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La reforme fiscale Marocaine
Présenter le système fiscal marocain dans son étendue et sa diversité
implique un travail d'inventaire de l'ensemble des impôts effectivement
appliqués. En effet, dans le système fiscal marocain on trouve une mosaïque
d'impôt. A ce propos on peut illustrer la citation de Duverger qui annonce : "en
quelques sorte, les systèmes fiscaux sont des constellations dont les impôts
sont des étoiles"9
Dans ce chapitre pour que notre analyse aura d'intérêt, on essayera
d'exposer d'une part les apports et limites de ce système, et le diagnostic du
système fiscal marocain de l'autre part.
9 : DUVERGER, M., les finances publiques, 1975, p 465
Le Maroc dispose actuellement d’un système fiscal moderne similaire à ceux
adoptés par de nombreux pays européens. Ce système est le résultat d’un
processus de réforme entamé par la loi cadre de 1984. Il repose sur quatre
impôts et taxes à savoir :
- la taxe sur la valeur ajoutée ;
- l’impôt sur les sociétés ;
- l’impôt général sur le revenu ;
- et les droits d’enregistrement et de timbre.
Plusieurs aménagements ont été apportés à notre système fiscal au
cours des dernières lois de finances, en exécution des Hautes Directives Royales
contenues dans le discours prononcé par Sa Majesté le Roi à Jorf Lasfar en date
du 26 septembre 2000 et des recommandations des assises nationales sur la
fiscalité.
Dans ce sens, il a été notamment procédé à la mise en application de
nombreuses dispositions visant :
- la simplification et l’harmonisation du système fiscal par l’intégration
de plusieurs cédules dans l’impôt général sur le revenu et l’impôt sur
les sociétés ;
- l’allégement des procédures visant à renforcer les garanties accordées
aux contribuables ;
- l’introduction de nouvelles mesures d’incitation à l’investissement en
faveur de plusieurs secteurs d’activités, notamment le tourisme, le
transport international, la bourse et des mesures à caractère social tel
que l’habitat social.
C’est ainsi que les impôts cédulaires tels que la taxe sur les produits
de placement à revenu fixe (TPPRF), la taxe sur les profits de cession de valeurs
mobilières (TPCVM) et la taxe sur les produits des actions et parts sociales
assimilées (TPA), la taxe sur les profits immobiliers (TPI) ont été intégrés dans
l’impôt général sur le revenu ou l’impôt sur les sociétés.
Par ailleurs, il a été procédé à la suppression de la participation à la
solidarité nationale (PSN) et la contribution sur les revenus professionnels
exonérés.
Cette politique fiscale sera poursuivie par la mise en chantier de
plusieurs projets se rapportant à :
- la réforme de la fiscalité locale ;
- le réaménagement de la fiscalité des personnes physiques ;
- la réforme du code de l’enregistrement et du timbre.
S’agissant de la réforme de la fiscalité locale, elle s’articule autour de
deux axes :
- le premier concerne les impôts locaux gérés par la Direction Générale
des Impôts au profit des collectivités locales (au nombre de 3) ;
- le second traite des taxes et redevances gérées directement par les
Collectivités Locales (au nombre de 40).
Le premier axe de cette réforme vise à moderniser et simplifier les
impôts locaux par le réaménagement des textes fiscaux relatifs à l’impôt des
patentes, à la taxe urbaine et à la taxe d’édilité.
Elle consiste en :
- l’intégration de la taxe urbaine professionnelle dans l’impôt des
patentes de manière à encourager l’investissement et à réduire la
pression fiscale supportée par les entreprises et ce, par le
réaménagement du barème et la réduction de 4 à 3% du taux servant à
la détermination de la valeur locative des constructions, matériels et
outillages ;
- le réaménagement du barème de la taxe urbaine visant à réduire la
pression fiscale sur les ménages.
Le deuxième axe a pour objectif de réaménager la loi n° 30 – 89
relative à la fiscalité des Collectivités Locales et de leurs groupements par la
suppression de certaines taxes dont le rendement est dérisoire et l’aménagement
et le regroupement de certaines taxes de même nature.
En ce qui concerne la fiscalité des revenus des personnes physiques, il
convient de souligner que des études ont été menées à ce sujet en vue de
réaménager cet impôt pour l’adapter aux mutations économiques et sociales qu’a
connu le Maroc au cours des dernières années. Ces études ont porté sur un
ensemble de paramètres concernant aussi bien le tarif de l’impôt dans ses
composantes tranches de revenus et taux correspondants que les différents
abattements et déductions accordés aux contribuables en vue de la détermination
de la base imposable.
A cet égard, plusieurs alternatives ont été retenues. Elles aboutissent
toutes à des moins-values fiscales variant entre 720 millions de dirhams et 3,2
milliards de dirhams selon le barème choisi et les déductions et abattements qui
seraient maintenus ou remplacés par une déduction forfaitaire accordée à
l’ensemble des contribuables soumis à l’impôt sur le revenu.
Quant à la refonte du code de l’enregistrement, elle se traduirait par la
restructuration du texte actuel pour répondre aux impératifs de clarification, de
simplification et de rationalisation du système fiscal. Elle vise également son
harmonisation avec les dispositions applicables dans les autres impôts et taxes,
dans le sens d’un renforcement des garanties offertes aux contribuables.
L’ensemble des mesures introduites au cours des dernières années
constituent de véritables avancées qui convergent dans le sens de l’élaboration
du code général des impôts.
Section I : Apports et limites
L'histoire de la fiscalité marocaine depuis l'indépendance est celle du
remplacement progressif des impôts analytiques par des impôts synthétiques.
Cette évolution marquée par de nombreux tâtonnement et quelques retours en
arrière n'a pas encore atteint son terme.
Précisément, à partir des année 80, Le Maroc à l'instar de la plupart des pays
développés, a entamé sa première étape de réforme de sa fiscalité par
l'institution de la T.V.A en 1986, de l'I.S en 1987 et de l'I.R en 1990, à fin de
pouvoir faire passer la fiscalité d'un système déjà sous optimal vers un autre
optimal (doté le Maroc d'une fiscalité moderne basée sur la trilogie "T.V.A, I.S,
I.R").
Parallèlement, des changements au niveau de la fiscalité extérieure ont été
opérés. Ils consistaient en des révisions à la baisse des droits et taxes à
l'importation.
De même, au niveau local, on a assisté à une insertion de toutes les dispositions
relatives à la fiscalité locale dans un texte d'ensemble, alors qu'avant la réforme,
la fiscalité locale était régie par plusieurs textes disparates.
De nombreux réaménagements ont depuis lors été introduits par les différentes
lois de finances en vue de répondre à des objectifs économiques, financiers, ou
sociaux : c'est le cas, à titre d'exemple, du réaménagement des codes
d'investissement intervenu en 1988, la mise en place de la charte de
l'investissement en 1996 en insérant de mesures fiscales d'incitation à
l'investissement dans le droit commun, en privilégiant l'acte d'investir et en
simplification des procédures administratives.
Or et en dépit de toutes ces modifications, les objectifs restent encore loin d'être
réalisés car une bonne fiscalité s'accorde automatiquement sur les objectifs
premiers de la fiscalité : neutralité, équité et simplicité.10
L’objectif final de ces réformes étant la stabilisation et la réduction du taux de
pression global.
Il convient donc, d'apporter des solutions urgentes sur le plan de la législation
fiscale comme celui de la pratique fiscale.
Paragraphe I : Simplification de la fiscalité marocaine :
Les différentes réformes fiscales sont d’abords motivés par un objectif initial de
simplification des systèmes des prélèvements directs, devenus complexes. La
multiplicité des régimes et des mesures particulières applicables à certaines
catégories de contribuables, d’activités ou de revenus, a introduit d’inévitables
distorsions dans les incitations qui pèsent sur les différents choix des ménages et
des entreprises.
Etant donné que la simplification est à la fois un gage de compréhension de
l'impôt par le contribuable et une condition de sa bonne gestion.
Elle doit consister toujours un objectif prioritaire de la réforme fiscale.
Cette simplification doit prendre plusieurs aspects détaillés comme suit :
1) une réduction du nombre élevé des natures d'impôt traduite par une
suppression de plusieurs sortes d'impôts. A titre d'exemple, on peut citer
le regroupement des revenus catégoriels par l'instauration de l'impôt sur
le revenu (I.R) qui répond aux soucis de simplification de l'imposition des
revenus des personnes physiques.
10 : Les anciennes règles d'Adam Smith et qui sont au nombre de 4 : justice, égalité devant
l'impôt, certitude (pas d'arbitraire dans l'établissement de l'impôt) commodité (simplification),
économie (moins coût) de taxation
En effet, l'I.R se substitue à compter du 1er Janvier 1990 :
Aux prélèvement sur les traitements et salaires, pensions et rentes
viagères. (Dahir du 7 janvier 1959)
A l'impôt sur les bénéfices professionnels (Dahir du 31/12/ 1959)
A l'impôt agricole (Dahir du 20 Décembre 1961)
A la taxe urbaine pour les revenus locatifs (article 2 de la loi de finances
pour l'année 1978)
Il est recommandé d'envisager la suppression de certaines taxes et le
réaménagement des autres taxes car la pluralité des natures n'entraîne que des
doubles emplois, des surimpositions et des inéquités et enfin de leur caractère
antiéconomique.
Notamment, de l'impôt des patentes, de la taxe urbaine et de la taxe d'édilité, de
la taxe sur les terrains non bâtis et la participation à la solidarité nationale qui lui
est associée11.
Partant des expériences étrangères des pays développés, la simplification de la
fiscalité marocaine visera alors :
o A procéder à un "toilettage" de la fiscalité actuelle dans le cadre de
l'unification avec la fiscalité d'Etat.
o Le regroupement de certaines taxes en vue de leur simplification, à
l'harmonisation des deux fiscalités locale et d'Etat et de leur cohérence.
o Supprimer les taxes dites nuisibles alourdant la capacité contributive des
citoyens.
o Regrouper la taxe urbaine et la taxe d'édilité en une seule taxe.
o D'harmoniser des taxes qui se font concurrence comme la taxe de séjour
et la taxe de promotion touristique, la taxe de licence et la taxe sur les
débits de boissons, etc.…….
11 : Abrogée par la loi de finance 2000
Cette première simplicité concerne le volume de la fiscalité à coté de laquelle
une autre simplicité rattachée à chaque nature d'impôts et qui consiste à la
clarification des textes de la loi en vigueur, avec une rédaction simple et concise.
De même, on peut citer l'importance de la simplification des obligations
déclaratives dans la mesure où un contribuable n'aura à souscrire qu'une seule
déclaration annuelle au titre de l'ensemble de ses revenus.
En fin, il faut ajuster la simplicité des formalités de déclaration d'impôts dont
leur souscription nécessite l'aide d'une tierce personne.
Paragraphe II : Equité
L'équité consiste dans la recherche d'une meilleure répartition de la charge
fiscale en fonction de la capacité contributive des redevables. A cet effet, l'impôt
doit assurer une fonction de redistribution des revenus en utilisant les techniques
tels que la progressivité, les abattements, déductions ou exonérations, etc.….
L'élargissement de l'assiette fiscale et l'harmonisation des techniques
d'imposition constituent deux éléments nécessaires pour rendre le système
équitable.
1- l'élargissement de l'assiette fiscale
L'élargissement de la base d'imposition peut être obtenu de deux manières
La première consiste à intégrer progressivement dans le champ d'impôt
certaines bases non encore appréhendées.
La seconde consiste à supprimer certains allégements fiscaux "la
limitation12.
12 : Les allégements fiscaux concernent les avantages octroyés par :
- Le droit commun : exonération, abattement ….
- Les codes d'investissement (avant l'intégration de la charte d'investissement)
On peut citer à titre d'exemple la suppression des exonérations tout en instaurant
des taux réduits (cas de la T.V.A).
Auxquelles, on peut ajouter aussi d'autres mesures d'élargissement de l'assiette
fiscale telle l'harmonisation entre la fiscalité locale et la fiscalité d'Etat incitative
à l'investissement, et l'institution des mesures marquant la volonté de l'Etat de
servir les contribuables dans les meilleurs conditions et de lutter contre la fraude
et l'évasion fiscale.
A noter que ces exonérations et allégements ne sont pas toujours octroyés dans
un but d'équité (c'est-à-dire la prise en considération de la capacité contributive
des catégories particulières de contribuables), au contraire ce sont des privilèges
obtenus par des groupes soucis économiques sans aucune vision cohérente du
développement de tout la notion.
2- modes d'établissement de l'impôt
Les aménagements relatifs à l'élargissement de l'assiette fiscale restent
insuffisants pour imposer tous les contribuables d'une manière équitable. Ils
doivent être poursuivis des modes d'établissement de l'impôt appropriés sans
discrimination des règles d'assiette comme par exemple, en matière d'I.R, les
différentes déductions peuvent être appliquées selon qu'il s'agit de revenus
provenant d'une activité industrielle ou agricole, du foncier, ou des produits de
placement. De plus, l'instauration d'un barème progressif n'a servi que peu le
critère de l'équité.
Cette progressivité est régressive, elle avantage les détenteurs de hauts revenus.
Dans ce sens, on peut citer les inégalités atteintes en matière d'I.R qui constitue
un impôt déclaratif ou l'on constate des prélèvements trop élevés pour une
catégorie de revenus (IR/IS) prélevé à la source par le débirentier par rapport
aux autres catégories de revenus faiblement taxées et parfois échappent à
l'impôt.
De plus en matière de T.V.A, l'élaboration du taux majoré de 30% n'a aucune
signification soit du point de vue d'équité soit du point de vue efficacité. Ce ne
fut qu'une simple recommandation du F.M.I.
3- l'efficacité économique
L'efficacité d'un système fiscal en tant qu'instrument de politique économique
s'apprécie à travers :
La simplicité de la fiscalité devant s'apprécier par rapport aux
opérateurs économiques au même titre que pour les ménages, sa
rentabilité permettant la mobilisation des recettes fiscales et son
coût pour l'amélioration des méthodes de gestion et de la
performance de l'administration fiscale.
La réforme fiscale a affiché, parmi ses objectifs, la création d'un
environnement favorable. Dans ce cadre, on va retenir deux
mesures : l'allégement de la charge fiscale et les essais de
rationalisation du dispositif incitatif comme par exemple
l'institution de la T.V.A comme un système d'imposition du chiffre
d'affaires permet d'atteindre aux mieux certains objectifs d'efficacité
économiques.
3-1- l'allégement de la charge fiscale
Au Maroc, la période antérieure avait vu les taux nominaux d'imposition
applicables aux diverses assiettes augmentées considérablement en raison de la
croissance rapide des dépenses publiques. Ces taux ont été abaissés depuis la
mise en vigueur de la reforme fiscale. En effet, en matière d'I.R : les
allégements apportés par l'I.R concernent les relèvements successifs du seuil
exonéré de 12.000 DH en 1990 à 18.000DH en 1994 puis à 20.000 en 1999. la
baisse du taux marginal de 52% en 1990 à 48% en 1994 et 44% en 1996 et 42%
en 2007 taux qui reste encore élevé comparé à la situation économique réelle des
redevables imposés en matière d'I.R et ceux imposés en matière d'I.S pour un
taux de 35% ou 39,6% pour le même revenu donnant alors lieu à un
assujettissement inéquitable à l'assiette fiscale d’où la nécessité d'uniformiser
ces taux d'imposition dans la limite des réalités économiques, sociales et
financières des supporters de la charge fiscale à fin d'aboutir à leur consentement
de la politique fiscale du gouvernement marocain.
Notons aussi que l'inéquités de la fiscalité marocaine s'illustre dans les
contribuables ayant à titre d'exemple un revenu foncier se trouvent à le tête des
bénéficiaires de l'allégement. L'abattement appliqué à ces revenus a été relevé de
25% à 40%. A l'inverse, les salariés ont peu bénéficié de cette mesure13.
L'inflation et le mode de recouvrement de l'I.R (retenu à la source) ont atténué
cet allégement. Il faut aussi actualiser certains seuils et déductions (exemple des
déductions pour charges de famille fixées à 180 DH par personne montant
négligeable par rapport aux exigences de la vie quotidienne).
3-2- la fiscalité et l'investissement
La fiscalité est l'un des instruments utilisés par les pouvoirs publics pour
promouvoir l'investissement du secteur privé14 et attirer l'investissement direct
étranger15.
13: Dans le système fiscal français on saisit le revenu du couple et non pas au niveau dechaque conjoint pris séparément : en plus, les salariés dont le revenu est appréhendé entotalité bénéficient d'un abattement de 20%.14 : Le lien entre la fiscalité et l'investissement est certain. En effet l rentabilité d'uninvestissement dépend des aides fiscales du régime d'amortissement pratiqué, des impôtsfrappant l'exploitation, de l'imposition des plus values.15 : Le climat favorable à l'attrait de l'investissement étranger est fonction de plusieursvariables à savoir l'infrastructure socio-économique, la stabilité politique…
Avant 1996, à coté du droit commun, il existait un certain nombre de codes des
investissements qui octroyaient des avantages fiscaux et financiers à l'industrie,
au tourisme, aux mines, à l'artisanat et aux investissements immobiliers,
maritimes et l'enseignement supérieur. Des avantages supplémentaires ont été
octroyés au titre de l'exportation et de la promotion régionale.
En plus de ces codes, il y a aussi des possibilités de conventions entre
l'administration et quelques entités économiques (une entreprise, une
profession).
Par exemple, dans le cas d'investissement importants (dépassant 50 millions de
DH), le gouvernement signe des conventions spéciales qui peuvent procurer des
avantages supplémentaires.
Paragraphe III : d'autres mesures d'accompagnement.
1- fiscalisation du secteur informel
Le secteur informel16, sous une multitude d'appellations (économie non
officielle, économie non structurée, économie souterraine, secteur traditionnel
etc….) suscite des débats théoriques et empiriques d'une grande divergence.
Au Maroc, ce secteur n'a jamais fait l'objet, à notre connaissance, d'aucune étude
complète et détaillée. Seule la direction de la statistique à effectuer en 1988 une
enquête nationale sur le secteur non structuré localisé. Cette étude n'a concerné
que les entreprises inscrites à la patente et soumises au régime du forfait. Les
activités non inscrites n'ont pas été repérées.
16 : Le concept de secteur informel se réfère à l'absence des formalités auxquelles doiventobéir les commerçants par exemple la tenue d'une comptabilité.
Les marchands ambulants, le travail à domicile et les activités clandestines ont
été exclus exemple du contre bande constituant un grand danger pour l'économie
marocaine poussant à la fermeture de plusieurs entreprises et par la suite
l'augmentation du taux de chômage accompagné d'autres répercutions négatives
économiques et sociales.
Et pour faire face au secteur informel, le dispositif instrumental dont dispose
l'administration fiscale est :
Le recensement :
L'administration fiscale effectue, durant la période du premier trimestre de
l'année, un recensement des contribuables, des biens immobiliers et des activités
industrielles et commerciales.
Cette mesure est très intéressante dans la lutte contre une grande partie du
secteur informel. Cependant, à partir de 1990 les lois fiscales en vigueur ont
élargie la périodicité du déroulement de l'opération du recensement à 5 ans dont
la durée à été réduite à une année (loi de finances 2003).
La déclaration d'identité fiscale :
La loi n°22-89 modifiant et complétant la loi n°17-89 relative à l'I.R a fait
obligation aux contribuables de produire une déclaration d'identité fiscale
permettant de saisir toute la population fiscale. Or, cette disposition n'a pas
produit les résultats précomptés.
Les obligations des patentables :
A compter du 1er janvier 1990, les patentables doivent afficher le numéro article
du rôle de leur imposition à l'impôt des patentes.
Les personnes qui livrent des biens et des marchandises sont tenues de porter sur
lecture l'article de l'impôt des patentes de leurs clients.
De ce fait, la réduction de ce secteur informel serait par l'une de deux modalités
suivantes :
o Soit par la taxation du secteur informel par la fiscalité directe ou
indirecte. Pour la première, les agents du secteur informel assument
même partiellement une certaine charge de la fiscalité indirecte sur leurs
consommations intermédiaires. Seulement ils ne peuvent pas jouer un
rôle dans la collecte de l'impôt (T.V.A principalement). Pour la deuxième,
la loi fiscale marocaine n'appréhende d'une manière partielle qu'une partie
repérée du secteur informel, celle monétarisée et intégrée aux circuits de
commercialisation.
Généralement les contribuables sont assujettis à la patente, à un impôt
forfaitaire évalué à partir du revenu minimum et à quelques taxes locales.
o Soit par la résorption du secteur informel car ce dernier produit des effets
anti-économiques qui ont un impact sur la compétitivité des entreprises et
de l'industrie nationale. Il est à l'origine de trois handicaps majeurs à la
compétitivité nationale de l'économie marocaine :
La concentration de la pression fiscale sur le secteur formel et sur
les importations créant des distorsions et décourageant la
productivité.
Cette situation suscite une dévalorisation de la force du travail
salarié.
La résorption du secteur informel permettrait d'éliminer ces handicapes et
d'obtenir des conditions essentielles de la compétitivité de l'économie et réaliser
des recettes complémentaires en faisant participer chaque citoyen, selon ses
facultés contributives au financement du principe de la concurrence loyale et de
la compétitivité entre les entreprises et assurer la justice sociale, contribuer à la
formation et l'éducation des citoyens dans la mesure ou l'impôt est perçu comme
un acte de liberté et de souveraineté et décourager le recours à la fraude fiscale.
En réalité, le secteur informel est difficilement cernable. Son identification
suppose une grande action. Les moyens dont dispose l'administration fiscale
n'attestent aucun progrès dans ce sens. Envisager d'autres procédures
d'imposition adoptées à aider les agents du secteur informel à une transition
progressive vers le secteur formel doit constituer une priorité.
Toute fois, l'administration fiscale à elle seule sans la collaboration des autres
ministères et départements, ne pourrait pas appréhender ce secteur dont la
fiscalisation concerne l'ensemble des administrations. A cet effet, une
coopération nationale inter administration doit être institutionnalisée.
L'inflation : élément perturbateur négligé :
L'inflation est un élément qui perturbe tous les objectifs prônés par la réforme
fiscale17. En effet, elle fait apparaître notamment de lourdes impositions et
déplace la charge fiscale sans relations avec les mouvements survenus dans la
production et les revenus. Elle agit sur la charge réelle de l'impôt de deux
façons, par le rétrécissement de la base imposable d'une part, et d'autre part par
l'accentuation de la progression pour quelques revenus n'enregistrant aucun
accroissement réel. C'est ce qu'on appelle le "tracket-creep".
Des corrections du barème d'imposition et des allégements fiscaux sont
nécessaires pour compenser les effets de l'inflation.
17 : Un rapport de l'OCDE a souligné que :" en l'absence des mesures correctives de laredistribution de la charge fiscale résultant de l'inflation peut être considérée non seulementcomme contraire aux principes de l'équité fiscale mais aussi comme entraînant une répartitionde la charge fiscale différente de celle qui est souhaitée ou qui est prévue par la loi"
Etant donné que le "système fiscal qui n'est plus en liaison avec la vie réelle
devint alors un danger pour l'économie d'un pays, c'est pourtant ce qui se produit
au cours d'une inflation lorsque les chiffres nominaux figurant dans la législation
fiscale ne sont pas réajustés et que cette dernière suit aveuglement une
comptabilité illusionniste.
Les effets de l'inflation touche essentiellement les contribuables dont le revenu
est totalement déclaré et imposé à la source, c'est-à-dire les salariés. La loi
relative à l'I.R ou les modifications opérées par la suite ne présentent aucun
traitement sur pour freiner les effets de l'inflation, ce qui entraîne
l'alourdissement de la charge effective supportée par la majorité des salariés qui
constituent la grande part de la demande intérieure.
Section II : D'autres critères d'une bonne fiscalité
Paragraphe I : Critère de cohérence
La fiscalité marocaine dans son ensemble doit être cohérente. Les impôts la
constituant devraient être complémentaires pour que les lacunes de l'un soient
comblées par l'autre et pour que les objectifs d'un impôt ne soient pas neutralisés
par les effets d'un autre.
Cependant, la présence de plus d'une autorité légiférant en la matière (parlement,
collectivités locales, administration "taxes parafiscales") et dont les objectifs ne
concordent pas souvent, à aboutir à des incohérences structurelles.
L'incohérence pourrait aboutir à des situations de double imposition et d'évasion
fiscale. Cela fausserait la concurrence et introduirait des éléments spéculatifs qui
créent de fausse compétitivité.
Il convient donc de doter la fiscalité, et chacun des impôts qui la composent de
ce que Claudino PITA a appelé la rationalité instrumentale qui consiste à faire en
sorte qu'il compose une véritable fiscalité comprenant des impôts dont la nature
soit conforme aux fonctions lui incombrant et évitant une prolifération de
charges juxtaposées et parfois incompatibles. Les meilleurs signes de cette
rationalité seraient la simplicité et la cohérence. Dans ce cadre on peut parler de
la concurrence fiscale.
Paragraphe II : Critère d'harmonisation fiscale
L'adhésion aux conventions de l'organisation mondiale du commerce et
l'instauration des zones de libre-échange exigent des pays d'élaborer ou de
réformer leurs fiscalités non sur la base des critères uniquement intérieurs, mais
aussi sur les données des fiscalités concurrentes ou partenaires.
Donc, pour que la fiscalité ne défavorise pas la compétitivité d'une économe, il
faut qu'elle soit harmonisée avec celle des pays concurrents.
L'harmonisation fiscale peut être définie comme étant l'adoption des règles
fiscales contraignantes, au niveau de chaque Etat, et ce pour assurer le bon
fonctionnement des zones de libre-échange.
Il en résulte que l'élaboration d'une fiscalité compétitive dans l'attrait des
capitaux étrangers doit offrir des avantages au moins égaux à ceux offerts par les
systèmes concurrents. En tenant compte, bien sur, de l'idée que la fiscalité n'est
pas le seul déterminant de l'attrait des investissements étrangers.
En général, et conformément aux dispositions de conventions de non double..
Imposition de l'OCDE 1, la double imposition juridique s'atténue en utilisant
l'une des trois méthodes :
La méthode de l'exemption : les revenus d'origine étrangère sont
purement et simplement exonérés d'impôt dans le cadre du pays de
résidence.
La méthode d'imputation : le pays de résidence calcule l'impôt national
sur le bénéfice mondial et soustrait de ce montant celui des impôts versés
à l'étranger pour obtenir le montant net de l'impôt dans le cadre national.
La méthode de déduction : les impôts versés dans le pays de la source
sont déductibles du bénéfice mondial imposable dans le pays de
résidence. Il est évident que ce système atténue la double imposition au
niveau international mais ne le supprime pas.
Paragraphe III : Critère d'une fiscalité basée sur la transparence et la
rationalité
La fiscalité transparente doit permettre à chacun d'identifier ce qu'il paye, de
telle façon que les décisions de la collectivité soient en accord avec les
préférences des contribuables.
Le poids de la fiscalité a des limites édictées par :
La recherche de la rentabilité et de la compétitivité pour l'entreprise
La sauvegarde du pouvoir d'achat des ménages.
Section III : Diagnostic du système fiscal
Cette section vise à exposer et développer les caractéristiques majeures du
système fiscal marocain. Dans ce cadre on évoquera la complexité, l'iniquité et
la manifestation de l'archaïsme de ce système18.
Paragraphe I : La complexité du système
Comme tous les systèmes fiscaux des pays en voie de développement, le
système fiscal marocain est caractérisé par sa complexité. En effet, les nombreux
objectifs qu'il devait permettre d'atteindre et la recherche d'une adaptation sans
cesse renouvelée de la législation à ces objectifs avaient
18 : pour plus de détail voir : ELGADI, A., Une fiscalité moderne pour une entreprise
performante face au défi de la mondialisation, édition Omnia, 1999.
conduit à procéder, au fil des lois de finances à des modifications qui ont aboutis
finalement à multiplier les cas et les retraitements particuliers rendant ainsi les
textes de plus en plus complexe. Par conséquent une telle situation s'était
traduite par :
Un affaiblissement de rendement du système de fait de l'érosion de la
base imposable et de l'augmentation du coût de l'administration du
système.
L'incohérence du système qui a aggravé la fraude et l'évasion fiscale et à
déboucher parfois sur des situations de double imposition élevée.
Toutes ces conséquences ont rendu le système fiscal inefficace et source
d'inégalité19.
Paragraphe II : L'iniquité du système fiscal
1- Au niveau de l'impôt sur le revenu IR
S'agissant d'impôt sur le revenu (IR), l'iniquité a résulté de l'inexistence d'un
ensemble d'impôts cédulaires regroupant les modalités d'assiette hétérogène, des
règles de liquidation discriminatoire et des obligations très inégales selon les
cédules.
1.1- Les modalités d'assiette
Les régimes d'impositions étaient très hétérogènes. Les règles d'assiette de
chaque cédule différaient. Par conséquent, les obligations des contribuables
aussi différents.
1.2- Les règles de liquidation
Les barèmes d'impositions étaient très différentes aussi bien dans la fixation des
seuils exonérés que dans le découpage des tranches et le choix des taux. Prenant
à titre d'exemple les deux cédules suivants :
19 : MAAROUFI, A., mémoire de licence sous le thème de "la réforme fiscale et son impactsur les entreprises marocaines"
Impôt sur les bénéfices professionnels : IBP
Tranches en DH Taux0-3000
3001-6000
6001-21000
21001-24000
24001-36000
36001-50000
50001-500000
500001-2000000
Exonéré
5%
11%
14%
20%
30%
40%
48%
Impôt agricole
Tranches en DH Taux0-4000
4001-6000
6001-12000
12001-24000
24001-48000
48001-170000
Au-delà
Exonéré
8%
10%
12%
15%
17%
20%
Toutes ces différenciations et bien d'autres 1(les modes de recouvrement par
exemple) ont aggravé les disparités de la charge fiscale sur les revenus dont
l'importance n'a pas été contrecarrée par l'institution de la contribution
complémentaire en 1972.
2- Au niveau des taxes sur le chiffre d'affaire
En matière de taxe sur le chiffre d'affaire, les inégalités et disparités constatées
concernent aussi bien la taxe sur les produits que celle sur les services.
L'iniquité de ces taxes sur le chiffre d'affaires découle des facteurs suivants :
Les facteurs de rémanence et de butoir : le facteur de rémanence renchérit
les coûts de production, ce qui influence d'une manière négative la bonne
marche des entreprises nationales.
Au facteur de rémanence, s'ajoute celui du butoir. L'existence d'un crédit de taxe
constitue un coût financier qui entrave l'épanouissement des entreprises.
Multiplicité des taux : l'examen des taux appliqués révèle leur nombre
important et leur caractère discriminatoire.
Il résulte de cette architecture des taux largement différenciés une inégalité
remarquable au niveau de la taxation des produits. Cela a entraîné une
mauvaise allocation des ressources.
Paragraphe III : Manifestation de l'archaïsme du système fiscal antérieur
La complexité et l'iniquité antérieur s'étaient manifestées à travers deux
déséquilibre : au niveau de la répartition de la charge fiscale, et le deuxième
relatif au coût des facteurs de production.
1- La répartition impôt direct/ impôt indirect
Les impôts indirects au sens large ont occupé une place importante dans les
recettes totales de l'Etat. Le tableau suivant montre bien cette importance :
Ventilation d'impôt directs/ impôts indirects et leurs part respectives dans les
recettes fiscales de l'Etat. (En millions de DH)20
AnnéeMontant % Montant % Montant %
Impôt direct
IBP
PTS
Impôt indirect
Droit de
douane
TIC
TCA
3533
1719
1088
10335
3530
1822
3665
25,4
12,4
7,8
74,6
25,4
13
26,4
5258
2145
2026
15915
4714
2504
6557
25
10
9,6
75
22,3
11,8
31
6023
2169
2433
17376
4799
2582
7802
26
9,3
10,4
74
20,4
11
33,4Recettes
fiscales
13888 100 21173 100 23399 100
La faible part de l'imposition directe dans les recettes totales est une
caractéristique directe des systèmes fiscaux des pays en voie de développement.
Par contre dans les pays développés, les impôts directs constituent des
opérations importantes des recettes fiscales.
En plus, l'accroissement plus rapide des impôts indirects répercutés pour une
large part dans les coûts, les prix et les salaires renchérit le coût de la production
et par conséquence peut perturber la bonne marche de l'entreprise.
20 : EL AKKOUCHI, A., fiscalité et compétitivité de l'entreprise industrielle au Maroc, éditionOmnia, 2000, p.103-104.
2- L'imposition relatif des coûts de facteurs de production : le
travail et le capital
En tenant compte de la prédominance des impôts indirects qui touchent d'une
manière ou d'une autre les revenus salariaux et de la faiblesse des impôts
frappant les revenus de la propriété et de l'entreprise au moment où les
prélèvements sur traitement et salaire ont dépassé largement l'impôt sur les
bénéfices professionnels. En 1985 ces prélèvements représentaient 97,30% de
l'IBP.
Toutes ces causes et autres ont débouché sur un déséquilibre des charges fiscales
en faveur du capital et au détriment du travail. Et par voie de conséquence on a
assisté à une substitution du capital au travail, et donc l'effet négatif sur l'emploi.
Dans ces conditions, la reforme de ce système archaïque, complexe, inéquitable
et d'un rendement financier insuffisant s'avérait nécessaire et surtout avec la
crise financière que le Maroc a connu vers la fin des années 1970.