie d’arrêtés parmi d’autres. L’arrêté en question est classé dans la catégorie
« Modifications au Règlement Général de la Circulation (Direction des déplacements urbains) »
et est lui-même subdivisé en plusieurs sections en fonction des arrondissements de Lyon :
a) Réglementation du double sens cyclable dans les rues à sens unique de la zone 30
Centre Presqu’île de Lyon 4e arrondissement
b) Réglementation du double sens cyclable dans les rues à sens unique de la zone 30
Centre Presqu’île de Lyon 1er
arrondissement
c) Réglementation du double sens cyclable dans les rues à sens unique de la zone 30
Centre Presqu’île de Lyon 2e arrondissement
g) Réglementation du double sens cyclable dans les rues à sens unique de la zone 30
Centre Presqu’île de Lyon 5e arrondissement
D’autre part, l’arrêté querellé ne comporte qu’une seule fois le visa suivant :
« Le Maire de la Ville de Lyon,
Vu le Code Général des Collectivités Territoriales et notamment les articles L. 2212-1, L. 2212-2,
L. 2212-5 et L. 2213-1 à L. 2213-6 ;
Vu le Code de la Route ;
Vu le Code de la Voirie Routière ;
Vu le Code Pénal ;
Vu la loi n°96-1236 du 30 décembre 1996 sur l’air et l’utilisation rationnelle de l’énergie ;
Vu le Règlement Général de la Circulation du 6 janvier 1999 modifié ; (…) »
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Enfin, une seule signature apparaît :
« Pour le Maire de Lyon
Le Premier Adjoint
J.-L. TOURAINE »
Il apparaît donc que l’arrêté des 17, 20 et 21 mai 2010 avait un seul et unique objet, la mise en
place des double-sens cyclables dans le centre-ville de Lyon. Il a d’ailleurs été publié en un seul
bloc, le 14 juin 2010.
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B. Concernant les délais de dépôt de la requête introductive d’instance
La Ville à Vélo a exercé auprès de la Ville de Lyon un recours gracieux formulé le 23 juin 2010 et
reçu en mairie le 25 juin suivant.
(Pièce n°4 – recours gracieux de la Ville à Vélo à la Ville de Lyon)
Dans ce recours, la Ville à Vélo demande bien au Maire de Lyon d’abroger l’arrêté municipal
appliquant le décret n°2008-754, à savoir l’arrêté « publié au Bulletin Municipal Officiel de la
Ville de Lyon du 14 juin 2010, en tant qu’il modifie le règlement général de la circulation et qu’il
institue des double sens cyclables dans les rues lyonnaises. »
Ce recours a été rejeté expressément par la Ville de Lyon, par courrier en date du 26 juillet 2010
et reçu le 10 août 2010.
(Pièce n°5 – décision expresse de rejet de la Ville de Lyon)
Une décision expresse de rejet de la part de l’autorité administrative proroge
traditionnellement le délai de recours, initialement porté à 2 mois à compter de la publication
de l’acte en cause. En l’espèce, la décision expresse de rejet de la Ville de Lyon a prorogé le délai
de recours contentieux et l’a porté à 2 mois à compter de la réception du rejet par la Ville à
Vélo. Il en ressort que le délai de recours contentieux expire normalement au 10 octobre 2010.
Par conséquent, la Ville à Vélo est parfaitement recevable à exercer le présent recours devant
votre tribunal, par la requête déposée le 24 septembre 2010.
Il ne saurait être dénié à l’association la Ville à Vélo le droit de contester la mise en place des
double-sens cyclables. Sa requête vise donc bien à l’annulation des réglementations en date
des 17, 20 et 21 mai 2010. Par conséquent, l’association est parfaitement fondée à attaquer
l’arrêté publié le 14 juin 2010, elle dispose d’un intérêt à agir indéniable, et le tribunal de
céans a été saisi en bonne et due forme par la personne habilitée au sein de l’association à
ester en justice.
Par conséquent donc, les conclusions aux fins d’irrecevabilité de la Ville de Lyon ne pourront
qu’être rejetées.
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C. Concernant l’illégalité de la décision du Maire de Lyon
La Ville à Vélo entend demander l’annulation de l’arrêté municipal des 17, 20 et 21 mai 2010. En
effet, en droit, cet arrêté est insuffisamment motivé (1) et contraire à l’esprit tout comme à la
lettre du décret du 30 juin 2008 (2). Enfin, pour de nombreuses raisons factuelles, il est entaché
d’erreurs manifestes d’appréciation (3).
1°) Un arrêté municipal dénué de motivation
En effet, alors que le principe du décret est la généralisation du DSC, de nombreuses rues sont
exclues du DSC dans la zone 30, sans motivation particulière dans l’arrêté municipal en
question. Les seules motivations contenues dans l'arrêté sont d'ordre général, de sécurité et de
commodité, en faveur donc des DSC.
Les visas de l’arrêté municipal contesté, notamment, ne permettent en rien d’expliquer en quoi
une telle restriction des DSC serait motivée sur un périmètre aussi large (84% des rues en sens
unique de la zone 30 de la Presqu’île !) que celui qui est visé.
2°) Un arrêté municipal contraire à l’esprit et à la lettre du décret de 2008
L’article R. 110-2 du Code de la route, tel qu’il résulte des modifications instituées par le décret
du 30 juin 2008, est clair dans son intention :
« (…) Toutes les chaussées sont à double sens pour les cyclistes, sauf dispositions
différentes prises par l'autorité investie du pouvoir de police (…). »
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Il en ressort très nettement que le DSC est le principe, et non une exception. Il convient de
souligner que le pouvoir réglementaire aurait très bien pu, si ses intentions avaient été
différentes, instituer le DSC comme une exception ou une possibilité dans les zones 30, et non
comme un principe. A ce titre, d’ailleurs, la vitesse dans ces zones est limitée. Celles-ci sont
aménagées et affectées à la circulation de tous les usagers ; en fait comme en droit, ces zones
ont bien pour vocation de favoriser la sécurité de tous les usagers, et de favoriser les modes de
déplacement doux.
Contrairement à ce qu’avance la Ville de Lyon, il est parfaitement inexact que la Ville à Vélo
interprète la généralisation du DSC dans les zones 30 en principe absolu. Il n’échappe toutefois
pas à la Ville de Lyon que le principe de généralisation des DSC, tel qu’il résulte du décret de
2008 précité, et comme tout principe, ne doit pas être criblé d’exceptions au point d’être vidé
de sa substance. Cela a pourtant bien été la démarche de la Ville de Lyon.
Aux termes de l’article L. 2212-1 du Code général des collectivités territoriales (CGCT), le maire
dispose du pouvoir de police municipale, dont le but est d’assurer le bon ordre, la sûreté, la
sécurité et la tranquillité publics. S’il dispose d’une certaine latitude dans l’exercice de ses
pouvoirs, il n’y est toutefois pas totalement libre. Il doit notamment justifier pourquoi il exerce
ses pouvoirs de police et dans quelle mesure ces pouvoirs sont nécessaires.
Par exemple, est illégal l’arrêté interdisant tout accès d’un chemin vicinal à une route nationale dès lors que les
dangers courus par les usagers de ces deux voies au carrefour formé par leur intersection pouvaient être évités par
des mesures moins rigoureuses (CE, 17 mars 1978, Gaillard et Figini ; Lebon 139).
En l’espèce, il apparaît que le Maire de Lyon a exclu du DSC dans la zone 30 de la Presqu’île 84%
des rues à sens unique. De fait, 16% seulement des rues éligibles de la zone 30 sont en DSC,
alors que la Ville de Lyon met en avant des circonstances locales et la sécurité de tous les
usagers de la zone comme seules justifications à cette exclusion.
(Pièce n°6 – carte de la zone 30 de Lyon et des DSC)
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Dans sa décision expresse de rejet, la Ville de Lyon concède que l’arrêté en date des 17, 20 et 21
mai 2010 est prudentiel, arguant une mise en place des DSC étape par étape, sans toutefois
justifier de circonstances particulières qui permettraient de ne pas généraliser immédiatement
les DSC dans la zone 30.
D’ailleurs, une mise en place étape par étape à partir du 1er Juillet 2010 est parfaitement
contraire à la lettre du décret du 30 juin 2008 dans la mesure où celui-ci disposait que les DSC
dans les zones 30 devaient être mis en place au plus tard au 1er
juillet 2010, et non à partir du
1er
juillet 2010. La ville de Lyon semble avoir pris cette date comme un point de départ et non
comme une date-butoir, sans d’ailleurs indiquer le moindre échéancier.
La Ville à Vélo demandait déjà la mise en place de DSC par des courriers au Maire de Lyon en
2001 et en 2003 à l’exemple des aménagements réalisés à Villeurbanne.
De plus, dans son mémoire, la Ville de Lyon se dit prête à appliquer le décret dans un délai de 9
mois. Mais ces 9 mois sont largement écoulés depuis le 1er
Juillet 2010 et à fortiori depuis Juillet
2008 !
3°) Un arrêté municipal entaché d’erreurs manifestes d’appréciation
L’arrêté municipal est en effet entaché d’erreurs manifestes d’appréciation quant à la mise en
place des DSC dans la zone 30 concernée.
En effet, la Ville de Lyon met en avant l’argument de la sécurité afin de ne pas généraliser cet
aménagement. Or il apparaît, bien au contraire, que le DSC est un gage de sécurité pour les
cyclistes !
Par ailleurs, l’arrêté municipal est peu cohérent au regard des finalités du décret de 2008. Pour
preuve, certaines rues de mêmes caractéristiques (largeur, trafic, stationnement…) sont pour les
unes autorisées au DSC, tandis que les autres sont interdites au DSC !
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a) Concernant l’argument de la sécurité, la Délégation à la sécurité et à la circulation
routière (DSCR), dans un communiqué diffusé notamment par la Préfecture du Rhône, écrivait le
30 juin 2010 :
« Pour les cyclistes, le DSC raccourcit les distances à parcourir, garantit plus de sécurité
du fait d'une meilleure visibilité réciproque entre usagers et un différentiel de vitesse
moins important. »
(Pièce n°7 - communiqué de presse de la DSCR)
Il faut savoir que le décret n°2008-754 a été pris dans le cadre plus général de la démarche dite
du « Code de la rue » et à la suite de nombreuses études portant sur les DSC installés
notamment à Strasbourg, Grenoble, Rennes, Nantes, Colombes et démontrant leur intérêt et
leur innocuité. Ils ont également fait l'objet d'une fiche descriptive détaillée par le Centre
d'Etudes sur les réseaux les transports, l'urbanisme et les constructions publiques (CERTU).
(Pièce n° 8 - Les double-sens cyclables CERTU - Fiche Vélo n°6 ;
http://www.fubicy.org/IMG/pdf/CERTU2008doublesenscycl.pdf)
En Belgique, où les DSC (qui sont y dénommés SUL - sens unique limité) existaient depuis 1991 ;
ils ont été généralisés dès 2004, tant leur intérêt était démontré.
(Pièce n°9 - Communiqué Service public fédéral belge mobilité et transports ;
http://www.mobilit.fgov.be/data/pbs/P040630bf.pdf)
L'exemple belge nous montre que le cycliste en DSC bénéficie des avantages de sécurité
supplémentaire suivants :
* le conducteur de la voiture est assis à gauche, c’est-à-dire du côté où s’effectue le croisement. Plus proche du
cycliste que lors d’un dépassement, il évaluera plus facilement l’espace nécessaire dans une rue étroite ;
* en cas d’accident dû à l’ouverture intempestive d’une portière, les conséquences pour le cycliste seront
souvent moins graves que lorsqu’il roule dans le sens du trafic (le cycliste ne court aucun risque de se blesser au
tranchant de la portière, et celle-ci aura tendance à se refermer sous le choc qui sera donc moins rude) ;
* enfin, même dans les cas où l’automobiliste ne peut pas voir arriver le cycliste à contresens, le cycliste pourra le
plus souvent entendre arriver le véhicule à moteur avant de le voir, et pourra donc anticiper une manœuvre
d’évitement.
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Aussi, l'arrêté en cause affirme-t-il :
« (…) qu'il importe d'assurer dans les meilleures conditions de sécurité et de commodité la
circulation des cyclistes, il convient (…). »
Dès lors, on en déduit que la suite logique devrait être de multiplier les DSC et non de les
restreindre si on a à cœur la sécurité des Lyonnais !
b) Ainsi, il paraît difficile de comprendre pourquoi deux rues semblables comme le sont
la rue Sala et la rue Sainte Hélène subissent un traitement différent : alors que la rue Sainte
Hélène est pourvue d'un DSC, la rue Sala en est privée…
(Pièce n°10 - photos comparées de la rue Sainte Hélène et de la rue Sala)
� Pourtant, la mise à double sens de la rue Sala permettrait aux étudiants et aux chalands
cyclistes empruntant la passerelle Saint Georges, 1°) pour les uns de traverser la Presqu'île, et
2°) pour les autres de rallier la rue Victor Hugo sans avoir besoin de remonter jusqu'à la Place
Bellecour, sur le trottoir, ou de franchir le flot des voitures sur le Quai Tilsit pour tourner dans la
rue Sainte Hélène...
Dans la rue Sala, ils iront directement :
- à la Fédération Européenne Des Ecoles ;
- à l'Institut De Musique Sacrée ;
- aux Œuvres Pontificales Missionnaires (O.P.M) ;
- au Centre de Formation Shampoo ;
- à l'Ecole Collège et Lycée Chevreul ;
- à la Résidence des Jésuites ;
- à la Fédération des Particuliers Employeurs du Rhône ;
- au restaurant administratif des finances ;
- chez Manpower…
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Le motif avancé par la Ville selon lequel se produisent de fréquents stationnements sauvages en
double file dans cette rue ne saurait être retenu comme argument de sécurité pour exclure
cette rue du bénéfice du DSC, car le respect des interdictions de stationner relève de la
responsabilité du Maire.
Cette incohérence se retrouve dans de nombreux cas et notamment dans le 4ème
arrondissement où la rue d'Ivry est à DSC quand celui-ci n'est pas autorisé dans la rue du
Chariot d'Or.
(Pièce n°11 - photos comparées de la rue d'Ivry et de la rue du Chariot d'Or)
En outre, le mémoire du défendeur ne présente que 30 rues qui seraient impropres au DSC, cela
laisse 211 rues où le DSC pourrait donc s’appliquer. Et nous notons qu’en majorité ces trente
rues sont assez spacieuses pour accueillir une file de stationnement automobile, et parfois
deux ! Le Code de la Route dispose que toutes les chaussées en zone 30 sont à double sens
pour les cyclistes, il ne précise rien en matière d’obligation d’offre de stationnement.
c) Par ailleurs, le Club des Villes Cyclables (au Bureau duquel la Ville de Lyon était
représentée) énonce dans un communiqué en date du 14 septembre 2010 :
« (…) le Club des villes et territoires cyclables plébiscite les double-sens cyclables, levier
puissant pour une voirie hospitalière. La mise en application du décret du 30 juillet 2008 a
introduit la généralisation des double-sens cyclables dans les zones 30 et les zones de
rencontre. Le bilan positif affiché par le double-sens cyclable doit appeler à la poursuite
du processus d’apaisement des voiries urbaines et à leur extension au-delà des zones 30
et des zones de rencontre. »
(Pièce n°12 - communiqué du 14 septembre 2010 du Club des Villes Cyclables)
De plus, notons que le DSC n’est pas une nouveauté dans l’agglomération : dès juin 2006,
pendant toute la journée du samedi 3 juin, à l'occasion de la Fête du Vélo, les Lyonnais étaient
invités à emprunter les rues Sainte Catherine, de la Martinière, Désirée, Puits Gaillot via des
DSC.
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d) Surtout, les DSC existent depuis longtemps dans le Grand Lyon même hors zone 30 !
Mais surtout :
- à Lyon :
rue colonel Chambonnet (2ème
) ;
rue de la Barre (2ème
) ;
rue des Cadets de la France Libre (3ème
) ;
rue Bellecombe (6ème
) ;
rue Domer (7ème
) ;
pont Masaryk (9ème
).
- à Villeurbanne :
rue Anatole France (sur 400 mètres) ;
rue Francis de Pressensé (sur 500 mètres).
- à Saint-Priest :
rue du Grisard (sur 230 mètres) ;
rue Anatole France (bande à contresens non protégée, 500 mètres).
- à Saint-Fons :
rue Anatole France (sur 180 mètres) ;
rue Parmentier (sur 200 mètres) ;
rue Francis de Pressensé (sur 250 mètres).
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e) Par ailleurs, La Ville à Vélo avait obtenu du candidat de la liste « Aimer Lyon »,
Monsieur Gérard Collomb, une réponse favorable à la question posée lors des élections
municipales du printemps 2008 :
« Etes-vous d’accord pour généraliser les doubles-sens cyclables dans toutes les rues à
sens unique sauf exception justifiée ? »
(Pièce n°13 - questionnaire du mardi 22 janvier 2008)
Enfin, la ville de Villeurbanne a adopté une attitude radicalement différente, en généralisant les
DSC même en dehors des zones 30…
f) La Ville de Lyon reproche à La Ville à Vélo d’adopter une attitude radicale, sans doute
notre association s’est laissé abuser par la littérature du Club des Villes Cyclables, qui écrivait
dans une motion rédigée le 19 octobre 2007 lors d’un Congrès qui se déroulait à… LYON !
« la mise en place systématique de double-sens cyclistes dans les rues à sens unique situées en
zone trente et les rues réglementées à trente à l’heure marquerait une forte volonté
d’intégrer de nouvelles pratiques cyclistes dans la ville et d’améliorer leur sécurité »
(Pièce n°14 - Motion du Club des Villes Cyclables)
g) La Ville de Lyon prétend que l'association La Ville à Vélo perçoit les Double-Sens
Cyclables comme des « bulles de sécurité ne représentant aucun danger pour ses usagers». Il
n'a jamais été question pour La Ville à Vélo de prétendre que les Double-Sens Cyclables
écartaient tout risque pour les cyclistes et autres usagers de la route, comme chercherait à le
faire croire la Ville de Lyon. Le mot de « bulle », qui ne signifie rien, n'a pas été employé par la
Ville à Vélo dans son mémoire. Mais nous soulignons que les double-sens cyclables sont au
moins aussi sûrs pour les usagers que n'importe quel autre aménagement. Cette assertion, loin
d'être « partiale », résiste à l'épreuve des faits : la Ville de Lyon n’a pu citer aucun accident
frontal depuis leur mise en place, en dépit de l’énergie cinétique proportionnelle au carré de la
vitesse.
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Pour conclure, la Ville de Lyon entend s’exonérer de sa responsabilité en mettant en avant
plusieurs arguments :
- la généralisation des DSC serait dangereuse ; à l’appui de ces allégations, la Ville de Lyon
ne produit l’exemple que d’un seul accident :
A la lecture du constat, il s’avère que cet accident n'est pas dû au double-sens cyclable proprement
dit, mais au non-respect par l'automobiliste de l’article R415-9 du Code de la Route énonçant :
«I. - Tout conducteur qui débouche sur une route en franchissant un trottoir ou à partir d'un accès non
ouvert à la circulation publique, d'un chemin de terre ou d'une aire de stationnement ne doit s'engager sur
la route qu'après s'être assuré qu'il peut le faire sans danger et qu'à une vitesse suffisamment réduite pour
lui permettre un arrêt sur place.
II. - Il doit céder le passage à tout autre véhicule.»
La Ville de Lyon avance également que « le double-sens cyclable impose à l'automobiliste, qui
débouche dans une rue perpendiculaire, de prêter attention aux deux sens de circulation ». La Ville à
Vélo est en total accord avec ces propos, tout comme le Code de la Route, dans son article R415-1 :
« Tout conducteur s'approchant d'une intersection de routes doit vérifier que la chaussée qu'il va croiser est
libre, circuler à allure d'autant plus modérée que les conditions de visibilité sont moins bonnes.»
La Ville de Lyon écrit que « dans la configuration de voies étroites, avec des files de stationnement,
(...) le double-sens cyclable impose à l’automobiliste qui débouche dans une rue perpendiculaire de
prêter attention aux deux sens de circulation ». La Ville à Vélo souhaite préciser que ce n'est pas le
double-sens cyclable qui impose de prêter attention aux deux sens de circulation, mais bien le Code
de la Route.
Il n'y aurait donc pas, comme le prétend la Ville de Lyon, « une accoutumance nécessaire des
automobilistes » au double-sens cyclable qui justifierait le « déploiement progressif du double-sens
cyclable », sauf si la Ville de Lyon part du postulat que les différents usagers ne respecteraient pas,
par nature, le Code de la Route. Si tel était le cas, tout aménagement ou toute signalisation quels
qu'ils soient (feu de signalisation, Stop, ligne continue...) seraient donc inopérants et ne pourraient
garantir la sécurité de la circulation. Il n'en est heureusement rien. L'irrespect du Code de la Route
par certains usagers ne peut donc à notre sens être utilisé comme argument pour définir la
dangerosité du double-sens cyclable.
Mémoire en réplique TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE LYON
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- des contre-exemples montreraient que le DSC n’est pas généralisé (Nice, Montpellier,
Marseille…) : il est pour le moins curieux que la Ville de Lyon justifie ses réticences à
appliquer le décret par l’exemple de villes qui l’appliqueraient encore moins bien, comme
si leur attitude l’exonérait de ses obligations vis-à-vis de la réglementation.
- les contraintes de la circulation, comme « le stationnement ou arrêt fréquent en double
file gênant les croisements entre modes de déplacement » (sic !) qui empêcheraient
l’extension des DSC. La Ville de Lyon adopte un raisonnement très curieux, pensant que
le non-respect par les automobilistes du Code de la Route pourrait contribuer à la sécurité
de tous en général, et des cyclistes en particulier… drôle de conception de la sécurité ! A
l’évidence, cette argumentation ne résiste ni en droit, ni en fait.
La Ville de Lyon part du postulat que les automobilistes lyonnais ne respectent et ne respecteront
pas le Code de la Route, notamment l'article R417-10 qui dispose :
« Est considéré comme gênant la circulation publique l'arrêt ou le stationnement d'un véhicule : (…) en
double file, sauf en ce qui concerne les cycles à deux roues, les cyclomoteurs à deux roues et les
motocyclettes sans side-car ».
Si toutefois la Ville de Lyon souhaite limiter la pratique du stationnement en double-file, qui peut
effectivement s'avérer dangereux pour tous les Lyonnais (automobilistes, piétons et plus
particulièrement les enfants et les seniors, ou les cyclistes), la Ville à Vélo estime que la Ville de Lyon
en a toute la capacité et surtout le devoir. La création d'espace de livraisons en nombre,
l'augmentation du nombre des patrouilles de la police municipale dans les rues où le stationnement
en double-file est endémique... sont deux des leviers permettant de réduire ces pratiques
dangereuses, rappelons-le, pour tous les usagers.
Il est difficilement compréhensible, de notre point de vue, que la Ville de Lyon s'appuie sur le non-
respect du Code de la Route par certains usagers pour refuser la mise en place de double-sens
cyclable, comme si cet irrespect était inévitable et finalement presque naturel, alors que cette même
ville dispose de tous les pouvoirs de police nécessaire pour lutter contre ce problème du
stationnement en double-file.
Mémoire en réplique TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE LYON
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���� Ainsi, pour toutes ces raisons de droit et de fait, l’arrêté municipal en date des 17, 20 et 21
mai 2010 encourt inévitablement l’annulation. Dans l’intérêt de la sécurité des cyclistes et des
autres usagers de la rue (automobilistes, piétons…), il est urgent de prendre un nouvel arrêté.
Mémoire en réplique TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE LYON
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PAR CES MOTIFS :
Plaise à la Cour :
� Annuler l’arrêté municipal du Maire de Lyon en date des 17, 20 et 21 mai 2010 et publié
le 14 juin 2010 au Bulletin municipal officiel de la Ville de Lyon en tant qu’il modifie, en
ses points a), b), c) et g), le Règlement Général de la Circulation du 6 janvier 1999
modifié de la Ville de Lyon.
� Enjoindre, en vertu de l’article L. 911-1 du Code de justice administrative, au Maire de
Lyon de prendre dans un délai de 3 mois après le prononcé du jugement, un nouvel
arrêté conforme à l’esprit et à la lettre du décret du 30 juin 2008.
� Condamner, en vertu de l’article L. 911-3 du Code de justice administrative, la Ville de
Lyon à une astreinte de 1.000 euros par jour de retard en cas d’inexécution de la
présente décision dans le délai imparti.
� Condamner, en vertu de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative, la Ville de
Lyon à la somme de 750 euros.
Mémoire en réplique TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE LYON
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BORDEREAU DES PIECES COMMUNIQUEES
• Pièce n°1 : arrêté du Maire de Lyon en date des 17, 20 et 21 mai 2010.
• Pièce n°2 : statuts de l’association « La Ville à Vélo » mis à jour au 2 février 2009.
• Pièce n°2-1 : procès-verbal de l’AGO du 2 février 2009 (jointe)
• Pièce n°3 : mandat du Conseil d’administration de La Ville à Vélo en date du 21
septembre 2010.
• Pièce n°4 : recours gracieux de La Ville à Vélo en date du 23 juin 2010.
• Pièce n°5 : rejet exprès du recours gracieux par la Ville de Lyon en date du 26 juillet
2010.
• Pièce n°6 : carte de la zone 30 de Lyon et des DSC.
• Pièce n°7 : communiqué de presse de la DSCR.
• Pièce n°8 : les double-sens cyclables CERTU Fiche Vélo n°6.
• Pièce n°9 : communiqué Service public fédéral belge Mobilité et Transports.
• Pièce n°10 : photos comparées de la rue Sainte Hélène et de la rue Sala.
• Pièce n°11 : photos comparées de la rue d'Ivry et de la rue du Chariot d'Or.
• Pièce n°12 : communiqué du Club des villes cyclables.
• Pièce n°13 : questionnaire Association Vélo du mardi 22 janvier 2008.
• Pièce n°14 : Motion 2007 du Club des villes cyclables (jointe)