Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg 2e ... · 2 Vu le mémoire en duplique...
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Tribunal administratif Numéro 37781 du rôle
du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 14 avril 2016
2e chambre
Audience publique de vacation du 1er août 2018
Recours formé par
Monsieur ....., ….,
contre une décision du conseil communal de Frisange
et contre une décision du ministre de l’Intérieur,
en présence de Madame ....., …..,
en matière de plan d’aménagement particulier
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 37781 du rôle et déposée au greffe du tribunal
administratif le 14 avril 2016 par Maître Sabrina Martin, avocat à la Cour, inscrite au tableau de
l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur ....., demeurant à L-....., tendant à
l’annulation, d’une part, d’une délibération du conseil communal de Frisange du 8 octobre 2015
portant adoption d’un projet d’aménagement particulier concernant des fonds sis à ....., au lieu-dit
« ..... », et, d’autre part, d’une décision du ministre de l’Intérieur du 5 janvier 2016 portant
approbation de ladite délibération du conseil communal de Frisange ;
Vu l’acte de l’huissier de justice Guy Engel, demeurant à Luxembourg, du 20 avril 2016,
portant signification de ce recours à l’administration communale de Frisange, établie à L-5750
Frisange, 10, Munnerëfferstrooss, représentée par son collège des bourgmestre et échevins
actuellement en fonctions ;
Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 18 mai 2016 par
Maître Claude Schmartz, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg,
au nom de la commune de Frisange ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal
administratif le 11 juillet 2016 ;
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 15 septembre 2016
par Maître Claude Schmartz, au nom de la commune de Frisange ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 17 octobre 2016
par Maître Sabrina Martin, au nom de Monsieur ..... ;
Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal
administratif le 10 novembre 2016 ;
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Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 14 novembre 2016
par Maître Claude Schmartz, au nom de la commune de Frisange ;
Vu l’acte de l’huissier de justice Guy Engel, demeurant à Luxembourg, du 14 juin 2017,
portant signification du susdit recours à Madame ....., demeurant à L-….., tel que le tribunal l’avait
ordonné à l’audience publique du 8 mai 2017 ;
Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 7 juillet 2017 par
Maître Anne-Laure Jabin, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à
Luxembourg, au nom de Madame ..... ;
Vu l’ordonnance du tribunal administratif du 20 septembre 2017 fixant des délais pour le
dépôt de mémoires supplémentaires ;
Vu le mémoire supplémentaire déposé au greffe du tribunal administratif le 23 octobre 2017
par Maître Anne-Laure Jabin, au nom de Madame ..... ;
Vu le mémoire supplémentaire déposé au greffe du tribunal administratif le 27 novembre
2017 par Maître Sabrina Martin, au nom de Monsieur ..... ;
Vu le mémoire supplémentaire déposé au greffe du tribunal administratif le 22 décembre
2017 par Maître Claude Schmartz, au nom de la commune de Frisange ;
Vu le mémoire supplémentaire déposé au greffe du tribunal administratif le 25 janvier 2018
par Maître Anne-Laure Jabin, au nom de Madame ..... ;
Vu le mémoire supplémentaire déposé au greffe du tribunal administratif le 26 février 2018
par Maître Sabrina Martin, au nom de Monsieur ..... ;
Vu le mémoire supplémentaire déposé au greffe du tribunal administratif le 23 mars 2018
par Maître Claude Schmartz, au nom de la commune de Frisange ;
Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions attaquées ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Jérôme Commodi, en
remplacement de Maître Sabrina Martin, Maître Isabelle Boultgen, en remplacement de Maître
Claude Schmartz, Maître Anne-Laure Jabin et Monsieur le délégué du gouvernement Luc Reding
en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 16 avril 2018.
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Le 23 mars 2015, la société anonyme ....., ci-après désignée par « la société .....», soumit au
collège des bourgmestre et échevins de Frisange, ci-après dénommé « le collège des bourgmestre
et échevins », un projet d’aménagement particulier concernant des fonds sis à ....., au lieu-dit
« ..... », pour le compte de Madame ......
Lors de sa séance du 15 juin 2015, le collège des bourgmestre et échevins retint, « (…)
après analyse du dossier (…) » et à l’unanimité des voix, d’une part, que ledit projet
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d’aménagement particulier « (…) ne [prévoirait] pas de dérogations par rapport aux prescriptions
du règlement général sur les bâtisses de la commune de Frisange et [serait] conforme au Plan
d’Aménagement Général actuellement en vigueur (…) » et, d’autre part, « (…) qu’[il soutiendrait]
le projet, vu que l’idée présentée s’[intégrerait] de façon harmonieuse dans le tissu urbain existant
(…) ».
Par avis du 17 juin 2015, le collège des bourgmestre et échevins informa le public du fait
que la procédure d’adoption de ce projet d’aménagement particulier venait d’être entamée, que
ledit projet serait déposé pendant trente jours à la maison communale, où le public pourrait en
prendre connaissance, et que durant ce délai, les observations et objections contre le projet en
questions devraient être présentés par écrit au collège des bourgmestre et échevins sous peine de
forclusion.
Par courrier de son litismandataire du 29 juin 2015, Monsieur ..... soumit au collège des
bourgmestre et échevins des objections et observations par rapport audit projet d’aménagement
particulier.
Le 15 juillet 2015, la cellule d’évaluation instituée auprès de la direction de l’aménagement
communal et du développement urbain du ministère de l’Intérieur, ci-après désignée par « la cellule
d’évaluation », émit son avis concernant ce projet d’aménagement particulier.
Lors de sa séance publique du 8 octobre 2015, le conseil communal de Frisange, ci-après
désigné par « le conseil communal », décida, « (…) avec 3 voix pour et 5 abstentions (…) »,
notamment, « (…) de ne pas tenir compte de la réclamation de M. ..... (…) » et d’approuver le
projet d’aménagement particulier en question.
Par décision du 5 janvier 2016, le ministre de l’Intérieur, ci-après désigné par « le
ministre », approuva ladite délibération du conseil communal du 8 octobre 2015.
Par avis du 14 janvier 2016, le collège des bourgmestre et échevins porta cette décision à la
connaissance du public.
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 14 avril 2016, Monsieur ..... a fait
introduire un recours tendant à l’annulation, d’une part, de la délibération, précitée, du conseil
communal du 8 octobre 2015 et, d’autre part, de la susdite décision ministérielle du 5 janvier 2016.
I) Quant à la compétence
Les décisions sur les projets d’aménagement, lesquels ont pour effet de régler par des
dispositions générales et permanentes l’aménagement des constructions qu’ils concernent et le
régime des constructions à y élever, ont un caractère réglementaire.1
Conformément à l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des
juridictions de l’ordre administratif, ci-après désignée par « la loi du 7 novembre 1996 », seul un
1 Cour adm., 10 juillet 1997, n° 9804C du rôle, Pas. adm. 2017, V° Actes réglementaires, n° 48 et les autres références
y citées.
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recours en annulation est susceptible d’être introduit contre un acte administratif à caractère
réglementaire. Le tribunal est partant compétent pour connaître du recours en annulation introduit
à l’encontre des décisions déférées.
II) Quant à la loi applicable
Le tribunal précise que la procédure d’adoption d’un plan d’aménagement particulier, ci-
après désigné par « PAP », est prévue par la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant
l’aménagement communal et le développement urbain, désignée ci-après par « la loi du 19 juillet
2004 ». Or, celle-ci a été modifiée à plusieurs reprises et dernièrement (i) par une loi du 28 juillet
2011 entrée en vigueur, en application de son article 45, en date du 1er août 2011, (ii) par la loi du
30 juillet 2013 concernant l’aménagement du territoire, publiée au Mémorial A, n° 160 du 6
septembre 2013, (iii) par la loi du 14 juin 2015 portant modification de l’article 108 de la loi
modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain,
publiée au Mémorial A, n° 113 du 17 juin 2015, (iv) par la loi du 3 mars 2017 dite « Omnibus »,
entrée en vigueur, en application de son article 76, le 1er avril 2017 et (v) par la loi du 17 avril 2018
concernant l’aménagement du territoire.
Etant donné, d’une part, que le tribunal vient de retenir que seul un recours en annulation a
pu être introduit à l’encontre des décisions déférées et, d’autre part, que dans le cadre d’un tel
recours, le juge administratif est amené à apprécier la légalité de la décision déférée en
considération de la situation de droit et de fait ayant prévalu au jour où elle a été prise2, les
modifications apportées à la loi du 19 juillet 2004 par la loi « Omnibus » ainsi que par la loi précitée
du 17 avril 2018 adoptées et entrées en vigueur postérieurement à la prise des actes litigieux,
intervenue le 8 octobre 2015, respectivement le 5 janvier 2016, ne sont pas à prendre en
considération en l’espèce.
Selon les dispositions transitoires figurant à l’article 108ter de la loi du 19 juillet 2004, tel
que modifié en dernier lieu par la loi précitée du 1er août 2011, « (1) (…) La procédure d’adoption
des projets d’aménagement particulier qui a été entamée avant le 1er août 2011, peut être continuée
et achevée conformément aux dispositions du Titre 4 de la présente loi qui était en vigueur avant
le 1er août 2011. ». En l’espèce, il est constant que le projet d’aménagement particulier a été
présenté auprès du collège échevinal en date du 23 mars 2015, de sorte que la procédure d’adoption
afférente a, a fortiori, débuté après la date butoir du 1er août 2011, fixée par l’article 108ter de la
loi du 19 juillet 2004. Il s’ensuit que la version de la loi du 19 juillet 2004 applicable au présent
litige est celle résultant des modifications opérées par les lois des 28 juillet 2011, 30 juillet 2013 et
14 juin 2015.
III) Quant à l’admissibilité des mémoires des parties
Dans le dernier état de ses conclusions, Monsieur ..... fait déclarer qu’il se rapporterait à
prudence de justice en ce qui concerne l’admissibilité des mémoires de la partie étatique, de la
commune de Frisange et de Madame ......
2 Trib. adm., 27 janvier 1997, n° 9724 du rôle, Pas. adm. 2017, V° Recours en annulation, n° 19 et les autres références
y citées.
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S’il est certes exact que le fait, pour une partie, de se rapporter à prudence de justice
équivaut à une contestation3, il n’en reste pas moins qu’une contestation non autrement étayée est
à écarter, étant donné qu’il n’appartient pas au tribunal de suppléer à la carence de la partie
demanderesse et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base
de ses conclusions4.
Le demandeur étant resté en défaut de préciser pour quelles raisons il estime que les
différents mémoires produits par ses adversaires ne seraient pas admissibles, le moyen afférent
encourt le rejet.
Dans son mémoire en duplique, la commune de Frisange se rapporte à prudence de justice
en ce qui concerne l’admissibilité ratione temporis du mémoire en réplique du demandeur.
L’article 5 (5) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les
juridictions administratives, ci-après désignée par « la loi du 21 juin 1999 », dispose que « Le
demandeur peut fournir une réplique dans le mois de la communication de la réponse (…) ».
Le point de départ pour le mémoire en réplique étant la communication de la réponse à la
partie défenderesse, c’est à partir de la réception du mémoire en réponse par cette dernière que
court le délai de fourniture de la réplique.5
Il est constant en cause que le mémoire en réponse de la commune de Frisange a été notifié
à la partie demanderesse en date du 15 septembre 2016, de sorte qu’a priori, le délai pour fournir
le mémoire en réplique a expiré le 15 octobre 2016.
Or, étant donné, d’une part, que le 15 octobre 2016 était un samedi et, d’autre part, qu’en
vertu de l’article 5 de la Convention européenne sur la computation des délais signée à Bâle le 16
mai 1972, approuvée par la loi du 30 mai 1984, « Il est tenu compte des samedis, dimanches et
fêtes légales dans la computation d’un délai. Toutefois, lorsque le dies ad quem d’un délai avant
l’expiration duquel un acte doit être accompli est un samedi, un dimanche, un jour férié légal ou
considéré comme tel, le délai est prolongé de façon à englober le premier jour ouvrable qui suit. »,
le délai en question est prorogé au jour ouvrable suivant, soit au lundi, 17 octobre 2016.
Le mémoire en réplique du demandeur ayant été déposé au greffe du tribunal administratif
à cette dernière date, le moyen tiré de l’inadmissibilité ratione temporis du mémoire en question
encourt le rejet.
IV) Quant à la recevabilité du recours
Le délégué du gouvernement se rapporte à prudence de justice en ce qui concerne la
recevabilité du recours « (…) quant au délai et quant à la forme (…) ».
3 Trib. adm., 27 octobre 2004, n° 17634 du rôle, Pas. adm. 2017, V° Procédure contentieuse, n° 741 et les autres
références y citées. 4 Trib. adm., 23 janvier 2013, n° 30455 du rôle, Pas. adm. 2017, V° Procédure contentieuse, n° 741. 5 Cour adm., 18 mai 2006, n° 21112C du rôle, Pas. adm. 2017, V° Procédure contentieuse, n° 783 et les autres
références y citées.
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Le tribunal vient de préciser que s’il est exact que le fait, pour une partie de se rapporter à
prudence de justice équivaut à une contestation6, il n’en reste pas moins qu’une contestation non
autrement étayée est à écarter, étant donné qu’il n’appartient pas au juge administratif de suppléer
à la carence de la partie demanderesse et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient
pu se trouver à la base de ses conclusions7.
Dès lors, étant donné que le délégué du gouvernement est resté en défaut de préciser quelles
formes n’auraient pas été respectées en l’espèce, le moyen d’irrecevabilité afférent encourt le rejet.
Quant au moyen d’irrecevabilité ratione temporis encore soulevé par le délégué du
gouvernement, il y a lieu de relever que l’article 16 de la loi du 21 juin 1999 prévoit qu’en matière
d’acte réglementaire, « Le délai d’introduction est de trois mois à partir de la publication de l’acte
attaqué ou, à défaut de publication, de la notification ou du jour où le requérant en a eu
connaissance. ».
Etant donné, d’une part, que la décision ministérielle d’approbation du 5 janvier 2016 a été
publiée le 14 janvier 2016, tel que relevé ci-avant, et, d’autre part, qu’en matière de tutelle
administrative, le délai de recours contentieux ne court qu’à partir de la publication de l’acte
d’approbation8, le délai pour agir à l’encontre des actes déférés a expiré le 14 avril 2016. La requête
introductive d’instance ayant été déposée au greffe du tribunal administratif à cette dernière date,
le moyen d’irrecevabilité ratione temporis encourt le rejet.
La partie communale soulève encore l’irrecevabilité du recours, au motif qu’il aurait été
signifié à l’« administration communale de Frisange », partant à une entité dépourvue de
personnalité juridique n’ayant ni capacité ni qualité pour être destinataire de l’acte, alors qu’en
application de l’article 163 3° du Nouveau code de procédure civile, ci-après désigné par
« NCPC », la « Commune de Frisange », seule dotée de la personnalité juridique, en application
de l’article 107 de la Constitution, aurait dû figurer sur l’exploit d’huissier en tant que destinataire
de l’acte.
Monsieur ..... réfute ce moyen d’irrecevabilité en se prévalant de l’article 29 de la loi du 21
juin 1999 et de deux jugements du tribunal administratif – la référence faite dans le mémoire en
réplique au « tribunal d’arrondissement » étant constitutive d’une erreur matérielle – des 26 mai
2004 et 11 juin 2008, portant respectivement les numéros 17274 et 23329 du rôle et en soulignant
que la partie communale n’aurait pas établi avoir subi un préjudice du fait de la désignation,
critiquée par elle, du destinataire de l’acte d’huissier portant signification du recours. Elle ajoute
que l’administration communale serait une administration déconcentrée de l’Etat, pourvue d’une
personnalité juridique propre, et que les termes « administration communale » seraient
couramment utilisés par les juridictions administratives pour désigner les communes. Ainsi, la
partie communale n’aurait pu se méprendre sur l’identité du destinataire de l’acte. Par ailleurs,
6 Trib. adm., 27 octobre 2004, n° 17634 du rôle, Pas. adm. 2017, V° Procédure contentieuse, n° 741 et les autres
références y citées. 7 Trib. adm., 23 janvier 2013, n° 30455 du rôle, Pas. adm. 2017, V° Procédure contentieuse, n° 741. 8 Trib. adm., 23 mai 2000, n° 11206a du rôle, Pas. adm. 2017, V° Procédure contentieuse, n° 241 ; Cour adm., 6
novembre 1997, n° 10013C du rôle, Pas. adm. 2017, V° Tutelle administrative, n° 27 et les autres références y citées.
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l’article 163 3° du NCPC prévoirait que les communes seraient assignées en la personne du
bourgmestre. En l’espèce, la signification aurait été faite en bonne et due forme à domicile le 20
avril 2016 et le bourgmestre de la commune de Frisange aurait personnellement signé l’exploit
d’huissier.
L’article 163 3° du NCPC – applicable dans le cadre du présent litige, étant donné que dans
la mesure où le règlement de procédure applicable devant les juridictions administratives n’y
déroge pas, les prescriptions du NCPC sont à suivre en la matière9 – dispose que les communes
sont assignées en la personne du bourgmestre.
Si la partie communale en déduit, en substance, qu’en cas de recours contre une décision
d’un conseil communal, le destinataire de l’exploit d’huissier portant signification de ce recours au
défendeur y devrait être désigné, non pas comme « administration communale », mais comme
« commune », le tribunal constate, nonobstant la question de savoir si ces deux termes sont à
considérer comme des synonymes ou non, que cette argumentation s’analyse comme une allégation
de l’inobservation d’une règle de procédure.
Conformément à l’article 29 de la loi précitée du 21 juin 1999, « l’inobservation des règles
de procédure n’entraîne l’irrecevabilité de la demande que si elle a pour effet de porter
effectivement atteinte aux droits de la défense ».
Or, la commune de Frisange ne fait état d’aucune atteinte à ses droits de la défense en
relation avec la désignation du destinataire de l’exploit d’huissier du 20 avril 2016 comme
« l’administration communale de Frisange » et le tribunal constate qu’elle a pu amplement assurer
sa défense au fond à travers ses mémoires en réponse et en duplique, ainsi que ses mémoires
supplémentaires fournis en cause.
Il s’ensuit que faute d’atteinte vérifiée aux droits de la défense de la commune de Frisange,
l’inobservation alléguée de l’article 163 3° du NCPC ne saurait entraîner l’irrecevabilité du
recours.10 Le moyen afférent encourt, dès lors, le rejet.
Madame ..... conclut, à son tour, à l’irrecevabilité du recours, au motif que la réclamation
introduite par Monsieur ..... à l’encontre du projet d’aménagement particulier aurait été basée sur
l’article 13 de la loi du 19 juillet 2004, applicable à la procédure d’adoption d’un plan
d’aménagement général (« PAG »), au lieu de l’article 30 de la ladite loi, applicable à la procédure
d’adoption d’un PAP. Ainsi, ladite réclamation n’aurait pas été valablement soumise à la commune
de Frisange, de sorte que Monsieur ..... serait forclos à agir devant le tribunal administratif,
conformément à l’article 30, alinéa 8 de la loi du 19 juillet 2004.
Monsieur ..... fait plaider qu’en sa qualité de propriétaire de la maison jouxtant la limite de
la propriété de Madame ....., il serait à qualifier de personne intéressée, au sens de l’article 30,
alinéa 8 de la loi du 19 juillet 2004. En cette qualité, il aurait présenté une réclamation par écrit et
dans les délais au collège échevinal. Ainsi, cette réclamation, dont il ressortirait clairement qu’il
9 En ce sens : Trib. adm., 30 octobre 1997, n° 8936 du rôle, Pas. adm. 2017, V° Procédure contentieuse, n° 302 et les
autres références y citées. 10 Voir p. ex., par analogie : Cour adm., 14 juillet 2015, n° 35887C du rôle, disponible sur www.jurad.etat.lu.
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serait opposé au PAP litigieux, serait parfaitement valable pour avoir été introduite conformément
aux dispositions dudit article 30, alinéa 8 de la loi du 19 juillet 2004. D’ailleurs, le conseil
communal ne se serait mépris ni sur l’objet ni sur la cause de sa réclamation, étant donné qu’il
l’aurait convoqué et entendu en date du 16 septembre 2015. Il s’ensuivrait que la référence faite à
l’article 13 de la loi du 19 juillet 2004 devrait être qualifiée d’erreur matérielle et n’aurait, dès lors,
d’incidence ni sur la validité de la réclamation ni sur la recevabilité du présent recours.
Madame ..... résiste à cette argumentation du demandeur, en se prévalant de la
jurisprudence du tribunal administratif selon laquelle l’indication erronée d’une base légale
déterminée constituerait, non pas une erreur matérielle toujours susceptible d’être redressée, mais
une erreur de droit susceptible d’entraîner l’annulation de la décision viciée. Cette jurisprudence,
certes établie à l’encontre des administrations, devrait néanmoins s’appliquer à un administré dont
les intérêts seraient défendus par un professionnel en la matière. Ainsi, la réclamation de Monsieur
..... serait dépourvue de base légale, de sorte que le recours subséquent devrait être déclaré
irrecevable.
Aux termes de l’article 30 de la loi du 19 juillet 2004 :
« Le projet d’aménagement particulier avec, le cas échéant, le rapport justificatif est
soumis au collège des bourgmestre et échevins.
Le collège des bourgmestre et échevins analyse la conformité du projet d’aménagement
particulier avec le plan ou projet d’aménagement général. Dans un délai de trente jours de la
réception, le dossier complet est transmis pour avis à la cellule d’évaluation instituée auprès de la
commission d’aménagement par lettre recommandée ou par porteur avec avis de réception.
(…)
Dans le délai de trente jours, prévu à l’alinéa 2, le projet d’aménagement particulier est
déposé, le cas échéant, avec le rapport justificatif pendant trente jours à la maison communale où
le public peut en prendre connaissance. Le dépôt est publié par voie d’affiches apposées dans la
commune de la manière usuelle et invitant le public à prendre connaissance du projet.
(…)
Dans le délai de trente jours de la publication du dépôt du projet dans les quatre quotidiens
publiés et imprimés au Grand- Duché de Luxembourg, les observations et objections contre le
projet doivent, sous peine de forclusion, être présentées par écrit au collège des bourgmestre et
échevins par les personnes intéressées. (…) ».
L’article 30, alinéa 8 de la loi du 19 juillet 2004 prévoit donc un délai de trente jours dans
lequel d’éventuelles observations ou objections contre le projet d’aménagement particulier sont à
présenter au collège des bourgmestre et échevins, sous peine de forclusion. Selon une jurisprudence
des juridictions administratives devenue constante, le recours introduit devant le juge administratif
contre un projet d’aménagement particulier n’est recevable qu’à condition de l’épuisement de la
procédure non contentieuse de réclamation prévue par l’article 30 de la loi du 19 juillet 2004
impliquant en particulier que l’omission d’emprunter la voie de la réclamation à adresser au collège
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des bourgmestre et échevins à l’encontre du projet d’aménagement particulier, entraîne
l’irrecevabilité omisso medio du recours devant le juge administratif11.
Dès lors, un recours contentieux n’ayant pas été précédé d’une réclamation devant le collège
des bourgmestre et échevins est irrecevable.
Force est au tribunal de constater que l’article 30 de la loi du 19 juillet 2004 ne réglemente
pas le contenu de la réclamation à adresser au collège échevinal, outre la précision qu’elle doit
contenir les objections et observations de la personne concernée. Dès lors, à défaut de disposition
expresse en ce sens, l’introduction valable d’une réclamation n’est pas conditionnée par
l’indication correcte de sa base légale. Au contraire, au vu de la finalité de la procédure
précontentieuse de réclamation, qui est de voir disparaître, au cours de l’élaboration du PAP, les
réclamations solutionnées, tout en ne laissant subsister que celles maintenues et réitérées, lesquelles
sont partant seules susceptibles d’être portées devant les juridictions de l’ordre administratif12, il
suffit que le libellé de la réclamation permette d’identifier son auteur, de même que le projet
d’aménagement particulier visé et fasse ressortir des observations et/ou des objections formulées
par la personne concernée à l’encontre du projet en question.
En l’espèce, le courrier précité du litismandataire du demandeur du 29 juin 2015 précise
expressément qu’il est rédigé au nom de Monsieur ..... et il en ressort sans équivoque que ce dernier
s’opposait à l’adoption du projet d’aménagement particulier litigieux, au motif que les parcelles
faisant l’objet de ce dernier seraient situées en zone inondable, de sorte que la mise en œuvre dudit
projet risquerait de lui causer un préjudice, en sa qualité de propriétaire de la parcelle adjacente.
Le tribunal en déduit qu’en adressant ce courrier au collège échevinal, le demandeur a
manifestement introduit une réclamation, au sens de l’article 30 de la loi du 19 juillet 2004, à
l’encontre du projet d’aménagement particulier faisant l’objet des décisions déférées, nonobstant
la référence erronée à l’article 13 de cette même loi.
Le moyen d’irrecevabilité omissso medio sous examen encourt, dès lors, le rejet.
Madame ..... soulève encore l’irrecevabilité du recours pour défaut d’intérêt à agir dans le
chef du demandeur, au motif que Monsieur ..... ne justifierait pour aucun des moyens invoqués
d’un intérêt personnel distinct de l’intérêt général et resterait en défaut de justifier dans quelle
mesure la réalisation du PAP lui causerait grief ou aggraverait sa situation personnelle.
Le demandeur réfute ce moyen d’irrecevabilité, en faisant valoir que le terrain abritant la
maison d’habitation lui appartenant serait adjacent à ceux couverts par le PAP. Ces derniers, qui
seraient actuellement situés en dessous du niveau de la rue traversant le lieu-dit « ..... », seraient
régulièrement sujets à des inondations et feraient fonction de zone tampon et de rétention des eaux
de pluie et des eaux de crue du ruisseau ....., faute de canalisation publique suffisante. Or, le PAP
litigieux prévoirait d’élever le niveau des terrains concernés au même niveau que ladite rue, de
sorte que la maison d’habitation de Monsieur ..... serait davantage exposée aux inondations, alors
11 Trib. adm., 10 juillet 2014, n° 32627 du rôle, confirmé par Cour adm., 4 juin 2015, n° 35035C du rôle, Pas. adm.
2017, V° Urbanisme, n° 555. 12 Trib. adm., 28 juin 2018, n° 39248 du rôle, disponible sur www.jurad.etat.lu.
10
que « (…) l’immense volume d’eau actuellement retenu par les près ne le sera[it] plus et
traversera[it] les zones d’habitation situées aux alentours (…) ». Le demandeur ajoute que le
rapport de la société ....., tel que versé par Madame ....., serait partiel, non pertinent et non concluant
et que les mesures y préconisées ne sauraient remédier aux « (…) diverses causes d’inondations
qui [le] toucheraient (…) et risque[raient] incontestablement de les aggraver (…) ».
Madame ..... conteste cette argumentation du demandeur, en faisant valoir que l’intérêt à
agir ne se déduirait ni de la seule situation de voisin, ni de la situation existante avant l’exécution
d’une autorisation administrative, mais des conséquences qu’aurait l’exécution d’une autorisation
administrative sur la situation du demandeur par rapport à sa situation initiale. Or, Monsieur .....
resterait en défaut de prouver une aggravation de sa situation personnelle du fait de l’exécution du
PAP. L’argumentation non autrement étayée du demandeur ayant trait au risque d’inondation
résultant d’un relèvement du niveau des terrains couverts par le PAP au même niveau que la rue
longeant la maison lui appartenant serait insuffisante à cet égard, alors qu’elle serait contredite par
les mesures d’assainissement telles que proposées par la société .....dans sa « Demande
d’autorisation selon la loi du 19 décembre 2008 concernant la protection et gestion des eaux —
Evacuation/Ecoulement des eaux superficielles vers ..... » et approuvées par le ministre de
l’Environnement. Il en serait de même en ce qui concerne l’argumentation de Monsieur ..... selon
laquelle la réalisation des travaux prévus ne ferait que réduire à 127 m3 la capacité de rétention
d’eau et augmenter le nombre de mètres cubes d’eaux à évacuer résultant des eaux usées de 14
ménages supplémentaires, de sorte à aggraver la situation existante. Madame ..... conclut que dans
la mesure où elle aurait établi que l’exécution du PAP litigieux conduirait à une amélioration de la
situation de Monsieur ....., le recours devrait être déclaré irrecevable pour défaut d’intérêt à agir
dans le chef de ce dernier. Cette conclusion ne serait pas ébranlée par le fait que tant la commune
de Frisange que le ministre auraient « (…) accepté les réclamations de la partie demanderesse
(tout en les déclarant non fondées), alors que la loi ne leur accorde[rait] pas le pouvoir d’apprécier
l’intérêt à agir des réclamants (…) ». En tout état de cause, il ne serait pas interdit de soulever le
défaut d’intérêt à agir pour la première fois au cours de la procédure contentieuse.
Le demandeur insiste sur le fait qu’en cas de fortes pluies, le réseau d’assainissement de la
commune de Frisange serait largement insuffisant pour évacuer les eaux pluviales, de sorte que les
parcelles couvertes par le PAP feraient office de cuvettes et retiendraient les eaux pluviales au point
de former un étang d’au moins 4500 m3. Or, la « Demande d’autorisation selon la loi du 19
décembre 2008 concernant la protection et gestion des eaux — Evacuation/Ecoulement des eaux
superficielles vers ..... » invoquée par Madame ..... ne porterait nullement sur les capacités
d’évacuation du réseau d’assainissement de la commune de Frisange, mais seulement sur celles du
système d’assainissement propre au PAP litigieux. L’approbation, par le ministre de
l’Environnement, des mesures d’assainissement préconisées par la société .....serait, dès lors,
dépourvue de pertinence et ferait, d’ailleurs, l’objet d’un recours contentieux séparé. Le demandeur
insiste encore sur le fait que ce serait précisément en raison du risque d’inondation des caves et des
sous-sols des maisons situées au lieu-dit « ..... » que les maisons projetées par le PAP litigieux
seraient conçues sans un niveau en sous-sol. Or, sa maison d’habitation serait dotée d’une cave, de
sorte que sa situation serait aggravée en cas d’exécution dudit PAP.
11
Il ressort de la jurisprudence de la Cour administrative13, rendue à propos de PAP adoptés
selon la procédure applicable avant la modification de la loi du 19 juillet 2004 par la loi du 28
juillet 2011 – laquelle comprenait une procédure précontentieuse d’aplanissement des difficultés
par le biais de réclamations à introduire, d’abord auprès du collège échevinal et, ensuite, auprès du
ministre –, que sous l’empire de cette ancienne législation, le recours introduit devant le juge
administratif contre un PAP n’était recevable qu’à condition de l’épuisement de cette procédure
non contentieuse de réclamation, impliquant qu’en particulier, l’omission d’emprunter la voie de
la réclamation à adresser au gouvernement à l’encontre de la délibération portant adoption d’un
projet entraînait l’irrecevabilité omisso medio du recours devant le juge administratif. Cette même
jurisprudence admettait qu’en contrepartie, le réclamant débouté disposait – peu importe que sa
réclamation ait été déclarée irrecevable ou non fondée par le ministre – d’un intérêt à voir vérifier
la légalité de la décision ministérielle prise à son encontre et, plus loin, de la délibération
communale ainsi approuvée, de sorte que son recours en annulation était à déclarer recevable sous
l’aspect de l’intérêt à agir au-delà de toutes autres considérations, fussent-elles du domaine
politique.
Il est exact que depuis la modification législative opérée par la loi du 28 juillet 2011, la
procédure précontentieuse d’aplanissement des difficultés prévue par l’article 30 de la loi du 19
juillet 2004 ne prévoit plus qu’une seule étape, consistant en des observations et objections à
introduire auprès du collège échevinal et à trancher par le conseil communal quant à leur
recevabilité et quant à leur bien-fondé, dans le cadre de sa décision sur l’adoption ou le rejet du
projet, telle que prévue par l’alinéa 10 dudit article 30, de sorte que la loi ne prévoit plus la
possibilité pour les administrés d’introduire une réclamation auprès du ministre.
Il n’en reste pas moins qu’il ressort de la jurisprudence des juridictions administratives14
que nonobstant cette modification législative, la recevabilité du recours contentieux contre un PAP
est toujours conditionnée par l’épuisement de cette procédure précontentieuse, impliquant en
particulier que l’omission d’emprunter la voie de la réclamation à adresser au collège des
bourgmestre et échevins à l’encontre du projet d’aménagement particulier entraîne l’irrecevabilité
omisso medio du recours devant le juge administratif, tel que précisé ci-avant.
Ainsi, la jurisprudence citée ci-avant, rendue à propos de PAP adoptés selon la procédure
applicable avant la modification de la loi du 19 juillet 2004 par la loi du 28 juillet 2011 – aux termes
de laquelle, en contrepartie de l’obligation d’épuisement de la procédure précontentieuse de
réclamation, la qualité de réclamant débouté conférait au demandeur un intérêt suffisant à agir au
contentieux – est transposable à des PAP adoptés après la prise d’effet de cette modification
législative, tels que le PAP litigieux.
Le tribunal retient, dès lors, que l’administré ayant introduit une réclamation à l’encontre
d’un projet d’aménagement particulier auprès du collège échevinal dispose – peu importe que sa
13 Cour. adm., 19 janvier 2012, n° 28915C du rôle, Pas. adm. 2017, V° Urbanisme, n° 28915C ; Voir aussi, pour des
décisions rendues en matière de plan d’aménagement général : Cour adm., 17 avril 2008, n° 23846C du rôle, Pas. adm.
2017, V° Urbanisme, n° 223 et les autres références y citées, ainsi que trib. adm., 24 mars 2004, n° 16556 du rôle, Pas.
adm. 2017, V° Procédure contentieuse, n° 95 et les autres références y citées, de même que trib. adm., 8 décembre
2014, n° 33918 du rôle, confirmé par Cour. adm., 12 mai 2015, n° 35730C du rôle, Pas. adm. 2017, V° Procédure
contentieuse, n° 93. 14 Voir notes de bas de page n° 11 et 12.
12
réclamation ait été déclarée irrecevable ou non fondée par le conseil communal – d’un intérêt à
voir vérifier la légalité de la décision de ce dernier prise à son encontre et, plus loin, de la décision
ministérielle portant approbation de la décision en question, de sorte que son recours en annulation
est recevable sous l’aspect de l’intérêt à agir au-delà de toutes autres considérations – fussent-elles
du domaine politique.15
En l’espèce, il est constant que le conseil communal a, par sa décision déférée du 8 octobre
2015, adopté le projet d’aménagement particulier litigieux, tout en rejetant la réclamation introduite
par Monsieur ....., cette décision ayant été approuvée par le ministre, par sa décision déférée du 5
janvier 2016.
Eu égard aux considérations qui précèdent, le demandeur dispose partant en l’espèce d’un
intérêt à agir suffisant par le seul fait que sa réclamation a été rejetée par une décision du conseil
communal, approuvée globalement par le ministre, et ce indépendamment de toute autre
considération relative à la question de savoir si son intérêt à agir est réel, né et actuel.
Le moyen d’irrecevabilité afférent encourt, dès lors, le rejet.
Pour le surplus, Madame ..... se rapporte à prudence de justice quant à la recevabilité du
recours quant au délai et quant à la forme.
La contestation ainsi soulevée est à rejeter, pour les mêmes motifs que ceux développés ci-
avant par rapport à la contestation identique soulevée par le délégué du gouvernement.
A défaut d’autres moyens d’irrecevabilité, le tribunal retient que le recours en annulation
est à déclarer recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai prévus par la loi.
V) Quant au fond
Il appartient au tribunal de déterminer la suite du traitement des moyens et arguments des
parties compte tenu de la logique juridique dans laquelle ils s’inscrivent, sans être lié par l’ordre
dans lequel les moyens ont été présentés par les parties, l’examen des moyens tenant à la légalité
externe devant précéder celui des moyens tenant à la légalité interne.
Quant à l’absence d’un plan directeur
Dans le cadre de son moyen tiré de la violation de l’article 2 a) de la loi du 19 juillet 2004,
le demandeur invoque le défaut de réalisation d’un plan directeur englobant les terrains situés au
Sud-Est du site du PAP.
Etant donné que cette considération a trait à la régularité formelle de la procédure
d’adoption du PAP, elle relève de la légalité externe des décisions déférées, de sorte à devoir être
analysée avant l’examen du bien-fondé desdites décisions.
15 Voir, en ce sens : Cour adm., 29 janvier 2015, n° 35429C du rôle, disponible sur www.jurad.etat.lu.
13
Le demandeur fait valoir, à cet égard, qu’aux termes de l’avis de la cellule d’évaluation, la
zone « nouveaux quartiers » située en zone destinée à être urbanisée et se trouvant au Sud-Est des
parcelles couvertes par le PAP risquerait d’être hypothéquée, empêchant ainsi une utilisation
rationnelle du sol à cet endroit, le demandeur soulignant que pour cette raison, la cellule
d’évaluation aurait recommandé d’élaborer un plan directeur englobant l’entièreté de la zone
« nouveaux quartiers ».
Madame ....., en tant que partie tierce intéressée, fait valoir que ce serait à tort que le
demandeur soutiendrait qu’un plan directeur englobant l’entièreté des fonds sis dans une zone
destinée à être urbanisée et devant assurer un développement rationnel des terrains situés au Sud-
Est de ceux couverts par le PAP ferait défaut, étant donné qu’un tel plan directeur figurerait dans
le rapport justificatif d’août 2015.
Elle ajoute que le PAG de la commune de Frisange reposerait sur la loi modifiée du 12 juin
1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes, ci-après désignée
par « la loi du 12 juin 1937 » et fait valoir qu’aucune des hypothèses prévues par l’article 108ter
(3) de la loi du 19 juillet 2004 ne serait donnée en l’espèce, de sorte qu’un plan directeur n’aurait
pas dû être établi. Par ailleurs, si, dans son avis du 15 juillet 2015, la cellule d’évaluation a
recommandé d’élaborer un « (…) plan directeur englobant l’entièreté de la zone « nouveaux
quartiers », afin de pouvoir garantir un développement rationnel des terrains y inclus (…) », cette
recommandation ne reposerait sur aucune exigence légale, de sorte qu’il ne s’agirait que d’une
incitation à élaborer un concept d’ensemble, sans viser le plan directeur, tel que prévu par la loi.
Le demandeur rétorque que le PAP litigieux couvrirait des terrains enclavés dans un tissu
urbain existant avec lequel il faudrait garantir les jonctions fonctionnelles, respectivement
l’intégration urbanistique, de sorte à tomber dans le champ d’application de l’article 108ter (3) de
la loi du 19 juillet 2004.
La partie communale fait valoir qu’il se dégagerait de l’article 108ter de la loi du 19 juillet
2004 que l’exigence d’établir un plan directeur ne viserait que les communes dont le PAG aurait
d’ores et déjà fait l’objet d’une refonte globale, sur base de ladite loi du 19 juillet 2004. Or, le
PAG de la commune de Frisange reposerait toujours sur la loi du 12 juin 1937, de sorte que
l’obligation d’établissement d’un plan directeur ne serait pas applicable en l’espèce.
L’article 108ter de la loi du 19 juillet 2004 est libellé comme suit :
« (1) La procédure d’adoption des projets d’aménagement général, dont la refonte
complète a été entamée par la saisine de la commission d’aménagement avant le 1er août 2011,
peut être continuée et achevée conformément aux dispositions du Titre 3 de la présente loi qui
étaient en vigueur avant le 1er août 2011.
La procédure d’adoption des projets d’aménagement particulier, qui a été entamée avant
le 1er août 2011, peut être continuée et achevée conformément aux dispositions du Titre 4 de la
présente loi qui étaient en vigueur avant le 1er août 2011.
14
(2) La mise en œuvre des plans d’aménagement général visés au paragraphe qui précède,
ainsi que des plans d’aménagement général dont la refonte complète a été achevée au 1er août
2011 se fait comme suit:
Le plan d’aménagement particulier «nouveau quartier» a pour objet d’exécuter et de
préciser le plan d’aménagement général à l’exception des terrains bénéficiant des dérogations
prévues par l’alinéa qui suit et des fonds faisant l’objet d’un plan d’occupation du sol au sens de
l’article 11, alinéa 3 de la loi précitée du 21 mai 1999, ainsi que des fonds situés dans la zone
verte telle qu’arrêtée par l’article 5 de la loi précitée du 19 janvier 2004.
Pour les communes qui ont défini dans leur plan d’aménagement général, conformément
aux dispositions de la présente loi qui étaient en vigueur avant le 1er août 2011, des terrains ou
ensembles de terrains auxquels l’obligation d’un plan d’aménagement particulier n’est pas
applicable, le bourgmestre peut directement délivrer une autorisation de construire pour ces
terrains ou ensembles de terrains dans les conditions suivantes:
– les projets de construction à réaliser doivent s’adapter à leur voisinage immédiat en ce
qui concerne le mode et degré d’utilisation du sol des terrains concernés, le mode de construction,
leurs dimensions et leur emprise au sol;
– les terrains concernés doivent être situés en bordure d’une voie entièrement équipée sur
base de l’article 23, alinéa 2 de la présente loi, à laquelle leur accès est garanti et doivent pouvoir
être raccordés aux réseaux d’infrastructure existants;
– les projets de construction à réaliser ne compromettent pas l’aménagement des terrains
adjacents.
Si les trois conditions prémentionnées ne sont pas remplies cumulativement, toute
autorisation de construire doit être précédée par un plan d’aménagement particulier «nouveau
quartier» établi et mis en œuvre conformément aux dispositions de la présente loi.
Les plans ou projets d’aménagement général visés par le présent article peuvent être
modifiés ou complétés conformément aux dispositions de la présente loi.
(3) Au cas où le plan d’aménagement particulier «nouveau quartier» visé à l’alinéa qui
précède, ne couvre qu’une partie d’un ensemble de terrains destinés à être urbanisés et non encore
viabilisés, ou encore s’il couvre des terrains enclavés dans un tissu urbain existant avec lequel il
faut garantir les jonctions fonctionnelles respectivement l’intégration urbanistique, le rapport
justificatif est complété par un plan directeur couvrant ce plan d’aménagement particulier ainsi
que les terrains auxquels il doit être intégré. (…) ».
Force est au tribunal de constater que l’article 108ter (3) de la loi du 19 juillet 2004 impose
l’élaboration d’un plan directeur, non pas pour tout PAP, mais uniquement pour « (…) le plan
d’aménagement particulier «nouveau quartier» visé à l’alinéa qui précède (…) ».
Ainsi, l’obligation d’élaborer un plan directeur ne s’applique qu’aux PAP « nouveau
quartier » visés à l’article 108ter (2) de la loi du 19 juillet 2004. Il ressort du libellé de cette
15
dernière disposition légale que sont ainsi visés les PAP « nouveaux quartiers » mettant en œuvre
un PAG qui a fait l’objet d’une refonte complète ayant été soit entamée avant le 1er août 2011 par
la saisine de la commission d’aménagement, soit achevée à cette dernière date.
Or, en l’espèce, aucune de ces deux hypothèses n’est vérifiée, étant donné que le PAP
litigieux s’inscrit dans le cadre d’un PAG n’ayant pas encore fait l’objet d’une refonte globale sur
base de la loi du 19 juillet 2004.
Il s’ensuit que l’élaboration d’un plan directeur n’était pas requise, de sorte que le défaut
allégué d’un tel plan est sans incidence sur la légalité des décisions déférées. Les contestations
afférentes du demandeur encourent, dès lors, le rejet.
Quant au moyen tiré de la violation de l’article 23 de la loi modifiée du 19 décembre
2008 relative à l’eau, ci-après désignée par « la loi du 19 décembre 2008 »
Le demandeur soutient que les décisions déférées devraient être annulées pour violation de
l’article 23 de la loi du 19 décembre 2008.
A cet égard, il fait valoir que les parcelles couvertes par le PAP litigieux seraient situées en
zone inondable, au sens de l’article 2 (48) de la loi du 19 décembre 2008, en ce qu’elles formeraient
une aire naturelle ayant la capacité de retenir temporairement, d’une part, les eaux de crues ayant
débordé du ruisseau ..... et de l’étang environnant et, d’autre part, les eaux de ruissellement des
terrains agricoles situés en amont du site du PAP. Il s’ensuivrait que l’autorisation visée par l’article
23 (1) e) de la loi du 19 décembre 2008 aurait été requise. Or, celle-ci ferait défaut, de sorte que
les décisions déférées devraient encourir l’annulation, le demandeur citant encore, dans ce
contexte, l’article 39 (4) de la loi du 19 décembre 2008.
Il se dégagerait encore de l’article 23 (1) f) de la loi du 19 décembre 2008 que toutes
mesures ayant une influence sur l’infiltration naturelle et toutes mesures de collecte des eaux de
ruissellement dans les zones soumises à l’élaboration d’un PAP requerraient l’autorisation du
ministre de l’Environnement. Or, cette autorisation ferait défaut en ce qui concerne le bassin à ciel
ouvert, le remblai, le fossé contournant le site du PAP et la canalisation du ruisseau ....., tels que
prévus par le PAP, de sorte que les décisions déférées devraient encourir l’annulation.
Par ailleurs, les décisions déférées devraient être annulées, étant donné que l’infrastructure
d’assainissement du PAP n’aurait pas fait l’objet de l’autorisation prévue par l’article 23 (1) g) de
la loi du 19 décembre 2008.
Les parties défenderesses et tierce intéressée concluent au rejet du moyen tiré de la violation
de l’article 23 de la loi du 19 décembre 2008.
Le délégué du gouvernement soutient que les autorisations prévues par ladite disposition
légale constitueraient des autorisations individuelles devant, le cas échéant, être sollicitées par
l’initiateur du PAP, une fois que ce dernier aurait été dûment approuvé par l’autorité de tutelle.
Elles auraient pour objet d’assurer la bonne exécution du PAP et il n’appartiendrait pas au ministre,
exerçant son pouvoir de tutelle conformément à l’article 30 de la loi du 19 juillet 2004, d’autoriser,
16
respectivement d’approuver des travaux, aménagements ou autres mesures envisagées dans des
zones inondables.
La commune de Frisange, rejointe sur ce point par Madame ....., en se prévalant d’une
jurisprudence des juridictions administratives, soutient également que les autorisations prévues par
l’article 23 de la loi du 19 décembre 2008 se situeraient, non pas dans le cadre de l’adoption d’un
PAP, mais dans le cadre de son exécution, de sorte que le défaut éventuel de ces autorisations serait
sans incidence sur la légalité des décisions déférées.
Dans son mémoire en réplique, le demandeur fait valoir que la loi ne prévoirait pas que les
autorisations visées par l’article 23 de la loi du 19 décembre 2008 ne seraient données que
postérieurement à l’adoption d’un PAP et préalablement à son exécution.
Aux termes de l’article 23 de la loi 19 décembre 2008, « (1) Sont soumis à autorisation par
le ministre [i.e. le membre du Gouvernement qui a la gestion de l’eau dans ses attributions]: (…)
e) tous travaux, aménagements, ouvrages et installations dans les zones riveraines visées à
l’article 26, paragraphe (3) ou dans les zones inondables visées aux articles 38 et 39;
f) toutes mesures ayant une influence sur l’infiltration naturelle et toutes mesures de collecte des eaux de ruissellement dans les zones soumises à l’élaboration d’un plan
d’aménagement particulier «nouveau quartier» conformément aux dispositions de la loi modifiée
du 19 juillet 2004 précité,
g) toute infrastructure d’assainissement dans les zones soumises à l’élaboration d’un plan d’aménagement particulier «nouveau quartier» conformément aux dispositions de la loi modifiée
du 19 juillet 2004 précité, (...) ».
Force est au tribunal de constater que les autorisations du ministre ayant la gestion de l’eau dans ses compétences requises par l’article 23 e), f) et g) de la loi du 19 décembre 2008 ne font
pas partie intégrante du processus d’adoption d’un PAP. En effet, l’obtention desdites
autorisations, ainsi que la procédure d’adoption du PAP sont deux procédures distinctes et le
défaut éventuel des autorisations exigées en vertu de l’article 23 e), f) et g) de la loi du 19 décembre 2008 n’affecte ni la légalité de la décision du conseil communal portant adoption d’un PAP, ni
celle de la décision ministérielle portant approbation de cette décision16, chaque autorité statuant
dans son propre domaine de compétence.
Le moyen afférent encourt, dès lors, le rejet.
Le tribunal relève ensuite que l’article 39 de la loi du 19 décembre 2008, auquel le
demandeur se réfère encore, est libellé comme suit : « (1) Sans préjudice des dispositions visées au
paragraphe (4), il est interdit dans les zones inondables déterminées au titre de l’article 38:
a) de définir dans le cadre du plan d’aménagement général de nouvelles zones urbanisées
ou destinées à être urbanisées dans lesquelles peuvent habiter des personnes ou dans lesquelles
peuvent être aménagés des installations, ouvrages ou constructions diminuant le volume de
rétention ou risquant de créer un dommage pour les personnes, les biens ou l’environnement;
16 Trib. adm., 28 mars 2013, n° 29749 du rôle, confirmé par Cour adm., 14 novembre 2013, n° 32501C du rôle,
disponibles sur www.jurad.etat.lu.
17
(…)
(4) Par dérogation aux dispositions du paragraphe (1), point a), une nouvelle zone
urbanisée ou destinée à être urbanisée peut être désignée ou une zone urbanisée ou destinée à être
urbanisée existante peut être agrandie ou changée d’affectation, si le volume de rétention perdu
peut être compensé et s’il n’en résulte aucune augmentation du risque de dommages pour les
personnes, les biens ou l’environnement liés à des inondations, ni à l’intérieur de la zone en
question, ni dans des zones inondables situées en amont ou en aval. Ces mesures sont subordonnées
à une autorisation du ministre. (…) ».
Force est au tribunal de constater qu’indépendamment de la question – litigieuse – de savoir
si le site du PAP se trouve en zone inondable, la référence, faite par le demandeur, audit article 39
de la loi du 19 janvier 2004 est à écarter pour défaut de pertinence, étant donné que les décisions
déférées n’ont pour objet ni la désignation d’une nouvelle zone urbanisée ou destinée à être
urbanisée, ni l’agrandissement, ni le changement d’affectation d’une zone urbanisée ou destinée à
être urbanisée existante, étant donné que les parcelles couvertes par le PAP litigieux sont d’ores et
déjà classées en zone d’habitation « nouveaux quartiers », soit en zone destinée à être urbanisée,
par le PAG en vigueur de la commune de Frisange, sans que ce classement ne soit affecté par les
décisions déférées.
Il s’ensuit que le moyen afférent est à rejeter.
Quant au moyen tiré de la violation de l’article 17 de la loi modifiée du 19 janvier 2004
concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, ci-après désignée par « la
loi du 19 janvier 2004 »
Le demandeur fait ensuite valoir qu’il se dégagerait de la strategische Umweltprüfung, en
abrégé « SUP », réalisée dans le cadre du projet de refonte globale du PAG de la commune de
Frisange, que de part et d’autre du chemin rural « ..... » se trouveraient un alignement d’arbres et
une haie constitutifs de biotopes protégés par l’article 17 de la loi du 19 janvier 2004, dont le PAP
prévoirait la destruction partielle, sans que le ministre de l’Environnement n’ait accordé de
dérogation à l’interdiction de destruction d’un tel biotope, telle que prévue par ledit article 17 de la
loi du 19 janvier 2004, de sorte que les décisions déférées devraient encourir l’annulation.
Les parties défenderesses concluent au rejet du moyen tiré de la violation de l’article 17 de
la loi du 19 décembre 2008.
Le délégué du gouvernement fait valoir que le demandeur opèrerait une confusion manifeste
entre l’acte réglementaire approuvé par le ministre, à savoir le PAP, et les autorisations
subséquentes, devant être délivrées par l’autorité compétente, à savoir le ministre de
l’Environnement, en fonction des contraintes environnementales pouvant être identifiées sur le
terrain couvert par ledit PAP. Ainsi, le ministre ne saurait violer l’article 17 de la loi du 19 janvier
2004, lorsqu’il se contenterait d’approuver un document d’orientation urbanistique reprenant et
précisant le PAG, qui ne serait, de par sa nature, pas susceptible de nuire à des prétendus biotopes
localisés sur le terrain devenu potentiellement constructible. Ce ne serait qu’une fois que le PAP
18
serait approuvé et que l’exécution de ce dernier prendrait forme par le biais notamment du début
des travaux de viabilisation que l’article 17 aurait vocation à s’appliquer.
La commune de Frisange fait plaider que l’autorisation ministérielle exigée par l’article 17
de la loi du 19 janvier 2004 ne serait requise qu’au moment de la mise en œuvre du PAP, et non
pas au moment de son adoption.
Dans son mémoire en réplique, le demandeur rétorque que rien ne justifierait que
l’autorisation du ministre de l’Environnement requise aux fins de procéder à la destruction de
biotopes ne serait requise que postérieurement à l’adoption du PAP.
Aux termes de l’article 17 de la loi du 19 janvier 2004, « Il est interdit de réduire, de
détruire ou de changer les biotopes tels que mares, marécages, marais, sources, pelouses sèches,
landes, tourbières, couvertures végétales constituées par des roseaux ou des joncs, haies,
broussailles ou bosquets. (…)
Le Ministre [i. e. le membre du gouvernement ayant la protection de l’environnement dans
ses attributions] peut exceptionnellement déroger à ces interdictions pour des motifs d’intérêt
général. (…) ».
Force est au tribunal de constater que l’autorisation du ministre de l’Environnement, requise
en vue de la destruction de biotopes, ne s’inscrit pas dans le cadre du processus d’adoption d’un
PAP. L’obtention de ladite autorisation ainsi que la procédure d’adoption du PAP sont deux
procédures distinctes et le défaut éventuel de l’autorisation exigée en vertu de l’article 17 de la loi
du 19 janvier 2004 n’affecte ni la légalité de la décision du conseil communal portant adoption
d’un PAP, ni celle de la décision ministérielle portant approbation de cette décision17, mais a pour
conséquence d’empêcher l’exécution matérielle du PAP, seule susceptible d’avoir une incidence
concrète sur des biotopes protégés par ledit article 17 de la loi du 19 janvier 2004.
Le moyen tiré de la violation de cette dernière disposition légale, au motif de l’absence de
l’autorisation du ministre de l’Environnement y prévue, encourt, dès lors, le rejet.
Quant au moyen tiré de la non-conformité du PAP au PAG
Le demandeur fait valoir qu’il se dégagerait du PAG de la commune de Frisange que les
parcelles couvertes par le PAP litigieux seraient classées en zone « R II U », de sorte que les
constructions y admises devraient être des maisons (i) unifamiliales, (ii) avec jardin et (iii) isolées,
le PAG prévoyant la possibilité d’y ériger des maisons bi-familiales, à condition que soit réalisé au
préalable un PAP.
Or, le PAP litigieux prévoirait la réalisation de huit maisons jumelées, de trois maisons en
bande et uniquement de trois maisons isolées.
17 Voir, par analogie : Trib. adm., 28 mars 2013, n° 29749 du rôle, confirmé par Cour adm., 14 novembre 2013, n°
32501C du rôle, disponibles sur www.jurad.etat.lu.
19
Ainsi, l’utilisation du sol prévue par le PAP ne serait pas conforme à celle prescrite par le
PAG, de sorte que les décisions déférées devraient encourir l’annulation pour violation de l’article
26 de la loi du 19 juillet 2004.
Les parties défenderesses et tierce intéressée concluent au rejet de ce moyen.
La partie communale, rejointe sur ce point par la partie étatique, fait d’abord valoir qu’en
vertu de l’article 108bis (2) de la loi du 19 juillet 2004, l’article 26 de la même loi, dont se prévaut
le demandeur, ne serait pas applicable au cas d’espèce.
Après avoir souligné qu’il se dégagerait tant des décisions déférées que de l’avis de la
cellule d’évaluation que le PAP litigieux « (…) n’a[urait] pas suscité de remarques concernant sa
conformité au PAG actuellement en vigueur dans la commune de Frisange (…) », elle soutient,
ensuite, en se prévalant des dispositions de l’article 108bis (1), alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004,
que dans la mesure où ledit PAG serait encore basé sur la loi du 12 juin 1937 et où le PAP litigieux
aurait été adopté conformément à l’article 30 de la loi du 19 juillet 2004, le PAP en question
pourrait, « (…) le cas échéant (…) », modifier ponctuellement le PAG en vigueur. Sur ce dernier
point, elle cite un extrait de son « Avis sur les plans directeurs sectoriels » du 4 novembre 2014 et
fait valoir que la création de nouveaux logements et la diversification de l’offre du logement
visant à atteindre un maximum de personnes de tous les âges seraient non seulement des
objectifs d’intérêt général, mais également des buts qu’un concept d’urbanisation de qualité
devrait viser à atteindre. Elle souligne que les objectifs urbanistiques poursuivis par les auteurs
du PAP auraient été une densification du tissu urbain de la localité de ....., le prolongement du
tissu bâti existant et l’urbanisation de terrains classés en zone constructible par le PAG, répondant
ainsi à la « (…) volonté communale (…) » et augmentant l’offre de logements. Il s’ensuivrait que
même si le PAP litigieux ne correspondait pas tout à fait au PAG actuellement en vigueur,
l’adoption de ce PAP aurait uniquement pour conséquence de modifier ponctuellement le PAG en
vigueur, conformément à l’article 108bis (1), alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004, de sorte le moyen
tiré de la non-conformité du PAP au PAG serait à rejeter.
Quant à l’argumentation du demandeur, développée dans son mémoire en réplique, selon
laquelle les conditions de l’article 108bis (1), alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004 ne seraient pas
remplies en l’espèce, la partie communale fait valoir, dans son mémoire en duplique, qu’à supposer
qu’il y aurait effectivement une modification du PAG par le PAP, celle-ci devrait être qualifiée de
ponctuelle, étant donné que le PAP litigieux ne concernerait qu’une fraction limitée des parcelles
formant la localité de ..... et que le classement des parcelles concernées en zone d’habitation
« nouveaux quartiers » n’en serait pas affecté. Après avoir souligné que le document intitulé
« Analyse de conformité du Projet d’Aménagement Particulier (P.A.P.) « ..... » à ..... avec le Plan
d’Aménagement Général (P.A.G.) de la commune de Frisange », établi par Monsieur .....,
ingénieur-technicien communal, ne contiendrait aucune remarque concernant la conformité du
PAP litigieux au PAG en vigueur, la partie communale insiste sur le fait que l’« (…) éventuelle
modification du PAG (…) » aurait été indispensable pour améliorer la qualité urbanistique du PAP,
notamment, pour atteindre les buts que la commune se serait fixée en matière de logement. Sur ce
point, la commune de Frisange fait plaider qu’il serait évident que les prix de maisons isolées
seraient plus élevés que ceux de maisons jumelées.
20
La partie tierce intéressée fait valoir que ce serait à tort que le demandeur soutiendrait que
le PAP prévoirait huit maisons jumelées, trois maisons en bande et trois maisons isolées, alors qu’il
se dégagerait tant de la partie graphique du PAP que du rapport justificatif afférent que seraient
prévues huit maisons isolées et six maisons jumelées unifamiliales. Ainsi, des maisons en bande
ne seraient pas prévues. Cette notion se définirait, en effet, comme un ensemble de maisons
individuelles de conception analogue, juxtaposées et mitoyennes par tout ou partie de leurs
pignons. Or, aucun des immeubles projetés ne répondrait à cette définition. Comme la notion de
« maison jumelée » pourrait se définir comme visant deux habitations accolées, les immeubles
situés sur les lots …. devraient être qualifiés de maisons jumelées. Les maisons projetées sur les
lots ….. constitueraient manifestement des maisons isolées. Il en serait de même des maisons
prévues sur les lots …., étant donné que leur seul point de rattache avec la construction voisine se
situerait au niveau du garage, ce qui ne les qualifierait ni de maisons en bande, ni de maisons
jumelées. Ainsi, le PAP serait conforme au PAG, ainsi que cela se dégagerait de l’article 2.2 de ce
dernier, qui prévoirait que dans la zone « R II U » seraient admises des maisons isolées, et – à
condition que soit réalisée au préalable un PAP conformément à la loi du 19 juillet 2004 – des
maisons bi-familiales.
A titre subsidiaire, la partie tierce intéressée fait valoir que dans l’hypothèse où le tribunal
devrait arriver à la conclusion que le PAP prévoirait des maisons en bande, une modification
ponctuelle du PAG aurait été introduite, afin d’aboutir à une mixité des typologies des habitats, à
savoir des maisons isolées, jumelées et en bande, telle qu’elle serait préconisée par l’article 2 d) de
la loi du 19 juillet 2004 et par l’article 9 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 concernant le
contenu de l’étude préparatoire d’un plan d’aménagement général d’une commune.
En tout état de cause, le degré d’occupation du sol fixé par la PAP serait conforme aux
prescriptions afférentes du PAG.
A titre liminaire, le tribunal relève qu’il est certes exact qu’en vertu de l’article 108bis (2)
de la loi du 19 juillet 2004, l’article 26 de la même loi, invoqué, dans ce contexte par le demandeur,
n’est pas applicable pour la mise en œuvre d’un PAG fondé sur la loi du 12 juin 1937, tel que celui
de la commune de Frisange. Ce seul constat n’est, cependant, pas suffisant pour écarter le moyen
du demandeur, étant donné, d’une part, que ce dernier a expressément invoqué la non-conformité
du PAP au PAG et, d’autre part, qu’en vertu de l’article 25, alinéa 1er de loi du 19 juillet 2004, dont
l’application pour la mise en œuvre d’un PAG fondé sur la loi du 12 juin 1937 n’est pas exclue par
l’article 108bis (2) de ladite loi du 19 juillet 2004, les PAP précisent et exécutent le PAG, de sorte
à devoir être conformes à ce dernier, sous réserve de l’application des dispositions de l’article
108bis (1), alinéa 2 de la même loi permettant, sous certaines conditions, à un PAP de modifier ou
de compléter ponctuellement un PAG adopté sur base de la loi la loi du 12 juin 1937.18
Le tribunal relève ensuite qu’il est constant en cause pour ressortir tant des explications
concordantes des parties que de la partie graphique du PAG de la commune de Frisange que les
parcelles couvertes par le PAP sont classées par ledit PAG en « zone d’habitation – nouveaux
quartiers », de type « R II U ». Aux termes de l’article 2.41 de la partie écrite du PAG, les « (…)
nouveaux quartiers sont certaines parties de secteurs d’habitation qui sont soumises à l’obligation
d’être couvertes par un projet d’aménagement particulier suivant la loi du 19 juillet 2004 (…) et
18 Trib. adm., 14 décembre 2017, n° 38474 du rôle, disponible sur www.jurad.etat.lu.
21
ses règlements d’application (PAP) couvrant soit tout le secteur, soit au moins un hectare du
secteur indiqué dans la partie graphique du PAG comme nouveau quartier ». Aux termes de
l’article 2.1 de la partie écrite du PAG, les zones désignées dans la partie graphique par la lettre
« R » sont les « quartiers résidentiels », lesquels constituent, d’après l’article 2.11 de ladite partie
écrite, « (…) les parties du territoire de la commune destinées à grouper des habitants des
commerces et des constructions servant à abriter les activités qui sont le complément naturel des
habitations (…) ». Aux termes de l’article 2.23 de la partie écrite du PAG, l’indication, dans la
partie graphique du PAG, de la lettre romaine « II » signifie que sur les parcelles concernées, sont
autorisés deux niveaux pleins destinés entièrement ou partiellement à l’habitation. Quant au régime
juridique applicable aux parcelles marquées dans la partie graphique du PAG par la lettre « U »,
point litigieux en l’espèce, il y a lieu de se référer à l’article 2.22 de la partie écrite du PAG, aux
termes duquel « (…) Le règlement de construction prévoit (…) la construction de maison à
caractère unifamiliale avec jardin, isolées indiquée sur plan avec la lettre « U ». Des maisons bi-
familiales y sont également admises à condition que soit réalisé au préalable un plan
d’aménagement particulier suivant la loi du 19 juillet 2004 (…) et ses règlements d’application
(PAP) ».
Il s’ensuit qu’un PAP couvrant des parcelles classées en zone « R II U », tel que le PAP
litigieux, est seulement conforme au PAG, en ce qui concerne les types de maisons prévues, s’il
s’agit soit de maisons unifamiliales isolées avec jardin, soit de maisons bi-familiales.
Le demandeur soutient que le PAP ne serait pas conforme au PAG, en ce qu’il prévoirait, à
côté de trois maisons isolées, huit maisons jumelées et trois maisons en bande, tandis que la partie
tierce intéressée soutient que le PAP prévoirait cinq maisons jumelées et huit maisons isolées.
Force est au tribunal de constater que la partie écrite du PAG ne contient pas de définition
des notions de « maison unifamiliale isolée » et de « maison bi-familiale », ni d’ailleurs des notions
de « maison en bande » et de « maison jumelée », auxquelles les parties se réfèrent encore. Dans
ces circonstances et à défaut de définition légale de ces notions, le tribunal se réfère aux définitions
figurant dans l’annexe II du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 concernant le contenu du
plan d’aménagement particulier «quartier existant» et du plan d’aménagement particulier «nouveau
quartier» portant exécution du plan d’aménagement général d’une commune, ci-après désigné par
« le règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 ». S’il est exact que ce règlement grand-ducal
concerne, non pas le contenu des PAG, mais celui des PAP, cette démarche se justifie néanmoins
dans une optique de cohérence terminologique de la réglementation urbanistique communale et,
par conséquent, de sécurité juridique, en ce qu’elle permet d’éviter que des termes identiques
employés respectivement par le PAG et le PAP répondent à des définitions distinctes selon
l’instrument réglementaire en question.
Aux termes de cette annexe II, constitue une maison unifamiliale « (…) une construction
servant au logement permanent et comprenant en principe une seule unité de logement (…) », une
maison bi-familiale étant « (…) une construction servant au logement permanent et comprenant
deux unités de logement (…) ». Constitue une maison en bande « (…) toute construction faisant
partie d’un ensemble de minimum trois maisons accolées (…) », tandis qu’est une maison jumelée
« (…) toute construction faisant partie d’un ensemble de deux maisons accolées (…) ». La notion
de « maison isolée » n’étant pas définie, le tribunal retient qu’est une maison isolée une maison ne
22
pouvant être qualifiée ni de maison jumelée ni de maison en bande, soit une maison qui ne fait pas
partie d’un ensemble de maisons accolées.
Force est d’abord au tribunal de constater, au vu de la partie graphique du PAP, qu’aucune
des maisons prévues ne peut être qualifiée de maison bi-familiale, étant donné qu’il ressort de la
légende du PAP, ensemble la représentation schématique du degré d’utilisation du sol par lot, que
chaque lot ne contient qu’une seule unité de logement (« 1-u »). Ainsi, les maisons prévues par le
PAP constituent toutes des maisons unifamiliales.
Le tribunal constate ensuite que seuls les lots n° …. comprennent des maisons isolées, ne
faisant pas partie d’un ensemble de maisons accolées. En effet, les maisons projetées sur les autres
lots font toutes partie d’un tel ensemble de maisons accolées, en ce qu’elles sont accolées à la
construction voisine soit au niveau de leur garage, ainsi que cela est le cas pour les maisons prévues
sur les lots n° ....., soit au niveau d’un mur principal, ainsi que cela est le cas pour les maisons
projetées sur les lots n° ….. . Les maisons prévues sur les lots n° …. font parties d’un ensemble de
deux maisons accolées, de sorte à devoir être qualifiées de maisons jumelées, tandis que les maisons
projetées sur les lots n° …. font partie d’un ensemble de trois maisons accolées, de sorte à devoir
être qualifiées de maisons en bande. La qualification des différentes maisons ainsi retenue par le
tribunal est d’ailleurs celle retenue par les auteurs même du PAP et, dès lors, par les autorités
communales et de tutelle ayant adopté, respectivement approuvé ledit PAP, étant donné qu’il
ressort de la représentation schématique du degré d’utilisation du sol par lot figurant sur la partie
graphique de ce dernier que les types de constructions admis sur les différents lots y sont
désignés comme suit :
- « mj », pour les lots n° ….., ce qui correspond à « maison jumelée », aux termes de la
légende du PAP et de l’article 2.1 de sa partie écrite,
- « mi », pour les lots n° ….., ce qui correspond à « maison isolée », aux termes dudit
article 2.1 de la partie écrite du PAP
et
- « mb », pour les lots n° …., ce qui correspond à « maison en bande », aux termes de la
légende du PAP et de l’article 2.1, précité, de sa partie écrite.
Etant donné que l’article 2.22 de la partie écrite du PAG n’autorise sur les parcelles
couvertes par le PAP que des maisons unifamiliales isolées avec jardin ou des maisons bi-
familiales, que le tribunal vient de retenir qu’aucune des maisons projetées ne peut être qualifiée
de maison bi-familiale et que seules les maisons prévues sur les lots n° …. peuvent être qualifiées
de maisons isolées, le PAP n’est pas conforme au PAG en ce qui concerne les types de maisons
autorisées sur les lots n° ….., lesquelles constituent des maisons jumelées ou en bande.
A titre subsidiaire, les parties défenderesses et tierce intéressée se prévalent des dispositions
de l’article 108bis (1), alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004, aux termes duquel « Les plans ou projets
d’aménagement général fondés sur la loi du 12 juin 1937 précitée peuvent être également modifiés
et complétés ponctuellement par un plan d’aménagement particulier dont le contenu des parties
graphique et écrite correspond à celui du plan d’aménagement particulier «nouveau quartier»
23
établi conformément à la procédure prévue à l’article 30, à condition qu’une telle modification
ponctuelle s’avère indispensable pour améliorer la qualité urbanistique du plan d’aménagement
particulier. ».
Or, dans la mesure où (i) il ressort de l’article 25, alinéa 1er de la loi du 19 juillet 2004 qu’en
principe, un PAP est un instrument juridique d’une hiérarchie inférieure à un PAG, (ii) la possibilité
instaurée par l’article 108bis (1), alinéa 2 de modifier un PAG par un PAP constitue une dérogation
exceptionnelle à la procédure régulière de modification du PAG et (iii) cette dernière procédure
offre davantage de garanties aux administrés que la procédure d’adoption d’un PAP, étant donné
qu’à la différence de cette dernière, elle permet aux personnes intéressées d’adresser des
réclamations, non pas seulement au collège échevinal, mais aussi, dans une deuxième étape, au
ministre, le tribunal retient qu’une telle modification du PAG par le PAP ne saurait s’opérer de
manière implicite et se déduire de la seule non-conformité du PAP au PAG, mais doit ressortir de
manière univoque et expresse de la partie écrite ou graphique du PAP19. Cette solution s’impose
encore afin d’assurer que les administrés soient informés en temps utile de l’existence de la
modification du PAG par le PAP et puissent apprécier, en connaissance de cause, l’opportunité
d’introduire à l’encontre de cette modification des objections ou observations auprès du collège
échevinal et, dans une étape ultérieure, un recours contentieux devant le tribunal administratif,
évitant ainsi que l’existence d’une modification du PAG par le PAP, qui constitue une dérogation
exceptionnelle à la procédure régulière de modification des PAG, tel que souligné ci-avant, ne soit
révélée que dans le cadre d’une éventuelle instance contentieuse individuelle, en fonction des
moyens présentés par le demandeur à l’action.
En l’espèce, le tribunal constate qu’il ne ressort ni des parties écrite et graphique du PAP,
ni, d’ailleurs, des décisions d’adoption et d’approbation des autorités communales et de tutelle, ni
des autres éléments du dossier administratif que le PAP aurait expressément vocation à modifier le
PAG en ce qui concerne les types de constructions admis sur les parcelles qu’il couvre. Au
contraire, il ressort de manière explicite du rapport justificatif de novembre 2014 que le PAP ne
contiendrait pas de dérogations au PAG en vigueur, effectuées sur base de l’article 108bis (1),
alinéa 2 de la loi du 19 juillet 200420, de sorte qu’il n’est nulle part affiché une quelconque intention
des auteurs du PAP et, par conséquent, des autorités communales et de tutelle ayant adopté,
respectivement approuvé ce dernier, de procéder à une modification du PAG, ce constat étant
corroboré par l’argumentation, pour le moins incohérente, des parties communale et tierce
intéressée selon laquelle, en substance, le PAP ne modifierait le PAG que dans l’hypothèse où le
tribunal devrait constater sa non-conformité à ce dernier.
Dans ces circonstances, le tribunal retient que l’argumentation des parties défenderesses et
tierce intéressée, fondée sur ledit article 108bis (1), alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004, ne se limite
pas à un complément de motivation, admissible en cours d’instance contentieuse, mais tend en
réalité à modifier la portée de l’acte réglementaire litigieux, de sorte à devoir être écartée.
Il suit des considérations qui précèdent que le PAP n’est pas conforme au PAG, sans que
cette non-conformité n’ait pu être couverte par les dispositions de l’article 108bis (1), alinéa 2 de
la loi du 19 juillet 2004.
19 Voir, en ce sens : trib. adm., 14 décembre 2017, n° 38474 du rôle, disponible sur www.jurad.etat.lu. 20 Rapport justificatif de novembre 2014, p. 16.
24
Quant aux conséquences découlant de ce constat, le tribunal retient que s’il est certes exact
qu’a priori, il y a lieu de faire valoir pour autant que possible les dispositions réglementaires prises
plutôt que de les voir périr, en vertu de la maxime « potius ut valeat quam ut pereat », il n’en reste
pas moins que dans la mesure où l’illégalité venant d’être constatée concerne 11 des 14 lots du
PAP, soit la très grande majorité de ces lots, une annulation intégrale des décisions déférées
s’impose, afin de ne pas hypothéquer la qualité et la cohérence urbanistiques du projet. Il s’ensuit
que le recours en annulation dirigé contre la décision du conseil communal du 8 octobre 2015 et
contre la décision ministérielle du 5 janvier 2016 est à déclarer fondé, sans qu’il n’y ait lieu de
statuer sur les autres moyens invoqués par le demandeur, cet examen devenant surabondant.
VI. Quant aux demandes d’indemnité de procédure
Eu égard à l’issue du litige, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de la commune de
Frisange tendant à l’obtention d’une indemnité de procédure de 2.000 euros, sur base de l’article
33 de la loi du 21 juin 1999, aux termes duquel « Lorsqu’il paraît inéquitable de laisser à la charge
d’une partie les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens, le juge peut
condamner l’autre partie à lui payer le montant qu’il détermine. ».
Pour le même motif, la demande tendant à l’octroi d’une indemnité de procédure de 2.500
euros, telle que formulée par la partie tierce intéressée, encourt également le rejet.
Il en est de même en ce qui concerne la demande de Monsieur ..... tendant, dans le dernier
état de ses conclusions, à l’octroi d’une indemnité de procédure d’un montant total de (3 x 3.500
=) 10.500 euros, étant donné qu’il n’appert pas des éléments en cause en quoi il serait inéquitable
de laisser à sa charge les sommes exposées non comprises dans les dépens.
Par ces motifs,
le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;
reçoit le recours en annulation en la forme ;
au fond, le déclare justifié, partant annule la décision du conseil communal de Frisange du
8 octobre 2015 et la décision du ministre de l’Intérieur du 5 janvier 2016 ;
rejette la demande de Monsieur ..... tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure
d’un montant total de 10.500 euros ;
rejette la demande de la commune de Frisange tendant à l’allocation d’une indemnité de
procédure de 2.000 euros ;
rejette la demande de Madame ..... tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure de
2.500 euros ;
fait masse des frais et les impute pour moitié à la commune de Frisange et pour moitié à
l’Etat.
25
Ainsi jugé par:
Olivier Poos, premier juge,
Daniel Weber, juge,
Michèle Stoffel, juge,
et lu à l’audience publique de vacation du 1er août 2018 par le premier juge, en présence du
greffier Xavier Drebenstedt.
s. Xavier Drebenstedt s. Olivier Poos
Reproduction certifiée conforme à l’original
Luxembourg, le 01.08.2018
Le greffier du tribunal administratif