INSTITUT DE FORMATION EN MASSO-KINESITHERAPIE DE RENNES
Les modalités du renforcement musculaire.
Quelles applications aux membres supérieurs du patient
blessé médullaire de niveau thoracique bas ?
En vue de l’obtention du Diplôme d’Etat de Masseur-Kinésithérapeute
Kevin GISBERT
2011-2012
Ministère de la Santé et des Sports
Région Bretagne
Institut de Formation en Masso-Kinésithérapie de Rennes
Les modalités du renforcement musculaire.
Quelles applications aux membres supérieurs du patient
blessé médullaire de niveau thoracique bas ?
Sous la direction de KOSTUR Laurent
Travail personnel présenté par :
Kevin GISBERT
En vue de l’obtention du Diplôme d’Etat de Masseur-Kinésithérapeute
2011-2012
Résumé
Ce travail cherche à définir les objectifs que le kinésithérapeute doit rechercher lors de
l’athlétisation des membres supérieurs du patient paraplégique afin de lui offrir de bonnes
capacités de déplacement et de transferts, donc une bonne autonomie. Il cherche également à
déterminer les modalités des exercices qui doivent être proposés aux patients afin d’atteindre
ces objectifs.
Une revue de la littérature sur le renforcement musculaire permet de déterminer les
différents objectifs qui peuvent être atteints par celui-ci sur un muscle sain et les modalités
des exercices correspondant à chaque objectif. Une seconde revue de littérature sur les
activités de propulsion du fauteuil manuel et de transferts du patient paraplégique permet de
définir les muscles sollicités lors de ces activités. A partir de ces informations les objectifs et
les modalités de renforcement afin de faciliter ces activités peuvent être déterminés.
Ces objectifs d’endurance, d’explosivité et de force cherchent à être remplis au cours
d’un programme déterminé par la mise en lien des besoins et des moyens d’y parvenir. Ce
programme d’exercices de 12 semaines est présenté avec ses principes et précautions. Les
exercices sont décrits un à un et pour la plupart illustrés.
La discussion pose les limites de ce travail et les obstacles rencontrés.
Mots-clés :
Paraplégie, lésion médullaire, renforcement musculaire, membres supérieurs,
propulsion, transferts
Keywords :
Paraplegia, Spinal Cord Injury (SCI), strength training, upper limbs, propulsion,
transfers
Sommaire I. Introduction ..................................................................................................................................... 1
1. Expérience personnelle ................................................................................................................ 1
2. Intérêt du renforcement musculaire chez le patient paraplégique ............................................... 2
3. Problématique .............................................................................................................................. 3
II. Méthodologie de recherche ............................................................................................................. 3
III. Le renforcement musculaire sur muscle sain .............................................................................. 4
1. Le calcul de résistance maximale (RM) ...................................................................................... 4
2. Les différents types de fibres ....................................................................................................... 5
3. Les différents modes de contraction ............................................................................................ 6
a. Le travail isométrique .............................................................................................................. 6
b. Le travail concentrique ............................................................................................................ 6
c. Le travail excentrique .............................................................................................................. 7
d. Le travail pliométrique ............................................................................................................ 7
e. Synthèse .................................................................................................................................. 8
4. Les différents objectifs ................................................................................................................ 9
a. Le gain de force maximale ...................................................................................................... 9
b. Le gain de puissance .............................................................................................................. 10
c. Le gain de force explosive ..................................................................................................... 11
d. Le gain d’endurance .............................................................................................................. 11
e. Le gain de volume ................................................................................................................. 12
f. Synthèse ................................................................................................................................ 13
5. La fréquence des séances .......................................................................................................... 13
IV. Application aux membres supérieurs du patient paraplégique complet thoracique bas ............ 14
1. La pathologie ............................................................................................................................. 14
2. Analyse des activités quotidiennes du patient paraplégique en fauteuil roulant manuel .......... 14
a. La propulsion ......................................................................................................................... 14
b. Les transferts ......................................................................................................................... 17
c. Synthèse ................................................................................................................................ 21
3. Les muscles à renforcer ............................................................................................................. 22
4. Objectifs du programme de renforcement ................................................................................. 23
5. Programme de renforcement ..................................................................................................... 24
V. Discussion ..................................................................................................................................... 29
VI. Conclusion ................................................................................................................................. 30
Bibliographie ........................................................................................................................................... 1
Annexes ................................................................................................................................................... 4
1
I. Introduction
1. Expérience personnelle
Au fur et à mesure de mes stages, le renforcement musculaire a toujours été quelque
chose qui m’a beaucoup questionné. Au cours de différentes prises en charge, j’ai eu à utiliser
le renforcement musculaire et je me suis souvent demandé combien de répétitions et combien
de séries je devais faire effectuer à mes patients. En effet, j’observais les kinésithérapeutes qui
en faisaient faire à leurs patients et je constatais que chacun avait une pratique différente et
bien à lui de cette technique. Doit-on arriver à une fatigue musculaire importante pour être
efficace ? Tous les muscles doivent-ils être renforcés de la même manière ? Fort de toutes ces
constatations, j’ai alors décidé de réaliser mon mémoire sur le renforcement musculaire afin
d’étudier la littérature sur ce sujet et ainsi de développer mes connaissances.
Le renforcement musculaire est la technique active de base de la kinésithérapie. Celui-
ci peut être utilisé dans différents objectifs : curatif, préventif ou palliatif selon s’il s’agit de
traiter un déficit (suite à une immobilisation par exemple), d’éviter la perte musculaire (durant
l’immobilisation par exemple) ou de compenser la perte de muscles (comme l’athlétisation
supra-lésionnelle chez le patient paraplégique) (Gain & Coll., 2003b).
D’un point de vue physiologique, le muscle ne répond pas de la même façon selon la
stimulation. Ainsi lors d’un renforcement musculaire, le nombre de séries, de répétitions,
l’intensité de la résistance, la vitesse du mouvement, les temps de récupération, les modes de
contraction ou encore la course musculaire travaillée sont autant de paramètres que le
kinésithérapeute doit maitriser au mieux afin d’optimiser le renforcement musculaire et
atteindre les objectifs fixés (Bellaud & Coll, 2003 ; Marsal, 2007). Ainsi, le renforcement
musculaire optimisé est relativement complexe à réaliser pour le kinésithérapeute qui doit être
capable de maitriser tous ces paramètres (Gain, 2001).
Ainsi, sur le terrain, l’ensemble des paramètres précédemment cités ne sont pas
toujours maitrisés. Ceux tels que la course musculaire et le mode contractile le sont
généralement bien mais les autres ne le sont pas toujours. Par exemple, l’utilisation des
résistances manuelles très fréquente en kinésithérapie compte tenu de sa facilité d’utilisation
présente l’inconvénient majeur de ne pas permettre de chiffrer l’intensité de l’exercice. En
revanche, les résistances élastiques fréquemment utilisées également permettent de donner
une valeur chiffrée à la résistance appliquée au mouvement par l’intermédiaire de calculs
2
fonction du modèle et du pourcentage d’allongement de l’élastique (Annexe 1). Toutefois,
cette possibilité offerte par les bandes élastiques n’est pas toujours exploitée (par manque de
temps ou de diversité de bandes).
Lors d’un de mes stages, la rééducation d’un jeune patient paraplégique en phase
d’autonomisation a été la source d’une réflexion avec mes collègues stagiaires. Nous
souhaitions lui proposer un protocole de renforcement et d’athlétisation des membres
supérieurs mais nous nous sommes retrouvés face à nos difficultés et notre manque
d’expérience dans ce domaine. Sachant que le protocole proposé devait répondre à des
objectifs précis, nous ne savions pas quelles modalités les exercices de renforcement devaient
respecter.
2. Intérêt du renforcement musculaire chez le patient paraplégique
Les membres supérieurs du paraplégique qui se retrouve dans un fauteuil roulant
deviennent ses membres portants : son autonomie passe par ses membres supérieurs
(propulsion du fauteuil manuel et transferts principalement) (De Morand, 2008). Les échelles
d’indépendance telles que l’index de Barthel (Annexe 2), la mesure d’indépendance
fonctionnelle (MIF, Annexe 3) ou encore la Spinal Cord Independence Mesure (SCIM III,
Annexe 4) qui est spécifique au patient blessé médullaire prennent en compte la capacité à se
déplacer sur de longues distances ou à réaliser sans aides techniques les transferts. Ces
capacités reposent bien entendu sur un apprentissage technique de la gestuelle mais leur
réalisation nécessite également une musculature appropriée (Chivilo & Coll., 2002). La Haute
Autorité de la Santé (HAS), dans son guide Affections Longue Durée n°20 concernant la
paraplégie publié en juillet 2007, préconise d’ailleurs une athlétisation des membres
supérieurs du patient dans la partie rééducation du plan de prise en charge thérapeutique
proposé.
Une étude ayant testé les effets de la musculation des membres supérieurs chez des
sujets blessés médullaires et des sujets valides rapporte que les patients blessés médullaires
répondent au moins aussi bien au renforcement musculaire que les sujets valides (Turbanski
& Coll., 2010) cependant, peu de données dans la littérature concernent les modalités du
renforcement musculaire qui doit être appliqué au patients blessés médullaires.
Lors de ses activités quotidiennes, le patient blessé médullaire sollicite ses membres
supérieurs selon une fonction à laquelle ils ne sont pas habitués. Ils nécessitent davantage de
force et vont désormais fonctionner très souvent en chaîne cinétique fermée (CCF) ou semi-
3
fermée alors que la personne valide utilise ses membres supérieurs presque exclusivement en
chaîne cinétique ouverte (CCO). Cela explique le fait que les membres supérieurs du patient
paraplégique nécessitent une rééducation à type d’athlétisation via le renforcement
musculaire. Cependant, quel programme de renforcement doit être proposé aux patients
paraplégiques ? Quel est l’objectif recherché au cours de ce renforcement ?
3. Problématique
Ce travail cherchera à trouver des éléments de réponse à la problématique suivante :
Dans le but d’obtenir une athlétisation des membres supérieurs optimale pour son
autonomie, quelles sont les modalités d’application du renforcement musculaire aux
membres supérieurs du patient paraplégique complet de niveau thoracique bas lors de
la phase d’autonomisation ?
Une première partie présentera les données de la littérature concernant le renforcement
musculaire sur muscle sain d’une manière générale. En effet, les membres supérieurs du
patient paraplégique étant situés en zone supra-lésionnelle il s’agit de muscles sains. Puis une
seconde partie sera consacrée à son application sur les patients paraplégiques dans le but
d’athlétisation des membres supérieurs après une analyse guidée par la littérature des besoins
précis de ces patients.
II. Méthodologie de recherche
Les recherches ont été effectuées du 22 janvier 2012 au 07 mars 2012 sur les bases de
données suivantes : Kinedoc, PubMed, EM-Consulte, Google Scholar, ScienceDirect et le
moteur de recherche du Centre de Documentation de l’IFPEK.
Les mots clés employés ont été « paraplégie » (« paraplegia »), « blessé médullaire »
(« spinal cord injury »), « renforcement musculaire » (« strengh training »), « transferts »
(« transfers »), « propulsion », « wheelchair ».
Compte tenu du faible nombre de résultats intéressants pour le sujet de ce travail, tous les
articles ayant un lien ont été retenus qu’il s’agisse d’études, de retours d’expérience ou d’avis
d’experts.
4
III. Le renforcement musculaire sur muscle sain
Le renforcement musculaire peut répondre à différents objectifs. Selon l’objectif de
l’exercice, ses modalités diffèreront. Ainsi la musculation peut être appliquée dans un but de
gain de force, de puissance, d’explosivité, d’endurance ou de trophicité (volume). En fonction
de l’objectif du pratiquant et afin d’avoir une bonne efficacité, le nombre de répétitions, la
charge ou encore la vitesse du mouvement sont autant de paramètres qui sont à maîtriser
(Marsal, 2007). De plus, différents modes de contraction existent, il faut donc choisir le ou les
modes contractiles qui s’appliquent le mieux à la situation. Afin de faire le meilleur choix
possible pour le patient, des connaissances sur les effets de chacun de ces modes sont
nécessaires.
1. Le calcul de résistance maximale (RM)
La résistance maximale ou charge maximale d’un muscle est la charge maximale qu’il
est capable de mobiliser une fois et une seule sur l’amplitude totale du mouvement concerné.
Cette valeur permet ensuite d’évaluer la résistance à imposer au muscle en fonction de
l’objectif recherché. Avant de commencer le programme il faut donc mesurer la RM du
patient sur l’ensemble des exercices qui vont composer le programme. Le calcul de RM doit
être réalisé avec le matériel qui sera utilisé ensuite lors du programme de renforcement et
après une phase d’échauffement car on va alors demander à un muscle non-entraîné de
soulever une charge importante.
Il existe deux façons de déterminer la RM, une méthode directe et une indirecte. La
méthode directe consiste à trouver la charge correspondant à la RM en augmentant
progressivement la charge « à tâtons » jusqu’à trouver celle qui ne peut être mobilisée qu’une
seule fois et qui constitue donc la RM. La méthode indirecte consiste à soulever une charge
moins importante que la RM le maximum de fois possible, il existe ensuite une relation entre
le nombre de répétitions qu’a été capable de réaliser le patient et le % de RM que représente
la charge qui a été mobilisée. Selon Brzycki, cette relation serait RM = charge déplacée /
1.0278-(0.0278 x nombre de répétitions) (Bernard & Coll., 2008). Ainsi par exemple une
charge ayant été mobilisée à 10 répétitions représente 75% de la RM. Cependant lors du
calcul de RM plus la charge est importante et donc le nombre de répétitions réalisées est
faible et plus la valeur de la RM déterminée est fiable.
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2. Les différents types de fibres
Les muscles sont principalement composés de trois types de fibres. Les fibres de type I
encore appelées fibres rouges ou fibres lentes sont les fibres les plus endurantes, ce sont celles
qui développent le moins de force mais elles sont peu fatigables. Elles fonctionnent sur un
mode oxydatif, c’est-à-dire aérobie : elles utilisent l’oxygène pour fabriquer leur énergie
(ATP) et nécessitent donc un muscle bien capillarisé.
Les fibres de type II également appelées fibres blanches ou fibres rapides. Il en existe
2 types différents : les fibres IIa et IIb. Ces deux types de fibres fonctionnent principalement
sur un mode anaérobie. Les fibres IIb sont celles qui développent le plus de force mais sont
les plus fatigables. Les fibres IIa sont intermédiaires par rapport aux types I et IIb : elles sont
relativement fatigables et développent une force modérée.
Lors d’une contraction musculaire, les différents types de fibres ne sont pas recrutés
simultanément dès le début de l’exercice. Leur recrutement se fait selon l’intensité de la
résistance avec un recrutement principal des fibres I pour une intensité faible (jusqu’à 50% de
la RM) auxquelles vont se rajouter les fibres IIa (à partir de 50% de la RM) puis les fibres IIb
(au-delà de 80% de la RM). Cet ordre de recrutement est cependant modifié lors d’une
contraction intense explosive avec un recrutement prioritaire des fibres IIb (Gain & Coll.,
2003a). Cette chronologie de recrutement est illustrée sur le schéma suivant (figure 1).
Figure 1 : Recrutement des différents types de fibres en fonction de la charge imposée.
(D’après Costill, 1980)
6
3. Les différents modes de contraction
a. Le travail isométrique
La contraction isométrique est une contraction statique ce qui implique que le
développement de la force s’effectue principalement dans la position angulaire de travail. Par
conséquent cette position doit être judicieusement choisie en lien avec l’utilisation
fonctionnelle du muscle, ou le renforcement isométrique devra être effectué successivement à
différentes positions (Gain, 2001 ; Bellaud & Coll., 2003 ; Gain & Coll., 2003a et 2003b).
Ce mode de contraction est favorable au développement du volume musculaire (Gain,
2001 ; Bellaud & Coll., 2003 ; Gain & Coll., 2003a ; Vanbiervliet, 2008) et il permet de
développer une force supérieure de 10% à la force maximale concentrique (Gain & Coll.,
2003a).
Ses principaux inconvénients sont qu’il diminue la capillarisation intramusculaire, est
peu favorable à la vitesse de contraction (Gain, 2001 ; Bellaud & Coll., 2003 ; Gain & Coll.,
2003a) et ne permet pas le développement de la coordination intra et intermusculaire (Gain,
2001).
Finalement ce type de contraction semble peu fonctionnel et un entraînement
musculaire en mode isométrique est répétitif et monotone pour le sujet (Bellaud & Coll.,
2003). Son utilisation doit être modérée et couplée à d’autres modes de travail (Gain, 2001).
b. Le travail concentrique
La contraction concentrique est un mode de travail dynamique du muscle dans lequel
sa longueur se réduit et ses points d’insertion se rapprochent.
Il s’agit du régime de contraction qui développe le moins la force mais il présente
l’intérêt de nécessiter un temps de récupération plus court. Il sollicite un grand nombre
d’unités motrices ce qui le rend efficace à l’échauffement, mais cela implique également une
grande consommation d’énergie (Gain, 2001 ; Gain & Coll., 2003a).
Il semble peu judicieux de l’utiliser seul car finalement dans les activités quotidiennes
il ne s’agit généralement pas du mode contractile dans lequel sont sollicités les muscles (Gain
& Coll., 2003b).
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c. Le travail excentrique
Lors de la contraction excentrique, le muscle s’allonge et ses points d’insertion
s’éloignent (Bellaud & Coll., 2003). Cette contraction part donc d’une course plutôt interne
vers une course plutôt externe et l’action réalisée est alors une action de freinage d’une
charge, comme par exemple la contraction quadricipitale excentrique lorsqu’un sujet
s’accroupi pour retenir la charge qui est le poids de son corps.
Ce mode de contraction est celui qui développe le plus de force (30 à 50% de plus que
la force maximale isométrique selon Gain). Il est peu consommateur en énergie métabolique
et nerveuse est très efficace dans l’objectif de gain de force tout en n’entraînant que peu
d’augmentation du volume musculaire (Gain & Coll., 2003a). Toujours selon Gain, le
renforcement musculaire en mode excentrique améliore la force également dans le mode
concentrique à moyen et long terme (après restructuration des stries Z lésées par
l’entraînement excentrique) et permet de renforcer les structures passives ce qui n’est pas
négligeable pour la prévention d’apparition de tendinopathies.
Cependant, le mode excentrique doit être utilisé avec précaution car le risque de
lésions musculaires est présent, notamment à vitesse rapide, alors que le travail à vitesse
ralentie ne présente qu’un intérêt limité car peu fréquent dans les activités courantes (Bernard
& Coll., 2008).
d. Le travail pliométrique
Il s’agit d’une contraction excentrique suivie immédiatement d’une contraction
concentrique.
Ce mode de contraction est retrouvé dans les activités quotidiennes majoritairement
sur les membres inférieurs : course, sauts ce qui rend cet entraînement proche de la fonction
(Gain, 2001). Il ne présente en revanche pas d’intérêt dans le cas du patient paraplégique.
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e. Synthèse
Chaque mode de contraction présente ses avantages et ses inconvénients. En fonction
du patient, de sa pathologie et de ses objectifs, un mode sera préférentiellement choisi par
rapport à un autre. Le mode de contraction utilisé au cours des exercices de renforcement
musculaire sera donc lié aux objectifs : par exemple si l’objectif est de lutter contre
l’amyotrophie, les modes concentrique ou isométrique sont à privilégier.
D’une manière générale, le renforcement musculaire afin d’être optimal doit mêler
différents modes de contraction afin d’utiliser au mieux les avantages et inconvénients de
chaque type de contraction. Ce mélange de modes de travail peut se faire par exemple selon
une progressivité : le renforcement isométrique ou concentrique est moins fonctionnel mais le
renforcement excentrique ou pliométrique, plus fonctionnel, peut être potentiellement lésant
notamment chez un sujet non-habitué. On peut alors imaginer un début de programme en
isométrique, moins traumatisant, puis rapidement une progression vers le concentrique et
enfin, lorsque le sujet se sent à l’aise, un renforcement excentrique et pliométrique bien
contrôlé afin d’être au plus proche de la fonction.
Cependant les critères de chaque mode de contraction ne sont pas les seuls éléments à
prendre en compte. En effet, il faut déterminer le mode de contraction fonctionnel du muscle
dans les activités quotidiennes ou sportives. Le mode de contraction utilisé ensuite en
entraînement sera le même afin de pouvoir transposer les acquis de l’entraînement dans la
fonction (Gain, 2001 ; Marsal, 2007). Ainsi par exemple, le muscle moyen fessier
fonctionnant majoritairement comme stabilisateur en contraction statique lors de la phase
unipodale de la marche sera préférentiellement renforcé dans le mode statique et dans
l’angulation d’abduction de hanche correspondant à celle de la phase d’appui unipodal de
marche. De la même manière un muscle sollicité en concentrique dans l’activité ne sera pas
entraîné en excentrique.
Afin d’atteindre les objectifs fixés, le choix du bon mode de contraction est important,
mais d’autres paramètres entrent également en jeu. Ceux-ci sont entre autres la résistance
appliquée, le nombre de répétitions effectuées ou encore les temps de repos entre les séries.
La partie suivante nous permet de déterminer ces paramètres d’après la littérature en fonction
de l’objectif de rééducation.
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4. Les différents objectifs
a. Le gain de force maximale
La musculation est une technique permettant le gain de force. Ce gain est dû dans un
premier temps à l’adaptation des facteurs nerveux sans modification importante de la structure
même du muscle (lors des 8 premières semaines environ) grâce à un meilleur recrutement et
une meilleure synchronisation des unités motrices (un maximum de fibres musculaires sont
recrutées au sein du muscle) ainsi qu’une meilleure coordination intramusculaire (l’ensemble
des fibres recrutées se contractent au même moment) et intermusculaire (les muscles
agonistes du mouvement se contractent en synergie et les muscles antagonistes sont relâchés
au maximum). Puis à partir de la 8ème
semaine entrent en jeu des facteurs structuraux avec une
hypertrophie musculaire liée à une augmentation du nombre de myofibrilles dans le muscle et
donc une augmentation de volume des fibres musculaires (Portero, 2001 ; Gain, 2001 ;
Bellaud & Coll., 2003).
Malgré une multitude de protocoles existants, tous les auteurs semblent s’accorder sur
les points suivants : un renforcement musculaire par lequel on cherche à développer la force
doit s’effectuer à au moins 60% de la RM pour espérer un minimum d’efficacité (Portero,
2001 ; Bellaud, 2003 ; Marsal, 2007 ; Vanbiervliet, 2008) et à plus de 80% de la RM pour
avoir une action sur les fibres IIb et donc recruter l’ensemble des fibres du muscle (Gain,
2001 ; Vanbiervliet, 2008). Les séries sont composées d’un faible nombre de répétitions, en
lien avec la charge importante à déplacer. Les gains en force sont plus importants avec des
charges lourdes et un nombre de répétitions faible (par exemple 3 répétitions à 95% de la RM
plutôt que 8 répétitions à 80% de la RM), mais en fonction de l’entraînement du sujet
l’utilisation de charges proches de la RM n’est pas toujours possible (Portero, 2001). De plus,
la récupération entre chaque série de mouvements doit être complète, c’est-à-dire de 3 à 5
minutes (Gain, 2001 ; Bellaud, 2003 ; Bernard & Coll., 2008).
Une méta-analyse réalisée par Bird et ses collaborateurs (2005) indique suite à
l’analyse de diverses études les paramètres du renforcement musculaire en force. Ainsi, au
cours de la séance, les exercices doivent être globaux puis analytiques afin d’obtenir un gain
plus important. L’inverse entraînerait une fatigue du muscle cible qui serait suppléé dans le
mouvement global par les autres groupes musculaire, rendant les mouvements globaux moins
efficaces dans le renforcement du muscle cible. Les séries sont composées de 3 à 8 répétitions
et espacées de 3 à 5 minutes de récupération. La charge est proportionnelle au nombre de
répétitions selon la formule de Brzycki précédemment citée.
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Concernant le nombre de séries, le gain de force maximale nécessite 3 à 4 séries (Bird
& Coll., 2005) mais une autre méta-analyse dans laquelle a été étudié ce point spécifique
rapporte que 2 à 3 séries entraîneraient un gain en force 46% supérieur à une série seule et
qu’il n’y aurait pas de différence significative entre 2 à 3 séries et 4 à 6 séries (Krieger, 2009).
Ainsi, il semblerait que 2 à 3 séries soient suffisantes pour développer la force maximale, ce
qui reste valable chez le sujet non-entraîné et entraîné (Krieger, 2009).
b. Le gain de puissance
La puissance musculaire correspond à la capacité de réaliser un mouvement avec une
charge donnée à une vitesse maximale. Il s’agit donc d’une relation entre la force et la vitesse.
Elle s’exprime selon le produit suivant : Puissance = Force x Vitesse.
Le renforcement musculaire dans l’objectif de développer la puissance s’effectue avec
des charges légères à modérées comprises entre 30 et 60% de la RM (American College of
sports medicine, 2002) voire jusqu’à 70% de la RM (Gain & Coll., 2003b ; Burtin, 2010).
Gain et ses collaborateurs (2003b) rapportent que Miller et Quièvre dans Les techniques de
renforcement musclaire (1997) différencient deux types de procédés : la puissance maximale
à composante de force qui se travaille avec des charges comprises entre 50 et 70% de la RM
et la puissance maximale à composante de vitesse qui se travaille avec des charges allant de
30 et 50% de la RM. Cependant quelle que soit la charge, le principe de l’entraînement à
visée de gain de puissance reste l’accélération maximale du mouvement, l’objectif étant
d’atteindre la vitesse maximale pour une charge donnée (Gain & Coll., 2003b).
Les séries, au nombre de 3 à 6, sont composées de 3 à 6 répétitions non-limitées par la
fatigue, l’objectif étant d’être capable de maintenir la même vitesse de mouvement à chaque
répétition. Afin de maintenir cette capacité de développer une grande vitesse de mouvement,
la récupération entre chaque série doit être complète, de l’ordre de 3 à 5 minutes (American
College of sports medicine, 2002). Enfin, les exercices utilisés pour développer la puissance
seront principalement pluri-articulaires (American College of sports medicine, 2002).
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c. Le gain de force explosive
La force explosive, ou explosivité, correspond à la rapidité de montée en tension du
muscle, c’est-à-dire sa capacité à se contracter rapidement à une intensité maximale. Cela
nécessite un bon développement de la coordination inter et intramusculaire (Gain, 2007), par
conséquent, dans un but d’optimisation, l’utilisation de mode contractiles tels que
l’excentrique ou le pliométrique qui développent cette coordination peut être judicieuse.
Les charges appliquées sont faibles, inférieures à 30% de la RM et les mouvements
doivent être rapides. Les séries sont composées de peu de répétitions afin de maintenir le
niveau de vitesse comme pour le développement de la puissance. Le temps de récupération
doit être total pour conserver la capacité de vitesse dans le mouvement.
Les méthodes stato-dynamiques qui sont composées d’un temps statique suivi d’un
temps dynamique explosif, et bulgare / lourd-léger (encore appelée méthode par contraste des
charges) où l’alternance de charges lourdes et légères est censée permettre un transfert de la
force vers l’explosivité sont particulièrement utilisées dans l’objectif de gain d’explosivité
(Gain, 2007 ; Burtin, 2010).
d. Le gain d’endurance
Pour gagner en endurance, le renforcement doit solliciter les fibres de type I qui sont
les plus endurantes et fonctionnent sur un mode aérobie (consommation d’oxygène) (Gain,
2007). Ce type d’entraînement « vise à améliorer les capacités du muscle sur le plan
métabolique » (Gain & Coll., 2003b).
Les auteurs s’accordent sur le fait que les charges à mobiliser ne sont pas importantes
30 à 50% de la RM (Burtin, 2010) ou 30 à 60% de la RM (Marsal, 2007) mais que la
répétition des exercices est recherchée (Marsal, 2007) avec des séries de plus de 20 répétitions
(Bird & Coll., 2005) voire même plus de 30 répétitions (Burtin, 2010). Pour un travail en
endurance, le nombre de séries et de 4 à 6 avec 30 à 60 secondes de repos entre chaque série
(Bird & Coll., 2005).
Il est possible de travailler l’endurance spécifique d’un muscle par l’alternance
d’exercices globaux et analytiques, organisés du plus global au plus analytique permettant un
épuisement musculaire localisé. Une pré-fatigue est obtenue par l’exercice global suite auquel
on réalise un exercice analytique sur le muscle cible (Cometti, 2002).
12
D’autre part, l’entraînement peut être spécifique à différents niveaux d‘endurance qui
ont chacun leurs caractéristiques : l’endurance de force maximale (capacité à mobiliser des
charges lourdes dans la durée), l’endurance axée sur la vitesse (capacité à répéter des
exercices à grande vitesse) et l’endurance à puissance maximale (capacité à répéter des
exercices dans le secteur optimal du produit force-vitesse) (Gain & Coll., 2003b). L’action de
l’entraînement sur chaque type d’endurance est fonction de l’intensité de la résistance
appliquée - dans la fourchette de 30 à 60% de la RM - et par conséquent de la vitesse du
mouvement.
e. Le gain de volume
Comme cela a été précisé précédemment, lors d’un entraînement musculaire, les
modifications structurales du muscle n’interviennent pas immédiatement puisque les
premières modifications concernent les facteurs nerveux. C’est la raison pour laquelle on
observe généralement un gain de force avant d’observer une modification du volume
musculaire. Les gains en hypertrophie sont généralement observés à partir de la 8ème
semaine
d’entraînement (Bird & Coll., 2005), ce qui implique qu’un renforcement musculaire à but
hypertrophique nécessite un programme prolongé au-delà de 8 à 12 semaines.
Tous les types de fibres n’ont pas le même potentiel hypertrophique. Ainsi, les fibres
de type II et plus particulièrement de type IIa ont un fort potentiel hypertrophique, tandis que
les fibres de type I ont un potentiel hypertrophique moindre (Bird & Coll., 2005). Afin
d’atteindre l’objectif de volume musculaire, le renforcement doit donc se faire à une intensité
de travail élevée afin d’avoir une action sur les fibres de type II. Par conséquent une intensité
comprise entre 70 et 85% de la RM est souhaitable (American College of sports medicine,
2002). Les séries, au nombre de 3 à 4 (Bird & Coll., 2005), sont composées de 8 à 12
répétitions (American College of sports medicine, 2002). L’objectif est de mettre le muscle en
difficulté de ravitaillement afin de favoriser la stimulation de la synthèse protéique (Gain &
Coll., 2003b), le temps de récupération entre chaque série n’est donc pas total mais de l’ordre
d’une à deux minutes (Bird & Coll., 2005). La vitesse du mouvement n’est pas recherchée, les
mouvements s’effectuent plutôt à vitesse lente (Gain & Coll., 2003b).
De plus, compte tenu de leur effet hypertrophique, les contractions de type isométrique
et concentrique sont à privilégier (Gain & Coll., 2003b). Comme pour le gain de force, au
cours de la séance, les exercices seront d’abord globaux puis analytiques (Bird & Coll., 2005).
13
f. Synthèse
Objectif Force
maximale Puissance Explosivité
Endurance
musculaire Hypertrophie
Intensité (%
de RM) 60 à 100 %
30 à 70 % (axé sur
la vitesse à
intensité faible, axé
sur la force à
intensité élevée)
< à 30 % 30 à 60 % 70 à 85 %
Répétitions
par série 3 à 8 3 à 6 3 à 6
> à 20 voire
> à 30 8 à 12
Nombre de
séries 2 à 3 3 à 6 3 à 6 4 à 6 3 à 4
Temps de
récupération
entre les
séries
3 à 5 minutes 3 à 5 minutes 3 à 5 minutes 30 à 60
secondes 1 à 2 minutes
Vitesse du
mouvement Lente Maximale Maximale
Lente ou
rapide selon
l’intensité et le
niveau
d’endurance
travaillé
Lente
Types
d’exercices
Globaux puis
analytiques
Principalement
globaux
Pluri-articulaires
Stato-
dynamique
Bulgare /
contraste des
charges
Globaux puis
analytiques
Globaux puis
analytiques
Concentrique -
Isométrique
Tableau 1 : Synthèse des modalités d’entraînement en fonction des objectifs
5. La fréquence des séances
Bird et ses collaborateurs (2005) rapportent dans leur méta-analyse une étude ayant
montré qu’un programme comprenant 2 séances par semaine permettait de générer 80 à 90%
des gains développés par des programmes comprenant plus de 2 séances par semaine. Ils
rapportent également qu’une autre étude ayant été réalisée chez des novices a conclu sur le
fait que 3 séances par semaines était la posologie optimale. Finalement 2 à 3 séances par
semaine sont recommandées.
Le repos recommandé entre chaque séance est de 48 heures (Portero, 2001), il faut
cependant noter que si l’entraînement s’effectue sur un mode excentrique ou pliométrique,
l’espacement des séances doit être plus important compte tenu du caractère lésionnel de ces
modes contractiles.
14
IV. Application aux membres supérieurs du patient paraplégique
complet thoracique bas
1. La pathologie
La paraplégie est un état survenant suite à une lésion médullaire thoracique ou
lombaire. Cette lésion entraîne une paralysie généralement définitive qui peut être complète
ou incomplète. Elle intéresse les membres inférieurs ainsi que le tronc ; elle varie fonction de
la hauteur de la lésion. Une lésion thoracique basse (T12) entraîne une paralysie et anesthésie
de l’ensemble des membres inférieurs et de la sphère vésico-sphinctérienne, tout en laissant
intacts les muscles abdominaux et érecteurs du rachis dont l’innervation est supérieure
permettant donc un meilleur équilibre et contrôle du tronc. La conservation de ces muscles est
le critère justifiant le choix de ce niveau lésionnel dans ce travail puisque le meilleur contrôle
du tronc facilitera les possibilités de travail efficace du renforcement des membres supérieurs
en offrant un meilleur point fixe.
2. Analyse des activités quotidiennes du patient paraplégique en
fauteuil roulant manuel
Le paraplégique en fauteuil roulant manuel utilise ses membres supérieurs tout au long
de la journée. Son autonomie en fauteuil passe par des membres supérieurs efficaces dans ses
activités quotidiennes. Les muscles des membres supérieurs du patient paraplégique doivent
donc être entraînés afin d’obtenir cette efficacité. Pour cela, il est nécessaire de déterminer les
principales activités communes à l’ensemble des patients paraplégiques et de les analyser. Ces
activités sont la propulsion du fauteuil roulant manuel afin de se déplacer, ainsi que les push-
up et transferts afin de décomprimer les points d’appuis au fauteuil et de passer du fauteuil au
lit, au canapé, aux toilettes ou encore à la voiture et inversement (liste non-exhaustive).
a. La propulsion
Le cycle de propulsion se divise en deux phases : une phase de propulsion en chaîne
cinétique semi-fermée, durant selon les auteurs entre 20 et 35% du cycle, pendant laquelle la
main est en contact avec la main courante et une phase de récupération en chaîne cinétique
ouverte située du moment où la main lâche la main courante au moment où elle se repose sur
celle-ci. De plus, plusieurs auteurs s’accordent pour dire que la phase de propulsion est
15
divisée en deux phases distinctes déterminées par des activités musculaires différentes : une
phase de « tirer » du début de la propulsion jusqu’au vertex de la roue et une phase de
« pousser » du vertex de la roue à la fin de la propulsion.
Selon Vanlandewijck & Coll. (1997) qui se sont appuyés sur plusieurs études
analysant le mouvement de propulsion en fauteuil roulant manuel via une électromyographie
(EMG) de surface, la phase de « tirer » montre une action du biceps brachial, du deltoïde
antérieur ainsi que du grand pectoral. Le passage au niveau du vertex de la roue entraîne une
diminution de l’activité du biceps brachial simultanément à l’apparition d’une activité au
niveau du triceps brachial. Enfin, durant la phase de « pousser », les muscles deltoïde
antérieur et grand pectoral sont toujours actifs ainsi que le muscle triceps brachial. Ces
données indiqueraient que le grand pectoral et le deltoïde antérieur seraient les principaux
muscles de la phase de propulsion. La phase de récupération quant à elle montre une activité
des chefs moyen et postérieur du deltoïde ainsi que du trapèze supérieur. La fin de cette phase
serait marquée par l’apparition d’une contraction sur les muscles deltoïde antérieur, grand
pectoral et grand dorsal pour accélérer les mains et les ramener sur la main courante.
Vanlandewijck et ses collaborateurs indiquent que le cycle de propulsion serait constitué
principalement de contractions concentriques.
Les caractéristiques d’activation musculaires sont identiques pour l’ensemble des
patients paraplégiques, quel que soit leur niveau lésionnel (Thoumie & Coll., 1997). Les
données présentées par Vanlandewijck & Coll. concordent avec celles présentées par Schantz
& Coll. (1999).
L’analyse de l’étude de Mulroy & Coll. (1996) confirme également les données
précédentes mais nous apporte des informations complémentaires. En effet cette étude n’a pas
été réalisée en utilisant une EMG de surface mais une EMG avec des aiguilles implantées
dans les muscles, ce qui permet de recueillir des informations non plus seulement sur les
muscles superficiels, mais sur l’ensemble des muscles de l’épaule soit 12 muscles au total.
Cette étude a été réalisée sur 17 hommes paraplégiques de niveau T10 à L3 ne présentant
aucune douleur d’épaule et ne pratiquant pas de sports en fauteuil de niveau compétition. Le
niveau de bruit de fond de l’EMG a été évalué au repos puis une contraction maximale sur
chaque muscle a été évaluée afin d’obtenir les données EMG de cette contraction maximale et
ainsi pouvoir déterminer pour chaque muscle l’intensité de la contraction au moment de la
propulsion.
D’après cette étude, les muscles de la phase propulsive sont le deltoïde antérieur, le
chef sternal du grand pectoral, le supra-épineux, l’infra-épineux, le dentelé antérieur, le chef
16
long du biceps brachial et le chef long du triceps brachial. Le triceps brachial prenant le relais
du biceps brachial au cours de la propulsion. L’ensemble de ces muscles hormis le triceps
brachial commencent à travailler en fin de phase de récupération aux alentours de 80 à 90%
du cycle, probablement de manière excentrique afin de freiner le retour en fin d’amplitude et
de ramener les mains vers l’avant pour les positionner sur la main courante. Les muscles de la
phase de propulsion sont actifs sur une période durant entre 30% et 40% de la durée totale du
cycle. Mulroy et ses collaborateurs ne présentent pas la phase de propulsion divisée en deux
comme le font les autres auteurs, cependant, l’activité retrouvée au niveau des muscles biceps
brachial et triceps brachial semblent confirmer cette distinction.
Concernant la phase de récupération, les muscles activés sont les chefs moyen et
postérieur du deltoïde, le subscapulaire, le supra-épineux et le trapèze moyen. De la même
manière, ces muscles commencent à travailler en fin de phase de propulsion, probablement
de manière excentrique afin de freiner le mouvement de propulsion et de préparer la phase de
retour. Les muscles de la phase de récupération sont actifs sur une période durant entre 55% et
70% de la durée totale du cycle.
Il est intéressant de noter que le muscle supra-épineux est retrouvé à la fois dans les
muscles sollicités lors de la phase de propulsion et lors de la phase de récupération. La
chronologie de mise en jeu des différents muscles est la même, quel que soit le niveau
lésionnel ou l’installation au fauteuil (Codine & Coll, 1997)
L’étude de Mulroy et ses collaborateurs présente également l’intérêt d’évaluer
l’intensité de la contraction de chacun des muscles mis en jeu dans l’activité de propulsion.
Ainsi, il est possible de définir la part d’activité de chaque muscle mis en évidence lors de ce
mouvement. Cette étude a permis de déterminer que chez les sujets étudiés les muscles de la
phase de propulsion (tiré et poussé) se contractent à une intensité moyenne comprise entre
20% et 23% de leur intensité maximale déterminée par contraction maximale avant le test,
hormis le supra-épineux (27%) et le chef sternal du grand pectoral (35%) qui semblent
davantage sollicités lors de cette phase. Concernant les muscles de la phase de récupération,
ceux-ci se contractent à une intensité moyenne comprise entre 28% et 32% de leur capacité
maximale sauf le supra-épineux qui travaille à une intensité moyenne de 21% de sa capacité
maximale.
Les pics d’intensité maximale de chaque muscle ont également été précisés, tous sont
sollicités à un moment donné du cycle à une intensité supérieure à 40% de leur capacité
maximale. Il faut noter que lors de la phase de propulsion, les muscles grand pectoral avec un
pic à 58% et supra-épineux avec un pic à 67% sont les plus sollicités. De la même manière,
17
lors de la phase de récupération, les muscles trapèze moyen avec un pic à 55% et
subscapulaire avec un pic à 67% sont davantage sollicités.
b. Les transferts
Plusieurs types de transferts sont décrits chez les patients paraplégiques. Il y a le
« push-up » qui est la simple élévation du corps en prenant appui sur les mains des deux côtés
du fauteuil roulant. Cette technique doit être réalisée plusieurs fois par heure par le patient
paraplégique afin de décomprimer les appuis fessiers dans le but de prévenir les escarres. On
peut également citer les transferts latéraux, qui sont généralement utilisés pour tous les
transferts de type fauteuil-lit ou fauteuil-toilettes où le fauteuil est positionné latéralement au
point d’arrivée du transfert. La troisième classe de transferts est le relevé du sol où le patient
assis sur le sol prend appui avec ses mains sur le fauteuil qui est placé dans son dos afin de
s’élever et de venir s’asseoir. Cette troisième classe pourrait s’apparenter au push-up mais en
y associant un recul du bassin et du tronc. Quel que soit le type de transfert, tous ont en
commun le fait que le patient doit soulever le poids de son corps à la force de ses bras.
Le « push-up »
Une étude publiée par Reyes et ses collaborateurs en 1995 présente les données EMG
recueillies chez 13 sujets masculins paraplégiques bas de niveau lésionnel T8 à L1 ne
présentant pas de douleurs d’épaules qui auraient pu fausser les tests. Afin d’obtenir des
données fiables, la possibilité de contraction des muscles abdominaux infra-ombilicaux a été
testée, aucun sujet ne présente de paralysie des abdominaux inférieurs (signe de Beevor
négatif). L’analyse EMG a été réalisée en intramusculaire sur 12 muscles qui sont les
suivants : grand dorsal, chef sternal du grand pectoral, trapèze moyen, dentelé antérieur, les
trois chefs du deltoïde (antérieur, moyen et postérieur), supra-épineux, infra-épineux,
subscapulaire, chefs longs du triceps brachial et du biceps brachial. Soit les mêmes muscles
que l’étude de Mulroy et ses collaborateurs sur le mouvement de propulsion. Toujours comme
dans l’étude précédente, le niveau de bruit de fond EMG ainsi que les données EMGmax de la
contraction maximale de chaque muscle durant 1 seconde ont été relevés. Afin de réaliser les
mesures en conditions identiques pour l’ensemble des sujets, la consigne suivante a été
donnée : réaliser un push-up de la même manière que lorsqu’ils souhaitent soulager les appuis
fessiers du fauteuil et maintenir 1 à 2 secondes la position d’élévation avant de redescendre.
Quatre phases ont été déterminées : le chargement initial du début du mouvement
jusqu’au moment de décollement des fesses, l’élévation, le maintien et la redescente. La phase
18
de redescente n’a pas été analysée car les données EMG montraient une cessation d’activité
musculaire lors de cette phase. Cette cessation d’activité n’a pas été expliquée dans l’étude
mais il peut s’agir soit d’une redescente brusque des sujets, soit du fait que la contraction est
excentrique lors de la redescente et donc moins intense sur l’EMG. La durée moyenne du
push-up est de 2,6 secondes dont 1,4 secondes de maintien. La stratégie d’élévation retrouvée
est identique pour l’ensemble des sujets avec des activations musculaires semblables.
Les données EMG présentées dans l’étude sont les intensités moyennes relevées au
cours de l’action de push-up. Elles montrent une activité importante synergique des muscles
grand dorsal (58% EMGmax lors de la phase d’élévation) et grand pectoral (32% EMGmax
lors de la même phase) avec une activité significativement (p<0.01) plus importante du grand
dorsal. Ces deux muscles en synergie et en CCF permettent l’élévation du tronc. Le chef long
du triceps brachial présente également une activité importante (54% EMGmax lors de
l’élévation) en lien avec l’extension du coude observée lors du push-up qui contribue à la
majeure partie de l’élévation totale obtenue. Les muscles de la coiffe des rotateurs
(subscapulaire, infra-épineux et supra-épineux) montrent une faible activité EMG lors de cette
action (environ 10% EMGmax) ce qui d’après Reyes et ses collaborateurs montre que leur
rôle pour éviter l’impact de la tête humérale sous l’acromion chez des sujets dont le grand
dorsal et le grand pectoral sont bien renforcés est réduit, les deux gros muscles s’insérant sur
le thorax et l’humérus remplissant cette fonction. Le dentelé antérieur présente lui aussi une
faible activité EMG (environ 10% EMGmax également) indiquant qu’il ne réalise pas une
action importante au cours de ce mouvement. Enfin, les trois chefs du deltoïde, le trapèze
moyen et le biceps brachial ne présentent pas d’activité EMG supérieure à 5% EMGmax, ce
qui selon les paramètres de l’étude indique leur absence d’action au cours de ce mouvement.
Le transfert latéral
Le transfert latéral présente plusieurs séquences : des séquences horizontales et des
séquences verticales. Les séquences horizontales sont « l’avancée » au cours de laquelle le
bassin va être dirigé vers l’avant afin d’éviter tout choc avec la roue du fauteuil roulant et « le
translaté » avec un déplacement latéral du point de départ à la cible. Les séquences verticales
sont « le soulevé » avec un décollement des appuis sur le coussin afin d’éviter toute friction,
« le maintien » au cours du translaté afin de rester en élévation et « le contrôlé » avec une
maitrise de la redescente sur la cible. (Perrouin-Verbe & coll., 1997).
19
Dans les faits, ces différentes séquences ne sont pas strictement séparées les unes des
autres. Ainsi, comme le décrivent Perry et ses collaborateurs lors d’une étude en 1996, le
transfert latéral est divisé en trois phases qui sont « la préparation » de la prise d’appui sur les
mains jusqu’à la perte de contact des appuis fessiers, « l’élévation » et « la descente ». Selon
cette description, les séquences horizontales seraient donc mêlées afin d’observer un
déplacement en diagonale, tandis que les séquences verticales se dérouleraient simultanément
au déplacement latéral.
L’étude de Perry et ses collaborateurs présente les données EMG intramusculaire des
muscles de l’épaule lors d’un transfert latéral chez 12 hommes paraplégiques bas (T8 à L1) ne
présentant pas de douleurs d’épaules qui pourraient fausser les données. Les caractéristiques
de l’étude sont les mêmes que celles de Reyes & Coll. dans leur étude sur le push-up : les 12
muscles étudiés sont les mêmes, le niveau de bruit de fond et la mesure EMGmax ont été
réalisées de la même manière et la présence d’un minimum d’abdominaux sous-ombilicaux a
également été testée par le signe de Beevor. La consigne donnée à l’ensemble des sujets était
la même à savoir : réaliser un transfert comme ils le font habituellement, du fauteuil à un plan
de rééducation réglé à la même hauteur que l’assise du fauteuil.
Les données EMG recueillies sont différentes pour le bras dont le sujet se rapproche
lors du transfert et pour le bras dont il s’éloigne.
Au cours du transfert, du côté dont le sujet s’éloigne, une activité EMG est décelée
tout au long du transfert sur les muscles grand pectoral (de 31% à 49% EMGmax) et dentelé
antérieur (de 21% à 54% EMGmax). Les muscles infra-épineux (de 21% à 45% EMGmax) et
grand dorsal (de 20% à 25% EMGmax) présentent une activité EMG principalement dans les
phases de préparation et d’élévation. Enfin, les muscles supra-épineux et deltoïde antérieur
(environ 45% EMGmax) ont une activité majoritairement durant la phase d’élévation.
Du côté dont le sujet se rapproche, le grand pectoral est le seul muscle à présenter une
activité importante au cours des trois phases (de 33% à 81% EMGmax) tandis que le
subscapulaire a pour sa part une activité décroissante (26%, 19% et 16% EMGmax). Le grand
dorsal montre une activité durant les phases d’élévation et de descente (40% et 26%
EMGmax). Le chef long du biceps brachial présente au cours des phases de préparation et
d’élévation une activité notable (26% et 28% EMGmax) tandis que les muscles dentelé
antérieur, infra-épineux et deltoïde antérieur ne présentent une activité significative que
durant la phase d’élévation (respectivement 47%, 37% et 20% EMGmax)
20
Les chefs moyen et postérieur du deltoïde et le trapèze moyen ne présentent à aucune
phase et sur aucun bras d’activité EMG suffisante pour être considérés comme effecteurs du
mouvement de transfert latéral. Le cas du chef long du triceps brachial est quelque peu
différent car même si son activité EMG est comprise pour l’ensemble des phases et pour les
deux bras entre 10% et 20% de l’activité EMG maximale, le transfert latéral nécessite
forcément de par ce mouvement d’élévation associé à une extension des coudes une activité
importante du triceps brachial. L’hypothèse posée par l’équipe ayant réalisé cette étude est
que l’activité ayant été mesurée uniquement sur le chef long du muscle, celle-ci n’est pas
représentative de l’activité réelle de l’ensemble du muscle.
Sur l’ensemble des muscles étudiés, l’intensité EMG lors de la phase d’élévation est
plus importante que lors de la phase de descente, bien que le poids du corps repose toujours
sur les bras. Les auteurs précisent que cette inégalité est liée à la différence de mode de
contraction entre les deux phases, la première se déroulant sur un mode concentrique et la
seconde sur un mode excentrique. La contraction excentrique est moins détectée à l’EMG que
la concentrique, ce qui explique cette activité EMG plus faible.
Les données EMG de chaque muscle prises en compte lors de cette étude
correspondent à la médiane des individus étudiés car les valeurs recueillies ne correspondent
pas à la loi normale donc la moyenne n’aurait pas été représentative de l’ensemble des sujets.
Les valeurs minimales et maximales de chaque muscle sont comprises sur une très grande
fourchette de valeurs pouvant résulter de capacités différentes de chaque individu. En effet,
pour se transférer, un sujet dont la force maximale et plus élevée développe un pourcentage de
cette force moins important qu’un sujet dont la force maximale est plus faible.
Le relevé du sol
Une étude publiée par Gagnon et ses collaborateurs (2005) présente les données EMG
de six muscles lors d’un transfert postérieur surélevé. Ce transfert avait un point d’arrivée
surélevé de 10 centimètres par rapport au point de départ, ce qui est évidemment plus faible
que la hauteur d’assise d’un fauteuil mais le mouvement réalisé lors de ce transfert se
rapproche tout de même de l’action réalisée afin de remonter dans un fauteuil roulant. Un
parallèle entre les données EMG recueillies lors de cette action et la demande musculaire
réelle d’un transfert sol-fauteuil peut donc être réalisé tout en sachant que celle-ci sera
forcément plus importante dans ce transfert.
21
L’étude a porté sur 10 hommes blessés médullaires complets entre C7 et L2 selon les
individus. Les individus ne présentaient aucun trouble de l’épaule afin de ne pas fausser les
données. Les données EMG ont été recueillies par EMG de surface sur six muscles de
l’épaule : le deltoïde antérieur, le chef long du biceps brachial, le chef long du triceps
brachial, le chef claviculaire du grand pectoral, le grand dorsal et le trapèze inférieur. Une
mesure EMGmax a été déterminée pour chacun de ces muscles grâce à trois contractions
espacées de temps de repos avant le début de l’étude.
Trois méthodes de transfert ont été évaluées dans cette étude : une avec les deux mains
en appui sur la surface inférieure, une avec les deux mains sur la surface supérieure et une où
les sujets avaient une main sur chaque surface. La méthode avec les deux mains sur la surface
supérieure se rapproche davantage de la technique couramment utilisée par les patients
paraplégiques pour remonter dans leur fauteuil, les données EMG de cette technique seront
donc rapportées ici.
Seulement trois sujets ont réussi le transfert postérieur surélevé avec les deux mains en
appui sur la surface supérieure, les moyennes EMG présentées ici concernent donc seulement
ces trois individus. Leur niveau lésionnel est T4, T5 et T12. L’ensemble des muscles étudiés
présente une activité modérée à importante hormis le chef long du biceps brachial (16%
EMGmax) qui a probablement eu une action complémentaire du deltoïde antérieur sur la
flexion de l’épaule compte tenu de la position de départ en extension et de le position
d’arrivée en légère flexion. Le deltoïde antérieur (73% EMGmax), le trapèze inférieur (84%
EMGmax), le grand dorsal et le grand pectoral (55% EMGmax chacun) ainsi que le chef long
du triceps brachial (40% EMGmax) ont tous joué un rôle important dans la réalisation de ce
transfert. Comme pour l’étude précédente, l’activité du triceps brachial a probablement été
sous-estimée puisque seulement le chef long du muscle a été étudié. Compte tenu de l’action
qui nécessite la mise en charge du poids du corps associée à une extension du coude, il est
raisonnable de supposer que l’activité globale du triceps brachial est bien plus importante.
c. Synthèse
L’intérêt de ces différentes études réside avant tout dans la possibilité de déterminer
grâce aux intensités EMG recueillies si la part de travail demandée à chaque muscle ou
groupe musculaire est importante ou non. La valeur précise du rapport entre l’intensité de
contraction du muscle lors de l’activité et sa capacité maximale est individu-dépendante
puisque chaque individu présente une force maximale différente, elle ne présente donc pas un
22
intérêt important. De plus les valeurs EMGmax déterminées dans chaque étude ne
correspondent pas forcément à une contraction maximale du muscle, en effet, rien ne permet
d’assurer que le sujet déploie le maximum de sa force au moment du test. Cela est d’ailleurs
vérifié dans quelques études où certains sujets lors de l’activité dépassent largement pour un
muscle donné l’intensité maximale EMG qui avait été déterminée lors du test.
Lors de l’activité de propulsion, l’analyse EMG permet donc de déterminer que les
principaux muscles activés sont les deltoïdes antérieurs, les grands pectoraux, les biceps et
triceps brachiaux, les dentelés antérieurs ainsi que les muscles infra- et supra-épineux lors de
la phase en chaîne cinétique semi-fermée. Lors de la phase en chaîne cinétique ouverte, les
principaux muscles activés sont les deltoïdes postérieurs et moyens, les trapèzes supérieurs et
moyens, les subscapulaires et les supra-épineux.
Concernant les activités de transferts, les muscles activés généralement retrouvés d’un
transfert à l’autre sont globalement les mêmes, le push-up étant celui qui sollicite le moins de
muscles puisqu’il s’agit du mouvement le moins complexe parmi ceux qui ont été présentés
ci-dessus. En confondant toutes sortes de transferts, les muscles sollicités lors de ces activités
sont nombreux : grands pectoraux, grands dorsaux, triceps brachiaux, dentelés antérieurs,
deltoïdes antérieurs, infra- et supra-épineux, subscapulaires et trapèzes inférieurs.
3. Les muscles à renforcer
L’analyse des activités d’autonomie du sujet paraplégique permet de définir les
groupes musculaires à renforcer afin de permettre à un patient en cours de rééducation et
d’autonomisation de développer une musculature appropriée à ses activités futures.
Les muscles sollicités dans les activités de propulsion et de transferts nécessitent d’être
renforcés puisqu’ils vont désormais être beaucoup plus sollicités que lorsque le sujet était
valide et dans une fonction inhabituelle.
Ainsi par exemple, compte tenu de la fréquence du mouvement de propulsion qui est
67cycles/minutes (Mulroy & Coll., 1996) et donc de l’activité prolongée des muscles mis en
jeu dans ce mouvement particulièrement lors de déplacements en extérieur, un gain en
endurance de l’ensemble de ces muscles est nécessaire. Le grand pectoral doit notamment être
renforcé dans sa fonction d’adduction car une fatigue de celui-ci lors de déplacements
prolongés induirait une moins bonne efficacité dans cette fonction ce qui impliquerait un
glissement de la tête humérale qui irait s’impacter contre l’acromion et pincerait les tendons
de la coiffe des rotateurs (Mulroy & Coll., 1996).
23
De la même manière, l’étude de Reyes et ses collaborateurs nous indique que la
réalisation des push-up ne sollicite que très peu les muscles rotateurs de la coiffe dès lors que
les muscles grands dorsaux et grands pectoraux sont bien renforcés et travaillent en synergie.
D’autre part, lors du renforcement il faut veiller à ne pas créer de déséquilibres
musculaires agonistes / antagonistes. Ainsi, un muscle qui n’a pas une importance capitale
lors des activités quotidiennes mais qui est antagoniste à un muscle sollicité doit donc
également être renforcé. En effet, l’apparition de déséquilibres musculaires pourrait être un
facteur d’apparition de douleurs et tendinopathies de l’épaule (tendinites, ruptures tendineuses
de la coiffe des rotateurs…) (Chivilo & Coll., 2002). Un renforcement majoré sur les rotateurs
médiaux (RM) en délaissant les rotateurs latéraux (RL) entraîne un déséquilibre du ratio
RM/RL alors que pour être normal celui-ci doit être compris entre 1,2 et 1,5. Il a été décrit
dans la littérature un déséquilibre du ratio RM/RL chez des patients souffrant de conflit sous-
acromial sans savoir si le déséquilibre est une cause ou une conséquence du conflit (Codine &
Coll., 1997). Dans le doute, il est préférable de ne pas créer ces déséquilibres.
Enfin, un programme de prévention d’apparition de tendinopathies de la coiffe des
rotateurs peut être appliqué compte tenu de la fréquence de ces atteintes chez ce type de sujets
(Chivilo & Coll., 2002). En effet l’apparition de douleurs d’épaules sédentarise rapidement
les sujets paraplégiques car ils ne peuvent plus se déplacer sur de longues distances et réaliser
correctement leurs transferts. Il est donc primordial de conserver l’intégrité de la ceinture
scapulaire de ces patients.
4. Objectifs du programme de renforcement
Le programme de renforcement des membres supérieurs proposé aux patients
paraplégiques doit leur permettre d’acquérir une plus grande autonomie. C’est-à-dire qu’il
doit leur permettre de développer une musculature suffisante pour réaliser de longs
déplacements en fauteuil roulant manuel, pour réaliser seul et en sécurité toutes sortes de
transferts tout en évitant l’apparition de douleurs d’épaules.
La possibilité de se déplacer sur de longues distances dépend de la capacité qu’ont les
muscles à se contracter sur de longues périodes tout en conservant la même fréquence et la
même intensité de contraction, c’est-à-dire de l’endurance musculaire.
Les transferts doivent pouvoir être réalisés le plus rapidement possible, ils nécessitent
donc une certaine explosivité avec une mise en tension rapide des muscles à leur niveau
maximum. D’autre part, la force maximale développée doit être suffisante pour que le sujet
24
puisse soulever le poids de son corps lors de la réalisation des transferts (Gain & Coll.,
2003b). En effet lorsque le sujet n’est pas capable de soulever le poids de son corps à cause
d’un déficit de force des abaisseurs ou de la chaîne d’extension des membres supérieurs, une
planche de transfert devient indispensable à la réalisation de tous les transferts ce qui entraîne
une limitation de l’autonomie (Perrouin-Verbe & Coll., 1997).
Le programme doit donc développer l’endurance musculaire des muscles sollicités
dans l’activité de propulsion, l’explosivité et la force maximale des muscles mis en jeu dans
les différents transferts, tout en renforçant les structures musculaires et tendineuses de la
coiffe des rotateurs afin de prévenir l’apparition de tendinopathies.
5. Programme de renforcement
Le programme ici proposé s’étale sur 12 semaines, avec 3 séances par semaine
séparées d’au moins 48h de repos. Des étirements des muscles sollicités sont proposés les
jours de récupération afin de conserver la souplesse et de favoriser la récupération. L’objectif
n’étant pas de créer une hypertrophie majeure chez les patients paraplégiques qui aurait pour
effet d’augmenter la charge à déplacer lors des transferts et donc de les rendre encore plus
compliqués à réaliser, il est donc préférable de ne pas prolonger un programme intensif au-
delà de 12 semaines puisque les modifications structurelles se réalisent majoritairement après
cette échéance. Ces 12 semaines se divisent en 3 cycles de 4 semaines avec des objectifs bien
distincts. Ces cycles sont ordonnés de manière à respecter un principe de progressivité des
charges au cours du programme : travail de l’endurance, puis travail de l’explosivité et enfin
travail de la force maximale. Le fait de commencer par un cycle d’endurance, donc avec des
charges plutôt faibles, permet au sujet d’acquérir la gestuelle appropriée à chaque exercice.
Lors des cycles suivants quand les charges augmenteront cela sera sur des exercices que le
patient maitrise donc le risque de mauvais placement et de compensations sera réduit.
L’objectif s’intéressant à la prévention des tendinopathies s’inscrit tout au long du
programme par l’intégration des muscles de la coiffe aux différentes phases du programme ou
encore par le renforcement des muscles grands pectoraux et grands dorsaux ayant pour effet
de protéger la coiffe des rotateurs lors des activités de propulsion et de transferts comme
précisé précédemment.
Le programme doit respecter certains principes : avant de commencer tout
renforcement musculaire, il faut s’assurer que le patient ne présente pas de douleurs
d’épaules. En effet, la présence de douleurs au niveau des épaules s’avère être une contre-
indication à la pratique du renforcement musculaire des membres supérieurs. Une attention
25
toute particulière sera également portée à la fatigue du patient, qu’elle soit physique ou
mentale. Le patient doit pouvoir se consacrer entièrement à son exercice lorsqu’il l’exécute
faute de quoi le risque de blessure est majoré. De plus un patient fatigué aura une moins
bonne récupération et l’efficacité du programme de renforcement se verra diminuée. Il est
préférable de reporter une séance lorsque le patient n’est pas en pleine possession de ses
capacités. Avant de débuter les exercices avec des charges importantes, un échauffement
musculaire doit être réalisé. Enfin dans un but de prévention des épaules, une bonne stabilité
du tronc au cours des exercices est recherchée (quitte à sangler le patient si son équilibre est
précaire) et la course musculaire travaillée dans les différents exercices doit être réglée en
éliminant les secteurs contraignants pour l’épaule (Chivilo & Coll., 2002).
Avant de débuter le programme, un calcul de la RM doit être réalisé pour chaque
exercice proposé. La charge à laquelle chaque exercice doit être réalisé afin d’atteindre
l’objectif fixé (endurance, explosivité ou force) pourra ainsi être déterminée. La RM sera
remesurée au bout de 4 et 8 semaines lors du changement de cycle afin de ré-étalonner les
charges car les progrès peuvent être rapides chez des sujets non-entraînés (Burtin, 2010).
Les quatre premières semaines sont consacrées au travail de l’endurance musculaire.
Tous les exercices sont réalisés selon les mêmes modalités : ils se font donc à une intensité
comprise entre 30 et 60% de la RM et à une vitesse rapide ou lente selon la charge. Pour
chaque exercice, il est réalisé entre 4 et 6 séries espacées de 30 à 60 secondes de récupération
et constituées de plus de 20 à 30 répétitions. Au cours de 4 semaines, une progression peut
être instaurée en commençant la première semaine avec des charges d’environ 30% de la RM,
un mouvement répété 20 fois par série sur 4 séries séparées de 60 secondes de récupération et
en terminant la quatrième semaine avec des charges avoisinant les 60% de la RM, un
mouvement répété plus de 30 fois par série sur 6 séries espacées de 30 secondes de
récupération.
Le renforcement musculaire en endurance permet de développer au sein du muscle
l’utilisation de la filière aérobie. Cette filière, principalement utilisée par les fibres de type I
qui sont les fibres les plus endurantes, utilise l’oxygène apporté au muscle pour synthétiser de
l’ATP (énergie). Dès lors, on comprend que le système cardio-respiratoire doit également être
capable d’apporter au muscle l’oxygène nécessaire et qu’il est difficile de parler de travail
musculaire en endurance sans parler de réentraînement à l’effort dans le cas de patients
déconditionnés. Cependant, ce travail s’intéressant à l’application du renforcement musculaire
au patient paraplégique, le versant de la rééducation concernant le réentraînement à l’effort
nécessaire chez ce type de patients ne sera pas développé.
26
Au cours de ce premier cycle, les exercices proposés visent les muscles sollicités au
cours de la propulsion du fauteuil roulant manuel. Les exercices sont réalisés du plus global
au plus analytique au cours de la séance. Les exercices suivants peuvent être proposés :
-développé-couché en décubitus avec un coussin sous les genoux pour protéger la
région lombaire (Annexe 5) : sollicite les muscles grands pectoraux, deltoïdes antérieurs et
triceps brachiaux principalement, ainsi que les petits pectoraux et les dentelés antérieurs
(Delavier, 1998).
-pull-over en décubitus avec une barre (Annexe 6) ou assis avec un appareil à charge
guidée (Annexe 7) : sollicite les muscles grands pectoraux, chefs longs des triceps brachiaux,
grands ronds, grands dorsaux, dentelés antérieurs, rhomboïdes et petits pectoraux (Delavier,
1998).
-simulation de propulsion de fauteuil roulant, assis avec élastique tendu vers l’arrière
et le haut tenu dans la main, départ coude fléchi à 90° et épaule en extension, réaliser une
extension du coude associée à une légère flexion de l’épaule (tirer sur l’élastique vers l’avant
et le bas). Sollicite principalement les triceps brachiaux, les deltoïdes antérieurs, les grands
pectoraux et les dentelés antérieurs.
-travail des biceps brachiaux assis au fauteuil avec haltère (Annexe 8) ou élastique
(Annexe 9) : flexion de coude contre résistance en supination sur toute l’amplitude en retenant
la descente. Garder l’épaule immobile. Alterner les deux bras (travailler un bras pendant la
récupération de l’autre).
-travail des triceps brachiaux assis au fauteuil avec élastique (Annexe 10), en
décubitus avec haltère (Annexe 11) ou en procubitus avec haltère (Annexe 12) : extension de
coude contre résistance en insistant sur la fin d’amplitude d’extension qui est la position dans
laquelle le muscle est sollicité lors de la propulsion.
-travail des deltoïdes antérieurs assis au fauteuil avec haltère (Annexe 13) ou
élastique (Annexe 14) : flexion d’épaule contre résistance en se limitant à 90° de flexion
(contrairement à l’illustration annexe 13).
-travail des deltoïdes postérieurs assis au fauteuil avec haltère (Annexe 15) ou
élastique (Annexe 16) : extension d’épaule contre résistance en allant bien jusqu’au bout du
mouvement avec la main en arrière du corps comme lors du mouvement de propulsion. Cet
exercice sollicite également les rhomboïdes et trapèzes, d’autant plus s’il est réalisé
simultanément des deux côtés.
27
-travail des dentelés antérieurs assis au fauteuil avec élastique (Annexe 17).
L’élastique est tendu vers l’arrière, tendre le bras vers l’avant en réalisant une extension du
coude puis réaliser un déplacement antérieur de l’épaule (« enrouler l’épaule ») en gardant le
coude tendu et sans réaliser de rotation du tronc.
-travail en abduction assis au fauteuil avec haltère (Annexe 18) ou élastique (Annexe
19). Cet exercice sollicite principalement le chef moyen des deltoïdes ainsi que les supra-
épineux et trapèzes supérieurs (Delavier, 1998).
-travail en adduction horizontale en décubitus avec haltère (Annexe 20) ou assis sur
un appareil « butterfly » (Annexe 21) : sollicite le chef sternal du grand pectoral (grand
pectoral dans sa composante d’adduction), et travail en adduction assis au fauteuil avec
élastique (Annexe 22) en dessous de 60° d’abduction (contrairement à l’illustration) et en
gardant les épaules basses pour éviter les conflits au niveau de l’épaule. Réaliser le
mouvement dans le plan de la scapula. Cet exercice sollicite les abaisseurs en course interne
(grand pectoral et grand dorsal en synergie).
-travail en rotation latérale assis au fauteuil avec élastique en position R1 coudes au
corps (Annexe 23) ou en procubitus avec haltère en position R2 (Annexe 24). Cet exercice
sollicite principalement les muscles infra-épineux et petit rond.
-travail en rotation médiale assis au fauteuil avec élastique en position R1 coudes au
corps (Annexe 25). Cet exercice sollicite les muscles rotateurs médiaux qui sont le grand
dorsal, le grand pectoral, le grand rond ainsi que le subscapulaire.
Le deuxième cycle est consacré au développement de l’explosivité afin de permettre
au patient de réaliser les transferts rapidement. Les charges sont faibles, inférieures à 30% de
la RM mais les mouvements doivent être réalisés à une vitesse maximale. L’objectif pour le
patient est de conserver la même rapidité gestuelle tout au long de la série. Quand une
répétition est plus lente, il faut stopper la série même si elle n’est pas terminée. Les séries, au
nombre de 4 à 6, sont composées de 4 à 6 répétitions et espacées de 3 à 5 minutes de
récupération. Pour respecter une progression, le cycle peut commencer avec 4 séries de 4
répétitions, puis essayer de passer progressivement à 6 répétitions par séries, ensuite à 5 puis
6 séries et enfin le temps de repos peut progressivement être réduit de 5 à 3 minutes. Les
exercices mettent en jeu des mouvements globaux qui sollicitent les muscles sollicités lors des
transferts, en concentrique comme lors de l’activité.
28
Les exercices proposés lors de ce cycle sont le développé couché (Annexe 5), le pull-
over (Annexes 6 et 7) et le travail à la presse à bras (Annexe 26) pour simuler le push-up,
qui sollicite en synergie les grands dorsaux et les grands pectoraux dans leur fonction
d’abaisseurs ainsi que les triceps brachiaux.
Ces exercices peuvent également être réalisés en suivant les modalités de contraste des
charges ou en stato-dynamique avec un début de mouvement, un arrêt de quelques secondes
en contraction statique puis une fin de mouvement explosive.
Enfin, le troisième cycle est consacré au gain de force maximale afin de développer
principalement la force nécessaire pour soulever le poids du corps lors des transferts. Les
exercices sont donc réalisés lentement avec une charge supérieure à 60% de la RM en
réalisant 3 à 8 répétitions par série au cours de 2 à 3 séries séparées de 3 à 5 minutes de
récupération. Le cycle démarre avec des charges comprises entre 60 et 70% de la RM répétées
8 fois au cours de 2 ou 3 séries avec 3 minutes de récupération et se termine avec des charges
supérieures à 80% de la RM répétées 3 à 5 fois au cours de 2 ou 3 séries avec 5 minutes de
récupération. Au cours de la séance, les exercices sont globaux puis analytiques. L’ensemble
des exercices précités peuvent être réalisés lors de ce cycle, en insistant bien sûr sur les
exercices sollicitant les grands pectoraux, les grands dorsaux, les triceps brachiaux ainsi que
le dentelé antérieur. Cependant les autres exercices ne doivent pas être délaissés toujours dans
l’objectif de ne pas créer de déséquilibres et ainsi de protéger les épaules. L’exercice à la
presse à bras peut être abandonné dès que le patient est capable de soulever le poids de son
corps. Il est à ce moment remplacé par des séries de push-up sur table en appui sur des cales
avec une progression de la hauteur de celles-ci et comprend un temps concentrique, un temps
isométrique puis un temps excentrique (Gain & Coll., 2003b).
A la fin du programme de 12 semaines, l’objectif est que le patient garde ses acquis
(voire qu’il continue à les développer) afin de conserver son niveau d’autonomie. Un relai
avec un éducateur sportif APA peut être effectué afin de réaliser des activités adaptées telles
que le basket-fauteuil ou encore le hand-bike. Au cours de ces activités les qualités
musculaires du patient seront entretenues. En guise d’entretien, le patient peut conserver une
séance de musculation par semaine à domicile avec des élastiques ou en salle spécialisée en
utilisant des appareils et haltères. Les activités quotidiennes participent également au maintien
des acquis.
29
V. Discussion
Le renforcement musculaire chez le patient paraplégique n’est que peu traité dans la
littérature, hormis si l’on s’intéresse au renforcement sous-lésionnel lors de lésions
incomplètes. Aucun article n’a été retrouvé proposant des exercices de renforcement
musculaire variés à proposer aux patients paraplégiques ni même ne citant précisément les
muscles à renforcer si ce n’est le grand dorsal et les triceps brachiaux. Cet obstacle a pu être
contourné par la lecture d’articles rapportant des études ayant analysé les muscles de l’épaule
mis en jeu lors des activités de propulsion et de transfert chez les patients paraplégiques. A
partir de ces études, il a été possible de dégager les muscles les plus sollicités et donc à
renforcer.
Cependant ces études présentent quelques limites. Tout d’abord elles n’ont été à
chaque fois que sur peu de sujets ce qui fait poser question sur la fiabilité de leurs résultats.
Toutefois, les résultats similaires de l’ensemble de ces auteurs suggèrent une certaine fiabilité.
Ensuite, certains muscles de l’épaule ne sont pas analysés au cours de ces études
(grand rond, petit rond…), il est donc impossible de savoir à quel point ceux-ci peuvent être
sollicités. Ces muscles ayant des actions réalisées également par d’autres muscles qui ont été
étudiés, on peut supposer que leur activation est similaire. Dans tous les cas, ils sont de toute
façon renforcés lors du programme proposé justement car leurs actions sont similaires à
d’autres muscles renforcés et car les déséquilibres doivent être évités.
Le programme de renforcement proposé se veut optimal, cependant il ne l’est pas. Il se
concentre uniquement sur les muscles de l’épaule car la littérature retrouvée n’étudiait que ces
muscles-là. Les muscles des avant-bras et des poignets sont également sollicités lors de la
propulsion et des transferts. Les poignets nécessitent entre autre une bonne stabilité. Aucune
littérature n’ayant été retrouvée sur ce point-là, ces exercices n’ont pas été évoqués.
Enfin ce travail s’intéressant aux membres supérieurs, le renforcement du tronc
(abdominaux, spinaux) n’a pas été évoqué. Il est évident qu’un des principaux objectifs de
renforcement chez le patient paraplégique se situe au niveau du tronc, avant même de
démarrer l’athlétisation des membres supérieurs puisqu’un tronc stable lors des exercices de
renforcement des épaules est essentiel. Généralement, ce renforcement est bien pris en charge
en rééducation car l’acquisition d’un bon équilibre assis fait partie d’un des objectifs majeurs
de la rééducation du paraplégique et que l’équilibre assis dépend de la musculature du tronc.
Le renforcement des membres supérieurs est parfois moins développé lors de la rééducation
car s’il est impossible de ne pas s’apercevoir que l’équilibre assis n’est pas acquis, il est
30
beaucoup plus délicat de déceler un manque d’endurance chez un patient. Or ce manque
d’endurance va limiter les déplacements extérieurs et donc réduire l’autonomie.
Le programme ici proposé doit également être modulé en fonction de l’entraînement
antérieur du patient, c’est-à-dire avant sa paraplégie. S’il s’avère indispensable chez un
patient auparavant sédentaire, il peut sûrement être réduit chez un patient très sportif ayant
déjà toutes les qualités musculaires requises. De la même manière, chez un patient
relativement sportif ou ayant l’habitude de pratiquer de la musculation, les différents cycles
peuvent être attaqués de manière plus intensive avec des charges plus importantes.
VI. Conclusion
Ce travail cherchait à déterminer selon quelles modalités le renforcement musculaire
doit être appliqué aux membres supérieurs du patient paraplégique. En effet, le renforcement
musculaire peut répondre à différents objectifs. Selon ceux-ci, ses modalités diffèrent. Le
kinésithérapeute doit être capable d’appliquer ces modalités lors des séances avec ses patients
afin d’être efficient.
Concernant le patient paraplégique, un renforcement des membres supérieurs suite à la
lésion médullaire est indispensable dans la majorité des cas compte tenu des modifications
d’utilisation des membres supérieurs engendrées par la vie au fauteuil, dans l’objectif de lui
offrir une bonne qualité de vie. L’analyse des activités de propulsion et de transferts a montré
une sollicitation importante de l’ensemble des muscles de l’épaule, ce qui implique un
renforcement nécessaire de ces muscles afin de les préparer à ces sollicitations.
Les muscles des membres supérieurs doivent être entraînés en endurance afin de
développer leur capacité de résistance à des sollicitations prolongées lors de la propulsion du
fauteuil roulant sur de longues distances. Afin de permettre au sujet de réaliser efficacement
ses transferts, les muscles des membres supérieurs et notamment les grands dorsaux, grands
pectoraux et triceps brachiaux doivent être entraînés en explosivité et en force.
Ce travail propose un programme de renforcement musculaire de 12 semaines divisé
en 3 cycles de 4 semaines où chaque objectif est travaillé séparément. Des exercices de
renforcement sont proposés pour chaque cycle.
Ce programme n’a malheureusement pas pu être mis en pratique sur un patient
paraplégique. Il serait intéressant à l’avenir de le faire afin de tester son efficacité et
éventuellement d’y apporter les modifications nécessaires.
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Annexes
Annexe 1 : Correspondance de résistance des bandes élastiques selon l’étirement et la couleur
Annexe 2 : Index de Barthel
Annexe 3 : Mesure d’indépendance fonctionnelle (MIF)
Annexe 4 : Spinal Cord Independence Measure (SCIM III)
Annexe 5 : Développé couché ou Bench Press
Annexe 6 : Pull-Over à la barre
Annexe 7 : Pull-Over sur appareil
Annexe 8 : Biceps Brachial (haltère)
Annexe 9 : Biceps Brachial (élastique)
Annexe 10 : Triceps Brachial (élastique)
Annexe 11 : Triceps Brachial en décubitus
Annexe 12 : Triceps Brachial en procubitus
Annexe 13 : Deltoïde antérieur (haltères)
Annexe 14 : Deltoïde antérieur (élastique)
Annexe 15 : Deltoïde postérieur (haltère)
Annexe 16 : Deltoïde postérieur (élastique)
Annexe 17 : Dentelé antérieur (élastique)
Annexe 18: Travail en abduction (haltère)
Annexe 19 : Travail en abduction (élastique)
Annexe 20 : Travail en adduction horizontale (haltère)
Annexe 21 : Travail en adduction horizontale (appareil butterfly)
Annexe 22 : Travail en adduction (élastique)
Annexe 23 : Travail des rotateurs latéraux en position R1 (élastique)
Annexe 24 : Travail des rotateurs latéraux en position R2 (haltère)
Annexe 25 : Travail des rotateurs médiaux en position R1 (élastique)
Annexe 26 : Travail des dépresseurs
Annexe 1 : Correspondance de résistance des bandes élastiques selon l’étirement et la couleur
(http://www.thera-band.com)
Annexe 2 : Index de Barthel (http://www.cofemer.fr/UserFiles/File/Barthel2.pdf)
Annexe 3 : Mesure d’indépendance fonctionnelle (MIF)
(http://www.cofemer.fr/UserFiles/File/ECH.1.9.1.MIF.pdf)
Annexe 4 : Spinal Cord Independence Measure (SCIM III)
(http://www.cofemer.fr/UserFiles/File/001_ECHELLES%20ADULTES%20TOME%202_page176SCIM%20III.pdf)
Annexe 5 : Développé couché ou Bench Press
Annexe 6 : Pull-Over à la barre Annexe 7 : Pull-Over sur appareil
(entraînement-sportif.fr)
Annexe 8 : Biceps Brachial (haltère) Annexe 9 : Biceps Brachial (élastique)
Annexe 10 : Triceps Brachial (élastique) Annexe 11 : Triceps Brachial en décubitus
Annexe 12 : Triceps Brachial en procubitus
Annexe 13 : Deltoïde antérieur (haltères) Annexe 14 : Deltoïde antérieur (élastique)
(limité à 90° de flexion)
Annexe 15 : Deltoïde postérieur (haltère) Annexe 16 : Deltoïde postérieur (élastique)
Annexe 17 : Dentelé antérieur (élastique)
Annexe 18: Travail en abduction (haltère) Annexe 19 : Travail en abduction (élastique)
Annexe 20 : Travail en adduction Annexe 21 : Travail en adduction horizontale
horizontale (haltère) (appareil butterfly) (entraînement-sportif.fr)
Annexe 22 : Travail en adduction (élastique)
Annexe 23 : Travail des rotateurs latéraux Annexe 24 : Travail des rotateurs latéraux
en position R1 (élastique) en position R2 (haltère)
Annexe 25 : Travail des rotateurs médiaux en position R1 (élastique)
Annexe 26 : Travail des dépresseurs (idem presse à bras)
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