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LA DÉLINQUANCE ENREGISTRÉE DES JEUNES ADULTES À BRUXELLES : LE POIDS DU CONTEXTE SOCIOÉCONOMIQUE Charlotte VANNESTE, Isabelle RAVIER et Valentine MAHIEU AVRIL 2017 | #11 | L’analyse des indicateurs statistiques relatifs à la délinquance en- registrée des jeunes bruxellois de 18 à 25 ans indique une relation particulièrement significative entre les taux de signalements ventilés selon la commune de résidence des jeunes concernés et les indica- teurs caractérisant le contexte socio-économique de chacune des 19 communes de la Région de Bruxelles-Capitale. Tout se passe comme si dans chaque commune, les taux de jeunes adultes signalés à la justice étaient directement proportionnels aux taux de chômage, aux revenus moyens ou aux proportions de bénéficiaires du revenu d’intégration sociale observables dans cette commune. Cet article rend compte des principales étapes de la construction et de l’analyse de ces données inédites, et propose d’éclairer ces résultats au regard d’acquis scientifiques ancrés dans deux traditions de recherche en criminologie bien distinctes. www.jsjv.be

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LA DÉLINQUANCE ENREGISTRÉE DES JEUNES ADULTES À BRUXELLES : LE POIDS DU CONTEXTE SOCIOÉCONOMIQUE Charlotte VANNESTE, Isabelle RAVIER et Valentine MAHIEU

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L’analyse des indicateurs statistiques relatifs à la délinquance en-registrée des jeunes bruxellois de 18 à 25 ans indique une relation particulièrement significative entre les taux de signalements ventilés selon la commune de résidence des jeunes concernés et les indica-teurs caractérisant le contexte socio-économique de chacune des 19 communes de la Région de Bruxelles-Capitale. Tout se passe comme si dans chaque commune, les taux de jeunes adultes signalés à la justice étaient directement proportionnels aux taux de chômage, aux revenus moyens ou aux proportions de bénéficiaires du revenu d’intégration sociale observables dans cette commune. Cet article rend compte des principales étapes de la construction et de l’analyse de ces données inédites, et propose d’éclairer ces résultats au regard d’acquis scientifiques ancrés dans deux traditions de recherche en criminologie bien distinctes.

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Charlotte VANNESTE est docteur en criminologie, maître de recherches à l’Institut National de Criminalistique et de Criminologie (INCC) et chargée de cours en criminologie à l’Université de Liège (ULg)

Isabelle RAVIER est sociologue et docteur en criminologie, chercheure à l’INCC et professeur en Criminologie à l’Université Catholique de Louvain (UCL).

Valentine MAHIEU est criminologue, chercheuse à l’INCC, assistante chargée d’exercices et doctorante à l’Ecole des sciences criminologiques de l’Université Libre de Bruxelles (ULB).

Justice et sécurité/Justitie en veiligheid, [email protected], www.jsjv.be, ISSN : 2406-6931AVRIL 2017 | #11 | Justice et sécurité

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INTRODUCTIONLe titre de cet article précise d’emblée qu’il y sera question de délin-quance « enregistrée » et non de « la délinquance » dans son ensemble. Si nous le soulignons c’est que le qualificatif est loin de constituer une nuance anodine. Les acquis de la criminologie le confirment depuis des décennies mais le message doit pourtant être rappelé de façon récurrente tant la confusion est encore véhiculée dans les médias, dans l’opinion publique, voire dans certains discours plus éclairés.

La mesure de la délinquance réellement commise est affaire impos-sible : les statistiques institutionnelles (policières ou judiciaires) ne peuvent mesurer que les faits et personnes qui font l’objet d’un si-gnalement à – ou par – la police, et sont donc le reflet tout autant des facteurs qui influencent ce processus dit de « renvoi » vers la justice que des faits qui sont initialement commis. D’autres types d’indicateurs existent certes. Nous pensons aux enquêtes de délinquance autoré-vélée1 ou encore aux enquêtes de victimation2, toutes deux cependant également entachées de biais qui leur sont propres3. Chaque comptage en la matière ne peut donc être que partiel : il rend compte du point de vue d’un seul type d’acteurs : les institutions, l’auteur ou la victime (Ro-bert & Zauberman, 2011, 54). Une approche qui a la prétention d’être complète devrait pouvoir mettre en perspective plusieurs sources, reflétant les différents points de vue, et tirer les enseignements de cette confrontation. Même dans un tel cas, on ne pourrait considérer avoir une vision complète de la délinquance.

En ce qui concerne la délinquance des jeunes adultes en Région de Bruxelles-Capitale, un seul type de source est actuellement exploitable, à savoir les statistiques institutionnelles. Celles-ci ne peuvent donc me-surer que la délinquance « enregistrée » par l’institution judiciaire, à la suite d’une plainte, d’une dénonciation ou d’une action policière proac-tive. Qu’il y ait plainte ou dénonciation, ou non, lorsqu’une infraction est commise, son renvoi vers la justice dépend de toute une série de fac-teurs : la visibilité et la nature du fait, la relative transparence ou opacité

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1 Encore appelées enquêtes de délinquance autoreportée ou autorapportée, elles peuvent être définies comme des formes de sondage auprès d’une population à laquelle on demande de révéler si durant une période donnée, elle a commis ou non certains actes délictueux (Aebi & Jaquier, 2008).2 Les enquêtes de victimation sont réalisées auprès d’une population générale et visent à demander aux enquêtés de déclarer s’ils ont été – eux ou leur ménage – victimes d’un ensemble d’infractions définies au cours d’une période de référence donnée.3 Les enquêtes de délinquance autorévélée ne peuvent rendre compte que du point de vue de ceux qui se reconnaissent auteurs d’infractions, ce qui suppose des biais importants. Les enquêtes de victimisation quant à elles ne peuvent concerner que des infractions impliquant une victime identi-fiable, elles ne sont par nature pas adéquates lorsque l’on souhaite évaluer une population d’auteurs circonscrite par une caractéristique – l’âge en l’occurrence – que la victime n’est pas à même de pouvoir (précisément) apprécier.

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de l’espace géographique ou social dans lequel il se déroule, la capacité de la victime à se plaindre, le souhait de la victime d’en éviter les pos-sibles effets ou l’importance qu’elle y accorde, les éventuelles régulations informelles, la confiance en la justice, la réceptivité de la police, ou en-core l’appartenance de l’auteur à un groupe perçu comme socialement menaçant, etc. L’action proactive de la police est quant à elle déterminée par des priorités et des moyens de même que, au quotidien, par les représentations qui sont véhiculées à propos de la délinquance et du délinquant. Dans ce système de représentations, il est clair que certains individus ou groupes présentent une vulnérabilité particulière parce qu’en raison d’un ensemble idéologique complexe ils incarnent à un moment donné le sentiment d’une menace. Les chiffres produits par les statis-tiques institutionnelles ne peuvent donc être considérés comme une mesure de la criminalité en tant que telle, mais bien comme une mesure hybride renvoyant tout autant au traitement social et institutionnel sélectif qui leur est appliqué qu’aux faits initiaux qui l’ont enclenché, sans que l’on puisse faire la part des choses entre les deux composantes.

Les données analysées dans cet article ont été rassemblées dans le cadre de la recherche réalisée à la demande de l’Observatoire Bruxellois pour la Prévention et la Sécurité dont la requête initiale était de dresser un état des lieux de la délinquance juvénile en Région de Bruxelles-Ca-pitale (RBC) (Mahieu, Ravier & Vanneste, 2015, 2016). Nous ne traiterons dans cet article que des données relatives aux jeunes adultes âgés de 18 à 25 ans accomplis, à l’exclusion donc de celles portant sur les mineurs d’âge relevant du tribunal de la jeunesse. Si la demande ainsi circons-crite peut paraître simple au premier abord, l’examen des données statistiques disponibles amène à modérer très rapidement ce constat. Est à souligner tout d’abord le fait que ni la police ni les parquets correc-tionnels (en charge d’affaires présumées commises par des personnes majeures) ne publient à ce jour de données statistiques en fonction des personnes signalées, et a fortiori en fonction de leur catégorie d’âge. La recherche impliquait dès lors un accès aux bases de données brutes. Cet accès, obtenu en ce qui concerne les parquets4, nous a permis grâce à la collaboration active des analystes statistiques du Collège des procureurs généraux d’analyser des extractions anonymisées issues de la base de données des parquets correctionnels. L’examen de ces données a néan-moins mis en évidence des limites considérables, découlant de l’enregis-trement non systématique d’informations importantes dont en particulier celles relatives à la commune de domicile des personnes, l’un des deux critères servant de base pour délimiter la population concernée (l’autre étant l’âge). Les enregistrements comportent en effet une part significa-tive de données manquantes, ceci en proportion variable en fonction de la base de données concernée.4

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Ainsi, en ce qui concerne les jeunes adultes enregistrés dans la base de données des parquets correctionnels, le défaut d’enregistrement de la commune de domicile est plus important dans l’arrondissement de Bruxelles (en ce compris Hal-Vilvorde) que pour l’ensemble des arrondissements belges5. Les indicateurs calculés pour la RBC seront donc de ce fait sous-estimés et ceci dans une proportion significative qu’il nous est impossible d’évaluer distinctement pour la seule RBC. Il ressort de ce constat que les taux calculés, potentiellement indicatifs d’une proportion de jeunes majeurs signalés par rapport à la popula-tion bruxelloise de référence, ne peuvent être dans ces conditions que sous-évalués. Le calcul de ces taux reste néanmoins d’un grand intérêt pour réaliser des comparaisons entre les différentes communes bruxel-loises. Il n’y a en effet aucune raison de penser que le défaut d’enregis-trement de l’information relative à la commune de domicile – résultant de la charge administrative des parquets respectifs – affecte davantage les jeunes d’une commune plutôt que ceux d’une autre et les compa-raisons entre communes établies sur la base de cet échantillon seront dès lors tout à fait valides.

DE FORTES DIFFÉRENCES ENTRE LES COMMUNES AU NIVEAU DE LA DÉLINQUANCE ENREGISTRÉEUne mise en perspective de la délinquance enregistrée en fonction de la commune de résidence de l’auteur présumé peut être réalisée en rapportant le nombre de jeunes adultes signalés au parquet à la population de référence de la commune concernée, à savoir la popu-lation de 18 à 25 ans accomplis. Les extractions obtenues auprès des parquets correctionnels ont permis de calculer le nombre de jeunes majeurs signalés annuellement sur une période de cinq années à savoir de 2008 à 2012. Sur cette base nous avons, pour cet article, retenu deux types d’indicateurs à savoir :

(1) le taux de jeunes signalés au moins une fois durant l’ensemble de la période de cinq années, en fonction de leur commune de résidence6. Dans ce cas, chaque jeune n’est comptabilisé qu’une seule fois même s’il est signalé à plusieurs reprises durant cette période.

(2) le taux moyen annuel de jeunes signalés, en fonction de leur com-mune de résidence. Un même jeune signalé à plusieurs reprises au parquet durant la même année n’est dans ce cas comptabilisé qu’une seule fois, mais sera pris en compte plusieurs fois s’il est signalé au cours de deux ou plusieurs années distinctes.

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5 Evalué à 11,7 % pour la Belgique et 15,8% pour l’arrondissement de Bruxelles.6 C’est la commune de résidence apparaissant chronologiquement la première qui est dans ce cas considérée.

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Le tableau 1 reproduit ces deux d’indicateurs, exprimés en pourcen-tages, ainsi que les données qui en ont permis le calcul.

Tableau 1. Nombres et taux (%) de jeunes bruxellois (18-25 ans) signa-lés à la justice en fonction de leur commune de domicile (2008-2012)

Le calcul de ces taux impose deux observations. Rapporter les chiffres bruts obtenus à la population de référence ne permet en rien, tout d’abord, de conclure purement et simplement que X jeunes majeurs sur 100 sont signalés annuellement à la justice dans telle ou telle commune, ceci en raison de la part significative de défaut d’enregistrement de la commune de domicile. Mais l’utilité de ce taux est bien de pouvoir mettre les communes en perspective d’une façon pertinente. Il y a lieu de souligner, ensuite, que dans ce calcul les jeunes sans domicile offi-

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(%)

Molenbeek-St-Jean 9744 3443 35,3 1043,0 10,7

Saint-Josse-Ten-Noode 3368 1184 35,2 352,2 10,5

Anderlecht 11038 3804 34,5 1103,8 10,0

Bruxelles 17111 5678 33,2 1691,2 9,9

Koekelberg 1905 593 31,1 169,6 8,9

Schaerbeek 13590 4051 29,8 1161,2 8,5

Saint-Gilles 5093 1464 28,7 420,2 8,3

Berchem-Ste-Agathe 2082 570 27,4 158,6 7,6

Evere 3461 916 26,5 268,4 7,8

Forest 4986 1317 26,4 388,6 7,8

Jette 4636 1162 25,1 339,8 7,3

Ganshoren 2004 491 24,5 144,0 7,2

Ixelles 9608 1968 20,5 569,8 5,9

Etterbeek 5053 993 19,7 293,6 5,8

Auderghem 2949 557 18,9 165,4 5,6

Uccle 7598 1412 18,6 397,4 5,2

Watermael-Boitsfort 2288 422 18,4 126,2 5,5

Woluwe-St-Lambert 5282 724 13,7 200,8 3,8

Woluwe-St-Pierre 3829 479 12,5 120,4 3,1

RBC 115623 0 27,0 9114,2 7,9

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ciel ou ceux ayant un domicile à l’étranger ne sont d’office pas considé-rés, le critère de définition de l’extraction étant la domiciliation en RBC. Les jeunes en séjour irrégulier n’ont donc pas non plus pu être pris en compte.

Quel que soit l’indicateur considéré, un constat s’impose d’emblée : de fortes différences apparaissent en fonction de la commune de rési-dence, allant jusqu’à des taux – plus de – trois fois supérieurs dans les communes présentant les taux les plus élevés par rapport à celles présentant les taux les plus faibles.

Le contact avec la justice marque donc de façon claire plus fortement les jeunes de certaines communes plutôt que d’autres. Dans le haut de ce classement se situent Molenbeek et St-Josse, talonnées par An-derlecht, Bruxelles-Ville et Koekelberg. A l’opposé, les communes de Woluwe-St-Pierre et Woluwe-St-Lambert affichent les taux les moins élevés suivies par Uccle, Watermael-Boistfort et Auderghem.

L’INFLUENCE DÉTERMINANTE DU CONTEXTE SOCIO-ÉCONOMIQUE : LES CONSTATS STATISTIQUESAu vu de ces constats, la connaissance de la situation bruxelloise sug-gère d’emblée l’hypothèse d’une relation entre taux de signalement et contexte socio-économique. Pour en vérifier la pertinence, trois types d’indicateurs ont été retenus qui permettent de caractériser le contexte socio-économique de chacune des communes, à savoir : le taux de chômage en distinguant le taux global et celui des jeunes de moins de 25 ans, le revenu moyen par habitant, et la part de bénéficiaires du revenu d’insertion sociale (RIS)7.

La relation entre d’une part les taux de jeunes majeurs signalés et d’autre part ces différents indicateurs socio-économiques a ensuite été examinée, faisant ressortir à chaque fois des corrélations hautement significatives, dont les coefficients indiquent une force particulièrement importante (tableau 2). Tout semble donc se passer comme si, dans chaque commune, les taux de jeunes adultes signalés étaient directe-ment proportionnels aux taux de chômage, revenus moyens ou pro-portions de bénéficiaires du RIS, observables dans la commune. Les coefficients de corrélation évaluent en effet à plus de 80% (= R2) la part de variabilité dans les taux de signalement qui peut être expliquée par les variations dans les taux de chômage globaux des différentes com-munes. En ce qui concerne le taux de chômage, la relation est significa-tive tant lorsque l’on retient le taux de chômage global, que lorsque l’on opte pour celui des jeunes de moins de 25 ans.

AVRIL 2017 | #11 | Justice et sécurité7 Ces données, tout comme celles relatives à la population, sont rassemblées et mises à disposition par l’Institut Bruxellois de Statistique et d’Analyse (IBSA).

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Tableau 2. Coefficients de corrélation entre taux de signalement de jeunes majeurs et indicateurs socio-économiques

Le graphique 1 permet de visualiser la relation entre taux moyen annuel et taux de chômage des jeunes, et de situer les positions respectives de chacune des communes. Il y apparaît ainsi clairement que, plus le taux de chômage des jeunes est élevé dans une commune, plus le taux de signalement de jeunes adultes à la justice y est élevé également. Le même rapport est observable avec les indicateurs de revenu moyen et de part de bénéficiaires du RIS qui varient dans des proportions très comparables.

Graphique 1. Taux moyen annuel (2008-2012) de jeunes de 18 à 25 ans signalés au parquet et taux de chômage (des jeunes 18 à 25 ans) selon la commune de résidence (RBC)

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Variables dépendantes Tx jeunes signalés 2008-12 Tx moyen annuel jeunes signalés

Variables indépendantes R R2 p-level R R2 p-level

Tx chomage global 0,912 0,821 0,000 0,916 0,839 0,000

Tx chômage jeunes 0,897 0,805 0,000 0,904 0,817 0,000

Revenu moyen -0,866 0,751 0,000 -0,868 0,754 0,000

RIS 0,774 0,6 0,000 0,792 0,627 0,000

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8-20

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Taux de chômage des jeunes de 18 à 25 ans (2008-2012)

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Le taux de délinquance enregistrée, tel que considéré supra, est évidem-ment une mesure très grossière, qui ne tient pas compte du fait que les auteurs présumés peuvent avoir été signalés pour des faits de nature et de gravité très diverses, dont les taux d’élucidation sont également variables, et avoir été ou non régulièrement en contact avec la justice. Il est dès lors pertinent de vérifier si la relation observée globalement peut être confirmée lorsque ces diverses composantes sont considérées. Compte-tenu des limites propres aux enregistrements statistiques, sou-mis aux contraintes des définitions codifiées, quelques paramètres ont dès lors été introduits dans l’analyse permettant de rendre compte sous divers angles de la « gravité » de la délinquance signalée en fonction des communes de résidence. Ces paramètres ont trait d’une part au nombre de signalements par jeunes – en d’autres termes, la récidive – d’autre part au type de fait pour lesquels ceux-ci sont signalés.

Par commune, nous avons ainsi calculé : (a) la part et le taux de jeunes signalés une seule fois au cours des cinq années et la part de ceux signalés dix fois et plus, (b) la part et le taux, de jeunes signalés respec-tivement au moins une fois pour un fait qualifié de vol avec violences ou menaces, pour coups et blessures volontaires, pour homicide ou ten-tative d’homicide, pour participation à une organisation criminelle, pour vol avec effraction, ou pour un fait relatif aux stupéfiants.

Une première démarche a permis de vérifier que la corrélation significa-tive entre le taux de chômage des jeunes et les taux de jeunes signalés est confirmée pour chaque groupe de jeunes tel que défini ci-des-sus par le type de prévention qui a justifié son renvoi vers le parquet. Comme l’indique le tableau 3, quel que soit le type d’infraction consi-déré, l’association entre le taux de délinquance enregistrée et le taux de chômage des jeunes est toujours hautement significatif. La relation la plus faible, mais néanmoins importante (R2 = 0.30), est observée lorsque seuls sont considérés les jeunes signalés au moins une fois pour des faits de stupéfiants. La prise en compte de la récidive ne porte pas non plus atteinte à l’association constatée : la relation est en effet tout aussi significative lorsque les jeunes signalés seulement une fois pendant la période de cinq ans sont considérés, ou lorsque seuls sont pris en compte ceux qui ont été signalés dix fois ou davantage durant la période de cinq ans.

Autrement dit quelle que soit la gravité de la délinquance – en termes de type de faits ou de récidive – le taux de signalement de jeunes (18-25 ans) au parquet pour des faits délinquants est toujours, par commune, significativement associé au taux de chômage des jeunes observable dans cette commune. Plus le taux de chômage y est élevé, plus les taux de signalements y seront élevés, quel que soit le type d’infraction consi-déré ou le degré de récidive.

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Tableau 3. Corrélations avec le taux de chômage des jeunes en fonction du nombre et du type de faits

COMMENT COMPRENDRE L’ASSOCIATION ENTRE DÉLINQUANCE ENREGISTRÉE ET CONTEXTE SOCIO-ÉCONOMIQUE ? Comme dans toute analyse statistique de corrélation, rien ne permet de glisser purement et simplement d’un constat d’association significative à un rapport de causalité. L’intérêt qu’il y a à établir un pur rapport de causalité est d’ailleurs mis en question par une large frange de scienti-fiques qui lui préfèrent une perspective systémique mettant en évidence des relations d’interdépendance et d’interactions réciproques. Et dans cette perspective, ce qui importe c’est que l’association significative vienne prendre sens dans un ensemble fonctionnant comme un sys-tème fait d’interactions dynamiques cohérentes (Loriaux, 1994).

COMMENT INTERPRÉTER CES RÉSULTATS ?

Pour éclairer ces résultats, on est en mesure de renvoyer à (1) des acquis de recherche, déjà très consistants, qui mettent en avant la relation étroite entre indicateurs (de tensions) socio-économiques et indicateurs de criminalité enregistrée. Une tradition de recherche tout aussi importante (2) met par ailleurs en évidence le rapport étroit entre indicateurs socio-économiques et indicateurs de pénalité (en particu-lier l’emprisonnement).

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VARIABLE INDÉPENDANTE Tx chômage jeune

Variables dépendantes R R2 p-level

Taux de jeunes signalés au moins une fois pour

vol avec violences ou menaces 0,9 0,81 0,000

coups et blessures volontaires 0,82 0,69 0,000

homicide ou tentative 0,84 0,7 0,000

association de malfaiteurs 0,85 0,72 0,000

vol avec effraction, escalade ou fausses clés 0,89 0,79 0,000

stupéfiants 0,59 0,30 0,008

Jamais signalés pour vol avec violences, coups ou stupéfiants 0,89 0,80 0,000

Taux de jeunes signalés

une seule fois en 5 ans 0,86 0,72 0,000

10 fois ou plus en 5 ans 0,82 0,68 0,660

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Etant donné la nature hybride des indicateurs de délinquance enregis-trée, qui renvoient tout autant à la commission des faits qu’à leur renvoi sélectif vers le système judiciaire, le raisonnement ne peut certainement pas être unidimensionnel. Tant la relation entre chômage (ou situation économique) et délinquance commise que celle entre chômage (ou si-tuation économique) et renvoi vers le système pénal doit être envisagée pour comprendre les associations observées.

(1) SITUATION ÉCONOMIQUE ET PROPENSION À LA DÉLINQUANCEEn ce qui concerne le rapport établi entre délinquance commise et situation économique, la littérature en la matière reconnaît générale-ment un double rapport entre criminalité et conjoncture économique, dont les dimensions sont susceptibles de se neutraliser mutuellement (Lagrange, 2001). En effet, la première approche, que l’on peut résumer par l’adage « l’occasion fait le larron » met en avant le fait qu’en période de prospérité, davantage de biens consommables sont en circulation, augmentant d’autant les cibles et les occasions d’atteintes aux biens. Les adeptes de cette « théorie des occasions » mettent alors en avant l’existence d’un lien entre l’augmentation de la prospérité et celle de la criminalité contre les biens. La seconde approche, s’inspire quant à elle de la théorie de l’anomie proposée par Durkheim et affinée ensuite par Merton. Plutôt que de se focaliser sur les opportunités de délinquance, cette approche met l’accent sur les motivations à entrer dans une carrière délinquante. Elle part de l’hypothèse que les délinquants n’ont dans l’ensemble pas de buts dans l’existence vraiment différents de ceux que poursuivent les citoyens respectueux de la loi. Ces buts com-muns sont généralement l’argent et la reconnaissance. Mais ce qui les différencie, c’est l’accès aux moyens pour y parvenir. La motivation à la délinquance viendrait alors de l’écart existant entre les désirs, les biens disponibles, et les possibilités d’atteindre les buts socialement valorisés par des moyens légaux. Selon ce raisonnement, les motivations au délit augmenteraient donc en cas de situation économique défavorable, de chômage et d’inégalités sociales croissantes, entraînant de la sorte une augmentation globale de la criminalité. Inversement, une conjoncture économique favorable, serait de nature à réduire le potentiel de frustra-tion naissant de l’écart entre les aspirations matérielles et les possibi-lités légales d’y répondre. Ces deux approches, mettent ainsi en avant deux composantes distinctes du rapport entre situation économique et criminalité qui se contrecarrent mutuellement au niveau de leurs effets globaux. Une conjoncture économique défavorable diminuerait, selon la première approche les opportunités délinquantes, mais accroitrait, selon la seconde, les motivations à la délinquance.

Comme Hugues Lagrange l’explique dans son analyse des rapports entre l’évolution temporelle de la criminalité et celle du contexte so-cio-économique en France, le phénomène permet de comprendre

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pourquoi, jusque dans les années 1970, aucun lien statistique n’a pu être établi entre les taux de criminalité et les taux de chômage. Ce n’est plus le cas toutefois dans les études postérieures à 1970 qui mettent alors en évidence l’existence d’une telle corrélation. Le constat sug-gère ainsi que depuis la récession enclenchée dans les années 1970, la délinquance d’exclusion, « second ressort de la délinquance », prend nettement le pas sur la délinquance d’opportunité qui s’était déve-loppée en période de prospérité. L’auteur pointe là « un formidable pouvoir de frustration » se conjuguant de plus avec une explosion des consommations ostentatoires. Il décrit ainsi la dialectique de frustration sous-jacente conduisant à une quête de reconnaissance par des voies illégales: « quand les difficultés se concentrent toujours sur les mêmes, ceux qui cumulent des parents dévalués, des échecs scolaires, des frères sans travail, n’acceptent plus de jouer le jeu dans les règles » (Lagrange, 2001, 87-88). L’évolution de la délinquance juvénile doit dès lors fondamentalement être interprétée à la lumière de cette fracture so-ciale. Cette « rupture du pacte civil », conclut l’auteur, « dépend en effet étroitement de ce qui est perçu comme une rupture du pacte social à travers la concentration du chômage et des discriminations ».

Plus récemment, la démonstration d’une association significative entre les taux de criminalité enregistrée et des indicateurs socio-économiques, dont le chômage et un indicateur d’inégalité de revenus, a été réalisée dans un contexte qui nous intéresse directement, à savoir la Belgique, et dans le cadre d’une approche géographique similaire à la nôtre mais bien plus étendue puisque ce sont toutes les communes belges qui sont englobées dans la démarche. L’approche développée dans la recherche réalisée par Marc Hooghe et al. (2011) diffère toutefois de la nôtre en ce qu’elle se base sur des statistiques policières publiées, donc sur base de l’unité de compte « infraction » et sans aucune information relative à la personne de l’auteur. C’est donc le lieu de commission du fait qui est pris en compte pour analyser le rapport entre les indicateurs économiques et la délinquance enregistrée et non le domicile du suspect comme c’est le cas dans notre démarche. Sa recherche porte sur l’ensemble des statistiques policières publiées pour la période 2001 à 2006 et met en évidence, dans une analyse en fonction des communes, une relation significative positive entre taux de chômage et taux de criminalité, qu’il s’agisse de criminalité contre les biens ou de criminalité violente (analy-sées distinctement). Les auteurs concluent de leur vaste recherche que « With regard to public policy, the main conclusion could be that espe-cially unemployment is strongly related to crime rates » (2011, 15). Ils soulignent toutefois qu’ils ne sont en mesure de faire aucun constat sur les mécanismes liant criminalité et chômage (contrairement à ce qu’avait proposé Hugues Lagrange). Quoiqu’il en soit, les résultats obtenus par Hooghe et les nôtres se confortent mutuellement pour confirmer la rela-tion significative entre les deux types d’indicateurs.

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(2) SITUATION ÉCONOMIQUE ET PROPENSION AU RENVOI VERS LE SYSTÈME PÉNAL Ni la recherche de Hugues Lagrange, ni, plus encore celle de Hooghe ne prennent toutefois en considération – ou suffisamment en considé-ration – le fait que les indicateurs de criminalité enregistrée sont tout autant significatifs d’une réaction sociale sélective que de la propension initiale à commettre des délits. Ils n’intègrent pas, en d’autres termes, la dimension « constructiviste » – les statistiques de criminalité sont le produit d’une construction sociale – pourtant incontournable. Cette dimension est par contre totalement considérée, et est même centrale, dans la tradition de recherche qui s’est attachée d’une part à démontrer empiriquement la relation entre indicateurs socio-économiques et pé-nalité et d’autre part à développer des modèles conceptuels permettant de comprendre la nature de ce lien. Sans pouvoir entrer dans le détail des concepts mobilisés pour ce faire on peut résumer ainsi très som-mairement la teneur de ce lien (Vanneste, 2001, 2013).

Le concept d’insécurité est central : plus l’insécurité économique est importante – se traduisant par des indicateurs de chômage ou d’iné-galité sociale dans la période récente –, plus elle se répercute sur une insécurité focalisée sur le crime. Comme l’explicite le sociologue Dario Melossi : « L’image du crime subit un grossissement lorsque règne ce sentiment de malaise » (Melossi, 1994). Par ailleurs, plus il y a insécurité économique, plus également elle engendre un besoin de légitimation politique. Et tout concourt à ce que le pénal exerce cette fonction. Il en a en effet les attributs requis. Il est le lieu d’un des rituels symboliques le plus puissant dans toute société. Il se fonde et se (s’auto)légitime en distinguant magistralement et rituellement le bon du mauvais (Sumner, 1990)8. Ce processus permet ainsi en ciblant un phénomène pour lequel un coupable peut être désigné de détourner l’attention de l’impuissance à gérer les sources plus profondes du sentiment d’insécurité.

Ces deux facteurs – insécurité et besoin de légitimation - co-agissent alors en faveur d’une réaction sociale plus répressive. Et cette réaction sociale plus répressive s’exercera de façon privilégiée sur les franges de population les plus vulnérables et désavantagées qui personnifient le mieux le sentiment d’une menace et se prêtent le plus facilement à être désignées comme coupables. Le processus favorise ainsi la prise en charge par le pénal d’une population socialement précarisée et qui échappe à l’intégration sur le marché de l’emploi, au moment où, dans un contexte socio-économique plus défavorable, les politiques sociales se profilent de plus en plus en retrait.

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8 Comme l’exprime très justement Colin Sumner : “Power thus recharges its moral batteries. This ritual defeat of the Forces of Evil by the Forces of Good must stand as the criminal law’s most important ideo-logical function, in comforting and reassuring the population” (Summer, 90, 47).

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EN GUISE DE CONCLUSIONS… A partir d’un objectif de recherche initial posé en termes de « construc-tion d’indicateurs » de la délinquance enregistrée des jeunes de la RBC, c’est bien une réalité très plurielle qui est ressortie de l’analyse. Le renvoi de jeunes vers la justice suite à une infraction s’avère en effet très variable selon la commune de résidence du jeune impliqué. Ces divergences renvoient clairement aux particularités socio-économiques communales : ainsi, plus les taux de chômage sont élevés dans une commune, plus le renvoi de jeunes vers la justice y est important, et ce en proportion.

Les résultats obtenus dans notre recherche, en mettant en perspective les taux de délinquance enregistrée par commune et les indicateurs socio-économiques, confirment indéniablement l’existence d’une association hautement significative sans permettre de préciser si ce lien relève, ou dans quelle mesure il relève, plutôt (1) d’une propen-sion à une délinquance d’exclusion plus importante dans un contexte défavorisé ou plutôt (2) d’une sensibilité et proactivité plus grande de la part de la police vis-à-vis des comportements des populations des communes plus défavorisées, et d’une prise en charge informelle plus performante, sans recours au judiciaire, des problématiques délin-quantes dans les communes aux conditions socio-économiques plus favorables. Il est également vraisemblable que ces deux types de com-posantes interagissent de façon conjointe.

L’objet de cet article est de rendre compte de résultats chiffrés sans pouvoir analyser plus avant les implications de ces constats. Mais il est clair que ceux-ci incitent certainement à une réflexion plus fonda-mentale quant aux moyens qui sont mobilisés pour tenir compte de la composante socio-économique dans la mise en œuvre de la poli-tique criminelle et tout particulièrement dans ses interactions avec la politique sociale. En ce qui concerne la Région de Bruxelles- Capitale, les clivages sociaux, et particulièrement ceux qui touchent la jeunesse bruxelloise, sont régulièrement soulignés dans la littéra-ture scientifique (Rea & al, 2009 ; Sacco & al. 2016). Le baromètre social relatif à la situation des Bruxellois 2016 insiste sur la situation particulièrement précaire des jeunes adultes avec de fortes varia-tions selon les communes (Observatoire de la Santé et du Social de Bruxelles-Capitale, 2016). La nécessité d’une approche systémique est alors mise en évidence, qui tienne compte d’enjeux multiples concernant l’éducation, l’accès au marché du travail, la politique urbaine et la mixité sociale (Lenel, 2013) ou encore la discrimination dans ses diverses formes. Les pistes de réflexion pour une meilleure articulation entre politique criminelle et politique sociale sur le terrain bruxellois ne manquent donc certainement pas.

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