Matthieu Miegeville
L’Enfant duSilence
L’enfant du silence
Matthieu Miegeville
L’Enfant duSilence
@ Matthieu Miegeville, 2014
J’ai sept ans. Les enfants me regardent. Quelques adultes aussi. Ils attendent ma réponse. Je ne sais pas quoi dire. La vérité ? Elle me fait honte. Et ils ne la comprendraient pas. On me jugerait peut-être. On me raillerait sûrement. La nature, aussi sociale soit elle, laisse peu de places aux faibles. Car je l’étais. Je me voyais ainsi, et me comportais comme tel. On me confortait dans cette position. Je me confortais dans celle-ci. J’avais peur. Je ne comprenais rien. J’étais dépendant. À tout. À l’amour. Aux autres. À la chaleur d’une peau que je ne touchais pas. Il me fallait mentir. Mais je ne savais pas encore manier les mots et la vérité. C’est alors que le silence s’est imposé à moi. Comme un ami. Comme la seule issue de secours d’une malaise social. Un sentiment d’être autre.
Les enfants riaient et j’étais seul le soir. Les enfants marchaient et j’avais peur qu’on tombe. Les enfants hurlaient et je fermais les yeux. Comme pour disparaître, et éviter d’être leur cible. Dans ce banal constat, les mots sont venus pallier au vide. Tel un miroir à qui l’on parle, faute de meilleur ami. Les mots donnaient la distance. Ils faisaient la normalité. Ils donnaient le change. Ils étaient épanouissement. Ils étaient humour. Ils étaient rêves. Ils étaient séduction. Ils étaient une porte. Entre moi et le monde, faute de parler plus simplement.
Préface
Léa Ragueneau
Quand la musique vint à moi, elle trouva un client. Je suis de ceux qui rêvaient d’abord à être un groupe de rock avant de rêver à faire de la musique. Mon utopie me faisait sauter la case apprentissage. Je compris dès la première seconde où je fus sur scène l’exutoire cathartique qu’allait être la musique pour moi. Je le compris pourtant en faisant preuve lors de ce concert d’une médiocrité abyssale, qui côtoyait dans ses profondeurs les records de Jacques Mayol. Mais l’important n’était pas là. La musique, son écriture, et son expression concrète, allaient être la voie de la sortie d’un silence.
Je n’éprouve aucune gloire à cela. Je suis loin d’estimer que mon chemin est fini. J’en suis à peine à me penser que je suis déjà sur un chemin. Mon parcours singulier m’a amené des avantages et des inconvénients. Je suis persuadé d’être au final tout sauf une exception. Cela me rassure peut-être.
Mon rêve de tout temps était d’être comme tout le monde. Au bout de trente-cinq ans, j’ai réussi le pari de ne jamais vraiment l’être.
Nicolas Fleuré
Je dédie ce livre à ma femme, Nina. Mon plus grand soutien et ma plus grande source de foi en l’humanité. Puisse l’avenir et l’amour nous guider loin. Ensemble.
Je remercie ceux qui m’ont toujours poussé à écrire. Mes amis. Ceux qui m’ont toujours soutenu et compris sans dénigrement ni violence. Ma famille. De la manière la plus entière. Je repense à ma professeur d’allemand au collège, Mme Bassil, qui répondait à qui voulait absolument m’envoyer dans des études scientifiques : « Matthieu n’est pas un scientifique… allons. Il faut qu’il puisse écrire. » Vous le saviez avant moi. Merci.
Je remercie aussi ceux dont la défiance m’a poussé à continuer vaille que vaille. Je repense à cette professeur de musique me disant : « Au moins une chose est sûre avec toi, tu ne feras rien dans la musique ». Je citerai Michel Cloup pour répondre à ceux-là : « Recycler cette colère. Car aujourd’hui comme hier, cette colère reste mon meilleur carburant. » Je remercie ceux qui ont œuvré pour ce livre : Léa Ragueneau, Florent Guth, et les enfants du silence de Terre Neuve Collective (Andy Richards, Léa Costantino, Vincent Lasserre, Matteo Ferraro, Yohan Hennequin, Bernard Cabarrou, Brice Sansonetto) ainsi que les Jeudis du Rock (Christophe Rymland et Charles Féraud).
À mon fils. À nous, à toi, de ne pas être un enfant du silence.
« Les enfants commencent par aimer leurs parents ; devenus grands ils les jugent, et quelquefois ils leur pardonnent. » Oscar Wilde
crédits
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chaPitre i
L’enfant seuL
Lys Anamorphose
Suspendu au destin comme à cent mille cordes Refaire dans sa tête les chemins de traverse Parcourus les pieds nus, sous la grêle et l’averse Entendre au fond de soi l’orchestre qui s’accorde
Courir à petit feu sous la neige et le temps Attendre jour et nuit les soleils de novembre Dompter cent vingt chevaux, et faire qu’ils se cambrent Quand on leur dit l’amour, quand on leur dit le sang
Au milieu des forêts, grandes, sombres, humides Effrayer l’innocent, le sourd à perdre haleine Intriguer les enfants qu’intrigue cette peine Se voir en noir et blanc, avec cent mille rides
Les nez rouges se cachent, ils saignent du sang blanc À trop se voir en éclats, on n’entend pas les rires À vivre dans les lois, on oublie les désirs On voit en quelques pleurs que c’est long cent vingt ans
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Cent Mille Cent Vingt
Je suis la terre neuve Je suis une terre si longue Je marchais, je marchais Je n’arrivais jamais
Je suis ceux qu’on abreuve Et je tirais la langue Je marchais, je marchais Je n’arrivais jamais
Je suis en terrain connu J’ai marché là mille ans Je recherchais des voiles Pour me pousser au vent
Mais elles poussent en terre inconnue Elles me poussaient vers la défaite Mille fois, j’ai relevé la tête Mis de moi, dans cette terre nue
Encore, encore
Je suis la terre neuve Je suis une terre si longue Je marchais, je marchais Je n’arrivais jamais
Je suis la terre neuve Je suis une terre si longue Je marchais, je marchais Je n’arrivais jamais
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Chapitre I L’enfant seuL
Je marchais, je marchais
Éradiqué le grand mouvement des plaques Effrayé par les grandes portes qui claquent Irascible
Reformulés les abracadabras Formaté le cerveau de haut en bas Invincible
Personnifié l’illusion salvatrice Perdues les utopies dévastatrices Indicibles
Déchirés les habits des vieilles guerres Décorées les vestes de mille fers Intangible
Falsifiés les beaux papiers de l’esprit Faussaires ternis, les briseurs d’ennui Impossible
Rémanents les combats pourtant vaincus Prémisses effleurées d’un crayon nu
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Colère nue
La musique pleure. En somme C’est mon âme qui s’écoule Comme un cri dans la foule La tristesse d’un seul homme
Le brouillard tombe. Au fond C’est la vue qui se brouille De la neige que l’on souille Et craquelle sans un son
La colline sombre. Au mieux C’est l’océan qui mange De la terre qui dérange Ou c’est la fin des cieux
L’écorce saigne. À force C’est la sève qui fatigue Comme si lâchait la digue Ne plus bomber le torse.
AGORA FIDELIO – Une Histoire de Chair
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Chapitre I L’enfant seuL
L’écorce saigne
Léa Ragueneau
Tu sais, des fois, j’aimerais être autre chose que moi Autre chose qu’un homme Perdu sur une route sans marquage au sol Sans rien qui ne détourne de son but en somme
Les morceaux sont là, comme des pièces de soi Étendus sur la voie, comme une autre icône, Déchu de ses croyances, tombé d’une tour immense, Où la gravité n’existait même plus comme loi
Tu sais des fois, j’aimerais être ce à quoi je rêvais L’être en or, celui qui mène la bataille, celui qui sait où vont les âmes, Celui qui vise la pomme et pas la tête, Qui vise les hommes et pas les femmes,
L’être qui tient toujours la barre, même en tourment dans la tempête, qui ne plie pas, qui ne rompt pas, J’aimerais pouvoir dire que cet être c’est moi
Crawling in the roses Howling in the row (you know, sometimes…)
Tu sais des fois, j’aimerais dire que tout va toujours bien, Tout comme hier, tout comme le jour d’après, Tout comme demain, comme aujourd’hui Celui qui pleure, celui qui rit, celui auquel on se tient
Celui qui tient, le coup, comme le bon bout, Comme celui qui se retient, celui vers qui l’on vient, Qui sait le sens des choses, qui connaît la musique, Celui qui n’a peur de rien, même pas des fins tragiques
Tu sais des fois, j’aimerais pouvoir mettre en garde Ceux tombés sous les armes, qui me tuaient parfois, Quand on tombait sous le charme, sous les flèches des rois, Et surtout de leurs reines. Oh mon Dieu, qu’il me tarde
Mais putain, quelle histoire. Dire qu’on vit tous la même J’aimerais être mieux, j’aimerais dire je t’aime Être fier, Être calme, être bien, une fois Je le serai peut-être, je le jure, je le veux.
I wish I was
AGORA FIDELIO - Les Illusions d’une Route - Barcelone
GPS (Grande Peur Solitaire)
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L’enfant seuL
Des mains creusent la terre sur le flanc des volcans Si la roche est friable, il y a de l’espoir Mais les ongles s’écorchent sur de la roche noire, On ne creuse la pierre que quand on a vingt ans
Des cohortes salies remontent les chemins Tracés comme des spirales au flanc de la montagne Ils ne voient plus leur nombre car la poussière éloigne La foi de ceux qui croient, de Rome les Romains
Et les cailloux dévalent, et emportent avec eux Leur flot de sang-mêlé, que les enfants répandent Sur leurs corps, sur leurs pères, sur les rêves qu’ils vendent À ceux qui ont perdu le goût de vivre à deux
Des grands hommes attendent que leur soit apportée La rançon de la gloire sur un plateau terni Ils attendent des autres que soit enfin finie La vie qu’ils achetèrent au facteur chaque année
Des mains creusent la terre sur le flanc des volcans Des doigts pétris de soufre ont ouvert des fissures Des yeux pleins de poussière cherchent la route sûre On ne creuse la pierre que quand on a vingt ans
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De la terre sous les ongles
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Chapitre I L’enfant seuL
Recommencent les sommes impaires Et les heures indues au devenir funeste Recommencent tous les faux-semblants manifestes Et tout le temps perdu en affaires
Apparaissent les nouveaux incompris Et les mots trop appris que l’on a oubliés Apparaissent les faits qu’on ne juge que sur pied Et toute l’agression d’un mépris
Remodèlent, tous les faux-semblants Les schémas que personne même au fond n’imagine Remodèlent, tous les trafiquants de bonne mine Les images que tout le monde attend
Avilissent, les déviants sous contrôle À des comportements que la foule acclame Avilissent, les mendiants de grande flamme À des sons que les sages immolent
Les nouveaux schémas
This could be life for everyone A life from sea to shore From less to more
I walk away I walk with a bag in hand Forward to bury the past
At last can I be what you are ? At least can I see what you saw ? You’ll be the last one to dance with me
This could be a knife A weapon of choice A fight without a war With me alone
At last can I be what you are ? At least can I see what you saw ? You’ll be the last one to dance with me
This could be a life
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This could be a life
TERRE NEUVE Collective – The Child from silence
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Chapitre I L’enfant seuL
Je construis sur la mer Des anges rentrent dans nos vies C´est l´acier qui les gèle Dans nos tripes Le ventre a besoin d´air Des anges rentrent dans nos vies C´est la science qui me gène Dans nos tripes
Dans nos esprits se décrochent L´envie d´ici, l´envie d´ailleurs De voir son double enfin Sourire à qui le rend meilleur Nos esprits font la belle À celle qui danse au premier plan La vue se brouille encore Devant le moindre changement
M´entends-tu ? Je parle quand tu n´entends pas Je te parlerai encore Car maintenant
Je construis sur la mer Des anges rentrent dans nos vies C´est l´acier qui les gèle Dans nos tripes Le ventre a besoin d´air Des anges rentrent dans nos vies C´est la science qui me gène Dans nos tripes
PSYKUP – L’Ombre et la Proie
Polder
À terre ! Des anges rentrent dans nos vies… Laisse les entrer là
À pousser le vice Je ne pense qu´au mien Je ne pense qu´aux femmes Je ne pense qu´aux liens Je ne pense qu´aux dames Je ne pense qu´à moi Je ne pense qu´à moi Je ne pense qu´à moi Mais j´y pense
Les anges sont rentrés dans nos vies, aux suivants…
Bien au chaud Dans ma terre Bien au fond Dans ma tête
Un polder Seule issue : construire sur l´eau La seule
Avoir Ne pas être Se mentir longtemps Autant se perdre
Se croire Des apôtres Se promettre souvent Autant se taire
Se voir En albâtre Se briser pourtant Autant se rendre
Et boire Tous ces litres S’y noyer dedans Qui pour comprendre
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Le Silence et l’alcool
L’enfant seuL
Séverine Godissart
Elle lui manque tellement La rage d’aujourd’hui Crachée sur autrui Maintenant
Il lui en veut tellement Qu’elle lui réponde Sa fadeur féconde Le sang
Il en lâche tellement De haine à leur trousse Que ces armes le poussent À cran
Il s’en veut tellement De tuer le monde Que les morts le grondent À blanc
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À Blanc
Un idéal de vie comme un tableau de maître J’ai rêvé si souvent de repeindre l’espace Mais je dessinais mal et voyais à ma place Une étendue trop blanche où se cognaient des lettres
Le chevalet posté comme un train qu’on attend Comme des pinceaux figés de peur qu’on le salisse Je joue l’adulte sauvage après l’enfance lisse J’écris pour tuer le vide jusqu’à la fin des temps
AGORA FIDELIO – Le Troisième Choix
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Chapitre I L’enfant seuL
Le Tableau de maître
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chaPitre ii
L’enfant couché
Lys Anamorphose
Les jambes, elles étaient fines, elles étaient longues, elles étaient fortes Telles à de la morphine, je m’injectais des corps immenses Le désir était lune, il criait comme on porte offense Aux dames, une par une, qui me submergeaient par cohortes
Les peaux, elles étaient sueur, elles étaient sexe, elles étaient sales Rougies par le labeur, rougies à force qu’elles s’entrechoquent Les marques étaient des mains, jusqu’à ce que les matins s’en moquent La mire était leurs seins, jusqu’à ce que je me sente mal
Au creux de leur plissure, le chant des loups qui m’enivrait Était un chant de louves, qui finissait par être vrai Quand l’explosion qui couve, finissait par des cris sauvages La tête contre les murs, je criais pour tourner la page
Et des corps emmêlés, il ne restait que les vapeurs Les marques indélébiles, au goût de sang, au goût de peur Leurs frissons si fragiles s’évaporaient dans les blessures D’alcool et d’eau salée, j’étais sali dans mon armure
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Les Corps emmêlés
Toi qui erres dans les vagues Dis-moi comment Le tourbillon des sens Dis-moi comment Les années dans le doute Dis-moi combien Vouloir être l’amant Dis-moi pourquoi
Toi qui viens dans mes draps Dis-moi comment Mes souvenirs divaguent Dis-moi comment L’étreinte à court d’essence Dis-moi combien Des cadavres sur ma route Dis-moi pourquoi
Toi qui brûles sous ma main Dis moi comment Les frissons sans la danse Dis moi comment Des signes de la croix Dis moi combien Être seul contre toutes Dis moi pourquoi
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Chapitre II L’enfant CouChé
Dis-moi comment
Elle se comporte comme un chien La chienne Tu voulais qu’elle te dise « viens » La chienne Le sang coule pour que rien Ne vienne En devenir le sien La chienne
Le nez dans le goudron La chienne Contempler des géants La chienne Elle a léché des doigts La chienne Elle n’a jamais séché Les tiennes
Car les chiens baisent les chiennes
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La Chienne
Une histoire de chair Qui commence au fond De caniveaux saouls Où tout se confond L’ombre et la lumière L’envie, le dégoût
Une histoire de peaux Trop endolories Cherchant un éden Dans des coloris, Méduse, de radeaux Le deuil en ébène
Une histoire d’odeurs Mal attentionnées Desseins malhabiles Les corps, les pensées Se mélangent en chœur Comme l’eau avec l’huile
Une histoire de rien Qui creuse l’estomac La honte au miroir Nausée et gravats Tes cheveux et tes seins Histoire sans histoire
AGORA FIDELIO – Une Histoire de Chair
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Chapitre II L’enfant CouChé
Le dégoût
Elle est tombée La honte suprême Du haut des cieux Des mines blêmes Vouloir plonger À mille lieues
Elle vomit La honte infâme Des troubles eaux Du corps des femmes Se voir enfoui Sous mille maux
Elle dérange La honte suave De ces pulsions Que l’oubli lave Marée étrange Des émotions
Elle déchire La honte lourde Des cris de peine D’oreilles sourdes Vouloir sentir Sur soi la haine
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Verres Opaques
La peau claire et l’ambre satiné Quelques verres de chaleur alanguie Un hiver de coupable apathie Des faux airs d’hispaniques étés
L’esprit vole et la tête est sereine Assurée et consciente au milieu Des effluves enivrant peu à peu Le corps se vide, la mémoire est pleine
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Chapitre II L’enfant CouChé
Les Vases communicants
Heureusement qu’il y a l’oubli Que les jours passent, et que l’eau coule Sous ces ponts que j’ai bâtis Sur les rives de deux guerres C’est mon passé que je détruis À chaque seconde, chaque heure qui roule Bien enterré dans ma nuit Dire adieu à ce faux frère Ma délivrance, que je t’envie Toi tu t’éloignes quand je me saoule Ces cadavres mis à l’abri La souffrance que l’on déterre Un jour se réveiller en vie Être à sa place dans la foule Respecter ce qui est écrit Dire adieu à mon enfer
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Heureusement qu’il y a l’oubli
Quand tu danses Tu te signes et sur ton corps Je dessine Le remords, l’empire des sens
Jusqu’à ta peau je serre Je ne l’avais vu si blanche Jusqu’à ta peau je serre
Je désire Que l’envie vienne en lieu sûr Je suis sûr De te dire des lignes de vie
À la ligne À l’envie À l’instar de ta bonne étoile
Jusqu’à ta peau je serre Je ne l’avais vu si blanche Jusqu’à ta peau je serre Je l’avais vu m’attendre
Jusqu’à ta peau je serre Je ne l’avais vu si blanche
Quand sur moi tu dors Quand sur moi tu te confonds Faire de nous un corps Seul et prêt à prendre des coups
Jusqu’à ta peau je serre Je ne l’avais vu si blanche Jusqu’à ta peau je serre Je l’avais vu m’attendre
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Chapitre II L’enfant CouChé
Si blanche
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chaPitre iii
L’enfant et L’âme sœur
Séverine Godissart
Speak to me Tell me all is not well Tell me you heard This strange sound
Speak to me Tell me all is not well Tell me all the things Kids never dare to tell
Tell me There’s nobody Under our bed
I still believe in this story With the black wolf killing for glory Hydras, witches, and monsters And ghosts haunting memories
Speak to me Tell me we ain’t no good Tell me we smile on that picture Cause I don’t
Speak to me Tell me all is not well Tell me all the things Kids never dare to tell
Tell me There’s nobody Under our bed
I still believe in this story With the children loving their parents The garden, the house, the dog and the priest And ghosts haunting memories
Tell me all the dead people never come back to life Cause I think I don’t want to
Speak to me before I speak to God
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Speak to me
Tu la vois là, la belle histoire Elle te regarde, elle te regarde Elle s’écrit là, sous d’autres doigts Tu la regardes, en blanc et noir
Le texte est beau, la belle est chienne Elle te regarde, elle te regarde Elle s’allonge là, sous d’autres doigts Tu t’allonges là, elle se fait tienne
Le livre est chaud, la chaleur monte Elle te regarde, elle te regarde Elle monte là, sous d’autres doigts Elle te regarde, elle est la honte
Tu la sens loin, la belle histoire Elle regardait, elle regardait Tu as eu la chance du scénario L’air du matin, l’ivresse du soir
MY OWN PRIVATE ALASKA – A Red Square Sun
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Chapitre III L’enfant et L’âme sœur
Elle te regarde
On avait pas de sentiments On était pas là pour l’argent On se touchait dehors dedans Et pourtant
Les bras, les jambes glissaient encore Dans des draps blancs qui sentaient fort La déraison, l’envie, la mort Et alors
Ça fait plusieurs fois qu’on essaye C’est pareil Séparons-nous tranquillement
Les langues, les têtes, les yeux tournaient Dans tous les sens. On se croyait Sur un manège à censurer Et après
Je ne trouvais pas le sommeil Les peaux étaient froides au réveil Ça fait plusieurs fois qu’on essaye C’est pareil
Séparons-nous tranquillement
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De beaux draps
Qu’il est bon d’être seul Quand on est seul à tes côtés Les ambiances fiévreuses Me font encore trop divaguer Après tout, qu’est-ce qu’ils veulent Voir en un jour tout bien finir Se purger par la gueuse Ne plus penser et repartir
Remontant le courant Pour sentir son corps se reprendre La bouche en permanence Emplie d’une douce saveur de cendres Pour soi, avoir le temps De contempler tout son naufrage Et revoir la surface Des profondeurs où nul ne nage
Lesté de sacs de pierres Qu’on aimerait voir s’envoler Images oniriques De vingt mille cieux remplis d’objets Lâches par qui les lâchent Afin de lever les regards Baissés par ceux que fâchent Les trop lointaines lueurs d’espoirs
AGORA FIDELIO – Une Histoire de Chair
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Chapitre III L’enfant et L’âme sœur
En un jour
Du très profond de l’abîme Là où le soleil cesse Perdues sont les caresses Les souvenirs des cimes
Sous un ciel radieux Pointe le souvenir Éclaircies pince-sans-rires Du goût de vivre à deux
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Chapitre III
Le Souvenir de soi
Heston Benstead
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Il scrute l’horizon pour y voir des noyés Elle scrute son mari qui en scrute tant d’autres Ils regardent la mer pour toucher le parfait Là-bas le bateau l’emmène
Elle regarde son fils comme les années qui passent Il regarde son ventre sans regarder ses pieds Ils sont nus sans armures et s’ignorent de guerre lasse Là-bas le bateau l’emmène
Et chaque grain de sable, chaque grain est compté Encore un grain de plus sans que la vie ne change Les grains ont fait des dunes, et les rêves des regrets Là-bas le bateau l’emmène
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Chapitre III L’enfant et L’âme sœur
Là-Bas le bateau l’emmène
À t’entendre Il n’y a jamais eu personne en tort Arrêtés Sous les feux Enlacés
En cinq ans On a jamais bu à l’eau qui dort Des lampées Comme des feux Avalés
Se méprendre Il n’y a jamais eu personne en tort Arrêtés Sous les feux Se lâcher
En cent ans On a jamais bu à l’eau qui dort Des lampées Comme des feux Avalés
L’eau qui dort
AGORA FIDELIO – Altitude Zéro
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Mourir En faire juste une étape Comme un désir ancien de fuir les larmes En finir Pour le bien de quelqu’un Courir Pour éviter les armes
Sentir Tout le poids que l’on lâche Comme le meilleur moment de fuir ses instincts Rêver à S’en aller sans fièvres Comme un avant, comme un après Dans le même calme
Idée Croire à la vie sans l’autre Comme au surnaturel, comme aux guerres sans morts Pousser le vice Du fond du cœur Sans gangrène S’amputer soi-même
D’une vie à l’autre Essayer d’en partir D’une vie à l’autre Essayer d’y aller D’une vie à l’autre Essayer, revenir D’une vie à l’autre Essayer d’essayer
AGORA FIDELIO – Le Troisième choix
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Chapitre III L’enfant et L’âme sœur
Mourir
Leste Coupable Paroles Défendues
Geste Capable Symboles Attendus
Reste Comptable Envols Prétendus
Envols Prétendus
Je ne pensais pas Avoir besoin d’autre que moi Pour me faire du mal Comme un grand Je dessinais L’enfer À ma fenêtre
Chaque choix Chaque nouvelle Comme une ironie Laissait du sang Toutes les pièces D’un jeu d’enfant Tombaient Au fond de moi
Une à une
Puis te voilà J’aurai cru voir le ciel Ave maria Je te saluais si bas Mais tu as su montrer Le pire en toi Tu es la peste Tu es le choléra
Et il faudra M’arracher la mémoire Comme on arrache des dents Comme ton sourire Dieu jugera les siennes Si seulement il existait Alors je t’oublierai Et avant, j’arracherai les tiennes
Une à une
AGORA FIDELIO – Le Troisième Choix
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Chapitre III
Ma violence
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Je pourrais comme d’autres, vomir des états d’âmes Cracher le fiel des anges
Je pourrais comme ta colère éclater sur des portes closes À faire tomber les murs
Ad vitam aeternam
Tu pourrais comme d’autres rester en la demeure d’obscurs faiseurs de sorts Les parents de ta sœur
Tu pourrais comme avant user la corde raide Revoir la vie en rouge Sans trouver de remède
Ad vitam aeternam
On pourrait pour longtemps recommencer la ronde des onomatopées Que le silence féconde
On pourrait pour autant dire que c’est tout juste si les mots refleurissent Se relèvent les bustes
Revoir la vie en rouge Sans trouver les fruits
Comme d’autres
L’enfant et L’âme sœur
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chaPitre iV
L’enfant et ses Pairs
Séverine Pech
Il est triste le temps De poésie magique Pathétiques amants Aux mines sympathiques Recroquevillés d’orgueil Tournés vers la spirale Vie pour vie, œil pour œil Pacifique général
Il est triste l’instant Quand l’assurance devient La pitié, méritant D’autistes lendemains Scorpions aux creux des flammes Des feux de cheminées, La nostalgie des femmes Qui jadis, rayonnaient
Que c’est triste aujourd’hui De voir chaque piédestal Des statues des amis Se faire autant de mal
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L’Amour des ordres
Ton enfance Elle te mène tant La poursuite C’est le jeu du vent
Tu as bien su l’enjamber Avec l’aide du temps Elle a voulu t’attraper L’avenir t’attend
Il n’y aura pas deux soleils Pour vous deux Pas assez de dents qui brillent Qui brillent aux cieux Il n’y aura pas de sourires Pour l’un d’eux Pas assez, tu en veux mille Tu n’auras pas mieux
Son enfance Elle la cherche encore Elle s’oublie C’est le jeu du temps
Il n’y aura pas deux soleils Pour vous deux Pas assez de dents qui brillent Qui brillent aux cieux Il n’y aura pas de sourires Pour l’un d’eux Pas assez, tu en veux mille Tu n’auras pas mieux
Il n’y aura pas deux soleils Pour vous deux Quand les sentiments débordent La rivière
Pour vous deux La rivière
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Chapitre IV L’enfant et ses pairs
Deux soleils
Blue The color was for you Despite none of your eyes being blue Just like the ocean When it’s Green Full of gasoline I saw you grin at me Your smiles I can’t believe in Understand The dress was
White It needed to be white And I hope you understand why I needed sex and alcohol Cause when I fell I fell in a Black. A big black inner hole, I didn’t even see the sides, The light in the end was so far, And it was,
Red All is red now The sky is red, the water is red, All is red now The grass is red, the stone is red, the sand is red All is red now My hands are red, my feet are red, my hair is read, my eyes are red All is red now
Yellow Sweet and dangerous yellow Did I wear the color of shame ? Could I just swallow all this rain ? Purple Was the rain. And what’s the purpose of this lane ? Will I be insane again ? And find our home
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Red
You’re so small You’re so precious And you don’t know what to say
There’s a wall Something precious And you don’t know how to climb
But this is how it will be This is how you’ll get undressed Without a view Unless you love each other
This is how you’ll meet This is how you’ll get undressed Unless it’s true A truth unlike the others
Talk to her Words will come out And take her hands Arms will follow
This is how it will be This is how you’ll get undressed Without a view Unless you love each other
TERRE NEUVE – This is how you’ll get undressed MY OWN PRIVATE ALASKA – The Red Sessions
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Chapitre IV L’enfant et ses pairs
Get Undressed
Empty ? Empty like my brain Empty cause I’m the idiot of this train Idiocy is my pride, cause I forgive I forgive the unforgiven I give more than I get And with a single black pen I paint in color, I paint in red
Now, we are travelling inside, out of our minds Now, we are travelling, so far away from home
The dress was white, It needed to be white
Va-t’en mourir Vers d’autres pays D’autres cieux La mort sera plus belle
Puisses-tu nourrir De nouveaux défis D’autres dieux Des idées à la pelle
Va-t’en marcher Vers d’autres nations Des langages Incompris de tes pères
Sans corriger Sans mises en question Du visage L’ombre sera telle quelle
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L’Ombre du visage
Live on
Remember what we’re made of Remember where we came from
Through every rainbow I’ll see you rise And don’t you dare Touch my hair if you need To relieve the weight Of this mother fuckin’ guilt
It’s so hard to sleep at night It’s so hard to wake up every day
Through every rainbow I’ll see you rise And don’t you dare kiss my face I will find a solution Live on Cause I need it
Pray the lord my soul to keep In order to survive In order just to breathe
This is all I can say This is all I can save Your fuckin’ memory Cause it’ll never be the same
Amen.
MY OWN PRIVATE ALASKA - Amen
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Chapitre IV L’enfant et ses pairs
Amen
Je l’aurai ma vengeance Sur toi et d’autres Oui je l’aurai
La vengeance n’est jamais Vraiment la nôtre Oui je le sais
Je veux te voir souffrir Comme je souffrais Oui je le veux
La souffrance ne soigne Jamais les plaies Mais c’est un jeu
De croire que je verrai Comme une justice Oui je le crois
Du sang sur les papiers De l’armistice Il coule déjà
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Du Sang sur les papiers de l’armistice
Tu voulais être comme tous les hommes Toi que tout séparait Leur maison, leur foyer, leur vie, Tu voulais y goûter
Pour conjurer la maladie Tu as forcé le destin Tu étais comme eux, c’était tout comme Tu es monté dans le train
Vous étiez deux puis tu étais seul Car elle est descendue Tu voulais que le train déraille Car elle n’y était plus
Tu la rattraperais où qu’elle aille Pour que l’image perdure Tu l’attacherais dans la gueule Du loup, pour ton futur
Quand elle revint, tu fus de joie Ton rêve continuait De votre enfant, ce fut le tien Entre toi et ta vie
Vous étiez deux, tu seras trois Un fils pour ta lignée De ton histoire, il est le soin Mais vois-tu à quel prix ?
Tu ne seras pas comme tous les hommes Toi que tout rapprochait Je vois en toi comme dans un frère Moi qui te critiquais
Car de ton frère, je fus le père Moi qui te consolais Tu es le crayon, et moi la gomme Nous peignons d’un même trait
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Chapitre IV L’enfant et ses pairs
Comme tous les hommes
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chaPitre V
L’enfant, Père et mère
Nicolas Fleuré
Le rêve l’a guéri Et il marche à nouveau Il sourit de nouveau Et sa peau n’est plus blême
Il revient à la vie Respirant à nouveau Il n’y a plus de problèmes Elle revoit son mari
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Mon pharaon blanc
Je me rappelle Il y avait de l’herbe sur le toit des maisons C’était l’adulte qui avait toujours raison Quand je réfléchissais, je pleurais souvent Je ne réfléchis plus
Je me rappelle C’est dans la rue que l’on jouait au ballon Je marchais quand on me le demandait Je marchais sans même savoir où j’allais Je cours un peu trop
Tu te rappelles On était seul à traverser la grand-rue On était seul à remonter la cascade Nos mères arboraient un sourire de façade Qu’elles n’arborent plus
Tu te rappelles On achetait des glaces comme des trophées On vivait le même jour à longueur d’été Nos pères jouaient un rôle qu’ils connaissaient mal Ils ne le jouent plus
On se rappelle Il y avait encore des plages abandonnées On avait même encore le droit de pêcher J’ai oublié l’eau qui avait goût à la terre Je ne l’oublierai plus
J’ai oublié Que je n’étais pas seul à jouer dehors Qu’on m’a bien appris que le silence est d’or On en a tué d’autres et je me suis tu Je n’oublierai plus
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Chapitre V L’enfant, père et mère
Je me rappelle
Va mon frère Va trouver le chemin Va mon frère C’est le tien
Il t’attend derrière la colline Il te tend les bras, mon frère Il mène où rien ne mine Il t’attend car c’est le tien
Il t’attend dans les montagnes Ton fils embrasse son père Il mène où tu le gagnes Il t’attend car c’est le tien
Va mon frère Va trouver le chemin Va mon frère C’est le tien
Va elle est belle La route devant Va elle t’appelle Et il est temps
Va elle t’appelle Et il est temps
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Chapitre V
Va mon frère
Lys Anamorphose
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Il n’était pas de ceux qui évitent l’addition Il n’était pas de ceux qui réclament la potence Il ne fallait pas avoir des os de faïence Car c’était lui qu’on attend sur l’échafaud
Il n’était pas de ceux qui annulent leur mission Il a marché dans des couloirs mi blanc mi or Il n’y avait pas de fée penchée sur son sort Personne pour y démêler le vrai du faux
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Chapitre V L’enfant, père et mère
Son Histoire
Quand l’été venait Nous étions jeunes, encore enfants Pour un seul baiser Nous aurions vendu nos parents
D’un revers de manche Un éternel dimanche
Quand nous étions innocents Quand nous allions lentement
Quand le temps passait, Il soufflait chaud et patiemment Seul le score comptait, Nous étions libres et inconscients
Quand nous étions innocents Quand nous allions lentement
Nous n’avons fait que suivre Un éternel dimanche
Nous n’avons fait que suivre Les règles Les parents Les enfants des autres Les courants Les cadrans D’horloges Les ordres
Nous n’avons fait que suivre Un éternel dimanche Nous n’avons fait que grandir D’un revers de manche
Nous étions jeunes Nos silences dans nos yeux d’hier S’ils étaient tous joyeux Ne saliraient pas nos yeux d’aujourd’hui
Nous n’avons fait que suivre
I don’t know what means a father I don’t know what for I don’t know I have forgotten I’m innocent innocent innocent
I was left in your room All was left for me I was stuck in this role It was meant for me Still refusing to play Innocent innocent Be the one or betray Innocent innocent
I don’t know what means a mother I don’t know what for Mother, sister, my ghost lover I’m innocent innocent innocent
I was left in your room All was left for me I was stuck in this role It was meant for me Still refusing to play Innocent innocent Be the one or betray Innocent innocent
I don’t know I have forgotten I’m innocent, innocent, innocent
I was left in your room All was left for me I was stuck in this role It was meant for me Still refusing to play Innocent innocent Be the one or betray Innocent innocent
Innocent innocent, innocent innocent, innocent innocent, I was I was me I don’t know I have forgotten I’m innocent, innocent, innocent
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Chapitre V
Innocent, Innocent
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L’enfant, père et mère
Il y avait des chambres La première était vide La deuxième était vide La troisième est malade De janvier à décembre
Il y avait des jouets Les malles en étaient pleines Les pièces en étaient pleines Sans jamais de brimades De mars à février
Il y avait des fantômes Ma tête en regorgeait Ma tête les inventait Je les ai vus ensemble Je jure, c’était tout comme
Il y avait des familles L’une n’existait pas L’autre n’existait pas Et moi pourtant je tremble Comme dans un jeu de quilles
La Maison des fantômes
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chaPitre Vi
L’enfant debout
Léa Ragueneau
Du fond des âges remonte la vieille rengaine Dans des draps si froissés qu’on y verrait la peau Dans l’iris refermé de ceux qui parlent trop Pour prouver au bon Dieu le secret que l’on traîne
Comme la colère qui gronde là où poussent les blés La terreur s’est assise pour contempler l’effroi De ces mains qui se tendent à n’en savoir pourquoi L’esprit qui se rappelle la couleur d’exister
Des instants se terminent pour éviter fragiles Que le temps les avale pour redécouvrir Des vérités trop vraies qu’on eut peur de réduire De la beauté sur terre qu’on eut cru volubile
Elle semblait oubliée l’écrasante asphyxie Des lumières aveuglantes qui alarment à l’œil Les membres du même corps, ébloui sur le seuil D’une porte que personne n’aurait voulue franchie
C’est un souffle hésitant qui anime le fleuve Redonne souffle et vie et c’est l’eau qui inonde Des lits taris de feuilles sèches comme la mer profonde C’est le corps tout entier qui refait plume neuve
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Le fond des âges
Il est de ces soleils Qui naissent entre les pierres Là où coule l’eau noire Le goudron et la bière Il est de ces soleils Qui naissent sans espoir
Et ces rayons réchauffent Les chairs trop confortables La peau qu’on croit trop blanche Et la voix trop aimable Et ces rayons réchauffent Le temps gris des dimanches
Seules quelques lumières Rêvées le long des ombres Au bord de rues humides Au milieu des décombres Seules quelques lumières Sous quelques pluies acides
Il est de ces mirages Qu’on voit en pleine vie Ivre de pleine conscience Dans la foule et le bruit Il est de ces mirages Qui défient la défiance
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Chapitre VI L’enfant debout
Eaux et Défiance
Il y eut des tornades Nous avons traversé Les quarantièmes rugissants Nous avons tant péché Nous avons tant souffert Nous nous sommes faits du mal Nous nous en sommes faits juste assez Pour savoir qu’on est bien
Et n’importe où que j’aille Il jaillit des aspects Des reliefs immensément Plus grands que l’on connaît Et si l’on doit mourir Je veux mourir sur toi Mourir au creux de ton épaule Reste seule avec moi
ll coulera des larmes Sur le champ des possibles De joie, elles couleront ensemble Elles couleront sensibles Nous toucherons nos peaux Nous toucherons les cieux Nous ne toucherons plus le fond Maintenant qu’on est deux.
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Les quarantièmes rugissants
La photo trône fière là où le roi la pose Et la reine resplendit dans l’immobile pose Les notes coulent et flottent dans l’air cristallin La main caresse la peau et rejoint l’autre main
Les deux corps se mêlent et la puissance émane De ces âmes et éclaire les yeux du chaman Les étoiles admirent le temps qui s’arrête Et cet autre univers qui se crée dans la fête
Les arbres et les plantes se penchent et s’inclinent Devant l’idylle que seule la nature imagine Le ciel se fait clément, la pluie se fait moins grise Le feu se fait plus grand, la sagesse l’attise.
Impassible et souriant comme un mauvais acteur Je resserre l’étreinte et n’ose regarder l’heure Souhaitant que la veille remplace le lendemain Souhaitant que rien ne sépare nos deux mains
À nous deux, la question est de voir si l’on tombe Amoureux, fou ou pas, ou voir si l’on succombe À la force des esprits qui s’enlacent en passion À savoir si la chute n’est pas élévation.
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Chapitre VI L’enfant debout
Là où le roi la pose
Souviens-toi Nous irons danser Toute la nuit Comme en passé Souviens-toi Les ailes déployées
Tu sais on veut tous s’en aller En attendant le vent Le vent il ne fait que pousser On ne part jamais vraiment
Souviens-toi Tu seras couché Sous la lune Comme en été Souviens-toi Les ailes déployées Tu partiras Comme au passé
Tu sais on veut tous s’en aller En attendant le vent Le vent il ne fait que pousser On ne part jamais vraiment
TERRE NEUVE – The Child from silence
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Chapitre VI
On ne part jamais vraiment
Adrien Landry
There’s a beast livin within me Feeding with strawberries You see, it doesn’t look bad
But I know that you still fear it I know you wanna run away from here
But know that you could stay Sit on this piece of tree And eat some strawberries Eat some strawberries
Share them with the monster Feed the monster yourself You see it doesn’t bite hard
But I know that you still fear it I know you wanna run away from here
But know that you could stay Sit on this piece of tree So please don’t let it go Please don’t let it go
Trust a sun And lights on, the monster loves you Free the monster yourself You see it’s not so dark
But I know that you still fear it I know you wanna run away from here
But know that you could breathe Sit on this piece of cloud
And live unto the air Live unto the air Live unto the air Live unto the air
The monster loves you
TERRE NEUVE – This is how you’ll get undressed
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Innocence
Is a living dare To be myself Doesn’t make no sense
I see you I can just applaud I’m the mouse And the cat is you
If only I can free myself As you freed your mind Their eyes are my chains And I leave all my health behind
You’re not afraid of the fall You’re not willing to appear To be is easy Don’t want to be me at all I just find me under I Under I
Wearing mask Doesn’t get to you No answers There’s nothing to ask
I see you Feeling jealousy Cause I lie And I can’t see me Anymore
Turn the other I
TERRE NEUVE – This is how you’ll get undressed
The Other I
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Chapitre VI L’enfant debout
I was on the river and I called your name You didn’t hear my voice anymore I was different and you were the same One foot in the water, and one on shore
I was in the river and I saw my dress It was brighter than ever before Your violence could have even been blessed It has been cleaned from the mud and sores
I was on the river and you felt so well You didn’t sink at all anymore This river didn’t look like a well This river looked like a salvation door
Oh no I don’t want to come back On the shore Again
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In the river
CATS ON TREES - Uli
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Chapitre VI L’enfant debout
Les mains fendirent les bûches Et la hache se posa Le bois tombé par terre Et le sourire osa Toucher le vieux visage Qui ne souriait guère Illuminer de joie Le jeune et le grand-père
Il n’en fallait pas plus Pour sentir l’évidence Le vide n’existait pas Pour celui qui avance Les coups sur le billot Sonnaient la fin de guerre Les mains touchèrent les mots Comme un feu qu’on libère
Des bûches et des bûchers
Tout le corps dans la sphère et la tête au formol C’est avant tout les flammes qui guidèrent le pas C’est la vie tout entière qui émergeait du sol Comme les feux d’une route qu’on ne connaissait pas Décider coûte que coûte des virages inconnus Avancer à genoux quand nous manque l’Essence Pour rebrousser chemin quand le cœur ne suit plus Se mouvoir n’importe où pourvu qu’il y ait un sens
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Le feu sur le bord de la route
L’enfant debout
Virginie Aubee
Nous sommes tous des bons travailleurs Tentant de faire tant bien que mal Inventant son propre piédestal Voyant en nous des hommes meilleurs
Dieu qu’elle est chaude cette illusion Dieu qu’on y croit à ces mensonges Nous sommes la tâche, nous sommes l’éponge En évitant toute allusion
Jetée au beau milieu du ring Pour essuyer les traces de sang En compter dix, en compter cent, Ils disent « Fight, fight », tu entends « Sing, sing »
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Sing, Sing
On cultive des fruits dont le goût est amer Dont la chair est sucrée, qu’on sait insaisissables On refait des objets qu’on ne savait plus faire Qu’on fait sans toucher terre pour s’en croire capable
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Chapitre VI L’enfant debout
Les Mangues bleues
Elle était belle La vie des autres Quand c’était la tienne Avoue C’était la vôtre Sans tes ficelles Il fallait qu’elle tienne À vous
Fallait du cran L’amour peut-être Pour y croire encore À toi Tu voulais être Si différent Si tu peux le voir Bats-toi
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Avoue
Tu le sens Et je le sens si bien Car tu le sais En chaque geste, à chaque marque Nous sommes ça
Beaucoup de bien, un peu de mal C’est humain
Mais quand l’amour te va si bien
Je n’ai plus mal
Tu le sens Et je le sens si bien Car tu le sais Il y a la route, il y a le ciel Avec nous
L’histoire nous a donné raison Un enfant
Car quand l’amour nous va si bien
Je n’ai plus mal
Le souvenir de te rattraper Comme un oiseau mort, un homme blessé Oui je me souviens t’avoir enlacée Comme une reine que son peuple ignorait Moi je me rappelle t’avoir relevée Mis les pieds sur terre, me voir décoller Moi j’ai la fierté d’avoir vu en toi Celle que toi seule, tu as su révéler
Toi…
Tu le sens Et je le sens si bien Car tu le sais Il y a la route, il y a le ciel Avec nous
L’histoire nous a donné raison Un enfant
Car quand l’amour nous va si bien
Je n’ai plus mal
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Chapitre VI L’enfant debout
L’Amour nous va si bien
Quand nos sentiments se perdront en vol La jeunesse aidant, couchés sur le sol, Comme un enfant fou d’amour pour nous voir Unis
Quand nous serons las de nous battre encore Ralliés à nos bras, nos armes sur le corps, Promets-moi que nous écrirons l’histoire, Comme un enfant fou d’amour pour nous voir Unis
Comme les parents qu’on a jamais eus Comme des enfants on s’est toujours tus Comme les parents qu’on a jamais vus Comme des enfants, corps à moitié nu
Si loin Si longtemps Si loin Si longtemps
Je suis l’enfant des amours oubliés Je suis le père d’une histoire retrouvée Je suis l’enfant des amours oubliés Je suis le père d’une histoire retrouvée
Je suis l’enfant du silence.
La fin du silence.
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Chapitre VI
L’enfant du Silence
Léa Ragueneau
sommaire
Chapitre i - L’enfant seul
p. 12 Je marchais, je marchais p. 13 Cent Mille Cent Vingt p. 14 L’écorce saigne p. 15 Colère nue p. 17 GPS (Grande Peur Solitaire) p. 18 De la terre sous les ongles p. 19 Les nouveaux schémas p. 20 This could be a life p. 21 Polder p. 23 Le Silence et l’alcool p. 24 Le Tableau de maître p. 25 À Blanc
Chapitre II - L’enfant couché
p. 28 Dis-moi comment p. 29 Les Corps emmêlés p. 30 Le dégoût p. 31 La Chienne p. 32 Les Vases communicants p. 33 Verres Opaques p. 34 Si blanche p. 35 Heureusement qu’il y a l’oubli
Chapitre III - L’enfant et l’âme sœur
p. 38 Elle te regarde p. 39 Speak to me p. 40 En un jour p. 41 De beaux draps p. 42 Le Souvenir de soi p. 44 L’eau qui dort p. 45 Là-Bas le bateau l’emmène p. 46 Envols Prétendus p. 47 Mourir p. 48 Comme d’autres p. 49 Ma violence
Chapitre IV - L’enfant et ses pairs
p. 52 Deux soleils p. 53 L’Amour des ordres p. 54 Get Undressed p. 55 Red p. 56 Amen p. 57 L’Ombre du visage p. 58 Comme tous les hommes p. 59 Du Sang sur les papiers de l’armistice
Chapitre V - L’enfant, père et mère
p. 62 Je me rappelle p. 63 Mon pharaon blanc p. 64 Va mon frère p. 66 Nous n’avons fait que suivre p. 67 Son Histoire p. 68 La Maison des fantômes p. 69 Innocent, Innocent
Chapitre VI - L’enfant debout
p. 72 Eaux et Défiance p. 73 Le fond des âges p. 74 Là où le roi la pose p. 75 Les quarantièmes rugissants p. 76 On ne part jamais vraiment p. 78 The monster loves you p. 79 The Other I p. 80 In the river p. 81 Des bûches et des bûchers p. 83 Le feu sur le bord de la route p. 84 Les Mangues bleues p. 85 Sing, Sing p. 86 L’Amour nous va si bien p. 87 Avoue p. 88 L’enfant du Silence
Conception et réalisation : Exotypie à Toulouse.Photographie de la couverture : © Tementiy Pronov (Slippy Inc.).Impression : Escourbiac à Graulhet, le 27 janvier 2014.ISBN : 978-2-9547844-0-3. Dépôt légal : 1er trimestre 2014.Loi n° 49-956 du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse.
ISBN : 978-2-9547844-0-3
Prix : 20 euros
Matthieu Miegeville
Matthieu Miegeville écume la scène depuis 15 ans déjà (Psykup, Agora Fidelio, My Own Private Alaska, Terre Neuve Collective) et parcourt les routes à la recherche de sa vérité sur le monde.
Au travers de textes toujours sincères et sur le fil, il a su mettre en mots et en musique les émotions de l’artiste à fleur de peau. Il a su apprivoiser l’art de réduire les cris au silence et le silence à la musique. Titre de livre à contre-courant, d’un amer en faire une bouteille à la mer ; l’enfant du silence n’a jamais été si expressif.
Entre désespoir et volupté, entre tendresse assumée et cris à la volée, les textes dessinent le portrait d’un enfant en quête de vérité et d’un adulte en quête de soi.
Léa Ragueneau
L’Enfant du silence
© Nicolas Fleuré
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