LA GESTION PRVENTIVE DES RISQUES DE CATASTROPHES NATURELLES EN
ASIE DU SUD ET DU SUD-EST : DFIS POUR LA RDUCTION DE LA
VULNRABILIT DES POPULATIONS
Par
Genevive Sylvestre
Essai prsent au Centre Universitaire de Formation en Environnement en vue de
lobtention du grade de matre en environnement (M. Env.)
Directeur : M. Pierre Ozer
CENTRE UNIVERSITAIRE DE FORMATION EN ENVIRONNEMENT
UNIVERSIT DE SHERBROOKE
Berthierville, Qubec, Canada, 27 juin 2011
i
SOMMAIRE
Mots cls : Catastrophes naturelles, vulnrabilit, pauvret urbaine, changements
climatiques, prvention, gestion des risques, Asie du Sud et du Sud-Est
Inondations, cyclones, vagues de chaleur, scheresses, incendies de fort Au cours
des dernires dcennies, les spcialistes du Groupe dexperts intergouvernemental sur
lvolution du climat ont constat une augmentation de la frquence et de lampleur des
phnomnes mtorologiques extrmes lchelle mondiale, qui serait due, entre autres,
la faon de vivre effrne de ltre humain. Ces alas causent la mort de milliers de
personnes chaque anne, sans compter les blesss, les sans-abri et les rfugis. Elles
ont galement des rpercussions considrables sur les infrastructures et lconomie des
pays touchs, de mme que sur lenvironnement. LAsie est de loin la rgion du monde la
plus affecte par ces cataclysmes. Elle dtient dailleurs le triste record du plus grand
nombre de dcs lis aux dsastres naturels depuis 1980. Par ailleurs, diffrentes
contraintes sociales, historico-coloniales ou politico-conomiques vulnrabilisent les
individus dans leur vie quotidienne, ce qui a pour consquence daggraver leur situation,
dj prcaire, en cas de dsastres naturels. Les personnes les plus pauvres des pays en
dveloppement, en Asie du Sud et du Sud-Est notamment, sont bien souvent les
premires victimes des catastrophes naturelles.
Lobjectif de ce prsent essai est de dmontrer les rpercussions (aux niveaux humain et
conomique) des catastrophes naturelles en Asie du Sud et du Sud-Est afin de proposer
des recommandations pour une meilleure gestion anticipative des risques de
catastrophes et pour rduire la vulnrabilit des populations dans cette rgion du monde.
Les recommandations se concentrent sur la gestion prventive des risques dalas
naturels, de plus en plus reconnue par les acteurs de la gestion des risques comme tant
lapproche adopter. Cet essai soutient notamment que la rduction des risques de
catastrophes passe par des programmes de lutte contre la pauvret et de protection de
lenvironnement, par lappui et la participation des communauts locales, par lducation
et la sensibilisation des populations exposes, par la mise en place de mesures
spcifiques pour les zones urbaines, par des normes de construction plus strictes et par
une meilleure synergie entre les diffrents acteurs impliqus. Ces stratgies de gestion
constituent une pierre angulaire pour rduire la vulnrabilit des populations et prserver
la dignit humaine et ils font aussi appel au respect des droits de lhomme.
ii
REMERCIEMENTS
Je tiens tout dabord remercier mon directeur, M. Pierre Ozer, professeur attach au
Dpartement des Sciences et Gestion de l'Environnement de l'Universit de Lige
(Belgique) et docteur en gographie, spcialis sur les problmes lis aux catastrophes
naturelles et leur gestion. Pierre a accept de me suivre tout au long de la ralisation de
cet essai, et ce, malgr ses nombreuses obligations. Ses commentaires pertinents, sa
patience et sa comprhension mont aide ne pas baisser les bras et aller au bout de
cette aventure.
Je tiens remercier mon entourage d'avoir particip la russite de cet essai. Un merci
particulier mon amie Jolle et mon pre Pierre davoir lu et corrig ce travail. Je tiens
aussi remercier ma grand-mre Marie-Ange et mon amie Violne d'avoir lu cet essai
tout en portant une attention particulire aux fautes dorthographe et de syntaxe. Un merci
Andr-Luc galement de mavoir aide dans la mise en page. Votre appui, vos
commentaires constructifs et vos judicieux conseils ont contribu la russite de cet
essai. Par ailleurs, je tiens remercier ma famille et mes ami(e)s de mavoir soutenue et
encourage, particulirement dans les moments de dmotivation. Je ne peux passer sous
silence lappui constant de mes parents, Francine et Pierre, de mes trois colocataires,
Amandine, milie et Violne, de mme que de mes amies Genevive et Stphanie.
Je tiens galement faire un clin dil mes collgues, mes ami(e)s de la matrise en
environnement, et particulirement la gang du profil international. Merci Vronic,
Laurence, Dominique, Marie-Claude, Patricia, Richard-Philippe et tous les autres pour
avoir t l durant ces belles annes passes Sherbrooke et ltranger. Les moments
passs en votre compagnie, que ce soit durant les cours Sherbrooke, durant les
activits parascolaires, au cours du stage au Vietnam ou au cours de lchange tudiant
en Belgique ont t fort agrables et enrichissants. galement, partager mes
questionnements et mes baisses de motivation avec vous durant la rdaction de cet
essai, au cours des derniers mois, ma encourage persvrer et je vous en remercie.
iii
TABLE DES MATIRES
INTRODUCTION ...............................................................................................................1
1. VOLUTION DES CATASTROPHES NATURELLES DANS LE MONDE .................4
1.1 Bilan des catastrophes naturelles lchelle mondiale et en Asie .......................... 4
1.2 Pertes humaines .................................................................................................... 9
1.3 Rfugis environnementaux ................................................................................. 16
1.4 Pertes conomiques et disparits nord-sud .......................................................... 18
1.5 Catastrophes naturelles et les changements climatiques ..................................... 24
1.5.1 Prsentation du Groupe dexperts intergouvernemental sur lvolution du climat24
1.5.2 Principales conclusions du Quatrime Rapport dvaluation du GIEC.............. 25
2. LIENS ENTRE PAUVRET ET CATASTROPHES NATURELLES .......................... 28
2.1 Indice de risque de catastrophe du PNUD ............................................................ 28
2.2 Croissance urbaine explosive et bidonvilisation .................................................... 29
2.3 Vulnrabilit, pauvret et alas naturels ............................................................... 33
2.3.1 Vulnrabilit, bidonvilisation et marginalit ....................................................... 33
2.3.2 Vulnrabilit et contraintes quotidiennes .......................................................... 35
3. TUDES DE CAS DE CATASTROPHES NATURELLES EN ASIE DU SUD-EST .. 40
3.1 Sisme et tsunami dans locan Indien................................................................. 40
3.1.1 Gestion des risques au tsunami dans locan Indien : un systme dalerte
prcoce est-il adquat?............................................................................................. 43
3.1.2 Pour une meilleure gestion des risques de tsunamis en Asie du Sud-Est ........ 44
3.2 Cyclone Nargis au Myanmar ................................................................................ 45
3.2.1 Prsentation des faits et des avances de la NASA ......................................... 46
3.2.2 Analyse de la gestion du cyclone Nargis .......................................................... 48
3.3 Inondations Jakarta (Indonsie) ......................................................................... 51
3.3.1 Causes des inondations ................................................................................... 51
3.3.2 Consquences conomiques et sanitaires ....................................................... 53
3.3.3 Analyse de la gestion des inondations Jakarta .............................................. 54
4. INITIATIVES MISES EN PLACE EN ASIE DU SUD ET DU SUD-EST ..................... 57
4.1 Initiatives aux niveaux international et rgional ..................................................... 57
4.1.1 Cadre daction de Hyogo 2005-2015 ................................................................ 57
4.1.2 Disaster Risk Reduction (DRR) Project Portal .................................................. 60
4.1.3 Initiatives de lUNESCO ................................................................................... 61
iv
4.1.4 Asian Disaster Preparedness Center ............................................................... 64
4.1.5 Asian Disaster Reduction and Response Network ........................................... 65
4.1.6 Micro-assurances pour les populations faible revenu ................................... 66
4.2 Initiatives au niveau national ................................................................................. 68
4.2.1 Initiatives des gouvernements nationaux en Asie du Sud et du Sud-Est .......... 68
4.2.2 Programme de relogement et dendiguement aux Philippines .......................... 72
4.3 Initiatives lchelle locale ................................................................................... 73
4.3.1 Projet de CARE en Inde ................................................................................... 73
4.3.2 Importance du savoir autochtone ..................................................................... 74
4.3.3 Projet participatif dune communaut locale aux Philippines ............................ 75
5. RECOMMANDATIONS POUR UNE MEILLEURE GESTION DES CATASTROPHES
NATURELLES EN ASIE DU SUD ET DU SUD-EST ................................................ 78
5.1 Investir dans des projets de prvention des risques de catastrophes ................... 78
5.2 Mettre en place des programmes de lutte contre la pauvret et de protection de
lenvironnement ............................................................................................................ 80
5.3 Appuyer les communauts locales et favoriser une participation citoyenne .......... 81
5.4 duquer et sensibiliser les populations ................................................................. 83
5.5 Mettre en place des mesures spcifiques pour les zones urbaines ...................... 84
5.6 Respecter les normes de construction ou mettre en place des normes de
constructions plus svres ........................................................................................... 85
5.7 Favoriser une synergie entre les diffrents acteurs............................................... 86
5.8 Conclusion et discussion ...................................................................................... 87
CONCLUSION ................................................................................................................. 89
RFRENCES ................................................................................................................ 91
BIBLIOGRAPHIE .......................................................................................................... 100
ANNEXE 1 PRSENTATION DES 10 CRITRES POUR LA CAMPAGNE MONDIALE
RENDRE MA VILLE PLUS RSILIENTE 2010-2011 ....................................... 101
ANNEXE 2 TABLEAU RSUM DES RECOMMANDATIONS POUR UNE MEILLEURE
GESTION PRVENTIVE DES RISQUES DE CATASTROPHES NATURELLES EN
ASIE DU SUD ET DU SUD-EST ............................................................................. 103
v
LISTE DES FIGURES
Figure 1.1 : Nombre de dsastres naturels enregistrs l'chelle mondiale, 1900-2005 ...5
Figure 1.2 : Nombre et type de catastrophes naturelles lchelle mondiale, ....................5
Figure 1.3 : Distribution rgionale des catastrophes naturelles par type, 1991-2005 ..........6
Figure 1.4 : Bilan des catastrophes naturelles lchelle mondiale en 2010 ......................8
Figure 1.5 : Variation du nombre de morts et du nombre de personnes affectes par les
catastrophes naturelles, 1970-2010 ...................................................................................9
Figure 1.6 : Nombre de victimes de catastrophes naturelles par 100 000 habitants, 1976-
2005 ................................................................................................................................ 10
Figure 1.7: Distribution (exprime en %) de pertes humaines en Asie par type de
catastrophe naturelle, 1980-2008..................................................................................... 13
Figure 1.8: Distribution (exprime en %) de personnes affectes en Asie par type de
catastrophe naturelle, 1980-2008..................................................................................... 14
Figure 1.9 : Exposition aux cyclones et aux sismes dans les grandes villes du monde,
projection 2000-2050 ....................................................................................................... 15
Figure 1.10 : Distribution (exprime en %) du type dvnement ayant caus la mort en
2010 ................................................................................................................................ 16
Figure 1.11 : volution des pertes conomiques totales et assures, avec tendances
long terme, engendres par les catastrophes naturelles lchelle mondiale, 1980-2010
........................................................................................................................................ 19
Figure 1.12: Index de risques de catastrophes naturelles ................................................ 22
Figure 1.13 : Risque de mortalit pour les cyclones tropicaux dans deux pays prsentant
une exposition similaire : le Japon et les Philippines ........................................................ 23
Figure 2.1 : Population urbaine et population vivant dans les bidonvilles ......................... 32
Figure 2.2 : Interactions et rapports de causalit entre les facteurs de vulnrabilit ......... 36
Figure 3.1 : Pays ou territoires touchs par le tsunami du 26 dcembre 2004 ................. 41
Figure 3.2 : Image satellite du cyclone Nargis, dbut mai 2008 ....................................... 46
Figure 3.3 : Trajectoire du cyclone Nargis et intensit selon lchelle Saffir-Simpson ...... 47
Figure 3.4 : Trajectoire du cyclone Nargis et zones sinistres .......................................... 49
Figure 3.5 : Un homme entour de dchets suite aux inondations Jakarta en fvrier
2007 ................................................................................................................................ 53
Figure 4.1 : Carte localisant l'le de Simeulue et la province dAceh (Indonsie) .............. 75
Figure 4.2: Localisation de l'le de Divinubo (Philippines) ................................................. 76
vi
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1.1 : Catastrophes ayant caus plus de 10 000 morts, 1975- 2008* ................... 11
Tableau 1.2: Dix catastrophes naturelles ayant caus le plus de pertes humaines en Asie,
1980-2008 ....................................................................................................................... 12
Tableau 1.3: Dix catastrophes naturelles ayant affect le plus de personnes en Asie,
1980-2008 ....................................................................................................................... 13
Tableau 1.4 : Catastrophes ayant entran des pertes de plus de 10 milliards dUS $,
1975- 2008* ..................................................................................................................... 20
Tableau 2.1 : volution de la population urbaine des bidonvilles (exprime en millions) .. 31
Tableau 2.2 : Proportion de la population vivant dans des bidonvilles (exprim en%) ...... 31
Tableau 3.1 : Pays touchs par le tsunami, nombre de morts, disparus, nombre total* et
personnes dplaces (dcompte arrt au 6 mai 2005) .................................................. 42
Tableau 3.2 : chelle de classification des ouragans Saffir-Simpson ............................... 47
Tableau 4.1 : Rsum des priorits du Cadre d'action de Hyogo ..................................... 59
Tableau 4.2: Objectifs spcifiques du Programme de gestion des risques de dsastres du
Gouvernement indien et du PNUD, 2002-2009 ................................................................ 70
vii
LISTE DES ACRONYMES, DES SYMBOLES ET DES SIGLES
ADPC Asian Disaster Preparedness Center (Centre asiatique de
prparation aux catastrophes)
ADRRN Asian Disaster Reduction and Response Network (Rseau asiatique
de rduction et de rponse aux catastrophes)
ANASE Association des Nations de lAsie du Sud-Est
(ASEAN en anglais, soit Association of Southeast Asian Nations)
AUDMP Asian Urban Disaster Mitigation Program (Programme asiatique de
rduction des catastrophes en milieu urbain)
AusAID Australian Governments Overseas Aid Program
(Programme daide extrieure du gouvernement australien)
BCAH Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations
Unies
BCPR Bureau pour la prvention des crises et du relvement
(Crisis Prevention and Recovery)
CAH Cadre daction de Hyogo
CRED Centre de recherche sur lpidmiologie des dsastres
(Center for Research on the Epidemiology of Disasters)
DFID UK Department for International Development (Dpartement de
Grande-Bretagne pour le dveloppement international)
DIPCN Dcennie internationale de prvention des catastrophes naturelles
DRR Project Portal Disaster Risk Reduction Project Portal
(Projet portail de rduction des risques de catastrophes)
DSRP Documents de stratgie pour la rduction de la pauvret
EMDAT Base de donnes internationale sur les catastrophes
(The International Emergency Disaster Database)
FAO Organisation des Nations Unies pour lalimentation et lagriculture
(Food and Agriculture Organization of the United Nations)
FICR Fdration internationale des Socits de la Croix-Rouge et du
Croissant Rouge
FMI Fond montaire international
GIEC Groupe dexperts intergouvernemental sur lvolution du climat
(IPCC en anglais, soit Intergovernmental Panel on Climate Change)
viii
IDMC Internal displacement monitoring centre
(Centre de suivi des dplacements internes)
IMD India Meteorological Department
(Dpartement mtorologique indien)
IRC Indice de risque de catastrophe
ITU International Telecommunication Union
(Union internationale de tlcommunication)
MRC Mekong River Commission
(Commission pour la rivire Mkong)
NASA National Aeronautics and Space Administration
(Aronautique nationale et Administration Spatiale)
NTHMP National Tsunami Hazard Mitigation Program
(Programme national de rduction des risques de tsunami)
OCDE Organisation pour la coopration et le dveloppement conomiques
OI Organisation(s) internationale(s)
OIM Organisation internationale pour les migrations
OMD Objectifs du millnaire pour le dveloppement
OMM Organisation mtorologique mondiale
OMS Organisation mondiale de la sant
ONG Organisation(s) non gouvernementale(s)
ONU Organisation des Nations Unies
ONU-HABITAT Organisation des Nations Unies pour les tablissements humains
(UN-HABITAT en anglais, soit United Nations Human Settlements
Programme)
PANA Plans daction nationaux dadaptation
PDSL Pays en dveloppement sans littoral
PED Pays en dveloppement
PEID Petits tats insulaires en dveloppement
PIB Produit intrieur brut
PNUD Programme des Nations Unies pour le dveloppement
(UNDP en anglais, soit United Nations Development Programme)
PNUE Programme des Nations Unies pour lenvironnement
(UNEP en anglais, soit United Nations Environment Programme)
ix
SIPC Stratgie internationale des Nations Unies pour la prvention des
catastrophes naturelles (UNISDR en anglais, soit United Nations
International Strategy for Disaster Reduction)
UNESCO Organisation des Nations Unies pour lducation, la science et la
culture
(United Nations Educational, Scientific and Cultural Organization)
UN-OCHA United Nations Office for the Coordonation of Humanitarian Affairs
(Bureau pour la coordination des affaires humanitaires)
USAID United States Agency for International Development
(Agence tats-unienne de dveloppement international)
x
LEXIQUE
Ala Dsigne la probabilit doccurrence dun phnomne. Lala
est fonction de lintensit dun phnomne et de son occurrence.
(tir de Ozer, 2008, p.8) Catastrophe naturelle vnements brutaux d'origine naturelle, engendrant
gnralement la mort et la destruction, petite ou grande chelle. Les catastrophes naturelles sont diverses et varies : temptes majeures, ouragans, cyclones ou encore drglements climatiques, mais aussi sismes, tsunamis, avalanches, ruptions volcaniques, inondations, etc.
(tir de Dictionnaire Environnement, 2010)
Rsilience Il sagit de la capacit des personnes et des conomies ponger les pertes conomiques et sen relever. titre dexemple, les pauvres ont souvent une faible rsilience face aux pertes, notamment du fait quils manquent dconomies et dassurances.
(tir du United Nations International Strategy for Disaster Reduction (UNISDR), 2009 b, p.7)
Risque naturel Il sagit de lquation dun ala naturel gnrateur de
dommages et de la vulnrabilit. Comme lala et la vulnrabilit sont des notions sans cesse changeantes, le risque nest jamais dfinitif et varie dans lespace et dans le temps.
(tir de Ozer, 2008, p. 9) Vulnrabilit Au sens large, elle exprime le niveau de consquences
prvisibles dun phnomne sur des enjeux. Il sagit de la capacit des socits rpondre des risques potentiels. Ainsi, plus un systme est apte se relever dune catastrophe, dun ala, moins il est vulnrable. Il existe plusieurs mesures de vulnrabilit : vies humaines, importance financire, impacts conomiques, intrts culturels, etc.
(tir de Ozer, 2008, p.8)
Schma montrant les composantes (ala, enjeux ou vulnrabilit) menant au risque (tir de Ozer, 2008, p. 14)
1
INTRODUCTION
Chaque anne, la plante subit les assauts de phnomnes mtorologiques et
gologiques extrmes. Mga-sisme en Hati, canicule et feux de fort en Russie, autres
tremblements de terre en Chine et en Indonsie, inondations au Pakistan, glissements de
terrain en Chine, vagues de froid au Prou et en Europe Lanne 2010 a t marque
par de nombreuses catastrophes naturelles 960 au total ayant provoqu la mort de
plus de 296 800 individus et affectant un total de 207 millions de personnes (blesss,
sans-abri, dplacs) (Munich Re, 2011). Selon la compagnie de rassurance Munich Re,
au niveau conomique, les catastrophes naturelles ont caus en 2010 plus de 150
milliards dUS $ de dommages, tandis que les pertes couvertes par lindustrie de
lassurance sont de 37 milliards dUS $ (ib.). Sajoutent cela les dommages causs
lenvironnement. Les deux cataclysmes les plus mortels de 2010 le tremblement de
terre en Hati du 12 janvier tuant plus de 222 500 personnes, et la vague de chaleur en
Russie causant la mort de 56 000 individus ont fait de lanne coule la plus
meurtrire depuis deux dcennies (ib.). En outre, pour le premier trimestre, lanne 2011
(en date du 31 mars) ne laisse pas sa place non plus : selon la base de donnes
internationale sur les catastrophes EMDAT (The International Emergency Disaster
Database), 189 phnomnes naturels ont caus la mort de plus de 30 500 personnes
(Catnat.net, 2011). Depuis le dbut de 2011, on recense notamment les pluies
diluviennes au Brsil, un sisme en Nouvelle-Zlande, et surtout, un tremblement de terre
de magnitude 9 lchelle de Richter ayant provoqu un tsunami frappant le Japon, sur la
cte nord-est, le 11 mars dernier et faisant plusieurs milliers de morts, 14 300 selon le
bilan officiel, ainsi que 12 000 disparus (Novosti, 2011).
Depuis toujours, lAsie est de loin le continent le plus affect par les cataclysmes naturels.
Sur les 7752 phnomnes naturels qui ont assailli la plante depuis 2001, pas moins de
2300 sont survenus en Asie, soit prs de 30 % (Catnat.net, 2011). Pour lanne 2010,
89 % des personnes affectes (blesss, sans-abri, dplacs) se retrouvent sur le
continent asiatique (ib.). En outre, en tenant compte des dix plus importantes
catastrophes naturelles de 2010, cinq sont survenues en Asie (Chine, Pakistan et
Indonsie) (ib.).
2
lchelle mondiale, les spcialistes du Groupe dexperts intergouvernemental sur
lvolution du climat (GIEC) ont constat une augmentation de la frquence et de
lampleur des phnomnes mtorologiques depuis les trente dernires annes (GIEC,
2007). Ces vnements exceptionnels ont galement comme consquence de retarder
latteinte des Objectifs du millnaire pour le dveloppement (OMD) et de faire reculer le
dveloppement conomique et social de nombreux pays moins dvelopps.
La Dcennie internationale de prvention des catastrophes naturelles (DIPCN),
proclame en 1989 par deux rsolutions de lAssemble gnrale des Nations Unies,
avait comme objectif principal de mieux se prparer face aux alas mtorologiques
extrmes (Toutain, 2001). La DIPCN incitait les gouvernements mettre en place des
systmes dalerte accessibles tous. LOrganisation des Nations Unies (ONU) a
galement dcrt en 1989 une journe internationale pour la prvention des
catastrophes naturelles (gestion anticipative des dsastres naturels, attnuation de leurs
effets), qui a lieu chaque deuxime mercredi doctobre. Pour faire suite au DIPCN, lONU
a aussi lanc en 2000 la Stratgie internationale des Nations Unies pour la prvention des
catastrophes naturelles (SIPC). Cet organe sappuie sur des comits nationaux et son
secrtariat permanent est bas Genve (Suisse).
Malgr ces initiatives mises en place par lONU, quen est-il vraiment de la gestion des
risques de catastrophes naturelles, particulirement dans les pays en dveloppement
(PED)? Les scientifiques ont t interpells pour mieux comprendre les phnomnes
naturels et gologiques de la terre. Des programmes dvaluation des risques majeurs ont
t mis sur pied dans certains pays. Mais quen est-il rellement sur le terrain? Faut-il un
phnomne climatique ou gologique de grande ampleur pour que les comportements
changent et pour que les gouvernements adoptent une politique de prvention des
risques efficace et mieux adapte aux besoins des citoyens? Le tsunami du 26 dcembre
2004 au large de Sumatra (Indonsie), dans locan Indien, montre clairement la
ncessit pour les pays de mieux se prparer dventuels cataclysmes qui peuvent
devenir apocalyptiques si une gestion anticipative adquate nest mise sur pied.
Cet essai a pour objectif de dmontrer les rpercussions (en pertes humaines et en
pertes conomiques) des cataclysmes naturels lchelle mondiale et en Asie du Sud et
du Sud-Est plus particulirement, afin de mieux cibler les mesures de prvention efficaces
3
mettre en place; le tout dans le but de rduire la vulnrabilit des populations dans cette
rgion du monde. La finalit de cet essai sera donc dmettre des recommandations pour
une meilleure gestion prventive des risques dalas naturels en Asie du Sud et du Sud-
Est.
Une attention particulire a t porte la collecte dinformations qui constitue le point
dancrage de lessai. Ainsi, la validit, la qualit et la fiabilit des sources ont t vrifies.
Ce travail sappuie sur de nombreuses bases de donnes pertinentes et jour qui
proviennent notamment dorganisations internationales (OI) et rgionales comme lONU,
le GIEC, le Programme des Nations Unies pour le Dveloppement (PNUD), lOrganisation
des Nations Unies pour lalimentation et lagriculture (FAO), lAssociation des Nations de
lAsie du Sud-Est (ANASE), etc. Des articles scientifiques, des articles de priodiques,
des ouvrages et des documentaires font aussi partie de la documentation.
Cet essai sarticule autour de cinq chapitres. Le premier chapitre prsente lvolution des
catastrophes naturelles lchelle mondiale et en Asie au cours des dernires dcennies,
notamment en termes de pertes humaines et conomiques. Il portera galement une
attention particulire sur les changements climatiques puisque laugmentation de la
frquence et de lampleur des alas naturels semble tre lie au rchauffement
plantaire. Le second chapitre brosse un tableau des liens existants entre la pauvret et
la vulnrabilit face aux risques de catastrophes naturelles. Lexplosion dmographique
urbaine, la bidonvilisation et les liens entre vulnrabilit, pauvret urbaine et cataclysmes
naturels seront divers sujets abords. Le troisime chapitre a pour but de prsenter trois
tudes de cas de catastrophes naturelles survenues en Asie du Sud-Est. Une analyse
sensuivra afin de comprendre les lacunes au niveau de la prvention et de la gestion des
risques lors de ces catastrophes. Pour sa part, le quatrime chapitre permettra dexposer
et danalyser les initiatives de prvention mises en place aux niveaux international,
rgional, national et local en Asie du Sud et du Sud-Est. Finalement, le cinquime
chapitre propose des recommandations pour une meilleure gestion prventive des
catastrophes naturelles dans cette rgion du monde.
4
1. VOLUTION DES CATASTROPHES NATURELLES DANS LE MONDE
Au cours des dernires dcennies, on a constat une augmentation de la frquence et de
lampleur des phnomnes climatiques, mtorologiques et hydrologiques extrmes. Ce
chapitre a pour but de brosser un tableau de lvolution de ces alas, principalement au
cours des dernires dcennies. Dabord, il sagira de prsenter un bilan des catastrophes
naturelles lchelle mondiale et en Asie. Les pertes humaines et les rfugis de
lenvironnement constitueront les deuxime et troisime points abords. Par la suite, les
pertes conomiques lchelle mondiale seront voques. Enfin, il sagira de prsenter le
GIEC et les principales conclusions de son quatrime rapport dvaluation sur lvolution
du climat, notamment des liens tablis entre les changements climatiques et
laugmentation de la frquence et de lampleur des catastrophes naturelles.
1.1 Bilan des catastrophes naturelles lchelle mondiale et en Asie
Selon le Centre de recherche sur lpidmiologie des dsastres (CRED), qui fait partie de
l'Universit catholique de Louvain (Belgique) et qui travaille avec l'Organisation mondiale
de la sant (OMS), le nombre de phnomnes naturels extrmes a dcupl entre la
premire et la deuxime moiti du 20e sicle, allant de moins de 580 plus de 6720
sinistres naturels (Gaillard, 2007). Malgr le fait que cette liste soit probablement
incomplte durant les premires annes de rfrence, il ny a aucun doute sur
laugmentation de leur frquence au cours de la deuxime moiti du 20e sicle (ib.). La
figure 1.1 illustre lvolution du nombre de dsastres naturels enregistrs pour la
priode 1900-2005. Elle dmontre une augmentation significative du nombre de
phnomnes de nature hydromtorologique, particulirement partir des annes 1980.
Pour sa part, la figure 1.2 illustre lvolution du nombre de catastrophes naturelles pour la
priode 1980-2010. travers cette figure, on remarque que, depuis 1980, le nombre de
catastrophes naturelles enregistres a plus que doubl, passant de moins de 400 en 1980
plus de 800 pour les cinq dernires annes (except pour 2008). Il est galement
possible de voir le type de catastrophe naturelle pour chaque anne, soit les vnements
gophysique, mtorologique, hydrologique ou climatique. Alors que le nombre
dvnements gophysiques demeure sensiblement stable, on remarque une
augmentation du nombre de phnomnes mtorologiques, hydrologiques et climatiques.
5
Lgende : Biologique : pidmie, infestation dinsectes
Gologique : Sisme, tsunami, ruption volcanique Hydromtorologique : Crue, inondation fluviale, tempte pluviale, glissement de terrain, tempte tropicale, tempte de neige, grle, tornade, tempte locale, scheresse, vague de chaleur, gel, incendie de fort
Figure 1.1 : Nombre de dsastres naturels enregistrs l'chelle mondiale, 1900-2005
(tir de UNISDR, s. d.a)
Lgende : vnement gophysique : Sisme, ruption volcanique, tsunami vnement mtorologique : Tempte tropicale, tempte de neige, grle, tornade, tempte locale vnement hydrologique : Crue, inondation fluviale, tempte pluviale, glissement de terrain vnement climatique : Vague de chaleur, gel, incendie de fort, scheresse
Figure 1.2 : Nombre et type de catastrophes naturelles lchelle mondiale, 1980-2010
(tir de Munich Re, 2011, p. 44)
6
LAsie est reconnue pour tre la rgion du monde la plus en proie aux catastrophes
naturelles. Les zones ctires sont notamment trs touches. Mustapha Meghraoui,
physicien gologue l'Institut de physique du globe de Strasbourg, insiste sur
limportance davoir une vision long terme (sur 3000 ans ou plus) et non court terme
des calamits naturelles (De Malet, 2008). Nanmoins, les chiffres sont l : des 10 plus
grandes catastrophes naturelles depuis 1950, six ont frapp lAsie (UNISDR, 2009b).
Base sur la dfinition des Nations Unies, une catastrophe naturelle est qualifie de
grande
si une rgion ou un pays est dpass par la situation. Cest le cas lorsque des milliers de gens meurent, que des centaines de milliers de personnes se retrouvent sans-abri ou lorsque les pertes conomiques ou les pertes couvertes par les assurances sont exceptionnelles et que le pays ne peut les assumer (Munich Re, 2011, p. 45) (traduction libre).
Lgende : Biologique : pidmie, infestation dinsectes
Gologique : Sisme, tsunami, ruption volcanique Hydromtorologique : Crue, inondation fluviale, tempte pluviale, glissement de terrain, tempte tropicale, tempte de neige, grle, tornade, tempte locale, scheresse, vague de chaleur, gel, incendies de fort
Figure 1.3 : Distribution rgionale des catastrophes naturelles par type, 1991-2005
(tir de UNISDR, s. d.b)
La figure 1.3 montre une distribution rgionale des catastrophes naturelles par type
(biologique, gologique ou hydromtorologique) pour la priode 1991-2005. On constate
un nombre lev de catastrophes naturelles dorigine hydromtorologique en Asie ainsi
7
que pour le continent des Amriques. LAsie est galement le continent qui a enregistr le
plus de phnomnes gologiques pour cette priode, tandis que lAfrique est le continent
qui a enregistr le plus de phnomnes biologiques.
Le continent asiatique est notamment reconnu pour ses caractristiques gophysiques
qui le rendent plus risque (De Malet, 2008). Il sagit non seulement de lune des rgions
les plus sismiques au monde, elle est galement reconnue pour son cocktail explosif
au point de vue climatique (ib.). Au niveau de la tectonique des plaques, celles de lAsie
ont une dformation trs rapide. Alors que le systme de plaques indo-himalayen pousse
contre le continent, de nombreuses failles sont prsentes dans le Sud et le Sud-Est
asiatique, do la frquence des sismes dans cette rgion du monde (ib.). Au niveau
climatique, les masses dair chaud provenant des ocans Pacifique et Indien, mles aux
masses dair froid du Tibet et de la Sibrie provoquent notamment de nombreux cyclones
(ib.). Il est noter que les pays industrialiss sont aussi affects par les cataclysmes
naturels, pas seulement les pays moins dvelopps. Les nombreux morts et disparus au
Japon, laccident nuclaire Fukushima, ainsi que la situation conomique prcaire suite
au tsunami qui a frapp lle nippone le 11 mars dernier le confirment.
Par ailleurs, avec 960 catastrophes naturelles, lanne 2010 reprsente la deuxime
anne record depuis 1980, juste derrire lanne 2007 (Munich Re, 2011). Elle a ainsi
dpass de loin la moyenne annuelle de 785 sinistres (ib.). Selon les donnes de la
socit de rassurance Munich Re, 91 % des catastrophes de 2010 sont dues aux
conditions atmosphriques, tandis que 9 % sont attribuables aux tremblements de terre et
aux ruptions volcaniques (ib.). Comme pour les annes prcdentes, lAmrique et lAsie
sont les deux continents les plus touchs, avec 367 et 317 vnements extrmes
respectivement (ib.).
Alors que 2009 ne comptabilise aucune grande catastrophe naturelle (selon la
dfinition des Nations Unies), cinq des vnements de 2010 rpondent ces critres.
Ces vnements sont les tremblements de terre en Hati, au Chili et en Chine, les
inondations au Pakistan et la vague de chaleur causant des feux de fort en Russie. La
figure 1.4 prsente un bilan des catastrophes naturelles en 2010.
8
Figure 1.4 : Bilan des catastrophes naturelles lchelle mondiale en 2010
960 phnomnes naturels extrmes
50 phnomnes naturels majeurs En 2010, cinq alas naturels ont rpondu aux critres applicables une grande catastrophe naturelle.
(tir de Munich Re, 2011, p. 55)
Lgende : vnement gophysique : Sisme, ruption volcanique, tsunami vnement mtorologique : Tempte tropicale, tempte de neige, grle, tornade, tempte locale vnement hydrologique : Crue, inondation fluviale, tempte pluviale, glissement de terrain vnement climatique : Vague de chaleur, gel, incendie de fort, scheresse
9
1.2 Pertes humaines
Quil sagisse de pertes humaines, de disparus, de blesss, de sans-abri ou de rfugis,
des dizaines de milliers de personnes sont affectes par les cataclysmes naturels chaque
anne. Selon un rcent rapport publi conjointement par la Banque mondiale et lONU,
les catastrophes naturelles ont caus la mort de 3,3 millions de personnes depuis 1970,
soit une moyenne de 82 500 personnes par anne (The World Bank and the United
Nations, 2010). Par contre, il y a de grandes variations danne en anne sur le bilan des
pertes humaines et aucune vritable tendance, comme le dmontre la figure 1.5. Les
pays moins dvelopps sont galement ceux qui enregistrent le plus de pertes humaines
(ib.). En outre, au cours des deux dernires dcennies, plus de personnes ont t
affectes par des dsastres naturels, surtout les populations pauvres des pays moins
dvelopps, quelles soient rurales ou urbaines. Malgr tout, le nombre de morts tend
diminuer lchelle mondiale (ib.).
Figure 1.5 : Variation du nombre de morts et du nombre de personnes affectes par les
catastrophes naturelles, 1970-2010
(tir de The World Bank and the United Nations, 2010, p. 27)
La figure 1.6 offre un aperu du nombre de victimes des catastrophes naturelles par
100 000 habitants lchelle mondiale pour la priode 1976-2005. On constate que le
nombre de morts est particulirement lev (plus de 4999 par 100 000 habitants) dans
10
certains pays asiatiques comme le Bangladesh, la Chine et lInde. Certains pays dAfrique
comme la Mozambique, le Niger, ou encore la Mauritanie enregistrent galement un
nombre trs lev de victimes. En contrepartie, des pays dvelopps comme les tats-
Unis, le Canada ou les pays europens enregistrent peu de morts (moins de 999 par
100 000 habitants).
Figure 1.6 : Nombre de victimes de catastrophes naturelles par 100 000 habitants, 1976-2005
(tir de EM-DAT, 2009)
Selon la base de donnes internationale sur les catastrophes (EMDAT), les dsastres
naturels ont des rpercussions sur 225 millions de personnes (morts, blesss, sans-abri,
dplacs) en moyenne chaque anne, dont 98 % se trouvent dans un PED (SIPC, 2006-
2007). Entre janvier 1975 et juin 2008, pas moins de 8866 vnements climatiques et
gologiques ont entran la mort de 2 283 767 individus (UNISDR, 2009b). Parmi ces
milliers dvnements, on dnombre 23 grandes (toujours selon la dfinition des
Nations Unies) catastrophes naturelles ayant caus la mort de 1 786 084 personnes, et
ce, principalement dans les PED (ib.). En dautres termes, 78 % des mortalits survenues
au cours de cette priode sont dues 0,26 % des vnements (ib.). Le tableau 1.1
prsente ces catastrophes. On remarque dans ce tableau que cinq des dix cataclysmes
ayant caus le plus de morts ont eu lieu dans la priode 2003-2008. Sajoutent ces
11
catastrophes le sisme survenu Hati en janvier 2010 (222 570 morts), qui prendrait le
quatrime rang de ce tableau.
Tableau 1.1 : Catastrophes ayant caus plus de 10 000 morts, 1975- 2008*
*Les catastrophes survenues dans la priode 2003-2008 sont surlignes en bleu.
(tir de UNISDR, 2009b, p. 4)
Selon un rapport de lOrganisation des Nations Unies pour les tablissements humains
(ONU-HABITAT) datant de 2007, les tremblements de terre et les tsunamis sont les alas
gologiques les plus mortels (UN-HABITAT, 2007). lui seul, le tsunami survenu en 2004
au large de Sumatra a caus la mort de plus de 226 000 individus. Selon ce mme
rapport, cest en Asie que les catastrophes naturelles, lexception des tempratures
extrmes et des ruptions volcaniques, touchent le plus de personnes (morts, blesss,
sans-abri, dplacs) (ib). Cest dailleurs ce continent qui dtient le triste record du plus
grand nombre de dcs lis aux dsastres naturels depuis 1980. Pour la priode 1980-
2008, 3341 cataclysmes naturels ont caus la mort de plus de 1,1 million dindividus, soit
12
une moyenne de prs de 39 500 personnes par anne, alors que la moyenne mondiale
est de 82 500 morts, comme il a t mentionn prcdemment (PreventionWeb, 2011a).
En dautres termes, au cours de cette priode, prs de 48 % des pertes humaines ont eu
lieu sur le continent asiatique. Le tableau 1.2 montre 10 catastrophes naturelles ayant
caus le plus de morts sur le continent asiatique entre 1980 et 2008. Pour sa part, la
figure 1.7 prsente le pourcentage de pertes humaines en Asie par type de catastrophe
naturelle pour la mme priode. On remarque que prs de 50 % des pertes humaines en
Asie sont dues des vnements de type gologique et que le tiers est caus par des
temptes.
En outre, toujours pour la priode 1980-2008, prs de 4,7 milliards dAsiatiques ont t
affects (blesss, sans-abri, dplacs) par les dsastres naturels, soit une moyenne de
163,5 millions de personnes chaque anne (ib.). Le tableau 1.3 prsente 10 phnomnes
naturels ayant affect le plus dAsiatiques au cours de cette priode. La figure 1.8, elle,
expose le pourcentage de personnes affectes en Asie par type de catastrophe naturelle.
Il est noter que les inondations sont le type de dsastre naturel qui a affect le plus
dindividus. En effet, sur le nombre de personnes touches entre 1980 et 2008, plus de
57 % dentre elles le sont en raison des inondations. Pour leur part, les scheresses ont
eu des rpercussions sur plus du quart dentre elles, tandis que les temptes reprsentent
13,5 % et les sismes, seulement 2 %.
Tableau 1.2: Dix catastrophes naturelles ayant caus le plus de pertes humaines en Asie,
1980-2008
Pays Type de
catastrophe Anne Nombre de morts
Indonsie Sisme* 2004 165 708
Bangladesh Tempte 1991 138 866
Myanmar (Birmanie)
Tempte 2008 138 866
Chine Sisme* 2008 87 476
Pakistan Sisme* 2005 73 338
Iran Sisme* 1990 40 000
Sri Lanka Sisme* 2004 35 399
Iran Sisme* 2003 26 796
Inde Sisme* 2001 20 005
Turquie Sisme* 1999 17 127
Sisme* : cela inclut les tsunamis
(modifi de PrventionWeb, 2011a)
13
Lgende : Sisme : 48,3 %
Tempte : 33,5 % Inondation : 11,3 %
pidmie : 3,6 % Temprature extrme : 1,4 % Mouvement massif humide (affaissement, chute de pierres, avalanche et glissement de terrain) : 1,2 %
Figure 1.7: Distribution (exprime en %) de pertes humaines en Asie par type de
catastrophe naturelle, 1980-2008
(tir de PrventionWeb, 2011a)
Tableau 1.3: Dix catastrophes naturelles ayant affect le plus de personnes en Asie,
1980-2008
Pays Type de
catastrophe Anne
Nombre de personnes
affectes au total
Inde Scheresse 1987 300 000 000
Inde Scheresse 2002 300 000 000
Chine Inondation 1998 238 973 000
Chine Inondation 1991 210 232 227
Chine Inondation 1996 154 634 000
Chine Inondation 2003 150 146 000
Inde Inondation 1993 128 000 000
Chine Inondation 1995 114 470 249
Chine Inondation 2007 105 004 000
Chine Inondation 1999 101 024 000
(modifi de PrventionWeb, 2011a)
14
Lgende : Inondation : 57,2 % Scheresse : 26,1 %
Tempte : 13,5 % Sisme : 2 %
Figure 1.8: Distribution (exprime en %) de personnes affectes en Asie par type de
catastrophe naturelle, 1980-2008
(tir de PrventionWeb, 2011a)
Pour sa part, le PNUD, conjointement au Bureau pour la prvention des crises et du
relvement (BCPR), a publi, en novembre 2004, un rapport sur la problmatique intitul
La rduction des risques de catastrophes : un dfi pour le dveloppement. Ce rapport fait
tat des dfis que posent les catastrophes naturelles sur la ralisation des OMD tablis
en 2000. Selon ce rapport, des milliards de personnes dans plus de cent pays sont
exposes chaque jour au moins lun des alas naturels suivants : tremblement de terre,
cyclone tropical, inondation ou scheresse (PNUD, 2004). Ces quatre types de
catastrophes causent elles seules 94 % des dcs, soit 184 dcs par jour en moyenne
dans diverses rgions du monde (ib.). Toujours selon ce rapport, le PNUD estime que
pour chaque personne dcde, environ 3 000 personnes sont affectes par les risques
naturels (ib.).
Par ailleurs, un des faits saillants du rapport conjoint de la Banque mondiale et de lONU
pour la prvention des pertes humaines et conomiques lies aux risques naturels est
que le nombre de personnes exposes aux sismes et aux ouragans pourrait passer de
15
680 millions en 2000 1,5 milliard en 2050 (The World Bank and the United Nations,
2010). Le nombre dindividus exposs ces alas naturels pourrait ainsi doubler en 50
ans. La figure 1.9 illustre une projection de lexposition aux cyclones et aux tremblements
de terre dans les grandes villes du monde pour la priode 2000-2050.
Pour lanne 2010, pas moins de 295 000 individus sont morts des suites dun ala
climatique extrme (Munich Re, 2011). Lanne dernire a ainsi t la plus fatale en
termes de pertes humaines depuis 1983, et la deuxime depuis les 30 dernires annes
(ib.). La figure 1.10 prsente la distribution en pourcentage du type dvnement
(vnement gophysique, mtorologique, hydrologique ou climatique) ayant caus la
mort en 2010. Comme il a t mentionn en introduction, le sisme en Hati est celui qui a
caus le plus de pertes humaines, soit pas moins de 222 570 morts.
Figure 1.9 : Exposition aux cyclones et aux sismes dans les grandes villes du monde,
projection 2000-2050
(tir de The World Bank and the United Nations, 2010, p.20)
En rsum, des centaines de milliers de personnes perdent la vie chaque anne des
suites de cataclysmes naturels, tandis que des millions dentre elles sont blesses,
perdent leur maison, ou sont forces de migrer. En outre, cest souvent dans les zones
les plus vulnrables et o la rsilience est moindre que lon enregistre le plus de pertes en
vies humaines et le plus dindividus affects.
16
Lgende : vnement gophysique : Sisme, ruption volcanique, tsunami vnement mtorologique : Tempte tropicale, tempte de neige, grle, tornade, tempte locale vnement hydrologique : Crue, inondation fluviale, tempte pluviale, glissement de terrain vnement climatique : Vague de chaleur, gel, incendie de fort, scheresse
Figure 1.10 : Distribution (exprime en %) du type dvnement ayant caus la mort en
2010
(tir de Munich Re, 2011, p. 44)
1.3 Rfugis environnementaux
Chaque anne, des millions de personnes sont forces de se dplacer, en raison des
changements climatiques, et notamment en raison de laugmentation de la frquence et
de lampleur des phnomnes climatiques extrmes. On assiste donc aujourdhui
lapparition dune nouvelle catgorie de rfugis : les rfugis environnementaux. Le
Programme des Nations Unies pour lEnvironnement (PNUE) dfinit ces rfugis comme
tant des personnes forces de quitter leur habitation dune faon temporaire ou
permanente, en raison de la dgradation (naturelle ou humaine) de leur environnement
qui bouleverse gravement leur cadre de vie et/ou qui dsquilibre srieusement leur
qualit de vie (Seghier, 2005). En 2003, lONU a dailleurs indiqu que, pour la premire
fois de lhistoire, le nombre de rfugis environnementaux a dpass celui des rfugis
politiques ou de guerre (Les rfugis de la plante bleue, 2006).
Le Haut Commissaire des Nations Unies pour les rfugis, M. Antnio Guterres a
soulign, au cours de la confrence sur les changements climatiques Copenhague
17
(Danemark) en dcembre 2009, que les alas climatiques deviendront dans un futur
proche le facteur principal de dplacement des populations (Fleming, 2009). Selon lONU,
les rfugis environnementaux sont et seront pour la plupart issus des pays les plus
pauvres de la plante.
Selon le rapport 2010 de lOrganisation internationale pour les migrations (OIM), le
nombre de personnes dplaces en raison des alas naturels est lune de leurs donnes
les plus fiables concernant les migrations caractre environnemental (OIM, 2010a). Le
Bureau de la coordination des affaires humanitaires (BCAH) des Nations Unies et
lInternal displacement monitoring centre (IDMC), soit le Centre de suivi des
dplacements internes, estiment que le nombre dindividus dplacs ou vacus en 2008
en raison dalas naturels d apparition soudaine se chiffre plus de 36 millions, un
nombre considrable pour une anne seulement (ib., p. 121). Le continent asiatique a t
de loin la rgion qui a enregistr le plus de dplacs au cours de la mme anne, soit
prs de 31,4 millions, ce qui reprsente plus de 87 % des flux migratoires dus aux
catastrophes naturelles (ib.). Dailleurs, 17 des 20 dsastres naturels qui ont entran le
plus de dplacements en 2008 ont eu lieu en Asie. Par ailleurs, lOIM souligne que malgr
lattention des mdias et des dcideurs sur les phnomnes climatiques extrmes comme
les cyclones, les ouragans ou les tsunamis, les transformations graduelles de
lenvironnement auront plus de rpercussions sur les flux migratoires des populations
(ib.). Daprs les prvisions, le nombre de rfugis de lenvironnement pourrait atteindre
200 millions dici 2050 (Becklumb, 2010).
Par ailleurs, mme si la frquence des phnomnes naturels extrmes a augment au
cours des dernires dcennies, cela na pas engendr de flux migratoires internationaux
supplmentaires (OIM, 2010a). En effet, la plupart des dplacements sont de courte
dure et provisoires et la plupart des personnes dplaces nont pas les ressources
ncessaires pour migrer ltranger (ib.). Selon lOIM, les changements
environnementaux, incluant les catastrophes naturelles, auront une incidence beaucoup
plus grande sur les migrations internes que sur les migrations internationales (ib.).
Les catastrophes naturelles ont des consquences considrables sur lconomie des
pays touchs. Il existe galement des disparits entre les pays du Nord et ceux du Sud,
disparits qui se creusent dautant plus suite une catastrophe naturelle.
18
1.4 Pertes conomiques et disparits nord-sud
Les catastrophes naturelles ont certes des effets nfastes sur le dveloppement
conomique. Dailleurs, les pertes totales de 2010, quivalant 150 milliards dUS $, sont
les cinquimes plus importantes depuis 1980 (Munich Re, 2011).
En moyenne, le cot conomique annuel des catastrophes naturelles est pass de 3,9
milliards de dollars US $ dans les annes 50, 63 milliards dans les annes 90, puis 67
milliards de dollars au cours de la dernire dcennie (UN-HABITAT, 2007). Selon la
compagnie de rassurance Munich Re, depuis les annes 60, la charge des pertes
conomiques a t multiplie par six, tandis que les pertes couvertes par les assurances
ont t multiplies par 32 (Ozer, 2008). Avant 1987, une seule catastrophe avait cot
plus de deux milliards dUS $ au secteur des assurances. Or, depuis, ce montant a t
atteint plus de 32 reprises (ib.). ce jour, la catastrophe naturelle la plus coteuse de
lhistoire de lhumanit sera probablement le sisme et le tsunami ayant frapp le Japon le
11 mars dernier. Les autorits nippones estiment plus de 290 milliards dUS $ les
dgts sur les infrastructures et les logements (Guillemoles, 2011). Qui plus est, cette
estimation ninclut pas les rpercussions sur lconomie nippone, de mme que les cots
de laccident nuclaire de Fukushima. Et cest sans compter les consquences de la
radioactivit sur ltre humain et sur lenvironnement. Avant que ces catastrophes ne
dvastent le Japon en mars dernier, le cataclysme naturel le plus coteux tait louragan
Katrina qui a ravag la Nouvelle-Orlans en 2005, et qui a engendr 125 milliards dUS $
de pertes conomiques (UNISDR, 2009 b). Selon le rapport conjoint de la Banque
mondiale et de lONU publi en 2010, les pertes annuelles mondiales causes par les
phnomnes naturels extrmes pourraient atteindre jusqu 185 milliards dUS $ par an
dici la fin du sicle, sans prendre en compte le calcul de limpact du changement
climatique (Organisation des Nations Unies pour lducation, la science et la culture
(UNESCO), 2011). Afin de voir le cot global caus par les catastrophes naturelles, il
faudrait ainsi ajouter de 26 28 milliards dUS $ aux 185 milliards dj comptabiliss (ib.).
La figure 1.11 montre lvolution, entre 1980 et 2010, des pertes conomiques totales et
des pertes financires couvertes par les assurances engendres par les grandes
catastrophes naturelles (toujours selon la dfinition des Nations Unies qui qualifie une
catastrophe naturelle de grande si une rgion ou un pays est dpass par la situation)
19
lchelle mondiale. Globalement, on constate une tendance laugmentation. Par
ailleurs, de janvier 1975 octobre 2008, on estime que les pertes conomiques slvent
1 527,6 milliards dUS $. Le tableau 1.4 prsente 25 grandes catastrophes
naturelles survenues au cours de la priode 1975-2008. Il est noter que 0,28 % des
catastrophes ont entran plus de 40 % de pertes conomiques, principalement dans les
pays dvelopps (ib.). De mme que pour les pertes humaines, on observe une
concentration dans la priode 2003-2008. En effet, quatre des 10 catastrophes ayant
entran le plus de pertes conomiques sont survenues au cours de cette priode. Tout
compte fait, avec ces donnes, on remarque que les pertes humaines et conomiques
sont directement lies au plan gographique et elles sont aussi lies un nombre trs
rduit de catastrophes naturelles (ib.). Dailleurs, il est noter que ces zones
gographiques comptent souvent beaucoup de personnes vulnrables.
Lgende : Pertes totales (en valeur de 2010)
Pertes couvertes par les assurances
Figure 1.11 : volution des pertes conomiques totales et assures, avec tendances
long terme, engendres par les catastrophes naturelles lchelle mondiale, 1980-2010
(tir de Munich Re, 2011, p. 47)
20
Tableau 1.4 : Catastrophes ayant entran des pertes de plus de 10 milliards dUS $,
1975- 2008*
* Les catastrophes surlignes en bleu reprsentent celles qui ont eu lieu dans la priode 2003-2008.
(tir de UNISDR, 2009b, p. 5)
Les catastrophes naturelles montrent quel point il y a des disparits conomiques entre
les pays du Nord et ceux du Sud. Le tsunami qui a ravag les ctes dAsie du Sud-Est est
un bon exemple pour concrtiser ces dires (Ozer, 2005). Alors que le cot total des
catastrophes naturelles sest lev plus de 130 milliards dUS $ pour lanne 2004 (dont
40 milliards dUS $ a t couvert par le secteur des assurances), les assurances nauront
dbourser que 100 millions dUS $ pour le tsunami de locan Indien, soit lquivalent de
moins de 0,08 % (ib.). Une si petite somme pour le plus grand cataclysme naturel de
ces vingt dernires annes [] (ib., p.42). Tout compte fait, alors que les pays
dvelopps assurent leurs biens, ceux du Sud nen ont pas les moyens, tant donn les
21
primes inaccessibles (ib.). En outre, la principale proccupation de ces populations est de
survivre au quotidien et non pas dassurer leurs biens.
Par ailleurs, lindex de risques de catastrophes naturelles (Natural Disasters Risk Index),
mis sur pied par la socit anglaise Maplecroft, a pour but de permettre au monde des
affaires et au secteur des assurances didentifier les risques des actifs internationaux
(PreventionWeb, 2011b). Lindex calcule les rpercussions des catastrophes naturelles en
termes de pertes humaines annuelles par million dhabitants, ainsi que la tendance de la
frquence des ces dsastres au cours des 30 dernires annes (ib.). La mthodologie
prconise reflte la probabilit que diffrents types de phnomnes naturels arrivent,
savoir les sismes, les ruptions volcaniques, les tsunamis, les temptes, les inondations,
les scheresses, les glissements de terrain, les tempratures extrmes et les pidmies
(ib.). La figure 1.12 illustre cet index lchelle mondiale. Quinze pays, dont 10 en Asie,
ont t nots comme tant des pays risques extrmes . Il sagit du Bangladesh, de
lIndonsie, de lIran, du Pakistan, des Philippines, de lInde, de la Chine, du Sri Lanka, du
Myanmar et de lAfghanistan. Il est noter que ces 15 pays risques extrmes ont
tous des conomies mergentes et figurent dans les chanes dapprovisionnement de
beaucoup dentreprises multinationales (ib.).
Les pertes conomiques quessuient les pays pauvres suite une catastrophe naturelle
sont moindres que celles des pays riches, en raison notamment du manque de rgimes
dassurances. Nanmoins, ces pertes sont proportionnellement plus grandes par rapport
la taille de leur conomie que les pays riches (UNISDR, 2009a). Daprs les
estimations, la part du produit intrieur brut (PIB) perdu est 20 fois plus importante dans
les PED que dans les pays industrialiss (Ozer, 2008). titre dexemple, les pertes
conomiques du sisme secouant le Pakistan en 2005 se sont leves cinq milliards
dUS $ de dgts; ce qui se traduit par lquivalent des prts de la Banque mondiale ce
pays au cours de la dernire dcennie (UNISDR, 2009b). Nombre de petits tats
insulaires en dveloppement (PEID) et de pays en dveloppement sans littoral (PDSL) se
retrouvent galement dans cette situation suite un cataclysme naturel. Ces tats
prsentent une rsilience assez faible suite aux pertes, ce qui se traduit par de graves
consquences sur le plan de leur dveloppement conomique (ib.). Le destin des PEID
reprsente en quelque sorte un microcosme de lhumanit, car il permet de voir la
vulnrabilit des tres humains face aux phnomnes naturels extrmes (Les rfugis de
22
la plante bleue, 2006). En Asie du Sud par exemple, les inondations causent en
moyenne 15 fois plus de pertes conomiques proportionnellement leur PIB que dans les
pays de lOrganisation pour la coopration et le dveloppement conomiques (OCDE)
(UNISDR, 2009a).
Figure 1.12: Index de risques de catastrophes naturelles
(tir de PreventionWeb, 2011 b)
Pour donner un exemple concret, il est intressant dtablir une comparaison entre le
Japon et les Philippines pour dmontrer la plus grande vulnrabilit de ce deuxime pays
par rapport au premier face aux phnomnes naturels extrmes. La population du Japon
est de 127 millions tandis que celle des Philippines est moindre, avec tout de mme 98
millions dhabitants (ib.). Quant au PIB du Japon, il fait six fois celui des Philippines (ib.).
Dans le premier cas, on estime 22,5 millions le nombre dindividus exposs aux
cyclones tropicaux chaque anne, tandis que ce chiffre est de 16,5 millions dans le
deuxime cas. En dpit de lexposition plus leve de la population nippone aux cyclones,
le taux de mortalit des Philippins est en moyenne 17 fois plus lev (ib.). La figure 1.13
montre une cartographie et une analyse partir dun systme dinformation gographique
(SIG) du Japon et des Philippines afin dillustrer le risque de mortalit face aux cyclones
23
tropicaux dans ces deux pays. Selon ce bilan des Nations Unies, cela na rien
dexceptionnel. Dailleurs, le risque de mortalit des habitants des pays faible revenu
exposs aux cyclones tropicaux est 200 fois plus lev que celui des pays de lOCDE
(ib.).
En bref, on constate une augmentation des alas naturels extrmes lchelle mondiale,
qui engendre des consquences majeures en termes de pertes humaines et financires,
de mme quen flux migratoires. travers ces phnomnes naturels extrmes, on
remarque galement le clivage qui existe entre les pays dvelopps et les pays du tiers-
monde.
Maintenant que lvolution et les rpercussions des alas climatiques extrmes ont t
tablies, il est pertinent de se poser des questions quant aux liens existants entre ces
derniers et les changements climatiques.
Figure 1.13 : Risque de mortalit pour les cyclones tropicaux dans deux pays prsentant
une exposition similaire : le Japon et les Philippines
(tir de UNISDR, 2009a, p. 1)
24
1.5 Catastrophes naturelles et les changements climatiques
Au cours des dernires annes, les recherches concernant lvolution du climat ont
progress de manire considrable. Comme le souligne Rajendra Pachauri, prsident du
GIEC, dans un consensus crasant, la communaut scientifique reconnat que les
changements climatiques sont bien rels (ONU, 2010). Dans un premier temps, une
prsentation du GIEC sera dpeinte. Dans un deuxime temps, les principales
conclusions du dernier rapport dvaluation du GIEC concernant les changements
climatiques (incluant les conclusions concernant laugmentation des alas climatiques
extrmes), de mme que les incidences anticipes sur lAsie seront exposes.
1.5.1 Prsentation du Groupe dexperts intergouvernemental sur lvolution du
climat
Le GIEC a t cr en 1988 par lOrganisation mtorologique mondiale (OMM) et le
PNUE. Il compte lheure actuelle 194 tats membres (ONU, 2010). Cet organe
intergouvernemental a
pour mission dvaluer, sans parti pris et de faon mthodique, claire et objective, les informations dordre scientifique, technique et socio-conomique qui nous sont ncessaires pour mieux comprendre les fondements scientifiques des risques lis au changement climatique dorigine humaine, cerner plus prcisment les consquences possibles de ce changement et envisager dventuelles stratgies dadaptation et dattnuation (GIEC, 2011).
Lun des principaux mandats du GIEC consiste donc faire ltat des connaissances
concernant les changements climatiques. Ses valuations sont fondes sur des
publications scientifiques et techniques largement reconnues (ib.). Jusqu prsent, cet
organe a publi quatre rapports dvaluation depuis sa cration (en 1990, 1995, 2001 et
2007). Le Cinquime Rapport dvaluation (AR5) sur lvolution du climat est en cours de
prparation et paratra en 2014. Le GIEC publie galement divers rapports
mtorologiques, des documents techniques et des rapports spciaux. Le groupe prpare
actuellement un rapport spcial concernant les catastrophes naturelles, qui sortira au
cours de lanne 2011 : Grer les risques dvnements extrmes et des catastrophes
pour amliorer ladaptation au changement climatique (ib.).
25
Adopt en novembre 2007 Valence (Espagne), le quatrime rapport de synthse sur les
changements climatiques rsume les rapports de trois groupes de travail du GIEC. Ces
groupes de travail ont pour mandat dtudier les principes physiques et cologiques des
changements climatiques, de leurs impacts, de la vulnrabilit et de ladaptation aux
changements climatiques. Ce Quatrime Rapport dvaluation (AR4) sappuie sur
lexpertise dune vaste communaut scientifique. Plus de 500 spcialistes dune centaine
de nations y ont contribu, sans compter les 2000 examinateurs qui ont galement
particip sa rdaction (ib.). Enfin, le GIEC demeure une sommit scientifique en ce qui
concerne lvolution du climat et ces publications sont largement reconnues par la
communaut internationale.
1.5.2 Principales conclusions du Quatrime Rapport dvaluation du GIEC
Les conclusions du Rapport de synthse du Quatrime Rapport dvaluation du GIEC, de
mme que plusieurs autres publications scientifiques, dmontrent sans quivoque que
notre plante subit un rchauffement climatique et que ce rchauffement est
essentiellement d aux activits anthropiques (GIEC, 2007). Il est galement prouv
scientifiquement que ces changements climatiques entraneront une augmentation (en
nombre et en intensit) des phnomnes mtorologiques extrmes lchelle mondiale
(SIPC, 2006-2007).
Les scientifiques du GIEC ont notamment observ une hausse, lchelle mondiale, des
tempratures moyennes de latmosphre et de locan, de la fonte massive de la neige et
des glaciers, de mme quune lvation du niveau moyen de la mer (GIEC, 2007, p.2). Le
GIEC a constat quentre 1995 et 2006, 11 de ces 12 annes font partie du palmars des
douze annes les plus chaudes depuis 1850, cest--dire depuis que lon dispose des
relevs instrumentaux de la temprature la surface du globe (ib.).
Dici la fin de ce sicle, le GIEC prdit un rchauffement du systme climatique. Avec 90
95 % de probabilit, ils estiment galement que les vagues de chaleur, les fortes
prcipitations et les autres alas climatiques extrmes seront de plus grande frquence,
de plus grande intensit et surtout, de plus en plus variables dici les prochaines annes
(ib.).
26
Par ailleurs, le GIEC affirme dans son rapport que lactivit humaine engendre des
impacts sur diffrents aspects du climat, dont llvation de la temprature moyenne (ib.).
En effet, les activits humaines auraient trs probablement contribu llvation du
niveau de la mer au cours de la deuxime moiti du 20e sicle (ib., p. 6). Elles auraient
probablement eu un impact sur la configuration des vents, modifiant ainsi la trajectoire
des temptes extratropicales et le rgime des tempratures (ib.). Qui plus est, elles
auraient sans doute contribu aux risques de vague de chaleur, la progression de la
scheresse depuis les annes 1970 et la frquence des pisodes de fortes
prcipitations, causant ainsi des inondations dans diffrentes rgions du globe (ib.).
Dautre part, le GIEC estime que si rien nest fait, une aggravation de la vulnrabilit des
populations est prvue. En effet, comme il a t possible de le constater avec certains
phnomnes mtorologiques extrmes survenus au cours des dernires annes, la
vulnrabilit des populations, tant dans les pays dvelopps que dans les PED, est plus
grande que ce que le GIEC avait estim dans son troisime Rapport dvaluation paru en
2001 (ib.). De mme, le GIEC pronostique une augmentation des scheresses, des
vagues de chaleur, des inondations, de mme quune intensification de leurs effets
dommageables (ib.). En outre, les changements climatiques auront trs probablement des
effets ngatifs sur les progrs raliss par rapport au dveloppement durable. Ils
pourraient aussi entraver la ralisation des OMD au cours du prochain demi-sicle (ib.).
Concernant les incidences anticipes pour lAsie, le rapport du GIEC prvoit que les
zones ctires, dont les rgions trs peuples des grands deltas dAsie du Sud, du Sud-
Est et de lEst, seront des endroits propices des risques dinondations marines et
fluviales (ib., p.11). galement, il estime que les changements climatiques accentueront
certainement les pressions que lurbanisation acclre, lindustrialisation et le
dveloppement conomique exercent dores et dj sur lenvironnement et les ressources
naturelles (ib.). En outre, pour cette rgion du monde, les modifications du cycle
hydrologique causeront probablement une hausse de la morbidit et de la mortalit
endmiques dues aux maladies diarrhiques qui accompagnent les crues et la
scheresse (ib.).
En bref, ce premier chapitre nous a permis de dresser un portrait de lvolution globale
des catastrophes naturelles. Il a t possible de constater quau cours des dernires
27
dcennies, les alas climatiques extrmes se sont accentus, et ce, autant en frquence
quen intensit. LAsie est le continent le plus en proie aux phnomnes naturels
extrmes. Au niveau du bilan des pertes humaines, il y a de grandes variations danne
en anne, mais ce sont certainement les pays moins dvelopps qui enregistrent le plus
de morts et o les migrations dues des alas naturels sont les plus importantes. Les
pertes conomiques quessuient les pays suite des catastrophes naturelles ont
galement augment de faon considrable au cours des dernires dcennies. Enfin, les
phnomnes climatiques extrmes inquitent la communaut internationale, si bien que
lon craint de ne pas atteindre les OMD.
Le chapitre suivant traitera des liens existants entre la pauvret et les risques de
catastrophes naturelles.
28
2. LIENS ENTRE PAUVRET ET CATASTROPHES NATURELLES
Suite cette prsentation de lvolution des phnomnes naturels au cours des dernires
dcennies, il semble ici pertinent de se poser la question suivante : pourquoi appelle-t-on
ces phnomnes naturels dune ampleur spectaculaire catastrophes ? Bien souvent,
lactivit humaine (celle des citoyens, du secteur priv ou de ltat) constitue lun des
facteurs transformant ces phnomnes extrmes de la nature en catastrophes tragiques
pour les populations et leur environnement (Walker, 1998). En outre, comme le souligne
Jean-Christophe Gaillard, les premires victimes sont souvent les laisss-pour-compte
de lordinaire et les oublis du dveloppement , bref les populations les plus pauvres
de la plante (Gaillard, 2007). En effet, le rapport mondial de 2007 sur les tablissements
humains dONU-HABITAT, consacr lamlioration de la sret et de la scurit
urbaines, conclut que ce sont principalement les PED, et particulirement les citadins
dfavoriss de ces pays qui sont les principales victimes des consquences des
phnomnes mtorologiques extrmes (UN-HABITAT, 2007).
Ce chapitre se divise en trois parties. Il sera dabord question de lindice de risque de
catastrophe mis sur pied par le PNUD. Par la suite, un tableau de la croissance
dmographique urbaine dans les pays du tiers-monde, incluant le continent asiatique,
sera dpeint. Enfin, il sagira de faire le lien entre vulnrabilit, pauvret, et les alas
naturels.
2.1 Indice de risque de catastrophe du PNUD
Dans son rapport sur la rduction des risques de catastrophes paru en 2004, le PNUD a
mis sur pied lindice de risque de catastrophe (IRC) afin de mieux comprendre la relation
entre le dveloppement et le risque de catastrophe. Selon les rsultats de lIRC en
fonction des quatre types de dsastres valus (tremblement de terre, cyclone tropical,
inondation et scheresse), le risque de catastrophe est beaucoup plus faible dans les
pays revenu lev que dans les pays faible ou moyen revenu. Les pays
dveloppement humain lev reprsentent 15 % des populations exposes aux
catastrophes naturelles, mais seulement 1,8 % des dcs (PNUD, 2004). loppos,
seulement 11 % des populations exposes aux catastrophes naturelles vivent dans les
29
pays faible dveloppement humain. Par contre, ces populations constituent plus de
53 % des dcs enregistrs suite un dsastre naturel (ib.).
Chaque anne, le PNUD estime 130 millions le nombre de personnes exposes aux
risques de tremblement de terre (PNUD, 2004). Des pays comme Hati, lIran,
lAfghanistan et lInde ont dmontr une forte vulnrabilit relative (population expose,
dcde) face aux sismes (ib.). Par ailleurs, en moyenne 119 millions de personnes sont
exposes chaque anne un risque de cyclone tropical (ib.). Des pays grande
population et situs sur des plaines ctires comme le Bangladesh, le Myanmar, le
Vietnam, les Philippines ou lInde sont trs vulnrables ce genre de catastrophe (ib.).
Concernant les inondations, prs de 196 millions de personnes dans plus de 90 pays y
sont exposes en moyenne chaque anne (ib.). Force est de constater une forte
vulnrabilit face ce type dala naturel dans de nombreux pays. Il existe galement des
inondations mineures et locales qui nont pas t comptabilises dans lvaluation de
lIRC du PNUD. Bien que ces inondations de moindre intensit ne causent pas de pertes
humaines, elles ont un impact ngatif sur le dveloppement des populations exposes et
sur lconomie de ces pays (ib.). Par ailleurs, le PNUD estime 220 millions le nombre
dindividus exposs la scheresse (ib.). Les tats africains sont les plus vulnrables
face cette catastrophe. Enfin, pour ces quatre phnomnes naturels, les rsultats du
PNUD dmontrent quen termes de superficie, les plus petits pays ont une exposition
relative plus leve (ib.).
2.2 Croissance urbaine explosive et bidonvilisation
Au cours des dernires dcennies, la population mondiale urbaine a augment
considrablement. Depuis 2007 environ, le balancier a bascul : plus de la moiti de la
population mondiale rside maintenant en ville ou dans une zone urbaine. En effet, sur les
6,9 milliards dindividus peuplant la plante, environ 3,5 milliards sont des citadins
(Worldometers, 2011). titre comparatif, la population mondiale tait dun peu plus de 2,5
milliards en 1950 et seulement 30 % vivaient en ville, soit peine 750 millions de
personnes (The World Bank and the United Nations, 2010).
Par ailleurs, on constate que la majeure partie de la population urbaine et des mgapoles
dans le monde se trouvent dans les pays faible revenu et revenu intermdiaire
30
(Fdration internationale des Socits de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge (FICR),
2010). On estime que sur les 3,5 milliards de citadins recenss dans le monde, 2,8
milliards vivent dans une mgapole des pays du Sud (ib.). La plupart des villes et
mgapoles dpassant le million dhabitants se trouvent en Asie (continent qui connat une
croissance urbaine phnomnale), en Afrique et en Amrique latine. Dailleurs, la Division
de la population des Nations Unies estime que la croissance de la population mondiale
des prochaines dcennies se fera majoritairement dans les villes et bourgs faible revenu
et revenu intermdiaire (United Nations Population Division, 2010).
En outre, une grande partie de cette croissance dmographique urbaine a et aura lieu
dans les taudis des villes et mgapoles des pays du tiers-monde. Peu importe
lappellation quon leur donne, que ce soit des quartiers informels, des bidonvilles, des
baraques, des slums (appellation anglaise pour dsigner les bidonvilles), des townships
(reprsentent les ghettos noirs crs en priphrie des agglomrations pendant
lapartheid en Afrique du Sud), ou des favelas (dsignent les bidonvilles brsiliens, Rio
de Janeiro notamment), les conditions sanitaires et de logement y sont trs rudimentaires.
Selon ONU-HABITAT,
une zone est un bidonville ds lors que lun des cinq critres de base de lhabitat humain fait dfaut, cest--dire : un accs leau, des dispositifs dassainissement, un logement durable, un espace de vie suffisant [et] une scurit lemploi (Mller, 2010).
ce propos, lun des principaux objectifs des OMD vise amliorer les conditions de vie
des populations vivant dans les bidonvilles. Dans nombre de rgions des PED, les
habitants des bidonvilles reprsentent plus de 25 % de la population des agglomrations
urbaines (ib.). galement, bien que lon manque de chiffres prcis, lONU estime un
milliard le nombre dindividus habitant les banlieues pauvres dans ces agglomrations et
l'on prvoit que ce chiffre sera de 1,4 milliard dici 2020, moins que les gouvernements
et les institutions internationales ne parviennent financer et grer la situation (FICR,
2010). Le tableau 2.1 prsente lvolution de la population urbaine habitant les bidonvilles
dans diffrentes rgions du monde (principalement les PED) entre 1990 et 2010, tandis
que le tableau 2.2 montre la proportion de lvolution de cette mme population vivant
dans les bidonvilles. Pour sa part, la figure 2.1 illustre les agglomrations dans le monde
de mme que la population habitant les quartiers informels.
31
Tableau 2.1 : volution de la population urbaine des bidonvilles (exprime en millions)
Rgion ou zones principales 1990 1995 2000 2005 2007 2010
Rgions en dveloppement 656,7 718,1 766,8 795,7 806,9 827,7
Afrique du Nord 19,7 18,4 14,7 10,7 11,1 11,8
Afrique subsaharienne 102,6 123,2 144,7 169,5 181 199,5
Amrique latine et Carabe 105,7 111,2 115,2 110,1 110,6 110,8
Asie orientale 159,8 177,1 192,3 195,5 194 189,6
Asie du Sud 180,4 190,3 194 192 191,7 190,7
Asie du Sud-Est 69 76,1 81,9 84 83,7 88,9
Asie occidentale 19,1 21,4 23,5 33,4 34,2 35,7
Ocanie 0,4 0,4 0,5 0,5 0,5 0,6
(modifi de United Nations Population Division, 2010, p.18)
Tableau 2.2 : Proportion de la population vivant dans des bidonvilles (exprim en%)
Rgion ou zone principale 1990 1995 2000 2005 2007 2010
Rgions en dveloppement 46,1 42,8 39,3 35,7 34,3 32,7
Afrique du Nord 34,4 28,3 20,3 13,4 13,4 13,3
Afrique subsaharienne 70 67,6 65 63 62,4 61,7
Amrique latine et Carabe 33,7 31,5 29,2 25,5 24,7 23,5
Asie orientale 43,7 40,6 37,4 33 31,1 28,2
Asie du Sud 57,2 51,6 45,8 40 38 35
Asie du Sud-Est 49,5 44,8 39,6 34,2 31,9 31
Asie occidentale 22,5 21,6 20,6 25,8 25,2 24,6
Ocanie 24,1 24,1 24,1 24,1 24,1 24,1
(modifi de United Nations Population Division, 2010, p.18)
32
Figure 2.1 : Population urbaine et population vivant dans les bidonvilles
(tir de Rekacewicz, 2010) la lumire des deux tableaux, on voit que lAfrique subsaharienne, lAsie du Sud et
lAsie orientale sont les rgions regroupant le plus dhabitants vivant dans les bidonvilles
(tableau 2.1). On constate galement que lAfrique subsaharienne, lAsie du Sud et lAsie
du Sud-Est ont les proportions les plus leves dindividus habitant les bidonvilles, avec
respectivement 61,7 %, 35 % et 31 %, ce qui est tout de mme considrable (tableau
2.2). Toutefois, dans labsolu, mme si le nombre dindividus vivant dans les quartiers
pauvres a augment dans les rgions en dveloppement, la proportion de cette
population a considrablement baiss. En effet, de faon gnrale, pour toutes rgions en
dveloppement confondues, la proportion de la population des bidonvilles est passe de
46 % un peu moins de 33 % au cours des 20 dernires annes (tableau 2.2). Plus
grande est cette baisse pour les rgions dAsie du Sud et dAsie du Sud-Est, passant
respectivement dun peu plus de 57 % 35 % et de prs de 50 % de la population
31 %. videmment, la lutte contre la pauvret est loin dtre gagne et beaucoup reste
faire afin datteindre la cible 7.D des OMD qui est d' amliorer sensiblement, dici 2020,
les conditions de vie de 100 millions dhabitants des taudis (ONU, 2011a).
33
2.3 Vulnrabilit, pauvret et alas naturels
Beaucoup de catastrophes naturelles sont dangereuses et peuvent entraner des pertes
humaines et conomiques considrables. Cependant, un ala naturel nest pas un
dsastre en soi (Lvque, 2001). Il le devient quand une situation de vulnrabilit se
superpose au risque naturel (ib.). La pauvret et les phnomnes naturels extrmes sont
deux flaux extrmement lis qui empchent plusieurs pays du Sud de se sortir du sous-
dveloppement. Laugmentation de lampleur des risques de catastrophes naturelles met
ainsi le dveloppement en pril (PNUD, 2004). Comme il a t possible de le constater
au premier chapitre, les alas climatiques extrmes entranent des consquences
immdiates sur les plans social et conomique.
Cette partie se divise en deux sections. Il sera dabord question de la vulnrabilit, de la
bidonvilisation et de la marginalit des populations face aux alas naturels. Par la suite,
des liens entre diffrentes contraintes structurelles et la vulnrabilit seront tablis.
2.3.1 Vulnrabilit, bidonvilisation et marginalit
Les personnes les moins nanties des PED nont souvent dautres choix que de sinstaller
dans des bidonvilles, en priphrie des villes. Dailleurs, ces personnes sont souvent
exposes des risques naturels. Selon le secrtaire gnral de lONU, M. Ban Ki-moon,
la vulnrabilit des villes et des quartiers pauvres augmente avec les changements
climatiques (ONU, 2011b). Par ailleurs, linverse est aussi vrai : lurbanisation informelle
anarchique accrot la vulnrabilit des populations face aux phnomnes naturels
extrmes, et parfois mme dun facteur de 10 ou plus (Davis, 2007). titre dexemple,
une partie importante de la population de Manille, capitale des Philippines, vit dans des
habitats sauvages, en bordure des ctes. Consquemment, 35 % de la population court
des risques dinondations (PNUD, 2004). Calcutta, en Inde, 66 % de ces 15 millions
dhabitants vivent dans des slums exposs aux cyclones ou risquant dtre inonds (UN-
HABITAT, 2007). Les citadins pauvres nont dautres choix que daccepter de vivre dans
ces conditions dsastreuses, au pril de leur bien-tre et mme de leur vie. De fait,
les quartiers pauvres priphriques constituent aujourdhui le problme sanitaire et environnemental global par excellence [] et ils sont en plus le dfi le plus important la solidarit humaine (Davis, 2005).
34
Qui plus est, la majorit de la population urbaine de la plante est concentre proximit
des zones de failles tectoniques actives. Les littoraux des ocans Pacifique et Indien en
sont de bons exemples (Davis, 2007). Des millions de personnes sont constamment
exposes des risques de tremblements de terre, de tsunamis, dorages violents, de
cyclones ou druptions volcaniques (ib.). Dailleurs, selon Kenneth Hewitt, gographe
spcialiste des risques environnementaux, les sismes ont dtruit plus de 100 millions de
logements au cours du 20e sicle, pour la plupart des bidonvilles ou des villages ruraux
pauvres (ib.). De la sorte,
le risque sismique est si ingalement rparti dans la plupart des villes que lon a pu forger le terme de tremblement de classe pour rendre compte de la nature fondamentale injuste des catastrophes (ib., p. 132).
La vulnrabilit des individus est galement fonction de leur marginalisation dans leur vie
quotidienne (Texier et al., 2009). La marginalisation peut tre gographique, car ils vivent
dans des zones menaces par des phnomnes naturels; sociale, car ils sont la plupart
du temps issus de groupes minoritaires; conomique, car ils sont souvent pauvres; et
politique, car leur voix nest souvent pas entendue et reconnue sur la scne politique (ib.).
Les premires victimes sont souvent des femmes, des enfants (comme cela a t le cas
lors du tsunami du 26 dcembre 2004 : plus de 150 000 personnes frappes par la vague
taient des enfants (Ozer, 2005), des personnes ges, des handicaps, des prisonniers
et des rfugis (Gaillard, 2007). La prcarit conomique des victimes, vivant bien
souvent avec un faible revenu, occupant des emplois informels, nayant aucune pargne,
vulnrabilise dautant plus ces individus aux risques naturels (ib.). Ces personnes sont
galement trs vulnrables face un ala naturel, soit par la localisation risque de leur
domicile, construit sur des sols instables ou dans des secteurs inondables, soit par
lutilisation de matriaux mal adapts, soit par lentassement de plusieurs membres de la
famille dans une mme habitation, ou soit par le manque despace entre chaque
habitation. Le manque de protection sociale ou une protection sociale inadquate, que ce
soit relativement lassurance sant, aux services dducation, ou encore aux soins
hospitaliers conduit une vulnrabilit dautant plus accrue (ib.). Qui plus est, les
bidonvilles des pays du tiers-monde ne sont, pour la plupart, pas protgs par des
rgimes dassurances pour couvrir les risques naturels, contrairement des villes des
pays dvelopps comme Los Angeles ou Tokyo (Davis, 2007). Ces deux villes sont
sujettes de hauts risques gologiques et mtorologiques. Cependant, comme ces
35
villes sont riches, elles peuvent se permettre de faire des travaux publics de grande
envergure afin de rduire les risques majeurs dalas
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