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GAÏA La Reconquête Tome 1by Jean-Michel RUFEMONTPaperback, 408 pages2015. Suite au génocide de l’humanité. La fabuleuse refonte des survivants,des blancs, en de puissants guerriers ; ce par leur lutte âpre et pathétique en vue de leur résurrection et sauvetage de leur honneur et intégrité, et de leur planète vénérée ; qui se révèlera être la mère sacrée. Intense préparation à une guerre, carnage rédempteur pour exterminer leur ennemi : les descendants des génocidaires.De nombreux personnages, de l’enfant à la femme et au vieillards, comme des hommes, tous égaux et soudés en une seule phratrie planétaire ; monde d’honneur, d’amour et générosité.Le premier héros est une belle jeune femme esclave, précédant beaucoup d’autres, ainsi que des hommes . Le dernier de cette saga inoubliable, est un de ses descendants : un bel enfant de sept ans aux pouvoirs fabuleux, qui va entraîner cette humanité renaissante vers une destinée stellaire inouïe. Vous envierez ce monde où la force, l’amour et l’honneur sont de chaque instant.

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Jean-Michel RUFEMONT

GAÏA

La

Reconquête

Tome I

Les Survivants

Roman

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©-2007. Jean-Michel Rufemont. Tous droits réservés

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...à ma fille Alexandra

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Table des Matières

Tome I

1 - Les Patrouilleurs 1

2 - Alabama 36 3 - Les Appalaches 76 4 - Les Charretiers 114 5 - Passions en Camargue 152 6 - Frayeurs et mystère à la pêcherie 189 7 - L’esclave Marcellin - Nouveau Guerrier 229 8 - Où la Camargue entre dans l’Histoire 271 9 - Outil révolutionnaire 290

10 - Visions d’apocalypse 339 11 - Confrontés à l’inconcevable 393

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L IVRE I

Les Survivants

Les Esclaves

es deux patrouilleurs étaient allongés dans les fourrés à la lisière du petit bois ; difficile de les voir tant leurs tenues de camouflage les faisaient se

confondre avec la végétation environnante dont la teinte principale tirait sur la couleur rouille, typique de cette fin d’un été particulièrement chaud qui avait desséché, cuite la végétation dans son ensemble.

Les voir était encore possible à deux mètres d’eux, un pas de plus en arrière et l’on ne voyait plus qu’un endroit uniforme de teinte de la broussaille mais, en regardant avec plus d’attention, on percevait alors comme une légère, oh ! une très légère brume due à un insoupçonnable dispositif électronique appelé Disfracteur-visu, de disfraction du spectre visible de la lumière, couplé à un écran anti IR, les infrarouges.

Un vache de truc sensas pour baiser ces immondes salopards de Zanko-Khuigs (prononcer le S), comme disait toujours le grand Vladi, en prenant pour l’occasion son air le plus farouche. Celui-ci est un hercule, un grand gars de presque deux mètres de hauteur, taillé à coups de serpe ; la trentaine à peine, les yeux bleus dans un visage aux traits anguleux sous une broussaille d’une tignasse chatain clair toujours peignée à la va-vite.

L

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Une grosse moustache de sapeur finissait de donner à son allure virile cet air bonhomme qui adoucissait cette masse impressionnante faite de muscles saillants, lui donnant cette perpétuelle démarche du fauve prêt à l’action fulgurante ; de celle de ces chasseurs redoutables et imprévisibles, ce qu’il était réellement dans toute ses fibres de par un atavisme d’ancêtres originaires de l’ancienne région appelée les Malkans, et plus précisément la Servi, une ancienne nation qui avait cruellement souffert, attaquée traîtreusement et détruite par ces maudits Zanko-Khuigs justement.

Il avait envers eux une haine indicible et vouait ainsi toutes ses actions de terrain à rapprocher le plus vite qu’il pouvait le jour de la reconquête sacrée, celle de leur carnage dans un lac de leur sang pourri.

Son coéquipier, Pédro, est physiquement le contraire. De taille moyenne et plutôt rondouillard que musclé, il arbore des cheveux noirs comme un corbeau, ce qu’il avait hérité d’une descendance franchement hispanique. Il haïssait lui aussi plus que tout au monde les Zanko-Khuigs, c’était son unique ressemblance d’avec le grand Vlad, comme il aimait l’appeler affectueusement, car il l’adore.

Malgré un courage hors norme qui, si on le laissait faire lui aurait valu la mort maintes fois, il n’était pas du tout un homme d’action proprement dite, mais dans l’équipe il constituait la partie essentielle du succès de leurs entreprises : c’est lui qui devait persuader leurs cibles à les accompagner...

Leur armement est bien fourni : un poignard de commando, plus une courte et large lame fixée à hauteur de la clavicule, sur la poitrine, la courte poignée en travers de la lame, prompte pour être rapidement saisie, et deux pistolets aux côtés. Pédro a une mitraillette en bandouillière et Vladimir une carabine d’assaut à répétition, équipée d’une lunette de visée. Toutes les armes à feu sont équipées de silencieux, toujours, base de leurs actions furtives.

Bien calé dans sa main gauche, le coude appuyé sur un lit de mousse onctueuse, Vladimir, la respiration lente et comme en harmonie avec son attention tendue, balayait lentement l’espace en contrebas de son Scruteur psycho. L’arme, de couleur noire mate, sans toutefois en être vraiment une au sens stricto sensu du terme, était assez disgracieuse de part sa forme mais surtout son aspect visiblement artisanal à la finition peu soignée. Une crosse volumineuse incluait le bloc d’énergie.

L’ensemble est constitué d’un tube de huit centimètres de diamètre et d’un mètre vingt de long environ ; ce dernier surmonté d’une minuscule caméra vidéo couplée à un puissant téléobjectif, puis trois petites coupoles en plastique gris foncé de différents diamètres ; la plus grande ayant une cinquantaine de centimètres de diamètres, chacune étant pliable et orientale à la demande, ainsi que rabattable pour le transport. Deux prises électriques de formes distinctes permettait de relier le scruteur par câbles aux casques des opérateurs : la plus petite pour le chasseur et la grosse pour le psycho, Pédro en l’occurence. En fait, l’ensemble paraissait plus désuet qu’impressionnant.

Là, à quelques trois ou quatre cents mètres de leur point d’observation enfoui dans ce sous-bois touffu et providentiel, d’autant plus que le kiosque des gardes n’était qu’à peine à une cinquantaine de mètres sur leur gauche ; une sentinelle,

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un de ces gardes honnis leur tournant le dos était encore bien plus près de leur planque ; le semi-humain, avec son uniforme bleu classique, avait pour armement une grosse cravache à la main et à la ceinture, un long poignard de commando et un bâton répulseur électrique qui vous envoyait valdinguer un balèze à plusieurs mètres ; il portait en plus un fusil à répétition en bandoullière. Un écouteur dans l’oreille gauche signalait un système de communication radio le reliant en permanence avec un supposé central. En fait, ce garde était un gros ventru assez grand « Un gros plein de merde », se pensa un Vladimir haineux.

Ainsi, dans ce champ cultivé de légumes, dont ils n’avaient pas la moindre idée de ce qu’ils pouvaient être, travaillaient environ une quarantaine d’esclaves visiblement robotisés, ne serait-ce que par leur classique léthargie. Mise à part leur occupation à bêcher obstinément, ils semblaient dépourvus de tout sentiment ou animation humaine, aussi bien les hommes que les femmes, en proportion plus ou moins égale, ainsi que les enfants quand il y en avait, ce qui était le cas cette fois-ci encore.

Lors de leur arrivée quelques heures auparavant, ils avaient aperçu de loin le camp de ces travailleurs, à environ trois kilomètres d’ici. Ce camp où ces esclaves résidaient était assez conséquent car il y avait trois barraques alignées, compte tenu qu’elles pouvaient contenir deux cents personnes chacune.

Ils avaient évalués l’ensemble des esclaves à six cents prisonniers possibles, car bien souvent ils n’étaient pas à leurs maximum des possibilités d’hébergement ; entre les transferts assez nombreux, les malades, les blessés et les décés.

Beaucoup de personnes qu’ils avaient sauvés, avouaient qu’il valait mieux y mourir rapidement plutôt que se traîner dans une telle vie d’enfer continu, mais ils avouaient qu’ils n’avaient pas eu le courage de se supprimer.

Ils travaillaient du lever au coucher du soleil ; ainsi l’été était le pire des rythmes pour eux tous. Ils étaient en principe assez correctement nourris, ayant le minimum requis pour un travail de force, mais une nourriture sans saveur et surtout sans fantaisie. La plupart de ces camps étaient au régime de leur production même, avec seulement de la viande deux fois par semaine, du poulet la plupart du temps. Les viandes nobles étant réservées aux tables des oppresseurs, là-bas, ils ne savaient où, sauf qu’ils voyaient bien régulièrement partir les animaux de boucherie, les meilleurs.

Ce qui les faisaient enrager et souffrir le plus c’était de voir les gardes qui volaient parfois un boeuf ou un mouton et le faisait cuire dehors, sur la braise...Les effluves de cette viande rotie était une véritable torture pour ces malheureux forçats. La souffrance intérieure revêt de bien étranges formes parfois, l’envie et la tentation en sont un des exemples le plus flagrant.

Le camp était complété par deux constructions mieux élaborées qui regroupaient les logements d’environ une centaine de gardes. Une grande baraque servait de réfectoire aux prisonniers. L’infirmerie était surtout utilisée par les gardes, le cheptel des esclaves n’ayant que peu de valeur à leurs yeux ; ne survivaient que les plus robustes.

Et enfin, au fond du camp était les douches et les toilettes.

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Au milieu de la place centrale était peint sur un grand rond de couleur blanche, un énorme numéro en noir ; ce qui indubitablement désignait une surveillance aérienne, sinon par satellite. D’où des règles strictes de sécurité observées par toutes les équipes de patrouilleurs. Vu l’état de soumission des esclaves, il n’y avait ni cloture ni mirador dans ces camps : les barbelés étaient dans les têtes... avec malheureusement leurs conséquences irréductibles pour les plus anciens.

Dans son viseur réglé sur optique et qui donc les grossissaient, les esclaves qui

étaient pour la plupart dans la moyenne d’âge, paraissaient toutefois en assez bonne condition physique. « Pour une fois », pensa Vladimir satisfait de ce constat, « ils ne paraissent pas des morts vivants, comme c’est malheureusement trop souvent le cas dans cette région de la Franki occidentale. » Ainsi nommée l’ancienne France.

Il soupira profondément et bascula du pousse le sélecteur de son scruteur et passa en vision psycho. « Fini de s’amuser », se dit-il en esquissant un sourire, « et au boulot, mon gars ! » Dans le viseur intégré dans la visière de son casque de fibrocéramique, la vision panoramique se changea en numérique ; chaque passage du détecteur sur un travailleur montrait sans surprise la grille quasiment plate et uniforme d’un esprit bloqué. Fataliste mais consciencieux et ne s’attendant pas à trouver une cible évidente et valable dans ce troupeau amorphe, Vladi n’en continua pas moins consciensieusement sa mission de prospection en vue d’une cible maintenant malheureusement visiblement des plus hypothétique.

La moyenne de récup était désespérante, environ un cas sur six à sept camps prospectés, et encore, tout dépendait de la qualité de la récup, soupira tristement Vladimir. Et c’est alors qu’au moment où il allait se détendre un peu, que pour la première fois depuis plusieurs jours de chasses infructueuses, apparut dans son viseur, une brève, une infime lueur rouge, signe presque certain d’un écho positif ; il arrêta instantanément le balayage et resta bloqué sur l’azimut.

Vlad, le coeur battant la chamade se cala confortablement la coude dans la mousse, réduisit le faisceau de détection vertical sur vingt degrés et attendit, la respiration en suspend, de voir réapparaître le signal. « C’est pas possible autrement » se dit-il, « je l’ai pas rêvé cet écho. » Il essuya d’un revert de la main la transpiration qui lui coulait presque dans l’oeil ; « c’est pas le moment de déconner, mon vieux, » se dit-il impatient...

Et enfin, comme dans un songe irréel, dans le haut à droite de son viseur, un puissant et bref éclat rouge illumina tout son viseur...Le fameux, le flash fatidique, objectif unique et sacré des équipes de patrouilleurs qui sillonnaient la planète comme des chiens furieux en risquant leur peau à chaque sortie. Lui, Vlad, tenait enfin la marque incontestable d’un esprit positif, un esprit LIBRE !

Il faillit bien crier sa joie à Pédro, son coéquipier allongé dans l’herbe à sa gauche, et qui se tenait coi depuis un long moment. Ce dernier qui connaissait bien son Vladi, avait perçu sa tension subite et lui murmura en plaisantant. Oh ! t’as trouvé une girelle, mon mignon ? Mais devant le mutisme et la façon dont son collègue se concentrait sur son outil, il perçut de suite que c’était du sérieux.

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Vlad, certain maintenant qu’il avait une cible réelle dans le champ de son viseur, et de plus, une cible avec une signature psycho d’un éclat à l’intensité remarquable, mais...et ça le faisait enrager, en détection perso, en visu, il n’était pas foutu de localiser la cible, lui, le grand Vladimir, le roi des chasseurs de son district, se dit-il en un sourire de dérision. Il n’avait devant les yeux, en panoramique, que la grille plate et quasie uniforme des travailleurs pris dans le faisceau ; il y avait de quoi enrager de ne pas pouvoir localiser sa proie. Merde de merde ! s’écria-t-il en lui-même, rageur.

Il respira profondément, repéra parfaitement la position du dernier contact et reprit sa quête, lentement, méthodiquement, en branchant le multi-écran sur le ponoramique et en sélectionnant la détection par bande vertical, balayant ainsi l’espace devant lui en optimisant tout ce que ses détecteurs trouveraient sur un étroit secteur, le moindre echo serait ainsi amplifié à la puissance quatre.

Il repartit donc du haut du champ et descendit lentement sur sa gauche, et c’est ainsi qu’il localisa la cible, grâce en premier aux infrarouges, encore une fois les IR, se dit-il affirmatif : la signature la plus franche car totalement indépendante de tout activité psychique ou autre ; mais ce fut par hasard et il eut suffit d’un rien qu’il passa à côté...comme quoi ça tient à peu de chose souvent. Combien en avons-nous loupé ainsi, pensa-t-il furieux...

Difficile de faire une estimation juste, c’est pourquoi ils revenaient toujours, toutes les équipes de patrouilleurs agissaient de même, ils revenaient régulièrement revisiter les camps, et plus d’une fois ils avaient ainsi sauvé une cible non perçue la fois d’avant...Fallait dire aussi à la décharge des patrouilleurs, qui tous prenaient souvent courageusement des risques insensés, que dans ces camps il y avait de fréquents déplacements de leurs populations, plus les malades qui pouvaient ne pas être là le jour de leur chasse précédente, etc.

Et enfin il la localisa avec certitude. Sa cible était tout là-bas, de l’autre côté du champ, à environ sept cent cinquante mètres, cachée par un talus ou un tas quelconque de végétaux. La cible apparaissait à peine quelques secondes, juste le haut d’une tête, puis disparaissait dans son viseur pendant un long moment, signe d’une activité physique quelconque ; certainement en train de travailler, se dit Vladi. Alors, et alors seulement, il murmura à l’adresse de Pédro qui ne le lâchait pas des yeux, car il savait, connaissant son co-équipier de longue date, qu’il avait enfin trouvé son gibier.

-Pédro, lui dit-il dans un murmure, j’ai un éclat formidable à onze heures de l’autre côté du champ, derrière ce monticule ; mais pour l’instant je n’arrive pas à l’avoir en clair. Merde alors ! ragea-t-il, jamais vu une signature pareille, et j’ peux pas la voir en visu, c’est le comble, non ?

Pédro, allongé sur le côté, lui toucha doucement le bras pour attirer son attention et lui dit tout bas, que dans ce cas, il va falloir contourner la plantation pour aller au contact. Vlad, sans quitter son écran des yeux, mais avec un petit sourire sarcastique, lui rétorqua, la bouche en coin.

-Et où que t’iras te planquer de l’autre côté, hé patate ! il n’y a que de l’herbe...à moins que tu aies envi de te suicider, dis voir ?

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Pédro, une fois de plus et sans réflechir plus loin, comme d’habitude emporté par son élan de bien faire, trop bien faire même, venait de proposer une folie, de plus suicidaire, comme lui avait si bien fait remarqué Vladi...une fois de plus aussi. Depuis qu’ils formaient cette équipe de patrouilleurs, voilà de ça au moins cinq ans déjà, combien de fois le grand Vladi, le baroudeur, grâce à son expérience et surtout son extraordinaire instinct de chasseur, lui avait ainsi évité la mort, ou sinon pire, la capture par les troupes de gardes de ces exploitations agricoles. Leur spécialité de chasse, en cas de capture ils connaissaient le tarif : mort lente après des heures, sinon des jours de tortures sadiques par les gardes.

Pédro, lui, était le psycho de l’équipe, ni plus ni moins ; il n’intervenait uniquement que sur ordre de Vladimir, le chef de l’expédition, titre uniquement dû à ses réelles capacités sur le terrain, car dans leur Humanité nouvelle il n’y avait aucune hiérarchie suivant les poncifs antiques morts avec leurs auteurs et leur monde pourri. Bien souvent c’était à partir de là que commençait le danger le plus grand de l’entreprise de sauvetage, car dès que le ou la zombi plus ou moins gravement atteint percevait son contact mental, c’était alors parfois le déclenchement de la peur panique pour la cible.

Combien n’en ont-ils pas perdu ainsi, au dernier moment d’une récupération possible, frisant bien souvent la cata pour eux-même aussi...Mais c’est le métier qui veut ça ; quoiqu’il ne s’y faira jamais de les voir sauvagement massacrés parfois, par ces gardes, fauves hallucinés et zombis eux-mêmes.

Pédro est souvent pris d’un début de doute sur leur chance de réussite à reconstruire un autre monde, leur monde à eux, celui des Humains libres. Quand on voit, se dit-il, le gouffre qui nous sépare encore de ce bonheur possible, sinon mythique...Nous sommes si peu encore, toujours à courir après l’élément de plus de possible pour participer à la construction de ce rêve. Mais faut bien rêver, se dit-il fataliste, sinon y a plus qu’à se flinguer, merde de merde !

Vladimir affina le réglage de son tromblon, comme il aimait souvent l’appeler par dérision, depuis qu’il avait vu une vidéo sur ces engins archaïques à leur base souterraine secrète des Pyrénées. Sa cible maintenant fixée en mémoire, avec ses paramètres complets mémorisés, donc impossible de la perdre maintenant, pensa-t-il ravi, semblait se déplacer lentement vers la gauche et, remarqua Vlad, si elle continue comme ça, dans un quart d’heure au grand maximum elle va arriver à découvert, juste après ce long monticule qui la cache.

La sentinelle alors près d’eux s’était éloignée lentement et maintenant descendait franchement vers le champ et vers la droite, allant visiblement retrouver un collègue qui était au bout du champs, à l’abri du soleil sous un parasol, un espèce de taud militaire couleur kaki. Chemin faisant, le garde ne put se retenir de donner gratuitement un coup de cravache sur une vieille femme qui bêchait péniblement, celle-ci vacilla un instant, se secoua, puis repris son travail comme si de rien n’était. Vu son état, se dit tristement Vlad, cette pauvre vieille ne va pas faire de vieux os.

-Pédro, dit Vlad doucement, prépare-toi d’entrer en action, la cible va être bientôt en plein champ opérationnel, alors faudra pas perdre de temps et se

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planter dans le toutim, ok ? J’ sais pas ce que ça va donner, mais faut faire le maxi pour récupérer celui-là, ou celle-là car c’est un esprit clair comme j’en ai vu bien rarement...une perle, mon pote ! Alors concentre toi un maxi et emballe moi ça à ta célèbre façon de bidouilleur de première, ok l’artiste ?

-Si ça dépendait que de moi j’irai le ou la chercher en courant, alors tu vois, lui répondit son collègue.

-Je vois oui, toujours sans mesure, le Pédro, hein ? Attention, le voilà ; je passe en clair pour voir la bête de visue...Vlad laissa un long sifflement admiratif assourdi fuser entre ses lèvre...Pédro, souffla-t-il haletant, la cible...la cible, c’est...c’est pas possible...Pédro, tiens toi bien : c’est une perle de vingt ans...belle comme l’aurore et blonde comme les blés...Mamamia, mon frère...j’ai jamais vu une fille aussi belle, vise un peu.

Il passa rapidement son tromblon et lui dit, nerveux, vise-moi ce petit lot l’ ami...t’as intérêt à la récupérer rapidos car sinon c’est moi qui y vais en courant, ok ? Récupérant son scruteur, Vlad brancha la seconde connexion sur celui-ci pour le casque de Pédro, qui rabaissa sa visière devant les yeux pour pouvoir ainsi intervenir en direct sur leur cible. Il ne se branchait qu’en dernier, seulement au contact, toujours, pour garder l’esprit clair, non perturbé par les aléas de la chasse proprement dite.

Le casque du psycho comporte comme une maille intérieure, un léger filet en métal tissé paraissant une sorte de laiton fin incluant des sortes de larges disques de cinq centimètres de diamètre : un sur chaque tempes, et six autres répartis sur l’ensemble du crâne, l’ensemble est imprégné sur un tissu, filet qui enrobait le crâne ; le tout relié bien entendu par la connexion au scruteur et ainsi à l’ antenne de contact qui est ronde et convexe et fixée par trois tiges en métal ; le ‘centreur’ comme ils l’appelaient, c’était l’antenne qui captait leur proie.

La partie émétrice du système de poursuite, par laquelle le psycho prenait contact, était une espèce de poire de douze centimètres de diamètre, continuée par un long canon étroit de soixante-seize centimètres de long, couplé au télescope. Son faisceau émetteur pouvait par temps clair et sec suivre une cible jusqu’à près d’un kilomètre, l’impact tenait alors dans un cercle de deux mètres cinquante.

Fallait pas que le chasseur se loupe, ça non, fallait être un sacré tireur pour suivre ainsi la cible souvent mobile et ne pas la perdre...Tout ceci, suivant les conditions atmosphérique, bien évidemment. Par temps de pluie ou de brouillard valait mieux rester peinard à la maison, comme ils appelaient leurs grottes salvatrices.

Là-bas, de derrière la butte, venait d’apparaître une jeune femme d’une vingtaine d’année à peine. Elle en avait en fait dix-huit plutôt que vingt. Blonde dorée, des mèches tirant légèrement sur le roux à cause du soleil, les cheveux coupés courts, comme toutes ces femmes esclaves ; elle devait mesurer à vue de nez, se dit Vladi, dans les un mètre soixante-treize et peser dans les cinquante huit kilos. Ça c’était l’appréciation du chasseur expérimenté, avis toujours judicieux de sa part.

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Sous la combinaison informe de cette beauté, on percevait, ou plutôt on soupçonnait au hasard de ses mouvements, un corps aux formes généreuses et harmonieuses. Son visage mince était halé par le soleil, donnant à ses traits réguliers cette noblesse naturelle à la beauté parfaite. De grands yeux d’un bleu apparemment foncés où l’on sentait une intelligence affinée et sûre d’elle et de son pouvoir ; un nez fin rehaussait deux lèvres pulpeuses à l’arabesque délicate. Elle était habillée comme tous les esclaves, de cette sorte d’horrible combinaison de couleur orange vif, le bas du pantalon enfoncé dans des bottes en caoutchouc noires.

Elle trainait péniblement un grand sac de toile d’où en émergeait de l’herbe et des branchages, et elle semblait se diriger vers un petit muret enfoui dans la végétation...Elle se trouvait ainsi loin des gardes, et d’après les calculs d’appréciation de balistique de Vladi, chose inouïe, elle était maintenant et pour un grand espace de temps encore, hors de la vue des gardes qui semblaient l’avoir carrément oublié derrière ce monticule. Seule, elle était seule ! Incroyable mais vrai, ce que Pédro constata lui-même.

-Pédro, lui dit-il, dès qu’elle sera tout près de ce muret, tu entres en action, mon frère, mais je t’en supplie, sauve cette merveille.

Elle enrageait, comme toujours, de se voir ainsi au niveau d’un animal, mais le

plus dur était de voir ses compagnons complètement abrutis et insensibles sur leur propres sorts. Elle était ainsi la seule pensante au milieu de ce troupeau. Mille fois au moins elle avait essayé de les secouer, les réveiller, de leur faire prendre conscience de leur situation dégradante, mais non, ils étaient optus, fermés à tout raisonnement, toute logique...

Seulement son ami, Victor, un vieil homme, se souvenait-elle, lui avait péniblement expliqué qu’ils étaient ainsi prisonniers de maîtres qu’on ne voyait jamais mais qui pourtant existaient bel et bien, résidants loin au-delà des collines et qu’ils habitaient dans des villes. Elle avait cru comprendre que c’était des sortes de grandes maisons...qu’ils étaient très nombreux, puissants, riches et dangereux ; les gardiens leur appartenaient aussi et de leur part il n’y avait que la mort à attendre, comme elle l’avait malheureusement constaté bien des fois.

Marion, lui avait dit et répété Victor bien souvent, comme pour lui graver ces paroles en son esprit : tu es comme moi, tu as un esprit différent des autres compagnons, qui eux sont devenus comme des animaux, à cause de ces maudits émetteurs d’ondes dans les dortoirs ; garde toujours secret ce pouvoir de penser et réfléchir par toi-même, car si les gardes s’en aperçoivent tu risques te faire tuer, sois toujours très prudente...Peut-être qu’un jour des secours viendront, mais...rien n’est moins certain, mais malgré tout, garde toujours un peu d’espoir.

Ainsi depuis toujours, consciente qu’elle avait un plus dans sa tête, elle s’était peu à peu, en apparence, résignée à supporter cette vie d’horreur, vie de néant et sans plus aucun espoir de s’en sortir et ce, malgré qu’elle rêva longtemps qu’un jour quelqu’un apparaitrait pour la sauver mais, seul jusqu’à ce jour, le désespoir fut son compagnon journalier.

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Elle arriva exténuée au muret, laissa son sac contre la pierraille brûlante de soleil ; essoufflée, du revers de sa main elle essuya la transpiration sur son front, puis, mourant de soif sous ce soleil de plomb, elle se baissa pour prendre une bouteille d’eau dans son sac de toile entreposé à l’ombre, et tout à coup elle se figea telle une statue, une peur monstrueuse s’insinua en elle, si forte qu’elle en fut paralysée sur place, incapable de bouger un seul doigt car, alors qu’elle était seule et loin des autres, ça elle en était sûre et certaine : quelqu’un lui parlait dans sa tête !

La voix...une voix douce, une voix d’homme, lui parlait lentement, calmement, une voix aux inflexions rassurantes, une voix chaude, amicale, et non l’ aboiement coutumier des gardes, et ça lui disait, « Bonjour, n’ayez pas peur de ma voix surtout, je suis un ami, un ami venu de loin pour vous sauver.Vous aimeriez être sauvée, partir de ce lieu mauvais pour vous ? Ne bougez pas d’où vous êtes pour ne pas alerter les gardes surtout, d’accord ? Répondez-moi en pensée, pensez très fort à votre réponse et je vous entendrai comme vous m’entendez, d’accord ? qu’en pensez-vous ? mon nom est Pédro, et le vôtre ? »

Elle ne savait plus réfléchir, penser, elle la pensante, restait plantée là, hagarde, puis elle s’enhardie lentement et reprit vite son naturel, son allant de fille courageuse et combative. Haussant les épaules d’un air fataliste elle se dit, se forçant à rire, mais d’un rire crispé malgré tout, « Voilà ce que c’est que de trop rêver, penser aux miracles » ; alors, provocante, se redressant, elle pensa très fort et railla cette voix imaginaire.

-Si tu es Pédro, l’esprit farceur, moi je suis Marion, l’esclave clouée à cette terre infâme, alors, où es-tu l’ Pédro qui vient narguer les esclaves, hein ? bien en peine de te montrer, l’ guignol, hein ?

Et la réponse fusa comme un éclair aveuglant dans sa maudite caboche de fille. -C’est un joli nom Marion, ma soeur s’appelle ainsi ; alors, Marion, reste calme

et tourne-toi lentement vers ta gauche, calmement...voilà, comme ça, je te vois d’où je suis, en face de toi dans ce bois de l’autre côté du champ. Tu vois que ce n’est pas une farce, hein ? Tiens ! fais quelque chose, un petit geste, et je te dirai ce que tu fais, pour te prouver que je te vois et que je ne suis pas un rêve comme tu le penses, allez, Marion, vas-y !

La fille, surprise, hésita un moment puis, décidée, fit une grimace et tira vite la langue vers le bois.

Et la voix lui répondit en riant. -Oooh ! belle grimace et jolie langue, Marion ! Pédro sentit nettement son esprit se détendre un peu, puis il continua son job. -Bien, maintenant tu vois le bois en face de toi...alors, reste bien calme, ne fais

pas de gestes brusques...je vais te montrer où je suis, caché dans les buissons...je vais t’envoyer un signal lumineux, il n’y a que toi qui pourras le voir, d’accord Marion, tu es prête ?

Maintenant, ahurie pour de bon, elle se mit à penser à toute vitesse : Oui...je suis prête...pensant aussi dans un souffle, que si c’est un cauchemard alors il vaut mieux mourir tout de suite.

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-Non Marion, ce n’est pas un cauchemard, et tu ne vas pas mourir mais quitter ce camp, alors regarde bien maintenant, tu vas voir trois éclats lumineux pour te signaler où nous sommes.

Et sur un signe de Pédro, Vlad envoya les trois éclats lumineux avec sa torche . Elle en fut suffoquée, puis l’évidence l’illumina brusquement d’une joie

intense : Un rêve n’envoie pas des signaux lumineux en plein jour ! Alors ? -Marion, es-tu convaincue maintenant qu’il ne s’agit pas d’un rêve ? Appelle-

moi par mon nom, Pédro, d’accord Marion ? -Oui, Pédro, répond elle, la poitrine haletante, puis, réaliste elle demanda.

Comment sais-tu mon nom ? Il fut heureux et fier de constater qu’elle avait un esprit alerte et claivoyant,

c’était vraiment La Perle que tout patrouilleur rêvait de ramener fièrement à la station.

-Marion, je t’expliquerai tous ça après, mais pour l’instant il y a plus urgent : il faut te sauver, tu comprends ? alors écoute-moi attentivement. Veux-tu venir avec nous de suite et tu n’auras plus jamais à travailler ainsi, et tu auras une vie totalement libre, tu auras plein d’amis qui sont comme toi, avec un esprit libre de dire et faire ce qu’ils veulent. Tout le temps et partout tu vivras dans un endroit très joli où tu seras en sécurité, tu auras pleins de choses qui t’appartiendront, seulement à toi...Alors, veux-tu venir vivre avec nous, Marion, être libre ?

-Oh oui Pédro ! mais quand ? comment ? vite ! Il sentait son esprit prêt à craquer de trop de tension, il enchaîna rapidement. -Parfait, écoute bien mes recommandations pour ne pas attirer l’attention des

gardes, c’est très important, tu le comprends n’est-ce pas ? Tu vas voir que c’est simple, ne t’affole surtout pas, reste calme, respire lentement, profondément pour t’aider à te détendre...comme ça...voilà, c’est bien, ça va mieux maintenant, ça sera vite fait tu vas voir, fais-moi confiance, mon travail c’est de te sauver, promis Marion ?

Un ‘oui’ fulgurant lui répondit de suite. -OUI, mais s’ils me voient marcher à travers du champ ils vont me battre et

m’endormir avec leur bâton de feu...je peux mourir pour ça. -N’aie pas peur Marion ; j’ai les moyens de rendre les gardes aveugles et

immobiles pour un long moment, environ dix minutes, ça suffira largement pour que tu coures nous rejoindre et nous partirons de suite dans une cachette et ils ne s’apercevront de ton départ que quand nous serons déjà très loin d’ici. Tu es toujours d’accord ? Tu dois venir de ton propre gré, tu dois le vouloir.

-Oui ! oui ! je comprends, dit-elle impatiente de tout ces discours. Bien sûr qu’elle voulait foutre le camp de cet endroit maudit, franchement, c’était pas le peine d’en faire tout un plat...mais, pensa-t-elle oppressée, faut faire vite parce que la relève de la garde ne va pas tarder.

-Donne-moi une toute petite minute Marion, je règle mes appareils pour immobiliser les gardes, puis je te rappelle, n’aie pas peur, à tout de suite, et ne bouge pas d’où tu es.

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-Vlad, dit-il, vite, elle est prête, faut envoyer le flux du brouilleur mental de suite...et n’oublie pas d’entrer les données de son mental en Sauvegarde, hein ? Fais pas la connerie de nous l’endormir aussi ; il manquerait plus que ça, pour une fois qu’on tire le jackpot...une perle de cet acabit ; je suis sûr qu’elle a un niveau de refraction à plus de cent, cent quarante...et de loin même, pour avoir résisté comme ça...et la forme qu’elle a ; elle a un esprit d’une vitalité incroyable, elle est fraîche, spontanée...crois-moi mon pote, ça va être du sublime cette fille...si elle nous pond des mioches de son accabit ça va être l’enfer pour ces pourris de Zanko-Khuigs qui...

Vlad, le laissait parler à bâton rompu, sentant que son pote avait besoin de décompresser après cette tension dialectique psycho, ce qui l’épuisait toujours pour un bon moment : la peur de tout rater par précipitation. Là il pouvait jacter le frère, c’était du mérité, amplement même...Il voyait la fille là-bas, qui se tenait apparemment calme mais il percevait sa tension, alors qu’elle faisait semblant de ramasser de l’herbe ; pas folle la guèpe, se dit-il en souriant, et maligne en plus, la garce, c’est pour ça qu’elle a survécue, intelligemment ; quel courage il lui a fallu, la pauvre môme.

Enfin, le bombardier d’infrason à pulsions fut méticuleusement réglé et prêt à tirer. C’est un genre d’affut de mortier sur un trépied, un gros tube noir de dix centimètres de diamètre et d’un mètre vingt de haut, surmonté d’une large antenne convexe de quatre-vingts centimètres de long sur cinquante de large, évidemment pointée vers le champ en contre-bas, vers les gardes.

Vlad se tourna vers Pédro qui s’était tu et le regardait régler son bidule en se rongeant les ongles, nerveux...

-Pédro, paré, dis-lui qu’elle se tienne prête à courir quand tu lui diras. Pédro se concentra et, sans que rien ne le laisse deviner, la communication fut

rapidement faite avec Marion. Il se tourna vers Vlad, le regardant intensément et, croisant les doigts des deux mains lui dit d’y aller, GO !

Rien d’apparent ne se passa, mis à part un très léger bourdonnement du bombardier, sauf que les gardes et les travailleurs se figèrent sur place et que quelques uns perdant leur équilibre tombèrent au sol, c’est tout. Quand ils se réveilleront ils ne ressentiront qu’une sensation de vide passager, et pour certains un mal de tête subit et inexplicable, sans plus, ce qui était capital pour le succès de leurs travail, il ne fallait surtout pas, pour le bien de la poursuite de leurs opérations de commandos, que les gardes comprennent ce qui se passait réellement. Ces derniers constataient alors, le plus souvent bien plus tard de la disparution mystérieuse d’un esclave, cela, le soir la plupart du temps, lors de l’appel des compagnies.

Qu’en était-il de leurs inquiétudes à ce sujet ? Mystère, mais vu le peu de consídération dont ils faisaient preuve à leur égard, ils en venaient à penser que ces disparitions sporadiques ne les préoccupaient pas le moins du monde...ou si peu, que c’était tout bénéfice pour eux-même, les Humains libres, qui pouvaient ainsi poursuivre leurs chasses effrénées.

Pédro brancha la source lumineuse vers Marion, l’appela et lui dit de courir vers eux, et qu’il n’y a maintenant aucun danger pour elle, lui dit-il. La fille, un

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instant hésitante se mit à courir en travers du champ, jetant des regards effrayés vers les gardes, là-bas, étrangement immobiles, certains de tombés dans le champ...ainsi que ses compagnons, pensa-t-elle en un éclair.

Pendant ce temps ils avaient levé le camp, embarqué leur légers matériels dans deux sacs de toile forte de couleur camouflage..Elle fut sur eux en un rien de temps, haletante et épouvantée de ce qu’elle venait de faire, qu’elle avait osé faire : désobéir effrontément aux ordres ! Elle leur tomba dans les bras, surprise car elle ne les avait pas vu à moins de deux mètres d’eux ; leur dispositif de brouillage de visu étant encore branché.

-Pas le temps de faire les présentation, lui dit Pédro avec un grand sourire, la prenant par le bras, il rajouta, faut déguerpir d’ici en vitesse.

Vlad coupa la faisceau du bombardier, replia l’antenne puis jeta l’appareil sur l’épaule et dit à Marion.

-On a exactement six minutes pour se tirer avant qu’ils se réveillent, en montrant les gardes du pouce par-dessus son épaule ; on a un vaisseau d’évacuation qui nous attend à moins de trois cents mètres d’ici ; on a le temps, mais c’est pas une raison pour se prélasser dans le coin. Faisant un grand et chaleureux sourire à Marion, il rajouta.

-À moins, ma beauté, que t’ aies des regrets de quitter ce joli coin, hein ? Elle le regarda, sidérée, puis parti en courant sans répondre, à la suite de Pédro

qui trouvait que l’instant n’était des plus propices aux conciliabules. Ah ! ce Vlad ! pensa-t-il en riant, toujours à braver insolemment la mort.

Ils furent très vite en vue du perceur, leur vaisseau de prospection qui avec ses sept mètres de longueur était facilement planqué dans une minuscule clairière.

C’est un engin à la coque faite de parois plates, les angles à peine arrondis, le toit légèrement bombé, enfin, pour celui qui aurait pu le voir à l’instant, d’une hauteur d’environ trois mètres sur quatre de large. Le dessous était plat et l’engin reposait au sol sur quatres béquilles rabattables et trapues de quatre-vingts centimètres de hauteur, la coque était noire et il était difficile de déterminer de quel matériau elle était constituée. L’avant de l’appareil, le pare-brise en fait, est constitué d’une courte pyramide tronquée, les quatre panneaux latéraux et le rectangle assurant une vision totale au pilote.

Quatre petits petits hublots de chaque côté, en face de quatre doubles rangées de deux sièges. Aucune part ne laissait supposer une sortie d’échappement de gaz, pas de dérives, ailerons ou autres, l’ensemble était quasiment lisse. En fait, cet engin de conception révolutionnaire et toute récente (nous verrons plus loin dans ce récit, l’origine extraordinaire de cette invention), fonctionne sur le principe de la gravité, ou plutôt sur son contraire, l’annulant.

Il se déplace ainsi verticalement par simple effet de réaction, si l’on peut dire, à l’attraction terrestre. Il tire l’énergie présente dans l’univers, gratuite et à profusion, ce qui donnait à ce type d’engin une autonomie illimitée ; la coque étant le support même, le moteur antigravitique ; pas de machinerie là-dedans, un simple procédé électronique suffisait à son extraordinaire déplacement silencieux...

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Le problème majeur, pour l’instant, était la vitesse de propulsion des plus limitée, car il ne se mouvait qu’en orientant ce fameux effet de rejet de l’attraction planétaire. Ils ne pouvaient atteindre ainsi au maximum que quatre cent cinquante kilomètres à l’heure...On leur avait promis pour bientôt un système beaucoup plus performant. Mais ce type d’engin avait à son arrivée fantastiquement révolutionné leurs chasses et énormément augmenté le sauvetage d’esclaves récupérables, car avant sa venue, imaginez un peu de l’aventure des pionniers : les déplacements se faisaient à cheval ; et encore, seulement après que les tous premiers survivants parvinrent à attraper des chevaux, puis les dompter, ce qui ne fut pas rien pour ces gens inexpérimentés de la chose...comme de la plupart de tout.

Les modestes mais providentielles dimensions répondent parfaitement aux objectifs discrets dont ce type d’appareil était amené à effectuer : voler des esclaves, leurs frères, à ces assassins dégénérés du genre humain. Ces descendants maudits et exécrés de cette race d’esclavagistes, haïs, dont chaque être vivant de leurs communautés se préparaient depuis des siècles à les détruire jusqu’au dernier ; c’était leur hymne, leur songe, leur objectif sacré, le credo de chacun, de l’enfant au vieillard : tuer une fois pour toutes toutes ces ordures de Zanko-Khuigs et leurs sbires, ces gardes maudits.

En déboulant dans la clairière, Vlad stoppa Marion dans sa course affrénée en la retenant par un bras, avant qu’elle ne percute de plein fouet le perceur quasiment invisible sous son champ de distorsion spectrale. Seulement percep- tible à un regard attentif qui aurait perçu comme une légère brume à la place de l’engin. Vlad, un boitier en main, tapa rapidement un code sur un petit clavier puis appuya sur un bouton, et dans cette brume, comme par magie, une trappe s’ouvrit en s’abaissant et dévoila quelques marches, au plus grand désarroi de Marion qui crut un moment avoir à faire à de la sorcellerie pure et simple. Ils l’entraînèrent rapidement avec eux à l’intérieur, et pendant que Vlad s’installait aux commandes, Pédro fit asseoir Marion dans un des sièges de toiles et lui sangla la ceinture de sécurité.

L’engin, quoique ventru avait pour intérieur un décor des plus spartiate ; on percevait de suite que l’efficacité avait été l’unique préoccupation de ses concepteurs, on peut même dire que la finition laissait franchement à désirer. Huit sièges de toile forte montée sur une armature métallique visible, occupaient l’espace en deux rangées doubles séparées par une étroite coursive qui donnait accès directement au poste de pilotage intégré à cet unique espace intérieur ; il en était seulement séparé si besoin était, par un simple et épais rideau de couleur bordeaux, pour l’instant rabattu sur un côté.

Derrière les deux rangées de sièges, est un espace libre d’environ un mètre quatre-vingts de profondeur, où ils avaient abandonné leurs matériels en arrivant, espace qui donnait accès à la porte rabattable et les marches donnant sur l’extérieur.

Un très léger bourdonnement, comme un murmure à peine audible se fit entendre et par le hublot à sa droite, Marion, définitivement effarée par tous ces brutaux évènements, vit au dehors les arbres disparaîtrent vers le bas et se

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retrouver rapidement dans les nuages, et le comble, pensa-t-elle, sans la moindre sensation de mouvement de cette machine du diable, très certainement.

Pédro, assis à côté d’elle, lui dit calmement avec douceur, en lui souriant. -Marion, je suis Pédro, et mon collègue se nomme Vladimir, qui est le roi des

chasseurs, ajouta-til en riant. Il faut faire rapidement une petite chose en premier.

Tout en parlant il avait prit un sac sur le siège en arrière. -N’aie pas peur, je vais prendre quelques appareils pour te protéger d’un léger

danger qu’il y a encore, mais ça sera vite fait, tu vas voir, reste calme, tu ne risques rien, d’accord ? Tu me fais confiance ?

Elle hacha lentement la tête avec un air visiblement pas rassurée. -Il faut que j’enlève un petit appareil espion qui est caché sur ton corps, pour

ne pas que les gardiens sachent où tu es, tu comprends ? N’aie pas peur surtout, cet appareil est tout petit et moins gros qu’un grain de riz et il est caché, juste sous la peau, alors tu vois...

Elle hochait la tête lentement, visiblement au bord de la panique, elle était tendue, respirant rapidement. Il la rassura le mieux possible et lui caressa doucement la joue...

-Reste calme, Marion, ce sera vite fait, tu verras, et tu ne sentiras rien, promis. Il lui installa une sorte de grande capeline assez lourde sur elle, englobant le

siège et allant jusqu’au sol ; cet ensemble incluant du plomb était supposé faire écran aux détections des satellites des Zanko-Khuigs. Puis il prit un appareil, une sorte de petit plateau avec un manche court, avec un cadran sur un côté.

Sous la cape et par une fente dans celle-ci, il le lui passa lentement sur son corps, à le froler, explorant méticuleusement chaque centimètres carrés. Sachant par expérience où chercher, il trouva rapidement le signal de la cible : un microchip à l’arrière du haut du bras gauche, dans le muscle intérieur de celui-ci ; il s’y attendait en fait, ils étaient presque toujours situés vers cet endroit.

Il écarta la cape sur le côté, la fit se pencher un peu en avant sur le côté droit, et discrêtement, hors du regard de celle-ci, il prit un petit cutter et ouvrit sa combinaison en croix sur vingt centimètres, rabattit les coins vers l’intérieur, dégageant ainsi une large surface de peau, puis il prit un stylo feutre dans la poche au revers de sa manche gauche, repassa le détecteur en tenant appuyé un bouton cette fois-ci, et au signal du chip, un mince faisceau lumineux indiqua un point sur la peau, le chip était juste dessous ; avec un crayon marqueur il traça un cercle autour de l’emplacement du microchip espion implanté sur tous les esclaves et très certainement sur tous les gardes.

-Je l’ai trouvé, Marion, lui dit-il souriant, c’est bientôt fini ; tourne-toi encore un petit peu sur le côté...voilà, très bien, tu vas sentir une toute petite piqûre mais n’aie pas peur, tu ne risques rien, je te le promets.

Il prit une petite seringue dans la même poche que le stylo, ainsi qu’un petit flacon d’un produit stérélisant dont il frotta la peau avec un bout de coton hydrophile et lui fit de minuscules injections en trois points autour du point central marquant l’emplacement du microchip...

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-C’est presque fini, Marion ; il lui piqua doucement le bras...tu sens quelque chose derrière ton bras ?

-Non, dit-elle appeurée, car ne voyant pas ce qu’il faisait à son bras...mais d’instinct, elle sentait que c’était pour son bien, et puis...elle n’avait pas le choix. Quelle aventure !

-Très bien, ne bouge plus, j’ai presque fini. Du temps qu’il lui parlait il avait sorti un minuscule bistouri avec lequel il fit

une entaille de un centimètre de long, et il sentit au bout de la lame le contact du microchip à quelques huit millimètres sous la peau, il s’empara d’une pince effilée, fouilla un peu dans la plaie et sortit cette saleté de microchip qu’il jeta rapidement dans une boîte aux paroies épaisse et la referma prestement d’un lourd couvercle : elle était en fait en plomb, et il allait la ramener à la station pour vérifier si ce chip ne contenait pas des éléments non répertoriés. Il essuya le peu de sang, nettoya la plaie avec un antiseptique et colla un large pansement adhésif sur le local. Il rangea ses ustensibles dans sa poche et vint devant une Marion prête de paniquer.

-Voilà, j’ai fini d’enlever cet espion qui était dans le derrière de ton bras, on te le fera voir à la station, ça s’appelle un microchip, avec ça ils pouvaient te suivre partout où tu allais et savoir où tu étais. Maintenant, tu as un petit pansement à ton bras, tu peux le toucher mais il ne faut pas l’enlever pour l’instant, on te dira quand tu pourras, à la station, d’accord Marion ?

Elle le toucha timidement du bout des doigts, rassurée que tous ces mystères soient enfin finis.

-Maintenant c’est fini, continua-t-il lui souriant, ils ne pourront plus jamais te retrouver. Pour ces maudits gardes tu as disparu, ils ne sauront plus jamais ce que tu es devenue, tu comprends ? Il n’existe plus de Marion, pour ces salauds, t’es contente ?

-Oh oui ! merci beaucoup, Pédro, dit-elle en poussant un long soupir de délivrance ; que ces gardes pourris crèvent tous...oui, tous ! disait-elle d’un air farouche et résolu.

-Crois-moi, Marion, de ça aussi on s’en occupe. Il lui sourit gentiment et s’assit à ses côtés, et ne dit plus rien durant un

moment, la laissant penser à ces événements brutaux...faire le point. Mais, en habitué, voyant son désarroi, comme tous ceux qu’ils sauvaient ainsi, il lui prit doucement une main dans les siennes et l’appela doucement par son nom.

-Marion, tu vois, tu es sauvée maintenant...plus jamais tu n’auras à craindre les gardes, ni personne d’autre, tu comprends ? détends-toi maintenant, il n’y a plus aucun danger, je te le promets.

Le fixant d’un regard sans fond, fixe, tendu...elle hocha lentement la tête, étant incapable de sortir une parole tant sa tension nerveuse était devenue intense, maintenant que tout était fini...cette aventure folle...cette peur dévorante qu’elle avait subi toute sa vie d’esclave.

-Marion, lui murmura-t-il en souriant toujours, je te souhaite la bienvenue parmi les Humains libres, car tu as des milliers de frères et soeurs à partir de maintenant, et fasse qu’à partir de ce jour, l’amour et la félicité soit pour

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toujours dans ton coeur. Il se pencha et l’ambrassa légèrement sur la joue et lui murmura encore : bienvenue parmi nous ma soeur, où tu es enfin chez toi, parmi les Humains libres.

Ce fut de trop d’un seul coup, pour une telle âme en perdition depuis si longtemps, cette douceur, cette gentillesse de son sauveur avait littéralement achevé, balayé d’un seul coup son pouvoir de résistance, et elle qui se croyait si forte...et, chose qui ne lui été plus jamais arrivé depuis sa plus tendre enfance, elle s’effondra en longs sanglots contre l’épaule de Pédro, qui lui tapotait doucement la joue, un bras passé autour de ses épaules, la serrant contre lui, il rajouta en parlant lentement, doucement.

-Pleure, Marion, pleure toutes tes larmes de malheur, qu’elles quittent ton corps pour toujours...Pleure ma chérie, ne les retiens pas, ces larmes-là sont ta délivrance, laisse les couler sans retenue...Tu pleureras encore dans ta vie, mais ce seront alors uniquement les larmes du rire, de l’amour et de la joie...N’aie plus peur car tu ne connaîtras plus jamais le malheur, je te le promets au nom de tous nos frères et soeurs...Marion, tu vas vivre maintenant dans un monde où n’existe que l’amour, l’amitié et la générosité...où les gens travaillent volontairement et avec plaisir et dans la joie, seulement, ils s’aiment, chantent, rient et dansent...Tu seras heureuse maintenant, c’est promis.

Un long, très long moment après, une fois calmée, il se leva et lui détacha sa ceinture et lui expliqua ce qu’ils faisaient et où ils allaient.

-Marion, maintenant nous allons vers notre base secrète qui est cachée sous une montagne, c’est en fait une grotte naturelle, bien à l’abri et très loin des Zanko-Khuigs, tes anciens maitres (Il fut obligé de lui expliquer qui étaient ces étranges personnages qu’il nommait ainsi). Dans cette base secrète qui est un grand village, nous sommes actuellement environ trois mille et cent douze personnes, et sur toute la planète il y en a des centaines, des milliers comme la nôtre, et certaines de bien plus grandes encore.

Grand effarement de Marion devant ces chiffres astronomiques sans réelle signification pour elle qui n’avait jamais vu ni imaginé qu’il puisse exister autant de personnes sur cette terre.

-Quand nous serons arrivés, dit-il, tes nouveaux amis qui sont tous tes frères et soeurs maintenant, comme Vladimir et moi, te feront une petite fête de réception pour te souhaiter la bienvenue, tu verras, ça va être super sympathique. Un homme et une femme de ton âge seront choisis par tirage au sort pour t’accompagner quelques jours et t’installer le mieux possible parmi nous. Ils te donneront de nouveaux et jolis vêtements tous neufs, rien que pour toi ; ils t’expliqueront tout de notre village, comment nous vivons et tu auras rien que pour toi un endroit très joli et confortable pour y habiter, et tu pourras parler avec qui tu veux, aller où tu veux, quand tu veux...et beaucoup, beaucoup d’autres choses merveilleuses que tu découvriras peu à peu.

Ainsi tu n’auras absolument aucun souci à te faire pour commencer ta nouvelle vie, tu pourras leur demander tout ce que tu veux ; tu comprends Marion ? En fait, je suis presque sûr...non, je suis certain maintenant que tu vas être la reine de notre station, tellement tu es jolie...Sais-tu, Marion, que tu es très belle ? lui

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dit-il en lui pressant sa main dans les siennes. Tous les garçons vont tomber amoureux de toi dès qu’ils te verront.

Elle le regarda avec des yeux ronds comme des billes, devant de tels propos si étranges, mais qui réveillaient d’étranges échos dans sa poitrine et son esprit chamboulé par toutes ces incroyables révélations .

Mais il n’osa pas lui avouer que pour son compte, il était amoureux fou d’elle depuis l’instant où il lui avait effleuré son esprit. Il se leva, remonta l’accoudoir central, puis la fit doucement s’étendre pour se reposer un moment ; il alla vers un placard, y prit une bouteille et remplit un grand verre d’un liquide ambré qu’il lui tendit.

-Pour te détendre, lui dit-il, et en totale confiance elle but ce délicieux breuvage sucré parfumé à la pêche.

Cinq minutes après elle dormait profondément sous les effets d’un narcotique. Le perceur mit plus longtemps que prévu pour rejoindre sa base car leurs

drones de surveillance automatique avaient détecté aux alentours de la région de celle-ci, deux vaisseaux de ces infâmes chiens de Zanko-Khuigs. Leurs drones, ces baladeurs presque sphériques d’approximativement trente-cinq centimètres de diamètre, fonctionnent également par effet antigravitique, ainsi ils sont lancés seulement aux moments des sorties et rentrées des équipes de patrouilleurs. Ces deux engins espions des Zanko-Khuigs les avait obligé à se planquer quelques heures au milieu d’un énorme nuage, un gigantesque cumulonimbus qu’ils suivirent lentement dans son déplacement vers l’Est.

Mais qu’importait le retard avec le trésor qu’ils ramenaient. L’Avantage crucial sur les armées de Zanko-Khuigs, et c’était là leur talon

d’Achille, c’est que leurs gardes subissant aussi une manipulation de contrôle mental, même soit-elle légère, pour les tenir sous la coupe de leurs maîtres à tous, les Zanko-Khuigs ; ce procédé enlevait à ces semi-humains, qu’ils étaient donc devenus, la faculté d’analyse élémentaire des situations ; faculté indispensable à toutes élaboration de la moindre stratégie suceptible du moindre succès.

En deux mots, leur esprit d’initiative et leurs réflexes étaient au niveau de celui d’un escargot des plus performants ! Ils ne devaient leur suprématie provisoire, qu’à leur nombre et surtout leurs redoutables forces militaires et armements terrifiants ; seule, la feinte et la surprise en viendra à bout ; tout un chacun savait cela, autant qu’il avait dix doigts dans les deux mains.

Depuis le début, les patrouilleurs qui furent à l’époque capturés ou descendus au combat, furent toujours plus victimes du fait du hasard, d’une confrontation fortuite, que d’une préparation structurée de la part de ces débiles arrogants et infatués d’eux-mêmes et de leurs mythique invincibilité...L’astuce était justement de les conforter dans cette opinion. C’est pour cela que les patrouilleurs évitaient le contact au maximum ; ils ne devaient tirer qu’en extrème et dernier ressort : ces pourritures devaient continuer d’ignorer leurs existence.

Mais avec les nouveaux moyens de prédétection que nos gars possédaient depuis plus d’une décade, ce genre de rencontre était maintenant pour ainsi dire

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inexistante. Ce qui avait doublement l’avantage de rassurer les guignols galonnés des Zanko-Khuigs qui se croyaient ainsi à l’abri de la moindre attaque, et devaient certainement penser, vu leur incommensurable fatuité, qu’ils avaient certainement anéanti cette racaille sauvage qu’ils rencontraient sporadiquement dans les anciens temps...La règle d’or était d’impérativement esquiver le contact, point final...Se faire oublier ; seul moyen de les démolir un jour, eux et leurs maîtres vérolés.

Ainsi, depuis leur prise de contrôle de la planète, au tout début du XXIè siècle,

les Zanko-Khuigs (injure venant du monde ancien pour désigner les anciens américains associés et complices d’une sorte de secte, peuplade maudite), aveuglés par leur succès et leur suprématie technologique, particulièrement dans le domaine des armes, s’étaient, au fil du temps, proprement endormis sur leurs lauriers, n’ayant que mépris pour cette racaille sauvage qui circulait encore parfois à l’état libre...

Dédain au plus grand profit exclusif de ces derniers : les Hommes libres, reclus dans les refuges naturels pour la plupart, tels que les grottes heureusement abondemment réparties sur toute la Terre, lieux de refuges et de résurrection de l’Humanité : que l’on écrivait toujours avec un H majuscule, terme désignant les Hommes et les Femmes libres, toujours écrits avec une majuscule également. Cette Humanité erratique et folle qui s’apprêtait une fois encore à repartir à l’aventure depuis ces grottes providentielles ; matrices d’une forme fragile de vie, mais ô combien ardente, farouche et résolue.

Cela n’avait pas été facile, car quand eut lieu l’attaque des centres les plus importants en 2015, principalement et en premier lieu sur les nations riches de l’ hémisphère nord : la Merdika du Nord (Amérique), l’Asia, l’Euromorte (Europe), la Chintok et le Jap (par mépris du monde disparu, ils ont déformé les noms)...toutes nations qui ont heureusement disparu, et les destruction massives des populations par les épandages aériens de gaz mortels ; il en résulta en quelques jours la disparition brutale de la majorité de l’humanité qui se montait alors à environ 7.5 milliards d’individus, les épidémies faisant le reste. Ce fut le chaos total, l’espèce humaine fut à deux doigts de disparaître à jamais et la planète détruite, pense-t-on.

Puis, ces monstres de Zanko-Khuigs s’établirent les maîtres de la planète, habitant pensait-on les principales capitales du monde, ainsi que quelques régions touristiques d’alors ; car ils ne sont guère nombreux par rapport aux masses gigantesques d’esclaves enchaînées à assurer leur subsistance, leurs luxes et perversions innommables.

Ainsi, ils avaient asservi brutalement les masses depuis longtemps désarmées sous le falacieux prétexte de préserver leur propres sécurité. De tels propos ne purent être éfficaces que sur des populations depuis longtemps abruties et manipulées avec l’aide de leurs politicards et les médias complices et vendus obséquieusement aux pouvoirs de leur argent mafieux. La seule satisfaction c’est que ces derniers furent les premiers à crever dans leurs si belles villes poubelles, qui furent leurs tombeaux.

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On estime qu’il ne resterait actuellement qu’à peine moins d’un total d’un million d’habitants environ sur toute la planète, tous confondus : tortionnaires, esclaves et Hommes libres. Il faut, et ce fut maintenant admis par tous les survivants connus de ce gigantesque génocide, il faut reconnaître que l’humanité ancienne était arrivée au point d’éclatement, au point de rupture démographique insupportable par une telle masse de populations insanes pour la plupart, de plus, analphabètes, ignorantes et incapables d’assurer le minimum de leur subsistance.

De tout ceci et après le génocide, résulta le sursis indispensable pour que la Terre, après un long siècle d’incertitude, réussisse et commençe lentement à s’autorégénérer et évacuer un taux hallucinant de pollutions de toutes sortes ; véritable miracle de la nature, car sans cet arrêt brutal d’apport journalier de polluants, la planète était irrémédiablement condamnée.

Déjà, les continents brusquement débarrassés de ce troupeau d’humanité sordide et n’ayant aucune utilité ni aucun sens, furent les premiers à recommencer à revivre lentement, l’apport de cet énorme degré des pollutions journalières disparu du jour au lendemain, pollutions découlant de ces milliards d’humains évaporés d’un seul coup, fut la source de ce renouveau, un gigantesque choc salvateur en somme. Car il est maintenant reconnu et admis qu’une planète et la population qui l’occupe, doivent évoluer en symbiose.

De cette harmonie qui en résulte, née une humanité supérieure et intellectuellement accomplie car intrinsèquement tournée vers le véritable don de soi et l’amour inconditionnel de son environnement. Chacun maintenant est respectueux et responsable de la biocénose terrestre, et s’implique en tout temps à l’entretien, respect et amélioration de son biotope.

Durant plus d’un siècle, suite à l’arrêt brutal d’apports de nouveaux polluants, les pluies lavèrent les strates des terrains engorgés de polluants chimiques, aidant en cela les océans à recycler la pollution. Ainsi et peu à peu, les élevages intensifs disparus, eux si préjudiciables à la vie, certains animaux retournèrent à l’état sauvage ; les champs abandonnés retournèrent en jachères ; les bosquets épars sont devenus des bois, eux-mêmes s’étendant en magnifiques forêts régénérant l’air et l’espace en une splendeur où prolifèrent toutes sortes de gibiers qui furent longtemps la principale source d’alimentation des survivants ayant échappés à la mort brutale puis à l’esclavage.

Et si, depuis, l’Homme libre assure sa propre alimentation en partie dans les cultures bios des stations, il a gardé ce goût pour le gibier qui est maintenant entré dans les moeurs culinaires de tous.

Maintenant la chasse est une activité importante, mais mesurée et volontairement et de beaucoup en deça de la demande...L’Homme nouveau doit et apprend tous les jours à être conscient de son environnement, élément capital pour la Vie, et ainsi tout faire pour l’optimiser le mieux qu’il peut.

C’est devenu un devoir, une priorité pour tous, un honneur sacré que de participer à une action de protection et surtout, d’amélioration concrète de la nature, car chacun à senti dans sa peau le danger de détruire la source de Vie, ce qui aurait dû être le cas pour les anciens qui en fait se sont suicidés en créant un

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monstre à leur propre image, le golem abject de leur propre infamie et de la fin de leur monde. Ainsi, si notre monde est physiquement bientôt pleinement redevenu un nouvel éden, il ne nous reste plus pour le parfaire qu’à massacrer ces immondes Zanko-Khuigs. Et c’est en très bon chemin, n’importe quel Humain libre vous le certifiera en rigolant.

Comme prévu par le process de récup psycho, alors qu’ils n’étaient plus qu’à

environ deux heures de leur base, Pédro réveilla Marion en lui remuant doucement l’épaule. Depuis le temps qu’ils sauvaient ces pauvres gens et suite à l’observation des réactions de ces derniers : réactions psychologiques parfois dramatiques, ils avaient développé un processus de récupération particulier.

Celui-ci était fort simple en définitive : il fallait être direct, simple et rassurant, prendre la direction de la récup ; ne surtout pas laisser le sujet trop réflechir car leurs longues années de soumission avait chez la majorité d’entre eux tué toute initiative, volonté de la moindre action suceptible de se sauver eux-même, beaucoup auraient eu peur même d’agir ainsi.

C’est difficile d’être libre et encore plus difficile de comprendre ce sentiment paradoxal ressentit par tous ; de la faute d’être prisonniers, le Syndrome du captif, disait-on. Ils répondaient tous au standard du Révélé, comme on les appelaient.

Certains craquaient littéralement peu de temps après leurs sauvetages, parfois dans le perceur même, là c’était pas la joie. Il est difficile de comprendre par quel processus mental passe la victime de cette vie d’horreur, surtout sans aucun espoir de s’en sortir, ce qui devient avec le temps une certitude pour elle...et, brusquement apparaîssent des sauveurs qui les enlèvent à leur enfer.

On peut seulement se faire une petite idée de l’intensité extraordinaire du choc émotionnel alors subit par eux. Certains être plus faibles, ou au bout du rouleau, mettent plusieurs semaines à se récupérer totalement ; certains au psychisme plus faible meurent dans les jours suivants, ce choc émotionnel intense les tuant aussi sûr qu’une balle. Malgré qu’au début de leur traitement on les isolassent dans un local insonorisé pour la nuit, les hurlements épouvantables de leurs atroces nuits de cauchemards était ce que craignaient le plus les autres habitants des stations, car beaucoup d’entre eux venaient de ces mêmes endroits maudits.

Quand ils revenaient avec un client ils naviguaient toujours de nuit pour éviter une possible détection, se déplaçant par des sauts de puce, lentement, scrutant leur environnement de leurs appareils de détection. Se planquant dans un bois le plus souvent, car les chasseurs des Zanko-Khuigs avaient tendance à les chercher près des villes abandonnées, quoique depuis quelques temps leurs sorties se faisaient de plus en plus rares ; mais c’était justement là le danger, de relâcher les mesures de sécurités. C’était exaspérant mais que faire d’autre ? La sécurité passait avant toutes autres considérations, c’était un ordre strict et accepté sans condition par tous les patrouilleurs.

Les pilotes étaient devenus des experts de la navigation à l’embrouille, comme il l’appelaient en riants ; à tel point qu’ils s’amusaient parfois, au hasard des rencontres dans les bois, à venir en douceur à deux ou trois mètres d’un cerf,

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d’un sanglier...avant que celui-ci brusquement effaré perçoive à ses côtés la masse sombre et diffuse du perceur, qui déclenchait la panique dans la troupe.

La base était prévenue de leur arrivée prochaine par un bref signal radio codé identifiant chaque appareil, ceci alors qu’ils étaient le plus loin possible. Quand ils ramenaient un client, un second signal spécial partait de la même façon, un ‘bip’ les assurait de la bonne réception. Ainsi prévenue, la base préparait une petite réception d’accueil pour le ou la nouvelle et heureuse élue.

Le rideau séparant la poste de commande était soigneusement tiré et les hublots était occultés par des panneaux spéciaux soigneusement ajustés. Personne de l’extérieur n’aurait pu voir le perceur à seulement quelques mètres.

Grâce à la potion qu’elle avait bu, Marion venait de dormir une bonne dizaine d’heures d’affilées, d’un indispensable sommeil profond et réparateur. Elle émergea de ce gouffre de non-être, ébouriffée et les yeux gonflés, mais en pleine forme. Sa nature de femme active et jeune reprenant rapidement le dessus.

Pédro lui sourit et lui souhaita le bonjour et lui dit qu’ils allaient bientôt arriver à leur base secrète.

-Que veux-tu faire, Marion ? As-tu faim ? Soif ? Il y a tout ce qu’il faut ici. -Oh oui ! je veux bien les deux, mais avant j’ai besoin d’aller au petit coin, lui

dit-elle en souriant. Il le nota avec plaisir : sans l’ombre d’une gêne apparente. -Suis-moi, Marion, je vais te montrer comment fonctionne l’installation de nos

toilettes où tu pourras te laver un peu. Il alla au fond de la carlingue et ouvrit une porte étroite qui donnait accès à un non moins étroit cabinet de toilette succinctement équipé. Quand elle vit cette installation, elle fut effarée, ce qui était logique. Il lui expliqua, en les faisant fonctionner, comment utiliser le lavabo, avec la serviette pour s’essuyer, ainsi que les WC, avec la papier adjacent dans sa boite fixée à la cloison.

-Si tu ne sais pas comment faire quand tu auras fini, dis-le moi et j’irais tout arranger, d’accord ? ne t’inquiète pas, tout ira bien. Ensuite, je vais te donner de nouveaux vêtements tous neufs dans lesquels tu seras beaucoup plus à l’aise...et nous jèterons ceux-là pour oublier tout ton passé, d’accord, Marion ?

-Oh oui ! s’écria-t-elle ravie, merci Pédro d’y avoir pensé...Je les déteste ces fringues maudites, je veux plus jamais les voir, ça non ! et elle entra dans les toilettes en chantonnant.

Quelle pêche cette fille, se dit-il émerveillé, c’est incroyable la vitalité qu’elle a ; j’ai jamais rencontré une fille pareille, ças non, se dit un Pédro admiratif.

Pendant ce temps, il tira d’un placard des sous-vêtements féminins, ainsi que des chaussettes ; une grande et ample longue robe en cotonnade blanche agrémentée de motifs multicolores brodés sur le devant, assortiment qu’il donna à Marion dès qu’elle réapparue, fraîche et pimpante et définitivement en super forme. Voyant ces vêtements, elle fut ravie et surprise, mais surtout elle hésita un bon moment sur l’utilité et l’utilisation de la culotte et du soutien-gorge.

Enfin, convaincue par ces tissus qui semblaient confortables, elle enleva d’un coup et sans plus de forme ses bottes et sa combinaison qui chut par terre, et se retrouva nue comme un ver devant un Pédro qui la regardait les yeux ronds et

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admiratifs, car comme l’avait deviné Vlad, et c’était parole de chasseur : c’était un sacré canon, la môme !

Malgré la pénombre qui baignait l’espace de la cabine, il put, béat d’admiration, détailler ce corps parfait aux formes magnifiques, où incroyablement tout y était muscles et douceur. Sa vie de dur labeur n’avait pas eut le temps de la marquer grâce à sa nature exceptionnelle et sa jeunesse : c’était une bénédiction que de l’admirer...La plastique de son corps d’albâtre lui inspira étrangement l’image inusitée d’un sompteux violoncelle blanc, les hanches pleines et larges, des seins fermes en forme de délicates poires qui défiaient la gravité. Seuls ses avant-bras, son visage et le cou étaient brunis, le reste était de porcelaine fine.

Il se dit in petto et sans bien trop savoir pourquoi, que ses hanches et ses cuisses fuselées et musclées à ravir seraient une merveille pour les enrichir de nombreux rejetons dignes de leurs somptueuse mère...et il se surpris, étonné, à faire une prière intérieure pour être choisi par cette merveille comme un des futurs étalons, pères de ces futurs Humains libres.

Passé le moment de surprise et d’hésitation de la découverte de ces vêtements, Marion s´était brusquement décidé à les mettre et, il en avait été fasciné de la voir alors se dresser un instant, perdant sa posture de soumission instinctive jusqu’alors et qui lui devait d’être toujours vivante, il avait vu alors dans son fascinant regard d’un bleu sombre aux incroyables reflets mauves, beauté irréelle qu’il n’avait jamais vu jusqu’alors, cette vigueur, cette flamme intense qui ne trompait pas le chasseur accompli qu’il était. Pédro fut absolument certain maintenant que Marion était, avait l’âme d’une farouche combattante qui se révèlerait rapidement à eux tous, et à commencer à elle-même. Une immense joie lui envahi le coeur.

Il était bouleversé car ils avaient trouvé la perle rare, une guerrière d’instinct qui, il n’en douta pas un seul instant, allait vite faire parler d’elle et sera vite connue de toutes leurs communautés. Avec une ardeur pareille à la sienne, pensa-t-il, nous gagnons tous un cadeau fantastique, cadeau pour notre Gaïa, notre mère, qu’elle soit bénie pour avoir miraculeusement préservé une Femme aussi rare et d’une si merveilleuse beauté. Il l’admirait ainsi, par tant de grâce et de noblesse naturelle...véritable Walkyrie antique, pensa-t-il troublé, flamme d’énergie pure digne d’un dieu guerrier éternel, Odin.

Elle n’eut pas conscience de ce que sa nudité venait de provoquer de troubles intenses chez son nouveau compagnon. Heureusement que le grand Vladi, qui pilotait au ras des arbres, ne vit pas ce spectacle car il aurait été foutu de nous cracher, pensa Pédro en souriant en lui-même. Y avait de quoi en perdre le Nord, et pour un pilote, c’est grave !

Marion, une fois habillée fut ravie de son nouvel équipement, elle se regardait de tous les côtés...s’entourait la taille des deux mains, retrouvant d’instinct les gestes troublants et merveilleux de la Femme éternelle, le sublime reflet de la grande Vie ; le tout en regardant Pédro d’un air émerveillé.

-Pédro, je n’aurai jamais pensé avoir des vêtements aussi...elle hésita un instant, aussi riches et aussi beaux, dit-elle de sa voix troublante aux inflexions profondes et sourdes, basses, un peu rauque même, lui semblait-il ; timbre de

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voix aux vibrations chaudes et puissantes de contralto, qui déclenchaient alors en lui d’insoupçonnables pulsions étranges qui lui chaviraient le coeur. Je suis heureuse comme tout, Pédro, merci beaucoup pour tout, elle s’avança vers lui et le prenant aux épaules elle l’ambrassa sur les deux joues puis le serra très fort contre elle...Il était prêt de défaillir de tant d’émotions, de voir une telle vigueur en cette merveille féminine envoyée vers eux tous par les mystérieuses puissances cosmiques.

Tout content, ému, il lui sourit et la fit ensuite asseoir et, lui prenant une jambe, lui mesura la longueur de son pied, à la grande surprise de cette dernière qui décidément avait résolu de se laisser guider sans protester, conquise par la gentillesse de son guide.

-C’est pour te choisir des chaussures à ta taille. -Ha ça oui ! j’en ai bien besoin, dit-elle, en donnant un coup de pied rageur aux

bottes qui traînaient par terre. Pédro, voyant ça, ramassa en vitesse la combinaison et ces maudites bottes et

les jeta dans un réduit et referma la porte, à la grande satisfaction de leur ancienne propriétaire. Dans un coffre, il choisit ensuite une paire de mocassins en cuir souple de couleur crème, et les chaussa à Marion qui se leva et exécuta quelques pas, s’essayant à la marche...la joie qui apparut sur ses traits illumina son visage d’un plaisir intense.

-Attends, Marion, c’est pas fini...il y a encore un ou deux petits présents qui vont te plairent, j’en suis sûr.

Pendant qu’elle suivait attentivement ses gestes, il ouvrit un tiroir et en sorti un petit étui en cuir rouge duquel il fit sortir en glissant, un collier de pacotille multicolore ainsi qu’un bracelet assorti. Marion, les yeux ronds, vit Pédro lui passer les bras autour du coup et lui attacher le collier, puis lui mettre le brasselet autour du poignet gauche.

-Ça te plaît, Marion, ces bijoux ? Ça devait car elle en resta sans voix. Elle regardait ces bijoux, le regardait lui,

passant de l’un aux autres...ses yeux lançant des éclats de bonheur pur, vifs, intenses. Il prit un miroir dans le tiroir et le lui donna ; elle put ainsi s’admirer à volonté...ce qu’elle fit pendant au moins cinq minutes pendant lesquelles Pédro resta prudemment coi, attendant l’instant de doute inévitable qui n’allait pas tarder, comme toujours vers ce moment-là, après ces instants de bonheur trop neuf et trop brutaux...en espérant ardemment qu’elle ne craque pas comme d’autres ; pas elle surtout, pensat-il fortement.

Puis, subitement inquiète, elle lui dit, le fixant, la voix hésitante. -Pédro...Pédro, dis-moi que...que c’est pas un rêve, dit...c’est vrai tout ça ? Je

rêve pas ? Je vais pas me réveiller là-bas ? dit-elle, parcourue par un long frisson. -Il rit un grand coup et lui passant un bras autour de la taille, l’amena tout

contre lui, l’embrassa tendrement sur la joue et lui dit alors. -Marion, réfléchis un peu à ce qui t’arrive, d’accord ? tu as déjà vu un rêve où

tu vis des choses que tu ne connaissais pas ? donc, que tu ne pourrais pas imaginer, hein ? Pense-y bien...et ce collier que tu as autour du cou, il est bien réel, non ?

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Il le prit du bout des doigts et le fit brinquebaler un instant, regard interrogatif...Puis profitant lâchement de son avantage, pensa-til, mais tant pis...il l’ambrassa de nouveau sur la joue et dit.

-Et ce baiser, c’est un rêve, crois-tu ? et il l’embrassa encore, il se fit honte, enfin, presque.

Elle se recula, le regarda...un long moment, hésitante, puis éclata de rire et en chantant, dansa une sorte de folle valse improvisée entre les deux rangées de sièges. Elle était sauvée, définitivement rassurée, comblée et conquise.

La tête de Vladimir dépassa du rideau, l’air interrogatif, alors son pote ravi lui fit un signe, le pouce en l’air et lui dit.

-On a vraiment tiré le jackpot, mon poto, c’est une perle inégalable, ils vont en tomber le cul par terre à la station, y a pas de doute là-dessus !

-Marion fit un magnifique sourire à Vlad en lui envoyant un petit signe de la main, à un Vlad ébahi qui rentra vite le tête et, chose inouie et de réputation pourtant impossible, on sentit le perceur faire une très légère embardée. Du jamais vu dans les annales.

La lumière de la cabine s’éteignit d’un coup, ne subsista plus que quelques

discrets voyants de sécurité sur le sol, puis Vladimir appela Pédro et lui dit d’ouvrir le rideau.

Pédro en ouvrant le rideau en grand, dit à Marion, avec un grand sourire. -Marion, ça y est, nous arrivons au bercail, et c’est pas trop tôt ; regarde bien ta

nouvelle maison...enfin, si on peut appeler maison une gigantesque grotte, dit-il en riant ; t’as jamais rien vu de pareil, ça je te le promets...et encore moins imaginé en rêve, hein ? tu connais les rêves, Marion ? lui dit-il affectueusement en souriant.

Elle répondit à son sourire et s’assied tout à l’avant près de Vlad, et fit de suite remarquer qu’elle ne voyait rien du tout, dehors était une nuit noire complète.

-Attends une petite minute et tu vas voir deux minuscules lumières bleues espacées l’une de l’autre, lui dit Vlad...là, regarde !

Effectivement, devant eux, à une distance difficile de juger, il y avait deux petites et faibles lueurs bleutées espacées de plusieurs mètres et vers lesquelles ils se dirigèrent lentement, puis passèrent exactement entre celles-ci, les frolant même, elle eut cette nette impression...puis elle perçut à peine des formes indéfinies dans la pénombre extérieures puis, elle sentie nettement que le vaisseau s’était posé, et le très faible bourdonnement qu’elle entendait jusqu’alors cessa d’un coup.

Des bruits étranges et sourds se firent entendre durant quelques longues secondes...comme l’impression, pensa-t-elle, d’une énorme porte que l’on fermerait et, brusquement, et elle en fut effarée, une intense et mystérieuse lumière illumina une immense grotte multicolore aux dizaines de stalactiques et formes bizarres, et une foule de deux à trois cents personnes étaient assemblée devant le pare-brise de l’appareil, pendant que la porte de la carlingue s’ouvrait...

Puis elle suivit Vladimir qui lui avait pris la main sans qu’elle s’en rende compte, et le suivit à l’extèrieur comme une somnambule, pour, descendant les

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quatres marches, déboucher sur un petit tapis rouge, où visiblement les attendait un commité de réception d’une douzaine de personnes vêtues de grandes tuniques blanches descendant jusqu’à leurs pieds, et qui tous, avec cette immense foule souriante, l’applaudirent chaleureusement à tout rompre.

Le calme revenu, un noble et grand vieillard aux longs cheveux blancs flottants sur ses épaules, s’avança en souriant, la prit aux épaules, l’embrassa sur les deux joues et lui dit fort ému.

-Marion, car je connais ton nom, comme tous mes compagnons ici présents, je m’appelle Charles. Au nom de notre communauté toute entière, celle des Humains libres, ceux d’ici et du monde entier, je te souhaite la bienvenue parmi nous tous, et sache que nous sommes fiers, très fiers de te recevoir. Nous espérons tous, et pour cela nous ferons le maximum pour t’y aider, que tu sauras t’adapter et trouver rapidement le bonheur et la joie de vivre parmi nous.

À partir de cet instant sacré pour tous, tu ne seras plus jamais seule, ni abandonnée ; la communauté entière donnera sa vie s’il faut pour te défendre, comme tu feras de même pour défendre tes frères et soeurs, que nous sommes.

Marion, ma fille enchantée, si jeune et si belle, acceptes-tu de faire parti de ton plein gré de notre communauté et d’accepter ses règles ? Tu es libre de choisir, mais ton acceptation t’engage pour la vie. Alors, dis-nous à tous ta réponse, lui dit-il gravement, c’est un engagement sacré, comprends-tu, Marion ?

Pendant qu’elle sentait sa tête, il lui semblait tout au moins, qui opinait apparemment de sa propre volonté, elle sentait ses jambes trembler et qui allaient traîteusement la lâcher...Jamais une si intense émotion ne l’avait submergé de la sorte...elle n’aurait jamais imaginé que le bonheur pouvait étouffer à ce point-là, non, impossible...et ce vieillard si calme et serein devant elle, et qui attendait tranquillement sa réponse et, si c’est pas un peu raide, elle était incapable de parler, totalement paralysée...ridicule, devant tous ces gens qui attendaient ainsi sa réponse, et elle restait plantée là comme une...

Pédro s’avança, lui prit doucement une main et se mit à parler, s’adressant à cette multitude innombrable de gens souriants et visiblement heureux de la recevoir...

-Chers amis, dit-il d’une voix ferme, je suppose que vous êtes conscients que notre chère nouvelle compagne, Marion, dit-il en la regardant un instant en lui souriant, est paralysée par l’émotion, et c’est parfaitement compréhensible ; beaucoup d’entre vous qui jouez les gros bras maintenant, firent de même, certains même pire, alors n’en parlons plus, mais...

Elle se dit que Pédro était décidément un gars avisé et d’un grand secours, il faudra pas que je l’oublie...

-Si je vous garantis, continua-t-il, car je la connais un peu quand même, si je vous dis qu’elle est ravie de vivre parmi nous, et qu’elle désire au plus au point accepter nos règles, vous ne me ferez pas l’injure de ne pas me croire ?

Des rires fusèrent dans la foule et une voix jeta : -Vas-y Pédro, mon gars ! si c’est le bidouilleur d’ première qui le dit, on te croit

sur parole, pas vrai les gars ? cria-t-il.

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Un grand murmure d’approbation lui répondit ; puis des chut ! chut ! se firent entendre.

Se tournant vers Marion il lui demanda si elle acceptait : -Fais juste un petit signe, Marion, et ça suffira. La gorge serrée elle opina de la tête avec un sourire timide, avec aussi une

grosse larme qui coula d’un coup sur sa joue gauche...enfin soulagée. Une ovation lui répondit et à partir de cet instant, elle fut emportée dans un

véritable tourbillon. Une petite fille se fraya péniblement un chemin jusqu’à elle et sur la pointe des pied, elle teint à lui passer un grand collier de fleurs fraîches autour du cou et l’embrasser sur les deux joues, d’une Marion qui dut se baisser pour l’y aider, la fillette lui dit avec un sourire ravi.

-Bonjour, Marion, je suis très heureuse de te voir, j’ai plein d’amies qui vont être jalouses de pas être ici à ton arrivée, dit-elle ravie ; elle respira vite un grand coup et poursuivit ; tu viendras nous voir, dis, à notre compagnie ? Ha ! j’allais oublier, je m’appelle Jérémie, tu demanderas à Pédro, il sait où c’est ; elle l’attira à elle et l’embrassa encore fort sur la joue...Marion, rajouta-t-elle doucement, je veux être ton ami, dis, tu comprends, parce que tu es la plus belle. Et elle partit en courant, en slalommant parmi le foule bruyante et gaie ; tous voulant lui parler, la toucher...

Soulagée, elle avait trouvé d’un coup une immense famille ; y avait de quoi perdre les pédales, non ? Un couple, d’environ son âge se fraya un passage jusqu’à elle, et Vlad, qui depuis leur arrivée semblait d’autorité lui servir de garde du corps, s’écria joyeux, en le lui montrant.

-Marion, à partir de maintenant tu vas être en de bonnes mains, il désigna le couple, je te présente ces deux-là qui vont te guider pendant plusieurs jours pour t’installer confortablement, comme Pédro t’en a déjà parlé.

Voici Joana, la plus belle brunette de la station, dit-il en riant et caressant la joue de cette dernière, la fille rit aux éclats et lui dit.

-Et toi t’es le plus grand bandit de toute l’hémisphère, mon chéri ! puis se tournant vers Marion.

-Bonjour Marion, je te souhaite la bienvenue parmi nous tous. -Et ce joli blondinet, ajouta Vladi, en désignant un garçon mince mais bien

charpenté, aux magnifiques cheveux blonds bouclés, c’est Eric, le roi des tombeurs, mais on sait pas de quoi, s’exclaffa-t-il ; l’interpelé lui donna une coup de poing amical dans l’estomac, et retorqua.

-Content de te revoir, la Flibuste, y a pas à dire, mais quand t’es pas là c’est un peu mort l’ambiance, et ils se donnèrent une vigoureuse et virile poignée de main en rigolant.

-Bien, dit Vlad, maintenant, Marion, je te laisse avec tes deux nouveaux amis qui prennent le relais ; si tu veux nous voir, Pédro ou moi, demande à ces deux lascards, ils sauront où nous trouver...Avant que nous repartions en chasse, bien évidemment.

-Tu repars quand ? lui demanda Joana. -Après demain, comme toujours, faut pas les laisser dans cet enfer. Faut se

manier le train, les aminches, sinon...Dis voir, Joana, tu seras chez toi ce soir ?

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dit-il avec un petit sourire malicieux, car j’avais comme dans l’idée d’aller te faire une petite visite de politesse, un brin de causette.

-Si c’est pour la politesse, dit Joana en soupirant langoureusement et en lui caressant lentement l’épaule, y a pas de problème, mon chéri. C’est fou ce que je manque de politesse en ce moment, ça tombe bien, hein, mon grand ?

-Alors, dans les onze heures, d’accord ma beauté ? tchao, la compagnie ! et il partit en sifflotant.

Marion fit un pas en avant et lui happa la manche, le reteint. Il se retourna, elle était devant lui, hésitante, confuse...elle l’attira et se haussant sur la pointe des pieds l’embrassa fortement sur les deux joue.

-Merci beaucoup Vlad, pour m’avoir sauvé, avec Pédro...je...je ne vous oublierai jamais tous les deux...j’avais tant rêvé à ma liberté...merci, merci, Vlad...si tu savais de quel enfer tu m’as sauvé...je pourrais jamais assez vous remercier.

-C’est rien Marion, c’est mon boulot de sauver les belles filles comme toi... Il lui caressa la joue. -Sois heureuse Marion, tu l’as bien gagné. Et il partit en grandes enjambées,

avant qu’elle ne perçoive son trouble. -Tu sais Marion, lui dit Joana qui était aussi grande quelle, en la serrant contre

elle affectueusement, c’est eux qui m’ont sauvé aussi, Vlad et Pédro...J’étais comme toi, esclave de ces pourris de Zanko-Khuigs...J’avais une quinzaine d’année quand ils m’ont trouvé...c’était l’horreur, frissonna-t-elle.

-Moi, dit Eric, c’est une autre équipe de patrouilleurs qui m’ont sauvé, c’est pareil, j’étais aussi prisonnier dans une exploitation forestière...J’avais quatorze ans quand ils m’ont récupéré ; depuis, j’ai appris à piloter un perceur et je fais le même travail qu’eux maintenant ; si je suis là en ce moment c’est que notre appareil a eut un petit accident et qu’il est en réparation.

-Nous sommes très nombreux dans les grottes, dit Joana, des anciens prisonniers comme toi...Chacun se choisit une occupation suivant ses goûts mais surtout suivant ses capacités, et...tu sais...Pedro aussi fut prisonnier comme nous ; Vlad est né ici à la station, mais ses parents avaient été prisonniers eux aussi...Il en a tant vu qu’il voue une haine mortelle aux Zanko-Khuigs, il n’arrête jamais un instant sa chasse pour en sauver le maximum...Je l’adore, ce grand fou, dit-elle radieuse.

-Tu verras, Marion, tu apprendras aussi un travail qui te plaira et tu participeras directement à la vie de la station, mais pour l’instant on a le temps de parler de tout ça. Allons visiter la grotte, s’écria joyeusement Eric.

-Ça oui ! s’écria Marion, puis calmée, elle réfléchit un moment...J’irai moi aussi sauver les esclaves ! Est-ce que je peux apprendre à conduire demain ?

-Non, non, Marion, dit Eric en riant, du calme ma belle, il faudra que tu apprennes diverses choses avant, mais un jour tu pourras sûrement faire parti d’une équipe de patrouilleurs.

-Je serai le pilote et le chef ! Elle chercha Pédro du regard, mais celui-ci avait discrètement disparu.

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Alors Joana et Eric la prirent en riant chacun par un coude et l’entraînèrent joyeusement dans la grotte.

-En route Pilote, dit Eric, puis il rajouta, allons à la découverte de ton nouvel univers. Si tu veux quoique ce soit, demande-le nous, nous sommes là pour ça, pour t’aider en tout, d’accord ?

Avec plaisir, s’écria une Marion qu’ils découvraient, ravis, une fille subitement pleine d’entrain et de joie de vivre et qui s’esclaffait, déjà à l’aise.

-Je meurs d’envie de tout découvrir, c’est magnifique cet endroit, et ça...et ça, c’est quoi ?...et ça, ça sert à quoi ? et où vais-je habiter ?...on mange bien ici ?...je voudrais boire et manger, je peux maintenant, Eric ? il est joli ton nom ; Joana, ta robe aussi, elle me plait bien...tu crois que je pourrais en avoir une pareille un jour ? Puis, elle s’arrêta brusquement de parler et prit une des mains de sa compagne et la regarda, fascinée, elle en caressa lentemant la peau, et dit, songeuse.

-Joana...comme tes mains sont belles, les miennes sont affreuses à côté, elle les lui montra, des mains caleuses aux ongles noirs et cassés pour certains ; comment ça se fait que tes mains sont si belles et pas les miennes ?

Joana lui prit une de ses main dans les siennes et dit, l’air insouciante, la lui embrassant.

-Marion, ma chérie, très bientôt tes mains seront comme les miennes, aussi belles, tu verras...Je vais t’aider et t’apprendre à en prendre soin, et de tout ton corps aussi...déjà que tu es si belle, il faudra prendre soin de toi, pour conserver ta beauté, d’accord ?

-Avec joie ! s’écria-t-elle ; puis elle cacha ses mains dans son dos. Eric s’approcha, lui enserra la taille et la colla brusquement contre lui, lui dit,

alors qu’il la dépassait d’une bonne tête. -Pour ma part, ma beauté, tu me plais telle que tu es, lui dit-il charmeur. Elle était pantelante, bras ballants en arrière, abandonnée dans le cerceau du

bras de cet homme merveilleusement beau, se pensa-t-elle...Elle sentait, comme enivrée, l’haleine de ce mâle qui, elle faillit défaillir, lui prit sa tête par derrière et l’ambrassa fougeusement sur la bouche...C’était la première fois que ça lui arrivait, elle en fut d’abord surprise, puis sentit d’étranges sensations dans son ventre...comme une brûlure monter en elle, puis irradier tout son corps totalement abandonné...elle était chancelante mais heureuse comme jamais.

Il la relacha doucement, souriant il lui dit. -Joana a raison, ma belle Marion, dans peu de temps tu seras une des plus

belles Femme de la station, sans problème. -Et voilà l’ travail, dit Joana riant fort, les mains sur les hanches et opinant de

la tête ; le beau Eric qui vient encore d’emballer une minette...qui ravie, lui fond littéralement dans les bras, comme toujours du reste...

Tous trois de rire en choeur. -Marion, fais attention à ce beau mâle car il croque tout cru les jolies filles

comme toi. Celle-ci regarda Eric dans les yeux et dit, charmeuse.

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-Oh ! il peut me croquer quand il veut...ça me fait pas peur, et elle l’embrassa sur la joue.

-Mais c’est sûr qu’il va te croquer, ma chérie. Ha là là ! soupira Joana en riant. -On dirait que t’as des regrets, ma belle ? dit Eric en regardant Joana. -Ben, répond-elle, prenant un air timide...y a longtemps que tu m’as pas fait

une visite de politesse, alors... -Il éclate de rire et s’esclaffa. -Longtemps...longtemps, attends voir, se tenant le menton du bout des doigts,

il réfléchit un instant, les yeux en l’air, puis lui dit, il y a seulement quatre jours, gourmande ; bon, si tu veux, je passe te voir demain soir, puisqu’ aujourd’hui tu t’es promise au grand Vladi, ok, ma belle ?

-Merci Eric, tu me combles. -Demain tu le seras encore plus, s’esclaffa-t-il fier de lui ; elle rit aussi aux

éclats, et l’embrassa tendrement sur les lèvres. Marion qui assistait à cet échange, demanda. -C’est quoi toutes ces politesses, hein Joana ? ça a l’air bien.... -Eric, la reprit dans ses bras. -Dans une semaine environ je t’en ferai aussi une visite de politesse, quand tu

seras bien installée, d’accord, Marion ? Elle hocha la tête, elle remarqua que dès qu’il la prenait ainsi contre lui, elle

était incapable de parler...c’était incompréhensible. -Joana, lui dit-il en relâchant Marion, qui respira profondément, prépare la

bien, apprend lui à se lav...Enfin, dit-il claquant des doigts, tu sais mieux que moi ce qu’il y a à faire, hein ?

-Tu crois ? répondit celle-ci en riant. -Bon ! allons visiter la station, dit-il. Elle regardait, fascinée, son nouveau monde, quand elle se retourna pour la

première fois et découvrit surprise, l’appareil d’où elle venait. -Ben ça alors ! c’est là-dedans que j’ai volé ? c’est pas gros pourtant, on dirait

pas à le voir. -Ce perceur, c’est ainsi que l’on nomme ces engins, est suffisamment gros pour

allez discrètement enlever les esclaves aux pourris de Zanko-Khuigs, la preuve : te voilà parmi nous, une de plus de sauvée. Et une de plus pour construire notre reconquête, car nous allons un jour, bientôt même, les tuer tous autant qu’ils sont, avec leurs militaires damnés eux aussi, expliqua Joana.

-Chouette ! s’écria Marion, vous allez tous les tuer ? -Nous tous oui, toi y compris, car à partir de maintenant tu fais partie

intégrale du plan de reconquête, c’est pour ça qu’il faudra que tu apprennes à devenir compétente comme nous tous.

-Tu peux compter sur moi, Eric, et Joana aussi bien sûr, je veux les tuer moi-même, sûr et certain, vous pouvez me croire...je les haï...je les déteste.

-Oublie-les pour l’instant ma chérie, dit Joana en riant, pense à toi pour le moment, pense seulement à t’installer confortablement parmi nous, c’est le plus important maintenant, pour être prête un jour à les détruire, d’accord ma chérie ? lui dit-elle en l’embrassant tendrement sur une joue.

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Réalisant brusquement, elle vit la charpente métallique de la porte de l’entrée, plus loin en contrebas, au ras de celle-ci coulait un petit torrent vers l’extérieur.

-Mais...si les gardes voient la porte du dehors, alors... -Aucun risque à ce sujet, lui expliqua Eric, vue du dehors la porte est invisible

car elle ressemble aux rochers qui sont autour d’elle ; c’est impossible de voir la différence, tu comprends ?

-Chouette alors, s’écria-t-elle. -Comme ça les gardes sont baisés, comme dit Vladi, dit Joana en riant. -T’as raison, Joana, et d’un coup, elle eut un long frisson, brrrr, il fait froid ici. Joana réalisa qu’elle n’avait que sa robe assez légère sur la peau, alors qu’eux

étaient plus chaudement vêtus. -Oh ! Marion, excuse-nous, dans la joie de ton arrivée, nous aurions dû y

penser de suite. Viens avec nous au magasin d’habillement et nous allons t’équiper comme il faut, promis.

-Merci bien, Joana, ce sera pas de reste, mais...y pensant bien, il fait toujours aussi froid ici ? c’est pourtant l’été là dehors.

-C’est normal dans une grotte, lui dit Eric, été comme hiver il fait quasiment la même température de 16,5ºC maintenant, depuis que nous y habitons, mais jamais pire non plus ; en fait, dans une grotte il n’y a pas de saison, et que dehors il gèle ou fasse +40ºC n’y change rien, tu comprends ? cela a des avantages en plus des inconvénients apparents : une fois acclimaté on ne souffre plus des changements saisonniers, c’est neutre, tu verras que tu t’y feras vite et sans difficulté, promis.

-Ha ! ça c’est marrant alors ! s’écria-t-elle joyeuse, j’aurais jamais pensé à un bidule pareil, hein ?

Joana et Eric se regardèrent et se sourirent, ravis de voir que leur nouvelle recrue était du genre à pas s’encombrer de fausse gêne. Nature et dynamique, tel fut leur verdict.

Au bout d’un moment, et après mûre réflection, Eric rajouta admiratif et à demi-mots.

-En fait, Joana, et tu te souviendras de ce que je te dis maintenant : je crois que c’est plutôt une véritable bombe qu’ils ont ramené...et ça va faire mal, crois-moi, à ces fumiers de Zanko-Khuigs. Comme disait le Pédro, toujours modeste, ils ont vraiment tiré le jackpot avec cette nana. En somme, que du super, hyper positif pour la quête du Graal, soit, massacrer jusqu’au dernier et le plus sauvagement possible ces pourritures de Zanko-Khuigs !

Une nouvelle ère commençait dans ce refuge de cette jeune et nouvelle Humanité pleine d’allant et de combativité. Chaque nouvel arrivant était ainsi un élément positif de plus vers la reconquête.

Brusquement, la lumière qui baignait à profusion cette partie de la grotte

baissa, car cet éclairage à gogo ne se faisait qu’à l’occasion des petites fêtes d’accueil ; il ne resta plus que les sources lumineuses coutumières, espacées de cinq mètres environ et autant en hauteur, dirigées vers le bas. L’éclairage, sans être violent n’en était pas moins largement suffisant pour vivre confortablement

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dans ce nid douillet, berceau de la nouvelle Humanité. La foule s’était lentement dispersée dans les rires et la joie...chacun retournait à ses occupations ou allaient se coucher. Les activités ne cessaient jamais dans la grotte, nuit et jour le travail pour construire leur futur continuait sans parer ; la passion pour sa réalisation servait de puissante et irrésistible émulation. Priver quelqu’un d’y participer aurait été la pire injure et punition...une infamie. C’était une ruche Humaine.

Effectivement, un long apprentissage allait débuter pour Marion, comme il en fut de tous les autres rescapés de ces camps maudits, et d’ailleurs. Cela devait commencer par son alphabétisation, car ils ne savaient ni lire ni écrire, beaucoup n’avaient même jamais vu une simple feuille de papier avec les signes de l’écriture imprimés dessus. Ils n’étaient ainsi que volonté pure sur un esprit totalement vierge...Parfaite pâte à modeler sur laquelle devait être inscrites en lettres de feu les préceptes de leurs nouvelles identités d’Humains sacrés. Il fallait les imprégner, leur révéler leur Moi propre, leur personnalités, leurs goûts et leurs capacités les plus diverses.

Il s’avéra vite que du fait de leur virginité spirituelle justement, ils apprenaient vite et avec une ardeur sans limite, aiguillonnés par l’objectif sacré de la reconquête. Ils étaient les élèves les plus attentifs qu’enseignants puissent rêver ; il fallait même parfois les freiner dans leurs ardeurs, surtout au début, où ils n’étaient pas accoutumés à développer une activité cérébrale intense, ou même tant soit peu minime, ils s’épuisaient alors vite et ne comprenaient pas pourquoi ils étaient si vite fatigués, alors que pour eux ils ne faisaient rien, d’après le standard de leur ancienne vie de forçat.

La plus grande joie pour tous était le jour où la personne savait enfin lire et devait, devant un aréopage compatissant et ravi, lire un petit texte de sa composition. Une petite fête était alors donnée en leurs honneurs, leur donnant le titre ronflant mais officiel de Conquérant de l’Humanité. C’était pour le joyeux élu (e), son entrée officielle parmi les Combattants du nouveau monde, titre le plus glorieux qu’un Humain pouvait rêver. Dès ce jour merveilleux de la reconnaissance officielle de la communauté, ils étaient alors pris d’une véritable boulimie d’apprendre, rien ni personne n’aurait pu les en empêcher.

Cette jeune Humanité était ainsi sur la voie sacrée, avec ses Hommes et ses Femmes passionnés par la réalisation de leur propre destin, sur la voie irréductible de la reconquête, la reprise en main de leur planète vénérée, Gaïa, la merveille azuréenne des espaces stellaires, futur berceau d’une neuve Humanité responsable, noble et glorifiée.

Dans cette Humanité en gestation prête à éclore, les standards du monde mort étaient définitivement rejetés, bannis à jamais. On ne parlait plus des droits de l’homme, cette honteuse tromperie, ineptie, idéologie partisane et inhibitrice inculquée aux masses ignares et imbues d’elles-mêmes, et qui fut mortelle à ces dernières. Non, on ne parlait simplement et avec orgueil que des Devoirs de l’Homme, concept en lui-même porteur de générosité, d’honneur, d’allant, de spontaneité, de sincérité et intégrité, le tout en une fabuleuse ouverture d’esprit emportant le sujet dans une dynamique surpassant tous les obstacles et difficultés, devenant de facto un prodigieux tremplin vers leur futur.

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Le Devoir soutient l’homme dans ce qu’il a de plus altruiste en lui ; il se révèle ainsi à lui-même et se fortifie de la grandeur de sa propre âme. Il n’a nul besoin de support illusoire et surfait, autre que lui-même, ainsi que de celui de ses frères et soeurs de sa communauté. Il s’exprime, se réalise ainsi chaque jour pleinement dans ses actes coutumiers empreints de noblesse et d’humilité.

L’honneur et le sentiment de la certitude, en toute humilité, de la grandeur de son espèce, est son opium, c’est tout, et c’est amplement suffisant à la plénitude de l’Homme. Ils ont compris que l’Homme ne se réalisera vraiment et durablement que par le développement et l’exploitation pour le meilleur, de son intelligeance. En lui-même il n’est rien. L’Humain ne se concrétise qu’en fonction de son intéraction avec la mère : Gaïa ; en symbiose la plus parfaite possible avec, pour, et dans elle, uniquement.

Nous sommes parfaitement conscients que le lecteur qui découvre ces écrits,

doit sans aucun doute se demander de quelle planète il s’agit, pour être ainsi capable d’avoir engendré de tels monstres coupables d’une aussi terrible tragédie que celle d’un génocide planétaire. Ces monstres sont les Zanko-Khuigs, et de l’avis général, eux seuls pouvaient commettre une telle infamie.

Il est inutile de spéculer où pourrait se trouver cette planète maudite dans le cosmos tout entier, car c’est malheureusement de la nôtre dont il est question, la planète Terre d’alors, pourtant si belle vue de l’espace. Pour un extraterrestre découvrant ce joyau, il ne pourrait se douter qu’elle abrita de telles horreurs.

Il est bon, essentiel même, que ces funestes événements soient relatés et expliqués de façon à guider l’Humanité renaissante, d’où le document ci-dessous, et ainsi tout faire pour ne pas risquer de reproduire les mêmes comportements et conséquemment les mêmes erreurs débouchant sur une semblable catastrophe.

Historique des Evénements Comme déjà dit et répété des milliers de fois sinon plus, quand l’attaque eut

lieu en Occident ce vendredi fatidique du 1er mai 2015, à 10 heures du matin, le moment où le maximum de personnes étaient supposées être dehors, en ce début d’une longue fin de semaine de repos, d’autant qu’il faisait un temps magnifiquement ensoleillé.

On hésite toujours à parler de cela tellement c’est immonde : les pouvoirs publics avaient monté une opération de manifestations populaires dans le monde entier. Pour ce faire ils avaient peu à peu et depuis fort longtemps habitués ces peuples stupides à accepter et suivre des ordres de ce genre, sans que quiconque se demande QUI dirigeait ainsi le monde ; quand ils le comprirent enfin, ce fut pour disparaître.

Ainsi, sous un prétexte fallacieux, le maximum de gens étaient dehors, participant joyeusement et naïvement à ce grand mouvement. Officiellement « Pour faire avancer la démocratie...asseoir le bonheur des peuples ». Tels étaient bel et

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bien les thèmes mis en avant. On reste confondu, stupéfait d’un tel degré de perversion et infamie.

Ce fut un carnage réussi pour les monstres planificateurs de cette épouvante sans précédent dans l’histoire de l’humanité qui en avait pourtant déjà vu de sévères exemples, de quoi sont capables les hommes, car au siècle précédent, les mêmes avaient, après avoir provoqué une guerre mondiale particulièrement monstrueuse, une de plus en fait, et alors que ce conflit été pour ainsi dire terminé, ils avaient bombardé et entièrement détruit des villes des vaincus habitées que par des civils : enfants, femmes et vieillards...

Ils testèrent même pour la première fois une bombe monstrueuse, dite bombe atomique, qui répandit sur la planète entière des radiations mortelles pour tous êtres vivants. C’est dire le degré incommensurable de nocivité de ces êtres déments...et qui pourtant dirigeaient ce monde d’alors.

Ainsi donc, ce jour-là, tout ce qui pouvait voler avait dû être réquisitionné pour cette tâche, car des centaines, des milliers d’engins volants sillonnèrent en premier les grands centres urbains. On pense que l’Euromorte entière fut attaquée le même jour, les plus grands pays et leurs grands centre urbains en premier, sans aucun doute. Pour prendre un exemple, voyons ce qui était notre pays d’alors, la France d’alors, la Franki, comme on l’appelle maintenant.

Il faut retenir que les survivants ont changé les noms des lieux, comme ceux des villes et des pays, et donc de leurs habitants, par dérision et mépris pour ce monde disparu dans l’abjection, d’où résulta ce drame. Ils ont compris et sont certains maintenant que ces peuples anéantis en sont les seuls responsables à tous les niveaux : peuples stupides et abrutis qui ont laissé faire, élus et réélus dix fois plutôt qu’une les mêmes politicards pourtant vendus et corrompus jusqu’à la moelle ; lesdits responsables, si on peut classer de tels monstres d’un tel adjectif, qui ont déclenché une telle folie, une telle monstruosité.

Il est connu que dans les rapports humains, que ce soit dans une grande famille comme dans une nation, il n’y a jamais un seul coupable, c’est évident, les victimes sont bien souvent consentantes, le plus souvent par lâcheté, veulerie, conformisme ou la plus noire des bêtises. Bref, en Franki donc, la capitale et son agglomération en entier fut survolée par des gros porteurs, du genre « tankers de ravitaillement en vol », qui passèrent lentement à ras des toits et firent plusieurs passages successifs, puis disparurent pour aller arroser les autres villes alentours, la plupart beaucoup plus petites et où un ou deux avions suffirent...Et ainsi de même sur tout le territoire, en rayant de la carte en un seul jour la population, les autres pays alentours subissant la même stratégie de l’horreur absolue.

Du fait de la surprise et de la mort instantanée des gens, les éventuels rescapés n’eurent pas le temps ni aucun moyen de prévenir les autres villes. Loin de chez eux, sans matériel, sans préparation technique et surtout psychologique ; faits qui peuvent paraître surprenants pour notre époque où de nos jours tous sommes préparés au combat et aux techniques de survie, car eux ne l’étaient d’aucune manière. La majorité d’entre ces personnes moururent donc assez

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rapidement suite aux privations puis aux épidémies qui se propagèrent rapidement à une grande, immense échelle, d’autant que l’été commençait juste.

Ces dernières victimes ont dû vivre un enfer de se voir mourir à petit feu. Longtemps après, certaines de nos équipes de prospec et récup dans les villes, ont retrouvé les restes de ces survivants...provisoires, qui s’étaient suicidés le plus souvent avec une arme à feu.

Par contre, on a pour l’instant aucun moyen de savoir où les Zanko-Khuigs se cachèrent pendant ces années, pour se protéger des épidémies. Savoir s’ils se cachèrent dans des bases militaires souterraines où ils attendirent de réapparaîtrent pour exploiter le monde ?

Nous sommes quasi certains qu’ils se planquèrent dans des bases secrètes qu’ils avaient installé en Ostrali, continent le plus isolé dans l’autre hémisphère.

Ils avaient installé ces bases depuis plusieurs générations, comme sur leur propre territoire, en volant l’argent de leur propre peuple qui, devenus si abutis qu’ils croyaient à tous les racontars qu’ils voulaient...Mais pour être juste, il en était de même dans tous les pays sans exception, tous les peuples se comportaient comme un troupeau d’animaux aveugles et stupides.

Je sais que c’est difficile à entendre vu de notre époque, une situation aussi monstrueuse, où les chefs (du nom de l’époque : politicards) décident froidement une telle chose, de voler, mentir, trahir les sentiments les plus nobles, et surtout, sans que quiconque ne vienne et élimine une telle personne aussi abjecte. C’était pourtant ainsi, ce monde d’horreur est dégoûtant, il n’y a pas d’autre parole.

Les monstres Zanko-Khuigs attendirent deux ou trois ans pour refaire surface. Tout ce qu’on sait c’est que peu à peu, nos équipes de prospections se déplaçant à cheval, découvrirent un jour par hasard ces nouveaux camps de travailleurs. Jusqu’au moment où nous comprîmes rapidement qu’en fait de travailleurs, nos semblables y étaient tenus en esclavage. Nous comprîmes que les infâmes Zanko-Khuigs étaient de retour, et nous comprîmes ainsi enfin et surtout le pourquoi de cette monstrueuse attaque contre l’humanité.

C’était signé. Ils avaient osé détruire l’humanité pour le bénéfice de leur misérable dictature du monde, qui était écrite et annoncée dans leur anciens écrits. Seuls des fous fanatiques tels que eux pouvaient avoir déclenché une telle barbarie. Ce que nous comprîmes tous aussi, c’est que la cible était enfin clairement désignée à tous les survivants, la haine commune était enfin focalisée, et définitive, et le restera jusqu’à la mort du dernier de ces pourris.

Ils avaient avec eux un nombre considérable de prisonniers, en plus des personnels de leurs forces armées. Troupeau considérable qu’ils avaient gardé on ne sait où et comment, et on s’aperçut très vite que tous ces gens étaient devenus des esclaves véritables et avaient l’esprit capté, suite à un procédé dont nous ignorions la nature ; jusqu’à récemment où nous mêmes reçûment enfin cette géniale invention qu’est le scruteur psycho, qui paraît-il ressemble au système employé pour les tenir esclaves, serviteurs plus ou moins obtus mais serviles. C’est ce nombre très important de prisonniers qui fait penser qu’ils s’étaient cachés sur ce continent, l’Ostrali.

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Voici succinctement l’histoire de ce monde qui nous échut...Rebut d’un monde de perditions, où nous dûmes repartir courageusement de moins que rien...Nous devons tout aux premiers survivants qui jetèrent les bases de notre civilisation actuelle, ils le firent en connaissance du passé mort sous leurs pas, et pour cause...Une poignée d’entre eux eurent la sagesse et le grand mérite de pouvoir et savoir analyser les causes majeures du pourquoi et du comment les choses avaient prise une telle tournure dans leur monde moribond.

La seconde chance fut qu’ils réussirent à convaincre les autres rescapés de comment il fallait qu’ils construisent leur nouveau monde, et avant tout ils furent tous d’accord sur ce qu’ils ne fallait pas reproduire. Ils eurent miraculeu- sement conscience qu’ils devaient inventer une nouvelle façon de vivre en commun ; tout le passé était mort et devait le rester impérativement.

Ce fut la chance de cet avenir qui démarrait dans des conditions bien hasardeuses mais avec une foi en eux-mêmes et déjà avec une envie, un puissant besoin de vengeance qui habita de suite tous ces misérables, ce sentiment fut le lien et un moteur puissant pour tous : reconquérir leur planète, Gaïa.

La foi en eux-même, avec leurs possibilités pourtant restreintes ; leur courage sans mesure et leur volonté, ces qualités élémentaires furent les moteurs essentiels de la réussite et de notre présent, présent où nous touchons bientôt au but de notre quête, honnorant ainsi, nous l’espérons tous ardemment, ces innombrables pionniers qui luttèrent sans relache et avec obstination ; ce qui est le trait dominant de nous tous maintenant, grâce à nos prédécesseurs qui nous montrèrent le bon chemin.

Les habitants de l’ancien monde depuis toujours se firent la guerre et ne connurent que la discorde ; ce fut sans doute de la peur salutaire de disparaître pour toujours qui déclencha dans l’esprit des survivants cette prise de conscience bénéfique qui nous vaut la joie et l’orgueil d’être là, nous tous, relevant le flambeau en dignes héritiers de ces Hommes exceptionnels, à qui nous devons d’exister encore.

Et il est bon et particulièrement important de rappeler, et ce fut notre principale chance, qu’ils étaient pour leur grande majorité, des Hommes et des Femmes simples, des gens du Peuple, du Peuple même ; ce mot que nous écrivons avec majuscule en leur honneur. Des travailleurs qui savaient ce que souffrir, se priver veut dire, et heureusement pour notre futur d’alors. Il n’y avait que des êtres relativement ordinaires pour percevoir le gouffre prêt à s’ouvrir sous leurs pas.

Des hommes d’idées (on les appelait alors avec mépris les intellos), les avaient si courtes leurs idées à l’époque, d’où le résultat...n’auraient pas, de par leur aveuglement conformiste et leur veulerie coutumière et compromissions envers les politicards, eut le cran de lutter avec les dents comme le firent ces glorieux Hommes et Femmes du Peuple, le populo, comme disaient avec ironie et dédain tous ces beaux penseurs en salons, ceux qui justement sont crevés avec leurs si belles idées, dans leurs si belles maisons et leurs si belles villes pourries ; c’était ainsi le meilleur cadeau qu’ils pouvaient ainsi faire à la postérité, à nous tous.

Merci à vous tous, les chancres !

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Alabama

es nobles personnes populaires édifièrent donc quelques principes de base élémentaires pour démarrer leur société ; en opposition directe et vu

l’exemple sinistre du passé, ils édictèrent quelques règles simples mais impératives et imprescriptibles. Nous les redécouvrons donc une fois de plus, elles ainsi que leur simplicité et évidence, les voici.

Moeurs, coutumes et objectifs de notre humanité. Principe unique et sacré. L’Homme et la planète Gaïa, son vecteur spatial, sont

déclarés une même identité, une et indivisible. Le soin premier de quiconque est de préserver leur intégrité commune.

1- l’Humanité, c’est-à-dire, l’ensemble des Humains de notre race blanche vivant sur la planète Gaïa, uniques survivants du désastre, constituent un ensemble homogène, indivisible et définitif, ceci, en dépit de leurs origines géographiques et languistiques ; données étant provisoires.

2- Le concept ancien de nation est banni à jamais du langage de l’Homme nouveau. Après la reconquête, lors de l’expansion des Hommes sur la planète, il sera essentiel que les concepts de Province ou Région soient préférentiellement retenus pour question de facilité, nommer les territoires occupés par celui-ci.

Tous les lieux seront accessibles à tous et en tout temps. Il faut bannir du vocabulaire les mots ségrégationnistes comme étranger et ses synonymes et affiliés. Vous êtes tous frères et soeurs, uns et indivisibles.

3- L’Humanité regroupe tous les individus en un ensemble indissociable, où chacun est responsable de l’autre, dorénavant nommé : sa soeur, son frère.

4- Les Hommes sont tous égaux dans l’absolu et libres de toute contrainte physique et psychique. Ainsi, aucun individu ne pourra prendre l’allant sur quiconque pour aucune raison qu’il soit, et nul besoin de loi pour établir cette évidence naturelle, éternelle et absolue : l’Homme né libre et le reste, cela est, comme il existe et respire, tout simplement.

5- Les décisions seront prises à la majorité et personne ne sera contraint de réaliser une action dont il réprouve le bon sens ou qui va à l’encontre de sa conscience ; à condition toutefois que dans sa vie, son comportement et ses actes coutumiers, antécédents et ultérieurs, soient en harmonie avec les arguments et/ou préceptes qu’il aurait énoncé précédemment, et n’entrent pas en conflit avec l’intérêt de la communauté, qui passe en priorité sur tous autres.

6- En harmonie avec le principe précité de liberté intrinsèque de chacun, l’union du mariage, coutume barbare du monde ancien, est bannie à jamais de notre collectivité.

7- Ainsi, chacun pourra et devrait prendre pour compagnon et compagne ceux qui répondront favorablement à leurs avances, d’un commun accord et

C

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uniquement. Aucun lien de duré de relation ne sera instauré, ce contrairement aux comportements hypocrites des anciennes religions castratrices morts avec elles. L’amour de deux êtres l’un pour l’autre est et sera reconnu et admis comme la chose la plus belle, la plus normale et naturelle, et conseillée à tous les membres des stations. L’amour corporel sera anobli comme il se doit, d’une chose naturelle et respectable, et de plus sa pratique conseillée à tous car il apporte la joie et l’équilibre...Ainsi que de nouveaux combattants !

8- Les enfants nés de ces unions seront à la charge et de la responsabilité de la communauté, et seront donc regroupés dans des compagnies spécifiques, élevés, éduqués par des responsables ; éducateurs compétents reconnus par la communauté à l’unanimité. Les personnes âgées seront de préférence désignées pour cette activité, les jeunes adultes ayant en principe des charges forcément plus dynamiques. Les enfants sont un bien sacré pour tous, chacun sera prêt à chaque instant à donner sa vie s’il faut pour les préserver de tout danger. Tous sont conscient que l’enfant est le futur de notre Vie, de notre collectivité.

9- Chacun recevra la meilleure et la plus complète éducation disponible du moment, ceci dès son plus jeune âge. Chacun devra savoir maitriser l’utilisation des ordinateurs, les sports de combat, les notions de survie et de secours médicaux disponibles au moment, ainsi que les principes et préceptes sacrés de l’écologie ; tous en perpétuelle évolution. On devra très fortement développer la polyvalence plutôt que la spécialisation restrictive et préjudiciable aux autres en cas d’événements porteurs de risques.

10- Le souci de justice et d’égalité entre tous, devra être constant pour chacun ; quiconque constate une infraction à cette règle devra immédiatement le signaler ; sinon, s’il était prouvé par la suite que son silence, conscient de la chose, ait entraîné un préjudice pour la communauté, il sera reconnu autant coupable que l’auteur du préjudice lui-même, et puni de façon identique.

11- Sachez que l’ancien monde était saturé d’une population en contradiction avec le bon sens le plus élémentaire, ce que vous devrez impérativement ne pas reproduire ; votre bonheur futur en dépend. Des milliards d’individus arrivent à générer un taux de pollution qui devient impossible pour l´élimination naturelle dont est capable une planète. Soyez conscient que Gaïa, malgré toute sa splendeur actuelle toute récente, relève d’une grave maladie qui faillit la tuer. De plus, ne croyez pas à son gigantisme pouvant tout encaisser...loin de là, car Gaïa est une petite planète, une minuscule petite boule bleue perdue dans cet immense univers, et elle est bien fragile, comme tout ce qui est petit. Alors, que l’esprit de la Vie des grands espaces cosmiques vous inspire un indéfectible amour pour notre Gaïa, notre merveille astrale, notre bien le plus précieux.

12- Pour réussir ce futur, une notion capitale doit impérativement être partie prenante de chacun de notre jeune Humanité, à savoir que vous devrez déveloper une société contrôlée pour en permettre son administration viable, c’est-à-dire que vous devrez limiter le nombre d’habitants à un niveau acceptable et équilibré. Nous recommandons de limiter ce nombre aux alentours de 500 million d’habitants maximum, car convenons que le but des Hommes est évidemment de vivre en harmonie, regroupés dans des

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communautés assurant la sécurité, le bonheur et l’équilibre de tous ; il va sans dire qu’une surpopulation en est forcément le contraire et mène droit au chaos ; voir l’exemple criminel et suicidaire de nos prédécesseurs irresponsables.

13- Le monde mort avait développé la fausse et hypocrite nécessité, le besoin d’une nombreuse humanité, car c’était la seule logique inéluctable pour une société basée toute entière sur le seul profit toujours plus grand d’une poignée de criminels, l’unique raison de valable alors car il leur fallait toujours plus de clients pour augmenter sans cesse leurs profits : le vrai cercle infernal qui résultat par un suicide collectif.

Ne nous y trompons pas, le crime final démentiel des Zanko-Khuigs en est le résultat direct : s’ils avaient programmé la dictature du monde d’alors, ils furent dépassés, trahis par la folle démographie qu’ils avaient eux-mêmes incité à se développer, avec l’aide complice en sous-main des églises, car depuis toujours partie prenante des mêmes intérêts d’enrichissement et ambitions dictatoriales, qui furent de toujours leurs réelles et unique raisons d’être.

Continuons de proscrire les religions, ceux qui persisteront en cette voie réprouvée par nos communautés se mettront de facto hors humanité et devront en assumer les conséquences radicales décrites en nos lois : la mort !

14- Gaïa est notre mère, elle appartient à chacun de ses filles et fils. Nous pourrons donc habiter les régions aux climats confortables pour y construire notre bonheur ; chacun bénéficiant d’un potentiel de centaines de milliers d’hectares, du jamais vu à ce jour. Il sera donc inutile d’aller vivre durablement dans les endroits inhospitaliers, comme les milliards de nos prédécesseurs furent contraints de le faire car de toujours ils n’eurent pas d’autre choix : ils vivaient et mouraient là où leur mère avait mise bas, car exclus du monde des puissants, vivants en parias, véritable troupeau d’humains déchus et asservis.

Conclusion. Fasse que notre travail vous permette de construire, à vous tous nos descendants, un monde de félicité et de joie de vivre, que jamais l’humanité jusqu’à ce jour immature et asservie ne connut. Restez forts et responsables, que le poignard qui vous libèrera ne quitte point votre ceinture, car vous aurez sans cesse à vous méfier de la spéculation et de la trahison. Que votre main reste ferme et votre volonté soit toujours prompte à donner la mort pour sauver l’honneur de notre grande race blanche, la seule subsistante en ce nouveau, ce merveilleux monde qui nous appartient de droit.

Répression, Justice et Chatiments : 1- Tous dangers reconnus intrinsèquement nuisibles à l’Humain, c’est-à-dire

venant d’autres Humains, et qu’ils soient de sources physiques ou spirituelles, doivent être impérativement et radicalement éliminés sans délai.

2- Tout individu qui tentera de détourner l’intérêt commun de la collectivité à son profit unique, sera jugé publiquement par douze personnes désignées par la collectivité ; la sentence sera le bannissement ou la mort, exécuté de suite.

3- Toutes violences physiques sur un membre de la communauté, sera condamné au bannissement ; l’auteur sera déporté de suite dans les endroits les

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plus inhospitaliers ; le climat et les animaux sauvages lui garantissant une mort que tous ses anciens compagnons lui souhaiteront alors des plus horribles.

4- Tout jugement sera unique et imprescriptive. La mort, le sera par strangulation lente, de façon que le coupable ait le temps d’apprécier le mal qu’il fit aux autres. Bourreau qui sera volontaire, sinon désigné publiquement par tirage au sort sur la liste des résidents présents sur les lieux, l’élu ne pourra se soustraire à cette charge.

5- Toute tentative de développer le concept d’un Être dit supposément supérieur à l’Homme, autrement dit, celui, celle ou ceux qui tenteront de créer une religion, ou tout autre organisation se rapprochant de ce concept de manipulation mentale, sera condamné à mort, car il est accepté et reconnu par tous à ce jour que ces religions d’alors furent responsables au premier chef, de l’esclavagisme, de persécutions et toutes sortes de violences innommables et manipulations des hommes, qui furent considérés et traités longtemps comme du simple bétail, capitalisé par les princes immondes de ces églises.

Partant du principe ancestral qu’un Homme averti en vaut deux...Fasse que ce travail vous inpire dans vos jours meilleurs.

Le Grand Conseil des Anciens. 2019. Province de Franki, planète Gaïa. Pour se faire une idée exacte de la situation lors de l’attaque de ce fatal

vendredi du 1er mai de 2015 ; nous sommes en mesure de vous présenter un document exceptionnel et garanti authentique...le contraire n’aurait aucun sens.

C’est le seul document existant de cette époque. Il fut réalisé par une petite équipe de travailleurs qui se trouvaient opérant (ce qui leur sauva la vie) dans une ville moyenne, le Montpellier d’alors, au Sud de la Franki.

Note. Ce document dont l’original était en assez mauvais état de conservation, fut trouvé en septembre 2021 dans une grotte abandonnée par des rescapés, on ne sait pourquoi exactement. L’original a été recopié sur support informatique, permettant ainsi de le reproduire et le diffuser parmi nos communautés. Ceci est la preuve incontestable de l’attaque et traîtrise que subit l’humanité.

Avis. Nous avons volontairement conservé le langage imagé de l’auteur. Attaque aérienne du 1er Mai 2015 à Montpellier : les faits. Nous sommes un groupe de cinq travailleurs, plus une jeune ingénieur

stagiaire, tous des cadors dans la maintenance d’installations frigorifiques, sans se vanter ; travaillant pour la Cie Freez-Azur, de Montpellier.

Je m’appelle Lucien Lebret, 37 ans et suis le chef d’équipe...enfin, j’étais plutôt, et suis en compagnie de mes collègues de travail : Claude Lherbier, 32 ans - François Richt, 39 ans - Frantz Slaugher, 26ans - Sergio Alonso, 34 ans, et la jeune ingénieur stagiaire, Béatrice Duprat, 23 ans.

Voici les faits de ce jour maudit du 1er mai 2015. Déjà nous étions tous furax d’être obligés d’aller bosser un jour de 1er Mai, faut

avouer que c’est un peu raide, non ? Donc, depuis une semaine, au grand hôtel Le Splendid, un 4 étoiles du centre ville de Montpellier, il y avait la centrale de

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froid qui déconnait à tout berzingue, et avec les vacanciers et la chaleur qui étaient bien là, faut imaginer le proprio de l’hôtel qui gueulait comme un putois, et ça bardait un max à la direction de notre boîte, d’autant que c’était la faute de Lepiscail, le contremaitre ; le Poiscail, comme on l’appelait. C’est comme ça que cette peau de vache nous a refilé le bébé : « Allez me réparer cette putain de centrale, bande de minables, ou je vous vire avec perte et fracas », qu’il nous gueule à tous ; même que le Sergio voulait lui rentrer dedans une bonne fois pour toutes. « Je vais le crever, cette salope » qu’il gueulait le Sergio...un peu nerveux sur les bords, le gars.

Et voilà la Béatrice, sympa, qui se met à défendre le Sergio ; alors, cet enfoiré de Poiscail, il lui gueule, à la gamine, « Que si elle n’y va pas le lendemain avec les autres, il la vire aussi ». Et c’est comme ça qu’elle s’est retrouvée dans cette galère avec nous...comme quoi, vivre ou mourir, ça tient à peu de choses. Elle devrait lui faire brûler un cierge au Poiscail, car c’est sa connerie qui l’a sauvé la môme.

Bref, le lendemain nous voilà tous les six sur le chantier au lever du jour, dans les 5 plombes du mat, car notre boss avait promis au proprio de l’hôtel, qu’à midi pétante son hôtel serait aussi froid que le pôle nord...Putain, ils te leurs racontent de ces conneries aux clients...et ces tarés avalent tout de go ! Enfin, si c’est pas un monde, surtout cette pauvre minette, la Béatrice, qu’était pas habituée d’aller bosser aux aurores, logique pour une future chef ! Bref !

Quand tout fut fini, il était déjà pas loin d’une heure de l’aprem ; nous avons repris le fourgon pour repartir à la boîte...et c’est quand nous avons déboulé sur l’avenue que nous avons découvert le carnage. Le fourgon a pilé et nous sommes tous descendus commes des fous, hagards...courant quelques mètres de tous les côtés, pour voir cette chose ahurissante de cadavres à perte de vue.

Béatrice me demande comment je fais pour avoir le courage d’écrire tout ça. Faut bien que quelqu’un s’y mette, que je lui réponds, faut prévenir les autres.

C’était horrible, surtout que sur le moment aucun des six ne comprenait ce qui était arrivé. Aussi loin qu’on pouvait voir de chaque côté de l’avenue, et en face, sur la grande place du Carroussel récemment inaugurée, ce n’était que des monceaux de cadavres, des centaines, des milliers de cadavres...Les plus près, on voyait bien qu’ils étaient morts suffoqués car ils se tenaient la gorge, la bouche grande ouverte, les doigts qui paraissaient vouloir arracher leur gorge...ils avaient leurs regards épouvantés. C’était monstrueux, horrible...je sais plus quels mots employer tellement que c’était dur de voir ça.

Quand nous avons réalisé que nous avions échappés à une fin aussi horrible, nous avons tous vomi les uns après les autres, longtemps, toutes nos tripes, puis nous avons compris qu’il fallait que nous partions loin d’ici, car il était évident que cette montagne de morts, d’où commençait à sortir une odeur bizarre, il était évident qu’il fallait se tirer de la ville, et vite, avant de mourir nous aussi par les épidémies qui allaient se développer rapidement.

C’est alors que nous avons pensé que ce carnage ne devait pas être le seul. Béatrice prit son mobile pour téléphoner à sa mère à Toulon... « On va voir », dit-elle tremblante comme une feuille. Ce fut tout vu ! On essaya de téléphoner à différentes villes, ce fut le silence total. Nous étions définitivement fixés et effarés, désemparés, horrifés, abasourdis, plus personne ne pouvait parler,

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devant ce gouffre béant qui s’ouvrait devant nous. Tout s’écroulait, se disloquait, disparaissait, il nous restait qu’un vide énorme devant nous...le néant.

Puis, un de nous a dit qu’il s’agissait d’une attaque, donc d’ennemis, et qu’il ne fallait pas rester là mais aller se planquer loin des villes. C’est là que nous avons pensé à nous réfugier dans une grotte, du fait qu’il y en pas mal dans la région. Mais le problème est apparut de suite à tous : comment y survivre dans cette grotte ? C’est notre formation de techniciens, habitués que nous étions tous à se colleter journellement avec des problèmes techniques, qui nous donna de suite ce réflexe de trouver la solution au problème posé par la destinée.

Bref, d’avoir dégagé les premiers impératifs, ouvrait le processus mental de recherche de solutions. C’était déjà une grande chose positive pour nous, un but à poursuivre, un objectif. Ça c’est très important : dégager un objectif ! À partir de là, et comme par miracle, nous avons saisi une donnée essentielle, et c’est incroyable la vitesse de notre réaction : la ville, et tout ce qu’elle contenait était à nous. Ce qui signifiait qu’il n’y avait plus qu’à aller se servir de ce quoi nous aurions besoin.

La ville devenait un gigantesque supermarché...dont nous étions les proprios ! Une rage de survivre s’empara alors de nous tous, et en moins de trente minutes nous avions établi un plan d’attaque, d’autant qu’il nous restait que quelques heures avant la nuit. Fallait faire fissa.

Nous sommes toujours restés conscients que derrière ce massacre il y avait quelqu’un dont il fallait se protéger rapidement...et nous en sommes vite arrivés à la conclusion que seuls ces salopards de Zanko-Khuigs en étaient les coupables, car les seuls capables de commettre une telle folie. Oui, ce génocide est signé, ce fut une certitude pour nous tous, uniquement des névrosés avaient put décider une telle manoeuvre contre l’humanité ; ils étaient en tout cas les seuls qui en avaient les moyens stratégiques, car ils avaient depuis longtemps, c’était un fait connu de tous, peu à peu réquisitionné la plus grande partie des moyen militaires de l’Amérique du nord, leur fief depuis des générations, et qu’ils avaient pillé jusqu’à l’os.

Donc, il ressortit que nous devions aller dans un grand magasin où là nous trouverions de tout pour nous équiper le plus rapidement. Nous repartîmes donc avec notre fourgon, sur la route de Nîmes, vers l’Ultra, le nouveau supermarché qui cassait les prix soi-disant, à la sortie de la ville...Nous, on disait, « Nous allons leur casser la baraque, à ces fumiers », et ça faisait rire tout le monde.

Ha oui ! j’ai oublié de dire que partout, on voyait des véhicules dont le conducteur était mort et qui avait causé un accident : écrasé des personnes, défoncé quelque chose, certains étaient renversés ; beaucoup de moteurs tournaient encore, les gagnoles coincées pare-chocs contre pare-chocs.

Chemin faisant donc, nous étions bien souvent obligés de déplacer un véhicule qui bouchait la voie...il suffisait alors de virer le mort par terre et de ranger l’engin sur le côté, ce que nous fîmes une trentaine de fois. Au début des cadavres encombraient les rues, et il y en avait beaucoup, nous les déplacions sur le côté pour passer avec le fourgon...Puis, le temps passant, nous réalisâmes

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qu’à ce rythme nous allions y passer la nuit...alors, n’ayant plus que le seul et unique choix de sauver notre propre peau...nous avons roulé sur les cadavres !

Ça giclait sous le bahut...On reconnaisait le bruit typique des crânes qui explosaient comme une pastèque sous les roues ; on avait l’impression de rouler sur des pavés mals joints et glissants...Nous étions livides...nous avons vomi plusieurs fois, à se tordre de douleurs, l’estomac vide depuis longtemps...les spasmes étaient terribles, mais la peur de crever aussi nous aiguillonnait, et nous repartions avec des regards d’hallucinés .

Nous avons récupéré deux grands camions à plateau. Arrivés au Super Ultra, heureusement que c’était jour férié, comme ça il n’y avait personne, ou plutôt, aucun mort, mis à part trois gardiens rétamés qui se retrouvaient de ce fait au chomdu. Moi j’ai jamais encaissé ces gardiens, des parasites en somme...

Bref ! Nous sommes entrés tous joyeux, avec chacun sa liste perso dans sa caboche. Nous fîmes une razzia gigantesque, tous excités de ce marché pharaonique dont aucun de nous tous n’avait même jamais osé rêver de toute sa putain d’existence passée à toujours calculer comment trouver vingt centimes pour faire un foutu euro.

Quand les camions furent pleins à bloc, bachés et arrimés... il y en avait des mètres cubes. Nous rangeâmes le tout et refermâmes soigneusement la porte avec de la ficelle pour ne pas que des animaux puissent entrer, en prévision déjà d’autres virées d’approvisionnement, car ce que nous avions ne durerait pas éternellement, bien sûr. Puis nous partîmes vers l’est, vers la ville de Nîmes, puis vers le nord, vers Arles, St Ambois...Frantz y connaissait cette grotte de Cocalière, relativement isolée. En passant devant la caserne des pompiers puis celle de gendarmerie, nous fîmes encore une razzia de matériels respiratoires et d’armes et munitions...de quoi tenir un siège.

Arrivés à la grotte Cocalière, nous dormîmes cette nuit-là dans les camions, bercés par les chants des grillons et autres insectes ; dans cette nuit étoilée et d’un calme incroyable, nul n’aurait put imaginer que l’humanité avait été condamné à mort, impossible.

Ce fut le lendemain matin seulement que la réalité de notre situation nous tomba dessus véritablement. L’effet de surprise étant derrière, la brutalité de la chose nous dessilla les yeux définitivement ; il n’y avait plus aucune illusion à se faire : si nous n’y prenions pas garde et y mettaient toutes nos énergies et nos volontés pour continuer à vivre, nous étions alors des morts en sursis ! La chose étant dite, il ne restait plus à chacun qu’à relever le gant. Plus facile à dire qu’à faire, croyez-moi.

Ce qui sauta aux yeux à tous, il nous fallait du courage à revendre...ne serait-ce que pour décharger les camions et trier tout ce vaste foutoir répandu dans l’herbe. Puis, il fallut visiter la grotte, heureusement nous trouvâmes les commandes pour l’illuminer, ce qui nous facilita énormément la visite et un premier choix d’aménagement ; puis le transport de tout le matériel et son rangement. Obligés, en urgence, de fabriquer des housses en plastique pour protéger nos réserves des gouttes d’eau. Nous y passâmes douze jours exténuants.

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Nous dormîmes longtemps dans des tentes de camping pour se protéger des gouttes d’eau. Chacun faisait le maximum qu’il pouvait, et la nuit venue les faibles comme le balèzes étaient épuisés. Nous redoutions le jour où l’électricité sauterait. Ce qui arriva seize jours après quand même, mais nous avions eut le temps de nous installer en y voyant clair, c’était énorme...mais la suite devint vite beaucoup moins drôle.

Par contre, au bout de quelques jours, alors que nous étions pourtant loin des agglomérations, les brises nous amenaient l’odeur atroce, heureusement diluée des cadavres en putréfaction ; là-bas, ce devait être terrible. Puis, des nuages épisodiques de mouches nous envahirent, portées par les vents ; véritable plaie à l’égyptienne, comme ils bavaient dans leur foutue bible, sauf que celle-ci était bien de chez nous. C’était infernal, vraiment, nous fûmes obligés de rester enfermés durant longtemps, assez loin de l’entrée, en faisant de la fumée en brûlant des végétaux encore verts, pour ne pas attirer et éloigner ces milliards de bestioles répugnantes et porteuses de mort. Nous imaginions aussi toutes les bêtes qui allaient se repaitre des cadavres : rats, chats, chiens, etc.

Durant le temps que dura ces aménagements, cela alla encore, l’activité incessante prenait toute l’attention de chacun, toute son énergie. Quant au bout de deux semaine, en gros, nous fûmes installés relativement confortablement, c’est là que tout devint véritablement très dur. Chacun restait avec ses sombres idées qui lui tournaient dans le ciboulot. Puis, les contraintes journalières apparurent ; par exemple : qui allait cuisiner ? Cette question aussi banale dans l’autre vie prit brusquement une ampleur démesurée ; et comme une femme était dans le groupe, la première réaction fut de lui coller ce boulot dans ses cordes.

Sauf que la Béatrice mit de suite tous ces balèzes au pas, et elle a eu raison. « Pas question de me refiler le bébé », s’écria-t-elle révoltée, et elle était vraiment furax la nana, « Si vous voulez manger, gueula-t-elle, il faudra que tout le monde s’y mette, c’est comme ça et pas autrement ! Vous croyez pas que je vais faire votre boniche, non ? Ben merde, alors, plutôt crever de suite ! » Qu’elle gueulait, la pauvre...

Après quelques réclamations, tous les hommes se mirent à participer à la bonne marche de notre petite communauté perdue sous cet immense ciel du midi. Oh ! ce fut pas facile, ça non...mais on s’y colla quand même. En fait, ça avait été une réaction d’hommes blessés dans leur orgueil...pas méchants pour deux ronds, juste un mouvement d’égoïsme mesquin mais somme toute humain. Tous, nous lui fîmes nos excuses les plus sincères à la Béatrice, ce qui fut une véritable délivrance pour cette pauvre fille qui se retrouvait la seule et unique de son espèce parmi cinq gars. Ce ne dut pas être facile pour elle, ça non.

Voici comment nous vécûmes. Nous avons eu une chance exceptionnelle d’être des techniciens, des mecs habitués à se bagarrer tous les jours, pas des ramollis de la comprenure, ça non, pas de ces intellos tous juste bons à baver leur fiel sur la société, non ; de ces niares qui de toute leur putain de vie de parasites furent juste bons à cracher dans la soupe et n’ont pas produit un centimètre cube d’un bien quelconque pour leurs semblables ; seulement des cloportes tout juste bons, ils y excellaient en fait, dans leur société baveuse, à répandre leur lèpre défaitiste et négationniste de la vie. La seule qui pourtant

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mérite réellement d’être vécue ; la vie des hommes de coeur et de courages, et non leur exhalaisons de vomi de leurs pensées stagnantes et déjà sclérosées avant de suinter de leurs crânes pleins de vents pestilentiels, d’où leur retour à la source, dans ces villes alors devenues dignes de leurs néants nauséabonds. Ouf ! Putain de nom de Dieu ! ça soulage !

Pour le présent, et c’est nouveau, nous observons depuis maintenant quelques semaines, des apparitions épisodiques d’engins volants noirs, d’un type que personne ne connait. Claude à même vu l’autre jour aux jumelles, loin d’ici, une trentaine de militaires habillées de noir qui ratissaient le terrain...Plus personne n’ose sortir de la grotte...pourtant, va falloir retourner chercher de la bouffe maintenant que notre stock arrive à sa fin...J’écris ça, on doit être environ vers le mois de janvier de 2018, bientôt trois ans de passé, c’est dingue comme ça passe vite, on aurait pas cru pourtant.

Ces mouvements de ces militaires nous épouvantent...alors que nous commencions à nous habituer à un nouveau rythme de vie, calme et relax, après toutes ces horreurs...C’est pas que c’est terrible, mais on vit quand même, et on garde toujours l’espoir d’une amélioration ; rencontrer un jour d’autres survivants comme nous...nous unir et foncer en avant pour construire un avenir meilleur...L’espoir fait vivre.

Ces militaires venus d’on ne sait d’où, foutent tout par terre. Fini la tranquilité, va falloir se réveiller, que je leur dis aux autres ; on s’est peut être un peu trop endormi sur nos lauriers...va falloir bouger. Demain, on a décidé coûte que coûte d’y aller, le Sergio et moi...faut bien se ravitailler, non ?

Note des transcripteurs. Le texte s’arrête ainsi brutalement, seul, un morceau de page visiblement déchirée à la hâte, a été rajouté dans le sac avec la lettre, et sur lequel apparait quelques mots hativement griffonnés de la main d’une autre personne, et qui dit : « En voilà d’autres, ils sont à environ 5 km sur la route vers St Ambois, on va les baiser en passant de l’autre côté. » C’est tout.

Nous ne saurons jamais ce qu’il advint de ce groupe, on tremble seulement quand on pense à tous ces malheureux rescapés capturés alors par les sbires des Zanko-Khuigs, ces gardes immondes, pourritures en sursis eux aussi.

Document pour propagation maximale car de l’intérêt de tous. Transcrit en juin 2022 par Raymond et Laura. Province Franki. Le capitaine Fred Richardson, Freddy pour les intimes, c’est-à-dire en vrai, ses

poulettes qu’il préférait le plus ces derniers temps, Jolye et Cyntra...Les deux pouliches dont il gardera longtemps le souvenir le plus chaud à son coeur pourtant blindé, mais maintenant blessé profondément, blessé à mort presque, car il savait maintenant par miracle ce qui était arrivé.

Il était avec son lieutenant et ami, Joss Firley...Joss, ce brave gars qui lui avait sauvé sa peau au péril de la sienne, il y avait quelques années de ça, et ils étaient devenus des amis, ce qui est rarissime dans leur profession de militaire des Forces noires. C’était lors de ce putain de traquenard où ils étaient tombés

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comme des cons, des bleusailles. Impardonnable, se maugréait-il sans cesse au souvenir de cette cagade, comme disait ces frenchmen du sud de leur country.

Ce fut lors de l’attaque du PC de ces enfoirés de chiites iraniens, juste deux semaines avant de les rayer de la carte, eux et leurs ayatollahs de merde...Ils avaient été les derniers sur la longue liste de ces pays de la région à être lessivés ; « Feront plus chier le monde, ces salopards, comme tous ces arabes de merde », pensait-il, il y avait de ça quelques jours encore.

Il lui semblait maintenant qu’il y avait des siècles. Ils étaient là sur ce chantier en construction en vue du percement d’un tunnel,

depuis guère plus d’une semaine maintenant, avec sa petite équipe de durs à cuires, spécialistes des coups tordus. Le patelin le plus proche de ce coin paumé d’Alabama, dans ce contrefort des Appalaches, était à plus de trois heures de gagnole vers le sud-ouest, et pour la question d’aller passer la soirée dans un bar ou s’envoyer une fille, c’était rapé, y avait que la cantine avec sa bière plus ou moins fraîche et le bordel ambulant classique avec ses éternelles radasses de tous les campements de cette sorte. « Si c’est pour se farcir une pouffiasse de ce claque merdique, autant se faire reluire tout seul », pensait-il en poussant un long soupir d’insatisfaction. Quel métier pourri, marmora-t-il entre les dents.

Il était le chef de ce groupe faisant parti des Forces Spéciales et ne recevait ses ordres que de l’état-major, uniquement, et encore, ordres codés. Ils ne découvraient la mission que dans l’avion qui les transportait vers leur cible, y compris le matos dont ils auraient besoin. C’était la manie du secret de leurs pontifes depuis qulques années maintenant. Toutes les actions étaient préparées par des équipes spéciales qui n’avaient aucune chance du moindre contact avec les exécuteurs des missions.

Ainsi, un équipage de bombardier recevait les coordonnées de leur cible qu’une fois loin du country, et ils n’avaient ainsi aucune idée de ce qu’ils allaient balancer sur la gueule de l’ennemi ; comme ça, pas de scrupules ni d’hésitations. Des centaines de milliers, voire des millions de personnes dispaissaient ainsi en fumée dans le plus absolu anonymat et l’indifférence générale. C’était devenu une horreur véritable, ça n’a plus rien à voir avec la guerre, pensa-t-il dégoûté, mais avec une immonde boucherie gratuite.

Ils se recupéraient de leur dernier coup fourré en Corée, à Pyongyang plus exactement, où ils venaient avec succès de dégommer un important groupe de galonnés de l’état-major de ces macaques. Puis leurs nouveaux super bombardiers, les Black-Terror, de 436 tonnes de charge utile, étaient venus leur jouer une sérénade à leur façon inimitable...Ils les avaient rayé de la carte de cette partie du monde...comme tous les autres singes avant eux en fait.

La base regorgeait déjà de matériels les plus variés, comme toujours. Pour l’armée il n’y avait jamais de restrictions budgétaires, c’était même une gabegie totale ; pendant, et il le savait, que des dizaines de millions de misérables crevaient de faim dans leur propre country. En plus de tous les engins de travaux publics inimaginables, il y avait des dizaines de camions de tous tonnages, et un énorme transport aérien, un Hercules BY-5oo, ces machines gigantesques équipés de huit énormes réacteurs capables chacun d’avaler un

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camion ; ces monstres noirs ressemblent un peu à une gigantesque chauve-souris, pouvaient transporter près de 500 tonnes sur une distance de 31.500 km, ou faire le tour du globe sans escale avec un fret plus limité...

Ces engins étaient véritablement effarants ; chargés moyennement ils étaient capable de se poser et redécoller d’une prairie de seulement 800 mètres de long, ce avec l’aide de deux boosters de chaque côté, ainsi que leurs énormes et nombreux trains de pneus.

Puis il eut un sourire de dérision quand il aperçut derrière ce mastodonte, un ridicule AF-380, l’avion mythe (alors) des européens, sourit-il de dédain. Quand je pense, se dit Fred, riant à demi, que cet engin sorti des ateliers il y a à peine huit ans de ça, fut la terreur de nos Cies, avec ses minables 150 tonnes.

Ce qui avait valut une gueulante de leur président et conséquemment la concentration de leurs constructeurs en un gigantesque pool, d’où sortirent ces fabuleux bombardiers Black-Terror et la version transport, dérivée de ces monstres, les Hercules BY-500, comme celui-ci, ramenant ainsi rapidement au rancart, ou presque, les zings de ces européens aux grandes gueules...bons qu’à jacter, pensa-t-il...des fiotes, tous autant qu’ils sont...toujours à tergiverser, bons qu’à jacter comme des gonzesses avec leurs diplomates mielleux et hypocrites, logique pour des faibles, dit-il tout haut avec mépris.

De plus, ça le faisait marrer de se souvenir que durant un temps pas encore si éloigné, il avait commandé une section de protection rapprochée des grands pontes de leurs grosses banques qui dirigeaient déjà le marché mondial, le monde en fait. Il les avait vu alors, ces caïds aux attache-cases noirs comme leurs costards et leur âme...s’ils en avaient seulement une. Ils étaient toujours là, toujours les mêmes, tous ces pourris de banquiers apatrides et sournois, les vrais maîtres de monde ; que ce soit pour une réunion d’affaire d’une Cie, d’un constructeur local, d’un Etat...et les mêmes encore chez ces européens pleins de vents...

Fred, et son pote Joss, n’étaient pourtant pas des enfants de coeur...on peut pas dire. Le pitaine, un pur texan, allait allègrement sur ses quarante balais et tenait une forme exceptionnelle, avec une carrure de lutteur de foire, ses 1.96 m de hauteur et ses 99,5 kg de muscles, et pas un poil de graisse (il tenait toujours à préciser ces 500 g de plus à son poids, simple coquetterie). Le style bahut breton, une gueule au carré surmontée de cheveux noirs coupés ras, comme tous dans ces compagnies, et des yeux marrons foncés.

Côté carrure il tenait de son père, sauf que son vieux était ramolli, ventripotent, avachi par son unique passion de gagner toujours plus de ses maudits dollars ! Il le haïssait. Il faisait dans le pétrole, pas très loin de la ville d’Austin ; quelques puits au début, hérités de son père paysan comme lui. Dès lors il n’eut plus qu’une idée : tenter déposséder de leurs terres par les pires moyens les autres péquenauds comme lui, pour s’enrichir toujours plus.

La chance lui avait souri, sauf qu’il devint complètement taré avec sa soif inextinguible de son putain d’or noir...Pour gagner toujours plus de fric, disait Fred écoeuré, il serait capable de vendre sa femme. Sauf que sa vieille ne valait pas un clou à l’argus. Sa mère, pensait Fred dégoûté, était une femme

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quelconque, petite et effacée, insipide, avec toujours le nez dans ses bondieuseries.

Elle était toujours fourrée dans son putain de temple d’Austin, au Central Presbytorian Church à East Eighth Street at Brazos, à prier pour l’âme corrompue de son mari ; et pour cela refilait du fric à l’autre fils de pute de pasteur, qui ayant senti la chose et la bonne poire, faisait allonger à la vieille de grosses sommes : « Meilleur moyen pour sauver l’âme en perdition de votre cher époux, ma fille », lui disait-il l’infâme : un jeune latino siropeux et collant comme la vérole sur le bas clergé. Sauf que son vieux, un jour fatal apprenant la chose, s’étranglant d’une rage mortelle, avait bien failli les buter tous les deux : sa conne de bonne femme et son vampire de maquereau onctueux et ruisselant d’hypocrisie et calculs vénaux. « Comme tous ces fils de putes de latinos de merde ! » que gueulait son vieux à s’en péter la glotte.

Fred, qui était batti en hercule et était champion de foot de son université ; promit à son vieux que s’il touchait un cheveu de sa mère, il allait lui sortir ses tripes une par une. Son vieux, en vrai lâche et ayant peur de son fils, laissa tomber la partie ; pour le plus grand profit (temporaire) de l’onctueux latino. Pour enfin, un jour de ses seize ans, Fred foute le camp pour de bon de ce milieu de tarés ; laissant à leur destin le trio endiablé. Un aller simple !

Ce qui plus tard l’écoeura un max, mais bien trop tard, ce fut quand, un jour sur Internet qu’il s’informait en douce de sa hiérarchie, il réalisa que ce job dans les Forces spéciales était assentiellement fait pour défendre les intérêts privés de pourris comme son père ; clique d’infâmes charognards qui menaient la monde à sa perte. Tel était bel et bien ce monde pourri qu’il défendait, malgré ses illusions des débuts.

Je me suis fait enc... jusqu’au trognon, pensa-t-il amer. Son pote, le Joss Firley, 32 ans, est d’un blond doré qui faisait littéralement se

pâmer les gonzesses ; il est moins grand que lui de dix bons centimètres, mince comme un manche à balais, les muscles fins mais d’acier et d’une endurance stupéfiante ; nul n’y aurait pensé en le voyant, d’autant qu’à le voir en situation normale il avait une démarche nonchalante...bien trompeuse.

Joss est un cas un peu particulier dans cette armée de tueurs professionels, car il est natif du Québec. De père anglais né en Ontario et sa mère québécoise. Il vécut toute son enfance dans un quartier populaire de Montréal Est, dans un petit immeuble de studios et petits apparts de location sis rue de Bellechasse, à moins d’un bloc d’immeubles du terrain de base-ball du Parc Pierre Marquette : l’été, lieu de réunion et montage des coups fourrés avec son équipe de petits marlous du quartier. Son père ayant mis les voiles peu avant ses douze ans, sa mère ne put mieux les loger car une fois larguée par son mari elle due chercher un job et ne trouva que celui de simple femme de ménage dans une entreprise de nettoyage officiant au Collège Dawson, pas loin de la station de métro Atwater, en zone ouest.

La seule chance de Joss fut que son père ne lui parlait qu’en anglais, du fait qu’il ne causait pas le français, comme la plupart de ces francophobes des autres

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provinces. Tout ce qu’il avait aimé de français, disait-il âmer, c’était le cul de sa mère. Joss passa son enfance souvent livré à lui-même, dans les rues à faire les quatre cents coups avec les copains. Ètats de faits d’où découla rapidement quelques rapports tendus avec les flics, puis une ambiance toujours plus tendue aussi avec sa mère qui n’arrêtait pas de gémir sur la vie : une vraie scie.

Il en eut vite ras le bol de l’horizon standardisé et monotone de cette ville plate de blocs de quatre étages sans fins, aux rues tirées au cordeau ; avec en sous-sol, comme partout dans ces immeuble, un local regroupant des machines à laver et sécher le linge pour les résidents ; endroit béni pour un chasseur comme Joss, qui y draguait à la pelle les femmes mariées résidentes, ravies de se faire monter par ce jeune coq impétueux et infatigable.

Toutes de grosses cochonnes en diable. Il était fier de son score, une dizaine au moins se faisaient culbuter pour pas une piastre, pendant que leurs maris se crevaient justement la peau à en gagner, ce qui en prime le faisait bien rigoler.

Une surtout, la Suzy, voluptueuse et dodue baiseuse dans la quarantaine, mais au QI maigrelet. Vicelarde en diable, que s’en était une bénédiction pour ce fringant queutard. Comme elle fumait beaucoup et avait peur de choper un cancer de la gorge, Joss, en fin roublard déjà, l’avait convaincu sans peine que le meilleur antidote était le sperme. Dès lors, cette vorace lui faisait des pipes à sécher un mammouth ; que pour finir il l’avait rebaptisée Sucette, mais que s’il était resté il y aurait assurément laissé sa peau...avec les os.

Joss était faché à mort avec le bon Dieu. Et que dire alors de ces hivers n’en finissant plus, à patauger dans cette boue noire de la neige fondue au gros sel... Laissant un mot d’adieu à sa mère, il fit son baluchon puis partit en stop s’engager dans les Marines chez les ricains...Et de par ses qualités de combattant hors pair, il échoua en toute logique dans les Forces spéciales ; comme des milliers d’autres jeunes fuyant pareillement un aujourd’hui sordide...Leur demain allant le devenir tout autant, mais dans un registre bien plus radical.

Et donc, le naturel revenant toujours au galop, du fait de ses origines de petit marlou montréalais, dès que Joss est en colère, les jurons, blasphèmes québécois qui relevent là exclusivement du langage religieux, ressortent alors avec vigueur et forcément avec l’accent, ce qui fait toujours rire son pote, le pitaine Fred Richardson ; rires qui font redoubler le flot d’injures...

L’attaque avait eu raison de leurs esprits, le choc émotionnel fut terrible. Quand, en ce jour férié (pour les civils seuls) du 1er mai 2015, ils émergèrent du

puits de forrage de ce vieux tunnel transversal abandonné, qui devait relier ce récent centre militaire de recherche scientifique souterrain, avec la vieille base de l’US Space & Rocket Center, à plus de trente bornes vers le sud, et dont le chantier devait reprendre sous peu ; c’est alors qu’ils virent leurs gars étendus sur la piste et les pelouses alentours, plus de soixante guerriers aguerris nettoyés en cinq sec par une saloperie de gaz.

Ils étaient tous morts dans la souffrance et la peur, se tenant désespérément la gorge, leurs yeux exorbités exprimant leur calvaire. Ils s’étaient vu mourir sans comprendre pourquoi, ni par la faute de qui ; c’était à vomir. Tous deux courant

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un moment des uns aux autres, en vain, effarés de stupeur, et quand ils eurent enfin compris ce qui se passait, ils coururent à la baraque équipée du matériel de communication, dont la radio longue portée.

Joss réussit après de longues recherche à capter enfin un signal étranger, car aucun signal de chez eux n’était audible, leur country paraissait mort. Ils entendirent seulement ces paroles fatales en français, émises par une station suisse, langue que Joss et son pitaine comprenaient assez bien pour avoir travaillé un temps à Paris pour y éliminer des groupes d’oppositions au gouvernement vendu aux cartels de chez eux, le tactique classique de subversion, et ils entendirent ces paroles laconiques mais combien révélatrices : « ...elques instants de Londres puis de Paris, une attaque aérienne sur ces deux villes ; attaque d’une ampleur sans précédent, qui a entièrement rayé de la carte ces populations qui ne pu... », et ce fut tout...mais largement explicite pour eux deux.

Ils restèrent paralysés sur place durant un long...très long moment, le temps que cette phrase laconique fasse son chemin dans les méandres anesthésiées de leurs cerveaux. Ils surent, ils comprirent alors que ces tarés pour lesquels ils travaillaient depuis une éternité sans chercher à comprendre, venaient de passer aux actes. Ils cherchèrent quelques temps d’autres émissions radio, en vain. L’espèce humaine semblait avoir disparu en entier d’un seul coup.

Fred, depuis longtemps déjà, savait que ce job qu’ils faisaient été une horreur absolue, que ces malades avaient instauré une dictature planétaire sanglante. Il sentait aussi que tout cela les entraînait toujours plus vers le pire, toujours plus vers l’enfer mais, se disait-il, dans l’espoir de décharger peut-être un peu sa conscience, quoique sans trop d’illusion quand même ; que ferait-il d’autre de sa peau ? Il ne savait faire que ce job : tuer, détruire, assassiner, mentir, voler...tout cela à l’infini et à profusion.

Cette liste lui laissait un goût amer dans la gorge, et son pote Joss pensait de même, il le savait, malgré qu’il fut plus jeune. Condamnés qu’ils étaient à continuer à bosser pour ces détraqués, tel se présentait leur avenir. Ils avaient mis le doigt dans une machine redoutable qui les broierait tous ; ça ils le savaient et le sentaient depuis toujours dans leurs tripes car ils étaient au courant de leurs saloperies, depuis qu’il y avait ce fabuleux réseau Internet à disposition de tous.

D’instinct, Fred s’était méfié de leurs magouilles devenant de plus en plus dangereuses, c’est pour ça qu’il avait cherché en douce de ses chefs, tous pourris et vendus corps et âmes, à comprendre son monde...Il n’avait pas été trop surpris en fait ; il avait découvert alors que son country avait depuis le début, et il y avait de cela fort longtemps déjà, été la victime de l’attaque en règle dont il fut la cible de la part de ces maudits banquiers européens d’alors ; banquiers qui avaient commencé par financer, de loin, leur guerre fraticide, à eux, ses propres ancêtres qui, comme des abrutis s’étaient saignés à mort entre eux, du Nord au Sud, pour la plus grande richesse de ces banquiers étrangers qui avaient financé les deux partis ; ainsi, peu importe qui gagnait, eux gagnaient sur les deux tableaux, puisqu’ils les avaient endetté à mort...Ils prirent le contrôle des finances de l’État et leur sort fut joué une fois pour toute.

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Ce qu’ils firent par la suite systématiquement sur toute la planète en déclenchant les guerres et révolutions suivant leurs intérêts financiers propres, et uniquement ; seul, l’argent, la richesse débile et stérile les intéressant. Comme ils le firent si bien en Russie, où ils financèrent ces bolchéviques de merde...pour finir par instaurer la guerre sur toute la planète, leur spécialité ; endettant toutes les nations d’alors, car ils ne vivent que de ça, et lui, le capitaine des Forces Noires, Fred Richardson, savait maintenant, mais c’était trop tard...bien trop tard : les rares survivants n’étaient que les cocus de l’Histoire, baisés jusqu’au trognon !

Et voilà où en était présentement ce monde débile. Le résultat que tout un chacun aurait dû prévoir immanquablement s’ils n’avaient été moins cons en réalité, mais...trop tard pour pleurer, mon gars, pensa-t-il, fallait se réveiler plus tôt, pensait-il amer...à moins que...à moins que...des micro-flashs semblaient venir faiblement lui titiller ses synapses...oui, à moins que...

Joss réagit le premier. -Et maintenant, mon pitaine chéri, qu’est-ce qu’on glande d’après toi ? Je crois

que nous avons une planète à notre disposition...tout au moins pendant un certain temps qu’il faudrait mettre à profit.

-J’en ai pas la moindre foutue idée, mon pote...mais toujours est-il qu’il faut se tirer d’ici avant d’être empuantis par les macchabées de nos pauvres gars, montrant les cadavres du geste au dehors de la cahute....C’est pas raisonnable, dit-il, le regard fixé sur les morts, c’est pas raisonnable de faire une saloperie pareille à ses propres gars, bordel de merde ! S’écria-t-il, en colère maintenant.

-Entièrement d’accord avec toi, Fred...les villes ont dû être arrosées pire qu’ici, certainement...pas la peine de s’y pointer, ostie ! Jura-t-il avec véhémence.

-Reste la base des grosses têtes planqués sous terre ; eux doivent s’en être tirés...À mon avis, ces fumiers ne les auront pas éliminés, ils en ont trop besoin pour la recherche...

-Pas con comme gamberge...t’as certainement raison. -Bon ! puisque j’ai raison, alors allons-y de ce pas ; tiens ! prend le volant de ce

camion et foutons le camp d’ici. -Ok, boy ! avec plaisir...de les voir comme ça, ça me rend malade, criss...au

moins on bouge, c’est l’a.b.c du métier : Ne jamais rester arrêté devant un imprévu ! Alors celui-là comme imprévu, il se pose là, barrons-nous dare-dare ! Et il grimpa et sauta au volant d’un immense 75 tonnes et mit le moteur en marche. Allez, go ! Cria-t-il au pitaine resté au sol, on décolle !

-Attends Joss ! attends un chouia, lui cria le pitaine, pour couvrir le bruit du moteur, puis il fit signe de stopper ce dernier, ce que Joss fit...Faut réfléchir, dit-il alors sur un ton normal...on va pas se comporter comme des lopes foireuses, non ? manquerait plus que ça, ben merde alors ! Non...attends un peu...faut s’équiper, voilà...charger ce bahut avec de l’armement varié puis du matos de survie : bouffe, pharmacie, fringues civiles et militaires, de l’eau, carburant, matériel de camping, et en quantité, des fois qu’on rencontre d’autres survivants, car plus on sera, mieux ça sera...et si on veut se refaire, y a aussi intérêt à trouver des gonzesses, c’est pas moi qui vai accoucher !

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-Ouais ! t’as raison, comme toujours du reste, lui rétorqua Joss, surtout qu’il faut pas compter sur moi pour te mettre en cloque, tabarnouche ! s’esclama-t-il hilare. Alors, allons de suite au dépot et y aura qu’a se servir suivant l’inspiration de moment, non ?

Le capitaine fit le tour de l’énorme camion, monta et s’installa sur le siège passager, un pied posé sur le tableau de bord, il alluma une clope, tira une longue boufée qui lui calma un instant les nerfs, et le bras droit sur la portière, il dit à Joss.

-Ok ! cassons-nous de ce cirque...j’ peux plus supporter de les voir comme ça, mes p’tits gars.

-Tu deviens sentimental, sur tes vieux jours ? lui dit le Joss, en riant jaune. -Ta gueule, p’tit con, roule et t’occupe pas de mes sentiments, car je suis prêt à

les gerber, alors... -Excuse-moi, si ça peut te consoler, t’es pas tout seul. -Bon, alors on ferme nos gueules, on fait le plein de carburant et de matos et

on roule à fond la caisse jusqu’à cette putain de base ; par la route on y sera en moins de quatre heures car il faut contourner ce vallon et cette chaîne de collines là devant, lui montra-t-il du geste. Allez, go, démarre !

Trois heures après ils ressortirent du dépot avec un chargement hétéroclite conséquent. Ils prirent la piste et foncèrent vers le centre de recherche secret enterré sous une colline boisée. Vu d’avion, rien ne laissait supposer de telles installations souterraines ; l’entrée était planquée dans un des grands hangards de stockage de fourrage d’une ferme authentique de la surface. La base s’étendait sur des kilomètres de galeries, dont Fred n’avait aucune idée sur la nature de leurs recherches scientifiques. Il savait seulement qu’ils étaient nombreux, des chercheurs, de hauts techniciens et une équipe des Forces noires.

Des dizaines de centres de recherches semblables existaient sur le territoire national et, se doutaient-ils très fort tous les deux, ils en avaient la certitude en fait : c’était ces fumiers de scientifiques de merde, et ce depuis toujours, qui avaient donné les moyens technologiques, les armes toujours plus terribles à ces immondes chefs de cette dictature mondiale, ce N.O.M, le Nouvel Ordre Mondial, comme tous les peuples l’appelaient ; tous ces lobbies bancos-industriels : les banques, pétroliers, industries pharmaceutiques, industries d’armements et leurs pourritures de militaires hauts gradés vendus corps et âmes à leur prise de dictature de la planète.

Tous ces scientifiques, ces salopards d’égoïstes n’avaient jamais résisté à leur vice de se défoncer dans leur recherche de merde, et ce, quels qu’en soient les coûts. La plupart auraient vendus pères et mères pour pouvoir continuer leur job de fanatique de la curiosité scientifique. Leur orgueil démesuré pour paraître dans une revue scientifique ou décrocher un Prix d’honneur international.

Tous ces immondes salauds étaient bien les premiers responsables de cette chaîne de mort qui venait de rayer l’humanité de la carte, car sans leur participation inconditionnelle à ces projets des tarés, ces débiles criminels du

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N.O.M, ces derniers n’auraient jamais pu concrétiser la réalisation de leurs projets criminels.

Et ils allaient leur remuer leur sale cul de plomb, à partir de maintenant, lui, le capitaine Fred Richardson et le lieutenant Joss Firley !

L’homme était devenu une montruosité pour lui-même. Que pouvaient-ils bien faire contre ça ?

Ils n’avaient pas fait cinq cents mètres que Fred fit stopper la camion. Un semblant d’idée venait de germer dans son cerveau...Ça couvait depuis un moment, il sentait ça venir. En fait, depuis le choc de la découverte du massacre, son cerveau pédalait à fond la caisse ; les calculs, stratégies, prévisions se suivaient dans sa caboche à une allure vertigineuse, pire qu’un ordinateur parti en cavale.

C’était sa spécialité à lui, le capitaine Fred Richardson, dès qu’un gros problème se présentait, son cerveau partait en cavale à la recherche de la solution idoine, solution qu’il trouvait presque toujours rapidement...Pour ça il était fortiche, c’était même le meilleur de sa promo.

Et ça pédalait à tout berzingue et, dans ce gigantesque fatra, une lueur de possibilité d’abord tremblotante se stabilisa enfin dans un coin de ce kaleidoscope halluciné. Une boule brumeuse commença à prendre forme, comme une planète en formation, pensa-t-il ; l’image lui plut...Il la fixa sur une bande d’attention, la contraignit à se concrétiser au plus vite et il se concentra dessus, la compressa jusqu’à lui donner une consistance palpable, la cerna de tout son esprit aiguisé à l’extrème, la polie méticuleusement et, il en fut heureux comme un gamin qui reçoit le jouet espéré depuis une éternité, comme dans un fash, il sut brusquement ce qu’ils allaient faire...ce qu’ils devaient faire.

L’ampleur de la tâche qu’il venait de décider l’effraya un court instant, mais sa nature d’homme de combat reprit de suite le dessus et, un objectif ainsi fixé le sortait de ce vide mortel, cette incertitude qui tue mieux qu’une balle. Un projet pareil allait les anéantir rapidement ou les réconcilier avec eux-mêmes...leur panser leur âme blessée, agonisante presque.

Fred Richarson, toujours égal à lui-même, venait de trouver le moyen de redevenir des hommes d’honneurs.

-Joss ! cria-t-il en se redressant subitement sur son siège, on retourne au camp prendre un second véhicule, une voiture officielle de l’armée. Je sais qu’il y a une vers l’infirmerie, elle fera l’affaire ; c’est celle de ce minable plein de vent, le Major Radcliffe...qui cette fois ne fera plus crever les malades en guise de les sauver, ce fils de pute.

En même temps, on piquera les cartes magnétiques de démarrage des zings...au cas où, ok, boy ? Et on va aussi transporter tous ces cadavres dans le tunnel, puis nous ferons sauter l’entrée, parce que s’il nous faut revenir dans le coin, et on va y revenir, ça va être irrespirable d’ici deux jours ; pas question de choper la mort connement, pigé lieutenant ?

-Go ! et pourquoi une bagnole et pas un camoin ? lui demanda un Joss étonné, tout en manoeuvrant l’énorme bahut pour faire demi-tour avec difficulté sur cette route étroite.

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Le capitaine lui résuma succintement son idée. -Ciboire de sacramant ! S’écria un Joss admiratif, en lui lançant un clin d’oeil, tu

peux dire que quand tu gamberges, toi, t’y vas pas avec le dos de la cuillère, mon pote. C’est dément ton idée, et vachement risqué mais...t’as raison en fait : qu’est-ce qu’on a à perdre, hein ? à par la vie, et pour ce quelle vaut maintenant.

Fred, sans rien dire, lui laissait lentement découvrir les données de leur objectif ; il savait qu’il pouvait compter sur son pote ; encore heureux que nous soyons encore ensemble, soupira-t-il. Et ils foncèrent illico et tous joyeux maintenant, à la mise en oeuvre de leur plan d’attaque.

Tout en conduisant, Joss rajouta, en éclatant de rire. -Hostie ! Je voudrais bien voir la gueule qu’ils vont faire, ces fumiers des

cartels ! Fred se cala bien dans son siège et regarda la piste, le regard rêveur, un petit

sourire de contentement sur les lèvres...Ouais, pensa-t-il...on va les baiser à mort, ces ordures.

De retour au campement ils commencèrent pas vider les poches des cadavres pour récupérer le fric, seulement les grosses coupures. Fred, tout en continuant de détrousser un cadavre, expliqua mieux son plan en détails à un Joss qui se demandait étonné ce qu’ils allaient pouvoir bien foutre d’un fric qui ne valait absolument plus rien, se disait-il en passant successivement les mains dans les poches d’un macchabée.

-Voilà mon idée, si tu vois de quoi l’améliorer, te gênes surtout pas pour me couper, ok ?

-Compte sur moi, l’ pitaine ! -Pour entrer dans cette base, va falloir y aller au culot, n’y rentre pas qui veut. -Je m’en doute. -Donc, on ne sait d’abord pas s’ils sont vivants, mais dans l’affirmative, j’ai

pensé que nous allons nous y présenter tous les deux, habillés milords, soit, en tenue réglementaire et nickels de la tête au pieds. Nous prendrons une douche avant de partir.

-Jusqu’ici, ça baigne. -Ensuite, je serai équipé d’un attache-case, j’en ai un dans mon barda qui fera

l’affaire, avec une menotte de sécurité autour du poignet. Nous nous présenterons au bluff, comme une mission officielle, devant remettre un document classé Ultra-secret et Prioritaire, au chef de la mission scientifique, exclusivement. Ça, le coup de l’ultra-secret, ça marche à fond à tous les coups, dit-il en riant ; rien qu’à voir le cachet rouge, le moindre troufion se mêt aussi sec au garde-à-vous, raide comme piquet, dit-il en riant fort.

-Faut dire qu’ils sont tellement abrutis aussi...dit Joss, rêveur, en hochant la tête et jetant un bref regard complice à son pitaine, pour qui il avait une admiration sans borne.

-On a de quoi préparer un ordre de mission qui aura l’air plus vrai qu’un authentique, on a l’habitude de ce genre de couillonnades, et pour une fois nos talents vont nous servir personnellement.

-Ouais, pour une fois, comme tu dis...mais le fric ?

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-Ça te travaille ça, le fric, hein ? -Avoue que pour une fois qu’on a un sac de piastres plein à craquer, ça vaut

plus que dalle, c’est un peu raide, non ? -Ça, je reconnais que... -Et en plus c’est même pas bon pour se torcher le cul, ciboire ! -Ah ! ah ! c’est bien vrai...J’ai idée que des fois qu’ils seraient au courant de

rien, du massacre, j’entends, ce fric peut être utile pour corrompre quelqu’un, acheter un service, etc. , tu piges l’arnaque ?

-Cette question, s’exclaffa Joss, et c’est à moi que tu demandes ça ? Ha ! ha ! elle est bien bonne celle-là.

-Ouais...enfin, voilà en gros mon idée ; pour le reste, et comme de toujours, faudra improviser devant l’ennemi...tu connais aussi, il me semble, Lieutenant Joss Firley, hein ?

-Tu crois, Capitaine ? Oh ! j’en connais un chouia, quoi, dit-il en s’esclaffant. Ils éclatèrent de rire et se donnèrent une vigoureuse poignée de main. -Joss, lui dit soudain le capitaine, en le regardant soudain avec cet air dur, ce

regard de tueur irréductible qui lui foutait toujours un peu la trouille et qu’il connaissait que trop bien pour l’avoir souvent vu à la veille du combat, à la veille de l’action où ils pouvaient à chaque fois y laisser leurs putains de peaux...Joss, mon gars, je compte sur toi jusqu’à la mort cette fois, hein, mon pote ? On va leur crever leurs sales peaux de putains d’enfoirés de pourris qu’ils sont tous, ok Joss ? Dit le pitaine avec violence.

-Ok boy ! je suis ton homme ! Mais, ceux-là, dit-il en montrant les cadavres du geste, avant de les faire sauter dans le tunnel...le mieux serait de filmer tous ces mecs calanchés, les nôtres et ceux du chantier. Il doit bien y avoir pas loin des trois cents macchabées environ, ça fera une preuve de poids pour les mecs de la station, non ? j’ai mon tévéphone sur moi pour ça, qu’est-ce que t’en penses ?

-Super, on les filme sur toute la base, puis on attaque le turbin. Joss, lui broya la main dans la sienne, yeux dans les yeux...sans répondre. Le pacte d’honneur était conclu. -Mais dis donc, dit Joss brusquement songeur, comment comptes-tu les

amener dans le tunnel, ça va pas être de la tarte. Fred hochant la tête regarda autour de lui, tournant lentement sur lui-même... -Les motos des gus ! avec des cordes pour les tirer, s’écria-til, lui montrant le

parc d’une dizaine de grosses cylindrées garées devant la cantine. Ils y coururent et pendant que Fred faisait sauter les antivols de deux grosses

Harley Davidson à coup de revolver, Joss avait récupéré un rouleau de cordage dans le coffre à outil d’un camion garé plus loin, et commençait à couper avec son poignard de commando des longueurs de celui-ci. Une fois filmé tous les gars éparpillés sur la base depuis le haut de la cabine d’un camion, ils attaquèrent ce travail macabre, chacun sur une moto.

Ils tirèrent les maccabhées par les pieds joints pris dans une boucle ; par fournées de cinq à six à la fois, les enfournant jusqu’à trois cents mètres au fond du tunnel, puis revenant pour une prochaine fournée. Puis Joss filma son pitaine tirant une fournée de cadavres, puis Fred fit de même avec son lieutenant.

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Pour finir ils firent enfin sauter l’entrée du tunnel. Ils étaient dès lors en pleine action en vue de la réalisation de leur plan d’attaque des forces militaires de la planète entière. Ils exécutaient ainsi le principe number one des commandos de la mort, et pour cette fois, c’était particulièrement choisi « Ne jamais rester arrêté devant un imprévu ! »

Pas mieux qu’un militaire pour exécuter illico une action clarifiée et décidée. Il serait grand temps, pensons-nous, de dévoiler notre identité au lecteur. Nous sommes en fait une de ces innombrables communautés de survivants de

part le monde, il y en a des centaines, et possiblement plus. Nous sommes des descendants de visiteurs qui, le jour maudit de l’attaque de ce fatidique 1er Mai 2015, étaient occupés à la visite guidée de la grotte de Betharram, de son nom d’alors, dans le sud de la Franki, dans cette ancienne France, grotte située dans le contrefort des montagnes des Pyrénées, grotte bénie qui fut notre providence, et que nous nommons maintenant Bertrand.

On ne s’étendra pas plus sur le calvaire que connurent tous ces malheureux quand ils émergèrent encore émerveillés du spectacle grandiose de la nature qu’ils virent dans cette grotte qu’ils venaient de visiter, spectacles de fééries, quoique chacune ayant sa personnalité propre.

Ils étaient les premiers visiteurs de ce jour férié, une trentaine de personnes de tous âges et de tous milieux, et rien ne les prédisposait à devoir vivre, ou plutôt entamer ensembles une survivance des plus hasardeuse ; pourtant, c’est ce qu’ils réussirent avec succès, puisque nous sommes présents.

Il est bon de savoir que ce groupe se composait de 9 couples ; plus 8 adultes seuls, comprenant 6 hommes dont le guide et 2 femmes ; plus 15 enfants, dont 8 garçons de douze à seize ans, et idem pour les 7 filles de l’ensemble, soit au total : trente et une personnes. Les adultes étaient composé de deux couples de retraités, et les autres dans une tranche d’âge allant de vingt à la quarantaine ; heureusement, beaucoup de jeunes donc, ce qui est d’une importance capitale, vitale dans des conditions de survie.

Nous sommes leurs héritiers spirituels, à qui nous devons d’exister et qui nous léguèrent leurs conseils éclairés et leurs précieuses directives découlant de leur connaissance parfaite de ce qui venait de s’écrouler sous leurs pas.

Ce groupe de rescapés fut en réalité un des plus importants de ce territoire, et c’est pour cela qu’il prit rapidement une importance naturelle d’une vaste région, et influença nettement la nouvelle communauté qui allait en éclore. La majorité des autres furent de petits groupes de personnes isolés au moment de l’attaque ; tels que citadins, chasseurs, braconiers, campeurs, paysans, etc.

Eux, comme beaucoup d’autres groupes, nous l’apprîmes par la suite, reproduisirent d’instinct le même schéma comportemental ; à savoir que les premiers moments de stupeurs passés, ils se groupèrent dans les abris naturels, les grottes en fait, et les hommes allèrent dans les villes pour s’approvisionner en vivres et matériels ; comme quoi, une intelligence primaire et instinctive survie toujours au fond de l’espèce, sinon il y sans doute longtemps que

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l’homme aurait disparu, car s’il subit déjà dans sa longue histoire des cataclysmes dévastateurs. Sauf que cette fois, c’est l’homme qui en fut responsable ; jamais pareille infamie n’avait entaché l’espèce.

Tous les survivants, la grande majorité dans des grottes, ont instinctivement changé le nom de l’endroit où ils demeurent. Ainsi, s’ils sont fait prisonniers, ils ne connaissent pas le vrai nom, et ne peuvent donc pas involontairement dévoiler, même sous le torture, l’emplacement de leur gîte.

Seuls, ainsi que le Conseil des Anciens, et ils en sont bien obligés, les patrouilleurs connaissent les noms réels et les emplacements des grottes de leurs territoires, grâce aux cartes et documents informatiques recueillis dans les villes abandonnées, dont ils se servirent dès le début pour tenter rejoindre les autres survivants. C’est ainsi que la nouvelle Humanité se structura assez vite et décida d’un commun accord des règles de vie à suivre pour reconstruire un futur possible, futur radicalement élagué des poncifs mortifères du passé.

Raconter l’odyssée de notre nouvelle espèce Humaine est une entreprise des plus hasardeuse et risquée, car il eut un isolement initial des groupes de rescapés qui prédomina longtemps. En fait, l’exploration débuta timidement par les plus courageux qui eurent un jour la force de caractère de braver les risques des gardes de ces nouveaux camps d’esclaves que sont ces exploitations agricoles, et qu’ils découvrirent brutalement, certains y laissant leur peau pour l’occasion. Ces héros, qu’ils sont tous, ont payé un lourd et douloureux tribu à la survie de l’Homme libre. Que les éternelles forces du cosmos leurs rendent hommage.

Ils s’aperçurent vite et à leurs dépends des pouvoirs de détection des forces de sécurités des Zanko-Khuigs. Au tout début donc pour se déplacer sur le terrain ils durent capturer des chevaux qui étaient redevenus presque sauvages depuis le temps qu’ils étaient livrés à eux-même. Il faut bien avoir à l’esprit que tous ces gars pour la plupart ne savaient rien des chevaux et ne savaient pas même monter.

On imagine sans peine les difficultés surmontées par ces braves gars ; de l’obligation de faire d’un pharmacien casanier un cow-boy, ou d’un mécanicien, instituteur, facteur, bibliothécaire...Quel courage il leur fallut. Il faut bien comprendre que cette génération, la première, est celle qui souffrit le plus de ce bouleversement radical de leurs Vies, du calvaire que fut le leur...Les générations suivantes naquirent dans le contexte et donc pour elles la difficulté journalière était le standard ; ils ne souffrirent donc pas comme les anciens de ce qu’ils n’avaient pas connu.

En fait, ce sentiment de normalité leur permit de partir à l’assaut de leur nouveau monde, l’esprit totalement libéré de sentiments inhibiteurs tels que le regret, les souvenirs, les remords, etc. Ils pouvaient foncer en avant, libres de toute entrave spirituelle. Ils étaient merveilleusement vierges, des Hommes et Femmes extraordinairement libres et forts !

Ainsi, grâce à leur farouche volonté, ils réussirent à entamer une lente exploration territoriale, et c’est ainsi qu’ils découvrirent les esclaves. Puis, les premiers à s’aventurer un peu loin, ne revinrent jamais. Que fallait-il faire pour échapper à la détection des moyens électronique des militaires ? Car ils en

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avaient déduis que le problème était bien à ce niveau là : leurs satellites de détection.

Les documents informatiques ainsi que la mémoire de tous indiqua qu’il fallait en premier se rendre invisible à l’observation diurne, donc se déplacer de nuit, puis faire de même aux détection par infra-rouges. Là, cela prit du temps et des tatonnements...Puis l’idée fut trouvée, après des essais malheureux qui valurent à quelques uns encore le sacrifice de leur vie. Ainsi, comme il suffisait de se protéger du haut, des satellites, ils inventèrent une sorte de couvercle individuel qui recouvrait entièrement la surface de l’élément, soit, un cheval et/ou un homme. C’était grotesque et inconfortable de marcher ainsi, c’est peu de le dire, mais c’était vital et s’avéra vite efficace.

Sur le cheval était ainsi fixé, à un mètre soixante-dix environ de hauteur, une armature recouverte d’une toile métallisée de couleur argentée mate, toile qui fut par chance trouvée dans l’entrepôt d’un grand magasin d’une ville ; la partie métallisée étant du côté de la souce de chaleur, pour la renvoyer vers la terre, et non vers l’espace. Le dessus fut peint de couleurs de camoufflage.

Un Homme seul portait un taud circulaire fixé par un harnais sur le dos, reposant sur les épaules par deux demi arceaux rembourés, l’ensemble fixé à la taille...Vous imaginez, vu de maintenant, alors que nous avons ces fabuleux perceurs, ce que devait être que de se déplacer accoutré de cet appareil peu commode, mais qui dès lors fut déterminant pour le début du sauvetage des esclaves, car dès que leur existence fut connue, la décision de les sauver par leur capture fut un cri du coeur de tous ; sauvetages décidés immédiatement et d’un commun accord.

La nouvelle Humanité naissait ainsi dans la prise de conscience collective de ce besoin vital pour elle, de l’entraide. Un impératif sacré naquit d’un péril commun à tous : sauver quiconque étant dans la nécessité. Pour la première fois peut-être, les hommes repartaient à la conquête de leur identité avec ce principe sacré et salvateur inscrit d’emblée dans leurs esprits, miracle résultant du péril majeur encouru par tous.

Partant ainsi de ce précieux principe qu’ils acquirent, quiconque rencontrait des survivants, leur relatait la façon dont leur propre groupe survivait ; ils échangeaient leurs recettes, moyens qu’ils avaient inventé ou tel type d’adaptation que chacun avait eut l’idée de faire avec les matériels qu’ils avaient récupérés.

Ce fut de suite un vaste et prolifique échange de tout ce qui pouvait faire avancer leur reconquête. Rapidement les gens se déplacèrent d’un lieu à l’autre...certains même changèrent définitivement de grotte ; tout ceci permit une nouvelle et salutaire mentalité, façon de vivre. Des femmes partirent vivre dans des communautés d’hommes, pour aider à la reproduction de l’espèce...

La liberté s’affirma rapidement comme le bien des plus précieux, enfin, un des plus précieux, car ils n’en gardaient pas moins ce sentiment puissant qui naissait chez eux, celui de l’altruisme pour eux salvateur ; ce fut sans aucun doute un des traits le plus fort qui devint dominant parmi eux tous, d’où qu’ils soient.

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Grâce à l’aide décisive qu’apporta l’informatique, l’apprentissage des matières, techniques et métiers les plus variés fut grandement facilité. Sans cet outil, pense-t-on, ils n’auraient eut guère de chance de s’en sortir si bien. Ils s’aper- çurent tous très vite, en fouillant dans les appartements et les maisons des villes abandonnées, qu’en fait, avec les ordinateurs et surtout l’Internet, ce système de communication planétaire qu’il y avait à l’époque, les multitudes de particuliers avaient stocké chez eux des milliards d’informations de toutes sortes, suivant les goûts de chacun.

Aucune de ces personnes n’aurait put ainsi se douter à l’époque qu’elle travaillaient de ce fait à sauver l’avenir de sa propre espèce. Ces villes mortes étaient en fait de gigantesques biliothèques comme l’humanité n’en avait jamais connue auparavent. Il suffisait d’aller se servir.

Dans les grottes, ils avaient peu à peu installés des dizaines, puis des centaines d’ordinateurs portables. Ces fabuleux ordinateurs donc, sur lesquels travaillaient d’arrache-pied des équipes qui classaient sur des milliers de disc-mémoires de 1.7 GO de stockages, de 5 centimètres de diamètres, capables de garder en mémoire une petite bibliothèque entière. Les technologies d’antan étaient ainsi sauvées et disponibles pour les futurs génies de leurs descendance ; de sorte qu’ils exploitaient au hasard de ces découvertes, les techniques qu’ils avaient besoin au moment.

Ce système de communication planétaire d’alors, l’Internet, avait été une immense révolution dans les mentalités. Datant d’à peine plus de deux décades d’avant l’attaque planétaire, ce média gratuit et accessible à tous avait permis en très peu de temps une prise de conscience des individus qui, grâce à une poignée, et chacun à son niveau, eurent l’idée de dévoiler et porter sur la place publique ce qu’ils savaient des vrais faits des choses ; dénonçant les mensonges des médias officiels, les vols, tromperies, magouilles diverses des politicards ; le détournement des découvertes scientifiques ; les saletés de développements de nouveaux virus ou vaccins contre les populations, puis le début des marquages avec des microchips implantés dans la chair pour espionner les gens ; les assassinats, les tortures ; les disparitions des contestataires, etc. Ce monde heureusement mort n’était qu’une liste sans fin de faits les plus abominables les uns que les autres.

Les hommes d’alors n’achetèrent plus les journaux, ne regardèrent plus les journaux d’informations de la télévision, car ils avaient compris, mais bien trop tard, qu’ils n’étaient que tromperies et mensonges et, de plus en plus contestataires, ils organisèrent des soulèments en masse...qui furent tous stoppés dans le sang. Après étude des faits, et avec le recul, on en vient à en déduire que les Zanko-Khuigs, voyant de ce fait des difficultées majeures à instaurer et maintenir à moindre coup et efficacement leur dictature, décidèrent ce moyen radical de passer outre ces masses peu malléables : en les éliminant.

Le seul, l’unique intérêt de ce résultat macabre fut qu’ils sauvèrent ainsi involontairement la planète d’une mort lente par les pollutions généralisées. Ce qui était le principal, pour nous tous les survivants.

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Les grottes comportant une rivière furent d’office choisies par les rescapés, ils y installèrent rapidement en plus de l’éclairage, des systèmes de canalisations de récupération des eaux usées, ainsi que des fosses septiques en plastiques. Au début, le problème de l’illumination fut le point noir. Enfin, en tatonnant, certains réussirent à s’équiper d’une, puis de plusieurs génératrices ; technologie qui se répandit rapidement, avec les descriptifs des matériels nécessaires et bien sûr les plans de montages ; comme de tout ce qu’ils entreprenaient.

Cette trouvaille fut le début du bond informatique effréné. C’est avec celui-ci qu’ils surent développer rapidement une culture biologique

dans les grottes, installant leurs plantations vers les entrées, captant ainsi le maximum de lumière naturelle puis, ils apprirent à cultiver dehors, au milieu de la végétation sauvage même, plantant leurs végétaux pas petits paquets ou unités disposées irrégulièrement au milieu de l’ensemble sauvage ; ainsi vu de l’espace il était impossible de détecter une agriculture ordonnée ; car toujours ce souci de se cacher des détections supposées fut omniprésent, une dure entrave à leur développement. Le travail s’y faisait péniblement, chacun avec son couvercle antiradiations. Vous parlez d’un pratique.

La pêche en rivière fut très vite pratiquée avec succès car le poisson devint vite abondant et donc facile à capturer avec des barrages et filets. La chasse, fut vite doublée par l’élevage d’animaux domestiques, assurant un approvisionnement plus régulier. Elevage qui fut développé sous le couvert des bois qui se mirent à croitre de partout...la planète renaissant. Il fallait ne pas concentrer les bêtes, ce fut difficile, mais il fallait de la viande, et du lait pour les bébés. Des gardiens restaient donc en permanence pour garder les troupeaux éparpillés sur des distances assez grandes ; ils se planquaient dans l’orée d’un bois, sous un grand taud identique au leurs, sous lequel ils pouvaient s’y cacher à deux.

Puis, apparurent des fauves beaucoup plus dangereux que les chiens sauvages et les loups: les ours et les taureaux. Ils durent monter leurs campements sur pilotis, les isolant aussi des charges de hordes de sangliers qui proliférèrent vite.

La Vie ne fut pas simple, ça non, il n’était plus question de sortir sans être sérieusement armé, il fallait abattre les chiens sauvages dangereux car devenus de vrais fauves. Les bébés et les enfants en bas âges surtout, qui avaient un besoin vital de prendre le soleil indispensable à leur développement ; nous les installons quelques heures par jour, du moins aux beaux jours, sous ces tauds, en bordure d’un bois devant l’entrée de la grotte ; une dizaine de personne fortement armées les encadrent, au cas d’une attaque de chiens ou autres.

La Vie n’est pas facile, mais cela vaut la peine de lutter d’arrache-pied pour elle. Le taux de mortalité fut un temps relativement élevé puis baissa franchement

au bout d’une génération. Nous pensons que les premiers survivants étant les éléments directement issus de la société disparue, étaient ainsi porteurs de la dégénérescence typique de celle-ci, où les individus étaient soumis depuis des générations à une alimentation totalement empoisonnée par les agrotoxiques qui, de juste, avaient aussi empoisonné la terre elle-même, ce en plus des végétaux génétiquement modifiés et dont porteurs de mort. L’empoisonnement par les vaccins avaient aussi grandement fait dégénérer leurs organismes.

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Pour bien comprendre ce monde disparu, comprendre cette folie, une de plus dirons-nous, il faut savoir que des grandes compagnies, pour encore plus et toujours enrichir une poignée d’entre eux, avaient depuis longtemps développé des céréales génétiquement trafiquées, dont personne ne savait si cela ne représentait pas un danger pour l’espèce humaine...Les politicards d’alors, comme dit précédemment, étant vendus corps et âmes, si seulement ils en avaient une, vendus à l’argent mafieux des banques internationales.

Les peuples des nations les plus riches étaient les plus atteints car c’est eux qui avec leurs plus gros pouvoirs d’achats représentaient donc la meilleure cible de ces fabricants et vendeurs de mort lente. En fait, et s’en est risible, ces populations riches furent les cibles privilégiées pour leur exterminateurs, qui leur passait la pommade pour mieux les endormir, les tromper et s’enrichir toujours plus sur leur dos.

Le procédé était pernicieux, démoniaque même, suivant une expression usée alors car, et c’est immonde, ces conglomérats, ou ces cartels comme ils se nommaient fièrement alors, et dont le principe était pourtant interdit...le principe seulement, car dans la réalité ils faisaient ce qu’ils voulaient des lois puisque c’était eux qui détenaient la richesse, richesse qui achète tout, surtout et y compris les politicards, d’où le cercle vicieux fatal aux hommes communs.

Ainsi, ils empoisonnèrent lentement les gens, comme déjà dit, de façon à leur vendre des remèdes supposés les soigner, remèdes qu’ils fabriquaient aussi, vous l’aviez deviné. Alors qu’en fait, ces potions plus dignes du charlatanisme de bas étage, étaient judicieusement étudiées pour les faire crever à petit feu, lentement, pour qu’ils consomment le maximum de leurs médicaments. Les écoles de médecine, étant sous leurs coupes, les élèves médecin, pharmaciens et infirmiers n’apprenaient que ce dont les cartels voulaient qu’ils sachent, et pas plus, évidemment. Les malades étaient ainsi entre de bonnes mains, pour la plupart, on peut imaginer comme...

En Franki ils avaient fait fermer les déjà rares écoles d’herboristerie, c’est dire. Ils avaient créé pour répandre leur lèpre, une organisation internationale qui

édictait leurs lois concernant la santé publique sur la planète entière. Pour vous dire quel manque de scrupules ils faisaient montre : ils avaient instauré un précepte...une idée, un fondement en fait, selon lequel la santé et la maladie dépendaient du même mode de traitement, étaient le même sujet.

Le premier venu d’entre vous aujourd’hui perçoit de suite la contradiction flagrante de tels propos, on y voit une volonté de manipulation délibérée...et bien, pas eux. La santé est pourtant unique en elle-même. Dire le contraire relève de la confusion mentale la plus évidente. C’est le bien le plus précieux pour l’Humain qui lutte du mieux qu’il peut quant apparaît, et seulement à ce moment-là, la maladie, qui est alors un simple incident de parcours de la Vie.

L’énergie de chacun est tournée vers une préservation de sa santé, soit par des règles de Vie bénéfiques : alimentation choisie et judicieusement sélectionnée, le repos bienfaiteur et surtout bien mérité, la joie de vivre, le plaisir de participer à une oeuvre grandiose, comme notre propre réalisation, la joie qu’apporte l’amour charnel ou passionné, etc.

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Vivre une Vie pleine et harmonieuse est bien le garant d’une santé accomplie, et la maladie est alors ni plus ni moins que la mouche tombée accidentellement dans le bol de soupe, auquel cas on jette la soupe et on se ressert, c’est tout.

Nous tous, pourtant troglodytes, le savons, mais pas ces pauvres peuples imbéciles et méprisés par leurs chefs...Ils étaient pourtant si fiers de leur état que s’en est à pleurer.

Parlant de santé, et pour bien cerner les problèmes de cette époque maudite, il faut relater ce qu’il advint de ce continent, la Frika, celui des hommes noirs disparus aussi...de ceux ayant la peau noire ; oui, il y en eut ainsi, comme des jaunes et des rouges aussi, ce pour la plus grande surprise de nos jeunes enfants apprenant la chose, et il y a de quoi. Depuis des générations déjà, en fait, depuis la découvert et la conquête par les Euromortes et l’esclavage qu’ils firent de ces peuples à moitié sauvages, ils les reléguèrent à la plus noire des misères, leur volant les richesses naturelles de leurs territoires et, non contents de ça, bien plus tard, ils leurs refilèrent des maladies mortelles pour les éliminer en masse.

Ce en plus des guerres civiles organisées par les euromortes pour les éliminer encore plus vite ; comme ils firent dans un passé plus reculé des peuples originaires du continent de la Merdika en général, soit du nord au sud. Ainsi, il était connu de tous les peuples, malgré le travail systématique de désinformation des médias des pays du nord, les plus riches, qu’à la veille de l’attaque générale contre l’humanité, la Frika était déjà dépeuplée de moitié, comparativement aux décades de fin du dernier millénaire.

Tout ces faits allant empirant de part le monde, aurait dû réveiller les esprits des peuples, pense-t-on, vu de maintenant...Mais c’est mal connaître alors le degré de déliquescence auquel ces peuples étaient arrivés. C’est tellement abject que nous avons choisi de ne pas en parler en détail à nos jeunes enfants, et de laisser accessible ces informations seulement à ceux qui plus tard auront le goût de savoir le vrai pourquoi et le vrai comment ces gens ont dégringolé aussi bas dans la négation. Aucune autre espèce vivante sur cette planète n’a montré un tel degré de renoncement à sa propre survie. Aucune. Ce comportement est un affront à la raison la plus élémentaire.

Vous nous excuserez, nous l’espérons tout au moins, de ce long trait concernant ces ignobles faits du passé, mais principalement leurs auteurs, heureusement disparus avec lui, sinon, s’ils sont actuellement de ces exploiteurs des Humains de maintenant, ils ne perdent rien pour attendre...leur dernière heure est presqu’ arrivée ; heure qui leur sera sanglante et horrible.

Plus de deux ans maintenant que Marion étudiait avec un groupe de

survivants. Ils travaillaient comme des forcenés depuis ce temps pour décrocher ce titre suprème, mais surtout, ils allaient très bientôt passer à l’action pour de vrai, soit aller sauver des esclaves, comme elle-même le fut.

Elle était devenue une Femme épanouie depuis cette arrivée nocturne en catimini dans la grotte Bertrand. La maternité lui avait donné ce plus qui

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transforme la Femme en un être d’une majesté, plénitude parfaite, donnant au corps ce volume et rondeurs irréelles qui font la Femme accomplie.

Une démarche et posture dynamique la montrait telle qu’elle était : une Femme d’action résolue, sûre d’elle, de ses qualités physiques et de son charme qu’elle savait super efficace sur tous ses nombreux amants d’un jour ou d’une nuit. Elle avait depuis découvert l’amour avec une fringale surprenante.

C’était comme on s’en doute, le beau Eric qui, suivant sa promesse, la déflora en douceur. Passé le petit moment délicat, elle devint rapidement une des plus courues de la station. Si bien qu’à cette veille du diplôme tant attendu, elle est déjà la mère de deux adorables et vigoureux bambins. Un premier, Clovis, un beau et vigoureux garçon aux yeux bleus et tignasse noire, puis une fille, Athéna, les deux faisant la joie de leurs mère et de leurs éducateurs.

Comme la plupart des cas dans les stations, on ignore avec certitude quels sont les vrais père, à part une ressemblance parfois révélatrice d’un enfant d’avec son géniteur. Mais cela ne pose pas de problème, ces nouvelles générations ont facilement évacué les préjugés stupides des anciens, et vivent ainsi pleinement leur Vie d’adultes entièrement libres. L’amour est ainsi devenu une des bases de la solidité de la communauté, puisque en commun accord chacun peut posséder un corps et une âme le temps d’une nuit...de plusieurs même, sans arrière pensée de possession ou exclusion néfaste à l’équilibre de chacun.

La virginité ne dure guère dans une telle ambiance ; les filles sont des plus choyées et respectées, comme jamais elles ne le furent de tous temps, où durant les derniers millénaires elles héritèrent de la haine de religieux hypocrites et en définitives plus enclain à une homosexualité honteuse, amenant inévitablement les sujets à une pédophilie criminelle, mais qu’ils cachaient par une corruption endémique.

À seize ans elles sont bonnes pour la procréation, mais avant cet âge, comme pour les garçons, on les initie à une hygiène corporelle stricte ainsi qu’à l’usage des préservatifs que l’on trouva en quantité considérables dans les villes. L’enfantement est un bien du ciel et de plus une nécessité vitale pour tous. L’enfant évoluant dans une telle ambiance sécurisante est assuré d’un développement optimal, d’autant que dans ces stations il n’y règne guère, comme de par le passé, de ce sentimentalisme faiblard qui annihile toute volonté de l’individu et en fait une mauviette fragile et capricieuse, non.

Les enfants de cette nouvelle Humanité sont très tôt responsables et conscients de leurs valeurs et de leurs devoirs envers leurs frères et soeurs. Ils sont alors d’un dynamisme étonnant et sont porteurs d’une foi en eux-même et de leur futur, qui pourrait surprendre un observateur qui brusquement les découvre, à se demander s’ils font vraiment parti de la même espèce que ceux du monde disparu, tant leur allant et leur joie de vivre est en totale opposition d’avec les comportements débilitants, fragiles et capricieux des adolescents d’antan, qui passaient leur temps dans un espèce de négativisme et renoncement à la vie proprement sidérant ; ils étaient depuis longtemps déjà des rebus mais ils ne le savaient pas...suivant le schéma béotien du consommateur pavlovien bavant de béatitude sur son propre état...illusoire et partant suicidaire.

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Les documents montrèrent clairement que depuis toujours ce furent les puissants qui détenaient le savoir. Savoir lire et écrire, les peuples étant tenus dans une ignorance crasse, ceci durant de longs siècles. L’écriture vint un jour à la portée de tous, de force, et ce fut tout récemment, et la langue, le franki, fut volontairement compliqué, atrocement compliqué même, pour retarder au maximum l’alphabétisation de la masse. A tel point qu’elle fut longtemps la langue des diplomates, qui était des personnes qui passaient leurs temps à chercher des accords de dupes avec leurs voisins, c’est-à-dire que c’était les pires menteurs et voleurs qu’il soit ; une dangereuse engeance. Du reste, un des plus célèbres ne fut-il pas un de ces princes de cette secte responsable de ces faits ?!

Ainsi, ce qui ressortit rapidement de cette étude et ces constatations réelles, c’est qu’il fallait refondre la langue, point final. Les nouveaux Humains ayant autre chose de plus urgent à faire que de passer des années à apprendre à lire et écrire suffisamment correctement, sans se casser la tête à devoir apprendre des règles atroces et débiles. Une guerre à mort était engagée contre ces Zanko-Khuigs. C’était l’unique urgence de valable et acceptable.

Le choix fut vite fait de simplifier la langue en excluant l’usage des lettres Q,Y et W. De plus, ils avaient exclu l’usage des doubles consonnes. Le son F était uniquement avec cette lettre. Puis toutes les lettres muettes de final des mots furent abolies ; certains sons furent simplifés, car pourquoi écrire par exemple, demain si on le comprend aussi bien avec demin ; ainsi, on écrit : mintenan ; drapeau-drapo ; brachycéphale-brakicefale ; guinguette-gingete ; pharmacie-farmasi ; carrosse-karose ; psychologue-psikologe ; tuyau-tuio ; photo-foto, etc.

Le principe moteur : apprendre vite, donc élaguer au maximum ! Donc, toutes les règles jetées dans la poubelle du temps ! Il n’y avait plus à y revenir, un point c’est tout. Ça c’était l’esprit guerrier constructif : direct au but !

Les nouvelles générations allaient ainsi gagner un temps des plus précieux. L’impératif était un apprentissage express, seul et unique valeur d’urgence.

Dans la foulée, ils exclurent aussi les maudits accents et les exceptions débilitantes ; par contre, ils conservèrent le K qui remplaça allègrement et logiquement le QU. Les conjugaisons furent élaguées, rafraîchies et pour de bon accessibles à tous et de suite, plus de règles vicieuses et débiles ; ainsi, des verbes être et avoir par exemple, cela devint ceci :

Etre : je sui, tu e, il ou ele e, nou some, vou ete, ils ou eles son. Avoir : j ai, tu a, il ou ele a, nou avon, vou ave, ils ou eles on. Ils partirent du principe intelligent que le sens de la phrase, son contexte,

détermine automatiquement le sens réel du mot, et donc du verbe. On ne peut donc pas se méprendre sur sa signification réelle. Un exemple simple : le mot vin, qu’il s’agisse de la boisson ou le verbe, il vin ; la méprise est impossible si l’on dit par exemple «Il vin en couran pour boire un vere de vin ». On sait de quoi il est question, inutile donc de compliquer la conjugaison, qui de fait n’existe plus.

De même, le féminin des mots a disparu, les noms communs sont devenus invariables. Exemple : un ou une chanteur / un ou une Franki, habitant la province Franki, etc. Simple, direct, efficace. En enlevant toutes les règles et

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exceptions ; en simplifiant, on parvient à une efficacité, rapidité d’apprentissage stupéfiante, d’où un résultat rapide : unique but recherché.

Le franki devint ainsi en un seul jour la langue la plus facile et la plus rapide à apprendre ; on écrivait pour ainsi dire comme on parlait. Que vouliez-vous de plus efficace pour ce peuple pressé de ressusciter ?

Pour vous prouver que tout ce micmac passé de ces difficultés de l’ orthographe d’antan n’était que merde en bâton, voici un petit texte génial retrouvé sur l’Internet d’alors, prouvant avec pertinence que toutes ces règles n’étaient pas indispensables, c’est un euphémisme, le voici.

L’ordre des lettres... « Sleon une édtue de l’Uvinertsé de Cmabrigde, l’odrre des ltteers dnas

un mot n’a pas d’ipmrotncae, la suele coshe ipmrotnate est que la pmeirère et la drenèire soeint à la bnnoe pclae. Le rsete peut êrte dnas un dsérorde ttoal et vuos puoevz tujoruos lrie snas porlbème. C’est prace que le creaveu hmauin ne lit pas chuaqe ltetre alle-mmêe, mias le mot cmome un tuot. La peruve. » Proprement sidérant, non ?

Nous conservons volontairement le vieux langage pour que cet ouvrage soit compréhensible au lecteur courant, toutefois, partant du principe que la théorie ne remplacera jamais l’expérience, et pour vous faire une petite idée de ce que donne un texte du nouveau monde, en voici ci-après un court exemple, pour cela, nous répétons ce paragraphe, ce qui vous permettra de faire la différence.

« Nou conservon volonteremen le vieu langage pour ke cet ouvrage didaktike soi conpreensible o lekteur couran, toutefoi, partan du principe ke la teori ne renplacera jamai l experience, e pour vou fere une petite ide de ce ke done un texte du nouvo monde, en voici ci apre un cour exenple, pour cela, nou repeton ce paragrafe, ce ki vou permetra de fere la diference ».

On imagine la tête que doivent faire des exégètes en lisant cela. Vous seriez pourtant surpris d’avec quelle facilité on se surprend à s’y habituer, vraiment. Si l’on admet modestement (impossible pour beaucoup) que ce qu’on prend pour former sa personnalité propre, son propre savoir n’est en somme, pour une énorme majorité, en fait près de quatre-vingt-dix-huit pour cent des populations, que l’apport reçu des autres. On réalise alors que l’on est soi-même qu’une outre pleine de vents divers et parfois admirablement odorants, faisant écho dans une tête ouverte aux quatre vents, justement, et deux hémisphères et, où c’est le dernier qui a parlé le plus fort qui a raison. Le reste n’est le plus souvent que fatuité dégoulinante et poisseuse, et même parfois pestilentielle.

Restons humbles et faisons simples. Ainsi, depuis l’origine de la recherche commune par les groupes de rescapés,

au fil du temps, la réunion de tous en une sorte de fédération des provinces...une amicale, plutôt, le terme est plus exact ; d’un commun accord il fut donc approuvé que le Franki serait, d’une part, de par la situation géographique centrale du territoire puis, de part le nombre le plus important, et de loin, de rescapés qu’il représente, et enfin, de part la grande simplicité de ce nouveau langage : la langue interrégionale de tous...Tous les échanges se firent dès lors dans cet idiome, renouant avec un lointain passé où il fut le langage des

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diplomates ; mot qui est depuis banni des usages, car trop lourdement chargé de connotations péjoratives.

Nous n’oublierons jamais plus que la dite diplomatie est typiquement l’arme des faibles et des lâches : exclusivement ; car la nation, ou quiconque est obligé d’en user montre visiblement ses faiblesses et sa forte propension à être finalement dominé. Tout prédateur ne s’y trompe jamais et ne résistera pas longtemps à exercer sa prérogative de droit. Pour se continuer dans l’hamonie et l’équilibre universel, la nature réclame le sacrifice du faible ; que cela soit dans la meute de loups ou tous autres animaux, le faible affiche ouvertement sa soumission par une gestuelle comportementale typique de ressemblance à la diplomatie.

S’il veut survivre, il ne doit pas laisser la moindre doute au puissant sur sa soumission...suppliant le fort de lui laisser la vie contre sa soumission totale et inconditionnelle. Celui qui se soumet à cette posture infâme devient une larve.

Par contre, la langue honnie par tous, celle des Zanko-Khuigs, fut bannie, oubliée à jamais et volontairement par tous les Humains libres de ces territoires. Ce fut un mouvement intense de rejet instinctif de tout ce qui touche de près ou de loin à ces monstres...mis à part les chercheurs sur informatique qui sont obligés de le comprendre et donc le lire, le reste des communautés se firent un honneur de l’avoir totalement exclu de leurs pensées.

Peu à peu, et qu’importait pour eux le gigantisme de la tâche, tout fut traduit en franki...Il en était ainsi des chances de leur devenir ; ils avaient senti d’instinct, ou compris, que ce que l’on ne nomme pas, n’existe pas ; et ce que l’on ne nomme plus, retourne au néant, d’où il n’aurait jamais dû sortir, de l’avis unanime. Ils appliquaient ainsi la propre forme de censure que les Zanko-Khuigs avaient de tous temps imposé contre leurs rares opposants qu’ils voulaient exclure du jeu démocratique, principalement lors des élections politiques, pour que les peuples les oublient. Un parti dont on ne parlait pas n’existait plus !

Un jour, il en sera idem pour eux. Dès le dernier d’entre eux massacré, tué, vidé de son sang pourri et brûlé jusqu’à ce qu’il n’en reste plus le moindre atome pour témoigner qu’ils auraient un jour pu seulement exister...larves immondes et puantes, retournant dans un néant d’éternité.

Depuis peu de temps même, et pour simplifier les rencontres toujours difficiles, vues les contraintes de sécurités, il fut décidé par tous que les réunions des Grands Conseils des Sages de toutes les communautés auraient lieu à la station Bertrand, celle-ci offrant de l’espace ainsi qu’un développement technologique approprié.

Marion descendit en nage du tapis d’entrainement des sports de combat, le

prof lui fit un coup d’oeil amical et lui dit visiblement ravi et fier de son élève. -Crois-moi, ma poulette, je ne voudrais pas être à la place du mec que t’auras

décidé de buter...T’es devenue une vraie furie, Marion, ma soeur adorée...mais alors, quelle pêche que t’as, chapeau !

-C’est grâce à toi, Gilles, à ta patience et ta gentillesse aussi ; au début, et tu le sais, je croyais ne pas pouvoir y arriver.

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-Je suis là pour ça...c’est mon turbin, et je le fais du mieux que je peux...comme tous ici, c’est ça qu’est fabuleux, tout le monde se donne à fond.

-C’est ce qu’il faut pour baiser ces salopards de Zanko-Khuigs, comme dit le grand Vladi. Au fait, réfléchit-elle, ils ne sont pas encore rentrés, avec Pédro ?

Le prof, sachant la grande affection qui la liait avec cette équipe de patrouilleurs, tenta de ne pas montrer sa préoccupation les concernants : ils avaient bientôt deux jours de retard.

-Non, pas de nouvelles, mais ils vont pas tarder maintenant, mentit-il, t’inquiète pas ma belle, ils vont bientôt être ici tes deux chéris, dit-il en riant .

-T’es bête, Gilles...c’est pas ça, mais...je peux pas m’empêcher d’avoir peur pour eux deux, tu comprends...c’est eux qui m’ont sauvé, comme tu sais, alors...

-Allez, va prendre une douche et te casse pas la tête, ils vont vite rentrer va, tout va s’arranger.

-T’as raison...je suis ridicule, hein ? -Non, Marion, ma chérie...on est jamais ridicule quand on tremble pour ceux

qu’on aime, pas vrai ? -Si....c’est bien vrai, allez, tchao, j’y vais, à demain Gilles...et je te promets que

je vais te casser ta baraque, s’esclaffa-t-elle, promis. -Oh ! te force surtout pas, d’accord ? répond-il en riant. Elle se dirigea vers une section de douches communes, rassurée par le calme

de Gilles. Elle l’aimait beaucoup, de part sa compétence et gentillesse. Ils avaient passé quelques nuit ensembles, normal, et elle savait ce qui le tourmentait ; elle savait qu’il souffrait d’être là, coincé à la base, et ne plus pouvoir partir en chasse. Pour tous les élèves il était un exemple vivant du sérieux de la situation et du devoir d’acquérir une formation des sports de combat du meilleur niveau ; comme des exercises de tirs sur cibles mouvantes ; les piègeages naturels ; les explosifs ; pilotage des perceurs, car même le psycho de l’équipe devait savoir piloter pour le ramener à la base si le pilote en était incapable...

Gilles avait été patrouilleur lui aussi ; puis un jour, avec son équipier ils se sont fait surprendre par ces maudits gardes. Il ne sait toujours pas pourquoi ni comment il en fut ainsi ; toujours est-il que dans le combat à mort contre ces redoutables machines à tuer que sont ces monstres semi-humains, il avait perdu sa psycho...sa douce Rosa, qui au moment de décrocher fut gravement blessée et ne put rejoindre leur perceur à temps, lui ne pouvant plus la secourir, étant serré de trop près par ces gardes maudits. Il la vit de loin, au moment de décoller comme un automate, suivant les ordres stricts et raisonnables en pareille situation extrème, de décoller quoiqu’il arrive, et il la vit, alors que leurs deux poursuivants allaient la rejoindre, se tirer une balle dans la tête, en regardant dans sa direction...

Elle lui souriait avant de mourir, comme pour lui dire, « Vas-y Gilles, je risque plus rien maintenant, sauve-toi ! » Il avait alors succombé à une démence qui lui ravagea le cerveau, fou de douleur, comme dans un cauchemard, il vit les gardes qui allaient violenter son cadavre. Alors, il ouvrit le feu sur ces monstres et les désintégra avec le canon laser...détruisant ces corps honnis avec une sauvagerie

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et violence inouïe...puis, réalisant que s’il laissait ainsi le corps de son amour, les autres allaient aussi le profaner, alors, froidement, il le désintégra pareillement.

Quand il quitta ces lieux maudits, il eut une envie démente d’aller anéantir le local des gardes au campement...mais il savait qu’il ne pouvait le faire, car comment ces esclaves-zombis restant prisonniers allaient-ils survivre, sans plus personne pour les alimenter. Il partit donc, la mort dans l’âme, se dépéchant de rejoindre la base, sa propre blessure à la jambe le mettant en danger.

Comme lors de cet accrochage il avait perdu en grande partie la mobilité de la jambe gauche, par une blessure par balle, lui aussi, il ne put désormais continuer de participer aux opérations de sauvetages des esclaves. La perte de son amour, augmenté de son infirmité partielle était devenu son calvaire journalier ; il s’était alors impliqué à fond dans l’entrainement des élèves...C’était devenu son unique raison de vivre : former ses élèves le mieux qu’il pouvait.

Gilles était alors devenu un professeur particulièrement intransigeant, mais le plus compétent de la station.

Ils étaient une fois de plus en planque, derrière un muret d’une vieille

construction en ruine cette fois-ci ; l’herbe était maigre, parsemée de buissons divers. Ils venaient à peine de s’installer pour encore tenter de repérer une cible possible. La température en ce mois de février oscillait vers les -4ºC. Malgré leurs combinaisons à chauffage intégré, rester ainsi allongé dans l’herbe blanche de gelée n’était pas une partie de plaisir, ça non ; mais que n’auraient-ils pas fait pour tenter d’en sauver un de plus.

Dix-huit esclaves s’épuisaient à sarcler, ils ne savaient quoi et de toute façon ils n’en avaient rien à cirer. Onze gars, trois femmes et quatre adolescents complétaient ce troupeau amorphe, comme d’habitude...Vlad, une fois bien calé le scruteur dans le creux de sa main gauche, commença la recherche en passant le faisceau de détection sur ces esclaves situés à quelques deux cents mètres de lui et, ô stupeur ! son écran lui montra les flashs rouges sur chaque élément.

Ils étaient tous positifs ! Impossible, se dit-il, ce tromblon déconne à tout va, pas possible autrement ;

alors que les esclaves présentaient le comportement classique des esprits léssivés...à les voir, ils paraissaient vraiment des zombis. La première surprise passée, il tapa plusieurs fois sur le scruteur psycho en maugréant entre ses dents.

-Cet engin est foutu ou déréglé, Pédro, lui dit-il, il me détecte tous les esclaves comme des positifs, c’est dingue, non ? alors que tu les vois comme moi, ils sont bien tous amorphes ces pauvres gars, non ?

Pédro toucha le coude de Vlad et lui dit, en rigolant. -Ce doit être ce froid qui a déglingué ton tromblon...ce peut être que ça à mon

avis, attends que le soleil monte un peu...Au fait, t’aurais pas du feu par hasard, pour nous réchauffer ? parce qu’on se les gèle pour de bon dans ce patelin de merde...j’ai les doigts complètement frigorifiés.

-Tu voudrais quand même pas que je t’allume un feu de bois, des fois, non ? lui répondit Vlad en riant sous cape.

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Ils se figèrent alors, glacés de peur cette fois, quand une forte voix mâle s’éleva derrière eux.

-Je crois pas que ce soit pas bien le moment de se réchauffer les noix avec un feu, pas vrai les gars ?

Vladi, un instant bloqué par la surprise, se bascula lentement sur le côté droit et vit un garde qui les observait à un mètre en arrière de leurs talons et, il leur souriait de toutes ses dents, et contrairement a leur habitude, il avait les mains libres, son bâton paralyseur accroché à le ceinture. Le gars devait mesurer dans les 1.78 mètres et bien peser dans les 90 kg ; rablais et costaud, pensa Vlad, en le détaillant lentement de haut en bas, tout en déplaçant lentement sa main vers son holster sous sa tenue de brousse...

-Tsss, tsss, tsss, pas touche à ton joujou l’ami, à moins que tu tiennes absolument à faire rappliquer mes chers collègues, hein ? dit le garde en souriant toujours.

-Alors, explique nous, cher ami si imprévu, à quoi jouons-nous ? lui dit Pédro, appuyé sur son coude gauche, en lui souriant lui aussi.

-Simple, je tiens à me tirer d’ici, alors j’ai pensé que je pourrais faire du stop avec vous.

-Monsieur est plein d’humour, je vois, mais moi c’est pas tellement mon genre, lui rétorqua Vlad, nerveux.

-Reste calme, mon gars, je vais t’expliquer le topo, ok ? Vous allez tout piger, mais faudra vous magner le train car on a exactement, il regarda sa montre bracelet...environ trois heures trente pour se tirer tous ensemble sans pépin, après ça va être duraille les mectons, sinon impossible.

-Et si tu nous expliquais de quoi il s’agit ; on gagnerait du temps, dit Pédro, impatient.

-Ok ! Voici l’ topo. Vous avez remarqué que je ne vous ai pas attaqué de suite comme ces tarés le font d’habitude, dit-il en montrant la direction du campement avec son pouce, derrière son épaule. Pour la bonne raison que contrairement aux apparences, et croyez-le si vous voulez, il se trouve que j’ai un esprit réfractaire aux saloperies dont les Zanko-Khuigs font régulièrement bombarder les gardes et les esclaves. Pourquoi suis-je ainsi ? je suis pas foutu de vous répondre...peut-être que des cerveaux sont réfractaires à ces ondes, et...

-On s’en fout, dit un Vlad nerveux, et après ? -Ok ! je suis donc entièrement indépendant d’esprit...j’ai mon juge arbitre

intégral, ce qui m’a permis de piger ce qui est arrivé à tous les humains. Le carnage général qu’ils déclenchèrent, etc., et depuis, j’ai une haine mortelle pour ces ordures ; alors, tout en faisant semblant d’être comme les autres félés, j’ai décidé de sauver le maximum d’esclaves possible...ceux-là en bas, devant vous, il leur désigna les travailleurs dans le champ.

-Stop, dit Vladi fermement, et comment ne peuvent-ils pas être avec l’esprit lessivé comme tous les autres, ils ont l’air complètement abrutis.

-Facile, ce que vous ne savez pas, c’est que pour les rendre ainsi soumis, ils reçoivent régulièrement des ondes de blocage psychique, par infrasons et autres. Cette saloperie est encore plus puissante pour eux que celle des gardes et, ces

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émissions sont commandées manuellement par un garde désigné pour cela. Les baraques sont équipées d’émetteurs fixés aux plafonds et sont espacés de huit mètres, chacun arrosant un secteur précis...J’ai alors débranché celui qui me fut le plus facile, celui correspondant à ces gars-là...qui donc font semblant d’être des zombis, mais qui en fait ne le sont pas du tout.

-Mais, dit Pécro, comment as-tu fait pour les prévenir de... -Si tu me coupes sans arrêt. Donc, dès le début je leur ai expliqué la situation,

leur possible mais hypothétique sauvetage un jour prochain, à condition qu’ils continuent à jouer le jeu. Dès qu’ils réalisèrent dans quelle condition étaient les autres, ils furent tous d’accord, comme on pouvait évidemment s’en douter. Puis je me suis démerdé pour être le chef de leur équipe de gardiens ; les deux en fait que j’ai envoyé au campement sous un prétexte bidon, dès que je vous ai repéré.

-Et qui nous prouve vraiment que ces gars soient libres d’esprit, comme tu dis ? Lui demanda Vlad.

-Facile, désignez en un au hasard et je le fais venir, vous verrez bien. -Ok ! Vlad observa les travailleurs et choisit un adolescent d’une quinzaine

d’année ; celui-ci, il le montra au garde. Ce dernier alla chercher le jeune garçon, et arrivé près deux, il lui dit de ne pas

avoir peur, qu’ils allaient avancer d’un mètre encore, et qu’il découvrirait des visiteurs qui pourraient les sauver...et il avança avec le garçon, qui les découvrit alors, effaré de leur brusque apparition, allongés dans l’herbe. Il restait là, tremblant de tout son être, visiblement appeuré, il cramponnait fermement la manche du gardien comme quelqu’un qui va se noyer doit cramponner une bouée. Le gamin regardait le garde d’un regard incrédule, ce dernier lui sourit, ce qui le rassura.

Pédro sourit à ce garçon si hâve, que c’était pitié. -Je m’appelle Pédro, mon garçon, et mon collègue là, il montra Vlad du regard,

s’appelle Vladimir, c’est le roi des chasseurs, ajouta-t-il en souriant, et toi, comment t’appelles-tu ?

-Gérard, monsieur, répondit-il d’une petite voix hésitante. -Gérard, fais-moi plaisir veux-tu, oublie le monsieur, je suis Pédro, c’est tout,

d’accord fiston ? -Oui mons...oui, Pédro, vous allez nous sauver ? -Oui, nous allons étudier comment nous pourrons faire, mais avant, Gérard,

sois gentil et dis-moi comment cela ce fait que tu ne sois pas, ainsi que tes compagnons, il hésita sur le terme...endormi comme les autres esclaves.

Le garçon, après un moment de légitime effarement, leur expliqua ce qui c’était passé et, ça faisait sept mois qu’ils jouaient ce jeu atroce. Ils étaient désespérés ; il les supplia de les sauver rapidement car ils ne tiendraient pas le coup encore longtemps à ce rythme...et ils avaient tous une peur bleue qu’ils soient transférés, ou que Georgios, il leur désigna le garde, soit muté ailleurs.

-Bien, merci mon garçon, lui répondit Pédro, nous allons étudier comment nous pouvons faire pour vous sauver tous à la fois...c’est pas simple tu sais, mais je te promets que nous ferons le maximum.

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-Oh, merci mons...Pédro...mais faut faire vite, hein Georgios ? en regardant le garde avec amitié.

-Bien, Gérard, lui dit ce dernier, en le prenant doucement par l’épaule, retourne vite avec les autres maintenant, mais ne leur dit rien tant que c’est pas vraiment réglé, tu comprends mon petit, inutile de risquer leur donner d’encore possibles faux espoirs.

Le garçon rejoignit en tremblant son poste de travail et reprit sa posture de zombi...

-Quel malheur...mais au fait, dit Pédro réalisant, comment as-tu fait pour nous situer ?

-Avec un peu de chance, j’ai aperçu la buée de vos respirations, surtout quand vous parliez. Faudra surveiller ça les potes, ça risque vous attirer de sales ennuis ; vous avez eu du pot que ce soit moi...

-Comment pouvais-tu savoir que nous viendrions ? -J’en savais rien, vous ou d’autres, mais je suis très attentif à l’environnement

car je sais depuis longtemps que des esclaves disparaissent, ce qui signifiait immanquablement la venue d’équipes de récupérations, parce que ces pauvres gars sont incapables d’eux-même d’entreprendre une telle chose, c’est tout.

-Parlons net, dit Vlad, comment comptes-tu faire pour évacuer ces dix-huit personnes d’un coup ?

-Dix-neuf avec moi, c’est à vous de voir comme, j’ignore quels sont vos moyens et possibilités de transport, alors...

-Il faut que nous parlions entre nous un moment, lui dit Pédro, c’est possible ? -Pas de problème, dit le garde, en s’éloignant de cinq mètres. Dès qu’il fut éloigné, Pédro dit à Vlad, -Ce garçon, Gérard, m’a l’air ok, et son histoire recoupe bien ce qu’a dit ce

Georgios, alors...comment faire pour les enlever tous les dix-neuf ? -Oui, ça fait un moment que je gamberge là-dessus...On peut charger au maxi,

huit passagers, sept en réalité, en plus de toi, et même au pire deux ou trois de plus ; ces perceurs n’ont pas été prévu pour le transport de masse, malheureusement pour une fois. Il y a un os, et là c’est du sérieux, en réalité il faut faire venir deux autres perceurs, pour la bonne raison que l’on ne peut absolument pas leur enlever leurs saloperies de microchip de merde à tous en même temps et en un minimum de temps, et comme tu sais, c’est un impératif...Il faudra donc, à condition que l’on puisse faire venir les perceurs dans la journée, les enlever tous ce soir ; voilà, si tu vois une autre solution ?

Pédro l´écoutait avec une attention tendue, analysant rapidement les données. -Je crois que t’as répondu à toutes les questions. Faut expliquer ça dare-dare à

ce Georgios, puis courir au perceur pour envoyer le message d’urgence. Le garde fut bien entendu d’accord ; les travailleurs pouvaient rester ici

jusqu’à dix-sept heures au maximum, pas plus car la nuit tombait de suite après. Il n’y avait plus qu’à attendre la réponse de la station sur la disponibilité des perceurs. Ils étaient à plus de six cent cinquante bornes de leur base, fallait attendre. Sûr qu’ils allaient remuer ciel et terre à la station, car c’était du jamais vu dans les annales que de sauver un groupe entier.

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Vlad, avant de coder le message, avait ordonné, en donnant sa position, que les deux perceurs soient équipés d’un maximum de capes anti-détections pour enlever les microchips, avec les nécessaire pour les extraire, plus des vivres, boissons, vêtements pour onze gars, trois femmes et deux garçons et deux filles dans les quinze ans...plus des vivres pour eux deux aussi, et, pensa subitement Vlad, méfiant...des paires de menottes pour tous ces esclaves miraculés, y compris le garde. Un excès de précaution valait mieux que son contraire.

Ils avaient prévu avec le garde, à qui Vlad avait donné un minuscule écouteur-oreillette, que eux resteraient planqués dans leur appareil, et qu’ils lui indiqueraient la suite des opérations par message radio codé. La réponse de la station arriva en moins d’une demi-heure : les deux perceurs demandés étaient déjà en route et seraient sur place vers les seize heures trente, ils leurs souhaitaient leurs meilleurs voeux de réussite. La station allait entrer en folie ; ils attendaient leur arrivée avec grande impatience et préparaient fébrilement une fête de réception géante...Les perceurs arrivèrent à seize heures et trente-huit minutes exactement, ils avaient volé le plus vite possible, vu les impératifs contraignants de sécurité.

Le garde, avait déjà préparé une manoeuvre pour éloigner de nouveau ses deux collègues sous un faux prétexte, ce qui faillit louper, l’un d’eux ne voulant pas retourner au campement...Il le menaça de dures sanctions disciplinaires et réussit, car ils ne voulaient pas laisser de marque de violence derrière eux, c’était une règle d’or. Les rescapés devaient disparaître comme par magie.

A l’heure dite, les esclaves se mirent en rang par deux et s’engagèrent dans les fourrés à l’opposé de la piste habituelle. Ils étaient fébriles, tremblaient de tous leurs membres depuis que leur garde et ami les avait mis au courant de ce qui se passait : ils allaient vers des vaisseaux qui allaient les amener loin d’ici...et dans quelques minutes ils seraient des hommes définitivement libres !

Vlad et ses deux autres collègues pilotes avaient décidé qu’ils prendraient le maximum de personnes et que lui prendrait le reste, y compris et surtout le garde, ce Georgios...Il avait un doute et il lui fallait donc le cuisiner pour être sûr de sa franchise. Ils arrivèrent épuisés, ayant marché ces quelques trois cents mètres à un train d’enfer...la peur au ventre. Ils furent de suite embarqués au fur et à mesure dans les deux premiers perceurs qui décolèrent de suite et partirent dans deux directions opposées. Les cinq derniers embarquèrent dans celui de Vlad, sauf qu’au moment d’embarquer, Georgios sentit une arme appliquée contre ses reins, Vlad lui disant à l’oreille.

-Simple précaution, mon gars, tu te fous complètement à poil avant d’embarquer, puis tu passes ces jolis bracelets, d’ac ? et ça urge !

-Rien à redire, j’aurais certainement fait pareil, dit celui-ci. Le garde se déshabilla en vitesse en sautillant de froid dans l’herbe gelée, mais

sans réclamer, puis Vlad lui mis les menottes autour de ses poignets joints dans le dos ; ils entrèrent dans le perceur. Pendant ce temps Pédro avait fait un paquet qu’il ficela, avec les vêtements, bottes et armes du garde, paquet dans lequel il mit une grosse pierre pour le jeter dans un lac, puis il embarqua à son tour ; la porte n’était pas encore finie de fermer que le perceur était déjà à plus

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de cinq cents mètres du local. Chaque perceur suivit une route différente, ils s’étaient donnés rendez-vous pour le lendemain soir à 20 heures devant la grotte Bertrand ; ils s’étaient promis de naviguer avec la plus extrème des prudence pour livrer intacte leur précieuse cargaison. Les trois équipages tenaient à faire une arrivée qui resterait inscrite dans les annales de la reconquête, et nul n’aurait songé un seul instant à leur reprocher ce petit orgueil bien légitime.

La température intérieure du perceur étant de 24ºC, leurs passagers avaient tous jeté leurs vestes matelassées à l’arrière de l’appareil ; ils étaient heureux de cette température estivale, se souriaient entre eux, échangeant leurs impressions à voix basse. Dès que le perceur fut en pilotage automatique, Vlad commença l’action décidée avec les autres équipages, au moyen de contrôler les passagers sans risquer d’être victimes d’une trahison, puis il brancha sur cabine l’alarme de détection de toute attaque ou interception possible dont ils pourraient être victime puis, se levant de son siège, il se tourna vers les passagers, les menaçant avec son pistolet mitrailleur équipé d’un silencieux.

Devant l’air effaré de ces derniers, il les avisa. -Mes amis, croyez bien que je suis absolument navré d’être obligé de vous

menacer ainsi avec cette arme, car soyez sûr et certain que nous ne vous voulons aucun mal, bien au contraîre, mais...devant cette situation si exceptionnelle : sauver dix-huit personnes d’un seul coup, ce qui n’est jamais arrivé ; vous devez bien comprendre qu’il nous faut appliquer un minimum de sécurité.

Ils hochaient la tête en silence, leur frayeur initiale se dissipant lentement. -A situation exceptionnelle donc, moyens exceptionnels. Pédro, mon collègue

va vous installer à chacun une paire de menottes, pour un court moment, rassurez-vous, puis, sur chacun de vous, il mettra ces grandes capes que vous voyez là, comme celle qu’il a en main. Ces capes sont pour vous isoler d’une détection encore possible des satellites de vos tortionnaires, car vous avez tous autant que vous êtes, un petit appareil qui est minuscule, implanté sous votre peau et avec lesquels les gardes peuvent vous suivre où que vous alliez. Nous devons vous les enlever le plus vite possible. Nous vous demandons de coopérer dans le calme à cette petite extraction qui sera faite sans que vous ne sentiez rien, je vous le promets. Celui qui refuse sera immédiatement débarqué dans la nature, seul et sans vivre. On peut compter sur votre coopération ?

Pédro passa à l’action pour leur passer les menottes puis les couvrir des capes. Avec l’aide de Vlad, ils commencèrent d’extraire ces maudits microchips. Ce fut baclé en vingt-six minutes ; les deux étaient en nage.

Restait le garde, que Vlad rejoignit et s’occupa en particulier, lui disant. -A nous deux, mon trésor...Tu dois avoir une de ces saloperies toi aussi. -J’en sais foutre rien, dit l’autre. -Je suis pas tranquille avec toi, l’ami, tu t’en doutes un brin, non ? -Je te crois sur parole...y a de quoi. -Bien, je vais t’éplucher avec ce détecteur, chaque centimètre carré de ta peau

de putain de garde que j’ peux pas blairer, tu piges ? -Pas besoin de dessin.

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-Tant mieux, alors tu restes d’un grand calme, tu bouges rien que pour respirer, ok ? et si je trouve autre chose que ces mouchards de merde, je te balance illico de cinq mille mètres d’altitude !

-Vas-y, et arrête de me raconter ta vie, dit Georgios avec froideur. Vlad ne trouva rien d’autre que le fameux mouchard, au grand soulagement de

tous les passagers qui avaient assisté à ce moment de suspense. Leur sauveur authentique ne risquait plus rien, ce garde, Georgios, qui était leur seul ami depuis ces longs mois d’enfer, à vivre journellement dans l’angoisse de devoir quitter leur baraque épargnée du bombardement de ces ondes infrasons.

Vladi enleva les menottes de Gorgios et lui tendit la main, qu’ils se serrèrent vigoureusement, à la broyer. Ce suspense prenant ainsi fin. Vlad fouilla dans un placard le long de la paroie et en tira un paquet de vêtement qu’il jeta au garde.

-Enfile ça, mon mignon, car t’es franchement pas présentable ; c’est une de nos combinaison de combat à chauffage intégré, comme ça tu seras de suite dans le bain. Tu règles la température avec ce petit curseur là, et il lui montra un petit boîtier à hauteur de la ceinture et lui expliqua le fonctionnement.

-C’est fabuleux un truc pareil et...c’est vous tous seuls qui avez pondu ce bidule ? dit Georgios d’un air stupéfait, où est la batterie ? réalisa-t-il incrédule.

-Cherche pas à comprende pour l’instant, pas besoin de batterie, ce système tire l’énergie de l’espace autour de lui. Tu découvriras sur notre nouveau Monde, beaucoup d’autres choses aussi, sinon plus incroyables encore ; patience, tu viens de mettre les pieds dans un Monde hyper développé...

Le garde s’habilla rapidement puis enfila des rangers qui lui allaient au poil, il en fut satisfait, et en fit la remarque.

-Je m’étais pas gouré sur la bête, à vue de nez je t’avais bien jaugé, dit Vlad. -Tu ferais un bon maquignon ; disant cela, il fit fonctionner le curseur vers la

gauche, et le rabaissa vite, commençant de transpirer. Il le mit vers la droite et trois secondes après il commençait à grelotter, il le remit vite en position neutre, regardant stupéfait un Vladi riant de sa surprise.

Vladi lui prit alors l’épaule dans sa grande main et, en souriant mais restant sérieux, il lui dit.

-Bienvenue parmi les Humains libres, Georgios, tu es le bienvenu. Que sais-tu faire, à part ton job de merde ? Mon nom est Vladimir, mais tout la monde m’appelle Vlad, et mon collègue et ami là, c’est Pédro, lui montrant ce dernier à l’avant de l’appareil.

-Merci Vlad, grand merci pour tous ces gens surtout, ça me rendait malade de les voir traiter ainsi...les pauvres. Tu sais, on a eu chaud en réalité, car je ne leur avais pas dit pour qu’ils gardent leur espoir intact et pas tout foutre par terre, car je devais être muté la semaine prochaine.

Il fit un signe à Pédro, à l’autre bout de la cabine, et lui cria, mille fois merci, Pédro ! Ce dernier sourit et haussa un peu les épaules, comme voulant dire : c’est rien, mon gars, c’est normal !

-Ouais...et tout ça parce que le Pédro n’arrêtait pas de me poser des questions, la buée...et tu l’as vue ; celui qui dit que le hasard n’existe pas devra revoir son idée, mon gars, s’écria le grand Vlad en riant fort.

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-Tu sais Vlad, maintenant que j’y repense...ça a tenu à si peu de chose, que j’en frémis de trouille rétrospective. On a eu un bol pas possible d’échapper à ces ordures...ouf !

-Tope là, mon gars, t’es tombé en plein où il faut, car on ne fait que ça : préparer le jour où on va les crever ces ordures, ok ? T’es satisfait, le militaire ? dit-il en s’esclaffant devant son air ahuri.

-Et comment, mais fais moi plaisir Vlad...ne m’appelez plus jamais militaire, je veux plus rien avoir à faire avec cette sale engeance de merde, ok ?

-D’accord mon gars. Bon, je retourne à mon pilotage, assieds-toi le mieux possible et écoute les infos que va vous donner Pédro, tu vas voir que tu vas aimer, tchao, et Vlad partit vers l’avant de l’appareil, laissant Georgios s’asseoir avec quelques difficultés, vue la largeur de sa carrure.

Pédro commença son délicat travail de psycho. -S’il vous plaît, soyez attentifs à mes recommandations, leur dit Pédro, en leur

retirant leurs menottes. Je vais vous distribuer de quoi boire et manger, ceux qui en revoudrons n’aurons qu’à le demander, il y a de quoi vous remplir le ventre à tous, alors ne vous gênez pas, tout à été prévu pour vous satisfaire au mieux.

Ils les servit copieusement de boissons et casse-croûtes variés, qu’ils mangèrent comme des affamés.

-Un conseil, mangez lentement, sinon vous risquez d’être malade. Personne ne vous enlèvera vos aliments. Mais à peine fini de les servir, ils en réclamèrent. Ils sont si maigres, pensa Pédro attristé, si hâves. Puis, une fois qu’ils furent enfin rassasiés, repus. Il commença à leur donner les infos concernant leur nouvelle destinée...Ils le regardaient sans rien dire, tendus encore, mais déjà réconforté par ce repas fantastique qu’il n’auraient jamais imaginé pouvoir exister...

-Vous pouvez vous détendre...car à partir de maintenant vous ne risquez absolument plus rien de vos gardiens ; pour eux, vous avez disparu de la surface de la terre, d’accord ?

Ils s’agitèrent tous et échangèrent rires et soupirs de soulagement. -Si vous voulez aller au toilette, demandez-le moi, il y a ce qu’il faut ici ; je vous

montrerez comment fonctionne l’installation. Aussitôt une file se forma pour y aller ; quand il eut fini d’expliquer à chacun le

fonctionnement, et qu’ils rejoignirent enfin leurs sièges, il leur expliqua ce qu’ils faisaient et où ils allaient.

-Vous devez tous vous poser des questions sur notre destination, et c’est normal ; voici, en fait, et c’est fort simple. Nous rejoignons notre base secrète cachée sous une montagne, loin, très loin de vos anciens persécuteurs, base qui se trouve. Et il leur expliqua le tout dans les détails, de leur future vie dans un monde fait d’amour et de joie, de liberté, d’entraide...

Ces gens commençaient à revivre au fur et à mesure de ces paroles inespérées. Ils le regardaient comme un miracle vivant, les yeux ébahis, ils opinaient lentement de la tête et se tenaient les mains jointes dans une prière inexprimée, éberlués devant ce futur qu’il leur décrivait et qui était pour eux tous, meilleur que tous leurs rêves passés, rêves entachés par leurs existences misérables et sordides...

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Et d’un coup, là, un immense soleil d’espérance les aveuglait de ses rayons d’or. Certains pensaient qu’ils allaient même mourir de joie à l’instant ; ils étaient brusquement submergés par une vague géante d’une émotion qui les emportaient comme des bouchons. Ils n’étaient plus rien subitement, rien d’autre que chaleur, lumière éblouisante, joie étouffante, rires, cris et pleurs qui leur brouillaient la vue...et ils allaient vers un paradis. Etait-ce possible, après tant de souffrance ? Existait-il encore un tel endroit sur cette terre maudite ?

Pour Pédro, habitué de ne traiter qu’une personne à la fois...où il pouvait contôler ses sentiments, cette immense émotion de ce groupe, d’un coup balaya sa résistance, et il pleura lui aussi toutes les larmes de joie de son corps, avec tous ces gens qui riaient, le visage trempé de larmes...Ils voulaient tous le toucher, l’embrasser...plus grand bonheur que celui-ci ne pouvait exister, se pensait-il, riant et pleurant à la fois.

L’espace intérieur du perceur n’était qu’un énorme murmure de bonheur pourtant contenu avec peine, une ruche géante aux insectes pris de folie. Il réussit enfin à les calmer et les avisa qu’il allait donner à chacun une boisson qui, leur dit-il, allait les aider à se détendre, le temps qu’ils arrivent enfin à la base...

Et il leur servit une délicieuse boisson parfumée à la pêche. Il passa la tête par le rideau tiré sur le poste de pilotage, et vit le grand Vladi

s’éssuyer discrètement le visage. Pédro fit semblant de ne rien voir et lui dit, enthousiasmé.

-Vlad, si t’avais vu ça, cette folie qui les a prise...ça fait plaisir à voir, mon pote. Il lui serra l’épaule fortement un moment, puis il le laissa, car il comprit que

son collègue était incapable de lui répondre, tant l’émotion lui serrait la gorge.

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Nouveaux paradigmes

a voiture avec Fred au volant roulait en premier, traversant d’immenses cultures de maïs et de coton, le camion le suivant à trente mètres environ,

les deux allant à une allure raisonnable, d’abord de part la piste qui ne permettait pas une vitesse excessive, mais surtout par la certitude qu’ils savaient d’être repérés et suivis depuis qu’ils avaient accédé à ce côté de la colline.

Comme convenus entre eux avant de prendre la route, Fred se dirigea vers le premier hangar qu’ils trouvèrent sur leur droite, il se gara sur le côté, laissant le camion entrer se garer à l’intérieur, à côté de machines agricoles, ce local n’ayant pas de porte était ouvert en permanence. Le long de la piste ils avaient croisé deux pick-up accidentées, leur chauffeurs étant morts à leurs volants.

Près de la ferme aussi, ils avaient aperçu deux corps tombés dans l’herbe, et plus loin, derrière un enclos on apercevait en contre-bas près d’un ruisseau, environ une dizaine de vaches étendues dans les hautes herbes, à l’ombre de magnifiques saules pleureurs. Joss rejoignit la voiture pour repartir vers le grand hangar principal encore hors de vue derrière un tournant, but de leur équipée. Il leur restait cinq cents mètres environ à parcourir, quand ils entendirent un cheval hennir et donner de violents coup de sabots contre une paroi.

-Crisse ! ça vient de cette construction, dit Joss subitement excité, en montrant un long bâtiment assez bas, loin sur leur gauche, de l’autre côté de la piste ; ce doit être l’étable, faut aller libérer ces bêtes, on peut pas les laisser crever comme ça, tabarnak !

-Ok ! On y va en bagnole, ça ira plus vite, allez, monte ! merde de merde, t’as beau tout prévoir, y a toujours un imprévu.

-On va pas les laisser crever, non, ciboire ! s’écria un Joss scandalisé. -Bien sûr que non, d’autant qu’il faut aussi refaire un cheptel, alors...c’était

façon de parler. Ils allèrent vers les écuries, Fred gara la voiture et ils coururent jusqu’à une

grande porte coulissante que Joss ouvrit à la volée...Une dizaine de vaches, un taureau et six chevaux dont un magnifique étalon étaient là, nerveux, ils devaient être affamés et mourir de soif. Une vache et une jument étaient visiblement pas loin de mettre bas. Pendant que Joss ouvrait les box pour les libérer, Fred, qui était resté sur le seuil, regarda autour de lui et aperçut un grand abreuvoir dans la cour, il y alla à grands pas ; le bac était à moitié plein, il ouvrit une vanne d’arrivée d’eau et le remplit rapidement, puis il la referma en partie, laissant couler un petit filet d’eau en permanence.

Au moins, pensa-t-il, ils pourront boire tant qu’il y aura de l’eau sous pression. Dès que libérées, les bêtes sortirent en vitesse et au fur et à mesure elles vinrent de suite boire à satiété...Fred eut un instant d’hésitation quand il vit le taureau,

L

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un mastodonte, s’approcher de lui...mais la bête l’ignora dédaigneusement pour seulement s’abreuver.

Joss ressortit tout joyeux et exulta. -T’as vu ça ? Sacramouille ! Pas besoin d’un carton d’invitation pour les faire

sortir, hein ? -Tu m´étonnes, ces pauvres bêtes meurent littéralement de soif...Des centaines

de millions d’animaux vont crever dans les étables, dit Fred, rageur...et ça me fait plus mal aux tripes de savoir ça, alors que je me fous de la mort de ces milliards de tous ces connards de gens de cette planète pourrie.

-Fred, lui répondit Joss avec fougue, en venant vers lui à grands pas, c’est nous tous qui l’avons pourri cette planète, comme tu dis, sinon elle serait toujours un joyau si nous l’avions respecté. Les pourris ? c’est toi et moi ! Ce sont tous les autres connards, comme tu dis avec juste raison, mais eux sont crevés, saint-ciboire, ok ? Mais nous qui sommes toujours en vie, c’est à nous maintenant de la sauver, notre planète...On en a qu’une, alors faut la bichonner maintenant, la dorlotter, baptême ! sinon, si nous n’en sommes pas capables, et bien vaut mieux clamser aussi, et tout de suite, comme l’autre vermine l’a fait...et, câlisse de calvaire, c’est ce qu’ils pouvaient faire de mieux en définitive ! Pour une fois ils ont réussi leur coup en beauté, tous ces tarés qu’ils étaient tous. Voilà mon point de vue définitif sur la question, Freddy.

Fred le regardant un moment, songeur, c’était rare que Joss l’appelle ainsi, fallait qu’il soit sous une grosse tension pour ça, et là c’était du choisi...Il s’approcha de Joss, lui sourit et lui tapotant affectueusement l’épaule.

-Je te connaissais pas en écolo, Joss. Ce dernier eut un sursaut et se révolta. -Ho ! surtout ne me taxe pas d’écolo, comme tu dis, répondit celui-ci l’air

visiblement ulcéré, car c’étaient tous des foutus vérolés communards de merde ! lui dit Joss en colère ; tu savais pas, Capitaine ? toi, le roi de l’ambrouille ?

Fred, sidéré, découvrait subitement un Joss inconnu, passionné par un sujet de civils, pensait-il.

-Faut d’urgence refaire ton éducation, mon pote, y a un trou dans ta comprenure, ciboire ! et un balèze en plus. Il faut d’urgence que tu saches que tous ces enfoirés, je parle bien sûr des têtes, les chefs, comme de toujours dans ces organisations politiques ; chefs qui manipulaient, trompaient, arnaquaient leurs pauvres cons de sympathisants, aveugles et complètement stupides, viarge, faisant confiance aux beaux parleurs, les meneurs du troupeau. En réalité, et tiens-toi bien l’ pitaine, le concept écologie d’origine partit des allemands et fut créé par la Stasi, cette infâme saloperie des services secrets de l’Allemagne de l’Est bolchévique, ces crissés ; ce pour déstabiliser l’Occident. Notre pays, comme les pays d’Europe, puis le reste du monde connurent chacun la création d’un parti écologique aux alentours des années soixante-dix ; partis écologiques nationaux alors promus par leurs propres PC, leurs partis communistes, pour destructurer, ruiner leurs propres pays.

C’est ce que les adhérents de ce parti de criminels appelaient « Oeuvrer pour le bonheur des peuples, » tabernak de ciboire de...Du reste, si ces populaces européennes

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plus particulièrement avaient été moins abruties, les gens auraient pu observer que ces partis Verts ne se préoccupaient à 95% que des intérêts des immigrés illégaux, des sans papiers, des populaces du Levant et de l’Afrique, enfin, de tout ce qui devait les ruiner un jour, et les anéantir, ostie ! Telle était la préoccupation essentielle, la vocation première de ces partis de criminels et traîtres à leurs propres peuples, ces enculés de calissés !

Tu piges maintenant, Capitaine, pourquoi je refuse qu’on m’appelle écolo...de merde, hein ? Fais-moi plaisir, veux-tu ? Capitaine Fred Richardson, ne m’appelle plus jamais de ce titre infamant, merci.

-Excuse-moi Joss, dit le pitaine subitement intimidé par la fougue de son collègue...moi, le fortiche, comme tu dis souvent, ne savais rien de tout ce micmac...parole d’honneur, j’ai jamais potassé ce sujet de civils, pour moi...mais ça ne m’étonne pas outre mesure, tout était littéralement pourri alors...mais, j’ignorais aussi ta passion pour le sujet.

-C’est par réaction à notre job de tout détruire, sans doute, qui m’a fait rapidement prendre conscience de l’importance cruciale de ces problèmes démographiques et d’hyper pollutions, d’assassinat à petit feu de la planète. J’ai ainsi vite pris conscience de la gravité de la situation. C’était même foutu, si tu veux le savoir, la planète était condamnée ; jusqu’à ce jour, oui, jusqu’à ce jour béni d’aujourd’hui en quelques sorte...car on a maintenant un faible chance que notre terre se récupère lentement, grâce à la disparition brutale de ces 7,5 milliards de maudits encrissés de fils de putes qui ne sont plus là pour continuer de la pourrir toujours plus à chaque seconde qui passe, ciboire, tu piges ?

Pris par son sujet, sa colère monstre ne le quittait plus. Joss, autoritaire maintenant, sortit son tévéphone, passa le clavier sur calculatrice et se prépara à entrer des données.

-Maintenant, Fred, songe seulement à la somme des déchets organiques de tous ces animaux domestiques, et pour abréger comptons un nombre X d’équivalent d’hommes (H) par types d’animaux, et nous aurons la somme plus exacte d’hommes sur cette foutue planète, et la pollution organique générale, des pipis et cacas de tous ces salopards réunis.

*1,650 milliard de vaches x 5 H (hommes) = 8,250 M-H (milliards d’hommes) *250 millions de canassons, ânes et mulets x 5 H =...1,250 M-H *1,300 milliard de porcs x 1,5 H = ...............................1,950 M-H *20 millions de chameaux x 5 H = ................................100 millions *2,3 milliards de caprins et ovins x 1 H = ...................2,300 M-H *7,500 milliards d’hommes = ........................................7,500 M-H TOTAL : 21,350 M-H ; soit 22 M-H Sans parler des milliards de chiens, chats, lapins, poulets, animaux sauvages et

tutti quanti. Sachant qu’un homme rejette journellement 200 gr d’excréments et 1,5 L

d’urine, vois le résultat catastrophique annuel de plus de 22 milliards de ces réels tas de fumiers ambulants.

Excréments : jour = 4,400 M de Tonnes / Par an = 1.606 M de Tonnes de merde.

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Urines : jour = 33 M de Tonnes / Par an = 12.045 M de Tonnes de pisse. Et je ne te parlerai pas de la monstrueuse pollution industrielle que tout le

monde connait : les milliards de bagnoles, camions, trains, bateaux, avions, usines, etc.

-Ben dis donc ! s’esclaffa un Fred sidéré, anéanti, cette planète n’était alors ni plus ni moins qu’un infâme et gigantesque chiotte !

-Vouais ! Tu comprends mieux le vrai problème maintenant, Fred ? que ces pourris de politiques avec l’éternelle complicité des journaleux, nous bourraient le mou, nous mentaient tant et plus avec le niveau démographique mondial, car nous n’étions pas que 7,5 malheureux milliard d’humains, comme tous ces fumiers voulaient nous le faire croire, mais bien l’équivalant catastrophique de 22 saloperies de MILLIARD de malades dégénérés pompant les réserves naturelles et empoisonnant tout le bastringle, tabarnak de ciboire !

Fred le regardait avec admiration, sidéré, mais se gardant bien de l’interrompre, découvrant un Joss véritablement passionné et calé en ce domaine.

-Et comme la croissance à ce haut niveau est forcément exponentielle, s’ils avaient continué comme ça, ils se seraient noyés sous peu dans leurs propres rejets...Une horreur absolue et crime irresponsable d’origine typiquement capitaliste, puisque pour toujours plus enrichir une minorité il fallait toujours plus de consommateurs et de produits consommables à leur vendre...C’est le scorpion qui se mord la queue. Quoiqu’il en soit ils étaient donc depuis longtemps condamnés à disparaître et...la façon dont c’est inopinément arrivé, peut-on dire, est sans doute la moins horrible que de mourir à petit feu étouffé et empoisonné par ses propres déjections.

Quoique en réalité ils seraient tous crevés de faim car il n’y aurait plus eu de quoi nourrir tous ces malades mentaux.

Fred en frissonna de dégoùt devant une telle prespective... -Ainsi, Fred, il faut la protéger notre planète, c’est notre unique chance, Fred,

crois-moi, si on veut survivre. Faut la respecter notre foutue planète, car on en a qu’une...il n’y a que ça à faire, le principal...le reste suivra tout seul, tu piges ? C’est capital !

-Ouais, je suis entièrement d’accord avec toi...Je faisais parti de ces « fils de putes » comme tu dis. Je vais alors me recycler à fond et suivre tes conseils évidents en définitive, car si on réfléchit un chouia, c’est certain que si l’on ne respecte pas ce qui vous porte, on se casse la gueule !

-Merci Fred, je sais que je peux compter sur toi. Joss posa sa main sur l´épaule de son pote, et la serra un moment...ils se

sourirent. -Bien...Fred se dégagea, mais il me semble que malgré tout nous avons une soi-

disant Mission officielle à remplir, non ? peut-être que nous devrions remettre à plus tard les soins à donner autour de nous, nous avons fait un max, déjà, me semble-t-il.

C’est pile à ce moment-là qu’ils entendirent un coq chanter à tue-tête. -Et c’est reparti, dit Fred en riant, volons derechef au secours de notre futur

garde-manger, mon pote !

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Ils coururent derrière la grange en riant comme des gamins, d’où semblaient venir ces cocoricos énergiques et rageurs. Effectivement, ils arrivèrent en vue d’un grand poulailler cerclé d’un fort grillage fixé sur un muret en ciment ; environ une centaine de volailles s’ébattaient là-dedans, poules et canards mélangés, et bien entendu, le seigneur des lieux, un arrogant et magnifique coq qui les toisait du haut de son tas de merde ; il y avait aussi des pigeons, lapins blancs, pintades, dindons...c’était une véritable harche de Noé que ce poulailler.

Dans un local attenant ils trouvèrent des sacs regorgeant de grains et granulés divers. Ils éventrèrent les sacs et répandirent leurs contenus sur le sol à l’extérieur ; avec un dernier sac, Joss alla vers la porte du poulailler en laissant tomber sur le sol une large trainée de grains de maïs...et Fred ouvrit la porte en grand et la bloqua pendant que Joss entra, déclenchant la révolution dans la volaille, qui commença à sortir dans un vacarme de cris et battements d’ailes. Il remplit un grand abreuvoir, puis, comme Fred le fit précédemment, régla le débit sur un petit filet d’eau qui coulera en permanence.

-En définitive, et c’est le comble, dit Fred, cette fausse-vraie ferme utilisée à planquer une base secrète, aura été la source de la sauvegarde de ces animaux indispensables à notre survie.

-Oui, répondit un Joss souriant, heureux de voir ces volailles s’ébattrent, le destin réserve parfois de bien étranges surprises...

-Bien, cette fois, la partie sauvetage est terminée, dit Fred, enfin, je le pense ; toutefois, un minimum de prudence est requit, il me semble ; alors écoutons un instant, des fois que nous ayons oublié quelques créatures encore captives ; et il mit sa main droite en pavillon contre son oreille, et la main gauche appuyée sur la hanche...tourna lentement sur lui-même, le regard au ciel.

-C’ que tu peux être con quand tu veux, dit Joss en s’esclaffant ; y a plus rien à sauver maintenant, on peut poursuivre la mission.

-Ok ! et avec plaisir, car pour mon premier jour de recyclage, on a fait fort. -Impec, mais tu le regretteras pas, Fred, crois-moi, la nature est généreuse, elle

te le rendra au centuple, et gratuitement de plus. Ils repartirent vers la voiture. En passant devant l’abreuvoir ils se brossèrent

leurs pantalons et se lavèrent les mains puis montèrent alors dans leur véhicule. Une fois installé au volant, Joss, l’air interrogatif, demanda à son équipier.

-Et s’ils sont tous rétamés, quest-ce qu’on fait ? -Allons d’abord voir ce qu’il en est, mon mignon, répondit ce dernier en

claquant des doigts ; pas de suppositions, des faits, rien que des faits, des certitudes, c’est tout ce qu’il nous faut, allez, go ! démarre !

La voiture manoeuvra doucement dans la cour, pendant que Fred, assis sur le siège passager fixait la paire de menottes de l’attache-case à son poignet gauche, puis la voiture s’engagea lentement sur la piste en direction du grand hangar fatidique. Ils ne semblaient pas pressés de découvrir ce qui les attendait...Ils allaient être bientôt définitivement fixés sur leur destinée. Ils y étaient presque, le hangar, à droite de la piste, était construit sur le contrefort de la colline, encaissé dans celle-ci dans sa partie plus grande arrière, jusqu’à une hauteur de

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quatre à cinq mètres approximativement. Fred indiqua à Joss de se garer à quelques mètres devant l’entrée, puis d’attendre.

-On attend ici, car j’ai pas la moindre foutue idée de comment on y entre. -T’en sais rien ? -Non, mais te casses pas le baigneur, s’ils sont vivants on va pas tarder à

recevoir de la visite, crois-moi. Il venait juste de prononcer ces paroles qu’une petite porte s’ouvrit dans le

battant droit d’une énorme porte double qui occultait le passage, et où un gigantesque camion aurait put entrer sans toucher les bords, et de loin, pensa Joss, qui suivait des yeux, immobile, le mouvement de la porte. Un sergent des Forces noires apparut, suivi d’une section de huit gars armés jusqu’aux dents, chacun tenant un pistolet mitrailleur pointé sur leur véhicule qu’ils entourèrent en courant.

Le sous-off s’approcha de Fred, qui baissa la vitre et attendit. -Que faites-vous dans ce secteur militaire, Capitaine ? Demanda-t-il sur un ton

rogne, il faut une autorisation spéciale pour y circuler ! -Capitaine Fred Richardson, et Lieutenant Joss Firley, des Forces Spéciales. J’ai

un ordre de mission, Sergent, bien évidemment ; un document classé ultra-secret et prioritairé, à remettre au chef de la mission scientifique en personne. Il sortit l’ordre de mission de la poche intérieure de sa veste et le lui tendit.

Le sergent le prit et se raidit imperceptiblement en voyant les deux grandes barres rouge barrant la chemise scellée en diagonale ; Fred donna un discret coup de coude à Joss, qui fit un effort pour se retenir de ne pas pouffer de rire.

-Ça paraît en règle, Capitaine, mais j’ai ordre de montrer ce document au commandant de la base avant de vous permettre d’entrer. Puis il claqua des doigts et avisa un de ses hommes.

-Caporal, dit-il à celui-ci en se touchant l’arcade sourcillière de l’oeil droit, vous me les lâchez pas de l’oeil d’une seconde !

-A vos ordres, Sergent ! s’écria ce dernier, raidi brusquement comme un piquet.

Le sous-off claqua les talons et s’engouffra par la porte ouverte, comme s’il avait une volée de frelons au fesses ; mais les troufions restèrent sur place, leurs armes toujours pointées sur eux.

Ils allumèrent chacun une clope et s’installèrent en vue d’une possible longue attente. Ils n’eurent pas le temps de les fumer que la porte s’ouvrait de nouveau à la volée et ils virent le sergent courir les cinq mètres les séparant de leur véhicule. Il se figea au garde-à-vous et par-dessus le toit de la voiture, le regard fixé sur un point imaginaire de l’autre côté de la vallée, il gueula littéralement.

-Le Commandant veut vous voir immédiatement, et le plus vite possible, Capitaine ! Sortez tous les deux de cette voiture, mes hommes vont vous encadrer jusqu’à destination. Vous ne devrez rien dire et ne pas quitter le chemin, sans ça... il était déjà parti devant.

Ils quittèrent rapidement la voiture et ils entrèrent, toujours encadrés par le peloton. Dans le fond du local, l’intérieur était rempli de fourrage jusqu’au trois-quart de la hauteur; des matériels à l’usage des champs étaient dispersés un peu

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au hasard semblait-il, des outils divers étaient accrochés aux murs et de la paille jonchait le sol cimenté et poussiéreux...Une vraie grange de paysan, rien d’autre que cette utilisation n’aurait pu venir à l’esprit de quiconque. Quand subitement, une partie de la masse de fourrage bascula sur le côté, découvrant une lourde porte en acier donnant visiblement sur une énorme cabine d’un monte-charge qui aurait pu facilement contenir une centaine de personnes. Dès qu’ils y furent entrés la porte fut refermée et ils plongèrent brusquement et pour un bon moment, comme un saut sans parachute, enfin presque...Puis, ils suivirent le sergent, toujours encadrés de la section armée ; ils bifurquèrent une bonne dizaine de fois avant de stopper devant une porte blindée, comme toutes celles qu’ils avaient vu en venant.

Sur la porte, un discret panneau indiquait, Commandant ; le sergent frappa, et une voix puissante gueula d’entrer. Le sergent ouvrit la porte et se plaça sur le côté pour les laisser entrer, puis la referma ; restant dehors avec sa section.

Fred et Joss étaient dans un vaste bureau aux meubles fonctionnels, typique de l’ameublement militaire ; seuls, quelques cadres de vues du monde civil accrochés aux parois donnaient à ce décor spartiate une note de chaleur toute relative. Ils avancèrent dans la pièce où ils étaient les seuls occupants. Fred allait s’assoir dans un fauteuil, quand la voix qui avait gueulé d’entrer, se fit de nouveau entendre, mais tout près d’eux cette fois, et un grand gaillard, un hercule sorti de derrière une avancée d’une cloison et s’écria tout joyeux.

-Ha non de Dieu ! J’étais certain qu’il ne pouvait pas y avoir un autre salopard que ce Fred Richardson-là !

Et devant un Joss éberlué, les deux tombèrent dans les bras l’un de l’autre, Fred et son ami retrouvé. Fred se dégagea de l’étreinte et en riant aux éclats, envoya à l’autre un coup de poing amical dans l’estomac, et s’écria.

-Je croyais bien jamais te revoir, vieille noix ! puis, se tournant vers Joss, il lui présenta son ami.

-Joss, je te présente le capitaine Wesley Zellwegger, le plus grand bandit de la création, mais à qui je confierai ma vie les yeux fermés. Puis il présenta Joss à ce dernier. Wesley ; je te présente mon pote, le lieutenant Joss Firley ; en lui aussi, Wesley, j’ai une totale confiance, ok ?

-C’est enregistré Joss, il lui tendit la main et lui serra à lui écraser les doigts en lui souriant; bienvenue à tous les deux dans mon repaire. Les amis des amis sont des amis, point final !

Le capitaine Wesley Zellwegger, qui avait nettement passé la quarantaine, était si possible encore plus baraqué que Fred, guère plus grand mais nettement plus large ; avec un poitrail digne d’un boeuf et des bras comme des cuisses. Rouquin comme c’était pas permis, avec les yeux verts sur une gueule en forme de poire, la machoire plus large que le crâne ; l’ensemble agrémenté, partagé par une longue cicatrice blafarde et en creux en travers de la joue gauche, partant de la tempe et finissant au menton. Avec sa voix de stantor, le capitaine Wesley Zellwegger ne faisait pas dans la discrétion, ce qui lui avait valu de la part de ces fiotes du Pentagone, comme il se plaisait à le souligner à tout bout de champ, sa durée indéterminée, pour ne pas dire définitive dans ce grade de capitaine ; ce

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qui lui convenait particulièrement, car il aimait vivre avec ses gars qu’il adorait, malgré ses gueulantes épouvantables.

Ses hommes lui avaient donné le surnom de Gueule d’enfer, mais nul ne savait si c’était par comparaison à la couleur de ses cheveux couleur de braise, ou par la puissance des décibels de sa douce voix fluette...Ils le craignaient et l’adoraient tous en même temps car ils savaient que leur pitaine se serait fait couper en quatre pour leur sauver la mise, ce qui était bien loin d’être le cas de la majorité des officiers actuels, dont la plupart des gars n’avaient envers eux que mépris absolu.

-Wesley, dit Fred, j’ai une mission de la plus extrème urgence, à propos d’une situation...catastrophique toute récente...et, il faut que je te pose des questions qui peuvent peut-être t’embarrasser, au niveau règlement j’entends.

-Le règlement, ici, c’est moi qui le fait, ok ? Alors vas-y, mais...Oh ! mais...t’es malade ou quoi ? Tu te pointes au bout de six ans au moins, la gueule enfarinée, et tu voudrais parler boulot sans boire un coup ? Je ne sais pas d’où tu sors, Fred, mais de là d’où tu viens, lui dit-il avec force en le frappant de l’index sur la poitrine, ils ont perdu le sens des usages les plus élémentaires, mon pote, c’est moi qui te le dit, dit-il tout en se dirigeant ensuite vers un grand classeur sur lequel était inscrit en grandes lettres noires ULTRA SECRET. On va arroser ça illico, puis on parlera de ton business, après seulement, ok ? Sachez, les potes, qu’il y a des priorités dans la vie qui passent avant toutes les autres !

Il prit une clé dans sa poche puis ouvrit le volet frontal coulissant du classeur, qu’il lâcha, celui-ci descendit d’un coup et dévoila un immense bar copieusement achalandé. Tous d’éclater de rire, et le capitaine Wesley de leur dire en montrant son bar, se pavanant et sérieux comme un prince : ça, les mecs, c’est un bar ! et questions secret, vous voyez par vous-même que j’en connais un rayon, pas vrai Joss ?

-Sans l’ombre d’un doute, capitai... Le capitaine lui coupa la parole d’un geste. -Pas de cinéma entre nous, gamin, oublie le titre, ok ? -Ok, Wesley, ça roule pour moi aussi, répondit Joss, ravi. -A la bonne heure, dit-il en servant trois grands verres d’un Whisky écossais de

15 ans d’âge, puis il les leur tendit et ils trinquèrent et dégustèrent ce scotch de derrière les fagots, que leur affirma un Wesley visiblement tout fier de son bar...ultra-secret, et il pouvait légitimement en être fier, c’était pas du vulgaire rye plus ou moins merdique de leur country, ça non.

-Les mecs, dit Wesley, avec un pareil nectar dans la panse, nous allons pouvoir parler sérieusement. Il remplit de nouveau les verres ; celui qui veut des glaçons n’a qu’à se servir, en leur montrant un petit frigo à côté du classeur ; pour ma part je me refuse vigoureusement à gacher ce divin breuvage avec de la flotte.

Personne ne prit de glace. -Asseyez-vous là, bien confortablement mes agneaux, et si vous avez encore

soif, pas de problème, ok ? J’ai une réserve à faire se pamer d’admiration un écossais pur grain lui-même. Je vous le confie à vous deux, leur dit-il en baissant

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la voix et en prenant un air de conspirateur, sous le sceau du plus grand secret, concernant les origines de ce breuvage digne des dieux de l’Olympe, voici.

L’année dernière donc, au moment de venir prendre le commandement de ce trou perdu...et si vous saviez à quel point il l’est vous me plaindriez tout plein ; j’étais à mon quartier général et...si je vous raconte ça c’est parce que c’est vraiment drôle, vous allez voir. Donc, je vais au magasin général pour prendre de l’équipement dont j’avais droit, plus ma liste perso en tête, comme toujours et, devine sur qui je tombe, Fred, je crois que tu le connais.

-Aucune idée, vas-y pour voir ? -Sur ce gros plein de lard, ce fumier de colonel Ashmore. -Bryan Ashmore ? demanda un Fred subitement fort intéressé. -Bryan Ashmore, lui même ! Il n’y a qu’un vérolé de son espèce, et fort

heureusement, le roi du marché noir, ce fils de pute ; que ça l’étrangle, celui qui n’a jamais fait profiter un pote.

Enfin bref, j’avais presque déjà fini d’emballé mes affaires dans ma tire, un vieil Hamvee passablement cabossé et qui avait fait la guerre contre l’Iran...et j’étais donc revenu dans son entrepot pour jacter un moment avec ce fils de pute, dans l’intention de lui soutirer quelques caisses de Whisky à bon prix. J’avais encore un carton de scotch dans les bras, et il y en avait encore deux caisses par terre à amener à ma tire. Dans le local où nous étions, il y avait une pile d’environ une quarantaine de caisses de ce whisky, là, celui que nous buvons maintenant, et j’avais beau discuter, cet enfoiré ne voulait pas baisser son prix...quand, et vous allez tout comprendre...quand, voilà un sergent qui se pointe en courant, et qui lui gueule au Ashmore.

-Mon Colonel, vite, il y a le Général Clooney qui vient d’arriver à l’improviste et il vous demande immédiatement au bureau des communications, là derrière, le sergent fit un geste du pouce par-dessus son épaule, et...excusez-moi, mon Colonel, rajouta-t-il...le Général n’a pas l’air content...

Sur ce, voilà le Bryan qui fout le camp en courant, trouillard comme toujours, et qui gueule au sergent.

-Sergent, prenez deux soldats et faites de suite charger les affaires du capitaine Zellwegger dans sa voiture !

Et, négligemment, j’ai alors montré du doigt au sergent, la pile de caisses de cet excellent whisky...

Il se leva, et dit en riant aux éclats. -Trinquons à ce fils de pute, le colonel Bryan Ashmore ! le roi des enfoirés ! et

fasse que son business l’étrangle ! Ils burent avec plaisir et en riant aux éclats. -Et voilà, les amis, ça c’est du business comme je l’aime...et sans se ruiner

surtout. Il se jeta dans son fauteuil qui gémit sous la charge, cala ses talons sur le rebord

du bureau, penché en arrière, puis tout en sirotant son scotch millésimée, il observa ses deux visiteurs durant un moment en silence, l’air pensif.

Fred et Joss avaient écouté toutes ces aventures de Wesley, mais le coeur n’y était pas...pas du tout même, ils ne parvenaient pas à se rebrancher sur le

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quotidien illusoire de cette base qui leur semblait vivre dans un autre espace-temps...dans un autre monde...

-Fred, dit au bout d’un moment le capitaine Zellwegger...Je te connais bien mon petit Fred, et j’ai la très nette et facheuse impression que t’as un gros problème sur les bras, hein ? et un maous de problème même, j’ me goure ?

-Y a de ça, Wesley...y a de ça, ouais, un big problème même, répondit Fred, désabusé, penché en avant, les coudes reposés sur les cuisses. Faut qu’on en parle à coeur ouvert tous les trois. Je peux compter sur toi, je sais, mais peut-être que tu vas pas nous croire...et pourtant il le faut.

-Attends, attends un moment, Fred, dit Wesley en se redressant, si c’est du coriace j’appelle mon pote...car moi aussi j’en ai un de solide, et vous allez rire, c’est aussi mon lieutenant, le lieutenant Mark Phydorway, un mec super. Je l’appelle, il sera ici dans deux minutes.

Il décrocha le combiné du téléphone, fit un numéro et attendit un instant...puis en fit un autre, il eut la comunications instantanément et gueula dans l’appareil.

-Sergent, trouvez-moi immédiatement le lieutenant Phydorway et dites-lui que ça urge, merci. Et il raccrocha énergiquement.

-Wesley, lui demanda Fred, sois gentil, ressers-nous de ton excellent scotch, qui me réconcilie avec la vie, car j’en ai foutrement besoin...putain que oui...

Il sentait, depuis qu’ils étaient arrivés dans ce bureau, au calme...le premier stress passé, qu’ils allaient avoir une vie de chien dans un avenir très proche. C’était le coup de pompe de l’inaction qui faisait sournoisement son oeuvre, il le savait...rien de pire que le premier break dans l’action, dur de repartir après...

-Pareil pour moi, dit Joss...pour le scotch...et pour le reste aussi... -Votre cas me semble sérieux les gars...on va prendre soin de vous, car je sens

que ça sera pas du luxe. Le pitaine alla à son bar secret, revint avec la bouteile et resservit les trois

verres quand, on frappa à la porte qui s’ouvrit sans attendre l’invitation à entrer. Le capitaine posa la bouteille sur le bureau, et fit les présentations en posant la

main sur l’épaule du nouveau venu. -Lieutenant Mark Phydorway - Capitaine Fred Richardson - Lieutenant Joss

Firley. Puis s’adressant au nouveau venu, il le mis au courant en deux mots. Le lieutenant Mark Phydorway a dans les trente ans ; bien batti, 1.84 m de

charpente solide sur ses 85 kg bien sonnés, les cheveux chatain clair, avec des yeux rieurs de couleur noire ; c’est le type même du beau garçon, et il le sait. Les filles en raffolent.

-Mark, ces deux gars sont des amis, c’est du sacré, et il n’y a pas de grade entre nous tous, ok ?

-Parfait pour moi aussi, enchanté de vous connaître les gars, si c’est Wesley qui le dit c’est que vous êtes réglo, alors de quoi s’agit-il ? dit-il en regardant son supérieur et ami.

-Bien, je crois que Fred va pouvoir nous affranchir maintenant que t’es là, j’ai préféré que tu sois arrivé pour qu’il nous l’explique, pour pas perdre de temps à tout répéter. Mark, sers-toi un verre, assied-toi et écoutons cette histoire qui me

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semble particulièrement...compliquée. Tous les verres sont pleins ? demanda-t-il à son entourage, alors, allons-y, à toi Fred, mon petit.

Un lourd silence s’installa dans la pièce, tout se figea...seules, les colonnes montantes des fumées des cigarettes semblaient vivantes. Le capitaine Fred Richardson respira lentement à fond, s’installa confortablement dans le creux de son fauteuil de cuir moelleux et attaqua courageusement la partie...Ça n’allait pas être de la tarte, pensa-t-il, fataliste.

-Il faut au préalable que je vous pose quelques questions mais, s’il vous plaît, ne me demandez pas à chaque fois pourquoi je les pose, sinon on va jamais s’en sortir ; vous pigerez tout après, et vous comprendrez le pourquoi de cette méthode, d’accord ?

-Vas y, Fred, nous sommes tout ouïe, promis, dit Wesley. -Bien. Depuis moins de 24 heures, avez-vous observé de quelconques

anomalies dans le train-train de la base ? Les deux autres s’interrogèrent du regard, hésitants, puis Mark dit en regardant

Fred, subitement pris par un doute. -Maintenant que tu en parles ; notre système radio paraît avoir des problèmes,

et malgré que mes gars aient cherché la cause, car nous ne recevons plus rien depuis quelques heures...

-Et la ferme, là dehors ? demanda Joss. -Ah oui ! Il parait ne plus y avoir une quelconque activité, les travailleurs

semblent avoir disparu. -Bien, continua Fred, votre système de recyclage d’air, est-il branché en

permanence sur l’extérieur ? -Les trois quarts du temps, oui, répondit Mark. -Ce qui signifit qu’il ne l’est pas en permanence, exact ? demanda-t-il à ce

dernier. -Exact. -Aujourd’hui...disons, il calcula un moment en regardant sa montre bracelet,

disons, aux alentours des 9 à 10 h, était-il sur l’extérieur ? Le capitaine Wesley Zellwegger s’exclaffa brusquement, subitement en colère. -Ça risquait pas pour la bonne raison que ce matin à l’aube un technicien à fait

je ne sais quelle connerie et nous à foutu le système électrique général en panne, ce jusqu’à 13:45 h au moins ; un sergent en plus, l’enfoiré ; du coup je lui ai foutu 10 jours à pied, pour lui apprendre à vivre, ce con ! dit-il furax.

Fred et Joss se regardèrent et hochèrent la tête, devenant blancs comme des cierges, car ça signifiait que la base avait également été condamnée mais que cette panne providentielle les avait sauvé : tous les volets, toutes les ouvertures sur l’extérieur s’étaient alors fermés automatiquement suivant les normes de sécurité en vigueur dans toute casemate ou centre souterrain comme celui-ci.

-Je sens un vilain caca, les mecs...rien qu’à voir vos gueules, dit alors le capitaine Wesley Zellwegger, rendu subitement méfiant et se redressant dans son fauteuil.

-Wesley, lui répondit Fred, en parlant lentement...Il les regarda tous les deux, les avant-bras reposés sur les cuisses, faisant tourner inlassablement son Zippo

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entre les doigts...il l’ouvrait, le refermait dans un claquement sec...puis il le rouvrait...Wesley, dit-il en regardant fermement son pote dans les yeux, ton sergent à qui t’as foutu les 10 jours...écoute-moi bien, il les regarda tous les deux en hochant la tête...libère-le et donne lui une caisse de ton foutu scotch, car il vous a sauver la vie à vous tous dans cette base à la con...car sans lui vous seriez tous refroidis à l’heure qu’il est.

Mark et Wesley se levèrent d’un bond, ahuris maintenant, regardant les deux autres assis, qui hochaient lentement la tête.

-ll faut de suite stopper les émissions radio et les détections radar, et vite, s’écria le lieutenant Joss Firley sur un ton énergique, prit d’une subite inspiration, en regardant les deux officiers debout devant leurs fauteuils, bras ballants, et qui les regardaient comme des martiens.

-Ouais, dit Fred, regardant son lieutenant en hochant la tête, j’y avais pas pensé sur le coup mais Joss à raison. Wesley, il faut tout stopper d’urgence, vite, donne les ordres...Il faut même ne plus répondre aux appels de l’extérieur ; je vous explique tout ça après, faut instaurer un black-out implacable, c’est le plus urgent, crois-moi.

Wesley et Mark se regardèrent, puis la pitaine hocha la tête lentement, le lieutenant bondit sur le téléphone et composa un numéro et attendit un instant...Wesley, qui était retombé le cul dans son fauteuil était penché en arrière, les pieds de nouveau sur le bord du bureau, c’est ainsi qu’il pouvait le mieux réfléchir ; et il regardait fixement Fred, comme sans le voir ; un Fred qui poussait comme un long soupir de soulagement.

-Ici le lieutenant Phydorway, qui est à l’appareil ?...Bien, soldat, appelez immédiatement votre chef de service, qui est-ce ?...Bien, c’est urgent, priorité absolue, j’attends...Sergent-chef Princhk ? Faites stopper immédiatement toutes, je répète, toutes les détections radars sur tous les azimuts et toutes les fréquences, ainsi que les émissions radios, vous m’entendez ? Bien, sur toutes les bandes également, et ne répondez plus aux appels du dehors également : c’est un ordre en priorité absolue.

Maintenez le black-out total jusqu’à nouvel ordre...Et bien, dites-leur que c’est un nouvel exercise, pas besoin de leur donner d’autres explications pour le moment. Je vous fais parvenir dans un instant, un ordre écrit signé par le commandant Zellwegger, exécution ! Puis il racrocha.

Wesley entendant ça prit un papier entête sur son bureau et griffonna quelques mots et signa d’une façon rageuse puis colla un coup de tampon sur le bristol, pendant que Mark appuyait sur un bouton, la porte d’entrée s’ouvrit et le gardien entra, se figea au garde-à-vous en claquant les talons.

Mark, prit l’ordre que lui tendait son chef et le donna au soldat. -Allez porter ce pli urgent aux transmissions, en priorité absolue ; vous la

remettrez uniquement en main propre au sergent-chef Princhk qui vous attend ; je vous donne quatre minutes, alors magnez vous l’ cul, ça urge ! Rompez !

Le soldat salua et sortit en vitesse. Mark, referma la porte, alla au bar et revint vers le bureau avec une bouteille de scotch neuve qu’il déboucha ; il servit

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lentement tous les verres, regardant chacun intensément dans les yeux, puis il s’assit avec lenteur dans son siège dans un silence général à couper au couteau.

Trois paires d’yeux étaient alors braquées sur le capitaine Fred Richardson, qui se serait bien passé d’un tel vedétariat.

S’étirant paresseusement dans son lit, Marion émergea d’un long et profond

sommeil ; si long, pensa-t-elle ravie, grâce à cette fameuse boisson parfumée à la pêche. Elle sourit en se rappelant la dernière et première fois qu’elle l’avait expérimenté, il y avait de ça de longs mois maintenant, dans ce perceur qui l’avait enlevé à cette vie dégradante de forçat. Elle se revit en pensée, Pédro lui donnant ce verre...Pédro, Vladimir, ses deux sauveurs qu’elle portait depuis dans son coeur d’une façon spéciale ; ils étaient ses meilleurs amis mâles, maintenant. Elle réfléchit un instant et se dit qu’en définitive qu’ils étaient plutôt ses meilleurs amants spéciaux, voilà, dit-elle à voix haute, c’est ça : avec eux j’éprouve l’amour de la Femme, plus...un petit quelque chose de particulier.

Elle réalisa brusquement qu’elle avait droit à deux jours pleins de repos, sans absolument aucune activité en vue...le repos total. C’était étrange de n’avoir aucun travail à faire ; elle avait gagnée ce droit exceptionnel, elle, comme ses collègues de classe, pour avoir fini leurs études, après un dur labeur de ces longs mois passés à étudier sans discontinuer, des matières à l’infini...de quatorze à quinze heures par jour d’apprentissage des plus variés, pour finir par décrocher ce diplôme symbolique qui allait les propulser dans la lutte active.

C’était Georges, le nouveau Grand Sage de leur communauté maintenant, qui lui avait annoncé la nouvelle de ce repos bien mérité, car Charles, son prédécesseur qui l’avait reçue à sa descente du perceur lors de sa libération, était décédé peu de temps après. Elle avait eut beaucoup de peine car elle avait été grandement impressionnée ce jour-là, à la vue de Charles, ce vieillard si calme et si bon...Son amour pour elle alors, pour ce qu’elle représentait, débordait de son personnage. Elle avait senti d’instinct en cet homme et ce pour la première fois de sa vie, cet amour généreux et spontané qui habitait ces nouveaux Hommes de cette Humanité libre ; ce sentiment alors tout nouveau l’avait submergé de bonheur, comme une vague géante. Elle sourit à ce souvenir chaud à son coeur.

Elle avait dès lors connu une vie pleine de choses fabuleuses et excitantes ; et particulièrement elle avait découvert l’amour, l’amour physique si entousiasmant et régénérateur, avec Eric, son premier amant. Puis son premier enfant, Clovis, avec un grand gars aux cheveux noirs comme un corbeau. Pour Athéna, la deuxième, elle aurait été bien incapable de dire quel était le père, mais qu’importait après tout, ils étaient leurs enfants à tous, dans cette station comme dans les autres ; les enfants de l’amour et de l’espoir.

Elle plaignait ces femmes de ce monde ancien, comme elle l’avait apprise en classe sur les vidéos, elle plaignait vraiment ces femmes d’alors qui passaient leur vie d’une façon si minable à seulement élever leurs enfants et supporter un homme...toujours le même, durant des décades, sinon une vie entière. Cela lui semblait une folie, une aberration totale que de sacrifier sa vie à une chose aussi

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banale que d’élever un enfant ; de plus, songa-t-elle, pour quels résultats. Bien souvent leurs mômes d’alors devenaient des humains loupés, c’était le mot exact, car ces enfants tombaient dans la drogue, le crime, la prostitution, les suicides : totale contradictoire pour des personnes se disant heureuses ; puis la misère sordide, la mort par inanition...

Ces pauvres gosses avaient été pollués dès leurs plus tendre enfance par les psychoses de leurs propres parents qui leurs transféraient ainsi celles qu’ils avaient eux-mêmes hérité des leurs, et de leurs aïeux...Pas étonnant que cette humanité était crevée de sa propre folie, pensa-t-elle, sûre d’elle.

Elle eut une chaleureuse pensée pour ses deux enfants qui bénéficiaient d’une éducation libre de tout complexe, recevant un amour positif et constructif...Ils étaient comme tous les autres, des enfants ouverts, joyeux de vivre, des enfants responsables, forts et dynamiques, des enfants aux sentiments puissants, droits, des enfants intègres, généreux et amicaux pour tous les leurs.

On leur enseignait l’amour de la Vie dès le sein ; on leur enseignait que toute la force dont ils avaient besoin pour affronter la Vie était en eux-mêmes, uniquement en eux-mêmes ; qu’ils pouvaient entièrement compter sur la communauté, mais jusqu’à une certaine limite. Leur destin vrai, unique, était dans leurs mains seules, et s’ils n´étaient pas capables de prendre soin de leur propre peau c’est qu’ils ne méritaient pas de vivre.

On leur enseignait que la Vie était un dur et noble combat fait de devoirs envers les siens. Ils savaient tous très tôt que Gaïa, leur mère à tous, n’acceptait que les êtres forts, car ce monde sera, existera que par la puissance de chacun, de son amour pour la Vie, de son don de soi, ou disparaîtra de nouveau.

Et la famille d’antan, pensa-t-elle horrifiée, avec ce couvercle étouffant sur l’individu, cette chape asphyxiante d’un faux-amour qui réduisait l’individu à une chose sclérosée, l’engluant dans une mélasse siropeuse de conformisme incapacitant et bien souvent létal...Marion frémit à la pensée de ce concept débile, criminel même.

Elle avait lu quelque part que la société disparue avait été fondée sur ce principe, cette idéologie plutôt. Il y avait bien eut au départ de l’humanité, une tendance, un instinct animal à s’accoupler en gardant cette dualité comme base elémentaire à la survie et la reproduction de l’espèce, puis avec le temps, beaucoup de temps, pensa-t-elle, cette humanité récente devint un jour pensante, réfléchie ; elle allait ainsi logiquement pouvoir se libérer de ses anciens concepts surannés mais...un jour, un jour sinistre pour cette humanité naissante, des plus malins, des plus vicieux plutôt, dit-elle tout haut écoeurée, inventèrent cette idée de divinités, soi-disant indispensables au bonheur des hommes...

Les faibles, soit la plupart des gens de ces populaces complètement ahuries avaient besoin sans cesse de se raccrocher à un support quelconque, mais surtout le plus illusoire possible. Ainsi, étant quasiment certains de l’échec, donc de rester à croupir dans leur fange, ils pouvaient ainsi se vautrer comme des porcs bien nourris dans leur nullité, veulerie, lâcheté et suffisance la plus totale et la plus éhontée, car ainsi ils ne se distinguaient pas de cette masse malléable, glaireuse et réconfortante de cette humanité vérolée qui grouillait et polluait

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cette planète pourtant si belle et qui ne méritait pas une telle chape de merde. Futur guano pour autre civilisation ?

Je fais confiance à ce pouvoir mystérieux de ce que l’on nomme la Nature, pensa-t-elle, pour, quand cela lui sera nécessaire à sa survie, si besoin de nouveau, qu’elle s’ébroue et fasse crever cette vermine qui éventuellement la défigurerait. L’homme d’alors, dans son infinie et dérisoire illusion de lui-même, ne percevait pas, et c’est logique, que la Vie dans son immensité nous montre sans cesse son pouvoir de se régénérer par la destruction des choses et des êtres. Actions indispensables avant toutes créations.

Qu’en serait-il de la rose sans le fumier, et du beau sans son contraire ? Ils avaient oublié que le concept de croyance en un dieu forcément insensé ou

pour le moins hypothétique, porte en lui le risque de désespoir quasi systématique, puisque l’homme a la plupart du temps le sentiment justifié d’être abandonné, tandis que la foi en soi-même ne laisse aucune place à l’attente d’une soi-disant aide extérieure, il se suffit donc à lui-même. L’Homme ainsi s’en fortifie sans cesse.

Marion se souvint de ses lectures et ainsi du sentiment d’un grand penseur grec, dont personne ne peut douter de la justesse de son jugement universel. J’ai nommée, dit-elle fièrement à haute voix et avec affirmation, Épicure, 341-270 avant l’autre ère. Epicure, qui fut l’iniciateur de l’un des courants majeurs de la pensée antique. Voici ce qu’il en disait, ceci avant la venue de ces religions monothéistes ; on ne peut donc le soupçonner d’athéisme primaire comme en avaient coutume de le faire ces religions totalitaires envers les non-croyants ; voici donc sa pensée:

« Le mal existe, donc de deux choses l’une, ou Dieu le sait ou il l’ignore. Dieu sait que le mal existe, il peut donc le supprimer mais il ne veut pas...un tel Dieu serait

cruel et pervers, donc inadmissible. Dieu sait que le mal existe, il veut le supprimer mais il ne peut le faire...un tel Dieu serait impuissant, donc inadmissible. Dieu ne sait pas que le mal existe...un tel Dieu serait aveugle et ignorant, donc inadmissible. »

Donc, dit-elle clair et fort en riant. Débrouillez-vous avec ça et tirez la chasse d’eau !

Et c’est depuis, que l’humanité ancienne régressa dramatiquement, s’en était fini de ses espoirs, espérances grandioses ; son mental fut irrémédiablement bloqué, destructuré, pollué par ces personnages, ces prêtres de ces religions qui pour s’enrichir à leur dépend développèrent, imposèrent comme standard ce concept de famille, le seul capable de maintenir les individus prisonniers de leurs hiérarchies, car alors retenus captifs dans une unité restrictive et castratrice. Le noyau familial avec son chef mâle, renvoyant outrageusement la femme dans les limbes de la Vie. Famille devenant la cellule, une loge au service de ces organisations religieuses maîtres des corps et des âmes, pour toujours plus les enrichir.

En fait, en ces temps révolus, ces religions étaient les maîtres du monde.

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Marion frissonna à l’idée d’une telle monstruosité. Comment ces gens pouvaient-ils supporter une telle infamie ? se dit-elle scandalisée ; comment peut-on en arriver à un tel degré de renoncement à soi, à la Vie ? c’est inconcevable, sauf si on retient l’idée qu’ils étaient tous manipulés depuis d’innombrables siècles, victimes d’un gigantesque lavage de cerveau à l’échelle planétaire. Une telle horreur valait sans peine la comparaison avec celle de sa vie passée dans ces camps de malheur...puis, réflection faite, elle réalisa que elle, Marion, depuis son enfance y avait été retenue prisonnière de force, et que malgré cette entrave à aller et faire ce qu’elle voulait, cela ne l’avait aucunement empêché de garder son libre arbitre et sa pensée intacte, toujours. Elle valait donc mille fois mieux que tous ces gens disparus dans la pire abjection, celle de leurs propre renoncement à la Vie pourtant sacrée.

Ah ça ! se dit-elle, réconfortée et fière, en cela seul ils méritaient parfaitement bien de crever et en prime le mépris de toute leur communauté actuelle. C’était cet unique sentiment qui leur revenait de plein droit. Tant mieux, s’écria-t-elle ravie, au moins ils nous ont laissé la place pour notre nouvelle société qui mérite cent fois mieux de peupler Gaïa, notre mère vénérée...

Elle se recueillit un moment et dit doucement, le regard empreint d’une joie et d’un amour intense...Je taime, ma Gaïa, ma mère bien aimée, nous sommes tes fils et filles qui prenons soin de toi ; fasse que ta beauté illumine à jamais les espaces stellaires et que notre ami le Soleil nous rechauffe de ses rayons d’or et te féconde dans la plus parfaite exubérance, et que sa force nous régénère dans la joie de la Vie. Que les forces du Grand Univers vous protègent.

Quelle expérience fabuleuse que de flemmarder, se dit-elle en s’étirant de

nouveau dans sa semi-rêverie. Elle regarda nonchalamment son petit univers intime de sa chambre, petite mais douillette, et qu’elle adorait. Quel luxe, pensa-t-elle, après ce dortoir sordide du camp, elle frissonna à ce souvenir immonde. Ici c’est mon chez-moi, mon petit domaine intime, luxe qu’elle n’avait pensé pouvoir bénéficier avant...ni même tout simplement imaginé. Comme la majorité des chambres de la station elle était constituée de matériaux récupérés dans les villes, par des équipes qui à la longue s’étaient spécialisées dans ce travail ; travail d’une importance vitale pour la vie de la station, mais qu’est-ce qui n’était pas vital pour eux tous ?

Il leur fallait être expert dans la connaissance et l’utilisation possible de chaque type de matériaux ou appareils qu’ils découvraient. Pour ça ces gars buchaient dur sur les disques vidéos pour intégrer ces connaissances techniques indispensables pour une récup optimale ; pour aussi éviter des accidents avec des machines plus ou moins bien connues...Comme toujours dans ces cas-là, l’expérience, l’instinct faisait la différence d’avec une bleusaille ; comme mézigue, pensa-t-elle en souriant.

Son carré, comme ils appelaient leurs chambres, de trois mètres trente sur trois environ, était constitué d’un plancher en bois fait de planches épaisses fixées sur un soutènement en parpaings, l’ensemble isolé du sol de quinze centimètres pour éviter l’humidité ambiante de la grotte. Une charpente légère en tubes

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d’aluminium ou en plastique au dessus légèrement pentu, supportait une tente en toile forte, aux parois doubles ; celle de l’intérieur étant aluminisée, retenant ainsi la chaleur à l’intérieur. Il suffisait alors avant de dormir d’y allumer une simple bougie pour y maintenir une douce température des plus confortable, surtout, pensa-t-elle en se pelotonnant dans ses couvertures, quand on devait passer la soirée à faire l’amour avec un beau mâle, rêva-t-elle en souriant.

L’éclairage était fournit par deux petits tubes au néon. Presque tous maintenant avaient une petite console pour écouter de la musique. Elle avait décoré sa chambre de quelques photos de l’ancien temps, certaines montrant des vues de bateaux, la mer...cette immensité liquide qui la fascinait littéralement...

Sa richesse était constituée de son lit double, en fait un matelas posé sur un simple châlit et quatre parpaings ; une chaises, une petite table en bois, un miroir pendu à une ficelle...et son petit coffre dans un coin, son trésor véritable, celui où elle rangeait ses richesses : trois robes longues et ces délicieux sous-vêtements ; deux pantalons de travail et deux blouses ; quatre pulls ; quatre paires de chaussettes épaisses et deux combinaisons de combat avec les chaussures de brousse, plus deux paires de chaussures pour l’intérieur de la station, et sa paire d’espadrile pour son carré, et son ratelier avec ses armes...Ah ! et mes bijoux, se rappela Marion, ceux en premier donnés par Pédro, qu’elle gardait religieusement, de même que quelques babioles offertes au début par Joana, à son arrivée.

Joana...sa douce Joana, une pensée chaude baigna son esprit au souvenir de celle qui l’avait si chaleureusement initiée à la vie de la station...Elle regarda ses mains parfaitement soignées, aux ongles courts et impeccables, comme toutes ses consoeurs, comme le lui avait apprise à le faire Joana, aussi. Une larme coula subitement sur sa joue, Joana n’était plus parmi eux...son amie, qu’elle était devenue dès ce premier jour. Il y avait trois mois maintenant, Joana avait été tuée par un taureau sauvage en allant remplacer un berger. La bête l’avait surprise au détour d’un bosquet. Ils la retrouvèrent deux heures après, son corps disloqué, avec d’horribles et nombreuses blessures, le fauve semblait avoir joué avec son corps comme avec une poupée de chiffon.

Joana, la belle brunette, comme disait Vladi, qui comme tous souffrait de cette disparition brutale et stupide. Mais tel était leur présent, leur univers était constitué d’un danger permanent. Un an avant, dans une autre communauté, un adolescent avait été tué puis dévoré par un ours...Joana, sa douce amie, naviguait maintenant dans les étoiles au-dessus de sa tête, vers qui elle envoya une pensée d’amour pour celle disparue, mais toujours présente dans le coeur de tous.

Son corps fut mis dans un sac mortuaire étanche, comme tous leurs morts, et de par l’impossibilité de creuser des fosses en terre, sous peine de détection des satellites, il fut stocké dans une grotte impropre à recevoir une communauté par manque d’eau douce ; chaque corps dans un sac étanche en plastique, récupérés par millions dans les stocks militaires. Grottes, aussi bien que dans cette ancienne champignionnière près de Tarbes, et dont on parlera prochainement.

Leurs morts étaient ainsi mis en réserve d’un jour meilleur, soit celui de leur victoire et de leur liberté, pour pouvoir alors ensevelir dignement tous ces morts

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par milliers. Chacun de ces tombeaux provisoires ont leurs entrées murées, avec une porte métallique et des grilles d’aération pour éliminer les gaz de décompositions des corps, qui étaient dûment identifiés ; les morts y étaient rapidement entreposés par des volontaires porteurs de masques respiratoires.

Une équipe de chasseur partit à la recherche de ce monstre, le taureau qui tua Joana ; animal qui représentait maintenant un grave danger permanent pour les communautés, car il semblait particulièrement vicieux. Ils l’abattirent à cinq kilomètres de la base, un taureau noir d’origine camarguaise. Il servit au moins à alimenter la communauté durant un bon temps. Dès l’origine de la catastrophe les nombreux animaux se trouvant libérés des hommes avaient proliféré ; et parmi ceux-ci on rencontrait maintenant jusque dans leur région pourtant éloignée de leurs terres d’origines, de ces taureaux de combat particulièrement agressifs.

La vie n’était pas simple, ça non, mais, pensa Marion toute fière, l’Homme nouveau, eux tous, ne se réalise que dans la difficulté, le danger décuple ses forces, sa robustesse et son ingéniosité. C’est pour cela que leur avenir est assuré, car ils ne reculent devant rien, jamais, et il ne peut qu’en être ainsi, leur vie spartiate est le garant de leurs force inébranlable...À l’opposé des autres avant, leur progrès illusoire les a tués, car il ramollit, le confort endort celui qui se laisse prendre à ce chant des sirènes...Ils crurent être arrivés au summum de leur civilisation et en définitive plus ils montaient dans ce rêves construit par leurs charlatans, plus ils creusaient leurs tombes, où ils chutèrent d’autant plus vite qu’ils étaient arrivés haut.

Pensant à ces fanfreluches, ses bijoux en toc, elle sourit, se rappelant sa joie quand Pédro lui avait passé le collier autour du cou, pour elle alors, ces bijoux représentaient un trésor inestimable. Mais elle n’était pas trop attirée par tout ça, c’était pas tellement son genre. Mon truc, se dit-elle, en serrant les poings, c’est le combat, sauver un maximum d’esclaves. Elle était folle de joie car elle allait partir pour sa première mission dans quatre jours.

Elles devaient recevoir leur propre perceur ces jours-ci, elle en était bouleversée de tant de bonheur. Elle allait au combat avec une hargne sans mesure, elle et son équipière, Céline, la psycho de cette équipe de nouveaux patrouilleurs. Depuis des mois elles s’entrainaient ensembles ; elles s’étaient découvertes des atomes crochus comme on disait ; Céline aussi avait été récupérée dans un camp et sa hargne ne devait en rien à la sienne. Elles étaient rapidement devenues de redoutables machine à tuer, une force intérieure irréductible les animait, et pourtant, elles étaient Femmes jusqu’au bout des ongles, belles, douces et amoureuses...quand c’était le moment.

Céline, est une belle jeune femme brune de trois ans plus âgée que Marion, presque aussi grande, mince, les cheveux et les yeux noirs avec une flamme de vie impressionnante quand elle était en rage. Pourtant, comme sa compagne, elle était d’une douceur remarquable et d’une gaité à toute épreuve. En réalité, c’était deux bombes vivantes que ces deux patrouilleurs, les gardes n’avaient qu’à faire gaffe à leurs os, se plaisaient-elles à répéter à tout bout de champ. En fait, se sont elles qui inaugurèrent les équipes de patrouilleurs entièrement feminines.

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Les Hommes et les Femmes se valaient en tout, dès lors rien n’importait plus que le résultat, peu importait qui en était responsable ; Femme ou Homme, c’était du pareil au même. Une seule chose était cruciale dans la formation d’une équipe de patrouilleurs, quelques soient leurs sexes : leur affinité réciproque indispensable, seule garantie d’une parfaite union dans l’action ; l’amour réciproque et véritable que l’on ressent profondément pour son équipier, est le meilleur moyen de cohésion totale, car générateur d’une confiance absolue indestructible. Seule, la mort pouvant l’annuler.

C’est la faim, ainsi que les besoins biologiques qui pour finir la tirèrent du

confort de ses draps. Elle se leva, mit une épaisse robe de chambre, prit sa serviette de bain, enfila ses espadrille et sortit pour aller prendre une douche au local commun le plus proche, les wc étant attenants. Elle y était la seule à cette heure inaccoutumée ; l’eau plus que tiède la réveilla tout à fait et elle termina sa douche express par une grande giclée d’eau glacée ; pratique qu’elle adorait car cela lui donnait une pêche terrible après coup. Elle se frictionna vigoureusement en chantonnant une ritournelle à la mode actuellement dans la station quand, la porte s’ouvrit à la volée et apparut Christian, un collègue de classe, qui tout excité, lui cria :

-Marion ! tu connais la nouvelle, ma poule ? -Non, mon poulet, répondit-elle en riant et le regardant étonnée, laquelle ? -Ils arrivent ce soir, dans une heure environ ! -Qui ça, ils ? dit-elle encore plus étonnée. -Oh pardon ! c’ que je peux être con aussi... -Mais non, mais non, va, rit-elle en se moquant affectueusement. -Oh ! t’as raison de te moquer de moi...Ils...c’est...il en bégayait presque ; trois

perceurs qui ramènent toute une équipe de rescapés, des esclaves, il y en a près d’une vingtaine parait-il, tu te rends compte, Marion, ma belle ? vingt personnes de sauvées d’un seul coup, c’est...

Elle n’entendait plus ce qu’il disait, elle le regardait comme dans un brouillard, ahurie...son geste de s’essuyer le dos, bloqué, tenant la serviette aux deux bouts, les bras en travers en diagonale...et elle restait là, ces paroles faisaient un fond sonore, mais elle n’y comprenait plus rien...VINGT...VINGT...seul ce chiffre l’aveuglait, VINGT ; cela signifiait VINGT malheureux sortis des griffes de ces monstres, VINGT Vies nouvelles qui allaient éclorent, VINGT soleils nouveaux dans cette station et les autres, car ils allaient devoir les répartir dans les autres pour réduire le danger d’une attaque ou autre...VINGT...VINGT...

Elle sentit que quelqu’un la remuait fortement par les épaules, c’était Christian qui lui criait sa joie de cette nouvelle, puis elle sentit les larmes couler sur ses joues, car elle pleurait à chaud de larmes...tant de bonheur, tant d’émotion, de joie...elle sauta au cou de Christian et le serra fortement contre elle, à l’étouffer...ils s’embrassèrent en riants et pleurants tous les deux pour finir.

-Je t’avais vu rentrer dans les douches, Marion...toute la station est en folie, le Conseil vient de l’annoncer à l’instant.

-Qu’elles sont les équipes de patrouilleurs qui les ramènent ?

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-Ecoute, chérie, le mieux est que tu ailles t’habiller de suite, car... -T’as raison, dit-elle en agrippant son peignoir au vol, puis elle partit en

courant, nue. -Fais gaffe à pas te casser la gueule, Marion, c’est pas le moment ! lui cria

Christian depuis la porte ouverte. Elle courait là-bas, lui répondant par un geste fataliste du bras ; personne

n’aurait pu l’arrêter. Arrivée dans son carré elle s’apprêta rapidement, se coiffa rapidement comme

à son habitude avec les doigts dans ses cheveux courts, puis enfila une combinaison de patrouilleur neuve, chaussa les chaussures de brousse neuves, puis épingla sur le devant de sa combinaison, à hauteur du sein gauche, l’insigne réglementaire comportant la photo de son portrait, son nom, l’année approximative de naissance et le nom de la station : Station Bertrand. Cette mesure avait été instituée, d’abord pour faciliter la reconnaissance de chacun de leur communauté, avec les fréquents nouveaux venus, esclaves ou autres, puis et surtout, lors des échanges avec les visiteurs des autres stations ; pratique de sécurité élémentaire devenue coutumière : savoir qui était qui, et d’où venait-il.

Elle sortit, fébrile, et se joignit aux groupes qui remontaient de leur deuxième niveau, se dirigeant par la rampe aménagée à l’entrée de la grotte. Un jeune et grand gars dans la trentaine, genre beau tombeur de coeurs tendres, les yeux noisettes et les cheveux chatains, la rattrapa en courant et lui dit en riant, tout excité lui aussi, en lui passant un bras autour du cou.

-Je suis certain que tous les habitants de la station seront là, pour l’arrivée de nos héros, tu paries ma belle ?

Ils s’embrassèrent tendrement sur les lèvres, puis continuèrent de suivre la foule grossissante au fur et à mesure qu’ils avançaient.

-Non, pas si folle, Guillaume, et d’abord, tu voudrais parier sur quoi, sur mon collier en toc ? dit-elle en riant.

-Non, une nuit avec toi me suffirait amplement. -C’est vrai qu’il y a longtemps que tu ne m’as pas fait une petite visite de

courtoisie, Guillaume, tu me négliges, mon chéri, c’est pas sympa ça, fit-elle faussement boudeuse.

-Oh ! m’en veux pas ma chérie, mais en ce moment je suis dingue pour la Ginette, cette rouquine d’enfer...elle me rend dingo, parole.

-Ginette...Ginette, qui c’est celle-là, cette furie ? -Mais oui, tu la connais pourtant, dit-il en riant, elle travaille parfois au

blanchissage avec ton amie, la Claudia. -Ah oui ! j’y suis ; dis-donc, c’est un beau morceau que ta Ginette...je

comprends maintenant pourquoi tu te fais rare. -Oh, tu sais...ça me passera... -Pas la peine de parier, mon beau, dit-elle en lui passant le bras sous le sien,

viens faire toc-toc-toc à ma porte quand tu veux, et la propriétaire des lieux te tombera toute rôtie dans les bras, ça te convient comme ça, mon mignon ?

-Putain, ma belle, avec un canon comme toi, faudrait être une vraie langouste pour ne pas accepter l’invite, s’esclaffa-t-il en riant aux éclats, et...t’as un soir de

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préférence, ma jolie patrouilleuse ? au fait, félicitations pour ton diplôme, Céline avec, embrasse la fort de ma part...La vache ! je plainds les pauvres mecs qui vont tomber sur deux furies comme vous deux.

-Merci pour les deux furies...mais nous sommes douces comme des cailles...et nous partons justement dans quelques jours...

-Super ! Un équipage de plus à la rescousse. -Ouais ! et tu connais la maison, en principe je ne reçois pas sur rendez-vous,

c’est le premier arrivé qui est servi... Guillaume lui pinça la taille en lui faisant un sourire charmeur...elle se colla

contre lui. -Alors, je t’attends ce soir, ok ? ça tombe bien, je suis en manque d’affection

ces jours-ci, avec le boulot que nous avons eu, avec Céline...pas eu le temps de penser à la bagatelle...et je me sens prête pour un match au finish...si tu penses être à la hauteur, et que ça te convienne...

-Impec, ma caille, j’ai justement une réserve d’énergie de dispo moi aussi... -Oh ! chouette alors ! Ils arrivèrent ainsi près de la plate-forme des perceurs où il y avait foule,

comme jamais la grotte n’en vit de même en un seul jour. Le Conseil des sages les avait bien possédé en cachant la nouvelle jusqu’au dernier moment ; mais bien obligé qu’il en soit ainsi, tant qu’ils n’étaient pas certain de leur arrivée imminente...tant de dangers les guettaient là dehors ; à cette pensée Marion en frémit imperceptiblement. Elle se faufila difficilement vers la plate-forme surélevée et miraculeusement prévue pour trois perceurs, « Et pas un canasson de plus », selon l’expression consacrée...Elle arriva enfin pas trop loin du groupe des douze du Conseil des Sages, là haut, et en faisant de grands gestes parvint à grand peine à attirer l’attention de Madeleine, l’une des sages ; mains en porte-voix elle lui cria, dans ce vacarme assourdissant des conversations.

-Madeleine ! Madeleine ! Quels sont les patrouilleurs qui les ramènent ? L’interpelée la regarda en bas en souriant et mit un doigt sur ses lèvres, puis lui

cria, les mains en porte-voix autour de sa bouche. -Observe bien l’équipage du premier perceur qui va entrer ! lui cria-t-elle en lui

souriant chaleureusement et lui faisant un clin d’oeil complice. Sur ces paroles, la lumière s’éteignit, ne laissant que de petits voyants lumineux

bleus au ras du sol. Un grand silence s’instaura instantanément quand la grande porte de l’entrée commença à glisser sur ses rails jusqu’à libérer totalement l’entrée. De l’intérieur on percevait maintenant une très faible clarté, celle de la lumière stellaire...Les centaines de poitrines de ces Hommes et de ces Femmes respiraient avec lenteur..Puis, une ombre occulta cette lumière astrale, un souffle léger, presque imperceptible les parcouru, celui de l’air déplacé par un premier perceur...puis un deuxième...puis le troisième perceur se posa comme une plume sur la plate-forme...les très légers murmures de leurs systèmes de propulsion s’estompèrent...un long soupir parcouru la foule...Ça n’en finissait plus, vite, pensaient ces centaines de gens...La porte se referma avec une lenteur exaspérante...et enfin, le soulagement quand une violente lumière illumina l’espace, et les portes des perceurs basculèrent...et les équipages apparurent, et

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ce fut un délire total dans la grotte, une folie s’empara de tous ; ils criaient, dansaient, pleuraient, riaient, sautaient sur place ; c’était du jamais vu pour tous des anciens esclaves pour beaucoup d’entre eux.

Marion surveillait le sas du premier perceur, et comme elle s’en doutait bien depuis un moment, elle vit Pédro, suivit de Vladi, descendre les quatre marches...Pédro l’aperçut dans la foule à leurs pieds, et lui envoya un baiser avec les doigts, puis il fit du coude à Vlad, lui montrant une Marion en larmes et riante de bonheur, ils se sourirent tous deux.

Puis à partir de cet instant, mais après un long moment d’applaudissements pour leurs héros, un grand silence s’établit pour la descente des rescapés. Ils apparurent timidement, chancelants, éberlués de découvrir cette foule, découvrir également la splendeur de la grotte...Beaucoup de spectateurs avaient en leur temps subit ce même choc après leurs libérations, ils savaient ainsi quel maelström assaillait leurs têtes fragiles. Ces pauvres malheureux se soutenaient les uns les autres, hâves...tremblants...

Georges, le sage des sages, avec son calme et son allure douce et magistrale coutumière, qui est un Homme de haute stature, mince, les cheveux blancs et encore fournis, les yeux noirs et pénétrants ; il se dégage de sa personne une prestance naturelle et autorité discrète mais ferme ; il fit un pas à l’avant du groupe des sages, à cinq mètres des arrivants ; ces rescapés de l’enfer, qui s’étaient regroupés en un bloc compact...grégarisme habituel du camp, et ils regardaient ce vieil homme plein de noblesse, le souffle en suspend ; ils sentaient tous d’instinct que les paroles qu’allaient prononcer cet homme digne, allaient avoir une importance cruciale pour leurs vies futures.

Puis, Georges parla enfin, de sa chaude voix grave et posée, au rythne lent et imposant, seigneural...

-Mes amis, vous tous, dit-il en les montrant lentement d’un geste large, nous sommes tous infiniment heureux de vous accueillir parmi nous. Je m’appelle Georges, j’ai été désigné par tous mes compagnons et compagnes pour...

Il leur fit le discours habituel de bienvenue. Et comme à l’accoutumée, aucun d’entre eux n’étant capable de prononcer un

seul mot...Au bout d’un moment ce fut Pédro qui d’autorité prit la parole, il s’avança, prit dans sa main celle d’une femme tremblante comme une feuille et fit son petit discours devenu maintenant habituel, la foule riant avec plaisir de le voir commencer. Quand il eut fini, et que chacun des arrivants hochèrent la tête, marquant ainsi leurs acceptations des règles, une immense ovations les acclama et les personnes chargés de les guider s’avancèrent vers eux...

Marion, profondément troublée, savait qu’à dater de cet instant chacun entrait dans un rêve dans lequel il avançait les yeux grands ouverts ; découvrant à chaque pas, à chaque seconde, des visages inconnus qui tous leurs souriaient, des visages où l’amour rayonnait comme un astre divin...Ils avançaient dans un autre univers, ébahis, émerveillés...certains chancelaient de tant de félicité...

-Marion, ma belle, te souviens-tu quand on t’a trouvé ? Vladi venait de sauter de la plate-forme à ses pieds et la prit dans ses bras

robustes. Ils s’embrassèrent très fort, se serrant l’un contre l’autre...

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-Ah ! Marion ! j’ai tremblé durant tout ce voyage de retour, qu’il n’arrive rien de facheux ; enfin, nous voilà.

Et il lui résuma leur extraordinaire aventure ; ce coup de chance fabuleux, grâce à Georgios, ce garde ; il le lui montra ce dernier sur la plate-forme, qui regardait émerveillé de tous les côtés son nouvel univers.

-Et Pédro, il va bien ? demanda-t-elle. -Impec, mais il doit être crevé le pauvre gars, avec tous ces gens à s’occuper,

c’est pas rien, mais en réalité, les trois équipages sommes sur les rotules, nous avons tous besoin d’une longue nuit de sommeil, crois-moi ; bientôt trois jours sur la brèche, ça use...et je te parles pas des rescapés, ces pauvres gens, t’as vu comme ils sont maigres.

-C’est ce que j’ai remarqué en premier...les pauvres...quels immondes salauds ces...Mais on va les requinquer vite fait, tu vas voir ça, Vladi, juré ; on va les gaver comme des oies !

-Ouais, je sais, dans une semaine ils seront pour la plupart méconnaissables, et tant mieux car du boulot les attend.

-Oh ! faut les laisser récupérer, non ? s’écria-t-elle scandalisée, elle lui donna une bourrade amicale, bourreau, va !

-Bon, je te laisse, Marion, je vais dormir... -Oh ! à propos d’oies, si vous avez faim, allez à la cantine d’Angèle, parait-il

qu’ils en ont et que c’est un délice, vous allez vous régaler. -Merci chérie, mais j’ai déjà mangé dans le perceur, mais franchement, j’ai plus

envie que de ça maintenant, DOR-MIR ! Tchao, chérie, à demain, et il l’embrassa affectueusement d’un baiser sur les lèvres et partit, mais elle le reteint par la manche et lui dit toute fière.

-Vladi...ça y est, j’ai mon diplôme de patrouilleur, avec Céline. Il la prit dans ses bras, la serra fort contre lui à l’étouffer de joie et la fit

virevolter en riant aux éclats... -Bienvenue parmi les Combattants de l’enfer, mon ange doré...Vous êtes déjà

la plus belle équipe de patrou...il hésita...illeurs, ou illeuses ? au fait, hein ? -Patrouilleurs aussi, Vlad, crois-moi, parce que si nous coinçons un de ces

putains de gardes, il sera aussi mal en point que si c’était des jules qui l’avaient rétamé, dit-elle en riant, les yeux brillants d’une flamme mortelle.

-Ça je te crois sur parole, ma beauté fatale...Bon, je vais dormir, j’en peux vraiment plus...on arrosera votre promo demain tous ensemble, préviens Céline et embrasse la pour moi, cette douce caille...fatale aussi, rit-il, tchao, ma belle ! et il partit pour de bon cette fois.

-Dors bien mon grand, tu l’a pas volé, à demain, lui cria Marion, le regardant partir...grande carcasse faite de muscles puissants, au milieu de cette foule égayée.

Marion hésita un instant, au milieu de cette masse inusité de tant de gens à la fois, c’était de jamais vu dans cette grotte. Mais elle n’avait pas envie de se méler à cette allégresse générale. Elle repartit vers son chez-soi puis, passant devant la cantine du secteur, celle d’Angèle, qu’elle préférait ; l’odeur de viande rôtie lui déclencha une fringale pas piquée des vers ; fringale que tous ces événements lui

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avaient fait oublier, mais son estomac lui, venait de la tirer par la manche. Elle entra, prit un ensemble plateau, assiette et couverts récupérés par milliers dans ces anciens supermarchés...vendant alors cette alimentation frelatée à ces populaces dégénérées, ainsi, l’un justifiant l’autre...tout un programme d’horreur, pensa-t-elle. Mais, fallait reconnaître que ces ensembles tombaient à merveille dans cette société en gestation rapide aussi, rit-elle, fière de leur société de combattants irréductibles et fiers...ces enfants merveilleux de Gaïa, la splendeur des espaces stellaires, se dit-elle émue.

Elle fit un petit bonjour de la main la serveuse occupée plus loin, se servit en entrée une salade de patates à la mayonnaise, qu’elle adorait. «Excellent pour ta ligne, ma fille, la mayonnaise », se maugréa-t-elle en riant et se palpant la taille à hauteur de la hanche puis, haussant les épaules avec fatalisme elle choisit une bonne portion de volaille rôtie avec de la purée de patates mélangée avec de la carotte et du potiron, le tout avec leur beurre et lait onctueux de leurs troupeaux, l’ensemble relevé à la noix de muscade. Elle héla la serveuse.

-Lucie, comment vas-tu, chérie ? c’est quoi cette volaille rôtie, c’est de l’oie ? -Ça va bien, Marion, merci, oui c’est de l’oie, les gens viennent même du

secteur 5 pour en manger, profite-en vite car ça va pas durer longtemps à ce rythme, elle est délicieuse. Oh ! à propos, j’en profite pour te féliciter pour ton diplôme, bravo, embrasse Céline pour moi aussi, d’accord ?

-D’accord et merci, mais tu sais, c’est un boulot comme un autre, pas plus. -Mon oeil, moi, personne ne va tenter de m’attaquer pour me faire la peau,

comme dans votre boulot d’enfer. -Et c’est très bien ainsi, Lucie, sois en heureuse, parce que ce ne sont pas les

morts qui feront avancer notre toutim, mais bien les vivants...T’es à combien d’accoucher maintenant ? j’ai l’impression que ça va pas tarder, hein ?

-Plus ou moins une quinzaine maintenant, je suis heureuse comme tout, en plus à chaque fois j’ai du lait pour un régiment de ces p’tits bouts d’ choux, dit-elle en soulevant ses énormes mamelles déjà gonflées ; je les allaite par fournée de trois, tu te rends compte, Marion, c’est super, non ?

-Formidable, oui, moi j’ai pas eu cette chance...pas beaucoup de lait...quoique dans mon job maintenant je n’aurais guère le temps de les allaiter, alors...la nature fait bien les choses faut croire...Bon, j’y vais, j’ai faim et je suis crevée, avec toutes ces émotions de cette arrivée de ce groupe, je suis folle de bonheur pour tous ces gens. Lucie, tchao, si je te revois pas avant ton accouchement, je te souhaite le meilleur pour toi et ton mioche.

Marion partit en prenant au passage dans un compotier, trois pommes vertes un peu acides comme elle les aimait, deux verres, puis une grande bouteille d’eau fraîche quelle mit ensuite dans un long tube isothermique en polystyrène, avec un couvercle de même structure. Une fois dehors elle se sentit toute drôle, comme prise de douces langueurs...puis, apercevant une amie qui passait, elle la héla.

-Ho ! Germaine, tu descends ? Celle-ci approcha en hochant la tête ; elles s’embrassèrent.

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-Salut ma belle, félicitations pour votre nouvelle équipe de patrouilleurs, toi et Céline, elle va bien ?

-Oui, merci. Dis-moi, puisque tu descends vers l’autre niveau, rends-moi un service ; essaye de trouver Guillaume et dis lui que je l’attends de suite, s’il peut...tu le connais ?

-Si je le connais ? s’esclaffa cette dernière, mais qui ne connait pas le beau Guillaume, hein ? tu charries ma belle, c’est un de ces coqs qui s’envoit régulièrement tout la volaille de cette station ; et elles en roucoulent comme des folles...à commencer par mézigue, alors tu vois.

-Oui, je sais bien...mais sois gentille, dis lui de venir vite, hein ? -Oh ! ho ! je sens que tu vas roucouler à ton tour dans pas longtemps, ma

chérie...J’y cours, Marion ma belle, avant que tu ne tombes en pâmoison...ça urge, tchao ! Et elle partit en courant et en riant comme une folle.

Marion sourit, haussa les épaules et continua vers son carré. Une fois entrée elle alluma la lumière puis une grosse bougie puis, hésitant un moment, elle en alluma une seconde...Quand Guillaume arrivera la température sera au poil, se pensa-t-elle en souriant...toute allanguie déjà.

Elle mit une cartouche holo-music, de musique douce dans sa petite console à l’écran de 60 cm de haut et 30 cm de diamètre, coupa l’image puis régla le son stéréo assez bas ; elle avait pu en obtenir récemment deux nouvelles cartouches, chacune d’une durée de 28 heures ; cartouches qu’ils s’échangeaient régulièrement entre eux tous...comme quasiment tout, et à commencer par nous-même, sourit-elle. Elle se changea, mis une robe pas trop chaude, s’installa à sa table et attaqua son repas avec une faim de loup.

L’oie était effectivement délicieuse ; j’aurai dû en prendre davantage, dit-elle tout haut. Elle croqua une pomme, but un grand verre d’eau fraîche puis pour finir rangea l’assiette sale et le couvert dans un petit coffret spécial en bois réservé à cet effet, et qui fermait hermétiquement pour ne pas que les odeurs incommodent ; ce jusqu’au lendemain où elle ramènera l’ensemble à la cantine.

Puis elle s’allongea et se détendit en attendant, espérant le beau Guillaume, le roi du poulailler, rit-elle.

Elle se réveilla en sursaut, on battait à sa porte. Elle se leva, ouvrit et vit Guillaume qui battait encore avec son doigt replié sur une porte imaginaire, disant toc, toc, toc, c’est-y qu’y a de la volaille dans c’te turne ? s’esclaffa-t-il. Elle l’agrippa par le col et le tira rapidement à l’intérieur, claqua la porte du talon et l’embrassa fougueusement sur la bouche tout en le renversant sur le lit...puis, il se relevèrent pour se déshabiller entièrement ; mais, au moment de se mettre au lit de nouveau, Marion le reteint par le bras et lui dit.

-Attends, dit-elle en riant, tu va voir...encore une petite chose à faire pour être tranquillles. Elle sortit de son coffre un petit panneau en carton blanc avec une ficelle fixée à deux bouts opposés, elle lui fit lire, et Guillaume éclata de rire à gorge déployée.

-Et tu vas mettre ça à ta porte ? dit-il sidéré.

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-Un peu oui, répondit-elle sûre d’elle ; elle ouvrit celle-ci et accrocha le panneau à la poignée. On pouvait y lire, écrit en grandes lettres majuscules au feutre noir : DÉRANGEZ PAS, ON BAISE !

C’était la nouvelle mode depuis qu’une équipe de farceurs avaient ramené de ces panneaux utilisés anciennement dans les hôtels, mais sur lesquels on ne lisait alors que quelques phrases utiles du genre « Ne pas déranger », « Occupé », etc. Puis, comme il n’y avait pas assez d’originaux pour tous, chacun s’était fabriqué le, ou les siens, exprimant l’état d’esprit d’un moment de son propriétaire. Ces messages avaient vite pris des tournures les plus abracadabrantes et des plus...impertinentes, pour le moins qu’on pouvait en juger de voir celui de Marion. Les passants rigolaient de voir ces messages insolites, mais en définitive bien représentatifs de la liberté de chacun et de l’humour propre à leur société ; au final ils en étaient tous fiers.

Riants aux éclats, suite à ce panneau, ils s’écroulèrent enlacés sur le lit puis, Guillaume la serrant dans ses bras, s’écria joyeux : 1er Round ! Et ils s’enfoncèrent dans le plaisir charnel, jusqu’à n’en plus pouvoir respirer de tant de jouissances.

Ils étaient remontés de ce gouffre sans fond, qui seul engloutit les amants effrénés...Les deux étaient allongés sur le côté ; Guillaume, la tête appuyée sur sa main droite, le coude replié sur le lit, regardant tendrement Marion, lui caressant lentement l’épaule et le cou, ils étaient en nage. Il se leva pour éteindre les bougies et ouvrir deux petits volets en toiles occultants deux petites fenêtres avec des moustiquaires, car les grottes étaient farcies de bestioles des plus indésirables, comme des araignées, scorpions, insectes et cloportes rampants et grimpants. Il regarda Marion en riant.

-C’est dingue la chaleur qu’il fait dans ces baraques dès qu’on baisouille un brin, tu trouves pas ?

-Oui, di-elle, en riant franchement, elle lui tendit les bras, viens vite dans mes bras, chéri.

Il se recoucha contre elle, qui le serra amoureusement...Un moment, puis il se dégagea doucement et, la tête de nouveau appuyée sur sa main droite, lui dit en lui caressant doucement une paupière encore gonflée.

-Je vois qu’on a encore pleuré, hein, ma douce ? -Tu vois toujours tout toi, Guillaume, dit-elle agacée...Oui, dit-elle en se

frottant lentement la paupière de l’autre oeil...c’est de voir ces pauvres gens libérés, ce soir...à chaque fois qu’il y a du bonheur dans l’air ça loupe pas, me voilà partie à chialer. C’est ridicule, ça m’énerve, si tu savais...Moi, la future terreur des gardes, soi-disant, qui suis capable de saigner une douzaine de ces salauds en rigolant, me voilà effrondrée par un peu de joie collective, c’est ridicule, je me foutrais des baffes si je pouvais, voilà ; lui dit-elle avec rage.

-Marion, mon amour, dit-il en l’embrassant doucement sur la joue...faut pas dire ça, c’est pour ça qu’on t’aime justement, tu ne comprends pas ?

Elle fit non de la tête, le regardant étonnée. -Parce que tu es si forte justement, tu es un être puissant, c’est ta nature

profonde et tu n’y peux rien. Suis ta nature de Femme de combat que tu es née

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pour être...en contrepartie justement, la nature est bien faite, crois-moi, elle t’a doté de ce don extraordinaire de sensibilitée qui te rend si proche et si sensible au bien-être des tiens. Seuls, les êtres forts et intègres sont capables de mener de front ces deux attitudes apparemment contradictoires ; elles se complètent en fait, apportent un équilibre essentiel à ceux dont le devoir est de côtoyer ces deux extrèmes : tuer en souriant, et aimer en pleurant. Tu es, Marion, un être si exceptionnel que tu ne te connais pas toi-même. Tu es le bloc de granit indestructible aux batailles les plus violentes, et tu craques à cause d’une simple petite goutte d’eau d’amour qui s’est infiltrée en toi et qui gèle...Je t’aime, Marion, comme tous t’aimons, je t’aime comme tu es, avec ta force et tes faiblesses, car ce sont ces dernières qui font de toi une Femme digne de cette nouvelle Humanité.

Reste toujours telle que tu es, Marion chérie, car ton intransigeance au combat, tes rires et tes pleurs réconfortent, soutiennent tes frères et soeurs dans l’adversité...L’Homme ne peut se réaliser sans ces sentiments, sinon c’est une bête ou une abjection vivante comme le furent ces populaces d’antan, où seul le superflu et le rire étaient de mise, bien vu, pour officialiser leur soi-disant bonheur factice de leur société corrompue jusqu’à l’os ; du reste, et c’est tant mieux, ils en sont tous crevés ; qu’ils pourrissent dans leur enfer aussi débile qu’eux. Voilà, Marion...comme je vois et sens les choses, reste toi-même et tu rendras les tiens heureux, c’est aussi simple que ça.

Elle se serra contre lui, enfin réconfortée par ces paroles appaisantes. Elle avait une grande confiance en Guillaume, c’était un être sensible aussi, il comprenait les autres, c’est pour ça qu’il était reputé pour être un des meilleurs psycho, avec son pilote, Françoise ; ils formaient à tous deux une redoutable équipe de choc, remportant de nombreux succès de rescapés sauvés.

-Guillaume, lui dit-elle dans un murmure, je t’aime beaucoup aussi...merci pour m’avoir fait ouvrir les yeux...j’avais pas pensé de voir les choses sous cet angle. J’aime beaucoup parler avec toi, tu comprends toujours tout...surtout nous les Femmes, alors que les autres disent que nous sommes incompréhensibles, merci.

-C’est rien, ma belle...Je change de sujet. Sais-tu qu’un ancien à revendiqué son droit d’être libéré ?

-Guillaume, non, qui ça ? s’écria-t-elle peinée, la main devant sa bouche... -En fait, cela a déjà eut lieu hier, c’est...ou plutôt, c’était Ferdinand, notre prof

des Sciences de la Vie. -Oooh ! je l’aimais bien, il était si doux, et si savant, il m’a apprit énormément

de choses, comme à tous ses élèves...c’est une grande perte pour nous tous... -Oui, ce vieux Ferdinand, dit-il attristé ; nous étions amis depuis mon enfance.

Je l’ai connu en arrivant à la station à l’âge de neuf ans, après mon esclavage aussi...Nous fûmes de suite amis ; depuis, je lui rendais souvent visite...nous bavardions ; si j’avais un problème ou une difficulté quelconque, il me conseillait toujours judicieusement...il me manque déjà énormément.

-Qui est-ce qui fut désigné pour le...traiter ?

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-On ne le sait pour ainsi dire jamais, c’est par tirage au sort. Il avait demandé la faveur d’esclure mon nom de la liste ; c’est bien digne de son attention légendaire aux autres ; il resta égal à lui-même jusqu’au dernier instant.

-Ça me fait froid dans le dos de penser à ça. D’après toi, Guillaume, tu es sûr qu’ils ne souffrent pas au moment de les tuer ?

-Mais non, bien sûr que non, on leur donne un puissant somnifère avant...Ferdinand avait demandé, avant, à écouter de la musique d’opéra qu’il adorait, en visionnant un montage vidéo de vues de la nature : des chevaux, la mer, des voiliers, des oiseaux, etc. C’est Gérard, le gars des coms, qui à fait ce montage génial, c’est un artiste ce gars, il a fait ce montage avec beauccoup de sensibilité pour cette occasion. Et quand c’est l’heure donc, il suffit de briser d’un coup les vertèbres cervicales. C’est garanti sans douleur.

-Oui, je le sais bien pourtant...je l’ai appris lors de mes cours de combat mais, pour un de nous c’est...

-C’est notre devoir d’aider jusqu’au bout. -Ce droit de disparaître quand on veut est la meilleure reconnaissance du

groupe envers celui qui décide librement de faire ce qu’il veut de sa Vie, je suis entièrement d’accord ; c’est la plus grande preuve de notre élévation morale, en fait, le respect de l’autre jusque dans le geste ultime, l’aide sans condition à celui qui souffre ou décide de partir quand il veut...C’est noble, mais c’est toujours dur de perdre ceux que l’on aime...

-Oui, bien entendu, à qui le dis-tu...C’est Bertrant, du Conseil, qui m’a avisé ce matin, et il m’a remis une lettre personnelle de Ferdinand.

-Que dit-elle ? Oh pardon ! si c’est pas indiscret. -Oh non ! c’est une simple lettre d’adieu à un ami, pour nous tous aussi en

fait ; tu veux la lire ? je l’ai dans la poche de ma veste... je sens qu’elle ne va plus me quitter cette lettre.

-Oui, j’aimerais bien, merci. Il se leva et fouilla dans la poche intérieure de sa veste et en retira une

enveloppe bleue qu’il tendit à Marion ; pendant que celle-ci s’asseyait sur le lit pour la lire, Guillaume s’allongea à son côtè, lui entourant le ventre de son bras, se serrant contre elle...Marion se racla la gorge et lut la missive à voix haute.

Mon cher ami, Guillaume, mon fils, Quand tu recevras ce message tu sauras ce qu’il en est advenu de ma destinée. Ne me regrette

pas, ce départ que j’ai voulu discret doit rester dans vos coeurs comme celui d’un vieil ami parti quelques temps en voyage, sans plus.

Je voulais te remercier chaleureusement de cette longue amitié dont tu m’as gratifié et qui a comblé mes vieux jours d’une joie sans pareille, depuis ce jour béni où, adorable petit chenapan, tu arrivas parmi nous. Merci, Guillaume, mille fois merci de m’avoir offert ce privilège de bénéficier de la compagnie et amitié d’un Homme jeune et si vigoureux, à moi, ce vieillard déjà condamné par la maladie de la Vie, ce moment inexorable où l’on doit quitter ceux que l’on aime. Je l’ai un peu devancé et choisi ainsi, loin de tous, pour ne pas voir votre peine sur vos visages aimés ; pardonnez-moi de ce petit manque de courage.

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Je pars heureux, avec la certitude au fond de mon coeur que vous allez tous atteindre le but fixé par nos anciens, vous y êtes bientôt, car vous êtes tous des Hommes et Femmes exceptionnels et dignes, et mon orgueil est d’avoir apporté ma modeste contribution à vous façonner pour affronter et gagner cette lutte vitale, pour cet avènement devant la splendeur des étoiles, de votre nouvelle Humanité libre.

Restez dignes, avancez toujours fiers, le regard tourné vers les étoiles, tels nos lointainss ancêtres de ce septentrion sacré, qui ne craignaient personne, le firent depuis la nuit des temps. Mais ne commettez point leur faute, par trop de grandeur d’âme et qui leur fut fatale, de recevoir en leur sein la lèpre de ces races du Levant qui les détruisirent par la manigance, fourberie et l’intrusion de leurs religions fatales à tout ce qui est le symbole de la grandeur de l’Homme : la force, l’honneur, la générosité et l’honnêteté, car elles ne vivent et prospèrent, telle une tumeur maligne que de la soumission de l’Homme.

Vous êtes dès lors des géants. Soyez et restez forts et responsables. Ecrasez sans remord du talon, s’il en reste un seul de ces cloportes, toutes tentatives de ce genre, rayez-les de la surface de Gaïa. Votre mère bénie entre tous les espaces stellaires l’exige, car elle est vouée désormais à n’engendrer que la grandeur, la vôtre, celle de ses fils du Soleil. Soyez en dignes, je n’ai pas peur, car je sais que vous l’êtes tous.

Je te quitte tranquille et la paix dans l’âme ; que les espaces stellaire prennent soin de vous tous. Transmets mes amitiés à tous tes frères et soeurs, que j’embrasse et bénis de mon amour. Je vous verrez bientôt chevaucher un jour ce monde alors grandiose, du haut des étoiles, ma future résidence.

Adieu, Guillaume, reste fort et courageux...Il est enfin temps pour moi de boire cette délicieuse boisson parfumée à la pêche, car je pense avoir bien mérité ce repos éternel, après avoir légué ma vie à l’instruction sacrée de plus de deux générations de ces blonds fils du ciel, illuminés de sagesse et de forces redoutables, maintenant.

Je t’aime. Ton vieil ami et père spirituel. Ferdinand Marion, profondément émue, reposa la lettre et regarda Guillaume, celui-ci

avait le visage baigné de larmes...Émue, elle s’allongea contre lui sans rien dire, le prit dans ses bras et le consola du mieux qu’elle pouvait, désorientée. C’était la première fois qu’elle voyait un Homme pleurer. Un long moment après, il s’ébroua et lui dit avec un sourire timide, reniflant, et s’essuyant les paupières gonflées par ses pleurs.

-Tu vois Marion, ma douce...maintenant nous sommes deux couillons qui pleurons pour rien.

-Non Guillaume, non, mon chéri, c’est pas pour rien, dit-elle, prenant sa tête dans ses mains et lui baisant ses paupières humides. C’est pour entretenir la flamme de l’amour et de la Vie.

Il lui caressa doucement un sein...descendit le long de son ventre...une flamme de désirs charnels enlaça leurs deux corps jeunes et vigoureux, la nature reprenant ses exigeances...Souffle haletant, elle se coula contre lui, cherchant sa bouche pour un baiser ardent...Elle écarta les cuisse, un long frisson lui parcouru le dos comme une onde de feu. Elle se cambra et s’offrit pantelante à son amant quand elle sentit sa main chercher sa toison d’or...puis, Guillaume se

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dégagea doucement, un court instant de leur étreinte, et s’écria joyeux ; Ding-Dong ! 2ème Round ! Et il l’embrassa fougeusement dans le cou ; elle se tordit de volupté sous ces baisers brûlants...Ils roulèrent, étroitement enlacés, puis de profonds soupirs de jouissances ne furent plus que le seul témoignage sonore de leurs ébats...

Coïncidences ? Poussé par un léger courant d’air coquin, le petit panneau pendu à la poignée de la porte, se balança un instant, comme pour acquiescer au bonheur de sa divine maîtresse dorée comme les blés...

Sur l’idée de Marion, la lettre de Ferdinand fut scannée puis reproduite en

grand nombres et affichée sur les nombreux panneaux d’affichage de la station puis, des visiteurs la découvrant, elle fut tirée en plus grand nombre encore et propagée dans les territoires les plus reculés...et ainsi à l’infini.

Cette lettre devint un mythe, un puissant symbole, le lien de tous sous une bannière, l’étendard de l’amour. Ce message apporta une confiance décuplée à tous ces Hommes et Femmes qui, s’inspirant de ces paroles désormais sacrées s’impliquèrent encore plus profondément dans leur préparation au combat ultime, car tous savaient qu’il n’y aurait qu’une seule et unique bataille : celle de la grande résurrection et suprématie de leur race blanche et unique sur ce nouveau monde, ou la mort.

Il fallait se décider maintenant, il fallait tout leur déballer...Le temps des

hésitations était définitivement mort avec l’autre monde, ne restait place qu’à l’action pure, l’unique possibilité de salut, si seulement il y en restait une seule.

Fred venait de saisir cette donnée essentielle résultante de la nouvelle situation, donnée qui allait dorénavant mener leurs vies à tous : tous les êtres de cette station de recherche venaient sans le savoir de basculer dans un autre espace-temps, un autre univers s’ouvrait devant leurs destinées, à eux de savoir exploiter cet ensemble ou disparaîtres ; seules ces deux options leur restaient accessibles à dater de cet instant...

La partie n’allait pas être facile, ça non. Comment allaient réagir ces hommes et ces femmes scientifiques, pas du tout familiarisée avec le danger et les manques les plus divers ?

Heureusement qu’ils aient eu cette chance incroyable de retrouver un ami comme Wesley Zellwegger, le meilleur et le plus apte à rapidement saisir cette nouvelle donne ; ceci changeait toute sa stratégie précédente...la simplifiait considérablement, et c’était fabuleux qu’il en soit ainsi, le sort paraissait enfin leur sourire. Ils allaient gagner un temps considérable pour mettre en route leur reconquête ; et pour ce qui était des scientifiques, il faudra bien qu’ils se mettent aussi dans le bain. Le vin était tiré pour tous, fallait le boire ou périr, c’est tout...et puis nous verrons bien, soupira-t-il.

Allez, mon gars, au rapport maintenant. -Mes amis, leur dit Fred, et c’est une très grande chance pour nous quatre que

nous le soyons, et encore plus que nous le restions ; j’ai en même temps le

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plaisir et le regret de vous annoncer que nous n’allons plus nous quitter d’une semelle. À dater de cet instant, notre destin commun est scellé à jamais...

Fred hésita un instant, puis se jeta à l’eau, leur annonça tout de go : Le monde de la surface n’existe plus ! Les cartels ont pratiquement rayé l’humanité de la carte !

Le capitaine Wesley Zellwegger et le lieutenant Mark Phydorway se levèrent d’un bond, incrédules, subitement muets de stupeur, et il y avait de quoi. Ils s’attendaient forcément à une mauvaise nouvelle, très mauvaise même, vue la tête que faisaient les deux nouveaux venus depuis leur arrivée, mais à ce point-là, aussi catastrophique, c’était l’écroulement brutal de leur monde qui disparaissait littéralement sous leurs pieds...Ils s’écroulèrent dans leurs fauteuils, pâles, respirations hésitantes, le regard fixe...puis, leur nature d’hommes d’action reprit rapidement le dessus, le capitaine Wesley Zellwegger demanda.

-Raconte nous ça dans le détail, Fred, s’il te plaît. Puis, ce tourant vers son lieutenant. -Mark, sois gentil, ressers-nous à boire, je crois que ce sera bienvenu pour tous. -Pour ma part, dit celui-ci, c’est même franchement indispensable. Il se leva,

prit la bouteile qui était restée sur le bureau et servit copieusement les verres...la bouteille tremblait à peine. Je pense que la super dose est de rigueur, messieurs, dit-il en riant jaune.

Ils se levèrent et verre en main portèrent un toast à leur nouveau monde puis, le capitaine Wesley Zellwegger, prit la parole et s’écria d’une voix ferme.

-Messieurs, soyons brefs mais efficaces à partir de cet instant. Je vous propose, en tant que commandant, ou plutôt, en tant que ex-commandant de cette ex-base de recherche, car dorénavant nous sommes tous logés à la même enseigne, si j’ai bien saisi l’ topo, je propose donc de porter deux toasts. Le premier, pour une ultime pensée à tous ces salopards qui nous ont bousillé ce monde déglingué, oublions-les dans leur néant, et qu’ils y pourrissent pour l’éternité ; et maintenant portons le toast, le seul de valable, à notre destinée commune, comme à dit mon ami Fred, et que le ciel soit béni pour me l’avoir sauvé, ainsi que son pote Joss. Fasse que ce destin qui prit soin de nous continu à nous protéger pour reconstruire un nouveau monde, le nôtre, car c’est ce que nous allons faire à partir de cet instant sacré. Amen !

Ils burent tous en silence, gravement, puis ce fut parti. -Mes chers amis, leur dit Fred, je vous propose de me laisser vous développer

les résultats de mes cogitations, car ayant plusieurs heures d’avance sur vous j’ai forcément déjà dégagé des objectifs : priorités, actions possibles, etc. Nous gagnerons ainsi du temps, ensuite, bien évidemment, chacun pourra apporter sa pierre à l’édifice, c’est même chaudement recommandé. Je vais vous conter notre aventure, à Joss et à moi depuis ce matin...Vous en saurez alors autant que nous ; nous pourrons ensuite passer à la partie essentielle, la reconquête de notre Monde ! Parce que nous allons le reconquérir pour le reconstruire à notre façon, soit, exclusivement un monde d’honneur et de justice ! dit-il péremptoire.

Pour agrémenter nos propos, nous avons filmé tous les cadavres du chantier, nos gars plus ceux de l’entreprise de forrage, soit environ 300 mecs dans la

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sciure...J’ai apporté un disk-mémoire en 3D de 10 heures de stockage, que voici, mais il y a même pas une heure de gravé, dit-il en tirant un minuscule boitier d’à peine 2 x 3 cm de sa poche et le tendit à Wesley, qui le prit et l’inséra dans une prise correspondante du lecteur positionné à côté de son bureau ; appareil incluant un écran plat de 1,60 x 2 m, le modèle standard de visionneur.

Joss lui fit signe de stopper la visue, avant qu’ils ne commencent leur récit. -D’autre part, dit Fred, en regardant Wesley, tu devrais enregistrer mon récit

pour ne pas avoir à le répéter par la suite quand il faudra expliquer la situation à vos gars et aux scientifiques, t’as ce qu’il faut ici ?

-Pas de problème, mon gars, ce visio fera l’affaire, c’est un combi 4 x 61 B, je peux quasiment tout faire avec. Je vais même te filmer en holographie, voilà, suffit de brancher les caméras spéciales et ces micros-quadri d’ambiance que voici, et c’est prêt. Je vais même régler les caméras sur grand angle, pour choper Joss par la même occase. Je le démarre en même temps que toi...on pourra même faire un montage de ton discours avec votre vidéo incluse ; nous aurons ainsi le poids des mots et le choc des photos, comme disaient les autres avant, tous ces pauvres et tristes connards en train de pourrir.

Rires des quatre. Ainsi, soutenu par Joss qui participa au récit des événements, Fred leur raconta la disparition de l’humanité, qui avait été condamnée par leurs infâmes chefs aux ordres et complices des lobbies militaros-financiers-industriels. Ils furent tous d’accord pour convenir que ce massacre ne pouvait avoir pour auteurs que ces fous furieux ; et, leur fit-il particulièrement remarquer, tous avaient été condamnés, cette base y compris ; ils avaient tous été destinés à la mort. Ce constat, clair comme de l’eau de roche, les endurci dans leur résolution à chercher, construire dorénavant l’élimination des lobbies et de leurs sbires, leur élimination totale de la surface de la planète. Puisqu’ils l’avaient voulu ainsi, ils allaient être servi.

-J’ai donc pensé que la solution était à la base, car avec la collaboration des scientifiques nous avons les moyens de développer, ou adapter des technologies à nos conditions de survie et de reconquête, puis une fois obtenu ces moyens...ou même avant du reste, nous devrions envoyer des équipes de secours dans tout le pays et chercher les groupes de rescapés qui, à mon avis, se seront retranchés dans des grottes naturelles...Les quelques qui en auront pris l’initiative seront à mon sens les seuls rescapés, ou presque, les autres...

Plus tard, dès que nous aurons les moyens de pouvoir prospecter en sécurité...à condition que vos grosses têtes nous pondent un moyen quelconque, bien sûr, nous devrons envoyer des équipes de part le monde pour faire de même, et divulguer, propager tous matériels et technologies propres à les développer et contribuer à la lutte de la reconquête. Nous leur devons bien ça, c’est même un minimum que nous devons faire. Je considère que dorénavant nous avons une énorme dette envers tous les peuples survivants, ce sera de notre devoir que de les assister du mieux que nous pourrons. Nous devons construire un Monde sans frontière, ouvert à tous, sinon, vaut mieux se flinguer de suite.

-Je suis entièrement d’accord avec toi, Fred, dit joss. -Nous sommes tous d’accord aussi, dit Wesley, pas vrai, Mark ?

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Celui-ci hocha la tête, le regard fixe, ailleurs. -Mais pour l’instant, comment comptes-tu trouver ces grottes, mis à part deux

ou trois les plus célébres, comme la Mammoth Cave National Park, dans le Kentucky, pour ne nommer que celle-ci, qui avec ses 563 km de galeries pourrait certainement abriter une population comme celle de la ville de New-York, à l’aise. Mais qui en connait d’autres, les noms, et surtout leurs localisations ? et combien y en a-t-il sur le territoire ? demanda Mark.

-Ça je peux te le dire, mais guère plus, lui répondit Joss, car j’ai vue une émission TV il y a trois jours environ. Il y en aurait plus d’une centaine, cent...trois ou cent quatre environ, je crois, je parle des grottes ouvertes au public seulement, tant qu’aux autres, mystère sur toute la ligne, mais il doit en exister des masses, connues seulement des locaux...qu’il nous faudra dégoter.

-Facile, dit Wesley, à moins que nos matheux en aient la liste, ce qui serait surprenant, il suffit d’aller dans la grande ville la plus proche avec des équipes de nos gars, c’est-à-dire la plus grande ville de l’Etat, à Birmingham, qui avec ses huit cent mille habitants maintenant doit regorger de matos, et chercher dans la bibliothèque municipale.

-J’ai une meilleure idée, dit Joss, ou plutôt, un complément d’idée : pendant qu’une équipe cherchera à la biblio, d’autres entreront dans les habitations et embarquerons tous les discs-mémoires des particuliers, et même des ordinateurs complets dans les magasins ; ensuite, il suffira de mettre un maximum de gars à éplucher ces montagnes de données et les classer et les garder sur discs-mémoires. Nous trouverons des données précieuses traitant de tout ce qui touche un monde, docs qui seront indispensables pour reconstruire le nôtre...

Vous serez surpris de la somme de l’intérêt qu’avaient les gens pour les sujets les plus divers, et de plus, toutes ces données furent piquées sur Internet, donc, pour la plupart d’entre elles, hors manipulations des sources officielles, qui comme tout un chacun le sait maintenant, enfin j’imagine, étaient totalement trafiquées, et donc d’aucune valeur, car n’étant que de la merde, de la chiasse de politicards, journaleux et intellos ; tous tout juste bons à se masturber la comprenure et se passer la pommade entre eux, c’est infâmes fils de putes. De toute façon, les villes nous appartiennent entièrement, alors il n’y a qu’à se servir...et c’est valable pour absolument tout le reste. Puis nous ferons de même dans toutes les villes des alentours...y a de quoi faire !

-Génial, mon gars, sûr que nous allons avoir besoin du maxi d’infos et de matos, répondit Wesley.

-Il faut réunir de suite vos grosses têtes et les mettre eux aussi au parfum, devant le fait accompli.

-Surtout que t’es devenu un maître en ce domaine, mon gars, dit Wesley en souriant à Fred; tu peux dire que t’es devenu le roi du suspense ; le vieil Hitchcock à côté peut aller se rhabiller après toi.

Ils rirent tous de bon coeur ; ils en avaient foutrement bien besoin. -Ouais, dit Fred en riant, par contre, ce qui m’inquiète un chouia...quoique ce

soit de ton ressort exclusif, Wesley, dit-il en le regardant, c’est du comment nous allons, et comment doit-on affranchir tes gars, la troupe.

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-Oh ! c’est fort simple, nous allons les réunir en premier en fait, reflection faite, et les affranchir tout de go, devant le constat de vos explications, c’est tout.

-Venant de leur capitaine, il ne devrait pas y avoir de problème ; ils ont une totale confiance en Wesley, rajouta Mark.

-En nous deux, Mark, ne soit pas si modeste, ils sont parfaitement au courant de ta valeur et de ta probité, aussi.

-Un autre problème les concernant, rajouta Fred...ainsi que tous les habitants de cette base du reste ; à savoir que plus rien n’existant du passé, notre organisation militaire, avec sa hiérarchie et tout son saint-frusquin ne vaut foutrement plus rien. Il n’existe pas plus de capitaine Fred Richardson à cette heure que de beurre au cul. Alors, d’après vous, comment envisagez-vous maintenir un ordre indispensable à la bonne marche de notre nouvelle société, sachant parfaitement tous les quatres, ce que l’homme porte en lui de négatif, et même dangereux pour le groupe...Je pense en particulier aux tire-au-cul, les voleurs, menteurs, maniaques sexuels, car il y a certainement des femmes chez les savants, non ?

-Trente-neuf nanas, dit Mark ; pas toutes des canons mais baisables. -Je propose, répondit Wesley, qu’en premier nous prenions nos gars de la

troupe au flan, au culot, et conservions cette foutue hiérarchie comme si rien n’avait changé en fait, et sur la lancée et avec le boulot qui nous attend tous, il devrait se passer un bon moment avant qu’un petit mariolle remette le système en question.

-Ok pour moi, dit Mark, d’autant qu’une fois lancés nous pourrons toujours suivre une politique à vue.

-T’aurais fait un bon politicard, Mark, t’as loupé te vocation, car c’était ainsi qu’ils dirigeaient, les autres enfoirés, le coupa Joss, en rigolant.

Tous rièrent de bon coeur, encore... -Au fait, demanda Joss, quel est l’effectif complet de cette base, civils et

militaires ? Ce fut Mark qui répondit aussi sec. -L’effectif militaire se monte au total à cent quatre-vingt-quatre personnes. Les

scientifiques sont deux cent soixante-sept individus au total, dont les trente-neuf mignonnes précitées, toutes spécialités confondues ; plus cinquante deux mecs pour l’hôtellerie, la restauration et le sanitaire...qui s’ocupent uniquement des civils. Nous les militaires avons nos gars pour ça. Donc, je récapitule : 184 troufions + 267 chercheurs, homme et femmes + 52 de maintenance ; total de la base : 503 personnes, plus vous deux, mes lascards, ça fait 505 gugus.

Mais y a de la place, cette base est gigantesque ; la moitié au moins ne sert à rien pour l’instant, alors...

-Pissss, siffla Fred entre ses dents, ça fait du monde tout ça...va falloir des réserves de bouffe en quantité.

-Pour l’instant pas de problème à vue, nous avons été ravitaillé il y a à peine trois semaines ; nous avons donc une année de stock de vivres, pour vivre en autonomie et autarcie totale, au cas où...et nous sommes maintenant entrés de plein pied dans leur fameux OÙ.

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-Et pour l’énergie électrique, vous avez je suppose une centrale nucléaire ? -Je croyais ça aussi au début, dit Wesley, puis, je me suis laissé dire, à demi-mot

bien sûr, par un scientif, que nous serions équipés d’un tout nouveau bidule révolutionnaire qui, tenez vous bien, essayez-vous même, voilà...bidule qui serait tributaire de...RIEN...NADA...NOTHING. Ça fonctionnerait avec l’air du temps ; mais surtout, ne m’en demandez pas plus, les gars, ok ?

-Ce serait super un truc pareil, mais quel est le type de recherche qu’ils font ? -Ça, Fred, tu nous en demandes encore un peu trop, c’est du top secret,

comme tu devrais t’en douter, répondit Wesley. Mais j’ai l’impression qu’ils sont branchés sur les matos électroniques, l’espace...quoique c’est vague comme explication, j’en conviens.

-Et pour la flotte ? -Aucun souci de ce côté-là, répondit Marck, nous avons trois captages répartis

dans la base à 732 mètres de fond, sur une nappe phréatique alimentée par une importante rivière souterraine ; de l’eau d’une puretée incroyable, pour ça nous sommes vernis ; c’est déjà ça de sûr...le principal même.

-Bien, nous verrons tout ça plus tard ; par contre, dit Fred, je suis d’avis qu’il faudrait de suite mettre une équipe de deux ou trois radios, des gars sûr et compétents, pour éplucher toutes les longueurs d’ondes, et encore tenter de capter le moindre signal, d’où qu’il vienne, et uniquement en réception ; nous ne l’avons fait ce matin que d’une façon trop brève et limitée. Il faut tenter le tout pour le tout pour tenter localiser un, voire plusieurs groupes de rescapés.

Mark, décrocha le téléphone et fit le numéro des transmissions. Il eut de suite la communication.

-Ici le lieutenant Phydorway...Très bien sergent-chef Princhk...Et il lui expliqua la marche à suivre.

EXECUTION ! Gueula-t-il dans le combiné, et il raccrocha, énervé. -Bon, je crois que plus vite ils seront affranchis, plus vite on pourra passer aux

grosses têtes, non ? Alors si on y allait, dit Fred. Le capitaine Wesley Zellwegger, prit un micro sur une petite console sur son

bureau, s’éclaicit la voix, brancha un contact et transmit ses ordres à toute la garnison.

-Attention ! attention ! c’est votre commandant qui vous parle, le capitaine Wesley Zellwegger. Je veux que vous soyez tous réunis, j’ai bien dit TOUS, sauf pour les deux personnes de planton aux transmissions radio, dans quinze minutes dans le Hall de déchargement nº 1. Vous serez mis au courant de nouvelles données concernant cette base et tous ses personnels. Les manquants auront 15 jours secs. À tout de suite. Ah ! Attendez une petite minute.

Mark s’approcha et lui parla à l’oreille, pendant que Wesley couvrait le micro de sa main, puis il le reprit et parla de nouveau.

-Attention : vous devrez tous venir avec vos tévéphones, c’est impératif, et d’ici là il est impérativement interdit de faire usage de ces appareils, ni d’aucun autre appareil et système émetteur radio. Terminé !

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-Par la même occasion, dit Mark, on récupére ainsi leurs tévéphones, pas question qu’un abruti nous fasse repérer en téléphonant à sa gonzesse ou à dieu sait qui. La black-out est valable pour tous.

-Et c’est parti, les mecs, dit Joss, à mon humble avis nous devrions trinquer à ce moment de calme, car c’est le der de der avant longtemps, j’ai l’impression.

-Si toutefois nous en connaîtrons un autre un jour, dit Wesley. -Je propose également qu’entre nous, mais seulement dans ce cas et en privé,

dit Fred, il ne soit plus question de hiérarchie, je pense que ça simplifiera grandement notre turbin. Ce qui fut adopté à l’unanimité.

La troupe fut donc mise au courant. Cela se passa relativement bien, bien mieux qu’ils ne l’auraient cru en définitive ; les hommes étant habitués à obéir sans se poser de question facilita grandement la chose ; et comme de plus on leur annonça que de très nombreuses activités nouvelles, et des plus variées allaient être initiées, même en dehors de la base, cela les requinqua grandement, car ces hommes d’action supportaient mal la routine de la base, sans sortir pour ainsi dire ; la perspective de nouveauté balaya rapidement l’horreur de la réalité.

Ensuite, Wesley convoqua tous les officiers et sous officiers pour une réunion de planification. Le soir même, à la nuit tombée, une équipe d’une vingtaine d’hommes sortirent de la base avec trois véhicules légers, plus deux pelles mécaniques ; les moteurs de ces engins furent trafiqués, comme il sera expliqué plus loin dans ce récit. Ils partirent à la recherche de tout ce qu’ils trouvèrent de morts, hommes et animaux pour les enterrer.

Lors de cette réunion, ils y établirent une première liste des objectifs des premières réquisitions de matériels à effectuer dans la ville de Birmingham : matos informatiques, y compris et surtout chez les particuliers ; vêtements fonctionnels masculins et feminins, y compris les sous-vêtements, ainsi que du linge et vêtements pour les bébés et enfants à venir ; alimentation, boissons, listes seulement limitées par une éventuelle imagination déficiente.

Sans le savoir ils reproduirent le même type de comportement que les européens, ce même jour, sauf que eux partirent avec dix-huit camions de gros tonnage, avec chacun un équipage de six hommes. A la tombée de la nuit, le long convoi partit de la base, tous feux éteints. Sur chaque véhicule on avait au préalable enlevé le thermostat du moteur, appareil qui est en fait une simple vanne thermostatique, de façon que celui-ci ne chauffe pas, évitant ainsi les détections de chaleur par les satellites des Zanko-Khuigs.

Quand les savants et techniciens furent mis devant le fait accompli, le résultat

fut infiniment plus dramatique qu’avec les membres de la troupe...infiniment pire. Ces malheureux n’étaient pas protégés, eux, par un esprit fruste, et ils le payèrent très cher. Pour des gens dont la nature propre était d’analyser journellement de nouvelles données, celles-ci furent particulièrement préjudiciables pour un grand nombre d’entre eux. À tel point que dans les trois jours qui suivirent cette révélation brutale, un mathématicien sexagénaire et une technicienne de trente ans se pendirent dans leurs chambres respectives.

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Ce renoncement dramatique à la moindre lutte fut un choc terrible pour tous les autres. Fred et ses compagnons frémirent à la pensée que ces actes désespérés ne fassent boule de neige parmi ces gens nullement accoutumés aux situations extrèmes. Ils les réunirent alors de nouveau et les sermonnèrent durement, leur faisant ressortir leurs responsabilités directes à ce génocide général, et leur devoir humanitaire de désormais devoir travailler inlassablement le reste de leurs vies pour trouver des solutions technologiques pour leur survivance commune, et leur devoir de former de nouveaux chercheurs, même de façon empirique ; cela étant mieux que rien du tout.

Wesley entra en rage et dit avec sa brutalité coutumière décuplée par la colère de les voir tous si ramollis et indécis, si lâche en fait, de les voir ainsi le dégoûtait au plus au point.

-Ecoutez-moi bien, il était furieux et les dominait de sa taille impressionnante. Vous avez littéralement vendu vos âmes à ces pourris des lobbies financiers

pour leur donner les moyens d’assassiner des milliards de gens. Vous êtes tous des infâmes saloperies, des crapules infectes, gueula-t-il. Mais soyez rassurés, vous n’êtes pas seuls car nous les militaires avons exploité la puissances des engins de mort toujours plus horribles que vous nous avez fourni. Nous sommes tous autant responsables que vous tous, là...à me regarder comme un martien, et, gueula-til à s’en péter la glotte, NOUS SOMMES TOUS DES POURRITURES, DES ORDURES, TOUS AUTANT QUE NOUS SOMMES !

Nous sommes sans doute le plus grand groupe de rescapés sur la planète, et nous avons l’unique chance d’avoir les installations et des gens capables de reconstruire un Monde futur, un Monde viable pour nos descendants ; alors, hurla-t-il, VOUS N’AVEZ PAS LE DROIT DE REFUSER VOTRE COLLABORATION À CETTE OEUVRE. VOUS ALLEZ DONNER LE RESTE DE VOTRE VIE À RECONSTRUIRE CE FUTUR !

Voilà ! à vous de choisir de suite. Soit vous collaborez à la reconstruction de ce monde pourri, ou je vous fait tous sauter avec cette base de merde ! hurla-t-il fou de rage.

Nous, les militaires, qui ne valons guère mieux que vous, sommes capables de survivre à ce désastre, c’est notre job ; nous connaissons tous les trucs pour se sortir des pires situations, et celle-ci est gratinée, foutre oui ! Si on en arrive là, nous amènerons les femmes jeunes de cette base, car nous aurons besoin de femelles pour la reproduction, et celles qui refuserons vous suivront dans la tombe de cette montagne de béton. Nous retournerons possiblement à l’état de barbares, j’en conviens, mais des barbares bien vivants...Vous avez cinq secondes pour vous décider, ou je vous abats comme des chiens puants que vous êtes tous, comme nous-mêmes !

Il dégaina son énorme revolver, dont il manquait seulement deux roues pour en faire un canon, et les menaça :

-JE DESCENDS À L’INSTANT CELUI OU CELLE QUI REFUSE, JE VOUS DONNE CINQ SECONDE POUR VOUS DÉCIDER ! UN...DEUX... Joss puis Mark dégainèrent à leurs tours...TROIS...

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Ce fut inutile de continuer de compter...La violence des propos fut le dernier choc salvateur de leurs âmes, de ces pauvres esprits si brillants dans le secret de leur labos, craquèrent devant les contingences du présent ; ils donnèrent tous leurs accords, livides, en tremblants comme des feuilles.

Puis, Wesley et Fred épaulés par leurs lieutenants, leurs racontèrent que dans leur dure vie de combattant, eux et leurs hommes, même les plus simples, les plus frustes, trouvaient toujours en eux-mêmes, et uniquement en eux-même, la volonté de continuer le combat, même et surtout dans les situations les plus désespérées.

Leurs unique chance dorénavant de retrouver leurs honneurs étant la lutte à mort pour reconstruire une humanité nouvelle, sur des bases sûres, exemptes de toutes les valeurs mortes avec ce monde pourri disparu sous leurs pieds.

L’appel à ce sentiment oublié par tous ces gens, ou presque, l’Honneur, fut le véhicule qui les remit sur les rails et leurs permit de relever ce fabuleux défi, insensé presque, de tout simplement reconstruire, inventer un nouveau Monde, celui de leurs enfants qu’ils allaient s’empresser de fabriquer aussi.

Le nouveau Monde était sauvé ; ces hommes et ces femmes allaient lui éviter de longs et peut-être fatidiques siècles de stagnation.

-Ecoutez ceci, leur dit Fred, à dater de cet instant solennel, considérons-nous tous comme le grain de gravier dans la chaussure du géant, élément minuscule qui va le terrasser.

Et, croyez-en la parole de combattants aguerris, et ne l’oubliez jamais, il regarda un à un ses trois collègues en cercle autour de lui : on tombe plus vite à terre à cause de ses pieds que par une balle.

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Les Charretiers

omme d’habitude le convoi se trainait sur cette ancienne petite route départementale qu’ils découvraient en cette partie jusqu’alors inutilisée. Ils

essayaient de diversifier au maximum leur trajets nocturnes pout ne pas créer un comportement routinier, des fois qu’un oeil ennemi repère une légère anomalie sur un secteur, car dès l’instant où ils auraient détecté un léger changement à la routine d’un point donné, celui-ci serait pour un temps, inconnu de leur part, surveillé plus particulièrement ; ce qui était le plus grand danger encouru par leurs équipes de récups. Pratiquant ainsi ils espéraient limiter au maximum possible toutes détections indésirables, pouvant leur être fatales.

Ce convoi était constitué de sept chariots des plus hétéroclites, pas deux qui se ressemblent car ils se constituaient suivant la disposition des matériels et des équipages disponibles. Ils sont fabriqués le plus souvent, comme cette fois-ci encore, avec d’anciens plateaux, les remorques de ces engins attelés derrière un tracteur motorisé, ensemble que les anciens appelaient des semi-remorques.

Leurs équipes de tecnos les trafiquaient pour leur usage spécifique actuel : ils ne gardaient que le plateau avec des ridelles légères supportant des filets tendus sur des poteaux espacés tous les deux mètres ; une bache peinte de couleurs de camouflage couvrant à l’aller comme au retour les marchandises alors récupérées dans les villes. L’intérêt vital était de se pourvoir d’ensembles les plus légers possibles, tous le superflu était radicalement rejeté. Ils conservaient un seul train de pneu arrière ainsi que le plateau directionnel avant, l’ensemble équipé d’un brancard central pour les attelages doubles de quatre chevaux. À l’aller, comme maintenant, deux chevaux suivaient à la longe derrière le chariot ; ils les remplaçaient chaque soir pour l’étape suivante, ne se déplaçant que la nuit.

Chaque équipe est formée de six gars, tous le mieux instruits sur les technologies de l’anciens monde. Ils sont vêtus de trellis de camouflage, ainsi que d’un casque de pilote d’hélicoptère militaire repeint de couleur de camouflage. Tous sont sérieusement armés, avec d’importantes réserves de munitions ; chaque équipe peut vivre en autarcie totale. Leurs armes à feu équipées de silencieux, chacun a ainsi deux armes de poing et une mitraillette, plus trois carabines à lunettes par équipe, sans compter les armes blanches, chacun s’équipant suivant ses goûts personnels ; cela va du simple poignard de commando en passant par la dague, le sabre de cavalerie, le coupe-coupe, ainsi que l’arbalette de tir. Deux grandes cartouchières barrent la poitrine de chacun. Chaque Homme dispose d’une visière de visée infrarouge incorporée au casque, si nécessaire, car ils ne se déplacent que la nuit.

Véritables désespérados de légendes, sauf que eux sont bien vivants, sans peur et particulièrement dangereux. Tous portent la moustache, la barbe et les cheveux longs. C’était vite devenu leur marque type, par nécessité aux débuts de

C

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leurs longs voyages par les chemins truffés d’embuches, privilège honorifique maintenant, de ces Hommes intrépides et courageux, admirés et vénérés de tous les leurs : les Charretiers.

C’est toujours un spectacle impressionnant pour les habitants des grottes quand ils les voient alors entrer en groupe compact, véritable bloc de force empreint de noblesse et de dignité. Le bruit de leurs bottes et celui métallique de leurs armes baignent alors leurs frères et soeurs dans une béatitude, une appaisante paix de l’âme de part la sécurité, la puissance impressionnante qu’ils représentent alors.

Ils entrent sous la plate-forme des perceurs, y laissant là leurs couvertures de protection anti-satellites, puis apparaissent alors aux leurs. Ce sont des Hommes farouches, qui ont tant affronté de dangers, livrés tant de combats, de luttes contre des dangers les plus variés et imprévisibles, qu’ils sont d’humeur sombre, peu causants. Ils ne savent pas bien exprimer l’amour profond qui les unis aux leurs ; leur vie de coureurs de chemins les ont marqués de cette gravité qui fait les guerriers, des Hommes de combats âpres et sauvages. Pourtant, prenez n’importe lequel de ces Hommes de roc, et qu’un petit enfant lui grimpe alors sur ses genoux en jouant et riant aux éclats, de ces rires purs et cristallins qui bouleversent les plus endurcis, et pour peu que le bambin lui murmure alors à son oreille ces simples paroles qui chavirent l’âme, comme : je t’aime, Pierre, Jacques ou Paul...vous verrez alors ce géant, serrer délicatement de peur d’écraser cette minuscule Vie si fragile contre sa poitrine, avec ses grandes mains calleuses, de grosses larmes silencieuses couler alors sur un visage buriné, la poitrine broyée sous une formidable émotion à lui éclater le coeur.

Les enfants étaient littéralement fous d’eux, c’était à qui aurait le privilège, l’insigne honneur d’être salué, nommé par un de ces grands guerriers redoutables ; pour beaucoup d’entre eux, ils étaient le modèle d’Hommes qu’ils aspiraient à devenir, des Charretiers : le titre de noblesse de ces Hommes inflexibles, équivalente à la gloire des Patrouilleurs, les combattants des airs qui viendront beaucoup plus tard.

Sur leurs chariots, les hommes s’assoient sur deux sièges en bois, simples planches pourvues d’un dossier de même nature, ceci sur deux niveaux superposés. Le siège du haut regroupant trois tireurs armés des carabines pour pouvoir éliminer les dangers éventuels représentés par des taureaux sauvages, des meutes de chiens et même de loups, des ours aussi, ainsi que des hordes de sangiers, tous plus ou moins affamés, ou agressifs. Ceux du bas disposent devant eux d’un support pour reposer leurs mitraillettes, une sorte de ratelier horizontal. Ceux du haut aussi, pour reposer leurs carabines debout sur la crosse, les gardant en main en permanence, leurs vies souvent dépendaient de leur rapidité de réaction.

Les trajets pour se rendre à une ville donnée prenait souvent plusieurs jours entiers, et autant sinon plus pour revenir avec les chariots lourdement chargés. Obligés qu’ils étaient de se planquer dès que le jour allait se lever ; pour ça, ils ne manquait heureusement pas d’endroits, comme les hangars de fermes qu’ils choisissaient de préférence à tout autre local, comme les bois, etc.

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Ils partaient chacun avec un ravitaillement complet, chaque chariot emportait une réserve de mille litres d’eau dans des barrils en bois, plus des vivres en conséquences, pour eux ainsi que du fourrage pour les chevaux durant leur séjour dans les villes. Durant le trajet, il n’y avait heureusement aucun problème, il suffisait de les lâcher dans la nature, cette dernière étant redevenue un Eden véritable, regorgeant de paturages naturels ; souvent même, un court d’eau ou un étang leur faisait économiser leur réserve d’eau qui serait alors des plus précieuse une fois arrivés dans la ville, car si les petites agglomérations étaient parfois pourvues de fontaines naturelles, dans les grandes par contre elles étaient le plus souvent absentes.

Ainsi, en cette fin de printemps, ce convoi se dirigeait vers la métrople

régionale d’antan, Toulouse, comme la nommaient alors les disparus. Une ville énorme pour leur standard jusqu’alors, avec ses un million et deux cent cinquante mille habitants au jour du massacre. Un autre convoi de huit chariots se dirigeait au même moment vers la ville de Bordeaux, à l’ouest, du côté opposé à leur quadrant ; autre ville approximativement de la même grandeur.

Ainsi, allant lentement de par les routes et chemins de campagne qu’ils privilégiaient le plus, ils avançaient tranquillement. Quatre jours pleins maintenant qu’ils étaient partis de Bertrand ; ils comptaient arriver à bon port le surlendemain seulement, juste avant le lever du jour, si tout allait bien. Ils avaient prévu de prospecter l’entrée de cette ville leur faisant face, sachant qu’au retour ils trouveraient selon leur carte routière de l’époque, un immense supermarché devant se trouver sur la route de la ville de Bayonne, à un lieu nommé Purpan, ce uniquement s’il leur restait encore de la place dans leurs chariots, sinon il iront la prochaine fois...

Depuis le temps que leurs équipes de gars dépieutaient les énormes stocks de mémoires des ordinateurs stockées par les particuliers de l’ancien monde, ils disposaient déjà d’une immense bibliothèque regroupant des sujets des plus variés...Ils savaient quasiment tout de leurs environnement, sinon de leur Monde. Leur base, comme les autres, était un centre de recherche d’informations incroyablement développé. Elle regroupait actuellement cent quarante six ordinateurs répartis dans toute la stations, suivant les espaces libres disponibles. Espace se faisant de plus en plus restreint maintenant, ils allaient bientôt arriver au seuil de saturation, ce n’était pas encore l’urgence mais la situation devenait préoccupante, et il en était de même pour de nombreuses autres stations.

Ces ordinateurs tournaient pour la plupart nuits et jours, des équipes se relayant. Ils avaient même été obligés de former des équipes qui repiquaient ces infos archivées une première fois, pour les redisposer en sous-classes, et bien souvent, en sous-sous-classes successives, sinon leurs exploitations devenait proprement impossibles à quiconque, tant la diversité rendait la chose à une échelle astronomique.

Pour ce qui était des vivres, viandes et poissons salés, le territoire regorgeait de gibiers les plus variés, ainsi que de poissons, en plus de leurs élevages...Il n’y

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avait qu’à se servir, mais ils en gardaient toutefois un bon stock en vue d’un possible événement facheux, car ils ne se fieraient plus jamais à la providence...La leçon était retenue pour toujours.

Ce stock de denrée en conserves servait entre autre à fournir ces expéditions comme la leur, en nourritures disponibles sans nécessiter de se les procurer en chemin pour ne pas perdre de temps ; les récups étant leur priorité absolue.

Comme dit précédemment, la nature offrait une profusion de tout ce qui est nécessaire à l’alimentation des Hommes et des bêtes, pour ça, Gaïa était devenue un véritable éden, un paradis retrouvé presque par miracle, pensaient-ils tous.

Ces gaz qui avaient tué des milliards de mamifères, n’avaient heureusement eut aucune influence néfaste sur les autres espèces. Ainsi, les insectes et les oiseaux n’avaient pas soufferts de ce désastre, c’est certainement grâce à ce fait que la vie prit rapidement une expansion spectaculaire, de par la pollinisation qui repartit sur une grande échelle part les abeilles surtout et les oiseaux innombrables. Les forêts resurgirent rapidement de partout, offrant à tous ces être minuscules une source illimitée d’expansion.

Abeilles qui dix ans avant le génocide avaient failli disparaître, de par les pollutions chimiques, les cultures modifiées génétiquement, véritable hérésie criminelle, et aussi toutes les ondes innombrables saturant l’atmosphère ; toutes sources de maux tuant aussi ces hommes irresponsables par millions. Et que dire des cétacés tués en masse, ces baleines victimes des sonars basse fréquences des militaires ; nouvelle technologie qui moins de dix ans avant 2015, envoyait des sons à 240 décibels, où à 300 milles ils avaient encore 140 décibels de puissances ; monstruosité digne de fous furieux criminels irrécupérables : scientifiques et militaires.

Toutes les stations bien entendu élevaient des abeilles en grande quantité, le miel étant devenu une des principales sources de bienfaits pour tous. Ils avaient apprit les soins à donner aux arbres fruitiers des fermes abandonnées, les légumes à cultiver, volailles à élever, etc. Ils ne manquaient absolument de rien et même étaient riches de produits redevenus naturels, non pollués par les cultures intensives d’antan et surtout pas empoisonnées par les venins chimiques utilisés alors. Ceux du monde mort étaient tous devenus fous, c’était une certitude absolue pour eux tous.

Vivre entouré que d’amis sûr, avoir une alimentation variée, saine et abondante ; le confort d’une grotte devenue hospitalière ; des activités excitantes et de grandes responsabliltés ; un idéal enivrant et des objectifs grandioses...que faudrait-il de plus pour être heureux ? Rien ! Ils avaient tout ce qu’un Humain pouvait désirer, ils avaient même l’amour des plus libres...Leur monde était déjà un paradis...l’antichambre en tout cas ; il le sera pleinement et alors seulement dès qu’ils auront massacré tous ces pourris de Zanko-Khuigs et leurs sbires, ces gardes immondes, exclusivement.

La petite route était tranquille en cette douce nuit de ce début juin. Nicolas, un

gars robuste dans la cinquantaine, tenait nonchalamment les rênes de leur

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attelage en tête du convoi, un pied posé sur le cale-pied, le coude droit reposant sur la rambarde dorsale...personne ne parlait, chacun sommeillant plus ou moins sur son siège. On y voyait assez bien sous ce quartier de lune, le ciel étant dégagé ; les attelages se suivaient à quelques vingt à trente mètres de distance, ce qui permettait de pouvoir manoeuvrer séparément sans se trouver coincer par un quelconque imprévu par les autres chariots. Fallait penser à tout dans leur monde, l’amateurisme y était bien souvent mortel et ne laissait même pas le temps d’un apprentissage, un danger pouvait surgir à chaque instant.

Les chevaux étaient dressés pour se défendre en cas de danger. Ainsi, à une attaque imprévue, les chevaux de tête se dressaient sur l’assaillant pour tenter de le tuer avec leurs sabots. C’est pourquoi leurs attelages représentaient une valeur inestimable, car il fallait de longs mois pour dresser ainsi une bête ; leurs chevaux étaient leur garants de survie, comme de tout dans ce monde. Ils étaient même leurs amis, un lien unissait bêtes et hommes, une grande confiance réciproque créait une union commune.

Ils furent tirés de leur torpeur par le hennissement de Vaillante, la jument à droite, c’était toujours elle qui en premier donnait signe d’une anomalie quelconque ; de suite, Nicolas arrêta l’attelage et dit tout haut.

-Stop, alerte jaune ! A ces mots, le garde du milieu sur le siège supérieur, tourné en permanence

vers l’arrière pour surveiller ce secteur, actionna la lampe d’avertissement d’un danger possible, ce en direction du chariot suivant, chacun faisant de même pour l’attelage suivant, et vice versa. Ces lampes-dynamos sont simplement enfilées et prolongées par un tube de vingt centimètres de long, ce qui permet d’envoyer de brefs signaux lumineux sans risque d’être détecté par un satellite.

Cinq signaux de trois éclats différents sont utilisés : Blanc = arrêt normal / Jaune = stop, danger possible (comme dans ce cas précis) / Rouge = alerte, danger absolu / Bleu = fin d’alerte / Vert = on repart.

Ils baissèrent instantanément leurs visières de visée nocturne sur le visage, chacun scrutant la nuit sur son secteur, les armes prêtes à cracher la mort à la seconde. Ils étaient devenus dur comme le granit, rien ne pouvait risquer de mettre leurs vies en danger sans que leurs réactions soient fulgurantes et irréductibles ; rien ne pouvait mettre les Vies des leurs en péril sans déclencher une attaque la plus meurtrière possible, aucun sentiment de pitié n’habitait alors ces hommes pourtant empreint d’un amour le plus pur pour la Vie des leurs.

Ce chemin comme la plupart, maintenant que la nature était livrée à elle-même, était surmonté de chaque côté d’une végétation exubérante, de plus, vue la saison, des arbustes obstruaient la vue alentour et les racines des arbres faisaient éclater le macadam. Ils naviguaient ainsi comme dans un tunnel végétal presque ; c’était un grand avantage pour esquiver les satellites mais un inconvénient pour une rapide détection d’un danger survenant à l’improviste, comme dans la majorité des cas. C’était presque toujours les chevaux qui donnaient l’alerte en premier, et encore cette fois, Vaillante, une magnifique jument bai, la meilleure de leurs sentinelles.

Nicolas la calma doucement de la voix.

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-Pisst, pisst, pisst, tout doux Vaillante, tout doux ma belle...calme...Vaillante, calme ma jolie...

La bête se calma un peu mais les deux chevaux maintenant restaient nerveux, les oreilles rabattues en arrière, naseaux écartés, leurs queues et crinières raidies, leurs flancs parcourus de grands et rapides frissons. Ils étaient prêt à se dresser face au danger. Deux ans avant, ces deux-là justement, lors d’un cas similaire, avaient tué un ours qui brusquement avait déboulé des fourrés d’un chemin et les avait attaqué. Le compagnon de la jument, son frère de deux ans plus âgé, Flash, un bai lui aussi, en portait encore une longue cicatrice sur le poitrail ; la rencontre avait été rude, et comme l’ours était sorti des fourrés juste devant les chevaux, ils ne purent tirer sans risque de blesser ces derniers...mais, le temps qu’un garde saute à terre pour intervenir, l’ours était raide mort sur le chemin, le crâne fracassé par un coup de sabot.

Ils avaient ensuite pansé la blessure de Flash, lui mettant quinze agraffes pour rapprocher les lèvres de la plaie, ce qui ne fut pas facile ; mais pour Flash, seule la confiance aveugle qu’il avait dans ses compagnons à deux pattes lui permit de surmonter le stress de la douleur ressentie lors de cet acte ; puis ils lui mirent un large cataplasme de miel, tenu par une bande qu’un des gars fabrica en déchirant sa chemise. Ils avaient découvert les extraordinaire vertues médicinales du miel, puissant antiseptique aussi afficace sur une plaie que sur une brûlure, dans un document traitant des Egyptiens, cet autre peuple disparut lui aussi depuis des milliers d’années...L’histoire réservait bien des surprises des plus inattendues.

Depuis cette aventure, ils emportaient toujours de grands pansements découpés en de grandes bandes dans des draps de lit en coton qu’ils mettaient à bouillir pour les stériliser. Une fois calmé les bêtes, ils avaient alors changé l’attelage, mettant ces deux chevaux à la longe, puis étaient repartis.

Mais ce qu’ils craignaient le plus était l’attaque d’un taureau qui charge les chevaux, car à moins d’avoir le temps de le voir et d’épauler, le risque était grand de voir leurs précieux chevaux gravement blessés par un de ces fauves redoutables et imprévisibles. L’unique avantage de ce risque est que ces animaux se tenaient alors le plus souvent sur la piste, dégagés et ainsi visibles, car ils n’attaquaient généralement que ce qu’ils percevaient, donnant alors juste le temps des deux ou trois secondes nécessaires pour viser.

Ils étaient donc là, tous sur le qui-vive quand, et ils éclatèrent de rire, soulagés, car à plus de trente mètres devant l’attelage, une compagnie de sangliers déboula de la droite et traversa la piste en trottinant dans leurs grognements habituels, ils étaient une vingtaine environ, amenés par un énorme mâle aux redoutables défenses...Ils traversèrent le chemin et disparurent. L’alerte terminée, le convoi reprit lentement sa route ; ils avaient encore eut chaud.

-C’est pas encore pour cette fois, dit un gars en poussant un long soupir, sur la droite de Nicolas.

Comme calculé le convoi entra dans la ville de Toulouse aux alentours de trois heures trente du matin ; ils s’y enfoncèrent durant plusieurs kilomètres pour dépasser, comme dans la plupart d’une trentaine des grandes villes qui étaient les grands centres industriels, les ruines de ces immenses et sordides bidonvilles,

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campements faient de baraques hétéroclites habitées à l’époque par les millions d’immigrés venus du Levant et de la Frika ; quoique des peuplades du sud-est d’Euromorte ayant une longue tradition de nomadisme et rapine se joignirent inévitablement à eux...Flux incontrôlable et fatal qui en quelques courtes années avaient plus que triplé la population originale des villes, comme de celle-ci, suite à une infâme manoeuvre des Zanko-Khuigs et des politicards euromortes qui, pour ruiner le commerce de ces derniers et garder la monopole commercial du monde, certains même, allant jusqu’à affirmer que c’était dans le but de tuer la race blanche par un métissage forcé et intensif.

Les Zanko-Khuigs avaient obligé leurs valets aux ordres, les politicards locaux, et ce moins de trois années avant leur attaque générale contre l’humanité, à voter des lois pourtant anticonstitutionnelles et liberticides, et contre l’avis des peuples, pour faire entrer la Truiki dans l’Euromorte, et à sa suite logique et pourtant prévisible, toute la lie de ces régions aux populaces fanatisées. Et de suite après, comme c’était pourtant prévisible, cela avait déclenché une véritable invasion de millions de ces hordes de misérables d’une autre civilisation, autre religion traditionnellement impérialiste et haineuse de l’Occident.

Les violences hurbaines se déclenchèrent alors en une vaste guerre civile et raciale à l’échelle du continent. Guerre raciale qui ne voulait pas dire son nom, avec l’outrageante hypocrisie et collaboration, comme depuis toujours, des corporations des journaleux et des intellos, aidées si besoin de beaucoup d’artistes du tristement fameux show-biz traditionnellement prostitués des pouvoirs politico-financiers.

Engeances qui oeuvraient sournoisement depuis des décades à inhiber tout sentiment de noblesse et de droiture dans les esprits ravagés des populations occidentales. Toutes ces engeances traditionnellement et depuis longtemps réputées pour s’être prostitués aux pouvoirs successifs, comme les gens disaient alors, «Ils vont tous à la gamelle », tous figés au garde-à-vous devant les donneurs d’ordres, ces financiers apatrides honnis par les populations.

Conflit qui ravagea dès lors les grandes cités de l’Euromorte entière, qui dès lors furent condamnées à disparaître sous cet hallucinant déferlement de barbares au racisme anti-blanc ancestral. Ces blancs qui pourtant civilisèrent la plupart de ces pauvres hères crevant de misère la plus sordide à cause essentiellement de leurs satrapes politico-religieux, fanatiques, corrompus et sanguinaires. Toutes ces ethnies allogènes alors unies dans un pacte de sang pour attaquer, tuer les blancs, retrouvaient instinctivement leurs atavisme de clans et racismes propres à leur culture ancestrale, sentiments provoquant de véritables guerrillas entre eux.

Ces villes pliaient sous les rapts d’enfants, leurs trafics pour les prostituer, les amenant à voler des enfants pour les tuer et vendre leurs organes ; les viols des femmes et jeunes filles ; assassinats, incendies, attaque en bandes...Liste sans fin de malheurs. Une haine effrayante menait alors ces troupeaux d’apocalypse sauvages et puants. Leur haine irréductible du blanc, l’envie, la jalousie, la revanche de leur propre situation ignoble qu’ils ne devaient pourtant qu’à eux-mêmes, maintenus qu’ils étaient tous et de tous temps par leurs religieux pervers

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et corrompus, dans un Moyent Âge mental dégénératif. La volonté de détruire le blanc à jamais les aveuglait. Ils déboulaient alors, meutes immondes et horribles aux visages déformés par des rictus d’épouvante.

Le grand Léonidas et ses valeureux 300 guerriers s’étaient sacrifiés pour rien, encore et toujours trahis 2500 ans plus tard par ces éphores nouvelles versions, abjects serviteurs du mal le plus absolu en ces nouveaux temps sous le royaume de l’infect Mammon ; prélude à un messianisme de barbarie des magistrats.

Pour beaucoup, les cités en avaient régressé des siècle en arrière ; véritablement assiégées qu’elles étaient par ces masses sordides. Ces assiégés s’étaient retranchés derrière un no man’s land, celui d’une ceinture continue de dizaines de mètres de largeur d’immeubles qu’ils avaient dynamité à la périphérie de la ville, ne laissant d’ouvertes que quelques routes d’accès sur l’extérieur ; portes qu’ils gardaient nuit et jour pour prévenir des attaques de ces hordes sanguinaires.

Ils durent alors former des convois armés pour entrer ou sortir des villes, assurer les ravitaillements en vivres...Mais pour combien de temps encore ? Tous les corps de polices et gendarmeries obligés de s’y impliquer alors, assiégés eux-mêmes et pris entre deux feux : celui des allogènes de la périphérie et leurs propres populations, prisonniers eux-mêmes du siège, sinon ils se seraient fait écorcher vivants par leurs propres populations rendues folles de haine envers tous pouvoirs ; comme il en fut souvent au début pour les officiels : les maires et leurs adjoints, hauts magistrats, juges et avocats affairistes, officiers ministériels, patrons de Presse, etc., tous ces gens infâmes et traîtres aux leurs, furent assassinés avec fureur, lynchés avec leurs familles entières montrant une arrogance proprement débile et suicidaire car venant d’une caste qui avait été trop habitué à mépriser le peuple. En fait l’anarchie régnait dès lors dans ces cités autrefois prospères ; les tribunaux de justice incendiés, à leur place régnait le plus absolu chaos, seul maître de ce monde occidental si arrogant et maintenant agonisant lamentablement sous ces déferlantes fétides et insanes des hordes sauvages.

Sans doute, d’avoir ouvert cette boîte de Pandore dont il n’en restait plus au fond une seule once d’espérance pour quiconque, les Zanko-Khuigs, effrayés de leurs propres actes de démence, déclenchèrent plus tard ce génocide à l’échelle planétaire, la situation étant devenue irréversible et définitivement incontrôlable.

Ce fut alors la chance pour leur nouveau Monde : on ne battit pas de l’éternel sur des ruines, le vieux monde devait donc impérativement disparaître. Quand on pense à de telles situations imposées à leurs peuples par leurs politiques, on reste confondu d’une si grande perversion si criminelle, que de condamner sciemment son propre peuple à un si horrible destin, car ces fanatiques, barbares venant du Levant et de Frika, n’avaient évidemment aucun respect de la vie, comme l’entend un occidental.

Enfin passée cette banlieue sordide de ces baraquements, la plupart écroulés et

regorgeant de vermines, ils choisirent de prospecter une section d’une grande et large rue avec des vitrines de magasins, chaque équipe prenant un bloc

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d’immeubles à prospecter. C’est dans ces magasins qu’ils planquaient leurs chariots ; il suffisait de défoncer la vitre à la masse, déblayer l’espace intérieur et d’y faire entrer le chariot à reculons, les chevaux étant à la longe à côté, ou parfois, s’il y avait une place publique avec de l’herbe, ils les y laissaient en liberté ; il suffisait de les appeler pour qu’ils rappliquent aussitôt, quoiqu’ils ne quittaient guère l’entourage du campement, et de l’abreuvoir de leur chariot...Ces bêtes étaient intelligentes, et si un événement imprévu arrivait durant que les hommes étaient à l’intérieur des immeubles, ils étaient de suite avertis par leurs hennissements, pour ça ils étaient tranquilles.

Toutes ces villes offraient un spectacle de désolation complète...Avec le temps, les intempéries et les charognards faisait que les rues étaient jonchées de cadavres desséchés, entiers ou en morceaux disparates, comportant d’horribles mutilations dûes aux animaux. Depuis longtemps déjà, cette vision ne leur faisait plus ni chaud ni froid...une indifférence glaciale les habitait, car s’ils devaient ressentir un sentiment ce n’était que mépris et dégoût pour ces populations sombrées dans leur propre folie, cela et uniquement.

Leurs travail était épuisant. La plupart du temps ils devaient d’abord défoncer la serrure de la porte d’entrée des appartements, car la majorité d’entre elles étaient fermées à clé du fait que les gens étaient sortis pour ce grand jour de fête d’alors. Les quelques cadavres qu’ils trouvaient dans les appartements ou maison, étaient alors jetés dehors. Le fait qu’il fit chaud lors de l’attaque, fit que les fenêtres étaient ouvertes. Il fallait alors choisir les marchandises, tout descendre à l’entrée de l’immeuble, puis remonter, et ainsi de suite. Ils ne dormaient que six heures par jour. La nuit venue, ils attelaient les chevaux pour amener le chariot devant les entrées d’immeubles pour les charger, puis les ramener à l’abri pour le jour suivant.

Trois jours déjà qu’ils travaillaient d’arrache-pied, il était presque midi. Nicolas, avec Christophe, un collègue, descendaient une fois de plus du sixième étages, chargés comme des mulets. Ils allaient toujours par deux, chacun avec son armement complet des fois qu’un danger se présente ; rien de très facheux n’était jamais arrivé jusqu’alors, mais...Il leur tardait de remonter car ils avaient décidé de stopper avec le reste de l’équipe pour casser une croûte...Ils l’avaient pas volé, ça non quant, à peine arrivés au rez-de-chaussée, ils entendirent les chevaux hennir bruyammant et donner des coups de sabots autour d’eux.

Ils jetèrent leur chargement par terre et coururent vers la petite place au coin de l’immeuble où ils les avaient laissés leur attelage. Un spectacle atroce les y attendait. Epouvantés, ils virent leurs quatre chevaux attaqués par une meute de...c’était le seul mot qui leur vint à l’esprit, une meute d’une dizaine d’êtres humains, hâves, d’une maigreur épouvantable et vêtus de haillons et qui menaçaient les chevaux avec des couteaux de toutes sortes. Deux d’entre eux gisaient déjà au sol : l’un était mort, le crâne défoncé et l’autre, l’épaule fracturée pendant à l’équerre hurlait de souffrance et de rage, rendant les chevaux encore plus agressifs. Ils tentèrent de stopper l’agression de ces hommes redevenus des bêtes sauvages, mais ces derniers se retournèrent contre eux deux, hurlants de rage, les attaquant, voulant visiblement leur faire la peau...

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Ils se regardèrent un instant, puis d’un commun accord ils dégainèrent leurs pistolets et les massacrèrent sur le champ. Personne ne devait pouvoir menacer un membre de leur communauté sans devoir le payer de sa vie. Telle était leur règle d’airain. Les autres équipes aussi alertées par les hennissements arrivèrent en courant, et ils en déduisirent vite que ces hommes devaient faire partie d’un groupe qui devait se terrer quelque part dans la ville ; ils représentaient dès lors un danger flagrant pour l’avenir. Ils partirent en chasse, les septs équipes, chacun pour explorer un secteur différent ; ils convinrent que ceux qui les trouveraient tireraient trois coups de feux en l’air.

Lors du massacre de ces hommes-bêtes, la coutume de leurs armes équipées de silencieux leur fut encore des plus profitables...Une équipe trouva l’antre du reste de la meute vers les six heures du soir, à trois kilomètres de là. Ils étaient une vingtaine, hommes, femmes et deux enfants épouvantablement maigres ; tous hagards, hargneux, se levant dès qu’ils les aperçurent, des armes de fortunes à la main pour les agresser, sans même tenter de dialoguer. Ils furent abattus séance tenante par les gars qui les trouvèrent ; quand les autres arrivèrent tout était déjà terminé.

Ce fut un choc violent pour tous, ils n’auraient jamais imaginé que des hommes tombassent si bas...la réalité dépassait l’entendement. Ils retournèrent vers leur campement, et durant que les autres reprenaient leur travail de récups, Christophe et Nicolas prirent des cordes, attachèrent les cadavres par les pieds et les tirèrent avec deux chevaux jusqu’à leur antre qui devint leur tombeau.

De retour à l’immeuble qu’ils prospectaient, ils parlaient déjà d’autre chose, ce triste épisode faisant déjà parti du passé ; seuls, les vivants et leur futur les intéressait, le reste...

-Tu sais, Christophe, lui dit son compagnon, ce fait lamentable me fait subitement me souvenir d’une pensée d’un écrivain de l’ancien temps...Je ne suis plus très sûr du nom de l’auteur, mais peu importe, voici ce qu’il disait ; je l’ai retenu par coeur car je le trouve admirable et correspond parfaitement à notre société actuelle, voici. « C'est notre tâche : donner autant de sens que possible à cette vie qui nous a été accordée, cette réalité avec laquelle le destin nous a entourés ; vivre de telle manière que nous puissions être fiers de nous-mêmes ; agir de telle manière qu'une partie de nous survive ».

-S’ils l’avaient écouté, tous ces fous d’alors, ils n’en seraient pas arrivés à ce point...Faut croire qu’ils portaient leur mort dans leurs esprits de détraqués.

-Ouais...faut croire que chacun mérite ce qui lui arrive en définitive... Une fois encore, l’inflexible loi de la Vie sacrée avait irrémédiablement parlé. Enfin, après cette longue semaine passée à la récup, ils préparèrent leur départ,

soulagés à la pensée de revoir les leurs, les amis, les amours du moment, certains leurs enfants...Ils s’apprêtaient fiévreusement, contents de quitter cette ville sinistre sans devoir y revenir avant un bon temps ; de tristes moments ne les y retenaient vraiment pas.

Les chariots étaient chargés à bloc, tout allait pour le mieux. Il n’y avait plus qu’à attendre la nuit complète, d’ici une heure environ pour atteler les chevaux

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et repartir. Roger et Germain, deux autres équipiers de l’attelage que nous connaissons bien maintenant, sortirent tranquillement, harnachés de leur toiture de protection et leurs carabines à l’épaule, pour aller lentement récupérer les chevaux qui étaient toujours sur cette place bien fournie en herbe haute et verte, du reste, ils n’avaient pas touché à leur stock de fourrage du chariot ; seule la réserve d’eau avait était nécessaire. Sereins, ils discutaient avec grand intérêt de ce qu’ils allaient faire en rentrant à la station Bertrand...

-En arrivant, la première chose que je fais, dit un Roger ravi, je fonce aux douches, je me fais une beauté et je vais illico me sauter la Julie, la grande blonde des Recherches bios, au niveau quatre, tu la connais ?

-Pourquoi, t’imagines peut-être que t’es le seul à te la faire la Julie ? lui répondit son collègue en riant, elle est bien bonne celle-là.

-Bien sûr que non, je suis pas givré à ce point-là, non ? -Ah bon ! tu m’as fait peur, mon pote. -Et toi, pour qui que t’en pince en ce moment ? -Ma jument ! -Pauvre Vaillante, dit-il riant aux éclats, mais à part elle, peuchère...qui c’est y

qui a les faveurs de monsieur, ces temps-ci ? Ils s’arrêtèrent pour converser plus à leur aise. La rue en enfilade qui montait

derrière eux deux, la place là en bas, avec les chevaux qui les regardaient arriver, piaffants, tous contents car ils devaient sentir que l’heure de l’écurie approchait.

-Franchement, avec notre job à toujours courir les chemins...pour la question radada faut pas être très précis, ni encore moins s’accrocher à une de ces dames ; tu prends ce qui passe et bien content encore.

-Ouais...Roger, pensait à son béguin du moment, sa grande blonde...le regard perdu dans le vague, par-dessus l’épaule de son collègue ; il voyait ainsi mais sans vraiment la voir, toute la longue rue en enfilade...Ouais, répéta-t-il, mais faut y croire parce que sinon, si tu ve...

Germain vit soudain son collègue devenir muet et qui regardait par-dessus son épaule, avec un air inconnu, un étrange mélange de peur et d’effarement, il allait se retourner quand Roger le retint fermement par son treillis.

-Germain, tourne-toi très lentement, et dis-moi ce que tu vois...des fois que je devienne fada, lui dit Roger avec une voix sourde et rauque, la respiration comme en suspend.

Germain se retourna lentement sur lui-même, sa main se dirigeant vers son pistolet automatique, mais Roger la reteint en faisant non de la tête...D’abord il ne vit rien, surpris, il allait dire à son collègue d’arrêter ses plaisanteries quand, il lui sembla distinguer une vague forme éclairée des trois quarts arrière par le soleil couchant...C’était comme un vague paquet de brume qui était environ à trois mètres du sol et à deux cent cinquante mètres d’eux, juste au-dessus de la bosse de la montée de la rue et, chose incroyable, cette chose se déplaçait lentement...avançait vers eux de quelques mètres puis stoppait, allant d’un côté de la rue, puis de l’autre, comme l’impression qu’elle cherchait quelque chose, fouinait de partout...et tout cela dans le plus grand silence.

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-Qu’est-ce qu’on fait d’après toi, maintenant avec ce machin...on sait même pas si on rêve ou si c’est réel, hein ? demanda Germain.

-Faut se préparer à foutre le camp d’ici en vitesse chacun de son côté pour essayer d’avertir les autres, si ça merdoit de trop...pour l’instant c’est tout ce que je vois à faire...ça n’a pas l’air de vouloir attaquer, on dirait en tous cas...

-Une idée : discutons et faisons semblant de ne pas le voir et pistons-le du coin de l’oeil...on verra bien ce qu’il va faire, d’ac ?

Ils poursuivirent une conversation imaginaire, nerveux à l’extrème, prêt à défourailler ou partir en courant...ou les deux à la fois, car ce machin évanescent leur semblait pourtant bien réel maintenant, et ils n’auraient pour rien au monde tourné le dos à cette chose. La situation était figée, complètement bloquée.

Puis, la chose, comme ils disaient, s’immobilisa un bon moment, puis se mit lentement en mouvement et avança carrément vers eux. Elle n’était plus qu’à quinze mètres maintenant et était montée à quatre ou cinq mètres de hauteur, semblant visiblement les observer...Regards en coin, ils crurent même percevoir vaguement deux visages qui les regardaient depuis l’avant de ce nuage maudit....Puis la chose fit un bond en avant à une vitesse stupéfiante et vint se placer sur leurs arrières et à la même distance que précédemment.

Ils firent instantanément un tour complet sur eux-mêmes, nez en l’air. -Maintenant c’est rapé pour leur faire croire qu’on les voit pas, dit Germain

nerveux, ça éclaircit la situation...moi je vais les flinguer dit-il, en décrochant brusquement sa carabine de son épaule gauche et la portant à la volée à la visée sur l’autre et tira une balle...mais il n’eut pas le temps de viser que le nuage avait disparu à la verticale et à la vitesse de l’éclair.

Ils restèrent plantés là pour un bon moment comme deux ahuris, cherchant la chose vers le haut, en vain ; le nuage avait disparu d’un coup, et ils ne trouvaient aucune explication à ce phénomène, sauf qu’ils étaient certains maintenant que cette machine, car s’en était bien une, était dirigée par des êtres intelligents et, la seule chose rassurante dans tout ça c’est qu’ils ne semblaient pas leur vouloir du mal, car comment se défendre contre un engin invisible ?

Ils récupérèrent leurs chevaux et de retour au campement mirent leurs collègues au courant de cette incroyable et mystérieuse rencontre. Ces derniers se moquèrent copieusement d’eux durant un bon moment puis, devant leur insistance, ils prirent la chose au sérieux eux aussi, et se promirent d’un commun accord de redoubler de vigilance durant le retour. Ce comportement étrange et sans signification logique de la part de cet engin les laissait grandement préoccupés...rien de pire que l’inconnu pour stresser son homme.

Le voyage de retour se passa sans incident, mais ils avaient déjà donné à l’aller, et ils arrivèrent à Bertrand neuf nuits plus tard, fourbus mais heureux d’avoir rempli leur mission de façon optimale, ce qui était leur objectif principal, sinon unique. Toute la base fut mise au courant de leurs aventures et de la rencontre avec un engin volant presque invisible, ce qui perturba la tranquilité de tous de savoir qu’un nouveau type de danger éventuel rôdait dès lors au-dessus de leurs têtes. Toutes les stations furent bien entendu mises au courant de cet incroyable événement, et de ce nouveau danger potentiel.

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Ce que ces équipages de récups ne se doutèrent jamais, c’est que ce fameux nuage les suivit à basse altitude durant tout leur trajet de retour, et qu’ainsi leurs occupants repérèrent leur grotte, localisation qu’ils marquèrent sur une carte de ce territoire du sud de la France, pour eux nommée encore ainsi.

L’étrave fendait lentement et puissamment les flots de cette mer bleue sombre,

rejetant deux vagues d’argent et symétriques de chaque côté de l’étrave tulipée, montant et redescendant lentement, suivant la très légère houle dans cette nuit d’un incroyable calme. Les étoiles brillaient comme souvent par de semblables nuits, lumière scintillante se mêlant à la pâle lueur lunaire qui lançait sur ces flots des reflets de métal argenté. Seul, le bruit sourd et lointain des deux moteurs diésel enfouis dans les entrailles du navire, faisait monter comme une lente et mouvante mélopée. Sons distincts entrant épisodiquement en résonance, en longues harmoniques chantantes, entrant alors en osmose avec cette houle faisant monter puis redescendre l’avant du navire. Deux êtres vivants semblant s’accoupler, l’un fait de métal vibrant et l’autre de cette masse formidable et profonde de la mer.

Ils venaient d’enfin quitter ce port d’Ajaccio où, une semaine plus tôt, Michael, le commandant du navire avait été contraint de se réfugier, suite à une inexplicable avarie d’un des deux moteurs de grande réputation de fiabilité pourtant. Avarie incompréhensible, du jamais vu pour un super technicien tel que lui. Ils avaient dû en fin de compte attendre les pièces et les tecniciens venant du continent. Passés ces premiers moments de rage et d’impuissance face à ces imprévus, ils avaient pris la chose avec philosophie, se payant du bon temps dans les restaurants et cabarets corse, où ils savourèrent la cuisine et ces chants polyphoniques autant que mélancoliques de ces chanteurs insulaires.

Le jour allait se lever d’ici à peine une heure et Michael était seul à la barre, comme presque toujours ; il adorait ces heures de solitude pleine de cette vie marine qui était toute sa vie, sa passion même ; il n’aurait pour rien au monde abandonné ce métier de marin ; loin de tous et de toutes ces infamies des terriens, là-bas au loin encore.

À seulement quelques petites heures devant l’étrave, les attendait l’éternelle merde de ce monde pourri...Seul, sur son bateau et cette mer, merveilleuse amie, il se réalisait pleinement et profondément, se reconstruisant un monde fait d’amour et de justice, un monde où les hommes seraient d’honneur, généreux et forts...Mais qui pouvait ne pas rêver d’un tel paradis ? pensa-t-il désabusé.

Michael est un homme élancé, dans la trentaine, au visage mince, les cheveux et yeux noirs, typique de ces gascons de légendes ; un homme fier, une âme généreuse et entière ; homme de parole au caractère entier.

Il entendit dans la coursive menant à la timonerie, une porte se fermer doucement puis les pas qu’il reconnut de suite, un sourire de plaisir se dessina sur ses lèvres car sa jeune femme venait de se réveiller et venait le retouver, Alexandra, sa belle et magnifique romaine de braise, qu’il avait rencontré l’année précédente alors qu’elle était en vacance avec une amie.

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Depuis toujours, c’est mystérieusement en Italie qu’il avait rencontré les plus belles rousses de sa vie, justement le type de femme qui le faisait flasher à tout coup et, fantastique miracle, il en avait une rien que pour lui, et quelle rousse, mamamia, pensait-il ravi, de celles les plus belles, aux cheveux d’un roux sombre, auburn comme on disait, des cheveux flamboyants, lumineux...un incendie d’or et de pourpre qui lui avait dévoré le coeur dès qu’il la vit.

Y repensant avec chaleur il en rit tout seul et revoyait la scène de leur fabuleuse et inexpliquable rencontre, comme si c’était à l’instant.

Ainsi il sortait de la salle des machines, revêtu de sa combinaison de travail verte et tachée, venant alors de monter sur le pont et, devant initialement monter à la timonerie, c’est alors qu’il fut brusquement pris d’une inexplicable envie de descendre de suite sur le quai. Il n’avait toujours pas compris à ce jour ce qui lui avait pris alors d’agir ainsi ; mais bref, il arriva donc à la coupée pour descendre sur le quai, et il venait de s’y engager quand, éberlué, il vit sur ce dernier, deux jeunes femmes regardant son bateau mais, de suite, il n’eut d’yeux que pour cette jeune femme de vingt printemps à peine, et qui lui souriait, le regardant avec ses beaux yeux verts.

Il s’immobilisa, fasciné par ce regard vibrant de vie, une splendide et oppulente chevelure rousse encadrant son visage un peu ovale, nez fin et droit, bouche large aux lèvres charnue et vermeilles...et cette peau...il crut en défaillir. Elle avait un maintien royal, une attitude noble et fière, comme on n’en voyait plus en ce monde fade et superficiel et, il venait, il le sentit d’instinct dans toutes ses fibres, au plus profond de ses tripes même, lui le dragueur invétéré et célèbre sur la place, de tomber amoureux fou de cette merveille incendiaire. Il descendit la coupée en courant les quelques mètres les séparant d’elles et se présenta à ces deux ravissantes et, elle lui répondit, avec un inoubliable accent italien et dans un français plus que correct.

-Je suis enchantée de vous connaître, Michael, je m’appelle Alexandra, et voici mon amie Josefa...C’est vous le commandant de ce bateau, Michael ? Il est très beau.

Il les avait de suite invité à bord pour boire une coupe de champagne, mais elle tenta refuser, lui disant avec son accent fou et adorable, et ce sourire...

-Je ne sais pas si je dois accepter l’invitation d’un inconnu, Michael...c’est...c’est pas convenable, peut-être...et pas prudent.

Il eut alors le réflexe génial et inusité, il en riait encore : deux policiers passant alors sur le quai, il les aborda au culot et leur dit.

-Messieurs les policiers, un instant s’il vous plaît, voyez : j’invite ces deux ravisantes et exquises jeunes femmes à mon bord pour y boire une coupe de champagne...Pourrez-vous témoigner au besoin de mes bonnes et honnêtes intentions à leur égard ? Mille fois merci messieurs, et il les plaqua là, retournant vers elles.

Les deux flics avaient acquiessé en riant puis avaient continué leur chemin...Et elles étaient montées à son bord...et il les avait reçu dans le salon...et il était sur un nuage...et il savait pertinemment qu’il ne la lâcherai plus jamais, un amour fou les avait assailli au même instant tous les deux sur ce quai...et il le lui avait

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dit un truc insensé, lui le fier dragueur, alors qu’il la connaissait depuis moins de cinq minutes, lui prenant la main, la pressant dans les siennes, yeux dans les yeux, fascinés l’un par l’autre, « Alexandra...jamais tu ne repartiras de ce bateau, je t’enlève pour toujours, parce que je suis fou amoureux de toi », et elle s’était alors blottie contre lui, souriante, lui disant d’une petite voix, « Oh oui ! Michael », en le regardant de ses yeux extraordinairement verts et lumineux...et il avait cru en mourir d’émotion...

Il les avait invitées toutes deux le soir même pour diner dans un restaurant intime et sympa qu’il connaissait sur le port...Ils avaient dansé avec délices, enlacés, les yeux dans les yeux...puis elle avait alors plaquée là son amie Josefa, qui était repartie seule et furieuse à leur hôtel ; puis ils étaient retournés au bateau, impatients, et ils s’étaient aimés comme des fous...alors qu’elle était inconcevablement, follement vierge...Cet amour fou, délirant et violent lui avait à elle aussi littéralement chamboulé son esprit et son âme.

Elle lui avoua même, pour tenter d’expliquer leur délirante folie réciproque, que trois jours avant encore, elle ne savait même pas où passer ses quelques jours de vacances. C’est à une terrasse d’un bar à Rome, en écoutant parler un jeune couple de deux très grands touristes d’un blond platine et certainement nordiques, vue leurs tailles, qu’elle eut subitement cette envie irrésistible de venir ici et...c’est incroyable, Michael, lui avait-elle dit alors, à peine arrivée à l’aéroport, elle avait décidée, sans demander l’avis de sa collègue qui devant son impétuosité ne put que la suivre alors avec fatalisme, qu’inexplicablement elle décida de descendre dans un hôtel sur ce port, qu’elle ne connaissait pas du tout. Elles avaient posé leurs bagages et avaient couru directement sur ce quai...et ils s’étaient rencontré de suite, à peine arrivée ; c’était totalement irréel et fantastique. Michael, lui avait-elle dit alors, on dirait qu’une force nous a irrésistiblement poussé l’un vers l’autre, car jamais avant je n’aurais commise de telles folies, un tel cataclysme.

Leur union avait été un coup de folie justement. Retournée à Rome en coup de vent, elle avait tout plaqué en une semaine ; largué sa riche famille de diplomates romains, larguée même son inséparable mamma. Elle avait semé une tempête derrière elle, jeté une famille entière dans la plus totale consternation, jeté aux quatre vents un avenir grandiose, foulé aux pieds un projet familial de mariage molto bêne. Et tout ça pour qui ? Un vulgaire et infernal marin, uno béllo francese ! Et elle avait débarqué à l’aéroport voisin, tornade tempétueuse, empressée, irrésistible, ses yeux lançant des éclairs d’émeraude. Elle arrivait ainsi avec une montagne de bagages et ses valises de bouquins...et ils s’étaient aimés comme des fous furieux, le monde n’existant plus autour d’eux...

Michael était ému de repenser à tous ces derniers mois de folies pures... Elle émergea des marches venant la coursive, à ses côté, lui étant assis sur le

haut siège de pilotage, les jambes allongées, les talons sur le tableau de bord, sa position favorite, il se pencha pour l’embrasser sur les lèvres.

-Bonjour, mon amour, tu as bien dormi ? Oh ! je vois que oui, rien qu’à voir tes yeux encore gonflés de sommeil.

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-C’est dommage de ne pas être restée avec toi et profiter de cette si belle nuit, mais je n’arrive pas à tenir les yeux ouvert toute la nuit comme toi...Comme c’est beau, Michael...regarde ces reflets de la Lune sur l’eau. Veux-tu que je te prépare le petit déjeuner maintenant, chéri ?

-Bonne idée, tu déjeuneras avec moi, là sur la banquette...en amoureux, avant que les marins ne se réveillent ; ce seront nos derniers petits instant en amoureux, avant de retrouver le port là-bas, avec tous ces fous furieux, débiles et arrogants de leur nullité crasse. Chaque fois qu’ils pensaient tous les deux à ce monde en décomposition qui était malheureusement le leur maintenant, ils enrageaient. Ils déjeunèrent ainsi tranquillement, en amoureux, heureux et riants de leur immense bonheur de vivre ; derniers moments de calme et sérénité...

Mais ils ne le savaient pas encore, ils ne pouvaient même pas l’imaginer, ils ne pouvaient pas savoir qu’ils allaient entrer dans une tourmente comme il n’en avait jamais existé sur ce monde, époque de chaos qui allait ravager leur bonheur paisible...alors qu’ils étaient encore à quelques heures de mer du port, à l’aube de ce 1er mai de 2015.

Ce fut seulement avec la force de l’habitude, quand le bateau fut amarré et le calme complet revenu, classique après chaque manoeuvre d’accostage, que François, le marin qui était aux amarres arrières, déboula en trombe dans la timonerie où ils étaient tous les deux, et leur cria, livide, regard effaré, se cramponnant au chambranle de la porte.

-Ils sont tous crevés ! Ils sont tous raides morts ! Passé le moment d’effarement d’une si incroyable déclaration, ils coururent à

l’arrière, suivirent François qui ne pouvait plus sortir un mot, la gorge bloquée par l’émotion...Francesco, l’autre marin, un cousin de sa femme, que par pure gentillesse et pour lui être agréable il avait embarqué pour ses congés, se tenait sur le pont, le visage blanc et tendu, regardant la vaste pelouse devant le bateau...La route qui la longeait, les quais à droite et à gauche...où des dizaines, des centaines de cadavres sans doute, en ce jour de fête, jonchaient le sol...

-Je suis allé en voir deux ou trois, dit Francesco, ils sont encore tièdes, il n’y a pas longtemps que c’est arrivé. Ils se turent et écoutèrent...Un silence glacial s’étendait sur la ville ; à par les faibles bruits de deux ou trois moteurs de voitures qui plus loin tournaient encore au ralenti ; d’autres véhicules étaient enchevétrées les uns dans les autres, avaient écrasé quelques corps, défoncé des vitrines ; même le bar où ils allaient souvent boire un coup, au loin, avait une voiture encastrée dans la porte pendante sur le côté, tables renversées, des cadavres partout...Incroyable spectacle qui leur glaçait le coeur.

Alexandra réagit la première. Elle bondit dans le carré et ressortit avec son tévéphone et tapa à toute vitesse un numéro sur le clavier et attendit, le visage déformé par l’angoisse...Elle en tapa successivement d’autres, avec le même résultat négatif, puis elle s’effondra dans un fauteuil.

-Michael, ô Michael, j’ai appelé Rome, Milan, Capri, Florence...il n’y a plus personne...Michael, il n’y a plus personne, répétait-elle ainsi plusieurs fois, livide...il lui prit l’appareil de ses mains tremblantes.

-Attends, je bigophone à Paris.

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Le résultat fut identique. Ils appelèrent alors tous et dans tous les coins, en France et ailleurs et se rendirent enfin à l’évidence que leur monde venait de disparaître à jamais. Ils tombèrent de suite tous d’accord pour reconnaître pour seuls et uniques coupable de cette monstruosité, les Zanko-Khuigs, les seuls assez fous et suffisamment dégénérés et puissants pour commettre un acte aussi insensé et abominable.

C’est à cet instant aussi qu’Alexandra se rendit compte de la chance fabuleuse que Francesco avait eu d’être embarqué à bord depuis juste deux jours, grâce à la gentillesse de Michael...Elle l’embrassa avec passion, le remerciant dix fois d’avoir ainsi sauvé son cousin, chose que fit aussi ce dernier, qui réalisait, livide, qu’il revenait de loin. Puis comme d’autres rescapés miraculés le firent ce même jour de par tout ce vaste monde d’horreurs, ils commencèrent à dégager les impératifs de leur situation, ce qu’ils devaient faire pour survivre et, c’est Michael qui eut le premier l’idée de se réfugier loin des villes, dans un grotte ; il n’en connaissait qu’une qu’il avait visité quelques années avant, la grotte des Demoiselles, dans l’Hérault. Devant le peu d’intérêt du marin François pour cette solution, Michael leur dit.

-Ecoutez, la grotte est la plus adéquate à ce cas qui brutalement devient cas typique de survie...Il n’y a pas d’autres solutions, les endroits habités vont être vite invivables avec ces monceaux de corps en décomposition. Il nous faut nous équiper dare-dare de tout ce qui nous sera indispensable pour survivre longtemps dans des conditions acceptables, et foutre le camp d’ici.

Nous emporterons le nécessaire que nous prendrons dans les magasins qui sont tous à notre disposition ; et sachez une chose, une chose capitale...dans cette grotte il y a une rivière souterraine qui, suite au mini séisme qui secoua la région en février 2013, il y a tout juste deux ans, une paroi de la grotte s’éffrondra, laissant le passage à une rivière souterraine jusqu’alors insoupçonnée et qui envahit la grotte sur vingt-six mètres d’extension, formant un petit bassin de retenue, puis elle replonge sous terre de nouveau. Ainsi donc, la présence de l’eau est le seul garant de survie à long terme.

Pour vous donner une idée des possibilités de survie, je me souviens d’un fait incroyable qui eut lieu il y a dix ans tout juste ; je m’en souviens bien car à la même époque je m’étais acheté une grosse moto, c’était en 2005 : un homme réussit à survivre durant 38 jours environ, perdu dans le noir complet dans une champignonnière désafectée, sans aucun équipement autre que commun ; c’était dans les Hautes-Pyrénées, vers Tarbes, je crois bien...Il survécut sans aucune source d’eau, suçant les gouttes d’eau sur les pierres et durant tout ce temps il se nourrit de si peu de chose qu’il maigrit de 18 kg...et néanmoins ils le retrouvèrent en bonne condition physique. C’est le moral exceptionnel de cet homme commun qui le sauva (sic).

Alors, qui m’aime ou me fait confiance me suive ; et ceux qui viennent avec moi acceptent de suite mon commandemant inconditionnel !

Ils partirent avec leurs vehicules à la chasse de deux ou trois camions, avec la ferme intention de s’équiper au maximum en allant dévaliser l’hypermarché à la sortie de la ville, à côté de l’accès direct à l’autoroute. Ils visitèrent aussi la

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caserne des pompiers et gendarmeries pour les armes et autres, les pharnacies, librairies, etc.

Ils prirent l’autoroute à la nuit tombée, épuisés, livides. Ils étaient quatre survivants, quatre camions chargés à bloc se suivaient en roulant prudemment. Des milliers de véhicules bloquaient les voies, il leur fallait slalommer entre eux et parfois les pousser sur le côté, et aussi rouler sur les corps...Paysages d’horreurs sans fin, des monceaux de carcasses encastrées encore fumantes n’étant plus que ruines noircies et nauséabondes.

Ils s’arrêtèrent à une station service pour faire les pleins des véhicules et se ravitailler en boissons et aliments, Alexandra alla aux toilettes pour se doucher.

Michael la vit revenir au bout d’un long moment, le visage mouillé de larmes, tenant dans chaque main, celles de deux jumelles, deux belles fillettes aux cheveux chatains d’environ douze ans, leurs visages ravagés de pleurs, de peur et d’angoisse.

-Michael, lui dit-elle en lui faisant un discret clin d’oeil, émue, regarde qui j’ai trouvé, ces deux ravissantes grandes filles, elle lui présenta : Julie et Julia. Michael est mon mari, leur dit-elle, vous allez venir avec nous et...nous serons votre papa et votre maman maintenant, d’accord ? Nous allons nous aimer très fort tous les quatres...Il y a aussi deux amis avec nous qui vont beaucoup vous aimer aussi, et nous allons tous vivre ensemble...Nous allons dans un endroit où on ne risquera plus rien, et qui est très, très joli et...nous serons tous heureux de nouveau...

Et c’est ainsi que leur petit groupe augmenté de ces deux fillettes arriva au lever du jour à cette fameuse grotte des Demoiselles où, miracle, un groupe d’une quinzaine de personnes, donc huit autres enfants, trois garçons et cinq filles y étaient déjà réfugiés. Eux aussi avaient dévalisé les magasins et casernes, trois autres camions chargés jusqu’à la gueule attendaient d’être déchargés, ce qui avec les leurs leur prit deux semaines d’un travail acharné et harassant...

Michael devint très rapidement le leader de cette communauté nouvelle. Son habitude du commandement, plus son savoir technologique furent déterminant pour le développement de la station, en collaboration avec un autre rescapé qui était un technicien en électricité. Ce furent eux deux qui adaptèrent une installation électrique de fortune qui fut prépondérante à leur développement, sinon le risque de régression était bien présent ; sans lumière et force d’énergie, l’homme a de grandes chances de replonger à l’âge de la pierre polie.

Son compagon, savait Alexandra, comme tous ces hommes de mer, était d’une immense débrouillardise, il savait tout faire de ses mains...Avec lui, un problème de quelqu’ordre qu’il soit trouvait toujours une solution rapide, logique et essentielle. Que serait-ils devenus sans un homme pareil, la majorité des autres étaient de bonne volonté, là n’est pas la question, mais ils n’avaient que très peu d’idées et encore moins d’initiatives ; ce qui ressortait d’une logique dramatique car venant tous d’un monde d’assistance étatique à outrance, système sciemment développé depuis des décénies pour justement annihiler les esprits de ces masses populaires rendues amorphes et cependant contentes et fières de leurs illusoires valeurs démocratiques, croyaient-elles, alors qu’elles étaient pieds et

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poings liés aux décisions de leurs tortionnaires esclavagistes, la clique vendue et corrompue jusqu’à la moelle de leurs politicards.

Alexandra, comme eux tous, passé les dix-huit premiers mois où ils avaient travaillé très dur pour aménager leur grotte, avaient peu à peu enfin retrouvé une nouvelle normalité de vie, relativement bien installés, avec même un minimum de confort, grâce à Michael toujours. Le côté rationnel, corporel de leurs existence étant enfin assuré, elle qui était d’une grande culture de par l’éducation élitiste dont elle avait bénéficié, ainsi que son goût naturel pour la recherche concernant les civilisations passées sur cette terre ; une nouvelle étant en gestation, la leur, mieux même savait-elle, car ils étaient une nouvelle humanité naissante, fantastique réalité qui lui illuminait son esprit d’une intelligence vive ayant un remarquable et rare pouvoir d’analyse et de synthèse.

Michael était sans cesse ébloui par cette intelligence exceptionnelle et comme toujours dans ces cas rares mais authentiques, d’une grande et émotionnante modestie.

Ils en avaient longuement parlé tous les deux, avec son Michael, du grand danger les menaçant tous si l’on n’ínculquait pas de force dans ces esprits malades, et particulièrement aux jeunes, une idéologie. Qu’ils prennent de suite conscience de leur valeur intrinsèque et unique...Qu’ils étaient seuls face à eux-mêmes et qu’ils ne trouveraient la force de lutter et de s’élever spirituellement que de cette prise de conscience de leur unicité.

Elle voulut alors lui expliquer avec preuves à l’appui des documents de sa vaste bibliothèque informatique, des preuves et de la nécéssité d’exclure, tuer de suite dans l’oeuf ces concepts de religions qui avaient aussi fortement contribuer à mettre en esclavage des sociétés disparues depuis longtemps déjà, et pour finir par une logique et suite implacable, par anéantir l’humanité.

Mais elle prêchait un converti, Michael savait tout cela depuis longtemps déjà, avec moins de science que sa compagne, soit, mais étant devenu de suite athée depuis qu’il avait fait sa première communion, de force, suivant la coutume, forcé par ces populaces pour lesquelles il n’avait que dégoût.

Lui, un homme d’honneur avait senti d’instinct ces pratiques néfastes à l’homme ; son métier le tenant loin des mass-médias comme la TV, qu’il avait en horreur, ayant compris depuis longtemps déjà que c’était devenu l’arme de prédilection du et des pouvoirs pour manipuler les foules. Ils convinrent alors qu’il leur fallait, pour convertir les autres à cette nouvelle normalité seule garante d’un renouveau vital, faire une sorte de coup d’état.

Imposer une dictature limitée dans le temps. Comme mes ancêtres le firent, Michael, lui dit-elle, ces fameux Romains

rétablirent des situations par l’établissement de la dictature d’un seul homme, chargé avec les pleins pouvoirs militaires de restaurer la paix et l’équilibre dans leur société du moment, étant convenu qu’au bout de six mois il devait rendre des comptes sur les résultats obtenus. Il y en eut de fameux, tels les Camille, Cincinnatus, Fabius Maximus Cunstator. Mais qui se souviendra de ces immondes politiciens de ces dernières générations ? Personne, sauf pour les mettre tous dans la poubelle de l’Histoire, véritables ordures puantes.

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C’est ainsi pour finir que le respect de l’Homme, son intégrité physique et morale sacrée fut imposé à tous, marqué au fer rouge dans ces esprits déboussolés, par ce jeune couple éclairé, honnête et courageux. Puis, Alexandra eut un entretien des plus délicats avec son compagnon ; elle lui expliqua que l’on ne pourrait créer une Humanité totalement heureuse et responsable que si l’on inculquait la notion élémentaire de l’amour total et respectueux de l’autre, ceci incluant immanquablement le développement d’une sexualité libre, pleine, entière et responsable.

Sinon, lui dit-elle, ils vont retomber dans les affres des tabous et autres débilités castatrices et ils ne referont que continuer les coutumes suicidaires des autres disparus, transmisent encore et toujours par leurs parents actuels.

Ainsi...elle lui dit qu’elle allait leur débloquer l’âme, à tous ces jeunes qui montaient à l’âge de découvrir l’amour avec un grand A...Elle décida donc de leur apprendre à faire l’Amour grandiose.

Elle instaura alors dans un local approprié et confortable, que Michael aménagea lui-même...avec amour, des cours d’Amour. Elle s’y impliqua elle-même, apprenant à faire l’amour aux jeunes à partir de quatorze ans. Elle apprit aux garçons à l’aimer charnellement et totalement, leur enseignant, avec les filles impliquées, toutes les positions et techniques de l’amour charnel et divin, leur enseignant du comment tirer le maximum de jouissances de leurs jeunes corps et de leurs âmes. Leur enseignant le respect absolu de l’autre ; leur mutuelles décisions inviolables d’accepter ou non un relationnement sexuel, mais elle leur enseigna que l’amour charnel de deux Êtres était la chose la plus belle et la plus importante pour leur bonheur commun, et qu’ils devaient le pratiquer naturellement et sans honte stupide ni retenue aussi souvent qu’ils en avaient envie.

L’Amour doit devenir le flambeau de notre jeune Humanité, la marque particulière et unique qui vous révèlera comme uniques et immortels, car seul l’amour résiste à tout. Le respect et amour total de l’autre, l’honneur et la générosité vous mèneront seuls dans les étoiles. Sinon, vous disparaîtrez dans un insondable malheur comme l’autre monde vient de vous en donner un triste et épouvantable exemple, car ils n’étaient menés que par la haine, l’égoïsme, l’orgueil, sans plus aucun idéal. Leurs âmes mortes, détruites par ces idéologies de mort des religions qui avaient tué leurs rêves d’existence dans la dignité la plus élémentaire.

Ces enseignements furent rapidement répandus dans toutes les communautés, accueillis d’instinct avec empressement, divulgués dans les stations autour d’eux, devenant plus nombreuses chaque jour...Ainsi, cet amour libre typique de cette Humanité eut pour principale génitrice, cette Femme extraordinaire de générosité, dynamisme et beauté remarquable, Alexandra, cette fière et noble romaine aristocratique et sensuelle qui imprima la foi dans ces Humains, au plus profond d’eux-mêmes, ce qui allait les amener à reconquérir leur nouveau Monde.

Ces Hommes et Femmes qui portent maintenant comme flambeau cet amour conscient qui les différencient de ces animaux sordides et pathétiques que furent

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leurs ancêtres. Ces ébats éducationnels et amoureux lui valurent, de la part de l’un de ses élèves, tous très assidus à ses cours d’amour, un jeune et déjà vigoureux gaillard, de tomber enceinte pour la deuxième fois, Michael étant logiquement le père de leur premier enfant. Elle en eut six durant sa longue et pleine vie d’amour inconditionnel.

Les deux petites jumelles effarouchées des premiers jours devinrent rapidement deux belles jeunes filles alertes et gaies, enthousiasmées par leur nouvelle vie pleine de responsabilités et de devoirs vitaux communs à eux tous. Filles et garçons, un objectif grandiose les portant tous comme dans un songe.

Elles donnèrent naissances à leurs premiers enfants à dix-sept ans passé. Michael, qui la déflora avec tout son savoir et sa délicatesse, fut le premier

géniteur de celui de Julia qui, follement éprise de lui, voulut impérativement qu’il fut celui qui lui révèle l’amour charnel et soit le père de son premier enfant...

Plus tard, dès qu’Alexandra eut atteind la quarantaine et cessa de donner ses cours d’amour, au plus grand plaisir de Michael, ce fut Julie qui prit le relais de professeur d’amour. Julie, devenue une jeune femme magnifique et d’une sensualité accomplie, ainsi ce travail, si l’on peut dire, lui alla comme un gant ; étant une femme adorant l’amour, une grande jouisseuse, personne d’autre quelle n’était mieux qualifiée.

Cette coutume de relais d’élève-professeur se perpétue jusqu’à ce jour. Ces jeunes femmes que dans toutes les stations on appela très vite du nom

sacré d’Aphrodite, devenant célèbres parmi les leurs car elles enseignèrent l’amour à tous leurs contemporains, qui leurs vouent une reconnaissance et amour éternel, les choyant de toutes leurs reconnaissance et affection. Ainsi, cette communauté revint à la vie sacrée sur la surface de Gaïa, qui avait préservé en ses entrailles cette minuscule étincelle, celle de l’amour renaissant maintenant, incrustant en chacun qui naissait, une parcelle de cette gemme sacrée en chacun d’eux. Ils avançaient alors, tels des soleils éblouissants vers la reconquète de leur Monde, celui de Gaïa, pierre précieuse et vénérée de tous.

Michael, vécu jusqu’à l’âge avancé de quatre-vingt-quatorze ans, beau record

de longévité pour cette époque de vie dure mais intense ; quoique ce qui pourrait paraître paradoxal, la moyenne de vie était quasiment la même que lors de l’attaque de 2015. Ceci étant dû, d’un commun accord, à la qualité de vie de tous, et ce but commun les liait, leur donnait un sentiment puissant d’un but suprème qui comble amplement l’esprit de chacun et donc annihile le pensement négatif, sentiment qui tue plus que la maladie, qui du reste se fait rare aussi, de par la plénitude spirituelle de chacun.

Il était connu de certains hommes éclairés que la maladie est pour beaucoup, sinon essentiellement d’origine psychosomatique. La longévité suit le bonheur de par la charge et responsabilités qui annoblissent l’Homme qui s’y investit pleinement.

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Voici, pour mieux cerner le personnage exceptionnel qu’était Michael, quelques uns de ses écrits. Cet Homme avait vraiment un esprit universel. Dans une critique, satire plutôt de l’homme d’alors, voici quelques considérations intéressantes, instructives mêmes et amusantes concernant l’Homme dans son ensemble, c’est à dire, vous aussi mesdames, avec de plus un côté humour, ce qui n’est pas pour déplaire, car indispensable au bonheur. Ainsi, cette partie d’un texte, tirée d’un ensemble, dont nous avons gardé ce qui suit.

Avis : les parenthèses sont de nous. [...]de plus, ils (les gens incultes) se prennent vraiment pour quelqu’un, qu’ils

pensent, pompeux, arrogants, suffisants. Mais justement et c’est l’évidence, Quelqu’un, c’est le sosie de Personne ; il est donc le frère de Pas-Grand-Chose ; comme le cousin de Sans-Intérêt, ou si vous préférez, le voisin de Nullité ; il est aussi bien l’écho d’Insignifiance, soit, résumons : le miroir du Néant.

Quelqu’un...Cerveau gavé aux radiations électromagnétiques et subliminales télévisuelles journalières : drogue décérébrante et anesthésiante des synapses, lobotomie virtuelle castatrice du Moi, enfin, pour ce qui en tient lieu ; ondes subliminales engendrant l’impossibilité de dire NON, et subséquemment provoque une mortelle apathie civique, justement programmée par les cuistres au service des manipulateurs patentés des ministères, eux-mêmes prostitués des lobbys bancaire et exterminateurs du gentil occidental.

C’est affligeant de devoir supporter des êtres si fats et si vides, car somme toute ils ne sont pleins que de 18% de carbone, 4% d’azote, 2% de calcium, 2% de phosphore, 1% de potassium, 0,5% de soufre, 0,5% de sodium, 0,4% de chlore ; le tout marinant dans 71% d’eau identique aux océans. Ajoutez à cela, pour donner du corps à cette soupe : du silicium, zing, manganèse, cuivre, brome, fluor, iode, magnésium, ainsi qu’un chouia d’étain, du vanadium, aluminium, plomb, cobalt, étain, molybdène, bore, titane ; secouer bien le shaker et servez un atome d’étoile ; soit, un androïde dont pour la plupart des performances journalières sont les suivantes : le coeur charrie 8.600 litres de sang en 108.000 battements ; les poumons fournissent les 12.000 litres d’air nécessaire en pompant 26.000 fois ; l’estomac sécrète 1,5 litre de sucs gastrique ; les reins filtrent 1.700 litres de sang et produisent 1,5 litre d’urine ; 1 litre de salive ; le foie fabrique 1 litre de bile ; les selles pèsent 0,200 kilo ; la sueur en climat tempéré est de 0,7 litre et en été peut atteindre 4 litres ; les cils battent 11.500 fois et chaque oeil est arrosé par 1 centilitre de larme ; les spermatozoïdes responsablent de ces performances sont 180 millions à chaque festival ; 1.800 calories sont nécessaires au bon fonctionnement de la machine ; les neurones au nombre de 14 milliard au départ, disparaissent au rythme journalier de 10.000 à vingt ans, 50.000 à quarante ans et 100.000 à quatre-vingt-dix ans.

Ainsi, de cette extraordinaire machine et malheureusement pour beaucoup ; cette tête n’est pleine que de vapeurs éthyliques et de neurones qui sont stériles car vides de la substance élémentaire : la Vie ! La Vie spirituelle vraie, l’intelligence essentielle et primitive qui fait la différence entre la machine et l’Être pensant par lui-même...Le manque de ce flash initial qui seul le différencie

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de l’animal obtus. Ainsi va l’homme-machine...robot évolué dans un non-être trompeur et fallacieux qui s’aveugle par sa si pleine considération de lui-même.

Aberration, mutant dévoyé d’une trajectoire initialement porteuse et devenue un sinistre trou noir à l’encéphalopathie galopante qui aspire la faculté de raisonnement et de clairvoyance propre à l’Être intelligent pour le maintenir dans une perception égocentrique découlant sur une fonctionnalité dégénérative et finalement socialement suicidaire. Ouf !

On se fera une très petite idée de ce que fut leur calvaire, avec cet extrait

encore, des nombreux textes de Michael. Tentons alors d’imaginer ce que dû être une telle vie pour ses compagnons qui n’avaient pas le sort d’avoir sa puissance spirituelle et son incroyable énergie. Ces quelques lignes sont absolument pathétiques et grandioses. Que chacun de nous s’en imprègne.

[...] Notre évolution cahotique ne s’est faite que par réaction, toujours, mais jamais par raisonnement. L’homme, cette néantitude prétencieuse, a-t-il un seul instant maîtrisé son évolution ? son destin ? ses valeurs ? a-t-il choisi ? pensé ? décidé ? voulu ? NON ! Depuis des millénaires il subit, il avance par hoquets, convulsions, spasmes. Jamais pour mais toujours contre les circonstances. Sa vie n’a jamais été qu’une quête désespérée, une fuite en avant sans fin et désastreusement éternelle.

Il ne va pas libre, non...il se fuit lui-même, la peur au ventre, désespéré, éperdu, talonné par l’oppression, l’inquisition, la torture, l’injustice et la faim au ventre. Il court désespérément vers la Vie...ce grand soleil d’espoir qui brille, là-bas ; il s’y précipite, les pieds au bord du gouffre...vascillant, pris de vertige. La bête, au fond, immonde et qui l’attend, le veut, le désire ; il sent le souffle mortel de la chose, tapie, là derrière lui, frémissante et prête à le déchiqueter, le mordre, le mutiler sauvagement...

Mon Dieu ! Quel calvaire que la vie de ce pauvre être minuscule...et ce soleil grandiose, là...qu’il n’atteint jamais : une angoisse, une agonie...Ainsi il va, le pauvre hère, il sombre, remonte, espère, rit, pleure, jusqu’à la nouvelle lame de fond. Ainsi il va, depuis le fond des âges, machine bancale et détraquée...

Puis, une lueur, oh ! infime dans cette nuit terrible...mais il sent enfin en lui monter quelque chose...c’est diffus, impalpable, il n’ose y croire...Si, il sent...oui ; une force est là en train de naître, inespérée mais bien réelle maintenant. La prise de conscience, la volonté ; un miracle sans doute ? le fruit de l’espoir ?

Il se transforme au fond de son âme, il en est certain parce qu’il le veut maintenant, c’est un choix délibéré, irréductible...Un Être nouveau est en gestation, en lui...c’est lui qui éclot à la vie...oui c’est lui, ô mon Dieu ! par pitié, aidez-le à naître...il va-t-être ; il est maintenant, un géant !

Alexandra, qui était plus jeune que Michael de onze ans, se refusa à se séparer

de son amour éternel, ayant ensembles surmontés tant d’obstacles. Ils les retrouvèrent enlacés, Alexandra s’était poignardée le coeur, couchée sur

le corps encore chaud de celui qui avait été toute sa vie. Elle laissa un message qui, scanné et reproduit à l’infini fit le tour des communautés, et devint, des

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générations avant le futur et sublime message de Ferdinand, le flambeau qui entraina impérieusement et irrésistiblement cette jeune Humanité vers les étoiles.

Message simple mais ô combien grandiose et pathétique, que chacun connait par coeur, au fil des nombreuses générations, le voici.

« A vous tous, nos frères et soeurs de ce vaste et futur Monde d’amour, Michael, qui vient de nous quitter à l’instant présent où j’écris ces lignes en lui tenant sa

main, se joint à moi pour vous léguer nos ultimes pensées et voeux de prospérité. Nous vous avons spontanément donné nos vies, nos énergies entières ; j’ai sacrifié mon amour

unique pour lui, pour vous apprendre l’Amour absolu, j’ai sacrifié la beauté de mon corps qu’il aimait et choyait avec tant de ferveur, pour faire revivre la Vie parmi nous tous ; je vous ai tout donné, comme Michael le fit aussi.

Nous vous prions, supplions même de ne jamais oublier les sacrifices de vos anciens, que vous deviendrez vite tous à votre tour. Transmettez inlassablement ce flambeau merveilleux et terrible du sacrifice de sa propre Vie pour que votre nouvelle espèce faite de noblesse, courage et grandeur d’âme, créer un jour ce Monde fantastique qui aura été l’enfant porté en le sein de la Femme grandiose et éternelle que vous êtes toutes, mes soeurs chéries.

Guidez, conseillez toujours vos mâles et impétueux compagnons sur ce chemin sacré des étoiles et de la sérénité, car vous êtes les gardiennes sacrées de l’Amour, les déesses de la Vie inestimable et si précieuse, comme le furents vos soeurs des millénaires avant vous.

Je vous demande pardon de vous quitter ainsi, mais je ne peux survivre une heure de plus à celui qui fut pour moi l’éternelle lumière de mon existence, de bonheur de chaque instant de ma vie harmonieusement remplie.

Nous vous aimons avec passion. Que les forces du cosmos vous protège et vous bénisse. Vos frères et soeurs et parents affectionnés, avec tout notre amour. Alexandra et Michael » Rapport : Mission de synchronisation de mise en osmose. *Secteur N-W Méditerranée / Région : grille H-42, cadre C-08 / Espace-Temps local :

Lundi 23 Juin 2014. Texte : Comme prévu et sur injonction subconsciente par psycho-sonde trois jours

auparavant, l’élément négatif arriva en vue de la cible au moment opportun ; comme prévu aussi par l’équipe de prospection, et on ne pourra que les en féliciter, car comme annoncé, les fréquences cérébrales étaient bien en parfaites harmonie, et même d’une rare syntonie, car nous n’eûmes, c’est dire, qu’à donner une très légère impulsion psycho-directionnelle pour que l’élément positif se déroute de son but initial et se porte de lui-même au devant de l’élément soeur, pour créer immédiatement de lui-même le contact et, chose peu commune, sans aucune intervention de notre part, ce qui n’est que meilleurs et garant d’une très grande longévité des harmoniques.

La rencontre des deux éléments fut un véritable spectacle d’une force inouïe, dont nous n’avions jamais été témoin à ce jour, mes trois équipiers et moi-même, car dès que l’élément positif apparut, le contact visuel des deux partie déclencha au bout d’un court instant, une amplitude des auras respectives et, s’approchant l’un de l’autre, à quatres mètres encore

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environ, elles s’attirèrent mutuellement jusqu’à se fondre en une luminosité ardente puis, dès que les sens olfactifs se croisèrent, les auras se mirent à scintiller puis, la rencontre suivant son cours, dès qu’il y eut le contact tactile venant encore intensifier si possible ce délire véritable, leurs auras alors richement irisées se mirent à pulser d’une façon violente, comme si elles allaient éclater.

Nous sommes donc en mesure d’affirmer que les deux éléments sont dorénavant indissociablement liés ; que nous leur avons implanté facilement leur ordre de mission subconsciente et qu’ils seront donc en mesure, au moment opportun, de donner ultérieurement l’impulssion vitale prévue et désirée par le Haut Conseil d’Harmonie.

Chef de mission, Aloard Funandilo. Il ne manquait plus que deux équipages maintenant, pour ouvrir cette réunion

attendue avec tant d’espérance par tous ; depuis le temps qu’ils y travaillaient, se dit pensif Heater Soler, tout en inscrivant l’heure et la date d’arrivée du dernier chasseur de rentré. Il en fut heureux car il vit de loin le pilote en descendre, ce grand déguingandé de Garry Iscovich, lui faire un signe du pouce levé accompagné d’un grand sourire de satisfaction, signifiant certainement que sa mission devait être positive.

Un grand gars s’approcha de lui et mettant sa main sur son épaule lui demanda amicalement.

-Dis-moi, Heater, combien en manque-t-il encore, c’est énervant d’attendre ainsi, que j’en ai déjà bouffé deux crayons à papier.

-Ha ! ha ! plus que deux maintenant, Ruppert, mais ils ne devraient plus tarder maintenant...tout le monde est à cran dans la base, et qui ne le serait pas, hein ?

-Quels sont les retardataires ? -Non, ils ne sont pas en retard ; l’un revient d’Europe et l’autre d’Amérique du

Sud, mais de la côte ouest, c’est pas la porte à côté, dit-il en rigolant...Patiente encore un peu et planque tes crayons à clé, ajouta-t-il en riant.

-Plus facile à dire qu’à faire, dit Ruppert Burrows en souriant, je retourne à mon bureau pour finir d’organiser la grande réception et réunion pour décider des actions suivant leurs résultats ; ils sont tellement énervés là-bas qu’ils ne font que des conneries...et, sois gentil Heater, dès que le dernier est rentré, sonne de suite le branlebas de combat, ok boy ? sinon on va tous péter les plombs pour finir !

-Oh ! tu peux compter sur moi, t’inquiète pas, ça risque pas que j’oublie car comme tous ici j’ai hâte de connaître les résultats de leurs chasses.

Ruppert partait déjà, quand un chasseur entra par le sas et se posa comme une plume sur son ratelier au fond du hall, Heater lui cria joyeux.

-Ruppert ! c’est celui d’Amérique du Sud...il en manque plus qu’un, mon gars, celui de l’Europe !

Ce dernier leva le pouce et lui sourit satisfait, continuant son chemin. Il manquait plus qu’un chasseur sur les seize de partis, certains depuis plus de deux mois maintenant, ils étaient allés éplucher les autres continents, et c’était pas une mince affaire.

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Quiconque aurait connu cette ancienne et austère base de recherche scientifique enfouie sous ce contrefort des Appalaches, dans cet ancien État d’Alabama, n’aurait rien reconnu. Des générations de ses habitants s’étaient succédées habilement et avaient survécu intelligemment à la catastrophe initiale.

La base donnait alors un spectacle des plus étranges, avec les cris et rires d’enfants se répercutant dans les galeries, ces dernières décorées de posters, dessins, peintures plus ou moins réussies, jardinières de fleurs et fougères et des bosquets d’arbres dans d’énormes pots, l’ensemble croissant sous éclairage adéquat et à profusion. Les gens qui y circulaient alors étaient tous décontractés, souriants, amicaux. Cette base était maintenant conviviale, ayant définitivement perdu cette ancienne froideur scientifique et militaire.

Depuis, dans cet ancien Hall de déchargement d’alors, un gigantesque panneau était visible depuis l’entrée ; trônaient ainsi les portraits géants des quatre héros, photos prisent du temps de leurs activités de sauvetage de l’humanité. Un message célèbre dit à l’époque par le capitaine Fred Richardson, tracé en immenses lettres visibles du plus loin de ce gigantesque hall, rappelait par ses quelques phrases dès lors immortelles, le devoir de chacun pour assurer le futur de tous, message que voici : « J’ai passé ma vie à détruire et tuer mes semblables, je le

regrette profondément mais c’est trop tard. Je m’engage dès lors et en fait le serment solennel, de furieusement défendre la moindre parcelle de vie sur cette planète qui est notre bien le plus précieux. Que les forces stellaires permettent que tous fassent de même. Votre frère repenti, Fred Richardson. » L’ancien monde était justement mort d’un excès trompeur d’une illusoire

facilité et d’assistanat, c’était pas le moment de reproduire cette lèpre morale qui annhile toute volonté de l’individu. L’individu qui se soumet ne mérite en fait que le carcan de l’esclave, qu’il est uniquement, sans plus. Cet acte abject de renoncement à sa dignité déclenche alors invariablement l’acte d’agression des prédateurs naturels inhérents à toute organisation animale.

Le fauve hésite toujours d’instinct à attaquer celui qui fait face mais, que ce dernier se dérobe et parte en courant, c’est alors sa mort assurée de plein droit puisqu’il renonce à combattre pour sa Vie et partant celle des siens. Le droit de vivre debout se gagne à chaque pas, à chaque inspiration ; seul celui qui marche ainsi la tête tournée vers les étoiles mérite de vivre.

En ce Monde nouveau chacun devait mériter sa Vie, tel était le prix à payer. Depuis les tous débuts il leur fallait des moyens de déplacements rapides,

économiques en carburants, d’autant que les stocks existant ne dureraient pas éternellement. Il fallait de plus que ces engins soient indétectables, de jour comme de nuit...Il leur fallait aussi trouver une source d’énergie électrique autonome, économique et sûre pour les survivants dans les grottes...Il fallait...il fallait...Les listes d’impératifs étaient alors si grandes que tous furent pris d’une véritable frénésie de travail. Pas un ne se défila. Un gigantesque défi les stimula jusque dans leurs sommeils.

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En prévoyance du renouvellement des chercheurs, et en plus de gens compétents qu’ils trouvèrent dans certaines grottes, quiconque de bonne volonté étant le bienvenu, le commandement proposa alors aux soldats qui le désiraient de commencer à travailler avec les scientifiques et d’apprendre sur le tas le maximum qu’ils pourraient. Une trentaine d’hommes de troupe se portèrent volontaires ; ce qui donna d’excellents résultats inattendus par tous, à commencer par ces militaires eux-mêmes.

Certains se révélant être doués pour certains travaux demandant une grande concentration et méticulosité, l’urgence décuplant les énergies de chacun et l’émulation faisant le reste. Ces savants savaient déjà que des collègues d’autres centres de recherches avaient trouvé une nouvelle forme de propulsion basée sur l’antigravité. Technique qu’ils ne maîtrisaient pas, leur fonction étant d’en découvrir d’autres ; mais, devant l’urgence de la situation ils tombèrent tous d’accord qu’il valait bien mieux exploiter celles existantes, d’autant qu’ils n’en avaient pas les plans, n’en connaissant que les principes théoriques.

La capitaine Fred Richardson, lui, savait miraculeusement où trouver un de ces nouveaux modèles d’engin qui commençaient à équiper leurs unités, car peu de temps avant de venir dans cette région, il avait vu sur une base de l’ancienne US Air-Force, plus exactement une base des Forces noires d’alors, un tel engin qui s’était craché accidentellement, et dont l’épave gisait dans un hangar, et il y avait de fortes chances pour qu’elle s’y trouva toujours.

Une expédition particulièrement soignée dans ses moindres détails fut donc de suite organisée et envoyée pour aller chercher l’engin à plus de mille kilomètres de leur base.

Ils revinrent presque deux mois plus tard, triomphants et épuisés, mais avec la mission remplie, et même au-delà car ils trouvèrent l’appareil indiqué par Fred, mais de plus, un autre en parfait état de fonctionnement : le pilote et son équipage étaient morts gazés devant la porte de l’appareil au moment d’y embarquer. Ils ramenèrent les deux engins en plus d’un incroyable stock d’armes, y compris un important stock de canons laser équipant ces chasseurs à propulsion antigravitiques, ainsi que toutes sortes de matériels et armements divers.

Pour cela, les dix-huit hommes prirent chacun le volant d’un camion qu’ils récupérèrent aussi sur place. Ils contèrent à leurs compagnons restés à la base, ce qu’ils rencontrèrent de leur ancien monde...de l’épouvantable spectacle qu’il offrait alors. Ils filmèrent des scènes dantesques de désolations et leurs assurèrent de la chance qu’ils avaient alors eu d’être restés bien à l’abri à la base.

Ce fut le début de ce renouveau qui dès lors allait remettre ces nouveaux hommes sur pied, à la reconquête de leur nouveau Monde. Les autres technologies furent réinventées ou réadaptées peu à peu. Pour cela, des équipes furent montées pour dépiauter les montagnes d’informations technologiques enfouies dans les mémoires du puissant ordinateur équipant la base, un Clayx E6-58, d’une puissance énorme. Ils savaient qu’il détenait des infos vitales pour eux mais, fallait-il encore les retrouver, et pour cela savoir les chercher dans le ventre de cette machine du diable.

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Ce genre de centres de recherches devait, pour être efficace, tenir à la disposition des chercheurs et techniciens, le maximum de données scientifiques, des inventions les plus récentes pour, et c’est parfaitement compréhensible et logique, pour ne pas être sans cesse obligé de réinventer la roue. Les générations passèrent lentement, parfois même le désespoir s’abattait sur les équipes, mais après un temps d’abattement ils repartaient de plus belle, l’espoir chevillé au corps. L’espérance de ce Monde meilleur et futur étant le moteur de leur quête.

Puis les chasseurs furent enfin conçus et fabriqués. La base, comme toutes les autres du genre, regorgeait de tous types de

matériaux et machines outils. Ils prospectèrent enfin leurs territoires en naviguant de nuit seulement, le système d’invisibilité spectral n’ayant été trouvé que plus tard. Des équipes de monteurs, les descendances des anciens militaires, travaillaient jour et nuit pour livrer ces appareils, mais malgré qu’ils soient fabriqués dans la plus grande simplicité, un appareil comme ceux-ci ne se construit pas en quelques jours, forcément. Puis ils trouvèrent les autres technologies qui allaient rendre enfin leur mission sacrée possible ; ils en pourvurent tous les nouvelles communautés de chez eux.

Les ateliers de montage tournaient nuit et jour...Il allait falloir approvisionner le monde entier, c’était pas simple. C’est à ce moment qu’ils envoyèrent des chasseurs pour détecter les communautés de survivants dans les autres continents ; effectuer une première estimation sur leur nombre et chercher comment envisager, si possible, de constituer et former des équipes locales pour assembler les chasseurs sur place, seul et unique moyen de pouvoir les en équiper le plus rapidement possible.

Fabriquer et livrer des chasseurs en kits fut la solution mais...comment allaient-ils trouver ces communautés, et surtout, comment allaient-elles réagir quand elles les verraient ; là était le grand inconnu. Ils prirent aussi conscience que le reste de l’humanité devait avoir une haine terrible envers les représentants de leur ancienne nation, et c’était parfaitement compréhensible et logique. Les équipes envoyées les prospecter allaient devoir faire montre de la plus extrème prudence.

Trouver les localisations des grottes dans le monde fut un jeu d’enfant, des quantités énormes des mémoires des ordinateurs des particuliers les leurs livrèrent à la pelle...le plus difficile étant de choisir dans le tas. Puis un autre problème apparut de suite : comment livrer des centaines de chasseurs en kits, dans ces chasseurs si petits ? Nouveau défi à relever ; des mois, des années passèrent encore.

Puis ils sortirent de leurs ateliers de montage, le super chasseur-transporteur, qui pouvait transporter en plus des trois hommes d’équipage, trente-huit kits de chasseurs plus les équipements de chasse aux esclaves pour les épuipages devant les piloter, équipages à former aussi.

Ils nommèrent ironiquement ce premier transporteur tant attendu, Désiré. Le Désiré nº 1 fit des essais parfaitement réussis, et la production repartit à son rythme intensif mais cependant toujours trop lente pour tous, tant ils étaient impatients d’en découdre, mais ce temps était encore bien loin. Beaucoup,

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beaucoup de travail était encore à faire ; et c’est connu que dès que l’on voit se préciser un but fixé, on devient d’autant plus impatient qu’on s’en approche ; comme un cheval qui sent l’écurie.

Le dernier chasseur de cette grande expédition mondiale de recherche des survivants était enfin arrivé depuis maintenant trois heures. Le grand Hall avait été rapidement aménagé. Une haute et spacieuse estrade trônait maintenant devant la foule des habitants de la base au grand complet, car tous, absolument tous étaient présents pour ce grand jour qui resterait dès lors marqué dans les annales de cette base dont les occupants se battaient avec ardeur depuis des siècles pour construire leur Monde futur, un Monde de justice et d’honneur.

Ils étaient au nombre de trois mille deux cent quarante trois personnes maintenant, tous fiers et impatients de connaître les résultats de ces expéditions revenues de leurs périlleux périples. Même les enfants qui d’habitude étaient de vrais tornades bruyantes balayant les galeries, se tenaient tranquilles, en rangs serrés devant le premier rang des adultes...mais on sentait que cela ne durerait guère, il fallait que la cérémonie ait rapidement lieu maintenant, sinon...

Enfin, Ruppert Burrows arriva comme à son habitude à grandes enjambées, monta prestement les quatres marches qui l’amenèrent sur l’estrade où il s’empara du micro. Tous pourtant savaient ce qu’il allait dire, mais un silence total figea les conversations en cours, l’instant était solennel, sacré. Ruppert est un grand gars de 41 ans, 1,94 mètres environ, puissant, d’une stature martiale ; c’est un homme autoritaire mais toujours empreint d’un grand calme, blond avec les yeux bleu.

-Mes amis, dit ce dernier d’une voix puissante, vous savez que les longs discours ne sont pas, et de loin ma spécialité, un rire parcouru la foule, une majorité de plaisantins m’ont élu pour présider cette cérémonie d’aujourd’hui, ceci à vos risques et périls, alors si vous n’êtes pas satisfaits de ma prestation, adressez-vous à ces responsables ou, irresponsables plutôt, seulement.

La foule rit de plus belle, et une voix fusa de celle-ci. -Vas-y, Ruppert ! Mais magne-toi le train, mon gars, qu’on en peut plus ! Un

grand rire et soupir de la foule acquiesça à ces paroles. -Je te comprends mon pote, répondit-il en souriant ; ainsi donc, mes amis, en

ce jour béni par la providence et l’aide spirituelle des espaces cosmiques, en ce jour de gloire de ce samedi 14 août 2354, date qui restera dans nos annales.

Je vous prie donc de bien vouloir saluer par la plus formidable ovation qu’aura entendu cette foutue base, les héros de ces expéditions revenues de par le monde, j’ai nommé, les seize jeunes, courageux et vaillants équipages de nos chasseurs, que voici ! Qu’ils soient bénis !

Il fit un geste vers la droite, où une grande porte coulissante s’ouvrit à la volée et les jeunes hommes et jeunes femmes souriants et fiers firent une entrée impeccable en rang par deux, dans leurs uniformes bleus ciel impécablement repassés. Ils se dirigèrent vers l’estrade et y montèrent vite fait en deux enjambées, sous un délire d’applaudissements, de cris, de pleurs, de joie suffocante, de rires. Les enfants dès lors redevenus intenables, envahirent

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l’estrade d’autorité telle une envolée de moineaux, et personne ne put les en faire redescendre avant qu’ils n’aient embrassé tous leurs héros.

Après un long, très, très long moment, le silence se rétablit de lui-même, plus par la fatigue et l’émotion qui s’abattit sur tous que par raisonnement ; il y a des instants ainsi dans la vie où la raison n’a rien a y faire. Ruppert Burrows reprit le micro, un large sourire de satisfaction baignait son visage.

-Sachez d’ores et déjà que ces valeureux gaillards, il les montra d’un geste large, nous ramènent d’excellentes nouvelles, mais sans avoir encore étudié leurs documents, forcément, on peut déjà affirmer que ce Monde présent, notre Monde vénéré regroupe des survivants dans beaucoup de régions, certaines plus que d’autres, évidemment. Il ressort de cette première estimation, évaluation sommaire, que nous pouvons compter sur des milliers de nouveaux Hommes et Femmes pour assurer notre reconquête à tous, réunis dans une union sacrée ; peut-être même que nous serions alors près de, Ruppert laissa la foule un instant dans l’attente...pas loin de cent mille survivants !

Une immense onde de bonheur se propagea sur toute la foule. -Bien ! Je puis vous l’avouer à tous maintenant, dit-il en riant, que si j’ai accepté

de présider ce grandiose événement c’est qu’il comporte un avantage grandiose lui aussi, tout en parlant il se dirigea vers une longue table couverte d’un drap ; car, pour fêter dignement la réussite grandiose de nos jeunes héros, comme ils le méritent amplement, il a été décidé d’arroser leurs exploit avec, et il enleva le drap à la volée, découvrant alors une table chargée de nombreux verres, de trois seaux à glace et de deux bouteilles pleines d’un liquide ambré.

Ruppert reprit son exposé, pour arroser leurs exploit, disais-je, avec les deux dernières et précieuses bouteilles du fameux whisky du non moins célèbre capitaine Wesley Zellwegger, un de nos pères charnel pour certains, et spirituels pour tous. Que le Cosmos prenne soin de son âme, et des notres.

Un grand rire parcouru la foule ; chacun sur l’estrade se servit de ce breuvage désormais quasiment mythique, et ils trinquèrent joyeusement, quoique la plupart de ces jeunes gens faillirent s’étrangler à la première gorgée, n’étant guère ou pas accoutumés de boire de l’alcool. Le président reprit la parole, la dernière bouteille quasiment vide à la main.

-Je voudrais que notre ami qu’on cherche toujours de partout, monte nous rejoindre sur l’estrade, j’ai nommé notre cher et prolifique professeur Nimbus, sans qui beaucoup de choses n’auraient pas pu se faire . Où se cache donc le professeur Lary Whyspianskir ? Liry, pour ces dames, me suis-je laissé dire...un grand rire s’empara de tous. Un mouvement se dessina vers le côté gauche de la foule, et un viel homme en émergea, la foule l’applaudit chaleureusement.

Lary Whyspianskir est un homme de petite taille et mince comme un fil, portant une barbe longue et claisemée, avec de grands cheveux blancs tombants sur ses épaules : parfaite caricature du savant ; des lunettes cerclées d’acier sur le nez, et ses yeux bleus clairs.

Malgré son âge certain il monta avec sveltesse sur l’estrade. -Mon cher ami Lary, pardonne-moi cette douteuse plaisanterie, lui dit Ruppert

en souriant et lui passant un bras autour des frèles épaules du vieillard, mais je

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tenais personnellement à rendre hommage devant nous tous réunis, aux services immenses que tous te devons, de par la prodigieuse et prolifique production de ton cerveau de géant que tu es vraiment, sans doute le plus plus grand d’entre nous tous. Mes amis, dit-il s’adressant alors à la foule, je vous prie d’ovationner également le seul génie authentique de notre communauté : notre ami à tous, Lary Whyspianskir !

Une formidable ovation salua celui qui leur avait donné en partie les chasseurs, le bombardier à infrason, les scruteurs psychos, le brouilleur spectral d’infrarouges, les drones de surveillance et participé d’une façon décisive aussi à la conception des centrales d’énergie portatives, les fameuses Centrales FMS, acronyme de Flux Magnétique Stellaire : un dispositif génial qui fournissait de l’énergie électrique à profussion, la tirant de ce que nommaient anciennement les gens, l’éther. En réalité, cette force cosmique faisait partie intégrale de l’univers et était donc présente dans le grand tout, en tout lieu et en toute chose.

Lary Whyspianskir leur avait pourtant dit plusieurs fois qu’il recevait mystérieusement les plans de ces fameuses inventions, la nuit quand il dormait. Il conversait alors, disait-il, avec des savants de grandes tailles, blonds aux yeux bleus pour la plupart d’entre eux ; et ces génies lui affirmaient que ces inventions étaient pour les aider à devenir meilleurs, et qu’un jour leur peuple et celui d’outre-mer seraient unis pour leur guerre de reconquête.

Mais comme Lary était un gars qui aimait faire des blagues et raconter des histoires drôles, personne ne croyait un seul mot de ces délires fantasmagoriques. Ils étaient tous certains cependant d’une unique chose le concernant, qu’il était un véritable génie, et c’était amplement suffisant, et on ne pouvait au pire lui reprocher qu’une seule chose : sa bien trop grande modestie !

On devait, comme le leur avait déjà expliqué Lary Whyspianskir, avec son savoir véritablement encyclopédique, à propos des Centrales FMS, cette extraordinaire découverte qui datait pourtant des débuts du siècle d’avant l’attaque, à cet homme de génie, le plus grand de tous les temps, d’après lui, Nikolas Tesla, originaire de ce petit pays nommé alors Croatie, gagnant de très nombreux Prix scientifiques internationaux, inventeur d’innombrables technologies et appareils en usage courant maintenant encore et de partout, ne serait-ce qu’un de nos vulgaire moteur électrique, etc.

Ce Nikolas Tesla avait immigré jeune encore dans leur pays, avait été financé par un de ces banquiers avides de pouvoirs, puis, lorsqu’il avait découvert cette possibilité, entre de nombreuses autres, de fournir de l’énergie électrique à tous et surtout gratuitement et de la distribuer sans supports physiques, sans fils.

Ces infâmes rapaces que sont ces engeances financières lui coupèrent alors les vivres, comme ils firent à beaucoup d’autres inventeurs de génie, et lui aussi se retrouva en bute à un implacable ostracisme, ruiné, oublié de tous et ses découvertes volées au profit des militaires qui développèrent alors des armes toujours plus redoutables contre l’humanité, comme toujours en cela, financés par les mêmes banques qui ne conçoivent l’avenir qu’à trouver les moyens d’étendre toujours plus leur infâme domination dictatoriale sur la planète et tuer

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le maximum de gens. Domaine en lequel de toujours ils excellèrent, par le mensonge et trahison.

Le temps des hommages était terminé. Ils pouvaient maintenant retourner à

leurs travaux, et pour Ruppert Burrows et son équipe du Conseil des sages, agrémenté des équipages de chasseurs, commencer de dépiauter et classer les infos ramenées par ces derniers. Le moment tant attendu par tous de pouvoir enfin commencer de monter une grande stratégie d’attaque entrait enfin en ses débuts, enfin accessible. Dès lors, le but ultime et unique de cette quête dans laquelle des milliers de personnes y avaient laborieusement contribué, sacrifié leur vie entière, se précisait...lls attaquaient enfin la dernière ligne droite, longue soit, encore, mais éclairée de certitudes maintenant.

La longue nuit de bientôt plus de dix générations de dure vies vouées à cette quête unique étaient enfin sur le chemin de la concrétisation de ces rêves jusqu’alors incertains. Ils savaient maintenant, ils étaient sûr que les jours de cet ennemi tant honni étaient comptés...Une planète entière ne vivait dès lors que pour les anéantir de sa surface, lèpre immonde et puante dès lors indigne des splendeurs de ce joyaux des espaces stellaires : leur planète Terre.

La gloire céleste devait un jour très prochain saluer, honorer ces millers de guerriers qui remontaient, fiers et orgueilleux des limbes de l’infamie causée par les immondes Zanko-Khuigs ; véritable affront, offense à la beauté pure, qu’ils allaient alors rayer inexorablement de la mémoire universelle.

Seuls, tel était leur crédo sacré, l’honneur, la probité, la générosité et l’amour des siens habiteront alors ce nouveau Monde, uniquement ; c’était un lien de sang qui unissait, faisait communier ces Hommes et ces Femmes, les faisait vibrer de la même énergie. Le sang seul était leur lien, le symbole sacré et unique qui unissait cette grande race de guerriers renouant avec leurs lointains ancêtres de cet Occident, seul, à la renommée éternelle de chevaliers à la droiture et vaillance qui ne se compte pas.

Leur atavisme à tous leur redonnait cette lumineuse énergie des grands et nobles combattants de la Vie vénérée et seule digne de s’exprimer dès lors sur leur planète tant aimée...Rien ne leur résisterait dorénavant, la règle universelle de l’âme méritante était alors la leur. Ils étaient les filles et fils de l’univers, les enfants vierges et lumineux de l’amour universel.

Tous les équipages avaient exposé les résultats de leurs recherches, avec l’appui

de nombreuses vidéos. Il n’en restait plus qu’un, celui de la mission Europe occidentale, le chasseur C12, ayant Alexander Cavalcanti pour pilote et son équipier, Williams Whitehead, le pyscho.

Cet équipage fit donc son rapport et comme les précédents ils furent bombardés de questions par les membres de cette commission. Le chef de mission commença son exposé. Alexander Cavalcanti, est un garçon de 23 ans, 1,78 mètres de taille, pour un bon 70 kg de poids ; vigoureux, comme la majorité des ceux et celles des autres équipage ; les cheveux chatain clair avec des yeux marrons perpétuellement rieurs, un visage où règne la sureté, la

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maîtrise de soi dans un calme olympien. On sent à le voir ainsi calme, une grande force intérieure et une volonté farouche.

-Mesdames et messieurs, dit-il, je dois vous parler de suite d’un problème que nous avons eu et qui nous préoccupe depuis cet événement, à Williams et moi, et qui nous semble unique puisque aucun autre équipage n’en fit mention ; tenez vous bien : notre chasseur fut détecté par deux hommes, en France du sud.

Ce fut la stupéfaction totale dans l’assistance, puis commentaires bruyants et désordonnés ; tout le monde voulant parler en même temps.

-Mes amis, continua le pilote, merci de faire silence, Williams, mon équipier va vous passer la vidéo de ces instants qui furent de stupeur pour nous deux. Williams Whitehead, se leva et introduisit un minuscule disk-mémoire dans le visio grand public, ce modèle présentant un écran géant ultra plat, les fameux écrans papiers tactiles de 4 x 6 mètres ; il se rassit à sa place et, télécommande en main, attendit la suite de l’exposé d’Alexander.

-D’abord et avant tout, avant la vidéo, il faut que vous connaissiez les circonstance de l’événement (Il le leur expliqua). Puis il fit un signe à Williams qui fit démarrer la vidéo.

L’assistance l’ayant visualisé, le responsable des ateliers de montage fut immédiatement avisé et fut prié d’amener d’urgence le chasseur C12 aux ateliers et de faire un contrôle rigoureux de tous ses systèmes de protections.

-Bref, ces hommes nous amenèrent à leur grotte nommée Betharram, au Sud de ce territoire mais, à notre grande surprise, ils nomment cette grotte Bertrand, qui est un prénom dans leur country. Tous ont pris l’habitude de changer le nom initial de leurs bases, en conservant une ressemblance phonétique du nom originel ; pratique qui s’est généralisée sur tout ces territoires, semble-t-il. Je n’en connais pas la raison.

Les ayant observé durant cinq jours pleins, nous sommes pour ainsi dire convaincus qu’ils y sont nombreux, ce serait à notre avis la plus grande base de ce territoire et sans doute la plus importante de cette partie sud de l’Europe. Ils entretiennent de nombreuses relations avec les autres nombreuses communautés et maintiennent un lien très étroit et très solide entre eux tous.

En réalité, nous sommes convaincus, Williams et moi, que ces gens sont très nombreux, répartis principalement dans le tiers sud de ce territoire qui regroupe la grande majorité des grottes de ce pays, et même cela parait être celui qui en possède le plus de toutes ces anciennes nations. Cette grotte Bertrand abriterait quantitativement, approximativement la même population que notre base, pensons-nous.

Un grand souffle de contentement passa sur l’assistance ; c’était là d’excellentes nouvelles.

-Et comment les évaluez-vous au niveau de...comment dire, demanda un grand gaillard maigre comme un clou, au niveau de leurs possibilités de s’impliquer dans une lutte de reconquête, sont-ils motivés ? Ont-ils conscience de la réalité ? Sont-ils mentalement prêt à affronter une guerre de reconquête ? Etc.

-Là, dit Alexander, je passe le manche à mon cher collègue et ami, Williams Whitehead, car lui seul est en mesure de vous répondre au mieux.

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A l’inverse de son chef et ami, Williams est un jeune homme d’environ du même âge que son compagnon, mais plus râblé et de réputation d’avoir une force peu commune ; les cheveux et les yeux noirs comme un corbeau, il est d’une douceur et patience à toute épreuve, ce qui est particulièrement indiqué pour son poste de psycho dans cette équipe, fonction exigeant un grand calme et un pouvoir de grande concentration et sensibilité pour pouvoir se brancher sur l’esprit d’un esclave prisonnier de ces horribles camps de travaux forcés.

-Mesdames et messieurs, avant tout, bonjour, passons sur le plaisir d’être à nouveau parmi vous, etc. Comme vient de vous le dire Alexander, ils sont effectivement nombreux, oui...je l’ai très nettement senti dans les détections de mon détecteur psycho, partout et toujours. Mais, si vous le permettez, vous verrez que c’est important pour mieux saisir l’ensemble de ces données ; j’aimerais d’abord faire un court retour en arrière, et vous faire un court exposé concernant la géostratégie-socio-politique d’antan.

-Matière où notre ami Williams, brille particulièrement, nous le savons tous aussi, dit Ruppert en souriant.

-Merci Ruppert de reconnaître mes compétences, répondit-il modestement en souriant.

La foule rit de bon coeur devant ces évidences communes puisque tout le monde dans la communauté connaissait les qualités et défauts de chacun.

-Ainsi donc, il est connu de tous, grâce à ces innombrables et précieux entre tous, documents retrouvés et piqués pour la majorité sur ce système Internet de communications globales du monde disparu, que les habitants de ces régions, ceux de ce territoire, la France, et plus particulièrement leurs forces armées, étaient réputés par les nôtres d’alors, de gens de peu de confiance, mal organisés et totalement incapables de faire front à un quelconque événement menaçant.

En deux mots : s’ils avaient alors une quelconque vertu ce n’était certainement pas d’avoir la vertu guerrière, au contraire. Du reste, ils en firent alors une magistrale démonstration devant les yeux du monde entier stupéfait, lors des invasions des barbares venant du Levant et du Sud. Ce fut le seul pays qui se laissa véritablement et lamentablement déborder par ce fléau. Ce avec la complicité abjecte de leurs politiciens, nous en avons maintenant les preuves.

De plus, ils furent victimes, pris sous l’emprise insidieuse de campagnes télévisuelles de manipulations des masses par de très fréquentes séries de messages subliminaux venant inculquer dans ces esprits dès lors prisonniers de l’idéologie du pouvoir aux ordres des cartels, cette abjecte et infâme idée que la race blanche était la seule fautive de tous les maux, et que le seul moyen de les sauver était de pratiquer le métissage par les mélanges raciaux jusqu’à totalement annhiler la race blanche, la seule fautive, selon ces traîtres infâmes aux ordres de la satrapie mondiale : les banquiers apatrides.

Tous ces événements sont corroborés depuis par les docs retrouvées sur Internet...Mais, et suivant les excellentes données ramenées par les équipes qui survolèrent l’Asie, et qui trouvèrent aucun rescapé, pour mieux le comprendre il faut analyser un tant soit peu et pour le moins, les événements de la dernière décade d’avant l’attaque de 2015.

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Ainsi, devant les agressions militaires et mondiales de plus en plus nombreuses et dévastatrices de nos propres forces militaires d’alors, ainsi que les anéantissements de nombreuses petites nations, etc. Comme chacun le sait maintenant, devant les agressions croissantes des notres, les chinois et les russes, vraisemblablement vers les années 2006 à 2009, passèrent des accords secrets de coopérations militaros-scientifiques pour faire face à la menace concrète et allant empirant de nos forces militaro-industrio-financières.

Ils construisirent alors dans ces deux pays, mais principalement en Chine communiste qui regorgeait de main-d’oeuvre pour ainsi dire gratuite, travailleurs étant déjà de véritables esclaves ; des bases ultra secrètes de recherche et constructions de matériels offensifs ; profitant en cela de l’adaptation de cette nouvelle arme redoutable, dite à antimatière, ils forèrent alors des bases sous les montagnes, à une vitesse et en quantité incroyable, pour y construire des avions.

Les rapports de nos services secrets...si secrets qu’ils en étaient quasiment inexistants, furent contraints de fournir d’urgence des infos sur ces monstres aériens. Il en ressortit alors les données encore plus effrayantes. A savoir que ces engins d’attaques dotés de la propulsion antigavitique, alors que nos fiers et arrogants états-majors pensaient être les seuls à maîtriser cette toute récente technologie, puis également de la propulsion MHD, leur assurant alors facilement les mach 10, sinon plus et les doigts dans le nez, comme on dit.

Mais le pire de l’horreur était à venir : ces engins de transport qui pouvaient se poser en quelques secondes n’importe où sur notre territoire, avaient leurs carlingues retenant en-dessous 8 énormes caissons de trois étages chacun pour les Tupolev et 9 caissons pour les Illiouchine ; caissons largables et dotés de l’antigravité. Chaque caisson pouvant se poser en douceur et éjecter dans la nature 3.000 hommes avec leurs armements d’assaut et armements lourds, y compris des engins blindés.

Vu le peu de temps que ces troupes devaient demeurer dans ces transports d’assaut, les hommes y étaient entassés debouts, le dos appuyé sur des rambardes en travers de la coque. Dès l’atterrissage, les parois avant et arrière de l’étage inférieur s’abattaient sur le sol, laissant sortir par chaque bout les engins blindés aux moteurs déjà ronflants. Pour les deux étages supérieurs contenant la troupe, les parois latérales se baissaient, éjectant en quinconce sur ces deux étages, des toboggans gonflables armés qui permettaient à la troupe de s’éjecter en moins de quatre minutes, troupe prête à l’assaut en moins de six minutes.

On pouvait aisément imaginer des dizaines de milliers de ces engins attaquant tous en même temps. C’était l’anéantissement certain de notre nation. Le véritable péril jaune dans toute son horreur, réel cette fois, et bientôt prêt à frapper. Et, c’est par un plus grand des hasard, comme la plupart du temps d’ailleurs, que nos systèmes de détections découvrirent ces nouveaux engins sino-russes, et ce, comme on le sait maintenant, seulement soixante-seize jours avant l’attaque de ce 1er mai 2015 en Occident. Il fut alors facile pour nous depuis, de déduire la raison de cet acte de folie criminelle de nos patrons d’alors.

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Mais les européens ne surent jamais rien de ce péril des armes aériennes sino-russe, ni encore moins de l’attaque aérienne massive que subirent ces deux pays par nos forces armées, deux à trois jours avant le reste du monde.

Les médias avaient pour cela été muselés, l’internet coupé ; un black-out médiatique implacable avait rendu les peuples occidentaux sourds et aveugles sur ce qui se passait alors en Asie, car l’Inde subit le même sort, ainsi que tous les pays de cette vaste région, Japon y compris ; la vieille haine et peur à l’égard de ces derniers joua à fond.

Ces territoires furent massivement gazés en un seul jour puis, les centres militaires et bases secrètes furent bombardés massivement ensuite, par-dessus le marché avec des bombes à antimatière et toutes les armes disponibles. Il leur fallait anéantir ces deux géants jusqu’à les rendre en cendre...C’est pourquoi, et c’est pas étonnant que l’Asie est actuellement entièrement dépeuplée, comme l’ont démontré les rapports des autres équipages inspectant ces secteurs. Beaucoup de ces malheureux rescapés, s’il y en a et si on les retrouve un jour, vont irrémédiablement régresser à la préhistoire, que dis-je, à la pré-préhistoire.

Williams Whitehead s’arrêta de parler un instant pour boire un verre d’eau. -Excusez-moi un instant voulez-vous, il but à long traits...Dans nos cockpits

nous ne sommes pas accoutumés à faire de si longs discours... Les spectateurs rirent un peu et la plupart en profitèrent pour se désaltérer

également. -Merci...Donc, ces fameux français du début de mon exposé, et j’y reviens

alors, ceux du monde mort, si péjorativement décrits par nos anciens, et à juste titre...ont, et c’est là un véritable miracle pour cette fois, ont produit de nouvelles générations d’hommes qui n’ont plus rien à voir avec leurs prédécesseurs directs ; sans doute, d’avoir découvert par la suite grâce aux documents piqués sur Internet, comme tous sur la planète, les réalités du monde mort sous leurs pas.

De quelle façon ces gens s’étaient comportés depuis des générations, en des renoncements si abjects, fit que ce violent choc psychologique leur fut extrèmement bénéfique, déterminant et indispensable même, rajouterai-je, et réveilla, déclencha plutôt comme par un violent électrochoc, aimerais-je dire, un réveil salvateur, et fit qu’ils rejetèrent en bloc ce monde mort et retrouvèrent par atavisme, les réflexes, les vertues guerrières et offensives de leurs très lointain ancêtres, qui en définitive sont les mêmes que les nôtres.

N’oublions pas que nous sommes cousins, de cette race universelle de ces grands guerriers blancs nobles et fiers et, vu ce lien filial qui nous unis de par les millénaires, si nous étions cousins, je puis affirmer que devant leur courage et leur farouche volonté actuelle, ils sont devenus de plein droit et à part entière, nos frères et soeurs légitimes. Je ne pense pas que le chef de notre mission, Alexander Cavalcanti, mon chef et ami me contredira, il regarda celui-ci, qui hocha affirmativement la tête...

Je vous affirme à tous, et c’est un privilège, en cet instant sacré, que nous avons dès lors trouvé des guerriers aussi redoutables que les nôtres et même si

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possibles encore plus déterminés, et qui auront leur place déterminante et essentielle lors de la grande bataille de la reconquête !

Une houle de cris de satisfaction passa dans les rangs des spectateurs présents. -Et, c’est justement là le grand problème actuel, poursuivit Williams, comment

allons-nous faire pour les aborder, car ils sont d’une extrème violence et méfiance à tout ce qui leur est étranger ; reflexes naturels salutaires et légitimes qui démontre clairement leur réaction positive au passé...Je vous avoue ne pas être peureux de nature et n’en ai aucunement la réputation mais...à l’idée de les affronter, je suis plutôt affligé de tremblements...oui, riez si vous voulez.

-Williams a raison, intervint énergiquement Alexander, tirant le micro vers lui, moi non plus je n’aimerais pas être obligé de les affronter. Ces convois, comme vous les avez vu sur la vidéo ; ce charretier qui sans en savoir plus nous a épaulé pour nous descendre froidement, et sans peur, vous l’avez vu vous-même ; du reste, je profite de cette cirsconstance particulière pour remercier du fond du coeur le gars qui eut l’idée géniale d’installer ce gros bouton champignon rouge de sécurité, et qui envoi d’un coup le chasseur à cinq cents mètres d’altitude d’un seul jet, et qui nous à sauvé la mise, car ce jour-là nous avons eu chaud ; ce gars a épaulé à une vitesse stupéfiante, vous l’avez tous vu la vidéo, ce qui démontre un entrainement exemplaire et une détermination sans faille.

Williams se penche vers le micro et dit en hochant la tête. -J’associe mon éternelle reconnaissance à celle d’Alexander, concernant

l’inventeur de ce fameux bouton rouge de sécurité, car sans lui...il fit un geste de la main, signifiant qu’ils seraient ailleurs à l’heure qu’il était.

-Ces équipages de chariots sont des gars redoutables, continua Alexander, véritablement, et ne reculent devant aucun danger...Nous avons assisté deux fois à des accrochages, alors que certaines de ces équipes étaient au bivouac pour le jour ; une fois avec une meute de chiens sauvages, puis une autre avec une compagnie de sangliers particulièrement dangereux car ils avaient des petits.

Ce furent des combats épiques et d’une violence inouïe ; certains hommes se trouvant au corps-à-corps durant un moment, se battirent aux couteaux et avec les dents. Alexander regarda son collègue qui hocha la tête pour affirmer ses dires...Nous n’avions jamais vu de combats aussi sauvages et emplis d’une telle frénésie de tuer. J’en suis encore bouleversé, je vous en donne ma parole d’honneur.

Alexander, fut un instant visiblement sous l’emprise d’une forte émotion, puis il se reprit.

-Voici la vraie, la principale question les concernant, dit de nouveau Williams, reprenant le micro, comme vous l’a confirmé Alexander. Comment les approcher et surtout, comment gagner leur confiance, car si on se loupe, c’est irrémédiablement fichu pour en faire nos frères de combat, car nous aurions alors des ennemis de plus, uniquement.

Ce sera à mon avis la stratégie d’approche la plus difficile à mettre sur pied. Il va falloir que nos plus fins esprits travaillent sur ce problème crucial...car telles sont les données. Comment faire de fauves redoutables et particulièrement

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méfiants, des amis, des frères de combat sûrs et définitifs ? Je souhaite bien du courage à ces Grosses têtes, ajouta-t-il en souriant.

Je vous remercie, chers amis, pour votre patience et grande indulgence. Je n’avais pas parlé autant depuis bien longtemps. Merci encore.

L’assistance l’applaudit chaleureusement pour toutes ces excellentes nouvelles...

Puis le président, Ruppert Burrows, se leva alors et réclama le silence de tous. -Chers amis, je propose de lever la séance qui pour une première fois fut

extrèmement riche en bonnes nouvelles ; ainsi avant de commencer à nous casser la tête sur ces nouveaux rébus que nos jeunes amis nous ont vaillamment ramenés de leur premier tour du monde...

Je vous propose d’aller au mess où nous y attendent de somptueuses glaces à la crème, de nos bénies soient-elles vaches laitières. Glaces à la fraise des bois, à la pèche, cette année particulièrement réussies ; à la menthe, framboises, cassis, noix de pécan, et...et...tutti quanti !

Qui les aime me suive ! En avant ! L’amphi se vida rapidement dans une bruyante allégresse générale. Cette jeune humanité se voyait enfin devant les portes grandes ouvertes d’un

futur assuré, le leur.

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Passions en Camargue

ette jeune Humanité était ainsi à un tournant capital de son histoire, mais une majorité l’ignorait. De prodigieuses forces en gestations depuis plus

de trois siècles maintenant, s’approchaient d’une éclosion qui allait profondément marquer les espaces stellaire de par le spectacle grandiose d’une guerre de titans ; guerre qu’allaient mener des groupes épars d’Hommes et de Femmes d’apparence pourtant si fragiles mais dotés d’une force terrifiante à laquelle rien ne résiste, celle de la foi absolue en eux-mêmes. La foi, la certitude de leur droit sacré de peupler Gaïa, leur planète vénérée. Gaïa, la splendeur de ces espaces stellaires, Gaïa, le saphir éblouissant, symbole de leur amour intense et indestructible pour la Vie sacrée.

Une partie d’eux viennent de ceux-là mêmes qui construisirent cette force létale qui annihila un monde ; leur situation privilégiée au milieu d’un microcosme douillet leur permit simplement de se réadapter en suivant une autre ligne du temps, suite à une simple rectification de leur trajectoire spirituelle initiale.

Les autres, miraculeusement sauvés par le sort indépendant de la volonté des hommes qui les avaient alors condamné à une mort tragique et se voulant totale ; après une horrible et douloureuse descente aux enfers et, après avoir donné ce fameux coup de talon au fond d’un désespoir le plus intense, remontèrent courageusement de ces affres sordides de l’antre de la misère spirituelle pour revenir à la Vie, chargés alors d’une prise de conscience de leur passé et de leurs devoirs dorénavant devant passer avant toute chose : porter au zénith, à la gloire céleste ces nouveaux Hommes et Femmes ressortis vaillamment, fiers et combatifs, de l’ignominie de la géhenne. Ceux-là seuls survécurent dans l’antre mystérieux et bienfaiteur des grottes, dans le ventre de la mère, Gaïa.

Ce destin dès lors remis sur une voie d’honneur allait faire se rencontrer ces gamètes isolés de chaque côtés d’un océan gigantesque ; union sacrée qui allait donner naissance à cette nouvelle Humanité. C’est cette force qui les mène contre l’obscurité, la foi en eux-même, savoir qu’ils sont les dépositaires d’une race de géants simplement endormis mais qui leur donne maintenant la puissance du combattant de l’éternité, pour lutter contre ces forces immondes du mal ancestral qui leur à volé leur bien le plus précieux : leur planète Gaïa.

Mais cette dernière revit maintenant, paradoxalement sauvée par un acte de démence de ceux, infâmes entre tous, qui voulurent tout anéantir. La grande Vie reprend ses droits un instant outrageusement volés par une misérable minorité sordide et pleine de cette arrogance qui leur permit seule, de mettre en esclavage, puis anéantir une humanité déchue par la faute de ses propres faiblesses et qui le paya légitimement de son existence.

C

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Tel est le pacte éternel du droit à la Vie, le mérite seul celui qui est prêt à lutter pour conserver ce bien le plus précieux de l’univers ; regarder fièrement les étoiles et se dire : je suis et reste un géant libre et digne et intégrant de ce prodigieux spectacle céleste.

Le reste n’est que loggorhée visqueuse, tromperie sur la marchandise, manipulations bonnes simplement pour les foules ahuries et rendues impropre à la plus minime des pensées personnelles. De telles masses, un tel troupeau est légitimement destiné, voué à l’apocalypse. Ainsi fut-il !

Le perceur survolait lentement à mille mètres d’altitude ces petites parcelles

cultivées éparpillées sur des kilomètres carrés de terrains vallonnés et couverts de bois et de bosquets séparant ces vignobles disparates. Elles avaient atteint ce secteur de chasse trois heures avant l’aube. L’appareil en position stationnaire à vingt-cinq mètres d’altitude, alarme automatique branchée bien évidemment ; elles avaient dormi jusqu’à ce qu’un grand soleil entrant à profusion par le pare-brise ne les tire de ce sommeil réparateur.

Marion s’étira avec délice et regarda sa compagne encore endormie, Céline, pelotonnée sur son matelas gonflable à côté d’elle, derrière la dernière rangée de sièges, comme toujours pour dormir...Elle sourit en voyant sa compagne dormir si profondément, son visage empreint d’une douceur sereine...Elle adorait Céline, un puissant lien d’amour et d’estime réciproque les unissait toutes deux.

-Quelle chance j’ai de l’avoir trouvé, se pensa-t-elle ravie, la regardant avec tendresse...J’aurais jamais pensé pouvoir un jour ressentir autant d’amour pour une Femme...elle est si belle, si forte, et si gaie, pensa-t-elle en la regardant dormir si confiante...Mais faut se réveiller maintenant, ma belle, dit-elle à mi-voix. Elle se pencha vers sa compagne et l’embrassa tendrement sur l’épaule gauche. Céline commença d’émerger de son sommeil, s’étira de tout son long et sourit à sa compagne.

-Bonjour, quelle heure est-il ? mon chef chérie, dit-elle en riant ; dommage, car j’étais partie dans un rêve érotique...que j’ai dû en mouiller ma culotte, parole ! dit-elle en s’esclaffant, oui...dommage que tu m’aies réveillé, car c’était bien parti pour un grand galop plein de cochonneries, comme je les aime.

Marion éclata de rire aux éclats, caressa brièvement la joue de Céline. -Tu changeras jamais, ma belle, t’es une croqueuse d’hommes. -Parce que toi tu serais du genre sainte-nitouche peut-être ? rit-elle. -Oh ! je ne pense pas que ce soit vraiment mon genre, non...j’adore les croquer

tout cru ces grands mâles arrogants et pourtant si délicieux, dit-elle le regard subitement tout allangui.

-Tu ne m’as pas répondu, qu’elle heure est-il ? -Largement l’heure de se mettre en chasse, ma nympho adorée ; 7:20 h, et

comme tu peux voir il fait un grand et magnifique soleil qui m’a justement réveillé. Tu vas faire ton petit pipi d’ange le temps que je prépare rapidement le frichti, on déjeune vite fait sur le gaz, et c’est parti, ok ?

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-Go ! Céline bondit sur ses pieds en riant et courut aux toilettes pendant que Marion préparait rapidement du café à la turque, fruits secs avec leur miel délicieux, et du lait chaud pour Céline.

Marion aux commandes du perceur, choisit une parcelles de ce vignoble où de nombreux esclaves ramassaient les grappes de ce raisin qui, transformé en vin, était mis en bouteilles cachetées. Bouteilles qui elles le savaient toutes deux, allaient finir sur de quelconques tables de Zanko-Khuigs, sous l’appélation de Bourgogne. Tous connaissaient les grandes régions vinicoles d’antan, régions qui actuellement cultivées se limitaient plus qu’à trois : la Bourgogne, la vaste région des Bordeaux, et la région des vins de champagne, qu’elles avaient bu une seule fois ; une bouteille à toutes les deux, avec Céline, et qu’elles adoraient...Ce vin étrangement pétillant les avait mise alors toutes deux dans une douce léthargie érotique...qu’elles s’étaient empressées d’éteindre, chacune avec l’aide du premier beau mâle qui leur passa alors devant...

En pilote de classe, Marion se faufila avec adresse entre le faîte des arbres et posa le perceur dans une minuscule clairière au milieu d’un boqueteau qui surplombait un lot de vignes aux grappes foncées gorgées de jus. Elles étaient si près des premiers travailleurs que Céline put les observer depuis la porte ouverte avec son scruteur psycho...Et encore une fois elle ne découvrit aucun signal positif parmi ces zombies qui ramassaient ces grappes de raisins de couleur rubis. Le perceur repartit lentement et ainsi toute la journée, elles visitèrent les lots de ce secteur sans avoir détecté la moindre source mentale autonome.

C’était désespérant de voir ces malheureux anchaînés à un destin horrible et de ne pouvoir rien faire pour l’instant et, avant longtemps encore, avant la grande attaque qui se précisait pourtant, mais quand ?

Dans des cas semblables elles étaient invariablement atteintes de morosité, tristesse profonde de n’avoir pu sauver une seule âme. Elles maudissaient, gardaient une haine tenace envers ces immondes esclavagistes de Zanko-Khuigs, et leurs troupes de semi-zombis, ces gardes pervers et cruels.

Leur prospection enfin définitivement close, le perceur remit le cap vers Bertrand, leur maison mais, naviguant sans se presser, furetant un peu partout, comme toujours, à l’affut de l’insolite, d’un quelconque événement ; rencontre fortuite qui pourrait amener un quelconque bien pour la communauté ; de plus, ce genre de balade au hasard permettait à tous les équipages de patrouilleurs de reconnaître le terrain, filmer, inscrire des particularités intéressantes sur leurs livres de bord. C’est l’a-b-c du conquérant que de garder en mémoire les données des territoires explorés.

Marion cette fois-ci avait pris une route plein sud. Le perceur avait déjà dépassé cette grande ville d’antan, Lyon, la Grande Poubelle, comme elles l’avaient renommé avec juste titre ; cette agglomération ayant été pareillement engluée à l’époque, dans une immense ceinture de campements barbares qui, au jour de l’attaque du 1er mai 2015, avaient déjà tué beaucoup de vies de leurs ancêtres coupables de tant de bétises et lâchetés suicidaires.

Les deux l’avaient rapidement visité l’année précédente. Elles furent horrifiées d’un tel spectacle de désolation. Entre les carcasses de cadavres desséchés et

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mutilés ; des rats sortaient parfois de ces cages thoraciques, véritables cerceaux béants d’épouvante, et dans ce spectacle de l’horreur sans fin, de féroces chats sauvages les poursuivaient, eux-mêmes pourchassés par des meutes de chiens sauvages errants, lesquels l’étaient parfois aussi par des meutes de loups encore plus féroces et affamés...Les montagnes de carcasses des véhicules croulant sous la rouille qui servaient aussi de nids pour toutes ces vermines. Les portes et fenêtres des immeubles battant aux quatre vents, beaucoup à moitié arrachées par les tempêtes, pendant lamentablement sur un gong vermoulu.

Certaines fenêtres défoncées par les branches des arbres de la rue qui n’avaient pas été émondés depuis des siècles, leurs racines ayant éclaté les murs, trottoirs et macadams...Des herbes, voire des arbustes sortaient par les ouvertures des immeubles, leurs racines faisant éclater les maçonneries. Des toitures s’étaient effrondrées sur les trottoirs, n’ayant pas été secourues en temps utile sans doute, par des artisans rendus à l’état de squelettes devant la porte d’entrée. Des nuées d’oiseaux nichaient dans ces décombres toujours debouts.

Elles n’avaient pas eu le courage de sortir du perceur pour entrer dans ces antres de mystères que sont ces immeubles. Elles eurent une pensée chaleureuse envers leurs charretiers qui eux avaient ce courage insensé d’aller affronter tous ces dangers. Ces gars-là étaient des géants redoutables. Marion eut une pensée émue en se souvenant de son dernier amant, juste avant de quitter la station, un de ces guerriers justement, Hugues, un géant un peu taciturne et d’une force herculéenne, et pourtant, d’une douceur et d’un amour immense pour elle et tous les siens...Hugues, son cher et puissant amant si délicat et attentionné...

Le perceur suivait lentement le cours du fleuve allant vers le sud, allant fouiner à ses alentours...un coup à droite, un coup à gauche, tournant lentement en grands cercles concentriques autour d’un amer quelconque, puis recommen- çant plus bas, partant du principe élémentaire autant qu’éternel que tout ce qui vit ne s’éloigne jamais beaucoup de la source d’eau disponible du lieu.

Partout, ce n’était que désolation ; sinistre spectacle de ruines d’anciennes entreprises qui bien avant 2015 déjà avaient été délocalisées vers l’Asia, la Chintok surtout, savaient-elles pertinemment ; ce qui avait été une des raisons majeures de la ruine de l’Euromorte d’alors, jetant des millions d’habitants dans la misère et le désespoir le plus sordide car n’ayant plus de travail qui leur fut volé par leurs politicards vendus aux lobbies industriels et à la finance apatride.

-Marion, regarde toutes ces horribles carcasses de ces bâtiments délabrés, lui dit Céline écoeurée, cette humanité débile nous a littéralement pourri notre Gaïa...Comment pourrons-nous un jour espérer faire disparaître toutes ces infamies qui la défigure...c’est à désespérer de tant d’horreurs.

-Oui, répondit sa compagne attristée aussi, je ne sais pas comment...Mais imagine comme ces paysages devaient être beaux avant qu’ils n’y construisent toutes ces horreurs...Comment ont-ils pu avoir cette folie de dénaturer ainsi une planète entière ou presque, c’est si abject que s’en est incompréhensible.

-Tu sais, Marion, faut pas rêver non plus...nous tous, seuls, avec nos seules mains, nous n’y arriverons jamais, c’est au-dessus des choses possibles...Il nous faudrait une...une, elle hésitait, une idée semblant vouloir germer dans son

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esprit...Il nous faudrait comme une arme qui détruise tout du...du haut des airs, voilà ! Avec nos perceurs tiens ! on survolerait les zones et tout serait détruit en tous petits morceaux, y aurait plus qu’à les ramasser et les transporter à...au...je sais pas où ni comment, mais ça serait déjà plus facile non ?

Tiens ! faudra passer l’idée aux Akadis, eux sauront peut-être ? -Ouais...super idée chérie, mais voilà, comment trouver un bidule pareil, hein ? -Et si on en parlait aux autres au retour, peut-être qu’un gars aura une solution

possible aussi, pourquoi pas ? -D’accord Céline, et bravo pour la gamberge ! Faut pas désespérer tu sais, car

en définitive tout ce qu’à inventé l’homme depuis la nuit des temps à toujours commencé par une simple, une minuscule idée qui jaillit d’un cerveau inconnu pour la plupart, alors...Te voilà peut-être à la veille d’être reconnue comme le génie de la station Bertrand, ma chérie, qui sait, hein ? lui dit-elle en lui souriant.

-Génie, génie...c’est beaucoup dire, et de toute façon je m’en contrefous comme de l’an 2015 du génie ; l’important c’est de ne plus voir toutes ces horreurs qui défigurent notre Gaïa, et qui me dégoûtent au plus au point, tant qu’au reste...

-Entièrement de ton avis, ma belle...Bon ! que fait-on maintenant d’après toi ? la nuit va tomber, faudrait trouver un coin peinard pour dormir et demain nous reprendrons la descente de ce fleuve jusqu’à...jusqu’à...Marion hésitait, faisant courir son crayon sur la carte, tenant le compas à pointes sèches dans sa main droite appuyée sur sa règle-rapporteur Cras (inventée par l’Amiral Jean Cras), servant à calculer et tracer une route sur une carte.

-Et si nous allions jusqu’à la mer pour nous baigner un bon coup, hein ? s’écria Céline, folle de joie.

Marion se retourna et la regarda avec de grand yeux étonnés, bouche ouverte, les bras ballants sur la table à carte.

-Tu sais que t’es dans un grand jour ma chérie, sans l’ombre d’un doute même ; deux idées géniales en moins de cinq minutes...faut que je note ça dans mon livre de bord, ça oui ! Viens ici que je t’embrasse, mon coeur ; et c’est ce qu’elles firent en riants comme des gamines.

Puis, cherchant depuis un bon moment, un endroit agréable où passer la nuit...

-Marion, regarde cette colline boisée là-bas, on pourrait s’y installer pour la nuit, ce serait quand même bien plus agréable que dans ces poubelles croulantes, et demain on aura le beau spectacle des arbres en ouvrant les yeux, ce sera quand même plus chouette, non ?

-Un ! deux ! trois ! s’écria Marion en comptant sur ses doigts tout en regardant Céline avec un grand rire excité : trois idées en moins d’un quart d’heure, tous records battus par notre championne toutes catégories, s’écria-t-elle en se levant pour prendre le bras droit de sa collègue et le dresser à la verticale, avis aux amateurs ! Ma chérie, tu es absolument géniale, et elle l’embrassa tendrement d’un baiser fugace sur les lèvres.

-Je vois pas ce qu’il y a de génial là-dedans, répondit une Céline fort modestement étonnée.

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-Si, mon petit coeur des îles enchantées...car moi, la grande terreur, commandant de ce tas de ferraille, je n’y ais foutrement pas pensé une seule petite seconde, dit-elle en riant aux éclats.

Le lendemain matin, le perceur reprit sa route plein sud, avec pour cette fois

un objectif des plus agréables : cette fabuleuse mer bleue et la baignade. Marion décida de se diriger directement vers le vaste delta de ce fleuve offrant

d’innombrables bras, canaux et îles absolument déserts de toutes vies humaines ; elle choisit un des bras du delta vers l’ouest, sachant trouver un coin isolé de tout spectacle de ville à l’horizon. « Pour se laver la tête des horreurs des hommes anciens », aimait-elle dire souvent.

Elles connaissaient déjà, et c’est avec une grande et folle joie qu’elles s’y rendirent car c’était une des rares endroits de ces vastes territoires camarguais exempts des pollutions passées ; très peu de bâtiments, loins à l’horizon encombraient cette immensité ; royaume des oiseaux de toutes sortes, y compris et surtout ces vastes et majestueux voiliers que sont les oiseaux de mer ; spectacle merveilleux que de les voir ainsi glisser dans l’azur, irréels dans ce ciel si magnifiquement bleu et serein. Qui aurait pu imaginer, de voir un tel éden, qu’un désastre sans précédent avait rayé une humanité de la carte...

Ayant navigué prudement et avec lenteur, elles y arrivèrent peu avant la tombée de la nuit ; Marion choisit un bois de tamarins, pins maritimes et pins parasols pour y installer le perceur qu’elle plaça en vol stationnaire à verrouillage géopoint, comme ils appelaient cette technique : le perceur suivait ainsi automatiquement et inexorablement ce point précis de la planète dans son déplacement dans l’espace ; ce que leur permettait cette fabuleuses technique de ces engins qui ne dépendaient d’aucune sources d’énergie autre que celle qu’ils puisaient à profusion dans l’univers.

Ainsi était le perceur sous couverture anti-détection des satellites, blotti entre la ramure des arbres, à quelques quinze mètres de haut environ, bien à l’abri dans cette végétation protectrice et à seulement une quarantaine de mètres d’une immense plage totalement déserte, la mer à l’infini, qui vers le ponant est revêtue d’un somptueux manteau de métal pourpre et irisé.

Il faisait nuit maintenant. Elle dinèrent d’un excellent repas et, luxe suprème, après avoir tout rangé des restes de leur souper et fait leur toilette pour la nuit, elles se changèrent et revêtirent leurs chemises de nuit légères et aérées pour cette douce nuit automnale ; elles éteignirent l’éclairage intérieure du perceur et ouvrirent la porte en grand, face à cette mer bleutée. Elles s’installèrent confortablement allongées sur leur grand sac de couchage étalé devant la porte largement ouverte, profitant ainsi d’une soirée au clair de Lune.

Rare privilège pour des guerrières, parmi les bruits stridents et innombrables des insectes ; sons modulés et capricieux leur parvenant par vagues, suivant les ondulations d’une douce brise marine leur apportant aussi ces troublantes effluves vivifiantes et énergétiques de ce mystérieux monde marin...

Puissantes senteurs d’un autre monde qui les étourdirent un peu et leur chavire l’âme, quand tout à coup, leurs mains se cherchent, s’étreignent fiévreusement,

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le temps se fige en une bouleversante attente...ces odeurs chargées de senteurs d’iode et de fraîcheurs vivifiantes...des frissons étranges leurs parcours les reins puis, brutalement, une vague géante survint alors d’un coup et les emporta, pantelantes, leurs esprits pris d’une folie étrange, pensées délirantes leur chavirant le coeur d’émotions irréelles...Cette onde enivrante les jeta alors sur une grève inconnue, abandonnées, offertes, de suite prises d’assaut par des pulsions brûlantes et impérieuses...Corps vibrants, reins cambrés à craquer, bouches ardentes à la morsure de feu, ventres dévastés par de gigantesques souffles de nuées ardentes, cuisses ouvertes parcourues de longs frissons de volupté, jambes aux muscles saillants et tendus pour soutenir ce corps qui se tord et se love sous les caresse brûlantes, poitrines haletantes aux seins gonflés, mamelons turgescents sous les morsures d’aiguillons électriques. Frénésie démentielle qui les noie, les emporte, les chamboule dans un maelström hallucinant ; les engloutie pour renaître aussitôt en de surnaturelles suffocations qui les rend littéralement folles d’une telle délivrance et de tant de plaisirs jusqu’ alors insoupçonné. Elles se laissent alors aller, vaincues, abandonnées, toutes ouvertes à ces ondes sauvages qui les dévastent, emportées par les réactions sublimes de ses pulsions de la Vie. Elles sombrèrent, se laissèrent alors enlever comme simples et fragiles fétus par les délices de ces appels irrésistibles du bonheur d’être jeunes, fortes, belles, vivantes et vibrantes d’indomptables énergies.

Toutes deux se pelotonnèrent dans le sac de couchage, tendrement enlacées, terrassées par la fatigue, alanguies en une douce extase, submergées d’un bonheur, d’une joie sourde et intense à chavirer l’âme des plus forts. Conscientes, ivres de bonheur et fières et heureuses de s’être ainsi révélées à elles-mêmes.

Elles s’endormirent ainsi, innocentes splendeurs féminines, chevelures d’or et de jade et jambes emmêlées ; grâces fragiles, peaux veloutées et parfumée de ces senteurs de l’amour virginal, douceurs de frèles pêches de vignes bercées par le chant sublime de leur mère vénérée, Gaïa, cette nature grandiose qui les appelle au secours depuis la nuit de temps barbares oubliés...Leurs deux esprits enlacés maintenant, tornade d’énergie lumineuse gonflée par le souffle puissant de Neptune, emportés dans des rêves de combats grandioses...Deux entités réunies, lovées en une seule et unique et vibrante torche flamboyante, s’élevant tout à coup au-dessus de ce bois de pins parasols, irradiant l’amour universel et éternel, le souffle divin de la grandeur de Gaïa, illuminant de ses rayons de Vie ces splendides manades de somptueux chevaux blancs et purs de cette Camargue millénaire.

Cet orgueilleux étalon d’un blanc nacré et scintillant de rosée, qui là-bas se dresse face à la Lune, crinière dressée dans un hennissement retentissant d’affirmation de sa puissance sur ses juments...Et ces sombres et redoutables fauves, ces taureaux paisibles et vifs comme l’éclair, gardiens attentifs et infatigables de leurs manades, prêts à fondre sur un ennemi tel un cauchemard, dans une charge de grondement de fin du monde...Ces traits fauves et fuyants du renard malicieux et vif comme la foudre. Ces vols d’oiseaux multiples à

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l’infini, nuages multicolores et sonores ; et ces flamands roses aux becs si ridicules, rutilantes flammes volantes de ces espaces vierges et sauvages...Et là-bas, sur cette mer lisse couleur de métal bleuté, peinte d’une scintillante trainée de Lune, une bande de ces étranges dauphins, offrant comme présent à ces prestigieuses visiteuses d’albâtre enfin retrouvées, leur spectacle d’ondulantes arrabesques...

Elles, elles sont communion pure, énergie sacrée éblouissante que sont ces deux fragiles représentantes de leur espèce renaissante de limbes insondables, deux âmes pures et dures comme le diamant, isolées au milieu de ce sanctuaire de Vie et de pureté. Elles, elles sont deux vierges farouches et indomptables, Walkyries immortelles, combattantes infatigables, symboles même de cet amour grandiose qui doit impérativement faire renaître une Vie puissante et légitime, née de ces femelles et de ces mâles sublimés de par leur foi porteuse de la terrible flamme destructrice de la rédemption...

Chaleur langoureuse, lumière violente, cris des mouettes et des goélands qui se

chamaillent et se volent sans fin un morceau de nourriture...Céline ouvrit les yeux et brusquement se souvint de leur nuit de folie, elle eut un léger sursaut, mit ses doigts devant sa bouche, yeux écarquillés, regard émerveillé...Elle se dégagea tout doucement du bras de Marion qui lui enlaçait son épaule, elle s’assied, regarde sa compagne à demi allongée sur le ventre, si belle et totalement abandonnée, pensa-t-elle rêveuse...

Elle prit volupteuseusement ses deux seins dans les conques de ses mains, les caressa lentement, ses seins encore lourds de jouissances, encore douloureux de cette folie...puis, sa main droite descendit lentement sur son ventre et arriva entre ses cuisses relevées et ouvertes et caressa doucement son sexe qui la brulait encore doucement, ses doigts s’entremêlant à sa sombre pilosité...un doigt cherchant un instant la douce chaleur humide de son intimité...un sourire radieux illumina son visage...Elle s’étira langoureusement, les bras à la verticale puis, se pencha pour déposer un léger baiser sur l’épaule de son amante assoupie.

C’est l’odeur puissante du café qui tira Marion de son néant. Elle ouvrit les yeux et vit un plateau avec son petit déjeuner servit à sa gauche, une tasse fumante de café fort comme elle aimait et, une Céline resplendisante qui attendait sagement son réveil, assise à sa droite, tout contre elle, lui faisant un sourire chargé d’amour intense et lumineux.

-Bonjour Marion, tu dormais si profondément...elle lui caressa la joue, je...je te regardais ainsi abandonnée et j’avais jamais réalisé, avant cette nuit de folies merveilleuses, comme tu est belle, si belle, mon amour...Sa main descendit et lui caressa lentement le flanc, s’arrêtant sur sa croupe, hanche pulpeuse à l’arrondi voluptueux...Je t’aime...je t’aime à la folie, Marion chérie ; puis elle lui donna une grande claque sur la fesse et s’écria en riant aux éclats et se levant d’un bond.

-Allez ! debout, chef ! c’est bientôt dix heures, et la mer, cette folle aussi, eau de vie sacrée de notre Gaïa, nous attend pour notre premier bain depuis longtemps !

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Après avoir méticuleusement contrôlé leurs alentours pour s’assurer qu’aucun danger ne pouvait les menacer même de loin, Marion posa le perceur au bas des arbres puis, vêtues seulement de leur splendide nudité, elles partirent enlacée vers la plage de sable blond, tenant chacune son sabre de combat dans sa gaine.

Marion tenait son katana jeté sur son épaule droite, tandis que sa compagne l’avait négligemment dans sa main gauche, le balançant négligemment de droite à gauche devant elle...Elles avançaient ainsi, folles de bonheur dans ce sable presque brûlant déjà, leur corps se gavant ainsi des puissantes ondes telluriques bénéfiques de leur mère bénie, Gaïa, la resplendissante, ainsi que ces ondes merveilleusement brûlantes de ce Soleil royal.

Ces sabres du Jap, ce pays du levant, avaient une histoire peu commune. Un jour une équipe de charretiers qui avaient dévalisé une armurerie,

ramenèrent un important stock d’armes blanches de toutes sortes, dont ces fameux et étranges sabres de samouraïs d’antan, ainsi que les couteaux droits de mêmes origines, des tantos. Marion qui avait toujours été fascinée par les armes blanches, était devenue experte au maniement de ces lames. La vue de ces sabres et couteaux lui fut irrésistible et elle s’en équipa ; commença alors un long entrainement, puis, Céline fit de même.

Pour leurs entrainements acharnés elle se firent fabriquer des sabres de bois durs par les menuisier. Elles avaient vu des vidéos montrant des combats d’un réalisme spectaculaire. Elles assimilèrent rapidement la philosophie de l’usage de ces armes redoutables : leur usage bref comme l’éclair mais dans la volonté de donner une mort fulgurante et instantanée. Elles acquirent ainsi une maestria et vitesse d’exécution stupéfiante.

Les âmes d’antiques et redoutables samouraïs étaient ainsi réincarnées dans ces deux magnifiques guerrières, fières et orgueilleuses filles de Gaïa, la vénérée ; ce qui était paradoxal mais tout de même heureux de faire revivre ainsi leur art, car de leur temps, les femmes de ces guerriers orientaux n’avaient pas le droit de toucher ces armes redoutables, sous peine de mort. Ce privilège sacré était seul l’apanage de ces hommes de fer au code d’honneur rigide et inflexible. Comme maintenant l’étaient ces nouveaux Humains de cet Occident millénaire.

Elles allaient depuis ainsi équipèes, le katana dans son foureau noir fixé dans le dos, la poignée derrière la tête, accessible en un éclair, le poignard, le tanto fixé devant à la ceinture. Elles avançaient ainsi, casque d’or et de jais, guerrières d’albâtre resplendissantes, deux corps somptueux d’une merveilleuse beauté digne de ce lieu vierge et serein.

Sabres plantés droits sur la grève, mortelles vigies de leur divines maîtresses, l’immense plage retentit alors de leurs rires et cris de joies d’enfants de l’amour. Elles se coursaient, nageaient timidement sans toutefois s’éloigner du bord où elles avaient pied...de petits poissons venant leur mordiller les jambes...Ce fut une heure de folles courses qui les jeta enfin sur la sable chaud, essoufflées, rompues par tant de bonheur.

Marion se pencha et embrassa langoureusement sa compagne sur la bouche, celle-ci se coula, se blotissant dans ses bras, leur jambes s’entremêlèrent et elles sombrèrent de nouveau dans une folie voluptueuse. Elles s’étaient endormies au

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soleil, la peau brulante de ses merveilleux rayons d’or...Céline dit alors à son amour tout neuf, le regard chargé de tendresse, toutes deux allongées ventre contre ventre, cuisses étroitement enlacées, échangeant leurs chaleurs de braise...

-Marion, c’est fou ce qui nous arrive... -Tu crois, chérie ? ça devait couver depuis longtemps, faut croire...comme quoi

on croit se connaître, et patatras, une éfluve marine et coquine qui passe et on se retrouve tout naturellement et toute surprise dans les bras de l’autre...faut pas chercher à comprendre surtout...Voilà pourquoi je t’ai toujours beaucoup aimée, sauf que je ne savais pas à quel point, voilà ! Elle prit la tête de Céline entre ses mains, l’attira contre elle et l’ambrassa fougueusement sur la bouche.

-Marion...Marion chérie, je voudrais te demander quelque chose, je peux ? -Comme si je pouvais te refuser quelque choses, mon oiseau joli...je donnerais

ma vie pour toi, alors... -Moi aussi, mon ange doré...je voudrais mourir pour toi...mais, comme tu

parlais des autres, à la station...Je voudrais que notre amour tout neuf reste un secret rien que pour nous deux, nous deux seulement...Je ne sais pas pourquoi mais j’ai peur que tant de bonheur attire des choses mauvaises, tu comprends, c’est ridicule, hein ?

-Mai non, mais non...elle lui sourit et lui caressa doucement la joue, mais c’est d’accord, nous garderons notre secret...tant que personne ne s’en apercevra, tu sais, car l’amour de deux êtres transcende tous les pouvoirs des gens : ça se voit, l’amour ainsi se sent à des kilomètres ; mais d’accord, gardons secret cet amour inestimable et pur. Allez ! il faut repartir ma belle, regarde comme le soleil a baissé sur l’horizon déjà, on se baigne encore un moment et en route vers de nouvelles aventures, elle s’embrassèrent encore violemment à pleine bouche, se serrant à s’étouffer...

-Oh ! Marion chérie, rien ne pourra plus jamais nous arriver de plus merveilleux.

Se tenant par la main et riant aux éclats comme de jeunes enfants, elle se jetèrent dans les vaguelettes de cette mer esquise et chaude de cet automne doré, de cet été indien, chauffée de tout l’été par le seigneur des lieux, ce grand Soleil somptueux et omniprésent.

Le perceur naviguait lentement cap à l’ouest maintenant, elles avaient atteint

ces monts et collines de cette région à l’ouest des ruines de Montpellier qu’elles venaient juste de dépasser. La nuit allait tomber d’ici une heures environ...il leur fallait commencer à penser se procurer un abri...Un grand bois de feuillus devant à cinq kilomètres. Le perceur s’y faufile avec l’habituelle maestria de son pilote...il avance tout doucement entre les troncs, invisible, à la recherche d’un espace où se poser quand, presque arrivé à l’orée opposée du bois, elles aperçoivent un groupe d’une douzaine de personnes qui bivouaquent. Ces gens sont assis et éparpillés, installés sur des troncs d’arbres morts, sur des souches déracinées. Une étrange impression ressort de ces personnes.

Marion stoppe le perceur et elles les observent durant un bon moment...Ils semblent fatigués, habillés étrangement avec de longues robes de couleurs

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foncées...Une étrange impression de gravité ressort de leurs visages mangés par de grandes barbes, car il n’y a que des hommes dans ce groupe étrange ; la gaieté ne leur est visiblement pas coutumière. Marion fait reculer le perceur d’une trentaine de mètres du groupe et le pose derrière quelques buissons dans l’herbe rase, la porte tournée à l’opposé du groupe, porte qu’elle ouvre.

-Marion, attends Marion, dit soudain sa compagne inquiète...Pourquoi veux-tu aller voir ces gens ? j’ai un mauvais pressentiment, tu sais...partons à la maison va, on peut y être demain matin, tranquilles.

-N’aie pas peur, mon ange, on va juste voir qui ils sont puis nous repartons. Ça te vas comme ça ?

-Marion...sois prudente, je suis pas tranquille, je les sens pas, je te dis, chérie... -Allez zou, on y va ! on en a pour cinq minutes, pas plus, tu verras. Elles sortirent du perceur et le contournèrent, têtes nues et les mains libres,

avec seulement leurs armement standard : deux pistolets et leurs armes de samouraïs qui ne les quittaient jamais. Elles s’avancèrent vers le groupe en dialoguant négligemment à voix haute, pour qu’ils les entendent venir et ne soient pas surpris par leur brusque apparition ; elles firent semblant d’être surprises de les découvrir...Céline dit à voix basse.

-Marion, fais attention à ce vieux assis là-bas sur la gauche sur cette souche. Il a une croix en bois sur sa tunique, c’est...ce sont des gens fanatiques pour une religion...Partons Marion, j’ai peur.

Marion lui prit le bras et le serra discrètement pour la rassurer...Arrivées à huit ou dix mètres du groupe elles stoppèrent, Marion s’adressa à eux.

-Bonsoir Messieurs, quelle surprise, nous qui croyions être seules dans ce bois, c’est un grand plaisir que de vous rencontrer ; que les grands espaces stellaires vous bénissent et vous protègent.

A ces mots, un homme fit un bond et s’avança d’un pas, leur disant, menaçant. -Qu’as-tu dis, femme ? Marion le regarda en souriant, les jambes écartées, bien campée sur ses pieds,

le pouce gauche passé dans son ceinturon, dans une attitude noble et sereine. -Je vous souhaitais le bonsoir, mon ami, et la protection amicale pour vous

tous, des espaces stellaires, rien de plus. Qui êtes-vous ? -Comment oses-tu me regarder de la sorte ? femelle perverse ! Marion savait maintenant que Céline avait raison, c’étaient des monstres

fanatiques. Selon leur code il n’y avait plus qu’à lutter et les détruire. Elle répondit à l’homme avec un sourire charmant.

-Je te regarde comme ce que tu es, petit homme minuscule et insignifiant, comme une merde puante que vous êtes tous.

-Qu’as-tu dit ? hurla-t-il suffocant de rage. Venez immédiatement vous prosterner devant notre maître vénéré, dit-il en montrant le vieillard.

-Nous ne nous agenouillons jamais devant personne, uniquement devant nos Hommes et seulement pour leur faire l’amour, car apprends une chose, racaille des enfers, nous sommes avec eux les uniques dieux de cette planète ; tant qu’à s’agenouiller, certainement pas devant un débris dégoûtant comme cette vieille

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chose puante, lui répondit-elle en le fusillant du regard et montrant d’un mouvement de tête le vieux en question.

L’homme, un instant sidéré de tels propos tourna la tête et regarda à sa droite le vieillard avec la croix sur la poitrine, Marion suivit son regard et, stupéfaite, elle croisa le regard dément de haine de ce dernier.

Elle dit entre ses dents à l’intention de Céline à sa gauche. -Position de combat ! Le premier qui avance, tue-le ; ce sont des fous

sanguinaires, t’avais raison, mon amour, pardon. Go ! Elles firent trois pas rapides chacune sur le côté, Marion vers la droite et Céline

sur sa gauche et se retrouvèrent campées solidement sur leurs jambes écartées et légèrement fléchies, en position oblique face au danger ; leurs bras droits volèrent alors derrière leurs têtes et l’homme planté là-bas entendit deux bruits brefs du chuintement du métal sur du cuir, de suite suivis presque en même temps par deux claquements secs : comme deux coups de fouets, typiques de ces sabres extraits violemment de leurs fourreaux, preuves de longues et tenaces heures d’entraînements. L’homme vit alors comme dans un cauchemard ces deux infernales femelles tenant à deux mains deux lames brillantes verticales...et, impensable, elles lui faisaient front, leurs regards exprimant une agressivité et une force démesurée.

Le vieillard regarda Marion, les yeux brillants de colère et de haine, et hocha la tête à l’intention de l’homme qui les avait apostrophé et qui avait stoppé net son mouvement, destabilisé par une telle vision aussi démente que ces deux vulgaires femelles damnées par les flammes de l’enfer ; se permettre un tel outrage impensable : menacer des hommes avec des armes. Son dieu ne permettrait pas ainsi un tel affront sans que la mort punisse ces deux furies, et il fonça sur Marion, mains en avant, bête de démence absolue, folie criminelle lancée contre la Vie noble et sacrée.

Céline s’élança à pas rapides vers lui, sabre levé à hauteur de son épaule droite, tenu à deux mains avec une résolution de fer ; elle tournoya sur sa gauche un tour complet sur elle-même et sabre à l’horizontale à bout de bras, elle frappa de toute sa rage et, avant que l’homme réalise ce qui l’envoyait rejoindre son dieu de démence, sa tête fit un saut en l’air pendant que le corps, sur son élan, venait stopper aux pieds de cette femelle blonde qu’il voulait tuer. Sa carcasse vint mourir aux pieds de cette outrageante beauté dorée, veines jugulaires sectionnées envoyant des giclées de sang sur la botte gauche d’une Marion qui restait de glace ; elle posa alors sa botte ensanglanté sur ce cadavre décapité et tressautant et, tendant le bras gauche vers ce groupe d’hommes destabilisés par cette attaque foudroyante et létale, elle les appela du doigt, un sourire méprisant aux lèvres.

-Venez, si vous en avez le courage, bande d’avortons puants, venez vous faire étriper par deux faibles femmes, rit-elle aux éclats, ses yeux lançant les éclairs du meurtre rédempteur, venez si vous l’osez, chiens puants que vous êtes tous, raclures de l’humanité !

Elle s’écarta de la carcasse et les attendit avec une furieuse envie de tuer dans les tripes. Céline avait décroché, de nouveau à hauteur de Marion à plus de

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quatre mètres d’elle sur sa gauche, reprenant sa posture d’attaque, son arme verticale tenue fermement à deux mains à hauteur de l´épaule droite; pendant que les autres hommes commençaient de foncer en désordre sur elles.

Les katanas frappèrent alors à une vitesse stupéfiantes ; elles tournoyaient, tornades scintillantes de leurs terribles lames. Marion vit en un éclair un homme qui allait surprendre son amour par derrière, trop tard pour intervenir, elle sortit son couteau et le lança, l’agresseur fut stoppé net dans sa course par la violence du projectile planté en plein coeur jusqu’au manche, il s’écroula à la renverse.

Trente secondes de combat, cinq cadavres jonchaient déjà le sol, têtes, bras et tripes éparses ; le combat âpre et sauvage continuait sans une parole ; seuls de courts râles de souffrances troublaient un instant les lieux. Marion venait de décapiter un agresseur et continua sa rotation initiale, emportée par l’élan, regard en coin derrière elle, elle vit un homme qui fonçait sur elle, se tournant en un violent tour de rein, sabre tendu en avant elle l’embrocha en plein coeur, genoux ployé, torse en avant à l’horizontale ; dans le choc, un han sortit de la poitrine du mourant, elle allait dégager sa lame, un pied sur la poitrine du cadavre quand, elle vit un nouvel agresseur foncer vers elle, profitant que son sabre était indisponible, elle se tourna alors d’un quart de tour pour qu’il ne perçoive pas son geste et tira son poignard de poing dans sa gaine fixée sur sa poitrine à hauteur de l’épaule gauche, le tenant dans une poigne de fer, elle se retourna d’un jet et faisant un bond vers l’homme qui tenait son couteau levé, elle lui planta sa lame dans l’oeil gauche jusqu’à la garde formée de son poing fermé ; l’homme poussa un hurlement démentiel puis s’écroula foudroyé, la lame ayant pénétrée jusqu’au cerveau ; elle la dégagea avec peine, un pied sur la machoire béante du mort, sa lame coincée dans le crâne. Elle remis son poignard dans sa gaine et récupéra enfin son sabre et continua dans une rage indécible de sabrer tout ce qui était devant.

Céline qui venait d’en étripé trois autres déjà, fonça pour intercepter un agresseur qui tentait de prendre Marion à revers, l’homme la vit, dévia sa course et se jeta alors sur elle, la démence pure dans ses yeux fous. Elle stoppa net en pleine course dans une feinte et le laissa passer à la froler, celui-ci courant penché en avant, elle lui trancha la gorge de son sabre, le tenant seulement devant sa gorge baissée, c’est lui-même qui s’égorgea avec sa vitesse mais, à son passage, elle sentit une pointe de feu s’enfoncer dans son flanc droit, elle vascilla alors et cria le nom de sa compagne, MARIOOON !

Cette dernière fut foudroyée un instant par cet appel au secours, elle la vit du coin de l’oeil tomber lentement sur elle-même, se tenant le flanc droit, sa main ensanglantée, l’homme égorgés à ses pieds, le corps sursautant encore. Saisissant alors en un flash foudroyant la scène, comprenant que Céline s’était portée à son secours lors de cette attaque par traîtrise, elle avait tenu sa parole, donnant sa vie s’il le fallait pour la sauver. Prise alors d’une rage démentielle, sabre levé à deux mains, elle s’élança sur les trois hommes qui restaient de vivants et qui faisaient une garde de leurs corps autour du vieux débris, elle les tua alors sauvagement et avec delices.

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Elle abattit avec rage son arme sur le premier devant elle, la lame frappa verticalement à ras de la tête sur l’épaule gauche, ouvrant, coupant en deux ce monstre jusqu’à la ceinture, il s’écroula ouvert en deux, dans un flot de sang noyant tout autour de lui ; elle tournoya et trancha la tête du deuxième et dans le même élan virevoltant, tua le dernier dans une violente estocade, son arme enfoncée jusqu’à la garde en plein coeur, le traversant de part en part ; sa tête tout contre celle du mourant, elle lui cracha au visage, puis dégagea son sabre d’un coup sec pendant que le corps de l’homme s’écroulait au sol.

Elle planta son katana en terre et alla prendre son tanto planté dans la poitrine de l’autre homme tué précédemment, elle dû mettre son pied sur la cage thoracique et le tirer violemment, la lame devant être coincée dans les côtes, puis elle courut vers ce vieux qu’elle haïssait plus que tout au monde ; le vrai, l’unique responsable de ces malheurs, elle le savait maintenant.

Celui-ci, le visage déformé par la peur et une haine démente, sortit un couteau de sous sa robe et la menaça, bras tendu, sa lame minable tremblante de sa peur. Marion rit aux éclats de voir cette larve le menacer pareillement, elle feinta alors sur la gauche puis fit un bond sur la droite et, tornade flamboyante, dans un mouvement virevoltant vif comme l’éclair, elle abaissa son arme à la volée et lui trancha la main à la jointure de l’articulation du poignet. Le vieux se mit à hurler de douleur, tenant avec l’autre main son bras estropié, la main restant pendante, tenue encore par un lambeau de chair et quelques tendons...Elle regarda ce vieillard immonde avec le mépris de toute sa hauteur, fière et arrogante puis, elle le renversa contre une souche d’un coup de talon dans la poitrine et se pencha sur lui, lui prenant sa chevelure dans sa main gauche, vibrante d’une haine mortelle, elle lui cria.

-Tu vas crever, sombre pourriture infernale ; disant ces paroles, yeux vrillés dans ceux du vieillard, elle lui planta brutalement son couteau dans le bas-ventre ; l’homme eut un sursaut qui lui coupa le souffle sous cet impact violent qui lui ravageait les tripes...Un rictus féroce aux lèvres, Marion, remonta lentement la lame dans un mouvement de scie, l’étripant lentement, méticuleusement, jusqu’à ce que la lame bloque sous le thorax...Regard d’épouvante et soufrances pures, ce dernier se mit à hurler de plus belle ; avec un sourire de furie démente, elle lui montra alors son couteau sanglant...

Tu vas crever des mains d’une femelle que tu aimes tant justement, déchets de l’humanité que vous êtes tous, comme tous tes tarés massacrés déjà ; retourne dans ton enfer que tu n’aurais jamais dû quitter, charogne puante, je te maudis !

Elle lui appliqua méticuleusement le couteau sur le côté gauche de sa gorge, l’homme la regardant effaré...yeux dans les yeux, elle lui trancha la gorge d’un lent mouvement rotatif, ses yeux plantés dans celui du condamné, pour bien se repaitre de sa peur lâche et immonde puis, elle le décapita rageusement au couteau, se relevant dans un rire de folie, elle crachant sur la tête tenue à bout de bras, elle tournoya sur elle-même et la jeta au plus loin de toutes ses forces.

Elle bondit ensuite vers Céline qui, allongée se tenait le flanc droit, une large tache de sang sur sa combinaison ; elle ouvrit rapidement une sacoche à sa ceinture, en sorti un paquet en papier qu’elle déchira rageusement avec ses dents

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et en tira un gros paquet de gase qu’elle introduisit derrière son ceinturon, pour compresser la blessure et stopper le saignement...La blessée est haletante, son doux visage est fiévreux où on y voyait déjà se dessiner les stigmates d’une douleur montante ; un appel pathétique et muet dans ses yeux, elle regarde Marion, la peur dans ce regard...regard suppliant, yeux mouillés de larmes, appel à l’aide désespéré...

-Céline, mon amour, pardon...bouge pas, lui caressant la joue, je cours chercher le perceur et nous fonçons à la base, ok ? ça ne sera rien, courage, les médics vont te sauver, mon amour chérie...elle l’embrassa rapidement sur les lèvres et partit en courant comme une folle, le plus vite qu’elle pouvait.

Le perceur en route à pleins gaz en pilotage automatique sur la base, elle avait

étendue Céline sur leur sac de couchage sur lequel elle avaient découvert leur vertigineux amour...corps calé contre la cloison arrière. Le message d’urgence codé prévu en ces cas-là était de suite parti dans les airs, avec sa position. Il y avait toujours plusieurs de ces équipes promptes à prendre l’air pour secourir leurs patrouilleurs, charretiers, ou n’importe qui d’autre. Elle avait demandé un pilote pour piloter son perceur ; elle ne pouvait plus quitter le chevet de sa compagne ; un remord suffocant, un pressentiment, une peur, une peur atroce commençait à lui tordre les tripes.

Elle se rappelait des pressentiments, les avertissements de Céline et, comme une folle stupide qu’elle était, elle n’en avait pas tenu compte...et son amour de sa vie était maintenant là...blessée par sa faute imbécile, sa foutue volonté de n’en faire toujours qu’à sa maudite tête...et Céline qui se meurt peut-être ; elle sursauta et repoussa violemment cette pensée néfaste, horrifiée de l’avoir seulement eu...

Céline, allongée sur le côté gauche dans la position classique du blessé, comme l’avait installé Marion du mieux qu’il fallait en ces cas-là : allongée sur sa jambe gauche tendue, la droite repliée, cheville posée sur l’autre genoux ; elle avait mise sous sa tête un gros oreiller fait de vêtements divers et sous son genoux replié, une grosse boule faite avec le duvet pour lui relever cette jambe et maintenir le bassin dans une position confortable, évitant ainsi un effort de torsion.

Elle lui avait enlevé son ceinturon avec ses armes, avait ouvert sa combinaison avec son couteau ensanglanté...une large et profonde estafilade lui barrait le côté à hauteur du foie, elle la lava, la banda, ressérant les lèvres de la plaie et, enfer et damnation de ces monstres pourrissants en enfer, elle ne pouvait plus qu’attendre les secours, restant là, impuissante et désoeuvrée, désemparée devant son amour qui souffrait, elle devenait folle d’être bonne à rien.

Elle entendit le bip-bip de l’approche de l’autre perceur et se remit alors aux commandes ; la rencontre eut lieu à un peu moins qu’à mi-chemin. Les deux appareils se posèrent sas contre sas et en quelques secondes l´équipe de se- cours et le nouveau pilotes passèrent de l’un à l’autre en un instant et ils repartirent comme des flèches. Les médics étaient trois, dont une femme.

Quand ils virent Marion dressée devant eux, ils furent saisis d’épouvante car elle était couverte de sang des pieds à la tête, jusque sur le visage et dans les

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cheveux...Elle les regardait d’un regard fou, les suppliants de sauver sa Céline, disait-elle, hagarde...Ils virent cette dernière couchée à leurs pieds, pareillement ensanglantée elle aussi, en plus de sa blessure. Ils virent aussi des armes ruisselantes de sang jonchant le sol du perceur, jetées là à la va-vite, spectacle dantesque dans ce perceur...Les trois médics étaient tremblants de peur et d’épouvante.

Ils entrèrent immédiatement en action, mettant la blessée sous perfusion, nettoyant la plaie qui ne paraissait pas vilaine à priori...Mais, ce qui les inquiétait le plus c’était cette fièvre vite venue, qui était le plus préoccupant, mais ils n’en dirent rien à une Marion qui les observait, muette maintenant, se tenant assise sur le rebord d’un siège, tournée vers eux, le regard fixe, livide...comme absente, des larmes silencieuses coulaient sur ses joues, laissant d’effrayantes coulées sanglantes.

Quant ils eurent fini ces premiers soins d’urgence, Josiane, la médic, voulut donner un sédatif à Marion, mais il fut impossible de lui faire entendre raison. Celle-ci, vibrante de passion, se dressa et lui saisit alors ses poignets et les tenant contre la poitrine, lui disait avec force.

-Sauve-la, Josiane, sauve-la s’il te plaît, fais l’impossible, Josiane...sauve ma douce...sauve ma soeur chérie, Josiane, s’il te plaît...vite...faites quelque chose, les regardant tous avec un regard brillant effrayant, sauvez-la...sauvez-la...je vous en supplie, sauvez-la...

-Marion ! Marion ! cria la médic effrayée, tu me fais mal, chérie... Marion la regarda alors, étonnée, puis regarda ses mains aux jointures blanches

de serrer les poignets de la médic dans une étreinte de fer. Elle la lâcha alors brusquement et s’excusa piteusement.

-Oh ! pardon Josiane, je te demande pardon, je me rendais pas compte...mais il faut la sauver, Josiane, il faut la sauver...Elle ne savait plus que dire ces paroles pathétiques...sauvez-la...je vous en supplie, sauvez-la...sauvez-la...

Elle voulait veiller sa compagne maintenant qu’ils avaient fini les soins. Marion, assise près de la blessée, ne la quittait plus, lui tenait la main, essuyant son front en sueur...elle lui parlait doucement, sans fin, la rassurant...et les deux, yeux dans les yeux se regardaient avec passion...elle lui disait que les médics allaient la sauver...qu’elle restait près d’elle, qu’elle ne la quitterait jamais, qu’elle était son amour éternel, qu’elle...qu’elle...

Josiane, la médic, voyant tant de détresse et un tel spectacle d’horreur et d’amour démesuré, et peut-être même, en tant que femme, sentant autre chose, bouleversée de les voirs ainsi si passionnées, s’éloigna dans l’allée centrale, se laissa tomber sur un siège et se mit à pleurer aussi ; les autres médics étant véritablement catastrophés de tant de malheur, ne savaient plus que faire, littéralement désemparés.

Et, qui ou quoi, se demandaient-ils épouvantés, pouvait donc être responsable pour avoir mis ces deux jeunes femmes dans un tel état, aussi épouvantable et aussi dramatique ?

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Il existe une vidéo de la vision discrêtement filmée d’une Marion ensanglantée lors de son arrivée, offrant un spectacle d’épouvante, accompagnant la civière AG de sa compagne. Un texte relatant minutieusement ce drame, pondu sur un accord complet de tous les sages, donnant l’ordre impératif à quiconque qui rencontrerait dorénavant de tels groupes de déments, l’ordre express de ne surtout pas les approcher et de les abattres de loin et brûler leurs cadavres immondes. Ce document final fut reproduit en centaines d’exemplaires sur disk-mémoires puis distribués dans toutes leurs communautés, qui en quelques jours furent toutes au courant de ce drame atroce qui les endeuillait tous. Plus jamais une si criminelle idéologie ne pourrait porter atteinte à la vie d’un seul de leurs membres. Si des fous persistaient en de telles démences, il leur faudra alors vivre enterrés pour l’éternité comme de monstrueuses et répugnantes larves et cloportes qu’ils sont...Leur moindre tentative d’apparition à la lumière bénie de leur astre solaire les condamnant irrémédiablement à la destruction par les Hommes irréductibles et nobles, seuls dignes de vivre dans la splendeur triomphale de leur Gaïa sacrée.

La grande salle de réunion était bondée. Le président de la conférence, et dès

lors unanimement consacré comme tel, Ruppert Burrows, monta en deux enjambées, comme à son habitude, sur la tribune qui dominait l’assemblée au coude à coude...Il installa ses aides mémoires sur le pupitre, prit le micro d’une main ferme, se racla la gorge un instant et attaqua, sans se douter à quel point ces moments allaient devenir inoubliables pour tous ces esprits surchauffés.

-Mes amis...je...il balayait lentement l’assemblée de son regard empreint d’une joie sourde, je demande avant tout pardon à tous ceux qui ne peuvent pas assister en direct à cette assemblée, par faute de place. Dès sa conception ce local ne fut pas prévu pour tant de personnes aussi passionnées par leur destin que vous tous, ceci pour la bonne et simple raison qu’à l’époque les hommes n’avaient déjà plus aucun idéal dans leurs tripes.

Un soupir passa sur l’assistance. -Depuis maintenant ces longues années que nos vaillants équipages de

chasseurs revinrent de ce tout premier tour du monde de prospections...nous avons, comme vous le savez tous, travaillé avec ardeur, avec les équipes aux spécialisations appropriées pour monter une minutieuse stratégie d’attaque pour reconquérir notre bien, notre planète !

Et...je puis vous le dire avec grande fierté et grande joie maintenant, et au nom bien entendu de tous ceux, et ils sont nombreux, qui y ont ardemment participés, c’est-à-dire nous tous...Il s’écria pleins poumons. Nous sommes maintenant certains de tenir dans nos mains la victoire pleine et entière sur ces pourris des cartels !

Ce fut un délire total dans toute la base...on devait même possiblement l’entendre au loin, les grondements émis par cette foule en délire devaient outrepasser les flancs de la colline...Il se servit un grand verre d’eau...

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-Mes amis...je vous en prie chaleureusement...passé ce moment inoubliable dès lors, de cette allégresse bien compréhensible et si largement méritée, soyez gentil maintenant de ne plus faire de vacarme, car sinon vous ne saurez donc jamais les mesures que nous avons retenu.

Un grand calme s’installa dès lors dans l’assemblée...tous attentionnés. -Je vous remercie...Tout d’abord, nous devons récapituler ce qui se passe chez

nous, sur notre propre territoire. Vous savez tous que depuis que nos inestimables Grosses Têtes nous ont donné en premier les chasseurs ; nous les avons envoyé prospecter tous les recoins de ce vaste pays. Nous estimons qu’il devrait y avoir quarante-huit milles survivants répandus dans de nombreuses grottes sur tout notre territoire. Ils sont tous techniquement hautement développés et chaque groupe régional assure sa totale autonomie, ce qui est essentiel, faisant ainsi d’eux tous des combattants super bien équipés, entraînés et responsables.

Nous avons ainsi une redoutable armée prête à se donner entièrement dans un combat irréductible, mais une armée invisible car logistiquement inexistante, et donc la plus performante et efficace ; elle pourra ainsi en quelques courtes heures apparaître au grand jour et frapper à mort...sortant alors des mystères des entrailles de la terre, fléau irrésistible qui anéantira ces monstres.

Bien...ceci étant entendu, passons au sujet que tous attendez avec impatience : qu’en est-il des autres territoires et...sommes-nous prêt à les contacter et leur fournir les matériels indispensable à cette lutte sacrée ? Je réponds illico à la deuxième partie de la question, OUI ! Nous sommes fins prêt à les équiper des pieds à la tête de matériels requis.

Un grand souffle d’émotions passa sur la foule. -Concernant les populations retrouvées dans ces vastes territoires, il existe de

grandes différences entre eux tous. Parlons-en plus en détail. L’Amérique du sud. Ces contrées furent de tous temps la chasse gardée, la propriété exclusive des

cartels, s’il fallait encore le préciser. Continent qui fut de toujours sciemment maintenu dans un retard technologique et éducatif systématique, avec, comme partout ailleurs dans le monde, les complicités des politicards véreux locaux, quoique l’adjectif véreux et consort soit inhérent et donc pléonastique au sujet.

Grand rire dans la salle. -Pour donner un seul exemple bien représentatif : ils imposèrent des salaires de

misères pour y développer leurs industries ; exemple du Brazil avec l’industrie automobile esclavagiste, qui y exploitaient alors une masse de malheureux éternellement prisonniers d’un tel cercle vicieux ; augmentant un jour démagogiquement les salaire de 5%, et le lendemain augmentant les coûts de la vie de 7% ; les tenant ainsi perpétuellement à la gorge, avec, il faut aussi le mettre en exergue, tant c’est ignoble, la complicité tacite des syndicats corrompus, pourtant prévus et payés par les employés pour les défendre.

Les populations de ce continent furent décimées comme partout ailleurs, les grandes et énormes villes comme Sâo Paulo et Rio de Janeiro par exemple, qui étaient à cause de la misère endémique et du trafic de drogue organisé par et

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pour des banquiers, industriels et politiques et protégés par ces derniers, comme partout ailleurs dans le monde aussi ; ces villes étaient donc à l’époque de véritables coupes-gorges, furent comme toutes, dévastées par les gaz puis inexplicablement rasées par des bombes à antimatière.

Ces deux grandes agglomérations ne sont plus que monceaux de gravats aux trois-quarts engloutis dans la fôret vierge qui a repris ses droits millénaires ; du reste, c’est à noter, et avec grand plaisir de par son importance vitale, l’immense majorité de ce continent est de nouveau redevenu ce qu’il devait être avant la venue de ces autres prédateurs que furent les espagnols et portugais : un somptueux spectacle naturel ! Un jardin d’éden comme devait être la planète entière à ses débuts, d’avant ce qui allait devenir une lèpre dévastatrice : l’homme irresponsable, véritable tumeur maligne de l’univers.

Il faut noter aussi que les cartels avaient au cours des années précédent l’attaque de 2015, fin octobre 2013 plus exactement, envahi toute la vaste région de l’Amazonie, sauf la Guyane française provisoirement épargnée. Ils envahirent du nord par le Vénézuela et les petites nations à l’est de celui-ci ainsi que le Brazil, sur le fleuve Amazone évidemment.

L’armée brésilienne, dans un baroud d’honneur, avant d’être facilement et totalement détruite, avait infligé de lourdes pertes à l’état-major de nos forces militaire, tuant une douzaine de généraux et une centaine d’officiers supérieurs, plus un énorme camp de munitions ainsi que des bâtiments de la Navy. Mais ils furent victimes de nos tous nouveaux chasseurs et bombardiers à propulsion antigravitique et hypersoniques ; ces pauvres malheureux se battirent avec courage mais moururent tous sans pouvoir rien faire.

Nos responsables politiques d’alors, les cartels en fait, ayant tout simplement dictatorialement annexé l’Amazonie pour s’approprier le bois et principalement l’eau douce, nos propres réserves hydriques étant irréversiblement contaminées par les poisons des industries agricoles et industries ; ainsi que pour alimenter en eau douce leur fief de la Méditerranée. Du reste, ce qui démontra aux yeux du reste du monde qu’ils avaient depuis longtemps planifié cette annexion, c’est qu’à peine maîtres des lieux, ils mirent leurs pharamineux moyens de transports d’eau douce de suite en action, de la façon suivante.

Ils avaient ainsi construit de gigantesques, c’est un euphémisme, tankers sous-marins : des engins de 70 m de hauteur par 300 m de large et 940 m de long, d’une charge en eau douce de 18.860.000 T, le reste étant réservé aux ballasts d’eau de mer ainsi qu’au machineries. Ces engins étaient alors accouplés en convoi de 25 sous-marins, dont un gigantesque pousseur à propulsion atomique de même section et 450 mètres de long et, un non moins gigantesque engin en tête du train, en forme de cône arrondi, de 360 mètres de longueur, celui-ci dégageant la force magnétohydrodynamique (MHD) : pour créer cette sorte de tunnel électromagnétique qui aspire le convoi (pour donner une image de cette fantastique technologie) ; convoi capable de transporter 471.500.000 de tonnes d’eau douce à la vitesse de 420 noeuds et naviguant par quarante à cinquante mètres de profondeur. Ce convoi titanesque de bientôt 25 km de longueur était

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accompagné et guidé depuis la surface par des avions d’assauts et bâtiments de la Navy équipés aussi du même type de propulsion.

Durant la navigation océanique et pour éviter le risque de cassure par effet de houle des tempètes, quoique à ces profondeurs cela soit peu probable, et peut-être aussi, officieusement, pour offrir une cible minimisée à toute attaque aérienne toujours possible, car l’eau était devenue une ressource stratégique de première importance, le convoi se renversait alors lentement par effet de ballast d’eau de mer, pour naviguer alors sur la tranche, la largeur devenant alors la profondeur du train de sous-marins.

Arrivant près des côtes, le convoi se remettait donc à plat, comme ceux allant à leur enclave de Méditerranée, où ils devaient passer le seuil du détroit de Gibraltar de seulement 200 mètres de fond, où l’île Spartel était en son milieu, côté Atlantique, son sommet culminant à –56 mètres de fond, représentant de fait un danger majeur pour ces trains de sous-marins. Le sommet fut donc dynamité, arrasé jusqu’à 100 mètres de fond. Nous ignorons comment mais ce que nous savons bien c’est qu’un violent stunami alla détruire les côtes du Maroc, d’Espagne et du Portugal, causant la mort de 7.456.420 personnes et ruina l’économie des ces régions déjà plutôt pauvres.

Arrivés à bon port, façon de parler puisque le convoi restait ancré au large, des quais flottants servaient de ponton d’extraction de l’eau douce vers les usines de traitement. Le pousseur et l’avant se détachaient du train de sous-marins pour reprendre un nouveau convoi laissé précédemment et repartir vers l’Amazonie, ce dernier lesté d’eau de mer.

Ainsi sans fin, norias titanesques et monstrueuses du détournement des richesses et énergies humaines et naturelles volées au service seul d’une minorité de fous criminels. Des dizaines de convois semblables sillonnaient alors les mers. Tout ce gigantesque et désastreux gaspillage en hommes, savoirs, énergies et richesses pendant que les 45 millions de pauvres absolus de notre pays, ce en 2005, pays se glorifiant d’être le plus riche et puissant du monde, en arrive au taux catastrophique et infamant de 93 millions de misérables en 2015. Chiffres que se passent de commentaire.

Ainsi en est-il de ces territoires. Après le vol de l’Amazonie par nos troupes, les populations réalisèrent enfin que leurs politiciens les avaient trompé et laissé faire cette ignominie, tellement corrompus qu’ils étaient depuis des générations ; d’autant mieux que les derniers en date étaient les élus de partis populaire, des gens du peuple même qui les trahirent de façon plus ignoble donc. Ces foules depuis toujours nationalistes, vénérant leurs patries, entrèrent alors dans une révolte et violence indescriptible.

Les états-majors militaires qui comme toujours s’en étaient sortis vivants, puisqu’étant planqués loin des combats d’Amazonie, furent les premiers écharpés. Un bon millier d’officier de haut rang furent lynchés, puis ce fut le tour des ministres, sénateurs, députés en active plus tous ceux des générations précédentes qu’ils trouvèrent, puisque la trahison remontait à des lustres ils étaient donc eux aussi responsables de ce désastre. La magistrature suivit cette onde de tueries sauvages et vengeresses, avec de très nombreux hauts magistrats

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et avocats, et jusqu’aux religieux de toutes tendances qui subirent le même sort, ces peuples pourtant croyants réalisant enfin que ces églises les trompaient aussi depuis toujours, avec leurs logorrhées mielleuses et visqueuses.

Les forces de polices de certains États, qui depuis toujours avaient été tenues pour méprisables par les pouvoirs successifs, se joignirent alors aux insurgés. On vit même, chose impensable peu avant, de nombreux chefs de trafics de drogues des favelas, se sentant l’âme patriotique et de fait trahis eux aussi, se joindrent aux insurgés avec leurs troupes de criminels aguerris au combat de rue : polices, civils, bandits, tous unis dans une mission sacrée pour laver leur honneur par un carnage généralisé.

Ces révoltes durèrent des années et mirent les pays de ce continent sud dans le chaos total, avec pour le seul Brazil, pas loin d’un million de personnes exécutées, justiciadas, comme criaient les foules en furie et ravies de leurs vengeances enfin assouvies ; car crever pour crever, disaient-ils en riant, ils ne seraient dès lors plus les seuls, comme de par le passé. Ce qui n’était qu’enfin vraie justice.

L’assistance sachant pourtant tout ces faits, écoutait dans un silence de mort. Comme avec ce sentiment diffus et oppressant d’être rattrapé par les infamies de leurs anciens...

-Donc, ce continent, mis à part certaines îles des Caraïbes, et dont nous reparleront ultérieurement, est hors de la question de notre stratégie du fait même qu’il n’y est aucun de nos ennemis l’habitant, ce qui est on ne peut mieux, nous évitant ainsi de devoir disperser nos forces d’attaques.

Ruppert Burrows, s’arrêta un instant de parler pour se servir un verre d’eau qu’il but à grands traits.

L’Asie. -Aborder ce qu’il en est devenu de l’Asie, je parle en général de ces contrées

immenses, qui pour mémoire regroupe les anciens territoires de la Russie, la Chine, et l’Inde et ses anciens domaines. Comme nous en avions déjà parlé il me semble, ces trois grands pays avaient formés une coalition miltaire et scientifiques une huitaine d’années avant l’attaque de 2015.

Ainsi donc et pour en finir avec ces territoires, ainsi que tous les autres petits pays et archipels de ces immenses contrées, jusqu’au Japon qui subit le même sort ; il furent gazés bien sûr et à outrance, puis les centres militaires et de recherches furent détruits avec des armes à antimatière. Les cartels bombardèrent ces lieux stratégiques de l’ennemi qui...ne faisait que tenter se défendre préventivement. Ces armes récentes à antimatière, pourtant interdites par toutes les nations, devant le danger inconnu encore qu’elle représentaient vraiment ; ils faillirent faire sauter la planète entière. Il s’en serait fallu de peu, des séismes gigantesques finirent de détruire ces régions, jusqu’aux côtes Est de l’Afrique et jusqu’au Nord de l’Australie.

Le Président se resservit à boire et but à longs traits, avec un plaisir évident. -Vous aller réussir à me déshydrater pour de bon, rit-il. Les gens de l’assistance l’accompagnèrent dans ses rires, heureux de cette

coupure dans cette liste sans fin des horreurs passées.

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L’Afrique. -Puisque nous avons cité le nom de l’Afrique, venons-y. Déjà que la côte Est

fut dévastée par le stunami, on peut considérer ce continent comme vidé des humains, avec comme toujours des groupes épars retournés à la jungle, que la plupart n’avaient jamais vraiment spirituellement et culturellement quitté. Les villes furent ravagées par les gaz. Seuls s’en sortirent, comme en Amérique du sud, quelques tribus loins des villes ; villes étant depuis des années déjà, les réceptacles sordides de ces millions de morts vivants en instances de passer de vie à trépas, qu’étaient ces populations ravagées par les maladies que leurs avaient traîtreusement inoculés toutes ces organisations dites alors charitables ; leur enfonçant la mort dans le corps en même que l’aiguille du vaccin se proclamant préventif et salvateur...Ce fut une monstruosité sans nom.

Ainsi donc, et sans vouloir faire étalage de mes connaissances sur ces sujets, on peut affirmer que ce continent est retourné d’où il aurait mieux valu qu’il n’en sorte : à l’inexistence humaine pure et simple. La nature une fois de plus y reprenant ses droits millénaires, il semblerait même que le désert central, le sahara, aurait stoppé son extension, ce qui semble logique puisque la source principale de désertification a disparue : l’homme. Ce qui fait que ces contrées étant vides, fait une troisième occasion de libérer nos forces d’attaque.

Le président fit un arrêt de son exposé. -Permettez, que votre président...traîtreusement désigné à ce poste par une

bande de sagoins qui se boyautent les tripes, là sur ma gauche, je vous vois, bande de...reprenne un verre d’eau salvatrice...

Tout le monde de rire de bon coeur ; sacré Ruppert, qui avait toujours le chic pour détendre l’atmosphère.

-Comme le moins futé l’aurait deviné tout seul, reprit-il, il nous reste à disposition, l’Europe et l’Australie. Comme vous le savez tous, de partout, nos chasseurs menés par nos jeunes et experts pilotes et équipages de nos forces d’assauts aériennes et temporairement déguisées en d’évanescents nuages épisodiques et malicieux, rires dans la salle...patrouillèrent la planète depuis grande altitude...de nuit principalement, pour alors infailliblement détecter les repaires de ces...de ces...je manque d’adjectifs salés.

La foule rit. -De ces immondes salopards de ces cartels de merde ! Ouf ! ça fait du

bien...rire de la foule...Ainsi, nous avons les positions de toutes leurs tanières, comme la vermine qu’ils sont et...étrangement et contrairement à ce que nous croyions tous depuis des siècles...Écoutez bien ceci...Ils sont remarquablement peu nombreux !

Un murmure d’étonnement parcouru l’assistance. -Oui, comme vous tous, nous fûmes stupéfaits de découvrir qu’ils n’étaient

relativement que peu nombreux. Cela nous parut tout d’abord incompréhensible puis, reprenant les données et analyses passées, nous refîmes une nouvelle synthèse basée sur un nouveau paradigme possible et qui serait alors le seul de vraisemblable pour expliquer ce mystère. Voici donc le résultat de nos innombrables cogitations...et conséquemment nombreux maux de tête.

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La foule rit encore de l’esprit sarcastique de ce Ruppert Burrows qui était décidément de première bourre à ce poste de Président.

-Tout d’abord, vous savez tous maintenant, quoique depuis peu, que les anciennnes bases militaire de nos territoires, dont nos anciens redoutaient tant les interventions militaires et qui leur ont littérallement gâché la vie depuis ces siècles, durant de longues et éprouvantes générations d’angoisses...Ont en fait, toutes, je dis bien toutes ces bases, ont été victimes de l’attaque de 2015, mais que nous-mêmes ne le sûmes seulement que très récemment, suite aux explorations lentes, minutieuses et dangereuses de les approcher, pensions-nous depuis si longtemps ; jusqu’à ce que l’on ait la certitude qu’elles étaient vraiment mortes et vides de vivants depuis le début. Ce constat fut un choc terrible pour nous tous, songeant à nos anciens, les malheureux, qui tremblèrent toute leur chienne de vie à cause d’un danger qui pour finir fut totalement inexistant !

Mais il y a pire, car c’est idem des bases militaires de la Navy, idem des anciens silos de missiles intercontinentaux, etc., et pire : nous ne saurons donc jamais ce qu’ils sont devenus, car ils ont tous disparu. Et comment et pourquoi cela, de tous ces innombrables bateaux de guerres à propulsions nucléaires, c’est-à-dire quasiment tous et plus particulièrement les gros, ceux étant équipés d’armements, de fusées à ogives nucléaires multiples, de types : porte-avions, sous-marins, destroyers ?

Partout, nos équipes encontrèrent les ports et bases désertes des sous-marins, incroyablement et inexplicablement désertes. En ce qui concerne les silos des missiles intercontinentaux, le mystère est encore plus étranger à la logique, car là on y trouve...comment dire...on y trouve des traces, si l’on peut paradoxalement parler de ce qui n’éxiste plus, mais laisse malgré tout une preuve tangible de quelque chose, car pour tous les silos dont nous avions les coordonnées, en fait des milliers sur des centaines de sites, nous n’y retrouvâmes que...

Écoutez bien ce que je vais dire, car c’est ahurissant et incompréhensible à tous nos sprécialistes des choses militaires d’antan, car là où nous devions donc logiquement trouver ces gigantesques structures de ces silos en béton, avec leurs missiles de mort dedans, représentant tous un danger mortel et incalculable pour nous tous, de par la vieillesse de leurs matériaux les constituant, et ainsi, les radiations qu’ils n’allaient pas manquer de laisser un jour se répandrent aux alentours...Nos équipes de nos vaillants patrouilleurs donc, ne retrouvèrent à leurs emplacements que...de vastes et profonds trous remplis des eaux de pluies et de ruissellements ; toutes traces de strustures initiales en bétons, ou quoique ce soit d’autre a totalement disparu !

Ce pour le plus grand désarroi de tous, car rien à notre connaissance explique d’une forme sensée et acceptable le pourquoi, et le comment de toutes ces disparitions d’éléments qui tous, représentaient un immenses danger mortel pour notre future civilisation. Nous devons donc vivre avec cet inconnu et gérer du mieux possible ces invraisemblables mystères, peut-être qu’un jour nous aurons une réponse acceptable, en attendant...

L’assistance était stupéfaite de ces révélations insensées ; après un bon moment de commentaires entre tous, le président put reprendre son exposé.

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-Possédant alors ces nouvelles données exprimant une réalité concrète autant que des plus surprenante, pour la première fois depuis ces générations de peurs et d’angoisses, les analyses approfondies qui en résultèrent montrèrent comment eut lieu la destruction des bases souterraines des forces militaires qui avaient pourtant porté ces maudits cartels au pouvoir. Certains d’entre vous, familiarisés avec ces sujets militaires de l’époque, savent que les états-majors militaires avaient, sous la hantise du secret, hermétiquement cloisonné toutes les entreprises à tous les échelons et toutes actions ou projets, etc.

Les forces armées de ce pays étaient devenues un gigantesque puzzle, où il était impossible de savoir qui était qui, et qui faisait quoi...Les cartels qui les manipulaient et qui seuls dirigeaient, puisqu’ils finançaient tout ce vaste jeu de cache-cache, ont alors, et au moment où cela les arrangeait...ont dû donner les ordres à différents et nombreux groupes des Forces spéciales, qui travaillaient exclusivement pour eux, leurs donnant alors des ordres de sabotages dans les bases les plus diverses : poses de bombes, explosifs, bombonnes de gazs, etc.

Les cartels avaient ainsi construit insidieusement leur propre arme de destruction et d’élimination à l’insu des propres condamnés qui se seraient donc auto-anéantis eux-mêmes. Les équipages des avions bombardiers ou autres, de toute façon, ne sachant jamais ce qu’ils envoyaient sur la tête des populations.

Pour dire de la viciosité de la chose, depuis plus d’une décade déjà, ils avaient accoutumé ces équipages de bombardiers à lancer des gaz ou autres sur les populations de leurs propres pays aussi bien que les autres. Nous retrouvons là ces fameux Chemtrails, ces mystérieuses traînées zébrant brusquement le ciel sur une ville, une région entière, et que les populations ahuries regardaient aussi intelligemment que des veaux...Le tout sous prétextes de recherches climatiques ou autres. Ainsi, au pire, ce jour du génocide, ces équipages de bombardiers firent leur travail habituel, et une fois de plus, la routine aidant ils arrosèrent copieusement les villes sans savoir ce que les réserves de gazs de leurs avions contenaient...la mort, cette fois-ci.

Nous sommes quasiment certains que les choses se passèrent ainsi, c’est la seule et unique explication qui tienne debout car basée sur les moeurs et coutumes journalières de travail de ces militaires robotisés d’alors ; aucune autre explication ne tient car sinon et malgré leur entraînement pavlovien, ces équipages d’avions se seraient très certainement révoltés en masse, car l’instinct de survie est infiniment plus fort que toutes manipulations psycho-machin-choses, pensons-nous. Voici comment ils ont pris le pouvoir absolu.

Je bois un verre d’eau et passons à la suite qui nous intéresse en priorité. Les spectateurs burent également...Une fois désaltéré, le président tourna des

pages de ses documents et poursuivit. -Voici la grande question maintenant : Où se sont-ils planqués durant les

épidémies ? L’Australie. Pour vous dire la vérité, nous sommes certains que c’est sur ce continent qu’ils

s’étaient réfugiés avec leurs gardes, travailleurs esclaves et techniciens de tous ordres pour assurer les maintenances et fabriques diverses de leur future

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installation en des lieux sélectionnés qu’ils pourront rejoindre une fois les épidémies passées ; bien à l’abri qu’ils sont sur ce continent isolé et éloigné des foyers de contamination.

Nous avons observé de haute altitude de vastes campements d’esclaves regroupées dans le centre du pays, plus exactement vers cette ancienne base secrête nommée Pine Gape, dans le centre du pays, à une vingtaine de kilomètres à l’Ouest des ruines de la ville d’Alice Spring, base secrète militaire des notres d’alors, qu’en réalité tous les services dit secrets de l’époque connaissaient ; car en ce monde soi-disant mirifique, tous s’espionnaient avec acharnement pour tenter se détruirent mutuellement.

Monde atroce et de folies innommables. Ces populations furent planquées vraisemblablement et temporairement dans

cette base souterraine et ils ont dû constuirent ces campements seulement après l’attaque générale, de façon que rien d’anormal ne soit perçu depuis les airs à l’époque. Cela se recoupe avec les journaux de l’époque qui durant quelques temps relatèrent de très nombreux cas de disparitions mystérieuses de populations un peu partout en Europe et chez nous aussi, exclusivement des blancs donc, des gens communs : des hommes et femmes techniciens, artisans, toubibs, etc., tous des occidentaux. Puis, comme à l’accoutumé, un black-out complet tira ce sujet des rédactions des médias, la censure venait encore une fois de plus d’être instaurée.

Mais peu importe comment ils s’organisèrent...Nous avons sujets bien plus captivants pour nous tous. Ils seraient donc au total, ceci n’est bien entendu qu’une estimation car on a évidemment pas été les compter dans leurs lits...Rires dans la salle...Ils seraient donc sur toute la planète, environ moins de cent mille malades mentaux au maximum ; voyez par vous-même que c’est relativement peu...Ce qui signifit que ces gens dominant des Cartels ont pratiqué un choix élitiste et implacable, ayant sciemment et froidement sacrifiés leurs propres coreligionnaires pour lesquels ils n’avaient que mépris pour leur grande majorité.

Avec le recul cela se voit clairement dans les documents d’époque, les journaux et autres, et cela n’est donc pas au final pas très surprenant. Ils sacrifièrent avec le dédain qui leur est caractéristique, cette partie d’entre eux, la plèbe, mais surtout ceux faisant partis de l’autre branche de leur peuple.

Ainsi donc, ce continent australien regrouperait approximativement et seulement, moins de deux à trois mille d’entre eux, estime-t-on. Donc, des forces armées limitées et bien structurées doivent en venir à bout relativement facilement...sous certaines conditions toutefois, dont pour l’instant nous ne bénéficions pas.

Il n’en dépend, pour la réalisation de reconquête dans son entier, que d’une arme dont nos vaillantes et indispensables Grosses Têtes nous ont promise et sans laquelle nous serions condamnés à croupir éternellement ou presque dans les entrailles de notre Terre. Ils nous l’ont promise pour très bientôt, arme pour anéantir d’un seul jet et définitivement et pour l’éternité cette racaille nauséabonde et purulente qui défigure encore nos territoires de notre planète sacrée et bénie.

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Un énorme applaudissement jaillit enfin de cette foule qui contenait avec peine son calme apparent. Le silence revenu, le président se resservit de nouveau un verre d’eau qu’il engloutit d’un seul jet.

-Suite à cette conférence, je tenais à vous prévenir que je ne veux plus entendre parler de flotte durant longtemps, et exige que l’on me fasse cadeau d’une caisse de ce tord-boyaux que l’on nomme pompeusement Rye, produit par nos vaillants et inestimables fermiers...que je remercie par avance ! dit-il en souriant.

L’assistance rit un bon coup de ce trait d’humour typique de Ruppert Burrows. L’Europe. -Maintenant que nous avons déblayé le superflu, venons-en au plat de

résistance, l’Europe, ou plutôt ce qui en reste et qu’ils ont rebaptisé Euromorte, et nous de Merdika du Nord, comme vous le saviez déjà ; c’est dire qu’ils méprisent souverainement tout ce qui rappelle le passé en sa totalité ; nous tous tout particulièrement !

Ceux d’entre vous qui il y a quelques années ont assisté à la petite réception lors de l’arrivée de nos vaillants équipages revenant de ce premier tour du monde...c’est-à-dire en gros vous tous présent aujourd’hui, se souviennent donc du premier rapport succinct de l’équipage du chaseur C12 revenant de ces contrées. Ils nous avaient judicieusement conseillé à l’époque, d’étudier une fine stratégie d’approche, vu le danger qu’ils représentent, étant réputés allergiques et très méfiants à tout ce qui leur est inconnu, ce qui démontre un excellent niveau d’adaptation à ce monde actuel où ne subsistent que ceux qui le méritent.

C’est chose faite pensons-nous. Pour cela nous avons formé des équipages de patrouilleurs parlant leurs langues, car sinon c’est même pas la peine d’envisager un contact, ce serait carrément les envoyer vers une mort certaine. Nous avons donc formé un groupe de garçons et filles, plus d’une trentaine de distingués et courageux linguistes qui sont tous habitués au combats de toutes sortes et ont une longue expérience des contacts humains délicats, sinon difficiles, et ils sont tous volontaires, évidemment.

Ce sujet important étant clos, nous en venons de nouveau à la question importante : combien nos ennemis sont-ils dans leurs villes de résidence ?

Toujours pareil, vu leur choix initial des lieux sélectionnés, ces maudits Zanko-Khuigs ont élu domicile dans deux régions voisines l’une de l’autre en bordure de la mer Méditerranée : le sud de la France et la seconde en Espagne. Chez nous ils s’installèrent comme déjà dit sur quelques îles des Caraïbes, la Floride et à Las Vegas, le seul lieu qui ne soit pas au bord de l’eau...Ils doivent y flamber faussement les fortunes du monde ancien, qui renaissent comme le phénix ; fortunes qu’ils volèrent méthodiquement depuis des siècles à ces populations abruties...qui étaient nos ancêtres directs, et dont il n’y a pas de quoi être fier.

Il y ont partout des esclaves attentifs à leurs moindre désirs et voyagent dans de luxueux engins antigravitiques, de l’un de ces endroits à l’autre à volonté. Ils mènent de vraies vies de pachas insouciants, ce qui est excellent pour nous, car ils se croient seuls sur ce monde...ce qui est toujours excellent pour nous encore. De ce fait leur réveil que nous leur souhaitons des plus atroces qu’il soit possible n’en sera que plus efficace, brutal...et sanglant.

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Toute la salle se leva et l’applaudit à tout rompre...Toujours heureux à ces idées de massacres rédempteurs. Puis le président continua, le calme enfin revenu...

-Le problème majeur sera alors d’évaluer au mieux possible les troupes de leurs gardiens, quantitativement et qualitativement ; quoique sur ce dernier point il semblerait qu’ils ne soient guère efficaces lors d’une attaque massive et brutale, d’autant que depuis le remps qu’ils dorment sur leurs lauriers ils ne doivent pas être très performants mais, suivant le principe sacré, évident et élémentaire qui dit que l’on ne doit jamais sous-estimer l’ennemi, nous allons les espionner méticuleusement pour en savoir un maximum sur eux : combien sont-ils, à quels endroits et quels sont leurs armements et matériels de déplacements ?

Chronologie d’attaque : on supprime ces gardes en premier puis nous donnons ensuite à nos chers, très chers et inestimables pourris de Zanko-Khuigs, toute l’attention qu’ils méritent.

Applaudissements nourris de l’assemblée. Le président se resservit un verre et le but...en faisant la grimace.

-Et n’oubliez pas mon rye, ok ? Merci bien messieurs ! La salle rit de bon coeur. -Donc...nous avons constitué à ce jour un stock de plusieurs centaines de

chasseurs qu’il ne nous reste plus qu’à livrer à nos frères et soeurs d’outre-Atlantique. Nous entrons dès lors et, je vous prie de le noter chers amis, dans la phase active et déterminante de notre reconquête !

La foule se leva et l’applaudit à tout rompre...un long moment se passa avant que le président puisse reprendre son exposé.

-Merci mes amis, merci...oui, nous entrons dans l’ultime, dernière ligne droite, qui encore est longue, soit, mais nous voyons déjà l’objectif dans le viseur. Ainsi, et je vais en terminer là, avant que la flotte ne me ressorte par tous les orifices.

Eclat de rire de la foule. -Et, j’ai le plaisir et l’immense honneur de vous annoncer, qu’en ce Jeudi 18

avril de l’an 2357, date qui restera mémorable...aux rares personnes, s’il en existe, qui ne le sauraient déjà ; que seize chasseurs ayant à leurs bords près de trois cent dix commandos, accompagnés de trente-trois transports vont partir demain et par vagues successives vers nos futurs compagnons de combat d’Europe.

Ces transports, appareils pouvant transporter chacun, je vous le rappelle, trente-huits kits de chasseurs plus tous les équipements de chasse ; seulement vingt-six seront chargés de ces kits, les autres sont réservés aux matériels divers : alimentation, boissons, équipements médicaux, etc. Parlant de ce sujet, deux équipes médicales complètes sont réparties, disposant chacune d’un transport tranformé en hôpital. Ainsi, une logistique minutieusement étudiée va suivre nos glorieux et premiers conquérants.

Bien entendu, nous continuons la production de tous ces appareils, les transports y compris, pour amener les conquérants à pied d’oeuvre lors de la future attaque générale. Nous devons rester prudents, très prudents même, d’autant que la vision du but à atteindre s’approche, ce qui risquerait de nous

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faire commettre quelques imprudences, car n’oublions pas que des forces ennemies peuvent nous rester cachées.

Nous garderons donc actives toutes nos mesures de sécurité en vigueur jusqu’à ce jour et...nous ne dirons rien de tout cela à nos futurs alliés et parents d’outre-Atlantique, car avec leur fougue tant décrite il ne faudrait pas qu’ils nous foutent tout par terre dans des actions inconsidérées et en avance sur le timing ; ce sera juste un petit mensonge par omission ; mensonge que nous nous faisons un devoir sacré de leur révéler peu avant l’attaque, ils en comprendrons les raisons.

Sinon ce serait recommencer ce cycle infernal de mensonges qui amena l’autre monde à sa disparition, ce après des millénaires d’horreurs sans noms. N’oublions jamais, mes amis, que c’est la malhonnêteté qui les perdit, alors restons dignes et intègres si nous voulons prétendre être meilleurs que ces malheureux dégénérés, car sinon...

Enfin, pour cloturer avec joie et exprimer notre reconnaissance illimitée aux nombreux intéressés, je demande que l’on applaudisse très chaleureusement les personnes de ces équipes de constructions de ces appareils, qui y travaillent d’arrache-pied depuis tant d’années, ainsi que ces déjà futurs héros que sont tous ces équipages réunis de cette prochaine expédition ; nos frères et soeurs tant chéris, leur souhaitant tous les succès dans cette première vague d’attaque contre ces pourritures infectes que sont ces désormais Zanko-Khuigs...de merde !

Ce fut un vacarme si possible pire que le premier, la colline devant littéralement en vibrer. Une immense ferveur étreignait ces gens, tous priaient en eux-mêmes les forces vives du cosmos éternel.

La station entière vivait depuis deux jours dans une tristesse profonde, et que

dire de Marion, elle qui avait passé les deux jours complets précédents au chevet de Céline qui, malgré les meilleurs soins des médics, fut irrémédiablement emportée par une septicémie foudroyante.

Décrire la tristesse d’un être comme cette jeune femme, entière, si généreuse et si dynamique est totalement impossible à quiconque. Tous avaient peur, tremblaient d’une réaction violente et désespérée de celle-ci, car tous connaissent la grande affection qui unissait les deux patrouilleuses. S’ils avaient su, s’ils avaient connu le puissant lien qui les avait uni par miracle juste avant cette catastrophe, ils auraient été encore plus effrayés.

Après le décès de Céline, Marion resta deux jours à l’hôpital...désemparée, hagarde, sans force, sans plus aucune réaction aucune, plus rien ne la tirait de cet état...elle sombrait peu à peu dans un puits de néant. Les médics la firent dormir durant deux autres jours complets. Elle ressortit de ces gouffres de non vie, tirée de l’enfer par une faim tenace ; la jeunesse et la nature reprenant leurs droits.

Puis on l’amena séjourner avec les tous petits qu’elle adorait. Surtout son fils Clovis et sa fille Athéna qui la couvrirent de baisers et d’amour...De vivre parmi eux lui redonna peu à peu le goût aux choses de son entourage : difficile de résister à la grande vitalité des enfants, c’est contagieux.

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Elle redevint enfin suffisamment forte pour qu’au bout d’une semaine elle puisse de nouveau vivre chez elle...

Ça, c’était la Marion publique, souriante, causante...mais l’intérieur était dévasté par un insondable désespoir, une chape de tristesse lui obscurcissait l’âme. Tous se rendirent enfin vite compte que son rétablissement n’était qu’apparent ; le corps marchait, bien sûr, mais l’âme se traînait derrière, pantelante...

Le grand conseil des sages décida alors qu’il leur fallait intervenir et trouver une solution pour rapidement sauver cette âme en perdition. Il fut donc décidé que puisque une grande affection et confiance l’unissait avec un de leur membre, Georges, celui-ci devait alors tout tenter pour la remettre sur les rails de la Vie, il en allait du devoir de tous de la sauver. Toutes idées, aides possibles lui étant dès lors assuré, Georges avait carte blanche.

Ce dernier fit une discrète et rapide enquête pour découvrir les deux ou trois personnes à qui Marion aimait particulièrement se confier, ses plus intimes en fait, tout au moins durant ces derniers temps, sachant pertinemment que dans leurs communautés les liens étaient si élastiques que tout changeait vite parfois.

Puis il se débrouilla pour également rencontrer Josiane, la médic de l’équipe de secours qui s’était trouvée au début dans le perceur ; s’en remettant à l’appréciation d’une femme, qui avait sans doute ressenti autre chose que les hommes présents ce jour-là. Georges connaissant bien, vu son âge, la réputation des femmes pour leur sensibilté particulière, leur sixième sens ; ce fameux flair féminin. Elle accepta de venir le voir à son carré.

Georges la reçut en toute simplicité et la fit asseoir sur l’unique siège, comme dans tous les autres carrés, lui s’asseyant sur le rebord de son lit. La médic est une femme mûre, dans la cinquantaine, 1.65 mètres, les cheveux bruns où quelques petites touffes grises lui donne ce sérieux de l’expérience. Belle corpulence, mais du genre fausse maigre. Toujours coquette, elle ne paraît pas porter ces petits kilos de trop qui lui gâtent pourtant un tantinet l’existence.

-Josiane, je te remercie chaleureusement d’avoir accepté de venir à ma demande, je sais que tu es beaucoup occupée avec ces charretiers blessés et...

-Georges, dis-moi vite ce qui te préoccupe, le coupa-t-elle, je te connais bien mon petit Georges...alors te fatigue pas à tourner autour du pot...Elle lui prit une main dans les siennes...Comme tu le dis toi-même, j’ai beaucoup de boulot avec ces charretiers, qui entre nous, je te rassure tout de suite, vont bien, ils s’en tireront encore pour cette fois mais, quelqu’un pourrait-il enfin leur dire qu’on a qu’une seule vie, parce qu’alors eux n’en font guère de cas, ils sont terribles.

-Ah ! merci Josiane, dit-il en souriant soulagé, enfin une bonne nouvelle. -Oui, grâce aux forces stellaires qui sauveront au moins ceux-là, une ombre

fugasse de tristesse passa sur son visage. Mais, dis-moi ton problème, que je connais peut-être, si je te connais bien mon ami, dit-elle en le regardant d’un air mystérieux, un léger sourire aux lèvres.

Il la regarda étonné de ces remarques... -Josiane, je veux que tu ne te méprennes pas sur mes intentions surtout. Je dois

te questionner pour essayer de pouvoir aider une personne qui est dans le

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malheur jusqu’au cou et...je ne sais pas comment faire, j’ai juste de vagues impressions, des pressentiments, tu comprends ?

-Vas-y va, je te dirai tout ce que sais car je sais que venant de toi ce ne peux être que noble, de qui s’agit-il ?

-De Marion. -J’en étais sûre, je le savais, dit-elle satisfaite ; je voulais justement venir t’en

parler. Oui, elle me préoccupe moi aussi énormément, et tu as raison, on doit faire l’impossible pour la sauver, elle est si extraordinaire.

-Je voulais te voir parce que tu l’as vu au tout début de cet horrible malheur, et ce sont les premières impressions qui sont les plus importantes souvent, et surtout toi, une femme aussi. As-tu vu ou ressenti quelque chose qui expliquerait ce...il hésita...cet abattement bizarre et inquiétant ? Ne me cache rien s’il te plaît Josiane, je te donne ma parole d’honneur que personne ne saura rien de cet entretien...Je sens qu’il y a quelque chose qui nous échappe...pour elle, cette enfant merveilleuse, nous lui devons tous tant de joies et de bonheur.

-Georges, je...elle hésitait du comment formuler sa pensée, tu as raison Georges, quelque chose nous échappe. Je l’ai senti en tant que femme comme tu dis, dans ce perceur. Les autre médics, des hommes n’ont dû rien y compren- dre, j’en suis sûre. De les voir toutes deux...mon flair de femme, oui...j’ai réalisé bruquement qu’un grand, un immense, un merveilleux événement récent, elle parlait maintenant avec passion au souvenir de ces instants uniques, tenant toujours la main de Georges dans les siennes et la serrant...qu’elles...elle baissa alors la voix pour protéger ce secret inouï, qu’elles avaient, lors de ce voyage, ce jour même il se pourait bien aussi...découvertes leur amour réciproque ; oui Georges...un grand amour total et absolu...amour charnel et de passion véritable, qu’elles ne soupçonnaient pas elles-même la veille encore, j’en suis certaine.

Tu connaissais, Georges, comme nous tous, leur grande et célèbre amitié, c’était peu dire, Georges...car en fait, un amour, une passion immense les enleva pour l’éternité et...c’est ce même jour, je pense, que ce malheur épouvantable les frappa. C’est horrible, pauvres enfants, de les voir toutes deux aussi passionnées l’une pour l’autre, car plus rien n’existait alors autour d’elles. Je peux te l’avouer sans honte, j’ai pleuré de voir tant de malheur et de détresse dans les yeux de ces deux malheureuses ; c’était si pathétique, Georges...je n’oublierai jamais une telle détresse...

Des larmes coulaient sur ses joues maintenant... -Tiens ! tu vois, à chaque fois que j’y repense je me remets à pleurer comme

une fontaine...à mon âge, qui l’aurait cru...J’en vois pourtant mon comptant de malheur avec mon boulot, comme tu peux aisément l’imaginer, mais comme ces deux-là, c’est épouvantable. C’était leur âmes même qui vibraient d’une flamme intense dans leurs yeux...Je puis te le dire maintenant, Georges : durant ces deux jours de lente agonie de cette merveilleuse enfant, Céline...sa Marion ne la quitta pas un seul instant...Elles étaient toutes deux dans un autre espace-temps, loin de tout...Marion, la pauvre enfant, savait alors d’instinct que sa Céline était perdue...elle la veillait alors d’une ardeur, avec une dévotion surnaturelle.

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Les deux ne se quittant pas des yeux un instant ; elle lui parlait sans cesse le premier jour puis...Céline alors, devenant de plus en plus faible...Marion lui tenait la main, lui essuyait son beau visage ovale d’antique madone...lui parlant de façon à peine audible pour nous tous les médics qui étions tous anéantis d’une telle intensité dramatique. J’avais l’impression, la certitude même qu’elles communiquaient alors par la pensée...

Céline s’éteignit dans les bras de Marion qui, la sentant partir, s’était allongée contre elle, la berçant dans ses bras, le visage ravagé de larmes silencieuses, ne la quittant pas des yeux, lui embrassant le front, les joue et ses lèvres avec ferveur, tout en lui chantonnant en murmurant doucement une berceuse pour enfant.

Nous fûmes obligés de lui enlever le corps de Céline des bras sans qu’elle n’ait aucune réaction...son esprit, son âme déjà partie avec son amour...Elle resta là, inconsciente durant tous ces jours suivants, horribles. Après le décès de Céline, ne sachant pas si nous allions pouvoir la faire revenir de ce néant, nous la transférâmes alors dans une autre chambre pour sa cure de sommeil, comme tu sais, ce qui, que grâce soit rendue aux bénies soient-elles forces stellaires, la sauva.

Josiane avait le visage mouillé de larmes. -Georges...j’en suis bouleversée pour le restant de mes jour...Je peux te le dire à

toi, Georges, toi qui comprend la vie : je préfèrerais mourir de suite plutôt que d’être de nouveau témoin d’un drame aussi atroce.

Georges était anéanti par ce récit inimaginable auparavant ; il resta silencieux un long moment, puis se reprit lentement, le visage blême.

-Et d’après toi...ces incroyables données changent tout de ce que j’avais en tête pour tenter de l’aider ; comment pourrait-on faire ? discrètement j’entends, car visiblement elle n’en a parlé à personne de...leur aventure sentimentale.

-Aventure est un euphémisme...une passion ardente les dévorait littéralement. C’est justement là le noeud du problème, car Marion, avec son caractère entier, ce secret l’étouffe littéralement, tu comprends ? ce lien puissant qui l’unit pour toujours à Céline, son amour ; elle ne peux en parler à personne et ça l´étouffe, et va la tuer...Ce doit être terrible de vivre ainsi, il y a de quoi devenir fou, oui, pour cette jeune femme si noble et si sensible.

-Mais comment faire, je répète ma question...d’après toi, en tant que femme, comment, que peut-on faire ? De savoir ça maintenant, j’en suis complètement désarmé, et le mot est faible.

-Il faudrait je pense trouver une personne très intime avec elle, qui doucement l’amènerait à se confier, lui arracher ce lourd secret enfoncé comme un pieu dans son pauvre coeur, dans son âme. Il faut la délivrer de cette hantise, car il me semble de plus qu’elle se sent coupable de ce drame, je ne sais pourquoi, il me fut impossible de la faire parler ce jour-là dans le perceur...elle était comme folle de désespoir, personne ne pouvait l’approcher pour la raisonner.

Tu connais sa fougue habituelle, alors tente d’imaginer comme elle était ce jour-là...c’était dantesque...Je ne peux plus oublier la vision de ces deux enfants couvertes de sang, leurs visages merveilleux ravagés par la peur, la souffrance et

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l’angoisse...et quand elles se regardaient, brillait alors dans leurs yeux une passion démesurée, inouïe.

-J’avais envisagé vaguement ce genre de chose, mais j’en étais à mille, cent mille lieues je vois...Mais je peux te le dire maintenant, j’ai fait ma petite enquête personnelle et je pense avoir trouvé la personne idoine, en qui elle aurait une grande confiance.

-Qui ça ? si c’est pas trop demander bien sûr. -Oh ! c’est un peu tard pour ça, non ? C’est Guillaume, le beau Guillaume

comme vous l’appelez toutes, dit-il en souriant. -Serais-tu jaloux sur tes vieux jours, Georges ? rit-elle faiblement en reniflant et

en essuyant ses paupières avec un mouchoir. -Si j’avais dû l’être un jour ce serait un peu tard, tu ne penses pas ? La médic lui sourit amicalement, puis continua. -Sérieusement cette fois, je crois Guillaume capable de l’aider, oui, à passer ce

cap difficile. Il a la réputation de...savoir faire parler les coeurs les plus délicats, alors...Je te rassure de suite, je n’ai pas expérimenté la chose personnellement, dit-elle en souriant.

-Dommage pour toi alors, hein ? Mais bon...sérieusement ; doit-on laisser Guillaume dans le brouillard ou lui donner certaines indications comme possibles de son mal ? En le prévenant on éviterait une erreur de manoeuvre qui serait alors gravement regrettable, et on gagnerait un temps précieux, car de la voir sombrer ainsi m’arrache le coeur.

-Oui, il vaut mieux lui en parler, et tu sais, Guillaume est réputé pour sa grande discrétion, jamais il ne parle des confidences que lui font toutes ses poulettes, c’est-à-dire en gros toute la station Bertrand !

Georges la regarda étonné, un sourire aux lèvres, et siffla d’admiration... -Et heureusement pour lui car ces furies lui arracheraient les yeux,. -Je viens d’y penser, si tu veux je pourrais le mettre au courant ; venant de ma

part, on se connait bien tous deux, cela serait plus facile pour lui d’assimiler cette responsabilité écrasante, venant d’une femme de mon âge et avec mon expérience. Sauver une Femme aimée de tous, comme Marion, c’est pas de la rigolade, faut un fin psychologue et un homme de courage et de confiance totale, et nous l’avons trouvé, alors ?

-Entièrement d’accord, enfin je respire mieux de savoir que nous approchons d’une solution, vois-le le plus vite possible alors, on a déjà perdu trop, beaucoup trop de temps pour sortir cette enfant chérie de tous, des griffes du malheur ; fais au mieux avec Guillaume...Mais j’y pense...il serait peut-être utile qu’elle ne sache pas que je suis au courant de cette démarche, qu’en penses-tu, Josiane ?

-Oui...s’il faut, on sera toujours à temps d’en parler. On fait comme décidé. -Merci Josiane, mille fois merci, les astres m’ont heureusement inspiré de te

demander de venir me voir, merci. -J’allais venir de moi-même, comme je t’ai dit. -Mais ainsi c’est maintenant au point...Je ne te mets pas dehors Josiane, bien

sûr, mais cours mettre Guillaume au courant...faut plus perdre de temps. Elle se leva et l’embrassa tendrement sur les joues.

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-Je suis heureuse de t’avoir revu en particulier, Georges, et merci pour notre Marion, on va la sauver va...n’ai pas peur mon grand et...passe nous dire un petit bonjour un de ces jours à l’hôpital, nous serons tous heureux d’accueillir cet ancien, redoutable et célèbre patrouilleur que tu étais...Pour moi tu l’est toujours, mon beau Georges, j’ai toujours le souvenir enchanté de nuits de passions passées dans tes bras robustes...et...

-Par vite trouver Guillaume, drôlesse, dit-il en riant et lui donnant une claque amicale sur ses fesses...Viens quand tu veux, avec grand plaisir...on verra bien ce que nous pourrons encore peut-être faire nous deux, mais je te promets rien, ma belle...Je ne t’ai pas oublié non plus ma jolie médic ; es-tu toujours cette polissonne ardente qui me mettait sur les rotules ? C’était le bon temps, hein ? Il l’attira à lui et déposa un affectueux baiser sur ses lèvres.

Elle partit de suite à grande enjambées, heureuse, avec la farouche résolution de sauver cette enfant victime de cet amour immense qui l’étouffait.

Elle était là...vide...esprit statufié flottant sur un sinistre no man’s land glacé,

immensité effrayante de non-vie, désert d’insensibilité létale absolue. Un coin de sa conscience cependant, lui envoyait des flashs du besoin impératif qu’elle avait de se reprendre, se relever, forte comme elle avait toujours été : une combattante de l’enfer ! Cette notion l’effleurait comme s’agissant de quelqu’un d’autre. Seul, un être de lumière l’appelait depuis l’insondable noiceur des espaces stellaires...une flamme d’amour dévorante attirait son âme pantelante vers l’image irréelle de sa Céline, spectre irradiant de cet amour violent qui les avait uni pour l´éternité...Elle était allongée sur le dos sur sa couche, la flamme vascillante d’une bougie éclairant d’une lumière hésitante et blafarde son beau visage livide mouillé par de larmes silencieuses. Vivait-elle encore ? Les larmes permettaient de l’affirmer oui, mais ses yeux, son regard fixe était perdu dans un autre espace-temps insondable...

Son être ressortit brutalement de ce chaos, alerté par des coups énergiques frappés à sa porte. Elle revint brusquement à la réalité, rappelée à la vie par les contingences de la station ; ruche ardente s’activant fiévreusement autour d’elle pendant qu’elle sombrait dans ses sentiments, elle en eut alors fortement conscience, comme dans un éclair...

La grande Vie continuàit là dehors, grandiose et obstinée. Elle se leva d’un bond et essuya ce visage qui invariablement à son réveil d’un

autre monde, était enlaidi par des pleurs irrésistibles. Elle s’arrangea ses cheveux en passant ses doigts dedans à la va-vite, comme à son accoutumé, puis elle alla ouvrir la porte qui allait encore certainement lui amener des gens emplis de bonnes intentions pourtant, mais qui maintenant l’horripilaient. Mais elle soupira et cette fois le visiteur lui tira même un sourire de contentement ; Guillaume lui souriait comme toujours depuis l’entrée, son beau visage avenant étant une invite irrésistible à le faire vite entrer.

-Comment vas-tu ma belle patrouilleuse, lui dit-il en la serrant énergiquement contre lui et en l’embrassant de deux baisers sonores sur les joues...Nous venons

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juste de rentrer avec Françoise, qui du reste t’embrasse très fort, elle est encore au PC des opérations à déméler les paperasses et faire son rapport de mission ; tu sais ce que c’est, elle qui a horreur de ça en plus, la pauvre choutte ; entre nous je te le dis, j’ai bien fait de pas faire pilote, hein ? car quelles emmerdes que ces formalités...Mais au fait, je cause, je cause ; connais-tu l’excellente nouvelle ?

Elle fit non de la tête, souriant, devant la joie communicative de son visiteur. -Non ? C’est un scandale ! dit-il faussement fâché, car nous avons ramené une

ravissante fillette brune d’une dizaine d’années environ, Flora, se nomme-t-elle, et crois-moi, elle sera vite une véritable et magnifique fleur, elle est si jolie...mais elle est si maigre que s’en est effrayant, la pauvre enfant. Mais comme d’habitude, notre inestimable et irremplaçable médic, j’ai nommé notre plantureuse Josiane ; surtout, Marion, je te supplie de ne jamais lui dire que je l’appelle ainsi car elle m’arracherait les cheveux, hein ? ma caille, lui dit-il en lui faisant un clin d’oeil complice.

Elle en rit aux éclats de cette sortie drôle et impromptue, et une voix au fond d’elle-même, une douce et chaude voix qu’elle connaissait si bien, lui dit alors « Enfin, mon ange blond, c’est si bon d’entendre ton rire, continue ainsi mon amour, car c’est ainsi que je t’aime le plus ».

Il avait refermé la porte et ils s’étaient assis, elle sur le bord du lit et Guillaume sur le siège, leurs genoux à se toucher, vue l’exiguïté. Ils se regardèrent un moment, sans rien dire...un moment de ces vides inexplicables passa entre eux deux ; il lui prit sa main gauche dans les siennes et la serra, la caressa doucement.

-Marion, ma jolie Valkyrie dorée...Je voudrais te parler, il faut que je te parle. As-tu toujours confiance en moi ? en ton Guillaume ? le fameux guérisseur des coeurs de ces dames, rit-il en se forçant, car de la voir ainsi si triste et enlaidie par les pleurs lui arrachait le coeur...

Elle hocha la tête en lui souriant faiblement mais le regardant intensément, avec dans son regard aux fabuleux reflets violets, comme un appel au secours inexprimé.

-Marion...Marion...je...je ne sais comment te dire tout ça, tu sais combien je t’aime...et de te voir ainsi, à la suite de ce drame horrible, qui a enfoncé tous les êtres de cette station et des autres aussi, dans une tristesse sans fond. Je...je puis te l’affirmer, Marion...j’ai visité plusieurs de nos stations voisines ; ils sont tous solidaires et compatissent à ton chagrin...Tous m’ont chargé de te transmettre un message : ils t’assurent de leur amour inconditionnel et éternel pour vous deux, Céline et toi réunies dans un bloc indestructible de reconnaissance et d’amour de tous.

Le dos raide, livide, tendue...des larmes coulaient à flots silencieux sur les joues d’une Marion qui le fixait intensément, souffle oppressé...

-Ils m’ont chargé aussi de te dire qu’ils attendent avec ferveur ton retour parmi eux tous, toi, leur Valkyrie dorée, qu’ils t’appellent tous...Marion, Marion chérie, ils t’assurent qu’ils verront toujours en toi ce couple éternel que vous formez toutes les deux avec Céline, et que tu te dois de continuer à la faire vivre parmi nous tous, dans cette énergie et cette joie qui irradiait de vous deux. Marion,

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mon amour doré, tu te dois de continuer la lutte, et tu le sais bien. Si tu avais vu cette fragile enfant, cette petite et frèle Flora, cette joie, ce bonheur qui l’étouffait d’être sauvée par deux anges descendus du ciel, pour elle. C’est pour continuer de sauver ces enfants que tu te dois de revenir parmi nous.

Marion le regardait toujours dans les yeux, comme inoptisée par ce regard franc comme l’or de cet ami inestimable, mais elle attendait inconsciemment autre chose de lui...une aide inexprimée et qui lui bloquait la gorge que de la lui demander...elle ne savait même pas le formuler elle-même...et ça l’étouffait littéralement.

-Marion, tu m’entends ? Comprends-tu ce que je te dis ? Elle hocha imperceptiblement la tête, lui prenant alors ses mains dans les

siennes, les serrants avec force...pour transmettre cet appel, la sortir de ce désespoir horrible ; continuant de le regarder intensément, de ses merveilleux yeux bleus d’où irradiait une supplique...une prière pathétique.

Guillaume en était à deux doigts de fondre en larme, de la voir et la sentir aussi désespérée, suppliante d’un appel à l’aide qui ne pouvait sortir de sa gorge bloquée par ce malheur épouvantable.

-Marion...il y a autre chose, je le sens, tu me connais, hein ? toi-même tu le dis, que je sens les choses mieux que les autres, et je sens une autre raison à ce gouffre qui te retient, qui t’empêche de revenir à la lumière. Chérie, dis-moi tout, tu sais que de toujours je t’ai aidé du mieux que je peux...fais moi confiance encore, c’est si important, c’est ton bonheur qui est en jeu...Il faut que tu saches que lors de votre arrivée à la station, ce jour du drame...j’étais forcément parmi la foule très nombreuse qui vous attendait, tous rongés d’angoisse...et par la suite, tous ces jours terribles, je vous ai vu, toi et Céline...et j’ai perçu un lien si puissant entre vous que...Marion, permets-moi de pouvoir te dire en toute franchise ce que je ressens, l’acceptes-tu ? c’est pour t’aider ma chérie, seulement t’aider...

Elle fit oui, hochant à peine la tête lentement, dos raidi, son regard fixe, intense, toujours vrillé dans les yeux de Guillaume ; un dramatique appel au secours vrillé dans ses merveilleuses prunelles aux reflets mauves...

-Oui...ces deux jours où vous étiez inséparables, d’une façon incompréhensible pour la plupart des autres témoins, mais j’ai alors saisi en un instant, senti...senti un lien fantastique qui vous unissait d’une façon rare et puissante. Marion...je suis certain que quelque chose de grandiose vous était arrivé récemment à toutes les deux...je le voyais sur vos visages, et j’étais bouleversé de voir de si forts sentiments entre vous deux...Marion chérie, dis-moi, à moi ton ami fidèle ce qu’il y avait entre vous deux...vide ton coeur de ce secret qui t’étouffe.

-Ont s’aimaient à en mourir, Guillaume, lâcha-t-elle tout à trac...Guillaume ! Ô Guillaume ! Elle lui serra les mains avec force, en pleurant maintenant à chaud de larmes, sans retenue, son âme enfin libérée, enfin libre de crier son secret qui devait ainsi en mourir, libérant un flot de paroles, le regardant maintenant avec une passion intense dans les yeux...Nous avions découvert un amour immense entre nous deux...le même jour que ce...ma Céline...nous étions ivres de bonheur

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de ce nouvel amour total et charnel...Nous nous sommes aimées comme deux folles, nous nous sommes dévorées d’un amour intense et dévastateur.

Ah Guillaume ! tu ne peux comprendre ce qui nous est arrivé ainsi à l’improviste, non...personne ne pourra jamais le comprendre...c’était sublime, fantastique, irréel...Nous avions découvert l’amour total...plus rien n’existait autour de nous...nous étions sur un nuage de songe...tu comprends ? Guillaume, tu comprends ? plus jamais je n’aimerai pareillement. Elle pleurait...pleurait maintenant libérée, serrée contre la poitrine de Guillaume qui la berçait tendrement, lui parlant doucement.

-Pleure mon ange...pleure toutes ces larmes de ton amour pour ta Céline...tes larmes d’amour illumineront son âme pour toujours...pleure, ma chérie, libère ton coeur et soit heureuse de revenir parmi tes frères et soeurs qui t’aiment aussi d’un grand amour.

Elle se calma peu à peu, prit un coin du drap et s’essuya le visage inondé de larmes.

-Marion chérie, c’est ce que j’avais ressenti entre vous deux, oui...je savais qu’il en était ainsi, c’est pour ça que tu te dois de continuer à faire vivre Céline...Elle est en toi maintenant, de par cet amour unique qui vous unit pour l’éternité. Elle te le demanderait elle-même, la connaissant bien.

-Oui, Guillaume...depuis longtemps maintenant je ressens ce genre de volonté en moi, c’est elle qui réclame ce que tu dis...Maintenant je le comprends mieux, grâce à toi, mon cher Guillaume...que deviendrais-je sans toi, toujours à la rescousse des coeurs perdus.

Elle se serra contre sa poitrine, ils se serrèrent fort et durant un long moment ainsi, puis ils s’embrassèrent sur les lèvres et les joues. Il sortit un mouchoir de sa poche et lui essuya tendrement le visage de ses pleurs, lui caressant doucement les joues et lui baisant les paupières.

-Marion, veux-tu m’écouter encore un moment ? J’ai une proposition à te faire, une demande plutôt...deux même...La première est la plus importante, la voici. Tu dois affronter cette vérité et ne plus la cacher à quiconque, car tu sais...en définitive, les gens qui vous connaissaient bien ne seront pas surpris de votre amour, et même, votre passion immense et si pure va certainement vous élever au summum de la réputation d’amour universel de nos communautés de cette jeune Humanité libre et noble. Vous serez un flambeau éternel, un phare pour l’amour des Hommes...Tu pourras en être fière et ainsi glorifier pour toujours, par votre amour commun, la pensée de Céline...Ta douce Céline vivra ainsi parmi nous en te voyant revivre toi-même. Qu’en penses-tu, chérie ?

-Oui, tu as encore et toujours raison, du reste...elle réfléchit un moment...Guillaume...il faut que je te dise toute la vérité...c’est important je sens...pour elle et pour moi aussi, je la lui doit. Céline voulait garder notre amour secret, elle voulait que notre amour soit une pierre precieuse à l’abri des regards des autres, c’était bien là sa timidité et délicatesse naturelle un peu et...je lui avais promise de respecter son voeux...Elle m’avait dit donner sa vie pour moi s’il le fallait et...c’est ce qu’elle a fait spontanément en me sauvant d’une attaque en traître...en plus...elle...Guillaume, ô Guillaume...sa voix se fit plus

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basse, tendue, elle lui serra un bras à lui faire mal...Céline voulait garder ce secret car elle craignait que tant de bonheur n’attire des forces mauvaises...

Guillaume la regardait, n’osant plus rien dire d’une telle révélation, respirant à peine, pressentiment qui s’était si épouvantablement réalisé, une profonde tristesse lui tomba alors dessus à lui broyer le coeur.

-Je vais assumer cette charge émotionnelle, je te le promets, mon Guillaume chéri, je te le dois bien en plus, mais...laisse moi un petit jour encore, juste un tout petit jour pour me recueillir auprès de son âme...que je lui explique ce que je vais...non, ce que nous allons faire toutes les deux...Elle sera heureuse, je le sais...je peux ?

-Oui, mais sois prudente, chérie, ne te laisse plus couler dans la nostalgie, la tristesse, d’accord ? Il faut que tu redeviennes forte, comme nous connaissons tous notre fière et célèbre Marion...Marion la guerrière, d’accord ?

Ils s’étaient levés, elle se jeta dans ses bras et le serra à l’étouffer. -Merci Guillaume, une fois de plus, encore mille, mille fois merci pour m’avoir

tiré de ce gouffre horrible, moi, pourtant soi-disant si forte comme tu dis ; je n’arrivais plus à m’en sortir seule...c’est horrible tu sais...mais ça va maintenant, tu peux être rassuré, je ne risque plus rien ; maintenant je sais comment vivre avec elle dans mon coeur, où je vais lui faire un petit nid douillet. Céline vivra avec nous ainsi.

-Bravo ! Merci de revenir parmi nous, mon ange. Tu vas rendre des milliers de gens heureux, ils attendent tous le retour de leur patrouilleuse...la fameuse tornade blonde, la terreur des gardes ! dit-il en riant fort, heureux de cet événement.

-Et ta deuxième proposition ? demanda-t-elle en souriant, levant son lumineux visage vers lui.

-Ça tu vas aimer, j’en suis certain. Ainsi, tu vas te faire belle et nous allons sortir tous les deux car beaucoup t’attendent pour une fête. J’ai commandé à la cantine d’Angèle, celle que tu préfères, et c’est elle-même qui s’est mise au fourneau, car il n’était pas question, m’a-t-elle dit sérieuse comme un hibou, tu la connais, que personne d’autre ne fasse le gâteau pour fêter le retour de notre grande Marion chérie, Angèle dixit...Un somptueux gâteau aux amandes et au miel, avec une montagne de crème en mousse et du cidre bien frappé de derrière les fagots, comme tu aimerais parait-il, me suis-je laissé dire, dit-il fier de lui.

Elle cria de joie comme une enfant, sautant au cou d’un Guillaume éperdu de bonheur. Elle se lava le visage à l’eau fraîche puis s’apprêta rapidement, mit sa plus belle robe et chaussures montantes dernièrement reçues puis, elle hésita un instant et prit dans un petit coffret à bijoux sur la table, un resplendissant collier en toc jetant mille éclats.

Guillaume reconnu le collier que portait Céline, qui ne s’en séparait jamais...Il ne dit rien et sourit tendrement de ce geste de fidélité à son amour.

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Frayeurs et mystère à la pêcherie

n cette nuit sombre de début d’avril, l’Atlantique Nord vit passer au ras des flots de silencieuses et étranges ombres compactes et successives,

évoluant à un rythme apparemment fantasque, irrégulier, comme hésitantes. Cependant elles suivaient un objectif certain car pour un observateur attentif, un cap déterminé pouvait visiblement ressortir de ces surprenants ballets aériens au ras des flots. Une intelligence structurée menait incontestablement ces étranges et menaçants oiseaux de nuit...

Observant bien, on y sentait comme une menace latente, diffuse, indéterminée mais certaine ; cette façon furtive d’évoluer dénotait une volonté farouche d’atteindre secrêtement un objectif inconnu et, c’est cette façon sournoise de se projeter en avant qui faisait que l’on ressentait comme une peur insidieuse vous envahir lentement...Un malaise sourd vous pendre alors aux tripes, puis il remonte et vous suffoque lentement. On se surprenait alors à inconsciemment prier pour ceux qui allaient être victimes de cette redoutable et puissante force noire qui avançait inexorablement sur ces flots obscurs et infinis.

Une farouche et irréductible volonté de destruction totale et barbare les unissait en un redoutable et implacable bloc de force létale tournée vers un seul objectif sacré.

Le petit campement permanent était judicieusement construit contre la haute

falaise traversée d’un profond torrent qui s’écoule en un flot rapide par un goulet ; l’autre rive à quelques cinq mètres en face étant pareillement une paroi abrupte en continuité de vingt-cinq mètres de haut et qui fuyait en ligne droite. La leur, la même et haute muraille verticale allait s’évasant suavement en forme d’une large conque, puis revenait vers le torrent pour s’en éloigner de nouveau, en un ample et majestueux S, offrant une aire plate de plus d’un hectare, avec pour leurs chevaux une belle herbe à profusion.

Ce fabuleux décor naturel avait été une invite à y organiser leur base de pêche car offrant de par la topographie une remarquable facilité de défense face aux dangers représentés par les animaux sauvages, particulièrement nombreux dans ces montagnes. L’entrée en ce lieu, en bordure du torrent, où la paroi venait s’en rapprocher dans l’arrondi convexe du S, était fermée la nuit par une solide palissade hérissée de longs pieux pointus tournés vers l’extérieur, l’ensemble monté sur roues. Ce barrage est articulé comme une porte, les gongs fixés sur la roche du S à droite, et vient s’appuyer sur un énorme monolithe de roche verticale et lisse donc l’encrage est en grande partie dans le torrent.

Barrière protégeant de tous dangers les trois pêcheurs et leurs cinq chevaux.

E

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Au fond, face à l’entrée et à quelques quatre mètres de la rive droite du torrent, sous l’aplomb de la falaise, ils avaient profité d’une nette avancée de la paroi sur environ un mètre et demi, un auvent bien prononcé de onze mètres de long et à trois mètres de hauteur, pour le continuer de trois mètres sur le devant, d’une solide construction rustique en bois de chêne.

Les produits de leurs pêches sont enlevés par des groupes d’une vingtaine de cavaliers itinérants et super armés qui assurent les ramassages dans les six pêcheries, tous les deux jours en hiver et chaque jour en été. Simple question de conservation du poisson, ces magnifiques truites, ombres, et écrevisses...

Justin, un jeune et grand gars de dix-sept ans, bien charpenté et de 1,78 de hauteur ; blond comme un soleil, avec de magnifiques yeux bleus dont toutes les mignonnes raffolent, venait d’arriver depuis peu dans cette équipe de pêcheurs, continuant de ce fait et pour la sixième fois ses stages de quatre mois de formation de Vie. Travaillant, apprenant chaque fois une profession différente.

Il venait ainsi de passer les derniers mois de l’année précédente avec les bergers, gardiens attentifs de leurs nombreux troupeaux éparpillés sur de grandes aires de paturages.

Puis la période avec les chasseurs, dont les garçons raffolent, renouant inconsciemment avec les pratiques de Vie de leurs très lointains ancêtres perdus dans les millénaires de l’histoire de ce Monde. Pose de pièges et l’affut interminable rongeant les nerfs ; l’approche silencieuse adaptée à chaque proie, chacune ayant ses trucs et astuces, puis le tir à la carabine, à l’arbalette, pistolets, etc., autant d’attraits pour tous ces jeunes passionnés de vie active et vivifiante.

Stage avec les forestiers, qui patrouillaient inlassablement à cheval par équipes d’une douzaine de gars n’ayant peur de rien. Ils sillonnent inlassablement ces contreforts montagneux pour la surveillance générale et régulation de la Vie sauvage. Actions obligées dans un cycle maintenant relativement fixé, à régulièrement éliminer les surpopulations épisodiques d’une espèce prédatrice représentant un danger pour leurs communautés

Il y avait aussi les charpentiers qui allaient en mission pour reconnaître les arbres dont ils auront besoin ; apprendre la technique de la coupe, à la lunaison décroissante pour le construction ; savoir travailler le bois, connaître les essences diverses de leur région, et leurs meilleures utilisations respectives ; ainsi que la coupe du bois de chauffe (en lune croissante) pour les cuisines.

Puis les stages avec les lavandières, dans les torrents glacés, dur mais indispensable, ingrat, faisant parti aussi de ces choses incontournables de la vie.

Stage tant attendu pour les garçons seuls, était celui avec les charretiers. Le dernier, vers les dix-huit, quand ils avaient atteint plus de maturité, d’expérience générale et de force physique, et plus de courage surtout, car fallait-il ne pas en manquer pour vivre cette Vie d’éternels dangers, loin des siens...Puis, chacun se choisissait une activité principale selon ses goûts, mais aussi en fonction aussi des impératifs spécifiques et ponctuels de tel ou tel groupe ; avec toujours si désiré la possibilité de pouvoir en changer un jour prochain.

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Tels étaient ces Hommes et Femmes nouveaux, forts, experts et responsables ; des Êtres universels dignes maintenant de peupler leur planète, Gaïa, la mère bénie comme ils la nommaient ; Gaïa, la splendeur des espaces stellaires.

Vie dure que Justin adorait. Vivre au grand air, libre sous le soleil restait toujours un rêve pour beaucoup, il se savait donc privilégié, de beaucoup même.

Ils venaient de rentrer au bercail, en cette longue et douce soirée de Juin ; la palissade à poste, ils s’étaient lavés, nus dans le torrent glacé ; à l’abri sous un sapin qui, véritable providence, penchait sur l’eau on ne pouvait mieux. Ils auraient voulu en planter un ainsi qu’ils n’auraient pu mieux réussir, idéal pour faire leur toilette à l’abri des satellites.

Justin, nu comme un vers et assis dans l’herbe grasse au bord de l’eau, affutait lentement son long coupe-coupe sur un gros galet arrondi. Plus loin, un de ses compagnons, Arnaud, un petit gars musclé et taciturne aux cheveux poivres et sel et dans la cinquantaine bien sonnée, étrillait calmement un cheval qui, tournant sa tête vers lui, essayait de lui enlever son large béret basque qu’il portait toujours sur le côté gauche de la tête...

Justin rit de grand coeur de ce tableau rustique, et lui lança en riant. -Ho ! Arnaud ! il va te le becter ton béret, tu vas voir mon gars. -S’il me fait ça, ce fils de pute, je lui mords l’oreille ! lui répond l’autre sans rire. -Ha ! ha ! je voudrais bien voir un cirque pareil, dit justin riant aux éclats pour

le coup, pauvre Fringant, quand même, tu ferais pas une chose pareille, non ? je suis sûr qu’il veut s’amuser, c’est un encore gamin ce cheval.

-Ouais, gamin ou pas, c’est pareil, voilà ! Faut lui apprendre le respect. -Apprendre le respect à un cheval ? il était sidéré le Justin...J’ai jamais entendu

un truc pareil, Arnaud, parole d’homme. -Aiguise donc ton coupe-chou et t’inquiète pas, l’ gamin. Justin haussa les épaule et en riant encore de cette farce continua lentement

son travail, récupérant ainsi de la fatigue de la journée. Ils avaient fait une bonne pêche, leurs chevaux de bâts chargés à bloc...Les ramasseurs étaient repartis avec la marchandise depuis une bonne demi-heure déjà...C’était, de l’avis unanime le meilleur moment de la journée. Frais lavé, à poil le cul dans l’herbe et les pieds au frais dans le torrent où des truites énormes filaient parfois comme des flèches d’argent à ras de la surface...Que vouliez-vous de plus pour être heureux ?

-Ho ! la jeunesse ! c’était Gautier qui le hêlait depuis la porte de leur cagna, un seau dans la main qu’il lui lança, et lui cria. Attrape ce seau et ramène-moi de la flotte, si vous voulez manger ce soir, bande de feignants, dit-il en riant.

Justin qui s’était levé d’un bond attrapa le seau au vol, le remplit d’eau glacée et le lui ramena.

Gautier est un gars plus jeune qu’Arnaud, dans les trente ans ; taille moyenne, cheveux chatains clairs et les yeux marrons, et il était toujours de bonne humeur...ce qui compensait d’avec le premier.

-Que nous fais-tu de bon ce soir, mon Chef préféré ?

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-Te fatigue pas avec ton chef, Justin mon drôle, rit-il...Tu vas te régaler mon gamin, parole ; un mets rare pour une fois : une truite au bleu pour chacun avec des patates à la cendre, et il éclata de rire.

-Tu parles d’une nouveauté, répondit Justin dépité. -Plains-toi, il y en a beaucoup qui voudraient bien en manger plus souvent, et

j’en connais. -Oui, je sais bien, Gautier, je disais ça pour la forme, ces poissons sont

vraiment délicieux, mais un bon morceau de viande grillé à la braise de temps en temps ne me dérangerais pas non plus.

-Moi non plus figure-toi, tiens ! va prendre une bouteile de vin du casier dans le torrent et on va boire un bon coup de rosé pour se mettre en appétit, et il cria à Arnaud.

-Ho la joie ! tu veux boire un coup de pinard avec nous ? -P’tit con ! répondit ce dernier en lâchant son étrille dans l’herbe, allant les

rejoindre. On ne pose jamais de question pareille ! OUI ! je veux boire un coup, petit rigolo !

Tous les trois de rire un bon coup ; fallait aussi se détendre les boyaux. Ils trinquèrent en dégustant ce délicieux petit rosé qu’ils avaient reçu juste

avant de partir de la station Bertrand, un coup de chance. Un chariot plein avec des marchandises à ras bord venant de la station Girelles ; comme d’habitude entre les communautés, échangeant leurs produits. Ces derniers leur avaient amené de ce bon vin rosé justement, des citrons, raisins, olives et huile du même fruit, melons, figues, des chèvres et moutons vivants élevés dans la garrigue, à la chair délicieuse et parfumée aux herbes de la Provence, ainsi que des lapins et lièvres parfumés de même.

Puis ces derniers repartaient avec leur produits de ces montagnes : oies, poulets, canards, des noix, les noisettes de montagnes, leur cidre et eau de vie de prunes...Les échanges étaient toujours très variés et toujours attendus par tous avec le plus grand plaisir et intérêt.

Enfin, selon leur coutume par beau temps, ils dinèrent dehors, assis sous le sapin au bord de l’eau, fabuleux décors pour un repas d’Hommes fatigués par une rude journée ; et c’était pratique pour balancer les restes hachés menus dans la flotte, restes biologiques qui alimenteront des alevins, toutes ces bestioles innombrables vivant d’un rien ; une poignée de sable et d’herbe pour laver les ustensiles, un rinçage éclair dans le torrent, et le tour est joué.

Ils se couchèrent au coucher du soleil...Demain dès l’aurore les attendait une nouvelle et rude journée, mais ni plus ni moins qu’à leur habitude.

Ils furent révéillés d’un seul jet par les chevaux qui étaient entrés en trombe

par la porte latérale restée ouverte, le jour avait à peine pointé, les cinq hennissant visiblement de peur, et s’il n’y avait pas eu la barrière de séparation ils auraient bien traversé toute la cagna...Ils sautèrent de leur chalits et se précipitèrent vers les fenêtres et...ils ne virent rien. C’était incompréhensible, ils avaient beau regarder de partout, rien d’anormal n’apparaissait.

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Ils se vêtirent en vitesse, prirent leurs armes, les culasses claquèrent et ils sortirent. Justin sortit par la porte de devant et Arnaud par la porte des chevaux sur le côté droit, Gautier restant en seconde ligne, restant à couvert dans l’étable, invisible. Les deux s’avancèrent sur l’herbe et regardèrent encore de tous côtés, en haut, de l’autre côté du torrent, sur la cagna, la falaise...rien, ils ne voyaient rien d’anormal ; les deux se regardèrent, incrédules, puis Arnaud cria à Gautier resté à l’intérieur.

-Tu peux sortir Gautier, il n’y a que dalle, j’y comprends rien...peut-être un grand aigle qui les a effrayé ? lui disait-il, les deux tournés vers celui-ci qui arrivait de l’étable, quand, venant d’avancer de trois mètres au dehors, Gautier bloqua pile et regardait quelque chose d’apparemment extraordinaire, vu son air, dans leurs dos, à eux deux, Arnaud et Justin et...il en restait sidéré, les yeux écarquillés et le menton pendant, bouche entrouverte et bras ballants. Les deux autres qui le regardaient, ahuris de le voir ainsi, firent volte face en un éclair, armes braquées, et alors, ahuris eux aussi...ils virent la chose.

Là-bas, contre la palissade, mais à l’intérieur de l’enclos, sans que rien ne l’ait laissé supposé, entendre un bruit quelconque...enfin, rien quoi...d’une sorte de grosse et longue masse confuse à peine discernable, comme un paquet de brume semblait-il, un nuage...s’ouvrait et s’abaissait lentement une porte ; des marches apparurent...quatres marches qui donnent accès à l’intérieur d’un appareil dont on le voyait maintenant clairement, illuminé par un éclairage intérieur, les dossiers d’une rangée de sièges étaient nettement visibles...

Ils restèrent un moment sans réaction, puis alors qu’ils allaient bouger et entreprendre une action, et sans même savoir laquelle, une voix féminine, une belle voix aux douces inflexions se fit entendre ; une voix avec un charmant petit accent indéfinissable, sortant de l’appareil par un système de com.

-Messieurs, dit la voix, je suis navrée de vous avoir surpris, pardonnez-moi voulez-vous car ce n’était pas du tout mon intention...Je suis le pilote de cet appareil et je vais sortir avec mon compagnon de vol pour faire votre connaissance...Rassurez-vous, nous venons en paix et ne sommes pas armés, à tout de suite.

Ils virent alors deux jambes descendrent lentement les marches...équipées d’une combinaison de camouflage quasiment comme les leurs, des bottes idem...puis enfin apparut en entier une jeune femme, de suite suivie par un homme jeune vêtu d’une combinaison semblable à celle de la fille. Ils leurs souriaient, montrant leurs mains vides tournées vers eux, puis arrivés sur l’herbe ils tournèrent lentement sur eux-mêmes pour montrer qu’ils n’étaient pas armés.

Ils avancèrent vers eux trois puis stoppèrent à trois mètres et la femme se présenta, souriante, puis présenta son compagnon, ils étaient calme et sûr d’eux, n’affichant aucune crainte, ce qui était essentiel et de bon signe.

Elle est moyennement grande, dans les vingt-cinq ans, 1.67 mètre plus ou moins, assez mince, mais plutôt le genre fausse maigre, justement comme Justin les aimait ; les cheveux et yeux noirs comme un corbeau, mais un beau corbeau, pensa-t-il en souriant.

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-Bonjour encore, messieurs, c’est un grand plaisir et honneur pour nous de pouvoir enfin vous connaître. Je m’appelle Elizabeth Marshall, mais appelez-moi tout simplement Elizabeth...et comme je vous l’ai déjà dit, je suis le pilote de ce chasseur, montrant l’appareil du pouce par-dessus son épaule, et voici mon copilote et ami, Irvin Arquette, c’est pareil, Irvin, suffira. Ce dernier mesurait bien dans les 1.80 et était plutôt costaud, cheveux chatains coupés courts, yeux foncés, ayant environ le même âge que sa compagne...Une belle gueule bien sympathique, pensa justin qui, fidèle à son caractère impétueux et spontané, jeta prestement la bretelle de sa carabine sur l’épaule et s’avança vers eux sans plus de forme, leur tendit la main, souriant, ils se donnèrent joyeusement une franche poignée de main.

-Je m’appelle Justin, ravis de vous voir aussi...car c’est plutôt rare de recevoir de la visite dans ce bled, surtout d’une belle poupée comme toi, dit-il à une Elizabeth qui fut franchement enchantée d’un tel accueil.

-Merci Justin, ton accueil me va droit au coeur, merci. Et tes compagnons, comment vous nommez-vous messieurs ? nous aurons plaisir à vous connaître.

Julien les présenta. -Allez, venez ici quoi, ils vont pas vous manger, merde ! Il tira Arnaud par la

manche...Celui-ci s’appelle Arnaud, leur dit-il, et voici Gautier, qui se décide à avancer, nous sommes trois dans cette pêcherie.

Tous se serrèrent la main, avec des sourires plus ou moins forcés de la part des deux autres, surtout de la part d’Arnaud, le grincheux, comme ils l’appellent affectueusement. Justin prit d’autorité les carabines des mains de ses deux compagnons et cala leurs trois armes contre la paroi rocheuse, il revint en souriant.

-Plus besoin d’armes maintenant, et tant mieux, dit-il souriant aux deux nouveaux arrivés, qui attendaient de voir l’air de rien comment les choses se décantaient.

C’est Arnaud qui passa de suite aux questions inévitables, c’était à prévoir, et à la surprise de Justin il lui parut moins bourru qu’à son habitude. Le charme de la poupée tombée du ciel semblait lui radoucir le caractère, mais il le connaissait bien le mignon, méfiant comme un renard, qu’il était aussi.

-Nous sommes aussi enchantés de vous connaître, Elizabeth et Irvin, leur dit Arnaud en les regardant tour à tour, mais...nous sommes pris d’une grande impatience de savoir, il compta sur ses doigts, 1- Qui êtes-vous ? 2- D’où venez-vous, 3- Que nous voulez-vous, 4- Pourquoi venez-vous visiter trois hommes isolés de tout ? 5- Pourquoi...

Irvin lui coupa la parole d’un geste de la main et dit en riant avec plaisir. -Arnaud...attends un peu, tu permets ? ces quatres premières questions vont

déjà éclaicir ces mystères, qu’ils sont encore pour vous trois, et c’est naturel. Je vais donc y répondre en quelques paroles qui vont tout résumer dans un premier instant et, je suis prêt à parier vos beaux cinq chevaux, que vous allez aimer ce que je vais vous dire et, à propos ; nous vous présentons nos excuses pour les avoir ainsi effrayés, les pauvres, je connais bien ces animaux et les aime aussi. Ainsi, écoutez bien, nous allons devenir des amis inséparables, je résume...

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Les trois pêcheurs le regardaient avec une intensité extraordinaire, leurs respirations subitement ralenties, oppressées, car ils sentaient dans leurs tripes qu’ils allaient apprendre des choses qui allaient avoir une répercussion immense pour eux tous, leurs communautés...

Irvin continua donc calmement. -Nous venons de très loin, nous sommes comme vous tous dans vos

nombreuses communautés, des descendants des survivants de 2015, nous sommes frères car nous avons un ennemi commun que nous voulons aussi détruire. Nous avons des centaines de ces appareils, dont nous allons vous équiper et apprendre le pilotage, pour un jour prochain maintenant, tous ensemble et unis dans le même objectif, tuer jusqu’au dernier ces ignobles et infâmes pourritures de Zanko-Khuigs !

Les trois pêcheurs restaient paralysés, les regardaient tous les deux comme sans les voir...puis, Justin se réveilla et prit Irvin dans ses bras pour danser une gigue endiablée. Gautier les stoppa par le bras, puis déclara à ces deux étranges visiteurs.

-Je voudrais tellement que tout ceci soit bien réel mais, qui nous prouve que tout cela est vrai ? pouvez-vous nous donnez une quelconque preuve de véracité et que vos intentions sont honnêtes ?

-Gautier, lui dit Elizabeth, je comprends très bien ton doute et tu as parfaitement raison, je ferais certainement de même...des preuves ? voyons, elle réfléchit un instant, vous devez vous souvenir qu’il y a quelques années de ça, deux de vos hommes de votre communauté de Bertrand, comme vous l’appelez.

-Parce que vous connaissez notre communauté aussi ? demanda Gautier, surpris.

-Oui, nous en connaissons beaucoup d’autres, peut-être pas toutes mais...Ainsi, ces deux hommes faisaient parti d’un convoi de récupération dans la ville de Toulouse et, ils ont vu accidentellement un de nos appareil et l’un d’eux à voulu tirer dessus, mais le chasseur avait disparu en un éclair. Ils ont certainement dû vous raconter cette incroyable aventure, non ?

Ils hochèrent la tête tous les trois en silence, médusés et heureux de découvrir enfin la cause de cet événement ancien qui les avait beaucoup inquiété, c’est un euphémisme.

-C’était le premier équipage de chasseur qui venait voir s’il y avait des survivants dans cette région, continua Irvin et...quand ils revinrent et nous racontèrent ces nombreuses communautés qu’ils trouvèrent alors, les vôtres, nous fûmes tous fous de joie et nous commençâmes alors avec ardeur la fabrication de centaines de ces appareils pour pouvoir équiper toutes vos communautés. Cela nous à pris toutes ces années, à travailler nuit et jour et, nous en avons amenés ici des centaines, en pièces détachées. Ils sont stockés au nord de la ville de Toulouse ; dans les anciennes usines de construction d’avions de Blagnac...avec des dizaines de nos gars qui commencent déjà à les assembler.

Ces appareils vous attendent, nous ne sommes pas seuls, une flotille de plus de dix de ces chasseurs et des plus gros, des transporteurs, qui ont amené ici tous ces matériels pour vous tous sur ces territoires et, nous continuons d’en

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fabriquer sans arrêt, pour le jour du combat final...Si vous le voulez, je puis vous montrer à l’instant la vidéo de cette rencontre historique entre notre chasseur et vos deux hommes...Ils se firent tous peur mutuellement en même temps, par la surprise générale. Voulez-vous en voir un passage ?

Ils acquiescèrent et montèrent à bord, découvrant cet étrange engin. Le jour s’étant levé tout à fait, Irvin baissa les volets occultant les hublots et

éteignit l’éclairage intérieur ; Elizabeth alla directement à son poste de pilotage, s’assit et prit un minuscule disk-mémoire dans un tiroir frontal de la console puis l’inserra dans le lecteur ; elle fit avancer la vidéo en accéléré jusqu’au moment où ils purent effectivement voir sur un large écran ; ils virent la scène filmée depuis le chasseur débouchant en haut de cette fameuse rue de Toulouse. Puis quand l’équipage aperçut leurs deux charretiers dans le bas de la rue, leurs collègues et amis qu’ils reconnurent de suite, c’était bien Roger et Germain ; ils assistèrent ainsi à cette incroyable rencontre jusqu’à la fin ; jusqu’au coup de carabine tiré par Germain et la mystérieuse disparition de l’appareil. C’est avec un grand soulagement qu’ils furent convaincus de la justesse de leurs assertions. Il n’y avait dès lors plus lieu de mettre leurs paroles en doute, à leur grand soulagement...

-Vous savez, leur dit Irvin, si nous voulions, du fait d’être quasiment invisible, nous aurions pu faire n’importe quoi sans que vous n’y compreniez rien du tout.

-Vendu, lui dit Arnaud en lui tendant la main en souriant, bienvenu à Bertrand et de partout, mais tu ne nous a toujours pas dit d’où vous venez , et comment vous disposez de ces engins remarquabless, et pourquoi vous...

-Et si nous allions en parler avec tous vos compagnons de Bertrand, non ? le coupa Elizabeth en souriant, ça éviterait de nous répéter inutilement...Vous pouvez laisser vos chevaux quelques heures seuls, ils ont à boire et à manger, alors ? un coup de chasseur et nous y sommes dans six minutes, et vous serez les premiers hommes à voler de toute l’Europe.

-L’Euromorte tu veux dire ! lui répliqua sèchement Gautier. Irvin le regarda, hésita un instant. -J’imagine que oui, dit-il surpris. Vous avez aussi changé le nom de votre

ancien pays ? -De tous, oui, nous ne voulons plus avoir aucune référence avec le monde

mort et tous ces salopards, ces minables qui l’habitaient alors, dit-il avec force ; qu’ils soient tous mille fois maudits et pourissent pour l’éternité !

Les deux visiteurs échangèrent un bref regard... -Alors, nos nouveaux amis, me faites-vous le plaisir et l’honneur de vous

piloter jusque chez vous ? leur dit, gracieusement Elizabeth, nous y serons dans tout juste six petites minutes, et vous allez avoir le privilège de découvrir votre monde vu du ciel et, croyez-moi sur parole, il est magnifique, cette région de montagnes est vraiment de toute beauté.

-Et dire qu’à nous il nous faut plus de deux heures de sentiers dangereux, dit Justin rêveur, c’est beau le progrès, dit-il en poussant un profond soupir puis, se tournant vers ses deux compagnons, il s’écria : alors, que vous faut-il de plus pour vous décider, hein ? pour mon compte on peut y aller tout de suite, ma

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poulette, dit-il à Elizabeth, en lui donnant une grande claque sur les fesses, à la grande et joyeuse surprise de celle-ci...

Puis il leur fit signe d’attendre, sauta par la porte ouverte sur l’herbe et couru vers la cagna pour faire ressortir les chevaux qui s’étaient calmés, puis ferma les deux portes et les rejoignit aussitôt en prenant au passage leurs carabines, en prenant soin d’en vérouiller leurs sécurités. Il monta les quatre marches en deux enjambées, jeta les armes sur une rangée de sièges et s’écria tout excité.

-Nous pouvons partir maintenant, pilote ! dit-il, en allant vers elle à l’avant et lui appliquant d’autorité deux bises sonores sur les deux joues ; je meurs d’envie de voir ce paradis vu du ciel, en route !

Ils décolèrent et chacun collé contre un hublot, ce fut une stupéfaction totale de découvrir ainsi leur territoire. Ce fut Arnaud, même, qui demanda à Elizabeth de ralentir la vitesse pour mieux s’approprier cette vision fantastique qui défilait dès lors doucement sous eux. Arrivé à un kilomètre de la station, Elizabeth stoppa le chasseur sur place, à quelques cinquante mètres d’altitude, à la surprise des passagers...aucun son n’était perceptible, cet engin évoluait sans recours apparent à une force motrice.

-Comment fonctionne ce chasseur ? demanda Gautier à Irvin. -C’est une technique révolutionnaire, un moteur antigravitique...mais nous

vous expliquerons bien mieux tout cela avec vos compagnons réunis, ok ? Nous avons stoppé car vous devez vous en doutez certainement ; il faut mettre au point une tactique d’approche de votre station, sinon, si nous arrivons ainsi directement, il y a de grande chance que nous soyons tués par le premier qui nous verra d’entre vos collègue, non ?

-Oui, tu as entièrement raison, lui rétorqua Arnaud, en souriant...et ça prouve que vous nous connaissez bien, car nous sommes plutôt du genre chatouilleux dans notre ensemble, et nous n’aimons guère les surprises...incompréhensibles surtout, et ce chasseur brumeux se pose plutôt là, question incompréhension.

-Très juste, répondit le pilote, et...nous connaissons bien votre méfiance face à l’inconnu, et vous avez entièrement raison d’agir ainsi ; donc, voilà ce que je vous propose, et dites-moi en toute franchise si vous êtes d’accord, j’insiste là-dessus. Je poserai le chasseur derrière ce petit bois près de la grotte, ainsi caché, à quatre cents mètres de l’entrée, vous irez prévenir les responsables de la communauté en premier...Vous organisez notre entrevue, et quand ils seront tous prêt pour ce grand Conseil, l’un d’entre vous trois n’aura qu’à sortir sur le devant de la grotte et faire un signe en l’air, le pouce levé ; nous vous verrons car le chasseur sera en l’air, au-dessus...

Ah, j’allais oublier, possédez-vous une source d’énergie électrique, et si oui, est-elle puissante ? C’est pour vous montrer des vidéos et documents divers ; avez-vous un grand écran vidéo ?

-Oui, nous avons l’électricité, répondit Gautier, comme toutes nos grottes et depuis les débuts même, mais pour la puissance je ne sais trop quoi répondre, ça me semble plutôt limité, quoique je ne comprenne rien à ces choses-là ; pour les reste, nous avons un écran moyen, oui, et pour la stratégie d’approche, pour moi c’est ok. Mais...il vous faudra être patient, car on va semer la révolution dans la

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ruche ; ils vont être tous fous, et pour les calmer ça va pas être de la tarte...ça non, il regarda ses compagnons qui hochèrent le tête.

-Très bien, rajouta Elizabeth, nous amènerons un source d’énergie électrique que nous installerons à la place de la vôtre et dont nous vous ferons cadeau, ainsi ne vous inquiétez pas en nous voyant débarquer avec du matériel un peu volumineux, d’accord ?

-Qu’est-ce qu’on peut perdre comme temps en parlotes, dit Justin, c’est pas comme ça que nous allons gagner la guerre ! Alors, pilote, qu’est-ce que t’attends, ma belle, hein ? lui dit-il avec son sourire le plus charmant.

Révolution est un euphémisme. La fameuse ruche entra dans un délire total, la nouvelle se répandit comme une traînée de poudre et tous voulaient voir ces extraterrestres, maintenant et tout de suite, sans perdre le temps de respirer même, et ce fut un travail sans nom pour rétablir un calme acceptable. Il fut alors convenu que la réception de ces étrangers aurait lieu dans l’Agora, la plus vaste salle de la grotte, qui fut de suite envahie, prise littéralement d’assaut par une foule compacte et excitée...

Durant ce temps, à l’extèrieur, une nombreuse équipe de gars installaient en courant sur le chemin d’accès, reliant l’entrée de la grotte à la plate-forme de déchargement des chariots, leur classique tonnelle de protection antisatellite.

Tout fut enfin prêt. Accompagnés de curieux et du Conseil des sages au grand complet, restant à l’abri de la tonnelle, les trois pêcheurs s’avancèrent de deux pas à découvert et Justin fit le signe du pouce en regardant vers le haut...La petite foule réunie était d’une immobilité et tension dense et palpable puis, ils réalisèrent d’un coup qu’une masse brumeuse se trouvait tout à coup devant eux, à trois mètres, sur le terre-plein. Une porte s’abaissa lentement et apparut à tous ce couple d’étrangers ; les deux s’inclinèrent respectueusement devant cet aréopage de personnes âgées qui se tenaient droites, dignes et fières pour les recevoir.

Constantin, le sage des sages d’alors, fit un pas vers eux et leur souhaita chaleureusement la bienvenue. C’est un homme assez grand et un peu fort de corpulence, les cheveux presque entièrement blancs, imberbe, avec des yeux bleus clairs qui exprime une grande bonté.

-Mes amis, Elizabeth et Irvin, puisque tels sont vos noms, je me nomme Constantin, et suis chargé, avec un immense honneur et plaisir, et aux noms de tous, de vous souhaiter la bienvenue parmi nous. Nos frères ici présent, dit-il en montrant d’un geste les trois pêcheurs, nous ont raconté votre surprenante rencontre, ainsi, et sans plus de forme, ni attente ni perte de temps, et avant que le reste de notre communauté qui vous attend à l’intérieur ne devienne folle pour de bon, je vous invite de suite à entrer afin que nous faisions tous ensemble totale connaissance, il s’écarta et les invita d’un geste à le suivre.

Elizabeth et Irvin s’avancèrent et lui tendirent leur mains, ils se saluèrent ; la pilote lui dit, en regardant toutes les personnes de cette assemblée.

-Constantin, je tiens beaucoup à vous remercier de cet accueil chaleureux qui nous va droit au coeur à tous deux, regardant et souriant brièvement à Irvin ; nous allons entrer avec d’autant plus de plaisir et fierté que notre communauté

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toute entière travaille d’arrache-pied depuis des très longues années à la concrétisation de cet instant présent et sacré...pour nous tous.

Une voix se fit entendre, railleuse, celle de Justin. -Et nous voilà repartis dans les parlotes ! -Justin à raison, dit le pilote en riant et faisant un clin d’oeil à ce dernier, allons

tous vite rejoindre vos compagnons mais, juste un petit instant, nous déchargeons un colis pour installer rapidement une nouvelle source d’énergie électrique, qui sera notre cadeau de bienvenue, nous vous la laisserons et...il y en aura d’autres, beaucoup d’autres pour toutes vos nombreuses communautés. Vous allez découvrir une merveille technologique qui va véritablement bouleverser harmonieusement vos existences.

Durant ces paroles, Irvin était remonté à bord de leur appareil, il redescendit lentement à reculons et, les spectateurs n’en croyaient pas leurs yeux. Il tenait une barre transversale fixée en travers sur le haut d’un gros colis ; des marchandises inconnues posées sur la surface d’un simple plateau épais d’une vingtaine de centimètres...et l’ensemble flottait dans l’air, la base à quelques trente centimètres du sol, se mouvant en tous sens suivait les mouvements de la main qui visiblement le guidait sans aucun effort.

Le plateau d’approximativement deux mètres de long sur un mètre trente de large, avec un panneau frontal à un bout portant la barre de commande, qui resta là, la barre à hauteur de la taille d’Irvin, il la tenait négligemment ; il poussa légèrement celle-ci et le plateau avança sans effort aucun...il le ramena devant lui de cette même façon désarmante et, il les regardait en souriant...

-Voyez, mes amis, leur dit-il, une première merveille que nous vous amenons, ce chariot fonctionne sur le principe de l’antigravité, exactement comme notre appareil, notre chasseur.

Constantin s’avança, la main tendue. -Je peux ? Irvin lui donna la barre, le colis suivant le mouvement ; Constantin en était

stupéfait. -Mes amis, dit ce dernier, je réclame l’honneur et le privilège d’entrer chez

nous en poussant ce fabuleux appareil, chose qui fut décidée dans le rire général. -Constantin, lui dit Irvin, pour changer l’altitude de ce chariot, il suffit de serrer

un peu plus fort cette barre de commande, puis relâcher la pression quand le chariot est à la hauteur désirée, à laquelle il y restera, d’accord ? Constantin fit un essai en suivant ces conseils et tous virent stupéfaits le plateau lourdement chargé s’élever et s’abaisser sans aucun effort, pour la plus grande fierté de Constantin.

-Il faudrait, rajouta Irvin, que vous préveniez, à moins qu’il ne soit ici, le responsable du système d’éclairage de la station, pour installer ces modules, montrant trois gros cubes sur le chariot ; qu’il nous rejoigne au tableau central de vos installations.

Constantin regarda autour de lui les personnes de l’assemblée puis, il avisa une jeune fille d’une quinzaine d’années, il alla vers elle et lui dit.

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-Louhana, va s’il te plaît, va dire à Félix qu’on a de suite besoin de lui à son tableau électrique, merci chérie.

La jeune fille lui sourit puis partit en courant. Le pilote sortit alors un petit boîtier de sa poche, ce dernier comportait un

petit clavier avec des touches à numéros. Elle posa son pouce sur une petite surface dégagée adéquate puis, en même temps elle approcha l’appareil devant son oeil droit, à quelques dix centimètres, et attendit deux secondes, un faible ‘bip’ se fit entendre, elle abaissa le boîtier et tapa un code à une incroyable vitesse et, aussitôt, la porte du chasseur se referma et ce dernier décolla et, tous le perdirent de vue dans le ciel.

Restait-il près ? Loin ? Personne ne pouvait donner de réponse. -Excusez-nous, dit Elizabeth, souriante, mais nous ne pouvions laisser cet

appareil ici au milieu, si quelqu’un venait a l’improvite il aurait pu se cogner dessus. Il nous suffit de le rappeler avec ce boîtier, Irvin ou moi...Nous seuls pouvons le faire, dit-elle avec un charmant sourire, nos données biométriques y sont seules habilitées.

Beaucoup d’entre eux n’avaient pas la moindre idée de ce que pouvait bien signifier « données bio-machin-truc-mes choses », mais ce qui était certain, et qu’ils appréciaient beaucoup, c’est que ces deux-là n’étaient pas tombés de la dernière pluie, car absolument personne ne pourrait leur piquer leur foutu chasseur !

Avec l’aide de Félix ils avaient rapidement et provisoirement branchés trois Centrale FMS de 10 kw chacune, module qui était le standard habitationnel ; il suffisait d’acccoupler ces modules à la demande ; de quoi certainement, et de reste, avec 30 kw illuminer toute la grotte avec des spots halogènes...Ils allumèrent toutes les lampes en même temps dans toute la grotte, ce qui n’était jamais arrivé jusqu’à ce jour par faute de puissance disponible...

Ils repartirent vers la salle où les attendaient la foule qu’ils entendaient gronder au fur et à mesure qu’ils en approchaient, encore plus quand la grotte fut entièrement illuminée comme un grand jour de fête...Un silence brutal s’établit intantanément parmi cette foule de milliers de personnes, dès qu’ils virent, ahuris, leur ancien, Constantin, poussant et pas peu fier, un gros colis qui flottait en l’air devant lui et qu’il manoeuvrait, exprès et en tous sens, avec un sourire et une aisance insultante au sens commun le plus élémentaire.

Quand le couple d’étrangers apparut, il y eu un instant de flottement puis, les applaudissement crépitèrent en rafales successives, dans les cris, les sifflets, les rires et la joie...Il fallut attendre, impuissant, qu’ils se calment, vaincus par la fatigue et l’émotion. Durant ce temps, les douze sages présents ainsi que la visiteuse étaient montés sur un petit podium central. Le chariot antigravitique dont Irvin avait repris la commande pour cette manoeuvre, l’ayant suivi sans aucun effort, à la plus complète stupéfaction de l’assemblée. Celui-ci, resté en bas devant l’estrade, avait auparavant rapidement pris un paquet sur le chariot et installé deux caméras sur deux trépieds, l’un plus haut que l’autre.

Le plus haut équipé d’une caméra devant tourner sans arrêt pour enregistrer la foule, l’autre caméra tournée vers la tribune pour enregistrer cette conférence mémorable, et pouvoir par la suite la faire voir à tous les autres communautés.

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C’était un instant solennel, unique dans l’histoire naissante de ce jeune Monde ; puis, Irvin les rejoignit rapidement sur le podium, avec le chariot le suivant comme une plume.

Ce fut bien entendu Constantin qui prit la parole, de toute façon personne n’aurait pu l’en empêcher tellement sa joie était grande. Il s’avança vers un micro sur trépied et attaqua cette fameuse présentation que chacun se remémora longtemps, la repassant et la repassant inlassablement sur leurs consoles vidéo, le soir avant de s’endormir...

-Mes amis...je vous demande de ne plus applaudir toutes les cinq minutes car sinon nous y serons encore demain, je compte sur vous ! Un murmure lui répondit. J’ai l’honneur et l’immense plaisir et privilège de vous présenter ces deux anges d’espérances folles tombés du ciel, les désignant d’un geste large ; voici, Elizabeth, cette charmante jeune femme est le pilote, et son compagnon et ami, Irvin, qui est le copilote. Je leur donne le micro pour qu’ils se présentent mieux eux-mêmes.

Il se tourna alors vers ses collègues de l’aréopage et leur dit en faisant une grimace.

-Voyez, j’ai été bref, non ? Bande de jaloux ! Tout le monde rit de bon coeur à cette sortie inusitée.. Elizabeth s’avança vers le micro. Pendant ce temps, Irvin déballait des paquets

sur le chariot, il en tira et déploya successivement deux grands écrans qu’il déploya en longueur, mais restant toujours roulés. Il sortit deux petits blocs, deux sortes de gros pavés oblongs. Il en fixa un sur le centre de la tranche de la feuille d’un écran, celui-ci y adhéra comme par magie ; il prit ensuite un petit boîtier de télécommande dans sa poche, le braqua vers l’ensemble ainsi constitué : écran plus bloc. Il appuya alors sur un bouton qu’il teint enfoncé et le bloc s’éleva lentement en l’air comme par magie, le haut jusqu’à une hauteur de douze mètres environ, la feuille de l’écran papier se déroulant en dessous.

Un murmure de surprise parcouru la foule. Il orienta l’écran en tournant le boitier, la feuille faisait quatre mètres cinquante de hauteur puis, il renouvela la même opération avec un deuxième écran...l’amenant par le même procédé en dessous du précédent ensemble ; il le fit tourner de sorte qu’il soit positionné en croix par rapport à l’autre, les deux offrant ainsi une vue sur 360 º ; tous les spectateurs ayant une vision àdéquate des vidéos que les deux visiteurs allaient visiblement leurs présenter. Installation terminée, il vint prévenir le pilote qu’elle pouvait y aller de sa conférence.

-En ce jour béni de ce début d’été de ce mardi 11 juin de l’an 2357, dit-elle, qui est le témoin de cette rencontre historique entre nos deux communautés soeurs ; nous vous saluons tous deux du fond du coeur, dit-elle, et vous transmettons le bonjour et amitiés de tous les nôtres qui sont restés à notre base. Ils y sont des milliers, comme vous le savez sans doute déjà, grâce à nos amis, ces trois pêcheurs, Justin, Arnaud et Gautier, à qui nous demandons sincèrement pardon pour les avoir involontairement effrayés. Nous sommes comme vous tous, dans vos nombreuses communautés : des descendants directs

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des survivants de 2015, victimes nous aussi de ces pourritures, charognes encore vivantes de Zanko-Khuigs, que nous al...

Elle n’alla pas plus loin car la foule l’applaudit à tout rompre un long moment, puis elle reprit, heureuse de voir une telle passion pour l’anéantissement de ces salauds ; elle continua.

-Oui, vous avez raison d’applaudir, car nous allons tous ensemble les rayer de la surface de notre Terre bénie !

Re-tonnerre d’applaudissements. Constantin s’approcha d’elle et se penchant légèrement vers le micro, en lui entourant les épaules de son bras droit, il lui dit, noble et serein, lui souriant, ému même.

-Elizabeth, ma belle enfant sacrée, nous tous, dans nos contrées...nous aimons aussi beaucoup notre planète, et nous la nommons Gaïa...C’est un nom ancien, très ancien et qui remonte à des millénaires avant la propre existence maudite et éternellement en enfer de ces dégénérés morts avec leur monde. Ce sont les Grecs, un de ces peuple anciens, en partie nos civilisateurs qui nous léguèrent notre civilisation à nous tous, vous tous y compris.

Nous sommes les enfants de cette riche et glorieuse civilisation indo-européenne ; les enfants de ces géants nordiques qui du septentrion propagèrent leur noble culture et spiritualité exempte de crainte et soumission, jusqu’à ce qu’ils succombent, traîtreusement trompés par certains des leurs qui firent entrer cette lèpre des sables, cette religion glauque et fanatique ne respectant rien de la vie des autres. Ils furent vaincus, victimes de leur altruisme exagéré, passant outre, et ce fut fatal à leurs valeurs millénaires de générosité envers les leurs, donnant la même confiance aux peuplades barbares qu’aux leurs, ce qui les tua.

Aucun peuple, aucune ethnie ne peut survivre sans pratiquer ces deux attitudes essentielle qui sont : l’amour inconditionnel des siens, de sa tribu, peuple ou nation, et conserver une volonté inflexible de rejeter dans la pire des violences s’il le faut, et sans attendre, tout danger allogène menaçant, car contraire à sa propre culture et moeurs. L’antique Rome, cet empire glorieux ayant pour racine la même origine indo-grecque, et qui régna sur le monde durant des siècles et lui apporta une nouvelle civilisation dont nous sommes les héritiers directs ; empire qui fut insidieusement submergé par leurs anciens esclaves.

Idem du dernier monde disparu, ils furent submergés par cette infame lèpre venant des sables qui ne produisirent le long des siècles que le fanatisme le plus abject, la mort et l’esclavage des plus faibles et, moeurs monstrueuses : la négation de leurs Femmes, leur mutilations crapuleuses de l’excision, dont elles furent victimes. L’éternelle Femme soumise encore à la folie criminelle de ces hommes dénaturés par les religions ; tous haineux de cet Être de lumière que fut toujours la Femme dans les millénaires antérieurs des notres, où elle fut toujours celle qui donne à l’Homme, la lumière, l’entendement et la raison du coeur...

Ces ordures, hommes déchus, ne pouvaient supporter longtemps de vivre sous l’influence de cet Être plus sain et généreux mais physiquement plus fraible que lui, ce bâtard infâme que fut dès lors l’homme, jusqu’à ce qu’il sombre après des millénaires de malheur pour tous...Grandeur et décadence, et toujours les

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éternels coupables, les politiques et sacerdoces aveugles et traîtres à leur propre sang. Il faut garder intact nos valeurs sacrées retrouvées, détruire dans l’oeuf et par les armes, toute tentative de la moindre idée subversive à notre idéal de civilisation nouvelle et qui sera grandiose...

Nous, Hommes d’aujourd’hui, portons envers nos compagnes un amour immense et inconditionnel. Elles, ces Femmes, sont nos amantes, nos soeurs et nos mères et sont aussi notre Gaïa retrouvée...Gaïa, ce nom d’une douceur approprié, entre en harmonie céleste avec notre nouvelle civilisation basée intégralement sur l’amour total pour ses frères et soeurs, et la mort la plus violente et sans condition pour tous nos ennemis...Gaïa...chacun de nous répète ce nom divin qui nous procure un bonheur sans pareil...Gaïa, la divinité personnifiant la Terre mère sacrée qui, unie à Ouranos, le dieu du ciel, elle donna alors naissance aux Titans, aux Cyclopes et aux monstres marins...

Nous sommes dès lors ces géants et nous nous réclamons être dignes de cet héritage sacré et avons tous fait le serment de redonner à notre mère à tous, notre Gaïa, sa place dans la splendeur des espaces stellaires, Gaïa, la beauté sidérale du Cosmos entier, sa place d’honneur dans ce théâtre fabuleux de ces immensités cosmiques.

Elizabeth, profondément émue par ces paroles sacrées, se rendit vite compte qu’à chaque fois qu’il prononçait, citait ce nom de Gaïa, la foule le reprenait à voix basse...Une sourde et profonde litanie résonnait intensément sous cette voute illuminée et irréelle de beauté millénaire...Elle en fut suffoquée et elle sentit alors irrésistiblement monter du plus profond de son Être, une résonance étrange entrant en harmonie avec ce doux nom répété dans cette sourde et intense litanie et, vaincue par une incompréhensible et irrésistible émotion qui s’abattit alors sur elle, la foudroya...elle s’éffronda en longs sanglots silencieux sur l’épaule de ce grand vieillard digne et solennel qui la berçait lentement contre lui...

Elle, la guerrière froide et déterminée, fut anéantie en quelques secondes par quelques paroles d’amour de ce vieillard paisible qui lui essuyait ses pleurs avec sa pochette, un linge fin d’une blancheur immaculée parfumé au chevrefeuille et une pointe de citron vert, venant d’Espingo, leurs frères du sud.

Elle se reprit, réussissant péniblement à articuler. -Constantin, pardon, je suis confuse, pardonnez-moi de m’être laissée allé

ainsi...c’est stupide, je ne sais pourquoi... -Non, mon enfant, lui dit Constantin, en lui baisant le front, au contraire, c’est

nous tous qui te remercions de ta sensibilité spontanée qui nous prouve ainsi que tu es un Être Humain pleine et entière et ainsi digne, capable de peupler cette planète qui est pour nous tous notre seul et unique vecteur spatial. Nous aurons surtout besoin de ceux qui sont capables de pleurer, car cela montre qu’ils ont une âme...seule et unique différence entre nous et les animaux.

Pui il lui tendit ses bras ouverts, lui disant. -Bienvenue au royaume des Hommes et des Femmes de coeur, Elizabeth, que

l’amour te protège éternellement.

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Puis il tendit un bras vers Irvin qui, derrière, était aussi sous l’emprise d’une terrible émotion. Constantin entre eux deux leur posa ses bras sur leurs épaules.

-Irvin, mon fils sacré aussi, je vois également avec plaisir qu’une grande émotion t’étreint, tu es digne aussi de notre nouvelle Humanité et, j’imagine que si vos compagnons vous ont choisi pour cette mission, c’est qu’ils sont certaine- ment dans le même état d’esprit, je me trompe ?

Tous deux hochèrent la têtes. -Je déclare donc en cet instant solennel, que nos deux peuples sont dès lors

unis pour le meilleur et pour le pire, dignes de lutter ensembles pour la gloire céleste de Gaïa ; étant entendu, comme nos lois le proclament, que celui qui le refuse pourra l’annoncer haut et fort, car tel est son droit sacré. Y en a-t-il un seul parmi vous qui refuse cette union ? dit-il s’adressant à la foule.

Un léger murmure répondit à la question...Constantin reprit. -Ainsi donc, et je n’en doutais pas un instant, l’union de nos deux peuples

frères est approuvé à la majorité absolue. Mes enfants, je vous demande une unique faveur, que vous m’embrassiez tous les deux. Ce qu’ils firent, sous une formidable ovation de cette terrible foule...

-Constantin, lui dit un Irvin fort ému, je...je réalise brusquement, et je pense que ma compagne ressent la même chose, que notre communauté qui s’est depuis des siècles entièrement vouée à la recherche et création technologique, a peut-être ainsi, inconsciemment faut dire, négligé, un peu oublié ce côté essentiel de la vie, cet amour que nous pratiquons aussi, mais jamais avec une telle force que vous tous.

Et ce nom, Gaïa...je ne sais pourquoi, alors que je l’ignorais, a baigné de suite mon âme d’une étrange douceur jusqu’alors inconnue. J’en viens à reconnaître que de par nos origines, une base de recherche scientifique...notre voie spirituelle était parcellaire et bien trop fixée sur le matériel, alors que vous, qui avez dû remonter péniblement des enfers, vous avez su, du fond de vos malheurs, retrouver cette noblesse d’âme, redonner à tous ce sentiment unique et pourtant immortel de l’amour.

Ce grand amour qui doit régner sur ce Monde neuf, pour que ce dernier soit un Monde où l’Homme y soit heureux. Seuls ces sentiments peuvent donner cette plénitude aux Humains, j’en suis certain maintenant que je vous connais, vous seuls avez raison. Notre matérialisme sec, qui a du bon aussi, tempéré, influencé par votre spiritualité qui va peu à peu le baigner totalement, car chez nous aussi, nos soeurs sont nos égales intégrales, rien ne nous sépare, va créer une Humanité grandiose, seule digne, comme tu dis Constantin, de peupler Gaïa. Ce nom, j’en fais serment, va être adopté par toutes nos communautés, à commencer par ces Hommes et Femmes qui nous ont donné ces armes de notre reconquête, et que voici.

Il se tourna vers les écrans planant sur l’estrade, enclencha une commande et apparu aux yeux de tous, la vue aérienne d’un paysage...Belle campagne valonnée et ensoleillée, montrant des champs de coton, des champs de maïs...

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-Voici, mes amis, d’où nous venons...cette magnifique campagne est dans le sud des Appalaches, dans l’ancien Etat d’Alabama...ce dernier est au sud des territoires anciennement appelés alors...il s’écria, les Etats-Unis d’Amérique !

Un grondement immense parcouru l’assistance, comme un souffle de mort... -Oui, nous sommes aussi les descendants de gens qui furent, comme vos

anciens, condamnés par ces ordures de Zanko-Khuigs, et que nous allons détruire grâce à ces technologies que nous devons uniquement à nos chercheurs scientifiques, car sans eux et leur dévouement inconditionnel nous serions tous condamnés à continuer de croupir dans nos refuges naturels, comme cette magnifique grotte. La grande majorité de nos gens, une bonne quarantaine de milliers de guerriers et guerrières y vivent toujours comme vous tous le firent depuis ces siècles de survivance héroïque.

Un applaudissement nourri lui répondit, passé cet instant de stupeur en apprenant l’origine de leurs deux visiteurs. Volte-face digne de gens qui comprennent vite et ont un grand pouvoir d’adaptation, un des principaux et non des moindres, critère de survie.

-Maintenant, veuillez découvrir ces héros anonymes à qui nous devrons un jour notre victoire ; ils sont dans une ancienne base secrête de recherche scientifique militaire, située à 78 mètres sous terre.

Irvin régla son boîtier et sur les deux écrans géants apparu la vue s’approchant d’une belle ferme à flanc de colline...un grand hangar ouvert en grand...une pile de foin dans le fond une énorme porte s’ouvrant dans cette dernière, dévoilant un grand espace. La caméra entra, attendit un moment puis ressortit, empruntant des couloirs fortement éclairés...La vue croisait des enfants criants et souriants...des hommes et femmes jeunes en combinaisons de combat, comme les leurs ; ils souriaient, faisaient un bonjour de la main en passant...

Puis la vision déboucha brusquement dans une immense salle, et ils découvrirent une foule très nombreuse de personnes habillées de blouses blanches, des militaires apparemment étaient avec eux, tous visiblement unis en un ensemble harmonieux d’amitiés réciproques...Tous ces gens souriaient à la caméra, saluaient de la main, puis la vision changea brusquement et ils se retrouvèrent dans un immense local où des hommes et des femmes travaillaient à construire d’étranges appareils de couleur noire, en forme de caisse carrée et allongée, un avant prismatique transparent agrémentant un des bouts de ces choses laides.

-Voici les ateliers, reprit Irvin, comme vous l’aviez compris de vous-même, ateliers où sont construits nos chasseurs, que vous découvrez en cette occasion. Voyez qu’ils ne sont pas très beaux extèrieurement, n’est-ce pas ? mais on leur demande pour l’occassion d’être uniquement efficaces, la beauté viendra plus tard, après la reconquête, car tout ce que nous construirons alors devra l’être en fonction de cet unique paradigme, la beauté et l’efficacité, joints en un ensemble harmonieux. Notre Monde, mes amis, sera la merveille de l’univers, c’est le serment que nous fîmes tous. La vue avança dans ces ateliers gigantesques où des centaines d’hommes et de femmes travaillaient avec ardeur, saluant un instant au passage de la caméra.

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-Ils savent tous que ce tournage vidéo est fait dans cette intention de vous être présenté. Ils tenaient tous à paraître et vous saluer, même pour un court instant pour ce moment solennel de maintenant ; comme les caméras que j’ai installé en bas enregistrent ce moment...pour qu’ils découvrent eux aussi et plus tard, les visages de leurs frères et soeurs de cette Euro...il hésita une seconde, cette Euromorte pour laquelle ils travaillent si dur depuis de nombreuses années.

La vue quitta la base et montra des vues aériennes de grandes villes célèbres à l’époque, New-York, Los Angeles, Chicago, Dallas, Washington...Toutes étaient visiblement à l’abandon total depuis longtemps, montrant les mêmes états de désolations que les ville de chez eux, ici en Franki et partout ailleurs dans ce monde de ruines horribles le défigurant

-Vous voyez par les vues de ces villes abandonnées que le monde entier sans exception fut victime de la folie des cartels, que vous nommez de Zanko-Khuigs ; sauf en Australie, où ils se réfugièrent avant l’attaque du reste du monde. Maintenant, mes amis...regardez bien ces vues qui vont suivre, elles furent prises chez nous aussi, ainsi que sur des îles d’une région au sud de nos territoires et que l’on nomme la mer des Caraïbes. Mais commençons par une ville du continent.

La vue montra une vision de nuit, une immense, intense et extraordinaire flaque de lumière qui illumina la grotte.

-Je vous présente...un des repaires des Zanko-Khuigs, la ville de Las Vegas ! Plus que jamais alors la dernière Sodome et Gomorrhe ; dernière car nous allons la détruire avec leurs immondes habitants actuels.

Un sourd et intense grondement surgit de cette foule fascinée par cette première et réelle vision de leurs ennemis...

-Voici la même ville vue de jour...vue de très haut, on n’en voit pas les détails car nous n’avons pas voulu prendre de risques inconsidérés pour ce tournage...mais voyez que l’ennemi existe bien...Voici d’autres lieux chez nous...La vision montra pareillement de jour et de nuits, des îles des Caraïbes, la péninsule de la Floride...Miami, etc. Les écrans s’éteignirent.

-Nous vous expliquerons plus en détails et plus tard, avec vos stratèges, les stratégies d’attaques que nous avons retenu, attendant également vos avis, cela va de soi, car à partir de cet instant sacré nous ne formons qu’un seul et unique peuple uni dans un seul idéal : la reconquête de notre planète !

La foule l’applaudit bruyamment. -Quoiqu’il faut que vous sachiez dès maintenant que nous ne sommes pas

encore prêt pour passer à l’attaque, il nous manque une arme essentielle pour cela...nos savants y travaillent nuit et jour. Il faudra rester patient encore, mais la réalisation de cette déterminante et indispensable arme est en bonne voie, nous ont-ils affirmé avant de partir. Mais un long travail vous attend aussi, ne serait-ce que pour apprendre à piloter et savoir chasser pour détecter, sauver les esprits sains des esclaves dans ces infâmes camps de travail.

Vous découvrirez alors un appareil fabuleux qui détecte les seuls esprits libres parmi une troupe d’esclave, ce qui facilite grandement leur récupération. Je

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passe maintenant le micro à mon amie, Elizabeth, qui va vous expliquer tout cela au mieux, je vous remercie de votre précieuse attention.

La foule l’applaudit chaleureusement pendant que le pilote s’avançait vers le micro.

-Mes très chers et inestimables...frères et soeurs, somme-nous désormais ; pour donner suite à ce savant exposé de mon valeureux compagnon, parlons rapidement de ce qu’il en est de notre venue chez vous.

Nous sommes nombreux ici en mission sur tous ces territoires, seize chasseurs patrouillent la désormais dénommée Euromorte. Nous avons amené des centaines d’appareils comme le nôtre, là dehors, elle fit un geste vague vers le haut, près de mille de ces chasseurs plus exactement. Ils sont en pièces détachées et il suffit de les assembler pour obtenir rapidement un appareil opérationnel ; des équipes de nos gars sont déjà à l’oeuvre. Nous les avons transportés dans des transports, plus d’une trentaine de ces appareils beaucoup plus grands, que vous avez vu sur la vidéo et, les ayant attendu longtemps et avec impatience pour pouvoir venir vous voir, nous avons appelé ce modèle Désiré, rire de la foule...

Chacun de ces transporteurs a amené 38 chasseurs plus les matériels allant avec. Ils sont entreposés dans une ancienne usine de construction d’avions. Usine mitoyenne de la ville de Toulouse justement, celle qui fut le lieu de rencontre de vos charretiers, Roger et Germain, avec le premier chasseur venu explorer vos territoires ; vous connaissez tous, j’imagine, leur extraordinaire et incompréhensible aventure d’alors...

Long murmure dans la foule. -Ces chasseurs servent principalement actuellement à aller détecter, avec des

appareils spéciaux, dont vous parla mon équipier, les travailleurs en esclavage dans les fermes des Zanko-Khuigs, ceux qui ont un esprit sain, indépendant. C’est ainsi beaucoup plus efficace et beaucoup moins dangeureux pour tous. Ces chasseur servent ainsi à aller percer les lignes ennemies et...

Une voix énergique monta dans l’assistance, lui coupa aussitôt la parole. -Puisqu’ils percent l’ennemi, alors on les appellera des Perceurs, car les

chasseurs c’est nous seuls ! Celui qui venait de l’interrompre se tenait devant l’estrade, un Justin fier de lui et qui lui faisait un clin d’oeil en souriant.

Le pilote lui sourit et lui renvoya son clin d’oeil, celui-ci en fut tout fier. La foule rit avec plaisir de cette sortie....

-Ainsi donc, comme l’a fort à propos suggéré notre ami Justin...chaque « Perceur », dorénavant, souligna-t-elle, a un équipage de deux personnes, un pilote et un chasseur psycho, elle sourit à Justin, chasseur qui avec ce matériel approprié déjà succinctement décrit, détecte les esprit encore sains et qu’ainsi l’on peut sauver, évitant de perdre son temps avec les autres qui sont pour l’instant malheureusement irrécupérables. Ainsi, mes amis, assez de longs discourts pour cette première fois.

Et comme de bien entendu nous ne pouvons pas en si peu de temps vous compter les siècles de notre propre aventure de survie, aussi...nous vous avons amené des disk-mémoires racontant toute notre longue histoire. Notre

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idéologie, qui est la même que la vôtre et qui montre bien que nous sommes tous frères et soeurs, car nous avons le même idéal...Vous y découvrirez les objectifs et stratégies retenues, etc. Vous pourrez ainsi regarder ces documents à volonté et les distribuer dans toutes vos communautés.

Irvin, qui avait pris un volumineux paquet sur le chariot, le remit à Constantin, qui était au milieu d’une vive discussion à voix basse avec le reste du conseil ; ce dernier, repassant la paquet à un collègue, s’approcha du micro et dit, s’excusant de couper la parole au pilote.

-Mes amis, Elizabeth et Irvin...Veuillez bien me pardonner de vous couper la parole mais, mes collègues du conseil me chargent de vous dire trois choses importantes, et je suis d’accord avec eux, voici.

1- Puisque vous êtes nos frères et soeurs de ce vaste continent qui fut un jour redécouvert et investi par nos ancêtres, des Français d’alors : les acadiens ; je dis bien redécouverts, car ouvrons une parenthèse. Comme on peut le lire dans des docs internet de ce grand pays d’alors, le Brasi, ce continent avait été découvert des siècles plus tôt par les scandivs, et d’autres plus anciens encore. Puis idem en Merdika du Sud et central ; le Brasi et d’autres furent exploités durant de nombreux siècles, plus d’un millénaire avant l’autre ère, par un peuple antique nommé les féniciens, qui furent accompagnés d’égiptiens, etc.

Et même plus fantastique encore, on y apprend que le fameux Christophe Colomb n’aurait rien découvert stricto sensu, car il savait l’existence de ce continent. Son expédition ne fut pas financé par leur royauté portuge, mais bel et bien par ces riches juifs marranes d’alors, qui allaient être officiellement expulsés par la sinistre inquisition...ce deux jours après leur départ réel vers ce futur Brasi ; ce qui prouve une vaste conspiration pour endormir la populace.

Ce sont ces riches juifs qui embarquèrent sur ces caravelles avec leur coreligionnaire Christophe Colomb qui, beaucoup de documents en portugais, ainsi que des Zanko-Khuigs, affirment de sa réelle appartenance à ce peuple.

Ces juifs fortunés importèrent la canne à sucre de l’île San Tomé et créèrent la première industrie de la canne à Récife, ville qui sera prise par les olandais. Puis les portuges la reprenant, avec l’inquisition, ces juifs suivirent les olandais vers le nord...colonisèrent les Antilles, ceux y restant devenant alors les Békés...Puis New Hollande, qui deviendra New York, etc. Tous ces lieux devenant de fameux repaires de prédateurs.

Mais basta du passé car seul le présent est d’intérêt vital pour nous tous ! Nous vous appèlerons donc désormais du nom respectable de ces français

d’alors, vous serez donc désormais pour nous tous d’Euromorte, des Akadis. Nous ne saurions supporter le nom de vos anciens de l’autre monde disparu,

principaux, sinon uniques responsables de ces anciennes barbaries. 2- Dès qu’il vous sera possible, quand vous repartirez, nous aimerions envoyer

chez vous tous, une mission de quelques uns d’entre nous pour connaître vos compagnons, les saluer et officialiser notre nouvelle et vaste communauté et ainsi leur faire connaître notre philosophie et aspirations légitimes.

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3- Il faudra de suite établir un système de...il cherche un instant ses mots...un système de navettes, de un ou plusieurs perceurs reliant en permanence nos deux communautés ; cela nous semble indispensable.

-Constantin, lui répondit Elizabeth, j’accepte avec plaisir et reconnaissance ce nouveau nom d’Akadi pour notre communauté, nous-mêmes étions mal à l’aise pour nous définir, ainsi ce nom de noble origine nous relie directement à vos anciens, merci de cette idée qui va enchanter tous les nôtres des Appalaches qui, si je ne me trompe est voisine de l’origine du peuplement, non ?

-Oui, répondit Constantin, les Akadis s’installèrent en Louisiane en 1755, tout près donc de chez vous, en Alabama. Elizabeth et Irvin, il faut que vous sachiez que la Louisiane française fut créée en 1699 par des français, des simples gens du peuple, que leur royauté abandonna lâchement à leur sort devant les troupes des pritichs, vos ancêtres directs.

La Louisiane ne se limitait pas à la région de la seule Nouvelle-Orléans, non ; c'était un immense territoire continental occupant les terres comprises entre la Nouvelle-France d’alors, soit le Canada au nord, et le golfe du Mexique au sud. Terres limitées à l’Ouest par les contreforts des montagnes Rocheuses et à l’Est par ceux des Appalaches. Tout le bassin du Mississippi et une partie des Grandes Plaines du centre-ouest de ce continent faisaient donc parti de ce domaine.

La Louisiane englobait en totalité ou en partie vingt et un des États composant votre nation d’avant 2015, à savoir : la Louisiane, votre Alabama, le Colorado, l'Iowa, l'Oklahoma, le Texas, le Tennessee, le Kansas, le Nouveau-Mexique, l'Indiana, le Kentucky, les deux Dakotas, l'Arkansas, l'Illinois, le Minnesota, le Wisconsin et le Wyoming, le Missouri, le Nebraska et le Montana.

-Merveilleux, nous serons donc doublement, que dis-je...nous serons donc ainsi vingt et une fois plus Akadis. Et pour ce qui est de votre venue chez nous, ainsi que ce système de navettes, il était prévu de vous le proposer après toutes ces journées de folies qui s’annoncent à la découverte de vos perceurs ; je me trompe ? dit-elle en riant.

-Oui, merci...ça va être effectivement de la folie pure durant quelques temps...alors c’est conclu.

Le pilote reprit son exposé. -Mais, pour le moment, et pour conclure enfin cette conférence historique, une

bien plus grande aventure se présente à l’instant. Que ceux qui veulent venir avec nous visiter pour une première fois ces centaines de perceurs qui sont désormais les vôtre, et découvrir par la même occasion votre région vue du ciel, région qui je vous l’affirme est magnifique...il nous suffit de sortir de la grotte, rappeler notre perceur ainsi que de gros transports qui nous attendent en vol stationnaire au-dessus de votre grotte ; nous pouvons amener jusqu’à près de mille quatre cents personnes d’un coup. Choisissez les volontaires !

L’ensemble de la foule se leva d’un bloc comme un seul homme. Ce fut de la sorte que ces chasseurs devinrent des perceurs, grâce à la

perspicacité de ce jeune effronté de Justin, et que ces communautés découvrirent ces lointains parents, les désormais Akadis, qui leurs amenaient les

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technologies qui allaient un jour leur ouvrir à tous la porte du paradis ; l’union sacrée était ainsi scellée. A partir de ce jour aussi et surtout, tous ces Hommes et Femmes virent leur vie heureusement chamboulées par les bienfaits de cette technologie venant d’outre-Atlantique.

Technologie qui, si elle fut la cause directe de la disparition d’un monde, renaissait sous l’autorité d’Hommes nouveaux qui vouaient dès lors son utilisation pour le bien de tous. Faisabilité naturelle qui renouait avec leur antique civilisation disparue, de partage et respect...Civilisation morte par la venue d’un dieu barbare et jaloux, le monde d’alors étant devenu l’esclave stupide et veule de l’immonde Mammon, cette divinité insatiable et perverse qui avait détruit l’âme des plus forts.

Ils se devaient, et le savaient tous, de ne plus retomber sous le piège des beaux parleurs. Tout prédicateur éventuel devant être illico passé par les armes. La moindre tentative de prosélytisme sournois, aussi bien religieux que politique, était pour le candidat qui n’en aurait pas le courage lui-même, le moyen le plus sûr et le plus efficace et rapide pour se faire suicider sur l’heure. Seules, les idées suceptibles d’apporter évolutions ou changement bénéfiques dans leurs communautés étaient celles présentées publiquement devant une assemblée conséquente, garantissant ainsi la franchise et honnêteté la plus élémentaire.

Quiconque voulait s’exprimer sur un sujet, présenter une nouveauté, nouvelle idée, pouvait le faire librement en mettant un placard sur les panneaux d’affichages de la station, avisant ses compagnons d’une réunion d’information publique pour un jour et heure précis, et à telle salle de réunion.

Depuis plusieurs jours maintenant, depuis le rétablissement de leur célèbre

patrouilleuse, toute la station avait retrouvé l’animation coutumière, aussi et surtout une grande joie collective qui les unissait tous dans la fièvre de la reconquête, travail sacré qui ne s’arrêtait jamais.

Marion avait retrouvé son perceur tout flambant, brillant de tous ses feux ; remis en parfait état par les équipes de nettoyage qui avaient passé plus de deux jours pour faire disparaître les taches de sang qui avaient littéralement sali tout l’intérieur de la cabine. Jusqu’aux commandes de pilotage, les toilettes, sièges...partout le perceur en était souillé ; ces gens avaient été effrayé de découvrir un tel spectacle, personne n’avait jamais vu un tel désastre.

Le problème maintenant était pour elle de trouver un psycho valable. Tous ceux qu’elle connaissait étant forcément engagés dans la constitution d’une équipe de patrouilleurs et, elle le savait pertinemment : on ne défaisait jamais une équipe soudée par des mois ou des années d’expériences communes.

Logique, pensa-t-elle, c’est si difficile de rencontrer deux personnes qui aient suffisemment d’affinité pour pouvoir se supporter des jours, voire des semaines entières dans l’espace exigu d’une cabine de perceur, sans grand confort et sans guère de distractions...C’est là le grand problème justement, en plus des qualités professionnelles requises de chacun, compétences devant impérativement assurer à chacun, qu’il puisse compter sur son compagnon en toutes situations,

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et ce jusqu’aux pires moments de dangers, car on ne part pas en promenade mais bien dans des actions guerrières qui peuvent se révéler mortelles.

Seule solution et la plus efficace et logique qui se présenta à son esprit, aller en parler justement à son ami du Conseil des sages, Georges, un ancien patrouilleur lui aussi, et un fameux en son temps, pour lui demander conseil. Rien de tel que quelqu’un qui connait le travail pour saisir dans les détails les besoins d’une action ; et de plus, ce qui ne gâtait rien, c’était un bon ami, et comme à son habitude, il la reçut dans son bureau, lui exprimant sa joie profonde et sa très agréable surprise de la savoir enfin rétablie pour de bon.

-Marion, ma patrouilleuse aimée, que les espaces stellaires soient bénis pour t’avoir ramené parmi nous tous. Que puis-je faire pour toi cette fois ? Toujours avec un grand plaisir si je puis t’aider en quoi que ce soit, tu me connais.

-Merci Georges, grand merci, je sais parfaitement que je peux compter sur ton aide et, tu vas voir, mon problème est d’une simplicité évidente, peut-être même te connaissant y as-tu aussi pensé toi-même , voici : comment trouver un bon psycho pour former mon équipe, et de plus rapidement. Si tu as la moindre idée ou encore mieux, une réponse à ces questions, je suis preneuse.

Georges reffléchit intensément un instant puis, la visage illuminé par une idée, claqua des doigts.

-Excuse-moi un petit instant, veux-tu...un coup de fil que j’avais complètement oublié de donner, juste une seconde.

Il prit le combiné du phone sur son bureau, appareil sur fil à usage limité à quelques personnes aux activités importantes seulement. Il fit un numéro et attendit un instant.

-Ha ! Gaston, content de tomber sur toi...oui, dis-moi, peux-tu donner un message à Françoise dès que tu la verras ?...merci, je te revaudrais ça...il rit...oui, alors dis lui que j’ai reçu les docs qu’elle m’avait demandé, qu’elle vienne les chercher rapidement...oui, c’est tout, elle est au courant, elle comprendra...Merci Gaston, fais mes amitiés à toute ton équipe...oui, promis, je passerai vous voir dès que j’ai un creu...excuse-moi mon ami, mais il faut que je raccroche, j’ai un visiteur qui...au revoir. Il raccrocha.

Il sourit à Marion qui regardait des vues aériennes de la Terre, fixées aux cloisons.

-Tu sais ma chérie, c’est dur de vieillir, le cerveau se ramollit à vitesse grand V passé un certain âge, et au mien actuel, ce qui n’est pas de la gnognotte, mes neurones foutent le camp par paquets de 100.000 journellement. Tu imagines un peu le carnage que ça fait dans une vieille carcasse comme la mienne ? c’est le taux de perte vers les 80 à 90 balais...Et toi ma belle, sais-tu combien se font la valise de ton joli petit corps adorable ?

Elle fit non de la tête, le regardant, admirative, sidérée par ce fameux savoir immense de Georges...

-Chaque jour qui passe, 30.000 neurones te quittent sans l’ombre du moindre regret ; entre nous, si j’étais eux je resterais amoureusement blotti dans une aussi ravissante personne que toi.

-Toujours charmeur, hein, Georges ? dit-elle en riant aux éclats.

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-Charmeur...charmeur, pour ce qu’il en reste, dit-il avec une moue de dérision, et...attends, ma belle, quand tu auras atteint la quarantaine, et que tu auras alors cet aura qui transfigure la Femme arrivée alors à son zénith, dommage que je ne le verrais pas...tu en perdras 50.000 par jour, le tout, et tiens-toi bien à la rambarde, sais-tu combien nous avons de neurones au départ ? dans pourtant une toute petite chose qu’est un Homme alors ?

-Pas la moindre idée, Georges, mais je sens que je vais le savoir dans pas longtemps, hein ? sourit-elle.

-Petite futée va...100 à 150 milliards de ces foutues neurones rendent alors l’Homme pour ce qu’il est devenu, le seigneur et serviteur de notre merveilleuse Gaïa, la plus belle des belles du cosmos en entier.

-Bravo ! Georges, dit-elle en applaudissant ; c’est toujours un plaisir renouvelé que de parler avec toi, qui est une source de savoir immense ; mais franchement, comment fais-tu pour savoir tout ça ? dit-elle stupéfaite.

-Oh ! tu sais, il n’y a guère de mystère en fait, j’ai toujours eu le goût de m’instruire, la lecture, etc. Ça c’est primordial la lecture, celui qui ne lit jamais n’est qu’une outre pleine de vent, un coup d’épingle et pfeuut...ce n’est qu’un pet de néant. Et puis, arrivé à mon âge, plus que certain malheureusement, il y pas mal de temps que les pulsions dites érotiques qui me chatouillaient alors la moelle épinière, sont du domaine des souvenirs ; alors dans ces cas-là, et n’ayant pas d’autre choix de toute façon, on retrouve la paix des sens et l’on peut paisiblement s’adonner à d’autres plaisirs que charnels.

Plaisirs sensuels qui sont extraordinaires, soit, j’en fus un aficionado inconditionnel et de première bourre, si tu me permets cette expression qui peux prêter à confusion, mais qui te bouffent littéralement toute l’énergie d’un individu.

-J’en sais quelque chose, Georges...ma...notre passion, Céline et moi, nous avait totalement ravagé, détruite, mais c’était si merveilleux...Bon ! parlons d’autre chose, et ce psycho alors, hein ? où vais-je pouvoir en pêcher un ? Tu ne m’as toujours pas répondu avec tes histoires de neurones à dormir debout, hein, Georges ?

-Ha ! dit-il avec un soupir de satisfaction, je retrouve enfin la combattante de feu, je me demandais quand tu allais te révolter devant mes radotages.

Elle lui donna un coup de poing amical dans l’estomac, en riant. -Tu changeras jamais, Georges, toujours farceur, et moi qui t’écoutais là,

comme une idiote...mais c’est vrai tes histoires de neurones ou c’est du baratin ? -Authentique ! garanti pur jus ! -Alors...et mon psycho, dans tout ce cirque ? -Je me suis laissé dire...mais c’est pour l’instant du domaine du secret,

que...qu’un candidat possible, une personne, et des plus inattendue, une vraie surprise en fait, pour toi j’entends, serait en train, ces jours-ci mêmes, de passer des tests pour juger de ses qualités de psycho justement.

-Qui ça ? cria-t-elle, impatiente de connaître la réponse. -Tss, tss, tss, tss...un peu de patience ma toute belle pé...j’allais dire, pétroleuse,

quoique...quand vous vous y mettez toutes autant que vous êtes...patrouilleuses,

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lessiveuses, cuisinières, médics et tutti quanti, vous nous la rendez bien infernale la vie...mais c’est si bon, faut bien l’admettre, et je...

-Georges ! si tu me le dis pas tout de suite, je t’arrache les cheveux ! -Ah non ! Au secours, cria-t-il, il m’en reste si peu déjà, je t’en prie ma

p...pa...patrouilleuse chérie, ais pitié de ma pilosité restante, merci bien ! Et ils rirent de bon coeur tous les deux. -Dis-moi qui c’est, Georges, sois gentil avec ta fragile, petite et douce

patrouilleuse chérie, comme tu dis, lui dit-elle en faisant la moue, charmeuse. -Oh ! pour la fragile, tu repasseras, s’esclama-t-il. Y a qu’à voir le carnage que tu

as fait de cette racaille d’illuminés : douze mecs rétamés et débités en tranches de saucisson...et par de faibles et fragiles Femmes, comme tu dis si bien ; la vache, elle est bien bonne celle-là, faudra que je m’en souvienne, rit-il de bon coeur.

-Georges, t’es vache ! -Tu savais pas ? -Allez, Georges...je me vois obligée d’insister. -Grossièrement, je te ferais remarquer...ma douce et fragile... -GEORGES ! cria-t-elle, ses yeux lançaient des éclairs maintenant, réponds-

moi ! -Oh ! oh ! voici le cobra royal qui pointe son nez ! Planquez-vous braves gens,

le commandant a parlé ! Je ne peux pas te donner de réponse encore, les tests...nous n’aurons les résultats que ce soir et de plus...la personne qui s’est proposée d’elle-même, j’insiste là-dessus, a demandé pour condition expresse que tu ne sois pas mise au courant de sa candidature ; tout simplement au cas où elle échouerait à ces tests. Cela part de nobles sentiments, ce qui ne me surprends pas du tout, la connaissant très bien. Et c’est tout ce que tu pourras tirer de moi ! Voilà ! C’est ainsi, ma poulette !

-Et je connais cette personne ? -Je me suis laissé dire, que elle en tout cas, te connaissait...profondément

même, dit-il avec un sourire bizarre. -Georges, dit-elle méfiante, le regardant d’un air soupçonneux, tu continues de

te foutre de moi ! -Marion, ma belle, loin de moi cette pensée, tu me connais, non ? -C’est justement parce que je te connais, oui, que je fais gaffe. -Merci, c’est agréable, si, si...moi qui me décarcasse pour toi... -Georges, te fatigue pas à m’endormir, d’accord ? Ce soir...et à quelle heure ?

demanda-t-elle déçue. -Oh ! vers les...neuf, dix heures je pense, guère plus en tous cas...dans une

heure même peut-être, ce serait aussi dans le domaine du possible ; tu sais ce que c’est, hein ? comme de toujours les gars du labo sont pas pressés eux...

-Et comment le saurais-je, si cette personne a réussi ? car je n’aurais pas le courage d’attendre jusqu’à demain...et qui va me prévenir ?

-Et bien voyons...il réfléchit un instant...mais elle-même ! -Mais...et si elle est recalée, alors, dit-elle exaspérée maintenant par ce jeu de

question-réponses débiles.

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-Oh ! j’ai comme un pressentiment qu’elle va réussir en fait, dit-il d’un air mystérieux.

-Georges...je vais t’arracher les cheveux pour de bon si tu continues à te foutre de moi. Tu sais quelque chose, Georges ! cria-t-elle, en colère pour de bon maintenant. Réponds-moi !

-Moi ? dit-il faussement surpris, en regardant sa montre bracelet ; tu sais pourtant que je suis incapable de faire une chose pareille, ma douce.

-Bon, je m’en vais, dit-elle furieuse, inutile de continuer à parler d’une façon aussi...stupide ! Ce sont tes neurones qui se font la malle, Georges, qui te rendent idiot ? lui dit-elle sur un ton froid et hautain.

-Et où vas-tu comme ça si vite ? -Chez moi pardi, à cette heure-ci, je préfère aller me coucher que de continuer

d’écouter des divagations de gens qui...qui, bref ! Merci quand même, Georges, elle se leva pour prendre congé.

La sonnerie du phone teinta, Georges décrocha rapidement le combiné en faisant signe à Marion d’attendre encore un instant.

-Oui ? Bonjour...oui, bonsoir plutôt, mais tu sais mon vieux, comme je suis tout le temps sur la brèche je ne sais plus si c’est le temps de jour ou de nuit...parfait...parfait, ça tombe au poil, au petits oignons comme dit l’autre, merci bien...ok ! Tchao ! dit-il en regardant à nouveau sa montre bracelet.

Il raccrocha, sourit amicalement à Marion. -Merci, que tu me disais, ma fille chérie, et de quoi donc, je n’ai pu t’aider et tu

pars furieuse, ça me peine beaucoup tu sais... Georges parut réfléchir un moment puis il claqua ses doigts. -Attends, ça me revient maintenant, quelle vieille andouille je fais...Ha ! ces

foutus neurones ! c’est quelque chose, tu sais...oui, j’ai en fait comme l’impression que ces tests seraient maintenant terminés en réalité à l’heure qu’il est, et...la personne les aurait passé avec brio, à la surprise des gars du labo, mais plus particulièrement encore de la personne elle-même. Mais, je parle, je parle, c’est de ta faute aussi, tu n’arrêtes pas de me poser des questions à n’en plus finir...Ha ! vous êtes bien toutes pareilles vous les Femmes...

-Georges ! Lui dit-elle d’une voix sourde et rauque, revenant vers lui et lui aggripant fermement sa veste sur la poitrine et l’attirant vers elle, le regardant avec dans les yeux avec une rage évidente. Si tu ne me dis pas qui c’est à l’instant, je t’arrache les yeux, dit-elle en furie.

-Elle en serait bien capable oui, dit-il appeuré en faisant le geste de se protéger le visage, il regarda encore sa montre bracelet...C’est pourtant simple ma chérie ; cours vite chez toi, la personne t’y attend depuis tout juste une ou deux min...Il ne termina même pas sa phrase qu’elle était déjà partie en trombe en claquant le porte, courant comme une folle.

Elle arriva devant chez elle complètement essoufflée. « T’as besoin de reprendre

vite fait l’entraînement, ma vieille. Ha ! c’est du propre ! » se pensa-t-elle outrée. Elle attendit deux à trois minutes pour reprendre son souffle puis se dirigea vers la porte de son carré...Là elle hésita, redoutant un instant une farce de Georges,

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mais réalisa qu’il ne ferait jamais une chose pareille, donc, son possible psycho l’attendait vraiment et...elle le connaissait, d’après les dire de Georges.

Elle avait beau passer toutes ses connaissances en revue, mais pas une seule de ces personne ne cadrait avec ce job, car pour être psycho il fallait un esprit très sensible, de la douceur, ce sens mystérieux qui fait s’accoupler deux esprits, c’est le seul mot qui lui venait en tête pour décrire ces qualités peu commnunes requises pour ce travail bien, bien particulier.

Sa pensée revint vers Georges, et son coup du « elle te connait profondément », dit avec cet air bizarre de Georges ; elle remarqua aussi qu’elle n’avait jamais vu ce dernier aussi...aussi...stupide, voilà le mot, stupide. Mais en réfléchissant bien ça ne cadrait pas non plus avec un gars comme lui, car il était loin de l’être, et elle le savait parfaitement...

Et ce mot qui lui courait dans la tête maintenant, profondément, profondément, répétait-elle pensive. Georges n’avait pas dit ce mot au hasard, elle le connaissait bien son Georges, et son esprit particulièrement vif et aiguisé...et cet air qu’il avait quand il lui sortit ce trait...Il y avait un code dans ce mot, un double sens, elle en était sûre...puis un flash illumina alors son cerveau : profondément = amant ! Et si c’était le sens de ce mot codé, alors c’était foutu pour trouver l’heureux élu, les candidats étant véritablement trop nombreux, puisque tous dans leurs communautés faisaient l’amour quand et avec qui ils voulaient.

Il te resta une seule solution, ma fille, se dit-elle à voix haute : entre et tu verras bien, allez zou !

Et elle tourna la poignée de la porte et l’ouvrit à la volée, pour enfin en avoir le coeur net, elle entra d’un pas et resta stupéfaite, littéralement clouée sur place par la découverte de la personne qui l’attendait, comme lui avait dit cette sacrée canaille de Georges...Son dernier amant, le géant Hugues, la regardait avec un grand et chaleureux sourire, confortablement assis dans l’unique fauteuil, les pieds allongés, les pouces passés dans les revers de son gilet.

Hugues est véritablement hors norme, de par sa taille de 2,05 m déjà, et une carrure impressionnante de lutteur de foire ; roux comme un soleil en feux, mais surtout ce qui surprend le plus en lui, est sa douceur et prévenance hors norme aussi. Hugues est une personne exceptionnelle et un spectacle de contradictions pour quiconque le découvre ; et bien entendu, d’un calme serein quoiqu’il arrive, de cette tranquillité olympienne de la force absolue qui surpasse tout.

-Je vois que Georges t’as enfin lâché le morceau. Ha ! celui-là, avec son baratin infernal ! Ça fait bien un quart d’heure que je me morfonds, là, tout seul ; j’avais peur à la longue que tu ne veuilles pas d’un charretier volant, ma douce.

Elle se jeta sur lui avant même qu’il n’ait le temps de se lever, et ils roulèrent par terre de l’autre côté du fauteuil renversé, manquant de peu de défoncer le carré, s’embrassant sur les joues et les lèvres comme deux fous, riants aux éclats de joie et de cette incroyable surprise...Ils se relevèrent en riants toujours, heureux comme des enfants, et elle voulut tout de suite tout savoir de cette histoire incroyable.

-Du calme, ma jolie...Tu ne prétends tout de même pas que je t’explique cette longue histoire en cinq minutes, non ?

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-Bien sûr que non, mon grand, mais...et tes chevaux que tu aimes tant, tes collègues, tes amis, enfin tout ce qui était ta vie jusqu’à maintenant...et tu quittes tout ça, comme ça ?

-Non, pas comme ça, dit-il en claquant deux doigts ; c’est une longue histoire qu’il faudra que je te raconte peu à peu, d’accord ? Mais on a le temps maintenant, à condition toutefois, car tu ne m’as encore rien dit, que le commandant m’accepte à son bord. Il se mit au garde-à-vous, la dépassant de plus d’une tête, et raide comme un manche à balais, s’écria de sa voix forte :

-Charretier Hugues, demande la permission de travailler à bord, mon Commandant !

Elle lui répondit sur le même ton, en riant comme une gamine. -Psycho Hugues ! Jurez-vous fidélité absolue à votre commandant ? -Je le jure, Commandant de mon coeur ! -Bienvenue à bord, mon amour ! lui dit-elle en se dressant sur la pointe des

pieds pour l’embrasser fougeusement sur la bouche. Ton serment t’engage aussi à me faire l’amour sans condition...ça gase pour toi, matelot ?

-Ça tombe à merveille, Commandant, j’ai toujours rêvé de m’envoyer en l’air, sans condition aussi !

Il rirent comme deux fous. -J’ai aussi une faveur à te demander, Hugues, lui dit-elle reprenant son calme,

mais je te rassure, tu es libre de refuser, et si c’est le cas je ne t’en voudrais aucunement, d’accord ?

-Vas-y ma chef, tu peux tout me demander, je te rassure ainsi à l’avance, je donnerais jusqu’à ma peau pour toi, ça te va aussi ?

Elle sourit et lui serra un bras. -Hugues, j’aimerais que tu te coupes la barbe et la moustache, et aussi racourcir

tes cheveux, car avec le casque sur la tête pendant des heures parfois, c’est désagréable et ça risque surtout d’atténuer l’efficacité du contact du bonnet de connection psychique avec la cible, le filet, tu comprends chéri ?

-Pas de problème...demain matin je serai tout neuf pour mon job, tu verras ; au fait, quand partons-nous en mission ?

-Demain matin alors, vers les 8 heures ; il n’y a plus de raison d’attendre maintenant. Durant deux ou trois jours nous ferons un galop d’essais indispensable pour apprendre à se connaître : nos réactions, nos réflexes, nos habitudes diverses, nos défauts aussi, les astuces du métier quoi, comme pour tous les autres jobs, chacun a ses combines. C’est primordial tu sais, Hugues, capital même, la vie peut dépendre d’une bonne synchronisation, faut être prêt à tout mais, suis-je stupide...c’est bien de moi ça, aller dire ça à un charretier...alors que vous êtes des guerriers par excellence, pardonne-moi, veux-tu ?

-Pas de quoi fouetter un chat, ma belle. -Mais, au fait, à propos d’entraînement, il va aussi falloir que je t’apprenne le

pilotage, c’est essentiel tu sais, un psycho doir savoir piloter pour au moins être capable de ramener le perceur, au cas où...

-Je sais piloter déjà, mais j’ai besoin de me perfectionner, c’est sûr. -Mais...comment peux-tu...

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-J’ai appris depuis maintenant dix jours avec Françoise et Guillaume. Ils sont super tous les deux, je les adore véritablement, se sont deux êtres de générosité, modestie et d’amour inconditionnel pour les autres...Ils sont follement amoureux l’un de l’autre aussi, c’est merveilleux que de les voir vivre ; ils forment une équipe puissante, liée par des sentiments très forts.

-Oui...c’est Guillaume qui m’a tiré du gouffre horrible et insondable où mon esprit c’était perdu, dit-elle le regard rêveur, c’est un ami sûr pour moi, il m’a toujours été de grand conseil, je l’aime follement, c’est quelqu’un d’inestimable.

-Je ne savais pas...Durant tous ces jours où il m’a généreusement appris tous ses trucs et astuces aussi, avec aussi beaucoup de patience...mais il ne m’a pas parlé de cette aide qu’il t’a apporté.

-Oui...et en plus, il est d’une discrétion à toute épreuve ; ça ne me surprends pas. Mais, dit-elle brusquement, ça me revient maintenant : comment Georges pouvait-il savoir que j’irais lui demander conseil ce soir là justement et... comment sut-il que tu serais à m’attendre dans mon carré ?

Hugues rit de bon coeur durant un instant. -Ce fut en fait une vaste conspiration. Connaissant la difficulté de trouver un

équipier, il savait que tu finirais par aller le voir, et il avait donc fait passer le mot : que persone ne puisse t’aider pour tu finisses par atterrir chez lui.

-Et j’y suis allée directement...Ha le bandit ! rit-elle. -Tu vois s’il te connait bien...Ils avaient monté toute une combine avec

Françoise et Guillaume. Te voyant rétablie et commençant à tourner autour de ton perceur, ils savaient que la belle allait redémarrer : la belle, c’est toi, mon coeur, rit-il ; ainsi donc, tous ces derniers jours pour l’entrainement avec le perceur de Françoise et Guillaume, nous restions aux alentours de la station, prêt à foncer à l’appel codé de Georges, signifiant qu’il fallait que je coure dare- dare à ton carré, la Belle au bois dormant était enfin réveillée.

Marion le regardait, le visage béat d’admiration et de reconnaissance, de découvrir et comprendre enfin cette vaste conspiration silencieuse de tous ses amis pour assurer son salut. Elle se jeta dans ses bras, l’embrassant sur la joue...

-Maintenant je pige toute cette vaste magouille de tous, lui dit-elle radieuse...les coups de fil de Georges...son message pour Françoise, lui disant qu’il avait reçu ses documentations, ou je ne sais plus quoi...et qu’elle passe vite les prendres...sacrée Françoise aussi...

-Tu sais, elle a refusée de partir en mission pour m’entraîner, pour que tu puisses avoir de suite un équipier ad hoc, dès que tu serais en forme...Elle aussi t’aime beaucoup.

-Je sais, et c’est réciproque bien sûr, nous sommes très liées depuis mon arrivée à la station, mais malheureusement avec ce job nous nous voyons trop peu souvent, c’est dommage. C’est la vie des patrouilleurs, à vagabonder par monts et par vaux, comme vous les charretiers aussi...Ce qu’elle a fait là pour moi ne me surprend pas de sa part, en fait...c’est réconfortant de savoir que l’on a tant d’amis sûrs. Merci, Hugues, pour ces bonnes et douces nouvelles, ça me touche énormément.

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-Tu sais Marion, en fait...tous les gens de la station ont pour toi énormément de sentiments d’amour et d’affection. Franchement, comment ne pas t’aimer, alors que tu es une lumière dans le coeur de tous ces gens ; tu ne connais pas toi-même la valeur que tu représentes aux yeux de tous, je te promets, chérie.

-Merci, Hugues...mais tu me gênes de dire ça...je ne fais pourtant rien de plus que les autres.

-Oui...rien de plus, et c’est vrai : tu pilotes, tu sauves des gens, tu ris, tu pleures, tu...mais il y a une aura autour de toi, une force qui te sort par les pores de ta peau, une énergie qui illumine ton entourage et...tu ne la perçois pas toi-même, et c’est logique puisque c’est ta personnalité intrinsèque, ta nature...D’une façon incompréhensible, de te cotôyer apporte une joie, une plénitude aux autres...Tu es ainsi faite Marion chérie, tu n’y peux rien, ni personne d’autre non plus, faut que tu fasses avec, mon coeur. En fait, tu es l’amour total personnifié, tout simplement.

-Hugues...j’ai aussi l’aura de Céline qui est en moi maintenant. -Je sais, chérie...Je l’aime beaucoup, Céline...nous nous connaissions aussi tous

deux, bien sûr, mais pardon, ça te gêne si je parle d’elle ? -Non, Hugues, rassure-toi, je suis en paix avec son âme maintenant...Céline,

mon grand amour...grâce à Guillaume, encore, je lui dois tout, mon bonheur de revivre, je lui en serais éternellement reconnaissante.

-En fait, pour en revenir à ma fameuse candidature... -Oui, au fait, dit-elle souriante, comment cela c’est-il passé ? -Dès que nous sûmes tous que Céline était...bref, la pauvre...Il était évident

qu’il te faudrait rapidement un équipier, alors je suis allé voir cette canaille de Georges, comme tu dis, dit-il en riant, et je lui ai de suite proposé ma candida- ture, pour ne pas perdre de temps ; candidature qu’il a acepté avec plaisir et empressement, ne doutant pas de mes qualités pour ce job. En fait, nous sommes de vieilles connaissances tous deux, nous sommes amis depuis des lus- tres, alors on se connait bien, voilà !

Elle regardait Hugues avec admiration, son visage baigné d’une paix extraordinaire.

-Et moi qui croyais bien connaître mon petit monde...j’étais loin du compte. Vous êtes tous d’horribles et adorables menteurs, magouilleurs, conspirateurs et...je sais plus quoi d’autres, mais je vous adore tous à la folie.

Il rirent tous les deux, de tant de joie et de bonheur. Hugues revint à la réalité et demanda. -Dis-moi, que dois-je prévoir comme vêtements à emporter ? On ira vers le

nord ou vers le sud ? -Prévois léger, nous irons vers...à la même latitude qu’ici pour ainsi dire, et là

où nous allons le climat y est plus chaud, plus doux qu’ici. -Je peux savoir où ? -C’est...et bien...réflection faite, non...c’est en fin de compte une surprise que je

te réserve, mon grand...Je suis sûre que tu vas adorer et...je te le dirai demain peut-être, dans notre perceur, matelot Hugues !

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-A vos ordres Commandant ! Il hésita un instant puis lui dit : Marion, ces deux mots que tu viens de dire en plaisantant « notre perceur »...tu ne peux savoir le plaisir intense qu’il me procure ; il y a si longtemps que j’en rêve, de partager cette vie de patrouilleurs...et de plus, avec la plus belle des pilotes. Tu vois devant toi le plus heureux des Hommes, Marion, mon ange doré, merci de m’accepter à ton bord.

-À notre bord, Hugues, dorénavant, et sache que je suis très heureuse aussi que ce soit toi mon nouveau compagnon de patrouille. En fait, j’essayais d’imaginer qui pouvait bien être cette mystérieuse personne, suivant les indications de ce sacré farceur de Georges, il est terrible tu sais...mais je ne voyais personne capable d’assumer ce poste. Les qualités spéciales qu’il faut, etc., tout ça parce que je pensais à des personnes plus ou moins disponibles dans ce boulot, tu comprends ? Et j’étais à cent lieues de penser à un charretier...c’était impossible.

Ah ! vous m’avez bien eu avec le Georges ! Il m’avait tellement énervée avec ses histoires à dormir debout, histoires de neurones, que je voulais lui arracher les cheveux.

-Non ? dit-il en s’esclaffant. -Parole ! j’étais excédée à la fin. -C’est un pince sans rire et un farceur, c’est vrai, mais c’est un Homme

remarquable. Et il t’as fais le coup des neurones ? -Oui, tu connais aussi ? -Si je connais ? il éclata de rire, c’est sa dernière marotte depuis six mois au

moins, sacré Georges, depuis qu’il a découvert cette histoire de neurones, il fait le coup à tous ses visiteurs ! dit-il riant toujours de bon coeur.

-Quelle canaille...adorable il fait, rit-elle aussi. -Oui...et je l’aime beaucoup. -Lui aussi, il me l’a dit...parlant alors de cette fameuse personne mystérieuse. Hugues regarda sa montre bracelet. -Marion, il serait plus sage d’aller dormir maintenant, non ? Nous avons tout

notre temps pour nous connaître mieux maintenant, tu as vu l’heure qu’il est ? -Oui, tu as raison ; j’en ai perdu cette notion du temps justement avec toutes

ces bonnes nouvelles, de plus il faut que j’aille au PC, régler quelques détails pour notre sortie de demain, et surtout faire préparer le perceur, l’avitaillement pour une semaine au moins, etc. Va dormir un bon coup, car tu vas avoir besoin de toutes tes forces...moi aussi du reste ; on se retrouve demain matin vers les 8 heures sur la plate-forme, et si je suis retardée, entre si tu veux dans l’appareil, tu y es dès lors chez toi, n’oublie pas, mon grand.

-Merci. -Hugues, tu connais l’appareil ? -Tu plaisantes, ma colombe, qui ne connait pas le perceur de notre fameuse

Valkyrie de feu ? Ils rirent tous deux ; il la serra contre lui un moment, se pencha et l’embrassa

sur les lèvres, puis partit. Marion alla voir les gars du PC, consulter les organigrammes des recherches en

projets et s’organisa avec eux pour se prendre trois ou quatres jours, laissant ses

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futures coordonnées géovariables du vol, comme ils nommaient une région : le secteur qu’un perceur se proposait de survoler, au cas où il faudrait le rechercher ou envoyer des secours ; prétextant, rien que de plus logique du reste, ces journées d’entraînement avec Hugues, son nouveau psycho, ce qui était en partie vrai aussi...Ce en plus de ses projets personnels qui n’avaient rien à voir avec de l’entraînement de patrouilleurs ; mais ça, c’était mystère et boul’ de gomme.

Ses obligations professionnelles parfaitement en ordre, comme à son habitude de commandant de bord consciencieux, elle repartit heureuse et sereine vers son carré, pour quelques heures d’un repos bienfaisant. Le premier qu’elle sentait dans toutes les fibres de son être, qui serait total et profond, ayant enfin renouée miraculeusement avec sa vie de chasseresse infatigable, avec le meilleur des compagnons qu’elle n’avait même jamais osé rêver...

Une si longue nuit d’épouvantes prenait ainsi définitivement fin. Telle une fleur précieuse, elle renaissait enfin à la Vie sacrée de leur prodigieuse mère, Gaïa, la divine ; la resplendissante beauté des insondables et prodigieuses nuits stellaires. Écrin de son amour d’éternité maintenant, pour Céline, sa douce et amoureuse compagne qui la veillait et l’attendait ainsi doucement et sans plus aucune impatience, sereine, sûre de son amour éternel...sur son lit de passions fait d’astres scintillants.

Cheveux coupés courts, barbe et moustache disparues, à la grande satisfaction

de son pilote chéri, Hugues regardait émerveillé le paysage défiler lentement en-dessous d’eux, Marion pilotant à faible altitude et à petite vitesse pour que Hugues puisse redécouvrir ces paysages qu’il connaissait pourtant bien, mais qui vu du haut du ciel lui semblaient presque méconnaissables, irréels de beauté.

-Marion, s’écria-t-il, c’est fantastique de voir ainsi nos territoires...j’avais beau les imaginer vus ainsi, mais la réalité est mille fois plus extraordinaire que mon imagination. Je ne m’en lasse pas. Regarde, là, ces chevaux sauvages comme ils sont beaux, avec ces trois poulains...et là, cette ourse et ses petits, ça ne serait pas le moment de lui tomber dessus à l’improviste. Oh ! cria-t-il extasié, regarde ce lac aux eaux d’un bleu sombre, comme il est beau...on dirait presque la couleur de tes yeux, chérie...

Ces premières heures de vol furent véritablement un réel enchantemant pour son nouvel équipier, et son émerveillement rejaillit par osmose sur elle-même, lui faisant redécouvrir aussi ces paysages grandioses de cette nature exubérante qui défilait sous le perceur, la routine lui ayant obscurci les yeux. Il suffisait pourtant de simplement regarder avec son coeur, son âme, pour prendre simplement conscience du monde fantastique dans lequel ils vivaient, la chance extraordinaire qu’ils avaient d’avoir un tel présent à leur disposition...Elle en fut gréée à Hugues de lui avoir permis de redécouvrir avec des yeux neufs, Gaïa, leur planète vénérée.

-Hugues, je suis si heureuse que tu apprécies ainsi notre Monde neuf, et comme il est beau, n’est-ce pas ?

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-J’en rêvais de le voir vu du ciel, mais la réalité est bien plus grandiose que dans tous mes rêves, c’est fabuleux, et merci de naviguer lentement, je peux ainsi me gaver de cette beauté...et dire que j’aurais pu ne jamais connaître tout cela, j’en frémis à cette seule pensée.

Ils étaient tous les deux assis sur une fesse sur le siège de pilotage pour qu’il puisse au mieux assister à ce fabuleux spectacle ; Marion ayant relevé les accoudoirs ainsi que la planche du tableau de bord relevée sur le côté droit. Elle pilotait lentement avec la seule poignée de commande en main, relié par un câble au tableau de bord ; l’avant de l’appareil, la courte pyramide étant constitué de quatre panneaux constitué d’un matériau transparent donnant à l’observateur l’impression fantastique de voler sans le support d’une machine.

Ils arrivèrent bientôt en vue de la mer, mais elle n’avait rien dit à son compagnon...Elle avait calculée une route nord pour arriver ainsi sur ce bras de la Camargue, à l’ouest du petit bras du fleuve...vers un rendez-vous...un petit bois de tamarins, pins maritimes et pins parasols, face à cette mer d’un bleu irréel qui allait très bientôt monter à l’horizon.

Ils survolaient ainsi lentement une magnifique manade de chevaux d’un blanc irréel, nacré, pur...Hugues, comme tous charretiers, fasciné par la beauté de ces splendides animaux, gardait les yeux fixés sur eux, sous le pare-brise. Il les admirait, muet de surprise et de tant de beauté de les voir de si près, ces merveilleux chevaux libres et sauvages. Marion avait fait descendre tout doucement le perceur au-dessus d’eux, qu’ils auraient pu sauter sur le dos de l’un d’eux...puis, l’étalon, un cheval fabuleux de puissance et de noblesse, dû sentir un malaise en voyant ce bizarre nuage évanescent au-dessus de son troupeau ; il se dressa alors de toute sa puisance, lança un formidable hennisement et la troupe détala dans un galop d’enfer.

Hugues allait exprimer ses sentiments devant ce spectacle, quand pour ce faire il releva la tête et resta muet, paralysé de stupeur, à la vue du spectacle prodigieux qui se dressait alors au devant du perceur...Une immensité liquide et presque bleue comme les yeux de sa compagne, s’étirait à l’infini devant eux. Le charretier venait de découvrir, suffoqué, l’âme de Gaïa, cette mer irréelle qui fascinait les hommes depuis la nuit des temps. Il en pleurait de joie, de bonheur pur maintenant, il n’aurait jamais cru possible tant de merveilles en un seul jour.

-Marion chérie, lui dit-il en la pressant sur sa poitrine, ô Marion, tu ne peux savoir, c’est le jour le plus fantastique de toute mon existence. Merci, mon amour chérie, pour m’avoir offert ces cadeaux inestimables, de telles découver- tes en un seul jour...pince-moi, car j’ai peur que ce ne soit qu’un rêve.

-Non, Hugues, inutile de te pincer car tout est bien réel ; elle lui essuya ses paupières mouillées de ses pleurs puis les lui embrassa doucement...C’est mon cadeau de bienvenue à bord, je t’avais réservé cette surprise, sachant que tu l’aimerais...et je suis très heureuse que ce soit le cas, mon chéri.

-Il faudrait être le pire et infâme des barbares pour qu’il n’en soit pas ainsi. -Je suis entièrement d’accord avec toi.

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-Mais...on pourrait peut-être aller se baigner, non ? Je sens une envie irrésistible d’aller m’y vautrer, m’y enfoncer de tout mon être dans cette immensité d’azur qui m’appelle, semble-t-il, pas toi ?

Marion rit de bon coeur de voir son amant pris lui aussi par ce puissant appel de Gaïa.

-Hugues, mon amour...la surprise n’est pas complète, écoute-moi sagement. Nous allons rester deux ou trois jours ici, blottis dans ce magnifique bois de pins parasols, là sur la droite...Vois la beauté majestueuse de ces arbres.

-Ils sont magnifiques, grandioses même, je ne connaissais pas. -Oui...j’ai un rendez-vous avec...avec...une personne...c’est personnel. Hugues,

mon chéri, nous allons nous aimer ici comme des fous mais, si tu me vois faire des choses incompréhensibles, n’aie pas peur, d’accord mon grand ? Je t’expliquerai plus tard...mais je t’en prie, surtout ne pose pas de question ni ne me dérange alors...tu veilleras sur moi, sur ma sécurité simplement, tu seras mon ange gardien ; promets-le moi, Hugues, s’il te plaît.

-Tu me fais peur, ne commets pas de folie irréparable au moins, je t’en supplie, sinon je ne me le pardonnerais jamais...tu me tuerais aussi, j’en fais le serment.

-Non, ne crains rien, Hugues, je tiens trop à toi et à la vie maintenant. Ce soir, toi qui aime tant les belles histoires, je vais te raconter une histoire d’amour extraordinaire, comme il n’en a jamais été écrite dans aucun conte, et comme il n’en existera plus jamais de pareille sous les cieux...

Mais pour l’instant, nous allons poser ce tas de ferraille dans ce bois...ensuite, j’ai mon rendez-vous comme je t’ai dis, mais je n’en ais pas pour longtemps, chéri ; il faudra que tu patientes encore un peu ; puis nous pourrons alors nous baigner, nous plonger dans l’âme de Gaïa, d’accord ?

Marion fit se faufiler le perceur entre les arbres pour aller le poser à l’endroit exact où ses patins s’étaient incrustés dans ce sable blond et chaud, il y avait de ça moins de trois semaines auparavant seulement. L’appareil posé, regard perdu un instant, elle regardait la plage à travers le pare-brise ; cet antique chemin de traces de doubles pas sur ce sable blond descendant vers la mer...des rires de femmes retentirent un instant dans sa tête...Elle fit un bond dans son siège, Hugues l’appelait, tenant la poignée de la porte.

-Je peux l’ouvrir maintenant, Commandant ? lui dit-il souriant, que je meurs d’envie de marcher sur ce sable.

-Oui, mais reste en tenue...tu vas monter la garde, armé avec ta carabine, le temps de mon rendez-vous.

Hugues ouvrit la porte, une chaude brise marine aux senteurs puissantes entra dans la cabine, il prit sa carabine dans le ratelier mural à côté et sauta sur ce sable blond, il cria tout heureux à Marion.

-C’est fabuleux chérie...et cette odeur de la mer, je n’aurais jamais imaginé une telle chose.

Marion sauta dans le sable à ses côtés, elle tenait un long paquet roulé dans un tissu noir, un cordon noué le tenant ainsi, elle était nue.

-Hugues, monte la garde...je te confie ma vie.

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Elle défit le cordon, déroula le tissu et jeta le tout dans le perceur. Elle tenait alors dans ses mains, un sabre et un poignard dans leurs gaines ; autour de son coup pendait un collier multicolore en toc, jetant mille éclats...

Hugues ne dit rien, mais il reconnut aussitôt le collier de Céline, pour la bonne raison que c’était lui qui le lui avait offert...Ils avaient étaient très intime Céline et lui, comme en étaient les moeurs de leurs communautés...

-Ne commets pas de folies, Marion...tu me fais peur. -N’aie crainte, elle l’embrassa sur les lèvres puis descendit vers la mer. Elle entra dans l’eau tout doucement, le visage levé vers le ciel, tenant des deux

mains les armes serrées tout contre sa poitrine, verticales entre ses seins, la bas du sabre entre ses cuisses...Elle entra dans l’eau jusqu’à la taille, se baissa lentement...puis elle s’allongea sur le dos, tenant l’équilibre en faisant de petits mouvements de nage de la main gauche...Elle resta longtemps ainsi, paraissant dormir presque...son corps ondulant, suivant la très légère houle. Hugues ne la quittait pas des yeux, inquiet...

Puis, elle se releva enfin, s’éssuya le visage et rermonta la douce pente de la plage, elle sourit à Hugues, qui en fut soulagé...Elle remonta de plus de quinze à dix-huit mètres sur le sable, bien au-dessus de la ligne d’eau des tempêtes, espérait-elle. Elle sépara les lanières des deux armes, tenant le couteau passé à un bras par le lacet puis, elle planta avec force le katana dans sa gaine dans le sable, s’appuyant dessus en le tournant pour l’enfoncer.

Satisfaite, l’arme dépassant des deux tiers environ, elle tassa le sable à coups de talon autour de son embase, puis elle fixa le poignard sur le manche en l’amarrant solidement ; elle leva ses deux bras et ouvrit le fermoir du collier qu’elle enroula de deux tours sur les deux manches des armes, refermant la fermeture. Elle fit deux pas en arrière pour contempler le résultat, puis elle tomba un genoux à terre et, tenant une main appuyée sur le manche du sabre, elle fit une longue et intense prière...

Hugues avait enfin tout compris...dernier adieu à son amour, en ce lieu qui avait certainement dû être le témoin de leur passion démesurée...

Marion était dans un songe irréel, des rires et cris joyeux de femmes résonnaient dans sa tête...Brutalement, le claquement sec d’une culasse qu’elle connaissait que trop bien la fit sursauter, Hugues venait d’armer sa carabine. Il regardait au loin vers sa droite, vers le soleil et elle entendit alors un grand galop et, se levant et se retournant d’un bloc, elle vit dans le soleil un immense étalon blanc comme neige qui fonçait sur eux de toute sa puissance...

Un flash dans sa tête et elle cria à Hugues. -HUUUGUES ! ne bouges pas, c’est un ordre ! Je t’en prie Hugues, ne lui fait

pas de mal quoi qu’il arrive, jures-le moi ! Ses yeux lançaient des éclairs. Il était éffaré, connaissant le danger redoutable que représentait un pareil

animal mais, il avait juré de lui obéir quoiqu’il arrive...et il était foutu, prisonnier de ce serment qui était une folie, il le savait bien ; cette promesse l’étouffait maintenant, mais...trop tard. Catastrophé, il baissa son arme, la regardant avec intensité ; priant le cosmos de toute son âme pour protéger cette folle et lui-même, car si elle mourait il ne lui survivrait pas, il le lui avait promis aussi...

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Marion fit une courte prière : Céline, mon amour chérie...ce beau cheval va décider si je te rejoins maintenant, je mets ma Vie devant lui...Une voix douce lui répondit alors. Marion, non mon amour, reste en Vie encore, et fais-moi vivre avec ton bel amant, je vous aime tous les deux, je t’attends, mais pas maintenant, je t’aime...

Comme dans un songe elle fit un pas sur le côté du sabre et fit face au danger, les deux pieds écartés, bien campée, les bras ballants, mains ouvertes tournées vers l’avant, sa tête blonde relevée, elle admirait ce fantastique étalon qui fut alors sur elle en un éclair.

Il la contourna en pleine vitesse, fit un large tour complet puis s’élança de nouveau sur elle. Il pila sur place en face d’elle...la regardant à trois mètres. Il était majesteux de puissance et de noblesse...levant et baissant sa tête, naseaux reniflants, piaffant, faisant entendre ces sourds et ronflants bruits de gorge. L’étalon se dressa alors de toute sa formidable hauteur, les sabots avant battant l’air et poussa un hennissement formidable...il aurait pu aisément la tuer.

Marion restait immobile, étrangement calme, ses yeux ne quittant pas ceux de l’animal ; ces grands yeux noirs globuleux et jetant des éclairs. L’étalon retomba lourdement les sabots sur le sable, piaffant toujours, dressant puis baissant sa tête...Comme pour me saluer, pensa-t-elle follement.

Intrigué vraisemblablement par cet animal insignifiant qui n’avait pas peur de lui, le cheval s’approcha lentement, la sentant de loin puis, la dominant de toute sa haute taille, se calmant un peu, il approcha, baissa son museau sur le visage de Marion. Elle sentit alors ce souffle puissant sur son visage, et sans savoir pourquoi cela lui chavira l’âme. Il soufflait fort, piaffant encore par moment, le cheval baissa son museau, le frottant sur ses seins...descendit sur le long de son ventre...elle était suffoquée par une intense émotion. Il redressa la tête et poussa de nouveau un hennissement, puis il retourna la sentir...son museau arriva à hauteur de son sexe, il la poussa avec son museau, elle fit un pas en arrière pour ne pas tomber, il revint et elle sentit une chaude et puissante respiration tout contre elle, en elle presque et...inexplicablement, il lui fut impossible de se retenir, et elle jouit comme une folle, intensément...en temblant de tout son être.

L’étalon la poussa encore avec son museau, soufflant, la sentant...Elle était comme folle de ce qui allait lui arriver. L’étalon la sentait avec insistance maintenant, il se dressa encore, son énorme et immense sexe dressé vers les cieux, il hennit, battant l’air des sabots.

Quand, on entendit un autre hennissement au loin ; l’étalon retomba lourdement sur le côté de Marion, écouta, les oreilles dressées allant dans tous les sens ; puis il poussa un retentissant hennissement et partit au grand galop, queue et crinière dressées.

Marion tomba à genoux sur le sable, épuisée, tremblante, le visage défait...haletante, ses cuisses pleines de sable collé sur les traînées de sa folle jouissance. Hugues courait vers elle et se jeta à genoux pour la prendre dans ses bras, elle se laissa bercer comme morte, le corps mou, sans réaction, il la secoua fortement...et elle revint à elle. Il l’amena au perceur en courant et lui donna un grand verre d’eau fraîche, puis lui passa un linge mouillé sur le visage et la nuque...

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C’était passé, elle reprit vite son dynamisme habituel, comme si de rien n’était. -Marion...ne refais plus jamais une choses pareille, t’as compris ? ou une autre

dans le genre, d’accord ? parce que je te promets alors de ne plus tenir mon serment. Tu es complètememnt folle, mais je t’aime à la folie aussi, alors entre deux fous on est bien monté, avec deux fadas, hein ? rit-il.

-Oui, je suis folle, c’est l’amour qui me rend folle...Céline m’a dit de ne pas mourir maintenant...elle veut vivre avec nous deux, jouir ensemble de la vie...tu la connaissais bien, Hugues ?

-Oui, Marion...Nous nous connaissions très bien tous les deux...je l’adorais, non, il se reprit, je l’adore, il faut dire ; c’est une Femme fascinante aussi, qui adore la vie, et si gaie...C’est moi qui lui avait offert ce collier, montrant d’un geste du menton le sabre sur la plage...

-Je suis heureuse alors, Hugues, que tu la connaisses et que vous vous aimiez aussi...Ça ne te dérange pas qu’elle soit avec nous ? Car tu sais, chéri...quand nous ferons l’amour je le ferai avec elle aussi.

-Non, rit-il...Faire l’amour avec une femme double, voilà un chose peu commune, non ? mais dis-moi, si nous allions enfin nous baigner, non ?

-Oui, tu as raison, on l’a pas volé...elle regarda alors ses cuisses...Hugues, regarde, c’est de la folie pure, non ? Ce cheval m’a faite jouir debout comme une folle...c’est normal tu crois ?

-Franchement j’en sais rien, moi qui peut prétendre bien connaître les chevaux, je n’avais jamais vu un étalon aussi superbe et aussi puissant, c’est un animal si fabuleux, mythique semblait-il...Mais je n’ai jamais vu un truc pareil avant toi...À mon avis, ma belle, tu es une jouisseuse née, tu es faite pour l’amour, voilà ! Surtout ne change pas, chérie, tu es une adorable nymphomane, et ça me convient parfaitement, étant moi-même un étalon, comme pas mal de belles drôlesses me l’ont souvent dit...à commencer par toi-même...alors hein ? Restons naturels et sautons-nous joyeusement et...sans compter surtout.

Elle éclata de rire. Il se dévêtit rapidement, puis lui tendit la main. -Alors, tu viens ? je veux y arriver avec toi...Nous rentrerons dans cette eau

magnifique tous les deux se tenant par la main, d’accord, Marion ? C’est un instant sacré pour moi, chérie, et je veux que ce soit avec toi qui me l’a offert en présent, tu comprends ?

-Hugues, il faut prendre des armes, on ne sait jamais ce qui peut survenir de l’horizon, la preuve, t’as vu ce cheval...Même s’il semble loin à l’infini un danger peut survenir rapidement sur nous ; on ne sort jamais désarmé.

Il remonta rapidement à bord et lui cria. -Je prends ma carabine et mes deux flingues, et toi, que veux-tu ? -Donne-moi mon sabre ! Il ressortit, tenant sa ceinture jetée sur l’épaule, avec ses pistolets, gardant la

carabine à la main, il tendit le katana à sa compagne, puis ils partirent ainsi à grandes enjambées, main dans la main, à la découvert de cette mer qui les appelait de toutes leurs fibres. En passant à côté du sabre de Céline, elle lui dit.

-Hugues, comme tu as dû le comprendre, ces armes sont celles de Cèline...il ne faut pas les toucher, elles resterons là, pour toujours.

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-J’avais compris, oui. Marion planta son sabre dix mètres plus loin, droit dans le sable et Hugue y

appuya sa carabine qui resta debout, la ceinture pliée posée à côté de façon que les pistolets ne touchent pas le sable. Il se sourirent...face à la mer, gonflant leurs poumons de ces puissantes senteurs marines uniques. Hugues chercha la main de Marion, qui la sentant la lui prit et la serrant fort et ils coururent se jeter dans cette onde fabuleuse.

Comment décrire alors la joie suffocantes de ces deux grands enfants ? C’est pure illusion que de tenter prétendre le faire. Aux cris incessants des nuées de mouettes et de goélands habituellement maîtres de ces lieux sublimes, se mélèrent alors ceux de ces deux immenses et étranges bipèdes qui firent autant de bruit sinon plus à eux deux que toutes ces volailles marines tournoyantes et piaillantes réunies...

Fantastique symphonie de la grandiose et somptueuse Vie d’éternité, chantant à la face de ce Monde virginal la gloire resplendissante de Gaïa, la mère divine qui choyait ses deux enfants d’or s’ébattant, confiants et heureux sur son ventre d’un bleu sombre aux reflets mauves, les mêmes que la couleur des yeux de cette somptueuse et jeune Walkyrie de feu qui courait sur ce sable blond, là, poursuivie dans une fabuleuse tempête de rires cristallins, par un géant ébernéen à la chevelure d’ambre, un dieu antique, fabuleux guerriers nordique qui essaimèrent la Vie dans ce septentrion porteur de noblesse et grandeur presque oubliées...

Gaïa les couvait, femelle farouche, de sa tendresse et passion jalouse retrouvée grâce aussi à ces deux-là justement...Deux unités de ces fragiles mais obstinés rejetons, symboles des conquérants mêmes de cet avenir vertigineux qui mûrissait lentement dans ses entrailles de flammes très bientôt rédemptrices.

Ils couraient, tourbillonnaient, flammeroles vives et sautillantes, dans un authentique oeil d’un cyclone de plumes et becs qui les entourait d’un vortex criard et zébré de flèches sonores argentées et cendrées...Véritable ode à la joie, grandiose fête païenne de l’amour et de la renaissance prodigieuse et sacrée.

Riants aux éclats, ils s’abattirent sur le sable chaud, vaincus par la fatigue de leurs courses et ébats dans cette eau fabuleuse regorgeant d’énergie ; de cette folie enfantine qui les prit délicieusement dès qu’ils s’y vautrèrent avec passsion, dans cette eau saline encore chaude et mystèrieusement vivifiante et enivrante. Marion s’écroula, se laissa aller à la renverse, étalée, ouverte sur la sable chaud qui transmettait à tout son corps des ondes bienfaitrices et bouleversantes.

Hugues qui la coursait depuis un grand moment, prenant garde de ne surtout pas la rattrapper, faisant ainsi durer ce jeu fantastique à l’infini...Poursuite qui même ludique faisait monter en ses fibres mâles et puissantes, ces pulsions mystérieuses et excitantes du chasseur coursant sa proie...

Il s’abattit sur elle en riant comme un fou, ils roulèrent plusieurs fois, étroitement enlacés et se retrouvèrent enfin immobiles, essoufflés, radieux...Lui, sur le dos, Marion se retrouvant assise à cheval sur son ventre dur...Elle le regarda de son incroyable regard bleu aux reflets mauves, excitée...elle se pencha en avant...

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Il la regardait, fasciné...respiration haletante. Elle sentait contre ses fesses monter la vigoureuse envie d’elle de son amant. Elle se blottit, frèle petite chose sur sa poitrine large et puissante, prit doucement la tête de Hugues entre ses mains, doigts emmêles dans ses cheveux d’ambre et l’embrassa intensément dans un long et profond baiser passionné sur la bouche...

Ils se dévoraient l’un l’autre...sans que sa bouche soudée ne quitte celle de son amant, elle se souleva, et d’une main chercha le pieu viril...respiration arrêtée, les yeux fermés, elle s’y assit lentement dessus jusqu’à sentir enfin lui remonter dans son ventre dévasté, une torche brûlante lui enflammant les reins...

Elle commença lentement à se bouger sur cet épieu qui lui ravageait les entrailles...commençant alors une lente, très lente cavalcade qui faisait monter du plus profond de son être vibrant, tendu comme la corde d’une harpe, des insondables et fantastiques pulsions de Vie...

Deux fortes et grandes mains lui enserraient les hanches, accompagnant son galop enfiévré maintenant...Elle sentit alors dans son ventre prit sous l’assaut d’ondes géantes, la flamme brûlante de Vie que son amant lui envoyait, torche terrifiante d’un bonheur qui illuminait ses yeux alors grands ouverts et qui regardaient ce nuage étourdissant d’oiseaux criards leur tournant sur leurs têtes...

Assise de nouveau maintenant, toujours farouchement empalée sur son vigoureux amant qui lui fouillait les entrailles de son sexe géant ; cambrée à l’extrème, le corps élancé vers les astres, sa croupe ondulait en lents mouve- ments de rotation, lovée autour de l’axe de feu de son mâle, le serrant de ses cuisses dans un étau de fer. Elle cria alors son immense et intense bonheur vivifiant qui lui révulsait l’âme, face à ces cieux d’azur, pâle miroir face à ses yeux sombres aux lumineux éclats mauves...

Elle se redressa encore plus, arqua ses reins à craquer, les deux bras alors jetés vers les cieux, ses deux mains dressées aux doigts ouverts comme pour un appel, une invite...Elle cria alors comme une folle un immense cri d’amour, violemment cambrée pour enfoncer encore plus loin en elle ce priape de fer, visage illuminé d’un bonheur étourdissant, moitié pleurant, moitié riant.

-CÉLIIIIINE ! CÉLIIIIINE ! mon amour ! je suis à toi pour toujours...je suis folle de bonheur, jouis avec moi sur mon amant de feu, viens, que je te fasse revivre ! JE T’AIIIIIME !

Elle se laissa tomber sur Hugues qui s’était immobilisée brusquement à cette incroyable et inusité déclaration d’amour ; il la serra dans ses bras comme une enfant fragile. Puis elle se releva au bout d’un long moment et le regarda de nouveau avec dans ses yeux cette passion intense qu’il redoutait, connaissant sa fougue naturelle.

-Hugues...ô Hugues, mon amour aussi, mon merveilleux amant...Je veux que tu me fasses un enfant ! Je veux que tu me fasses l’amour à en crever tous les deux...nuit et jour, jusqu’à ce que je sois pleine de ton sperme de géant antique que tu es...Je veux sentir en mes tripes ta Vie me fouiller...Je veux un merveilleux enfant avec ta puissance et ta noblesse, ta grandeur d’âme. Hugues, mon étalon d’amour, mon merveilleux compagnon chevalier.

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-Avec le plus grand des plaisirs, ma cavale de braise...Mais tu sais, c’est peut-être déjà fait du reste car j’avais tellement envie de toi depuis ces deux jours ensembles que j’ai envoyé dans ton ventre béni, du concentré de Hugues, le désormais célèbre et plus heureux des charretiers, désormais nommé du glorieux titre de noblesse de Charretier volant, évoluant dans des nuages de rêves avec un ange blond empalé sur son ventre !

Il rirent comme deux fous un long moment encore puis, allanguie, comblée, sereine maintenant, elle se souleva lentement comme à regret, sa main gauche tendue appuyée sur le sein noueux de son Homme, yeux dans les yeux, lui la guidait aux hanches, toujours cambrée pour sentir son amant la déhirer encore, son bras droit collé contre son ventre encore parcouru de profonds frémissements, la main à la renverse tout contre ses lèvres gonflées et brulantes, doigts en conque, accompagnant, étreignant, laissant glisser doucement entre eux dans une ultime caresse, ce sexe encore viril de son amant qui la quittait, membre dur et chaud, pal orgueilleux mouillé de leurs folles jouissances.

Elle dégagea sa croupe pleine et brûlante d’amour, lentement, doucement de son amant, le regardant toujours, les yeux emplis de reconnaissance, follement amoureuse...puis elle se coula, s’allongea alors sur son ventre dur et l’embrassa tendrement sur tout le visage ; toujours cambrée, sa vulve encore humide et brûlante parcourue des ultimes contractions, collée contre le sexe de son amant encore dressé entre ses fesses, fière et arrogante vigie.

-Hugues, viens, dit-elle alors de sa profonde et vibrante voix de contralto qui lui chavirait l’âme, allons nous plonger dans Gaïa, retrouver les forces vitales de notre mère.

Elle se leva d’un bond et lui tendit la main, il se leva enfin, épuisé, et allèrent se jeter de nouveau, main dans la main et avec un indicible délice dans cette onde merveilleuse et chaude de Vies sourdes. Debouts, dans l’eau jusqu’en haut des cuisses, elle le prit de nouveau par un bras, le lui serrant fort, et lui dit, la voix rauque, vibrante, le regardant avec force.

-Hugues, jure-moi que tu vas m’aimer comme un fou, je l’exige, je le veux de toute mon âme, jure-le moi, mon amour chéri.

-Connais-tu un mâle qui se respecte et qui serait assez fou pour refuser un si grand honneur et plaisir de ne pas engrosser une Femme telle que toi, mon ange blond ? Il faudrait être dégénéré jusqu’à la moelle alors, oui !

-Merci, mon beau chevalier...Tu vas m’aimer sans reprendre souffle pendant tous ces jours rien qu’à nous ; c’est un ordre, c’est une prière, une supplique...Je veux que tu m’anéantisse avec ton merveilleux et splendide sexe, que tu me ravages, que tu me défonces les entrailles...

Elle se jeta sur lui et ils tombèrent à la renverse sous l’eau, leurs bouches soudées dans un baiser passionné.

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L’esclave Marcellin - Nouveau Guerrier

uand, vers les dix heures du matin, Georges entra dans son local de travail, il trouva sur son bureau une feuille de papier pliée en deux, avec son nom

marqué dessus. Il l’ouvrit et vit sous le texte, au bas du verso de la feuille, la signature de Marion. Il s’assit vite pour lire ce message de cette femme qu’il adorait par-dessus tout et savait enfin sauvée et plus ardente que jamais, il lut.

Sacrée canaille de Georges, que j’adore, Bien entendu Hugues m’a tout raconté de votre vaste conspiration pour sauver l’épave que

j’étais inexplicablement devenue, moi...oui, moi si forte, que je croyais avant, et puis... Georges, je t’aime mon Georges chéri, et tous les autres bien sûr. Embrasse bien fort pour

moi Françoise et Guillaume pour leur aide inestimable ; Guillaume surtout, car je tiens à ce que tu le saches ; c’est lui surtout qui m’a tiré du gouffre dans lequel j’étais prisonnière de mon amour pour Céline. Demande lui qu’il t’explique toute cette histoire car je voudrais que tu la connaisses, toi qui est un Être de sentiments si nobles, tu comprendras alors cet amour qui nous enleva, Céline et moi...ce fut grandiose et malheureusement trop bref et violent...c’est sans doute les raisons de ma folie.

Voici le but principal de ce message, après avoir exprimé mon éternelle reconnaissance à tous mes amis qui m’ont sauvé ; fasse que les forces du Cosmos vous bénissent et protègent à jamais.

Céline a exprimé sa douleur de voir notre chère Gaïa défigurée par ces monceaux d’horreurs sans noms que sont ces villes et zones industrielles polluants tous nos horizons. Elle eut alors l’idée géniale de notre devoir de les faire disparaître à jamais, et pour ce faire, de la nécessité de devoir inventer une sorte d’arme qui désintègrerait le tout en petits morceaux, et que nous actionnerions du haut des airs, pendues sous nos perceurs ; il n’y aurait alors plus, selon son idée que je partage, qu’à enlever ces décombres et les transporter ailleurs...un ailleurs qu’il faudra trouver ou inventer aussi. Mais le principal, l’obstacle majeur de ce gigantisme et compactabilité actuelle de ces monstruosités serait ainsi déjà éliminé...on devrait pouvoir alors aisément trouver une faisabilité de transport.

Voici mon cher Georges l’idée de Céline, qui comptait vous en faire part...Soumets donc rapidement cette idée à nos frères Akadis, avec, j’insiste, le nom de l’auteur ; que le jour où ils nous procureront ces moyens, ce que je ne doute point, comme Céline ; que son nom passe ainsi à la postérité légitime pour avoir contribué de sauver, restituer sa splendeur intègrale à notre mère, Gaïa, la magnifique...Cela lui sera le cadeau d’une de ses filles qui la vénère, Céline.

Mon cher et précieux ami entre tous, Georges, au moment où tu lis cette missive, je suis, comme tu dois le savoir, puisque tu sais si bien toujours tout...déjà en route avec mon nouvel équipier, ce cher Hugues, qui effectivement me connait profondément depuis longtemps et, connaissance que nous allons sérieusement approfondir encore plus, car je l’adore ; c’est un Homme exceptionnel en tous points. Je revis donc pleinement et suis très heureuse.

Je tenais à te le certifier personnellement pour ne plus que mon état te préoccupe. Merci, mille fois merci, Georges, je t’aime, je t’aime si fort. Mille baisers les plus affectueux.

Q

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Ta fille, Marion. Georges reposa lentement la lettre sur son bureau, se renversa contre le dossier

de son siège et essuyant une larme qui roulait sur sa joue gauche, il sourit en pensant à cette noble enfant si passionnée qui revivait enfin pleinement et faisait que tous revivaient aussi sans plus aucune ombre sur leurs têtes. Passé ce court instant de rêverie, il se reprit et enregistra rapidement un message sur son visio, donnant les détails de cette mission importante à réaliser par et pour les Akadis.

Il sortit le disc-mémoire du graveur, le mit dans sa poche et alla d’un pas énergique au PC des missions des perceurs. Miracle, l’un d’eux était libre, il donna le disc-mémoire au pilote, avec mission d’aller de suite le remettre au responsable des Akadis des ateliers d’assemblages des perceurs à Blagnac, avec consigne que le premier qui partirait pour leur base des Appalaches remette ce message à leurs savants et, que ces derniers leurs donnent en retour une réponse, de ce qu’ils pensaient pouvoir faire d’une telle idée de démolition des villes et zones industrielles.

Il n’y avait plus qu’à attendre...encore attendre, toujours attendre, pensa-t-il rageur. En leur monde en gestation toute action prenait un temps incroyable et désespérant, sans communication radio de possible ; ils étaient ainsi condamnés à cette lenteur qui usait les nerfs. Mais comment faire différemment sans risquer de se faire repérer par ces maudits et pourris Zanko-Khuigs ? Tel était leur Monde actuel, pour peu de temps encore, j’espère bien, sourit-il en lui-même, car je voudrais bien être vivant le jour de cette attaque générale et avoir le plaisir suprème d’en étriper lentement au moins un de mes propres mains. Il regarda d’un air rêveur ses deux mains encore robustes tendues devant ses yeux, mains qui ne tremblaient pas d’un cheveux, fermes et puissantes encore...Mains qui sauront donner la mort la plus atroce, dit-il d’une voix forte et inflexible, le regard subitement dur.

De retour sur cette magnifique plage de ce sanctuaire de vie qu’est cette

Camargue redevenue vierge, nous y retrouvons Marion et Hugues, lors de leurs jeux à la sortie de leur baignade et de ce baiser passionné sous l’eau. Ils se redressèrent donc, à moitié étouffés, respirant l’air à grandes bouffées, les yeux pleins d’eau de mer qui les aveuglait à moitié, riant comme des enfants quand, une voix venant de la plage leur glaça le coeur.

-On se paye du bon temps quand on est loin de Bertrand ! Ils se préparèrent à tenter bondir vers leurs armes, Marion s’essuyait les

paupières comme une folle pour tenter y voir mieux quand, elle prit le bras de Hugues pour le rassurer, lui faisant non de la tête, et elle se précipita, tombant dans l’eau plusieurs fois vers un couple nu aussi, qui les observait en souriant depuis la plage...Marion criait et riait en trébuchant dans l’eau...

Là, sur la grève, leur faisait face un jeune couple ; derrière eux deux, à dix mètres environ sur le haut de la plage, on percevait en regardant bien, le nuage évanescent d’un perceur, la porte rabaissée, les marches et une partie de l’intérieur de l’appareil bien visibles. Était une ravissante et plantureuse rousse

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d’environ vingt-huit ans ; un corps épanoui d’une blancheur nacrée, peau de pêche un peu parsemé de taches de rousseurs, avec un visage mince empreint de noblesse et d’autorité naturelle ; le nez fin et droit, bouche pulpeuse aux lèvres esquises, cheveux de braise et avec des yeux d’un vert vif éclatant ; dans les 1.75 mètre d’un charme affolant. Son compagnon, un bel Homme plus jeune quelle de trois ans environ, de même taille à peu près ; la peau très légèrement ambrée, les cheveux chatains clairs et des yeux couleur noisette. Tous deux leurs souriaient chaleureusement, la Femme leur tendait ses bras grands ouverts.

En fait, cette dernière venue était la descendante directe de ce couple de marins qui arrivèrent au port, un certain 1er mai de 2015, et qui à l’époque avaient fui vers l’ouest : Michael et Alexandra, sa lointaine aïeule. Cette femme sur la plage était la réplique exacte de celle-ci, la somptueuse, impétueuse et racée, cette romaine rousse aux flamboyants yeux verts, autre Valkyrie de braise, digne d’un Odin...qu’elle était aussi.

-Alexandra ! Alexandra ! s’écria une Marion folle de joie, tu nous a fait une peur bleue, ma garce ! Elle la rejoignit et elles tombèrent dans les bras l’une de l’autre, s’embrassant et tournant un moment sur elles-mêmes, pendant que les deux hommes se donnaient une vigoureuse poignée de main, se présentant mutuellement : Hugues-Claude...Ils se firent un coin d’oeil complice et regardèrent alors ces deux folles qui se retrouvaient, attendant tranquillement qu’elles se calment.

Marion se sépara alors de sa retrouvaille et lui présenta son compagnon, puis cette dernière leur présenta le sien, Claude, un beau garçon très souriant, mince et bien bâti.

-Mais, réalisa subitement Marion, il y a longtemps que vous étiez là ? à nous... elle jeta un coup d’oeil gêné presque, à Hugues.

-Oooh...environ une bonne heure, dit Alexandra en souriant, regardant amoureusement son compagnon.

-Mais alors, vous...vous nous avez vu... -Oui, ma belle enflammée, dit Alexandra en éclatant de rire et l’attirant à elle

pour l’embrasser sur les joues ; nous avons involontairement assisté à vos ébats multiples et d’une telle sensualité et violence charnelle, dit-elle, mais nous n’avons pas eu le courage véritablement criminel d’interrompre de si belles envolées amoureuses ; si fait qu’emportés à notre tour par une émulation irrésistible, j’ai positionné un peu plus loin le perceur sur un géopoint, et nous nous sommes aussi sautés commes deux fous...C’est de votre faute aussi...on a pas idée de faire l’amour avec une telle frénésie à la vue du cosmos en entier, sans risquer provoquer des catastrophes.

Ils rirent tous de bon coeur. -Marion, lui dit Alexandra, Claude est mon nouveau compagnon aussi, elle

s’adressa à Hugues ; je ne te connaissais pas, Hugues, je ne t’ai jamais vu à Bertrand ?

-Pas étonnant, il y a peu de temps encore j’étais un charretier courant désespérément les chemins...et depuis peu, et grâce à cette merveille, il entoura affectueusement la taille de Marion, la montrant d’un geste, je suis devenu le

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premier Charretier volant de notre histoire ! Et attention...le charretier le plus heureux du monde !

Ils rirent tous ensemble. -Moi non plus, j’ignorais que tu avais un nouveau compagnon, c’est un plaisir

que de te connaître Claude, bienvenu parmi les combattants de l’enfer, comme dit toujours le grand Vladi, dit Marion en s’avançant vers ce dernier, elle l’embrassa sur les joues.

-Comment vont-ils ? lui demandèrent en choeur les deux autres. -Bien. Ils seront heureux, avec Pédro, de savoir que nous nous sommes vus. -Tu sais, lui répondit Alexandra, que mon ancien équipier, Bruno, a

malheureusement été victime d’un stupide et regrettable accident et...dit-elle attristée, il n’a pu récupérer totalement l’usage de sa jambe droite ; il boite et de fait, avec logique, ne peut reprendre ce travail. Il est malheureux comme tout ; c’était sa vie que de courir au secours de ces pauvres malheureux prisonniers de ces pourritures de Zanko-Khuigs...

-Mais au fait, que faites-vous vous aussi dans ce secteur isolé de tout ? lui répondit Marion en souriant

-Comme vous pouvez aisément l’imaginer, étant dans les parages, nous avons fait un crochet pour venir nous baigner rapidement un bon coup ; c’est un de nos endroits préférés car il est justement bien loin de tout...c’est un petit paradis.

-Pareil pour nous aussi, dit Hugues, Marion m’a fait découvrir la mer...J’en suis emerveillé de voir ces immensités vierges ; comme tu dis, Alexandra, c’est effectivement un véritable paradis. Nous, dans nos montagnes, n’avons pas de tels espaces aussi vastes, dit-il en montrant l’immense plage et la mer d’un large geste du bras.

-Je tente d’imaginer la première fois que l’on découvre ce décor, dit Claude, effectivement, ce doit être fabuleux, oui.

-Si tu as la chance d’y venir souvent, lui répondit Hugues, tu ne sais à quel point, mon collègue, dit-il lui souriant. Mais au fait, d’où venez-vous comme ça ?

-De Girelles, lui dit Claude, l’ancienne Grotte des Demoiselles -Bien ! Allez zou ! allons nous baigner tous ensemble, que nous devons repartir

rapidement, s’écria joyeusement Alexandra. -Et où allez-vous ainsi si vite ? lui demanda Marion. -La station a décidé d’envoyer régulièrement une équipe de patrouilleur

surveiller l’évolution du repaire des Zanko-Khuigs, et comme toutes les fois que le cosmos fait, tous les équipages se portèrent volontaires. Nous avons tiré le gros lot. Je suis d’autant plus heureuse que je pourrai peut-être voir le bateau de mes lointains grands-parents, s’il n’a pas coulé ; Michael et Alexandra aussi, se nommait-elle...Mais suis-je bête, vous connaissez tous sa lettre et le leg spirituel des deux à nous tous, leurs descendants. J’ai une photographie d’elle que j’ai tiré de son journal privé sur disc-mémoire : je lui ressemble comme deux gouttes d’eau, c’est incroyable non ? Mêmes cheveux, les yeux, la taille, tout, cette femme que j’aime mystérieusement, revit en moi...Ce sont les mystères de l’atavisme, près de douze générations après pourtant, c’est fou...

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-Alexandra, s’il te plaît, dit alors Marion inquiète, sois très prudente, chérie. -T’inquiète pas ma belle, tu connais les lieux, je crois, non ? -Oui un peu, j’y suis allé rapidement une fois en patrouille au début, mais il y a

longtemps, c’est pas notre secteur habituel. -Oui, nous allons nous planquer sur la dernière île, dans la baie en face ; durant

le jour, derrière la ruine de ce vieux chateau isolé sur les rochers...A l’extrème limite sud de la baie, et je vais même tenter de voir si le perceur peut y descendre à la verticale entre ces seules murailles qui sont encore robustes, alors tu vois...T’es rassurée comme ça ?

-Oui...mais je te connais ; elle s’adressa à son équipier. Claude, fais-moi une faveur...surveille-la bien veux-tu ? parce qu’elle me fait peur, elle est bien capable de commettre des folies, je la connais.

-Question folies, entre parenthèses, lui répondit Alexandra en riant, faudrait peut-être voir laquelle est la plus dingue des deux. N’est-ce pas ma belle patrouilleuse ?

-Je puis vous assurer, dit Claude, prenant sa compagne par la taille, que cette beauté est véritablement infernale à ses heures, et n’est pas de tout repos !

-Et moi, répliqua Hugues, entourant aussi la taille de Marion, je puis vous assurer qu’il faudrait inventer de nouveaux mots pour tenter décrire cette charmante furie, à ses heures aussi !

Marion essaya de lui donner une giffle pour rire, mais il lui bloqua le bras au vol et l’embrassa amoureusement sur la bouche...

-Bon, arrêtez vous deux ! C’est vous deux qui êtes infernaux oui, s’écria Alexandra en riant...sinon on ne va jamais repartir de cette merveilleuse plage.

-Moi j’ai tout mon temps, dit Claude, admirant Marion avec insistance... Celle-ci voyant ce net hommage à ses charmes, lui dit. -Trop tard mon joli...Ce serait avec grand plaisir mais je ne puis. Une autre fois

oui...elle les regarda tous deux, un sourire aux lèvres, visiblement heureuse, et leur dit tout à trac...Hugues va me faire un enfant, rien que lui ! se collant amoureusement contre ce dernier.

-Si c’est pas déjà fait, hein ? dit Claude en souriant, faisant un coup d’oeil complice à Hugues.

-Merveilleux, s’écria Alexandra...Ce bébé va être resplendissant, avec des parents tels que vous deux...Marion, tu as combien d’enfants maintenant ?

-Deux adorables chenapans...Clovis qui va sur ses cinq ans bientôt, et Athéna qui vient d’avoir trois ans...ils sont beaux comme des petits astres et ils promettent ; Clovis a déjà un caractère impétueux.

-Avec une mère pareille le contraire serait plutôt surprenant, sourit Alexandra. -Et toi, où en es-tu de tes mioches ? -François a douze ans maintenant, répondit-elle avec visiblement grande fierté,

il va entrer dans l’active dans deux mois, il est fou de bonheur, et il te pilote un perceur, faut voir comme ; rapide, champion de tir à toutes les armes, les sports de combat, il est déjà un guerrier affirmé, je suis très fière de lui. Suzanne, elle, a huit ans, elle est l’opposé de son frère, plus douce, on en fera une grosse tête je

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pense, elle ne sort pas le nez de ses livres et ordinateurs ; et la petite dernière, Léonie, va faire ses six ans...

Ils sont tous adorables, studieux et forts, je les adore ; ils seront des Humains forts et responsables. Elle regarda amoureusement Claude, le prenant par la taille. Je crois, dit-elle hésitante un instant, que...que c’est une merveilleuse occasion de vous annoncer aussi à tous...que je suis enceinte de nouveau, de toi Claude, mon chéri.

Ce dernier la regarda, ravi, n’en revenant pas, la serrant contre lui. -Et tu ne m’avais rien dit... -J’attendais un moment heureux pour cela, et celui-ci est bien choisi. -Depuis combien de temps ? -Oh ! un bon mois maintenant, je pense. Tous la félicitèrent joyeusement, lui souhaitant une grossesse heureuse et

menée à bon terme. -Bon, cette fois on va se baigner, cria Claude ! -Avant que vous repartiez, dit Hugues, vous viendrez à notre bord et nous

trinquerons à cette heureuse renconte, et à ton nouvel enfant, Alexandra, ma jolie. Tu es vraiment resplendissante, il fallait que je te le dises avant que vous ne repartiez.

-Merci, Hugues, ton compliment me touche beaucoup, mais toi, fabuleux géant d’albatre, qui es-tu vraiment ? le sage Odin ? son fils Thor ? Ta beauté et ta puissance m’impressionne vraiment, Hugues.

-Je suis simplement le serviteur de cette noble et belle Femme, dit-il souriant en lui montrant Marion, son seigneur et esclave.

-Il faudra un jour que nous rencontrions, Hugues, mais alors il ne faudra surtout pas faire un enfant tous les deux, car ce pauvre bout de chou s’enflammerait tout seul à la naissance, avec des parents aux cheveux de braise comme nous deux.

Ils rirent tous les quatres ; Hugues continua son propos. -Et nous trinquerons à ton futur enfant à toi aussi bien sûr, Marion chérie, et le

succès de votre mission...Nous avons un petit cidre bien frais, que je vous dis que ça, il est particulièrement bien réussi cette année.

-Au fait, s’écria Marion, s’adressant à sa collègue, qu’en est-il de ta jeune amie qui devait accoucher aussi ; Ninon, c’est bien son nom ?

-Tu n’as pas su ? Alexandra se rembrunie...Elle a accouché il y a trois semaines bientôt, en avance d’un mois environ et...la pauvre, elle était si heureuse car cela aurait été son premier. Son bébé est né mal formé, les jambes et pieds tordus parait-il, et il a bien sûr fallu le libérer, comme le commande à juste raison notre loi de Vie.

-La pauvre...elle qui était si contente, dit Marion attristée, je m’en souviens bien, elle me parlait de ce bébé comme de la merveille à naître, et puis voilà...La nature est bien ingrate parfois, mais heureusement pour cet enfant et pour la communauté entière, que nous soyons suffisemment forts maintenant pour ne plus maintenir en vie des êtres qui seraient irrémédiablement condamnés à une vie de disgrâce, et la cause du malheur des siens ; que ce soit pour handicap

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physique et, raison de plus, pour handicap mental, comme les autres anciens faisaient suivant leurs poncifs lâches et hypocrites d’alors, selon les préceptes ignobles de leur foutue église.

-De toute façon, dit Claude, ils ne faisaient que suivre des idées forces qui les avaient condamné depuis longtemps à finir de façon horrible et infâme, ce qu’ils ont parfaitement réussis ; mais ce qu’il ne faut surtout pas oublier pour saisir dans son entier leur degré d’infamie : ils pratiquaient ce vaste chantage aux bons sentiments humains, qu’ils disaient, pour en réalité créer un vaste marché d’assistance humanitaire dont en vivaient de très nombreux salauds, et en premier les laboratoires pharmaceutiques, les médecins et services hospitaliers et sans oublier cette véritable lèpre qu’étaient toutes ces Administrations étatistes.

Ils en étaient même arrivés à maintenir un marché factice de l’adoption d’enfants, qu’eux-mêmes abandonnaient, ceci par l’imposition de lois, normes restrictives limitant volontairement et insidieusement la possibilité d’adoption de ces malheureux enfants, pour maintenir à perpétuité le gagne-pain de ces groupes de criminels. Le mensonge et l’hypocrisie étant institués en valeur absolue, étant leur loi même.

-Mais Ninon va bien maintenant, rajouta Alexandra, il y a une semaine maintenant, elle a fait sa première mission de psycho avec son pilote et amoureux, Jackie, et lors de cette première expérience ils ont sauvé un beau garçonnet de huit ans ; alors imagine la joie de cette enfant encore, elle n’a que dix-sept ans tu sais. Ils sont fou d’amour tous deux, ils sont merveilleux, et Jackie va lui faire vite oublier ce mauvais moment, je suis rassurée là-dessus.

-Bon, mes amis, dit Claude, c’est bien joli tout ça, mais si nous allions enfin nous baigner, car franchement j’en ais ras le bol des parlotes maintenant !

Décision adoptée sur le chant et au quorum absolu. Ils coururent dans l’eau, se tenant joyeusement par la main en criant,

gesticulant, envoyant des trombes d’eau au ciel...Et ce fut de nouveau pour le cyclone de plumes et becs surpris d’un tel raffut, l’occasion de faire un grand et dès lors mémorable silence d’au moins...deux énormes secondes.

En ressortant de l’eau un grand moment après, tous riaient comme des enfants...Ils remontèrent vers le haut de la plage, et Hugues prit ses armes et lança le sabre à Marion qui venait en arrière, qui tenait le bras de son amie en conversant toutes deux. Il la siffla pour qu’elle le voit et attrape son katana au vol et, levant ainsi les yeux, Marion vit, effarée, Claude qui approchait du sabre de Céline pour le prendre aussi, elle hurla épouvantée et courue vers lui.

-CLAUDE ! NOOOOON ! Celui-ci bloqua son geste en suspend et resta immobile, la main à deux doigt

de prendre ces armes. Stupéfait, se demandant bien ce qui arrivait, ce qu’il pouvait avoir fait de mal inconsciemment.

Marion le rejoint rapidement et lui prit le bras avec force, le regardant avec dans ses yeux une flamme terrible.

-Claude, il ne faut pas toucher à ces armes...elles doivent rester ici, personnne ne doit les toucher, jamais !

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Alexandra les rejoint vite...elle pensait avoir compris le pourquoi de ces armes plantées dans ce sable. Elle prit Marion dans ses bras, elle trembait et lui dit de sa voix sourde, émue.

-Alexandra c’est...ce sont les armes de Céline, il ne faut pas les toucher, jamais. -J’avais compris, ma chérie, mais excuse Claude, il ne savait pas le pauvre, il

croyait bien faire. -Oui, pardonne-moi Claude, dit alors une Marion penaude, lui prenant le bras,

c’est de ma faute, j’aurai due vous prévenir. -Ça n’a pas d’importance, Marion, t’inquiète pas, c’est déjà oublié pour moi,

dit-il en lui caressant la joue. -Si tu veux, chérie, lui dit Alexandra, j’ai une idée magnifique. Nous

reviendrons ici après notre mission ; nous choisirons de beaux galets dans un torrent et nous construirons un petit tertre pour y fixer le sabre plus solidement...tu veux bien ?

Marion le regarda un instant, pensive. -Oh oui ! merveilleuse idée...Je veux que ce soit uniquement toi qui touche ses

armes et son collier, promets-le moi, lui dit-elle le regard vif, et il ne faut pas sortir les lames de leurs fourreaux surtout, je les y ais remises telles quelles après le combat ; car ces lames sont pleines du sang de ces immondes porcs, ces fanatiques religieux...Céline en a décapité un, égorgé, démembré et éventré quatres autres, et elle m’a sauvée la vie, comme elle me l’avait promise...elle donna la sienne d’un seul jet...Des larmes coulaient sur son visage.

-Je te le promets, Marion chérie...je ferai tout comme tu veux, je t’en fais le serment sacré.

-Merci, merci...Céline t’aimait beaucoup elle aussi, elle sera contente que ce soit toi qui lui construise ce tertre...oui.

-Mieux même, dit sa compagne, à chaque fois que nous viendrons ici, j’y mettrai un bouquet de fleurs, et tiens ! dès que construit, je prendrai des photos et ferai une petite vidéo avec tout ce paysage ; vidéo que je t’enverrai lors du premier transfert de marchandises, pour vous envoyer des citrons, huile, raisins ou autre, d’accord ? Ou même mieux, si j’ai l’occasion de te les porter moi-même peut-être, d’accord comme ça ?

-Alexandra, merci, merci, je t’aime très fort tu sais, tu es une amie précieuse, merci.

-Moi aussi, mon coeur, je t’aime...nous t’aimons tous. Il faisait nuit maintenant, Alexandra et Claude étaient repartis depuis

longtemps déjà pour poursuivre leur mission. Tous deux s’étaient aimés follement encore, baignés avec délices...Puis, Marion avait sans rien dire encore à son compagnon, replacé le perceur dans la ramure des arbres, à l’exact emplacement que quelques semaines auparavant. Fabuleux hasard ou cadeau royal des puissances stellaires ? le climat était le même en tous points identique que précédemment : ciel dégagé, douce brise marine, même la lune s’était mise de la partie pour venir les saluer ; jusqu’à la température identique à un degré près peut-être...

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Ils dinèrent d’un repas identique puis rangèrent le tout. Marion lui dit alors. -Hugues, comme je te l’ai promise, je vais maintenant te raconter cette fameuse

histoire...Pour cela nous allons faire notre toilette et revêtir nos vêtements de nuit pour être plus confortable ; puis nous allons éteindre la lumière de la cabine et installer un grand sac de couchage, que voici, devant la porte que nous allons ouvrir en grand pour profiter ainsi de cette merveilleuse nuit sous les étoiles ; regarde cette lune sur la mer, comme c’est beau. Et elle installa le tout comme elle le lui dit.

Elle s’allongea sur le duvet et l’invita à venir contre elle, sauf en plus, une petite lumière qu’elle avait prévu entre eux deux, pour voir le beau visage de Hugues tout contre elle, y chercher le courage dans ses beaux yeux verts et...elle lui raconta dans le moindre des détails l’éclosion de leur immense amour avec Céline, de cette soirée identique même ; le repas qu’ils avaient pris, le duvet, sa chemise de nuit, l’emplacement du perceur dans les arbres...Tout était identique, elle lui raconta tout, ne lui cacha rien, jusqu’au dernier souffle de Céline, son amour éternel.

Aux dernières paroles, de grosses larmes coulaient silencieusement sur ses joues...elle se blottie dans ses bras...Il la dorlotta doucement comme un petit enfant malade, lui caressant les cheveux...l’embrassant tendrement...jusqu’à ce qu’elle retrouve la paix de son âme vaillante, si sensible et passionnée.

Hugues, depuis le début de ce récit grandiose et combien pathétique, n’avait pas dit une seule parole, la regardant et l’écoutant, fasciné...lui tenant une main dans les siennes. Il n’y avait rien à dire à une telle histoire d’amour, c’était vrai ce qu’elle lui avait dit...plus jamais une telle passion n’éclorait sous ces cieux..

Il la consola longtemps, amoureusement, tendrement, le coeur chaviré de bonheur d’avoir ce privilège rare de pouvoir aimer et être aimé par un tel Être si exceptionnel ; ayant enfin miraculeusement trouvé cette opportunité tant recherchée, de pouvoir entièrement vouer sa force herculéenne, toute son âme et sa sensibilité à cette femme de lumière, si fragile et si terrifiante aussi ; lui, ce dieu antique de cet Occident immortel, protégeant les faibles et donnant la vie fragile et sacrée...

Blottie dans ses bras, fragile chaton blessé...ils s’endormirent profondément, ainsi embrassés, bercés par le chant sublime et éternel de cette nature prodigieuse, un rayon de lune venant même les caresser un instant d’un doux pinceau de lumière pâle ; le hululement d’une chouette exprimant, faisant d’autorité connaître à tout son vaste entourage, ce merveilleux amour qui renaissait encore dans cette douce nuit automnale ; amour bercé par le doux chant de cette enivrante brise marine parfumée de senteurs qui chavirent l’âme et qui rendent fou parfois aussi...

Zéphyr jouant dans les aiguilles des branches de ces autres géants aristocratiques que sont ces pins parasols, parfaites couronnes royales à ces amours de deux dieux antiques impétueux et sages, de leur devoirs immortels et vitaux...Ainsi renait l’amour, toujours, inlassablement de lui-même, il meurt foudroyé puis éclos de nouveau, indestructible...flamme d’or et de pourpre, éternel Sphinx de la puissante Vie universelle.

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L’année 2396 vit les heureuses naissances de deux magnifiques bébés qui

vinrent agrémenter les stations de Girelles ainsi que celle de Bertrand. Alexandra, en juin, donna le jour à une ravissante fillette nommée Hélène, qui

ressemblait fortement à son père, Claude ; un joli bébé aux cheveux chatains foncés, mais avec les yeux verts de sa mère. Marion quant à elle la suivit le mois d’après en donna le jour en juillet à un gros poupon roux comme un soleil, avec les yeux verts comme ceux de son père, et qu’ils appelèrent César ; un Hugues qui était fier et fou de joie car cet enfant était son premier rejeton officiel...car identifiable comme tel.

Les ébats amoureux de ces jours de folies érotiques sur cette plage de Camargue, avaient enfin porté leur fruit. Abrités qu’ils furent sous les pins parasols et annoncé et chanté par une chouette divinatoire...pour ne pas dire un peu sorcière, enfin...comme toutes les chouettes, quoi.

Deux jeunes vigoureux combattants venaient de voir le jour mais, auront-ils à se battre pour la reconquête de leur planète, ou leur parents pourront-ils leur assurer ce paradis tant attendu ?

La haute muraille de couleur ocre clair surplombant un plateau rocheux à fleur

d’une eau calme de couleur bleue sombre, se détachait, solitaire, sur cet immense panorama marin...Les goélands et les mouettes étaient les seuls habitants de ce lieu isolé. Seule, au nord et à une encablure, derrière un long mur de pierre écroulé en partie et courant le long du bord de mer, existait une grande construction basse dont une partie était écroulée, perdue dans une végétation dense et sauvage, de l’autre côté d’un sentier courant au pied de cette antique forteresse...L’ensemble était le seul vestige apparent d’un très ancien lieu de vie.

Le perceur était en position géopoint, juste derrière et en haut de la façade sud de la forteresse, face à cette mer d’immensité donnant sur cet infini azuréen. Alexandra se réveilla lentement ; ce fut en fait paradoxalement le calme revenu qui l’éveilla à la tombée du jour, de par le silence suivant l’arret des cris incessants de ces oiseaux de mer se chamaillants continuellement du lever au coucher du soleil...Ces gabians, comme ils appellent les goélands dans cette région au sud de leur territoire, ainsi que ces éternelles mouettes rieuses, jacasseuses, gueulardes et emmerdeuses itou, faut dire la vérité, pour celui qui prétend dormir en plein jour...chose quasiment impossible avec ces infernaux volatilles.

Plus d’un an déjà pensa-t-elle en souriant, en ayant une pensée émue pour sa petite dernière née, Hélène, qui de l’avis de tous sera une Femme ravissante ; comme sa mère, lui avait dit alors son compagnon, Claude, toujours amoureux fou d’elle, et elle aussi de lui, s’avoua-t-elle en souriant, le regardant dormir à ses côté, dans un langoureux abandon...Une année était passée depuis qu’elle avait repris son job après son dernier accouchement...Une douce et agréable pensée lui vint, se souvenant alors de cette heureuse rencontre avec Marion et Hugues,

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sur cette plage de Camargue. Leurs projets d’alors, Marion qui avait aussi accouchée juste après elle, son voeu d’enfanter accompli...

Ce tertre pour les armes de Céline qu’elle avait amoureusement construit, respectant sa parole sacrée donnée à son amie, cette combattante illustre parmi eux tous maintenant. Une Marion qui s’était relevée du fond d’un malheur pour être encore plus résolue, encore plus acharnée dans sa rage à l’encontre de ces charognes de Zanko-Khuigs. Telle la déesse nordique de l’amour, Freyja, déesse de la fertilité aussi, déesse de la guerre et de la sexualité libre, la première des Valkyrie, reine du Walhalla, auprès d’Odin, le grand dieu guerrier suprème. Marion, une haine indicible la faisait vibrer d’une tension farouche.

Puis, elle eut un rire affectueux au souvenir de cette Femme d’exception qui était à son avis le symbole même de la Femme d’origine millénaire quasiment recréée, reconstruite par son illustre aïeule, cette autre Alexandra de pure énergie et amour et qui vivait mystérieusement en elle maintenant...Elle sentait comme une force obscure l’habiter, une puissance, une volonté guider ses pas, irrésistible et incompréhensible. Elle aurait presque pu lui parler lui semblait-il, tant sa présence était forte.

Elle se leva doucement pour ne pas réveiller Claude, fit sa toilette et s’habilla de leur traditionnelle combinaison de combat. Le petit déjeuner prêt, elle posa le plateau sur la petite table rabattable fixée contre la cloison, juste à côté de son compagnon qui, elle le savait, allait ouvrir un oeil dans les quelques secondes suivantes. L’arôme d’un café bien fort le tirant invariablement de son sommeil. Elle se mit à genoux près de lui et l’embrassa dans le cou. Il se tortilla paresseusement un instant, puis l’attrapa brusquement par la taille et la renversa par-dessus lui, la faisant rouler...

-Bonjour Commandant de mon coeur ! lui dit-il en riant. Oh ! ça sent un délicieux caoua, j’ai faim !

Il se leva d’un bond, ouvrit le lourd rideau du poste de pilotage pour laisser entrer les derniers rayons du soleil couchant, puis il courut aux toilettes se laver et revint un bon moment après pour déjeuner avec son amour.

-Quel est le programme pour cette nuit, chef ? dit-il en mastiquant avec un plaisir évident, on devient de vrais hiboux dans ce boulot, non ?

-Chouette alors ! répondit-elle en riant, tu sais chéri...maintenant que l’on a suffisamment observé les lieux, les habitudes, manies...et même de loin, je te l’accorde...j’ai dans l’idée que l’on pourrait entreprendre une approche plus ...circonstancielle pourrait-on dire, non ?

-Oh attends ! précise un peu mieux ta pensée, veux-tu ? car t’as ce petit air que j’aime pas tellement, ma petite cachottière adorée, hein ?

-Non, sois tranquille...j’avais seulement dans l’idée de...de tenter d’approcher un peu mieux, peut-être...c’est tout.

-Oui, et ben c’est ce « peut-être » qui me chiffonne justement, vois-tu ? -Ecoute, Claude, lui dit-elle subitement tendue, si on ne prend jamais de risque

on va croupir pour l’éternité dans nos putains de grottes, tu comprends ? Ça fait depuis plus d’un an maintenant qu’on observe ces Zanko-Khuigs de merde, comme des hiboux, comme tu dis si bien, sans rien faire d’autre, alors...j’en ai

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ma claque moi, de ces grottes, je meurs d’envie de vivre au soleil, de manger au soleil, de courir sous le soleil...et de baiser au soleil aussi, pas toi ? Et je ne dois pas être la seule non plus, j’en suis persuadée. Elle était passionnée en disant ces paroles, ses grands yeux verts lançaient des éclairs.

-Du calme, ma chérie...Je suis d’accord avec toi, cent pour cent d’accord, mais faut pas tout balancer en l’air sur un coup de tête aussi, tu comprends ça, non ?

-Oui ! oui ! d’accord ! d’accord ! ça te va ? lui répondit-elle excédée, je connais le refrain par coeur, figure-toi...mais j’ai ma petite idée déjà. Il faudrait pouvoir coincer pour quelques heures un de ces esclaves qui paraissent être relati- vement libres d’esprits ; un de ces vieux qui ont l’air de commander, qui sont en charge de quelques responsabilités. J’en ai repéré un justement me semble-t-il, sans rien te dire encore, excuse-moi mon chéri, mais je ne voulais pas t’inquiéter avant d’être plus sûre de mon jugement

-Maintenant c’est fait, merci. -Non attends, tu vas voir...suis bien mon exposé et ensuite donne-moi ton

avis...mais sois honnête, hein ? sinon macache pour les petites parties de jambes en l’air que monsieur aime tant, n’est-ce pas, Don Juan ?

-Là c’est dur ! C’est plus du jeu...Tu ne ferais pas une choses pareille, au moins, hein ma caille ? à ton petit oiseau des îles, comme tu dis si joliment parfois, quand par exemple je te tiens amoureusement écartelée sous moi. Avoue, infernale femelle ! lui dit-il en lui souriant, lui passant une main entre les cuisses, sous la table.

Elle se trémoussa sous la caresse, riant aux éclats, puis reprit son exposé. -Mais non va...mon joli colibri des îles, lui dit-elle en lui caressant tendrement

la joue, surtout que ce serait moi la première punie, alors...mais, sérieux, réfléchis bien, tu vas voir que c’est jouable. Souviens-toi des lieux que nous avons surveillé la nuit dernière, tu y es ? Il hocha la tête. Tu vois ce grand bâtiment tout seul au milieu de ces grands platanes, sur cette place, juste devant le port...Ainsi, de là où nous étions, sur le haut de cette colline avec ces ruines de cette église apparemment, et au-dessus de ce genre de rampart qui surplombe cette partie de la ville et ce port. J’ai bien observé, enfin, du mieux que je pouvais vu les branches des arbres, et de plus nous étions placés sur le côte par rapport à cette façade donnant sur la place, face au port...

J’ai noté qu’une fenêtre au dernier étage du bâtiment restait éclairée tard dans la nuit, alors que de nombreux esclaves étaient entrés dans ce bâtiment, vers les dix heures quarante-cinq du soir environ, une fois terminé leurs services ; assez vite les lumières de ce bâtiment se sont éteintes, signe qu’ils dormaient ; sauf cette fameuse fenêtre qui resta allumée assez longtemps. Et souviens-toi aussi, passé les onze heures à vers minuit, il n’y eut plus personne circulant sur cette place...Ces quartiers me paraissent plus réservés aux personnels seuls...alors je...

-Alors tu veux aller voir de près cette putain de fenêtre ! Je te connais comme si c’était moi qui t’avais faite, mon adorable empêcheuse de tourner en rond mais...je suis de ton avis !

-Youpi ! s’écria-t-elle, folle de joie, je te reconnais bien là.

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- Tu reconnais que dalle, pour la bonne raison que je ne fais que suivre le commandant de bord, et basta !

-Menteur ! je te connais bien va...alors ? ton avis ? sans mentir sinon, couic ! terminé la baisette ! rit-elle aux éclats.

Il réfléchit un bon moment, la regardant, regard dans le vague... -Les problèmes qui me viennent à l’esprit en premier sont les suivants : pourra-

t-on approcher avec ces grosses branches de ces platanes qui obstruent tout ? D’autre part, cette couverture végétale est un excellent camouflage contre quiconque regarderait de loin. En suivant : c’est l’époque idéale pour une action sournoise comme on les aime, d’autant que ces arbres offrent une excellente planque avec leurs feuillage, car après l’été...et, si l’on trouve un gars là-dedans et, supposons que nous parvenions à communiquer avec lui, et si...et si...qu’en fait-on ?

-Ça, on aura le temps alors d’y réfléchir à temps, ne mettons pas la... -Charrue avant les boeuf, je sais aussi, merci mon joli petit coeur mignon tout

plein, lui dit-il en se penchant et l’embrassant sur les lèvres. -Tu sais cheri...c’est difficile de travailler quand on s’aime ; j’ai une envie folle

de faire l’amour, là tout de suite. -Pas question chef ! Et ton devoir de citoyenne de Monde, alors, qu’en fais-tu ?

Boulot-boulot ! Je me refuse à tout encanaillage intempestif durant les heures de service, voilà ! Non mais, sérieux, tu sais bien qu’avant une action, on ne sait pas ce qui peut se passer alors on se doit de conserver intacte son énergie combative, c’est vital...et tu le sais pourtant bien, chérie.

-T’es vache..mais t’as raison, je sais...mais, promets-moi au moins de me faire l’amour après, comme un fou.

-Promis, pétroleuse ! demain matin je te viole ! dit-il d’un ton faussement sévère.

-Oh oui ! rit-elle en applaudissant, plaisantant. -Bon, c’est bien beau tout ça, mais que décide-t-on de concret ? -J’ai pensé que l’on pourrait y retourner se positionner plus loin sur le port,

vers cet imposant bâtiment qui ne ressemble à rien, qui est une horreur absolue plutôt, biscornu, tordu, aucune recherche esthétique...Ils étaient véritablement fous ces gens à cette époque.

-C’est plus que certain, dit-il...Céline avait bien raison, la pauvre, il nous faudra détruire toutes ces villes monstrueuses. Tu sais en fait, j’ai pensé que ces gens sont devenus tels quels ; ont sombré dans un si épouvantable non-sens, à cause en partie de ces cadres de vie si laids de ces villes pour la plupart, sans âme, sans recherche esthétique, comme tu disais à juste titre. La beauté engendre la joie, le plaisir, rend heureux, même si l’on en est pas conscient sur le moment. De la beauté rayonne l’harmonie, le nombre d’or qui en est véritablement l’origine, est le vecteur qui gère des vibrations positives qui en découlent, ondes qui entrent en toi et s’accouplent à ton Moi profond dans une symbiose vitale qui transmet la Vie, ceci dans un éternel recommencement. L’Humain est fait pour s’idéaliser, faire naître l’harmonie et la grâce...Pour entrer en symbiose avec votre beauté, mesdames, vous qui êtes la lumière de nos existences.

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-Oooh ! comme c’est joliment dit tout cela, mon poète d’amour...mais c’est bien vrai, et l’inverse aussi forcément. Une fois avec Bruno, mon ancien compagnon de patrouille, nous sommes entrés dans une ville...je ne me souviens même pas laquelle, mais ça n’a aucune importance puisque elles sont toutes plus laides les unes que les autres et, nous sommes entrés par hasard dans un immeuble. C’était de fait un musée d’art moderne, comme ils appelaient ça ces débiles. Nous sommes montés au deuxième étage, la porte étant fermée, personne n’y était donc entré depuis ces siècles, ni aucun animal ; tout y était parfaitement rangé.

Nous avons alors vu ces horreurs de leur temps : des statues hideuses, sans queue ni tête, laides...puis des trucs qui ne ressemblaient à rien, représentant rien même, idiots, stupides, nuls, le néant total. J’ai même lu quelque part, et ce fut même écrit par l’un d’eux en plus, un nommé Shap...Shani...je sais plus quoi, et on s’en tamponne, que c’était justement eux les Zanko-Khuigs, qui avaient monopolisé le commerce des arts, se l’étaient entièrement approprié, gangréné, pollué, vérolé de A à Z la culture pour promouvoir la laideur et la nullité, et avec les médias à leurs bottes, pour ainsi détruire le sens du noble et du beau dans le coeur de ces foules béotiennes et abruties, choses parfaitement réussie.

Puis, pour comble de l’horreur, nous avons vu les peintures. Là, ce fut le summum de la laideur, de l’ignoble. Tu le croiras peut-être pas, chéri...il y a des tableaux représentant des soi-disant êtres humains ; les parties du corps mélangées dans un salmigondis infect, et encore, quand on arrive à les reconnaîtres pour telles. Des anatomies torturées, méconnaissables, où il en ressort une effrayante impression de souffrance, de négation...une sorte de sourde abomination qui se vrille dans ton esprit comme une chose abjecte et glauque, sournoise, mortifère...

Ce ne pouvait être que les oeuvres de malades mentaux, c’est impossible autrement. Il y en avait pas mal d’un de ces détraqués, qui devait certainement être le plus célèbre en son temps, le pire de tous à notre avis à tous deux alors, avec Bruno ; je ne sais plus le nom du peintre mais on s’en fout, que son nom comme lui-même soit damné car il mérite amplement de sombrer pour l’éternité dans un enfer tapissé de ses dégueulis abjects, et qu’il y pourrisse comme charogne véritable qu’il fut.

Quand tu as vu ces horreurs une fois, on n’est pas surpris alors de ce qui leur est arrivé, en fait : ils en étaient arrivés au point de négation absolue d’eux-mêmes...Pour que des humains aillent volontairement encenser et se soumettre à la vue, la contamination de telles déjections intellectuelles, si l’on peut encore prétendre dénommer ainsi ces ordures sans noms, c’est qu’ils s’étaient carrément reniés en tant qu’humains. Ils avaient fait comme moi ce jour-là, ils ont dû dégueuler leur âme vérolée, ou plutôt ce qui leur en tenait lieu, car je n’ai pu m’empêcher de vomir violemment devant ces monstruosités, ça a été plus fort que moi ; Bruno en était malade aussi, lui qui est si sensible, le pauvre.

Surtout, crois-moi chéri, si un jour tu as la tentation d’entrer dans un tel lieu de désolation, n’y vas pas mon amour, ça te salirait ta si belle âme...Il me fallut

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plusieurs semaines pour oublier ce spectacle, pour ne plus en faire des cauchemards.

-Tu es un vrai prof d’histoire de l’art, chérie, bravo ! lui dit Claude en souriant. -Bon, c’est vrai que quand je me lance sur ce sujet c’est difficile d’en sortir.

Mais oublions ces déchets, il vaut bien mieux. Et notre action commando dans tout ça ? Nous avons fait un léger dérapage semble-t-il, hein, mon coeur ?

-A vos ordres Commandant ! Psycho Claude, paré pour l’attaque ! -Alors, c’est simple en fait, il fait nuit noire maintenant...vingt et une heure et

quarante-trois minutes, alors on s’arrache de l’abri de ce castel mi-marin et on fonce pianissimo vers notre objectif, voir si on peut en tirer quelque chose cette nuit même, d’ac ?

-C’est parti, Amiral...on largue les amarres, et adieu va ! Claude se leva et prit sa guitare sur un siège, guitare qui ne le quittait jamais, en

excellent chanteur et compositeur qu’il était ; fit sonner plusieurs arpèges retentissants et roulants sur un style de musique d’Espingo, et chantonna, ravi.

-La chasse est ouverte...Planquez vos miches braves gens...Le commandant passe à l’action et...

Celle-ci fit deux pas rapides vers lui en riant aux éclats, lui prit sa tête entre ses deux mains et lui ferma la bouche avec un baiser de feu...

Le perceur descendit au ras des flots et contourna l’île par l’est ; il fit un large

crochet pour avoir une vision d’ensemble, laissant la pointe de la première île, la plus grande, sur sa gauche...En face d’eux, vers la gauche à 10h, le bord de mer était violemment illuminé comme toutes les nuits. Ces salopards, pensa le pilote, profitaient aussi de l’énergie électrique inépuisables de grosses Centrales FMS, centrales qu’ils avaient aperçu au nord de la ville à l’occasion d’un survol général. Ils les y avaient installé sans plus se soucier d’elles, dans ce parc de l’ancien réseau électrique de l’époque, pas loin de l’entrée et sortie de ce qui était alors un autoroute...Comme il aurait été facile de faire sauter tout ça...c’était tellement tentant...et tellement stupide aussi, qu’il valait mieux ne plus y penser du tout, se maugréa-t-elle, rageuse.

Quelques mois auparavant ils avaient reçu la visite officielle d’un chasseur Akadi ; ils venaient cette fois leur apporter une nouvelle extraordinaire : leurs scientifiques avaient trouvé dans les mémoires de leur ordinateur géant, une technologie qui allait leur donner l’arme indispensable...ce n’était plus qu’une question de mois pour maîtriser l’ensemble et pouvoir l’adapter pour l’utiliser suivant leurs propres moyens d’attaque aérienne : les chasseurs et transports que leurs équipes continuaient inlassablement de produire en quantité.

Il leur fallait se préparer à une action d’ensemble de toutes leurs forces vives, mais quand ? personne ne pouvait encore le préciser...tout ce qu’ils savaient c’est que des sections de leur contingent d’Euromorte serait le moment venu expédiée vers l’Ostrali, rejoindre celles des Akadis, lors de la première attaque contre ces pourritures de Zanko-Khuigs.

Le perceur passa au ras des flots, contourna lentement la pointe de l’île sur sa gauche, faisant route vers l’ouest ; au milieu, entre cette dernière et une avancée,

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une pointe venant de la terre...Puis il passa au large de la plage brillamment illuminée, sise à quelques encablures sur la droite ; devant les nombreux hôtels abritant cette vermine puante de leurs ennemis insouciants...L’appareil se dirigeant toujours très lentement vers l’abri de la jetée du port, faisant route à 14 h, la dépassa comme pour y entrer, mais il se dirigea en face vers la masse sombre, côté mer, du bloc de l’immeuble imposant par sa grandeur...et laideur, qu’ils avaient sélectionné comme point d’observation.

Arrivé au-dessus du début de la plage qui filait vers la droite, le perceur s’éleva lentement et alla se positionner sur une terrasse supérieure du côté gauche de l’édifice qui était dans l’ombre, faisant de fait un excellent et discret poste d’observation de toute l’aire aux alentours du port. Une longue nuit de planque commençait de nouveau.

Toute cette partie de la ville était plutôt faiblement éclairée ; des esclaves commençaient de revenir de leurs services par l’avenue qui venait des hôtels derrière eux, passant au pied de l’immeuble où ils étaient planqués. Ces pauvres gens qui, comme ils l’avaient depuis longtemps constaté dans toutes les exploitations agricoles, étaient exclusivement des blancs, aucune autre race n’y était représentée, seuls des occidentaux y étaient en esclavage. Ces pauvres hères marchaient lentement, épaules voutées, visiblement exténués et soumis ; ils étaient tous habillés du même type d’uniforme...

Ceux-là, des gens de services rapprochés, côtoyant les Zanko-Khuigs de près, étaient vêtus indistinctement pour les hommes et femmes, d’une combinaison de couleur mastic pâle, teinte d’une grande tristesse venant renforcer celle de ces malheureux ; une paire de chaussure de ville souvent dépareillées aux pieds, les cheveux courts pour tous, de type à la garçonne pour les femmes et, comble de l’infamie, ceux-la comme tous les autres dans ces villes, portaient autour du cou, en faisant le tour complet, un tatouage en forme de code-barres de trois centimètres de largeur et de couleur noire, la combinaison étant sans col il était visible de tous côtés. Tous deux savaient, avec Claude, que d’autres groupes de travailleurs étaient aussi affublés de ces tatouages, car tous en portaient, mais de couleurs différentes, dont ils ne connaissaient pas la signification, la spécificité.

Les heures s’écoulèrent, monotones...Il leur fallait scrupuleusement tout noter, les heures, les moindres détails, le nombre des esclaves suivant les horaires de changements de service, etc. Tout cela effectué en supplément des tournages vidéos qui enregistraient la moindre chose. Documents qu’ils visionnaient rapidement le lendemain, puis qu’ils ramenaient à la station pour être décortiqués par des équipes habituées à ce genre d’investigation.

Travail laborieux et ingrat effectué pour la plupart par des compagnons âgés ainsi que des gens physiquement handicapés et donc ne pouvant plus participer aux actions sur le terrain, comme malheureusement un grand nombres d’entre eux. Ces derniers s’impliquaient alors corps et âmes dans ce travail de recherche ; rien ne leur échappait.

Depuis plus d’une heure maintenant, les derniers travailleurs étaient entrés dans leur campement, cet immeuble solitaire sur cette place, but de leur investigation actuelle ; tout ce quartier était alors pour ainsi dire désert.

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-A mon avis, dit Claude, tout en continuant de regarder le détecteur infrarouge qui balayait l’esplanade ; déjà que nous n’avons rien vu de spécial de notre objectif, d’autant plus qu’on le voit à peine avec ces platanes qui couvrent toute la place, on ferait mieux d’y aller voir carrément, non ? Qu’en penses-tu, ma chef préférée ?

-Oui, tu as raison...on pourrait d’ici, faire un saut rapide nous séparant des platanes et aller se cacher à ras des faîtes de ces derniers, puis avancer vers l’objectif et...aviser sur place, qu’en penses-tu ?

-Impec ! En ce moment je ne détecte aucune cible humaine à moins de cent quarante mètres de ce côté-ci des hôtels de ces monstres, et le reste est désert, alors c’est le moment d’en profiter ; vas-y chérie.

Le perceur fit un bond de deux cent cinquante mètres environ les séparant des platanes, puis se stabilisa sur la couverture végétale, la base de l’appareil enfoncée dans les feuilles, restant là immobile durant un bon quart d’heure pour voir si leur mouvement ne déclenchait pas une quelconque réaction...non, tout continuait dans le calme total. L’appareil avança alors vers cette fenêtre qui les attirait comme une flamme attire un papillon de nuit, appel irrésistible.

Alexandra positionna le perceur bien en face de cette maudite ouverture, à quelques huit à neuf mètres d’elle encore. Les branches occultaient la vue qui en restait bien trop parcellaire et, comme ils le craignaient justement, l’une d’elles se trouvait pile devant l’ouverture, une branche partant horizontalement d’un platane sur leur droite, elle avait environ une douzaine de centimètres de diamètre. Impossible de s’approcher sans devoir l’enlever.

-Alors, qu’elle est la suite du programme ? dit-il. -Du calme, faut réfléchir... -C’est tout réfléchi, mon trésor. Ou on bousille cette putain de branche, ou il

n’y a plus qu’à repartir la queue entre les jambes, et je préfère te dire tout de suite que j’ai horreur de ça ; j’ai trop envie maintenant de savoir ce qu’il y a derrière cette ouverture mais...j’ai une idée !

-Vas-y, accouche ! -Tu positionnes l’engin au-dessus de la branche, je descends avec l’échelle

souple, je l’amarre au treuil avec un câble en acier, puis je la sectionne sur une grande partie de son diamètre avec la scie électrique...un seul grand coup rapide et appuyé, puis tu la tires ensuite jusqu’à ce qu’elle casse : tout cela après avoir préalablement éteint l’éclairage de la cabine, fallait-il encore le préciser.

-Mais...ça va faire un raffut d’enfer. -Si tu vois une autre solution, je suis preneur. -Et après, que fait-on avec cette branche pendue sous le perceur ? Je me refuse

de rester là avec ce boulet sous la coque, on ne sait jamais ce qui peut arriver. -Tu as raison...Il réfléchit un instant puis s’esclama d’un joyeux eurêka ! Quand

la branche aura pété, on ne bouge plus d’un cheveu durant un moment, tout reste immobile puis, quand tout est ok, sans aucune réaction aux alentours, on s’élève doucement pour la dégager puis on va la déposer à côté sur le faîte des autres arbres, laissant bien visible la boucle d’amarrage sur le dessus, ainsi...au moment de repartir, nous accrocherons le croc du treuil dedans et nous

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partirons comme une flèche en altitude, puis nous irons la larguer sur une des deux îles de la baie...et voilà, ni vu ni connu !

-Adopté ! Pour la peine, et te remercier de cette brillante et seule idée acceptable, ce matin avant de dormir, je te ferai une de ces petites gâteries buccales dont tu raffoles particulièrement, quoique, pour dire la vérité, je ne vis jamais aucun Homme ne pas l’aimer, rit-elle joyeusement, d’accord, mon amour joli tout plein ?

-Et voilà les éternelles pulsions sexuelles qui ramènent leurs fraises...Alors dépéchons-nous que j’en suis follement impatient ; tu parles si j’adore...c’est comme demander à un gars en train de se noyer s’il aimerait vouloir respirer !

La manoeuvre fut faites comme dite ; au moment du craquement qui fut comme un coup de fusil dans le grand silence environnant, la fenêtre s’ouvrit et ils virent un homme âgé se pencher pour regarder de tous côtés...il regarda la branche qui lui sembla bizarrement positionnée...puis il entra dans la pièce sans plus aucune préoccupation, ayant refermé la fenêtre.

Ils restèrent encore un quart d’heure ainsi, puis le perceur s’éleva lentement pour déposer son fardeau plus loin comme prévu...Alexandra positionna l’engin devant la fenêtre...Elle avança le nez de l’appareil tout contre les vitres, et ils virent enfin l’intérieur...L’imagination ayant toujours tendance d’enluminer les choses, ils furent profondément déçus et attristés à la vue du spectacle affligeant offert à leurs regards d’espions.

La pièce était relativement petite, quelconque, ressemblant à un vieux local de rangement. Un plancher en bois terne, des murs sans aucun revêtement, la pierre étant à nue, et pour décor un lit simple fait d’un chalit monté sur des parpaings, avec un vieux matelas tout taché et quelques couvertures aux couleurs fanées entassées au pied de la couche. Une vieille armoire en bois dans un coin ; une petite table en bois face à la fenêtre, une chaise en fer rouillée, puis deux longues étagères en bois fixées au mur de droite et au-dessus du grabat, avec de nombreuses chemises pleines à craquer de dossiers. Une faible ampoule électrique pendue au milieu du plafond jetait sur ce décor misérable une lumière blafarde, sinistre.

L’homme est assis devant sa table, une vieille paire de lunette rafistolée avec des bouts de ficelle sur le nez, une des branches maintenue par un morceau de fil de fer. Il écrit dans un grand cahier défraîchi, s’aidant d’annotations prises dans un vieux carnet écorné. Le vieil homme inscrit scrupuleusement des noms et des chiffres dans des colonnes, avec un vieux crayon délabré.

L’ensemble est d’une tristesse et d’une misère comme il leur semblait ne pouvoir jamais exister ; ils se regardèrent effarés, n’en croyant pas leurs yeux, effrayés de découvrir une telle désolation. Le vieillard est de taille et corpulence moyenne, une couronne de cheveux presque blancs, le sommet du crâne chauve...des yeux marrons et triste sur un visage blanchâtre, hâve et ridé ; les mains maigres aux grosses veines apparentes, sont comme le visage, tachées de tavelures sombres. Il se dégageait de cet homme une tristesse infinie, indescriptible.

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Un malheur épouvantable semblait lui courber l’échine. Il est habillé de l’éternelle combinaison, sauf que la sienne est de couleur violette pâle, défraîchie, son tatouage au cou est de la même couleur, mais d’un violet soutenu. Il était le premier qu’ils voyaient ainsi, et ils en déduisirent que cet homme devait être en charge de responsabilités particulières, déjà pour avoir un local à lui tout seul et y mener une activité isolée. Ce constat leur fut des plus encourageants, cela signifiait qu’il sera sans doute avec son mental intact et saura, pourra leurs donner des renseignements importants sur la vie des occupants de cette foutue ville.

-Maintenant, dit le pilote en souriant, nous voici comme le maçon : au pied du mur, même si nous en sommes à son faîte, plaisanta-t-elle...Question : comment l’aborder sans lui foutre une trouille à le tuer, ou qu’il ne sonne le branlebas ?

-Wouais...bonnes questions ma chérie, faut gamberger sec cette fois, ce serait des plus stupide que de tout gâcher maintenant...impardonnable surtout.

-Prenons donc tout notre temps alors, s’il le faut, et au pire on pourra revenir demain avec une stratégie aux petits oignons, mais surtout ne pas gâcher ce moment historique et si précieux.

-A mon avis, ma chef adorée, si nous ne sommes pas capables de pondre une stratégie, comme tu dis, dans les quinzes minutes suivantes, alors vaut mieux de suite rentrer à la maison, car ça voudrait dire que nous sommes bons à rien !

-Je te reconnais bien là... -Encore ? rit-il. -Oui, mon Seigneur et esclave adoré...toujours tout feu tout flamme ; mais tu

as raison : on lui rentre dedans ce soir-même, voilà ! -Oooh ! passe-moi la petite paire de jumelles, s’écria Claude soudain excité, je

tiens peut-être bien un début possible de solution. Alexandra décrocha la paire de jumelles pendue sur la cloison et la lui tendit

rapidement. Claude régla l’optique et scruta attentivement ce qu’écrivait l’homme, puis les

autres écritures remplissant les deux pages...penchant alors la tête, il tenta de décripter les mots écrits sur les chemises sur les étagères branlantes...

-J’ai trouvé ! s’écria-t-il joyeux, il écrit et parle l’ancien français ! Nous allons mettre une feuille de papier collée sur une vitre de la fenêtre...un message l’avisant...que...etc. Nous nous serons au préalable reculés pour éviter qu’il ne nous aperçoive et...nous attendons sa réaction, et si...s’il fait montre de donner l’alarme, on le flingue !

-Excellent, pour ta brillante idée tu auras droit à une double gâterie, mon chéri ! lui dit-elle en l’embrassant sur la joue.

-Chouette alors ! s’ecria-t-il ravis, mais l’une après l’autre, d’accord ? -Maintenant ; il faut pondre le texte adéquat...pas facile. -J’y pense, s’il faut le buter, et je prie le cosmos que non...il vaudra mieux alors

avancer, forcer la fenêtre et le tuer en lui brisant les vertêbres, car on ne doit pas laisser de marque d’agression extérieure, élémentaire.

-Très juste...durant le contact, je me doute que nous serons certainement obligés de lui dire qui nous sommes et d’où nous venons...

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-Disons alors que nous sommes des combattants...des rebelles plutôt, qui venons de...de l’est...de vers la lointaine Russie, voilà qui donne d’hypothétiques et larges possibilités d’investigations loin de chez nous.

-Bonne idée, impec même, donc...le message...Attends, je recule le perceur et nous nous y mettons tous les deux pour pondre ces quelques mots qui sont lourds, très, très lourds de conséquences.

Ils s’installèrent confortablement sur deux sièges au bord de l’allée centrale, se faisant face, chacun ayant un bloc de papier et crayon en main.

-Alors...qu’écrit-on ? dit Alexandra en tapotant le crayon contre ses lèvres, t’as une idée ? moi je n’ai jamais été fortiche pour écrire, c’est pas tellement mon truc, tu sais, mon canard joli.

-Pas de nom de volatilles, s’il te plaît, chef, dit-il sur un ton sérieux, car on sait que trop bien où mène ce genre de vocabulaire, n’est-ce pas ma colombe ?

-Au plumard ! s’esclaffa-t-elle, les yeux brillants... -Chuuuut ! fit-il, un doigt sur ses lèvres, s’il y a un gars qui passe en dessous il

va croire que les platanes rigolent, c’est pas sérieux. -Hi ! hi ! hi ! fit-elle doucement, se retenant de pouffer de rire. -Alors, on va pas y passer la nuit, non ? -Allez ! sérieux maintenant...Il ne faut que deux ou trois idées forces, le plus

bref possible, pour qu’il ait envi d’en savoir plus, l’amener à ouvrir sa putain de fenêtre et nous recevoir.

-Exact ! Donc, le mieux est que chacun ponde des phrases chocs, puis nous composons le bon en s’inspirant des résultats de nos cogitations, ok ?

Après une bonne demi-heure de raturages et de soupirs de tension, le message final donna enfin ceci :

Ami, n’aie pas peur, nous sommes tes frères. Le bruit que tu as entendu venait de nous. Nous sommes des rebelles venus de loin pour vous libérer. Si tu acceptes de nous recevoir, ouvre la fenêtre. C’est l’unique tentative de contact que nous ferons. Votre liberté à tous est entre tes seules mains. Décide, toi seul et de suite ! Signé : Les Humains libres du nouveau monde. -Parfait ainsi, dit Alexandra, ça résume bien l’ensemble de qui nous sommes et

l’objectif qui devrait lui être irrésistible. S’il ne mord pas à l’ameçon c’est qu’il a le cerveau HS, donc, couic ! pas de traces ; mais prions pour le contraire.

Elle manoeuvra lentement l’appareil pour faire venir la porte en face de la fenêtre, Claude la guidant.

-Stop, lui dit-il à voix basse, c’est bon comme ça, je colle le papier sur la vitre, le message côté intérieur...voilà, c’est fait, le vieux écrit toujours...attends, je prends ce long manche à balais...recule lentement maintenant...voilà, en dernier je cognerai un léger coup sur une vitre, et tu éloignes de suite le perceur, ok ?

-Vas-y chéri. Se tenant à la rambarde de sécurité, le corps penché au dehors, il frappa

légèrement la vitre et il vit à peine l’homme lever la tête, qu’ils étaient déjà

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invisibles dans les branches, à six mètres de l’ouverture. Manoeuvre de première de son pilote, une fortiche ! se pensa-t-il ravi et fier de son amour. La tension était palpable dans le perceur bloqué sur géopoint, le pilote l’avait vite rejoint devant la porte. Ces quelques secondes d’attente étaient les plus longues de leurs existence. Ils voyaient l’homme, assis à sa place, il regardait ce papier collé sur sa vitre, avec un air de totale incrédulité, sidéré...

Il mit un bon moment avant de venir lentement vers ce papier des plus inquiétants et surgissant brutalement dans une longue existence de non-vie éternelle, insondable nuit de désespoir. Il sentait que ces quelques lignes qu’il percevait maintenant allaient révolutionner sa vie...Et ce bruit de tout à l’heure, pensa-t-il d’un coup, cela expliquait bien des choses, puis enfin, il se leva et courut presque pour lire ce message d’un trait. Il fut obligé de le relire plusieurs fois d’affilées, les deux mains tremblantes appuyées contre les vitres pour ne pas chanceler ; ces phrases faisaient exploser une joie sourde dans son coeur, il eut même peur que celui-ci n’éclate.

Il lisait, la lèvre inférieure et le menton tremblants de pleurs intérieurs ; il fut obligé de retirer ses lunettes pour pouvoir s’essuyer les yeux, les larmes l’aveuglaient littéralement, et ce fut en tatonnant pour chercher la poignée qu’il ouvrit enfin d’une main tremblante la fenêtre en grand. Il décrocha le message et, le tenant serré sur sa poitrine haletante, il marcha à reculons, raide, jusqu’à buter contre son lit sur lequel il tomba assis, sans plus de force, pour laisser place à ces mystérieux visiteurs qu’il ne voyait toujours pas, son regard braqué sur cette fenêtre qu’il n’avait jamais perçue comme étant aussi belle d’espoirs insensés...

Et il vit...telle une apparition céleste sortie de nulle part, il vit s’avancer lentement vers lui, un jeune et grand guerrier nu tête et souriant, qui mit le pied sur le rebord de l’ouverture et sauta silencieusement à pieds joints sur le parquet, il lui sourit, mit un doigt sur ses lèvres pour lui recommander le silence puis il alla vers la porte, observa la fermeture, en hochant la tête de désapointement, il fit deux pas rapides vers la chaise qu’il alla placer, le haut du dossier penché en arrière bloqué sous la poignée, bloquant les deux pieds de cette chaise de légers coups de botte. Puis il alla rapidement et toujours silencieusement vers la fenêtre et siffla doucement un coup bref entre ses dents, tout en regardant souriant et amicalement le vieillard avachi sur sa couche et qui le regardait totalement ahuri, tremblant comme une feuille de ces platanes là dehors...

Puis il vit alors un autre guerrier apparaître dans l’encadrement, il sauta de même comme un félin dans la pièce et, médusé, il vit quand il se redressa que c’était une jeune femme de grande beauté, et qui lui souriait aussi. Elle vint vers lui, se pencha et lui prit sa tête entre ses deux belles mains robustes et soignées, et l’embrassa sur le front et les deux joues et...elle lui parla alors avec une telle douceur que ces paroles lui arrachèrent toutes les larmes de son corps. Du fin fond de sa mémoire, personne ne lui avait parlé ainsi, avec douceur et amour et...respect même lui sembla-t-il, il était effondré.

-Bonsoir, mon ami, je m’appelle Alexandra, et mon compagnon se nomme Claude, et toi, qui est-tu ? peux-tu nous le dire ? nous voulons te connaître.

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Elle s’était assise auprès de lui sur le lit, lui posant sa main sur le bras, comme une caresse ; il sentait son odeur corporelle, une odeur enivrante de fraîcheur et de santé, ses phéromones divines lui chamboulaient son esprit ; si belle...elle ne pouvait être qu’une déesse, un ange, un songe éveillé. Puis il réussit à articuler après un long moment, et s’être essuyé le visage, les dévisageant à tour de rôle, incrédule.

-J’ai...j’ai failli mourir de bonheur en lisant ce message, dit-il en souriant faiblement, je...je m’appelle Marcellin, mais personne ne m’appelle jamais par ce nom que j’avais quasiment oublié.

-Bonsoir, Marcellin, lui dit Claude, s’approchant et lui tendant une grande et forte main d’homme robuste et ferme ; nous sommes infiniment heureux de te rencontrer. Comme tu l’as compris dans ce message, nous sommes la première petite équipe d’Humains libres à venir dans cette région pour essayer de tenter, tous les trois, comment nous pourrons faire pour sauver tous les travailleurs prisonniers de cette région.

-Nous sommes tous des esclaves, Claude, répondit le vieillard avec force, non pas des travailleurs, non.

-Nous savons tout cela, Marcellin, lui dit Alexandra, c’est pourquoi nous devons être très prudents. Nous comptons sur toi pour nous informer le mieux possible sur tout ce qui concerne cette ville ; acceptes-tu de nous aider ?

-Oui, bien entendu, mais que puis-je faire dans l’état où je suis, si faible et si vieux déjà ?

-Marcellin, détrompe-toi mon ami, tout ce que tu sais sur cette ville nous sera très précieux, indispensable même, sans toi nous ne saurions pas quoi faire, tu comprends? Tu es l’homme le plus précieux pour nous tous maintenant.

L’homme comprit alors que ses connaissances seraient effectivement vitales et de la plus grande importance pour aider ces gens.

-Mais...qui êtes-vous ? d’où venez-vous ? réalisa-t-il enfin. Claude lui donna les informations décidées au préalable, puis lui demanda. -Y a t-il un risque que quelqu’un veuille entrer dans cette pièce ? -Oh non ! jamais personne n’y vient. Je suis si isolé que s’en est un calvaire, à

tel point que je n’ai pas parlé à quelqu’un aussi longtemps que maintenant, que durant au moins toute l’année écoulée.

-Mais, lui demanda Alexandra, que fais-tu comme travail et, elle hésita...que signifit ces couleurs de ce que vous portez tous au cou, ce violet par exemple ?

-Oh ! je comprend votre ignorance...Le violet dont je suis marqué est le signe distinctif et rare des quelques esclaves responsables de la bonne gestion des autres ; j’entends par-là que ces personnels soient toujours prompts à leurs services, sans présenter aucune gêne aux seigneurs des lieux ; en disant cela, un regard haineux brilla un court instant dans son regard. On nous nomme Majordome, et quand je dis nous, cela représente environ une douzaine d’autres esclaves dans mon genre, répartis en plusieurs points de la ville.

-Marcellin, dit Alexandra, acceptes-tu de venir dans l’appareil qui nous a amener, où nous pourrons parler plus tranquillement qu’ici, et je voudrais te montrer et avoir ton avis sur des documents importants concernants les...

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À ces mots Marcellin lui coupa brusquement la parole. -Pardon, dit-il excité tout à coup, les Documents ! Oui, je dois vous remettre

un trésor véritable ; ce sont les notes tenues à jour au fil des années par tous mes prédécesseurs, depuis l’an 2015, l’histoire véritable de nos conditions d’esclaves, qui commença pour beaucoup d’entre eux bien avant cette date. Ils étaient des gens ordinaires, hommes et femmes qui furent enlevés durant les années précédents ce malheur universel qui endeuilla l’humanité...Nous fûmes toujours conscients qu’il devait y avoir immanquablement des survivants éparpillés sur ce monde et...qu’il leur faudrait des générations pour reconstruire leurs forces...et vous voici, enfin !

Mille fois, cent mille fois le désespoir nous ravagea l’âme, mais toujours une flamme d’espérance se rallumait dans nos esprits...une croyance en nos enfants lointains qui naîtraient un jour. Vous ne saurez jamais la somme effrayante de désespérances que subirent ces hommes et ces femmes conscients de leurs états ; nous fûmes les porte-flambeaux de notre croyance inextingible, mais si dur, si atroce...

Il se leva, fit se lever aussi Alexandra et tira le lit ; il tremblait d’émotion de toute sa frèle carcasse. Il tira le parpaing dans l’angle du mur, à hauteur de la tête de lit...Il prit un vieux couteau de table rouillé sur une étagère des classeurs, l’inséra entre deux lames de parquet de cinquante centimètres de long, en faisant monter une qu’il enleva précautionneusement, puis ainsi de deux autres ; un long trou assez profond se présenta. Marcellin se baissa encore plus, y entra un bras et en ressorti trois paquets successifs enroulés dans de forts sacs en plastique maintenus par des bouts de ficelles disparates ; de longs cylindres qu’il remit avec ferveur à Claude, puis il referma le trou avec application, remit le lit en place et s’assit sur le lit, épuisé de tant d’émotions.

-Je peux mourir en paix maintenant que je vous ai remis les legs spirituels de mes compagnons. Ces rouleaux représentent aussi la souffrance de millions des notres qui vécurent une vie d’enfer de par ce vaste monde. Merci d’être venus...merci d’exister enfin, si vous saviez combien ont rêvé d’un instant semblable...Merci mes enfants, oh pardon ! de vous appeler ainsi, moi qui suis si lamentable dans mon aspect misérable, face à vous deux qui êtes si jeunes, si forts et si nobles.

-Non, Marcellin, lui dit-elle, tu es digne de tout notre amour, comme tous tes semblables, nous vous aimons et avons promis face au Cosmos de vous sauver ; nous pourrions être tes enfants. Marcellin, soit heureux et légitimement fier de nous retrouver alors.

Il la regardait, incrédule, visiblement sous l’emprise d’une immense émotion, haletant. Alexandra se rassit près de lui, lui entoura ses épaules de son bras droit et le berça lentement contre elle, comme un petit enfant malade, lui caressant la joue...et il pleura, il pleura longtemps, blottis contre cette femme qui l’aimait, il le savait maintenant ; c’était la première fois de sa vie qu’on l’aimait pour lui-même, et ce choc émotionnel était sans aucun doute le plus dur à passer...

Pour le faire monter sur le rebord de la fenêtre, ce fut du sport. Alexandra monta en premier, se cala bien les pieds puis attrapa Marcellin que portait

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Claude dans ses bras et qu’il lui tendit, elle le prit sous les bras, il pesait comme une plume. Il eut un instant de frayeur de se voir ainsi au bord du vide puis, il perçut l’intérieur du perceur dans le noir.

Elle le fit entrer en le tenant ferme et Claude la suivit aussitôt, après qu’il ait enlevé la chaise bloquant la porte et récupéré le message qui était tombé au pied du lit, puis il éteignit la lumière et tira les croisées derrière lui, les rouleaux de documents sous un bras. Ils installèrent Marcellin dans un siège, pendant que le pilote s’installait à son poste, Claude attacha la ceinture de sécurité à leur passager ; le pilote lui dit.

-Claude, on va de suite larguer cette branche au large même, en pleine mer, comme ça...

Ils étaient prêt à s’éjecter à la verticale comme une flèche. Un coup d’oeil aux

instruments de détections, tout était ok. Claude, après avoir refermé la porte s’assit à côté de Marcellin, et le prévint de ne pas avoir peur, qu’ils allaient monter très vite dans le ciel, pour ne pas qu’une personne puisse les voir. Quand il fut rassuré, Claude prévint le pilote d’y aller.

Le perceur partit comme une balle vers les cieux ; il fut à deux mille mètres en quelques secondes puis, il obliqua vers le large en vol horizontal, au grand soulagement du passager qui crut un instant mourir de frayeur ; sauf que sa peur la reprit quand Claude enleva une protection d’un hublot et qu’il lui fit voir la mer à mille mètres en dessous d’eux, magnifique immensité éclairée par la Lune.

A plus de quatre cents kilomètres au large, plein sud et loin de tout, le perceur descendit à ras des flots, le câble se déroula de deux mètres, la branche flottant alors, une échelle souple descendit de la porte sombre du perceur et Claude décrocha le câble ceinturant la branche, qui partit ainsi vivre une étrange et nouvelle vie marine...Il appela Marcellin qui s’était levé pour le voir faire, une main fermement accrochée à la poignée de sécurité intérieure du chambranle.

-Marcellin, t’es-tu déjà baigné dans ta vie ? -Oh non ! ça risque pas...nous n’avons jamais un seul jour de repos...jamais !

Les esclaves de mon groupe travaillent douze heures par jour, de 10 à 22 h, et ainsi de suite, éternellement...Je suis dans ce groupe avec ces horaires depuis quarante six ans maintenant, sans un seul jour ni un seul instant de changement.

-Veux-tu toucher de l’eau de mer...te baigner peut-être ? -Oh non ! s’écria-t-il visiblement effrayé, j’ai trop peur de ce noir, il y a peut-

être des requins, ou je ne sais quels autres monstres... -D’accord, Marcellin, une autre fois et en plein jour alors, tu sais, la mer est

extraordinaire, elle est notre mère à tous aussi ; connais-tu le nom de Gaïa ? -Non, qui est-ce ? -Gaïa est notre planète, et nous la préservons comme le joyau du cosmos

qu’elle est véritablement. Notre planète maintenant, Marcellin, est d’une splendeur fantastique...nous la choyons comme la prunelle de nos yeux, tu seras heureux ainsi que tous les tiens de découvrir en cette planète un vrai paradis...paradis pour ceux qui en sont dignes, uniquement.

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-Bon, maintenant que le perceur est sur géopoint à dix mètres d’altitude, dit alors le pilote, nous pourrions commencer cette réunion, cerner les problèmes qui se présentent...et c’est pas ce qui manque.

Marcellin, à quelque heure faut-il te ramener au plus tard ? -Avant le lever du jour, ça suffira largement. -Bien...alors commençons ; s’il te plaît, Marcellin, veux-tu boire ou manger

quelque chose ? il y a de tout à bord, ne te gêne surtout pas, d’accord ? Il hocha la tête pour acquiescer. Claude prépara un grand plateau, avec un

grand verre de jus de raisin bien frais pour chacun, des fruits secs et frais, ainsi que des brioches croustillantes. Ils s’installèrent à l’avant, le siège du pilote retourné, les deux autres sur les sièges avant, une table pliante supportant le plateau entre eux trois. Leur passager voyant ça, ne put résister et se goinfra de ces inestimables friandises et boisson dignes des dieux, à ses dires...

Quand il fut repu, après que Claude ait de nouveau réapprovisionné le plateau, ils purent enfin commencer.

-Marcellin, lui demanda Alexandra, nous voudrions connaître un peu mieux ton monde...les habitudes. Combien il y a d’esclaves environ, et combien il y a de vos...elle hésita un peu, vos maîtres ? Nous, nous les appelons les Zanko-Khuigs, et vous ?

-Oui, nous aussi, c’est le nom qui leur fut donné par les premiers esclaves, mais je n’en connais pas la signification ni la raison.

-C’est sans aucune importance ; tout ce qu’il faut retenir est que nous allons un jour prochain les tuer tous jusqu’au dernier, les rayer de la surface de cette planète qui est à nous tous, vous avec, les esclaves qui rejoindrons nos rangs. Mais pour l’instant il nous manque une arme, mais qui sera bientôt prête, c’est pour cela que nous avons besoin de ta collaboration, Marcellin, tu comprends ?

-Oui, je ferai tout ce que je peux et vous dirai tout ce que je sais... -Quel est ce bâtiment isolé où tu loges avec ces esclaves ? demanda Claude. -C’est l’ancien Hôtel de Ville, mais l’enseigne est tombée depuis longtemps. Le pilote déroula une grande carte de la région et l’étala sur la table le mieux

qu’elle put devant leur invité, après que son compagnon l’ait débarrassé du plateau qu’il déposa sur un autre siège à côté de leur invité, l’invitant d’un geste de se servir à volonté.

-Marcellin, lui demanda-t-elle en lui tendant un crayon rouge, peux-tu reconnaître sur cette carte les endroits qui sont habités par ces salauds de Zanko-Khuigs, et les entourer d’un trait rouge ?

Ce dernier s’empara du crayon et sans la moindre hésitation fit trois grands cercles sur des localités.

-Ceci, dit-il, se sont les endroits de concentrations de cette race maudite, mais ils vont un peu partout, au hasard de leurs déambulations parasitaires...mais ça reste épisodique. Dans une attaque d’ensemble, je pense que 98% d’entre eux seront pris dans le filet du premier coup ; de plus, ils n’habitent pas tout le temps ici, beaucoup d’entre eux vont résider dans d’autres endroits que je ne connais pas, et ni ne sais où ils sont.

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-Nous, nous le savons, d’autres groupes que les nôtres s’en occuperont quand il faudra. Nous déclencherons une attaque mondiale, partout en même temps. Es-tu rassuré comme ça, Marcellin ?

-Plus que dans tous les rêves de toute mon existence ; fasse que vous réussissiez.

-Bien...donc, la ville d’où nous venons...prends ce crayon bleu et, si tu le peux, peux-tu marquer au mieux possible jusqu’où s’étend la zone qu’ils habitent ?

Il prit la crayon et ceintura d’un trait une zone assez limitée concentrée sur le bord de mer puis, il entoura une zone nettement plus petite d’un long ovale, au nord-est de la ville, sur les hauteurs d’une longue colline la dominant. La ville étant en fait la terminaison d’un vaste vallon de forme vaguement triangulaire venant mourir, s’étaler au bord de mer.

-Ici, dit-il, montrant la colline, ils sont installés dans de luxueuses anciennes grandes maisons, c’était un quartier de gens riches. Ils y sont une moyenne de quatre à cinq cent en permanence je pense ; mais il faut que vous sachiez, connaissiez de suite leurs moeurs pour entendre au mieux la suite.

Il but de nouveau du jus de raisin avec un évident plaisir ineffable. -Vous savez...c’est la première fois de ma vie que je bois autre chose que de

l’eau. -Tu n’as jamais rien bu d’autre ? s’esclama une Alexandra littéralement sidérée,

autant que son compagnon. -Non, mes enfants...c’est du jus de raisin n’est-ce pas ? c’est un véritable nectar,

merci de me l’offrir. -Ces salauds vont souffrir mille morts avant de crever, je te le promets,

Marcellin, tu as ma parole d’Homme et de guerrier, lui dit Claude en lui serrant affectueusement l’épaule.

-Merci, mon fils...je voudrai tant voir ce jour et participer à cette curée que j’espère sanglante.

-Nous avons tous promis de laver notre honneur dans un fleuve de sang, le leur !

-Merci ! merci ! même si je ne le vois, de le savoir cela appaise mon âme. -Bien...tu parlais de leurs moeurs, car avant de les tuer il nous faut bien les

connaître, c’est l’abc de tout bon chasseur : connaître justement les habitudes de sa proie ! Alors ?

-Oui ! tu as raison Alexandra...ne nous distrayons plus, d’autant que je n’en ai pas l’habitude...Donc, les anciens disaient, dans ces documents des rouleaux, que ce peuple maudit a toujours eu depuis des millénaires un très fort penchant grégaire. Ainsi, ils auraient vécu durant des siècles ou des millénaires, je ne sais plus très bien, dans des communautés isolées ; volontairement maintenu ainsi par leurs religieux qui les y poussaient, alors qu’ils n’étaient que de sombres brutes pour la plupart illettrés, donc incultes et d’un fanatisme religieux sordide qui les maintenait justement dans cet état perpétuel de soumission à leurs prêtres qui les y exploitaient d’autant mieux qu’ils restaient ainsi soumis dans cette sordide promiscuité : le fameux cercle vicieux qui s’auto-entretien.

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L’atavisme et moeurs ancestraux aidant, ils sont donc comme de logique retombés à pieds joints dans leurs travers. Ils gîtent donc comme des porcs qu’ils sont devenus, ou redevenus peut-être, se repaissant satisfaits dans leurs auges ; cela est la grosse tendance de leurs habitude, si fait que quand vous en voyez un, la horde de ces monstres n’est jamais bien loin.

-Très intéressant et surtout fort utile pour les coincer, rit Claude satisfait. -Oui...c’est un espect important que de le savoir. Je suis certain que si un

danger survient, ils vont tous se regrouper comme des rats. -Et hop ! s’écria ravie Alexandra, tous dans la nasse ! -Très bien, et ensuite, combien sont-ils dans la ville au total, y compris ceux de

la colline ? -Impossible de donner un chiffre exact à un moment donné, Claude, car ils se

déplacent beaucoup avec leurs engins privés, ce sans prévenir quiconque, et encore moins nous autres, leurs esclaves...Ils n’ont pas de suite dans les idées et peuvent partir je ne sais où sur un coup de tête, c’est très courant mais...on peut estimer qu’ils seraient en permanence...il réfléchit un moment, les yeux en l’air...dans les quinze mille, à un mille près. Ils sont tous agglutinés dans ces hôtels de la grande plage centrale, face aux îles. Comme vous l’avez certainement ramarqué, cette avenue ne regroupe que des hôtels de luxe qui sont les uns après les autres, et la plupart sont relativement récents ; j’entends par-là qu’ils auraient été construis peu avant l’attaque de 2015. C’est le premier majordome qui le disait, « Moins de trois ans avant l’attaque, ce bord de mer avait été du jour au lendemain la cible des grands investisseurs hôteliers ; ils ont construit à tour de bras et en quelques années il n’y eut plus que des hôtels »...On comprend maintenant pourquoi : ils avaient prévu la destruction de l’humanité depuis longtemps !

-Et les autres lieux de cette côte, marqués sur la carte ? Marcellin montra les cercles rouges marquant les enclaves des Zanko-Khuigs. -Celui-ci, le deuxième en allant vers l’est, comme vous le voyez, est nettement

plus petit, mais ils y sont nombreux aussi, regroupés cette fois dans ces grands ensembles immobiliers avec son port inclu au pied de ces derniers. Je connais moins bien ce qui est hors de ma ville, forcément, mais par ouï-dire, je les y évalu à environ quatre à cinq mille.

Mais il faut savoir, même si je ne l’ai pas entouré d’un cercle au préalable, que pas mal d’entre eux vont assez souvent dans ce grand port, ici, placé comme vous voyez avant leur gîte principal des grands immeubles. Ils se servent de grands bateaux, enfin, ceux qui fonctionnent encore, c’est-à-dire deux ou trois je pense, comme dans ma ville, les autres sont hors services depuis longtemps ; et puis, ils en ont coulé beaucoup au début, étant pour la plupart d’entre eux inaptes à les piloter, et comme ils n’avaient pas prévu des techniciens de bateaux, ils se sont vite retrouvés comme des imbéciles avec des bateaux qui ne servent plus à rien ni à personne.

-Effectivement, dit le pilote, nous en avons aperçu beaucoup, la coque échouée sur des rochers ; d’horribles épaves mangées de rouille, toute la côte est littéralement polluée de ces poubelles. En plus d’inaptes, ils sont fous !

-Claude, s’il te plaît, je reboierai bien un peu de jus de raisin.

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-Mais bien sûr, Marcellin, et pardonne-moi, veux-tu...Voilà, je mets la bouteille dans ce petit réfrigérateur là, près de toi, ressers-toi quand tu veux ; Marcellin, pardonne-moi de te laisser mourir de soif, et si tu veux autre chose, manger, etc., ne te gêne surtout pas, mon frère, d’accord ?

-Merci de votre infinie bonté avec moi, mes enfants, il but à longs traits...c’est si bon ce jus de raisin, et votre amitié surtout.

-Et ce dernier cercle, dit le pilote, là à l’extrème Est...c’est nettement plus grand et avec deux ports aussi.

-Oui, ici sont gîtés la majorité d’entre eux je pense, mais je n’en suis pas certain...Ils doivent y être possiblement pas loin de quinze à vingt mille, mais ce n’est qu’une estimation, il faudra que vous enquêtiez plus sérieusement ; je le répète : je ne connais le mieux que ma ville.

-Justement, dans ta ville, Marcellin, demanda Claude, tu nous dis que tous les hôtels de la plage sont habités, mais y en a-t-il d’autres qu’ils occupent à l’intérieur ?

-Oui, peu, mais il y en a, et ils sont tout près de ce bord de mer, là, leur montrant la plage initiale.

-Peux-tu les situer sur une carte agrandie de la ville et les entourer d’un trait aussi ? Elle disposa rapidement une nouvelle carte sur la première ; Marcellin se concentra sur ce nouveau plan et inscrivit plusieurs cercles bleus.

-As-tu besoin de te reposer un instant, mon frère ? lui demanda Claude en lui souriant.

-Non, merci de l’intention, mais il faut travailler au maximum pour les crever ces ordures, j’aurai tout mon temps pour me reposer dans ma tombe, si par miracle j’en ai une un jour.

-Pourquoi dis-tu ça ? demanda le pilote étonné. -Parce que ces salauds jetent les corps des esclaves décédés, loin d’ici, avec

leurs engins volants, pour qu’ils soient dévorés par les meutes de chiens sauvages qui rodent en permanence aux alentours, attendant leurs pitance. Ce sont des monstres, je les hais à un point...J’ai plusieurs fois failli en tuer un, mais...une force m’a toujours retenu, pensant qu’il fallait que je vive encore pour un but inconnu...Je comprends maintenant que c’était vous deux, votre venue miraculeuse ; le destin a préservé ma vie pour ce jour, ce moment inespéré ; c’est fantastique !

L’équipage était blême de colère et de rage impuissante pour l’instant, Claude frappait fortement son poing serré aux jointures blanches dans son autre main ouverte, il haletait d’une rage à l’étouffer. Chacun but un verre de raisin en silence, pour pouvoir continuer de parler et débloquer leurs poitrines de cette étreinte oppressante d’envie sourde et puissante de tuer.

-Et les gardes, Marcellin, où sont-ils cantonnés en majorité et combien sont-ils ? lui demanda le pilote.

-Je pense qu’ils sont, ici dans ma ville, dans les...mille à mille cinq cents malades mentaux environ. Il regarda la carte et entoura deux points sur celle-ci. Ils sont dans cet ancien grand magasin face à la gare et...il y en a en permanence à l’ancien aérodrome de la ville...là à l’Ouest, ils doivent y tenir une garnison et y

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être les plus nombreux je pense, mais je ne puis rien affirmer car je n’y ai bien sûr jamais mis les pieds, c’est à étudier de plus près aussi.

-Marcellin, lui dit Alexandra ravie, tu es une véritable mine d’or de l’information, t’en rends-tu compte ? Que deviendrons-nous sans ton aide inestimable ? Tes amis te devrons leur liberté un jour, c’est évident !

-Tu me vois enchanté qu’il en soit ainsi, ma si belle enfant, je...je peux te parler avec franchise, Alexandra ?

-Mais bien entendu, Marcellin, je ne te demande que ça justement, parle-moi à coeur ouvert, je t’en prie même.

-Oui...ma si belle enfant, alors que tu es une femme extraordinaire de beauté, de fraîcheur, de...je ne sais plus comment exprimer ma joie de te voir, te regarder simplement respirer. Tu...vous ne pouvez pas savoir bien sûr...tu es si belle, une femme si ravissante et entière...tu es un rêve pour un vieil homme comme moi. Dans cette ville, comme dans toutes, nos femmes esclaves, les pauvres, habillées pareillement et surtout minées par ce malheur qui ne cesse un seul instant de torturer nos existences, sont de pauvres malheureuses bien incapables de paraître avec un moindre soupçon d’attrait, de beauté, de fraîcheur. Mais les autres...les femelles des monstres Zanko-Khuigs, monstres elles-mêmes ; sont justement devenues monstrueuses de laideurs et de méchanceté, comme tous le sont de toute façon ; de se gaver de tous les plaisirs charnels, autant la nourriture que le sexe, car ils ont des esclaves spécialisés pour cela. Je vous en parlerez plus en détail plus tard.

Ces monstres Zanko-Khuigs ont dégénéré en véritables tas de viandes repoussants et puants et...ce qui n’était pas fait pour les arranger, de par le très haut niveau de consanguinité qu’ils ont développé, c’est leur mode exclusif de reproduction du reste ; ils en sont encore plus horribles, en totale déliquescence, leurs tares ont outrageusement repris le dessus et en font donc des monstres véritables. Ils sont tous énormes et avachis, rutilants de bijoux graisseux et abjects. Ils puent la sueur et le stupre, car ils ne font que baffrer et faire l’amour, qu’ils appellent ça ; ce sont des copulationss porcines et rien de plus...ils font ça n’importe où.

C’est immonde de les voir...Ils ont pour cela ces fameux esclaves sexuels comme animaux de compagnie ; vous les reconnaîtrez à leur collier de couleur rose, uniquement eux en sont affublés ; cela va d’enfants de quatre à cinq ans à de jeunes adultes jusqu’aux alentours de vingt ans, mais guère plus. Ecoutez bien car c’est très important pour vous lors de l’attaque...Ces malheureux, les roses, sont conditionnés dans ce grand bâtiment à côté du port, celui qui est tout biscornu, d’une grande laideur.

-C’est celui où nous étions planqués certainement, dit Claude ; celui en venant de la plage ?

-Oui, il n’y en a qu’un d’aussi grand et aussi laid, d’aussi affreux. Avez-vous vu ce qu’il y a d’écrit au-dessus de l’entrée, le long de la rue qui vient des hôtels ?

-Non, dit Alexandra, nous ne sommes pas encore allés de ce côté de cette façade, pourquoi ?

-Le fronton de l’entrée porte le nom de MK-ULTRA.

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-Et alors, que signifit ce nom ? demanda-t-elle étonnée. -C’est le nom, comme l’expliquent les anciens dans les rouleaux, qui remonte à

plusieurs décades d’avant l’attaque de 2015, et qui était une sorte d’entreprise criminelle appelée Projet Monarch, pour rendre esclaves des gens du peuple et les amener à en faire des esclaves sexuels dociles pour assouvir les pires jeux pervers et érotiques des puissants : les politiques, industriels, financiers, etc. Ils rendaient ainsi prisonniers, dressés psychologiquement par toutes sortes de tortures physiques et psychologiques, des enfants, des femmes et des hommes, des familles entières souvent aussi. Certains aussi étaient dressés comme tueurs.

Et depuis ces débuts, avec l’aide de médecins psychiatriques principalement, d’infâmes crapules qui avaient vendu leurs âmes aux pires monstres de la création. Ainsi, ils ont perfectionné cette technique en une redoutable et définitive machine à tuer tout esprit, sentiment et jugement. Ces enfants qui sont ainsi traités dans ce lieu sinistre, sont entraînés durant de nombreuses semaines, où ils y suivent régulièrement par la suite des stages pour les fixer en un état de soumission totale ; local où ils doivent y souffrir mille morts car on les entend parfois hurler de souffrance comme des déments...

Ces enfants sont, il dû reprendre son souffle tant son émotion était grande ; ils en ressortent définitivement pervers et voués corps et âmes à leurs propres bourreaux...Ils sont totalement assujettis à leurs caprices sexuels les plus sordides et sont devenus comme de féroces chiens de garde pour leurs maîtres. Ces roses nous espionnent, nous leurs semblables esclaves aussi, et s’ils peuvent faire du mal à l’un de nous, ils s’en font une joie même, leurs maîtres les récompensant d’une babiole...

C’est épouvantable, il est arrivé même qu’ils tuent sauvagement l’un d’entre nous, le plus souvent une de nos compagnes, car ils sont lâches bien sûr. Souvent, leurs maîtres les tiennent en laisse comme des animaux, qu’ils sont véritablement devenus ; des jouets sexuels qui assouvissent les pires perversions des maîtres, et ce partout où ça leur prend : dans la rue, la plage, n’importe où.

Des scènes souvent d’une ignominie révoltante, abjecte et...quand ils sont fatigués d’un jouet, ils le massacrent ou le donnent aux gardes, ces autres détraqués mentaux qui s’en repaissent sadiquement, jusqu’au moment ou ils le jètent aux chiens sauvages, encore vivant parfois. Nous sommes tous marqués de ces colliers de couleurs à notre arrivée, dans cet immeuble.

Les deux qui l’écoutaient étaient atterrés, livides ; de grosses larmes silencieuses coulaient sur les joues d’Alexandra, qui semblait ne pas même s’en apercevoir...

-Ainsi...le jour de l’attaque, je ne sais quel sera votre plan, stratégie, mais comprenez bien qu’il vous faudra alors tuer en premier ces malheureux enfants marqués de rose, car ils seront un grand danger dans votre dos ; ils n’hésiteront pas à tuer les vôtres en traître...Ce que je vous demande, car ce sont nos malheureux frères et soeurs quand même, mais absoluments irrécupérables et de véritables bêtes fauves, c’est de les tuer impérativement mais si possible sans qu’ils ne souffrent, car ils ne sont pas responsables...ce sont eux les premières victimes de ces monstres Zanko-Khuigs ; eux oui, faites les souffrir un enfer,

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que le ciel en entier entende leurs hurlements d’effroi et de souffrance les plus atroces, ça oui, il le faut absolument, impérativement.

Marcellin cessa de parler, le regard triste, perdu dans un autre monde d’horreurs innommables. Un long silence oppressant s’installa dans la cabine puis, Marcellin demanda d’aller aux toilettes, du coup ils y allèrent tous trois. Durant le temps que leur invité était ainsi isolé, Alexandra vérifia le bon fonctionnement des deux caméras d’ambiance qui enregistraient discrêtement cette entrevue stupéfiante, mémorable et déterminante.

Ils burent encore du jus de fruit, et pour cette fois ce fut du jus de pomme, pour le plus grand régal de leur invité.

-Marcellin, dit Alexandra, doucement en lui prenant une de ses mains dans les siennes, je n’avais jamais entendu de telles horreurs de toute ma vie...nous ferons tout comme tu dis, je te le promets.

-Combien d’esclaves êtes-vous ? demanda Claude. -D’abord les couleurs, il montra son tatouage autour du cou ; les Noirs donc,

les plus nombreux, qui sont le service hôtelerie ; les Verts, qui sont la maintenance des espaces verts ainsi que la voirie ; les Marrons, qui sont les techniciens hautement spécialisés, du type électriciens, plombiers, etc., puis ces fameux Roses sexuels ; ainsi que des Rouges, en petit nombre, pour les services de santé : toubibs, chirurgiens, dentistes...Marcellin comptait sur ses doigts...Ha ! et quelques Jaunes, qui sont à leur arrivée des jeunes gens, mais qui sont réservées au service exclusif des gardes, pour leur jeux pervers de détraqués qu’ils sont tous. Nous ne les revoyons plus jamais, ces malheureux sont condamnés dans une vie d’enfer à tous les sévices sexuels j’imagine, sans aucune chance de pouvoir changer leur sort, mis à part le suicide, comme pour tous. La seule chose qui est interdite aux gardes, est de les tuer, ce privilège étant exclusivement réservé à leurs maîtres ; le meurtre et l’assassinat est le privilège unique des Zanko-Khuigs, les seigneurs de la planète...

Si nous, esclaves, sommes malades plus de quinze jours sans pouvoir travailler : direction les chiens sauvages, uniquement ! C’est pour cela que vous verrez très peu de gens de mon âge, je suis un cas peut-on dire ; je dois avoir une forte constitution pour avoir survécu sans pépin majeur jusqu’à maintenant.

Combien sommes-nous ? Dans ma ville...c’est encore difficile à affirmer car les esclaves qui travaillent sur la colline y restent pour ainsi dire à vie et n’ont donc aucun contact avec nous, ceux d’en bas.

Un gars comme moi, un violet, y est avec eux en permanence aussi...Je dirais que nous sommes sans doute aux alentours de dix à douze mille environ, sans compter les roses bien évidemment, dont j’ignore combien ils sont, et dont beaucoup disparaissent assez régulièrement.

-Mais, s’esclaffa Alexandra, où sont-ils tous ? où logent-ils ? nous n’en avons vu que très peu entrant ou sortant des hôtels, comme ceux qui logent dans ton immeuble, pour ne citer que ceux-là.

-Oui, je comprends votre grande surprise, mais c’est pas étonnant. Ceux de mon immeubles sont actuellement au nombre de trois cent dix-sept exactement, des esclaves d’appoint. Ils vont uniquement où on a besoin de renfort, ils n’ont

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pas de poste fixe, ce sont des Itinérants, comme on les appelle. Les autres, ceux qui sont à poste fixe, habitent sur place et sont donc corvéables à merci...Ils logent dans les sous-sols, les anciens garages des véhicules d’antan. Ils s’y sont aménagés tant bien que mal des coins pour dormir sur des grabats, dans les anciens box des véhicules. Ils prennent leurs repas dans un local spécial dans un coin des cuisines de l’hôtel où ils résident, deux fois par jour, au début et en fin de service ; nous avec, et pas de quoi grossir, croyez-moi.

Les douches et toilettes sont à disposition au premier sous-sol, pour qu’ils arrivent propres, habillés d’une combinaison propre tous les jours, impéccables pour aller servir ces porcs puants que sont tous ces monstres de Zanko-Khuigs. Voici pourquoi vous n’en avez aperçu que très peu. Beaucoup de ces malheureux n’ont pas vu le soleil depuis des années, ils tombent vite malade, et vous connaissez maintenant dans ce cas la suite qui leur est reservée au bout de quinze jours sans pouvoir travailler : les chiens sauvages !

-Que ce passe-t-il si l’une de vos femmes tombe enceinte ? lui demanda Claude.

-Cela est variable mais surtout très rare, et heureusement, déjà que nous sommes séparés pour dormir, les hommes des femmes. Les quelques cas de grossesses chez nos compagnes sont donc suite à leurs viols, soit par les roses ou par leurs maîtres...J’ai connu seulement trois cas ; le premier, la coupable, dès que découverte vers les cinq à six mois de grossesse, fut jetée vivante aux chiens, en passant bien entendu un temps chez les gardes...Le deuxième cas : la malheureuse eut la force de se tuer elle-même ; ce fut la plus chanceuse, et le dernier cas...vous ne me croirez peut-être pas, rien que d’y repenser je voudrais mourir de suite, comme à chaque fois pareil...

Ils la laissèrent mener sa grossesse à terme, la choyant même un peu pour la mettre en confiance, pauvre malheureuse et, quand vint le moment d’accoucher, ils firent rassembler par les gardes un maximum d’esclaves sur l’avenue, devant le grand hôtel central ; c’était en été, ils amenèrent alors le chariot de la clinique sur lequel elle était allongée, déjà prise sous les douleurs et...pardonnez-moi...mais il faut tout dire pour venger la mémoire de cette malheureuse jeune femme, elle avait vingt-trois ans, et si jolie...

Les Zanko-Khuigs...quel malheur, chaque fois que j’y pense ça me tue un peu plus...ordonnèrent alors à leurs esclaves roses, ces jeunes tueurs horribles, de l’accoucher au couteau et de jouer au ballon avec son bébé. Ces malades l’éventrèrent en hurlant de rire comme des damnés puis jouèrent avec ce bébé qu’ils tuèrent de suite et fut mis rapidement en morceaux, le sang inondant tous ces malades et l’assistance de leurs maîtres qui étaient ravis ; les tripes formant de longs serpents sanglants sur les trottoirs et l’avenue...

Puis, comble du macabre et de l’horreur, durant qu’ils jouaient avec les restes de la dépouille ensanglantée du bébé, l’un de ces grands criminels rose de vingt ans, sur ordre de sa maitresse, une grosse truie Zanko-Khuigs, viola la malheureuse qui agonisait sur son chariot ; ses boyaux ruisselants de chaque côté d’elle, et ce barbare total, ivre de folie meurtrière, fouilla dans le ventre

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béant de la malheureuse pour chercher à tâtons son propre sexe au fond du bas-ventre.

Il le sentit alors et poussa un hurlement bestial de contentement...puis il prit les boyaux et s’en fit un collier, frappant des deux mains à plat dans ce ventre innondé de sang et du liquide amniotique, éclaboussant toute l’assistance hurlante de rire puis, il fit à la malheureuse un collier de ses propres viscères pendant qu’elle expirait lentement, les yeux révulsés d’horreur et de souffrance...

Il se coucha alors sur elle et força sa bouche pour un baiser immonde mais, réunissant ses dernières forces dans un ultime effort, elle lui arracha sa langue avec ses dents ; ce dernier tenta se relever en hurlant de plus belle, l’arrosant de sang mais, le visage ensanglanté, elle cracha ce morceau de chair d’épouvante et lui agrippant ses deux oreilles avec ses dernières forces, elle l’attira violemment contre elle et lui arracha toute la lèvre supérieure et le nez, on entendit le violent choc des dents entre elles lors de ce baiser abject.

Puis elle passa enfin, après cette longue et infamante agonie dans des souffrances indicibles, la bouche pleine de ces chairs abjectes, inondée de ce sang vénéneux, avec dans ses yeux écarquillés cette ultime flamme de rage meurtrière qui lui permit de gravement mutiler son immonde agresseur, sa suprème vengeance en fait...Elle mourut ainsi comme une guerrière, rachetant, arrachant son honneur à l’ultime seconde de sa vie.

Le violeur alors pris d’une terreur et souffrance immense certainement, se releva et voulut s’enfuir de ces restes monstrueux, il sauta à bas du chariot pour courir, mais il y fut retenu prisonnier par les boyaux qu’il s’était passé autour du cou ; le corps suivit son mouvement, glissa et tomba lourdement sur le macadam, il s’emmêla les pieds dans les tripes, le tout dans une vaste et horrible flaque de sang et, il voulut rejoindre sa truie Zanko-Khuigs, laquelle voyant ce spectacle écoeurant, fit signe aux gardes qui sont toujours présents lors de ces assemblées.

Deux de ces derniers vinrent, attrapèrent le violeur chacun par un bras...il était couvert de sang et les yeux fous, hurlant, bavant comme un chien enragé ; sur ordre de la truie Zanko-Khuigs, les gardes l’égorgèrent puis le décapitèrent, jetant cette tête immonde aux autres qui reprirent une monstrueuse partie de ballon avec les pieds...Ils riaient tous comme des fous furieux de voir ce spectacle dantesque.

Ce jour-là finit comme toujours en de pareils cas de violences collectives, entre eux dans une copulation générale si abjecte et si dégradante qu’aucun animal dans tout l’univers ne commet.

Le soir, il restait en plus de ces restes macabres de ces deux corps horriblement mutilés, y compris les morceaux épars du bébé et qui restèrent sur place jusqu’au lendemain. Comme à chaque fois, lors de tels massacres, il y eut en plus cinq cadavres d’enfants sur l’avenue, des petits corps mutilés...vagins et anus éclatés, certains aux morceaux manquants avec les marques évidentes de morsures, horriblement ensanglantés ; tous finirent étranglés, comme à chaque fois de semblables bestialités. Le lendemain matin comme en pareil cas, le service de voirie enlevait ces restes mortels, les disputants aux charognards à

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l’oeuvre depuis des heures déjà : les bandes de rats, les goélands et mouettes et des chats sauvages, sans compter les nuages de mouches entrant en compétitions...Future pitance pour les chiens sauvages...

L’unique avantage pour les survivants en ces cas de leur folie meurtrière et collective, est l’apathie qui s’abat alors sur leur troupeau immonde. Ils sont alors pris pour une douzaine de jours, rarement plus, d’une anesthésie générale, les privant alors de toutes envies sexuelles ou autres...Ils vivent alors ainsi dans une stupeur collective qui est la sauvegarde de tous les nôtres...jusqu’à la prochaine onde de violence qui les rendra encore pire que des animaux, des déments hallucinés qui ne trouvent qu’un semblant de repos que dans l’horreur la plus sanglante et absolue.

Marcellin se tu, le regard dans le vide, hagard... Les deux étaient encore plus effarés, puis Alexandra courue aux toilettes pour

y vomir violemment, longtemps...Ces deux enfants de Gaïa n’en croyant pas leurs oreilles...Puis, un long, très long moment après, écoeurés et révoltés à jamais, ils se reprirent et continuèrent ; une monstrueuse envie de tuer au fond des tripes...

-Pardon, de vous avoir raconté tout cela, mes enfants...de vous avoir sali vos âmes si nobles mais...il fallait que je le dise enfin à quelqu’un, que je libère un peu mon âme de cette épouvante. La vision de ce jour de cauchemard me poursuit inlassablement toutes les nuits dans des affres de souffrances innommables. Dès que je ferme les yeux, j’ai en permanence le regard halluciné et effrayant de souffrance et d’angoisse éperdue de cette pauvre enfant, regard qui me poursuit sans cesse...

Je ne peux fermer les yeux sans la revoir sur son chariot, et ses yeux, ses yeux...c’est épouvantable, ce regard qui me hante...ces mares de sang, les cris et rires de cette foule de monstres ignobles. Je ne peux oublier, comme tous mes compagnons. Nous savons qu’il existe des esclaves dans des fermes agricoles et qu’ils ont le cerveau comme anesthésié ; ils ne doivent donc plus pouvoir penser alors. Nous les envions et voudrions avoir ce privilège. Ne plus penser, être des morts vivants. Le cerveau est une machine redoutable et qui ne s’arrête jamais et de plus incontrôlable. Ne plus pouvoir penser, si vous saviez à quel point nous en rêvons.

Un long moment de stupeur s’installa encore parmi eux deux...puis... -Mais, dit Claude, qui avait l’air pensif, avec tous vos gens qui disparaissent si

vite alors, et aussi abominablement, comment font-ils alors pour avoir toujours suffisemment de personnels à leurs services ?

-Aux débuts parait-il, selon nos anciens, ils tuaient les esclaves avec une telle frénésie qu’ils se retrouvèrent vite à court de personnels. Ils durent alors freiner leurs ardeurs meurtrières pour conserver leur train de vie, c’est uniquement pour ça, sinon. Ils ont une haine virulente contre nous tous, notre race blanche.

Maintenant, ceux de ces générations actuelles, totalement dégénérés, adipeux et amorphes, sont trop mous pour toute action violente, alors ils font tuer par leurs jouets sexuels ou par les gardes. Ce sont de véritables larves en fait ; ainsi, nous recevons régulièrement des contingents d’esclaves jeunes venant de loin,

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de l’Australie, disent-ils. Ces nouveaux esclaves arrivent tous guillerets et bien normaux, en parfaite condition physique, mais ne sachant pas ce qui les attend ici, dans ce joli décor vu de loin. Il y en a de tous les âges, les plus jeunes et plus beaux étant réservés pour le MK-ULTRA...pour en faire leurs horreurs sexuelles.

Il y aurait là, sur ce continent australien, quelques centaines de vigoureux esclaves mâles étalons, et des milliers de pondeuses qu’ils les appellent, femelles reproductrices qui sont menées au mâle sitôt accouchées. Ils y sont tous bien nourris et vivent dehors dans un grand camp de baraquements. Ils y cultivent eux-même leurs moyens de subsistances. Ce sont des brutes totalement incultes et ignares de leurs véritables conditions, pareils à des animaux.

Quand les gardes viennent ramasser les couvées de petis, une fois qu’ils sont sevrés, pour les MK-ULTRA entre autres, dont ces géniteurs ne se doutent pas un seul instant de leur réelle destinée ; les femelles alors, seulement elles, esquissent alors des grimaces d’attaques simiesques pour tenter défendre leurs portées, mais elles reculent vite devant les armes électriques des gardes.

Passé les quarante ou cinquante ans maximum, ou suivant l’état de conservation de la bête, ces femelles sont éliminées, ainsi que de même vers les quarantes ans maximum pour les mâles. Ces femelles les plus belles encore, passant alors bien évidemment un lap de temps chez les gardes, puis...ce continent Sud ayant lui aussi de traditionnels chiens sauvages particulièrement efficaces, parait-il...Vous connaissez maintenant leur destin final.

Les jeunes réservés à un service technique sont élévés dans des centres professionnels, car les Zanko-Khuigs sont bien obligés de former leurs futurs serviteurs. Les connaissant, cela doit leur être odieux de devoir justement instruire ceux qu’ils haïssent et méprisent mais, comment faire autrement ? Les esclaves les mieux lotis sont ceux des service de santé ainsi que les personnels des cuisines ; ceux-ci ne sont jamais importunés, ils sont relativement bien traités même, comme tous ceux qui sont relationnés à l’alimentation en général ; les autres spécialités traitant de la maintenance sont relativement bien protégés de ces malades de part leur isolement professionnel même, ils n’ont le plus à craindre que les gardes qui les accompagnent où qu’ils aillent, en équipe ou séparément.

Le pire est pour ceux à leur service direct, en contact journalier avec eux, ce sont eux, enfin, nous, voulais-je dire, leurs traditionnels souffre-douleur des services hôteliers ; quoique les majordomes comme moi sont protégés de part la difficulté de leur remplacement, uniquement. La plupart de ces personnels hôtelier ne reçoivent aucune instruction professionnelle ; il est évident que pour faire des lits ou servir une table et faire le ménage, nul besoin de perdre son temps en formation, cela s’apprend sur le tas en peu de temps.

Les autres reçoivent un enseignement qui va se détériorant graduellement, ce qui se conçoit aisément puisque les professeurs sont les anciens élèves des couvées précédentes. Chaque génération déformant l’information reçue, y apportant à son tour sa petite touche de fantaisie avant de la retransmettre. Ce sont des artistes, chacun interprétant la comédie à sa façon ; si bien que je ne

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vous conseillerai point de vous faire soigner par ces autoproclamés mèdecins locaux, il vaut bien mieux compter sur le bon sort et dame Nature.

Autre particularité de ce système d’élevage en batterie des esclaves, car tel est le véritable terme le désignant ; leur langage est un charabia d’anglo-français...qui décante en vivant ici, donnant une sorte de parlé parfois inintelligible, mais il leur suffit de comprendre les ordres des maîtres, ces derniers ne leur demandant jamais un avis ou encore moins une réponse, ils les méprisent bien de trop pour cela. Ainsi donc, vous le savez maintenant, les Zanko-Khuigs font de l’élevage, de l’élevage d’humains, comme du bétail que nous sommes. Ce qui est paradoxal dans tout ce lamentable processus de reproduction et d’élevage d’animaux, parlant aussi bien des esclaves que des autres, c’est que les esclaves ont de part leur vie spartiate même et surtout de par leur relativement peu de consanguinité, puisque les produits de leurs accouplements sont exportés, cassant ainsi radicalement le cercle infernal de montes d’enfants-parents, et vice versa.

Ils conservent de ce fait un niveau de qualité génétique excellent comparé à leurs tortionnaires totalement dégénérés. Pour ces derniers, la souche de leur race est irrémédiablement détruite est rendue inexistante même à l’heure actuelle. En fait, et c’est là que c’est le plus drôle, si l’on peut oser parler de drôlerie dans un tel contexte d’une si grande épouvante, c’est que leur angoisse fanatique et religieuse de garder la supériorité intacte de leur race, a fait qu’ils se sont détruis eux-mêmes...en un retrour du redoutable boomerang génétique, imparable et radical.

J’irai sans aucune crainte encore plus loin dans le paradoxe...Si nous tenons tous à notre vengeance salvatrice et indispensable, il faut alors se dépécher de les saigner comme des porcs immondes qu’ils sont tous, avant qu’eux-mêmes ne disparaissent de par leur état actuel de déliquescence complète qui les attend sous peu...Je ne leur donne même pas un siècle encore pour qu’ils retournent alors en l’état de larves, déchets abjects et nauséabonds. Ils ont suffisemment pollué la planète comme ça ; dépéchons-nous et assassinons-les joyeusement dans la plus totale épouvante une bonne fois pour toutes et brûlons leurs charognes, qu’il n’en reste plus un seul atome, une seule molécule infectée de vivante !

Mais, parlant d’élevage...Comme disait le premier majordome qui commença de raconter notre histoire ; a-t-on un seul jour pris, sur cette planète, la moindre considération autre que marchande pour le bétail ? Peut-être sommes-nous voués à expier les fautes...des horreurs commises par nos ancêtres ? On peut se poser légitimement la question quand on voit la somme d’horreurs que nous subissons tous depuis des siècles. Mais, ne croyez-vous pas que les souffrances de millions des notres aient maintenant racheté notre pardon ? On ne peux humainement continuer ainsi cette atroce et consciente mort vivante que subissent les nôtres ; même les animaux sauvages les plus féroces se lassent de tuer au bout d’un moment, mais pas eux...jamais. Ils sont le mal indicible de l’univers en entier...plus aucun mot du vocabulaire ne peut plus les décrire, non, ils se sont d’eux-mêmes irréversiblement positionnés au-delà des humains.

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Marcellin s’arrêta de parler, essoufflé et étonné de cette si longue tirade...Les deux le regardaient...livides...

-Mais amis, je pensais depuis toujours n’avoir rien à dire d’intéressant ou d’important et...je réalise abasourdi que je viens de parler mille fois, dix mille fois plus que durant toute mon existense, jusqu’à ce jour fantastique de votre venue miraculeuse.

-Toutes ces révélations sont véritablement incroyables et d’une extrème importance pour nous tous, merci infiniment Marcellin, lui dit Alexandra, en lui serrant affectueusement un bras, et...sais-tu où se trouve ces camps en Ostrali ? le nom de la région ou celui d’une ville ?

-Malheureusement non, là-bas, les gens ne savent rien du monde qui les entoure, ils sont coupés de tout moyen de savoir quoique ce soit, il n’y a pas de bibliothèque, comme ici aussi du reste, où elle fut incendiée dès les débuts de la dictature de ces pourris, ainsi que tous les journaux et autres sources susceptibles de nous fournir la moindre parcelle d’information mais, il y a un nom qui court dans les têtes, je n’en connais pas la valeur, les gens parlent de cette région australienne comme étant près d’une montagne qui s’appellerait, Makdoneil ? Mac Donel ? Doniel ? je n’en connais pas l’orthographe pas plus que sa réelle existence, il vous faudra chercher.

-Si un nom semblable existe nous le trouverons, sois certain de ça, Marcellin, et encore mille fois merci ; nous allons gagner un temps fou et précieux, uniquement grâce à toi...Nous en savons maintenant plus en ces quelques heures passées avec toi que durant tous ces siècles de recherches angoissantes d’incertitudes, c’est fantastique !

-Je suis heureux alors de pouvoir être enfin utile à quelque chose. C’est très réconfortant pour moi, car vous savez, vivre avec ce vide au fond des tripes, savoir que sa propre existence n’a aucune espèce d’importance, de valeur, est d’une nullité totale, est la pire des tortures journalière que peut ressentir un être humain...Ce sentiment de non-existence est atroce. Merci à vous deux de me permettre enfin de revivre alors pleinement, me retrouver après cette si longue nuit de néant, merci mes enfants, merci.

Ils firent un arrêt, soulagés de stopper un moment le rapport de ces horreurs...C’était bien plus qu’ils ne pouvaient en supporter en une seule fois. L’équipage de ce perceur était totalement atterrés ; eux qui pensaient connaître le summum de l’infamie avec ces esclaves des collectivités agricoles, réalisaient effarés que ces derniers étaient sans plus aucun doute alors, des sortes de privilégiés dans l’horreur. Ils se restaurèrent encore puis, la mission continuant malgré tout, il leur fallait obtenir de suite un maximum de renseignements, car rien ne permettait alors d’avoir la certitude de retrouver leur nouvel ami lors d’une autre visite...

-J’espère que votre attaque ne tardera pas trop, dit le vieillard, car j’aimerai tant voir ce jour et, vous n’avez aucune idée de quand cela sera possible ?

-Pour l’instant non, mais c’est d’après les dires de nos scientifiques, une question de un à deux ans environ ; ils en seraient à l’adaptation de cette arme

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sur nos appareils ; nous étudions déjà les stratégies de cette attaque qui nous libèrera tous, ou nous mourons tous.

-Ne dites jamais ça ! Vous allez réussir ! s’écria Marcellin avec force. Mais vous parliez de stratégies ; il y a un type d’information qui peut s’avérer utile, voire importante, judicieuse. Sachez donc que tous les ans à la date du 1er Mai, les Zanko-Khuigs font une grande fête pour commémorer leur prise du pouvoir sur la planète ; les fins de siècle sont l’occasion d’une fête encore plus importante pour eux...J’ai pensé qu’un de ces jours spéciaux serait une excellente occasion pour les détruire en bloc, car alors ils sont tous présents ce jour-là et...symboliquement cela serait important aussi pour nous tous.

-Tu ferais un stratège remarquable, Marcellin, bravo ! lui dit Claude, excellente idée ; j’ignore si les nôtres y ont pensé aussi, mais nous allons les en aviser dès notre retour, sois certain, et avec ton nom joint à cette brillante idée et qui passera à la postérité, car nous devons toujours honorer nos semblables qui auront marqué la reconquête.

-Puisque cela vous semble utile je vais vous donner les jours de ces dates du 1er Mai, je les ai là sur moi, dans mon carnet qui ne me quitte jamais, ce pour ne pas oublier de réclamer du personnel en supplément bien avant ces jours fatidiques, car ils sont toujours l’occasion de grands massacres collectifs.

Il sortit son vieux carnet d’une poche, le feuilleta un moment puis trouva la bonne page ; il prit un crayon et commença d’annoter sur la carte, en énumérant à haute voix.

-Commençons donc à partir de l’année prochaine, les jours de ces 1er mai : 2398 = Vendredi / 2399 = Samedi / 2400 = Dimanche / 2401 = Mardi / 2402 = Mercredi / et en suivant... Je n’ai pas le courage de marquer la suite car il sera alors certainement trop tard pour moi. Par contre, le dimanche de ce 1er mai 2400 serait intéressant puisque contrairement aux Zanko-Khuigs, c’était le jour de repos hebdomadaire des occidentaux d’alors. Nous, les nouveaux maintenant, renouerions ainsi avec cette tradition typique de notre race, en un jour d’éclat particulièrement sanglant et grandiose.

-Merci pour ces informations, dit Alexandra, nous allons donc, rajouta-t-elle en riant, ordonner à nos savants qu’ils se débrouillent comme ils veulent mais qu’ils doivent absolument nous équiper de cette arme pour attaquer ce 1er mai 2400, pour satisfaire et honorer son auteur, toi, Marcellin, dit-elle en riant.

-Riez, riez, oui, vous pouvez en rire, dit alors Claude en souriant et les avisant de l’index, c’est ainsi que les grands événements historiques se réalisent parfois, par un clin d’oeil de l’Histoire à ses grands inspirateurs, souhaitons le très fortement en tout cas.

-Bien...Marcellin, sérieusement maintenant, demanda Alexandra, comment faites-vous pour que chacun d’entre vous...les majordomes, sachent l’existence de la cachette de ta chambre et de devoir poursuivre la constitution de ces documents de votre Histoire ?

-Ah oui ! je comprends votre doute, mais c’est simple en fait. Depuis des années déjà, et il en fut ainsi pour nous tous, un plus jeune que moi, mon futur remplaçant est désigné pour apprendre ce qu’il devra savoir faire au cas de ma

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disparition brutale, soit : les chiens sauvages...en première raison. Pour cela, les Zanko-Khuigs évaluent le QI, le quotien intellectuel de chacun et savent donc quels sont les meilleurs pour chaque poste délicat. Ainsi donc, depuis longtemps déjà je forme mon remplaçant déjà désigné et lui transmets mon savoir et...plus particulièrement donc, le devoir de continuer la rédaction secrète de notre histoire, pour un futur jusqu’alors des plus hypothétique, pour ne pas dire incertain, mais maintenant réellement possible, enfin.

-Marcellin, il va nous falloir te ramener pour ne pas provoquer une alerte avec ta disparition, dit Claude, tu comprends que nous sommes obligés d’agir ainsi ?

-Oui, mais n’ayez aucune crainte pour moi, car rien que de vous savoir là, caché quelque part, cela est désormais la plus grande joie de toute mon existence et...je vais tenter encore plus de récolter un maximum d’informations pour votre prochaine visite ; je vous attendrai comme jamais je n’ai espéré quelque chose...sauf de mourir peut-être.

-Merci Marcellin, dit le pilote, tu as une âme généreuse d’authentique guerrier et tu es digne de combattre à nos côtés, merci infiniment ; tu as désormais une place d’honneur parmi nous et tu fais dès cet instant parti des combattants de la reconquête de Gaïa, la splendeur des étoiles. Bienvenu parmi nous tous, mon frère, viens que nous nous embrassions ; ils se levèrent et se donnèrent une accolade.

-Pour que nos futurs contacts soient plus rapides, nous allons te donner un petit appareil enregistreur, que voici. Claude sorti d’une poche intérieure un graveur à micro-caméra de haute mémoire et à énergie illimitée, l’ensemble tenait facilement dans une main ; il lui en montra la fonctionnement, et après quelques essais Marcellin fut capable de s’en servir correctement.

-Quand nous passerons récupérer la mémoire de cet appareil, nous ne resterons que quelques minutes, car il ne faut pas trop tenter le sort non plus. Nous t’apporterons aussi des colis de vivres en plus forcément d’une nouvelle mémoire pour l’enregistreur et...n’oublie pas, c’est très important : enregistre toutes tes pensées, même et surtout tout ce qui te semble de peu de valeur ou même ridicule peut-être, car nos stratèges pourrons possiblement en tirer profit, d’accord, mon frère ? Ah ! et n’oublie pas à chaque fois, au début de l’enregistrement de préciser tes désirs ou besoins de quoi que ce soit, que nous puissions les satisfaire, d’accord ?

-Très bien ainsi. J’espère pouvoir glaner des informations intéressantes qui aideront à les détruire.

-Marcellin, dit Alexandra, une fois nous viendrons pour une longue visite, dans pas trop longtemps nous espérons. Nous ferons une provision de petits graviers pour à chaque fois en jeter une pincée contre les vitres de ta fenêtre, pour t’aviser de notre présence, d’accord ? Tu n’auras ainsi qu’à l’ouvrir.

-Entendu. -Peux-tu nous dire à partir de quelle heure au plus tôt, nous pouvons venir,

pour une sortie comme celle-ci ? -Dès qu’il fait nuit noire.

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-Mais, dit Claude, les derniers esclaves rentrent vers les dix heures passées, pour certains d’entre eux, n’y a-t-il aucun risque si tu pars avant ?

-Non, je vous l’ai déjà dit...personne ne vient jamais dans mon coin, jamais, et encore moins les Zanko-Khuigs, et surtout pas la nuit. Les gardes ne viennent jamais non plus, alors voyez, je peux quitter ces lieux pour quelques heures sans que personne ne s’en aperçoive et ne s’en préoccupe encore moins. Ça fait des siècles qu’il en est ainsi, et vous savez, pour changer une routine ancrée depuis si longtemps dans leurs moeurs, il faudrait un événement si extraordinaire que s’en est impensable ; et rien ne le justifie pour le moment ; de plus, je suis presque certain que la majorité des Zanko-Khuigs ne savent plus lire notre langue et tout juste même s’ils sont encore capable de la parler car la plupart du temps ils nous parlent par borborygmes, gestes, grimaces, etc. , ce sont de vrais singes en fait.

Ils communiquent entre eux dans leur jargons et chacune des deux races s’isole de plus en plus. La seule chose qui les maintient en état de dictature sont les gardes qui leurs restent soumis sous une contrainte psychologique irréversible et au processus automatique, se perpétuant sans fin, un vrai cauchemard...Sans ces derniers nous aurions pu nous-mêmes facilement les tuer depuis longtemps, mais voilà, ces gardes, monstres semi-humains à leur dévotions nous sont impossible à effronter.

Nous, les esclaves, pour pouvoir conserver notre efficacité de travail, avons forcément notre mental intact, car un zombi ne peut prendre d’initiative et...je suis certain qu’ils trouvent un plaisir sadique à nous torturer mentalement car ils nous vouent une haine farouche. Nos anciens nous disent qu’il en fut toujours ainsi. Cette peuplade maudite hait le reste des humains depuis toujours, mais nous les blancs encore plus que les autres, c’est pour cela qu’ils capturèrent les nôtres pour les asservir plus tard, uniquement ceux de notre race qui leur a été de toujours intellectuellement infiniment supérieure, ainsi qu’aux autres groupes d’humains d’ailleurs. Ce sont, disaient les tous premiers majordomes, nos ancêtres blancs qui apportèrent la civilisation au monde de plusieurs millénaires passés, eux seuls et aucun autre peuple, qui n’étaient somme toutes que des barbares insanes ; comme ces maudits Zanko-Khuigs, qui pour se venger misérablement assouvissent ainsi leur instinct primaire et millénaire de crapules criminelles, fourbes et perverses avant toutes autres choses.

-C’est très intéressant, dit le pilote, je n’avais jamais songé à ce côté de communication et ne savait donc pas s’ils parlaient notre langue, ni encore moins une autre.

-Parfait ainsi alors, c’est l’heure malheureusement. Veux-tu, Marcellin, que nous te préparions un colis avec des vivres, ces jus de fruits que tu aimes tant ?

Marcellin réfléchit intensément...puis accepta. -Avec grand plaisir oui, Claude, mais il faut faire des paquets qui puisent entrer

dans la cachette sous le plancher, inutile de prendre des risques inconsidérés quand même.

-D’accord, on voit là la sagesse d’un Homme responsable, dit Claude, qui commença de préparer trois grands colis allongés avec des sacs de voyage en

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toile de nylon noir, faisant choisir à leur invité les marchandises qu’il préférait ; le perceur étant déjà en route vers la côte.

-Marcellin, profite de boire et manger tout ce que tu peux avaler, lui dit Claude en riant...La prochaine fois que nous viendrons nous te réserverons une surprise que tu vas aimer...Oh ! et puis je peux te le dire maintenant, nous en avons parlé tous deux avec Alexandra, pendant que tu étais aux toilettes : nous t’amènerons voir rapidement quelques uns de nos frères, d’accord ? découvrir tes autres frères et soeurs, les Humains libres, que vous serez bientôt tous, tu vas aimer.

-Mais, j’y pense tout à coup, dit Alexandra, pour ce petit voyage, il vaudra mieux attendre d’être plus avancé dans la saison pour profiter des nuits plus longues ; deux à trois heures de plus c’est appréciable, c’est quasiment la durée du vol aller-retour.

-Mes enfants, je vous attendrai sans impatience avec la plus grande joie de toute mon existence, faites au mieux.

Le perceur arriva une demi-heure avant le lever du jour, à deux mille mètres d’altitude et se positionna au-dessus des arbres de la place, pile sur sa position du départ. Celle-ci étant entrée dans la mémoire de l’ordinateur de vol ; c’est-à-dire, position du géopoint précédent ainsi que l’altitude préalable, précise à dix centimètres près, jouant, suivant la déformation de la surface terrestre assujettie à l’attraction de la Lune et de tous les soleils alentours ainsi que et surtout les constellations...Une fois tous solidement attachés avec leurs ceintures de sécurité, Claude donna ses instructions à leur visiteur.

-Marcellin, cette fois-ci nous allons tomber comme une pierre du haut du ciel, et nous arrêter pile d’où nous sommes partis, d’accord ? alors n’aie pas peur, la sensation sera l’inverse qu’au départ...tu vas te sentir t’envoler de ton siège, prêt, Marcellin ?

Ce dernier hocha la tête, se cramponnant inconsciemment aux montants latéraux du siège, le regard anxieux...

Et l’engin chuta comme un météore, cela dura, dura...au moins quelques secondes puis, il ralentit assez vite et s’ommobilisa comme prévu, la fenêtre de Marcellin les attendait, là devant eux. Le perceur resta ainsi durant dix minutes, immobile et enfoui dans la ramure des platanes...Puis le pilote le fit virer et, lumières intérieures éteintes, Claude ouvrit la porte ; l’appareil vint se positionner en travers, pile devant l’ouverture, ces engins pouvant se déplacer dans tous les azimuts.

Claude, une mitraillette équipée d’un silencieux braquée vers la pièce obscure, poussa doucement les croisées du pied et alluma une petite torche dynamo pour vérifier que la pièce ne cachait pas un piège...tout y était tranquille comme lors de leur départ.

Marcellin alla embrasser Alexandra, puis revint et sauta sur le rebord de la fenêtre, il était maintenant d’une grande assurance. Il se laissa glisser sur le plancher, tendit les mains pour récupérer ses colis de vivres que lui passait Claude et, quand il se redressa après avoir déposé le dernier colis au sol, la fenêtre était vide, ils avaient disparus comme des fantômes.

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Un grand sourire illumina alors son visage radieux. Il rangea vite son nouveau trésor sous le parquet puis remit méticuleusement tout en place...Enfin heureux, souriant, il s’allongea sur son grabat et s’endormit de suite comme un enfant. Et pour la première fois de sa vie il fit un somptueux rêve de conquêtes sanglantes dans les hurlements d’épouvante de ses victimes.

Il était alors un jeune guerrier intrépide et fort et d’immondes porcs à visages humains ruisselants de sang, les tripes croulantes et puants la charogne, le suppliaient à genoux de les épargner, tremblants, gélatineux et repoussants de bassesse, et alors, avec l’aide de sa merveilleuse compagne à la flamboyante chevelure de flammes, ils les égorgeaient sans fin en riant tous deux aux éclats...

Ils les égorgeaient, leurs sabres d’airain, tel un pendule séculier les fauchant dans un sourd chuintement divin d’une suave mélodie ; la lame tranchait dans un doux feulement moelleux et transmettait alors une onctueuse vibration au poignet, ondes entrant en syntonie, s’accouplant aux vagues de haines meurtrières s’écoulant à travers le métal de l’arme, fusion d’osmose létale...

Et, radieux, ils les égorgeaient...les égorgeaient...le bras levé, le pendule s’abattait alors sur une écoeurante gorge adipeuse, y ouvrant une large bouche abjecte aux lèvres pourpres boursoufflées, tranchant des doigts, parures et colliers : des lunes de perles marines et pierres précieuses, minuscules soleils multicolores virevoltaient alors, scintillants un instant sous les feux du soleil, puis étaient enfin engloutis dans cette monstrueuse ouverture dans un flot de gargouillis vermeil de bulles mousseuses éclosant sporadiquement.

Et ils riaient et les égorgeaient...égorgeaient...égorgeaient...égorgeaient... D’immenses fleuves écarlates couraient alors dans la ville, la noyant sous un

immense lac de sang immonde puis, enfin satisfaits, enfin heureux et ivres d’une joie pure, ils repartaient enlacés dans leur fabuleux vaisseau d’or, dans les rayons pourpres de ce soleil complice, pour aller sauver d’autres esclaves. Puis, repus un moment de carnages et de meurtres légitimes et rédempteurs, ils faisaient divinement l’amour sur une couche immaculée de fleurs de lys et sous le chant majestueux de harpes célestes...

Ils avaient des enfants blonds d’une grande et lumineuse beauté et d’une grande culture et gentillesse, qui les remerciaient en les couvrant de baisers en chantant, avec des fleurs dans les cheveux...

Les étoiles de cet univers fantastique se penchaient alors sur la couche immaculée de ces jeunes et merveilleux héros qui venaient enfin de nettoyer pour toujours le Cosmos d’une noirceur repoussante et néfaste ; les Astres flamboyants pouvant maintenant illuminer les espaces stellaires de la grandiose flamme de la Vie et de l’Amour...

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Où la Camargue entre dans l’Histoire

e perceur quitta cette ville d’enfer, se dirigeant de toute sa vitesse vers sa station. Ils firent plusieurs duplicatas de la vidéo de cette incroyable

rencontre avec Marcellin. -Claude, dit le pilote, j’ai réfléchi à ces nombreux problèmes levés par ces

révélations de Marcellin...beaucoup concernent les Akadis pour monter leur stratégie d’attaque, sur l’Ostrali en premier, je vais donc directement à Blagnac leur remettre une copie pour qu’ils l’aient le plus vite possible, il ne faut pas perdre une seule minute. Cela va être la révolution et la consternation la plus totale dans toutes nos communautés ; il faut de suite tout réétudier à partir de ces nouvelles donnes. Claude, je suis atterrée de ce que nous avons appris...c’est si, inhumain...on cherche les mots pour le décrire.

-Oui, chérie...que dire devant de telles horreurs...Veux-tu que je te prépare une collation ? Pour moi aussi, ça nous fera du bien de se restaurer un peu ; de toute façon nous ne pouvons rien y faire pour l’instant, alors...

-Oui, merci, tu as raison...Cette vidéo va leur donner du zèle aux savants, tous vont se préparer avec encore plus d’ardeur si c’est encore possible. Il faut impérativement pouvoir rapidement passer à l’attaque, tous vont être con- vaincus que l’on ne peut plus attendre, car c’est humainement impossible maintenant.

-C’est certain, répondit Claude avec fermeté, il va même falloir, ça s’impose aussi, étudier une forme de les détruire de façon particulièrement horrible ; je me refuse à les tuer simplement, ce serait par trop injuste...Ce serait une infamante trahison envers tous ces millions de malheureux qui ont souffert l’impensable depuis ces siècles ; une mort rapide est hors de question, nous ne retouverons notre intégrité qu’uniquement après leur avoir fait subir les pires chatiments que nous pourrons imaginer : c’est ça qu’il nous faut étudier aussi ! En urgence aussi !

-Je suis du même avis ; quand ce pauvre homme nous racontait ça, j’étais envahie de pulsions de meurtres démentielles, j’en étouffais littéralement de cette sourde envie de les massacrer. Oh ! s’esclama-t-elle...j’ai une idée qui sera certainement judicieuse. Après avoir avoir donné une copie à Blagnac et chez nous à Girelles, nous irons à Bertrand leur en remettre une aussi, et nous irons voir leur ancien, Georges, du Conseil des sages, un grand ami de Marion et de Hugues aussi, ce sont eux tous qui l’ont sauvé en fait, la pauvre...

Georges est un Homme d’une grande culture, c’est elle qui me l’a dit. Il connait énormément de choses sur d’innombrables sujets et, peut-être pourra-t-il nous trouver une ou plusieurs idées intéressantes de massacres sanglants, d’accord ?

L

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-Avec plaisir, car tout ce qui les concerne me passionne dorénavant, surtout les moyens de les détruires le plus horriblement possible, exclusivement !

-Tu sais...pensant bien à toute cette incroyable aventure, pour lui donner un nom, pour moi, il en ressort une impression de perte de temps énorme.

-Comment ça ? -Et bien...si nous n’avions pas pris cette initiative on... -Non, chérie, si TOI, tu ne l’avais pas prise...avec ce ON, je sens où tu veux

en venir et, ne me dis pas que tu me reconnais bien là, merci. Elle rit un peu et cela les détendit davantage, ce dont ils avaient bien besoin. -Oui, parce que si on réfléchit un peu, on se rend de suite compte que nous

piétinons depuis des années à cause de trop de prudence qui bloque toute possibilité d’évolution...et pourquoi ?

Il la regardait, l’oeil dans un ailleurs de pensées intenses, puis il lui répondit tout en réfléchissant.

-Parce que...nos décisions sont prises par des personnes certainement trop âgées dans leur ensemble, ils manquent de jus, c’est indéniable, d’autant que nous entrons dans une époque charnière où il va nous falloir prendre les risques inhérents à toutes actions guerrières.

-Exactement, ça me fait plaisir que tu ais cerné le vrai problème du premier coup, chéri.

-Me reconnais-tu bien là aussi ? plaisanta-t-il. -Absolument, et j’entrevois le devoir impératif de changer, modifier en partie

tout ça, sinon... -Tu sais chérie, ces gens, nos chers anciens de ces Conseil des Sages, ne fautent

que par soucis de nous protéger malgré nous, nous les jeunes ; ils ne fautent que par excès de bons sentiments à notre égards, j’en suis absolument convaincu.

-Oui, moi aussi, mais vois toi-même le résultat catastrophique presque, engendré par ces excès sensés nous protéger, et qui produisent le contraire.

-Tu as raison, c’est indéniable ; que comptes-tu faire alors ? -Le plus tôt possible dès notre arrivée à Girelles, j’ai l’intention de leur en

parler, au préalable en petit comité, nous deux ensemble bien évidemment, pour leur faire prendre conscience de la nécessité de rajeunir ces Conseils des anciens par l’apport de personnes plus jeunes.

Je vois ça de la suivante façon, puis dis-moi ton idée : 1- On permet l’entrée de six personnes de quarante à soixante ans. 2- Les six personnes restantes sont au-dessus de cet âge, ils devrons donc eux-

mêmes désigner d’un commun accord lesquels d’entre eux restent au Conseil. -Ça me parait judicieux mais...je pense que dès qu’ils auront vu cette vidéo ils

vont prendre conscience tous seuls de cette nécessité de rejeunissement des cadres ; mais sinon ?

-Alors j’exigerai la réunion d’une assemblée générale d’urgence pour voter les mesures qui s’imposent d’elles-mêmes.

-J’entrevois une possible amélioration plus...il chercha un instant ses mots, plus pointue ; dis-moi ce que tu en penses ; voici. Ce nouveau groupe de gens de la cinquantaine en moyenne, que tu proposes, apportent la maturité, le savoir

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actualisé, je suis d’accord mais...il leur manque aussi ce petit côté d’inconscience et d’audace qui fait parfois toute la différence au moment de l’action, et je pense en disant cela à l’époque du premier contact des Akadis, moment des plus délicats qui auraient très bien pu mal tourner vu le trop de méfiance et manque de spontanéité des deux pêcheurs adultes ce jour-là.

J’ai bien potassé ce rapport, et j’en ai déduit que ce qui justement fit de suite la grande différence ce jour-à, fut la présence déterminante de ce jeune d’à peine dis-sept ans, ce jeune Justin, qui de par sa fougue entraîna ses compagnons pour un contact direct, outrepassant ce fameux excès de prudence qui bloque tout et peut avoir de graves conséquences. Du reste, dans ces documents il ne ressort nulle part le pourquoi, de la part de cette équipe d’Akadis, de leur choix spécifique de contact avec cette petite équipe de ces trois pêcheurs.

L’équipage du perceur éludèrent adroitement la question à l’époque, et maintenant que nous connaissons forcément les moyens de détections dont ils bénéficiaient, je suis persuadé qu’ils firent alors une longue chasse parmi les nombreux groupes des notres, jusqu’à trouver ce jeune à l’esprit impétueux, et je suis persuadé maintenant qu’ils basèrent alors leur tactique de contact reposant entièrement sur ce pouvoir de ce jeune impulsif d’entraîner rapidement ses compagnons malgré eux, ce qui fut des plus judicieux et preuve d’une grande perspicacité de leur part. En raison de tout cela, je n’hésiterai donc pas de proposer pour ce nouveau Conseil, trois tranches d’âges :

1- Trois jeunes de vingt à trente-cinq ans environ. 2- Quatre de tes fameux hommes mûrs, ce qui fait sept nouveaux conseils, et

pour finir, cinq anciens de ceux actuels. Nous aurons ainsi la fougue des trois premiers, tempéré par la maturité des quatre suivants, le tout sous les hauts conseils malgré tout de cinq authentiques vieux Sages aux jugements toujours inestimables. Résultat de ce conseil 3 + 4 + 5 = 12 Conseils de...mi-sages ! rit-il.

-Super ! je te reconnais...exactement, mon oiseau du paradis chéri, oui, superbe idée des plus performantes mêmes ; mais je plains les anciens, ils vont souffrir de devoir supporter ces jeunes impétueux, s’esclaffa-t-elle.

-Ça les rajeunira ! rit-il, et moi je plains les jeunes obligés de supporter aussi ces vieux radoteurs, ça fera donc zéro à zéro !

-Alors c’est d’accord ! on va leur planter la révolution dans leur apathie générale ! Il faut absolument que l’individu puisse émettre librement son idée, il doit garder son juge arbitre total, sinon nous allons scléroser nos capacités de jugement et condamner la communaute à une lente mais inévitable régression. Seul le jugement individuel nous gardera alertes et prêt à tout, surtout avec les jeunes, comme tu dis ; ces vieux sages proposeront alors et principalement des tempérances si besoin ; je suis certaine d’être dans le vrai.

-Tu as entièrement raison, et le problème de Girelles étant le même que ceux de toutes les stations, tous vont devoir s’actualiser...Certains vont nous maudirent !

-Mais non, chéri...car ils montreraient alors aux yeux de tous qu’ils ont usurpé un poste dont ils n’étaient pas digne : un vrai sage doit reconnaître tout seul ses propres erreurs, sinon il n’est pas un vrai sage mais un...

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-Je reconnais bien là, la rouerie bien féminine ; vous êtes infernales, mes petites cailles, mais on vous aime comme ça. Ils sembrassèrent avec passion.

Le perceur fonçait sous pilotage automatique tous les détecteurs d’alarmes

branchés. Claude, assis derrière le siège du pilote qu’ils avaient retourné et levé les accoudoirs. Alexandra était allongée, le buste sur les cuisses de son compagnon qui lui caressait doucement les cheveux, tous deux se reposant de ces intenses émotions. Aucun des deux ne parlait plus, l’appareil filait dans la nuit un peu éclairée par un quart de lune. Ces instants de grand calme leur étaient indispensable après ces heures de tension extraordinaires où ils avaient découvert le summum de l’horreur.

Ils avaient alors découverts aussi que depuis des siècles les leurs tremblaient car ils croyaient avoir à faire front à un ennemi nombreux et redoutable, alors qu’ils étaient peu et de plus et surtout totalement dégénérés...D’avoir tremblé devant de tels déchets leur avait alors fait ressentir une haine et volonté de les massacrer encore plus intense et farouche...Il faudra qu’ils payent cette frayeur injustifiée dans encore plus de souffrances encore pire, telle était leur certitude absolue. Mais pour l’instant, ils profitaient de cet inestimable moment de détente, dans le calme et la sérénité offerte par la sécurité de leur perceur.

Soudain, Alexandra eut un mouvement brusque comme quand on fait un rêve. Elle se releva d’un bond, tourna rapidement son siège et étudia un instant leur position avec ses instruments de bord, puis elle fit faire à l’appareil un large virage sur la droite.

Elle venait de répondre à un appel inconscient... -Chérie, où va-t-on si brusquement ? -Claude...ne me juge pas s’il te plaît, sur cette manoeuvre qui pourrait te

paraître insensée, ça prendra quinze minutes environ, pas plus...peux-tu me le promettre ?

-Oui, bien entendu mais, peux-tu m’expliquer quand même ? -Claude, mon chéri...je sens...je sais qu’il faut que j’aille me recueillir sur cette

plage tout à côté, là...sur les armes de Céline, où elles se sont aimées à la folie. Il faut que j’aille la saluer, lui dire ces nouvelles et la prier de nous aider, il le faut, je le sais...elle...et ne te moque pas s’il te plaît...car elle m’appelle. Après, nous repartirons, juste cinq minutes avec elle...elle qui est morte les armes à la main nous sera d’une grande aide...ne me demande pas comment, je le sais, je le sens, je ne suis pas folle, il faut me croire...d’accord ?

-Alexandra, mon ange de feu...que puis-je dire contre...rien évidemment, je te fais entièrement confiance, et puisque tu sens qu’il faut y aller, alors pas de problème ; je suis cent pour cent avec toi.

Le perceur descendit très rapidement pour, au bout de cette large boucle se retrouver survolant une immense plage où la mer d’un grand calme venait mourir dans un minuscule clapotis. Le bois de pins parasol apparut rapidement sur la droite dans le pare-brise...vingt-trois secondes plus tard l’appareil était posé à quelques mètres d’un petit tertre fait de galets de montagne, le sabre et le poignard entourés d’un collier de toc aux mille éclats...

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La porte s’ouvrit et Alexandra sauta sur le sable et courut l’espace la séparant du tertre, elle tomba un genoux à terre, la main droite étreignant ces armes terribles et elle pria alors de toute son âme les forces du Cosmos en entier. Elle expliqua à son amie défunte ces stupéfiantes nouvelles qu’ils ramenaient aux leurs, et qu’elle comptait sur son aide pour massacrer ces pourritures de Zanko-Khuigs ; sa place avec les combattants de l’enfer était toujours parmi eux tous...

Claude, vingt mètres plus loin, marchait lentement au bord de l’eau, allant et venant, regardant de temps en temps cette Femme extraordinaire en tous points. Il en était amoureux fou, tous deux étaient unis par une grande passion qui ne se lassait point ; ils étaient heureux ainsi, faisant un travail qu’ils adoraient. Il alla jusqu’à ses marques de pas précédents et revint lentement, leva la tête et jeta machinalement un regard sur elle, et fut alors pris d’une frayeur intense qui le paralysa sur place, car là-bas...dans la pâleur blafarde de cet éclairage lunaire, Alexandra tournait le dos au petit bois, toujours agenouillée, l’esprit captivé par son intense recueillement...partie pour un moment dans un autre espace-temps.

Derrière elle, à moins d’un mètre de son dos, se tenait immobile, la tête penchée à hauteur de ses reins, un immense taureau noir de cette Camargue immortelle.

Il ne savait plus ce qu’il fallait faire, l’esprit vide, totalement vide...une peur affrayante lui bloquait la gorge dans une étreinte de fer...Crier ? Impensable ! La prévenir ? C’était déclencher une panique suicidaire ! Attendre...oui, attendre le pourquoi de cet animal fabuleux en cet instant si particulier et...pourquoi paraissait-il si calme ? Oui pourquoi ? Car inexplicablement tout à coup, ce monstre redoutable lui parut inoffensif, lui sembla-t-il. Le fauve souffla alors fortement, faisant voler du sable ; Alexandra sortit de sa torpeur, releva la tête et sentit certainement une présence derrière elle, elle se redressa lentement et eut un sursaut vite contrôlé quand elle vit cette énorme tête noire devant elle, une longue corne effilée et pointue presque à lui toucher son ventre, l’animal souffla fort encore, faisant voltiger le sable...

Elle s’immobilisa et tournant lentement sa tête vers la gauche, elle aperçut Claude à cinq mètres d’elle, pas loin du perceur, il était paralyssé de peur...Puis elle se dégagea très lentement vers l’appareil, le taureau poussa un fort mugissement, baissant et relevant la tête, elle continua de se déplacer lentement, Claude la rejoignant maintenant lui aussi ; le taureau, la tête haute les regardait ostensiblement dans une attitude noble et impériale, mais sans faire montre de la moindre agressivité...Il gratta le sable d’un sabot, soufflant fort, puis il vint sentir les armes dressées sur ce sable. Il se tourna alors vers eux, avança de plusieurs pas et poussa encore un puissant mugissement puis...il se coucha devant le tertre, la tête haute dans une attitude dominatrice, les dévisageant paisiblement.

Ils embarquèrent alors sans plus se presser, certains maintenant que cet animal fantastique était mystérieusement un heureux, incompréhensible et incroyable présage pour leur reconquête. Ils lui semblèrent qu’il venait les assurer de sa protection, terrifiant gardien du symbole de l’amour qu’était ce tertre portant comme un flambeau les armes de fer qui avaient défendu la Vie, au sacrifice

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suprème d’une Femme d’exception, dont l’âme criait maintenant vengeance du fond de cette nuit stellaire grandiose...

Il décolèrent lentement, le fauve les suivant un instant des yeux, son énorme tête levée vers le ciel, il se releva et poussa un profond et lugubre meuglement qui se répandit sur ces immensités vierges et nobles, comme un avis de temps nouveaux qui se préparaient, semblant annoncer une guerre rédemptrice qui sera alors d’une violence terrifiante et marquera l’univers de la sublime renaissance d’un nouveau peuple jeune et fort, porteur de la Vie éternelle qui honore les guerriers seuls dignes de vivre sous ces cieux.

Subitement, alors que le perceur était en route, un sombre nuage sortit brusquement de on ne sait où, passa lentement sur ce gigantesque monolithe vivant. La bête, de couleur de nuit d’épouvante, regarda cette complice chape de noirceur qui venait semblait-il la conforter, l’encenser dans sa redoutable puissance et destinée immémoriale de donneur sacré de la mort foudroyante et sinistre, symbole vivant de la violence aveugle, suprème et imparable terreur pour tous ceux ayant bafoué la Vie.

Lors de leur sortie du perceur et comme toujours en pareil cas, en situation de

nuit, la caméra grand angle à infrarouge fut automatiquement actionnée et, dans la précipitation de cette visite éclair si particulière, ils oublièrent tout simplement de la stopper. Ainsi, cette incroyable rencontre avec cet animal fabuleux fut très rapidement connue de tous, jusqu’à bien entendu en Akadi. Le mythe de cet animal fabuleux prit ainsi corps, tous étant persuadés d’un message des forces du Cosmos, à leur seul bénéfice.

Rapport : Mission d’implantation en urgence. *Secteur Nord-Ouest Méditerranée / Région : grille H-4 - cadre A-07. Suite à projet développé au tout dernier moment, avons pu intercepter de justesse l’unité en

question ; l’implant fut donc opérationnel et la mise en action sélectionnée le fut dans les quarante secondes qui suivirent.

Avons pu également, mais avec de grandes difficultés, diriger et contrôler le symbole (invraisemblable) choisi, au bon moment et au bon endroit ; il faut dire que le résultat fut extrèmement impressionnant. Je me dois toutefois de signaler qu’un événement inconnu d’origine climatique inexplicable et même invraisemblable, est survenu peu après le départ de la cible ; malgré tous nos détecteurs actionnés, nous n’avons pas pu en déterminer la cause et encore moins l’origine. De ce fait, avons décroché immédiatement. Pour toutes ces raisons, nous ferons un rapport complet, qu’une fois rentrés à bon port, dans moins de douze minutes.

Arrivée imminente, code BX-23 : Priorité Urgence Rouge ! Chef de mission, Commandeur-Extra, Hillyo Laydulfiner Avis à tous. Voici un communiqué des plus encourageants, puisque nos frères

et soeurs d’Akadi ont enfin réinventé, sinon modifié et adapté des technologies qui nous assurent déjà la victoire à 98%...les 2 % restant sont d’après les dires de

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nos stratèges, la part réservé aux imprévus qui découlent invariablement de toutes activités humaine ; mais, connaissant la hargne et la haine qui habite chacun de nous, il ne saurait être question de se laisser impressionner par un si petit et si ridicule pourcentage.

Parlant de ces armes, nous venons d’apprendre par les gens de la mission venue récemment avec la navette des Akadis que...et c’est là une des choses des plus importantes pour ce futur dont nous parlions : suite aux recherches acharnées concernant cette fameuse arme devant nous assurer la victoire, ces géniaux savants Akadis ont fait d’une pierre deux coup et trouvée ainsi l’arme de destruction des villes, inspirée par celle qui nous manquera toujours, j’ai nommé notre soeur chérie, Céline, la compagne de Marion, qui formaient une remarquable équipe de patrouilleurs.

Grâce et honneur soit rendu à cette vaillante Combattante de l’enfer, pour ne pas plagier notre cher Vladimir. Ainsi, nous asssurent-ils, nous pourrons aisément anéantir en minuscules morceaux ces horreurs sans noms que sont ces constructions habitationnelles et autres. De plus, comme tous le savent maintenant, ils sont enfin prêt à nous livrer sous peu les nouveaux transports géants ; ces appareils sont capables de transporter quatre cents personnes assises plus les bagages ou, en transport pur, lever une charge de 104 tonnes. Nous devrions recevoir les premiers kits dans les prochaines semaines. Les savants Akadis finissent d’adapter et fignoler ces armes sur nos engins volants.

Et pour l’évacuation des montagnes de déblais résultant des destructions des villes et autres, ils auraient trouvé le principe de la technologie adéquat pour cela : de gigantesques plates-formes antigravitiques. Cela prendra du temps, beaucoup de temps pour tout nettoyer bien entendu mais, le temps est l’élément dont nous manquerons alors le moins, joint à la volonté de redonner à Gaïa sa splendeur méritée ; nous ne doutons pas de mener à bien cette oeuvre sacrée qui aura une importance immense pour nous tous.

Ces plates-formes AG seront construites seulement après la victoire, car vu leur gigantisme elles ne pourront ètre construites qu’au dehors de la base des Appaches ; car retenez bien les fantastiques dimensions de ces monstres : 150 mètres de large, 500 mètres de longueur, pour une surface totale de 75.000 m², avec une coque de 3,50 mètres d’épaisseur seulement, surmonté de poteaux de 12 mètres de haut, reliés par des câbles en acier ainsi que des filets de même nature, offrant un cubage de 900.000 m³; l’ensemble pouvant supporter une charge fantastique de 4 million de tonnes de déblais. Ces engins pourront se mouvoir à la vitesse de 540 km/h environ. Il est impossible de prévoir combien de temps nous mettrons pour enlever tous ces décombres, la tâche est si gigantesque.

Ces plates-formes seront remplies, nous disent-ils, par des sortes d’aspirateurs géants et machines à godets incorporés à la plate-forme, car chacune sera autonome. Elles aspireront les déblais pas plus gros qu’un poing d’enfant, assurent-ils toujours, car tout ce qui est en pierre, ciment ou autre, sera pulvérisé en petits morceaux...Les parties ferrugineuses seront enlevées par des grues équipée de puissants aimants, métaux qui seront récupérés pour réutilisation

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ultérieures. Les autres métaux seront prélevés manuellement avec des grues classsiques et l’ensemble stocké sur un terrain proche en dehors des décombres.

Les décombres inutiles seront alors transportés sur les grands fonds des mers et des océans, de préférence ces derniers. Les cartes nous indiquent les endroits les plus profonds. Ce seront les dernières pollutions imposées aux océans de notre Gaïa, fasse qu’elle nous le pardonne, mais c’est à notre connaissance actuelle l’unique moyen de faire disparaître ces Himalaya d’horreurs.

Les plates-formes seront équipées longitudinalement de deux systèmes antigravitique séparés, ainsi, lors du déchargement il suffira à l’opérateur installé dans un perceur séparé de la plate-forme, qu’il commandera par radio-commande ordinaire, de stopper un côté de la puissance antigravitique de la plate-forme pour que cette dernière bascule dans le vide sur le côté, et ainsi laisser tomber la charge en quelques secondes.

Ces plates-formes pouvant être assemblées en train de dizaines d’unités ou plus. Il n’est pas impossible d’imaginer des convois de dizaines, voire de centaines de km de longueur. Tout dépendra de la vitesse de construction de ces dernières ; choses des plus faciles, nous affirment-ils, car ce n’est que de la ferraille à souder ; travaux bruts sans fignolage aucun, la partie principale antigravitique ne tenant que relativement peu de place, et d’une relative facilité de construction.

Mais nous ne parlons que de travail et de devoirs...et si nous rêvions un peu aussi ? Nos fameux et inestimables frères Akadis ont rêvé avant nous et nous font généreusement cadeau de leurs rêves fabuleux que voici, et qui vous l’allez voir est d’une si grande et si fantastique simplicité.

Ces fameuses plates-formes pourrons aussi servir de support à une maison et permettre ainsi de pouvoir se déplacer avec son gîte...comme les escargot. Un tel espace peut recevoir l’équivalant d’une petite ferme : une belle et vaste maison avec tout le confort : piscine, terrain de sport, vaches, chèvres, volailles ; paturage, des arbres, jardin potager et fleurs...Un rêve véritable et qui nous tend les bras. Ainsi, quand on réfléchit un tant soi peu à ce nouveau moyen fabuleux de vivre, cela va donner, créer une autre dimension à la Vie...Plus besoin alors d’habiter éternellement sur son lieu de travail ; on pourra changer de lieux de résidence à volonté, aller sur l’eau même et servir de bateau, etc.

Il est impossible de prévoir les retombées qu’aura un tel mode de Vie sur l’ensemble de nos communautés ; tout ce que l’on peut en dire c’est qu’il sera assurément porteur d’un grand changement.

Mais, revenons les pieds sur Terre. Concernant le nettoyage de ces horreurs que sont ces villes, tâche gigantesque qui nous prendra des dizaines d’années, sinon plus peut-être ; il faut avoir conscience que nous aurons un travail préalable de sauver certains biens qui sont inestimables, telles certaines oeuvres d’arts qui méritent d’être transmises au futur ; cela sera un long et méticuleux travail de sélection avec nos spécialistes en la matière. On peut considérer à vue de nez qu’environ la majorité des oeuvres des dix à douze dernières décades d’avant l’attaque sont bonnes uniquement pour la poubelle, ce sont pour la plupart de véritables déjections d’esprits malades.

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Nous gagnerons ainsi un temps précieux, car ces tarés avaient construit des musées d’art moderne, qu’ils nommaient pompeusement ; ainsi, bien le merci messieurs les propagateurs de décadences spirituelles d’antan, car ceux-là, vos musées dégueulis subiront en priorité les moyens de destructions systématiques, direction : la grande et vaste poubelle de l’Histoire, qu’ainsi et à juste titre, ces monstruosités aillent retrouver leurs auteurs !

Avant destruction aussi, nous devrons visiter les usines pour sauver les matières premières, les matières usinées, les appareils innombrables et indispensables au début, ainsi que les stocks les plus divers qui gisent par millions de tonnes dans ces lieux, pour les stocker et les protéger de la détérioration du temps. Nous en avons déjà sauvé énormément, mais c’est rien à côté de ce qui reste. N’ayant pas alors le souci immédiat de fabriquer ce qu’il nous faudra pour vivre, nous pourrons pour une bonne part d’entre nous nous impliquer pleinement dans cette oeuvre de restauration de la beauté de notre planète inestimable, Gaïa, la merveille stellaire.

Ainsi, dès que nous serons libres de vivre dehors et où bon nous semble, nous allons connaître une légitime période d’euphorie, c’est un euphémisme...Une sorte d’ivresse va inévitablement s’emparer de chacun de nous et nous allons, pour beaucoup, éprouver le besoin de voyager, découvrir les nouveaux horizons à notre disposition, car nous serons alors les seigneurs uniques et véritables des lieux. Il y a de quoi en perdre pour un temps tout sentiment de devoirs et d’obligations ; cela sera parfaitement légitime et naturel, le contraire serait même inquiétant.

Puis...le temps passant, combien...deux mois? trois mois ? peut-être plus, c’est difficile à prévoir, disons qu’au bout de six mois de vagabondages à la découverte de notre planète, suffise à combler de bonheur la majorité des notres. À ce moment sera venu le temps de nous mettre à la tâche, joyeusement, avec ardeur et responsabilité, valeurs qui sont le signe, la marque même de notre jeune et vigoureuse civilisation.

Ainsi, durant que nos équipes de guerriers recyclés enfin en ardents travailleurs de reconstruction de notre capital, Gaïa, les autres, comme maintenant dans nos grottes, continuerons d’assurer la subsistance de tous. Nous pourrons alors provisoirement nous installer près de points d’eau naturels, par exemple, dans des structures industrielles encore en bon état, en dehors des villes, ou dans ces anciens et vastes hypermarchés qu’ils nommaient avant, et dans de petits villages mêmes, des fermes aussi, etc. Partout, nous aurons avec ces Centrale FMS, l’énergie électrique à profusion ; nous pourrons ainsi redémarrer des fabriques diverses, etc. Tout cela se fera de soi-même et petit à petit au fil du temps et des besoins de tous, inutile donc de se casser la tête maintenant.

Un travail parallèle devra être mené de front et en urgence : celui de tout démonter de nos campements dans ces centaines de grottes qui auront assuré notre préservation et résurrection. Nous devons à Gaïa de lui restituer ces gîtes temporaires en l’état où nos anciens les ont trouvé. Pour cela il sera facile de tout remettre en l’état initial car tout est monté de structures légères ; ainsi, la

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nature reprendra lentement ses droits en ces lieux millénaires pour leur redonner cet éclat sublime de splendeur éternelle.

Quels bénéfices nous apporterons ces travaux ? Le fait de se retrouver vivre dehors va bouleverser nos coutumes et habitudes de Vie, c’est indéniable, inévitable et naturel. Le fait d’avoir alors une mission sacrée commune va, et c’est là le plus important, nous tenir unis durant longtemps dans cette action de restauration de la nature en ses droits. Ceci nous facilitera grandement l’apprentissage de devoir vivre volontairement en communauté éclatée, alors que nous serons peut-être parfois tenté de nous isoler.

Nous trouverons alors grâce à cette obligation d’oeuvrer volontairement ensembles, un nouveau sens de la Vie particulière tout en maintenant les liens qui nous unissent et font de nous une société structurée et responsable. Sinon...si nous défaisons ces liens, nous ne donnons pas cher alors de notre futur : nous serions vite détruis par nous-même, car nous reproduirions les mêmes schémas que ces fous disparus ; une telle société developpant imparablement l’égoïsme, la jalousie, l’envie pour certain d’exploiter les autres, s’accaparer les richesses de la communauté. La liste des côtés négatifs dont sont capables les individus est véritablement incalculable, en cela la puissance de perversité du cerveau humain est malheureusement illimitée.

Nous proposons donc pour tenter de faire mieux que nos prédécesseurs, de conserver précieusement et les respecter, les mesures radicales et indispensables acceptées par tous au départ, et les répéter avant l’attaque même ; mesures qui feront donc jurisprudence, de ces lois que nous appellerons Lois de l’Èthique, qui couperont dès sa venu à l’esprit le moindre bourgeon d’envie possiblement négatif envers le groupe.

La base de Blagnac fut prise de folie dès que les quelques dizaines d’Akadis y

travaillant, ainsi que les stagiaires locaux en apprentissage, prirent connaissance de la vidéo de l’entrevue avec Marcellin, que leurs ramenaient Alexandra et Claude. Quand on dit folie, c’est rien de le dire...Une équipe de gars et de filles parlant couramment le Franki se mirent de suite à doubler les dialogues en Akadi, car la majorité des gars des Appalaches ne maîtrisaient pas encore suffisamment bien notre langue ; cela leur prit la journée entière, mais le soir même, chamboulant d’autorité tout leur planning des navettes, un perceur avec son équipage remonté à bloc, partait à tout berzingue vers la base d’outre-mer, canon laser prêt à descendre tout ce qui se trouverait devant ; il emportait, trésor véritable d’horreurs et devoirs de faire vite, une copie de la vidéo originale de Marcellin, plus la version doublée.

A la station de Girelles...oublions les superlatifs, gardons comme standard le mot FOLIE et n’en parlons plus ; une majorité de ces guerriers voulaient partir de suite pour crever les Zanko-Khuigs sur le champ...et ça ne fut pas une mince affaire que de les calmer et remettre à plus tard ce carnage programmé et tant désiré. Puis ils envoyèrent de suite un perceur à Bertrand, les avisant de la venue dans les deux heures qui suivaient d’une mission d’extrème d’urgence, avec

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parmi eux des Sages du Conseil de Girelles ; avec avis de devoir regrouper le maximum possible des habitants ; tous, étant l’idéal.

Ils devaient préparer l’Agora avec les grands écrans vidéos car, leur dirent-ils, un équipage de patrouilleurs ramenait de chez les Zanko-Khuigs, des nouvelles qui allaient bouleverser toutes leurs connaissances les concernant ; ensuite ils devaient faire en sorte que tous les patrouilleurs, mais surtout, Marion et Hugues, soient impérativement présents, c’était extrèmement important.

Le perceur repartit sans que son équipage ne leur dise rien de plus, laissant derrière lui une situation indescriptible de...FOLIE. L’équipage fit ainsi le tour des autres communautés, laissant à chacune une copie vidéo de cette entrevue avec Marcellin. En deux journées, tous les survivants de Franki et d’Espingos furent alors au courant de ces nouvelles extraordinaires de gravité. Si cela avait été mesurable et perceptible, on aurait alors perçu se levant dans un sourd et puissant grondement, le souffle brûlant et bestial d’une gigantesque onde de haine meurtrière et sauvage couvrant ces vastes régions et s’étendant comme un monstre froid, gueule effrayante et béante aux crocs démesurés s’avançant irrésistiblement vers une enclave de petits bonheurs insouciants, factices et glauques, paresseusement blottis au bord de plages dorées...

Le perceur identifié et attendu dans une tension générale indicible, se posa enfin sur la plate-forme de Bertrand. Les sept sages en descendirent, reçus avec empressement par leurs collègues locaux ; puis Alexandra et Claude apparurent enfin, de suite pris d’assaut par un Hugues et une Marion fort soucieux.

-Alexandra, demanda une Marion fébrile, pourquoi devons-nous être présents, spécialement, Hugues et moi ?

-N’aie crainte ma chérie, rien de facheux pour vous deux, dit-elle en regardant Hugues aussi, je vous le promets, mais il fallait bien que j’avise que tu sois présente, surtout toi, tu comprendras pourquoi plus tard, n’aie pas peur chérie, d’accord ? Elle l’embrassa chaleureusement.

Mes enfants, leur dit Georges, dépéchons-nous de rejoindre l’Agora sinon ils vont tous devenir fadas à force de vous attendre, faisons vite. Ils partirent alors d’un pas ferme vers la grande salle, l’Agora, baptisée ainsi en hommage aux anciens grecs, durant que la porte d’entrée se refermait dans un bruit sourd, tous les enfants de la station étant ainsi à l’abri, présents et anxieux.

Dès qu’ils apparurent enfin à cette foule dense, des applaudissements nourris les saluèrent ; seuls montèrent sur le podium central, l’équipage du perceur, les autres allant s’assoir sur des sièges libres réservés à leurs intention, au premier rang des spectateurs ; deux sièges restant libres pour l’équipage de Girelles.

Claude sortit le micro-disck vidéo d’une poche et l’inséra dans le lecteur ; c’était le système visio que leur avait laissé l’équipage du premier contact, Elizabeth et son compagnon Irvin. Cela allait être la deuxième fois que ces écrans géants en sustentation au-dessus de leurs têtes allaient leur montrer des documents qui allaient bouleverser leurs vies. Tous les spectateurs en étaient plus ou moins conscients, car jamais une réunion d’urgence n’avait revétue un si grand mystère et suspense, c’était du jamais vu ! Les deux se regardèrent un instant, dernier moment de calme puis...Alexandra se dirigea vers le micro,

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respira un bon coup et attaqua son discours de présentation de ces fameux événements qui, sans les connaître encore, les rendaient déjà tous dingues...

-Mes amis, mes chers, très chers frères et soeurs, vous savez maintenant que nous ramenons, avec mon équipier, Claude, dit-elle en se tournant vers lui et lui prenant sa main droite, des nouvelles fantastiques mais, je préfère vous prévenir tout de suite...d’une épouvantable tristesse, sentiments qui vont vous révolter comme jamais vous ne le fûtes jusqu’à ce jour. Nous croyions comme vous tous connaître ces ordures de Zanko-Khuigs. Nous sommes tous loin du compte, très, très loin du compte...

Préparez-vous à voir, mais surtout entendre le rapport d’un de ces esclaves de l’enclave de notre territoire de ces monstrueux salauds ; car tout ce qui va être dit maintenant sur ces écrans dépasse tout ce que vous aurez pu imaginer de pire jusqu’alors. Juste pour vous situer rapidement comment, et pourquoi eut lieu cette rencontre, sachez ceci : j’ouvre une parenthèse concernant le pourquoi.

Après la présentation, nous aurons avec le Conseil des sages de Bertrand, et ceux de nos collègues de Girelles, la délégation ici présente, et nous deux, Claude et moi-même, une entrevue où nous aborderons l’urgence de devoir modifier la composition de nos Conseils des sages justement.

Un murmure passa dans la foule. -Voici les faits, qu’elle leur expliqua... Ce document a une durée de plus de trois heures, nous ferons donc une pause

vers le milieu ; d’une part pour que chacun puisse aller aux toiletttes, se desaltérer, mais surtout, croyez-moi, vous en aurez grandement besoin pour reprendre votre souffle. Je conseille même de vous abstenir d’y assister à celles d’entre vous qui sont enceintes, mes soeurs, et bientôt à terme, ou de même à toute personne trop sensible car...vous n’y entendrez que des mots, mais d’une telle violence et horreurs qu’il vaut mieux vous éviter d’en être aussi victimes, il y en a bien assez déjà comme ça.

Je vous recommande, malgrè que je sache que cela vous sera difficile, de freiner vos envies de meurtres qui vont vous assaillir avec certitude ; faites un effort et réservons ces pulsions justifiées pour plus tard, avec alors la certitude absolue, je répète, absolue, que nous allons, que nous pourrons les massacrer de la façon la plus horrible. Je vous laisse découvrir le pourquoi de cette affirmation, et vous allez en rester sur le flanc, je vous le promets. Mais assez de mot creux, nous rejoignons nos sièges, avec Claude, et place à l’impensable, à tout à l’heure et, courage !

Ils descendirent, s’installèrent confortablement le mieux possible, Claude étant à la droite de Hugues, celui-ci ayant Marion à sa gauche, suivie d’Alexandra qui fermait cette rangée d’amis. Un opérateur baissa l’éclairage dans l’Agora ; Claude braqua sa télécommande vers le podium...La vidéo commença.

Ils virent la fenêtre approcher, la vision dans cette pièce misérable...ils découvrirent ce vieil homme miteux, exprimant sur son visage une détresse innommable...le message sur la vitre....leur descente dans la pièce...dans le perceur puis, le dialogue de Marcellin commençant...et la tension, l’angoisse, la

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colère, la révolte, l’envie de tuer, massacrer, hurler ; montait dans cette immense salle de la grotte Bertrand, l’Agora, place commune des grandes réunions et décisions publiques des cités grecques, le coeur, l’âme de Bertrand ; ainsi de toutes les autres stations qui avaient adopté ce vocable antique pour désigner leurs lieux de réunions publiques.

La séance prit fin, après une pause qui fut indispensable ; des Femmes s’évanouirent, d’autres furent prisent de malaises, vomissements. Ce fut comme à chaque fois qu’ils passaient cette vidéo, une horreur, une consternation générale indescriptible. Tous étaient profondément, épouvantablement choqués et, ce fut comme toujours maintenant aussi, une grande difficulté pour les empêcher de partir de suite pour aller saigner ces pourritures.

Alexandra, se leva et avança de trois mètres dans l’espace la séparant du podium ; micro en main, elle s’apprêta à parler...elle regarda Claude et lui fit un signe d’un imperceptible hochement de tête. Celui-ci se pencha pour interpeler discrètement Hugues ; il lui fit comprendre de s’approcher pour lui parler en particulier; ce dernier optempéra, étonné. Claude se pencha, la bouche tout contre son oreille, et lui dit dans un murmure.

-Hugues, écoute-moi bien, c’est très important. Nous allons maintenant montrer un document fantastique ; une aventure, et le mot est faible, qui est arrivée à Alexandra et...nous craignons, car elle est d’une certaine façon concernée, que Marion n’en soit violemment touchée, sentimentalement parlant, croyons-nous, alors, tiens-toi prêt à intervenir s’il le faut...pour la protéger d’elle-même peut-être. Mais espérons que tout ira bien, mais il vaut mieux tout prévoir ; à tout à l’heure, mais n’ai pas peur, il n’y a rien de grave, au contraire pensons-nous, mais trop d’émotion d’un coup peut nuire aussi, tiens-toi prêt maintenant, lui dit-il en lui serrant l’épaule.

Alexandra, qui jusqu’alors faisait mine de se concentrer sur ce qu’elle allait dire, souriant de temps en temps à Marion, pour capter son attention, attaqua son nouveau programme.

-Mes soeurs, mes frères...je ne rajouterai rien à ce que vous venez de découvrir, l’horreur de la réalité se suffisent amplement à elles-mêmes...Je sais, nous savons tous deux, Claude et moi, votre immense dégoût et degré de révolte, car cela fut de même pour nous deux ce jour-là mais...mais, regardez bien ce qui va suivre, car vous aller voir alors la chose la plus fantastique, impossible même que vous puissiez imaginer.

Je vous explique rapidement comment cela est arrivé. Donc, nous étions... La vidéo démarra. Dès la vision du tertre, Marion s’était levée d’un bond sur

place, Hugues la retenant par un bras mais, quand elle vit le taureau, elle faillit s’évanouir pour de bon ; ils la firent asseoir de force, la calmant avec peine puis, elle reprit ses esprits... elle se leva brusquement de nouveau et s’écria, après la fin de la vidéo.

-Céline ! c’est Céline ! Elle nous envoit un message...il faut...il faut penser aux taureaux pour tuer tous ces horribles monstres pourris. Hagarde, elle regardait comme une possédée cette foule ahurie, l’ambiance générale était indes- criptible, certains même tremblaient de peur...Elle tournait lentement sur elle-

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même comme pour chercher un visage, son regard jetait des flammes, comme possédée, elle tremblait de tout son Être sous l’emprise d’une forte tension...Elle boucla un tour et trouva enfin sur sa gauche celui qu’elle cherchait, à deux pas, tout près d’elle ; elle se précipita alors sur Georges, un Georges encore plus surpris que tous les autres ; elle lui prit les mains dans les siennes et lui dit, ardente, criant presque, dans un silence total effrayant, tout le monde entendit alors ses étranges paroles qui les épouvanta.

-Georges, c’est toi, oui, Georges...Céline dit que toi tu sauras trouver comment les tuer dans d’horribles souffrances, les faire mourir de frayeur avec, pense aux taureaux et...elle dit que toi seul sait comment faire, toi seul saura trouver l’idée de leurs supplices les plus atroces et, il faut les...il faut...

Elle s’évanouit dans les bras de Georges. Ce fut comme on peut aisément s’en douter, une confusion totale, tout le

monde voulant donner son avis en même temps...Il fallut un grand, très long moment pour rétablir un minimum de calme dans ces esprits surchauffés. Les uns voulant de nouveau partir saigner ces pourritures de Zanko-Khuigs, d’autres voulant aller capturer un taureau pour voir ce qu’il en sortirait...d’autres encore voulant forcer Georges à donner de suite une réponse...

Marion revint à elle et fut toute surprise de se retrouver allongée sur le podium, entourée de ses familiers qui lui parlaient comme à une grande malade, et c’était pour elle le plus étrange car, quoiqu’elle se sente étrangement un peu fatiguée, elle se sentait en pleine forme et ne comprenait pas leur attitude et encore moins pourquoi elle était là. Ils furent alors bien obligés de lui expliquer ce qui venait de se passer et...elle les regardait encore plus ahurie car elle ne se souvenait de rien ! Enfin, l’incident fut mis de côté, bien obligé car comment gérer l’inexplicable...surnaturel...incompréhensible...

Le calme revenu, toute l’attention se reporta sur un Georges qui se serait bien passé de ce vedétariat...En vieux routier de la Vie, il vit bien que personne n’osait le questionner mais que tous attendaient son idée sur la question... Fataliste, il s’assit et, les coudes sur les genoux, se prit la tête entre ses mains et se mit à réfléchir intensément...il se força au calme. Devant cette attitude d’intense réflection, peu à peu, les gens se rassirent et firent rapidement silence, le regardant avec recueillement, comme si leurs regards intenses pouvaient l’aider.

Spectacle des plus impressionnant que de voir cette immense foule silencieuse de si terribles guerriers regardant avec tant d’intensité ce vieil homme. Et le temps passa, vingt minutes...les spectateurs commençaient à partir lentement, Georges paraissait une étrange statue, si ce n’était sa respiration lente...trente-cinq minutes maintenant...puis, il releva la tête, et tous virent dans ses yeux une joie intense qui gonfla et devint une allégresse débordante, il s’écria alors en se levant d’un bond et regardant ses compagnons à ses côtés, puis la foule les entourant...et il leur cria, excité.

-J’AI TROUVÉ ! Ce fut une ovation retentissante dans l’Agora, ceux qui venaient de partir

depuis un moment réapparurent en courant, regards interrogatifs...

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-Mes enfants...mes enfants, s’écria Georges, qui étouffait de bonheur, écoutez-moi...Céline a raison, je ne sais comment elle le sait, mais c’est vrai, je crois bien qu’il n’y a que moi qui sait COMMENT faire ce qu’elle nous demande. J’ai besoin de revoir mes livres et mes nombreuses archives sur certains sujets, mais je vois déjà une première chose qui va être démentielle et...pourquoi n’y ais-je pas pensé tout seul avant ? Il va falloir aussi que je consulte nos collègues Akadis de Blagnac, pour voir s’ils pourront construire...

Mais peu importe pour l’instant, écoutez bien ce que nous allons faire, j’ai une première idée de sûre, pour les autres il faut que je vois mes documents, voilà...Dès que nous serons sur les lieux, au point où ils aiment le plus se réunir, nous allons les encer...

Ainsi, il leur expliqua cette première idée de stratégie de terreur de ce futur carnage rédempteur, et la foule, à chaque détail, se levait et grondait de satisfaction, comme une houle gigantesque de chevelures multicolores.

L’ambiance fut alors de joie totale et fort bruyante ; de cette haine mortelle qui les habitait découlait une jubilation, une intense satisfaction de voir enfin, de construire la stratégie finale qui s’annonçait alors infiniment plus terrifiante que tout ce qu’ils avaient rêvé jusqu’alors ; une fantastique pulsion meurtrière illuminait leurs âmes de guerriers farouches, leur appel au sang rédempteur s’envolait, illuminant le firmament...

Là-bas, sur une autre planète, en un autre temps...autre dimension ; sur des

plages dorées, l’insouciance y était d’une imperturbable rigueur. La race suprème dirigeait le monde sous une poigne de fer, tel que l’avait prédit et voulu leur dieu jaloux et perpétuellement insatisfait et assoiffé du sang des impurs, dont ils assouvissaient son monstrueux appétit par les nombreuses victimes sacrifiées à sa dévotion ; du reste, le nom même de victime n’était-il pas la définition exacte du sacrifice d’êtres vivants à un dieu ? Et comme il ne restait que le leur...qui, maintenant, au bout de ces siècles pourrait seulement avoir la plus infime pensée de changer tout cela ?

Cette seule idée était grotesque et les faisait glousser de rire... L’infâme racaille blanche restante et la plus vile et haïe n’étant bonne qu’à

gémir et saigner pour l’éternité sous leur joug implacable et glorieux, eux, les Seigneurs du monde, comme le leur avait promis leur dieu, alors...

Malgré toutes les explications données sur le mode de vie concernant ces

groupes de survivants épars sur de si vastes territoires, on peut légitimement s’interroger sur le comment ces gens se sont d’abord retrouvés, puis enfin réunis en une large assemblée structurée. Pour bien comprendre cela, il faut rappeler que les premiers contacts eurent lieu à pied, puis à cheval, lors de leurs randonnées de récups entre autres. Cela dura ainsi des générations et fut très lent puis, il y eut la venue inespérée des perceurs qui permirent de suite une exploration tous azimuts. C’est ainsi que les Frankis étant les plus nombreux, et

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de loin, conquirent l’assentiment des groupes isolés du Nord de leurs territoires, ces derniers étant plus ou moins franchement délimités par les frontières naturelles, renouant ainsi avec le passé, les coutumes expansionnistes millenaire des humains de toujours.

Les nordiques furent ainsi conviés à descendre vers le Sud pour se regrouper en une vaste confédération plus puissante que jamais. Ces derniers ne se le firent pas dire deux fois, et c’est avec un immense plaisir qu’ils rejoignirent ces sudistes, apportant dans leur gènes et au bénéfice de tous, un sang neuf et généreux, de par l’atavisme des grands et immortels guerriers de la grande tradition nordique, pères lointains de tous ces hommes blancs.

Ce mélange de sang fortifia alors grandement ces peuples frères. Ainsi, des Hommes comme le fameux compagnon de Marion, Hugues, est directement descendant de cet apport génétique fantastiquement puissant, comme beaucoup d’autres comme lui, ainsi que des Femmes, montrent l’évidence d’une résurrection inespérée de la grande race blanche, définitivement immortelle.

Tous ces groupes vivaient donc dans une parfaite harmonie ; les nordiques s’étant installés, éparpillés de préférence dans ces stations au plus petit nombre d’habitants et offrant encore suffisemment de places de libres, car depuis ces siècles, la démographie avait sérieusement augmenté, d’autant avec les moeurs libres en vigueur. Ils avaient très vite appris le Franki et l’Espingo, étant depuis toujours accoutumés à pratiquer plusieurs langues, comme tout groupe est obligé quand il est en petit nombre. En quoi que ce soit, c’est la masse qui fait la force d’une communauté, cela en fut toujours ainsi depuis la nuit des temps, seul, le dit progrès technologique vint chambouler ces bases de la Vie. Un peuple ayant des armes plus puissantes que les autres, et actionnées de loin, peut implanter une dictature planétaire, exemple des Zanko-Khuigs.

Mais oublions ces données funestes, le plus intéressant est bien de savoir du comment ils vivent au jour le jour : l’alimentation, la santé...Nous en avons pas mal parlé déjà mais, plus de détails rendront plus compréhensible la réalité, car vivre ainsi n’est pas des plus simples ni le plus facile, car fini le confort insouciant du modernisme, où il suffit de tourner un robinet pour obtenir de l’eau chaude ou froide ou mélangée ; appuyer sur un bouton pour avoir de la lumière, sans faute, etc. Là...dans une grotte, il faut tout prévoir longtemps à l’avance, sans pour autant être certain du résultat ; c’est dur, oui, mais cela forge un caracactère.

Concernant la confort de la grotte proprement dite ; très vite ils se rendirent compte que l’humidité ambiante était nuisible à la santé et à la conservation des matériels : les ordinateurs, papiers, tissus, alimentation, etc. , tous ces items venant des récups et qu’ils étaient bien forcés de garder sur place. La solution fut vite trouvée ; dès qu’ils eurent l’électricité relativement abondante grâce aux turbines installées dans les torrents, le plus souvent dans la grotte même, énergie constante, gratuite, silencieuse et non polluante et inutile de la stocker, étant disponible en permanence, ce qui au début fut un luxe inouï comparativerment aux tarifs monopolistes et mafieux des fournisseurs officiels de l’électricité d’antan, ce dans tous les pays, riches et pauvres.

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Ainsi, ils installèrent des conduites en métal ou en plastique qui descendent dans les fonds les plus bas de leurs grottes, envoyant en permanence de l’air pulsé venant de l’extérieur et ainsi, en quelques semaines ou mois, selon les volumes des lieux, l’humidité de l’air baissa nettement et, avec les chauffages des cuisines, des bougies, des énergies dégagées par les organismes des habitants, l’hydrométrie atteignit alors un niveau acceptable et sain, ce qui aussi fit chuter l’impression de froid malgré une moyenne atteinte de 15º à 16º C, avec cette petite hausse due aux incessantes activités humaines ; grâce aussi aux ordinateurs qui ne stoppaient jamais ; ces grottes devinrent rapidement de véritables ruches ardentes et confortables.

Ils avaient instauré les cycles de jour et de nuit, pour respecter le fameux rythme circadien. Par exemple, à sept heures du matin, certaines lampes fortes étaient alors allumées dans les hauts des galeries et des salles, dont certaines d’immenses ; de la musique en sourdine était diffusée tout le jour, avec possibilité de pouvoir régler le volume ou l’arrêter localement si l’on voulait.

A 21 h, ces lampes-soleils étaient éteintes, ne restant que des lumignons le long des allées ou pour signaler un obstacle naturels, soit en haut ou vers le bas. Dans la mesure du possible et suivant les dispositions naturelles des lieux, les activités industrieuses, tels les ordinateurs, les cuisines, etc., sont regroupées dans des locaux isolés le plus possible, car ceux qui dormaient devaient pouvoir vraiment récupérer après leurs dures journées de labeur.

Ils cuisinèrent longtemps avec des feux de bois sur des grilles entre des murets de pierres vite assemblées. Les fours pour cuire les pizzas, le pain, volailles, rôtis et autres, furent construits en terre argileuse : une demi-sphère sur une dalle de pierre ou d’ardoise, avec une ouverture frontale et un pierre plate pour la fermer ; c’est grandement suffisant et très efficace et permet une cuisson de grande précision et d’un parfum merveilleux, d’autant que les sources de leurs nourritures étaient fournies par dame Nature, en produits riches et abondants. Pour les plats en sauce devant cuire longtemps, ils redécouvrirent et adoptèrent cet appareil fabuleux qu’est la Marmite norvégienne, qui était encore utilisées avant l’attaque par quelques paysans intelligents et astucieux.

En fait, n’importe qui pouvait s’en fabriquer une, le principe qui pourtant est des plus simple et évident, avait été relégué au fond des mémoires, pour que le système capitaliste puisse leur vendre leurs cuisinières et fours mirobolants et crachant mille feux de leurs chromes et nickels : fastueux miroirs aux alouettes. Le plus mirobolant dans ces engins étant la grande consommation d’énergie calorique qu’ils avalaient goulument, véritables gargantuas énergétiques, pour les plus grands profit des fournisseurs d’électricité, éternel cercle vicieux capitaliste ; l’esprit du commerçant étant depuis toujours à la source de tous les maux.

Ainsi, dans cette enceinte close et thermiquement isolée de ces marmites, un plat dont vous avez déjà commencé la cuisson sur le feu, et porté à ébulition durant environ cinq minutes ; mis de suite dans la marmite, va finir d’y cuire dans son jus, gardant saveur, vitamines, le tout sans énergie calorique autre que la sienne propre emmagasinée, et en quelques minutes ou heures ; le tout est de s’y prendre suffisamment tôt. Le principal intérêt de la marmite

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norvégienne est donc l'économie d'énergie, sans compter le temps libéré à touiller, surveiller le feu, avec en plus la garantie que cela n’accrochera.

Mais à l’époque, il suffisait d’accéder à Internet pour avoir toutes ces informations ainsi que les plans.

Pour garder les victuailles, les torrents aux eaux glacées s’y prêtent à merveilles ; il suffit de mettre les marchandises dans des conteiners étanches en acier inoxydables ou en plastiques et de les plonger dans le courant glacé, tenus avec des câbles et contrepoids. Les cuisines sont équipées de conduits évacuant les fumées au dehors, par des ouvertures naturelles dans la voute, qu’il suffisait parfois de simplement agrandir. Ils cuisinent principalement la nuit, avant le lever du jour, pour réduire les risques de détections des fumées en plein jour ; c’est fastidieux, mais comment faire autrement ?

Pour la cuisson au bois ils avaient retrouvé les tables de combustion de différentes essences de bois. Ainsi, le premier en qualité est le chêne, qui dégage la meilleure chaleur, sans fumée ; il dure très longtemps pour brûler, est excellent pour les braises ; puis vient les ormes, les oliviers, érables, hêtres...Pour faire de la fumée en quantité, pour faire fuir des insectes ou des nuisibles, exemples des chauve-souris, il suffit de brûler du pin ou du sapin, effet garanti par la production d’une fumée abondante.

Une formidable source de santé et d’énergie fut la pratique très tôt adoptée par tous de consommer des graines germées. Cet apport régulier est une véritable source de bienfaits ; en plus c’est d’une facilité étonnante, il suffit de laisser faire le temps, la nature.

Voici par exemple les transformations des vitamines du blé après 5 jours de germination. La vitamine C augmente de 600 % /A x 300 % /B1 x 20 % /B2 x 300 % /B3 x10 à 25 % /B5 x 40 à 50 % / B6 x 200 %. Le germe de blé contient également des vitamines E, D, B8 et B9, des minéraux (phosphore, calcium, chlore, potassium, soufre, sodium, cobalt, manganèse, fer, magnésium, molybdène, bore, cuivre), des protéines, des fibres. Véritable richesse naturelle.

Mais à l’époque, avant 2015, des gens intelligents savaient aussi tout cela et beaucoup prenaient préventivement soin de leur santé, sans s’occuper des diktats étatistes. Il suffisait au curieux d’aller faire un tour sur Internet pour avoir toutes informations de premières qualités, comme pour tout autre sujet.

Voici l’exemple admirable d’un petit ensemencier du sud de Franki. Ce qui fut déterminant pour s’approvisionner en graines de qualités, sans modification génétique, comme c’était la mode criminelle lancée par des sociétés Zanko-Khuigs et d’Euromorte depuis plus de trois décades, et qui consistèrent à déposséder le paysan de son bien ancestral : leur capital de semences conservées pour les replanter. Dès lors ce dernier ne put plus réensemencer ses terres avec les graines de sa récolte passée. Ils devaient alors acheter les semences de ces industriels maudits, semences portant alors un gène tueur, les rendant stériles ; véritable atteinte à la Vie sacrée.

Devant ces faits criminel accomplis, cette petite entreprise collectait les semences et graines garanties naturelles et les vendaient. Ils furent alors l’objet de nombreuses persécutions policières et judiciaires, dont beaucoup de ces sbires

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furent traditionnellement le bras armé et déguisé des cartels et, le temps passant et la situation générale empirant, la direction de cette société choisit courageusement et intelligemment la résistance organisée et ainsi, discrètement, dans une grotte naturelle gisant sur le terrain d’un ami sympatisant, révolté lui aussi de ces pratiques fascistes de leur politicards vendus à ces cartels de mort, ils y aménagèrent un vaste abri en béton armé, avec toutes les normes de conditions optimales d’étanchéité et d’hydrométrie, la température étant celle de toute cavité souterraine : +/- 13ºC.

La nuit ambiante aidant, ils reconstituèrent ainsi un important stock de toutes leurs graines et semences d’origines naturelles dans des emballages sous-vide sous ambiance d’azote ; semences fournies par des cultivateurs de différentes régions, pays et continents associés à cette noble tâche, ces hommes et femmes voulant sauver la richesse et diversité des plantes existantes sur terre, comme le firent tous les paysans depuis des millions d’années, depuis le premier homme.

Puis eut lieu ce jour maudit et inespéré au final de compte, de ce 1er mai 2015. La grotte tomba dans l’oubli, jusqu’à ce qu’une équipe de farfouilleurs tous terrains de Girelles la redécouvre et réussise à en forcer l’entrée. C’est depuis ce grand jour que nous avons l’inestimable chance d’avoir pu retrouver une alimentation saine, grâce au grand courage et perspicacité surtout de ces responsables de cette petite entreprise.

Fasse que les forces stellaires bénissent à jamais ces courageux et audacieux patrons de cette petite entreprise. Ils ne le surent jamais mais ils sauvèrent les descendants de leur race, car les cultures industrielles étaient irrédiablement et gravement contaminées.

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Un outil révolutionnaire

eaucoup de choses avaient évolué, arrivé en cette fin décembre de l’année 2398. Depuis la remarquable et salutaire ignitiative d’Alexandra et de

Claude son équipier, tous les Conseils des sages avaient avec sagesse reformulé leurs compositions, les anciens reconnaissant sans discuter que leurs excès de prudence avait était un frein à l’avancée de leur connaissance de l’ennemi. Les deux nouveaux groupes adjoints avaient depuis donné à ces Conseils, une nouvelle et grande vigueur.

Ils avaient donc de suite organisé une surveillance non-stop des Zanko-Khuigs, les principales stations s’étant réparties la tâche d’espionner 24/24 h ces infâmes salopards, ainsi que leurs gardes, sans lesquels ils les auraient déjà proprement rayé de la surface de la planète. Les stations de leurs frères Espingos envoyant simultanément des perceurs vers le sud de leur territoire pour y espionner les autres retranchements de l’ennemi.

Ils les connaissaient bien maintenant, mais il subsistait toujours l’incertitude et la méfiance concernant leurs pouvoirs éventuels de défenses et détections, car ils ne savaient pas ce qui se passait dans ces immeubles, et plus particulièrement dans ces fameux bâtiments MK-ULTRA, un dans chaque site. Que s’y passait-il vraiment ? Avec les nombreux va-et-vient des Zanko-Khuigs : qu’allaient-ils y faire ? Était-ce aussi un PC de communications en plus du conditionnement des Roses ? Disposaient-ils d’une puissance de frappe inconnue ? Autre choses ? Ces données inconnues leur imposait toujours une grande prudence. Tous priaient les forces stellaires pour que les Akadis leur pondent enfin ce moyent de les anéantir une bonne fois pour toutes : l’arme ultime !

Très rapidement les moeurs et habitudes de l’ennemi leur furent familier, d’autant plus que peu de nouveauté entrait dans leur vie somme toute routinière et relativement banale, hors le fait qu’ils étaient tous capables d’une monstrueuse barbarie devenue routinière aussi...Des scènes d’une violence meurtrière et sauvagerie dantesque et gratuite était leur spectacle presque quotidien. Certains équipages sur leurs propres demandes avaient été relevés de leur charge car ils ne pouvaient plus supporter de les voir martyriser tous ces innocents. Seuls les plus endurcis se forçaient, se faisaient un devoir de continuer pour un jour prochain devoir les détruire avec certitude ; c’était devenu leur orgueil que de surmonter leur immense dégoût et répulsion pour être à même de les espionner malgré toutes ces horreurs dont ils étaient les témoins.

Les viols, assassinats, tortures d’enfants comme des adultes étaient communs, tout le temps et en plein jour, de partout et à n’importe quel moment, au seul plaisir et envie du moment d’un de ces porcs ou truie de Zanko-Khuigs. Le spectacle même d’un massacre sanglant déclenchait souvent l’hallali pour ceux

B

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se trouvant à proximité. Tous ces équipages de surveillance, aux débuts, en furent malades, vomirent de rage et désespoir, d’impuissance de ne pouvoir et surtout de devoir ne rien faire, mais ils restèrent fermes à leurs postes, se jurant de les exterminer bientôt avec une rage et une volonté farouche.

Il en était ainsi sur toute la planète couverte d’une lourde chape d’horreurs innommables.

Comme promis, Alexandra et Claude rendirent régulièrement visite à Marcellin, lequel donnait des rapports réguliers mais de moindre valeur, et c’était logique car il n’avait que très peu de marge de manoeuvre et le manque de nou-veauté dans la vie des Zanko-Khuigs fit qu’il n’eut rapidement plus rien d’important à révéler. Comme ils le lui avaient promis aussi, ils l’avaient amené une nuit découvrir leurs gens de Girelles ; Marcellin en avait pleuré de voir tous ces très nombreux guerriers, et il réalisa enfin que l’extermination des Zanko-Khuigs était une réalité tangible, inexorable même.

Ainsi, une fois de plus ils allèrent lui rendre une visite éclair, comme toutes les deux ou trois semaines maintenant ; l’habitude s’était instaurée d’elle-même d’aller le ravitailler avec des colis d’une nourriture riche et reconstituante ; mais pas trop non plus pour qu’il ne grossisse exagérément et mette ainsi sa vie en danger en présentant une amélioration ostensible de son état, changements qui auraient immanquablement attiré l’attention de ses infãmes tortionnaires. Puis aussi bien entendu ils en profitaient pour récupérer, échanger le disck-mémoire comportant d’éventuelles nouveautés.

Marcellin avait beaucoup changé, physiquement remplumé, mais le plus grand changement était surtout moral. Il était maintenant un Homme sûr de lui, résolu et d’une grande allégresse ; son travail de coopération avec ces nouveaux Humains lui avait apporté cette joie de vivre qu’il n’avait jamais connu avant ce jour béni de leur arrivée inespérée devant sa fenêtre...Il revoyait souvent en pensée, leur venue dans cette chambre sordide et tout ce qui avait alors suivi comme dans un songe...Leur gentillesse et la beauté de cette femme magnifique, Alexandra, dont il rêvait souvent la nuit maintenant et, miracle de la Vie éternelle, son image avait peu à peu supplanté celle de l’horreur dantesque de cette esclave éventrée et violée sur son chariot...Il pouvait enfin dormir maintenant, et le plus souvent avec un sourire illuminant son visage.

Le perceur, stabilisé à mille cinq cents mètres d’altitude sur le géopoint mémorisé, plongea d’un coup comme un météore pour venir se positionner en quelques secondes devant la fenêtre de Marcellin, qu’ils virent encore au travail, assis devant sa table malgré l’heure tardive, écrivant dans son grand livre.

Claude jeta une pincée de graviers contre la vitre, Marcellin releva la tête et comme à chacune de leur visite, son visage rayonna de bonheur. Il se précipita pour ouvrir la croisée et dit à Claude, en lui serrant chaleureusement la main, lui dit à voix basse.

-Bonsoir mes enfants, je vous attends avec grande impatience depuis des jours, tiens, Claude, voici le disck-mémoire. Je ne vous dis rien, vous y découvrirez une nouvelle, une seule nouvelle, mais c’est à mon avis une nouveauté d’une grande importance stratégique.

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-Merci, Marcellin, lui dit Claude en prenant le disck et le mettant dans la poche intérieure de sa combinaison, tout en lui donnant un autre de vierge ; voici aussi ton ravitaillement, il lui tendit un gros cylindre noir. Veinard, lui dit-il en riant, tu es devenu le plus gras de tous tes collègues.

Marcellin sourit de contentement puis alla rapidement dégager son lit pour enlever les lattes de parquets dégageant sa cache secrète. Il en tira un petit colis et revint rapidement vers la fenêtre pour l’échangea avec le nouveau colis d’aliments, ainsi que le petit conteiner cylindrique que remit Marcellin, récipient étanche contenant les dêchets, les restes alimentaires du ravitaillement précédent ; chaque nouveau paquet incluant cette fameuse petite poubelle à la fermeture hermétique, car il ne fallait que rien de l’extérieur ne soit suceptible d’être trouvé sur place, rien, absolument rien, pas même la moindre odeur, ni encore moins le pépin d’une pomme ou d’orange ou mandarine venant des territoires du sud, de chez les Espingos.

Alexandra, comme d’habitude vint rapidement l’embrasser, pour le plus grand bonheur du vieillard ; il lui avait même franchement avoué un jour, et remercié, que son image faisait désormais partie de ses rêves qui dès lors étaient une véritable félicité ; en deux mots, qu’il était amoureux de sa grande beauté et grandeur d’âme.

-Marcellin, lui dit-elle en le serrant un instant contre elle, sois prudent surtout, ne prends aucun risque inconsidéré ; je tiens personnellement, comme tous nos compagnons aussi, à ce que tu sois à nos côtés pour la grande bataille finale.

-Merci, Alexandra, ma jolie. Cette invitation venant de ta part est le plus bel argument à prendre soin de ma vie.

Le perceur ne resta que quelques minutes puis repartit comme une flèche vers la voute étoilée. En route sous pilotage automatique vers Girelles, toutes alarmes branchées, malgré que depuis longtemps maintenant et inexplicablement, la détection d’un appareil Zanko-Khuigs se fasse de plus en plus rare et pour finir par être inexistante même. Ils s’intallèrent confortablement, impatients, et prirent enfin connaissance du mystérieux message de Marcellin.

Ils le virent sur l’écran vidéo, ce dernier tenant sa caméra tournée vers son visage, alors qu’il était couché sur son grabat ; il parlait à voix basse, articulant lentement avec application...Ce cher vieil Homme était devenu un espion rusé, un conspirateur né. Son message est ainsi fait.

-Mes enfants, disait-il, tous ses messages commençaient alors par cette formule devenue coutumière ; on sentait dans ces quelques mots pouvant paraître banaux, une sorte de dévotion, une grande émotion de la part de son auteur...Comme vous le savez, je me suis forcé, et le mot est faible, depuis le premier jour après notre première rencontre, à une discipline pourtant odieuse pour moi : celle de tenter comprendre le langage de l’ennemi ; ils virent passer une lueur de haine intense dans les yeux du vieil Homme...

Mais, continuait la bande, cette pratique pourtant pénible a enfin porté ses fruits car cela m’a permis de capter une conversation entre deux de ces porcs ; j’y appris une nouvelle surprenante et des plus intéressantes pour notre stratégie

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d’attaque. Sachez que je fis patiemment et discrètement attention à leurs propos, et j’eus enfin confirmation par deux fois encore de ce grand événement exceptionnel, local et futur.

Ainsi je pense pouvoir affirmer que c’est officiel, à savoir que leur ROI et toute sa clique, seront pour cette fois présents dans notre localité pour l’anniversaire séculaire de leur prise de pouvoir, le dimanche 1er mai 2400 ; jour qui sera l’occasion de grandes tueries, comme toujours en ces cas-là..

Je ne me souviens plus si je vous l’avais dit, mais ils ont effectivement une sorte de roi...J’ai personnellement l’impression pourtant que ce fameux roi l’est par convention plus que par toutes autres raisons. J’ai cru comprendre selon leurs bavardages de vieilles rombières, car ils sont cancaniers à un point que s’en est déplorable et fatigant, que ce roi là et sa Cour...des miracles (il faut bien rire un peu aussi), serait donc plus prosaïquement les descendants de la famille la plus puissante financièrement des débuts de leur hégémonie sur les autres peuples...Mammon en personne en quelques sortes.

Ils seraient tous initialement originaires d’Europe, sinon d’ici ; ce monarque tient sans doute à rappeler et affirmer son autorité sur ses vassaux de ce continent. Sujets, auxquels il leur faudra à certains d’entre eux et en temps venu, évacuer les deux derniers étages du grand hôtel central pour laisser la place à ces Majestés et leur clique...C’est assez cocasse car les futurs déménagés en puissance font déjà la grimace, comme quoi : à seigneur, seigneur et demi, aussi !

Je vous signale donc que dans ces cas de grande affluences, il est de coutume d’ouvrir exceptionnellement les deux hôtels qui sont après le port, tous deux de grands standing aussi mais qu’ils délaissent habituellement car leur éloignement est préjudiciable à leur grégarisme atavique et exacerbé. Vous verrez sur le plan de la ville que vous aviez le premier jour de notre rencontre (le jour le plus beau de toute ma vie), j’avais entouré ces deux hôtels d’un cercle rouge...ou bleu, je ne suis plus très sûr, ma mémoire me joue des tours parfois ; mais enfin, comme j’estime mon âge aux alentours des soixante-cinq à soixante-huit ans...à vue de nez, on ne saurait donc sans risque me demander plus de précision, car en la circonstance je relève plus du fossile que du guerrier frais et pimpant, ne vous en déplaise.

Tout ça pour dire que le massacre de toute cette infâme racaille n’en sera que plus noble et plus glorieux ; à condition bien sûr que nous attaquions ce jour-là !

Ainsi, mon obstination aura porté ses fruits ; je vous fais ainsi part de ma grande satisfaction et de ma fierté de Combattant de l’enfer ; quand connaitrai-je enfin ce fameux Vladi ? Je m’en excuse mais je le mérite car ce travail de les écouter est pour moi des plus horrible et pénible, car pour l’essentiel je n’entends que des propos stupides et des monstruosités.

Fasse que cette nouvelle vous apporte l’idée de redoubler votre volonté de les massacrer de façon lente et des plus horribles ; en ce jour qui sera alors véritablement royal, mais pas pour ceux qui le pensent actuellement !

Je vous embrasse affectueusement, surtout à toi, belle Alexandra, la dès lors resplendissante lumière de mes nuits. Faites mes sincères amitiés à tous vos vaillants compagnons. On les aura ! criaient ainsi nos ancêtres.

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Alexandra essuya une larme sur sa joue, la passion que lui vouait ce vieil Homme l’émouvait beaucoup...Mais elle savait, pour les voir tous régulièrement maintenant, que les femmes esclaves étaient ternes et effacées, et c’était là leur propre intérêt de ne pas attirer sur elles l’attention de ces fous furieux et des truies Zanko-Khuigs, mégères acariâtres et toujours insatisfaites ; les véritables maîtresses des lieux en fait, leurs mâles poussifs subissant plutôt les humeurs de ces véritables harpies qui étaient le summum de l’horreur femelle. Dégoût total que de les voirs déambuler, pachydermes gélatineux et ruisselants de crasse, de sueur malsaine et d’innombrables bijoux graisseux, attifés de sortes de grandes tuniques amples et vaporeuses, l’été.

Ces truies se baignaient nues, comme leurs mâles aussi énormes et poussifs pour la plupart, eux aussi couverts de colliers en or, bagues et gourmettes les plus grosses et ostensibles possibles, tous, de par leurs coutumes ancestrales de parvenus vulgaires, étant de véritables vitrines ambulantes...Les voir s’ébattre sur la plage et dans l’eau avait quelque chose d’obscène, alors que dire de leurs ébats, leurs vices sexuels et pulsions meurtrières auxquels ils s’adonnaient ouvertement et sans retenue...Ce n’était que scènes de sodomies, les perversions les plus abjectes entre tous, parents et enfants y compris, d’où leur grande dégénérescence. La totale soumission sexuelle des enfants esclaves, ces fameux roses pourtant dévoués à leurs pires travers, étaient forcés à les satisfaire sans condition dans d’abjects jeux pervers...

Alexandra revoyait souvent une scène qui l’avait rendu malade de rage et de

dégoût. Elle ne pouvait s’empêcher d’y penser parfois, malgré tous ses efforts de l’oublier. Ce drame c’était passé sur la plage alors que leur perceur était planqué de nouveau dans les plus hautes superstructures de cet immeuble hideux, le MK-ULTRA, mais du côté des hôtels cette fois-ci. Ils y étaient nombreux sur la plage vue en enfilade depuis leur appareil ; les familles de ces porcs amenant leurs esclaves roses partout avec eux, certains tenus en laisse comme des chiens.

Ce fut horrible encore. Un de ces porcs, après avoir sucé goulument une jolie gamine blonde d’une dizaine d’années, laquelle bien entendu lui avait fait la même chose ; il lui arracha brutalement sa robe puis la gifla à la volée et la renversa violemment sur le dos et la viola de tout son poids de porc immonde.

La fillette se débattait en hurlant de douleur, écrasée sous son poids énorme, étouffant sous la masse de cet être écoeurant ; peut-être même la déflora-t-il alors...Mais le pire était à venir. La truie de ce monstre, ou une autre peut-être, se mit à califourchon sur la tête de la fillette et lui appliquant son énorme vulve sur le visage, elle l’étouffa lentement pendant qu’elle embrassait à pleine bouche le violeur et qu’elle trémoussait sa croupe sur le visage de l’enfant qui tentait de se libérer en vain ; toute la foule alentour riant comme des demeurés pendant que la fillette se débattait désespérement pour tenter de respirer, le porc lui bloquant les deux bras, puis continuant ce viol monstrueux jusqu’à sa jouissance bestiale finale...alors que sa victime était déjà morte depuis cinq minutes.

Enfin repu, il bascula sur le côté et fit négligemment signe à un garde pour qu’il enlève le cadavre au visage ruisselant de sang des menstruations de la truie

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criminelle. Le visage violacé de cette enfant, par cette asphyxie immonde...son bas-ventre étant aussi ensanglanté, le sexe, les cuisses. Le monstre but une coupe de champagne et partit se baigner avec sa truie complice de ce meurtre sans nom...Ils riaient, insouciants et heureux de vivre ; la foule alentour reprenant ses occupations comme si de rien n’était.

Durant ce temps, le garde le plus près de ce drame, car ils y sont toujours une centaine alignés le long du mur soutenant le brise-lame, avait pris la jambe gauche du petit cadavre à hauteur de la cheville et le traîna derrière lui ; il gravit ainsi les marches menant vers le trottoir de l’avenue, la tête de la fillette sonnant sur chaque niveau. Arrivé en haut, la jambe libre qui traînait en travers, se prit dans le montant en ciment du brise-lame et bloqua le corps...Le garde sentant alors une résistance, sans même regarder en arrière le pourquoi, en véritable machine aveugle, tira violemment la jambe vers lui, ce qui eut pour résultat de briser la hanche à hauteur de l’autre jambe ; il continua ainsi son chemin avec ce petit corps nu ensanglanté, odieusement désarticulé et traînant sur le macadam.

Il se dirigea ainsi indifférent vers un des grands bacs à poubelles disposés tous les cinquante mètres ; il sortit d’une poche un genre de stylo qu’il passa lentement sur le tatouage du cou de l’enfant morte, satisfait du résultat, il remit l’enregistreur de code-barres dans sa poche, leva le couvercle et soulevant ce petit corps désarticulé de la morte, il le jeta dedans sans la moindre considération.

Ces bacs servant à stocker les cadavres jusqu’au lendemain matin, pour être alors récupérés par le service de voirie. Ces cadavres sont ensuite collectés et transportés par les gardes avec un de leur engin volant antigravitique, vers le local où ils alimentent ainsi les chiens sauvages ; sur le vaste espace goudronné d’un carrefour surplombant l’autoroute, situé à environ dix kilomètres au nord de la ville ; territoire qui montre clairement en permanence un spectacle des plus horribles, celui d’un amoncellement d’ossements humains : crânes, tibias, hanches, cages thoraciques, colonnes vertébrales. Restes qui y sont de tout temps vue la fréquence de nouveaux cadavres jetés là...Une nuée d’oiseaux charognards et de rats énormes qui festoient sur les restes délaissés par les chiens sauvages qui laissaient de la viande tant parfois ils étaient repus de l’abondance de victuailles. Une odeur de mort épouvantable imprégne ces lieux maudits.

La ville elle-même, comme toutes les autres, est protégée des attaques de ces prédateurs par une robuste barrière métallique constituée de gros poteaux supportant un réseau de forts filets métalliques électrifiés à gros maillage, doublé à l’intérieur d’un second aux mailles bien plus serrées ; l’ensemble allant jusqu’à près d’un kilomètre au nord, et qui englobe entièrement la ville dans un vaste demi-cercle allant jusqu’au bord de mer.

Dans cet espace ainsi protégé, tout ce qui ne servait pas à loger les Zanko-Khuigs et leurs maudits gardes était totalement détruit, soufflé par des explosifs. Les gardes faisaient des rondes régulières avec leur engins volants, tuant tout ce qui bougeait dans ce redoutable et impraticable no man's land de gravats, où rien ne dépassait de plus d’un demi-mètre de hauteur.

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Comme toutes les activités ou presque de ces gardes, ces fameuses rondes sont réglées comme par un métronome, et à la minute près en un cycle immuable ; ce qui était excellent pour monter les stratégies d’attaques qui, concernant ces fameux gardes robotisés, étaient déjà au point depuis longtemps déjà. Si des petites équipes les surveillaient encore ce n’était que par souci de prudence, au cas d’un changement bien improbable dans leurs routines bien ancrées, enracinées même. Mais il ne faut jamais sous-estimer l’ennemi, tel est le premier axiome du conquérant !

Alexandra se reprit enfin, elle s’ébroua et sortit de ce cauchemard pour reprendre le fil de la réalité.

-Claude, dit-elle, nous allons de nouveau voir les Akadis en premier, puis direction le bercail, ok ?

-Circuit des plus logiques encore, c’est certain qu’il faut les aviser rapidement de cet événement providentiel et futur pour décider de l’attaque. J’ai la nette impression que d’attaquer ce jour-là serait des mieux choisi pour un massacre « Royal », comme dit ironiquement notre ami Marcellin. Que ferions-nous sans ce grand guerrier ? Quand on pense qu’il a passé une longue vie de soumission et que dès qu’une chance de les détruire se présente, le voilà prompt en un éclair pour les massacrer ; c’est un Homme de grande valeur à tous points de vue, fasse que les forces du Cosmos le protège.

-Oui, tu as raison, c’est un Homme remarquable et...sa passion pour ma personne me touche énormément, je me suis promise que dès la victoire...quand on l’aura remplumé et donné une forme plus civilisée, et bien récuré aussi, je lui ferais l’amour, tendrement et du mieux que je pourrais, il le mérite et sera ainsi heureux je pense.

Claude lui sourit, et dit en riant. -Surtout, chérie, ne lui dis jamais ton intention érotique avant ce grand jour,

car il serait bien capable d’en mourir d’émotion ; tu vas faire de notre vénérable Marcellin, l’Homme le plus heureux de ce Monde. Je suis ravi pour lui car il le mérite grandement, comme tu dis si bien.

Le perceur arriva devant le grand hangar des ateliers de construction de Blagnac en peu de temps ; le pilote actionna la télécommande codée d’ouverture de la grande porte...L’appareil se glissa à l’intérieur du hall qui était sombre comme la nuit ; ils attendirent quelques secondes que la porte sur coulisseaux latéraux se referme seule, puis le hall de réception fut chichement éclairé par quelques lampes. Ils sortirent rapidement et se dirigèrent vers la porte donnant accès aux logements des responsables, mais vue l’heure encore très matinale, comme ils s’y attendaient, il n’y avait personne. Ils prirent le couloir central et se dirigèrent vers les dortoirs...Ils arrivèrent vite devant la porte qu’ils cherchaient, celle du responsable de la base de construction des perceurs.

Sur la porte était un petit panneau portant l’inscription Commandant - Jennifer Chancellor. Mais ils eurent beau frapper doucement, personne ne répondit. Claude ouvrir la porte et ils entrèrent. Ils virent alors avec la lumière du couloir, l’occupante et leur amie, la chef de la base, plongée dans un profond sommeil réparateur ; rien d’étonnant car ils savaient qu’elle travaillait quinze heures par

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jour environ, et quand elle tombait dans son lit c’était le plus souvent pour un sommeil inconscient et absolu.

-Claude, lui dit sa compagne en chuchotant, franchement ça me fait de la peine de la réveiller, la pauvre, elle est crevée ; elle va y laisser sa peau dans ce boulot, vivement que pour tous ces gens aussi que la victoire soit proche, car ils ne vivent que pour travailler, et encore travailler sans cesse, c’est pas une vie...

-Je sais bien, chérie, mais il faut la réveiller ; du reste, si elle savait que nous ne l’avions pas fait pour la laisser dormir, elle nous engueulerait de première, tu la connais pourtant : le travail avant tout, comme elle le répète sans cesse ; laisse-moi faire, je vais la réveiller en douceur...enfin, du mieux que je peux.

Il s’agenouilla devant la couche, dégagea le visage de Jennifer d’une mèche de cheveux chatains clairs, puis il se pencha et l’embrassa doucement sur l’épaule, puis sur la joue. La dormeuse bougea alors doucement, puis entoura le cou de Claude de son bras libre, l’attira vers elle et dit dans un souffle à peine audible : Mario...ô Mario, je t’ai...elle ouvrit alors les yeux et fit un bond, stupéfaite de voir qu’elle n’embrassait pas un Mario, mais un Claude qui lui souriait gentiment, avec derrière celui-ci, une Alexandra debout qui lui souriait aussi, l’air désolée.

-Pardon pour la méprise, chérie, lui dit Claude en souriant, mais je tenais à te réveiller de la façon la plus gentille possible.

Jennifer tira le drap à la volée puis se leva rapidement, tout à fait réveillée maintenant ; elle dormait toujours nue, Claude le savait bien pour avoir plusieurs fois déjà passé la nuit avec elle. Jennifer est une grande jeune femme de vingt-sept ans et dans les 1,72 m environ de hauteur, les yeux bleus clairs sur un beau visage un peu ovale ; un corps parfait, bien entretenu par une rigoureuse règle de vie active incluant la gymnastique journalière en plus de la traditionnelle et sacrée pratique des sports de combat.

-Ça ne fait rien, Claude, c’est toujours un plaisir de te voir...elle l’embrassa sur les lèvres puis elle s’avança vers Alexandra, les deux s’embrassèrent chaleureusement. Que nous vaut la visite impromptue cette fois encore des deux empêcheurs de dormir à satiété ? leur dit-elle en riant.

-Jennifer, dit Alexandra, je suis vraiment navrée de devoir te réveiller avec tout ce travail que tu as, je le sais bien mais, une fois encore, comme tu disais, nous rapportons une grande nouvelle de la même source que précédemment ; rien de grave rassure-toi, important plutôt, et je suis d’avis qu’il faut la transmettre rapidement aux Appalaches ; et elle lui expliqua en deux mots.

Claude lui donna une copie sur disk-mémoire. -Vous avez bien fait de me réveiller, je dormirais mieux ce soir, je vais

réveiller...Mario, justement, leur dit-elle avec un sourire ironique, pour le doublage, et ça partira dans trois à quatre heures environ, ok comme ça ?

-Merci, Jennifer, je savais pouvoir compter sur toi, lui dit sa visiteuse ; nous repartons de suite pour répandre la nouvelle chez les nôtres, ça va être encore une grande joie collective ; envoie le bonjour à tous les tiens.

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Ils s’embrassèrent et quittèrent une Jennifer de nouveau prête pour une journée bien remplie, malgré qu’il ne soit qu’à peine cinq heures du matin ; ils reprirent rapidement les airs vers Girelles...

Aux Appalaches aussi la base était sous une tension perpétuelle, où tous étaient

plongés dans leur travail enfiévré pour réussir le plus vite possible leur part déterminante à la grande victoire. Mais il restait tant à faire et, ils savaient aussi que depuis le temps qu’ils tiraient sur les stocks de matériaux et matériels les plus divers, allait venir le jour que tous craignaient, où ils se retrouveraient proprement coincés dans leur développement. Plus grand exemple flagrant de ces futurs manques qui seront dramatiques : les chalumeaux oxhydriques, par manque de bouteilles de gaz d’oxygène et d’hydrogène.

Une équipe de chercheurs travaillaient depuis des mois pour tenter de trouver un autre système, mais en vain jusqu’alors, au grand découragement de tous et de la rage de leur Grand Manitou de maintenant, James Whistler, un gars ayant un véritable don, mais don ou pas, ils étaient bloqués sur un problème qui paraissait rester insoluble.

James Whistler est un jeune gars dans les trente-cinq ans, 1,67 m de hauteur, les cheveux et les yeux presque noirs ; sans être gros, il est plutôt du type bien enveloppé, ce qui lui importe guère car il n’a qu’une seule passion dans sa vie : la recherche scientifique. Une femme de temps en temps, et le reste lui est pour ainsi dire inconnu et de peu de valeur. Un trait de caractère le caractérise cependant, et personne ne s’avise de l’oublier : il a un caractère colérique à l’extrème et son impuissance dans la recherche en ce cas précis le maintient en l’état d’une sourde colère contre lui-même.

Cette nuit-là encore, James Whistler quitta le labo grand dernier. Il se changea puis s’écroula dans son pucier et sombra de suite dans le néant, dans un sommeil si profond qu’il paraissait en catalepsie...Et il rêva et découvrit alors dans une illumination faramineuse de son cerveau prit d’une véritable folie, un systèrme révolutionnaire qui allait, il en était certain, résoudre tous leurs problèmes depuis des mois, car il rêva d’un système impossible à imaginer avant mais dont maintenant il voyait parfaitement bien les plans, les shémas et les calculs...Les yeux ouverts, il regardait un immense tableau sur lequel cette révélation miraculeuse défilait lentement. Mais surtout il voyait clairement un outil fabuleux faire des travaux de découpages et de soudures encore plus inimaginables...Puis, quelqu’un qu’il ne vit lui dit alors gentiment.

-« James, retourne à ton laboratoire maintenant, et mets toutes ces données en ordre sur ton ordinateur pour ne pas les oublier, et bonne chance, à vous tous. »

Quand les collaborateurs de James Whistler arrivèrent le lendemain à leur labo, ils le découvrirent habillé de son pyjama tout fripé, les cheveux en bataille, des espadrilles aux pieds...Il avait branché son ordinateur sur le grand écran vidéo de 4 x 5 mètres servant aux conférences et...il était à présent à quatre pattes par terre en train de couvrir de notes et dessins une rame de papier...

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-Mes amis ! mes amis ! vous ne le croierez certainement pas, s’écria-t-il, je viens d’inventer pendant que je dormais, un appareil révolutionnaire...Je vous présente ce qui va envoyer dans l’oubli tous nos appareils jusqu’alors servant à découper, à souder et compagnies...Appareil que j’ai nommé, le Couteau moléculaire ! Ne me demandez pas comment j’ai fait, je n’en sais foutre rien moi-même, et peu importe du moment que ça marche, car ça marche, je l’ai vu fonctionner !

Il s’arrêta alors de parler, surpris tout à coup par ses dernières paroles ; il réfléchit un instant, perplexe, puis confirma ce fait étrange.

Ses collègues devenant inquiets pour sa santé mentale, craignant tous que l’échec de leur recherche n’ait atteint l’équilibre cérébral de leur collègue et ami à tous. Ils leur expliqua le principe de fonctionnement et d’utilisation.

Devant ses explications des plus sensées, ils en vinrent à se rendre à l’évidence de la justesse de ses affirmations. La nouvelle fit alors rapidement le tour de la base, et il leur fallut traîner James Whistler, de force chez lui pour qu’il se lave, ce qu’ils firent, pour qu’ensuite il s’habille, ce qu’ils firent également, puis qu’il passe prendre son petit déjeuner en vitesse à la cafétéria, et seulement alors, le laisser enfin courir à son labo pour commencer de suite la construction du prototype de cet engin fabuleux.

James, furieux de ce contretemps, fut bien obligé de suivre ces procédés employés charitablement pour conserver un James Whistler en bon état.

Ils y passèrent trois semaines de travail acharné, pour fabriquer ce prototype qui ressemble à une sorte de gros manchon de vingt centimètres de long sur cinq de diamètre ; ses composants assemblés dans un tube en PVC de récupération, comportant sur son avant conique fermé d’un bouchon de même nature, trois embouts métalliques de quatre millimètres de diamètres et de trois centimètres de long environ, épointés à leurs bouts et qui se rejoignant presque en un seul bec, embouts formant un triangle de deux millimètres d’écartement entres ces trois pointes. Le plus gros de l’ensemble est la petite Centrale FMS qu’ils avaient récupéré sur un autre appareil.

Et vint le moment du verdict. Pire qu’un coup de poker, car dans ce vulgaire appareil était en jeu le devenir d’une jeune humanité. James affirma alors que son appareil allait fonctionner correctement ; tous le souhaitaient aussi mais, avec une certaine dose de doute bien légitime.

Et tous allèrent comme un seul homme dans l’atelier le plus proche de construction des chasseurs et autres appareils.

Il hésita un instant puis traversa l’atelier en sa longueur et alla directement vers un techno leur tournant le dos et qui ne les vit point venir avec son casque et ses lunettes noires de protection sur le nez, en train, qu’il était occupé de découper en deux parties égales avec un chalumeau oxhydrique, une épaisse poutre métallique en forme de T de six mètres de long et de trente-cinq centimètres de hauteur, l’acier devant à vue de nez avoisiner les quinze millimètres d’épaisseur.

James Whistler, s’arrêta derrière lui, l’aéropage de ces ouvriers les entourant d’un demi-cercle parfait. Souriant malicieusement il leur fit signe de faire silence ; tous les personnels du vaste atelier s’étaient arrêtés de travailler, on

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n’entendait plus que le bruit sifflant de la torche du chalumeau ainsi que des jets de métal fondu éjecté en grosses gerbes incancescentes sur le sol. Le tronçon de la poutre en métal fut enfin sectionnée au bout de plus de dix minutes d’un travail laborieux, les deux morceaux restant en place sur leurs tréteaux.

Le tecno ayant éteint la torche, un grand silence s’instaura dans le vaste atelier. Le travailleur, qui avait ôté ses gants en peau et allait enlever son casque et ses

lunettes de protection, se figea un instant dans son mouvement, réalisant brusquement l’étrange silence ambiant. Il termina son geste d’enlever son casque et lunettes tout en se retournant intrigué ; une longue chevelure blonde se déroula et tomba en cascade sur ses épaules : la tecno, Eileen Athaway, ahurie, découvrit alors ces gens des labos et tous ses collègues qui l’entouraient en souriants tous d’un étrange air entendu de conspirateurs...

-Eileen, lui dit en souriant James Whistler, nous admirions, enfin, façon de parler, le travail ardu qui est le tien ; c’est fatigant non ?

-James, t’as toujours été un petit rigolo, tu sais ; dire que c’est fatigant, c’est rien de le dire, et en plus c’est dangereux, de part la masse et le poids de ces poutres, mais surtout de ces émanations de gaz que l’on respire mais, dit-elle alors en les regardant tous en souriant, comment faire autrement, hein ? si l’on veut s’en sortir, y a pas d’autres choix, alors...

-Et si je te donnais un nouvel appareil qui fera ce travail en quelques secondes et sans émanation de gaz ou autre, ça te conviendrait, ma belle ?

-C’est gentil de ta part James, répond-t-elle en lui souriant et lui caressant la joue, je te reconnais bien là, toujours galant avec les dames, et je te remercie bien mais...d’où tu le sortirais cet appareil miracle, hein ? de ta poche peut-être ? s’esclaffant en prenant les autres à témoins de cette bonne farce.

-Exactement, ma jolie, et il sortit alors lentement l’appareil de sous sa blouse et le lui montra fièrement. Le voici ton appareil miracle, je l’ai appelé le Couteau moléculaire, et je vais te montrer, comme à tous ces incrédules aussi que sont mes collègues, les pouvoirs faramineux de cette nouvelle technologie. Qu’as-tu à découper maintenant ?

Eileen se dirigea vers une autre poutre semblable à la première, disposée sur des chevalets en fer ; elle lui montra la découpe à effectuer en son milieu, l’endroit marqué par un long trait de craie blanche.

-Voici, James...à toi l’honneur ! Je t’avoue que je suis grandement impatiente de voir ce...miracle, et si ça marche, je suis preneuse de suite, car je vous avoue que j’en ai ma claque de ces chalumeaux de merde ! Au moins que cela soit dit une bonne fois pour toutes !

-Merci Eileen, on a besoin d’aucun moyen de protection avec cet appareil, ce qui est un miracle de plus.

Ce premier essai eut donc pour témoin privilégié trois cent trente-six personnes qui s’en rappelèrent tout le restant de leur vie. James s’avança vers la poutre à découper...Il régla au hasard le curseur découpage à mi-parcours, avança l’appareil contre l’acier...Puis il actionna la commande et, devant ces centaines de paires d’yeux ahuris de cette foule sidérée, paralysée sur place devant ce spectacle invraisemblable, la poutre fut sectionnée en quelques

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secondes, par un trait fin et régulier d’à peine un millimètre de largeur, et ce surtout sans bruit, sans étincelles, sans fumée, sans odeur, sans dégagement de gaz ou autres...sans rien : c’était net, instantané et sans bavure.

Après un long moment de totale stupéfaction, ce fut le délire dans cet atelier ; tous d’appplaudir à tout rompre. Un rêve pour tous ces Hommes et ces Femmes qui transpiraient durant leur dure vie à ces travaux pénibles et sans fin. Le calme revenu, James Whistler, éluda d’un geste le roulement des questions.

-Ainsi...leur dit-il, après avoir découpé, pour construire, on se doit de...souder ! C’est pas moi qui vais vous l’apprendre...et c’est ce que je vais faire de ce pas ; que quelqu’un veuille simplement avancer les deux morceaux de la poutre découpée l’un contre l’autre, merci.

Aussitôt, les deux gars étant les plus près se précipitèrent et en forçant collèrent les bords de la coupe à se toucher.

James, au jugé, effectua les réglages requis sur son engin...Il respira un grand coup, appliqua les trois sortes d’électrodes sur le début de la découpe de la poutre puis il actionna le démarrage du soudeur. Tous furent témoins de la jonction instantanée des deux parties métalliques. Tous virent la vitesse de soudure, si on pouvait appeler cela de soudure...Tous virent la poutre qui retrouva son aspect initial en moins de deux minutes ; rien ne pouvait dès lors prouver qu’elle venait d’être l’objet d’une quelconque action sur sa constitution moléculaire initiale ; les deux parties étaient intimement liées en un seul et unique morceau.

Il leur fallut un bon moment pour réaliser que ce qu’ils venaient de voir n’était pas sorti d’un songe, mais bel et bien d’un engin inventé par ce type génial entre tous. Et, bien entendu, l’effet de surprise passé, tous bondirent sur leurs pieds et assaillirent ce pauvre James, qui n’eut d’autre ressource que de bondir à son tour sur un meuble pour pouvoir respirer et répondre au feu roulant des questions.

-Maintenant, mes lascards, dans vos travaux, ô combien pénibles, nous le savons tous, vous êtes fréquemment dans l’obligation de chauffer les tôles pour les plier, les cintrer, etc. Eileen, ma belle poupée blonde (rire de la foule), pourrais-tu me donner un morceau d’une grosse tôle bien épaisse ?

L’interpelée fonça vers le stock de ferrailles, mis ses épais gants en peaux et choisit un morceau d’une quarantaine de centimètre de long, qui devait bien peser plus de 30 kilos, elle le prit en force en l’appuyant sur son ventre aux muscles tendus et le jeta sur les tréteaux à coté de la poutre ; essouflée, elle se tourna vers James Whistler, et lui dit en souriant d’un air malicieux.

-James, si tu réussis à me plier cette ferraille, je...je suis à toi pour cette nuit, pour comme d’habitude assouvir tous tes fantasmes, ok mon mignon ?

La foule rit énormément et des quolibets jaillirent, - Veinard James, te loupe pas ; - Eileen, c’est lesquels ses fantasmes ? – Eileen, fais gaffe à son chalumeau...

-Merci, Eileen, pour ta proposition que j’accepte comme toujours avec grand plaisir, et ta discrétion surtout ; regarde-les maintenant, ces grands imbéciles. Mais bon, allons-y, gagnons tes faveurs que j’apprécies toujours énormément, ma belle Eileen.

Elle sourit, toute contente de ce compliment.

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James positionna le couteau moléculaire réglé sur fonction découpeur, à la verticale au milieu de la pièce, le leva, d’environ dix centimètres de hauteur, puis il appuya sur la commande. La pièce métallique, sur un rond d’un diamètre de cinq centimètres environ, vira au rouge en trois secondes, il avança le couteau rapidement et chauffa toute la largeur de la pièce au rouge vif, en quelques secondes...Puis il le positionna plus loin et recommença, levant le couteau, le rabaissant, la chauffe suivant en intensité la hauteur de l’engin ; il coupa le contact et se retourna vers la foule qui était encore stupéfaite...

-A quelle heure veux-tu que je vienne, James ? lui dit alors Eileen, en souriant, conquise.

-Demain vers les 20 heures, cela t’ira, ma douce colombe ? car aujourd’hui je suis mort de fatigue.

-Parfait, mon mignon, je te promets que ça va chauffer ! avec ou sans ton foutu couteau molécu...j’ sais pas quoi !

Tous de rires enfin de ces échanges galants qui détendirent l’atmosphère. -Maintenant, dit James, ultime essai, donnez-moi deux bouts de métaux

différents. Deux autres technos coururent vers le tas de ferrailles et revinrent avec deux

bouts de tôle, l’une en acier et l’autre en cuivre, ils les placèrent sur les tréteaux, les deux bords à se toucher, puis ils laissèrent la place à James.

Celui-ci vint, régla son outil et souda sans problème les deux métaux ; seule restait visible une bande d’environ huit millimètres de large de couleur intermédiare, mais il n’y apparaissait aucune boursoufflure ni rien d’autre, et comme la soudure précédente, la pièce était chaude mais on pouvait facilement y laisser la main dessus.

James s’amusa alors à y découper des ronds, des carrés, des formes au hasard, puis il les ressoudait négligemment comme s’il avait fait cela toute sa vie...

Eileen s’avança et lui prit le bras, le forçant à stopper son engin miracle ; elle le fit se retourner vers elle puis elle lui prit la tête entre ses deux mains et se penchant sur lui elle l’embrassa avec passion à pleine bouche durant un long moment...puis, se séparant d’un James ravi mais qui cherchait son souffle, elle lui dit alors, dans les rires de la foule.

-James Whistler, au nom de tous mes collègues faisant ces travaux et qui pour l’heure rient comme de fieffés imbéciles, je te remercie infiniment car tu viens de nous libérer d’un véritable travail de forçat, ingrat, pénible et dangereux ; mais que cependant nous faisons avec ardeur pour contribuer à nous sauver tous. Merci mille fois, James Whistler, tu es le plus grand d’entre nous tous, que les forces du Cosmos te bénissent et te protègent.

Tous les participants l’applaudirent à tout rompre. Sur ce, James, en souriant mais un tantinet gêné, découpa encore négligemment un bout de la tôle puis, tenant toujours le contact enfoncé, dans le même mouvement il appliqua brusquement le couteau sur la dos de sa main gauche. Ce fut un cri d’effroi dans cette foule incrédule mais, à leur grand soulagement, rien ne se passa, le couteau n’attaquait pas la chair...et maintenant toujours le contact enclenché, il ramena

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l’engin sur la tôle qui fut alors découpée d’un seul jet et...tous de copieusement l’engueuler de la peur qu’il leur fit.

-Ainsi mes amis, vous savez maintenant que cet engin ne présente aucun danger pour l’utilisateur, il n’officie que sur les métaux ; c’est un miracle de plus.

Ce soir là, pour une fois, il était même relativement très tôt, quelques compatissantes blouses blanches portèrent un James Whistler chancelant de fatigue jusqu’à son foutoir, où ils le revêtirent d’un pyjama neuf et repassé et le couchèrent dans son lit qui avait été entièrement refait avec des draps propres, par une bonne âme ; attention envers leur nouvel héros qui dormit durant douze heures d’affilées.

L’étude, la conception et la réalisation d’un appareil facilement préhensible et plus petit, leur prit environ deux semaines. Ils réussirent à installer une petite chaîne de production qui démarra de suite, si bien qu’un mois après ces premiers essais, ils purent en sortir une bonne trentaine par jour. Outil qui changea de suite la vie de ces centaines de travailleurs de la base, mais aussi et surtout accéléra d’une façon spectaculaire les rythmes de construction des chasseurs, de l’arme finale ainsi que de toutes autres fabrications.

Il fut prévu d’un commun accord que chaque appareil volant devrait en être équipé car il pourrait servir d’arme défensive : pouvant tronçonner celle d’un attaquant. Tel est le partage de cette nouvelle Humanité, une complète coopération volontaire, selon un consensus global ; seul et unique moyen de parvenir au jour de plus en plus proche à leur but sacré : éliminer cette racaille sordide de la surface de cette Gaïa.

Le chasseur d’Euromorte apportant la nouvelle de Marcellin, arriva deux jours

après les fabuleux essais du couteau moléculaire. Cette nouvelle de ce fumeux roi Zanko-Khuigs devant être en Franki le 1er mai 2400, fut à l’origine d’une grande folie collective, car maintenant, OUI, grâce à James Whistler, ils avaient enfin les moyens de construire rapidement l’arme et en équiper les centaines de chasseurs devant transporter les milliers de guerriers sur les enclaves de ces salauds polluants le globe de leur présence nauséabonde.

Il fut alors décidé d’organiser une réunion d’urgence du grand Conseil des sages pour le lendemain matin même.

Cette réunion fut une fois de plus sous la haute présidence de leur sage, le président depuis des lustres, Ruppert Burrows, qui en cette fin d’année de 2398, n’est plus le gaillard fringant de ses débuts, mais il conserve une énergie hors du commun pour son âge plus que respectable ; il est droit comme un I, se déplace normalement, et son esprit est toujours aussi alerte et prompt à tout saisir en une seconde, quanlité élémentaire pour un coordinateur et chef tacticien.

La réunion démarra dans un grand brouhaha. Etaient présents la majorité des équipages qui avaient participé aux premières vagues d’expansion vers l’Euromorte. Avec le temps tous ces gens fameux étaient donc devenus des Sages, têtes grises pour la plupart. Et bien entendu, se tenait aux côtés du président, le dernier héros en date, le célèbrissimo inventeur, James Whistler, le

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découvreur du fabuleux Couteau moléculaire, appareil qui depuis sa création était en train de révolutionner les moyens de production de tous les appareils nécessaires à la grande bataille finale. Le président prit alors la parole pour la énième fois de sa vie, dans cet amphithéâtre dès lors familier.

-Mes amis, dit-il, je vous demande comme à chaque fois de conserver votre calme...sans toutefois, en réaliste patenté que je suis, me faire trop d’illusions.

Rire de l’assistance, ainsi que du président... -Vous savez tous que cette réunion a été décidée suite à une petite

découverte...banale, pourrait-on dire, d’un de nos rêveur patenté, j’ai nommé notre nouvel héros et prodigieux savant entre tous, James Whistler, que voici !

Ce fut comme de bien entendu, un chahut général sous des applaudissements effrénés.

-James Whistler, lui dit alors Ruppert, aurais-tu la bonté de nous dire comment t’es venue l’idée d’une technologie aussi extravagante, sans données techniques superflues, en considération de nos faibles esprits, comparé au tien de géant !

Le président lui laissa la place devant le micro ; l’interpelé s’avança, regarda la foule devant lui, hésita un instant, puis se jeta à l’eau.

-Vous n’allez certainement pas me croire, mais...comme je l’ai déjà dit à mes collègues du labo qui...n’en croient pas un traître mot non plus, il articula alors d’une voix forte : JE N’EN SAIS FOUTREMENT RIEN !

L’assemblée fut parcourue par d’une onde d’étonnement et de protestations. -Voilà une étrange affirmation, James, aurais-tu fait comme ton illustre

prédécesseur, notre inoubliable collègue, le grand Lary Whyspianskir ? Qui nous disait, à nous, pauvres ignorants, qu’il recevait des sortes de...visions ?

-Je ne voudrais surtout pas me comparer à Lary mais...il hésita, sachant que ce qu’il allait dire allait peut-être jeter ces gens dans la plus totale confusion mentale et le désarroi...Vous tenez vraiment à le savoir ? D’avoir cet appareil ne vous suffit point, hein ? comme toujours l’Homme veut avoir le beurre et l’argent du beurre, comme disaient ces abrutis du monde mort, c’est cela ? Vous voulez vraiment le savoir ? James était excité maintenant, de devoir tout raconter et risquer de passer pour un fou ; mais son sens de l’éthique était plus fort que son confort moral : il était prêt, oui, à leur révéler la vérité, coûte que coûte.

-James, le coupa gentiment Ruppert, voyant son embarras et sa volonté de défier ses frères par une révélation qu’il supputait pouvant être destabilisatrice pour tous...Fais selon ta volonté, James, personne ici présent ne te force à quoi que ce soit, tu as ma parole, James, cela devrait te suffire, mon ami.

James Whistler, le regarda et hocha lentement la tête, -Je sais, Ruppert, et je t’en remercie du fond du coeur mais...il faut que je parle,

je ne dois pas garder cela ignoré de vous tous, non...Il faut que je vous dise la vérité vraie, la grande vérité ; de celles qui bouleversent parfois un monde, un peuple...une civilisation, oui...Mais nous sommes une civilisation d’Hommes et Femmes alertes et sans peur maintenant, non ? nous l’affirmons grandement tous les jours en tous cas ; nous ne risquons donc pas de périr dans un ethnocide suicidaire, comme ceux du monde mort. Je vous en prie, ne me

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regardez pas comme un fou ; je ne suis aucunement sous l’emprise d’un quelconque délire, non...

Et puis d’ailleurs, réfléchissez un seul petit instant : est-ce qu’un fou aurait pu inventer une chose aussi compliquée jusqu’alors pour nous tous ? moi y compris encore la veille au soir ? NON ! Cent fois NON ! et tous mes collègues le savent bien au labo, mais personne ne dit rien car cela les effraie...Alors ils jouent les innocents, se contentant en riant jaune de mettre ça sous le chapeau de l’alors providentiellement dénommé génial, James Whistler, le génie du siècle disent-ils...Génie, mon cul ! J’étais dans le brouillard le plus complet, comme mes illustres collègues, sans plus, voilà la vérité, et tous ces faux-culs le savent parfaitement bien, voilà l’encore pure vérité.

James se servit un verre d’eau à disposition sur une petite table sur le côté...L’assistance, dans un silence absolu, le regardait boire lentement son verre...tous étaient pendus à ses lèvres...

-Vous vous souvenez certainement des rapports relatant les nombreuses découvertes de Lary Whyspianskir, justement...Rapports desquels il ressort qu’il avait reçu les idées de ses découvertes durant ses nuits...Certaines nuits où il rêvait et voyait des gens inconnus lui révéler des technologies nouvelles...et cela à chacune de ses inventions véritablements géniales alors, et qui seules permirent notre réelle avancée scientifique ; inventions sans lesquelles nous en serions encore aux débuts d’une recherche empirique. Nous tous devons reconnaître objectivement ces faits indiscutables ; je pose la question : est-ce vrai ou non ?

Tous dans l’assistence hochèrent affirmativement la tête, toujours dans le plus grand silence.

-Je vous remercie de votre droiture et honnêteté intellectuelle mais...à l’époque, tablant sur la propension légendaire de ce pauvre Lary à faire et raconter des blagues, personne ne voulu croire un seul instant à ses assertions selon lesquelles il recevait les idées des découvertes durant ses rêves bien étranges et si particuliers. Ils mirent ça, ô coupable et pleutre ironie, providentielle à votre conformisme, sur la grande modestie de leur collègue...C’était ainsi bien plus confortable pour les esprits frileux de ses contemporains, dont une majorité sont encore présents dans cet amphithéâtre.

Ainsi, j’ai décidé de changer la donne et de passer outre à votre conservatisme dès lors classifié d’outrancier et maintenant insupportable, s’il vous venait par cas l’idée de vouloir persister dans ce même chemin rétrograde. Je vous prie donc par là-même, de partager avec ma modeste personne, je dis bien partager, dans le sens le plus large possible du terme, le fait que je me casse la tête depuis des jours pour enfin tenter essayer de savoir qui sont ces gens qui, comme mon illustre prédécesseur Lary Whyspianskir, m’ont tiré de mon lit pour me montrer, oui...comme sur une vidéo, le principe du Couteau moléculaire. Me montrer sa conception, les plans, sa fabrication, etc., le tout dans les moindres détails et, je l’y ai même vu fonctionner de visu...C’était sans doute pour cela que j’étais certain de mon appareil avant même les premiers essais.

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Dernier détail important dont j’ai souvenance, quand ce fut terminé, j’entendis clairement une voix me dire, « James, retourne à ton laboratoire maintenant, et mets toutes ces données en ordre sur ton ordinateur pour ne pas les oublier, et bonne chance à...vous tous », soulignant les deux derniers mots.

Voici, chers amis et amies, ce qu’il en est du, entre parenthèse, soi-disant génial James Whistler, qui ne l’est pas plus ni moins que la veille de cette fameuse nuit. Si quelqu’un d’entre cette honorable assemblée avait une seule petite explication sensée à me proposer, je lui en serais infiniment gré. Vous en savez tous maintenant autant que moi. Merci.

Le président n’avait jamais vu de sa vie l’exposé d’un invité se terminer dans un si grand silence ; tous étaient littéralement sidérés, assommés, anéantis, ce terme étant et de loin le plus juste.

-Mes amis, se reprit le président, devant notre stupeur collective suite aux révélations de notre ami James, je serais tenté de chercher immédiatement des explications...Pour clarifier la situation et ne point se perdre dans des supposi- tions plus ou moins oiseuses, je vous soumets la seule idée de concrète qui me vient à l’esprit. Nous ne sommes pas seuls sur cette planète ! Souligna-t-il d’une voix forte en détachant chaque syllabe. Une autre civilisation hautement développée prend en compte notre devenir. Heureusement pour nous, rajouterais-je, car malgré la suffisance légendaire de notre espèce, nous sommes réellement peu de chose sur ce foutu cailloux spatial qu’est notre terre.

Et maintenant, si vous réflechissez un minimum plutôt que de nous regarder, James et moi, avec des yeux de veaux, vous conviendrez avec moi que ces fantastiques données recoupent admirablement les trous jamais élucidés que nous avons dans notre Histoire naissante. À savoir : la mystérieuse et inespérée disparition des navires de guerre à propulsions et armements nucléaires ; comme ceux des nons moins dangereux silos de fusées intercontinentales à ogives nucléaires multiples ; les centrales nucléaires productrices d’électricité ; ce qui fut également le cas des Ruskofs dans leurs bases arctiques ; idem des silos de l’ex-Pakistan, de l’ex-Iran, de l’ex-Corée du Nord, etc. Qu’en pensez-vous ?

Personne de l’assemblée ne répondit...ce fut James, qui reprit la parole. -Ruppert, comme toujours tu es égal à toi-même, tu as toujours le chic pour

déterminer de suite le point sensible exact du problème, et si personne ne te répond c’est que tout simplement tu as déjà énoncé toutes les données acceptables. Seules, j’ai la nette impression que manqueront pour longtemps encore, les réponses, à savoir : qui sont ces gens et où sont-ils ? Mais, une donnée essentielle nous importe seule pour l’instant, à savoir que nous sommes sous...James hésita un moment...Nous sommes l’objet de l’attention de forces qui nous sont bénéfiques et que donc nous ne devons pas nous en préoccuper outre mesure pour l’instant ; de toute façon, que pourrions-nous faire d’autre ?

Il nous faut donc garder nos énergies pour ainsi nous jeter entièrement dans notre objectif majeur et primaire : la reconquête de notre Gaïa, car l’aide qu’ils nous apportent, en fait...n’est-ce pas dans cet objectif même ? C’est l’unique logique qui ressort de la moindre analyse, alors, fonçons joyeusement vers

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l’anéantissement de ces pourris de Zanko-Khuigs, puisque cela semble de leur intérêt aussi...de nos amis inconnus, pour l’instant.

Quelque chose me dit que nous les verrons un jour si...si toutefois nous sommes capables de reconquérir notre liberté. Voilà l’enjeu à mon avis : ils nous donnent des sortes de jokers, mais c’est essentiellement à nous seuls de gagner notre paradis, voilà...Je suis certain qu’il en est ainsi. Je suis donc d’avis de clore ce sujet et continuer uniquement sur notre lancée guerrière, la seule valeur d’importance pour l’instant, et...je tiens à te remercier en particulier, Ruppert, pour avoir donné brillamment confirmation à mes propres supputations qui étaient les mêmes que les tiennes. Nous pouvons enfin respirer un peu...et être conscients que nous conquérons un Monde qui sera alors à partager avec des amis généreux...des amis discrets, mais puissants et efficaces ; qui vivra verra. Fin de mon exposé. Merci à tous.

Tous l’applaudirent chaleureusement, James venait astucieusement de sortir l’assemblée de sa stupéfaction. Le fait de reparler de conquête les remettait sur la voie sacrée et compréhensible ; l’unique objectif était bien comme toujours de massacrer ces ordures de Zanko-Khuigs, et cela seul !

La président reprit l’initiative des débats après avoir bu un verre d’eau, imité par presque tous les participants à cette réunion ; Ruppert Burrows, s’avança de nouveau vers le micro et continua.

-Bien...après ces données imprévues qui, comme le dit alors James, aux témoins de premiers essais, nous mirent tous littéralement sur le cul, rire de l’assistance, nous pouvons je pense reprendre le cours du programme qui était initialement prévu, à savoir la question essentielle : la venue miraculeuse de cette technologie nous donne-t-elle enfin la possibilité de passer plus rapidement à l’attaque de ces salopards de Zanko-Khuigs ?

Je voudrais pour cela connaître l’avis éclairé et indispensable du responsable général construction, notre soeur et amie à tous, Francisca Alonso. Il fit signe à une spectatrice de venir sur le podium.

L’interpelée se leva et vint d’un pas énergique le retrouver sur le podium, dont elle gravit allégrement les quatres marches en deux enjambées. Francisca est une belle femme dans les trente cinq ans environ, 1,74 mètre, les cheveux chatains foncés, les yeux marrons clairs avec une pointe de vert suivant l’éclairage. Elle est bâtie d’une forte charpente sans aucun gramme de graisse, car c’est une sportive accomplie et d’une grande force physique et grande souplesse. Mise à part ces données générales, elle est particulièremnt appréciées de tous pour sa grande conscience professionnelle et savoirs techniques doublés d’un sens de coordinatrice hors pair.

Arrivée près de Ruppert elle lui entoura la taille d’un bras puis se dressa sur la pointe des pieds et l’embrassa d’emblée sur les lèvres ; tout le monde étant au courant du béguin commun actuel des deux...Le président, avec son esprit toujours alerte et gaillard, pour ne pas dire égrillard, à tel point que quand on mettait en doute sa vigueur, vu son âge en balance avec celui de sa dulcinée du moment, celui-ci répondait alors avec un rire narquois à qui voulait bien

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l’entendre, « Mon cher (e), apprenez que je suis comme les poireaux : j’ai la tête blanche mais la queue verte ! » Affirmation péremptoire qui clouait le bec du curieux (se).

-Merci bien, Francisca, de bien vouloir nous apporter ton avis des plus éclairés. Peux-tu nous informer sur l’état des plannings de construction de l’ensemble des matériels, et plus particulièrement ceux d’assauts ? Ainsi que des problèmes ou difficultés éventuelles.

-En ce qui concerne les délais de constructions et d’équipements des appareils aériens, les livraisons vers l’Euromorte, etc., tout est maintenant dans les temps voulus ; tout sera prêt vers la fin octobre au plus tard, ainsi toutes les équipes de part le monde auront leurs matériels en main. Ils auront plusieurs mois pour s’habituer à leurs matos et s’entrainer, et réparer ce qui est éventuellement déficient...ce qui est fort rare, heureusement.

En ce qui concerne l’arme majeure dont dépend toute l’attaque, et dont vous connaissez tous maintenant les données si particulières, du fait de cette rapidité de construction inespérée jusqu’alors, cela nous permet pour une sécurité optimale, de doubler leurs modules de lasers séquentiels en cascade ainsi que la source d’énergie électrique, car...malgré que les gars du labo nous certifient qu’elles ne peuvent pas tomber en panne, du fait que le temps n’est plus un obstacle, nous mettons carrément deux Centrales FMS en fonction ; la deuxième en standbay, à démarrage automatique en un centième de seconde. De toute façon tous ces matériels seront récupérés après la victoire pour d’autres et innombrables utilisations pacifiques, alors et seulement.

A ce propos, mon cher Ruppert, je te rappelle, devant témoins, elle interpela l’assistance du regard, que tu m’as promis une place dans les commandos d’assauts, je tiens personnellement à étriper un maximum de ces pourritures de Zanko-Khuigs, toujours d’accord...chéri ?

Grand rire dans l’assistance, de la surprise de leur président qui ne s’attendait point à une sortie de la sorte ; ce qui prouvait que même à son grand âge on découvrait tous les jours des facettes cachées et donc inexplorées de la Femme...

-Mais...absolument, ma chérie, aussi, lui répondit-il en souriant jaune, chose promise, chose due !

-Merci, Ruppert, t’es chou, je savais qu’on pouvait compter sur toi. Pour l’occasion, elle s’adressa de nouveau à l’assistance, je me suis frabriquée un sabre et un poignard à ma mesure, et qui coupent comme un rasoir...Il ne manque plus que les ventres et les gorges qui vont avec, s’esclaffa-t-elle.

L’assemblée rit de bon coeur de cet excellent humour macabre. -Ainsi, reprit Ruppert, nous pouvons donc enfin fixer dès maintenant la date

de l’attaque mondiale ? Tu es certaine de tes information ? -A deux semaines près, oui, début novembre de 2399 au plus tard, sans

problème ! répondit-elle ravie. Ruppert Burrows, fut alors pris d’un grand sourire, il jubilait carrément, ne

pouvant contenir sa joie ; il passa un bras autour de l’épaule de Francisca et la serrant affectueusement contre lui, s’adressa aux spectateurs.

-Mes amis...Mes très chers amis et amies, vous tous, et au nom de tous les habitants de ce futur Monde libre, je tiens à formuler une décision qui engage

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dès cet instant tous ces nouveaux Humains libres que nous sommes, à savoir que...Ruppert s’arrêta de parler un instant, regarda sa compagne d’un regard ému, la serra encore plus fort contre lui et s’écria. Je déclare, en ce jour béni de ce samedi 19 décembre 2.398, que l’attaque générale pour exterminer les Zanko-Khuigs jusqu’au dernier de cette immonde et infâme vermine, aura lieu le...il respira bon un coup...le dimanche 1er mai 2.400 ! Êtes-vous tous d’accord ?

Un hurlement lui répondit, les chaises et les bancs furent renversés dans une tempête de cris et de rires, d’applaudissements à tout rompre...En deux mots, ils étaient tous devenus fous. Ruppert, brancha la sonorisation sur diffusion générale, embrassa les lèvres d’une Francisca aux anges, se racla la gorge, puis prévint alors tous les habitants de la base.

-Attention ! Attention ! Ici Ruppert, communication générale concernant tous les personnels de cette base, je dis bien, tous les personnels...Mes amis et amies, préparez-vous à une grande, une fantastique nouvelle...Entendez-vous le raffut monstre que font les personnes présentes à la grande réunion du Conseil ? Oui ?

Ils sont devenus fous de joie, et bien faites tous de même car nous venons enfin de fixer cette fameuse date de la grande attaque de notre reconquête contre ces pourris de Zanko-Khuigs ; attaque qui aura donc lieux, il épela lentement en criant: le-di-man-che -1er -mai-2.400 !

Amusez-vous aussi ! Je décrète pour ce grand jour historique, que tous cessiez de travailler jusqu’à demain ; faisons tous le fête, soyez bénis !

Maintenant, cria-t-il, que la fête commence ! Et tous firent la fête...et quelle fête ; la preuve ? La réserve de rye en prit un

sacré coup ; ils dansèrent comme jamais, et...neuf mois après il y eut une nette montée en flèche des naissances, du jamais vu d’un seul coup, enfin...façon de parler.

Ce mercredi soir-là, 23 décembre 2398, c’est sous une violente tempête de

neige et un froid de canard que la délégation Akadi fit son arrivée à la station Bertrand, condition climatique idéale pour tromper toute éventuelle détection indésirée. Ils étaient nombreux à accompagner leur président, car pour ce grand jour où ils venaient leur annoncer la date de l’attaque, il avait tenu à être accompagné de ses collègues du Conseil et des premiers explorateurs de ces contrées.

Ils furent accueillis à leur descente du transport avec de grandes marques d’estimes et d’amitiés par le Conseil de Bertrand au grand complet, ainsi qu’une foule compacte et joyeuse ; tous entrèrent rapidement s’abriter du froid et de la neige dans la chaleur relative de la grotte puis, la grande porte d’entrée montée sur rail fut de suite fermée et ils allèrent directement vers l’Agora, dans un chahut de vives discussions et rires, ces retrouvailles toujours trop rares étant à chaque fois l’occasion de se remémorer leurs souvenirs communs, riches en surprises et espoirs de batailles sanglantes démesurées.

Ils débouchèrent enfin dans l’immense salle des réunions publique sous un déluge d’applaudissements ; ils furent tous dirigés vers les sièges leurs étant

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réservés devant le podium central. James Whistler resta avec son chariot au bas du podium. Georges convia Ruppert sur le podium ; lui passant un bras sur ses épaules, il s’avança vers le micro, se racla la gorge bloquée par une grande émotion, puis il put enfin parler.

-Mes amis, vous tous réunis ici ce soir, ainsi que tous nos compagnons restés dans leurs stations, aussi bien ici en Franki que partout ailleurs dans ce vaste et magnifique Monde qui est notre et unique, et plus particulièrement aux compagnons Akadis restés dans leurs grottes et leur base aux Appalaches. Je...je ne sais plus comment vous formuler ce que je ressens, à la nouvelle que mon grand ami et mon frère, il montra Ruppert d’un geste, m’a fait bénéficier en primeur pendant que nous venions ici. Je lui laisse donc sans plus tarder vous révéler la plus grande nouvelle que nous espérons tous depuis des lustres, il laissa le micro à Ruppert ; à toi l’honneur, mon frère, et soit béni pour cette félicité que tu nous apportes, ainsi que tous tes compagnons et compagnes, les désignant d’un sourire et d’un geste au pied du podium.

Ruppert sourit à tous et attaqua en s’éfforçant de maitriser au mieux son accent Franki assez spécial.

-Hello ! Bonsoir à tous, mes chères soeurs et frères, et excusez-moi d’avance pour mon accent épouvantable, mais je promets de tenter m’améliorer...rire de tous. Je tenais à vous faire part de notre immense plaisir d’être de nouveau parmi vous, nous tous Akadis ici présents ce soir, et de retrouver ainsi nos frères et soeurs de combats futurs et...qui maintenant ne sauraient plus guère tarder !

Je ne vous ferai pas attendre plus longtemps au risque de me faire lyncher, rire nerveux de tous. Je vous annonce officiellement que nous avons définitivement arrêté la date de l’attaque générale contre ces pourris de Zanko-Khuigs.

Ce joyeux massacre général, aura donc lieu le... Dimanche 1er Mai 2400 ! Hurlements général à en décrocher les stalactites et spots d’éclairages... À chacun d’imaginer, si possible, la folie qui les prit tous...Ce fut démentiel,

d’autant que rapidement retentit une musique d’orgues aux accords fracassants, musique extravagante et endiablée produite par leur organiste maison, la belle Eveline qui se surpassa ; musique extraordinaire de cet instrument fabuleux qui donnait à cette frénésie des spectateurs une dimension proprement délirante. Un bon quart d’heure plus tard donc, au moins, quand ils furent tous aphones et retombés le cul dans leurs sièges, et après avoir hurlé, gesticulé, sauté, ri...

Le président Ruppert Burrows put enfin reprendre son exposé. -C’est avec une très grande satisfaction que je constate que ce programme

festif de ce 1er mai 2400 est du goût de vous tous, grand merci mes amis ! Grands et vastes rires dans la foule. -Sachez que tout ceci nous le devons à une découverte technologique

extraordinaire, quoique à mon avis le mot soit faible, mais vous pourrez en juger aussi bien par vous-même, car nous avons amené le nécessaire pour vous faire une démonstration de ce nouvel outil fabuleux, mais surtout, nous avons amené celui qui est à l’origine de cette fabuleuse invention, j’ai nommé et le prie de venir nous rejoindre sur ce podium, notre cher et inestimable compagnon et ami, James Whistler, notre héros à tous !

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James salua l’assemblée d’une courbette, déclenchant des applaudissements nourris ; puis il s’avança pour récupérer son chariot AG et gravit avec ce dernier les quatre marches donnant accès sur le podium. Ruppert l’accueillit et lui passa un bras sur les épaules, l’amena vers le micro, et le présenta à la foule.

-Mes amis, sachez et n’oubliez jamais que nous devrons notre victoire à ce génie authentique, James Whistler, je vous demande de l’applaudir encore une fois, car il le mérite grandement.

James, gêné, subit encore, stoïque, une bordée d’applaudissements. Le silence revenu, Ruppert continua. -Vous allez voir par vous-même ce fabuleux outil, je laisse sans plus tarder la

parole à son inventeur. James installa de petits tréteaux métalliques sur le podium, puis y posa un

tronçon de un mètre de long de la poutre ayant servie aux premiers essais ; il sortit le couteau moléculaire d’une petite boîte et le montra à l’assistance.

-Voyer ce que fait cet engin d’apparence plutôt minable, c’est le prototype ; je l’ai appelé, le Couteau moléculaire ; il agit sur les tous métaux, uniquement, au niveau de la structure moléculaire de ceux-ci. Cet appareil va révolutionner les méthodes de fabrication. Mais passons de suite aux démonstration, assez de discours qui perdirent l’autre monde !

-Ça c’est bien vrai ! jeta d’une voix franche un homme dans l’assistance ! Tout habitué aurait pu aisément reconnaître celle d’un certain pêcheur nommé Justin, aux cheveux gris maintenant, mais toujours d’attaque. Rires diffus dans la foule.

Ainsi, James Whistler commença ses démonstrations successives pour la plus grande stupéfaction de son auditoire, stupéfaction grandissante à chaque expériences. Quand il eut fini, la salle entière lui fit une ovation fantastique. Il put enfin reprendre la parole et leur dit que dès qu’ils seraient en mesure d’en fabriquer en série, d’ici environ un bon mois, ils en recevront leur contingent, ainsi qu’une chaîne de montage avec tous les secrets de fabrication, tous seront ainsi à même d’accélérer la fabrication des matériels pour pouvoir passer à l’attaque largement en temps voulu.

Tous l’applaudirent très fort de nouveau quand, la foule se tourna d’un coup vers l’entrée de l’Agora, et un grand silence s’abattit subitement sur l’assistance.

Arrivaient vers eux en courant, deux patrouilleurs, le plus grand poussait un brancard AG devant lui ; ils enlevèrent leurs casques et tous reconnurent de suite, Alexandra et Claude, de la station Girelles ; ce dernier resta au pied du podium avec la civière sur lequel était étendu un homme aux cheveux blancs, recouvert d’une couverture de survie métallisée ; Alexandra, monta les marches par deux et alla directement et d’autorité au micro et s’écria d’une voix forte et tendue.

-Nous sommes venus directement ici sans passer par Girelles, pour ne pas perdre de temps, car sachant que vous tous, nos frères Akadis y étiez, et que peut-être vous avez un médecin avec vous, est-ce le cas ? Elle appostropha Ruppert, qu’elle connaissait bien.

-Malheureusement non, ma soeur, pourquoi ? lui demanda-t-il.

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-Voyez tous sur cette civière ce vieil homme très malade, je le crains...C’est notre inestimable guerrier, Marcellin, s’écria-t-elle.

La foule fut parcourue d’une onde d’émotion, puis des rangs au-dessus des visiteurs Akadis, se leva la médic locale, Josiane, accompagnée de François, un de ses collègues ; ils se frayèrent rapidement un chemin puis arrivèrent au pied du podium.

Alexandra redescendit, prit une main du malade dans les siennes et lui parla doucement.

-Marcellin, lui dit-elle, nous sommes arrivés dans la station Bertrand où, comme tu peux le voir nous sommes au milieu d’une grande réunion ; regarde ces milliers de guerriers, Marcellin...Voilà nos médics qui vont te soigner et te guérir, n’aie aucune crainte, d’accord ?

Elle lui présenta la médic. -Dis-leur ce que tu ressens, depuis quand et comme c’est arrivé. Du haut du podium, Ruppert les interpela. -Sache, Marcellin, et vous deux ses sauveurs, que la date de l’attaque contre les

Zanko-Khuigs est enfin décidée ; ce grand jour historique aura lieu le dimanche 1er mai 2400 ! Grâce à toi Marcellin, valeureux guerrier. Mais place aux médics qui vont te remettre sur pied.

Marcellin pleura à cette nouvelle fantastique, puis il se concentra, il était calme mais très faible ; il expliqua aux médics qu’il ne souffrait pas, seule une grande faiblesse l’avait prise un jour au réveil six jours avant, il avait eut froid toute la nuit et s’était réveillé fievreux, il toussait et...c’est tout ce qu’il trouvait à expliquer, sauf qu’il ne tenait plus debout, et qu’il valait mieux ne pas perdre de temps avec sa vieille carcasse, qu’ils avaient autres choses de bien plus important à faire que de perdre leur temps avec un si vieil homme...

Mais personne n’écoutait ses délires. Mais, dit-il encore, il faut qu’il soit revenu mort ou vif dans sa chambre avant la fin du neuvième jour suivant, pour que son absence ne soit pas l’objet d’un moindre soupçon de la part des gardes, car ils viendront automatiquement chercher son cadavre, ce qui est la routine après 15 jours d’absence de quiconque, sans chercher à en savoir de plus.

Les deux médics, sans plus écouter ses divagations l’amenèrent dare-dare à l’hôpital. Ils le lavèrent dans un bain bien chaud, puis le massèrent sur tout le corps avec de l’huile d’olive et pour finir lui firent revêtir un pyjama molletonné ; puis vint alors seulement les potions et remontants maison.

Ils lui firent ingurgiter de force un grand verre contenant le jus de trois grosses oranges additionné de celui de quatre citrons verts ramenés par les Akadis, le tout additionné de beaucoup de miel, véritable mélasse qui devait le remettre rapidement sur pied. L’illustre malade avala ensuite une forte décoction d’écorce de saule ; la-dessus, ils lui firent boire une délicieuse boisson parfumée à la pêche, le couvrirent chaudement et, la panse ainsi bien remplie, ce cher Marcellin sombra dans les bras de Morphée pour plusieurs heures d’affilées.

Pendant ce temps dans l’Agora, la discussion concernant Marcellin était l’objet

d’une stratégie minutieuse et des plus compliquée, car ils avaient décidé d’un

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commun accord que Marcellin ne retournerait plus jamais dans son antre sordide ; il avait fait cent fois son travail et on ne pouvait décemment l’y laisser retourner, cela aurait été un crime sordide, tout simplement. Mais alors, un obstacle subsistait, à savoir : comment faire pour que sa disparition ne déclenche pas de suspicion parmi la sécurité des Zanko-Khuigs ?

Réponse unanime et seule évidente, trouvée à l’instant par ces chasseurs hors pair : y déposer un cadavre lui ressemblant suffisamment, revêtu de ses hardes, avec une imitation de son tatouage autour du cou ! Evident mais pas simple, car où dégoter un cadavre assez frais lui ressemblant, le tout en à peine huit jours.

Le Conseil des sages décida d’envoyer illico des perceurs visiter toutes les stations, leur exposant ces faits ; et qu’ils fassent au mieux pour leur fournir un cadavre dans ces normes et dans les temps ; pour cela, l’un d’eux courut à l’hôpital où il fit, avec l’aide des médics, des photos du visage de l’intéressé, ainsi que du tatouage sur plusieurs faces autour du cou. Josiane, la médic, prit même son mètre de couturière et méticuleusement en mesura la hauteur ainsi que la longueur des séquences se répétant tout autour du cou ; elle nota scrupuleusement ces mesures sur un carnet, déchira la page et envoya un infirmier l’apporter à Georges ; ils dupliquèrent les photos puis, une dizaine de perceurs prirent les airs dans cette nuit glaciale en direction des nombreuses stations éparpillées sur ces vastes territoires.

La médic, Josiane, en Femme experte des choses de la vie, égale à sa légendaire attention coutumière des choses les plus diverses et d’apparences insignifiantes, avait, à son avis, suite à une longue pratique de leurs Hommes, guerriers impétueux et de leur sempiternelle manie de pousser toujours de l’avant sans suffisamment se soucier d’assurer leurs arrières, et avant qu’il ne soit trop tard, mis de côté dans un sac étanche, les hardes sinistres de ce pauvre homme.

Revenant à Bertrand après cinq jours d’absence, quiconque aurait alors vu le

célèbre Marcellin en serait resté sur le flanc. Après une thérapie intensive, le repos complet, une alimentation hyper riche, en fait, ils le gavèrent comme une oie, et beaucoup de sommeil ; le cher homme, aux yeux de tous, s’était considérablement remplumé grâce aux soins attentifs et inflexibles des médics, avec à leur tête, Josiane, la médic en chef qui officiait sur son éffectif, ne laissant personne, médics aussi bien que malades, outrepasser ses directives dictatoriales, mais réputées super efficaces, ce dont il importait en premier.

Mais il fallait reconnaître l’efficience de son art car, personne à son arrivée ne donnait cher de la peau de ce pauvre Marcellin, qui était dans le coeur de tous un des maître-d’oeuvres de la victoire. En deux mots, il était devenu le chouchou de la station Bertrand et...ce grand stratège profitait alors largement de son aura, sans toutefois, fallait être juste, en abuser...de trop.

Alexandra qui, revenant plusieurs jours après à la station, s’étant promise de le récompenser d’une nuit d’amour, découvrit suffoquée que ce coquin de Marcellin était devenu la coqueluche, le sujet de l’attention érotico-passionnée de diverses compagnes de cette station, et entre autres, il eut le privilège vu son

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âge hors normes pour la chose, de passer deux nuits avec Diane, une splendide et chaude et dangereuse blonde, l’Aphrodite même de la station qui, dit-elle à son entourage, subjuguée par la vigueur et surtout le retard d’affection de ce cher Marcellin, lui réserva deux jours pleins de ses chaudes faveurs ; ce qui manqua de peu de renvoyer l’intéressé à l’hôpital, à la grande protestation de Josiane, qui connaissait, pour être bien placée, les grands pouvoirs de destruction de la fameuse et brûlante Aphrodite...

Le Marcellin en question, lui, était copieusement gavé des meilleures victuailles, meilleurs soins et thérapies de la part des médics. Ils lui avaient fait revêtir une combinaison à ambiance contrôlée et, comme il fit parti d’emblée du Grand Conseil des Sages, il eut droit à revêtir la grande toge blanche des élus ; un macaron côté coeur sur la poitrine, représentant une magnifique vue de Gaïa.

S’ils tenaient tous à maintenir un lien sacré avec le passé de leur race, cela le fut uniquement en l’unique référence honorable envers leurs lointains aïeux, ces terribles Gaulois qui du fond de la grande Histoire des civilisations marquèrent durablement ces temps lointains et multi-millénaires de leur présence irréfutable, incontournable et civilisatrice. Ces toges blanches des druides, leurs sages.

Fantastique épopée des Gaulois qui commence deux à trois millénaires avant la

dernière ère ; des peuples de ceux-ci allant jusqu’en Afrique, en Asie et dans toute l’Europe d’avant la lettre, y imposant leurs droits et coutumes, même chez les grecs et les romains. Ils envahirent les grecs plus de trois siècles avant l’ère dite moderne, et bien avant et par deux fois les territoires d’avant les romains.

Ces Gallis qui regroupaient diverses nations, envahirent ces territoires jusqu’au Tibre, et en l’an -364 battirent et expulsèrent les habitants des lieux, les Sicules, des siècles avant les propres Ètrusques, qui bien plus tard leur reconquirent ces territoires. Ces derniers furent à nouveau chassés par de nouvelles peuples Gallis, et pour finir, ces mêmes Gallis faillirent anéantir Rome qu’ils assiégèrent sept mois durant, les Romains s’étant retranchés dans le Capitole. Ces derniers rachetèrent leur liberté sous une très forte rançon.

Au final, tout un chacun connait la fin de l’histoire, à savoir que l’hégémonie aussi brutale et sanglante de ces derniers, les Romains, gagnèrent la partie, alors qu’ils se comportaient ni plus ni moins que comme les hordes barbares comme tous leurs voisins. Ce que les historiens vendus à une Histoire officielle partisane et systématiquement falsifiée durant les deux mille ans suivants, cachèrent toujours aux peuples occidentaux, nos pères...aveugles et stupides, fallait-il qu’ils le soient devenus pour ainsi croire ces traîtres et infâmes.

Il faut pourtant savoir que les Gaulois étaient alors si puissants et redoutés, à un tel point que lors des déplacements de ces tribus Gauloises allant vers le Sud, vers l’Est, vers l’Asie, pour trouver d’autres territoires à leur expansion, les peuplades romaines et barbares (d’avant la lettre) s’enfuyaient de terreur à leur vue, s’écriant : Galli ! Galli ! Telle est pourtant la véritable et magnifique Histoire de nos ancêtres Gaulois, à laquelle ce livre ne suffirait pas. Histoire aux mille faits les uns plus riches que les autres, témoignages d’un passé magnifique de puissance et honneurs guerriers ; si loin de ces dernières générations disparues

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dans un avilissement aussi abject, qu’il semble concerner une autre planète plutôt que ces derniers rebus d’humanité que furent les derniers hommes à sombrer dans l’oubli.

Ces gens du dernier monde disparu, en totale déliquescence organisée depuis deux millénaires, ne surent jamais rien de ces faits de leurs propres ancêtres, leur propre civilisation rigoureusement authentique pourtant, la religion orientale ayant supplanté, occulté leur culture propre. Elle imposa la leur, insidieuse et esclavagiste, déguisée sous de mièvres paroles pour détourner les esprits occidentaux alors abâtardis, de la grandeur de leur ancienne civilisation guerrière pourtant si puissante et respectée alors de tous les peuples les plus civilisés d’alors, ni plus ni moins que ces fameux Gaulois, Germains et Nordiques, à l’origine, civilisateurs aussi et avant les Grecs et Romains de ce Monde présent.

Ce monde d’alors d’il y a trois, quatre à cinq mille ans et plus, était de barbaries, tous ces peuples se valaient en ce domaine, absolument tous.

Qui pourrait croire un seul instant que les récents disparus dans le déshonneur et dans la fange venaient de tels peuples guerriers ? C’est absolument impossible tant ils étaient lâches et veules ! La culture allogène, de par sa conception initialement prédatrice, réalisa alors l’exploit impensable de détourner ces peuples à un tel point de leur propre culture, qu’ils leur inculquèrent le dégoût de soi, de tout ce qui les rattachait à leurs valeurs vitales, à leur racines profondément occidentales plongées dans la nuit des temps...

Ils rejetèrent alors tout ce qui les unissait ; ainsi, impensable folie suicidaire, insulte ignominieuse à leurs vaillants ancêtres, ils se mirent à adorer l’étranger, d’où le résultat final inéluctable. Ainsi, ô faiblesse coupable, vergogne insoutenable, ils écoutèrent alors le chant fatal et sirupeux des sirènes mortifères qui les annihila jusqu’au fin fond de leurs âmes corrompues. Ainsi, indignes de la Vie sacrée, ils furent détruits, selon la grande loi immémoriale de l’univers qui affirme que seuls méritent de vivre, eux seuls perdurent, les êtres forts et honorables, respectueux et protecteurs de leur Vie et de celles des leurs.

Des empires puissants et orgueilleux vécurent, passèrent un instant sur la scène de l’Histoire : Egyptiens, Romains, Anglais, Français...et combiens d’autres oubliés dans la nuit des temps ; l’actuel vestige des Zanko-Khuigs suit le même chemin, l’heure à sonné pour eux de payer leurs infamies de leurs existences.

Quand on eu dit au bout de quatre jours à Marcellin qu’il ne repartirait pas et

resterait définitivement avec eux tous, sur l’instant il se révolta contre cette atteinte à sa volonté de devoir aider à détruire l’ennemi mais, Georges, lors d’une entrevue en particulier dans son bureau, sut lui faire entendre raison.

-Dis-moi Marcellin, toi mon ami, mieux, mon frère même, tu sais pourtant bien maintenant combien nous tous te portons en haute estime, t’aimons.

-Oh oui ! jamais je n’aurai rêvé trouver une telle ambiance d’affection et de générosité, c’est certain.

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-Alors, qu’irais-tu faire là-bas de plus que tu n’aies déjà fait ? tu sais très bien que tu nous a tout révélé en ce qui concerne les Zanko-Khuigs, alors, pourquoi aller risquer d’y laisser ta Vie, surtout pour rien qui n’en vale la peine.

-Je...je ne sais trop bien pourquoi en fait, c’est vrai ; surtout que maintenant je suis si heureux ici, comme jamais je n’aurai même jamais osé l’espérer.

-Ah ! tu vois, tu avoues, alors puisque tu es si bien avec nous, reste ! -Mais...ils vont s’apercevoir de ma disparition d’ici trois ou quatre jours

maintenant et...vous n’avez pas trouvé de cadavre pour me remplacer, et c’est grave peut-être, voilà pourquoi il faut que j’y retourne.

-Cadavre ou pas, tu resteras ici, un point c’est tout. C’est un ordre de tous tes nouveaux frères et soeurs maintenant, pas un seul d’entre eux ni encore moins aucune des belles ne te laisseront repartir sans déclencher une révolte. Il faut te faire à cette idée, mon cher Marcellin, que tu es devenu la coqueluche de tous, et en particulier, me suis-je laissé dire, le président sourit affectueusement, de certaines de ces dames qui te vouent une passion...débordante, disons ; alors, sérieusement Marcellin, aurais-tu le courage de décevoir ces charmantes drôlesses ?

-Vu sous cet angle, je t’avoue Georges que je n’en ai pas le courage, rien que l’idée de quitter ce paradis, j’en tremble de frayeur, voilà la vérité vraie mais, s’il fallait n’écouter que ses sentiments affectifs, où irions-nous ?

-Marcellin, c’est dit, tu restes donc dans ce paradis qui est désormais aussi le tien, le sujet est clos ! Et en ce qui concerne l’ennemi, car il nous reste encore quatre jours ; l’ennemi sera, vu son esprit de supériorité et suffisance exacerbée, incapable d’imaginer une seule seconde de l’existence d’une force s’apprêtant à les détruire ; cela risque juste de compliquer leur mesures de sécurité pendant un certain temps, mais rien de grave à mon avis...Si cela arrive, nous aviserons.

Donc c’est dit, te voilà membre d’honneur de notre Grand Conseil des Sages, je tenais à te le faire savoir officiellement, de la décision commune de tous ses membres qui tiennent à te recevoir parmi eux en tant que stratège concernant ce repaire de l’ennemi d’où tu viens ; entendu, mon cher collègue ? Nous serons de ce fait historique, le seul Conseil des sages composé de treize membres.

-Moi, parmi le conseil des sages ? mais...je ne sais si je peux accept... Le président lui coupa la parole sur un ton ferme, autoritaire. -Personne n’a le droit de refuser un si grand honneur, te voilà bombardé Sage

d’entre les sages ; tu nous a prouvé tes hautes capacités et grande valeur morale dès le premier jour où nous vîmes cette vidéo qui bouleversa profondément les milliers des notres, et qui ne l’oublieront jamais, soit en certain.

Marcellin, levons-nous, et donnons-nous l’accolade. Georges fit le tour de son bureau et serra contre lui avec émotion ce vieil

Homme de grand honneur, et pourtant bien plus jeune et plus fragile que lui, et lui dit.

-Marcellin, je suis fier de te recevoir parmi nous, c’est un honneur pour nous tous de recevoir un grand guerrier tel que toi ; sache que dorénavant tu fais parti intégralement de la race des vainqueurs, cette Humanité blanche et sacrée ; tous te seront dévoués jusqu’à ton dernier souffle.

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Marcellin, tu es maintenant un Homme libre ! Marcellin tremblait d’émotion, il s’essuya rapidement les yeux du revers de sa

manche. Georges alla vers un coffre dont il souleva le couvercle et en tira un paquet enveloppé dans un linge blanc immaculé, entouré d’un épais passement de couleurs dorée et argent, il le lui tendit.

-Voici, Marcellin, la toge te revenant, tu en auras quatre unités ; enlève je te prie celle que tu portes jusqu’alors et qui était symbolique. Comme tu as déjà pu t’en apercevoir depuis ton arrivée parmi nous, ces toges sont seules réservées aux seuls membres du conseil. Je te prie de la passer séance tenante.

Le nouveau conseillé, ravi, défit rapidement le cordon, déroula le linge et tira du paquet une magnifique toge faite dans un tissu d’un blanc éclatant, il enleva rapidement celle qu’il portait puis enfila la nouvelle, et fut surpris qu’elle lui aille aussi parfaitement ; puis il boucla le ceinturon en cuir, lequel comportait l’étui d’une longue dague au manche richement ouvragé.

-Ne sois pas surpris qu’elle t’aille si bien, c’est Josiane, la médic, qui prit tes mensurations lors de ton sommeil réparateur.

Ils s’embrassèrent encore une fois, puis tous deux rires de ces petits secrets qui sont souvent sous-jacents à toutes actions humaines, et pourtant sans lesquels rien de déterminant ne se réaliserait.

-Cette dague, Marcellin, est la marque de notre civilisation, pour rappeler qu’elle naîtra seulement du sang de nos ennemis, sang que nous ferons couler à flot, tel est notre serment. Cette arme n’est pas honorifique mais bien réelle, et tu devras t’en servir et tuer de ta main quiconque tenterait de te détourner de ce noble devoir. Sache aussi, maintenant que tu es des notres, que cet ornement vestimentaire fut imposé aux membres désignés du Conseil ; ce sans candidature de la part des intéressés, jamais, et c’est important de le souligner.

Les responsables désignés pour une haute charge ne postulent jamais, ils sont désignés par la majorité des habitants de chaque station qui, s’étant ainsi concertés et donnés des responsables et décideurs de leurs destinées, tiennent ainsi à les honorer de cette charge tout en les montrant ainsi distinctement aux yeux de tous, pour le pire et le meilleur qui peut alors résulter de leur décisions.

L’investiture étant volontairement aussi sans cérémonie particulière, égale à tout autre activité ; telle est la seule et vraie justice. L’absolue égalité devant les devoirs et responsabilités ; ce qui démontre une grande sagesse populaire retrouvée par instinct de survie, soit : ne pas laisser les responsables agir dans l’ombre, mais toujours à la grande lumière du jour, la seule porteuse de cette vérité éclatante, aveuglante et donc insoutenable aux traîtres et parjures éventuels ; engeance maudite jusqu’alors inconnue en nos phratries, sinon sous le risque d’une mort certaine, rapide et justicière.

Ainsi, mon cher et noble collègue entre nous tous, te voilà désigné Responsable, ce qui te donnera parmi les nombreux privilèges rattachés à la charge, celui de devoir te sacrifier pour le bien commun, s’il le fallait, ainsi que du devoir sacré de l’obligation de rendre des comptes de tes actes ; mais à part ces bricoles, je te rassure tout de suite, c’est pas fatigant, s’esclaffa le président, hilare.

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Tous deux éclatèrent de rire joyeusement, le nouveau conseillé, incrédule, admirant sa toge resplendissante de lumière céleste, lui sembla-t-il...

Le Conseiller d’Akadi, Ruppert Burrows, se réunit avec les stratèges Franki, ici

même à Bertrand. -Ainsi donc, dit-il, nous voici à l’avant-veille de ce grand jour qu’espérèrent des

centaines de milliers de nos anciens, espoir dans lequel ils y sacrifièrent leurs vies entières ; fasse que nous soyons tous dignes d’eux. Malgré ce changement significatif de la vitesse de fabrication, d’ici plus ou moins un mois, puisque comme dit précédemment vous allez recevoir une première livraison de ce fameux couteau moléculaire, avec une chaîne de montage inclue...presque rien de la stratégie initiale d’attaque retenue n’a changé, à moins d’une dernière information déterminante, et que voici.

En ce qui concerne l’Ostrali et les derniers relevés maintenant réalistes du nombre d’ennemis sur place, il s’est révélé à la grande surprise de nos nombreuses équipes de surveillance, que ces salopards y sont nettement moins nombreux qu’estimé initialement. Et même plus surprenant, leurs effectifs sur place ne sont pas réguliers et changent sans arret. Pour dire vrai, il semble pour acquis que ceux qui vont là-bas par roulements rapides seraient les plus bas dans l’échelle sociale de leurs communautés, les plus pauvres en fait. C’est assez comique qu’ils conservent leur ancien culte de la puissance financière comme valeur sociale déterminante ; ainsi leurs plus fauchés y sont corvéables à merci.

Nous les y estimons à une moyenne de neuf cent à mille individus, mais les nuits, leur antre brille de mille feux, ce qui nous avait induit en erreur ; ce qui prouve encore une fois de plus qu’il ne faut surtout pas se fier aux apparences.

J’aimerai poser une question à notre nouvel et honorable pair, Marcellin, dont je profite de l’occasion pour souhaiter la bienvenue aux noms de tous les miens, ainsi que mes meilleurs voeux d’un prompt rétablissement.

Celui-ci tout fier se gonfla de sa nouvelle importance et lui répondit. -Honnêtement, Ruppert, je pense avoir tout dit de ce que je savais. -Certainement, et personne ici n’en doute, mon frère, mais...nous avons lu

méticuleusement, et dix fois plutôt qu’une les rapports de la fin du dernier siècle, rapports écrits par le majordome d’alors, un certain Urbain ; ainsi, il ressort de ses dires qu’à l’époque du changement du siècle, leur roi d’alors vint aussi dans cette même ville, et les festivités qu’ils firent attirèrent de nombreux autres Zanko-Khuigs, dont ceux venant d’Australie, et qu’ils furent obligés de les loger dans des hôtels jusqu’alors inutilisés ; hôtels situés principalement vers le centre ville ; et il écrit bien noir sur blanc que cette arrivée, par lui classée d’imprévue, eut lieu environ une douzaine de jours avant les festivités.

Ma question est donc la suivante, Marcellin, existe-il des hôtels de second ordre qui pourraient loger une éventuelle affluence de voyageurs imprévus ?

-Oui, bien sûr, il y en a une bonne dizaine environ, je peux vous les marquer sur la carte du début, si vous l’avez.

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-Pas de problème pour la carte, lui répondit Georges, en la lui tendant avec un crayon de couleur verte ; saurais-tu reconnaître et marquer ces hôtels ?

Marcellin, sans répondre la prit et la déplia, il l’étudia un instant puis sans hésiter entoura d’un cercle vert une dizaine de points puis, hésitant encore un peu, il en entoura un onzième et marqua un point d’interrogation à côté.

-Je suis moins sûr pour ce dernier, dit-il en tapotant le point sur la carte avec son crayon, mais il pourrait très bien faire l’affaire pour, disons, les plus fauchés de ces pourris.

Rire général de l’assemblée... -Parfait ainsi, Marcellin, et à combien estimes-tu grosso modo le nombre de

lits que représentent cette dizaine d’hôtels ? -Oh ! disons...il se concentra...certainement beaucoup plus que les effectifs

moyens d’Ostrali, sans l’ombre d’un doute ! -Parfait ! parfait ! dit un Ruppert fort satisfait, ainsi, suite aux confirmations de

l’existence de ces hôtels, je suis en mesure de pouvoir affirmer à 98 %, que les résultats de nos analyses indiquent que pour ces festivités de début de siècle, la plupart sinon tous leurs effectifs d’Australie, doivent quitter ces lieux en cette occasion particulière, ce plusieurs jours avant pour festoyer avec leur congénères des autres continents.

Ils ne viennent sans doute pas tous en cet endroit en ces cas-là, mais la venue cette année de leur roi peut fort bien les y regrouper tous ou presque ; puisque selon leur tradition, synonyme d’abjection, les faibles se doivent toujours de venir s’incliner, s’avilir devant le ou les puissants du jour ; ce qui fut le cas pour tous les peuples au cours de ces derniers deux millénaires d’avant la destruction de l’humanité qui, sous des couverts de semblants de démocraties, vécurent sous une perpétuelle chape de plomb de par les censures innombrables enfermant les esprits dans une éternelle nuit...

Ainsi, et malgré les fausses apparences de progrès récupéré dans sa quasi intégralité par les forces occultes détenant le vrai pouvoir, jusqu’aux derniers de ces pauvres innocents, coupables de ne vouloir pas voir le sordide de leurs propres conditions, et qui finirent comme de juste cette longue tragédie par leur propre anéantissement programmé de longue date par leurs propres chantres qui leurs chantaient les louanges du métissage dans la joie universelle, et dans l’intérêt de tous...Vastes troupeaux de cigales en butte et sous le despotisme insidieux d’une tradition clanique calculatrice et intrinsèquement prédatrice.

En de tels cas le résultat est impérativement le même sous quelques cieux que cela soit, la Vie dans cet univers n’est que force, lutte, honneur et courage, et toute entité ne respectant par ces préceptes élémentaires est vouée à sa disparition à plus ou moins brève échéance ; ce qui fut le cas une fois de plus, en cette circonstance de cette humanité dégénérée qui quitta rapidement la scène de cette galaxie, car à l’échelle du Cosmos, deux millénaire de temps terrestre ne sont que quelques battements d’ailes d’un papillon...Rien qu’une humanité de plus de disparue somme toute, ce qui n’empêche en rien le parcours du temps des autres se montrant viables.

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-Que nous proposes-tu alors, demanda Georges, si je comprends bien, il serait ainsi vain d’envoyer nos troupes en Ostrali, si ces fils de putes viennent tous chez nous, c’est bien ça ?

-Oui, Georges, tu as parfaitement bien pigé le topo, toujours l’esprit vif à ce que je vois !

-A mon avis, le jour ou le fameux esprit se fait la malle, il vaut mieux se faire libérer plutôt que de continuer d’encombrer le plancher des vaches, ne penses-tu pas aussi ?

-Yes ! Oh pardon ! pour ce mot intempestif en ces lieux si intransigeants avec la morale, je ne connaissais pas l’expression du plancher des vaches, mais c’est fort bien imagé.

-Ok ! et n’aie pas de souci à propos de moralité, alors, qu’en serait-il de la stratégie nouvelle ?

-Nous pensons qu’environ un mois avant la date fatidique, pour eux j’entends, rires de tous, nous doublerons les effectifs d’espionnage de ce continent Sud pour tenter de déceler au plus tôt leurs intentions de voyager.

-Et s’ils ne partent pas, demanda la conseillère Clarisse, de la station Girelles, que fait-on, et quand ?

-Bonne question, mais...pardonne-moi, je ne suis pas certain de bien me souvenir de ton nom ?

-Clarisse, je suis de la station Girelles, on se connait déjà un peu, mais il y a si longtemps, je comprends ton oubli.

-C’est vrai qu’à chaque fois que je viens, et pas assez souvent à mon goût, de nouveaux visages et nouveaux noms viennent embrouiller ma mémoire qui n’est malheureusemnt plus toute neuve.

-Sais-tu, Ruppert, intervint alors Georges, fort à propos, combien ton cerveau perd de neurones journellement ?

-HA NON ! Ça suffit ! Ce fut un cri unanime de tous les représentants Franki à cette réunion. Tu vas pas nous refaire le coup de tes foutus neurones, Georges, ça non ! s’écria sérieux, un grand gars aux cheveux blancs.

Ruppert les regarda les uns après les autres, ahuri, sidéré d’une telle protestation générale à l’encontre de son vieil ami Georges, qu’il considérait pourtant comme un Homme sensé et fort équilibré. Ce fut une autre conseillère qui l’avisa, Germaine, qui lui dit en aparté, mi-sérieuse, mi-souriante.

-Ruppert, un conseil si tu permets : ne prononce jamais le mot de neurone quand tu es en tête-à-tête avec notre illustre Georges, car alors il va t’embarquer dans une histoire à dormir debout...C’est sa marotte depuis des lustres, alors te voilà prévenu.

Devant l’air surpris de l’Akadi, tous éclatèrent de rire. Puis ce fut Clarisse qui, ayant pitié de leur visiteur, lui révéla en deux mots la signification de ce mystère, sous le regard apparemment indifférent de Georges...

-Mon cher Ruppert, pour ne pas te laisser sur ta soif de vérité, voici l’histoire en quelques mots : Georges, notre illustre compagnon que voici, elle entoura affectueusement la taille de ce dernier de son bras, ayant un jour, lors de ses nombreuses et studieuses lectures, découvert la mort de nos neurones et,

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passionné par ce drame de la vie pourtant authentique, en fit tout une histoire qu’il sert jusqu’à plus soif à quiconque a le malheur de le suivre dans son délire.

Ainsi donc, et pour clore le sujet, sache qu’à ton âge déjà certain, pardonne-moi ma franchise, tes neurones meurent donc par paquets d’environ cent mille par jour, mais rassure-toi, cela sur plus de 150 millards d’unité au départ ; il n’y a donc pas de quoi fouetter un chat, ni personne d’autre du reste, voilà tout !

Ruppert se mit à rire à en pleurer, suivi de toute l’assemblée...y compris ce cher Georges.

-Maintenant je comprends mieux mes trous de mémoire, merci bien, Clarisse, lui dit un Ruppert reprenant son souffle, sauf toutefois une chose étrange, et peut-être sauras-tu me l’expliquer ; pourquoi m’arrive-t-il fréquemment d’oublier un rendez-vous que je sais qu’il sera ennuyeux, mais jamais je n’oublie celui avec une jolie personne de ton sexe. C’est normal, docteur ?

Tous les participants de rire de bon coeur. -Je vois avec plaisir, Ruppert, lui répondit-elle en souriant, que tu es de la race

des galants, merci pour nous toutes ; et surtout, continue ainsi, il n’y a pas de contre indication, tu peux même en abuser.

Tous l’applaudirent pour cette charmante tournure de sa réponse. -Bien, tout cela est bien gentil, mais où en sommes-nous de notre stratégie

dans tout ça ? Demanda Félix, un conseillé d’une autre station. -Tu as raison Félix, de nous ramener sur le bon chemin, merci, lui dit un

Georges légèrement énervé. Allez donc savoir pourquoi... Ruppert, redevenu alors sérieux continua son exposé. -Nous bénéficions de plus d’un an pour parfaire cette attaque, sans se presser,

calmement, méticuleusement, ainsi chacun aura le temps de visualiser clairement son secteur d’action. Que chacun de nos guerriers puisse imaginer avec délice tous les pourris qu’il pourra égorger après leurs avoir infligé mille souffrances ; ce sont de tels petits détails semblables qui comptent dans la préparation d’une attaque ; que chacun s’y transpose en réel, rien de tel pour une réussite totale, de plus, cela amène et entretient la joie sauvage dans le coeur de l’attaquant, donc c’est tout bénéfice.

-Bientôt, dit le conseiller Casimir en rigolant, il y aura plus d’attaquants que de gibiers.

-C’est la même chose chez nous, dit Ruppert en riant, mais vaut mieux ainsi que l’inverse, ainsi nous sommes certain de les anéantir jusqu’au dernier rat, et c’est parfait comme cela. Nous ne ferons pas un duel d’escrime mais bien un gigantesque massacre programmé de la façon la plus fourbe et cruelle possible ; nous ne ferons ainsi que leur renvoyer, de plein droit, la monnaie de leur épouvantable génocide, de la même fourberie, mais augmenté des très lourds intérêts de leur souffrance qui devra être à la hauteur de leur dette astronomique envers notre race...Je veux...pardon, nous voulons tous que cette galaxie entière entende leurs hurlements de frayeur et de souffrance, est-ce d’accord ?

Un immense hurlement de joie sauvage lui répondit, puis ils se turent rapidement.

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-Le plus difficile va être encore de devoir patienter tous ces longs mois, cette éternelle attente est épuisante et démoralisante, dit encore Casimir.

-Nous le savons tous que trop bien, dit Georges, seule l’idée de toucher enfin au but doit nous soutenir ; ne pas faiblir en aucune façon, pour le moins pour honorer dignement les souffrances et privations de nos anciens.

Ruppert réclama que tous redoublent d’attention. -Mes amis, il y a plusieurs choses extrèmement importantes, des données que

nous connaissons depuis pas mal de temps déjà et qu’il est plus que grand temps que vous en soyez avisés. Avant tout, pour les actions classiques, sachez que nous avons décidé de conserver toutes les mesures de sécurité en cours en activité, car nous ne savons pas avec certitude si l’ennemi n’a pas des moyens occultes de détections et d’interventions. Concernant donc ces données secrêtes, sachez et soyez en sûr que si nous ne vous en avisâmes plus tôt, c’était dans le seul souci de sécurité maximum.

Ainsi donc, ces données se décomposent en plusieurs points. Premièrement : James, le génial inventeur de ce fabuleux couteau moléculaire,

écoutez bien car c’est ahurissant, mais par recoupements ultérieurs à ses propres déclarations, nous semblent vraies. James, donc, nous a certifié qu’il avait reçu la...révélation de cette technologie, une nuit durant un rêve ; qu’il vit en réel comme sur une vidéo toutes les informations nécessaires à la réalisation de cet outil, et qu’il vit cet outil en fonctionnement et que, pour finir, une voix, aux intonations amicales, lui adjoignit clairement dans son esprit, qu’il aille de suite à son labo pour mettre ces données en ordre dans son ordinateur et...cette voix termina son propos sur ces paroles lourdes de conséquences, lui disant, je le cite : « Bonne chance, à vous tous » !

Tous le regardaient, incrédules, sidérés, muets de surprises de tels événements. -Il va sans dire que cette invention, des dires mêmes de tous nos chercheurs,

était hors de leurs connaissances du moment, et même de très loin, ce qui du fait corrobore les dires de James. D’autre part, vous vous souvenez certainement de la demande que nous vous fîmes par le passé, d’aller contrôler l’état des lieux de certains anciens sites militaires sur votre territoire, ainsi que d’autres ?

Tous d’opiner de la tête, pendus aux paroles de cet Akadi qui les laissait pantois.

-C’est là une deuxième donnée vitale, en corrélation directe avec la première, savons-nous maintenant nous aussi depuis peu. Chez nous aussi, nous allâmes contrôler nos anciens sites, il en ressortit, d’autant plus certainement que nos territoires regorgeaient de ces sites militaires que, alors que nous les crûmes en activité durant ces siècles passés, qu’en réalité ils étaient tous détruits, totalement détruits et apparemment depuis le début, ce qui était inexplicable ; jusqu’à ce que, lors de recherches plus poussées, nous constatâmes qu’en fait ils avaient étaient détruits, et de plus, toutes les sources nucléaires, mortelles pour notre futur, avaient disparu comme par enchantement, comme les quelques silos de chez vous ; sauf qu’en Akadi il y étaient des milliers ; idem des bateaux de guerre à propulsion et armements nucléaire, idem aussi pour l’ancienne Russie et leurs

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bases de la mer Arctique ; ce qui nous permet de penser logiquement qu’il en fut de même sur toute la planète, y compris ces fameuses centrales nucléaires pour produire de l’électricité ; et à savoir quoi d’autre encore.

Tout a disparu comme par magie ; il ne reste sur les sites de ces silos que des trous remplis des eaux de ruissellements et de pluies, la plupart maintenant abritent une vie aquatique salutaire. Ainsi donc, et c’est là cette grande révélation bouleversante, tout comme vous qui croyiez depuis toujours être sous la menace de forces de détections et d’interventions militaires des Zanko-Khuigs...

Nous avouons qu’il n’en est rien, et qu’il n’en fut rien durant tous ces siècles. Tous nos ancêtres et ce jusqu’à ce jour, vécurent, nous tous y compris, sous une peur imaginaire, une menace inexistante.

L’assemblée fut littéralement retournée d’entendre de tels propos...d’avoir vécu ainsi si difficilement pour rien était difficile d’encaisser, ce fut un choc violent pour tous.

-Mes amis, du calme, comprenez bien que nous n’avons eu la confirmation de ces données que seulement il y a quelques jours, depuis la révélation de James, car...cela signifit aussi, et vous en saurez alors autant que nous tous Akadis, qu’une puissance étrangère à notre civilisation réside aussi sur cette planète !

Un murmure immense engloba un instant cette foule tétanisée... -En deux mots, nous pensons qu’il s’agit de ce que l’on nomme

communément, des extraterrestres ; mais où résident-ils ? mystère ; l’unique chose de positive est qu’ils semblent vouloir nous aider à débarrasser cette planète de la présence vérolée des Zanko-Khuigs ; nous avons donc décidé de ne point nous encombrer l’esprit de ces nouvelles données puisque de toute façon nous ne pouvons rien y faire, pour continuer de concentrer toutes nos énergies à massacrer nos ennemis. Qu’en pensez-vous, vous, Frankis ?

Ce fut dans un ensemble parfait qu’ils hurlèrent un OUI ! NOUS AUSSI ! un oui retentissant ; l’ambiance fut de suite à la fête, tous avaient retrouvé leur entrain coutumier.

L’Akadi leur fit signe qu’il voulait encore parler ; ils se calmèrent un peu par politesse mais on sentait nettement qu’ils en avaient assez de cette conférence, ils l’écoutèrent donc d’une oreille distraite.

-Je rajouterais seulement quelques mots ; James est persuadé que ces gens nous aident en nous donnant ces technologies qui sont utiles à notre reconquête mais, dit-il, c’est à nous seuls de gagner notre liberté ; ils ne feront pas un geste en notre faveur et, une fois débarrassé le plancher de nos ennemis qui semblent aussi leurs être insupportables, il y a de grandes chances pour qu’un jour nous les rencontrions...mais pour l’instant ce ne sont que des hypothèses.

-Allons donc crever la peau des Zanko-Khuigs, ça c’est une certitude, pour le reste nous verrons bien plus tard ! S’esclaffa, hilare, la conseillère Audrey, une septuagénaire toute de flamme, au regard brillant du guerrier sentant approcher l’heure du combat ; tous ses collègues de l’applaudir chaleureusement.

La séance était close.

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Peu de temps après cette grande conférence qui avait chamboulé leur vision de ce monde, Georges arriva dans son bureau sur le coup des 10:30 h et, n’ayant rien à faire de particulier, il s’adonna à son vice préféré et ouvrit ainsi un nouveau livre, traitant des OVNI (Objet Volant Non Identifié) ; document de l’ancien monde, parlant des extraterrestres. Il y avait trois autres livres sur son bureau, tous sur le même sujet. Il attaqua cette lecture avec une grande méfiance, doutant fort que les auteurs de ces ouvrages aient vu un seul de ces fameux appareils et encore moins leurs équipages allogènes. Il s’installa comme à son habitude pour lire confortablement : à la renverse dans son fauteuil fait d’une épaisse peau de cuir tendue sur une armature en acier inoxydable, et ses talons calés sur le rebord de son bureau, il attaqua résolument sa lecture, bien résolu à tous les lire pour se faire sa propre idée sur le sujet, ce comme à son habitude de vieux chasseur ne se fiant qu’à son pif...ce qui, preuve de grande efficience, lui permettait d’être toujours en vie.

Il n’eut pas le temps de tourner la première page que la porte s’ouvrit à la volée, c’était Josiane la médic, qui venait toute essoufflée d’avoir couru depuis son hôpital, lui apporter la dernière grande nouvelle que plus personne n’espérait. Georges surprit de son irruption intempestive, abaissa son livre et regarda la médic en face de lui, à laquelle il dit en souriant, sarcastique.

-Que t’arrive-t-il, ma belle, de courir de la sorte à ton âge ? serait-ce qu’un satyre voudrait te violer ?

-Malheureusement non, rit-elle, ah c’est malin ! Elle se laissa choir sur l’unique siège disponible pour récupérer son souffle. Je viens te chercher pour t’amener dare-dare dans mon antre.

-Pourquoi ? c’est toi qui as décidé de me violer ? -Georges, s’il te plaît, arrête tes conneries pour un moment, d’accord ? Viens

avec moi séance tenante, ça urge, et bouche cousue pour l’instant, c’est du sérieux ; pour le reste, si tu tiens à ce que je te viole, repasse me voir plus tard dans mon carré, d’accord, mon beau patrouilleur ?

-C’est gentil ça, il y a longtemps que l’on ne pas appelé ainsi. -Si tu restais moins avec tes bouquins et plus souvent avec les personnes de

mon genre, aussi... Ils partirent d’un pas ferme vers l’hôpital, et malgré qu’il insiste elle ne voulut

rien lui dire avant d’y être arrivés. Ils allèrent directement au bureau de la médic. Elle s’installa dans son fauteuil et son visiteur sur un petit siège qui de par son exiguïté ne se prêtait pas du tout à une longue entrevue, et tel en était bien l’objectif : décourager les raseurs !

-Bien, dit-elle, maintenant nous pouvons causer, personne n’entendra ce que nous allons dire ; tu décideras ensuite si ce sujet doit rester ignoré de certains, ou doit plutôt être mis à la connaissance générale, tu en seras seul juge, d’accord ?

-C’est si grave que ça ? -Grave ? non, pas du tout, délicat plutôt, tu vas comprendre en deux mots.

Figure-toi que nous venons de recevoir un patient particulier qui nous vient de la station Dugrenier ; il nous fut amené par un perceur qui est reparti illico. Cet

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Homme, tu le connais très bien, c’est leur vieux Donatien, comme l’appellent affectueusement les siens et...

-Oui, c’est certain que je le connais bien, nous avons chassé la belle ensemble, il fut un temps lointain, et alors, qu’arrive-t-il à ce cher vieux Donatien ? Puis-je le voir ?

-Oui, tu vas le voir, d’autant qu’il l’a demandé lui-même, il voulait te saluer avant de...elle hésita, puis se décida à lâcher le morceau ; en fait, Donatien étant déjà bien mal en point question santé, a décidé de demander à être libéré de suite pour que son corps remplace celui de Marcellin dans son antre !

Georges la regardait d’un regard fixe, figé par une émotion intense qui montait graduellement du fond de ses tripes et lui bloquait la gorge...il put enfin parler au bout d’un moment.

-Donatien, ce vieux brigand, c’est pourtant vrai qu’il a une forte ressemblance avec notre nouveau conseillé, et comme une andouille je n’avais jamais fait le rapprochement...mais lui l’a fait, cela ne m’étonne pas de lui, c’est un noble guerrier, fort et généreux...Josiane, amène-moi vers lui, s’il te plaît.

Ils partirent dans l’allée centrale partageant les six chambres alignées de chaque côté ; ils entrèrent dans la dernière sur la droite.

Donatien, qui était allité les reçu avec joie, il était véritablement un parfait sosie de Marcelin. Il s’écria en voyant son visiteur.

-Voilà enfin ce vieux bandit de Georges, Josiane, lui dit-il en lui prenant la main, tu ne sauras jamais le nombre incalculables de belles que nous avons sauté tous les deux.

Georges lui prit sa main droite et la serra avec tendresse, rajouta. -Et combien d’esclaves des plantations agricoles nous avons sauvés aussi,

n’est-ce pas mon vieux complice ? -Foutre oui, nous en avons sauvé notre compte, c’est bien vrai, et tant mieux,

nous ne devons ainsi rien à personne, pas vrai ? mon grand ami Georges. -Alors, vieux pote, que me raconte là cette médic, Josiane, mon amie ; tu

comptes nous quitter avec un plan spécial, paraît-il ? -Tout juste, mon collègue, et tu vas voir que cela est fort simple en vérité ; suis

bien mon raisonnement, que tu as de toujours jugé des plus sûr, d’accord ? -C’est certain, Donatien, j’ai toujours admiré la justesse et pertinence de tes

cogitations, ainsi donc ? -Je me suis donc pensé que comme la nature m’a donné une tête semblable à

celle de ce brave Marcellin, que le Cosmos le bénisse et, que par la force des choses, ladite nature réclame un sosie du dit Marcellin, ce qui pré-supposait une volonté sous-jacente d’en venir un jour à une action particulière, peut-être ? je ne puis ainsi faire autrement que d’offrir cette vieille carcasse, qui de toute façon n’irait guère loin maintenant ; ainsi, je fais d’une pierre deux coups.

1- Je me libère de ces os qui me donnent de plus en plus de tracas au point de ne pouvoir bientôt plus marcher.

2- Je sauve la mise et permet d’arnaquer ces pourris de Zanko-Khuigs ; mon seul regret sera de ne pas assister à cette grande victoire, pour le reste...j’ai fais largement ma part et peut donc partir l’esprit tranquille.

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-Donatien, lui dit Georges ému, je te reconnais bien là...toujours généreux et l’âme vaillante ; comme telle est ta décision, je vais bien entendu organiser la chose ; as-tu une ou plusieurs volontés particulières à exprimer ?

-Oui, je tiens à ce que Marcellin ne sache pas qui c’est qui le remplace, et encore moins que c’est un libéré pour l’occasion. Je ne veux pas que ce pauvre Homme qui a déjà tant souffert ne risque pas d’être pris de remords intempestifs, car il en serait bien capable ; je veux qu’il savoure chaque instant de sa liberté retrouvée et tant méritée, pour le peu qu’il lui reste à vivre ; qu’il sache simplement que son remplaçant fut une mort accidentelle dans une station éloignée, sans plus...Une sorte de cadeau du hasard, pas plus ; et c’est un peu ça en réalité, si je suis né avec sa tête, que je trouve au demeurant fort sympathique...alors...

-Grand merci pour lui, Donatien, lui dit Josiane, il est si heureux maintenant, que les forces du Cosmos prennent soin de ton âme. Donatien, tu es un grand Homme, comme me l’a dit Georges, merci mille fois, elle s’avança et se penchant sur sa couche, le serrant contre elle et l’embrassa sur les joues.

-Josiane, tu es bien gentille et fort jolie, ma belle, mais n’exagérons rien...je me suis toujours efforcé d’être un bon guerrier, sans plus, comme des milliers et des milliers d’autres avant moi le furent depuis ces presque quatre siècles de luttes acharnées.

-Donatien, as-tu d’autres demandes à exprimer ? -Oui, Georges, une seule encore, une faveur importante que je te demande

personnellement. Lorsque cela sera le moment de la grande, sauvage et furieuse curée générale pour exterminer cette race maudite, fais-moi l’insigne honneur de massacrer un de leur couple abject en mon nom propre. Tue-les au nom de Donatien...Tue-les avec toute ta hargne et ton envie de les massacrer que je sais égale à la mienne, ainsi je serai vengé, heureux et comblé. Merci par avance, mon frère.

-Entendu, je te donne ma parole d’honneur qu’il en sera fait selon ta volonté, et avec grand plaisir.

-Je sais, Georges, je te souhaite le plus grand bonheur quand tu les mettras en pièces, en charpie avec ton couteau.

-Et je tiens à ce que tu saches, Donatien, que ton amitié d’une vie entière dont tu m’as donné le privilège de m’honorer, comblera mon âme de bonheur jusqu’à mon dernier souffle, merci, mon fidèle ami.

-Tu vivras encore longtemps, Georges, je...je ne sais pourquoi mais je te vois accomplir encore de grandes choses pour le bonheur de tous...Oui, ton destin est marqué pour une immense réalisation ; reste fort, comme tu le fus toujours ; je t’accompagnerai dans cette course grandiose, du haut des étoiles, ne l’oublie pas, mon frère.

Voyant la forte émotion de Georges qui lui bloquait la gorge, Josiane s’avança. -Donatien, maintenant, je regretterai toujours de ne pas t’avoir connu avant ce

jour. Que désires-tu écouter comme type de musique, et que veux-tu voir comme genre de vidéo ? cela rend le passage beaucoup plus doux et agréable, je te le conseille, mon frère.

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-Ah ! tu vois comme c’est drôle, Josiane, pris dans cette action guerrière et posthume, je n’avais pas pensé à ce côté...confort ; mais voyons ça...il réfléchit un moment...Tiens ! avez-vous encore cette si fameuse et antique vidéo de la libération de ce si célèbre Ferdinand ?

-Je pense que oui, lui dit Georges surpris, on ne détruit jamais rien ; et pour la musique ?

-J’aime beaucoup l’opéra, les sopranos, contraltos, ténors, barytons...Des musiques et chants folkloriques des plus variés ; par exemple...Georges enregistrait discrêtement ses paroles ; cette musique Espingo, La Irmandad de las Estrellas, ces anciens chants envoûtants de ces femmes de la Galice, comme c’est beau, si tu savais Georges...Et toujours dans le même registre un peu, ces musiques avec guitares du compositeur Frances Iribarren, c’est vieux mais sublime. Les Chants des Femmes Bulgares, si éblouissant et émouvant, combien de fois j’ai pleuré d’entendre ces voix bouleversantes de ces Femmes simples ; les musiques de la Merdika du sud aussi, celle des indiens du Péru, Bolvi...du Brasi aussi, leur musique comme le Frevo, et bien sûr la Samba, particulièrement interprétée par cette chanteuse à la voix si profonde et sensuelle et qui m’émeut, Alcione, et Tania Alves aussi, avec sa sublime voix de gorge qui se dédouble et m’émeut, ô combien...Et puis tous les auteurs classiques.

Ha ! si cependant, j’aimerais fort entendre de J.S bach, son chef-d’oeuvre, sa fameuse Toccata et fugue en ré mineur mais, jouée dans une version éblouissante par Virgil Fox, sur le fameux orgue du Royal Albert Hall, ce malgré qu’il fut un Pritich...Et puis, puisque nous y sommes à me combler, n’est-ce pas, j’aimerais écouter cette musique particulièrement virile et qui m’enchante, celle de nos frères Germains, leurs marches militaires, ainsi que ces musiques follement gaies de leurs fêtes populaires, avec tambours et cuivres et flonlons dans des rythmes endiablés à en péter les carreaux, symboles mêmes de notre force et foi en l’avenir ; et puis, on ne saurait oublier un p’tit coup de musette frivole et insouciant, pour pas m’accuser de injustement renier les nôtres, mais j’ai de toujours préféré ce qui est noble et puissant, martial...Trop de délicicatesse, à mon avis, pourrait amener au relâchement spirituel fatal : un guerrier se doit de rester fort et avisé...Et pour le reste, vous voyez mes goûts maintenant, je vous fais confiance, mais qu’au moins j’écoute ces morceaux-là, merci bien, avec ça je serai comblé, merci Josiane d’y avoir pensé.

-Parfait, Donatien, lui répondit cette dernière, je vais t’envoyer notre chef cuisinière préférée à Georges et à moi, la mère Angèle, elle va te soigner aux petits oignons, promis, tu n’auras qu’à composer ton menu de midi avec elle, et ne te prive de rien surtout, c’est pour le compte de la maison, dit-elle en riant en se forçant.

-Impec, lui répondit alors Donatien, je vais alors en prendre pour plusieurs jours...c’est que j’ai de la route à faire jusqu’au Walhalla.

-Bien, Donatien, lui dit Georges, nous te laissons pour aller faire ces préparatifs, ta musique, la vidéo qui est soi-disant de toute beauté, à tout à l’heure, détents-toi, tout ira bien ; la médic l’embrassa sur la joue, puis ils quittèrent la chambre.

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Une fois sortis ils allèrent de nouveau dans le bureau de la médic ; ce fut Georges qui démarra, la voix sourde de son émotion..

-Josiane...le destin réserve de bien dures et étranges surprises...Je n’aurais jamais pensé qu’un jour ce soit moi qui organise la libération de Donatien, un de mes plus vieux et plus fidèle ami, ça non...

-Oui, Georges, j’en suis consciente ; heureusement que l’Homme ne connait pas son avenir...

-Mais bon, puisqu’il en est ainsi, d’après toi, vaut-il mieux lui appliquer les tatouages de son vivant ou après ? c’est une question technique, selon la disposition des tissus, j’imagine que...

-Je comprends mais ne sais trop quoi répondre, franchement, comment se présente la chose en fait ?

-Les gars de la maintenance, qui touchent à tout, ce sont en fait de vrais génies ces gars-là ont...mais attends une minute, tu me fais causer, comme tu dis, mais il faut en urgence passer un avis public du tirage au sort de l’officiant d’une libération, qui doit avoir lieu cette nuit ; une minute veux-tu ?

Georges téléphona de l’appareil de la médic à sa secrétaire du moment, qui arriva en quelques minutes, et qui est une belle femme brune et yeux noirs dans la trentaine, mince et bien faite, et avec un visage avenant et souriant...

-Ah ! Martine, vois s’il te plaît de préparer de suite et en urgence, l’avis de tirage au sort pour une libération pour cette nuit en soirée, et qu’il soit affiché immédiatement dans toute la station avec avis sonore. Deuxième avis : le libéré tient à garder l’anonymat, alors...motus. Martine allait sortir quand il la retint. Autre chose, préviens de suite le responsable du PC des opérations des perceurs, qu’il vienne me voir immédiatement, c’est urgent ; vas-y maintenant, Martine, et grand merci, je compte sur toute ton attention habituelle, lui dit-il avec un chaud sourire.

La secrétaire lui rendit un charmant sourire, ravie, elle sortit rapidement exécuter les ordres de son illustre chef, qu’elle adorait, parfois aussi d’une attention toute particulière...

-Où en étais-je dans tout ça ? ma jolie médic chérie, lui dit-il avec son plus charmant sourire.

-Georges, arrête de me faire du gringue, veux-tu ? c’est plus de nos âges, mon bon...Tu parlais de tes gars géniaux de la manutention, et tu disais que...

-Oui, merci ma belle, je disais justement que ces gars sont, avec leurs stocks de récups de peintures dite vinyliques, parvenus à reconstituer la teinte exacte du tatouage du code-barres de Marcellin ; ce sont vraiment des cadors. Une fois la peinture sèche, ce qui est très rapide, la ressemblance est vraiment parfaite.

Pour l’application ils ont fabriqué une sorte de gabarit dans une bande de plastique assez rigide, bande qu’ils suffit d’appliquer sur la peau pour ensuite y passer méticuleusement un minuscule rouleau en peau de leur fabrication ; ils ont ainsi fait des dizaines d’essais successifs et sont arrivés à parfaitement maîtriser la technique. Reste à savoir s’il vaut mieux l’appliquer sur un gars vivant ou...il ne termina pas sa phrase qu’elle lui coupa la parole, outrée.

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-Georges, ainsi qu’il soit bien clair entre nous, y pensant bien, et imaginant d’ici ce travail de ces peintres si particuliers ; je me refuse absolument à imposer cette pratique barbare à ce pauvre Homme qui est déjà sous une tension nerveuse extrème, et ce malgré l’apparence de décontraction qu’il veut nous montrer. C’est proprement scandaleux car inhumain ! Nous ferons donc ce tatouage, après seulement, voilà tout, et c’est un ordre, dit-elle fermement.

-Oui...tu as raison, ma chère Josiane, nous les Hommes serions de nature trop dure parfois, heureusement que votre grande et inestimable sensibilité nous ramène quand il le faut sur le chemin de la compassion et de l’amour fraternel indispensable à l’équilibre si difficile du bonheur, grand merci encore, ma soeur chérie.

La médic rougit sous ce compliment mérité, elle le savait, car connaissant que de trop bien l’ardeur bouillonnante dans les veines de leurs compagnons mâles, ardeurs qu’il leur fallait, elles leurs Femmes, régulièrement appaiser de leur sagesse, patience et douceur ancestrale. Elle connaissait bien cet atavisme remontant aux nations gauloises, qui virent un jour arriver les armées carthaginoises d’Annibal (-218). Devant l’obstruction des armées gauloises, le grand chef carthaginois fut contraint d’accepter une négociation, où un traité fut signé entre les deux parties ; une des clauses les plus inusitées pour ces étrangers, fut que si les soldats carthaginois présentaient des réclamations auprès des Gaulois, seules les Femmes de ces derniers étaient habilitées à juger et traiter, ce en vertue de la coutume des Ligures et des Aquitains, qui remettaient les importantes décisions politiques et autres, entre les seules mains de leurs compagnes ; grande preuve de confiance de la part de ces redoutables guerriers craints sous tous les cieux.

Et pourtant, ils furent dénigrés et passés pour sauvages et barbares par les générations suivantes et maudites, vendues aux religions allogènes...Alors que les propres femmes, du temps de ces dernières, furent méprisées, avilies et traitées en véritables esclaves et parias durant les deux millénaires suivants. Ces dernières, dans les tous derniers temps, dans ces pays se disant pourtant démocratiques, n’y trouvant qu’une parodie de respect et de droits égalitaires dans le vote politique et social tronqué et bafoué, et ce, que seulement quelques petites décades avant leur brutale disparition, certains pays continuant jusqu’à la fin de leur refuser ces droits honorables élémentaires.

Lesquels étaient donc les vrais barbares en fait ? Considérations faites des époques si distantes.

Le chef de service au PC des opérations des perceurs, Honorine, une brune aux yeux noirs dans la cinquantaine, et du genre déménageur autoritaire, mais toujours souriante, mais pas du tout le genre de Georges, arriva en trombe et entra sans frapper, comme à son habitude, et malgré les avis contraires de Georges, qui, fataliste mais furieux et contraint en avait pris son parti depuis longtemps.

-Que ce passe-t-il, grand chef ? s’écria la mégère d’une voix à réveiller un escadron, aux yeux du grand sage légèrement irrité mais ne le voulant point le

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laisser paraître...Cette garce, se pensa-t-il, n’a peur de rien ni de personne, et le jour de l’attaque elle fera un carnage de ces pourris de Zanko-Khuigs.

-Honorine, merci d’être venue de suite. -C’est normal, chef ! cria-t-elle de sa voix fluette de stentor en jupon, avec son

grand sourire. -Honorine, s’il te plaît, lui dit-il sur un ton neutre, ne me coupe pas la parole à

chaque instant, merci. Voici l’ordre de mission, la chef du PC sortit rapidement un calepin d’une poche et nota les ordres...Il s’agit, dicta Georges, d’une mission de toute urgence à envoyer à la station Girelles. Message à transmettre : « Envoyer immédiatement en priorité absolue à la station Bertrand, l’équipage de patrouilleurs : Alexandra, le pilote et son psycho, Claude ». Le sujet : « Renvoi du bébé au bercail ». Ce sera tout et c’est classé Priorité rouge ! Exécution immédiate ! Merci bien, Honorine.

Cette dernière tourna les talons et repartit en courant. -Georges, t’es vache avec cette pauvre fille, elle fait pourtant un boulot

remarquable. -Je sais bien ma douce, mais que veux-tu, je ne supporte pas le genre

débardeur qui enfonce les portes ouvertes ! -Enfin, dit-elle, je sais bien que l’on ne peux se passionner pour tout le monde,

mais fais un effort pour être un tout petit peu plus gentil avec elle...J’essayerai de lui toucher un mot, pour tenter qu’elle soit moins...hommasse, si tu veux.

-Si tu penses pouvoir atteindre à un résultat, pourquoi pas ; je ne dois pas être le seul à être irrité par son comportement à l’emporte-pièce, non ?

-Je crois aussi, effectivement, mais bon...Tout est réglé donc, j’ai de vrais malades à voir, accidentés plutôt, alors on se retrouve ce soir vers les 20 :30 heures ici ; dès que les gars amèneront la musique et la vidéo j’irai en équiper Donatien ; sois tranquille, je m’occupe de lui pour tout, d’accord, Georges ?

-Merci Josiane, je vais de ma part prévenir les peintres pour qu’ils se tiennent prêt, il faut qu’ils soient deux pour...

Il ne termina pas sa phrase et partit rapidement. Marcellin se précipita au bureau de Georges dès qu’il fut avisé que ce dernier le

demandait. -Ah ! Marcellin, merci d’être venu rapidement, nous avons besoin de ta

collaboration indispensable, mon frère. -Que puis-je faire ? dit ce dernier, ravi d’être enfin utile. -C’est simple, tu vas voir, et j’y ai pensé tout à l’heure. Il faudrait que tu écrives

un petit mot pour ton remplaçant dans ta chambre de là-bas, il fit un geste lointain et vague de la main, juste quelques mots pour qu’il se doute qu’il se passe des choses étranges ; qu’en fait, tu n’es pas mort, même s’ils trouvent un corps à ta place ; ce qui va vraisemblablement arriver car figure-toi qu’un gars d’une station éloignée et te ressemblant assez bien, a eu un grave accident et leurs médics craignent bien qu’il ne passera pas le jour, alors...Nous voilà ainsi

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par le plus grand des hasards en mesure de tromper ces pourris de Zanko-Khuigs ; on peut dire que le destin est avec nous, non ?

-Incroyable oui, la Vie réserve de drôles de surprises on peut dire, mais bon, cette idée de laisser un mot pour mon remplaçant est excellente, mais, en y pensant bien, est-ce bien prudent ?

-D’après tes dires, les gardes viendront au final des quinze jours voir le pourquoi de ton absence et enlèveront le cadavre, sans plus, c’est bien ça ?

-Telle est la pratique jusqu’alors, pourquoi en changeraient-ils maintenant ? -Bien, dans ce cas, je t’ai préparé un modèle de ce que tu pourrais écrire ; il prit

un papier sur le bureau et le lui tendit, dis-moi ce que tu en penses et bien entendu, corrige si besoin et rajoute son nom en tête.

L’intéressé le prit et le lut rapidement. -Oui, c’est succinct et laisse plus de place à l’imagination qu’à une certitude.

Vois comme je le ferais, deux ou trois retouches. Il écrivit rapidement puis tendit le papier à Georges qui le lut, et fut d’accord.

-Avec ton écriture et ton nom apposé au bas du billet, il saura qu’il se trame vraiment quelques choses ; voici cette feuille de papier, écris donc ce message avec ton écriture naturelle surtout ; au fait, comment est-il pysiquement ton remplaçant ? que l’on sache le reconnaître.

-C’est un homme d’environ quarante ans et plus grand que moi de dix bons centimètres, les cheveux bruns foncés commençant à grisonner sur les tempes, les yeux noirs, et il est plutôt mince. Georges notait ces renseignements sur une fiche.

Marcellin écrivit rapidement le message, mit son nom au bas et le tendit à son interlocuteur ; celui-ci le lut à haute voix.

Mon cher Marius, Sache qu’une nuit il se pourrait que tu entendes le bruit d’une poignée

de graviers jetés contre tes vitres. N’aie pas peur alors, ouvre ta fenêtre, ce seront des amis, à bientôt. Les documents anciens sont en leur possession, inutile de les continuer. Détruis ce message. Marcellin

Le Grand sage rangea précieusement le document dans une enveloppe et, remerciant chaleureusement son interlocuteur pour sa collaboration, lui disant qu’il fallait qu’il s’occupe rapidement de faire partir ce message ; son visiteur s’esquiva pour ne pas retarder ce grand Homme dans ses affaires importantes et urgentes.

Il fut satisfait de savoir que l’on allait pouvoir tromper ces pourritures de Zanko-Khuigs, la seule et unique chose qui importait dans son âme d’ancien martyr ; une jubilation intense se répandit dans son coeur, tel un baume appaisant. Il repartait heureux de ce bureau, fier de participer à cette arnaque, avec cet Homme de haute estime et d’une si grande simplicité que ce grand Homme, ce Georges, qu’il adorait.

Ils étaient depuis une demi-heure environ dans la chambre à côté de celle de

Donatien ; tout était en place dans ce commando bien particulier ; le perceur et

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son équipage arrivés depuis peu de Girelles, attendaient sur la plate-forme, prêt à décoller à la seconde.

L’officiant de cette libération attendait dans une autre pièce, ne voulant pas être identifié, selon son droit le plus strict, ce qui était pareil dans la majorité des cas. La médic les quitta. Elle entra sans faire le moindre bruit dans la chambre de Donatien, ce dernier, allongé et le buste relevé par une pile d’oreillers, un casque hi-fi sur les oreilles, suivait sur le grand écran vidéo de somptueuses vues aériennes de la nature, des vues magnifiques de Gaïa, cadeau grandiose à celui qui allait partir pour son dernier combat posthume ; combat de géant, pour ce noble guerrier au coeur et à l’âme altière.

La médic, qui une heure avant lui avait fait boire un très léger calmant, toucha le bras de Donatien, ce dernier tourna la tête vers elle et lui sourit, il enleva son casque.

-Josiane, je n’avais jamais vu notre Gaïa sous de tels angles, c’est une véritable perle...Je suis prêt maintenant, alors donne-moi ta potion magique et n’en parlons plus. Je partirai avec ces vues merveilleuses et cette musique que j’aime, merci pour tout cela, Josiane, que le Cosmos te bénisse ; donne-moi cette potion pendant que le courage m’habite. La seule pensée de contribuer de vous donner Gaïa en cadeau me suffit, mais ne perdons pas de temps en palabres stériles, le temps du dernier combat pour moi est venu ; il tendit la main, elle lui tendit le verre qu’il prit d’une main ferme et but d’un trait sans trembler un seul instant. Josiane, parts maintenant, ma soeur, laisse-moi pleurer de bonheur devant ces merveilles, avant mon grand voyage, adieu !

Il remit son casque et regarda de nouveau la vidéo... Josiane sortit de cette chambre, éffrondrée, en larmes, devant tant de courage,

de calme et d’abnégation pour cette action suprème. Elle alla pousser la porte de la pièce où attendait l’officiant, elle avança son buste et dit à mi-voix, moitié sanglotant. Il sera prêt dans dix minutes à partir de maintenant ; dès que c’est fini, tape trois coups brefs à notre porte, bon courage, que les forces du Cosmos soient avec toi ! Puis elle réintégra la chambre d’attente avec les autres ; elle alla se blottir dans les bras de Georges, sans rien leur dire de ce courage insensé de Donatien, chose qu’elle se réservait de leur révéler après, car un tel sacrifice ne pouvait rester inconnu de leurs communautés : il faudra un jour, se promit-elle, rendre hommage à ce grand guerrier.

Ils se précipitèrent sitôt les trois coups donnés contre le battant de la porte. La médic retrouvant ses réflexes calmes et précis de la professionnelle, arracha

d’un coup le drap sur le corps, le tourna sur le côté, arracha le pyjama, plia la jambe du dessus et lui enfonça un gros paquet de coton dans le rectum, pour retenir les selles qui allaient normalement être expulsées de part, comme toujours dans ces cas-là, le relâchement du sphincter ; l’urine étant déjà sortie, toujours la première et dès l’arrêt des centres vitaux. Durant ce temps, Georges avait enlevé le casque hi-fi de la tête ballante de Donatien, il alluma le plafonnier puis stoppa la vidéo, pendant qu’un des peintres installait un puissant spot sur trépied.

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Ils installèrent le corps sur un chariot AG peu large pour pouvoir travailler confortablement, la machoire tenue fermée par un bandeau autour du crâne pour la seule durée de leurs travaux de falsification. De plus, la médic installa sur les yeux une sorte de prothèse qu’elle avait commandé à ces fameux génies de la maintenance : deux appareils légers montés comme une paire de lunettes, fabriqué en fil de fer, s’appliquant directement sur les globes occulaires pour maintenir leurs paupières ouvertes, comme devraient être celles résultant d’une mort accidentelle ; l’ensemble tenu par deux tiges recourbées derrière les oreilles. La médic écarta largement les paupières avec deux doigts, puis y encastra l’appareil.

La délicate opération de falsification pouvait commencer. Les deux peintres, Hervé et Olivier, se mirent à l’ouvrage. Le plus dur à

supporter pour tous furent les yeux grands ouverts et vides de ce mort les fixant derrière ces étranges bésicles. Ils opérèrent relativement rapidement à la surprise de eux deux, disant qu’ils s’étaient entraînés sur des chevreaux fraichements tués par les cuistots de la cantine nº 3 ; leur recommandant même d’aller rapidement en déguster la saveur hors pair, car tout le monde y courait se régaler.

Hervé tenait le gabarit reproduisant une séquence du code-barres d’une longeur de huit centimètres, le modèle en plastique était fixé à ses deux bouts sur deux axes reliés chacun à une petite tige centrale perpendiculaire, servant de poignée. La médic positionnée à la tête du chariot, tout en bloquant la tête ballante avec ses deux avant-bras, tendait légèrement la peau pour en effacer les plis éventuels, pendant que le dernier opérateur, Olivier, était chargé de la délicate application de la peinture mate avec son minuscule rouleau. Les traits fins du code-barres faisant un millimètre de large contre trois et demi pour les gros ; les séquences étant espacées de un centimètre, laissant la pomme d’Adam libre sur six centimètres de large ; un dernier espacement variable à l’arrière du cou dépendait de la circonférence de ce dernier.

L’opération se fit en trois temps, le temps de laisser sécher avant de retourner le corps, s’aidant pour cela d’un petit ventilateur pour accélérer l’opération. À la fin ils libérèrent la machoire que la médic ouvrit ostensiblement, déshabillèrent le corps et lui firent revêtir les hardes de Marcellin, puis lui mirent les chaussures aux pieds. Ils fouillèrent ensuite les poches ; s’y trouvaient bien la vieille paire de lunettes rafistolées, le vieux crayon délabré et le fameux vieux calepin qui avait été remis en place après en avoir photographié chaque page...

Le corps fut embarqué dans le grand sac mortuaire ; Josiane fit alors sortir tout le monde de la chambre. Une fois seule, elle rouvrit la combinaison, dénuda et releva une jambe du cadavre et sortit le tampon de coton du rectum qu’elle jeta dans un sac spécial étanche qu’elle le ferma prestement ; elle referma la combinaison du cadavre puis appuya de tout son poids sur son ventre, elle entendit le gargouillis des selles sortir ; elle referma vite la glissière du sac étanche et sortit.

Le mort fut amené en vitesse vers le perceur sur le chariot AG ; ils l’y embarquèrent rapidement et la médic donna ses dernières instruction aux deux patrouilleurs et leur remit un petit paquet...Le perceur sortit alors lentement de

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la grotte, tourna sa proue vers l’Est puis fila comme une flèche en prenant de l’altitude dans une sombre nuit glaciale et sans lune.

La diabolique mission d’imposture entrait enfin dans sa phase terminale dans cette ultime nuit de possible, en ces premiers jours de l’année 2399.

Le perceur filait à toute allure à deux mille cinq cents mètres d’altitude, en longeant la chaîne des Pyrénées. Passé cette dernière il fila vers le grand large au-dessus de la mer sombre, pour y faire un très large virage jusqu’à atteindre leur objectif. Le pilote avait décidé, comme à chaque fois de modifier leurs route d’approche. C’était une routine ancrée dans leurs neurones, de ne jamais suivre deux fois de suite la même route, une sécurité de plus pouvant éviter un repérage éventuel.

Claude avait ouvert le paquet remis par la médic. Il mis avec précaution la lettre écrite par Marcellin dans la poche intérieure de sa combinaison, puis il prit une feuille de papier, la déplia et se mit à potasser une énième fois la liste concernant les actions chronologiques à accomplir lors du dépos du corps dans cette chambre sordide ; satisfait, il la rangea dans une poche, prit dans le paquet une sorte de petite gourde en plastique d’un demi-litre montée avec une dragonne qu’il passa autour de son buste sur l’épaule droite. Assis derrière le pilote, il se pencha, embrassa tendrement Alexandra dans le cou, celle-ci se trémoussa sous les chatouilles de ce baiser.

-Combien de temps encore, Commandant de mon coeur ? lui demanda-t-il en souriant.

-Plus que...elle regarda ses instruments de bord...douze minutes sur géopoint objectif ! Sais-tu qui est ce mort ?

-Pas la moindre idée, mais il peut dire qu’il tombe à pic ; il l’aurait fait exprès qu’il n’aurait pu mieux faire, que le Cosmos prenne soin de l’âme de ce guerrier inconnu qui nous sauve à point.

-Soi-disant, continua-t-elle, que notre cher vieux Marcellin se porte comme un charme, et qu’il serait à Bertrand comme un véritable coq en pâte régnant sur une cour de femelles aux petits oignons pour sa personne. Ce vieux coq serait devenu l’objet de toutes leurs attentions particulières ; et imagine un peu que Josiane, la médic, est obligée d’y mettre le holà, avant que ces furies ne le renvoient à l’hosto sur un brancard AG. T’imagines un peu ça ? Qui aurait cru ce pauvre misérable à la tête d’un harem particulier. Dit-elle en s’exclaffant.

-Oui, c’est plutôt inattendu, surtout quand on l’y a vu arriver en si piteux état. Je suis ravis pour ce vieux coq du crépuscule ; fasse qu’il s’en donne à coeur joie et autant qu’il pourra, car malheureusement il ne rattrapera jamais le temps perdu, qu’il soit heureux ainsi, c’est la moindre des choses que vous, mesdames, pouviez lui offrir et, je suis quasiment certain qu’il ne rêve plus aussi exclusivement à sa rousse guerrière si tendrement particulière des débuts.

-Tant mieux, rit-elle, je suis ainsi délivrée de ce devoir que je m’étais imposé, du moment qu’il a trouvé son bonheur, le reste importe peu, je suis ainsi infiniment heureuse pour lui. Bien, nous arrivons, mon coeur, tout est paré ?

-Paré, chef !

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Le Soleil, perdu au milieu d’une branche de la gigantesque spirale tourbillonnante de notre galaxie, fonçant à cette hauteur à plusieurs millions de km/h dans les ténèbres glacées des espaces sidéraux, entrainant un cortège de minuscules planètes, dont la nôtre qui, malgré sa course folle autour de son astre, ce à la vitesse vertigineuse de 107.280 km/h, et sa vitesse de rotation équatoriale de 1666 km/h, vit le perceur revenir une fois de plus se positionner exactement sur le géopoint marquant une fenêtre misérable perdue dans cette somptueuse galaxie de plus de 150 milliards d’étoiles, ce grâce au miracle de cette fantastique technologie Akadi ; il plongea alors comme toujours tel un bolide pour venir se positionner pile devant son objectif.

Une chance pour cette fois : ils arrivèrent sous une pluie battante accompagnée par un vent furieux d’une tempête du sud-est ; en plus de l’heure inusité, absolument personne ne circulait dans la ville, leurs détecteurs en faisaient foi. Après une immobilité absolue élémentaire et minimale de quatre petites minutes pour cette fois, toutes sources lumineuses intérieures éteintes, le perceur vira lentement sur place pour venir positionner sa porte déjà ouverte à hauteur de la fenêtre ; l’engin ainsi bloqué, comme soudé sur place sur ce géopoint ; ils passèrent à l’action.

Tous deux étant équipés d’un masque respiratoire et de gants en caoutchouc fins. Claude, son pistolet automatique équipé d’un silencieux braqué vers la pièce, actionna sa lampe-dynamo et parcouru l’intérieur de son faisceau. Il poussa la croisée bloquée avec un petit morceau de branche de platane, coincé sous le montant de la croisée rabattante. Il sauta silencieusement à l’intérieur, prit la chaise métallique et alla bloquer la porte d’entrée de la chambre. Revenant sur ses pas, il prit la barre de commande du chariot AG que lui tendait Alexandra et amena le corps à l’intérieur, sa compagne le rejoignit rapidement. Ils déplacèrent le lit en silence, Claude dégagea une lame de parquet occultant la cache et y déposa au fond, à plat et bien visible, le carré de papier contenant le message de Marcellin à son successeur ; ils remirent tout en place puis s’occupèrent du corps.

Ils mirent le chariot à l’endroit calculé : sur le parquet et perpendiculairement au pied de la cloison, au bas de laquelle était une vieille caisse en bois contenant divers objets de l’ancien occupant des lieux. Ils ouvrirent la fermeture à glissière du sac puis prirent le corps en force, à cheval sur lui, et le déposèrent ainsi sur le côté gauche, à environ un mètre vingt de la porte, la tête tordue contre la caisse, le cou comme brisé suite à une chute fatale.

Claude prit son poignard de commando et fit une minuscule entaille sur la bord du couvercle de la caisse, entaille dans laquelle Alexandra coinça trois cheveux du mort qu’elle arracha de sa tête. Ils durent forcer sur le cou pour lui faire prendre l’angle requit car la raideur du cadavre commençait à faire son effet ; puis de même, ils arrangèrent les bras et jambes aux positions correspondantes à la suite logique d’une chute.

Ils sortirent comme prévu de la poche droite du mort, ses lunettes qu’ils déposèrent à environ soixante centimètres devant la tête, comme si elles avaient été éjectées sous l’impact ; le calepin ouvert à plat et le vieux crayon à moitié

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démantibulé, les deux posés loin l’un de l’autre sur le plancher et à plus de trois mètres des pieds du cadavre, comme si l’homme avait eu un malaise...les avait lâché...avait trébuché vers la cloison...puis était tombé, se tuant en se brisant la nuque contre la caisse en bois...

Claude se recula et jugea de l’ensemble, il fit signe du pouce à sa compagne que c’était ok ! Puis ils roulèrent bien serré le sac mortuaire et le mirent dans un second sac poubelle étanche plus petit en plastique épais. Claude enleva par-dessus sa tête le gourde qu’il portait, dévissa la bouchon et arrosa le cadavre à hauteur du bassin sur le devant, c’était l’urine du propre corps qui devait laisser l’odeur forte caractéristique, puis il jeta la gourde dans le sac. Alexandra se pencha sur le cadavre et lui enleva son étrange paire de lunettes qu’elle jeta également dans le sac et, durant que Claude le fermait méticuleusement, elle tapota les paupières du cadavre pour qu’elles soient bien appliquées sur les yeux exorbités...Plus rien ne laissait supposer que ce cadavre ne résultait pas d’un accident, on ne peut plus vrai.

Le pilote remonta sur le rebord de la fenêtre, puis son équipier lui passa la barre du chariot AG avec le sac dessus ; il contrôla avec grande attention l’ensemble de leur mise en scène et que surtout ils n’avaient rien oublié. Satisfait, il enleva le verrouillage de la porte et remit la chaise à sa place exacte, il rejoignit la sortie et tira les croisées en place, les rebloquant avec un petit morceau de branche. Il referma la porte du perceur qui, ne l’étant encore point totalement que ce dernier était déjà à pas loin de mille mètres d’altitude dans sa vertigineuse montée en chandelle...puis il mit cap vers l’ouest sous pilotage automatique.

-Cap vers le bercail, mission carambouille parfaitement exécutée ! s’écria joyeuse, Alexandra. Chéri, sers nous veux-tu, un verre de n’importe quoi, il faut dignement arroser cette longue opération qui aura occupé beaucoup de per- sonnes ; durant que tu nous prépares ce breuvage bien gagné, j’envoie un message flash chez nous pour qu’aussi ils savourent cette réussite complète.

-Sois sympa, envoie-le en multi-faisceaux, pour qu’ils l’aient tous, ils l’ont bien gagné aussi, non ?

-Oui, tu as raison, nous l’avons tous gagné. C’est une victoire collective. Quatre minutes et quarante secondes plus tard, le message codé et comprimé

en un quasi imperceptible bip, traversait les airs dans un faisceau horizontal focalisé vers l’ouest.

Claude avait durant ce temps sorti une somptueuse bouteille de champagne du frigo, bouteille qu’il gardait précieusement à bord, la réservant pour une grande occasion ; sa compagne la découvrant fut aux anges, heureuse de boire cette boisson qu’elle adorait. Puis, elle eut une idée, tout en tournant son siège vers l’arrière...

-Attends, chéri, ne l’ouvre pas encore, remets-la au frais. Ce dernier la regarda, étonné ; tu vas voir, lui dit-elle mystérieusement, j’ai une idée que tu vas adorer.

Claude, sans rien dire remit donc la bouteille dans le frigo puis vint s’asseoir sur un siège derrière le sien, lui déposa un baiser sur ses lèvres, puis attendit le résultat de cette cogitation toute feminine...prêt au pire.

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-Bien ! attaqua-t-elle avec un curieux sourire sur les lèvres, lui prenant les mains dans les siennes...Te souviens-tu bien du premier jour de cette folle aventure avec Marcellin ? je parle des quelques heures d’avant son incroyable rencontre.

-Forcément, comment pourrais-je oublier ces heures de grandes, que dis-je, suffocantes tensions.

-Non, non, mon coeur, je parle de ce moment où je t’avais promise quelque chose, toi aussi du reste et, que ces événements suivants nous ont fait oublier, forcément, mais néanmoins, ce qui fut dit alors reste à faire...Tu ne vois pas un petit peu de quoi je cause, hein ? mon joli petit colibri des îles enchantées, hein ? dit-elle en se faisant soudain toute chatte et caline...

-Oooh ! ça y est ! s’esclama-t-il, le colibri joli est de retour, ça va chauffer je sens, se penchant et l’embrassant violemment à pleine bouche...puis, reprenant son souffle...Qu’avons-nous donc dit cette fameuse nuit, ma douce colombe enflammée du croupion ?

-Que nous allions nous faire l’amour comme des fous furieux et que je te devais deux séances de turlututu endiablées, mon joli canard adoré.

-Tiens, voilà la basse-cour qui se pointe, ça va être sanglant cette fois ; et où allons-nous pratiquer ce match au finish, ma chef adorée ? ici, parmi les étoiles ? Se faisant il lui avait passé une main entre les cuisses et la caressait lentement, elle se trémoussait comme en miaulant presque, à cette sorte d’habitude qui était sienne...Elle lui avait se faisant, pour ne pas être en reste, ouvert le bas de sa combinaison et avait sa main dans son slip...

-Nous y serons, dit-elle haletante sous la caresse, dans maintenant...trois...trois minutes...Elle se reprit énergiquement et débita d’un seul trait sans respirer : planqués dans ce petit bois de tamarins et de pins parasols, sur notre petit coin secret de cette Camargue qui m’envoute et me rend folle, comme Marion et Céline le furent elles aussi. A peine fini sa longue phrase, par une sorte de miracle, elle se jeta sur lui et l’embrassa fougueusement sur la bouche...

-Parfait, réussit-il à articuler un moment après, essoufflé et, voyant sa main dans sa braquette, il lui dit, mi-offusqué, que faites-vous donc là, madame ?

-Je suis le petit Poucet, mon bon monsieur, et je compte mes cailloux, un-deux, un-deux, un-deux...

Se levant en trombe, il s’écria. -Ça suffit, drôlesse ! me croyez-vous donc en plomb ? -Oh que non ! mon chouchou chéri, mais comment trouves-tu mon idée ? -Pour les turlututus, l’un après l’autre, s’il vous plaît, ma douce et infernale

chatte, mais sachez que je vous rendrai le pareil à l’instant même, telle sera votre punition !

-Oh oui Monsieur ! s’écria-t-elle, timide, comme une fillette réprimandée. -Et pour ton idée, reprit-il d’un air penseur, c’est effectivement une idée hyper

chouette, et comme il y en a certainement une d’authentique dans ce bois, elle va découvrir ce qu’est un véritable colibri joli pris de frénésie érotique. Elle pourra donc raconter à coeur joie ce combat homérique à tout son voisinage,

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car tout le monde sait bien que toute chouette qui se respecte est de réputation cancanière.

Ils éclatèrent de rire tous les deux, juste au moment du bip signalant l’approche du géopoint choisi.

Alexandra s’installa rapidement à son poste de pilotage, tremblante encore d’excitation de cette sournoise mais délicieuse entremise dans son entrejambe. Elle respira à fond un grand coup, se concentra sur sa tâche puis réussit à poser le perceur directement entre les branches des imposants pins parasol, la porte tournée vers la mer. Le vent était fort mais sans pluie maintenant. Èclairés par intermittence par de fugaces rayons de lune perçant un instant de gros nuages sombres se pourchassant dans un ciel d’encre. De gros rouleaux argentés venaient déferler sur la grève en de sourds et puissants grondements, rythmant une sourde mélopée aux vivantes vibrations, pulsations entrant en harmonie avec tout Être vivant, échos à ceux de ces myriades de soleils tapissant les espaces insondables de l’univers.

La porte grande ouverte, giflés avec délice par les fougueuses rafales de ce vent impétueux les noyant dans de puissantes senteurs marines chavirant leurs âmes et leurs esprits divaguant d’un bonheur étourdissant, ils trinquèrent et burent étroitements enlacés une première coupe de champagne, devant le spectacle grandiose de la mer déchaînée, puis ils fermèrent la porte en frissonnant.

Ils installèrent avec hâte leur grand duvet par terre, se déshabillèrent rapidement puis firent de même leur toilette et...l’illustre breuvage des dieux aidant, sous le chant colossal assourdi de cette mer sacrée en furie, ainsi que des ondulants sifflements du vent dans les aiguilles des pins, ils s’aimèrent vraiment comme deux fous, enivrés l’un de l’autre autant que du vin...

Ce fut une nuit grandiose, une nuit de folles étreintes ; corps tendus se lovant sous les gerbes successives de jouissances à rendre fou ; plaisirs poussant cruellement leurs âmes prêtes à se désintégrer de tant de violence exacerbée. Une nuit folle de plus célébrant ce grand amour d’un Homme et d’une Femme, de ces nouveaux couples merveilleux vivants dès lors sous ce soleil, sous les auspices de ce royaume sacré qu’est cette Camargue éternelle, conservatrice de la beauté et de la force de la puissante Vie sauvage et souveraine.

Ils cloturaient ainsi dans ce don absolu et démesuré de l’amour charnel, de cet hymne à la Vie dans la joie pure et immense, dans cette jouissance extrème et aiguë qui transcende le Moi, cette longue et opiniâtre bataille où ils venaient de triompher grâce au courage sans borne aussi, d’un combattant posthume inconnu, qui de part son sacrifice suprème leur ouvrait un chemin royal vers la victoire : abnégation relevant d’une générosité hors du commun ; grandeur de ces nouveaux Humains capables de tels actes au-dessus de toutes les louanges.

De tels Êtres étaient les nouveaux dieux de ce nouveau Monde, les fils sacrés et seuls dignes de leur mère, Gaïa, la splendeur des étoiles, la perle du Cosmos.

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Visions d’apocalypse

ette année de 2.399 fut le témoin d’une activité encore plus délirante de la part de toutes les communautés de cette jeune, puissante et farouche

famille d’Humains nouveaux. Tous les Hommes et les Femmes qui n’avaient pas d’occupation importante et directement reliée à la construction des moyens d’assauts, se portèrent volontaires pour aller aux ateliers de construction de Blagnac, pour se proposer d’aider les tecnos du mieux qu’ils le pourraient, pour accélérer et enfin en finir de toutes ces fabrications.

Malgré le souci d’employer des gens forcément incompétents de ces choses-là hautement compliquées et qui risquaient de gêner plus que d’apporter une aide réelle, les chefs de districts de fabrications réussirent l’exploit de finir par en embaucher quelques centaines, les occupant à des tâches subalternes et primaires et d’apparence insignifiantes, mais qui permirent peu à peu et à la grande surprise de tous les travailleurs confondus, de gagner environ trois semaines sur le plan général, à la grande joie et orgueil de tous.

On peut dire que les centaines de tecnos furent assistés par une petite armée de fourmis hautement attentionnées et vaillantes. Rien ne les rebutait du moment que c’était pour la reconquête. Un tecno, par exemple, n’avait plus le besoin de quitter son poste pour aller prendre un outil ou une pièce, non, car l’arpète à ses côté avait déjà fait un bond pour lui ramener en un éclair.

Georges, arriva un jour à l’improviste avec la navette qui faisait sept fois par jour la liaison des stations de la zone Centre-Est II et Blagnac, et fut stupéfait de découvrir cette ambiance de ruche ardente ; il en fut extrèmement surpris et heureux et fit part de sa surprise à celle qu’il était venu voir, Jennifer Chancellor, le commandant de la base.

Ils étaient dans le bureau de cette dernière, confortablement installé dans un sofa en bambou verni, assis sur un matelas, dossier et coussins assortis de couleur bleue pastel avec des motifs en arrabesques aux chaudes teintes où l’orange dominait ; une petite table trônait devant eux, sur laquelle l’hôtesse avait servi une légère collation et un rafraîchissement.

-Sais-tu, Jennifer, que je ne m’attendais pas du tout à trouver tes ateliers avec une ambiance de travail aussi prodigieuse, je craignais plutôt que ces volontaires ne compliquent et retardent vos travaux ; comment avez-vous accompli un tel miracle d’adaptation de tous ces gens ?

Jennifer Chancellor, se mit à rire de bon coeur de voir la surprise de Georges, son ami et amant occasionnel parfois aussi. Jennifer n’était pas retournée chez les siens depuis bien longtemps ; elle se plaisait chaque jour davantage avec ces Frankis aux esprits railleurs et parfois difficiles, mais qui faisaient preuve d’une constance remarquable dans leur travail, ce qui pour elle était la marque de grands Hommes et Femmes forts, sur qui on pouvait compter.

C

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Plusieurs fois les siens lui avaient proposé de la relever de ce job au loin pour revenir vivre aux Appalaches, mais elle avait refusé à chaque fois. Ce qu’elle ne leur avait pas dit c’est qu’elle avait découvert chez ses nouveaux compagnons et compagnes, ce grand sens de l’amour qui les habitait. Elle avait en fait choisi de vivre et aimer de toutes les fibres de son jeune corps exigeant, dans les bras de ses vigoureux compagnons Frankis qui, trouvait-elle, étaient les seuls capables d’éteindre ce feu ardent qui brûlait perpétuellement en elle et la consumait sourdement, exigeant de fréquents appels à l’aide parmi ce vigoureux cheptel de mâles robustes et ô combien experts de la chose sacrée.

Du reste, elle avait, dès le début de leur installation, réquisitionné deux locaux juxtaposés pour en faire son bureau de commandement et dans l’autre situé derrière, communicant par une porte interne, elle l’avait équipé en chambre de repos avec toutes les commodités requises pour ses siestes quasi journalières et le plus souvent accompagnée d’un chevalier servant, et ardent...Lieu d’où elle ressortait invariablement plus épuisée qu’en y entrant, mais qui lui procurait sa fameuse joie de vivre qui faisait le bonheur de tous, car elle en ressortait irradiante d’une félicité incomparable et communicative.

C’est cela aussi qui lui plaisait énormément chez ces coquins de Frankis, leur langage très riche et très imagé. Elle était stupéfaite de leur tournure d’esprit qui, associée à leur langue permettait de pouvoir employer dix, vingt mots ou expressions différentes et bien tranchées pour exprimer une idée ou un concept...C’était pour elle un plaisir de tous les jours, de chaque instant que de dialoguer avec eux, Hommes ou Femmes, curieux de tout, l’esprit ouvert sur le nouveau, s’adaptant avec une grande facilité.

Ils avaient en somme miraculeusement retrouvé les qualités de base de leurs lointains ancêtres, ces fabuleux Gaulois qui ne reculaient devant rien, jamais, toujours à la recherche de l’aventure, industrieux, inventifs, gais et guerriers farouches et infatigables, redoutés des autres peuples...Ces Hommes et ces Femmes actuels donc, ayant suivant les circonstances, un esprit vif, enjoué, caustique, égrillard, sarcastique, calin, doux, agressif, coquin, ordurier aussi, que s’en était à un point invraisemblable pour elle...

Et que dire alors du langage de l’amour à la Franki...Folies, pures folies ! C’était un festival d’érotisme auditif, jouissif et percutant pour ses innocentes

oreilles Akadis des débuts, parmi ces adorables amants, véritables fous délirants qui, dans leur extravagance verbale la transportait ainsi dans une autre dimension. Elle n’en revenait pas de la somme des gros mots et injures, comme dans l’amour, et dont ils disposaient et usaient couramment, ce qui la faisait immanquablement rire aux éclats. Combien de fois elle avait succombé de rire, obligés de stopper leurs ébats amoureux pour tout reprendre plus tard...

Quel bonheur insensé que de vivre de tels instants enivrants, cette démesure dans les jeux de l’amour, cette folie étrange et impensable avant pour elle, où la jouissance peut être grandement décuplée par un langage approprié, y trouvant une autre dimension au bonheur physique. Cela fut une véritable révélation pour elle, et jamais, au grand jamais elle ne quitterait ses chers Frankis, ses merveilleux et délirants amants, ça non, pour rien au monde !

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Pour résumer, si elle devait regretter une seule chose dans sa jeune vie déjà bien remplie jusqu’alors, soupira-t-elle avec malice, cela aurait pu être de ne pas s’être proposée comme Aphrodite de sa base...mais bof ! Ainsi elle se rattrapait ici selon ses besoins démesurés et avec grande vigueur, et de plus elle était indépendante et commandait seule tout ce putain de bastringue, comme disaient en riant ses compagnons locaux : mon harem de machos particuliers, comme se plaisait-elle à l’appeler...

Elle se souvint d’une récente discussion avec Georges, justement, où ayant totalement confiance en sa discrétion et compréhension des gens, elle lui avait avoué sa passion démesurée pour l’amour physique, sa boulimie d’amour ; quand elle lui avait dit alors.

-« Georges, tu sais, toi qui me connais si bien maintenant, j’ai envi de te dire une chose que je ne dirais jamais à une autre Femme, sauf à une Aphrodite, ce que je fis un jour en Akadi, et qui m’avoua ressentir exactement les mêmes choses que moi...C’est que je suis folle de bonheur d’être née Femme, et de plus avec cette dévorante envie du mâle, car en plus de la jouissance normale, physique, je ressens un bonheur immense quand un homme me pénètre, la jouissance psychique de le recevoir, me fouiller le ventre, m’étouffer de sa masse virile, sentir son haleine me révulser l’âme...En plus, j’ai ce plaisir fantastique de me soumettre entière, m’ouvrir à sa force brutale s’il faut, être totalement possédée jusqu’en mes fibres les plus secrètes, les plus profondes...A chaque fois j’en remercie le Cosmos de m’avoir faite une femelle si parfaitement faite pour l’amour...Suis-je normale, Docteur ? »

Georges avait ri de cet aveu qui ne le surprenait pas, lui avait-il dit en souriant, qu’elle était des plus normales et fantastiquement attirante, et de surtout rester telle quelle : la plus grande et fantastique jouisseuse de la région.

Elle aimait beaucoup converser avec Georges, car il était à ses yeux un vrai puits de science, de savoirs en tous genres et, ce qui ne gâtait rien, il était un vrai farceur et aimait bien vivre et s’amuser, chose qui lui manquait le plus dans ce job perpétuellement dévolu au travail, encore au travail et toujours au travail, plus ces en-cas éroticos-particuliers...

Elle se prenait parfois à rêver à ce qu’elle pourrait bien faire après la victoire, et là, il existait un grand vide dans son imagination. Il lui faudra se recycler, réapprendre à vivre une vie insouciante, comme du reste la plupart de ses compagnons des ateliers qui menaient le même vie.

-« Ne te préoccupe surtout pas de ces jours futurs », lui avait dit Georges un jour, toujours lui, le sage des sages, mon père spirituel, pensait-elle sans le lui avouer ; « car le jour d’après notre victoire nous serons tous pris de folie durant quelques mois, c’est logique et essentiel, vital même ; puis les choses décanteront et rentreront d’elles-mêmes en ordre et chacun retrournera vers ce qu’il sait faire de mieux pour commencer alors la phase la plus importante pour nous : la reconstruction de notre Monde neuf ; en commençant par raser les ruines de l’autre monde, et en premier les régions où auront péri nos ennemis que...nous ne nommerons plus par leurs noms, pour qu’ainsi ils disparaissent dans l’oubli éternel du coeur de notre jeune Humanité.

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Ainsi vois-tu, ma belle Akadi, tu auras du pain sur la planche pour nous construire les plates-formes et leurs accessoires pour évacuer ces montagnes de déblais vers les mers. Te voilà un futur emploi tout trouvé, toi la grande spécialiste de ces jeux de construction. »

Heureusement qu’il nous reste le pouvoir de faire l’amour à en mourir, soupira-t-elle en pensant à ces grands moments d’amours exotiques et divins...

Puis, revenant à la réalité, elle répondit à la question de son visiteur assis à ses côtés et qui attendait tranquillement sa réponse.

-C’est simple en fait, Georges, il suffit de faire confiance aux gens et de les motiver ; quelques heures de formations express et nous avions des centaines de bras disponibles et efficaces, et le tout dans la joie, c’est magnifique, non ?

-Formidable, tu veux dire, Jennifer chérie, qu’aurions-nous fait sans toi ? Nous te devons tout.

-Laisse tomber, en fait, je me paye sur la bête, sur tous ces Hommes admirables à tous points de vues et qui me comblent pleinement, comme tu le sais déjà ; ce dernier sourit de connivence. Je suis très heureuse parmi vous et ne tiens pour rien au monde à vous quitter, vous êtes tous ma pleine et entière famille maintenant, alors ne me remercie pas, mon cher Georges, c’est plutôt à moi de le faire car j’ai trouvé la joie et l’équilibre parmi vous tous.

-Tant mieux, j’en suis infiniment heureux qu’il en soit ainsi...Mais, j’étais venu pour un tout autre sujet dont tu dois bien te douter. Où en est notre affaire de construction bien spéciale et si particulière ?

-Mon cher ami, j’ai le plaisir de t’annoncer que c’est aux petits oignons, dit-elle en riant fort, depuis que nous avons ces fameux outils, ces couteaux moléculaires de ce cher James Whistler, que je connus intimement aussi, nous n’aurons aucun problème pour réaliser ta commande si particulière ; à ce propos, on peut affirmer que tu es le premier client privé de mes ateliers...et de tout notre jeune monde aussi, certainement !

-Parfait ! parfait ! s’écria un Georges ravi, si j’ai bien saisi ton propos, vous allez pouvoir tout fabriquer, vraiment ?

-Si je te le dis ; tiens ! je vais te montrer les photos de ce qui est déjà réalisé. Jennifer alla vers un grand classeur et en tira une chemise au nom de son

visiteur, l’ouvrit et lui tendit une pile d’une série d’une bonne vingtaine de photos tirées d’un ordinateur. Georges les regarda avec grande attention et fut conquis par ces constructions qui allaient permettre une mise en scène de l’horreur absolue, du super grand Guignol.

-Et pour mon engin en bronze, vous avez trouvé les matériaux nécessaires à sa fabrication ?

-Oui, rassure-toi, j’ai une équipe de patrouilleurs qui, il y a maintenant deux semaines environ, ont trouvé deux usines avec le matos. Dans quelques jours je les enverrai récupérer le tout avec deux de nos tecnos et leurs couteaux moléculaires, plus une mini-grue et des chariots AG car il faut faire des découpages savants sur plusieurs machines construites dans ce matériau ; pas de problème donc, tout sera au point bien longtemps avant cette date fatidique, n’aie crainte, mon cher.

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-Impec, tu es un véritable ange tombé du ciel. -Par contre je réitère ma demande, cette faveur que tu m’accordes d’être

présente avec vous sur ce site, le grand jour du massacre. Je tiens absolument à participer au grand massacre pour voir la gueule d’épouvante que feront ces pourris...Tu sais, Georges, en y pensant bien, tu aurais fait un fameux réalisateur de spectacle d’épouvante dans l’autre monde. Je reconnais bien là, et m’incline, les avantages d’une solide instruction littéraire, et historique surtout ; la suprématie de l’esprit sur la matière en somme, car nul guerrier commun n’aurait pu imaginer une telle mise en scène, c’est plus que certain.

-L’autre monde, dis-tu ? Foutre ! Que notre Gaïa bénie m’en garde bien ! Mais, faveur accordée et avec un très grand plaisir, d’autant que ce privilège te revient de plein droit, ma belle, toi la super réalisatrice de tous ces décors de ce futur spectacle d’épouvante, comme tu dis si bien. Tant qu’au reste, je suis bien trop heureux ici et maintenant, et en y pensant bien même, je suis persuadé que tous nos gens sont infiniment plus heureux et équilibrés que dans ce si abominable autre monde, car tous avons une vie bien remplie, avec un idéal, un but, un objectif puissant qui lie chacun des notres dans une action commune et vitale...

Il n’y a dans chaque esprit aucune place pour le moindre doute sur le bien fondé de nos actions ; nous avançons tous la main dans la main dans un consensus absolu qui génère une immense joie, une intense satisfaction, jubilation de chaque moment de la Vie. Une plénitude, sérénité merveilleuse qui baigne l’âme de chacun ; et la grande preuve de ce tout, s’il en était besoin : vois comme tous nos gens sont en parfaite santé, débordant d’énergie et de joie...

Toutes ces maladies d’antan résultèrent de leur mode de vie insalubre et partant suicidaire : vêtements en tissus synthétiques dérivés du pétrole, comme leur bouffe, emballages, contenants, etc. Toutes sources mortifères que nous avons éliminé de nos pratiques journalières ; et que dire de l’eau chlorée, véritable bombe chimique à retardement ; leurs cultures génétiquement modifiées et empoisonnées avec les agrotoxiques ; sans oublier qu’ils vivaient sous une chape d’innombrables radiations, ces ondes porteuses de dégénéréscence de toutes sortes, sinon de mort : ondes des lignes à haute tension du transport de l’énergie électrique, ondes radios, ondes TV, ondes radars, ondes des GPS et celles des micro-ondes mortelles de leurs téléphones portables qui leur cuisaient le cerveau, ainsi que celles collectives, pires encore, sur les immeubles des villes : les mêmes micro-ondes que pour faire leur tambouille et les bouziller génétiquement, et qui peu avant 2015 furent responsables de millions de cancer du cerveau, chez les enfants surtout ; sans parler des cécités précoces, des maladies dégénératrices cérébrales comme la maladie d'Alzheimer, etc, etc. Liste d’horreurs sans fin.

Toutes ces horreurs et débilités ayant disparu de nos communautés du jour au lendemain, ce qui est bien la preuve de la justesse de nos moeurs et coutumes actuels. Le bonheur et équilibre psychique de tous ? il se découvre à chaque seconde, évident, dans le regard de chacun de nous, et ce encore bien plus fort depuis que l’échéance de l’attaque fut enfin déterminée. Je n’oublierai jamais ce jour béni où mon grand ami Ruppert vint nous annoncer cette grande nouvelle

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de ce jour de l’attaque tant attendu depuis ces siècles par nos innombrables prédécesseurs qui y vouèrent leurs vies. Fasse que les forces du Cosmos prennent soin de son âme.

-Personne ne l’oubliera jamais, Georges, tu peux en être certain ! Pour ma part, rien que d’y repenser j’en tremble d’émotion...As-tu su que ce jour-là, et pour la première fois dans l’histoire de cette base stratégique, j’ai ordonné pour tous les ateliers le repos complet jusqu’au lendemain ?

-Oui, soi-disant que ce fut une folie, comme ce le fut partout ailleurs dans toutes les stations du reste.

-Une folie ? Ha ! ha ! Ce fut un véritable délire collectif ; nous avons dansé, festoyé à outrance, bu à excès, et ce fut ensuite une gigantesque partie de radada, comme ces adorables coquins disent ici...Pour ma part, et tu connais bien, mon chéri, ma célèbre boulimie en ce domaine, je me suis donc faite sautée par cinq joyeux lurons, et ce jusqu’aux aurores...que j’en avais le popotin en triste état, s’esclaffa-t-elle...Mais il y a des occasions exceptionnelles qui pardonnent tous les excès, me suis-je dis alors, n’est-ce pas, mon chou ?

-Absolument et sans aucun doute ; franchement, Jennifer, et je me répète une fois de plus, à chaque fois que nous nous voyons ; tu es si belle et si femelle jusqu’au bout des ongles, que tu as même de forts ravissants aussi, en deux mots : tu es si bandante et chaude du derge, que je regrette mille fois mon âge, car si je n’ai plus la vigueur physique d’antan, sache bien que je ressens toujours cette furieuse envie de te ramonner la crémaillère et te faire une furieuse descente au panier pas piquée des vers !

Jennifer éclata d’un grand rire et mis un bon moment pour reprendre son souffle, pliée en deux qu’elle était.

-Georges...riait-elle toujours et cherchant son souffle, mais où donc allez-vous chercher de telles expressions ? c’est délirant de drôlerie, j’adore.

-Oh ! ça vient tout seul, tout simplement, lui dit-il en riant aussi, un Franki ne se force jamais dans ce domaine...ça fuse à l’à-propos, voilà !

-Je vous adore tous, mes frères chéris. -Merci bien pour nous tous, ma belle Akadi, si...mais restons en là, car sinon.... -Georges, il y a longtemps déjà...En toute franchise, veux-tu rester avec moi

cette nuit ? je te promets de rester douce, caline et patiente et oublier mon côté mante religieuse, tu veux bien ? ça me ferait beaucoup plaisir, tu connais parfaitement mon grand penchant pour toi, n’est-ce pas ? Alors ?

-Ah ! Jennifer, insupportable et affolante tentation...et dire qu’il me faut te refuser, alors qu’il y a moins de deux décades je t’aurais faite gémir et demander grâce...car figure-toi que pas plus tard que cette nuit dernière, Martine, ma chère secrétaire du moment, tu la connais je crois ?

-Oui, la dernière fois vous êtes venus ensemble...Belle plante que cette Martine, et elle m’a l’air des plus vicieuse et délurée, sexuellement parlant j’entends, et je m’y connais...

-Ça oui ! et une enflammée du croupion de première elle aussi ; enfin, toujours est-il que cette nuit même, elle se mit en tête de me redonner mes ardeurs de mes vingt printemps, folie que tout cela...et comme une andouille que je suis, j’ai

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suivi ses arguments érotiques irrésistibles, faut dire ; arguments qui, après cette fameuse nuit...eurent pour résultat de me mettre sur les rotules, enfin quoi, je roule sur les jantes ; elle me les a asséchées pour au moins une semaine ! Alors, merci pour ta proposition qui m’enchante et m’honore mais me laisse malgré tout sans réaction, évidente...C’est le calme plat, quoi ! Waterloo ! Waterloo ! morne plaine ! comme disaient ces tarés disparus.

Jennifer rit aux éclats encore et l’embrassa tendrement sur les lèvres et lui dit. -Georges, promets-moi que la prochaine fois que tu viens me voir, tu resteras

à jeun durant une bonne semaine, d’accord ? que nous puissions tenir un minimum de conversation particulière, ok, mon chéri ?

-Avec grand plaisir, je note ta proposition on ne peut plus raisonnable, merci, ma colombe, chaude du...

Grand rire de Jennifer. -En plus, lui dit-elle, nous pourrons parler encore et encore de l’Histoire de ce

monde ; cela me passionne et ne connais personne d’autre que toi qui connaisse si bien ce si vaste sujet, promis ?

-Avec grand plaisir, ma belle Akadi de feu... L’Histoire avec un grand H est un sujet capital et bien trop négligé par la

grande majorité d’entre nous, dit-il, mais je comprends aussi que des Êtres jeunes qui sont impliqués chaque jour dans une lutte âpre, et qui risquent leur vie à chaque sortie ne puissent point se soucier de ces données, n’en aient ni l’envie ni encore moins le temps. Il en revient donc aux anciens comme moi de se préoccuper d’étudier ces choses-là et de les en aviser des faits importants et vitaux pour la construction de notre futur ; car il est pourtant évident que si l’on a la plus petite prétention de construire un nouveau Monde, ce qui est notre cas, il est impératif, vital même, de connaître un minimum celui qui l’a précédé, pour au moins ne pas reproduire le négatif d’antan ; et comme en l’occurence tout ce qui vint du monde disparu est réputé totalement insane et mortifère à 98 %, l’on se doit de le parfaitement connaître pour reconstruire sur de nouvelles bases.

En clair, tout ce qui concerne les moeurs et us et coutumes de ces civilisations disparues, fut quasi totalement bon pour la grande poubelle du temps, les oubliettes de l’éternité. Du reste, pour dire l’importance de la chose Historique, sache que depuis les six à huit millénaires précédents pour le moins, le monde ancien avait occulté l’Histoire vraie. Il ne faut jamais oublier que l’Histoire est toujours écrite par les vainqueurs, essentiellement.

Les dirigeants de chaque pays manipulaient les faits, refaisant leur Histoire, l’adaptant suivant leurs propres intérêts. Et quand je dis pays, il faut entendre les rois puis les politicards de ces nations ; véritable crime de société qui permit ainsi aux satrapes de tous poils et de toutes couleurs de réécrire à leur convenance et chaque jour l’Histoire de leurs régions, pour permettre de manipuler les peuples maintenus dès lors dans un spectacle irréel, à la mise en scène d’une perpétuelle désinformation propre à les tenir dans un éternel lavage de cerveau sans cesse réactualisé, et dans une servitude douceureuse dont les propres victimes ne percevaient même pas leurs propres carcans et boulets à

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leurs pieds. Beaucoup le pressentaient mais par lâcheté et conformisme confortable ils s’éfforçaient de ne pas le voir officiellement. Il n’y a pas plus aveugle et sourd celui qui ne veut point voir ni entendre !

A ce sujet j’ai lu une doc où l’auteur ancien disait que l’homme d’alors avait son cerveau auto-programmé pour exclure de sa pensée et perception, tous faits jugés inacceptables, soit qu’ils représentaient une situation ou fait hors norme, hors du conventionnel, du paradigme établi. Ceci pour le protéger d’un choc émotionnel incapable d’être géré. On comprend mieux pourquoi ils subirent ces dictatures sans rien faire contre, leur lâcheté, veulerie et conformisme aveugle les avait ainsi déjà condamné depuis fort longtemps à disparaître.

En fait, la dictature mondiale une fois instaurée, mise en place, les emprisonna, avec l’assentiment béat de ces populaces rendues aveugles et sottes, dans ce faux bonheur matérialiste de la course à la consommation frénétique de biens matériels. Consommation compulsive, perpétuelle et à outrance, de nouveaux biens ; habitudes, vices que ces satrapes leurs inculquèrent avec l’aide de la télévision, support farci de publicités et messages subliminaux les poussant à cet effet et, ils le surent mais bien trop tard, ils subissaient depuis des décades un autre type de contrôle de leur volonté par l’effet de la fréquence des vibrations des images sur les écrans de télévision ; système programmé sur des fréquences particulières qui annhilait la volonté propre du sujet, l’amenant inconsciemment à un comportement de soumission dirigé à distance.

Au final, les peuples furent victimes d’eux-mêmes, de leur incapacité à se sortir de ce carcan qu’ils se passaient joyeusement chaque matin autour du cou, et à chaque achat compulsif qui les enchaînait toujours plus à leur ratelier. Rendus victimes de la peur de perdre tous leurs faux biens s’ils ne marchaient pas droit, suivant les diktats des maîtres qui les tenaient ainsi à la gorge, à la longe, comme des animaux de trait qu’ils étaient devenus sans le percevoir.

Ainsi, sous le prétexte de faire face aux actions terroristes qui, pour la pluparts étaient l’oeuvre de ces gouvernements criminels, pour officiellement instaurer toujours plus de moyens de protections des populations face à ces attentats aveugles et sanglants, et suite aux implants de chips au suivi satellitaires sur les animaux domestiques, qu’ils étaient devenus. Les gouvernements présentèrent une profusion de bonnes raisons de ces moyens de contrôles...Ainsi, leur contrôle absolu par ces fameux et sinistres micro-chips implantés alors dans leurs chairs, sur le dessus de leur main droite.

Pratique qui allant à l’encontre des libertés les plus élémentaires de chacun des citoyens, fut instaurée et rendue obligatoire du jour au lendemain au final de 2013 dans tous les pays riches pour commencer, faisant fi des molles contestations des organisations de défenses des droits civiques ; l’ensemble aggravé par un tatouage invisible, sauf sous lumière noire, d’un code-barres sur le front de chaque individu, marque implantée à son insu, quand un individu entrait dans un service hôspitalier et devait être anesthésié, tandis que les bébés le reçurent automatiquement à la naissance.

Ainsi dans les villes, en plus du suivi satellitaire des chips implantées dans chaque individu, chacun était sous surveillance constante de caméras de

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détections d’ultraviolets couplées à un laser, pouvant de ce fait lire le code-barres de chaque individu perdu dans une foule. Ils étaient ainsi sans cesse contrôlés et espionnés dans leurs moindre actions. L’argent liquide et les cartons de paiements ayant disparu par la même occasion, tous les achats ou quelconques transactions détectés instantanément avec ce chip implanté se faisaient dès lors par retraits automatiques sur leurs comptes bancaires.

Plus personne ne pouvait échapper à ces contrôles absolus, à moins de fuir le pays et ce système d’espionnage tout azimut, et perdre tous ses biens pour partir en se cachant, vivre dans un pays pauvre ou en développement, comme l’Asia, la Merdika du sud, certaines îles des Karibes et d’Océni...tout en ne sachant pas jusqu’à quand ils échapperaient à ce système se voulant planétaire.

En définitive, ces populations furent victimes de ce faux progrès matérialiste de cette société se targuant de supériorité absolue sur les sociétés précédentes. Mais de par ce fait même, ils perdirent l’instinct de survie salvateur de l’animal, le seul d’authentique et vital et ne furent plus capable de percevoir sous leurs pas la damnation se cachant sous l’épais tapis de l’illusion dans lequel ils s’engluaient insidieusement et inexorablement. Marécage fatal qui peu à peu les engloutira irrémédiablement corps et biens, car ne laissant alors plus aucune volonté et possibilité d’action...atteignant alors le fatal point de non-retour !

On pourrait en parler pendant cent ans que nous n’épuiserions pas la liste des innombrables crimes et faits coupables de cette humanité, si l’on peut encore décemment qualifier de tels individus d’hommes.

Si l’on devait parler des choses démentes que ces gens faisaient depuis des millénaires, durée qui en elle-même démontre une inéxorable constance dans leur folie furieuse ; on peut prendre au hasard l’exemple typique suivant, parfaitement représentatif.

Quelques siècles avant 2015, la secte religieuse phagocytant l’Occident, fut divisée en plusieurs branches ennemies, il faut souligner ce détail, branches qui se firent une guerre à mort sur un point de divergence de leur pratique routinière, à savoir que lors de leurs simagrées, spectacle fourni pour endormir leurs troupeaux bêlants de leurs partisans aux esprits obscurcis, ils usaient d’une sorte de brioche, pourquoi pas après tout...mais, le litige explosa un jour pour savoir, et crois-le si tu le peux, Jennifer, savoir s’il fallait fabriquer cette pâte avec du sel ou du sucre.

Tu peux aisément imaginer l’importance vitale de la chose, ma chère Akadi jolie...Deux camps, deux chefs successifs divergèrent donc pendant des générations, deux monstres dictatoriaux et sanguinaires devrait-on dire, résultat : des guerres et conflits jusqu’à peu avant leur disparition, ravagèrent l’Euromorte de leur haine réciproque durant des siècles. Des millions d’innocents furent tués pour ce détail d’une importance cruciale pour l’avenir de l’homme d’alors, comme on peut aisément s’en douter...

Jennifer le regardait bouche bée...stupéfaite. -Voici comment cette humanité naquit et prospéra dans la pire des dictatures,

le meurtre, la torture et négation du Moi de l’individu. Une monstruosité absolue, qui doit être annihiler de cette planète, définitivement, inéxorablement

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et sans pitié. Nous tous, Hommes et Femmes d’honneur, devons anéantir ces tendance avec la même fureur qu’ils employèrent pour mettre ces hommes en esclavage. L’amour universel éclora ce jour du grand massacre, car seul le sang de ces monstres survivants coulant à flot lavera cette infamie, car seul le sang du coupable peut laver le sang versé par ses victimes, uniquement, le reste n’est que hypocrisie et intentions cachées et suspectes de récupérations. La mort du coupable, la plus horrible possible est seule rédemptrice ! Tel est notre devoir sacré, ancré profondément dans l’esprit de chacun de nos combattants ; que Gaïa soit remerciée à jamais d’avoir permis la renaissance de ces Humains forts, généreux et responsables.

Jennifer, respiration en suspend, buvait ses paroles... -Ha ! et on ne peut parler de leurs folies coupables sans citer leur suicide

collectif avec les drogues qui étaient le monopole des Etats, particulièrement celui de Merdika du Nord, chez toi justement, ma belle ; réseaux mondiaux de la vente de cocaïne produite en Merdika du Sud et organisés par leurs services secrets et avec les grands financiers traditionnels.

Pour l’Euromorte, le trafic de l’opium d’où dérive l’héroïne était dans les mains d’un Zanko-Khuigs encore, celui d’un milliardaire contribuant à l’assassinat des jeunes occidentaux. En général, ces drogues furent peu à peu tolérées puis sans contrôle à partir de 2012 ; sciemment, pour anéantir les restes de virilité des peuples, véritable génocide qui ne voulait pas dire son nom ; mais malgré tout, ce ne furent qu’une minorité des populations qui tombèrent dans ce piège pervers, les plus faibles et les plus jeunes malheureusement, comme tel était leur ignoble objectif. Sans doute comptaient-ils les soumettre tous comme firent ces maudits Pritichs avec l’opium contre les Chintoks ? Le résultat escompté ne fut pas probant car fut limité mais l’intention génocidaire était flagrante.

Jennifer changea de position, le fixant toujours intensément. -Ce qui caractérise le plus à mes yeux leur niveau astronomique de la

déchéance la plus ignominieuse et impardonnable, fut le fait courant alors d’avoir des animaux de compagnie chez soi ; les choyant de leur amour dénaturé et abject de bassesse sentimentale la plus vénéneuse. Leur donnant les meilleurs soins et alimentations ; dépensant des fortunes pour ces chiens et chats pour la plupart, quoique certains adoraient des grenouilles, araignées, serpents, rats, souris, lapins, oiseaux et tutti quanti, ce avec le plus grand naturel et dans un consensus général, car cela fut la création d’une nouvelle industrie alimentaire milliardaire pour fournir tous ces monstres dénaturés, ce qui les condamne en bloc à une damnation éternelle. Mis à par bien sûr comme toujours, une poignée de personnes lucides qui se révoltaient devant ces faits inacceptables et insoutenables, car ces monstres idolâtres laissaient crever de faim des millions de leurs semblables, et pire encore, des millions d’enfants mouraient de faim et de sévices les plus horribles dans l’indifférence générale et totale !

A ce propos, selon un rapport datant de 2005 d’un de ces organismes mondial officiel, chaque année de ces temps-là, six million d’enfants mouraient de faim dans le monde ! Connaissant le haut pouvoir de mensonge et de manipulation de ces organismes tous vendus au pouvoir de Merdika du Nord, les plus grands

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responsables de cette barbarie : laisser mourir des enfants de faim, on doit, pour cerner la vérité de plus près, multiplier ce chiffre par deux ou trois...

Disons donc qu’annuellement 20 million d’enfants mouraient de faim en 2005, chiffre plus objectif ; puis, dans la décade suivante, et jusqu’en 2015, ils furent près d’une centaine de million. Alors que des millions de ces pauvres misérables vivaient dans les pays riches même, devant ces riches donc, enfants et adultes blancs croupissants dans les rues, pendant que des immigrés étaient subventionnés par les États d’Euromorte ; véritable infamie et trahison.

Le plus regrettable est qu’une telle humanité ne soit pas crevée bien plus tôt pour éviter ainsi une vie de calvaire à ces milliards de misérables, cela aurait été une véritable et authentique miséricorde, et réellement humanitaire que celle-ci.

Ainsi de la Frika...pauvres êtres frustes, innocents et généreux dans le fond. Étiez-vous parfois des damnés des espaces stellaires ? comme vous l’écrivait déjà un Charles Fort dans Le Livre des Damnés : « Fuyez si vous le pouvez un jour ! Je vous le garantis, votre rédemption n’est point sur ce monde », disait-il alors.

-C’est monstrueux, révoltant ; comment pouvaient-ils aussi nonchalamment commettre de tels crimes ? Cela me dépasse complètement, je n’arrive pas à réaliser ce qui se passait dans la tête de ces gens pour évoluer ainsi.

-Et oui, seule une folie collective, une pathologie organisée peut l’expliquer à mon avis, mais je crois que cela restera un mystère authentique pour nous tous qui sommes sains d’esprit et équilibrés. Cela fait lourdement réfléchir sur le supposé moyen réel, le pouvoir et volonté de révolte de l’individu moyen.

Toutes les guerres et soi-disant révolutions furent voulues, organisées et financées par la grande finance internationale, dans ton ex-pays ; des documents historiques et nombreux sont là pour le prouver ! Est inexistant donc, le supposé pouvoir des peuples à organiser d’eux-mêmes une révolte ; les mouvements anarchistes des 19 et 20ème siècle l’apprirent à leur dépend et le payèrent durement. Seuls les lobbies financiers ont payé pour que soient commisent toutes ses horreurs, monstruosités sans nom. Oui, eux seuls !

La semaine dernière j’ai retrouvé comme par miracle dans le foutoir de ma biblio, un article d’un journaliste Franki fort polémique en son temps, Urbain Gothier, qui mourut deux générations avant le génocide, la voici :

« Vous voulez vivre ? Vivre, c’est agir ; et l’or est un puissant levier. La misère aussi, qui donne l’indépendance.

Il est fort, l’homme qui dispose de quelques millions. Mais il est redoutable, l’homme qui n’a pas de besoins, qui n’a pas de liens, qui n’a pas de crainte, et qui garde une âme ferme, une pensée lucide, l’œil juste et la main prompte. Restez pauvres.

Si vous êtes privés des filles d’opéra, du salut gouailleur des laquais, de l’obsession des parasites, de l’envie des faquins, de la trahison de vos amis, vous ne manquerez pas cependant de quelques satisfactions. Vous sentirez les vivifiantes secousses de la colère et les fortes jouissances du mépris. »

-Admirable ! Mais...mais c’est tout à fait nous à nos débuts ça !? s’écria-t-elle ravie.

-Indubitablement, ma belle, et de pauvres d’alors, vois maintenant notre puissance qui va rayer ces chients de ce monde, notre colère et mépris aidant

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justement...Cet Urbain là avait écrit notre glorieuse destinée, ne nous reste donc plus qu’à effectuer sa glorieuse aussi, réalisation, ce qui ne saurait plus tarder !

-Exactement Georges, nous allons les rayer de la carte ! -Parfaitement ! Donc, l’homme d’alors de par son grand nombre avait sa

faculté d’analyse annihilée par l’ampleur démesurée de sa propre masse gigantesque. Des milliards d’unités ne forment plus qu’un bloc impersonnel sans plus aucun pouvoir de compréhension et discernement et encore moins de la faculté d’analyse et donc de prendre la moindre décision qui lui soit bénéfique.

Masse = inertie aveugle et léthargie chronique, d’où résulte immanquablement le chaos et pour finir dans une apothéose, sa disparition finale ; le tout généré par l’insatiable soif de toujours plus exploiter cette masse amorphe et ignare de la part des satrapes qui, pour employer une métaphore, scièrent la branche sur laquelle ils étaient assis, et disparurent avec leurs victimes, car eux-mêmes furent victimes de la sordide et criminelle machination de leurs maîtres à tous : ces pourritures de Zanko-Khuigs.

Seul leur immense orgueil et suffisance les empêcha de percevoir leur pourtant incommensurable et sordide réalité, à savoir qu’ils étaient aussi des esclaves serviles et d’autant plus abjects qu’ils avaient cru abuser la plèbe, vile et toujours méprisable, suivant le standard de ce monde-là ; le cercle était ainsi bouclé.

Les hommes de ce temps devinrent réellement et possiblement fous de par cette promiscuité justement, ce manque d’espace vital de l’individu vivant dans ces monstrueuses mégapoles toujours plus gigantesques et inhumaines donc, où chacun subissait de perpétuelles agressions de toutes sortes, sans pour autant en être vraiment conscient.

Tels des insectes grouillants, ils comprirent bien trop tard que les êtres humains ne sont pas adaptés pour vivre dans l’étouffante densité d’une ruche industrielle urbaine. La preuve fut là, crevant les yeux au bout d’un siècle de bruits, de la vitesse croissante, les rythmes de travail toujours plus hallucinants, la destruction du cycle naturel de la lumière avec l’éclairage artificiel à profusion et sans parer, les ondes de toutes sortes interférant sur son propre rythme biologique, le destructurant gravement.

Cet insecte déphasé atteignit de fait un seuil pathologique et de ceci partirent les déclenchements de pulsions létales de par l’exaspération de son instinct animal de prédateur refoulé, porte ouverte alors aux sauvages pulsions de meurtres et massacres sporadiques, donc inexplicables pour le commun des mortels...Folie pure et simple. Enfermez n’importe quels animaux dans une ambiance stressante, au bout d’un temps ils vont s’entretuer. Masses sordides et méprisables s’il en est ; ils disparurent tous à la brutale et immense satisfaction révélée et générale des rares survivants !

-J’ai toujours senti ces choses-là d’instinct mais ne savais pas le formuler avec autant de brio comme tu viens de le faire, mon cher Georges, dit alors Jennifer dans un long soupir...Trop prise comme tu dis si bien par la charge de ce job qui me pompe tout mon temps ; c’est pour cela que j’adore converser avec toi, car tu es une véritable encyclopédie vivante et irremplaçable.

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-N’exagérons rien, personne n’est irremplaçable, et heureusement car sinon. Les cimetières sont pleins de ces gens irremplaçables justement...se croyaient-ils. Mais c’est certain que j’en sais beaucoup plus que le commun des mortels ; cela aura au moins permis de trouver ces idées pour ce spectacle d’épouvante : connaître les travers et certaines coutumes anciennes de l’ennemi qui, il se pourrait fort bien que la majorité d’entre eux ne s’en souviennent plus bien non plus, ce qui est fort possible aussi. Le temps peut être un grand illusionniste pour les âmes saturées d’infamies.

-Je donnerai cher pour que ce grand jour soit demain, tant il me tarde de les voir se liquéfier de peur.

-Patience, ma belle, tu sais pourtant bien, toi, une si divine croqueuse d’Hommes, que plus c’est long plus c’est bon, hein ? dit-il en souriant de connivence.

-Comme tu le dis si bien, dit-elle en riant aux éclats avec plaisir, et merci pour la divine ; j’ajouterai ce superbe et modeste qualificatif au palmarès de mon tableau d’honneur...de l’érotisme effréné.

Ils rirent tous deux un moment, puis Georges renchérit. -Tiens ! Toi qui est fana d’Histoire, je vais te conter un fait récent. Sais-tu

d’abord que dans le temps j’étais un patrouilleur, un pilote de perceur ? -Oui, et fort célèbre, parait-il. -Qui t’as dit ça ? dit-il fort surpris. -Alexandra et Claude, nous sommes grands amis depuis longtemps

maintenant, et depuis plus récemment, avec leur amis patrouilleurs aussi, Marion et son équipier, ce fameux Hugues. Je n’aurai jamais oser imaginer qu’il puisse exister un Homme aussi gigantesque, il est impressionnant, de par sa taille, et sa douceur aussi, mais il doit être redoutable au combat.

-Ça tu peux en être certaine, invincible par le commun des mortels même, affirmerais-je sans hésitation.

-J’ai beaucoup été impressionnée aussi par cette Femme, Marion, que j’ai senti être un être d’exception elle aussi, je ne sais pourquoi réellement, mais je suis certaine que c’est un Être d’une dimension hors norme, je me trompe ?

-Absolument pas, ton flair ne t’a pas trompé ; je l’adore cette Marion, et nous sommes très amis...Elle est relativement depuis peu avec nous, elle fut esclave dans une plantation agricole, et déjà elle fut la cause de grands et puissants événements qui impressionnèrent fort tous les nôtres, qui sont pourtant pas facile à l’être, tu peux m’en croire sur parole ; et c’est d’elle aussi cette inspiration de développer ce spectacle d’épouvante pour les Zanko-Khuigs, et sans savoir vraiment pourquoi, je sens obscurement qu’elle n’a pas fini de nous surprendre, l’avenir seul le confirmera.

Mais bon, revenons en à cette histoire qui concerne d’une certaine façon et indirectement les origines de vous tous, Akadis...C’est au sujet de vos ancêtres à l’origine de la constitution maudite des Zanko-Khuigs ; les Pritichs.

-J’ai ouï-dire que les survivants au génocide auraient disparu, c’est cela ? -Oui, mais sais-tu comment et pourquoi ? -Non, pas la moindre idée.

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-C’est un peu long, as-tu le temps pour écouter ce récit de notre Histoire ? -Pour toi mon cher Georges, ma pendule s’arrête, je suis toute ouïe. Elle

s’installa plus confortablement, assise sur une jambe repliée sous elle, le bras gauche allongé sur le dossier du sofa, tournée vers son visiteur qu’elle ne quittait pas des yeux, fascinée par son charisme.

-Merci de ton attention ; mais sache toutefois que si je suis un des héros involontaire de cette aventure, je ne te la conte que pour sa valeur instructive pour les générations futures ; du reste, ton ignorance à ce sujet me montre que chez vous le sujet ne fut pas assez divulgué, et c’est préoccupant ; j’en parlerai à mon collègue Ruppert pour qu’ils rectifient le tir.

Voici l’histoire ultime des Pritichs. Ainsi donc, dans les premières années où

nous reçûmes les premiers perceurs, avec l’aide de tes compagnons des Appalaches qui nous les avaient livré et qui parlaients plusieurs langues de l’Euromorte et, sachant pertinemment grâce à nos documents informatiques et autres que la très grande majorité de nos populations de survivants se regroupaient principalement vers le sud, particulièrement ici même en Franki du sud, et en second en importance, en Espingo et, hasard ou pied de nez de l’histoire, ce furent justement ces deux contrées que choisirent nos ennemis pour résidence ; comme si le destin préparait avec malice la façon d’optimiser leur futur anéantissement.

Donc, le reste de ces populations étaient éparpillées et pour ainsi dire isolées par petits nombres dans les autres territoires. Il était plus qu’ évident que pour construire une force de reconquête, nous devions impérativement nous regrouper, joindre nos forces et qualités respectives pour arriver à une faisabilité acceptable, sinon la reconquête serait hors d’atteinte : seule la vie en symbiose pouvait générer l’harmonie et ainsi nous donner cette chance.

Nous décidâmes donc de passer à l’action et prospecter ces territoires de l’Euromorte. Ce fut un succès complet et heureux, et avec l’aide de tes frères et soeurs Akadis comme interprètes, tous ces groupes isolés représentant des milliers de personnes furent rapidement conquis par notre proposition de venir vivre chez nous et chez nos frères Espingos, des perceurs de chez eux participant aussi à cette recherche.

Ainsi, en quelques six mois nous transférâmes ces gens dans nos stations. Ils s’intégrèrent rapidement et avec facilité, apprenant rapidement et d’autant mieux notre langue que c’était la plus parlée et la seule de restructurée pour une assimilation immédiate, de part sa concordance avec la phonétique. Pour finir, ce fut une réussite totale et de l’intérêt général, ces gens sont depuis indissociables de notre communauté.

-Je savais tout cela, dit-elle, et trouve admirable ce travail de regroupement qui vous rend bien plus forts et efficaces, et surtout aura eu pour résultat d’effacer ces anciennes notions de frontières, donc de différenciations stériles ayant pu encore persister dans les esprits, c’était là un grand danger potentiel futur de désunion, c’est évident.

-Exactement, tu as bien saisi l’ topo.

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-Le plus extraordinaire est qu’ils apprirent tous le Franki, cela dû être passablement compliqué, non ?

-En fait, non ; les jeunes s’y mirent de suite avec facilité, seuls les adultes eurent le plus de mal, et c’est logique. Il faut savoir que les difficultés pour apprendre une langue viennent de l’accoutumance auditive à la sienne propre, car chacune s’inscrit sur une bande de fréquences bien délimitée. Ces fréquences se mesurent en Hertz ; ainsi, la voix humaine officie sur une bande allant de 100 Hertz (graves), jusqu’à 8.000 Hertz (aigus). Sache, ma chère, que le principe de base est que l’on apprend bien que ce que l’on entend bien. cqfd !

Georges alla prendre un crayon et un bloc-note sur le bureau et revint s’asseoir et commença d’inscrire ces fameuses bandes de fréquences.

-Voici donc schématiquement les bandes en hertz des principaux idiomes occidentaux de l’époque.

*Voix humaine : de 100 Hz (grave) à 8000 Hz (aigu) Zanko-Khuigs.1500________________________________________8000 Pritich. 2000____________________________________8000 Ritali. 2000______3000 Franki. 100_300 Espingo. 150_350 Germain.100_______1500 Portuge, langues Slaves. 100________________________4000 -Super ! Je comprends mieux maintenant, dit-elle en souriant, ainsi, on entend

le mieux que dans la fréquence de sa langue maternelle, c’est bien ça ? -Exactement ! Comme tu peux le voir sur ce diagramme, le franki était le plus

restreint sur la bande, et alors totalement hermétique à ces pourris de Zanko-Khuigs, comme nous du leur du reste, puisque les deux officient sur deux longueurs de fréquences étrangères. Et, douce ironie de l’Histoire, ce fameux franki jusqu’alors hermétique à tous les autres groupes linguistiques, est devenue la langue de tous ces nouveaux Humains sur ce continent, belle revanche et vengeance sur l’adversité, non ? dit-il ravi et fier.

-Formid ! et qu’en est-il de ces Pritichs, alors ? -Nous y voilà. Depuis de nombreux siècles le peuple de cette nation, de part

son isolement sur son île, à moins qu’ils n’héritèrent d’une tare quelconque, avait développé un sentiment autre que leurs voisins continentaux. Ces peuples insulaires ont avec le temps, mais surtout grâce à leurs satrapes qui les manipulèrent, aidés aussi par leurs églises successives, avaient développé un esprit de supériorité outrancier et exacerbé débouchant comme de logique sur la haine de tout ce qui n’était pas Pritich...

Une haine indicible pour tous leurs voisins d’Euromorte d’avant la lettre. Ils furent ainsi depuis plus de mille ans, les agresseurs des nations de ce continent, à commencer par leurs voisins directs, les Rilands et Kosses, puis d’ailleurs : les Chintok, L’India, la Frika, etc.

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Ils développèrent une force maritime militaire et se rendirent maîtres des mers et firent alors tout ce qui était en leur pouvoir pour systématiquement ruiner toutes tentatives d’union d’une possible Europe unie d’alors ; ne reculant jamais devant une action aussi dégradante et vile soit-elle. Ils asservirent par le trafic d’opium et de thé, les Chintoks, puis leurs voisins des Indes, puis les pays du Moyent-Orient et une bonne partie de la Frika, le reste étant sous la coupe des Frankis. Pour finir, ils envahirent la Merdika du Nord, chez toi, ma belle Akadi, massacrant pour cela et sans sourcillier des millions d’autochtones dénommés abusivement indiens. Et pour finir en beauté ces infamies, ils annèxèrent le reste de ce continent sous un contrôle économique et militaire total.

Les peuples autochtones de ces vastes contrées du Sud avaient aussi été annihilés par des colons Espingos et Portuges ; les deux marchant derrière les bannières scélérates et criminelles de leur Église ; les représentants de cette dernière exhortant alors leurs forces militaires prédatrices à mettre en esclavages ces peuples innocents, puis de les massacrer devant leur honorifique résistance à devenir les esclaves de ces hommes immondes et parjures à leur dieu soi-disant fait d’amour universel...Mais cela est une histoire.

Ce peuple Pritich fut donc de tout temps l’ennemi héréditaire des autres peuples de l’Euromorte, et plus particulièrement avec nous, les Frankis, leurs voisins les plus directs et leur faisant toujours face et, comble d’une insoutenable injure et arrogance à leurs yeux, nous fûmes pour de longs siècles, de plus ou moins égale puissance militaire avec eux, suivant les cours fluctuants des conflits armés qui endeuillent et couvrent sans parer des siècles de guerres, massacres innombrables et désastres pour tous ces peuples pris dans l’étau de la folie de volonté de toujours plus de puissance aveugle de leurs royautés et églises, et ensuite de leurs gouvernements autoproclamés démocratiques ; tous foncièrement malhonnêtes, criminels et esclavagistes, au mépris total de la Vie et de la morale la plus élémentaire ; mot ayant perdu le moindre sens sous leurs mandats.

Il en fut ainsi, jusqu’au dernier jour de ce dramatique 1er mai 2015. Ils restèrent en dehors, réticents jusqu’à la caricature à l’union de cette Europe qui de toute façon avait été constituée pour mieux asservir tous ces peuples ignares et stupides, sans exception aucune. Il faut savoir qu’ils furent tous rendus en esclavage de part leurs incommensurable lâcheté et incurie, et le comble de l’ironie, ils se croyaient libres, alors qu’ils étaient livrés pieds et poings liés aux moindres diktats de leurs politicards, eux-mêmes vendus aux financiers.

Il suffisait, par exemple, de perdre son emploi pour devenir un rebut de la société, à la merci des pouvoirs, un esclave des puissants...Ce qui fut facile pour les Hommes décidés et sans scrupules qui les contraignirent, car il faut reconnaître que si les premiers ne se défendirent pas, les seconds eurent la force et le courage de les réduire à néant. La liberté se gagne à chaque instant de sa Vie, c’est une lutte âpre et dure mais à la seule portée des âmes fortes, bien trop rares en ces temps de veulerie généralisée, et ce fut là le drame majeur et déterminant de cet Occident dégénéré et insane.

Faut-il une preuve majeure de tout ceci ?

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Durant tous ces longs siècles de l’histoire romaine, qui commença il y a bientôt trois mille ans maintenant, terre de satrapes innombrables, et jusqu’au jour dernier de cette humanité disparue, il n’y eut qu’un seul Homme fort et rebelle méritant ce titre de noblesse suprème, ce titre d’Homme. Un seul parmi ces centaines de millions, ou milliards d’hommes depuis cette Rome arrogante et criminelle. Seul, cet Homme fut le symbole de la liberté en tout temps, j’ai nommé le glorieux esclave-gladiateur révolté, le thrace Spartacus, qui avait été enrolé de force dans l’armée romaine et, ne supportant pas de servir les ennemis de son peuple, de tous les peuples d’alors plus exactement, se révolta et entraina un groupe de 74 gladiateurs avec lui, dont deux Gaulois, Oenomaüs et Crixus, ce dernier commandera un troupe des révoltés, ainsi que des Thraces et des Germains.

Spartacus menera le plus grand soulèvement d'esclaves de tous les temps, composant une armée hétéroclite de 120.000 misérables qui se joignirent progressivement à lui. Dans une furieuse et dès lors légendaire et grandiose épopée, il tint héroïquement les armées romaines en échec pendant deux ans, de -73 à -71 avant la dernière ère, et fut finalement vaincu et tué sans gloire par les légions du préteur Marcus Licinius Crassus, ayant le surnom de Dives (le riche) qui devait son immense richesse en possédant une grande quantité d’esclaves, et un des plus importants propriétaires immobilier de Rome.

Ce dernier, plus tard, laissera sa peau d’infâme en Syrie, dans la guerre contre les Parthes. Après divers combats contre plusieurs compagnies d’esclaves qui s’étaient séparés, et après un gigantesque massacre de ceux-ci, avec l’aide des légions de Pompée accouru d’Espingo pour l’occasion, les derniers 6000 révoltés furent mis en croix sur les 195 km de la via Appia, allant de Capoue à Rome. Le corps de Spartacus, le plus glorieux combattant de la liberté de tous les temps, ne fut pas retrouvé, privant ainsi la dictature sanglante des Romains de ne pouvoir exploiter sa dépouille pour leurs propres gloire de criminels barbares se cachant sous les apparences trompeuses des toges immaculées de leur noblesse infâme, impérialiste, esclavagiste, corrompue, violente et dépravée ; pratiques se poursuivant jusqu’à l’époque ultime des costards croisés.

Jennifer poussa un long soupir... -Un autre cas d’esclaves révoltés existe, et beaucoup plus récent, celui de cette

île des Karibes, tout près de chez toi, ma belle Akadi. Je parle là de Haïti, qui se libéra en 1791 des chaînes des Frankis d’alors. La grande différence fut que ces populations d’esclaves noirs et des métis, qui prirent ensemble le pouvoir, fut que dès qu’ils eurent arraché leur indépendance en massacrant les blancs, ils développèrent un racisme exacerbé entre eux. Les métis se voulant supérieurs aux purs nègres, et depuis ils instaurèrent un régime de terreur sans fin, se massacrant joyeusement les uns les autres, ruinant à jamais cette île qui pourtant fut un jour plus riche que le pays de tes ancêtres, ma belle Jennifer.

Exactement comme le firent les anciens esclaves au Liberia, ruinant à jamais cette nation artificielle de la Frika, nation fantoche inventée par les premiers Zanko-Khuigs esclavagistes, pour calmer leur conscience qui les tracassait,

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dirent-ils, mais en réalité ce fut une tentative de se débarrasser de cette masse de nègres dont ils ne savaient plus que foutre.

L’ironique de tout ces faits grotesques et sinistres, est que ces gouvernements criminels Euromortes de cette fin de civilisation, culpabilisèrent leurs peuples en leur faisant croire que eux seuls, les blancs, étaient des racistes. Faut-il être la pire des raclures pour agir ainsi. Sauf que ces peuples changèrent vite d’avis quand les turcs et autres populaces barbares à leurs suite envahirent l’Euromorte, leur espace vital ; mais c’était mille fois trop tard et ils en crevèrent ; pour notre plus grande gloire à nous, les enfants sacrés de Gaïa. Quoi qu’il en soit, prétendre que les races n’existent pas est totalemment mensonger.

Ce bobard comme tant d’autres fut répandu par des scientifiques marrons vendus aux principaux intéressés d’une telle manipulation, dans le but de se protéger eux-même avant tout, et répandre ce venin mortel d’une soi-disant uniformité de l’espèce humaine en vue essentielle de leur future dictature planétaire, soit, les Khuigs eux-mêmes. Ces dits scientifiques, infâmes raclures s’il en est, criminels et traîtres à leur espèce, se vendirent sans vraiment le savoir eux-mêmes parfois, car seul les intéressait un gros chèque suffisemment conséquent pour occulter tout sens dérangeant de bioéthique et honneur élémentaires ; mais quand on vit et prospère dans le royaume du seigneur Mammon, seul le résultat financier compte, telle est la seule et véritable éthique en fait : la richesse financière.

Si tous partageons un même patrimoine génétique à 98,80 %, il en va de 94 % avec la souris et de 98,40 % avec le chimpanzé, et c’est environ ce petit 1,20 % de notre ADN qui différencie aussi nettement et aussi irrémédiablement un Germain d’un Ritali, qu’un indien d’Amazonia d’un Chintok, ou comme un Portuge se différencie d’un Skandinav, etc. Toute personne ayant gardé son libre arbitre et esprit clair savait obscurément du fond de son âme que la version officielle était une monstrueuse manipulation dans l’intention de nuire gravement aux humains autres que Khuigs, et en particulier, nous les blancs, qu’ils haïsaient depuis toujours.

Et s’il fallait une preuve de tout ceci, la voici. Pourquoi ces infâmes Zanko-Khuigs tentèrent-ils alors d’inventer des armes raciales, des armes chimiques et bactériologiques spécifiques aux habitants de la Frika ? Il paraît bien qu’ils aient réussi quand les autres peuples virent plus tard le génocide effectivement réalisé sur ces peuples. L’arme raciale, le vaccin, dénonce aussi clairement que le jour qui survient après la nuit, que les différences raciales flagrantes existent bien entre les blancs, les noirs, les jaunes et les rouges...

Et pour autre preuve s’il en faut : chaque race a des tares et maladies spécifiques à chacune d’entre elles, et dont j’ai une liste de certains de ces faits dans mon ordinateur. Tout le reste n’est que logorrhée nauséabonde et raciste, elle. Que donc ils croupissent tous en enfer, où aucun fauteuil ne sera disponible à la droite d’un dieu virtuel et aucune vierge ne sera à disposition, car ils sont tous morts dans la pire des infâmies, les bourreaux aux ordres comme les victimes avilies, soumises et bêlantes...pures abjections !

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Du reste, ce n’est pas pour rien que quasiment vingt siècles après les Romains, les nations dites modernes de l’Euromorte, en commençant par un autre dictateur, un Franki cette fois, un certain Napo...drôle de nom, qui instaura le nouveau droit de justice de la République en s’inspirant de celui des Romains, qui n’étaient pourtant que des esclavagistes, impérialistes et d’un mépris et d’une brutalité totale pour la vie des autres, concept au-dessus de toute légalité, valeur et morale élémentaire...Pas étonnant que ces derniers siècles les amenèrent ainsi infailliblement droit au tombeau ; car ils avaient choisi pour valeur et exemple la négation même du sens de la Vie, et comme toutes les dictatures ils finirent dans la fange et le grand oubli cosmique et justicier.

Jennifer qui l’écoutait religieusement depuis le début, n’y tint plus et s’esclama. -Cette histoire de ce Spartacus est inouïe et exemplaire pour nous tous

maintenant, quel Homme que celui-là, dit-elle admirative ; je suis entièrement du même avis que toi, faut se bagarrer jusqu’au bout, jusqu’à son dernier souffle !

-Exactement ! Mais sans entrer dans plus de détails, sinon nous n’en finirions pas ; plusieurs générations avant la fin de ce monde donc, avec leurs esprits pernicieux et systématiquement haineux de leurs voisins, les Pritichs entrèrent alors tout naturellement en osmose totale avec un nouveau peuple maudit extra-Euromorte. Peuplade pratiquant aussi une haine totale et bien plus virulente des autres, une haine pathologique pourrait-on dire ; mais ils étaient bien plus retors, maladivement xénophobes, racistes jusqu’à la moelle, criminels par atavisme millénaire, ayant l’hypocrisie et calcul pour valeur et symbole...mille fois pire que les Pritichs, et c’était pas peu dire. Ces deux peuples étaient vraiment fait pour se rencontrer et s’unir, car on ne vit jamais sur cette Terre un aussi abominable et parfait mariage d’intérêts ; et c’est ainsi que naquit ce duo infernal et immonde d’entre toutes les horreurs qui ensanglantèrent durant d’innombrables millénaires cette pauvre planète, les Zanko-Khuigs.

-Quelle horreur, soupira Jennifer... -Et pour finir par une hilarante revanche de l’Histoire pour une fois, par l’effet

du grand balancier d’éternité, le même qui justement arrive en ce moment sur la gueule des Zanko-Khuigs ; ces Pritichs hautains et arrogants, finirent par devenir les serviles et empressés serviteurs de leur misérable progéniture de Merdika du Nord qui, en dignes et abjects fils de putes qu’ils étaient, les méprisaient ouvertement et furent les organisateurs attentionnés de leur ruine définitive. Cette nation misérable des Pritichs ne devint alors pas autre chose que l’obséquieuse et lamentable catin délabrée de leurs rejetons, bâtards maudits entre tous et haïs par tous les peuples de cette planète, ces Zanko-Khuigs, de l’infâme Merdika du Nord !

Tout en écoutant intensément, Jennifer avait rapidement servi un nouveau rafraîchissement dans deux grands verres ; Georges se désaltéra et continua.

-Sache avant tout, ma chère Jennifer et Akadi chérie, qu’il me plaît de penser, et en suis même certain, que tu ne saurais, de part ta gentillesse légendaire et grand amour à notre encontre, qu’être une descendante de ces Rilands, ces celtes Gallies, ou de ces Kosses, ces Pictes ; tous autres aïeux de ces contrées

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nordiques et insulaires étant définitivement incompatibles avec ta personnalité faite exclusivement de générosité et amour des autres.

-Oh merci Georges ! car je commençais à trembler à la seule idée d’avoir des ancêtres tels que ces monstres Pritichs ; encore merci, mon cher Georges.

-N’ai aucune crainte à ce sujet, tu es la droiture, l’honneur et l’amour universel personnifié, ton sang est celui qui fut de toujours l’allier et l’ami des Frankis, généreuse et franche. Bon sang ne saurait mentir.

-Ouf ! Je respire enfin, si c’est toi qui le dit ; elle lui prit une main et lui embrassa longuement avec ferveur, réconfortée.

-Ainsi donc, pour, et avant de le perdre, reprendre le long fil de cette histoire ; je fus par hasard désigné pour prospecter ces survivants Pritichs avec tes compagnons interprètes Akadis, le pilote Walter et son collègue Kevin ; mais pardonne-moi de ne pas me souvenir de leurs noms complets et à rallonge, ce qui n’est pas dans nos coutumes, comme tu le sais.

-Peu importe, continu, Georges, je suis impatiente de savoir la suite ; sais-tu que tu es un conteur remarquable ? qu’à chaque fois je plonge tête baissée dans ton histoire et en oublie le présent.

-Merci pour le remarquable ! Pour donc abréger cette histoire de ces Pritichs ; en quelques jours d’une rapide prospection, nous trouvâmes deux communautés regroupant relativement peu de monde, 438 personnes au total, dont un grand nombre de vieillards ; un pourcentage très nettement au-dessus de la normale, contraîrement et inexplicablement par rapport à nos stations du Sud aux effectifs beaucoup plus nombreux et à la moyenne d’âge beaucoup plus jeune.

Malgré leur état somme toute lamentable, Walter et Kevin entrèrent alors en action avec allégresse. Ils leur exposèrent ce programme de regroupement vers le grand Sud, aux climats bien plus cléments et dans un intérêt commun de constituer une force vive et efficace ; et ils leur expliquèrent nos intentions de détruire les Zanko-Khuigs, responsables du génocide de l’humanité.

A notre grand désarroi, ce fut un fiasco complet, plus même, car ces malheureux nous exprimèrent froidement leur haine pour tout ce qui n’était pas des leurs, et encore plus quand ils apprirent que nous étions des Frankis. Devant la grande agressivité spontanée d’eux tous à notre encontre, nous fûment obligés de sortir nos armes, en tuer quatre ou cinq et prendre la fuite avant d’y laisser notre peau.

-A ce point-là ? s’esclama Jennifer, abasourdie, horrifiée. -Comme je te le dis, tel fut ce jour d’horreur, de démence d’un rebut immonde

de ce restant d’un peuple dès lors exclu de sa légitime prétention et droit initial à s’intégrer dans nos communautés. Deux jours après et pour en avoir le coeur net, Walter et Kevin, tentèrent de renouer le dialogue, leur exposant brièvement les avantages pour eux, Pritichs, de s’unir à des communautés nombreuses et puissantes, mais rien n’y fit, ils maintèrent leurs positions d’intransigeance absolue et, comble de l’infamie, allant alors jusqu’à nous menacer de nous dénoncer aux Zanko-Khuigs s’ils en avaient l’occasion, leurs héritiers spirituels selon eux, dénoncer notre présence et de nos intentions à leurs égards...En fait, ils étaient persuadés que le monde avait été victime d’une catastrophe naturelle...

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-C’est invraisemblable une folie pareille ! s’esclaffa Jennifer, outrée, scandalisée. -Et oui, demande un jour à lire le rapport détaillé que firent à l’époque Walter

et Kevin, et tu en sauras alors autant que moi. Ainsi, devant ces faits catastrophiques et révoltants, mais surtout présentant un

immense danger potentiel futur, nous les laissâmes et allâmes vers l’Ouest prospecter leurs voisins de la Riland, qui depuis des siècles étant sous la domination des Pritichs, leur vouaient une haine mortelle. Ils nous reçurent avec enthousiasme et adhérèrent de suite à notre plan d’union des peuples, se souvenant d’autant plus d’une ancienne association de leurs peuple avec le nôtre pour combattre leurs ennemis héréditaires, les Pritichs ; nous gagnâmes ainsi près de 5463 âmes de plus.

Puis nous fîmes de même avec les Kosses, et là aussi l’alliance fut instantanée. Ce peuple avait aussi une longue tradition de résistance armée contre les Pritichs, et par delà les siècles ils n’avaient cependant pas oublié leur alliance avec nous les Frankis, contre les Pritichs toujours, dans une abominable guerre qui dura cent ans. Leur groupe représentait une population de 4987 personnes qui vinrent vaillamment grossir notre armée de combattants.

Ces deux communautés fort résolues à exterminer l’ennemi, et experts dans les armes, sont de rudes combattants, aussi déterminés que les nôtres. Tous ces peuples coalisés ne faisant désormais plus qu’un maintenant ; pour le plus grand bonheur de tous ; c’est notre seule chance bien réelle de parvenir ainsi à reconquérir notre Gaïa, la belle des cieux éternels.

Quand nous exposâmes à ces deux populations la situation des Pritichs, ils n’en furent pas surpris et déclarèrent qu’ils étaient des fous furieux et l’avaient toujours été, s’étant toujours comportés avec eux, Rilands plus parti- culièrement, en ennemis irréductibles, barbares et immondes, envers toute logique et normalité. La seule chose de sensé qu’il faut faire avec ces bêtes puantes, nous affirma alors le chef du clan Riland, Arthur O’Connell, c’est de les détruire tous car sinon, insista-t-il encore fortement, soutenu en ses propos par Robert Roxburgh, le chef des Kosses ; s’ils ont l’opportunité de nous dénoncer aux Zanko-Khuigs, vous pouvez être sûr qu’ils ne s’en priveront pas, car de toujours ils sont haineux des autres, de ceux de leur propre race pourtant.

Ils représentent un danger perpétuel et réel maintenant qu’ils vous connaissent, ainsi que de vos intentions ; il faut les éliminer jusqu’au dernier, on n’a pas le droit de laisser suspendu ce danger mortel sur les têtes de nos descendants, car nous qui les connaissons que trop bien et depuis l’an 1171, soit plus d’un millénaire, date où ils envahirent nos terres de Riland; nous pouvons vous affirmer qu’ils mettrons leurs menaces à exécution ; on ne change pas des fous criminels, des névrosés dégénérés qui plus est, visiblement au jour d’aujourd’hui.

Gaïa, notre mère bénie, rajouta perspicace le kosse Robert Roxburgh, pour venger les nombreux peuples victimes depuis si longtemps de ces malades mentaux, les a puni de leurs crimes séculaires en les rendant impropres à se reproduire, car du fond de leur stupeur, ils sont visiblement condamnés à l’extinction, mais n’attendons pas l’échéance et exterminons-les nous-mêmes et

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sans attendre ; on ne peut et on ne doit pas laisser perdurer un mal incurable menacer ainsi nos existences.

Nous revînmes ainsi rapidement vers le Sud, exposer aux notres cette incroyable situation et de la nécessité d’une action urgente et radicale. Pendant que les responsables organisaient la future répartitions dans nos stations d’Espingo et de Franki de ces nouveaux venus Rilands et Kosses qui, ces derniers vinrent avec leur trésor de guerre comme ils disaient : un stock de 352 barriques de leur boisson nationale, leur fameux Whisky, plus un troupeau de leurs moutons des îles Shetland, fameux pour la laine.

Nous repartîmes vers le nord dans un gros porteur avec un contingent de cent quatre-vingts volontaires super armés et forts résolus. Rapidement, nous nous présentâmes de nouveau aux Pritichs, et Walter et Kevin les avisèrent, en vain, que nous ne pouvions pas les laisser nous menacer, les priant une dernière fois de revenir sur leur décision infâme de nous dénoncer aux Zanko-Khuigs ; ainsi, devant leur criminelle obstination il n’y avait plus qu’à passer à l’action. Ce fut une exécution générale vite et proprement exécutée.

Même leurs femmes et enfants ont esssayé de nous tuer avec des armes dérisoires, alors la réaction de nos guerriers fut irréversible et totale ; ces cloportes dégoûtants de renoncement à l’honneur primaire de leur espèce, furent fusillés par rafales de pistolets mitrailleurs, sans arrêter, calmement et avec froideur, comme quand on détruit l’antre de bêtes malfaisantes et ignobles.

Ainsi finit dans la pire des abjections le déchet de ce restant de peuple infâme et traître de toujours à ses semblables. Fasse qu’ils pourrissent dans leur enfer débile en compagnie de tous les satrapes de la création ; qu’ils y retrouvent bientôt les Zanko-Khuigs ; ils seront ainsi à jamais rayés de la mémoire de ce Monde, désormais le nôtre.

Georges se tut, le regard triste, dans un ailleurs désastreux et innommable. Jennifer, livide, assise à ses côtés sur le canapé, lui prit une main dans les siennes et lui embrassa doucement.

-C’est horrible, Georges, je comprends que vous ne pouviez faire autrement avec ces fous criminels ; quel malheur, comment des êtres humains peuvent-ils en venir à un tel sentiment de rejet des leurs, cela me dépasse.

-C’est pourtant avec ce même type de comportement que les Euromortes en sont venus à se renier eux-mêmes, leur propre race, leurs propres cultures et traditions, pour idolâtrer d’autres peuples pourtant de longue tradition leurs pires ennemis, et les pires ennemis aussi de la liberté d’autrui et de l’honneur primaire de respect des autres. Du reste, après la chute de l’empire romain, ces barbares écumèrent longtemps les côtes Sud de l’Europe en des razzias sanglantes pour y prélever des esclaves blancs, des millions de slaves donc, d’où l’origine du nom, synonyme d’infamie pour ceux qui le pratiquent.

Aussi invraisemblable en fut-il, comme tu le dis si bien ma chère Jennifer, c’est incompréhensible mais pourtant réel, voilà pourquoi il faut que ce lamentable et désastreux fait historique de notre jeune Histoire soit porté à la connaissance de nos grands enfants, et ce sans exception, sinon c’est faire courir le risque à nos

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descendants de ne pas être suffisamment prévenus des terribles dangers que peut représenter l’Homme pour lui-même, envers sa propre espèce qui plus est.

Imagine, ma douce Jennifer chérie, que nous n’avons pas encore d’existence officielle sur cette planète et malgré notre Humanité balbutiante, notre Histoire à peine sortie des limbes est déjà entachée de trop nombreux faits horribles et sanglants, à cause de la folie de certains ; il faut donc absolument s’en prévenir le mieux possible et sans sentimentalisme pernicieux, aussi dangereux que le reste.

-Je suis entièrement de ton avis, Georges, je vais faire un rapport aujourd’hui même et demander des explications du pourquoi ils n’instruisent pas les jeunes à propos de ce sujet particulier et...peut-être bien ont-ils caché d’autres faits aussi graves, pourquoi pas après tout ? Je vais exiger que cette grave lacune soit immédiatement corrigée.

-Dis-leur que je te soutiens entièrement dans ta démarche, que c’est moi-même, un des principaux protagonistes de ce drame qui te l’ai appris et que je suis de tout coeur avec toi...Je resterai ici jusqu’à ce que tu aies écrit ton rapport et le signerai avec grand plaisir.

-Merci, mon Georges, on va leur remuer leurs culs à ces planqués, bordel de merde ! comme vous dites ici, dit-elle en s’esclaffant.

-Ruppert va en faire une jaunisse, répondit ce dernier en riant aussi, il va me maudire.

-Ça lui fera du bien à lui aussi, de le sortir de sa léthargie ; va falloir qu’il se remue les fesses, le président de mes deux, rit-elle, mais sois tranquille, il ne t’en voudra aucunement car il saura qu’ils ont lamentablement failli, Ruppert et un Homme ayant un grand sens de la justice et d’une grande noblesse d’âme.

-Je sais, c’est pour toutes ces qualités que nous avons une grande amitié réciproque ainsi qu’un grand respect mutuel, je l’aime beaucoup.

-Crois bien que tes sentiments à son propos sont partagés. -Oui...à propos de faits sanglants entachant notre jeune histoire, connais-tu

celle de ce drame très récent de ce groupe d’une douzaine d’hommes propageant ce concept criminel de religion proscrit par toutes nos communautés, et leur rencontre par une équipe de nos patrouilleurs, et qui finit par leur extermination ?

-Oh oui ! s’esclama Jennifer, devenant livide d’un coup, lorsque je l’appris j’en fut malade de peur et de dégoût...Si je me souviens bien, c’était une équipe de patrouilleurs de deux Femmes et...l’une des deux succomba plus tard à une blessure, c’est bien ça ?

-Oui, une larme coula sur la joue de Georges, ce fut notre si douce et ravissante Céline, que j’adorais, comme tous dans nos communautés, ainsi que ce couple remarquable et admiré de tous qu’elles formaient alors et...sais-tu qui était sa compagne ?

-Malheureusement non, je ne me souviens pas de son nom, sauf que c’est une Femme réputée remarquable et d’une grande puissance et résolution à anéantir les Zanko-Khuigs...Qui est-ce ? Je la connais ?

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-Oh oui ! que tu la connais ! C’est ni plus ni moins que la grande amie de ton amie Alexandra, notre grande Marion, vénérée par tous les nôtres.

-Maintenant je comprends pourquoi je fus fortement impressionnée par cette sorte d’aura qui émane d’elle, une force, une puissance obscure que l’on ressent à son contact...Quelle Femme admirable, ce fut terrible.

-Oui, un immense désespoir pour elle, car elles venaient juste de découvrir leur grand amour total et mutuel le même jour que cet horrible drame, et oui, rajouta-t-il devant l’étonnement compréhensible de Jennifer ; elles s’aimaient d’un amour démesuré au-dessus de toutes contingences...et cette pauvre enfant, Marion, de désespoir faillit en perdre l’esprit. Nous la sauvâmes de justesse, nous, quelque-uns de ses amis, moi y compris, organisant à son insu une savante conspiration pour la ramener parmi nous tous. Ce furent les quelques semaines de la plus grande tristesse qui régna dans notre station...Mais enfin, que grâce soit rendue aux forces stellaires, la conspiration réussit, incluant ce fameux géant, Hugues, charretier de son état jusqu’alors, ami et amant de longue date de Marion, mon ami également.

C’est cet Homme exceptionnel en tous points qui se proposa pour être son nouveau psycho, et depuis, que les forces du Cosmos le bénisse, il a redonné le goût et la joie de vivre à notre enfant chérie, Marion, ainsi qu’à toute notre communauté. Si je t’ai parlé cette histoire dramatique c’est pour que tu comprennes parfaitement l’importance de l’amour réciproque, l’union de tous dans une société d’Humains responsables partageant les mêmes valeurs, le même but ; chaque élément y tient alors une place vitale, car si personne n’est heureusement irremplaçable, chacun y est indispensable à y maintenir l’harmonie, une puissante cohésion .

Jennifer était bouleversée, cette fois ce fut son compagnon qui la consola un instant, puis il rajouta.

-Parlant il y a un instant de ces fous criminels des religions en tous genres, continua Georges, as-tu entendu parlé de cette secte de fanatiques, autres malades mentaux évoluant alors en Ruskof, ceux que l’on appelait les Skoptzy ?

-Non, pas du tout, que faisaient-ils ceux-là ? lui répondit-elle, les yeux ronds d’étonnement.

-Cette fois je vais vraiment engueuler mes collègues des Appalaches, et plus particulièrement un certain Ruppert, ils sont en dessous de tout ! Chaque jeune doit être éduqué de ces horreur...mais bon, je verrai ça plus tard. Que faisaient-ils, me demandais-tu ? Ecoute bien un rapide résumé de cette histoire sanglante et démente entre toutes, hors de toute imagination possible d’un Être normal, sain et équilibré.

L’histoire de ces monstres déments, les Skoptzy, réalité qui fut toujours cachée

à leurs aficionados de la secte dominante en Occident, et pour cause, car tiens- toi bien, il a existé des sectes chrétiennes qui ont pratiqué l’abomination de la mutilation sexuelle avec amputation partielle ou totale des testicules et/ou du pénis, et pour les femmes, des horreurs encore pires.

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Jennifer le regardait avec un air ahurie, les yeux ronds, bouche béante de surprise...effarée.

-Ainsi, cette secte russe de ces damnés Skoptzy, débuta cette folie furieuse vers 1755 environ et, chose inouïe, il en existait encore au lendemain du génocide de 2015. Ses mentors promettaient à ces fanatiques décérébrés, débiles, la rédemption après mutilation. Mais en réalité, la vraie motivation concernant la castration était que pour tous les intégristes religieux en général, la sexualité entraîne impérativement la damnation éternelle ; ceux pratiquant aussi l’infâme circoncision et monstrueuse excision ont de toujours employé les mêmes raisonnements, et ce, jusqu’à la veille encore du massacre de 2015, époque où ils se prenaient pour la civilisation la plus avancée de tous les temps.

Ainsi donc, après le mariage et la naissance de leurs deuxième enfant, les mâles se soumettaient à la castration. En premier on brûlait les testicules aux fers rouges, mais cela sembla tout de même par trop cruel, alors on coupa la bourse et les testicules au rasoir ou au couteau, car les testicules étaient considérées comme les clés des portes de l'enfer (ça ne s’invente pas). En second venait l'amputation du pénis deux ans après celle des testicules. Pénis qui était coupé avec un couteau, avec des ciseaux ou une hachette. L'hémorragie était stoppée par de la glace ou de la résine et l'urètre était gardée efficiente par une tige. Rien que d’y penser on en frémi.

Pour les femelles, ces malheureuses, c’était encore plus horrible si l’on peut, car en premier était l'amputation des seins puis, en une deuxième séance c’était l'ablation complète de la poitrine, puis venait celle des petites lèvres et parfois aussi celle du clitoris et des grandes lèvres. On a peine à imaginer ces pauvres femmes se soumettant volontairement à de si horribles supplices. Tout cela pour mériter une place privilégiée dans un paradis chimérique. C’est affligeant et désespérant de l’entendement humain.

Jennifer le regardait, atterrée, livide...elle resta sans voix durant un moment, tant son effarement était intense ; puis elle parvint enfin à s’exprimer.

-C’est effectivement au-dessus de toute perception logique, effectivement, dément, complètement dément, mais comment vous sûtes alors qu’ils se réclamaient de cette secte pourtant connue comme ayant disparu ?

-Tu vas voir que c’est en réalité fort simple. Il y a environ une dizaine d’année, nous envoyâmes encore une fois plusieurs équipes de patrouilleurs vers ces lointains territoires de l’est. C’est ainsi qu’une de ces équipes patrouillant sur la Ruskof, rencontra la bande de ces fous furieux gîtant dans l’ancienne capitale, Moskou, dans la station de métro délabrée de Tushinskaya, de la banlieue Nord-Ouest. Ce fut en fait par hasard, la fumée de leur feu de camp trahit bêtement leur position.

Mais, je réalise subitement que je te noie sous ces données ; pardonne-moi mais ce domaine de l’Histoire avec un grand H ne supporte pas l’à-peu-près, on se doit d’être précis, à défaut d’être concis ; mais c’est mon dada, alors...

-Ne t’excuse surtout pas, Georges, au contraire, car comme tu le sais cela me passionne, continu s’il te plaît.

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-Nos gars nous les décrirent comme misérables, physiquement et moralement, les vidéos qu’ils en ramenèrent faisant foi ; vêtus de haillons pour la plupart, ils représentaient en fait une communauté assez semblable en nombre et d’apparence aux Pritichs que nous avions éliminés quelques temps plus tôt. Ils se croyaient seuls au monde, les uniques héritiers de leur dieu, en somme...Ainsi, dans leurs cerveaux sclérosés, sans doute eurent-ils à redouter alors de la part de ces étrangers, une concurrence déloyale et subite auprès de leur terrible divinité ?

Le drame eut lieu très rapidement lorsque l’un d’eux surpris un couple de nos guerriers tendrement enlacés, s’embrassant passionnément sur la bouche sous un sapin non loin de l’entrée de la station de métro, chose des plus banales qu’il soit. Mais pas pour eux, car ils entrèrent littéralement en transe, sortant tous en courant de leur tanière en chantant, possédés, des cantiques pour appaiser la colère de leur dieu, le tout dans une sorte de danse du scalp. Se faisant, ils se déshabillaient avec frénésie pour montrer, offrir à leur fameux dieu, les horribles stigmates de leurs mutilations sacrilèges à la grande Vie universelle, preuves glorieuses à leurs yeux de leur indéfectible amour et respect divin.

C’est ainsi que les nôtres horrifiés comprirent en un éclair à qui ils avaient à faire. Comme on peut s’en douter, ils étaient sidérés, anéantis d’un tel spectacle aussi monstrueux ; tous ces corps torturés offraient une vision dantesque, certaines blessures récentes étaient purulentes, sanglantes et nauséabondes.

Plusieurs des notres, Hommes et Femmes vomirent sur le champ mais, très vite le pire était à venir, car leurs oraisons à peine terminées, les Skoptzy voulurent prendre nos gens de force pour leur faire subir les mêmes abominations que les leurs.

Alors ce fut le massacre instantané, instinctif et salutaire de la pure et saine raison face à la folie totale et irréversible ; pas même un enfant ne survécu, rien.

Ainsi, espérons-nous fortement, finirent pour de bon les Skoptzy, monstruosité enfin rayée de la surface de Gaïa, véritable affront à sa véritable et grandiose beauté divine, elle. Depuis ce jour-là nous avons décidé de surveiller régulièrement et pour encore longtemps toutes ces immenses territoires, et nous le ferons même longtemps après la victoire, car qui peut réellement savoir ce qui pourrait bien pouvoir se cacher d’ignoble et létal dans ces dizaines de millions de kilomètres carrés de ces espaces infinis et sauvages, et qui furent de toujours sources de dangers mortels pour les Hommes libres ?

-Je suis véritablement atterrée de découvrir ces vérités sur notre propre espèces. Je ne trouve plus de mot pour exprimer ma...consternation, et c’est un euphémisme ; sauf qu’il faut envoyer d’urgence ce rapport aux miens.

-Et oui, ainsi va ce monde depuis toujours : splendeurs véritables cotôyant aussi le pire des cloaques.

-C’est horrible et inquiétant, car mal prévenus nous risquerons d’être de nouveau victime de tels cas, ou d’autres peut-être pires.

-Voilà, tu as parfaitement saisi l’étendue et la gravité du problème, car les sources du mal sont infinies, la preuve. Je vais te conter rapidement un dernier fait désastreux concernant les travers maudits dont peut être capable l’Homme ;

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rien à voir cette fois avec un cas de fanatisme religieux, ce qui est en soi un parfait pléonasme, ni un cas de xénophobie débile comme les Pritichs, non, cela c’est passé dans la grande île au sud de la Ritali, en Sicili...Ce fut un drame causé par la jalousie exacerbée et séculaire de ces insulaires primitifs.

Les Ritalis explorèrent leur territoire tout en longueur et arrivèrent un jour sur

cette île. Ils étaient avec deux gros transports avec chacun une centaine de guerriers volontaires et prêt à tout ; le cas des Pritichs et Skoptzys avait servi de leçon. Connaissant la tradition des moeurs moyenâgeuses des habitants de ces régions, ils furent sur leur garde dès le début, et bien leur en prit.

Ils rencontrèrent trois groupes ne se connaissant pas les uns les autres, car séparés par de grandes distances et plusieurs vallées ; chacun vivant plutôt pauvrement en autarcie complète ; chaque communauté regroupant environ de 650 à 730 personnes au total.

La tactique fut de les aborder avec un seul transport ayant seulement quelques guerriers à bord, pour ne pas les effaroucher ni qu’ils se sentent agressés ; le deuxième transport regroupant la force d’intervention, survolant de très près les lieux, restant invisible à leurs regards, mais prêt à intervenir à la minute. Bref, très rapidement ils se rendirent compte que les femmes du premier groupe vivaient tout simplement dans une sorte d’immonde esclavage, victime de la folie de ces hommes devenus pire que des bêtes, pratiquant une brutalité quotidienne sans nom. Beaucoup de ces femmes avaient le visage portant des marques de violences, et différentes blessures, etc. Les responsables de l’expédition leur enjoignirent alors de cesser de se comporter ainsi avec leurs femmes, leur ordonnant de venir vivre avec les communautés du Nord, pour ainsi pouvoir surveiller leur bonne volonté.

Ce fut le signal du carnage. Ces hommes sortirent leurs armes et tentèrent de tuer froidement ces étrangers

venus leur dicter leur mode de vie et, comble de l’épouvante pour ces nouveaux venus, la majorité de ces femmes se joignèrent à leurs torsionnaires pour les tuer également Mais heureusement que le psycho du second perceur avait détecté à temps leurs intentions meurtrières, le pilote ayant alors rapidement posé l’engin en arrière du groupe, leurs guerriers étant sortis et en position prêt à tirer...Dès qu’ils sortirent leurs armes, les nôtres les éliminèrent tous en quelques minutes.

Des trois groupes idem, ils éliminèrent le restant des vieillards et grands adolescents agressifs et visiblement irrécupérables. Ils ramenèrent uniquement moins d’une centaine de très jeunes enfants qui furent séparés et distribués dans nos stations, pas plus de un enfant par local. Ils furent suivis avec grande et discrète attention durant toute leur croissance...Mais, que Gaïa en soit remerciée, tous devinrent de parfaits éléments, ayant oublié l’exemple désastreux des moeurs barbares de leurs origines.

On peut dire que notre nouvelle Humanité sera née dans la souffrance et de par le courage et l’opiniâtreté de tous les nôtres qui à l’occasion restèrent inflexibles et farouchement déterminés à faire prévaloir notre droit sur notre

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planète, notre chère Gaïa, car rien ni personne ne nous arrêtera dans notre marche en avant.

Jennifer qui avait écouté ce récit comme sans respirer, était de nouveau effrondrée, livide.

-Tu sais, Georges, je réalise maintenant, connaissant ces faits horribles et données dont je n’avais jamais eu vraiment conscience, ainsi que de leurs importances pour certains, combien infiniment grand fut votre mérite, et ce depuis les premiers rescapés qui firent preuve d’une conscience aiguë de ces périls représentés par ces différences de nombreuses cultures et langues découlant des nations anciennes...Combien il eut suffi de peu de chose pour qu’ils retombent dans les mêmes travers que leurs anciens.

Je trouve admirable que ces gens simples pour la plupart aient réussi cette sorte de miracle de construire cette cohésion extraordinaire de gens si divers et que tout séparait apparemment ; alors que dans ma communauté des Appalaches, si l’on compare, nous fûmes énormément privilégiés, c’est sans commune mesure même, car nous étions tous issus du même moule ; votre parcours fut une invraisemblable gageure...et vous l’avez gagné haut la main et avec un extraordinaire brio, bravo ! Mille fois bravo !

Je vous en admirerez encore plus maintenant, car vous êtes des géants, et suis fière et honorée de faire partie intégrante de votre communauté ; sincèrement, Georges, merci de m’avoir si bien acceptée parmi vous tous, je suis très émue et touchée de votre amitié et amour à mon encontre, merci.

Georges se pencha et l’embrassa affectueusement sur la joue et le front. -Jennifer chérie, remercie toi toi-même, ma soeur, car si nous tous t’aimons

autant c’est que tu le mérites grandement par ton attitude de tous les jours envers ton entourage...Demande un peu à tes nombreux et heureux amants et amis pourquoi ils t’aiment tant. La réponse est garantie et à l’unanimité : pour toi-même, Jennifer Chancellor, pour ton amour des autres, ta droiture, ta joie de vivre, ta compétence dans ce job, et ton côté Femme belle et amoureuse et généreuse en tout.

Ainsi, nous ne nous devons rien mutuellement, nous partageons des qualités identiques et complémentaires aussi, d’où notre bonheur réciproque de vivre ensemble. Je te remercie aussi, ma chère Jennifer, ma soeur chérie, d’être comme tu es, et te prie surtout de continuer de rester telle que tu es, car tu rends tout simplement heureux ceux qui ont le privilège de te côtoyer, à commencer par moi-même.

Profondément troublée, émue, elle s’avança et se coula contre lui et se blottit au creux de son bras, la tête reposant contre son épaule, le visage enfoui dans son cou, se saoulant de son odeur virile et soignée, parfumé comme à son accoutumé avec une fragance de sauge et une pointe de citron vert, odeur d’Homme puissant...

Alors, s’embrassant et se serrant avec tendresse l’un contre l’autre, un grand moment d’intenses et chaleureuses émotions passa sur eux deux, les enveloppant d’un suave voile irisé de sensations qui font palpiter l’âme, la vrillant de plaisirs suraigus et exacerbés comme sous l’implant d’une fine aiguille

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rougie au feu ; de ces instants rares et magiques où dans un couple, chacun se sent en total unisson avec l’autre, instants fugaces mais ô combien merveilleux et qui emplissent le coeur d’une puissante sensation de plénitude, de bonheur enivrant et de joie pure, sentiments presque irréels et que l’on voudrait pouvoir saisir et retenir prisonniers dans sa main, minuscules et vibrants oiseaux de paradis, en catimini et tout contre son coeur...et qu’ils durent une éternité...

Ils en étaient là de ces instants si précieux, quand on frappa à la porte qui

s’ouvrit de suite, laissant entrer Alexandra et Claude, tous sourires et surpris de trouver là ce fameux Grand Sage entre tous, Georges de Bertrand, qui fut ravi de les revoir.

-Tiens, dit ce dernier, souriant et se levant pour les saluer, voici nos dès lors traditionnels porteurs de nouvelles fracassantes et révolutionnaires. Quels faits époustouflants nous apportez-vous aujourd’hui ?

Les deux interpelés s’esclaffèrent pendant que tous quatres s’embrassaient avec chaleur ; Claude lui répondit.

-Rien pour cette fois-ci, mon bon Georges, c’est le calme plat sur toute la ligne. -Tant mieux ! répondit Jennifer visiblement soulagée, car je vous avoue que

depuis un certain temps, dès que je vous vois arriver je ne vis plus, me demandant quelle nouvelle catastrophe vous allez nous révéler.

-Pardon pour toutes ces frayeurs causées bien malgré nous, ma chérie, lui dit Alexandra, qui la tenait encore embrassée, puis elle se dégagea.

-Que nous vaut alors le plaisir de cette visite impromptue ? lui demanda l’hôtesse.

Ce fut Claude qui lui répondit en riant. -Vous ne le croirez sans doute pas, mais nous trouvant sans mission pour

quelques jours, et oui, renchérit-il devant leurs airs étonnés ; nous avons pensé venir offrir à tes ateliers, ma chère, la force de nos bras pour n’importe lesquelles des occupations qui pourraient aider vos tecnos, même le job le plus nul ou le plus sordide ne nous effraie aucunement ; tel est le but de notre visite.

Jennifer les regardait avec des yeux ronds comme des billes, suffoquée, elle regardait Georges, les regardait de nouveau, puis Georges...

-Hello ! s’écria Claude en riant et lui passant rapidement une main devant les yeux, ça va, Jennifer ? atterris, on est arrivé, ma poulette !

Celle-ci sortit de sa stupeur et poussa gentiment Claude puis, le reprenant de suite par un bras elle l’attira vers elle pour l’embrasser sur les lèvres.

-C’est malin, dit-elle en riant, puis s’esclaffant, VOUS DEUX ? travaillant aux ateliers ? jamais je n’aurais imaginé une telle chose possible. Vous, les oiseaux éternels, venir s’enfermer ici ? Impensable ! Mais je vous remercie infiniment et suis très touchée de votre proposition que...je suis obligée de refuser, car imaginez un peu que nous sommes déjà surchargés de volontaires à n’en savoir plus que faire ; chaque tecno à derrière lui de un à trois aides, tous sur le quivive, prompts pour lui apporter l’outil ou la pièce qui lui manque ; c’est une folie que de les voir se démener, et ils sont passionnés par ce travail vital à un point inimaginable. Alors, merci beaucoup pour votre généreuse proposition, et

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pardonnez-moi encore de ne pouvoir y donner suite, c’est vraiment impossible, nous sommes saturés ; vous le comprendrez facilement j’imagine.

Devant l’air franchement dépité des deux volontaires, Georges eut une brusque illumination et s’écria soudain tout joyeux et excité.

-Mes enfants, dit-il à Alexandra et Claude, vous tombez on ne peut mieux en définitive, car moi, je vous embauche pour une mission de salubrité des plus urgentes et immédiate.

Tous de le regarder surpris d’une telle flamme dans son regard, attendant impatients la suite.

-Oui, car je constate une fois de plus que je viens ici, que notre belle et adorable hôtesse, dit-il en lui prenant une main dans les siennes, se meurt à petit feu dans cet emploi qui lui prend tout son temps, au dépend de la moindre fantaisie extèrieure à cette base...Ainsi, j’ai décidé et j’ordonne, en ma qualité de super ancien, et je n’accepte pas d’être contredit, que vous nous ameniez illico dans votre perceur, pour allez visiter et faire découvrir à Jennifer, cette magnifique plage de Camargue et...j’en profiterai pour me recueillir sur ce tertre de notre enfant tant regrettée, Céline, notre douce et si courageuse guerrière.

Ce fut un cri de joie des deux patrouilleurs. -Mais...mais, et mon travail, tenta de protester Jennifer, je ne peux... Tous les trois lui coupèrent la parole de concert. -Georges a entièrement raison, s’écria une Alexandra toute excitée, on t’enlève

sans te demander ton avis, un point c’est tout ! -Ton idée est géniale, Georges, lui dit Claude, puis se tournant vers Jennifer,

dis-moi franchement, es-tu une seule fois sortie de ton trou pour visiter un tant soit peu la région, ma douce et folle travailleuse ?

Surprise, cette dernière due avouer, l’air penaude. -Ben...je suis tellement prise par ce travail que... que je n’en ai pas encore bien

eu le temps de... mais je... -Tu viens donc illico avec nous, et c’est tout, la coupa Georges ; appelle ton

second pour l’aviser que le commandant va se baigner à la mer, et de suite, dit-il sur un ton de commandement péremptoire ; tous le regardèrent, surpris, découvrant brusquement un Georges employant un tel ton autoritaire et sans réplique.

Jennifer, subitement subjuguée, se précipita vers son phone et fit le numéro de son second, lui demandant de venir de suite. Moins de deux minutes plus tard, on frappa de nouveau à la porte ; entra l’adjoint du commandant de la base. C’est un Homme pas très grand, brun, les cheveux et yeux noirs, dans les trente-cinq ans environ, toujours souriant et visiblement un natif de la région, de ces Hommes remontant aux peuples Ligure ou Aquitain, à trois ou quatre millénaires d’ici...

-Ha ! Raoul, merci d’être venu de suite, lui dit Georges ; c’est pour t’aviser que nous t’enlevons ton commandant pour la journée. Nous allons lui faire prendre l’air avant qu’elle ne s’étiole tout à fait, et nous irons jusqu’à lui faire faire trempette dans la belle mer d’azur ; te voici donc pour ce jour bombardé commandant en chef de la place, et c’est un ordre ! S’écria-t-il.

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L’interpelé fut un instant surpris de cette grande nouveauté, puis exprima vivement sa joie en serrant vigoureusement une main de Georges.

-Enfin, c’est pas trop tôt, il y a enfin quelqu’un de sensé et charitable sur cette terre de labeur, pour penser à prendre soin de cette pauvre enfant qui se tue à son boulot, grand merci à vous tous, n’ayez crainte je me charge du reste.

-Raoul, lui dit son chef, pardonne-moi de te laisser tout ce boul... Elle ne termina pas son mot qu’il lui coupa la parole d’autorité. -Arrête de me raconter ta vie que je connais par coeur, ma chef adorée, et va

donc prendre l’air avec ces gentils énergumènes, pour une fois que quelqu’un pense un peu à toi, et va donc te tremper le cul dans la grande bleue et n’en parlons plus...et t’es pas encore partie ? s’écria-t-il interrogatif et en lui souriant, les deux mains sur les hanches.

Tous d’éclater de rire. Durant ce temps, s’étant concertés en catimini, Claude et Georges prirent par surprise Jennifer sous les aisselles, et chacun la tenant fermement sous un bras et par un coude, ils l’entrainèrent illico vers la sortie, plus personne ne voulant plus écouter ses protestations qui finirent rapidement dans un murmure, pour la simple forme...

-De commandant d’une haute place stratégique, me voilà devenue une prisonnière devant obéir aux ordres, c’est un monde ! et mon rapport, alors, j’ai un rapport urgent à faire, moi ! s’esclama-t-elle en vain, à moitié outrée.

Ses pieds touchaient à peine le sol du bout des orteils, tenue fermement entre les deux Hommes l’amenant rapidement vers le perceur ; suivait derrière cet étrange équipage, une Alexandra qui riait aux larmes de voir la pantomine du commandant de la base pour tenter se libérer en vain ; tandis que Raoul, ravi, appuyé nonchalamment contre le chambranle de la porte du bureau restée grande ouverte, les applaudissait à tout rompre...Il cria à sa chef, en riant aux éclats, au moment d’embarquer dans l’engin.

-Jennifer, ma chérie ! Prends tout ton temps surtout, que je savoure mon nouveau commandement !

La porte du perceur claqua, puis l’engin s’éleva de quelques centimètres, tourna sur place...Raoul eut à peine le temps d’entr’apercevoir par un hublot la frimousse ravie de sa chef, avant que le perceur ne devienne évanescent et parte comme une flèche, la grande porte du hangar se refermant déjà toute seule. Il entra et s’installa dans le siège de Jennifer, la place du Commandant suprème de cette base de constructions stratégiques de cette Humanité future...Il s’étira, l’air pensif pour un instant, mains derrière la tête et talons sur le bord du bureau...il murmura en souriant, ému aussi, mais heureux.

-Oui...c’est cela même...prends du bon temps, le meilleur et sans te presser, ma chérie...ton pote Raoul s’occupe de tout, comme toujours, mon ange. Puis il se leva d’un bond et partit allègrement vers les ateliers en sifflotant, un large sourire aux lèvres.

Ainsi, pendant que le commandant partait vers un court repos forcé mais de

l’avis général, bien mérité, la fabrication d’engins et armes létales continuait dans une ambiance fébrile, chacun y mettant le meilleur de lui-même. Jamais

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humanité ne vécue une telle passion, engagement aussi intense et continu que ces nouveaux Hommes et Femmes...non, jamais ! L’ardeur qu’ils y mettaient était digne de leur déesse sacrée, Gaïa, la belle des belles des somptueux espaces stellaires, parure seule digne de leur mère à tous, cette sublime Gaïa, pour laquelle ils donnaient d’un seul jet toute leur vie, spontanément et sans aucune attente en retour, car tel est et doit être le prix de l’amour universel, le don de sa personne pour sa communauté, sans calcul ni gloire, par le simple fait d’exister en harmonie parmi ses frères et soeurs qui font tous de même : assurer la sécurité et la plénitude de tous, du nouveau-né au vieillard qui à déjà fait le don de sa vie aux autres...Le cocon, l’osmose protectrice de la phratrie, sous les auspices divins et merveilleux de Gaïa, la mère, la soeur et l’amante fabuleuse de beauté et de grâce immortelle.

En ce début d’été 2399 donc, cette base stratégique de Blagnac bourdonnait

d’une activité fiévreuse, intense et passionnée, ce d’autant plus que chaque jour les rapprochait de la grande bataille finale ; l’émotion grandissant d’un cran à chaque journée qui commençait, comme le coureur de marathon qui sait le but bientôt atteint et se concentre exclusivement sur l’entière mobilisation de ses forces, pour les porter à leurs paroxysmes.

Ces gigantesques ateliers de construction des géants des airs d’une époque disparue, avaient, depuis l’arrivée des Akadis et leurs matériels, totalement changés d’aspects. Ils disposaient ainsi d’espaces démesurés vue la petitesse des engins qu’ils fabriquaient en comparaison des avions comme ce fameux géant sorti en 2007, l’AF-380 et ses 150 tonnes de charge utile, qui avait été rapidement dépassé en grandeur et en puissance par ceux des Zanko-Khuigs, les Black-Terror ; puis eux tous surpassés par les monstrueux avions des Ruskofs et des Chintoks...d’où l’inéluctable génocide final et la fin logique de ce monde de déments : clou de cette monté dans l’horreur et la folie suicidaire devenue irréversible.

Ici, comme aux Appalaches, ils avaient su récupérer, exploiter au maximum les matériels innombrables trouvés sur place. Ainsi, les fauteuils de ces géants trouvés dans ces ateliers avaient été démontés pour être utilisés dans leurs perceurs rudimentaires mais parfaitement efficaces et sûr. Par la suite, des équipes de tecnos dans des gros transports partirent explorer les quelques industries en sous-traitances qui fournissaient ces types de matériels ; ils y trouvèrent là des stocks importants alors prêt d’être envoyés à Blagnac...Ils y arrivèrent ainsi avec plus de trois siècles de retard mais furent les bienvenus.

Dans cette logique ils visitèrent aussi tous les aérodromes de leurs territoires. Ils y trouvèrent des milliers d’avions de tous types dans lesquels ils y récupérèrent les fauteuils, les hublots avec leurs volets de nuit, les blocs de stockages des aliments avec les systèmes de réchauds et les frigos, les rangées de porte-bagages dans les cellules et les compartiments des toilettes avec leurs réserves d’eaux propres et d’eaux usées...

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Il suffisait aux équipes de tecnos spécialisés dans ces types de récups, de découper au couteau molléculaire le tronçon de l’avion comportant les parties spécifiques convoitées ; ces derniers étaient ensuite soulevées par une grue volante AG puis déposées sur de grands plates-formes AG construites pour ces occasions, mesurant 25 x 35 mètres. Une fois pleine à ras bord, un transport la soulevait et partait de nuit et à toutes vitesses vers Blagnac...Il fallut même rapidement réduire ces équipes de récups car les ateliers n’arrivaient plus à suivre leur rythme d’approvisionnement pour incorporer ces matériels dans leurs constructions, les modifier pour les adapter à leurs nouvelles fonctions.

Le grand chef de cet empire, la géniale Jennifer Chancellor, eut un jour une idée géniale, dont elle fut à juste titre très fière. En vue de l’attaque, elle fit construire et équiper des transports spéciaux devant servir aux équipes des chefs stratèges qui coordineront leurs forces d’attaque de ce grand jour tant espéré : trois appareils pour la Franki, un sur chaque cible-localité donc, et quatre autres pour l’Espingo, l’ennemi y étant plus dispersé qu’ici. Pour ce faire, elle récupéra astucieusement les cellules de petits avions de l’époque, des AF-300 ; desquels on enleva les ailes n’ayant plus aucune utilité, vestiges d’une époque surannée.

L’avion était tronçonné sur l’arrière, juste derrière les toilettes existantes et ainsi récupérées, venait ensuite un espace de six mètres de long comportant une table centrale supportant une maquette détaillée du local d’attaque ; maquette qui était encadrée de deux rangées de sièges contre la coque, ainsi que les deux racks des communications radios pour communiquer avec la nuée de perceurs locaux qui participeront à l’attaque, plus celui des liaisons avec les Appalaches.

Vient ensuite un bar et un frigo bien achalandés et les doubles rangées d’une trentaine sièges, puis de suite le tronçonnage et le montage de la verrière panoramique avant. L’ensemble posé et ceinturé par des arceaux métalliques soudés sur une plate-forme AG construite à la mesure ; les commandes de vols de ce dernier étant en double dans l’engin qui est également équipé du fameux système de disfraction de la lumière le rendant invisible.

Le système de communications radio transcontinental conçu aux Appalaches, spécialement adapté à ce seul grand jour, devra relier exclusivement la Franki et l’Espingo à la base Akadi, dans une triangulation précise et unique. Chacune de ces trois unité étant couplée à un laser, pour envoyer les communications ciblées sur des émetteurs-récepteurs idoines qui seront ce jour J, supportés par une série de deux Blocs AG répartis sur l’Atlantique, sur deux points équidistants des deux continents et à 20 mille mètres d’altitude. Personne d’autre ne pouvant les capter, et encore, lui aurait-il fallu détenir la clé du code de brouillage qui change automatiquement toutes les trente secondes, et de plus ne retransmet que sur des récepteurs préalablement authentifiés par un code unique.

Chacun de ces sept appareils furent appelés Central-Stratèges, et chacun aura un numéro d’identification géant inscrit sur chaque côté de sa coque. Il sera pourvu d’une escadrille d’escorte de huit perceurs rapides spécialement équipés d’une porte à ouverture à glissières latérales de chaque côté, d’où des tireurs pourront intervenir avec des lance-missiles et/ou des batteries légères à laser ou des mitrailleuses lourdes. Ils seront ainsi équipés de trois tourelles de

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désintégrateurs lasers à tirs rapides. Un à l’avant, monté sous la verrière, le suivi-cible et la commande de tir couplé à la visière du casque du pilote ; une tourelle au-dessus de la coque, avec un mitrailleur à poste, et pour finir, une semblable sous la coque, arrosant particulièrement le secteur arrière.

Les Akadis ayant développé le même système pour leurs usages locaux, leurs cibles étant réparties également sur de grandes distances. Un troisième Central-Stratége était prévu pour l’attaque sur l’Ostrali, malgré que tous soient persuadés qu’ils n’auront point à l’utiliser ; les effectifs de l’ennemi de ces contrées devant logiquement se replier pour participer aux festivités exceptionnelles de ce début de siècle...ce, selon leurs savantes prévisions stratégiques mais, seul pour l’instant l’avenir confirmera la justesse de ces prévisions.

Concernant les communications locales spécifiques, chacune fut prévue avec ses moyens exclusifs et indépendants ; les Chefs Stratèges possédant un moyen de communications régionales leur étant propre. CLOISONNAGE, couplé à un système local à laser horizontal, tel est le secret de cette stratégie d’attaque massive et planétaire, seul moyen de centupler leur efficacité et chance de succès vital pour tous.

Ainsi, chaque localité aura ses communications focalisées sur un bloc radio AG positionné au large, à environ 10 km en mer, en face de la localité. Ce Bloc AG étant à une altitude de cent mètres, toutes les émissions-réceptions radios de chaque unité-perceur sera donc focalisées sur une porteuse couplée à un laser, en direction unique vers le Bloc AG, lequel pourra à leur demande précise interconnecter des perceurs entre eux, sinon tous : cas presque unique prévu pour annoncer la Grande Victoire Officielle.

De plus, sur demande exclusive des Chefs Stratèges, chaque Bloc AG pourra s’interconnecter avec ses semblables positionnés le long des côtes, chacun des deux autres étant de même devant sa cible. Toute tentative éventuelle d’écoute de l’ennemi qui, suivant les technologies en usages du temps (révolu) de leur grandeur criminelle, était basée exclusivement sur les communications verticales, Terre-Air-Espace et vice versa ; ils ne pourront donc jamais se douter de l’existence d’un système horizontal, qui plus est d’apparition subite, local et à laser, donc aux bandes extrèmement restreintes et aux communications qui seront de plus limitées au strict minimum et de plus codées.

Même durant un conflit armé déclaré et en activité, aucune possibilité de détecter et intercepter un tel système de communication en si peu de temps n’a jamais existé ; alors que dire des chances de succès de la part d’une populace amorphe et ramollie, imbue d’elle-même dans une arrogance et suffisance écoeurante, et que dire alors de leurs personnels de sécurité robotisés, pour ne pas dire trépanés de la comprenure ! Ennemi qui éventuellement ne disposera ainsi que de quelques secondes pour une hypothétique prise de conscience de la brutale existence d’une attaque générale en règle à leur encontre.

Après des siècles de torpeur générale, il serait fort étonnant qu’ils maintiennent en permanence un système de surveillance, et si oui, qu’il soit réellement efficace et fonctionnel. Passé l’unité de quarante minutes de possibles quoique irréelles réactions...le système sécuritaire local pourra être considéré comme n’ayant plus

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lieu d’être, quoique sera tout de même maintenu jusqu’au bout : car la victoire sera d’ores et déjà en bonne voie de réalisation et pour ainsi dire acquise !

Ainsi, cette idée de la géniale Jennifer Chancellor de construire ces transports spéciaux pour leurs grands Chefs Stratèges, fut de suite adoptée par sa consoeur, aux Appalaches, le grand béguin de Ruppert Burrows, l’autre grande chef des ateliers de construction, la brune et vigoureuse tecno et guerrière, Francisca Alonso, qui s’employa à équiper leurs équipes de stratèges des mêmes types d’engins, de fait particulièrement bien adaptés à cet empoi unique, car spacieux et fort économiques à construire, en temps et en matériels ; une simple et évidente adaptation y pourvoyant largement et pleinement.

Puis, l’idée et l’habitude étant prises, sur la fin ils adaptèrent ainsi tous engins volants qu’ils trouvaient sur les tarmacs et hangars des anciens aérodromes, les sectionnant en tronçons pour en faire des transports des plus hétéroclites, mais fonctionnels, gratuits en matériels et économes en durée de construction...

La vue de la future Flotte d’attaque de cette Humanité aurait fait sourire d’un mépris le plus total tout militaire d’antan, c’est certain, mais leur aspect des plus désuets, sinon lamentables, cachait en réalité une force prodigieuse et des plus redoutables de guerriers prêt à tout, prêt au pire, et même au-delà.

Des Hommes et Femmes ne vivant que pour un massacre général et sanglant d’une force dégénérée, abjecte et maudite, à devoir, dans un absolu impératif d’être rayée de la surface de leur planète, Gaïa, la belle entre toutes, leur planète sacrée se devant d’être lavée de la souillure de leur seule présence. Rien, absolument rien au monde ni personne ne pourra dès lors arrêter cette force prodigieuse une fois lancée à la reconquête de son bien le plus précieux : Gaïa !

Telle une vague gigantesque, elle déferlera alors irrésistiblement sur ce monde de malheurs innombrables pour refaire pousser de nouveau le rire cristallin des petits enfants, le sourire sur un visage féminin et la joie de vivre pour tous. Il en sera ainsi ! Tous en firent le serment sacré !

Nul, dans cette Humanité empreinte d’honneur et de respect absolu de soi et des autres, ne pourrait songer un seul instant à se parjurer, renier sa parole. Non, une telle hérésie est du domaine de la folie pure et simple ; aucun Homme ou Femme sensé ne saurait imaginer une telle ignominie, non, impossible.

Ils étaient tous en totale communion spirituelle sur leur devoir et devenir commun et inséparable : ils étaient définitivement UN ! Un seul peuple unique, habitant la merveille des merveilles des espaces stellaires, GAÏA ! Un tel héritage et devoir ne supporte point la moindre hésitation, ni doute ni travers, cela serait totalement grotesque et inepte, pour ne pas dire injurieux ; car c’est du domaine du sacré et ne se discute tout simplement pas ; c’est d’une telle évidence.

En cette journée exceptionnelle en tous points, c’est un plaisir que de suivre les

heureuses aventures de notre chère Jennifer, car c’est sous un magnifique et chaud soleil qu’ils arrivèrent à cette plage désormais mythique, et qu’Alexandra posa en douceur le perceur à l’abri de ces splendides pins parasols qui impressionnèrent fort notre nouvelle venue en ce lieu maintenant réputé.

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-Je n’avais jamais vu des arbres aussi majestueux, s’esclama-t-elle émerveillée, ce sont véritablement des rois couronnés.

-Surtout qu’en tant que véritable obsédée du boulot, je parie qu’il y a belle lurette que tu n’as certainement pas vu d’arbre tout court, lui rétorqua Alexandra aussi sec, vrai ou non ? Avoue, ma chérie.

-Ben oui, voilà, t’es contente ? répondit-elle agacée. -De te voir aujourd’hui sur cette magnifique plage, oui, et j’en suis même ravie. -Et nous tous aussi, rajouta Claude en riant, alors dans ce cas fini les constats

et remarques vaseuses et inusitées en un tel lieu si idyllique, je propose donc que nous allions nous baigner tout de suite.

Tous à poil ! cria-t-il, en se déshabillant en vitesse et, rajouta-t-il en riant de plus belle, le dernier dans l’eau offre la tournée générale !

Ce fut de suite la course, et comme prévisible, le dernier dans l’eau fut Georges, qui prit la chose avec philosophie, car on ne lutte pas à son âge avec des jeunes gens vigoureux et pétants de santé et de Vie comme ces trois-là. Ce fut une belle et grande annimation sur cette plage, à tel point que le fameux nuage de plumes et becs en fut tout retourné une fois encore. Décidément, pensèrent avec juste raison ces volatiles marines, ces étranges bipèdes sont à chaque fois la cause d’un raffut monstre, qu’il est alors difficile de s’entendre piailler en paix.

Le commandant de la base stratégique oublia d’un coup tous ses devoirs et soucis imaginaires et s’extasia sur les remarquables qualités de cette mer d’azur...qu’elle avoua n’avoir jamais imaginé un seul instant qu’une telle merveille puisse seulement exister. Révélation : c’est le terme adéquat pour vraiment expliquer la joie et le bonheur ressenti par Jennifer, qui était en fait au paradis, et voir son bonheur subi était une joie pour ses compagnons.

Comme toujours, tous ceux qui découvraient la mer recevaient un choc émotionnel intense et pur, qui bouleverse l’âme et apporte pour longtemps une plénitude et paix intérieure, la sérénité même. Ètait-ce une onde d’amour envoyée par la mère à ses enfants bénis ? Le sublime cadeau de bienvenu de Gaïa à ses fils et filles ? Toujours est-il que celui qui héritait de ce privilège divin repartait transformé et conscient d’appartenir à une entitée puissante et protectrice, faite d’amour et de paix grandiose. Plus jamais il n’oubliera ce jour fabuleux de ces instants de découverte dans le sein et la grandeur majestueuse et mystérieuse de Gaïa, sa mère vénérée.

-Quand je pense que j’avais ce fabuleux privilège à portée de main et jamais n’en ai eu la curiosité de le découvrir, il faudrait que je me foute des baffes, vraiment ! s’esclaffa-t-elle avant de plonger pour la énième fois dans cette fabuleuse eau nourricière, mais dans un mètre de profondeur seulement.

Par faute de liberté de leurs mouvements, très peu de ces nouveaux Humains savaient nager, mais cela ne saurait durer longtemps maintenant, le compte à rebours des derniers jours restant à vivre de leurs ennemis héréditaires était irrémédiablement enclenché. Le grand balancier du destin prenait chaque jour qui passait, plus de vitesse dans son retour inexorable d’une justice divine, celle de Gaïa, la vénérée de ces Hommes et Femmes faient d’honneur intransigeant

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et d’amour pur et universel inéluctablement inséparable et en symbiose vitale avec cette propension instinctive à tuer froidement l’inacceptable, tuer toute force obscure et néfaste pour ces honorables êtres de lumière, fiers et incorruptibles ; condition sine qua non de la Vie de la phratrie et de l’unité divine intrinsèque la constituant, l’HUMAIN.

Car ils sont ces nouveaux venus, nouvelle race indomptable prête à éclore dans l’Histoire de cette galaxie. Nouvelle force et volonté opiniâtre avec laquelle il faudra dès lors compter. Ces Terriens, nouveaux dieux véritables, farouches et indestructibles ; les seuls dignes fils et filles de Gaïa, la splendeur azuréenne !

La journée se passa dans l’exubérance totale, liberté de se mouvoir sous le feu

sacré de ce grand Soleil vivifiant, délire des sens et de l’esprit, véritable fête paienne, la seule d’authentique car en osmose avec cette Nature paradisiaque, cet esprit universel propre et unique au polythéisme, véritable clé de l’ouverture au Cosmos en entier. Celui, seul, qui délivre l’âme de ses perversités métaphysiques inclues dans le dieu supposé unique et par nature impropre à satisfaire la propension spirituelle de l’Humain sain et équilibré à se projeter vers les étoiles.

La Vie cosmique et entière, seule vérité authentique et palpable à l’esprit libre et intègre qui de par sa dimension même ne supporte pas de limite à son pouvoir d’extension et de création. L’Homme, lui seul, est un Dieu multiple et infini ! Il lui suffit de le savoir, il lui sufit de le vouloir pour le devenir, c’est tout.

Ils se baignèrent tant, ils rirent et se coursèrent tant, véritables enfants à l’exubérante et vivifiante joie de vivre, qu’ils s’écroulèrent enfin sur la plage, repus, ivres de fatigue, de soleil et mouvements. Alexandra et Claude installèrent devant la porte du perceur abrité sous les arbres, un grand taud qu’ils avaient fabriqué pour ces occasions : fait d’une armature légère montée sur quatre piquets plantés dans le sable, supportant une de ces fameuses toiles antisatellites, au-dessus peint de la couleur du sable, avec quelques taches vertes imitant cette herbe rase poussant chichement en ce lieu.

Ils dressèrent ainsi une table et quatre sièges pliants, en vue d’y déguster un déjeuner bien mérité, car les estomacs criaient famine. Le pilote s’étant mise au fourneau ; rapidement les odeurs de cuisine les firent s’assembler pour ce banquet champêtre et marin de surcroît. Ce fut une fête des plus réussies car pour leur invitée c’était la première fois de sa Vie qu’elle se restaurait dehors en plein soleil, rien que ce fait inusité fut source de grande joie et d’allégresse.

Elle découvrait ainsi brutalement les bienfaits de la Vie libre et sans limite, véritable révélation ; car on a beau savoir la théorie des choses, rien ne remplacera jamais l’expérience propre. Cela leur faisait aussi réaliser combien leurs ennemis les avaient privé de liberté élémentaire, les renforçant encore plus si possible dans leur profonde envie et devoir de les anéantir.

La chef les régala du mieux possible des réserves du bord, et sans être un repas gastronomique, tous se régalèrent véritablement, d’autant que Claude déboucha une, puis une deuxième bouteille de vin rosé bien frais, breuvage qui participa aussi à la grande allégresse de ce jour béni entre tous ; le tout cloturé par un bon

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café et un verre d’alcool de derrière les fagots. Ils restèrent ainsi, après ce succulent repas, à converser et raconter des blagues, détendus, insouciants et heureux de vivre, puis ils finirent par s’allonger sur le sable à l’ombre des pins parasols ; quant Alexandra eut une idée pertinente.

-Claude, chéri, chante leur ta dernière chanson, la Destinée, qu’on rigole. -Bonne idée ! s’écria ce dernier, je cours chercher ma guitare. -Vous allez rigoler, dit-elle aux deux autres...je me demande où il va chercher

tout ça. Ha ! le voilà ! Claude s’installa sur une chaise, accorda durant un moment son instrument

puis fut prêt à chanter ; il leur dit en souriant. -Cette modeste chanson me vint un jour que je m’interrogeais, en vain comme

toujours, sur nos origines et notre destinée donc. Il attaqua sur un rythme drôle et joyeux ; chanson qui les fit beaucoup rire.

Dure Destinée Moi, si fragile et flou, Dans ce nuage si fou ; J'étais si bien blotti, Et de bourses loti ; Qu' il m'a fallu, ma foi, Malgré mon désarroi, Subir l'assaut d'un spasme, Eclor’ à la vie dans l'orgasme. Refrain Etre ou ne pas être ? Spermato, que faut-il être ? S'obstiner puisque l'on pullule, Malgré la sournoise pilule ? Compter sur notre aisance ailée, Passer par devers le stérilet ? Profiter pendant que l'on clapote, D'une brêche dans l'infame capote ? Ou s'abandonner à sa destinée, Et à l'occasion partir en fumée. 2 Quelle folie que ce chemin, Jeté dans ce flot inhumain. De la quiétude à la compétition, Moi qu’ai aucune ambition. De mes collègues aussi frénétiques, Faut ramer sec, sinon bernique. Le virage va falloir que j’ l’ chope En arrivant dans cette fallope. 3 Faut y aller sans faire la lippe, Fallope soit ! Ha ! non d'un’ pipe !

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Partir vite et n' avoir point de braies, Et surtout pas faire le benêt. Je nage, nage mais je m'en tamponne, Est-ce dans un’ mignonne ou friponne ? Sans savoir où je vais déboucher, Si on fera de moi qu'une bouchée. 4 Dans ce peloton tels des anguilles Faut voir ça comme ça frétille. Complotant, qui arrivera en tête, Dévalant comme des fous, l'urêtre. Pourquoi mon ardeur est si mitigée ? Sachant qu’y aura pas de débouché. Belle inspiration, qu’une course pareille, Moi qui rêvait tant de voir le soleil. 5 Ouf ! Ça y est, le fond ne pas racler, Dans l'explosion ne pas renacler. Virage au frein, faut pas que je me trompe, Pas le moment d'avoir le coup de pompe. Dans cette noirceur faut pas que j'affabule, Si je veux me coincer ce putain d'ovule. C'est tout bon, encore un petit coup de rein, Merde ! C’est rapé, y a déjà un copain. Après avoir beaucoup ri de cette chanson satirique, ils s’octroyèrent une sieste

bien méritée, cloturant cette journée fantastique de liberté totale et insouciante, nouveauté qui illumina l’esprit de Jennifer, car jamais elle n’avait pensé la Vie dehors sous ces apparences de décontraction et relâchement aussi total et absolu. Sa vie en fut véritablement bouleversée à jamais.

-Jamais je ne pourrai vous remercier comme il se doit, dit-elle ravie, à ses hôtes ainsi qu’à Georges, grâce à vous trois je sais maintenant ce que Vivre libre veut vraiment dire, je n’aurais jamais imaginé ce goût si puissant de la liberté ; c’est fantastique, j’étais folle de ne pas l’avoir découvert plus tôt ; mais je vais me rattraper maintenant, croyez-moi, s’esclaffa-t-elle.

Tous rirent de bon coeur et la félicitèrent de sa décision. -BRAVO ! S’écria Claude, enfin une adepte de la Vie en plein air ; dans pas

longtemps maintenant tu pourras vivre en permanence dehors si tel est ton désir, ma chère nouvelle ex-travailleuse troglodyte exacerbée. Vive la nouvelle Jennifer des espaces illimités et ensoleillés ! cria-t-il joyeux.

Tous les trois l’applaudirent et l’embrassèrent chaleureusement. Cette dernière les regarda un instant, songeuse, puis leur déclara tout de go.

-Maintenant que j’y pense...ça doit être fabuleux de faire l’amour sur cette plage, dans un tel paradis et sous ce Soleil royal si beau et si grandiose, hein ? vous croyez pas ?

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Claude et Alexandra se regardèrent avec un sourire complice, et cette dernière lui dit alors.

-Jennifer chérie, Claude et moi pouvons te certifier que c’est effectivement fantastique, car c’est un de nos rares endroits favoris pour la chose...ainsi que Marion et Hugues aussi ; nous nous y sommes rencontrés un jour pour cette occasion commune au deux couples...ce fut un grand jour de folle joie.

-Et qui d’autres que nous ignorons peut-être ? rajouta Claude. -Un de ces jours il faudra faire la file pour avoir le privilège de pouvoir

baisouiller sur ce sable, dit Georges en riant aux éclats ; en guise de coin tranquille ça va tourner à la foire, manquera plus qu’une clique, une guinguette et des pédalos, ce serait un comble !

-Et ce serait grand dommage et coupable car nous reproduirions alors le standard d’invasion territoriale des autres tarés disparus et qui polluèrent ainsi la planète ; ne parlons pas de malheur, dit Alexandra en frissonnant à cette pensée néfaste et criminelle.

Puis, s’adressant à Jennifer, elle lui dit discrètement en aparté. -Je te donnerai les coordonnées géographique de cette plage, ma belle, car je

sais que tu la mérite, et elle aussi ; Gaïa mérite une amoureuse telle que toi, aussi fougueuse et passionnée.

Elle s’embrassèrent et s’étreignirent un moment. -Mes amis, dit alors le pilote, tout paradis soit-il, ce coin merveilleux fait partie

intégrale de notre mère, Gaïa, et de ce fait la suit dans sa course sidérale et, la nuit approchant il nous faut donc nous préparer à le quitter, aussi triste soit-il, car ainsi va la Vie en ce somptueux carrousel céleste.

Là-bas, vers le couchant, le disque solaire allait disparaître d’ici guère moins d’une heure environ.

-Mais, ce n’est qu’un au revoir, mes frères...et soeurs, chantonna Claude en grattant sa guitare, pour casser la mélancolie s’installant sournoisement. Nous reviendrons, promis, juré ! cria-t-il en se tournant vers les arbres puis vers la mer, les saluant d’une révérence, comme les prenant à témoin.

Ils se rhabillèrent lentement, rangèrent les restes et matériels du repas, démontèrent le taud...Le moment tant redouté de quitter cette merveilleuse plage et ses délices de liberté imprévus était venu, irrémédiablement.

Au moment d’embarquer, Georges, demanda la faveur d’un dernier instant pour aller se recueillir une dernière fois sur le tertre de Céline, la guerrière bien-aimée de toutes les communautés...Son coeur, comme à chaque fois qu’il pensait à elle était étreint d’une grande tristesse, et le temps qui d’habitude appaise les douleurs ne faisait rien pour l’atténuer...il l’aimait tant...Ses compagnons restés devant la porte du perceur, il fit donc les quelques pas vers ce tertre qu’avec ferveur ils avaient fleuri en arrivant...Il mit un genoux à terre...tête baissée, et avança lentement sa main droite pour la poser sur la poignée du sabre...

Ce qu’il ne vit pas, tant ses pensées étaient prises par sa fervente prière à cette jeune enfant disparue et qui lui manquait durement, c’est qu’alors qu’il commençait à se diriger vers le tertre, le ciel au couchant se chargea brusque- ment de nuages noirs grossissants très rapidement en une sombre et gigantesque

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nuée occultant tout l’horizon. Cette masse sombre fantastique et irréelle grossit à vue d’oeil et vint vers eux à une vitesse effrayante.

Tous les trois étaient paralysés d’effroi devant le perceur, devant un aussi gigantesque et inexplicable mystère de la nature, et surtout de la brusquerie de ce fait précis et, Georges, inconscient de ces événements se déroulant dans son dos...posa alors sa main droite sur la poignée du sabre.

A l’instant précis où elle s’y posait, un énorme et monstrueux éclair zébra le ciel en entier et frappa le sabre et la main posée dessus dans un fracas assourdissant de fin du monde, pendant que le tonnerre d’une puissance colossale roula longtemps sur lui-même, comme s’il se faisait écho à lui-même, se nourissant de sa propre puissance et énergie, dans un roulement infini et démentiel, surnaturel ; le ciel étant zébré d’immenses éclairs.

Ce spectacle d’un tel déchaînement et soudaineté de la nature était du jamais vu ni encore moins imaginable. Eux trois, qui étaient restés figés sur place, liquéfiés véritablement de peur, virent l’immense flash aveuglant englobant le corps entier de Georges, ils le crurent mort à l’instant, car il ne pouvait en être logiquement autrement, devant une telle force céleste aussi démesurée et aussi puissante et, stupéfaits, n’en croyant pas leurs yeux, ils le virent se relever lentement, indemme dans sa toge blanche intacte...miraculeusement indemme.

Ce dernier se tourna légèrement vers eux et leur sourit puis, il se tourna ostensiblement vers le couchant, les jambes écartées et bien d’aplomb et attendit, calme et serein, les bras relâchés le long du corps, mains ouvertes et détendues. Il bomba légèrement le torse, tête levée, menton en avant, il souriait, heureux et détendu, confiant, sous ces cieux terribles et menaçants et ce grondement effrayant de ce tonnerre d’un autre monde et qui continuait de rouler dans l’aveuglement de ces éclairs surnaturels.

C’est tout cela qu’ils virent et les laissait pantois ; seule, minuscule entité vivante au milieu de ce spectacle démentiel, Georges paraissait sourire à quelqu’un, à quelques chose, là-bas, vers ce couchant tapissé d’une noiceur sinistre et combien oppressante. Les trois le regardaient ainsi, incrédules de ces faits inexplicables puis, pareillement, ils regardèrent aussi dans la même direction et...ils crurent qu’ils allaient mourir de peur, ou ils ne savaient de quoi.

Là-bas au loin, en cet horizon d’un noir épais, effrayant, tel un spectacle divin ou d’un diable, car il ne pouvait en être autrement, ils virent l’énorme masse d’encre noire de ce nuage unique et colossal englobant tout l’horizon, la plage et la mer y compris, être brutalement percé par un puissant rayon de soleil, rayon relativement fin comparé à cette immensité couleur de nuit d’apocalypse, et qui éclaira comme un projecteur, et suivit alors, une chose qui les terrorisa tous les trois. C’était l’affolante vision d’un immense taureau noir monté par une aussi gigantesque cavalière nue et d’une blancheur lumineuse éblouissante, irréelle.

Les cheveux noirs de jais, la tête ceint d’une couronne de fleurs champêtres et, vision qui leur glaça le coeur, les grands yeux de cette cavalière d’apocalypse étaient vides, horriblement vides ; deux sombres et immenses puits lugubres, cavités desquelles jaillissaient deux épais faisceaux lumineux et blafards braqués vers l’avant, vers l’infini...vers cet Orient innommable, but de sa course...

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La cavalière tenait dans sa main droite un immense sabre ensanglanté, le faisant tournoyer au-dessus de sa tête, la lame en vrombrissant jetait des éclairs d’acier froid et mortel. Dans l’autre main elle tenait la hampe d’une longue lance fixé à l’étrier, en haut de laquelle était une large et longue bannière claquant au vent de la course, bannière à l’arrière de laquelle sortaient de longues gerbes de flammes.

La bête, d’une hauteur et grosseur fantastique, arrivait vers eux à une vitesse hallucinante et, par-dessus le grondement du tonnerre, on entendit alors le bruit gigantesque d’un incroyable galop faisant trembler le sol. Ils furent sur eux en quelques secondes, ce taureau était démesuré et impossible d’être réel...Ils virent nettement quand ils passèrent entre Georges et leur groupe, à les toucher, sentant les ronflements de forge de la respiration haletante du fauve qui fonçait tête baissée, comme suivant ses immenses cornes effilées tels deux dards mortels ; course semblable à un déferlement de cent locomotives ensembles ; les yeux du monstre lançait des lueurs de braise, couleur de sang et, comme ils s’en doutèrent alors tout en le redoutant en même temps, ils constatèrent alors anéantis, que la cavalière n’était autre que Céline, paraissant une géante sur sa monture sortant des enfers ; une longue traîne blanche vaporeuse et immaculée de plus de dix mètres de long était prise à son cou et flottait, jointe à la bannière au vent de la course de ce fantastique et terrifiant équipage.

Ils eurent alors le temps de lire sur la bannière blanche, écrit en énormes lettres de couleurs or, le nom de GAÏA, entouré d’enluminures desquelles ruisselaient des flots de sang...Georges étant à la droite de l’apparition, vit nettement sur le flanc droit de la cavalière, une large balafre d’où s’écoulait un ruisseau de sang vermeil. Ruisseaux de sang des impurs, pensa-t-il à la seconde, et qu’il avait promis de faire couler à flots à son inestimable ami Donatien, ce guerrier inflexible, bloc indestructible d’amour pur et inconditionnel.

Quand ils passèrent devant eux, ils entendirent clairement surmontant le grondement du galop et celui du tonnerre qui continuait, un immense rire de femme surmontant des cris de joie et de guerre mélés à un immense fracas d’un combat à l’arme blanche d’une nuée innombrable de guerriers. Quand cet effrayant équipage fut passé, ils virent aussi comme en surimpression, cette gigantesque armée de guerriers la suivant et bataillant ; masse hallucinante de gigantesques guerriers blonds revêtus d’armures étincelantes, leurs immenses haches et épées rougies de sang jetant des éclairs...Les cris hystériques des combats à mort de ces guerriers farouches, qu’ils étaient tous eux-mêmes, combat qu’ils allaient aussi devoir livrer...dans leur grande bataille d’apocalypse et finale.

Cette troupe sortant droit du Walhalla les dépassèrent en trombe, allant ainsi vers l’Est, vers cet ennemi ancestral...Puis, fasciné, ils aperçurent alors nettement de dos cette cavalière à forme humaine suivie de son armée d’ombres et dans la fureur des combats, elle se transforma rapidement en un immense squelette continuant sa course démentielle et, suprème instant de folle terreur, ils virent alors cette masse de guerriers suivant ce taureau d’un autre monde, aborder comme un large fleuve rouge...une fleuve de sang dans lequel ils se

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jetèrent tous résolument ; le taureau s’y jetant le premier, faisant jaillir aux cieux des gerbes de sang...l’armée le suivant, y entrant jusqu’au genoux faisant bouillonner en d’immenses jets cette terrifiante rivière couleur vermeil...

Inexorable justicière : la Mort rédemptrice était en chemin. Le message était des plus clairs puis ; disparaissant vers cet horizon qui sera

bientôt celui de leur combat décisif, la masse nuageuse et l’orage les suivit rapidement puis tous disparurent sous un horizon de nuit effrayante. Ils se retrouvèrent subitement sous un chaud soleil couchant, comme s’il ne c’était rien passé, au calme de cette merveilleuse plage...la mer venant mourir en de minuscules vaguelettes, les oiseaux innombrables continuant leur chahut de toujours...Ils virent Georges, tombé à genoux, épuisé, mais le visage radieux et illuminé d’une force et douceur étrange. Ils se précipitèrent alors vers lui pour le relever. Ils se regardaient, livides et tremblants ; aucun d’eux n’osait exprimer ses pensées sur cet événement totalement anormal...puis Jennifer s’y résolue.

-Dites-moi si j’ai rêvé ou déliré ? Vous avez vu comme moi ce...ce taureau et cette Femme ?

Ils se regardèrent tous, et c’est Georges qui lui répondit. -Non, Jennifer chérie, tout fut réel, je veux dire que nous l’avons tous vu, la

réalité étant possiblement, certainement même, d’une autre nature, mais nous le vîmes tous les quatre, ton esprit est normal, rassure-toi.

-Merci, Georges, ouf ! Mais...peux-tu nous expliquer comment tu n’es pas mort avec cet énorme éclair ?

-Et qu’as-tu ressenti, exactement ? rajouta Claude. -Je ne peux tout simplement rien expliquer, comme de juste...pourquoi tout

cela ? Pourquoi suis-je encore vivant ? Ces mystères resteront éternels je pense. Par contre, je n’ai ressenti qu’un appel dans ma tête, je n’ai eu conscience de cet éclair qui m’englobais que d’une façon secondaire...comme si je n’étais pas concerné, j’en fus conscient mais pas inquiété aucunement car mon esprit était captivé par une force énorme qui voulait me protéger et me fortifier pour un combat...mais je ne savais lequel en fait, aussi bizarre soit-il...Puis, c’est alors que comme vous trois j’ai vu ce taureau, et j’ai alors compris cet étrange message de cette enfant chérie, car pour moi, sa tragique disparition est une éternelle tristesse, une ombre à jamais sur mon coeur, car j’avais une tendresse particulière pour elle, et elle aussi...Des larmes commençaient à couler sur ses joues sans qu’il s’en soucie ; parfois elle me disait à l’oreille en se blotissant contre moi, fragile petit oiseau de paradis, « Georges chéri, je suis ta fille de sang, même si c’est pas vrai, mais peu m’importe, tu est mon vrai père d’amour et spirituel et je t’aime très fort pour toujours ».

Pour toi qui ne l’a pas connu, Jennifer...sache que la cavalière de ce taureau dantesque, est Céline, ma fille d’amour comme elle disait, l’ancienne compagne et grand amour aussi de Marion...et ces armes sur ce tertre que voilà, et que construisit Alexandra, avec l’avis de Marion, sont ses armes avec lesquelles elle livra son dernier combat pour la liberté, pour notre liberté à tous.

Il ne put continuer car il s’éffrondra en larmes, en un long sanglot tant son émotion était intense et insoutenable, Jennifer se précipita et le prit dans ses

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bras, le consola de son mieux sur son épaule...Alexandra et Claude les laissèrent par discrétion, s’en retournant vers le perceur en vue du départ devenant impératif maintenant. Une fois en vol de retour, Claude leur servit un rafraîchissement qui fut pour tous le bien venu après ces intenses frayeurs. Georges s’était remis de ses souvenirs émotionnels et discutait avec Jennifer.

-Tu peux dire, ma belle, que pour une fois que tu sors de ton trou ce fut une réussite.

-Ça oui, rit-elle, je m’en souviendrai de cette aventure démente, et de la peur démentielle aussi que j’ai éprouvé.

-Crois-moi, lui dit Claude, qu’il en sera de même pour nous tous. -Exact ! leur cria sans se retourner le pilote de son siège, en levant son pouce

de la main gauche. -Au fait, dit Claude s’approchant des deux Femmes et s’adressant au

commandant de la base de Blagnac, peux-tu me rassurer, ma chérie, et me dire si, en plus de ton trou que tu n’avais jamais quitté avant ce jour si...particulier, si tu es entrée une seule fois au moins dans une de nos stations, nos grottes ?

Grosse surprise de l’interpelée qui fut prise au dépourvu, et répondit en bafouillant lamentablement.

-Ben...je pensais que je....j’y ai pensé oui, une fois, et puis... -Et puis tu es restée rivée à ton précieux travail, hein ? C’est ça ? la coupa un

Claude scandalisé. -Oui, parce que...parce que...est arrivé un perceur des Appalaches qui...qui

nous amenait des...des... -Ça suffit, vilaine menteuse, la coupa Georges en la fusillant du regard, nous

allons réparer ces travers pervers de cette obsession pathologique au travail forcé, misérable esclave !

Il leva le ton et cria au pilote. -Alexandra, envoie de suite un message comprimé à son adjoint, ce cher Raoul,

qui sera ravi de voir durer son commandemant, car avise-le que sa chef est punie et ne rentrera que demain...et si elle est sage encore...Dis lui que nous la gardons dans nos pénates jusqu’à nouvel ordre ! EXÉCUTION !

Ce que illico et ravi s’empressa de faire le pilote ; puis tous de rire de voir la tête de la punie en question, qui tenta bien de protester pour la forme...puis finalement elle abandonna cette lutte stérile, soulagée de sa défaite, car rien n’est n’est plus reposant que cet état où l’on s’en remet au sort et/ou volonté des autres. L’abandon de la lutte est la suprème mais mortelle tentation perverse du guerrier.

-Vous êtes d’horribles dictateurs, s’insurgea-t-elle en souriant, ravie de cet imprévu, c’est vrai que plusieurs fois j’ai été tentée de vous demander de me faire connaître Girelles, puis je n’ai pas osé ; c’est stupide, je sais aussi.

-Ça tu peux le dire ! s’esclama un Claude scandalisé ; ne pas oser, avec nous deux, tes amis pourtant ? à quoi servirait l’amitié alors, hein ? peux-tu me le dire ? folle et furieuse travailleuse !

-Ok ! cria Alexandra se tournant vers eux, riant de joie, tu vas connaître notre station et nos gens qui seront enchantés de te faire découvrir leur havre de

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résurrection et de paix ; mais je te previens, ils vont vouloir te faire tout dé- couvrir, ça risque d’être un peu collant...

-Nous y mettrons le holà, rassure-toi ma belle, dit Claude en riant, sinon, et à notre grand regret, tu ne reviendrais pas nous rendre de petites futures visites que dès lors nous escomptons bien.

-Merci à vous tous, répondit une Jennifer un peu gênée, car pour dire vrai, j’en meurs d’envie depuis longtemps, voilà ! Vous êtes contents maintenant ? rit-elle.

-On ne peut mieux, répondirent-ils en choeur. -Nous allons arroser dignement ce grand jour avec un petit vin blanc doux pas

piqué des vers, et vous m’en direz des nouvelles, dit Claude en ouvrant son frigo-miracle et en sortant avec délicatesse une bouteille de vin à la robe si magnifiquement et richement dorée.

Il prit quatre verres ballon à pied dans un placard de la cloison, ouvrit la bouteille et les remplit lentement puis les distribua...Heureux, ils trinquèrent à ces événements et ce lourd et puissant message de Céline, puis ils trinquèrent à la joie d’un Raoul enchanté qui en prolongeait d’autant son commandement, ils rirent à cette idée. Ils humèrent longuement les délicates fragrances de ce magnifique breuvage d’or, puis ils dégustèrent alors lentement et avec délice ce petit Loupiac, que les gars géniaux et infatigables de cette ancienne région d’Aquitaine avaient réussi à remettre discrêtement en exploitation.

Douces saveurs de ce vin doré fort apprécié de tous. Le seul défaut de ce nectar était sa production provisoirement des plus limitées...mais, jubilaient ces paysans sarcastiques, en fourbissant leurs armes le soir à la veillée, en véritables paysan-guerriers, titre de noblesse par excellence, car sous le tablier du Seigneur fait vigneron ou d’une quelconque autre profession, se cachait leur invincible armure d’airain de flamme et d’honneur.

-Production limitée ? disaient-ils ainsi, soit ! ironisaient-ils en riant fort, avec des flammes de meurtres rédempteurs dans la prunelle, mais pour peu de temps encore maintenant, foi de Vigneron-Guerrier !

L’arrivée à la station de Girelles eut lieu au début de la nuit. Le pilote posa son

engin en souplesse devant l’entrée située au pied d’une immense falaise abrupte de 80 mètres de hauteur. Ils sortirent, la porte du perceur étant pile devant l’entrée de laquelle sortirent en courant deux personnes, c’était les placeurs habituels devant éventuellement amener le perceur à son emplacement de stockage situé à une vingtaine de kilomètres, dans une grotte réservée à ce seul usage car inhabitable, ne disposant pas initialement d’eau.

Il y en avait ainsi vingt-trois sur tout le territoire du sud de la Franki, et presque autant en Espingo, certaines de gigantesques. Ils les avaient donc aménagées en garages pour les innombrables perceurs que fournissait inlassablement les ateliers de Blagnac. Ces abris naturels furent exploités d’une forme optimale, car en plus des perceurs, et dès les débuts de la survivance de leurs communautés, leurs anciens y aménagèrent de gigantesques magasins de stockages de tout ce qu’ils trouvaient d’utilisable.

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Ils s’étaient rapidement rendu compte que de laisser ces richesses inestimables dans les villes, les exposait à un hasard inacceptable car n’importe quoi pouvait arriver et perdre ces stocks vitaux pour eux tous. Ils disposaient de ces bases de replis équipées de stocks de nourritures pour plusieurs mois, ainsi que de réserves d’eau douce pouvant étancher la soif de milliers de personnes pendant plus d’un an. Stockage hétéroclite de bacs idoines trouvés un peu partout dans les villes et villages, ce qui avait exigé de la part des premiers travailleurs de ces grottes un grand courage et détermination ; et que dire de leur foi immense en l’avenir car ces travaux harassants étaient pour une utilisation future et hypothétique qu’ils ne connaîtraient jamais.

Et folle ironie, souhaitant paradoxalement et ardemment au fond de leurs coeurs que ces bases de repli et de survie extrème ne servent jamais à leurs descendants. Passer ainsi des dizaines d’années à construire avec passion une chose démesurée et que l’on souhaite ne servir jamais à personne, demande vraiment du courage et obstination, c’était le moins qui leur manquait.

Cette base secrête que partage Girelles avec six autres stations, se nomme Espéranza. Elle était grandement privilégiée, comme sept autres grottes de même, car au cours de ces siècles passés, leurs anciens avaient creusé un boyau accédant à un torrent, en une légère montée d’un tunnel étroit de 0,80 m de large et 1,80 m de haut sur une distance de 723 mètres de long. Ils y installèrent sur toute la longueur un tuyau de huit centimètres de diamètre amenant l’eau jusqu’à leur grotte. La sortie de ce tunnel est cachée par des blocs de gros rochers en quinconce et des arbustes plantés pour l’occasion offrait une sortie de secours supplémentaire aux six autres naturelles existantes.

Au bord du torrent, le tuyau qui est caché par un amoncellement de rochers paraissant un éboulis plus que naturel, plonge dans l’eau du fort courant, sa tête rotative en forme d’entonoir formant un syphon. Il suffisait de tourner l’entrée évasée vers le courant pour amorcer la descente de l’eau, le contraire coupant l’alimentation ; simple et efficace, résultat du génie de l’adaptation à loi de la physique élémentaire.

Ainsi, par delà de plus de deux mille cinq cents ans, le père de ce moteur éternel qui leur amenait l’eau de Vie si précieuse et en abondance, Archimède, pouvait être légitimement fier d’eux. Mais combien de citadins du monde disparu, robots aux esprits sclérosés, auraient été capables de concevoir et construire un système aussi simple et aussi logique ?

Autre particularité de cette base Espéranza, et non des moindres, l’entrée principale se trouve au fond d’un aven presque circulaire de 27 mètres de diamètre et de 153 mètres de profondeur. L’immensité circulaire de cet aven permettait un trafic simultané dans deux couloirs verticaux. L’entrée des perceurs qui arrivent au fond se trouvent en présence d’une immense caverne de 56 m de hauteur, 94 m de large et 189 m de longueur ; l’ensemble suivi d’un dédale de grandes galeries et de sept autres cavités plus petites, totalisant un parcours de 3.452 mètres. Véritable bénédiction de Gaïa pour protéger ses fils et filles acharnés à lui redonner son éclat.

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Descendre entre ces immenses murailles sinistres et sauvages est un spectacle impressionnant et inoubliable, mais le pire est quand on arrive au fond et qu’on se touve brutalement devant une énorme porte métallique et, passé le sas on débouche ensuite dans la caverne, découvrant d’un coup la civilisation élaborée et industrieuse baignant dans une débauche de lumière ; personne n’oublie alors ces instants révélateurs de la hardiesse de ces communautés.

Comme dans toutes les stations, l’arrivée des Akadis et de leurs fantastiques Centrales FMS avait révolutionné la Vie de tous et en particulier dans ces bases de repli et de stockage. Ainsi cette base gigantesque de surcroit, avait bénéficié de toute leur attention pour l’équiper confortablement en vue de subvenir à un effectif maximum possible de 9.452 personnes en situation de guerre et de survie extrème.

L’immense caverne servait ainsi de garage à un parc de 1179 appareils en stockage permanent, ceux réservés pour l’attaque, plus un parc usuel disponible pour 143 perceurs et transports en activités journalières. Les stations habitées étant aussi saturées et devaient laisser en permanence une ou deux places de libres pour des perceurs arrivant en situation d’urgence. Les immenses ateliers de Blagnac, avec la foule dense y travaillant d’arrache-pied, avaient à ce jour déjà fourni des milliers d’engins de tous types ; ils en recensaient environ 19.530 rien que pour la Franki et peut-être 17.780 pour l’Espingo.

Depuis ces derniers mois déjà, faute de place dans les grottes, ils les planquaient dans de grands immeubles de la ville de Toulouse, des sections d’assaut montaient une garde volante et serrée...et ils continueront ainsi encore tout l’été. Les derniers appareils fabriqués resteront sur place, dans les ateliers, car plus aucune place de libre n’est disponible depuis plus d’un mois déjà. Il s’en allait temps de cesser ces constructions qui débordaient leurs possibilités de gérer de tels stocks éparpillés un peu partout. En clair, s’écriaient-ils d’un seul choeur, vivement l’attaque et qu’on en finisse !

Cette base de stockage et de repli bourdonnait comme une ruche et l’activité n’y cessait jamais. Un effectif de 18 personnes s’occupent de placer les perceurs qui entrent et sortent sans arret, jour et nuit dans un ballet incessant. Le plus impressionant d’assister à ce trafic intense, est le silence régnant dans ces lieux, puisque ces engins évoluent en silence total, et heureusement car cela aurait été invivable. Chaque perceur ayant sa commande à distance que le placeur remettait à un réceptionniste, le gars chargé d’aller placer l’engin, le liftier, le guidait du sol jusqu’à son rack habituel ; rack est une façon de parler car en réalité ces engins étaient placés les uns sur les autres en rangées compactes, et restaient ainsi à leur place par un verrouillage géopoint.

Et bien entendu, un effectif de 92 gardes mixtes, disposant d’un puissant armement était en permanence de faction ; les entrées et accès divers éventuels étant gardés nuit et jour. Des mitrailleuses lourdes et canons laser étaient en permanence pointés vers l’extérieur, leurs serveurs abrités derrière des casemates fortifiées, comme c’était le cas dans toutes les stations habitées.

Dans le haut de l’aven, à onze mètres de profondeur, ils avaient aménagé une grotte naturelle existante, offrant suffisemment de place pour une casemate de

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défense. En plus d’un léger surplomb de la paroi supérieure une tenture mobile montée sur des cadres rabattables et imitant la roche en occultait l’entrée. Les six canons laser et leurs consoles de poursuite et de tir, ainsi que cinq mitrailleuses lourdes antiaérienne qui l’équipaient, étaient montés sur les rails d’une plate-forme qui pouvait s’avançait de cinq mètres à l’extérieur, permettant de tirer dans tous les azimuts, y compris à la verticale. L’un de ces canons laser ainsi qu’une mitrailleuse pouvaient tirer vers le bas, au cas bien improbable où un engin ennemi réussirait à passer outre ce premier barrage de feu. Les personnels de cette défense avancée, une quinzaine de gardes renouvelés tous les trois jours, y accédaient avec des plates-formes AG, et bénéficiaient d’une autonomie de trois semaines en vivre, eau et munitions.

Il y a une quinzaine d’années de ça, un jour, la garnison de cette casemate détecta brusquement un engin ennemi furetant dans les environs de leur base. Leur système de détection est passif, fonctionnant sur le changement de la masse électromagnétique ambiante causé par l’entrée d’un engin spatial en évolution lente ou rapide dans le volume environnant d’une demi-sphère d’un rayon de 17 km, avec indication automatique de son azimut et code envoyé non-stop par son transpondeur, si c’est un des leurs...

Ils laissèrent l’engin ennemi fureter à sa guise quand, le pilote aperçut l’aven ; ce dernier choisit alors de descendre jusqu’au fond mais, quand il y parvint, ce fut pour son malheur car les gars de la casemate du haut le désintégrèrent littéralement sur le fond en une seconde, au laser et mitrailleuse lourde. Ils récupérèrent les restes mutilés de deux corps, celui d’un garde et d’un jeune Zanko-Khuigs qui pilotait. Les deux corps furent dévêtus puis amenés de nuit dans une vallée éloignée et jetés en pature à une bande de chiens sauvages, unique et digne fin pour ces fous criminels. Les restes de leur engin fut transporté dans la base et dépiauté jusqu’à l’os, mais plus rien n’était récupérable. Les cadors de la casemate l’avaient méthodiquement explosé avec rage et détermination et, fallait-il le rajouter, avec une intense jubilation.

Ces gardes de la base, regroupement venant des stations habilitées comme ayant droit en ce lieu, y restaient trois semaines par bordées alternatives. Chaque guerrier, et quel qu’il soit, c’est-à-dire Homme et Femme, y passait ainsi plusieurs fois au cours de sa Vie, pour ce devoir sacré d’assurer la défense de leurs biens communs.

La constitutions de ces vigiles armés représente l’énorme avantage de casser la routine des stations mais surtout cela faisait se rencontrer les collègues des autres grottes, les liant dans une action commune des plus bénéfique, car rien de tel que de s’emmerder pendant des jours à ne rien faire pour créer des liens indestructibles, car l’on fait alors parti d’une sorte de confrérie qui soude les amitiés et les intérêts...On se dit alors faire parti des Frères de la Garde, titre devenu universel et fièrement porté par quasiment tous.

Cette base Espéranza vit, sur la fin des fabrications de Blagnac, en vue de l’attaque, dans la grande salle à l’entrée, une grande ère réservée à l’installation de trois immenses maquettes des villes-cibles, où chaque groupe vient y travailler, répéter jusqu’à plus soif leur opération de massacre de l’ennemi.

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La ville-cible réservée à Georges et son équipe regroupant plusieurs stations, se nomme Cannes, la première de ce littoral voué à une violence jamais vue sur ce monde. Tel est leur serment sacré qu’ils firent.

Alexandra salua les deux placeurs, Sophie et Sébastien et les embrassa, puis

leur tendit la commande de son perceur. -Vous pouvez amener mon cheval à son ratelier, mes agneaux, leur dit-elle en

riant ; quoi de neuf à Girelles ? -Rien de nouveau, ma belle, lui dit Sébastien. Qui c’est cette belle poupée que

tu nous amènes ? -C’est la super craque qui nous construit tous nos engins volants, la fameuse

Jennifer Chancellor en personnne, et tu ne la reconnais pas ? toi un si terrible dragueur ? tu me déçois, mon chou.

-Oh ! il est un peu en baisse ces temps-ci, rétorqua Sophie avec un air compatissante, c’est plus ça quoi...l’âge peut-être ? va savoir, ma chérie...

L’interpelé la prit d’autorité par le bras et lui dit. -Viens derrière ce buisson cinq minutes et tu vas voir si je suis en baisse,

drôlesse ! que je te fasse rougir tes fesses ! dit-il en riant aux éclats. Alors, ma poupée, on peut ranger ton pursang pour la nuit ? demanda-t-il au pilote.

-Tout juste mon mignon, et gaffe de pas rayez la carrosserie. Alors que son perceur qui avait tant bourlingué était plus semblable à une

épave qu’à une objet sophistiqué. Tous rirent de bon coeur, le pilote les quitta et courut les quelques mètres pour rattrapper ses compagnons de voyage.

Sophie monta à bord et décolla de suite vers le garage Espéranza, pendant que Sébastien sautait sur une plate-forme AG équipée d’un pare-brise enveloppant les passagers ainsi que l’indispensable toiture antisatellites, et partit rapidement à sa suite pour ramener sa collègue.

Un autre perceur se posa alors qu’ils venaient à peine de partir, deux autres placeurs accoururent vers la porte qui s’abaissait...Plusieurs équipes étaient ainsi à poste à demeure 24-24h, soit pour aller chercher un perceur ou en amener un au repos. Ce travail était une des mille activités de ces stations, toutes d’une grande importance pour que la machine de guerre poursuive son extension sans accroc. Ce qui était admirable et n’avait jamais dû exister dans une société d’Humains, c’est que tous se dévouaient avec le sourire et la joie rivée au coeur d’oeuvrer pour le bien de tous. Ces Homme et Femmes nouveaux étaient véritablement fabuleux, et pour preuve de leur authenticité et réelle grandeur, d’une surprenante modestie.

Les nouveaux arrivants allèrent directement à la réception pour réserver deux carrés pour les visiteurs, où Claude eut beau faire du charme à la responsable du moment, ils ne purent en avoir qu’une, la dernière de libre.

-Fais un effort, ma belle, ces deux personnages sont importants et il en va de notre réputation de bon accueil.

Mais la chérie en question, Marietta, pouvait-on lire sur son insigne signalétique, ne put rien faire d’autre ; c’est une femme dans la cinquantaine, de

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forte constitution, avec un beau visage souriant, affable et courtoise ; elle lui répondit avec un beau sourire.

-Merci pour le compliment, mon bon, mais il ne me reste qu’un carré sur les quatorze de disponibles, alors...Qu’est-ce qui se passe ici, il y a un congrès ? demanda-t-elle, curieuse.

Georges s’avança et intervint pour stopper cette discussion stérile. -Dans ce cas ça n’a pas d’importance, merci Marietta, ça ne fait rien, je

rentrerai à Bertrand avec le premier perceur qui passe par-là, je laisse la place à Jennifer.

Cette dernière s’avança de deux pas et protesta vigoureusement en prenant le bras gauche de Georges.

-Ah non ! pas question, Georges, tu ne peux te défiler maintenant. Sois chou, reste avec moi pour cette nuit, je te promets de rester sage, d’autant que je suis complètement crevée après toutes ces émotions de cette journée, d’accord ?

-Bon d’accord, je crois bien que nous sommes tous fatigués et une bonne nuit de sommeil ne sera pas de reste mais, tu as promise devant témoin de rester sage, n’oublie pas.

Tous rièrent de ce gentil rappel à la sulfureuse Akadi. -Excellent ! s’écria Alexandra, joyeuse, et prenant la plaque avec le numéro de

leur carré que leur tendait Mariette en souriant. Allons de ce pas nous restaurer pendant qu’il n’est pas trop tard, je vous amène à notre cantine préférée à Claude et à moi, chez Fernand ; il a une tchache terrible mais c’est un cuisinier de première, vous verez ; ensuite, une bonne douche chaude et tout le monde au dodo, ce qui ne sera pas un luxe. Ça vous va comme ça, mes chéris ?

Programme accepté à l’unanimité. Ils se régalèrent comme promis, et le Patron Fernand, comme il aimait qu’on

l’appelle, leur proposa un menu à s’en lécher les doigts, et forcément car ils commencèrent par des écrevisses à l’armoricaine, si énormes qu’on aurait bientôt pu les prendres pour des homards ; suivies de lapin de garenne à la provençale, avec des petites olives noires, tomates succulentes et les herbes classiques du terroir provençal : farigoule, romarin, laurier, oignons...le tout cuit à l’huile d’olive et un petit vin rosé du cru, et savouré avec le même breuvage.

Déguster de tels plats était comme marcher sur un nuage. Ils finirent par un énorme plateau d’une vingtaine de fromages desquels ils se gavèrent, quoiqu’ils eurent encore un peu de place pour avaler une bonne tranche de patisserie, puis un café et...plusieurs verres cognac, prune et d’alcool de poire pour cloturer ce plantureux repas, le tout avec une bonne discution entre amis, à laquelle se joignit le fameux patron, Fernand.

Sortant de la cantine sur le coup des vingt-deux heures passées, repus ; il faut noter que les portions servies auraient facilement pu alimenter trois sous-hommes des temps passés ; également bien imbibés des nectars du terroir et, ainsi satisfaits de cette bonne soirée autour d’une excellente table, chacun réintégra ses pénates pour aller directement s’affaler dans les draps...Tous étant d’accord que la douche ne s’envolerait pas durant la nuit. Ils étaient morts de fatigue, d’émotions et de bains de mer ; dès lors, seul Morphée pouvait

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pleinement les satisfaire. Jennifer rejoignit son carré, tenue fermement sous le bras par son cavalier, car n’étant pas habituée à de telles agapes aussi bien arrosées surtout, elle titubait légèrement...Elle s’écria, joyeuse.

-Georges, dis-moi, mon chéri, c’est...c’est normal que je vois les lampes se dédoubler par moment, hein ? Hic !

-Tout à fait, ma colombe, surtout après les trois verres d’alcool que tu as bu pour finir, et c’est bien connu que c’est le dernier verre le pire ; faut jamais boire le dernier verre, souviens-toi toujours de ça, ma chérie, lui dit-il sérieux.

Elle stoppa sur place et le dévisagea, surprise un moment, puis, après un intense et douloureux moment de réflection, elle réussi à articuler assez clairement.

-Tu veux dire par là que...je me suis prise une cuite à cause du dernier verre ? Hic ! dit-elle fronçant les sourcils et tanguant légèrement...

-Exact, ce dernier verre, ben fallait pas le boire, c’est lui qui t’a cuité. -Mais...si...intense réflection de sa part...si je l’avais pas bu...ça aurait été pareil

avec le deuxième alors, puisqu’il aurait été le dernier, non ? -On peut rien te cacher, ma poulette ! Elle le regarda encore un bon moment puis réalisa. -Georges...tu te fous de moi, hein ? Hic ! je le vois bien, malgré que je sois à

moitié saoule. -Oh ! si peu, ma poulette, tu es ronde comme un melon, mais de Cavaillon, les

meilleurs remarque bien ! C’était juste pour voir si tu avais encore un minimum de tes esprits ; pas de problème, tu as brillamment réussi le test du poivrot.

-Ben merde alors ! c’est ma première cuite depuis longtemps, hic ! j’aurais eu de tout pendant ce voyage. Allons nous coucher, mon beau chevalier joli, car j’en peux vraiment plus, et ça c’est qu’chose alors ! Qui l’aurait cru, hein ? Hic ! La grande baiseuse de Blagnac sur les rotules, on aura tout vu aujourd’hui, hic ! que j’ pourrai même pas me faire un jouvenceau, quelle honte ! Hic !

-C’est parfait comme ça pour moi, ma chatounette...pour cette nuit j’entends. Par contre, pour la prochaine, je t’invite chez moi, à Bertrand, ok ?

-Oh oui ! on s’aimera comme des fous, d’accord ? -C’est décidément une idée fixe, mais d’accord...pour l’intention tout au

moins ; on verra bien si ma machine suit ton rythme, ce que je doute fort...Mais demain est un autre jour, et qui vivra verra. Allons dormir et prendre des forces donc, en vue de ce match au finish...vrai cas de suicide !

Et ils repartirent vaillamment, quoique chaloupant et riant d’un rien vers la couche salvatrice.

L’été passa rapidement, puis arriva la fin des fabrications...Les ateliers de

Blagnac semblèrent mort ; des centaines de tecnos et leurs aides bénévoles se retrouvèrent du jour au lendemain désoeuvré, du jamais vu dans ces ateliers où depuis de nombreuses décades y régnait une délirante activité industrielle, mais ce grand jour tant attendu et redouté aussi était enfin bien là.

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Le commandant de la base, Jennifer Chancellor, avait prévu ce traumatisme collectif de la cessation de ces activités qui avaient fait oublié à tous ces lendemains où il leur faudrait se recycler dans une nouvelle Vie ; elle avait donc discrêtement organisé une gigantesque fête pour marquer ce grand jour. Ainsi, trois jours après l’arrêt des fabrications et le rangement des ateliers, leurs matériels et outillages, et par un beau matin ensoleillé, arrivèrent des dizaines de perceurs et transports desquels débarquèrent plus d’un bon millier de passagers.

Ils venaient de Franki et d’Espingo, chaque station avait délégué quelques représentants pour honorer ces travailleurs et leur inestimable commandant, sans lequel rien de leurs force d’assaut n’aurait pu voir le jour.

Il y eut même, venant d’une station voisine, une clique qui les régala de musique énergiques des marches militaires de Germain, rythmes martiaux des plus appropriés qui les dynamisèrent à l’extrème. Puis, grande surprise pour tous car personne n’était au courant de leurs intentions, les Kosses sortirent leur cornemuses et entamèrent un festival aussi entraînant...

L’ambiance était des plus réussie, de nombreux buffets offraient des boissons et des casse-croûte à volonté. Ce fut un grand jour et une fête qui resta dans les mémoires...puis les invités repartirent. Le lendemain de gros transports amenèrent les personnels supplétifs vers leurs stations d’origines. Il ne resta qu’environ une bonne vingtaine de tecnos pour parer à tout éventualité, comme réparer les pannes et défauts de fabrications aventuels.

Tous retrouvèrent les leurs, les coutumes et habitudes de leurs matrices. Ils allaient maintenant attaquer la phase ultime, ils disposaient de sept mois pour cela, la phase la plus importante de toute leur vie : apprendre par coeur et jusqu’à satiété les phases chronologiques de la grande attaque finale, et chacun le lieu de son poste de combat et les actions qu’il devra accomplir dans un plan chronologique d’une rigoureuse précision.

Chacun reçu le plan entier de la ville le concernant, puis le plan grossi et le plus détaillé possible du quartier de son action et le ou les immeubles étant ses cibles, le tout rehaussé de centaines de photos prises de tous les angles possibles : les rues, les entrées d’immeubles, le nombres d’étages, combien de locaux intérieurs, les dépendances, les sous-sols, les arrivées d’énergies électrique, etc.

Mille détails qu’ils devaient assimiler totalement. Chaque guerrier se devait de pouvoir évoluer les yeux fermés dans son périmètre d’action et devait savoir ce qui devrait se passer dans un rayon de cent mètres autour de ses cibles, ainsi qu’une connaissance superficielle mais réaliste de l’ensemble de la stratégie d’attaque. Car chacun, isolé et dans le pire des cas devait être capable de tenter reprendre et coordonner une offensive générale.

Tous entamèrent résolument ces mois harassants d’apprentissage. Ils se faisaient répéter leurs leçons les uns les autres avec les compagnons d’attaque du même groupe d’assaut, chacun se faisait un point d’honneur de parvenir à relever ce défi ; tous sachant que ce jour-là sa vie dépendrait possiblement de son équipier, d’où l’intérêt d’une efficacité commune à cent pour cent.

Mais rien ne les rebutait, toute leur vie n’avait été qu’un combat obscur vers un objectif invisible, alors que maintenant ils le voyaient sur ces plans, photos et

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textes de détails à l’appui. L’ennemi était maintenant en vue, et ça faisait une énorme différence. Chacun en étudiant revoyait les horreurs des vidéos leur rappelant les monstruosités commises par leur ennemi héréditaire, cela suffisait pour les doper dans leur rage de les exterminer dans un massacre le plus horrible qu’ils imaginaient de possible...

Mais certains étaient véritablement furax, et c’est un euphémisme, car les stratèges, avec juste raison avaient décrété qu’une trentaine de guerriers mixtes resteront dans chaque station et base de repli pour protéger leurs biens, mais surtout les personnes ne participant pas à l’attaque, comme les jeunes enfants en dessous de douze ans, les personnes âgées ou inadaptées aux combats, ce qui était particulièrement le cas de celles travaillant aux ordinateurs, les cuisines, hôpital, ainsi que les quelques vieux trop faibles pour combattre.

Ils avaient pour mission vitale de préserver ces trésors vivants, car au pire, c’est d’eux tous que pourrait repartir une nouvelle tentative d’Humanité. Les guerriers désignés à cette charge vitale se résignèrent de leur frustation de ne pas participer au combat et se vouèrent dès lors à la tâche d’organiser une défense inexpugnable. Chaque station gardera quatre perceurs d’attaque et deux transports pour éventuellement amener les leurs vers la base de repli ; laquelle gardera en réserve une vingtaine de perceurs rapide d’attaque ainsi que huit transports lourds.

À moins d’y laisser leur peau jusqu’au dernier, aucune force ne pourrait envahir ces grottes devenues de véritables pièges sournois et mortels.

Dès les débuts de la deuxième semaine de ce mois d’avril 2.400, des escouades

faisant parties des troupes d’assauts devant attaquer la ville-cible Cannes, à laquelle leur grand sage, Georges, réserve un spectacle de terreur et d’épouvante particulièrement soigné, partirent par monts et par vaux avec des matériels des plus étranges et de types différents, en vue de pratiquer des chasses des plus étranges : la capture de fauves bien spécifiques.

Mais, nous devons de suite aviser le lecteur que toute cette bataille mondiale sera suivie et décrite principalement à travers les actions des combats qui auront justement lieu dans cette ville-cible Cannes. Les autres localités subiront une attaque plus ou moins semblable, chacune ayant une stratégie d’attaque particulière dépendant des décisions de chaque Central-Stratège.

Ainsi, en suivant ces équipes de guerriers précités, cela évitera une répétition lassante et n’apportant rien de vraiment nouveau pour le lecteur. Nous espérons de par cet éclaircissement affirmer la compréhension de chacun de vous, amis, vous lectrice et vous lecteur, car ce choix privilégie le paroxysme de la frayeur et violence rédemptrice qui s’abattront alors sur l’ennemi.

Par avance nous vous en remercions. Pendant ce temps vers l’orient, insouciante et infatuée, la charogne se prélassait

nonchalamment en ces derniers soleils d’été. Tels de caricaturaux mais

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immondes éléphants de mer chargés d’oripeaux grotesques et graisseux ; les monstres s’en donnaient à coeur joie, humiliant, torturant, assassinant leurs dernières victimes innocentes, victimes immolées à la folie d’un peuple pervers qui allait bientôt cesser de polluer cette planète.

Puis, comme le vent qui vient toujours après le beau temps, l’hiver à la suite de l’automne, le printemps de ce début d’un nouveau siècle en cette année 2400, suivant ces cycles immuables, s’installa sereinement en cette contrée, en suivant les rythmes de vies insouciantes de ses immondes habitants.

Et pourtant...Là-bas, vers cet Occident méprisé et tant bafoué, grondait du fond des sombres entrailles de cette planète complice, une force colossale qui finissait de fourbir ses armes, ses guerriers étaient enfin aussi prêt que l’on puisse l’être...

Tous, maintenant, en une nouvelle arithmétique qui s’affolait chaque jour un peu plus, ne comptaient plus les années, ni encore moins les mois, non, ils comptèrent les semaines, qui s’amenuisèrent à une vitesse stupéfiante ; puis vint le moment de ne plus compter que les jours, et alors, une intensité dévorante s’empara de ces Hommes et de ces Femmes qui semblaient s’étouffer d’impatience d’en découdre avec cette populace lèpreuse autant que haïe et méprisée...

Et enfin, ce jour tant espéré arriva au galop du fond de leurs désespérances oubliées, toutes les souffrances de leurs ancêtres formèrent une force presque palpable les unissant en un tout, un bloc homogène et inaltérable. Tous savaient, certitude remontant du fond de leurs âmes, que venant du fond des âges, des millions de leurs guerriers allaient les regarder sauver leur honneur depuis les balcons célestes illuminés du Walhalla.

Farouche et déterminé, chacun se jura d’être digne d’eux. Les fleuves de sang qu’ils leurs promirent laveront définitivement l’honneur des Humains nouveaux, ces guerriers et guerrières sacrés de cette race blanche immortelle et de ceux éternels de leurs frères morts au combats par delà les millénaires, car l’amour, l’honneur et le courage, seuls, défient le temps et l’espace.

Le destin des Zanko-Khuigs arrivait à son inéluctable échéance. Le grand balancier du destin arrivé en fin de sa course immuable, revenait maintenant en pleine vitesse vers la victime désignée par la Vie...

La grande Vie universelle et sacrée. Où ces glorieux survivants vont brutalement basculer en

un autre espace-temps...

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Confrontés à l’inconcevable

es huit chasseurs d’observation venant d’Akadi arrivèrent comme calculé sur le coup d’une heure du matin sur le continent d’Australie.

Nuit noire complète optimisant leur déjà quasi invisibilité classique. Ils se répartirent le long de la côte à égale distance les uns des autres et à une altitude de 9.000 mètres ; tous leurs système de détections opérationnels : détecteurs à infrarouges et ultraviolets, caméras à déclenchements automatiques et alarmes en batteries, pour enregistrer un quelconque mouvement important au sol.

Le lent survol en tous sens du territoire commença pour eux tous. Selon leur plan, chaque surface quadrillée du terrain fut alternativement survolée et contrôlée, rien ne leur échappait, et ainsi de suite et jusqu’à plus soif...

Les huit équipages s’installèrent et se préparèrent psychologiquement pour une longue, une fastidieuse traque silencieuse de l’ennemi. Ils arrivaient en ce lever du jour de ce lundi 4 avril 2400, devant attendre pour voir si les Zanko-Khuigs basés sur ce continent allaient vraiment comme prévu par leurs stratèges, évacuer les lieux pour aller festoyer avec leurs semblables, innommables pourritures condamnées et, le plus important, savoir quant aurait lieu ce départ, car passé le 26 courant au plus tard, leurs troupes d’assaut prévues pour attaquer ce continent devront quitter leurs bases pour se regrouper au grand large, encerclant l’ennemi en vue de l’attaque surprise prévue pour le 30 avril, trois heures avant le lever du jour.

Déjà une semaine d’observations serrées et rien de significatif ne changeait dans la routine de l’ennemi. L’ennui s’installait dans les esprits de ces équipages, chacun des deux équipiers dormait à tour de rôle...Vraie sinécure que cette mission, mais des plus importantes aussi, vitale même, tous en étaient parfaitement conscients...

Ils attaquèrent la deuxième semaine, à cran...car passée celle-ci ils allaient être bon pour une attaque en règle, tous préférant de beaucoup se concentrer sur l’Euromorte et leurs territoires d’Akadi. Et les jours passèrent avec une lenteur désespérante, vide de la moindre nouveauté.

Troisième semaine bientôt. Ils n’était plus à cran mais en rage. Le 18 avril passa, aussi morne que les autres ; le 19 ne fut guère mieux, seul leur ras-le-bol évoluait en ampleur. Le 20 avril se leva avec une aube aussi nulle que les précédentes, pourtant splendide, comme toujours, mais nulle pour eux tous, c’est ce que chacun décréta avec la plus évidente mauvaise foi...tous persuadés de la continuité de ce décompte des jours les menant vers une attaque en règle quasi inévitable maintenant...

Puis l’alarme sonna d’un bip retentissant dans sept chasseur, un message allait sortir dans les trentes secondes.

L

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Le huitième chasseur qui survolait en ce matin du 20 avril le centre du continent, vit un important regroupement d’engins Zanko-Khuigs. L’équipage de ce chasseur, le nº 127, piloté par Mary Houston et son psycho, Alison Gordon, compta au final trois gros engins ventrus assemblés sur le tarmac de la principale base souterraine de ces salauds, pas loin à l’ouest de l’ancienne ville d’Alice Springs, suivant leur carte. Les deux Akadis virent nettement sur leur écran retransmettant dans un zoom maxi, les centaines de ces ordures embarquer joyeusement dans ces appareils et, ils virent le dernier de ces monstres, un gros blond poussif et dégueulasse, fermer la porte d’entrée de la grotte et, chose stupéfiante, comme la ménagère sortant de chez elle pour aller faire son marché, suivant les vidéos témoignant des moeurs d’antan, le Zanko-Khuigs alla cacher la clé sous un bloc de rocher à quatre mètres environ sur la droite, en faisant bien observer son manège aux autres.

Puis il embarqua, riant, faisant des signes à ceux le regardant par les hublots. Les engins décollèrent puis partirent comme des flèches vers le Nord-Ouest en prenant lentement de l’altitude ; route les amenant comme prévu vers l’Euromorte.

Ce continent Australie était maintenant vide de leurs ennemis ! Les autres chasseurs reçurent alors le message comprimé et codé, qui une fois

rendu audible par le décodeur automatique, les avisa de la chose en ces termes : « De 127 - URGENT - Dégagez espace cadran N-W - Oiseaux au complet sur

pond d’envol, antre d’Alice Springs - 3 chars au cap 298º - Terrain reste vide - Contact général au Sud dans une heure, au top à 08:35...TOP ! VIVAT ! »

Savez-vous ce que veut dire allégresse ? C’est ce sentiment puissant et irrésistible qui s’empara d’un coup de tous ces Hommes et Femmes enfermés depuis des jours dans leurs caisses volantes...les yeux rivés sur leurs cadrans et écrans de contrôle et, un simple et banal bip les libéra d’un seul coup d’une oppressante et irritante tension générale.

Une heure après ils se retrouvèrent sur le géopoint préalablement convenu, à deux cents mètres d’altitude au-dessus du fond d’une vallée profondément encaissée, à l’intérieur de cette île vide de toute vie humaine, au large et au Sud-Est de ce continent, île anciennement appelée la Tasmanie. Les huit engins se posèrent sur un petit plateau rocheux dégagé presque horizontal, les seize membres d’équipages sortirent en courant pour s’embrasser de joie.

Tous félicitèrent l’équipage du 127 puis, le responsable de la mission, le pilote du chasseur 421, Patrick Mac-Clelland, son psycho étant Katy Atkins, chargea l’équipage du chasseur 628, le pilote Dunan Perry et son équipier, Charlotte Di Novi, de partir dare-dare vers les Appalaches en prenant la route Ouest pour prévenir les leurs au plus vite d’annuler l’attaque sur l’Australie ; pendant que par prudence, un deuxième chasseur ferait de même, en partant par l’Est ; il choisit pour cette autre mission stratégique le chasseur 79, piloté par Dawn Whipple et son collègue Matthew Matarazzo.

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-Dites-leur que les six autres chasseurs restons sur place par prudence jusqu’au 27 courant au soir, puis nous rentrerons bien à temps pour le grand festival sanguignolant ! Comptez sur nous. S’esclama-t-il.

Ils arrosèrent cet événement fantastique avec trois bouteilles de champagne embarquées en prévision de cet événement, puis chacun réintégra sa caisse.

Ils décollèrent ensemble puis partirent vers les trois cap différents ; les six chargés de continuer d’observer le territoire d’Australie remontèrent vers le Nord tandis que les deux messagers filaient comme des flèches vers leurs deux cadrans respectifs opposés, du levant et couchant.

Une phase importante de terminée venait s’encastrer parfaitement dans le plan prévu, première marche de gravie vers le succès final. Ces troupes libérées de cet objectif Grand Sud, changeront d’objectifs à la seconde, troquant leurs plans d’attaque pour ceux de leurs régions respectives.

Ils reprirent leurs postes de vigie, calmes et soulagés, enfin libérés de cet inconnu stressant. Le chef de mission, Patrick Mac-Clelland, se positionna sur le centre du continent, tous se maintenant à haute altitude, continuant d’observer le silence radio...car sait-on jamais ce que le destin peut réserver de surprise.

Surprise qui vint pour de bon le lendemain 21 avril, peu après l’aube, mais ne

correspondait pas du tout à ce qu’ils étaient légitimement en droit de s’attendre, et de beaucoup même, car ils se trouvèrent brutalement confrontés à l’inconcevable, événement qui leur glaça le sang.

Vue l’heure matinale, la moitié des équipages dormaient encore, récupérant de

leur quart de 4 heures d’affilées passées à la veille...et, malgré leur sommeil profond, tous firent un bond dans leurs hamacs, quand ils furent réveillés par l’alarme générale et stridente qui aurait réveillé un mort.

Leurs écrans montraient deux gigantesques objets volants se maintenant à trois

mille cinq cents mètres d’altitude et venant rapidement vers eux. Ils arrivaient du pôle Sud, où nulle vie ni infrastructure n’y est recensée... Sur ordre du commandant de la mission, les six chasseurs décrochèrent pour

aller se regrouper rapidement au Nord du continent et à neuf mille mètres d’altitude, espacés sur une longue ligne frontale, faisant face à ce danger éventuel et inconnu.

Ils attendirent la suite des événements...suite qui allait forcément dépendre des intentions de ces nouveaux arrivants sur la scène de leur reconquête ; car que pouvait-ils faire contre ces engins aussi énormes, leurs chasseurs paraissant des moutiques en face d’un mammouth.

Ces deux mastodontes, et le mot est faible pour les décrire, car en réalité

chacun d’eux semble plutôt comparable à un monde en miniature. Presque sphériques, quoique nettement aplatis aux pôles, de couleur de métal sombre et d’un diamètre évalué, vue la distance, à environ deux milles nautiques,

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dimensions stupéfiantes comparé aux insectes, microbes que sont leurs chasseurs.

Ils sont bardés de hublots, immenses baies vitrées et protubérances étranges et mystérieuses. Une sorte d’un large anneau très proéminent et de section triangulaire ceinture chaque engin à l’équateur.

Ils sont certainement redoutables et invincibles pour les microbes qu’ils sont et, devant la stupéfaction générales de ces six équipages de terriens suffoqués d’un tel spectacle.

Ce fut de nouveau le pilote Mary Houston qui réagit la première et émit l’idée que tous roulaient dans leurs têtes aux pouvoirs de raisonnements proprement disjonctés.

Elle cassa leur foutu silence radio qui à l’évidence n’avait plus aucune raison d’être, et cria dans son micro, d’une voix tendue frisant l’hystérie.

-Ce sont les mecs qui la nuit ont contacté Lary Whyspianskir et James

Whistler, et qui ont donné le couteau molléculaire à ce dernier, vous pariez, les gars ?

Les deux engins monstrueux avaient maintenant stoppé leur progression et se

tenaient devant eux, à quelques quatre mille mètres environ. Enormes, ils bouchaient quasiment tout le ciel.

Et alors...et alors, brisant cette incertitude oppressante et à leur consternation

générale et à leur grand soulagement aussi, ils entendirent chacun dans leur foutue caboche, pas moins, la réponse claire et puissante émise par une voix mâle, voix aux inflexions calmes et appaisantes...voix avec un léger accent indéfinissable...venue de on ne sait où.

-Bravo, Mary Houston, belle déduction et perspicacité bien

féminine, oui, effectivement, nous sommes bien les mecs qui...

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