Jérôme Vanderhaeghe Année 2012/2013
Fleur de Lys en medecine de Bernard de Gordon
ou l’approche de la pratique médicale à Montpellier
au XIVème
siècle
Mémoire présenté pour l’obtention du Master II Recherche
Sciences Humaines et Sociales
Histoire sociale, politique et culturelle de l’Europe de l’antiquité à nos jours
Sous la direction de Madame Nicole Brocard,
Maître de conférences à l’Université de Franche-Comté
Jérôme Vanderhaeghe Année 2012/2013
Fleur de Lys en medecine de Bernard de Gordon
ou l’approche de la pratique médicale à Montpellier
au XIVème
siècle
Mémoire présenté pour l’obtention du Master II Recherche
Sciences Humaines et Sociales
Histoire sociale, politique et culturelle de l’Europe de l’antiquité à nos jours
Sous la direction de Madame Nicole Brocard,
Maître de conférences à l’Université de Franche-Comté
Illustration de la page de couverture :
Médecin au chevet d’un malade, extrait de : Avicenne, Canon de la médecine,
XIIIème
siècle, Bibliothèque Municipale de Besançon (ms. 0457 f.036v) / « cliché
IRHT »
Je remercie Madame Brocard pour sa présence, son écoute, son soutien et ses
conseils avisés. Toujours présente et disponible, vous m’avez permis de
réaliser ce mémoire de recherche dans la plus grande sérénité. Je vous
remercie sincèrement pour la confiance que vous m’avez témoignée tout au
long de ces deux années de recherche.
Je remercie ma sœur Florence pour son soutien et ses encouragements. Merci
à toi d’avoir toujours répondu présent quand j’en avais besoin.
Je remercie mon frère Pascal pour sa présence et son positivisme.
Je remercie mes amis, Steven, Thibaud, Aurélien, Kevin, François, David et
Elodie pour leurs conseils, leurs encouragements et leur patience.
Je remercie Madame Sylvie Guy et Madame Claudine Maccioni pour leurs
encouragements et leur soutien.
Je remercie les personnels de la Bibliothèque Municipale de Besançon et de la
Bibliothèque Universitaire de Montpellier I pour leur disponibilité et leur aide.
Pour ma maman qui m’a toujours soutenu dans mes projets.
Je sais que tu serais fière de mon travail.
A toi, partie trop tôt…
Table des matières
Introduction ........................................................................................................ p.10
PARTIE I : Bernard de Gordon, un érudit montpelliérain ................................ p.11
I) Un auteur du XIVème siècle ............................................................... p.12
A) Bernard de Gordon .................................................................... p.12
1- L’Homme ............................................................................... p.12
2- Le maître en médecine ......................................................... p.14
3- L’enseignant ........................................................................... p.16
B) L’incunable INC 1010 de la bibliothèque municipale de
Besançon : Fleur de lys en medecine ............................................... p.18
1- L’ouvrage ................................................................................ p.18
2- Description et structure de l’écrit ......................................... p.20
3- Influence et postérité ............................................................. p.22
II) La société du XIVème siècle à travers l’ouvrage .............................. p.24
A) Erudit et scientifique : le médecin .............................................. p.24
1- Discipline et profession ......................................................... p.24
2- Organisation des études ....................................................... p.26
3- Science et astronomie ........................................................... p.27
B) La vision du monde à travers le manuscrit ................................ p.31
1- Du monde à l’univers ............................................................. p.31
2- Le monde animal et ses représentations ............................. p.33
C) La pratique médicale et la religion .............................................. p.36
1- Symboles et allégories .......................................................... p.36
2- Douleur, souffrance et passion ............................................. p.42
PARTIE II : Les conceptions médicales médiévales ......................................... p.46
I) Les origines de la médecine médiévale ............................................ p.47
A) Les fondamentaux : les connaissances antiques et arabes .... p.47
1- Le monde médical antique .................................................... p.47
2- La théorie des humeurs ......................................................... p.49
3- Le savoir arabe ....................................................................... p.52
B) La tradition salernitaine et la diffusion du savoir médical en
occident............................................................................................... p.53
C) Montpellier, ville cosmopolite ..................................................... p.56
1- Une ville au carrefour de la connaissance ........................... p.56
2- L’université de médecine ...................................................... p.57
3- Ces maîtres en médecine ...................................................... p.61
II) Influences et pratique médicale à travers l’ouvrage ........................ p.62
A) Les influences du maître Bernard de Gordon ............................ p.62
B) Observation, examens et pronostication ................................... p.64
C) Le temps et les maladies ............................................................. p.68
D) Fièvre, peste et lèpre : approche de la maladie ......................... p.71
1- Les fièvres ............................................................................. p.71
2- La peste .................................................................................. p.72
3- La lèpre .................................................................................. p.75
PARTIE III : Soigner le corps au Moyen Age ..................................................... p.81
I) Pharmacie et médicaments................................................................ p.82
A) Historiographie médiévale de la pharmacie et des médicaments
............................................................................................................. p.82
B) Le médicament au Moyen Age .................................................... p.83
C) La pharmacopée ........................................................................... p.87
D) Les drogues et leurs compositions ............................................ p.89
II) La pharmacopée dans l’ouvrage ..................................................... p.107
A) Les simples et les composés ................................................... p.107
1- Les médicaments simples ................................................... p.107
2- Les médicaments composés .............................................. p.107
B) Les apports arabes .................................................................... p.109
C) La practica montpelliéraine ...................................................... p.110
III) Soigner autrement ............................................................................ p.112
A) Les soins techniques ................................................................. p.112
1- Les bains .............................................................................. p.112
2- Evacuation de la matière ..................................................... p.113
3- Les ventouses ...................................................................... p.114
B) Saignées et actes techniques.................................................... p.114
1- La saignée ............................................................................ p.114
2- Médecine manuelle et petite chirurgie ................................ p.115
C) L’hygiène de vie ......................................................................... p.116
Conclusion ........................................................................................................ p.119
Annexes ............................................................................................................. p.122
Lexique .............................................................................................................. p.246
Bibliographie ..................................................................................................... p.256
10
« Cy commence la pratique de tres excellent docteur et maitre en medecine,
maistre Bernard de Gordon, qui s’appelle fleur de lys en medecine. ». Le maître au
Moyen Âge est identifié comme étant un homme que l’on considère aujourd’hui
comme un intellectuel. « Ce vocable [identifie] un type d’homme qui pendant le
Moyen Âge « travaillait avec la parole et avec l’esprit », ne vivait pas de la rente du
sol et n’était pas non plus contraint de « travailler avec ses mains », et qui était plus
ou moins conscient de sa « différence » par rapport aux autres catégories
humaines »1 . A travers l’incunable de Bernard de Gordon, Fleur de lys en
médecine, nous avons un angle d’approche particulier et nous pouvons faire un état
des lieux des connaissances médicales au début XIVème siècle. Nous avons la vision
de la société d’un érudit, d’un lettré. L’étude de notre source permet donc d’accéder
à de nombreuses connaissances sur la période contemporaine à Bernard de
Gordon, mais aussi sur l’héritage culturel que les intellectuels ont mobilisé pour
fonder les premières universités d’Europe et donner les premiers cours ; dans le cas
présent l’enseignement de la médecine à Montpellier.
L’étude de cette source dans le cadre de ce travail de recherche nous amène
à proposer des pistes de compréhension de l’ouvrage. Ainsi tout au long du
développement nous cherchons à avancer des clés de compréhension et une
approche thématiser au lecteur pour lui permettre d’envisager son approche de
l’œuvre Fleur de lys en médecine de Bernard de Gordon sous différents aspects.
En quoi l’approche de la médecine médiévale à travers l’étude du "practique"
Fleur de Lys en médecine de Bernard de Gordon permet-elle de mettre en avant la
connaissance globale de la société du début du XIVème siècle ?
L’analyse proposée est divisée en trois grandes parties. Dans un premier
temps nous nous proposons une synthèse des connaissances que nous avons sur
l’auteur et l’ouvrage puis la mise en avant d’éléments permettant d’avoir une lecture
éclairé de la source. La deuxième partie se focalise sur l’héritage culturel et
scientifique que Bernard de Gordon met en exergue. La troisième partie est
consacrée aux médicaments et aux soins préconisés dans l’ouvrage.
11 Le Goff Jacques, l’homme médiéval, coll. histoire, éditions du Seuil, octobre 1989 (p. 201)
11
PARTIE I : BERNARD DE GORDON,
UN ERUDIT MONTPELLIERAIN
Portrait de Bernard de Gordon, exposé dans le hall d’honneur de l’université de
Montpellier I (peinture daté du XVIIIème siècle)
12
I) Un auteur du XIVème siècle
A) Bernard de Gordon
1- L’Homme
Les historiens ont émis diverses hypothèses sur les origines de Bernard de
Gordon. Certains ont pu évoquer une naissance outre Manche (anglaise ou
écossaise)2, d’autres en Bourgogne. La thèse la plus probable serait une origine
méridionale, dans le village de Gordon (Quercy). Ainsi, d’après l’étude de l’historien
Luke E. Demaitre, les écrits du médecin laissent transparaître une véritable origine
continentale et particulièrement du sud. « Although there is no conclusive evidence
to identify the birthplace of Bernard de Gordon, his writing strongly suggests a
continental and, more specifically, a meridional origin.3 ». La date de sa naissance
nous est inconnue, cependant les historiens s’accordent à dire qu’il a pu naître vers
1260. Ainsi, dans le Lilum medicini, il indique qu’il a mis vingt ans à rédiger son
ouvrage : « Ce present livre fut commencé par la grace de Dieu au noble estude de
Montpellier, apres ce que je eux leu par l’espace de XX ans. Ce fut l’an de Nostre
Seigneur mill.ccc. et trois au mois de juillet.» [Folio 1 verso]
Si nous partons du principe qu’il faut avoir 25 ans pour être médecin, nous
arrivons à une date de naissance aux environ de 1258 (1303 – 20 = 1283 et 1283 –
25 = 1258). Sa mort est datée aux alentours de 1320. Cependant, un document
administratif atteste que Bernard de Gordon a assuré sa fonction d’enseignant tout
au long du premier quart du XIVème siècle.
“The earliest confirmation of his death may be a notarial dated 1330. This document
concerned Gulielmus Gordonius, a physician and canon of Asti (…) and made
mention of “the other Bernard Gordonius, formerly outstanding teacher of medicine in
Montpellier”, who lived “in the area of Provence. Since most of Bernard’s works area
2 Wickersheimer Ernest, Dictionnaire biographique des médecins en France au Moyen Age, Librairie Droz, Genève, 1979 3 Demaitre Luke E., Doctor Bernard de Gordon : professor and practitioner, édition pontifical institut of médiaeval studies, Toronto, 1980 (p.3) / « Il n’est pas aisé d’identifier spécifiquement le lieu de naissance de Bernard de Gordon. Cependant ses écrits laissent à penser à une origine contientale et plus méridonale. »
13
identified as having been completed “in preclaro studio Montis Pessulani”, it is safe to
assume that he spent his entire teaching career, witch spanned at least a quarter of a
century, at the same university4.”
Le Quercy au XIIIe siècle (carte extraite de l’Atlas Géographique du Lot, 1996)
Bernard de Gordon, médecin et professeur à l’université de Montpellier, rédige
de nombreux ouvrages de médecine dont l’ouvrage que nous étudions : le lilium
medecine. Ses textes sont diffusés dans tout l’Occident et sont traduits en de
nombreuses langues5 (six ou sept langues différentes d’après Luke E. Demaitre).
Mais il est cependant étonnant de voir que nous ne retrouvons pas de trace de
l’auteur dans les statuts de l’université6.
4 Id. Desmeste Luke E.,…(p. 31-32) / « La première confirmation de sa mort remonte à un acte notarié de 1330.
Ce document concerne Guielmus Gordanius un médecin et chanoine d’Asti (…) et fait mention d’un autre Bernard Gordonius, ‘ancien exeptionnel professeur de médecine à Montpellier’ qui a vécu dans la zone du domaine de Provence. Ces travaux ayant été identifiés comme ayant été accomplis ‘in preclaro studio Montis Pessulani’, il est raissonable de supposer qu’il a passé toute sa carrière d’enseignant, qui a durée au moins un quart de siècle, dans la même université » 5 Le Blevec Daniel, L’université de Médecine de Montpellier et son rayonnement (XIII-XV siècles), actes du colloque international de Montpellier (Université Paul-Valery, Montpellier III), 17-19 mai 2001, Coll. De Diversis Artibus, collection de travaux de l’académie internationale d’histoire des sciences, ed. Brepols, 2004 (p. 106) 6 Id. (p.103)
14
2- Le maître en médecine
Ses ouvrages et traités sont considérés par ses pairs comme étant d’une
grande richesse et sont exploités jusqu’au XVIe siècle. Nous retrouvons des
exemplaires de ses écrits dans toute l’Europe. « L’opus magnum de Bernard faisait
partie de collections privées de médecins et d’aristocrates, de la Catalogne à la
Bohême, et de bibliothèques universitaires de Salamanque à Cambridge et d’Oxford
à Erfurt. »7.
Bernard de Gordon est un médecin influent sur les pratiques de son temps, il
donne à travers ses ouvrages un enseignement pratique, permettant d’élaborer des
diagnostics précis. Il est cité et étudié par ses contemporains, tels que Guy de
Chauliac (1298-1368), ou Henri de Mondeville (1260-1320). L’auteur est un
contemporain et un ami8 d’Arnaud de Villeneuve (1238-1311).
Les différentes œuvres que nous pouvons attribuer à Bernard de Gordon sont
les suivantes (d’après Alberto Alonso Guardo)9 :
1. De regimine actuorum morborum (1294)
2. Compendium de regimine acutorum
3. Tractus de crisi et de diebus creticis (1295)
4. Tractus de reduccione geomancie ad orbem (traduction) (1295)
5. De decem ingeniis curandarum morburum (1299)
6. Tractus de gradibus (1303)
7. Practica dicta Lilium medicine (1305)
8. Liber de conservacione vite humane (1308)
7 Id. (p.105) 8 Balaguer i Perigüel Emilio., « Arnau de Vilanova. La médicina, la ciencia y la tecnica en tiempo de Jaime II », in
Revistas - Historia Medieval, Nº 11 (1996-1997) , 1997
9 Alonso Guardo Alberto, Los pronosticos en la medicina medieval : el Tractus de crisis et de diebus creticis de Bernardo de Gordonio, collection Série Lingüistica y filologia, editiones Universidad de Valladolid (Espagne), 2003, (p.21-28)
15
D’autres travaux lui sont attribués tel que :
1. Tractus de sterilitate mulierum
2. El arbor egritudinum
3. Opusculum de authenticis urinarum compositum per magistrum Bernardum de
Gordonio
4. De cautelis urinarum, Tractus de modo medendi in egritudinibus presertim
cum medicus nescit causam, Modus medendi extracts de modo Cophonis y
Modus practicandi.
La production scientifique de Bernard de Gordon est le reflet du savoir et de
l’enseignement de la médecine au Moyen Age (aux XIIIème et XIVème siècle). L’auteur
est inspiré d’une part des auteurs classiques grecs et latins (Hippocrate, Galien…). Il
l’est également des travaux de ses pairs (Arnau de Villanova10) et d’autre part de
ses recherches et expériences personnelles. Nous pouvons observer une évolution
entre ses premiers écrits et les plus tardifs. Les premiers travaux sont brefs,
pratiques, et sont le reflet d’une organisation très rigoureuse. Au fur et à mesure que
l’auteur acquiert de l’expérience, il produit des textes plus longs, plus littéraires et
doctrinaux11. Le changement se fait à compter de l’ouvrage que nous étudions, où
l’auteur a su proposer non seulement un ouvrage pratique, mais aussi un travail
scientifique réussi, réunissant savoir antique et observation. « A modo de conclusion
podemos decir que en su obra hay une combinacion de conocimiento tradicional y
punta de vista personales, de manera que su production no es fruto de una simple
recopilacion sino que la mano del autor se refleja en la seleccion de las fuentas
apropidas y en su habilidad dialéctica para reconciliar posturas real o aprentemente
contradictorias. Por otra parte, Bernardo de Gordonio reconoce con humilidad los
limites du propio conocimiento anadas generalmente.12»
10 Paniagua Juan Antonio, Studia Arnaldiane, Trabajos en torno a la obra médica de Arnau de Vilanova, c.1240-1311, Fundation Uriach 1838, Barcelona, 1994 (livre VI, p.65) 11 Alonso Guardo Alberto, Los pronosticos en la medicina medieval : el Tractus de crisis et de diebus creticis de Bernardo de Gordonio, collection Série Lingüistica y filologia, édition Universidad de Valladolid (Espagne), 2003 (p. 27) 12 Id. (p. 28) « En conclusion nous pouvons dire que dans son travail il y’a un mélange de connaissances traditionnelles et de son point de vu personnel. Ainsi sa production n’est pas le fruit d’une simple recomposition mais la main de
16
3- L’enseignant
Dans l’ouvrage étudié il s’impose comme étant un enseignant et un
pédagogue. Il n’hésite pas à interpeller les étudiants dans ses écrits. Dans le
chapitre traitant de cure de lepre (chapitre XXI), il illustre ses propos par une histoire
locale et idéfiante expliquant comment un étudiant montpelliérain (bachelier en
médecine) avait contracté la lèpre en ayant eu des rapports sexuels avec une
comtesse (luxure).
« Et chacun se doit bien garder qu’il ne dorme avec femme meselle, et advient a
Montpellier que une contesse y estoit venue laquelle estoit meselle et fut en la fin en
ma cure et ung bachelier en medecine l’abouboit et dormit avec elle et l’engroissa et
il devint parfaitement meseau et celuy est bien eureux qui se chastie par aultruy. »
[Folio 35R/V]
L’auteur interpelle ses lecteurs par un exemple concret. Ainsi, non seulement il
enrichit ses propos médicaux en prouvant ses dires mais il participe également, à
une forme d’éducation et de prévention en santé publique en utilisant une histoire
dans laquelle les étudiants qui lisent (ou écoutent13) les propos peuvent s’identifier
au pauvre bachelier.
Tout au long de l’ouvrage qui s’impose comme un véritable practique de
médecine il donne des conseils pratiques au futur médecin, comme nous pouvons le
voir dans l’extrait suivant du chapitre III du livre I traitant de fievre tierchaine : « il
c’est maladie vient avec terribles accidens et si ne peult souffrir ignorance de
medecin, ne la folie du malade, donc affin que nous puissons plus honnestement
resister contre les perilz qui sont a venir et que l’onneur du medecin soit gardée, c’est
bon de dire toujours les perils qui sont a venir. Donc prenons que le medecin soit
appellé apres la tierce proxime et il luy semble que on doit faire saignée et que le
sirop soit a administrer et soit fait ce que on doit faire selon la voye de rayson et s’il
n’a rien pronostiqué. Donc vient le quarte proxime qui est le plus fort lors les gens
d’entour diroient que la saignée l’auroit occis ou le sirop qu’il auroit prins, et ainsi le
l’auteur se reflète dans la séllection des sources appropriées et grâce à son habileté à se positionner dans la véracité de ses propos. D’autre part Bernard de Gordon reconnait avec humilité les limites de son propre savoir. » 13 Une partie des études médicales était consacrée à l’écoute de textes lu et commenté par les enseignants.
17
medecin seroit blasmé, mais s’il dit les périls en chescunes maladie il sera loé et non
pas blasmé. Decy, donc regle generalle que le medecin ne doit point ouvrer en
aulcune maladie s’il n’a devant pronostication. » [Folio 7R] ou encore dans le
chapitre traitant de fièvre quotidienne où Bernard de Gordon prône un comportement
que le jeune médecin doit adopter proche de notre ethique médicale contemporaine :
« Le medecin affin que on aye fiance en luy aulcune foys doibt dire aulcune chose
des choses passées, aulcune foys des choses presentes et aulcunes foys des
choses avenir. » [Folio 13R].
Homme lettré, il s’implique personnellement dans ce qu’il rédige. Il n’hésite
pas à remettre en cause les propos de ses pairs. Dans le chapitre IX du livre IV
traitant de pleuresis, il critique directement le médecin Pseudo Mesué :
« Et dois entendre si comme dist est qui repercutifs ne competent point en pleureis et
selles y competent point en pleuresis et selles y competent en aulcunes manière, si
comme le vouloit Eb Mesué elle competent droit a leniere et s’aulcun estoit present
et que dieu luy eust donné telle grace d’congnoistre tel commencement iniciant et
qu’il eust porté en sa moin ou en sa bource medecine repercutive ce eust este grant
chose, mais telles choses ne peuvent avenir ». Cet exemple montre que Bernard de
Gordon n’hésite pas à donner son point de vue et à commenter les travaux de ses
confrères et prédécesseurs. Ce qui peut être le reflet d’un caractère incisif et fort
mais montre aussi un véritable investissement personnel dans son enseignement.
18
B) L’incunable INC 1010 de la bibliothèque municipale de
Besançon : Fleur de lys en medecine
1- L’ouvrage
L’incunable présenté à la bibliothèque de Besançon (sous la cote n° INC
1010) est une version rédigée en français de l’ouvrage de Bernard de Gordon, Lilium
medicine ou Fleur de Lys en médecine.
Cette version imprimée à Lyon fait partie du fonds des œuvres rares et
précieuses de la Bibliothèque Municipale d’Etude et de Conservation de la ville de
Besançon.
Il semble que les éditions de l’ouvrage aient été limitées par le Doyen de la
Faculté de Médecine de Paris qui a obtenu en 1495, l’interdiction de sa mise en
vente, afin de limiter l’accès de sa lecture aux profanes14, mais l’arrêt des
impressions n’a certainement pas été immédiat15.
Le nom de l’imprimeur n’est pas indiqué et l’enquête sur la typologie utilisée
ne permet pas de l’identifier. Un des éléments qui pourrait dans le futur être pris en
compte pour le découvrir est l’utilisation de signes particuliers désignant les poids et
mesures qui sont difficiles à retranscrire objectivement. Il apparait juste que
l’incunable a été imprimé à Lyon le 31 août 1495. La ville de Lyon est la seconde ville
française (après Paris) où se sont installés les imprimeurs à la fin du XVe siècle16. Ce
développement s’explique d’une part grâce à un conseil de surveillance plus restreint
que celui de Paris et une manufacture largement encouragée par les notables locaux
qui y voient un attrait financier pour la ville. De nombreux ateliers apparaissent dans
les registres de taxe de la ville à cette période, mais il reste difficile d’établir des listes
précises vu l’hétérogénéité des ateliers qui se créent. Ce qui explique la difficulté de
14 Petouraud Charles, « Lyon et la medecine, La vie médicale à Lyon au Moyen-Age », numéro spécial de la Revue Lyonnaise de Médecine , 1954 15 Le Blevec Daniel., L’université de Médecine de Montpellier et son rayonnement (XIII-XV siècles), actes du colloque international de Montpellier (Université Paul-Valery, Montpellier III), 17-19 mai 2001, Coll. De Diversis Artibus, collection de travaux de l’académie internationale d’histoire des sciences, ed. Brepols, 2004 (p.106) 16 Grâce aux innovations mises au point en 1450 par Johannes Gutenberg (1400 – 1468), l’imprimerie moderne se développe de façon exponentielle en Europe.
19
connaître l’origine exacte de certain ouvrage. En ce qui concerne l’édition de notre
incunable, Fleur de Lys en medecine de Bernard de Gordon est donc une impression
lyonnaise anonyme datée.
D’autres éditions disponibles, sont toutes sont datées entre 1486 et 149817. A
noter que nous retrouvons une majorité d’exemplaires en latin postérieurs à la date
d’édition de l’ouvrage étudié, jusqu’en 1559. Ce qui peut s’expliquer par la volonté
de l’Eglise de limiter l’accès au savoir des profanes et ainsi de réserver la
connaissance aux seuls érudits maîtrisant le latin.
(Incipit du manuscrit n°J 32218 – Bibliothèque inter universitaire de Montpellier –
Montpellier 1 – Fonds ouvrages rares)
Ecrit en 1307 à Montpellier, il a été traduit en Français à Rome en l’an 1377.
Colophon de l’ouvrage Fleur de Lys en medecine, de Bernard de Gordon
(Edition de 1495)
17 D’après les sites de base de données nationaux : www.gallica.fr et www.sudoc.abes.fr 18 « In nomine dei misericordis. Incipit practica exellentissimi medicine monarche oni magistri Bernardi de Gordonio dicta Lilium medicine » : « Au nom de Dieu misericordieux. Incipit de l’exellent roi de la medecine Maitre Bernard de Gordon qui dicta le Lilium medicine ».
20
2- Description et structure de l’écrit
Volume de format in-quarto, à deux colonnes de 41 lignes par page, est rédigé
en écriture gothique. Les autres éditions portent le titre suivant : « La pratique de
maistre Bernard de Gordon en François », ce qui n’apparait pas dans l’ouvrage
étudié de la bibliothèque d’étude de la ville de Besançon. Le manuscrit est relié en
veau marbré, doré (dos), gardes marbrées, tranches rouges. Ses dimensions sont
celles d’un livre pratique à manier, à consulter et à transporter (16,5 cm de largeur /
25 cm de hauteur). Il est composé de sept livres comme nous l’annonce l’auteur
dans sa présentation : « Je intitule et appelle ce livre cy Fleur de lis de medicine, en
latin lilium medicine. Car au lis sont plusieurs fleurs et en chascune fleurs sont VII
fueilles blanches et VII grains ainsi comme dorés, et semblablement ce livre contient
sept parties ».
Nous pouvons noter sur la première page de couverture une dédicace (datant
de la fin XVIIIe) du Docteur P C Marchant médecin de Besançon, ancien propriétaire
de l’ouvrage (« Ex Libris »), présentant l’ouvrage comme étant un document médical
de référence sur la médecine du début du XIVe siècle (« Cet ouvrage (…) est un
traité complet de la manière de guérir toutes les maladies alors connues. »). Nous
retrouvons une présentation précise de cette œuvre dans un mensuel de vente et
d’échange de livre19 de 1781.
Le texte est structuré de manière rigoureuse. En effet, dès les premières
pages, l’auteur annonce les différents chapitres qu’il va proposer au lecteur. De plus
chaque chapitre est organisé de manière similaire avec des paragraphes bien
distincts.
Cette logique est retrouvée dans d’autres de ses ouvrages, mais aussi chez
les auteurs qu’il peut citer, comme dans l’ingenio sanitatis de Galien. Cette rigueur
permet de mettre en avant le sens scientifique, rationnel et l’aspect universitaire de la
discipline médicale.
Fleur de Lys en médecine est divisé en sept livres qui ont chacun une
thématique précise. Au début de chaque livre, une table des matières renseigne le
lecteur sur le contenu de chacun des chapitres (Cf. transcription). Les chapitres sont 19 Société des gens de lettre, L’Esprit des journaux, Tome II, février 1781
21
structurés : dans un premier temps l’auteur y présente et définit la maladie étudiée,
puis expose les signes de celle-ci ainsi que les éléments pour établir le diagnostic
(« pronostication »). Par la suite, il indique les traitements à proposer au malade
(« cure ») et parfois termine par un discours éclairé sur le sujet (« clarification »). Les
paragraphes sont hiérarchisés, les chapitres numérotés. Si nous comparons un
extrait de Fleur de lys traitant des menstrues à une autre production qui fait référence
en matière de santé de la femme : De passionibus mulierum attribué à Trotula (1050-
1097)20/21, nous voyons que sur une thématique identique l’auteur spécialiste ne
traite pas le sujet avec la même rigueur que Bernard de Gordon. Par exemple le
chapitre du « menstrus retenus » (du livre VII) est rédigé de manière détaillée et
précise, alternant théorie, observation et pratique alors que dans la traduction du
manuscrit22 De passionibus mulierum, pour un titre identique « de la retencion des
menstrues » le corps de textes est plus simple et se concentre sur l’aspect pratique
de la pathologie. Cette comparaison23 permet de mettre en avant le développement
de la médecine scolastique montpelliéraine et l’engagement que pouvait avoir
Bernard de Gordon dans ce mouvement de réflexion. (Cf. annexe)
20 Marien Guillaume, De passionibus mulierum, attribué à Trotula : un regard médical sur un manuscrit de gynécologie médiévale de la faculté de Médecine de Montpellier, thèse d’exercice présentée et soutenue le 16 décembre 2005 pour l’obtention du grade de docteur en médecine, université de médecine de Montpellier, 2005. 21 D’après différents travaux de recherche nous apprenons dans la thèse de Guillaume Marien que Trotula est une femme médecin de Salerne qui consacra une partie de ses travaux aux maladies des femmes. Cependant plusieurs écrits, dont celui là ne sont certainement pas d’elle, et écrits après sa mort. 22 Pezeu-Gilabert Geneviève, Le « de passionibus mulierum » de Trotula ; édition et traduction du manuscrit de Montpellier, mémoire de Maîtrise d’Histoire, Université de Montpellier III, 1988, 2 vol. (355p.) 23 Présentation des deux extraits de textes en annexe.
22
3- Influence et postérité
L’ouvrage Fleur de Lys en médecine est considéré comme étant « une
pratique de médecine, c'est-à-dire un texte qui ne comporte que le savoir théorique
indispensable à l’exercice de l’activité de jeunes praticiens »24, Le Lilium medicine
s’impose comme une véritable référence médicale et représente la base du
programme des études médicales du XIVème siècle25 qui s’inspire de l’Articella de
l’Ecole de Salerne. Il est encore conseillé aux étudiants de l’étudier quelques siècles
après son écriture. « A Vienne, en 1520, la lecture du Lilium était recommandée au
médecin débutant, pour la troisième année après son doctorat »26. Tout au long de
son écrit, le pédagogue interpelle le médecin en lui donnant régulièrement des
conseils. Ainsi, il lui préconise les attitudes à adopter face à ses patients. L’ouvrage
est à destination des praticiens et des étudiants ; l’auteur interpelle et conseille les
médecins sur leur pratique et les réactions qu’ils doivent avoir face aux différentes
pathologies rencontrées. Non seulement, il décrit les différentes maladies et leurs
signes et conseille d’un point de vue thérapeutique en préconisant des remèdes mais
aussi les attitudes relationnelles que doit adopter le professionnel auprès des
malades et de ses proches. Les conseils de Bernard de Gordon sont le reflet d’un
maître universitaire mais aussi d’un médecin aguerri qui souhaite transmettre son
savoir et ses connaissances. Ainsi, au chapitre III traitant de la fièvre Tierchaine, il
interpelle le lecteur en lui précisant qu’il doit informer le malade et ses proches,
« affin que nous puissons plus honnestement resister contre les perilz qui sont a
venir et que l’onneur du medecin soit gardée, c’est bon de dire toujours les perils qui
sont a venir. (…) S’il dit les périls en chescunes maladie il sera loé et non pas
blasmé » [folio 7 R]).
De toute évidence le practic en médecine Fleur de Lys en medecine de
Bernard de Gordon est l’écrit le plus populaire de l’auteur en son temps. Aujourd’hui
24 Faucon J-Claude, Labbé Alain, Quérel Danielle, Miscellanea Mediavalia, mélange offert à Philippe Ménard, éditions Honoré Champion, Paris 1998 (p. 1391) 25 Lorblanchet Hélène, La plume et le bistouri : Etudier la médecine à Montpellier au Moyen Age et à la renaissance, Bibliothèque Interuniversitaire de Montpellier, 2012 26 Durling R., An early manuel for the medical student and newly-flegded practitioner : Martin Stainpeis, “Liber de modo studendi seu lengendi in medicina”, editions Clio medica, 1970
23
nous retrouvons l’ouvrage sur le site de plusieurs bibliothèques27. De plus nous
pouvons affirmer que l’ouvrage est encore une véritable référence médicale et
scientifique au XVème siècle. Nous le retrouvons dans des inventaires de
bibliothèques de médecins (Pierre Cardonnel28/29), d’apothicaires30 et de religieux31
(Jean de Courtecuisse, Evêque de Paris et de Genève). Il est également répertorié
par L. Delisle dans les bibliothèques royales et impériales32/33/34. Et nous le
retrouvons dans les inventaires de l’université de médecine de Montpellier au début
du XVIème siècle35. L’ensemble de ces références montre l’importance de l’ouvrage
27 Bibliothèque Universitaire de Montpellier I, Bibliothèque Saint Geneviève (Paris), Bibliothèque Municipale de Besançon, Bibliothèque Numérique Galica 28 Chereau Achille, La bibliothèque d’un médecin au commencement du XVme siècle, librairie Techner, Paris, 1864 29 Pierre Cardonnel : médecin du XVme siècle. (D’après : Wickersheimer Ernest, Dictionnaire biographique des médecins en France au Moyen Age, Librairie Droz, Genève, 1979) 30 Collard F. et Samama E., Pharmacopoles et apothicaires, les « Pharmaciens » de l’Antiquité au Grand siècle, éditions L’Harmattan, 2006 31 Omont Henri, « Inventaire des livres de Jean de Courtecuisse, évêque de Paris et de Genêve (27 octobre 1423) », in : Bibliothèque de l’école des Chartes, 1919, Tome 80, pp 109 - 120 32 Delisle Léopold, « Inventaire des manuscrits latin de la Sorbonne, conservés à la bibliothèque impériale sous les numéros 15176 – 16718 du fonds latin [premier article] », in Bibliothèque de l’école des Chartes, 1870, tome 31, pp. 1 -50 33
Delisle Léopold, « Inventaire des manuscrits latins de la bibliothèque nationale insérés au fond des nouvelles acquisitions du 1er août 1871au 1er mars 1874 », in : Bibliothèque de l’école des Chartes, 1874, tome 35, pp76-92 34 Delisle Léopold, « Inventaire des manuscrits conservés à la Bibliothèque impériale sous les numéros 8823 -11503 du fonds latin [troisième et dernier article] », in : Bibliothèque de l’école des Chartes, 1863, tome 24, pp 185 – 236 35 Jullien de Pommerol M-H, « La bibliothèque de l’université de Montpellier en 1506 », in Bibliothèque de l’Ecole des Chartres, 1983, tome 141, livraison 2, pp. 344-351. « Les ouvrages médicaux comportent les manuels de base de l'enseignement de la médecine avec les deux "grands", Hippocrate (ive siècle avant J.-C.) et Galien(IIe siècle). A côté de la médecine grecque, la médecine arabe est bien représentée par Mesué, Johannitius, Isaac l'Israélite, Rhazes, Avicenne et Constantin l'Africain, qui se situent tous entre le IXe et le XIe siècle. L'école de Salerne, florissante aux xie-xne siècles, est présente avec Platearius (XIe s.) et Mauro (XIIIe s.). Les auteurs et commentateurs modernes sont essentiellement des Italiens du Nord, quatre du xive siècle (Dino del Garbo, Petrus d'Abano, Gentile da Foligno et Silanus de Nigris), cinq autres du xve siècle (Jacopo da Forli, An tonius Guainerius, Michael Savonarola, Hugo de Sienne et Baverius de Baveriis). A ces méditerranéens se joignent quatre Français du Midi, du xive siècle, Guy de Chauliac et les Montpelliérains Bernard de Gordon, Jean de Tournemire (médecin des papes, d'Urbain V à Clément VII) et Gérard de Solo. Seuls Girard de Bourges (xnie s.) et Jacques Despars (xve s.) représentent les Français du Nord ».
24
Fleur de Lys, s’étendant sur une large période, du XIVème siècle au XVIème 36, voire
jusqu’ au XVIIIème il est considéré comme étant un riche héritage sur la connaissance
de la médecine médiévale. « Cet ouvrage le plus étendu, le plus clair et le plus
méthodique qui soit sorti de la plume de Gordon, est un traité complet de la manière
de guérir toutes les maladies alors connues. Production supérieure à tout ce qui avait
paru dans le genre, elle fut justement admirée, et plusieurs fois imprimée37
. »
II) La société du XIVème siècle à travers l’ouvrage
A) Erudit et scientifique : le médecin
1) Discipline et profession
Le médecin du Moyen Age a plusieurs visages. Il peut être d’une part, dès le
haut Moyen Age, un homme d’Eglise érudit et d’autre part, et cela dès les XIIème –
XIIIème siècles, un laïc, scientifique formé dans une école ou une Université.
Le médecin est homme de sciences. Lettré, il est la main de Dieu sur la
maladie. Il se doit d’avoir une véritable ligne de conduite, digne de sa place dans la
société. En devenant médecin, il adhère à un savoir-être propre à sa profession. Il
soignera gratuitement les pauvres, dispensera tout son savoir sans négligence,
n’organisera pas de fraude avec la complicité des apothicaires, ne pratiquera pas
d’avortement et ne fournira aucun poison38. Ainsi, le praticien du Moyen Age adhère
aux écrits d’Hippocrate. La médecine est une branche de la physicia, la science du
36 Michaud Hélène, « Les bibliothèques des secrétaires du roi au XVIe siècle », in : Bibliothèque de l’école des Chartes, 1968, tome 126, livraison 2, pp. 333 – 376 37 Dédicace de l’incunable Fleur de Lys en médecine de la Bibliothèque Municipale de Besançon 38 Grmek Mirko D., Histoire de la pensée médicale en Occident, vol. 1 antiquité et Moyen-Âge, éditions Seuil,
1995 (p.160)
25
monde39, ce qui explique que le praticien est un homme qui s’intéresse à la
philosophie, la théologie ; il est également un astrologue qui connait les planètes et
analyse leurs mouvements ainsi que ceux du soleil et de la lune. Bernard de Gordon
fait allusion à de nombreuses reprises à l’astrologie. (« La quartaine communement
dure ung an, car ainsi que les maladies agues ensuivement le mouvement de la
lune, ainsi les croniques ensuivent le mouvement du soleil. » [Folio 10 V]).
La médecine est enseignée dans les universités et les écoles européennes
(Salerne ou Bologne par exemple). En France, nous pouvons citer celles de
Montpellier et de Paris. L’enseignement est basé sur la diffusion du savoir antique et
des connaissances orientales40. Cet enseignement permet de donner une valeur
scientifique à cet art et en limite l’accès aux charlatans. Le médecin doit être un
homme érudit qui doit savoir lire, maîtriser le latin, comprendre et commenter les
textes. L’art médical ne fait pas partie des sept arts libéraux ; il est considéré comme
un art mécanique « c'est-à-dire comme une activité humaine orientée vers l’utilité et
la pratique »41. C’est une discipline qui est perçue comme étant très proche de la
philosophie. Pour Isidore de Séville (560 – 636), la médecine est la « philosophie du
corps »42, notamment par les nombreuses interrogations qu’elle peut susciter. A
Montpellier, la médecine et la chirurgie se confondent. Ainsi, des universitaires
comme Guy de Chauliac puis Henri de Mondeville sont deux praticiens font la
promotion de chirurgie. Science de la médecine par les mains, la chirurgie n’a pas
été précédemment considérée comme étant à la hauteur de la noblesse d’exercice
des médecins. . Elle est stigmatisée par l’Eglise car cet art touche au sacré du
corps. Montpellier appartenant à la couronne d’Aragon jusqu’1349 en sera plus
épargnée que la Paris par ces propos.
39 Imbault-Huart Marie-José, La médecine au Moyen Age à travers les manuscrits de la Bibliothèque Nationale, éditions de la Porte Verte, 1983 (p. 10) 40 Voir note 34. 41 Grmek Mirko D., Histoire de la pensée médicale en Occident, vol. 1 antiquité et Moyen-Âge, éditions Seuil, 1995 (p.182) 42 Grmek Mirko D., Histoire de la pensée médicale en Occident, vol. 1 antiquité et Moyen-Âge, éditions Seuil, 1995 (p183)
26
2) Organisation des études
Dès le XIIème siècle, le fait d’exercer la médecine implique que l’on fait partie
d’une institution professionnelle. L’exercice de l’art médical s’est mis en place
parallèlement à l’universalisation de ces études. Ainsi il est exigé un niveau
intellectuel et de connaissance avant de pouvoir se prétendre médecin d’université ;
il en va de même pour enseigner. Chaque université va mettre en place son propre
cursus scolaire et ses propres exigences pour délivrer l’autorisation d’exercice de la
médecine. Le cursus scolaire des étudiants est le suivant : baccalauréat (Bernard de
Gordon raconte l’histoire d’un bachelier en médecine dans son chapitre sur la cure
de lepre43), licence, maîtrise, et par la suite doctorat. Les étudiants de l’université de
médecine de Montpellier doivent atteindre le niveau de la licence pour pouvoir être
médecin et la maîtrise pour prétendre à une charge d’enseignement. Chaque
université est autonome dans l’organisation de son programme d’étude. Dès 1220,
l’enseignement est codifié et régularisé, les enseignants doivent prouver leur niveau
de compétence avant d’exercer. Les étudiants doivent avoir acquis un niveau de
culture générale solide (latin, grec, français et philosophie) avant de pouvoir
entreprendre des études de médecine. Admis à l’université de médecine, l’étudiant
suivra des cours théoriques et pratiques pendant trois à quatre ans. L’étudiant choisit
de suivre les enseignements théoriques d’un maître en médecine, assiste aux
séances de lectures où ce dernier lit un ouvrage et le commente. Le programme des
enseignements est basé sur l’étude et la critique des auteurs anciens (antique,
arabe) et contemporains. Pour s’assurer une formation pratique, l’élève doit
également suivre son maître lors de ses visites auprès des malades. L’obtention des
titres universitaires se fait après le passage d’examens rigoureux en fin de cursus et
la délibération des enseignants. Le diplôme de médecine de l’université de
Montpellier (comme ceux d’autres universités de renom) donne accès à la noblesse
personnelle et à la noblesse héréditaire après vingt ans d’enseignement pour ceux
qui sont titulaires d’une chaire. Progressivement, la profession médicale s’organise
et se défini comme une profession spécifique donnant naissance à des
43 [Folio 35R/V] « Et chacun se doit bien garder qu’il ne dorme avec femme meselle, et advient a Montpellier que une contesse y estoit venue laquelle estoit meselle et fut en la fin en ma cure et ung bachelier en medecine l’abouboit et dormit avec elle et l’engroissa et il devint parfaitement meseau et celuy est bien [folio 35 V] eureux qui se chastie par aultruy. »
27
regroupements professionnelles. Seuls les étudiants formés dans les universités
peuvent prétendre au titre de médecin.
3) Science et astronomie
L’observation et l’étude du ciel, des astres et des phénomènes
météorologiques est un héritage antique et arabe. Au Moyen Age, l’astronomie
(science) et l’astrologie se confondent44. La scientia astrorum regroupe l’étude des
astres et de leur influence. Cette science est aux frontières du mysticisme, de la
divination, de la magie et de la nigromancie45. L’astronomie est intégrée en dernière
position dans le quadrivium après l’arithmétique, la géométrie et la musique. Les
érudits médiévaux s’intéressent à cette science qu’ils considèrent comme utile, leur
permettant de répondre à de nombreuses questions d’ordre privé, personnel,
religieux, et scientifique. Des astrologues de renoms ont été proche des cours
royales et les conseillers des princes. Nous pouvons citer Thomas de Pizan (1364 –
1432) astrologue et médecin de Charles V (1338 – 1380) ou Simon de Pharès (1440
– 1499) médecin46 et astrologue de Jean II, duc de Bourbon (1462 – 1488) et de
Charles VIII (1470 -1498). Jusqu’au début du XVe siècle, l’astrologue est confondu
avec le médecin. Ainsi nous retrouvons dans Le recueil des plus célèbres
astrologues de Simon de Pharès47 de célèbres médecins répertoriés en tant que
qu’astrologues. Ainsi il cite, entre autre, « Arnault de Villeneufve, exellent philozophe,
grant medicin et astrologien48 ». Ce n’est qu’en 1415 qu’apparaît dans les comptes
de l’Hôtel de France, la charge d’Arnould de La Palu qualifié comme premier «
44 La différence sera faite suite à la découverte du système héliocentrique par Copernic en 1543. 45 Nigromancie : "Art magique et divinatoire, fondé sur l'invocation des morts, des mauvais esprits, des démons, nécromancie" (Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales) 46 « il est qualifié du titre de médecin dans les registres de du Parlement de Paris » (d’après Boudet J-P, La bibliothèques de Simon de Pharès…(p.VIII)) 47 Boudet Jean-Patrice, « Simon de Phares et les rapports entre astrologie et prphétie à la fin du Moyen Age », in Mélanges de l’Ecole française de Rome. Moyen Age, Temps modernes. T.102, (pp617-648). Boudet Jean Patrice, Le recueil des plus célèbres astrologues de Simon de Pharès, édité pour la société de l’Histoire de France, Tome 1er édition critique, Librairie Honoré Champion, Paris, 1997 48 Id. (p. 466)
28
astrologien »49 à part entière. Il va apparaître entre le XIIe siècle et le XVe siècle une
différence entre les érudits qui s’intéressent à l’astronomie en tant que science
complexe et divinatoire, et les hommes de Dieux, les clercs, qui eux vont se tourner
vers la nigromance, la magie et l’exorcisme.
Au-delà des prédictions, l’astronomie permet de donner un rythme temporel
aux hommes avec les mois lunaires de trente jours et de définir le temps des
maladies. « Les maladies agues ensuivement le mouvement de la lune, ainsi les
croniques ensuivent le mouvement du soleil » [Folio 10V] propos de Bernard de
Gordon dans le chapitre traitant des fièvres quartaine50. L’astronomie médiévale est
donc l’auxiliaire naturelle pour définir les jours de saignée, d’administration des
purgatifs ou encore d’annonce des maladies51. Dans le traité de Galien, de diebus
creticis (traduit par Gérard de Crémone), les humeurs du corps sont en relation
étroite avec les mouvements du soleil et de la lune. Les parties du corps sont mises
en relation selon diverses combinaisons avec le mouvement des planètes
(mélothésie planétaire) ou des constellations du zodiaque (mélothésie zodiacale)52.
La numérologie en rapport avec les mois lunaires est un élément de prédiction des
sphères médico-astrologique. Ainsi en prenant en compte le mois lunaire de la
maladie, et le nombre de lettres du nom du malade le médecin aidé d’une sphère
divinatoire peut donner un pronostic défavorable ou non au malade. Cet étonnant
procédé est répandu dans tous le moyen âge occidental et l’on retrouve une version
d’une sphère de ce type copiée par Pierre Roger (futur pape Clément VI) vers 1315,
alors étudiant à l’université de Paris. Au-delà des études astrologiques et
astronomiques, il faut penser aux météores qui depuis toujours posent de
nombreuses questions aux hommes. Les éclipses sont synonymes de peurs
eschatologiques. Rappelant aux Hommes celles survenues lors de la Crucifixion du
Christ. Les comètes sont considérées comme annonciatrices de calamités ou de
mort de grands personnages.
49 Boudet Jean-Patricen entre sciene et nigromance, astrologie, divintion et magie dans l’Occident médiéval (XIIe
– XVe siècle), Publication de la Sorbonne, 2006 (p. 309) 50 Livre I de l’ouvrage Fleur de Lys en médecine. 51 Boudet Jean-Patrice, La bibliothèque de Simon de Pharès astrologues du XVe siècle, Centre d’Etudes des manuscrits, Bruxelles, 1994, (p. V) 52 Moreau Philippe, Corps Romains, éditions Jérôme Million, 2002 (p. 202)
29
Le soleil, le zodiaque et les quatre saisons
Paris, BnF, ms. Lat. 7028, fol. 154, (XIe siècle)
« [Ce] codex italien du XIe siècle a peut-être appartenu, au début du XIIe
siècle, à l’évêque Fulbert de Chartres. Aux angles sont figurées les quatre saisons ;
au centre, le soleil est assimilé au Christ, Soleil de justice. (…) Chaque signe est
caractérisé par l’indication du membre qu’il est censé gouverner, selon le principe de
la mélothésie zodiacale : le bélier domine le front, le Taureau les narines, les
gémeaux les yeux, le Cancer la bouche, le Lion les oreilles, la Vierge la gorge, la
Balance la poitrine, le Scorpion les seins, le Sagittaires les pudenda53, le Capricorne
le nombril, le Verseau les hanches ou les cuisses (coxe), les Poissons les jambes. »,
d’après l’analyse de Jean-Patrice Boudet54.
Bien que n’étant pas répertorié comme étant un astrologue de renom dans
l’ouvrage de Simon de Pharès, Bernard de Gordon, médecin du début du XIVe
siècle, rappelons-le, contemporain d’Arnaud de Villeneuve, s’est évidemment
intéressé à l’astrologie, aux planètes et aux phénomènes météorologiques. Nous
pouvons le confirmer en analysant les écrits que nous étudions où il y fait part de ses 53 Parties génitales des deux sexes. 54 Jean –Patrice Boudet, Entre science et nigromance, Astrologie, divination et magie dans l’Occident médiéval (XIIe siècle – XVe siècle), Publication de la Sorbonne, 2006 (p.40-41)
30
observations. Nous savons que Bernard de Gordon a demandé à un auteur sévillan
Jacob ben Makhir55 (connu sous le nom de Profacius Judeus) de lui composer un
traité sur les sphères armillaires56. A travers le texte étudié de Bernard de Gordon fait
référence à la météorologie et à l’astrologie pour prédire les temps ou l’évolution
d’une maladie. Dans le chapitre VIII du livre VII traitant des menstruations, il déclare
que les cycles menstruels sont dépendants de la lune « menstrus fluent selon la age
de la lune, car ils viennent aux pucelles ou premier quarton : et es jeunes ou second
quart et es vieille ou tiers et es anciennes ou quart et pour ce nous pouvons juger
que jeunes gens se doyvent saignier en nouvelle lune et les anciennes en vieille
lune. » [folio 185 R]. Le chapitre traitant de fièvre pestilenciale est composé de
nombreuses références aux planètes, à l’astrologie et la météorologie. « Les vapeurs
sont resolvées par la vertue des estoilles et des planetes et les vens portent leurs
vapeurs entant que une grant pestilence viene en aulcune partie du monde… le
signe de pestilence qui doit avenir, c’est quant appret l’estoille comette comme
chandelle ronde quant maintenant est chaleur maintenant froideur et ung jour ou en
divers jours et que lait est obscur et espes et semble qu’il pleuve et ne pleut point et
que este est chault et moiste et les oyseaul laissent leur nids et leurs œufs sur terre
et plusieurs bestes reptiles apparent ce sont signes de impedimie qui doit advenir. »
[Folio n°16 R / V ]
55 Jacquar Danielle, Micheau Françoise, La médecine arabe et l’Occident médiéval, éditions Maisonneuve et Larose, 1996 (p. 207) 56 Sphères armillaires : en astronomie, une sphère armillaire, aussi connue sous le nom d'astrolabe sphérique, est une modélisation basée sur la sphère céleste utilisée pour montrer le mouvement apparent des étoiles autour de la Terre et du Soleil dans l'écliptique. (source : Wikipédia)
31
B) La vision du monde à travers le manuscrit
1- Du monde à l’univers
La vision du monde au Moyen âge découle directement de la théorie
aristolicienne et se rapproche donc de la théorie des humeurs. Ainsi l’univers est
formé des quatre éléments (le feu, l’air, l’eau et la terre), le temps est divisé en
quatre saisons, et comme nous l’avons déjà vu, les individus ont quatre
tempéraments (pour mémoire : sanguin, colérique, mélancolique, phlegmatique).
Dans leurs études, les astrologues (et médecins) font des liens entre l’ensemble de
ces éléments, ce qui démontre l’importance de l’astronomie dans la médecine
médiévale. L’étude et les prédictions astrologiques sont basées sur l’observation du
ciel qui a toujours fasciné et terrifié les hommes57. Dans un monde où l’autorité
suprême est spirituelle, les signes célestes (comme les météores) sont considérés
comme étant des messages envoyés par Dieu aux hommes sur terre, alors que le
ciel représente l’infini et l’inconnu. « Les étoiles ont toujours été censées être
détentrices d’une puissance surhumaine qui influençait non seulement la vie de
l’homme mais également celle du monde »58. Les astrologues font une lecture
attentive du ciel, des étoiles, des planètes grâce notamment à l’astrolabe59 (outil
d’origine grec, perfectionné par les arabes). Ils réalisent des cartes du ciel, des
astres, de la position de la lune (lunaria), du soleil et des horoscopes.
57 Yvanoff Xavier, L’imaginaire du ciel au Moyen Âge, éditions Burillier, Vannes, 2007 (p. 33) 58 Fuhrman Joëlle, « L’influence de l’astrologie dans les écrits médicaux allemands du Moyen Age », dans Ribémon Bernard (sous la direction de), Observer, Lire, Ecrire le ciel au Moyen Age, Actes du colloque d’Orléans, 22-23 Avril 1989, collection Sapience, éditions Klincksieck, 1991, (p.103) 59 « D’une taille variable (entre 10 et 30 cm de diamètre) (…) permet de résoudre les problèmes essentiels relatifs à l’astronomie du premier mobile et de calculer sans peine, pour une ou des latitudes données, les levers des héliaques des étoiles et la position de l’ascendant et des maisons célestes » d’après Jean-Patrice Boudet, Entre science et nigromance, astrologie, divination et magie dans l’Occident médiéval (XIIe – XVe siècle), publication de la Sorbonne, 2006
32
« Cliché IRHT » ; droits institution de conservation, CNRS, MESR
Christ tenant l’Univers
Traduction de : « Aristoteles, Physicia » par GUILLELMUS DE
MOERBEKE
Paris bibliothèque Mazarine. Ms 3469 (f.273) / 1280 -1285
Cette enluminure représente le pouvoir et l’influence que le Christ a sur
l’univers. Dans cette représentation le Monde est divisé en différentes strates. Nous
pouvons identifier la terre (la partie la plus basse), l’air (en bleu clair) et le ciel (strate
la plus haute). Viennent s’intercaler entre les parties énumérées 2 autres couches, la
strate verte qui peu probablement représenter une couche décrite comme étant celle
d’éther et d’air humide et la partie rouge représentant le feu60. Au total nous
identifions facilement 5 strates contenues dans une sphère. Le chiffre 5
symboliquement représente l’unité de l’homme (les 4 membres et la tête). D’après
Hildegarde de Bingen, l’homme est « un médiateur entre les êtres spirituels et les
être corporels, un point de jonction entre l’éternité et le temps, le ciel et la terre61 ».
60 Furhman Joëlle, « L’influence de l’astrologie dans les écrits médicaux », dans Ribémon Bernard (sous la direction de), Observer, Lire, Ecrire le ciel au Moyen Age, Actes du colloque d’Orléans, 22-23 Avril 1989, collection Sapience, éditions Klincksieck, 1991, (p. 104) 61 Id…(p. 104)
33
L’univers est contenu dans un cercle, lui-même contenu dans deux autres. Ce qui
nous fait penser à la représentation de la trinité (Un seul Dieu représenté par le Père,
le fils et le Saint Esprit). Le cercle (par extension la sphère) représente la perfection
parfaite inaccessible à l’humain62. Ainsi le pouvoir suprême de Dieu sur l’Homme et
le monde est mis en avant.
2- Le monde animal et ses représentations
La vision du monde qui entoure l’homme du Moyen Âge est représentée
différemment de ce que nous pouvons décrire aujourd’hui, non pas que la nature soit
radicalement changé. Mais juste que nos perceptions contemporaines sont
différentes de celle du XIIIème siècle. La société médiévale est profondément
chrétienne et naturellement, l’homme trouve dans la Bible une réponse à ses
questions sur le monde qui l’entoure. Les représentations et les descriptions de la
nature et ses créatures que nous pouvons retrouver donnent une explication
théologique de la nature, mêlant créatures divines, mystérieuses et diaboliques.
D’après Michel Pastoureau « Les hommes du Moyen Âge savent très bien observer
la faune et la flore. Mais ils n’ont guère idée que l’observation ait un rapport avec le
savoir, ni qu’elle puisse les conduire à la vérité. Cette dernière ne relève pas de la
physique mais de la métaphysique : le réel est une chose, le vrai en est une autre,
différent e»63 . Les représentations que nous trouvons dans les bestiaires ne sont
pas ressemblantes à la vérité, mais ce qui importe est la représentation symbolique
incarnée par l’animal et non pas la représentation réelle. Tout au long de l’ouvrage
étudié, l’auteur fait référence à la nature et à ces animaux. Classiquement les
animaux sont catégorisés en 5 classes :
62 Cazenave, encyclopédie des symboles, coll. La photothèque, éditions le livre de poche, 1996 63 Pastoureau Michel, Bestiaires du Moyen Âge, éditions seuil, 2011 (p.12)
34
Quadrupèdes Sauvages ou domestiques « si comme loups, renars, ours,
chevaulx et lievres et toutes
bestes a IIII pies64 » [folio 35R] -
Oiseaux Créatures qui volent « on luy donnera (…) du brouet
de poule jeune cuicte » [folio 5R]
Poissons Toutes les créatures vivant dans
l’eau
« Et peu menger poisson…des
eaues nectes courans » [folio 38
V]
Serpents Serpents, lézards et dragons « venons aux serpens de lieux
bien secs qui on le dos noir et luy
loyez vers les extremitez le chief
et la queue et le bates tres bien
de petites verges et puis
souldainement II hommes luy
copent l’un la teste et l’autre la
queue tout ensemble et le laissez
debatre sur la terre et tant plus se
demenera et plus ystera de sang
et mieulx vouldra. » [Folio 37R]
« tu dois entendre que sang de
dragon est de froide
complexion » [Folio 174V]
Vers Animaux de petite taille, larves,
vermines mais aussi batraciens,
insectes, gastéropodes et aussi
quelques coquillages.
« Decy les medecines qui de leur
proprieté elective et merveilleuse
rompent la pierre, cest assavoir
lapis […] de scorpions et vecy
comment la fait
« …scopriones… »de ceste huil »
[folio 174 V]
(Tableau réalisé d’après les observations de Michel Pastoureau65)
35
Un des animaux les plus étonnants de l’époque médiévale est le dragon.
Créature considérée comme réelle, appartenant aux trois mondes (terrestre,
aquatique et céleste) il revêt une apparence polymorphe dans les différentes
descriptions que l’on peut retrouver. Décrit tel un grand serpent, « il est pourvu de
pattes et parfois d’ailes »66 ; animal terrifiant incarnant la force diabolique, c’est aussi
un animal omniprésent dans la société médiévale (nombreuses représentations).
Bernard de Gordon dans son chapitre traitant de la passion des gengives préconise
l’application d’une résine appelée « sang de Dragon » sur les plaies ulcérées « Et
pour ce es ulceres la ou il nous fault rengendrer chair nous y pouvons mettre sang de
dragon ». Ce que certain voyaient comme le sang desséché d’un animal fabuleux
permettant la renaissance de la chair était en réalité une résine rougeâtre aux
pouvoir astringents et hémostatiques, que l’on extrayait de palmier. Elle était utilisée
avec d’autres composants pour embaumer les corps, ainsi par exemple celui du duc
de Berry : « A Jehanni du Pré, espicier et appothicaire demourant à Paris…pour XII
livres de farine de fèves pour mettre avecques autres choses dedanz le corps de feu
mondit seigneur…Pour une livre alibani…une livre mierre fin67…une livre encens
fin…, une livre mastix fin…une livre momie (amone, fruit de la grosseur d’une
noisette, d’une odeur camphrée)…une livre de cyprès…pour pluseurs herbes
odorans par lui livrées pour ladite cause…pour demie once vif argent…une quart eau
rose…une livre canfre…2 livres de musc…2 livres de colofone…2 ivres poix noir…et
pour XII livre coton… »68.
65 Pastoureau Michel, Bestiaires du Moyen Âge, éditions seuil, 2011 (p. 14) 66 Id…(p.207) 67 Myrrhe 68 Lehoux Françoise, « Mort et funérailles du du de Berri (juin 1416) », in Bibliothèque de l’école des chartes, 1956, tome 114, (p.80)
36
C) La pratique médicale et la religion
1- Symboles et allégories
Au Moyen Age « tout est sacralisé, non seulement la théologie, la mystique ou
l’art, mais la sociologie et même la politique. Rien n’échappe au sacré69. »
Une lecture attentive des sources étudiées montre l’importance qu’attache l’auteur à
la religion, au sacré et à Dieu. D’une part en citant directement Dieu dès son
introduction, « Nul ne se peult mieulx approcher a Dieu que en estudiant en verité et
pour verité. Donc en l’onneur de l’aignel celeste qui est splendeur et gloire de Dieu le
pere, je intitule et appelle ce livre cy Fleur de lis de medicine, en latin lilium
medicine. » [Folio 1], et d’autre part en introduisant de nombreux symboles et
allégories tout au long de son texte faisant référence à la bible.
En premier lieu, le nom qu’il donne à son ouvrage présente une dualité. Au sens
propre, le lis blanc (lilium candidum) a pour propriété médicinale de calmer la toux et
les affections nerveuses. On peut également l’utiliser comme antiseptique local et
pour soulager les brûlures. Le lis est synonyme de blancheur et en conséquence de
pureté, d’innocence et de virginité. C’est aussi le symbole de la royauté en France70.
L’auteur explique ainsi le choix de son titre « je intitule et appelle ce livre cy Fleur de
lis de medicine, en latin lilium medicine. Car au lis sont plusieurs fleurs et en
chascune fleurs sont VII fueilles blanches et VII grains ainsi comme dorés, et
semblablement ce livre contient sept parties. La premiere est d’or clere et
respendissans, car elle traite des maladies universelles et commence aux maladies
de fievres. Les aultres VI parties seront blanches et transparans par leur grant
demonstrance. » [Folio 1]
Il est étonnant de voir comment Bernard de Gordon s’attache à faire ressortir
le chiffre VII dans sa présentation. D’un point de vue symbolique, ce chiffre est
universellement considéré comme représentant la totalité, mais la totalité en
69 Davy M. M, Essai sur la symbolique romane, coll. « homo sapiens », editions Flammarion, 199 (p.2) 70 Debuigne G., Couplan F. , Petit Larousse des plantes qui guérissent, 500 plantes, éditions Larousse, 2006 (p. 532)
37
mouvement ou un dynamisme total. Ce chiffre a une connotation religieuse, les VII
pétales de la roses qui évoqueraient les sept cieux, ou encore la clef de l’Apocalypse
(7 églises, 7 étoiles, 7 esprits de Dieu, 7 sceaux, 7 trompettes, 7 tonnerres, 7 têtes, 7
fléaux, 7 coupes, 7 rois). Avicenne également décrit les VII archanges princes des
sept cieux. Dans sa présentation nous pouvons également penser qu’il fait référence
à l’hexagramme (sceau de Salomon), les pointes représentant les 7 planètes moins
le soleil qui est au milieu (ici le soleil peut être d’or et les 6 autres planètes
« blanches et transparans »). L’être humain est également réputé pour être formé de
sept parties : le corps est constitué de 4 éléments et l’esprit de 3 forces71.
Tout au long de l’ouvrage il apparait deux types d’allégories et de symboles :
les nombres et chiffres des textes étudiés ne donnent pas uniquement une valeur
numéraire. Mais ils font référence à des connaissances anciennes et à des extraits
de la Bible. Le tableau suivant est un récapitulatif des nombres et des significations
retrouvés dans les textes. En complément de la symbolique des nombres, l’ouvrage
recèle de nombreuses images et allégorie. Il n’est pas aisé de les identifier dans une
première lecture pour ceux qui ne sont pas accoutumés aux textes médiévaux. Une
seconde lecture attentive dévoile des secrets inattendus et démontre le lien qui lie
l’homme du moyen âge avec la religion.
71 Fuhrman Joëlle, « l’influence de l’Astrologie dans les écrits médiévaux », dans Ribémont Bernard (sous la direction de), Observer, lire, écrire le ciel au Moyen Age, actes du colloque d’Orléans du 22-23 avril 1989, éditions Klincksieck, 1991 (p. 104)
38
Le tableau ci-dessous présente les différentes allégories et images identifiées dans
les transcriptions réalisées de l’ouvrage Fleur de lys en medecine.
Symbole Contexte Représentation
1 Représente l’homme debout pouvant
accéder à la révélation et à la
connaissance.
Homme debout accédant à la
Révélation.
3 La trinité. Dieu est en Un en trois
personnes
Perfection de l’Unité Divine.
4 On retrouve se nombre très souvent :
les 4 évangélistes, les 4 docteurs de
l’Eglise, les 4 grands prophètes, les 4
saisons, les 4 fleuves du paradis, les 4
tempéraments, les 4 humeurs, les 4
points cardinaux. il désigne aussi le
tétragramme JHVH (Yahwé) : nom de
Dieu.
Représente le tétragramme
JHVH, la croix du Christ
5 Les 2 bras, les 2 jambes et la tête. Il
peut aussi représenter la succession
des espèces, dans la Genèse : les
poissons et les volatiles furent créés le
5me jour.
Représente l’homme
6 Création du monde (dieu créa le
monde en 6 jours, il se reposa le 7me),
hexagramme (les 6 pointes = les 7
planètes (moins le soleil qui est au
centre)
Création du monde
7 Nombre symbolique important. Dans
l’Apocalypse selon saint Jean, le sept
représente un élément structurant de
son texte (7 Eglises, 7 cornes, 7
Nombre symbolique important
au moyen âge
39
coupes de la colère dans le « livre à
sept sceaux »). On retrouve ce chiffre
dans l’ancien testament. Au moyen
âge chiffre important : les 7 âges de la
vie, les 7 dons du saint Esprit, 7
vertus, 7 arts et sciences, 7
sacrements, 7 prières adressées au
Seigneur dans le Notre-Père.
9 Selon Pseudo-Denys l’Aréopagiste,
les anges sont hiérarchisés en neufs
cœurs.
La perfection de la perfection,
l’ordre dans l’ordre, l’unité dans
l’unité
12 Nombre de l’élection. Représente
l’Eglise, l’Eglise triomphante, au terme
des deux phases militante et
souffrante. Les 12 apôtres, L’arbre de
vie portait 12 fruits, le chiffre même
d’Israël qui est celui de l’ancien et du
nouveau peuple élu.)
Nombre de l’élection.
16 Carré de quatre Accomplissement de la
puissance matérielle.
24 La Bible connaît 24 classes de
prêtres, 24 classes de chantres, 24
classes de vieillards dans
l’Apocalypse. Ces vieillards exercent
un rôle sacerdotal et royal : ils louent
et adorent Dieu.
La double harmonie du ciel et
de la terre
36 Représente la Triade : ciel, terre et les
Hommes
Nombre du Ciel.
40 Dans la bible, Jésus prêche 40 mois
ou encore le ressucité apparait à ses
disciples pendant les quarante jours
Nombre de l’attente, de la
préparation, de l’épreuve ou du
40
qui précèdent l’Ascension. Les
hébreux sont condamnés à errer 40
ans dans le désert. Jésus,
représentant l’humanité nouvelle, est
conduit au temple quarante jours
après sa naissance, il sort victorieux
de la tentation subie pendant quarante
jours (St Mathieu) et réssucité après
40h de séjours au sépulcre.
châtiment.
41 40+1 Nombre de l’attente associé au
nombre de l’homme
Chien Symbole de la confiance, de la
vigilance. Mais aussi gardien de l’Au-
delà.
Gardien, accompagnateur dans
l’Au-delà.
Eau Eau du Baptême (nouvelle
naissance), L’eau lave le corps et le
purifie, L’eau est source de vie.
Source de vie, purificatrice,
regénérante.
Lait En raison de sa couleur et de son
goût. .
Pureté, douceur, « offrande
pure »
Lait et
Miel
La terre promise de Cannan est une
terre d’abondance ou le lait et le miel
coulent à flot.
Abondance, douceur
Matrice Fécondité, régénération
spirituelle
Miel Les enseignements de Dieu sont
comparables au miel pour leurs
propriétés de purifier de conserver
Purification, conservation,
douceur.
Mouton /
Agneau
L’agneau de Dieu est un symbole du
Christ. Mais l’agneau Pascal rappelle
la victoire de la vie sur la mort. Il
Résurrection
41
symbolise la Résurrection.
Pain
Pain levé
Nourriture de base et nourriture
spirituelle.
Le pain au levain symbolise la
transformation spirituelle.
Pêcheur Celui qui sauvera les hommes de la
perdition
Prédication, apostolat
Pierre La pierre et l’homme présentent un
double mouvement de montée et de
descente. L’homme naît de Dieu et
retourne à Dieu. La pierre brute
descend du ciel.
Relation entre le ciel et la terre
Poisson Le Poisson est une nourriture que le
Christ ressuscité a mangée. Allusion
au baptême.
Il peut aussi être l’image du Christ
(ICTUS)
Symbole du repas
eucharistique.
Représente le baptême.
Peut représenter le Christ.
Semence Puissance de vie
Serpent Serpent d’airain qui permet de rester
en vie
Vision positive, renaissance, ou
péché (péché originel)
Vin Le pain et le vin sont transformés en
chair et en sang de Jésus-Christ lors
de l’Eucharistie
Force germinative
42
2- Douleur, Souffrance et Passion
La douleur est une « une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable,
associée à un dommage tissulaire présent ou potentiel, ou décrite en termes d’un tel
dommage72 ». L’expression et le vécu de cette sensation sont dépendants des
caractéristiques individuelles, sociales et culturelles. La souffrance est d’une part
similaire à la douleur et parfois complémentaire. La souffrance est d’autre part la
résultante de la douleur sur l’esprit. La passion est proche de la mort, elle représente
la douleur et la souffrance à leur paroxysme.
La religion enseigne aux hommes que la douleur les rapproche de Dieu. Elle les
exhorte à la patience. Ainsi, le mortel fait honneur au Christ mort sur la croix. La
douleur fait référence à la Passion du Christ décrite dans le Nouveau Testament.
Pour saint Augustin73 (354 - 430) « Nul ne souffre inutilement ». D’une part souffrir
est une épreuve de Dieu que l’homme doit subir pour se rapprocher de Lui, de l’autre
la douleur peut être une punition divine. La notion de douleur reste ambigüe, et la
souffrance du corps peut être volontaire comme nous pouvons le voir lors des
séances de flagellations dans les monastères ou encore plus simplement lors des
périodes d’ascèse et de jeûne. Ainsi la violence faite au corps permet de ressentir la
douleur que le Christ a endurée lors de sa crucifixion. « La maladie et la souffrance
sont définies dans le livre d’Isaïe [ancien testament] comme la part que choisit le
Christ lui-même, l’Homme de douleur, méprisé, qui se charge de tous nos maux74
».
Pour Saint Jérôme (347 - 420), cet homme de douleur est le lépreux.
« Apprendre à supporter la douleur comme un don de Dieu est un sacrifice qui
rapproche le fidèle du Christ, comme un moyen de rédemption »75.
A travers les sources historiques étudiées, nous retrouvons de nombreuses
évocations à la Religion. Il y a un véritable parallèle entre la maladie et le péché. Les
72 D’après l’Association Internationale pour l’Etude de la Douleur. (http://www.institut-upsa-douleur.org/fr-FR/id-126/Mecanisme_de_la_douleur.igwsh) 73 Saint Augustin est considéré comme faisant partie des quatre Pères de l’Eglise (avec Saint Jérôme, Saint Ambroise et Saint Grégoire). 74 Gérard Michèle, « Quand la lèpre fleurit », Littérature, N°102, Echos et traces, 1996 (p14-28) 75 Roselyne Rey, Histoire de la douleur, coll. Histoire des sciences, éditions la découverte, Paris 1993, (P.59-60)
43
mauvaises pensées ou le mauvais esprit (décrite par Évagre le Pontique (345 -399)
sont d’après Bernard de Gordon source de mal. Ainsi la luxure, la colère et la
tristesse sont des échauffements de l’esprit qui peuvent entraîner une fièvre
« effimere ».
« Concupisible » Désirs « Irascibles » Privations, frustrations
Gastimargia (gourmandise) Orgè (Colère)
Philarguia (avarice) Lupé (tristesse)
Porneia (luxure) Acedia (desespoir)
Kenodoxia (égocentrisme) Uperèphania (orgueil)
Les 8 vices de l’esprit d’après Évagre le Pontique
Les remèdes font aussi appel en partie à la croyance. La diète (ou le jeûne) de
quelques jours proposée par le médecin peut bien sûr être interprétée comme
permettant au corps de se reposer ; mais cette pratique fait également penser à des
pratiques ascétiques des religieux pour purifier le corps et l’esprit et donc permettre
de se rapprocher de Dieu par la privation. L’eau est un des éléments qui rentre dans
la composition des recettes médicales, par le bain purificateur ou par l’absorption.
Ainsi nous pouvons lire dans les remèdes de la lèpre : « l’eau soit necte, clere de
fontaine sans nulle saveur, (et) qui coure vers l’orient » [Folio 38 V]. Nous pouvons
penser que l’auteur préconise une eau qui va en direction de Jérusalem.
Dans sa démonstration sur la lèpre il fait référence au Lévitique. Parmi les
cinq causes pouvant engendrer la lèpre, il insiste sur les relations sexuelles entre
hommes et femmes (chapitre 15 du Lévitique76) (Cf. annexe). La notion d’impureté
est omniprésente : («Lepre (…) est engendré en temps de menstrus ou qu’il est filz
de lepreux ou pour ce que lepreux avait dormi avec la femme grosse et ainsi
s’engendre lepre » [folio 35 R]) Pour illustrer ces propos, Bernard de Gordon nous
76 Le Lévitique est l’un des des cinq livres du Pentateuque dans l'Ancien Testament chez les Chrétiens. Il doit son nom au terme « lévite », prêtre hébreu. Il met l'accent sur la sainteté de Dieu et le code selon lequel son peuple pouvait vivre pour devenir saint. Son but est d'enseigner les préceptes moraux et les vérités religieuses de la loi de Moïse au moyen du rituel. Il livre comprend 27 chapitres, qui relatent l'exposé à Moïse des lois et des rites de Dieu.
44
relate une expérience entre un bachelier et une femme « moselle » à Montpellier.
Réelle ou imaginaire, cette histoire permet de mettre en valeur ces affirmations en
lien avec le péché de luxure. Saint Jérôme « conformément à l’esprit d’un passage
de l’Epitre aux Romains (VIII, 3) (…) explique que le fils de Dieu s’est incarné avec
une chair semblable à celle du péché77 ». La maladie, et tout particulièrement la
lèpre est un mal honteux, une faute qui transforme le corps qui devient pourriture ;
aussi paradoxal que cela puisse être, la maladie, la souffrance et la honte sont
considérées comme un don de Dieu (comme le décrit Baude Fastoul et Jean Bodel
dans leurs Congés), une épreuve similaire à la passion du Christ à traverser.
« Lépreux demandant à l’Antéchrist de le guérir »
Mystère du Jour du Jugement, Besançon BM, ms.0579 [f.012v]
« Cliché IRTH »
77 Gérard Michèle, « Quand la lèpre fleurit », Littérature, N°102, Echos et traces, 1996 (p14-28)
46
PARTIE II : LES CONCEPTIONS MEDICALES MEDIEVALES
Médecin examinant une fiole d’urine et prenant le pouls d’un malade
Râzî/Galenus (Ps.)/Hippocrates, Recueil de médecine, 1250-1260,
Avignon - BM - ms. 1019 (folio. 86V)
« Cliché IRHT »
47
I) Les origines de la médecine médiévale
A) Les fondamentaux : les connaissances antiques et arabes
1- Le monde médical antique
Les Ecrits hippocratiques sont la base de la réflexion des médecins arabes
aux médecins du Moyen Age occidental. Ils raisonnent sur les maladies et leurs
signes cliniques à partir de la théorie des humeurs développée par Hippocrate (-460 -
-370) dans les Ecrits hippocratiques. Il reste encore des points obscurs sur l’origine
de ces écrits. Il est fort probable que « la Collection hippocratique [provient] de la
bibliothèque de l’école de Cos78 ». La compilation des différents traités et écrits est
encore largement discutée. En tout état de cause, nous savons que l’œuvre est
écrite en langue ionienne et que l’ensemble des écrits s’accorde à rejeter « la magie
et la superstition comme moyens thérapeutiques79 ». Les chercheurs s’accordent à
affirmer que l’auteur de ces écrits ne peut pas être unique et donc qu’Hippocrate n’a
pas pu rédiger l’ensemble de l’œuvre. Mais l’ensemble des traités ont pour point
commun de présenter une approche nouvelle, une approche rationnelle de la
maladie et une réflexion sur la médecine et la déontologie. Les traités des Ecrits
Hippocratiques vont constituer les bases solides qui vont permettre l’émergence
d’une pensée et d’une pratique médicale en constante évolution de l’Antiquité à nos
jours. Ils vont être étudiés, interprétés, commentés durant toute l’Antiquité et le
Moyen Age. Ainsi Galien80 (131 – 201) va prolonger la réflexion et commenter,
compléter les travaux d’Hippocrate (et des autres). Il met en avant la rationalisation
de la médecine, l’importance de l’approche systémique. Ses propos vont être traduits
en Arabe puis en Latin (notamment par Constantin l’Africain). Son œuvre est
immense et riche d’enseignement. Ses recherches sont diverses, de la
78 Virgine Tordeux, La maladie sacrée, les perthenoi dans le regard de la médecine grecque, Mémoire de Master, Université de Rennes 2, 2006 79 Id. 80 Galien (131 – 201) : Erudit, scientifique et médecin il va commenter et rédiger de nombreuses œuvres. Ces écrits toujours dominés par les Ecrits Hippocratiques traitent de médecine et de pharmacie. Il met en avant le rationnel et l’approche systémique. Traduit en Arabe, il est l’un des pères fondateurs de la médecine islamique et médiévale.
48
pharmacologie à la chirurgie, sans oublier l’anatomie. Les médecins arabes tel que
Abulasis (940-1013), Râzî (865 – 925) ou encore Avicenne81 (pour ne citer que les
plus connus) vont s’inspirer de la pensé de Galien (et donc par interposition des
Ecrits hippocratiques) et enrichir à leur tour la pensée et la connaissance médicale
par leurs recherches et leurs écrits. L’université de Médecine de Montpellier se veut
comme étant le prolongement médiéval de l’école de Cos ; ainsi, à l’entrée de son
école nous pouvons voir un cadrant solaire portant les premières lignes des
Aphorismes d’Hippocrate : H TEXNH MAKPH82. Ce qui traduit aujourd’hui que cette
université est reconnaissante de son passé et de la richesse des enseignements
qui ont fait le renom ce cette université qui rayonne depuis le Moyen Âge.
Cadrant solaire placé à l’entrée de l’université de médecine de Montpellier I
81 Avicenne (980-1037) : né en Perse, est devenu l’un des plus grands médecins-philosophes de son temps. Il rédigea de nombreux (plus d’une centaine) sur la chimie, l’acoustique, la musique, la philosophie…et seize traités de médecine. Le plus célèbre est le Quanum fit’ tibb’ ou Canon de la médecine. Il fut inspiré par Aristote, Rhazès, Diosicorde ou encore par la théorie Hippocratique. 82 « L’art est long »
49
2- La théorie des humeurs
Cette vision de la médecine se base sur la médecine galénique, issue de la
théorie aristotélicienne des quatre éléments83 (l’air, le feu, la terre et l’eau), combinée
à la matière (chaude et humide, froide et sèche) et associée aux pensées et à la
réflexion des Ecrits hippocratiques.
D’un point de vue physiologique nous parlons du sang, du flegme (pituite), de
l’atrabile (bile noire) et de la bile (bile jaune). « Avec l’air, le sang est chaud et
humide. Le flegme est humide et froid comme l’eau. L’atrabile est froide et sèche
telle la terre. La bile, enfin, est chaude et sèche à la manière du feu. »84. Le sang et
la bile sont facilement identifiables, le flegme peut s’apparenter à la lymphe. Mais il
n’y a aucune correspondance physiologique avec l’atrabile.
Source : Wikipedia
83 Brelet Claudine, Médecines du monde, collection Bouquins, éditions Robert Laffont, 2002 (p. 438) 84 Bériac Françoise, Histoire des lépreux au Moyen-Age, une société d’exclus, éditions Imago, 1988
50
Les quatre éléments
Bartholomaeus Anglicus, livre des propriétés des choses, MS 1029, [Folio 130]
Bibliothèque Sainte Geneviève, vers 1350
« Cliché IRHT »
La santé au Moyen Age est définie comme un parfait équilibre de l’ensemble
de ces humeurs dans le corps. Cet équilibre peut être altéré (« dyscrasie ») par des
agressions externes (l’alimentation par exemple) ou interne (vieillesse). L’altération
des humeurs dans l’organisme entraine la dégradation de l’état général du malade.
Le médecin va s’efforcer de trouver le traitement adapté pour restaurer (ou
conserver) ce délicat équilibre en permettant aux humeurs viciées de se déposer
dans une partie du corps ou en les évacuants85. La médecine du XII – XIIIe siècle est
une médecine des fluides, une médecine purgative, une médecine des semblables
ou des contraires pour permettre au malade de retrouver son équilibre humoral.
85 Grisey Francine, La peste en Franche-Comté du XIVème au XVIIème siècle : traitement et prévention, Thèse pour l’obtention du Diplôme d’Etat de Docteur en Pharmacie, sous la direction de P. Laurent, Université de Franche-Comté, mars 2000 (p.21)
51
La théorie des humeurs s’inscrit dans une vision monothéiste de la vie, et permet de
considérer le corps comme une simple enveloppe corporelle86.
Bernard de Gordon s’appuie sur cette théorie, universelle au moyen âge, pour
diagnostiquer et soigner les maladies qu’il a identifiées. Ainsi, tout au long de ses
écrits il met en confrontation les signes cliniques qu’il a pu observer avec le système
humoral de son patient. Cette compétence lui est reconnue pour l’ensemble de ses
travaux87. « Selon le système de la médecine grecque, le système hippocratique en
particulier, il est impossible de déterminer le nombre des maladies »88. Au chapitre
XXVII (livre III) il précise : « purges le corps selon la exigence de l’umeur » [Folio
122V]
L’auteur nous précise dans son IIIème chapitre traitant de la fièvre tierchaine,
que les humeurs sont indépendantes les unes des autres même si elles sont
ensemble. En effet, pour lui, même si une humeur est corrompue les autres ne le
sont pas automatiquement car elles sont différenciées. « on peult demander se quant
une humeur est corrumpue se les aultres le sont, puis que elles sont ensemble. Je dy
que ce n’est pas choses necessaire pour ce que les humeurs sont distinguées par
leurs propres fourmes et par propres sieges et par leur propre mouvemens et a
chacune font regime, sa proprieté et son propre attemprement et ainsy une humeur
peult perdre son attemperance et la tremperance de l’autre ne sera pas perdue et
pour ce ce n’est pas necessite que se une humeur est corrumpue que les aultres le
soient. » [Folio 8 V]
Nous pouvons voir dans ces écrits le médecin et le pédagogue qu’est Bernard de
Gordon. Il a su adopter dans sa pratique d’une part les concepts de la médecine
hippocratique et galénique et d’autre part une réflexion clinique et scientifique
personnelle.
86 Brelet Claudine, Médecines du monde, collection Bouquins, éditions Robert Laffont, 2002 (p.438) 87 Le Blévec Daniel, L’université de médecine de Montpellier et son rayonnement (XIIIe – Xve siècles), Actes du
colloque international de Montpellier (Université Paul-Valéry – Montpellier III), 17 – 19 mai 2001, éditions
Brepols, 2004 (p. 112)
88 Faucon J-Claude, Labbé Alain, Quérel Danielle, Miscellanea Mediavalia, mélange offert à Philippe Ménard, édition Honoré Champion, Paris 1998 (p.1390)
52
3- Le savoir arabe
Les connaissances médicales du monde arabe sont fondées sur les socles du
savoir antique, byzantin et oriental (Perse, Inde, Chine).
Les arabes ont su traduire les textes grecs dans leur langue, sauvant le savoir
antique. Les Perses, au IVe siècle, ont accueilli des médecins chrétiens et des
nestoriens condamnés par le concile d'Ephèse. Ces médecins y ont fondé l'Ecole de
Jundishapour, riches en ouvrages médicaux et scientifiques. Cette école va former
des médecins de tout le Moyen-Orient et même des étudiants venus d'Inde ou de
Chine. L'apparition du papier va favoriser la diffusion du savoir scientifique dans
l'ensemble du monde arabe, de la Perse à l'Espagne. Les bibliothèques se
développent à travers l'ensemble de l'Orient (bibliothèque du Caire, de Bagdad, de
Cordoue...).
La prise de Tolède en 1085, lors de la Reconquista, par les troupes du roi
Alphonse VI, a permis de vulgariser les écrits médicaux arabes et antiques contenus
dans la bibliothèque de la ville dans toute l’Europe. La diffusion va se faire du Xe au
XIIe siècle par la communauté juive qui compte parmi elle de nombreux médecins et
apothicaires. Les juifs vont s’installer dans toute l’Europe en devenant médecin
particulier des rois, des princes de l’Eglise ou encore attachés à des municipalités.
Du Portugal à l’Allemagne, en passant par la Moldavie et l’Italie, les praticiens juifs
vont exercer leur art dans tout l’occident et participer à colporter la science arabe et
antique aux Chrétiens.89
Nous pouvons compter sur les nombreuses traductions, notamment de Gérard
de Crémone (1114 – 1187) et de Constantin l’Africain (1015 – 1087). Gérard de
Crémone à l’inverse de Constantin qui vient d’ « Ifriqiya pour « arabiser » le monde
89 Arnaldez R., Beaujeu J., Beaujouan G., Bloch R., Bourgey L., Dupont-Sommer P., Filliozat J., Furon R., Haudricourt A., Itard J., Labat R., Lefebvre G., Massignon L., Michel P-H., Needham J., Simon I, Stresser-Péan G., Taton R., Théodoridès R., Vercoutter J, Virolleaud Ch., La science antique et médiévale (des origines à 1450), éditions PUF, 1957 (p. 512/514)
53
latin, [va aller] au devant de la science arabe »90. Il traduit de nombreux ouvrages en
latin dont le plus connu est le Canon d’Avicenne.
B) La tradition salernitaine et la diffusion du savoir médical en
occident
La diffusion de savoir arabe va permettre de construire la médecine
occidentale par l’intermédiaire de deux voies de transmission : la voie italienne et la
voie ibérique. Comme nous pouvons le voir sur la carte91 ci-après, le bassin
méditerranéen joue un rôle d’interface prépondérant entre les deux cultures et le
savoir. Grâce au lieu de traduction de l’Europe méridionale, les connaissances
médicales antiques et leurs apports arabes vont pouvoir être diffusés dans tout
l’occident.
L’Ecole de Salerne premier lieu de traduction et d’étude, a vraisemblablement
été fondée sur les vestiges d’un ancien monastère du IXème siècle, se situe en Italie à
Salerne. Ecole de médecine, en alternance religieuse et laïque92, elle s’impose
comme étant l’un des plus grands lieux de connaissance et de diffusion du savoir
médical occidental à la suite de l’impulsion donnée par Constantin l’Africain venu s’y
installer (en 1077) pour y produire de nombreuses traductions. La Schola Salerni a
un rayonnement sur l’ensemble des lieux d’études et de formations des praticiens
occidentaux. De nombreux manuscrits et ouvrages émanant de Salerne sont
retrouvés dans les bibliothèques européennes. Ce haut lieu de la médecine
occidentale a permis de faire le syncrétisme entre les connaissances arabe, antique
et juive et ainsi d’établir les bases de la médecine scolastique. Si l’Ecole de Salerne
est considérée comme étant la première école de médecine d’Europe, il semble que
90 Jacquart Danielle et Micheau Françoise, La médecine arabe et l’occident médiéval, éditions Maisonneuve et Larose, Paris, 1990 (p. 148) 91 Jacquard Danielle, Micheau François, La médecine arabe et l’Occident médiéval, éditions Maison-neuve et Larose, 1996, p. 97 92 Guitard Eugène-Humbert, « les origines de l’Ecole de Salerne, Adelberto Pazzini, sull’origine e, sulla didactica delle scuola medica di Salerno, in Pagine di Storia della Medicina, 1958 » in : Revue d’histoire de la pharmacie, année 1958, volum 46, n° 157, pp. 308-309
54
depuis toujours la ville portuaire qui l’abrite a accueilli et soigné des malades.
Salerne est située en Italie, au sud de la ville actuelle de Naples et à 150 kilomètres
du Mont -Cassin. Sa position géographique est propice aux échanges commerciaux
et intellectuels ; la tradition veut que son école de médecine ait été créée par quatre
médecins d’origine et de cultures différentes : un grec, un arabe, un juif et un
italien93. Dès le Xème siècle, des lieux d’études de la médecine se développent sur ce
territoire et progressivement il se crée une culture médicale spécifique, alliant les
connaissances des uns et des autres. Mais c’est grâce à l’apport de Constantin
l’Africain qui traduit en latin et commente des versions arabes d’ouvrages antiques
que les divers apports médicaux sont diffusés au monde chrétien. Les auteurs tels
qu’Albucassis (la Grande Chirurgie) ou Avicenne sont découverts (ou redécouverts).
Dans sa thèse, Guillaume Marien94 met en avant la Chirurgie de Roger de Parme
ouvrage rédigé en 1170 considérée comme étant la représentation du mariage réussi
entre l’ensemble de ces connaissances. Ainsi l’auteur a rédigé une œuvre en mariant
les connaissances antiques et arabes et son propre savoir pour réaliser un ouvrage
de chirurgie moderne et illustrée. L’Ecole de Salerne devient le point de départ de la
diffusion de la connaissance médicale à l’ensemble de l’occident chrétien au X-
XIIIème siècle. C’est le cas de la ville de Montpellier qui connait un développement
similaire au XIVème en s’appuyant sur les œuvres de l’Ecole de Salerne. Ainsi Arnaud
de Villeneuve traduira l’une de leurs œuvres majeures : Regimen sanitatis
salernitanum dans son écrit du même nom. Une autre production majeure de
Salerne qui traversera le temps est l’Antidotaire Nicolas qui est un formidable recueil
de médicaments, lequel sera édité, corrigé et enrichi jusqu’à la fin du Moyen-Age95.
L’université de Montpellier est considérée comme étant l’héritière de la tradition de
l’école de Salerne ; ainsi au XIIème siècle, sur huit médecins de renom de la ville, six
sont issus d’une formation à la Salerne (Gilles de Corbeil, Benevenutus Grassus,
93 Castiglioni Arturo, Histoire de la médecine, édition Payot, 1931 94 Marien Guillaume, De passionibus mulierum, attribué à Trotula : un regard médical sur un manuscrit de gynécologie médiévale de la faculté de Médecine de Montpellier, thèse d’exercice présentée et soutenue le 16 décembre 2005 pour l’obtention du grade de docteur en médecine, université de médecine de Montpellier, 2005 (p.26) 95 Marien Guillaume, De passionibus mulierum, attribué à Trotula : un regard médical sur un manuscrit de gynécologie médiévale de la faculté de Médecine de Montpellier, thèse d’exercice présentée et soutenue le 16 décembre 2005 pour l’obtention du grade de docteur en médecine, université de médecine de Montpellier, 2005
55
Bernardus Provincialis, Johannes de Sancto Paulo, Matthaeus Salomonis et
Ricardus Anglicus)96.
La péninsule Ibérique est un également un lieu de syncrétisme culturel propice à
l’émergence du savoir médical chrétien.
96 Bosc Jean-Louis, Les auteurs andalous dans les œuvre médicales montpellieraines au Moyen Âge, essai de mise en évidence d’une voie de transmission montpellieraine, thèse dirigée par Daniel Le Blevec et Christophe Picard, soutenue le 16 octobre 2010, Université Paul Valéry, Montpellier III
56
Pendant leurs études, les auteurs arabes et grecs doivent être connus et
étudiés par les étudiants des universités d’Europe, ce qui se confirme en voyant le
programme de la Licence à Montpellier en 1309. Nous notons que nous y retrouvons
bon nombre des auteurs cités en exemple par Bernard de Gordon dans ses
ouvrages97, et notamment dans l’ouvrage étudié. La médecine arabe a permis
d’apporter à la médecine médiévale occidentale une ouverture clinique et scientifique
dans l’approche et l’étude des maladies. « Si les auteurs arabes, par exemple
Avicenne (980-1000), acceptent comme une sorte de dogme médical la théorie des
quatre humeurs, ils la soumettent à une exégèse logique très stricte et distinguent
entre l’équilibre des humeurs et celui des qualités primaires »98
C) Montpellier, ville cosmopolite
1- Une ville au carrefour de la connaissance
Si on en croit Jean Astruc, au VIIIe siècle, Charles Martel (690-741)
poursuivant ses victoires contre les « sarrasins » détruisit de nombreuses villes de
Septimanie (Nîmes, Agde, Maguelone...), ce qui incita leurs habitants à se
délocaliser et à construire une ville nouvelle : Montpellier aux alentours de 738.
Montpellier va rapidement se développer99. Elle est au carrefour de l’Europe
méridionale, située dès sa construction à proximité des axes de communication (voie
domitienne et route du sel). La position géographique de la ville est propice à
l’instauration du commerce et du savoir : elle est une ville d’échanges entre
l’Espagne et l’Italie, puis plus tard une ville dans l’air d’influence de la cour pontificale
d’Avignon. Montpellier est devenue une interface stratégique du commerce entre le
97 Demaitre Luke E., Doctor Bernard de Gordon : professor and practitioner, éditions Pontifical Institue of Médieval Studies, 1980 98 Grmek Mirko D., Histoire de la pensée médicale en Occident, vol. 1 antiquité et Moyen-Âge, éditions Seuil, 1995 (p.222) 99 Astruc Jean, Mémoire pour servir à l’histoire de la faculté de médecine de Montpellier, éditions P-G Cavalier, 1767 (p.3)
57
bassin méditerranéen (grec, latin) et le monde arabe, ce qui favorise les échanges
interculturels100. Parmi les habitants, nous retrouvons non seulement des populations
chrétiennes mais aussi des juifs et des arabes, dont de nombreux médecins vont
activement participer à la création d’écoles de médecine dans la cité.
A l’époque de Bernard de Gordon, la cité de Montpellier appartenait au souverain de
la couronne d’Aragon101. En 1348, elle sera achetée par le roi de France, Philippe VI.
2- L’université de médecine
Dès le XIIe siècle, nous retrouvons de nombreuses écoles de droit, d’art et
surtout de médecine à Montpellier. Les premières furent, créées par des juifs et
certainement des arabes venus s’installer dans la ville. Ce sont eux qui vont
100 Alonso Guardo Alberto, Los pronosticos en la medicina medieval : el Tractus de crisis et de diebus creticis de Bernardo de Gordonio, collection Série Lingüistica y filologia, éditiones de Universidad de Valladolid (Espagne), 2003 (p.16) 101 Le Blévec Daniel, L’université de médecine de Montpellier et son rayonnement (XIIIe – Xve siècles), Actes du
colloque international de Montpellier (Université Paul-Valéry – Montpellier III), 17 – 19 mai 2001, éditions
Brepols, 2004 (p. 274)
58
permettre de fonder la glorieuse réputation de la Faculté de médecine de Montpellier.
(« Il faut même avouer que c’est à eux [les juifs] que la Faculté de Montpelier doit
une grande partie de la réputation qu’elle a eue dans son origine, parce qu’ils étaient
aux Xème , XIème et XIIème siècles, presque les seuls dépositaires de cette
science »102). De nombreux témoignages de contemporains attestent de la réputation
du corps de médecins de Montpellier. Pour exemple, une lettre de saint Bernard
(1090-1153) au Cardinal Hugues (Evêque d’Ostie) rapportant que l’archevêque de
Lyon, Heraclius de Montboissier est tombé malade lors de l’un de ses déplacements
à Saint-Gilles et qu’il s’est fait transporter à Montpellier pour y être soigné. « Cùma
infirmaretur, per transiit usque as Montem-pessularum ; ibi aliquandicù ? commoratus
cum medicis »103. Progressivement, l’Ecole de médecine acquiert un rayonnement
en occident.
102 Arnaldez R., Beaujeu J., Beaujouan G., Bloch R., Bourgey L., Dupont-Sommer P., Filliozat J., Furon R., Haudricourt A., Itard J., Labat R., Lefebvre G., Massignon L., Michel P-H., Needham J., Simon I, Stresser-Péan G., Taton R., Théodoridès R., Vercoutter J, Virolleaud Ch., La science antique et médiévale (des origines à 1450), éditions PUF, 1957 (p. 514) 103 Astruc Jean, Mémoire pour servir à l’histoire de la faculté de médecine de Montpellier, édition P-G Cavalier, 1767 (p.8)
59
Plaque rendant hommage aux bienfaiteurs de l’université, exposée dans le hall
d’entrée de l’université de médecine de Montpellier I
Montpellier se dote d’une université de médecine dès le début du XIIIe siècle
(une école de médecine est attestée en 1150). Le légat Conrad créa officiellement
cet enseignement en 1220, permettant l’unification des différentes écoles de
médecine déjà en place104. Donnant le monopole de l’enseignement et de l’exercice
de la médecine à l’université. « Cette Bulle du cardinal doit être regardée comme le
véritable établissement de la Faculté de Médecine de Montpellier. C’estoit au
paravant un grand corps à la vérité, et un corps fort ancien (…) mais c’estoit un corps
sans forme et sans ordre, et une Ecole sans règle et sans discipline. Elle commença
alors à prendre une forme réglée et à suivre des statuts établis par une autorité
104 Verger Jacques, Les universités au Moyen Âge, coll. Quadrige Manuels, PUF, 2007 ( p.42)
60
légitime105. ». La Bulle de Nicolas IV (26 octobre 1289) confirme la mise en place
d’une université à Montpellier en organisant, régularisant l’ensemble des
enseignements (Droit, Art et Médecine)106 ; les premières dissections apparaissent
au XIVe siècle107. La proximité avec la cour des Papes d’Avignon est comme le
démontre Daniel le Blevec un facteur favorisant l’installation et le développement
d’une médecine universitaire à Montpellier. La curie avignonnaise profitait de
l’expertise des médecins montpelliérains, qui en retour pouvaient fréquenter des lieux
et hommes de renoms leur permettant d’avoir un revenu substantiel et une clientèle
fidèle108. Le rayonnement intellectuel au Moyen Age de l’université de médecine de
Montpellier culmine au XIVme siècle, de par sa position géographique et grâce à ses
enseignants-médecins qui ont su en faire un atout majeur dans le développement de
la connaissance de leur art, et permettant ainsi à l’université de Montpellier de
s’imposer comme étant un centre de connaissance médicale moderne.
105 Astruc Jean, Mémoire pour servir à l’histoire de la faculté de médecine de Montpellier, édition P-G Cavalier, 1767 (p.18) 106 Dulieu Louis, La médecine à Montpellier, tome 1 le Moyen Age, éditions Les Presses Universelles, 1975 (p.35) 107 Verger Jacques, Les universités au Moyen Âge, coll. Quadrige Manuels, PUF, 2007 (p.58) 108 Bosc Jean-Louis, Les auteurs andalous dans les œuvre médicales montpellieraines au Moyen Âge, essai de mise en évidence d’une voie de transmission montpellieraine, thèse dirigée par Daniel Le Blevec et Christophe Picard, soutenue le 16 octobre 2010, Université Paul Valéry, Montpellier III
61
D’après cette carte de L. Dulieu109 la ville de Montpellier est un centre culturel qui
grâce à sa position géographie centralise les connaissances et les apports de tout le
bassin méditerranéen.
3- Ces maîtres en médecine
Des praticiens reconnus dans tout l’occident vont couvrir le siècle par leurs
nombreux écrits. Nous pouvons citer Arnaud de Villanova (1238 – 1213), Gérard de
Solo (1335 – 1371), Jean de Tournemir, Guy de Chauliac (1298 – 1368) ou encore
Henri de Mondeville (1260 – 1320). Ce sont les ouvrages de ces médecins et la
diffusion de leurs nombreuses compositions et traductions qui ont donné la
splendeur scientifique à l’école de médecine de Montpellier110. Bernard de Gordon
fait indéniablement partie des grands médecins montpelliérains par ses écrits, mais
nous ne retrouvons pas de document officiel concernant des représentations ou
actions dans la vie publique de la cité ou de l’université
Ces auteurs sont étudiés, lus et critiqués dans toutes les universités de médecine
d’Europe. Leur apport à la recherche a permis d’inscrire dans le temps la réputation
de l’université de médecine de Montpellier.
109 Extraite de : Dulieu Louis, La médecine à Montpellier, Tome 1 : le Moyen Age, éditions Les presses universelles, 1975 (p. 25) 110 Paniagua Juan A., Studia Arnaldiane, Trabajos en torno a la obra médica de Arnaud de Vilanova, c.1240-1311, Fundation Uriach 1838, Barcelona, 1994 (livre VI, p.65)
62
Plaque, rendant hommage aux médecins montpelliérains, exposée dans le hall
d’entrée de l’université de médecine de Montpellier I
II) Influence et pratique médicale à travers l’ouvrage
A) Les influences de maître Bernard de Gordon
Dans l’ouvrage Fleur de Lys en medecine de Bernard de Gordon, nous
pouvons voir dès les premières pages que le maître, en savant, fait référence dès les
premières lignes à Socrate pour introduire son écrit. Par la suite, il ne se restreint pas
à citer les auteurs antiques, mais base sa réflexion sur la pensée médicale antique.
Luke Demaitre, a réalisé une étude complète des références utilisées par l’auteur
dans l’ensemble de ses écrits. (Cf. annexe 1)
63
Nous reprenons l’étude de cet historien pour compléter notre démonstration.
Pourcentages
Références
Ensemble des œuvres Lilium medicine
Grec 64,8 % 65,2 %
Judéo-Arabe et école de
Salerne
33,7 % 33 %
Contemporain 1,4 % 1 %
Ce tableau récapitulatif, montre explicitement l’importance apportée par l’auteur aux
écrits grecs notamment.
Parmi les auteurs les plus cités (dans l'ensemble des œuvres de Bernard de
Gordon) nous retrouvons en premier lieu Galien, puis Avicenne et Hippocrate. Il le
précise lui-même dès le premier chapitre de Fleur de Lys en médecine. « En ce livre
la, par la grace de Dieu, nous avons mis et assemblé les dits de Avicenne, de G111 et
de Ypocras » [folio 1 V]
Sources
références
Ensemble des œuvres Lilium medicine
Galien 600 226
Avicenne 297 130
Hippocrate 80 140
111 G = Galien
64
Bernard de Gordon informe le lecteur du Lilium medicine que son ouvrage est inspiré
d’Avicenne, Galien et Hypocrate (Hippocrate) (« car en ce livre la, par la grace de
Dieu, nous avons mis et assemblé les dits de Avicene, de G et de Ypocras et des
aultres » [folio 2 R]). Il décrit Gallien comme un grand médecin « Gallien prince des
médecins » [folio 2V].
Il est à noter que les références à ses contemporains sont très faibles (moins de 2%
sur l’ensemble de ces écrits).
B) Observation, examen et pronostication
Dans son introduction Bernard de Gordon précise vouloir que son ouvrage
Lilum medicine, soit un texte complet, clair et méthodique, traitant de toutes les
maladies « universelles » [folio 1 R]. Ainsi il traite en sept livre 163 chapitres. Les
maladies y sont définies et décrites. Le médecin montpelliérain s’attache à donner
des notions temporelles dans ses descriptions afin qu’elles soient le plus précises
possible et en adéquation avec les enseignements de ses paires plus anciens.
Le médecin use de ses cinq sens, (voir même d’un sixième : l’entendement d’après
Hippocrate). Il interroge le malade et cherche à définir les circonstances de
l’apparition des maux, puis il mobilise toutes ses capacités pour établir son
pronostique.
Odorat Apprécier les urines,
l’excreta, plaies et haleine
du patient et sa peau.
« espelle livide et puant »
[f.9R]
Vu Examiner l’environnement,
son aspect général, son
faciès, ses yeux son teint.
«« les yeulx sont
concaves et enfossez »
« la face est rubiconde »
[f.2V]
Goût Qualifié la sueur. « Aulcune fois est amere
ey signifie cole, se elle est
65
salée elle signifie fleum
salse » [f.17V]
L’ouïe Recueillir les plaintes du
malade, ausculter.
« La cure de la pierre est
triple. L’une est
preferuative, l’autre
mitiative de douleur et
l’autre vraye douleur. La
mitigative de douleur cest
se on ne peut picer et que
on aye gran douleur au
penil et es lieux
prochains » [f. 174R]
Toucher Prendre le pouls et on le
qualifie, on touche la
peau.
« la chaleur n’est pas
pongitive ne mordicative
au taster » [f.2R]
(D’après l’ouvrage de Moulinier-Brogi Laurence112 et complété avec les apports de
l’ouvrage Fleur de lys en médecine de Bernard de Gordon)
Le praticien réalise des observations spécifiques et systématiques telles que
la prise du pouls. Dans son ouvrage sur la médecine médiévale, Laurence Moulinier-
Brogie nous précise que la prise du pouls permet d’apprécier le rôle de la chaleur
dans le corps en fonction de ses caractéristiques. « Se on taste la face le cuir et le
pouls » [Folio 2V]
112 Moulinier-Brogi Laurence, l’uroscopie au Moyen Âge « lire dans un verre la nature de l’homme », éditions Honoré Champion, Paris 2012
66
Température Chaud/ froid, sueurs/sec
Urine Hématurie, urine colorée
Couleur de la peau et des
téguments
Ictère, langue noire et sèche, rougeur de la
face, courbures des ongles, aisselles livides
Douleurs Douleur au front, douleur et tourment de tout
le corps, douleur de la bouche
Spasmes abdominaux Flux de ventre
Elimination Rétention de selles
Pouls et vascularisation Faible, mal perçu, petit pouls, trouble du
rythme, réplétion des vaisseaux, pouls occulte
et rapide
Inflammation, œdème Inflammation des épaules, Œdème des
jambes, face enflée
Trouble psychiatrique Perturbation des esprits, frénésie
Sémiologie des fièvres d’après Bernard de Gordon
L’observation des urines est un des actes phares de l’examen paraclinique du
médecin au Moyen Âge. Grâce à cette sécrétion naturelle du corps, il peut identifier
de nombreuses dyscrasies qui déséquilibrent la santé de l’homme. Cette observation
est issue de la tradition hippocratique : « Il arrive aussi que les matières excrétées
par la vessie donnent plus de lumières sur les maladies que les matières excrétées
par les chairs »113, qui perdure au Moyen Âge. Il est évident que Bernard de Gordon
y accorde une grande importance puisqu’il écrira un traité traitant de cette pratique :
De urinis. Inspiré par l’Ars medica de Galien, il montre que les urines sont chargées
de superfluités qui composent le contenta. Par l’analyse de ces éléments, le médecin
voit la santé du corps du patient114. Nous en avons un exemple dans l’argumentaire
sur les signes de la lèpre au chapitre XXI du livre I. « L’orine se trait a couleur
113 Hippocrate, De l’art, XII, p.37 114 Moulinier-Brogi Laurence, l’uroscopie au Moyen Âge « lire dans un verre la nature de l’homme », éditions Honoré Champion, Paris 2012, (p. 57)
67
citrine et atenuite aulcune fois il a impetigine et serpigine et se multiplie tost. Et se
c’est de fleume la couleur est blanche et se trait a noirsure, il a la face sur enfleure et
les extremités avec ques aulcunes resolucions et furfures et scames blanches.
L’orine est blanche et se trait aspicitude avec aucune globosité saigneuze. Et se
c’estoit de melancolie la face se trait a noirsure trouble. Et se l’air est trop chault ou il
se esmeut ou il se courousse la couleur sera rouge, trouble, tournant a noirsure. Et
se l’air est froit, la couleur est livide et se trait a noirsure il a plusieurs neux entour le
corps. Les meurs sont melancoliques, il a stupeur et insensibilité, l’orine est tenue et
remisse. » [Folio 36R] Dans cet extrait, l’auteur nous décrit ce que le praticien doit
chercher dans l’observation des urines pour établir un diagnostic de lèpre.
La pronostication est un acte essentiel dévolu au praticien pour soigner son
patient. Dans le texte étudié, l’auteur réserve dans chacun de ses chapitres un
paragraphe au pronostic qu’il peut établir. Le pronostic est le résultat de plusieurs
éléments que le médecin analyse. Il mêle connaissances théoriques sur la maladie,
anamnèse et environnement du patient et les observations cliniques et paracliniques
qu’il a pu faire ainsi que les symptômes que le patient présente. Le pronostic jette
« un pont entre le passé, même récent, du patient, et son futur plus ou moins proche.
Le symptôme érigé en signe apparaît donc comme une singulière trace historique
douée de capacité prophétique »115. Le pronostic d’une maladie fait donc appel à la
connaissance et à l’observation que peut faire le médecin. Cependant, dans son
exercice et ses propos le médecin reste influencé par la religion et ses dires peuvent
s’apparenter à des prophéties116. « Il faut que le médecin soit tel un prophète, afin
qu’il puisse juger non seulement du présent mais aussi du passé et du futur117 ». Le
soignant ne doit pas uniquement se baser sur des signes cliniques physiques, il doit
prendre en compte la vertu du malade pour appliquer le traitement adéquat. Il met
en lien ses observations avec ses connaissances théoriques. Ainsi, la vertu est plus
importante que la maladie. « La maladie commandast a faire evacuation, et la vertu
115 Id. (p.30) 116 Moulinier-Brogi, L’uroscopie au Moyen-Âge « lire dans un verre la nature de l’homme », éditions Honoré Champion, Paris, 2012, (p.33) 117 Folieto (de) Hugo, De medecina animae, PL 176, coll. 1195-1196
68
commandast le contraire, en ce cas on doibt plus croire a la vertu que a la maladie »
[folio 10 R]
C) Le temps et les maladies
L’auteur identifie quatre temps pour les maladies : « commencement,
accroissement, estat et declination. » [Folio 1 V] Il suit cette logique pour décrire les
maladies dans son ouvrage.
Les maladies sont inscrites dans un schéma temporel défini par Galien (qui
suit la théorie hippocratique) comme étant le mois médical. Mais les calculs
divergent avec les connaissances des astronomes. Les médecins médiévaux vont
définir d’autre façon de calculer ce temps par rapport aux astres et aux mois lunaires.
Mais il correspondra toujours entre 26 et 27 jours. Le mois étant décliné en semaines
médicales puis en jours (mais pas de 24h). Danielle Jacquart a identifié le schéma de
calcul du temps médical par Bernard de Gordon118 :
1er semaine du 1er au 7e jour (1 semaine médicale + 6h de la semaine 2)
118 Jacquart Danielle, « Le temps médica »l, in Bibliothèque de l’Ecole des Chartes, Tom 157, janvier-juin 1999, éditions Droz, 1999. (p.165)
69
2e semaine du 8e au 14e jour (6 jours et 11 heures)
3e semaine du 14e jour au 20e jour (6 jours et 13 heures)
4e semaine du 21e jour au 27e (4 heures ½ de la semaine 3 plus 6 jours).
Il est important de pouvoir avoir une approche temporelle dans l’étude des
maladies pour pouvoir donner une description précise des temps d’apparition des
symptômes et des états de crisis. Le médecin doit pouvoir définir les accès de crises
(crisis) que le malade va traverser. Période critique définie comme étant l’état le plus
fort de la maladie, où le patient peut passer de la vie à la mort119. Bernard de Gordon
compare dans son liber pronosticorum, la crise à « un jugement criminel où se
trouvent quatre catégories de personnes : le coupable, le plaideur (actor), le juge et
les témoins. Dans la crise, interviennent la nature (actor), le coupable qu’est la
maladie et le médecin qui juge en fonction des témoignages apportés par les
accidents ou symptômes120 ». La crise est un état sur un temps plus ou moins long
de la maladie, ce qui veut dire que la fin de la crise ne correspond pas forcément à la
fin du mal.
119 Jacquart Danielle, Le temps médical, Bibliothèque de l’Ecole des Chartes, Tom 157, janvier-juin 1999, éditions Droz, 1999. (p.158) 120 Id. (p159)
70
Principium circuitis (paroxysme) : douleurs, vertiges, tremblements.
Principium rei : commence l’évacuation de la matière121, par la sueur ou par d’autres
voies.
Consumptio : adoucissement des symptômes, fin de la crise
Dans son exercice et ses propos, le medecin reste influencé par la religion et ses
mots peuvent s’appaenter à des prophéties122.
L’ouvrage présenté est un ouvrage complet sur la médecine au XIVme siècle. Les
sept livres traitent chacun d’une thématique précise.
Premier livre Fièvres, vairolles, vers,
morsure de serpens, arsure,
maladie des ongles et
macules
Fièvres, infections,
parasites, morsures
de serpent, douleur,
maladie de phanères,
brûlures, maladies
dermatologique
Deuxième livre le second livre qui traitcte
de toutes maladies du
cervel jusques a la maladie
des yeulx
neurologie
Troisième livre le tiers livre qui parle de la
maladie des yeulx
Ophtalmologie et
ORL123
Quatrième livre le quart livre qui parle des
membres spirituels et de
leurs passions
Pneumologie et
cardiologie
Cinquième livre le V livre qui parle des
passions des membres
Gastro-entérologie
121 Le matière : terme générique qui correspond au mal au sens figuré. 122 Moulinier-Brogi, L’uroscopie au Moyen-Age, « lire dans un verre la nature de l’homme », éditions Honoré Champion, Paris, 2012 (p. 33) 123 ORL : Oto-Rhino-Laryngologie
71
nutritifs
Sixième livre VI livre qui parle des
passions du foye, des reins,
et de la vecie
Hépatologie, uro-
néphrologie
Septième livre le VII livre qui parle des
passions des membres
generatifs, de l’omme et de
la femme
Sexualité, antidotes
D) Fièvre, peste et lèpre : approche de la maladie
1- Les fièvres
Les premiers chapitres de l’ouvrage traitent des fièvres, car l’auteur spécifie
« fievre est plus griesve maladie de toutes » [folio 1 V]. Dix chapitres sont consacrés
uniquement à ces maladies (qui sont en fait qu’un symptôme d’une même maladie)
La fièvre est une augmentation de la température du corps qui peut être due (la
plupart du temps) à une infection (mécanisme de défense du corps) ou à une atteinte
centrale neurologique (trouble de la thermorégulation). La fièvre est accompagnée
de signes cliniques (tachycardie, sueurs, frissons). Bernard de Gordon précise que
toutes les fièvres sont « chauldes » [folio 1 V] mais il fait dès sa présentation de la
maladie la différence entre une fièvre que l’on peut appeler pathologique (« chaleur
non naturelle » [folio 1 V) et la chaleur corporelle normale (« chaleur naturelle » [folio
1 V]) qui varie en fonction de l’activité (« aultre chaleur qui vient ou par yre ou par
labeur ne fait pas fievre » [folio 1 V]). Contrairement à la pratique médicale actuelle
où la fièvre est considérée comme étant un symptôme d’une maladie, nous voyons
que pour l’auteur ce sont des maladies à part entière.
72
Les causes de fièvres sont multiples et mixtes : d’une part, elles peuvent être
d’origine organique (par exemple éruption cutanée,…), d’origine externe (fatigue,
chaleur environnementale…) ou dues à l’esprit (passion de l’esprit). Mais dès que le
corps est touché par un déséquilibre c’est l’ensemble qui est déréglé (le corps et
l’esprit).
La fièvre est décrite comme pouvant être positive ou négative. En premier lieu,
lorsqu’elle est naturelle elle permet d’assurer l’équilibre du corps, des humeurs et de
digérer la matière. Mais au contraire, elle peut être source de maladie et de mort si
elle devient non naturelle et corrompt le corps et l’esprit.
Dix types de fièvres différentes sont définis. Il consacre un chapitre à chacune (En
annexe synthèse des différentes fièvres identifiées et traitées).
2- La peste
Au milieu du XIVme siècle, la peste a décimé en partie l’Afrique, l’Asie, et
l’Occident. Elle fut suivie de nombreuses récurrences et la dernière toucha Marseille
en 17720. Celle du Haut Moyen Age (du V me au VII me siècle) sont très peu
documentées, tant dans les textes médicaux qu’historique124.
- L’agent pathogène :
Le germe de la peste (Yersina Pestis) a été découvert en 1884 par Alexandre
Yersin (1863 – 1943). C’est un coccobacille ovoïde, à gram négatif, aérobie qui
appartient à la famille des entérobactéries. Il se multiplie entre 4° et 42° (lorsqu’il fait
froid ou en hiver, la puce va vivre au ralenti et rester contagieuse). C’est une
explication de l’apparition des épidémies au printemps. Il existe encore aujourd’hui
trois variétés de Yersina, dont la variété médievalis qui est aujourd’hui retrouvée
124 Le Goffe Jacques, Biraben Jean-Nöel, « La peste dans le Haut Moyen Age », in Annales. Economies, Sociétés, Civilisation. 24me année, N.6, 1969 (p.1448-1510)
73
autour de la Caspienne (et probablement en Sibérie). Cette souche est probablement
très proche (ou similaire) de la variété qui a décimé l’Occident au Moyen-Age125.
- La transmission :
Le mode de transmission de la maladie est connu depuis la fin du XIXe siècle. C’est
en 1898 que Paul-Louis Simond (1858 – 1947) démontre le rôle de la puce et du
rat126. La puce (Xenopsylla Cheopis), hôte du rat s’infecte du sang d’un rongeur
contaminé et peut transmettre l’agent pathogène à l’homme, tout comme une puce
qui vit sur un homme infecté peut en contaminer un autre si elle change d’individu.
La contamination peut être interhumaine (par une contamination "air"
(expectorations…))
- Les signes de la peste127 :
Au-delà des signes généraux d’infection (hyperthermie, frissons, asthénie), nous
pouvons retrouver trois aspects plus spécifiques de la maladie :
- La peste bubonique : se manifeste suite à une pénétration cutanée du
germe. Après une incubation de 1 à 6 jours, naît brutalement une forte
poussée de fièvre. Au point d’inoculation apparait une pustule qui se
nécrose donnant une plaque de gangrène appelée charbon pesteux
("anthrax"). Se développe parallèlement au 3ème jour une adénopathie
généralisée (axillaire, cervicale, inguinale) douloureuse et volumineuse
pouvant suppurer, appelée le bubon (ou "apostème"). Les complications
de cette affection peuvent entraîner une septicémie avec purpura, des
125 Corrion Yves, Les épidémies de peste en Franche-Comté au XVIIème siècle, Thèse pour l’obtention du Diplôme d’Etat de Docteur en médecine, sous la direction de M.Volmat, Université de Franche-Comté, 1980 (p.37) 126 Parreau Sandrine, Les épidémies de peste en Franche-Comté du XIVème au XVII ème siècle, Thèse pour l’obtention du Diplôme d’Etat de Docteur en médecine, sous la direction de P. Mercet, Université de Franche-Comté, juin 2008 (p.78) 127 Grisey Francine, La peste en Franche-Comté du XIVème au XVIIème siècle : traitement et prévention, Thèse pour l’obtention du Diplôme d’Etat de Docteur en Pharmacie, sous la direction de P.Laurent, Université de Franche-Comté, mars 2000 (p.21-22) et Corrion Yves, Les épidémies de peste en Franche-Comté au XVIIème siècle, Thèse pour l’obtention du Diplôme d’Etat de Docteur en médecine, sous la direction de M.Volmat, Université de Franche-Comté, 1980 (p.37-41)
74
coagulopathies (hémorragies multiples), des atteintes neurologiques
périphériques et centrales (délires, perte de conscience)
- La peste pulmonaire, est une transmission interhumaine (crachats…)
évoluant vers le tableau d’une pneumonie aigüe avec une toux produisant
des spumes sanguinolents.
- La peste septicémique, est une forme rapidement très virulente, entraînant
une bactériémie évoluant vers un état de choc (Pestis Siderans)
Il existe cependant une forme bénigne de la peste où la guérison est spontanée en 3
à 4 semaines.
- La peste selon Bernard de Gordon :
Il consacre un chapitre dans son premier livre, à la fièvre pestilenciale qui est une
fièvre qui se développe en temps d’épidémie (« quand les blez et lait et les eaues
sont corrumpues » [folio 16 V]). Il décrit l’épidémie comme un état de stupeur, le
monde en est bouleversé, les astres, le climat, le monde animal. «Le signe de
pestilence qui doit avenir, c’est quant appret l’estoille comette comme chandelle
ronde quant maintenant est chaleur maintenant froideur et ung jour ou en divers
jours et que lait est obscur et espes et semble qu’il pleuve et ne pleut point et que
este est chault et moiste et les oyseaul laissent leur nids et leurs œufs sur terre et
plusieurs bestes reptiles apparent ce sont signes de impedimie qui doit advenir »
[folio 17 V]. L’allusion au lait épais et obscure montre l’inquiétude des hommes du
début du XIVe siècle face à une épidémie de peste. Le lait représente la pureté,
l’abondance, la douceur et un mets divin128. Il évoque également à plusieurs reprises
l’astrologie (planètes et étoiles) pour définir l’épidémie. L’arrivée d’un temps « de
pestilence » semble être ressenti comme une véritable malédiction.
L’appellation peste n’est jamais clairement indiquée, l’auteur parle de « temps
de pestilence », « signe de pestilence ». Cependant, nous pouvons affirmer qu’il
parle d’épidémie de peste en prenant d’une part en compte le contexte apocalyptique
128 Cazenave Michel, Encyclopédie des symboles, éditions Le livre de Poche, 1996 (p.350)
75
qu’il décrit et les signes cliniques des patients : sécheresse de la langue, douleur,
puanteur du corps (« si comme l’aleyne, l’egestion, la sueur et l’orine » [folio 16 V]). Il
indique cependant que ces signes peuvent être confondus avec d’autres maladies en
phase aigüe ayant une présentation similaire (« veirolles, morbille et maladie
venimeuses »).
Pour soigner le malade victime de la peste, il propose des sirops et électuaires. La
saignée peut être indiquée. De plus il préconise de ne pas faire d’excès alimentaire.
L’écrit sur la peste se situe 40 ans avant l’épidémie de peste qui va ravager le monde
(1348). Les connaissances qu’il a sur la maladie sont probablement héritées des
connaissances et croyances de la grande épidémie qui a ravagé le haut Moyen Age.
Un écrit datant de 1551 intitulé De la manière de preserver de la Pestilence, et d’en
guerir, selon les bons autheurs, reprend de façon presque identique la présentation
du texte de Bernard de Gordon sur ce sujet sans le citer. Il est difficile d’analyser
cette découverte qui est étonnante. Le texte de Bernard de Gordon a-t-il été plagié ?
Y’a-t-il eu un rajout dans l’ouvrage Fleur de Lys postérieur à son écriture ? Il est
difficile d’apporter une réponse à ces questions. (Cf. annexe)
3- La lèpre
La lèpre est une affection qui est contagieuse et se diffuse dans l’ensemble de
l’Occident. C’est une maladie qui connait une brusque expansion dès le début du XII
me siècle. On compte au début du XIV me siècle 600 000 lépreux en Europe (Russie
comprise) sur une population totale de 75 à 80 millions129.
- L’agent pathogène130 :
Découverte en 1873 par Gerhard Armaueur Hansen, la lèpre est un parasite
intracellulaire de grande affinité pour les tissus cutanés et nerveux de l’homme. Le
129 Grmek Mirko D., Histoire de la pensée médicale en Occident, vol. 1 antiquité et Moyen-Âge, éditions Seuil, 1995 (p.307) 130 D’après : N’Bouela Marie-Claire, La lèpre, thèse pour l’obtention du diplôme d’Etat de Docteur en Pharmacie, sous la direction de J. Panouse, Université de Franche-Comté, novembre 1986
76
bacille (Bacille de Hansen) est classé dans la famille des mycobactéries
(Mycobacterium leprae).
- Transmission :
La transmission de la maladie se fait par contact ou par aérosolisation. En effet, tant
les ulcérations de peau que les sécrétions (ou flux) sont porteuses de la
mycobactérie. La proximité est l’une des causes principales de contamination.
Maladie d’évolution longue, on distingue trois périodes distinctes :
. Le temps d’incubation : période (de 2 à 5 ans) entre le moment de la pénétration du
bacille et les premiers signes cliniques.
. La période d’invasion : apparition mixte ou non des signes cutanés et ou
neurologiques en fonction du type de lèpre
. La période d’état : le malade présente les signes généraux de l’invasion de la
maladie.
- Les signes de la maladie :
On distingue aujourd’hui trois types de lèpre :
. La lèpre lépromateuse (léonine) : forme contagieuse de la maladie. Atteinte cutanée
générale prédominante sur le visage de type papule avec l’apparition de lépromes
(nodules).
. La lèpre tuberculoïde : forme non contagieuse de la maladie. Le patient présente
une dépigmentation de la peau et des ulcérations. Des troubles neuro-sensitifs
apparaissent progressivement.
. La lèpre borderline : forme mixte de la maladie.
- Présentation de la lèpre dans l’ouvrage de Bernard de Gordon :
Il consacre un chapitre entier du 1er livre de son ouvrage à la lèpre. C’est une
maladie complète qui se diffuse à tout le corps. (« On peut dire que cest maladie de
tout, car finallement elle corrumpt tout » [folio 40 R])
77
La description clinique établie est similaire aux descriptions que nous connaissons
aujourd’hui. Elle engendre sclérose (« sclirosim et duresse »), ulcération
(« herpestiomene »), verrues et nodules de la peau (« verruques et neux »). La
maladie touche le corps et la figure (« La lepre c’est maladie (…) corrumpant la
forme et la figure et la composicion des membres » [folio 34 V]), chute des sourcils
(« depilacion des surcils »), nez élargi (« nazilles elargians »), dépigmentation de la
peau (« la couleur de la face est livide et clere »), pustules (« pustulles »), infections
de la peau (« infections du cuir »).
Il identifie quatre causes de contamination :
- L’alimentation
- L’air corrompu
- La proximité avec un lépreux
- Relation intime particulière
Bernard de Gordon met en relation la lèpre et la relation intime entre les hommes et
les femmes (Cf. annexe : Lévitique chap.15). Dans le paragraphe qu’il dédie aux
causes de la maladie [folio 35 R], il insiste à plusieurs reprises sur ces affirmations.
- Enfant engendré en temps de menstruation
- Enfant engendré par un lépreux
- Lépreux qui dort avec une femme enceinte
- Homme qui a un rapport sexuel avec une femme qui a encore de la
semence d’un lépreux dans sa matrice
- Homme qui dort avec une femme lépreuse
La matrice représente la mère et la conception mais aussi le péché de chair, la
naissance et la renaissance spirituelle131. Elle représente la pureté pouvant être
contaminée par l’acte sexuel. Si la matrice est souillée par une semence de ladre, il
préconise de la faire sortir par divers moyens (en sautant, en éternuant, en la
131 Cazenave Michel, Encyclopédie des symboles, éditions Le livre de Poche, 1996 (p. 403)
78
baignant, en la lavant). L’association de l’amour à la lèpre et la mort est courante au
Moyen Age. Nous retrouvons cette analogie dans le roman de Béroul, Tristan et
Iseut. La lèpre est vécue comme une faute. « Dans l’Epître aux Ephésiens, Saint
Paul oppose fortement la lèpre (chair) et la virginité (l’esprit) 132». Dans les congés133
de Jean Bodel et Baude Fastoul, avoir contracté la lèpre est une honte134 :
Hontes, ki m’est montee u front (Jean Bodel, v 71, 216)
Fait a savoir tous ceux ki sont
Que des wages sui de Lienart (Baude Fastoul, v 454 -456)
("je fais pénitence pour autrui.")
L’éviction hors du peuple fait partie des mesures prophylactiques de cette maladie.
La désignation des ladres devant quitter la communauté est confiée entre autres au
médecin. Il fera une distinction entre les malades en fonction de l’évolution de la
maladie. (« Et en aulcuns lieux appart scabie et pustulles et morphée et par tout le
corps commence disposicion prudente, toutefois se sa fourme et sa figure ne se
corrumpt on ne le doit pas separer du peuple, mais on doit bien le menacier » [folio
35 V]), mais si le malade présente un état avancé, il sera séparé du peuple.
Concernant les remèdes, il propose des pilules, des décoctions, la saignée, ou
encore un remède à base de serpent. Il rédige un paragraphe complet sur les
modalités de choix et de préparation du serpent. C’est un animal qui mue et qui a la
peau qui change et se modifie (comme le lépreux). Prendre ce remède peut faire
partie du principe de la médecine des semblables. Symboliquement le serpent
représente d’une part la vie (Serpent d’airain) soit le péché (péché originel). Il est
également le synonyme de la renaissance (mue qui représente une nouvelle peau).
La vision de la lèpre lépromateuse comme étant une mue similaire à celle des
132 Gérard Michèle, Quand la lèpre fleurit, « Littérature », N°102, Echos et traces, 1996 (p14-28) 133 Jean Bodel et Baud Fastoul sont deux poètes qui ont été frappé par la lèpre. Au moment de quitter la société ils ont écrit leurs congés afin de faire leurs adieux. 134 Gérard Michèle, Quand la lèpre fleurit, « Littérature », N°102, Echos et traces, 1996 (p14-28)
79
animaux est retrouvée dans d’autres textes médiévaux. Baude Fastoul dans ses
congés pronera135 (v. 574, 576) :
Car Dix m’aprent a carier
Les travers pour esbanier136
Et si me fait muier ramage.
La mue est une valeur positive qui permet à l’animal de faire « peau neuve » et de
s’ouvrir à un autre monde.
135 Id. 136 « Car Dieu m’apprend à aller par les chemins de travers pour me divertir »
81
PARTIE III : SOIGNER LE CORPS AU
MOYEN-AGE
Médecin et plantes médicinales
Avicenne, Canon de la médecine, XIIIème siècle, Besançon BM, ms.0457
« Cliché IRHT »
82
I) Pharmacie et médicaments
A) Historiographie médiévale de la pharmacie et des médicaments
L’histoire de la pharmacie et des médicaments s’est construite à travers
l’étude des antidotaires, herbiers et manuscrits traitant de pharmacologie. Quelques
ouvrages fondamentaux semblent se détacher de l’ensemble des sources
disponibles. L’Antidotaire de Nicolas, est connu par tous les pharmaciens, bien que
son origine soit confuse et qu’il y ait eu certainement plusieurs productions de divers
auteurs ayant cette appellation. Ernest Wickersheimer démontre qu’il faut distinguer
un antidotaire de Nicolaus Salernitanus ( XIIème siècle) et un autre Nicolas, Nicolus
Prepositi médecin de la fin du XVème siècle. Cependant malgré le flou concernant
l’origine de cet antidotaire, nous savons qu’un ouvrage dénommé Antidotarius Nicolai
Alexandrini s’est imposé comme étant la référence pharmaceutique du Moyen Age.
Il devient le livre officiel d’enseignement de la Faculté de médecine de Paris (1270)
et tout apothicaire se voit dans l’obligation de le posséder dans son échoppe.
Un deuxième livre d’importance au moyen âge est un grand livre de
prescription : l’Antidotarius magnus de Salerne. Il faut également citer le Grabadin
(ou Antidotarium de Mesué, daté du Xème siècle). Cet ouvrage est une compilation
des compositions inventées par les Alexandrins, les Byzantins et les Arabes.
Les antidotaires sont indispensables aux médecins, car avant le développement la
profession d’apothicaire ce sont les médecins qui préparent eux-mêmes leurs
compositions médicinales137. Dans chaque ouvrage, les recettes sont explicitées,
précisant les différents éléments composant la préparation et les poids et mesures
de chaque ingrédient.
Concernant les herbiers, le Liber de simplici medicina (ou « Circa instans ») est un
traité sur les simples et leur utilisation par un médecin de Salerne, Platearius. Les
ouvrages que nous venons de citer permettent de donner des indications
137 Ausécache Mireille, « Manuscrits d’antidotaires médiévaux : quelques exemples du fonds latin de la Bibliothèque nationale de France », in Médiévales [en ligne] printemps 2007, mis en ligne le 06 septembre 2009.
83
homogènes dans la fabrication et la composition des médicaments et sur leurs
indications.
L’ouvrage étudié n’est ni un antidotaire, ni un herbier mais les practices des maîtres
donnent les bases des compositions médicinales en permettant d’y inclure des
observations et des modifications personnelles aux différentes préparations.
B) Le médicament au Moyen-Âge
D’après Hippocrate « Le remède est tout ce qui modifie l’état présent ». La
pharmacologie scientifique s’est construite sur la théorie des humeurs. Ainsi il revient
à dire que le principe naissant d’un remède est de « combattre le mal par son
contraire », mais sans se restreindre aux propriétés élémentaires. Ainsi nous
retrouvons tout un champ lexical spécifique qualifiant les médicaments : astringent,
évacuateur, diurétique, purgatif, humectant, rafraîchissant, émollient, narcotique,
vomitif…Partagée entre allopathie et homéopathie la pharmacologie médiévale du
XIVème siècle enrichie des connaissances antiques et arabes, s’étoffe sur les
connaissances développées auparavant (comme d’après les propos d’Hildegarde de
Bingen par exemple) sur l’art et la pratique médicale mais aussi sur l’observation et
la transcription des connaissances populaires des paysans ou des guérisseurs. Les
médicaments sont composés de plantes, de métaux, d’animaux auxquels peuvent
être rajoutés des excipients. Ceux-ci permettent d’assurer la conservation du
médicament, de lui donner un gout appétant (addition de sucre) ou de favoriser une
propriété salvatrice par rapport à un effet toxique.
84
Catégorie de
médicament
Propriétés Indications Remèdes
Maturatifs ou
suppuratifs
Provoquent la
formation de
collection de pue
Doivent apporter
une chaleur
supérieure à celle
du malade
Farine de froment, eau
chaude, poix, résine,
corps gras
Emollients ou
rémollitifs
Résolvent et
dissolvent pour
favoriser
l’élimination
Ils sont destinés
au traitement des
apostèmes
d’origine
lymphatique
Induratifs Durcissent les
tissus
Durcissement par
« congélation »
Pourpier, morelle,
pysllium, lentille d’eau
Agglutinants et
opilatifs
Bouchent les
pores internes
comme cutanés
L’imperméabilité
qu’ils créent au
niveau des tissus
ou du revêtement
cutané freine ou
inhibe les flux
humoraux.
Deux catégories :
- Médicaments
terreux :
amidon, tuthie et
le bol d’Arménie
- Médicaments
visqueux : les
graisses, le lait
caillé et le blanc
d’œuf
Mondicatifs Purifient Agissant tant au
niveau externe
que sur les
organes. Inhibe
les flux humoraux
Miel, lupin, farine de
fèves, câpres, scille et
scolopendre
Résolutifs et
raréfiant
Purifient Inhibe les flux
humoraux en
ayant la capacité
de diviser les
humeurs épaisses
Camomille, mauve,
huile de concombre
85
pour favoriser leur
élimination
épaississant Restreignent le
diamètre des
vaisseaux et des
pores
Effets réfrigérants.
Capacité à
refroidir.
Joubarbe, psyllium,
pourpier
Apéritifs Dilatent les
vaisseaux
Propriété chaude,
ils dilatent les
vaisseaux et
facilitent la
circulation des
humeurs, voire
leur évacuation
pain de pourceau, bile
de bœuf
Restrictifs ou
resserrant
Favorisent la
vasoconstriction
Ils sont employés
en cas
d’hémorragie ou
de diarrhées
Noix de galle, sumac,
myrte, rose
Adustifs ou
escarotiques
Provoquent la
destruction et la
liquéfaction des
tissus
Degré élevé de
chaleur
Chaux, cendre
alcaline, acides forts
Putréfactifs Provoquent la
destruction des
tissus
Moins chauds que
les précédents,
leur effet est lié à
une forte humidité
et aux propriétés
corruptrices de
l’eau.
Orpiment, aconit,
gomme de rue
sauvage
Cathérétiques Destruction
superficielle des
tissus
Sont moins
puissant que les
escarotiques
Cicatrisants
(incarnatifs ou
Favorisent la
reconstruction des
alun et oxydes de
cuivre
86
consolidatifs) tissus
Répercussifs Repoussent les
humeurs à
l’intérieur du corps
Drogues froides Morelle, plantain
Attractifs Favorisent
l’extériorisation
des humeurs.
Médicaments
chauds. Ils
agissent
directement en
raison de leur
propriété ou
indirectement en
provoquant un
phénomène de
putréfaction
Pouliot, mentastre
Libératifs ou
alixitères
Protègent
l’organisme des
venins
Décomposent ou
favorisent
l’élimination du
venin
Sédatifs,
narcotiques
Antalgiques Deux catégories dont
l’opium
D’après les travaux de Jean-Pierre Bénézet138, nous retrouvons dans cette
synthèse les grandes catégories (bien que non exhaustive) des médicaments et leurs
indication à la fin du Moyen Age.
138 Bénézet Jean-Pierre, Pharmacie et médicament en Méditerranée occidentale (XIIIe-XVIe siècle), éditions Honoré de Champion, Paris, 1999
87
C) La pharmacopée
La pharmacopée (arsenal thérapeutique) à disposition au moyen-âge provient
du règne animal, végétal ou minéral. « Ce sont des richesses fournies par la terre
aux hommes »139.
Ces éléments sont adaptés aux maux qu’ils sont censés soigner. « Lors de la
création de l’homme, une terre particulière fut tirée de la terre : c’est l’homme. Et tous
les éléments étaient à son service, car ils sentaient que celui-ci était vivant, et ils
coopéraient avec lui à toutes ses entreprises »140. Les produits de la nature sont
travaillés et préparés pour pouvoir être administrés afin de soigner les maux.
Les formes galéniques disponibles sont diverses et variées mais toujours externes.
Nous ne retrouvons pas de forme injectable dans les écrits.
Avicenne, dans son canon de la médecine, réserve deux des cinq livres à la
pharmacopée. Où il y décrit les médicaments simples (livre II) et dans son livre 5 la
constitution des médicaments composés, de la thériaque et autres électuaires.
L’auteur y décrit précisément les spécificités de chaque médicament, sa formule, sa
forme galénique, et son mode de conservation.141
Application locale Forme per os142
Emplâtre Tisane / infusion
Pulvérisation Juleps
Cataplasme Loochs
Collyres Sirops
Pommades Electuaires
Onguents Pilules et pastilles
confitures
139 De Bingen Hildegarde, Les causes et les remèdes, traduit du latin et présenté par Pierre Monat, ed. J.Millon, 140 Id. 141 Jazi Radhi, Asli Farouk Omar, « La pharmacopée d'Avicenne ». In: Revue d'histoire de la pharmacie, 86e année, N. 317,
1998. 142 Per os : voie d’administration d’un médicament par la bouche.
88
Nous retrouvons
- au niveau local : les onguents et emplâtres, les pommades et les collyres. (« Au
commencement, on doibt oster la opilacion en frotant le pis, le ventre et les costes et
les parties qui plus doullent de vin aigre blanc et oly camomille et de eaue rose, en
frotant doulcement et longuement. » [Folio 5R])
- au niveau entéral : les sirops, les décoctions, les confitures, les jus, les pilules143 et
la thériaque. « Et vecy que on luy donnera : milgraine sirop iulep, tizaine d’orge
coulée (…) brouet de ceses » [folio 5R]), « prenes (…) de la confiture » [folio…]
La thériaque, parvenue du monde romain, est considérée comme étant un remède
universel. Les Arabes, à la suite de Galien, en recommandent l’usage. Objet à partir
du XVme siècle, de l’attention des législateurs, elle est censée soigner de nombreux
maux dont la peste. Ce remède est très prisé à la fin du XIVème siècle. Sa
composition change d’un écrit à un autre, mais plus elle est composée de nombreux
éléments plus elle devient efficace aux yeux des malades144.
Les traitements proposés sont des traitements symptomatiques, prescrits pour
apaiser les signes cliniques ressentis et décrits par le patient. Il semble cependant
que la cause caractéristique que traduisent ces signes ne soit pas, ou ne puisse pas
être traitée spécifiquement. Ainsi, Hildegarde de Bingen, dans son ouvrage sur les
causes et les remèdes145 classe dans une nosographie détaillée, ce qu’elle peut
rencontrer contre les maux à soigner et établit une liste de concordance de
traitements adaptés à proposer aux malades. Il est important que le praticien puisse
d’une part, bien identifier les maux du malade et d’autre, maîtriser les éléments de sa
prescription. En effet, les ressources de la nature peuvent s’avérer « diaboliques » si
elles sont mal utilisées et peuvent donc être néfastes pour le malade. Mais les
143 « Dans l’Antidotaire de Nicolas, on retrouve les pilules aurées, les pilules quibus, toutes deux purgatives et à base d’aloès, les pilules stipices ou astringentes conte la diarrhée et les pilules diacostorées », in Dillemann Georges, « La pharmacopée au Moyen Age II. Les médicaments », in Revue d’histoire de la pharmacie, 57me année,n°200, 1969, (p.242) 144 Kassel Dominique, « La thériaques : 20 siècles d’histoire », collection histoire de la Pharmacie, Ordre des Pharmaciens, 1996 145 Id.
89
traitements administrés ne traitent pas uniquement des symptômes physiques mais
des causes bien plus subtiles de l’esprit tel que la colère, la mélancolie ou la luxure.
« La terre, avec des plantes utiles, offre un panorama des fonctions spirituelles de
l’homme, mais avec ses plantes inutiles, elle fait apparaître des fonctions mauvaises
et diaboliques »146
Des traitements par inhalation peuvent aussi être proposés. Flore Cano, nous décrit
les fumigations qui peuvent s’apparenter à des brumisations ou aux aérosols de
vapeur chargés de particules thérapeutiques.147
D) Les drogues et leurs compositions
La pharmacopée du XIVème siècle à Montpellier est partagée entre deux
grandes familles de médicaments : les médicaments composés et les médicaments
simples. Le terme drogue (ou « drug ») désigne dans son sens originel un produit
venant du monde végétal, animal ou minéral.
- Le règne végétal est le produit de base des médicaments. De tout temps les
hommes ont appris à reconnaitre les plantes qui pouvaient leur être utile dans le
domaine de la santé. Se sont constitués depuis l’antiquité des herbiers, des
glossaires botaniques et des manuscrits permettant d’identifier les plantes ayant un
effet thérapeutique. Nous retrouvons une triple origine des différentes plantes
médicinales utilisées au Moyen Age. Les plantes indigènes, les plantes cultivées
dans les jardins et les couvents (l’intérêt de ces jardins est de permettre d’acclimater
des plantes et d’avoir une ressource connu) et les plantes orientales (qui doivent leur
popularité aux médecins arabes).
146 De Bingen Hildegarde, le livre des subtilités des créatures divines, traduit du latin par Pierre Monat, ed. J.Millon, Grenoble 1988 147 Cano Alaixandri Fleur, Le livre de santé de Jacques Bonvalot, le savoir médical d’un notable au XVme siècle, Mémoire de Maîtrise d’Histoire médiévale sous la direction de Madame N.Brocard, 1999
90
Plantes indigènes Plantes cultivées Plantes orientales
Ache, Aneth, Aurone, Grande
Aunée, Angélique, Bétoine,
Boucages, Cataire, Chélidoine,
Millefeuille, Origan, Orties,
Plantains, Verveines…
Absinthe, Aigremoine, Bardane,
Bétoine, Cataire, Fenouil,
Grenadier, Marrube, Mauve,
Menthe, Pavot, Réglisse, Sarriette,
Scalarée, Thym,
Aloès, Camphre, Cannelle, Casse,
Scille, Séné, Tamarin Grenadier,
Opium, Mandragore, Colchique,
Myrrhe, Ricine, Noix muscade, Noix
vomique148
Exemple de quelques plantes utilisées dans les préparations médicinales149.
Les plantes suivantes sont retrouvées dans les transcriptions faites. Nous donnons d’une part leur origine, dans une deuxième
colonne l’indication thérapeutique actuelle150 , en troisième nous indiquons l’utilité qui en faite dans le Livre des propriétés des
aliments de Yûhannâ ibn Mâsawayh (certainement le premier traité arabe de diététique)151
148 La noix vomiquer est la source principale de strychnine. 149 D’après : Dillemann Georges, « La pharmacopée au Moyen Age. II. Les médicaments ». In revue d’histoire de la Pharmacie, 57e année, N.200, 1969, pp. 235-244 150 Debuigne Gérard, Couplan François, Petit Larousse des plantes qui guérissent, 500 plantes, éditions Larousse, 2006 151
Le Coz Raymond, Les chrétiens dans la médecine arabe, éditions l’Harmattan, 2006
91
Plantes aromatique, épices et condiments
Origine Indication thérapeutique Indication spécifique :
Livre des propriétés des
aliments
Utilisation traditionnelle
Amande
(lait d’)
Asie
occidentale et
centrale
Douceur pour la peau et
lutte contre les
démangeaisons
Déterge ce qu’il y’a dans
les membres supérieurs,
comme l’œsophage, la
poitrine et les poumons
Application locale,
gargarisme
Aneth Proche Orient Carminatif, diurétique,
digestif, favorise la
lactation
infusion
Coriandre Moyen Orient Affection gastro-intestinale.
Digestion difficile,
aérophagie et
ballonnement. Favorise le
tonus de l’organisme
Infusion
Girofle pays tropicaux Antiseptique, analgésique,
antispasmodique.
Bain de bouche, application
locale
92
Marjolaine Sud ouest de
l’Asie
Antiseptique,
antispasmodique. Utilisé
contre les migraines et les
tics de la face
Infusion, huile
Menthe Europe, Asie,
Afrique
Stimulant de l’appareil
digestif, antispasmodique,
céphalées, gingivites
Procure un sang
abondant et aqueux
Infusion, décoction, bain de
bouche
Pois
chiche
Proche-Orient Diurétique utilisé les
coliques néphrétiques et
les douleurs de l’appareil
urinaire, utilisé en cas de
blennorragie et hépatalgie.
Peut être utilisé en cas de
pleurésie
Déterge ce qu’il y a dans
les reins et la vessie,
désagrège les calculs.
Préparation à boire,
cataplasme
Poivre Asie Adouci la toux, traite les
coliques néphrétiques,
l’épilepsie et un anti
pyrétique, antirhumatismal,
stimule l’appétit et la
Rend l’urine abondante Cataplasme, huile
93
digestion,
Persil Sud-est de
l’Europe et
Asie
occidentale
Diurétique, carminatif,
stomachique. Dissipe
l’engorgement des seins et
tarit la lactation.
Décoction, infusion,
cataplasme
Romarin Bassin
méditerranéen
Antirhumatismal, utilisé
dans les attaques de
goutte, améliore la
circulation du sang,
stimulant digestif, stimule
les glandes surrénales,
anti-inflammatoire et
antioxydant
Infusion, vin, teinture, lotion
capillaire
Safran Sud est de
l’Europe et
Asie
occidentale
Gastralgie, emménagogue
dans les dysménorrhées,
insuffisance ovarienne,
localement dans les
embolies pulmonaires
Teint et rend la nourriture
appétissante, sa nocivité
pour le cerveau est
minime.
Infusion, sirop, teinture
94
Sauge Ouest du
bassin
méditerranéen
Tonifiant des voies
digestives et du système
nerveux, antiperspirant,
hypoglycémiant, régule le
cycle de menstruation,
antirhumatismal
Infusion, vin, teinture,
décoction, bain
Sésame Participe à des
compositions
aphrodisiaques (médecine
arabe : Ibn al-Jazzar)152
Cause une haleine fétide
152 Jazi Radhi, « Aphrodisiaques et médicaments de la reproducton chez Ibn al-Jazzar, médecin et pharmacien maghrébin du Xme siècle », in Revue d’histoire de la pharmacie, 75
me année, n°273, (pp. 155-170)
95
Fruits
Cerise Asie et pays
tempéré
Ecorce : fébrifuge et
contre la goutte, fruit :
comme antirhumatismal,
contre l’hypertension et la
goutte, laxatif
Sirop, décoction,
Poire Asie, Europe Nocive à l’intestin appelé
« colon »
On la surnommait « poire
d’angoisse » et on la
consommait surtout cuite
ou confite dans du miel
Pomme Asie et Europe pour l’estomac ; elle est un
contrepoison. Nocive pour
les nerfs. Propriété
antirhumatismal,
diurétique.
Fruit à croquer, infusion,
sirop.
Prune Asie, Europe Laxatif Fait glisser la bile jaune
qu’il y’a dans l’estomac et
l’intestin, par sa froideur et
sa viscosité
Compote,
96
Plantes potagères et légumes
Concombre Asie, Europe
et bassin
méditerranéen
Calme la toux, légèrement
laxatif, utilisé pour adoucir
la peau
Jus, lotion
Coloquinte Afrique du
Nord et Asie
occidental
Purgatif puissant Breuvage, pulpe, décoction
Endive Eteint l’âcreté du sang
Refroidissante et
astringente. Veines et
viscères. Calme les
nausées et la bile,
réconforte l’estomac. Elle
refroidit le corps de
manière admirable, si on
mélange son eau de la
céruse et du vinaigre. Ote
les taches des yeux.
Utilisé en emplâtre sur les
piqures de scorpion et
pour les autres venins
97
Epinard Europe,
Moyen Orient
Laxatif et dépuratif,
antianémique
Feuille, vin, infusion
Fenouille Bassin
méditerranéen
Digestif, carminatif,
galactogène
Augmente le lait Décoction, infusion,
cataplasme
Laitue Région
tempérées et
subtropicales
Léger hypnotique,
régularise l’ensemble des
fonctions digestives
Procure un sang tempéré Décoction, lotion,
cataplasme
Raifort Moyen Orient Antiscorbutique, tonifiant,
diurétique, expectorant
Vin, infusion, sirop
98
Fleurs
Lupin bassin
méditerranéen
Antiparasitaires,
aphrodisiaque. Utilisé en
dans les maladies
dermatologiques.
Décoction, lavement,
cataplasme
Rose Asie
occidentale
Lutte contre la tuberculose
pulmonaire, tonifiant,
utilisée pour réduire les
écoulements (leucorrhée,
hémorragie et diarrhée),
astringent, calme
l’inflammation oculaire
Infusion, confiture, miel,
vin, pommade
Violette Europe, Asie
occidentale,
Afrique du
nord
favorise l’expectoration
dans les affections
pulmonaires. Expectorant
et sudorifique.
Antirhumatismal.
Infusion, sirop, décoction,
cataplasme
99
Plantes et arbres
Bois de
santal
Asie, Fumigation
Cyprès Sud est de
l’Europe, ouest
de l’Asie
Infection du système
veineux (hémorroïdes,
varices, congestion
pelvienne…), lutte contre
l’incontinence urinaire
Suppositoire, décoction
Dyanthus
(œillet153
)
Europe, Asie Connu pour ses vertus
cicatrisantes. Donne de
l’énergie.
Eruca
(Roquette)
Bassin
méditerranéen
Astringente. Mangée seule
elle alourdit la tête, mais
cet effet nocif disparait si
on la mélange avec de la
laitue, des endives, des
bettes, du pourpier. Aide à
la lactation, favorise la
Ses graines peuvent
remplacer les graines de
moutarde en décoction.
153 L’espèce à fleur simple a été introduite par les Arabes en Espagne au XIIIme siècle, en provenance de Tunis et elle est présente dès le XVme siècle dans toutes l’Europe. Une variété àfleur double introduite en provenance de Valence vers 1460. Connu sous le nom d’oeillette en 1470. Son nom Dianthus signifie « fleur du seigneur ». Elle devient après la rose la feur la plus utilisés dans les guirlandes.
100
digestion des aliments.
Fumeterre Europe, Asie
tempérée,
Afrique du
nord
Dépurative, médicament
des voies biliaires, lithiase
hépatique biliaire
Dissipe la démangeaison
dans le corps.
Vertus dépuratives sur les
reins, la vésicule biliaire et
le foie
Infusion, vin, sirop
Mandragore Plante vivace
du bassin
méditerranéen.
Propriétés narcotiques et
toxiques.
décoction
Morelle Tous les
continents
Gastralgie, affection
cardiaque, pollution
nocturne, sédatif et
narcotique léger
décoction
Sureau noir Europe et Asie Diurétique, drainant,
adoucissante et anti-
inflammatoire oculaire
Décoction, vin, infusion,
suc, confiture,
Turbith
(racine)
Asie purgatif Décoction
101
Feuilles
Feuille de
cane à
sucre
Asie émollient Application locale
Feuille de
saule
Europe Antalgique,
antipyrétique
Décoction
Feuille de
vigne
Régions
chaudes et
tempérées
Antiseptique, anti-
inflammatoire, trouble
de la ménopause,
insuffisance veineuse
Décoction, cataplasme
102
« Récolte de la mandragore »
Français14969, [fol.61v]
BnF « cliché IRHT »
103
- Le règne animal : d’après l’étude de Georges Dillemann154.
Les drogues animales ont peu été utilisées en tant que principe actif. Leur utilisation
se développe surtout à la fin du Moyen Age. Cependant nous retrouvons des
éléments d’animaux comme excipient et additif aux médicaments : graisse (d’ours de
chat, poule…), sécrétions (musc, castoreum…) ou les productions (miel, œufs…)155
Notons une place particulière pour des éléments d’origine animale mais appartenant
au monde minéral (tel que les perles, le corail, l’ivoire, os). Les régimes font partie
intégrante des prescriptions du médecin pour lutter contre la maladie. Bernard de
Gordon décrit de nombreuses « diètes » dans son lilium medicine ayant pour
composition de la matière animale.
« La diete. Il doit user de petits poussins er e oyseaulx champestres et de
poissons scamoux et de eufs moles et de extremités de pourceaux, de moutons, de
cabris, de orgiat d’avenant et de brifuement de toutes ces choses qui sont de legiere
digestion qui ne racroissent point matiere, ne engroissent, ne qui ne concipent, ne
enflent. » [Folio 12R] – exemple d’un régime décrit dans le traitement des fièvres
quartaines (livre I, chapitre VI).
154 Dillemann Georges, La pharmacopée au Moyen Age. II. Les médicaments. In revue d’histoire de la Pharmacie, 57e année, N.200, 1969, pp. 235-244 155 A Montpellier, « parmi les drogues d’origine animale venaient les diverses sortes de musc portées par les caravannes jusqu’aux Echelles du Levant et, de là, amenées à Montpellier, le miel élaboré par les abeilles des Corbières au voisinage de Narbonne, la cire de Barbarie, et enfin la « graine d’écarlate ». Cette « graine » était la cochenille du chêne, Kermès, venant parfois de Valence, en Espagne, mais récoltée surtout dans les « garrigues » langdocienne ; matière tinctoriale faisant la renommée de la « Draperie Rouge » de Montpellier, et aussi médicament très recherché pour la préparation de la célèbre confection Alkermès qui lui devait son nom ». in Irissou Louis, « la pharmacie à Montpelleier avant les status de 1572 », in Revue d’histoire de la pharmacie, 22me année, n°85, 1934 (p. 226-227)
104
Animaux à 4 pattes
désignation Indication
Agneau Engendre un sang tempéré,
entre épais et fin
Cabri / Chevreau Engendre un sang épais,
moins chaud que celui
engendré par la viande de
mouton
Mouton Engendre un sang épais,
penchant vers l’atrabile,
(…) ; elle provoque l’atrabile
dans le foie et elle est
nocive à l’estomac
Pourceau (porc) / Porcelle
(truie)
Cerf Provoque une douleur
accompagnée d’un trouble
dans le corps
Oiseaux / Volailles
désignation indication
Poule / poulaille / geline /
poussin
Eteint l’inflammation de
l’estomac
Oyseaulx champestre
105
Dérivés des animaux
Ces produits sont souvent des adjuvants aux préparations médicinales. Ils peuvent
favoriser l’appétence du produit ou sa conservation.
Désignation indication
Graisse conservation
Lait d’Amande appétence
Lait appétence
Œuf appétence
Soie de porc conservation
Dans le chapitre IX (livre I) traitant de fievre ethique Bernard de Gordon donne une
graduation sur les laits en fonction de leur provenance et précise que le lait peut se
corrompre (‘tourner’) facilement si il n’est pas bu rapidement. Il précise que le lait est
meilleur si il est écrémé. [Folio 15V et 16R] « lait clere de quoy on osté le beurre.
Donc lait apartient aulx tiziques ou cas que fievre putride n’y seroit meslée, si comme
dit G au XI de Ingenio sanitatis. Et le meilleur lait qui appartient c’est lait de femme,
apres lait de anesse, et apres de chienne, et apres de vache, son peut on le doit
boire de la mamelle de la vache et son ne peut pernes ung vaisseau plain d’eaue
chaulde et le chauffez et luy faites boire tost, car le lait corumpt tantost ainsi que le
lait se corrumpt tantost ainsi que fait semence. »
106
Serpents, poissons et vers156
désignations indication
Poisson Ramollit le ventre,
surtout son bouillon
Scolopendre / scorpion Lapis de scorpion traite
la pierre des reins157.
L’huile de scorpion est
utilisée en cas de
morsure venimeuse
Serpent Traitement de la lèpre
Les drogues minérales sont peu nombreuses. L’on peut citer :
Les minerais : de fer, d’arsenic, de plomb
Les sels naturels : sel marin, sel gemme, alun, salpêtre, borax
Les gemmes : lapis lazuli, améthyste, saphir, émeraude, rubis
Les argiles ferrugineuses : bol d’Arménie ou Terre sigillée.
156 Cuisine et diététique se trouvent également convoquées pour répondre aux exigences des consommateurs bien particuliers que sont les malades (bouilli avec des aromates). Voir l’article de Nicoud Marylin « L'adaptation du discours diététique aux pratiques alimentaires : l'exemple de Barnabas de Reggio », in Mélanges de l'Ecole française de Rome. Moyen-Age, Temps modernes t. 107, n°1. 1995. pp. 207-231. Barnabas, médecin àVenise au début du XIVe siècle, « conserve la subdivision classique entre poissons de mer et d'eau douce, mais les critères généraux et théoriques qui permettent de connaître la valeur des différentes variétés sont oblitérés au profit de l'énumération de quelques espèces, sans doute de consommation courante en Italie du Nord. Ces poissons sont en effet péchés, nous dit Barnabas, apud nos, c'est-à-dire dans les lacs et rivières d'Émilie-Romagne et plus largement dans les mers qui bordent l'Italie ». Dans la catégorie des poissons de rivière, Barnabas mentionne les truites, des variétés de grosses carpes, les anguilles, les gardons, les varones désignent les goujons ou les vairons. Parmi les poissons de mer, Barnabas cite les turbots, les rougets mais aussi les soles. 157 Livre IV, chapitre III « Decy les medecines qui de leur proprieté elective et merveilleuse rompent la pierre, cest assavoir lapis […] de scorpions » [folio….]. (lapis signifie pierre)
107
En plus de l’utilisation des produits de base, la chimie a permis de constituer des
éléments essentiel pour la constitution des drogues, tel que les oxydes, la potasse, la
chaux, le soufre, l’acide Chlorhydrique. Ces préparations sont utilisées dans notre
pharmacopée contemporaine.
On retrouve des composés organiques dans les recettes de Bernard de Gordon, où
ils sont associés à des compositions médicinales : Aluminium, Ambre, Arsenic,
Camphre, Soufre
II) La pharmacopée dans l’ouvrage
A) Les simples et les composés
1- Les médicaments simples
Ils sont composés d’un seul produit actif auquel peut y être ajouté un
excipient. «Les remèdes concernés sont des boissons, des emplâtres, des
injections». Les experimenta sont issus de la tradition des médicaments simples.
Ainsi, Mc Vaugh les définit comme étant « un type nouveau de prescriptions simples,
courtes, peu rigides, utilisant des substances communes, où les doses sont rarement
spécifiées et où la théorie humorale n’apparaît que peu. » Dès que deux simples
sont associées, on parle de recette de santé.
2- Les médicaments composés
Ils sont issus de la polypharmacie arabe. Les remèdes sont des mélanges de
divers principes actifs et d’excipients. Le fait d’associer diverses substances peut être
la traduction d’une incertitude du médecin dans le traitement à prescrire, au patient
mais aussi la traduction du rêve du dogme médical de découvrir la panacée. La
célèbre « thériaque » qui est censée incarner ce rôle, a une composition différente
d’un auteur à un autre et d’un lieu à un autre. Une constante néanmoins : cette
extraordinaire polypharmacie de luxe, de composition assez variable et réunissant
108
plus de 60 et parfois plus de 100 constituants158, était composée de quatre groupe
de poudre (à usage purgatif, fortifiant et stimulant et des excitants et des calmants).
Remède universel la thériaque est prescrite pour une multitude de maux159 :
catarrhes, douleurs de jointures, maladies contagieuses, état fébriles (fièvre quarte
en particulier : [folio 11 V] « tu luy donra de aurea alexandrina et de tyriaque »)
troubles digestifs, hydropisie, troubles circulatoires, atteintes du système nerveux,
épilepsie, apoplexie et morsures de bêtes venimeuses. Plusieurs écoles de
médecine vont donner des recettes différentes. Se distinguent particulièrement la
thériaque de Venise et celle de Montpellier. Considérée comme un antipoison (ou
alexipharmaque), les grands (et les riches) se la procurent pour se protéger. La
fabrication des médicaments composés est à l’origine de la connaissance et du
développement de la pharmacodynamie, l’addition de plusieurs substances actives
pouvant modifier l’action voulue du médicament (toxicité, neutralisation du principe
actif…). C’est grâce à cette multitude d’ingrédients que l’organisme pouvait tirer
partie de celui ou de ceux qui lui étaient bénéfiques160. Héritiers de la pharmacie
arabe, les médecins montpelliérains vont user des potentialisateurs pour réduire les
posologies et la toxicité de leurs traitements. Plus il y a d’ingrédients dans une
préparation pharmaceutique, plus elle est chère. La préparation de la thériaque de
Montpellier répond à des règles strictes de préparation dictées par les professeurs de
l’université161. Les composés sont donc plus destinés à un public ayant les moyens
de se les procurer. (cf. annexe exemple de recette de préparation de la thériaque de
Montpellier).
158
Il existe une thériaque beaucoup plus simple, dite diatessaron qui, elle aussi, a parcouru les siècles, mais de façon très discrète, sans doute parce qu'elle ne contient que quatre drogues : racines de gentiane ; racines d'aristoloche ; baies de laurier ; myrrhe.. Flahaut Jean, « La thériaque diatessaron ou thériaque des pauvres », Revue d'histoire de la pharmacie, 86e année, n° 318, 1998. p. 173-182. 159 D’après : Granel François, « La thériaque de Montpellier », in : Revue d’histoire de la pharmacie, N. 229, 1976, pp 75 - 83 160 Id… 161 Granel François, « La thériaque de Montpellier », in : Revue d’histoire de la pharmacie, N. 229, 1976,( pp 75 – 83)
109
B) Les apports arabes
Les médecins arabes ont enrichi les connaissances pharmaceutiques
antiques. Issues de leurs connaissances, de leurs recherches et de leurs
expériences leurs des préparations médicamenteuses se sont développées et sont
transmises jusqu’au moyen âge. Pour preuve, nous retrouvons des plantes orientales
dans les compositions des recettes médicamenteuses chez les médecins
montpelliérains et dans les préparations médicamenteuses qu’ils peuvent proposer.
Divers types de préparations médicamenteuses liquides ont été inventées par les
Arabes162 et sont portées à la connaissance par divers traduction, qui ont vu le jour à
Montpellier. Vers 1318, Bernard de Gordon encourage son élève, le Valencien
Bérenger Eimeric, à traduire la partie du Tasrif d’Albucassis qui concerne les diètes
des malades. Il le fait d’abord d’arabe en catalan, puis de catalan en latin. Un autre
Valencien, professeur à l'Université de Montpellier, Arnaud de Villeneuve, dont les
compétences sont éprouvées en arabe, traduit divers écrits médicaux de l'arabe en
latin à la fin du XlIIème siècle. Parmi ces écrits il convient de souligner le traité sur les
médicaments simples du poète, médecin et philosophe Abu-s-Salt, habitant (fin XIème
- début XIIème siècle), connu en latin sous les noms de « Albumesar » et " Albuzale ".
Son Kitab al-adwiya al-mufrada est particulièrement intéressant parce qu'il est basé
sur des sources arabes inconnues dans l'Occident chrétien et qui, en fait, pendant la
période médiévale, n'ont été traduites ni en latin ni en d'autres langues occidentales.
La traduction latine d'Arnaud jouit d'une large diffusion, dont une partie ne fut pas en
latin. En effet, l'on connaît une traduction en hébreu et une autre en catalan, menées
à terme au XIV" siècle, bien que cette dernière, assez correcte, effectuée à partir de
la latine par un inconnu, soit conservée dans un manuscrit du XVe siècle163.
162 Dillemann Georges, « La pharmacopée au Moyen Age. II. Les médicaments ». In revue d’histoire de la Pharmacie, 57e année, N.200, 1969, pp. 235-244 163 Lluis Cifuentes, « L'Université de médecine de Montpellier et son rayonnement (XIIIe-XV e siècles) et la vernacularisation au bas Moyen Âge: Montpellier et les traductions catalanes médiévales de traités de médecine », Actes du colloque international de Montpellier, dir. Daniel Le Blevec, 17 - 19 mai 2001, Turnhout, 2004, p. 51 -61.
110
Forme galénique Appellation arabe
Juleps Jelâb Potion aqueuse préparée
avec des fruits, du sucre
ou du miel
Loochs Laûgât Potion préparées avec
des émulsions
Oxymels scanjabin Dissolution du miel dans le
vinaigre
Sirops Scharâb Essence de plante
associée à du sucre
C) La practica montpelliéraine
Bernard de Gordon et les maîtres montpelliérains de son temps ont permis de
développer une médecine à leur image, enrichie des connaissances de la médecine
arabe et antique. Grâce à leurs réflexions, à leurs recherches et leurs écrits, les
médecins du début du XIVème siècle de Montpellier ont ouvert la voie à l’émergence
d’une médecine moderne et par conséquent d’une pharmacopée renouvelée.
Nous trouvons au XIIIème
siècle deux types d’ouvrages thérapeutiques. Les
ouvrages théoriques de pharmacie, comme l’Antidotarium Nicolaï qui s’impose
comme la référence pour les médicaments délivrés par les apothicaires, et les
ouvrages pratiques. Fleur de Lys en médecine se classe dans la deuxième catégorie
puisque l’auteur y décrit des formules issues de ses recherches et de ses
expériences et donc se détache des dogmes de prescription théorique. Bernard de
Gordon pratique une médecine pragmatica contrairement à certains de ces confrères
(et notamment Arnaud de Villeneuve) qui eux prônent une via intellectualis. Une
controverse concernant les posologies des traitements médicamenteux s’instaure
entre les médecins de Montpellier. Engagé par Arnaud de Villeneuve dans son
Aphorismi de gradibus164, Gérard de Solo propose par la suite l’Introductorium
164 Guénoun Anne-Sylvie, Le médicament chez Gérard de Solo, médecin montpelliérain du XIVme sièle, in Revue d’histoire de la pharmacie, 87e année, N. 324, pp. 465-474 (p. 466)
111
juvenum qui est un résumé théorique centré sur les apports pharmaceutiques de l’un
de ses premiers traités Commentaire due le Livre IX d’Almasor de Rhazès165 qui est
un ouvrage célèbre pour ses apports en connaissances pharmacologiques. Cette
discordance concerne la graduation des médicaments et leur degré qui doit se
rapproché du degré de qualité (chaud, humide, froid, sec) de la dyscrasie qui
entraine la maladie. Gérard de Solo se rapprocher de Bernard de Gordon en se fiant
à ses expériences et en adoptant le point de vue d’Averroès et d’Avicenne166. A
travers la thèse d'Anne-Sylvie Guénoud167, nous pouvons comparer la pratique
pharmaceutique de Gérard de Solo et de Bernard de Gordon. Ces deux auteurs sont
des médecins ayant exercés à Montpellier au XIIIème siècle rattaché à l’université de
la ville. Leur différence d’âge permet de montrer une évolution dans la pratique de la
médecine et notamment de la pharmacologie. Bien qu’ayant chacun une pratique
d’experimenta168, Gérard de Solo est beaucoup plus précis dans ses recettes
médicales que Bernard de Gordon. Il ne se contente pas en effet de donner des
listes d'ingrédients, mais fournit le plus grand nombre possible de détails concernant
la préparation des remèdes. La dose des ingrédients est notifiée dès que nécessaire.
165 Rhazès (865-932) médecin d’origine perse mais de culture et de langue arabe. Il rédigea de nombreux traités de médecine et de pharmacologie. Médecin chef de l’hôpital de Bagdad et chercheur il prône l’expérimentation et pose les bases de la pharmacologie moderne « Si le patient peut être traité par le régime, éviter les médicaments, les associations de médicaments; et s'il peut être traité par des médicaments simples, éviter les associations de plusieurs médicaments. ». Landry Yves, Petite histoire des médicaments. De l’Antiquité à nos jours, col. UniverSiences, éditions Dunod. 166 Guénoun Anne-Sylvie, « Le médicament chez Gérard de Solo, médecin montpelliérain du XIVe siècle », in Revue d’histoire de la pharmacie, 87e année, N. 324, pp. 465-474 (p. 471) 167 Guénoud Anne-Sylvie, « Gérard de Dolo, maître de l’Université de Montpellier et praticien du XIVe siècle », Ecole nationale des chartres, Paris, 1982 168 « On désigne du terme d’experimentum un fait pratique, un remède dont les vertus avaient été découvertes par l’expérience, dans le présent ou le passé, et ne pouvaient être déduites purement et simplement par le raisonnement », d’après Guénoun Anne-Sylvie, Le médicament chez Gérard de Solo, médecin montpelliérain du XIVe siecle, in Revue d’histoire de la pharmacie, 87e année, N. 324, pp. 465-474 (p. 467)
112
III) Soigner autrement
A) Les soins techniques
Fidèle aux concepts de la médecine antique, le médecin du Moyen Âge
pratique une médecine des contraires et des semblables (« c’est par ire on le doit
faire estre doulx et debonnaire. Se c’est par tristesse on luy dit faire joye et lyesse, se
c’est par faim on lui doit donner a menger » [Folio 3 V]).
Il Réchauffe le corps (frictions) ou le refroidit (bains). Il allège l’enveloppe corporelle
en permettant l’évacuation des humeurs viciées (clystère, saignées) ou confronte le
malade à des soins de même complexion. Il a donc tout un arsenal de possibilités
thérapeutiques à sa disposition à proposer au patient.
1- Les bains
Le catalan Arnaud de Villeneuve, auteur d'un Regimen sanitatis très largement
diffusé, tient un discours diététique sur le balneum. Il fait une distinction entre le bain
humide et le bain de vapeur ou étuves : le premier sert à se laver, le second à
provoquer la sudation. Bernard de Gordon, lui aussi, a souvent recours au bain
thérapeutique dans les conseils qu’il peut donner pour soigner. La lecture des
chapitres traitant de la fièvre permettent d’argumenter en cette faveur. Face à une
température élevée, un corps chaud présentant des signes cliniques spécifiques
(chaleur, pouls accéléré, face livide, peau rouge…), il est conseillé de donner un bain
froid au malade, qui d’une part le rafraîchisse et d’autre part permet aux pores de la
peau de s’ouvrir et de facilite l’évacuation de la sueur (phénomène physiologique) et
des humeurs viciées. Il peut être proposé par la médecine des bains thérapeutiques
avec l’adjonction d’éléments dans l’eau ou des bains d’eaux spécifiques169. Il est par
169 A noter que Frédéric II prenait le bain à Pouzzoles et que le pape Innocent III avait redécouvert, une décennie plus tôt, les vertus des eaux chaudes de Viterbe. Selon Matthieu Paris, Grégoire IX s'y rendait régulièrement pour y soigner ses calculs. Plus tard, le souci d'hygiène individuelle et un besoin de cures efficaces dont témoignent entre autres Boccace et Pétrarque n sont assurément à l'origine d'un essor véritable de la pratique thermale, manifeste en Italie, tout particulièrement, à partir du XIVe siècle. Les praticiens, en tant qu'experts des choses de la nature, furent régulièrement convoqués par les autorités pour évaluer les qualités des eaux de leurs territoires. Nicoud Marilyn, « Les médecins italiens et le bain thermal à la fin du Moyen Âge », in Médiévales, n°43, 2002. (pp. 13-40)
113
exemple, recommandé aux lépreux de se rendre dans des eaux sulfurisées170. Dans
son exposé sur les fièvres, au chapitre de la fièvre effimere, Bernard de Gordon
préconise de prendre un bain thérapeutique avec adjonction de plantes ( [Folio 2R]
« (…) en declinacion de la fievre on le doivt baignier en eaue doulce en laquelle
soyent roses, camomille, mellilot et nenufar »).
2- Evacuation de la matière
« On doit vomir et apres se le ventre n’est lache, on doit faire suppositoires ou
clysteres. » [Folio 3 V]
Pour soulager le corps le médecin préconise traditionnellement l’évacuation
de la matière en utilisant des suppositoires ou des lavements avec des clystères.
L’évacuation des matières est le premier point abordé pour soigner la pleuresis171 :
« Au commencement on doit considerer s’il est constipé se faites cristere ou
suppositoire selon la convenance des choses particulieres » [folio 145R]
Bernard de Gordon conseille également souvent une autre alternative au
malade qui est de faire vomir afin d’expulser les humeurs mauvaises ou
excédentaires172. Dans les premiers chapitres étudiés traitant des différentes fièvres,
il est préconisé de faire vomir le patient. « Je dy qu’en tiersainne et en toute fievre
interpolée c’est bon vomir au commencement du proxime » [Folio 8 R]. Le médecin
peut conseiller un sirop vomitif. (« Avicenne loue moult vomir devant mengier et
apres mengier » [Folio 12 R]).
170 Brocard Nicole, Soins, Secours et exclusion, annales littéraires de l’Université de Franche-Comté, vol.160, diffusion Les Belles Lettres, Presse Universitaire de Franche-Comté, 1988 171 Chapitre IX du livre IV 172 Il est néanmoins préconisé de ne prendre aucune médecine purgative ou vomitive en juillet. En hiver, le phlegme domine et entraîne les catarrhes, la toux, des troubles oculaires. Soranus recommande alors des aliments chauds et substantiels, la consommation d'ache, de poivre et d'aigremoine. Il conseille d'éviter les bains et de purger la tête pour éliminer le phlegme du cerveau. On voit apparaître les médications.
114
3- Les ventouses
Dans le chapitre traitant de la lèpre, l’auteur propose en premier traitement
d’appliquer des ventouses dans le dos du patient pour favoriser la circulation du
sang. « Que on face ventouze avec scarificacion entre les épaules ou sans
scarification es jambes » [folio 36 R]. Cette pratique reléguée aujourd’hui au rang des
médecines traditionnelles existe encore notamment dans le cadre de la médecine
chinoise.
B) Saignée et actes techniques
1- La saignée
La saignée est une pratique courante mais qui demande des précautions. Elle
fait sortir le sang du patient. Physiologiquement, elle permet de réduire le volume
sanguin circulant dans le corps. Au Moyen Age, elle permet de purger un sang trop
riche et de rejeter les humeurs viciées. Bernard de Gordon donne des conseils sur la
façon de pratiquer la phlébotomie dans le chapitre traitant de la fièvre Synoque. Il
précise que cett pratique peut être dangereuse et qu’elle doit être réalisée avec
minutie. (« Et me semble que c’est plus seur de faire la saignié a plusieurs fois, tant
que la matiere defaille et non pas la maladie, car je ayme mieulx que la maladie soit
ung peu alongié que on deist que je l’eusse fait mourir » [Folio 9 V]). Au chapitre IX
du livre IV traitant de pleuresis, il décrit très précisément au médecin comment faire
la saignée dans cette affection. Il donne de nombreux repères anatomiques, ce qui
prouve une très bonne connaissance du corps et de son système vasculaire. « En
pleuresis se le corps est plain et vertu forte faites premier saignée selon Avicenne de
la saphenes dicelluy coste et puis se plenitude y est de la basilique de l’autre coste
et se il ne voulait faire des saphenes faite de la basilique de l’opposite coste et dois
cy entendre que selon la doctrine de G sur celle partie : Quando dolor spatulas etc.
Du foye vient une veine173 et va au cueur et se divise apres174 et monte droittement
173 Veine cave inférieur
115
jusques à deux guide gi, mais depuis qu’elle vient du cueur ung ramel yst hors du
troncs droit vers dextre et senestre et font la basilique en la curvature du bras. Ces
deux basiliques tirent du puis et pource ce seroit chose egale quant a ce de saignée
de quelconque que ce fust fait, car la distance est egale, mais aultres choses ya, car
les veines capillaires qui nourrissent les haultes costes elles ont colligance avec les
veines capillaires qui viennent de la basilique et ainsi au commencement saignes le
corps » [folio 145R].
Réseau veineux du bras175 trajet de la veine cave176
2- Médecine manuelle et petite chirurgie
Bernard de Gordon décrit dans son ouvrage Fleur de lys en medecine des
actes de petite chirurgie. Dans le traitement de la lèpre, il explique comment ablater
les bubons pesteux. « Nous venons a oster les bossectes et eminences et y’a
plusieurs manieres de elles elever. Aulcuns les copent en croix et les aultres les
ostent par corosis, les aultres les cauterizent mais vecy la meilleur maniere de elever
c’est que vous pernes le neu ou bossette a ung croc ou unes pincetes et le coppes
tout hors d’un rasoir et faictes ainsi de tous se le patient le peut souffrir. Et
assembles le sang que en ystra et le mesles tres bien avec litargie bien pulverizé et
174 Veine cave supérieur qui se divise pour former les veines brachio-céphalique. 175 www.Soins-Infirmiers.com 176 www.Larousse.fr
116
toute la face et tout le lieu en soit emplastré et le laissiés ainsi jusques a trois jours et
puis le lavés d’eaue de bren qui s’appelle « aqua furfu… » [Folio 37V]. Il n’hésite pas
à manipuler lui-même ses malades pour les soulager. Dans le livre IV au chapitre III
traitant de coliques néphrétiques (pierre dans les reins) il indique au médecin
comment évacuer les calculs rénaux en mobilisant le malade : « Or venons a la cure,
se la pierre est ou col de la vecie et qu’il ne puisse picer leves luy les hanches fort en
hault et les hurtes et frotes la verge et le penils et la pierre yra au fons de la vecie et
pourra picer…Item s’il ne peut picer pour ce que la pierre est trio grande et estoupe
le conduit qui est petit faites ainsi qu’il tienne le chief bas et hurtes la vecie et frotes
et comprimes et la pierre se descendra en la vecie et poura picer et sera remede
temporel ou boutes le doit en son cul et comprimes ». Cependant il fait la distinction
entre les actes du médecin et ceux du chirurgien : « La cure de la pierre qui se doit
faire par la main du cirgien quant est de present je le laisse. » Nous pouvons penser
qu’il laisse au chirurgien le soin de faire les gestes invasifs.
C) Hygiène de vie
La notion d’hygiène est ancienne. L’Antiquité a déjà conscience de
l’importance de respecter des notions élémentaires d’hygiène « pure », d’hygiène de
santé mais aussi d’hygiène de vie. Ainsi, nous retrouvons des traités qui décrivent les
règles à respecter pour une vie saine, tel que l’Epitre sur la vie Saine177 de Dioclès
de Caryst ou le traité d’hygiène de Galien (129-216).
Une vie saine dans un corps sain pour accéder à une vie spirituelle épanouie.
Les « régimes de santé » de la fin du moyen – âge sont destinés à des hommes de
haut niveau, pour leur permettre de « garder la santé ». D’après les recettes qui sont
proposées, ces hommes doivent suivre des conseils sur leur mode vie et qui leur
permettent d’éviter d’être malade et d’atteindre une longévité acceptable. L’homme
doit vivre dans un environnement pur (il y a analogie entre environnement et air
respiré). L’air doit être sain car pour le Moyen Age c’est l’un des éléments
environnementaux essentiels. En effet, l’air pénètre le corps pour lui permettre de
vivre en allant directement au cœur. L’air peut être modifié artificiellement par
177 Grmek Mirko, Histoire de la pensée médicale en Occident, Antiquité et Moyen Age, ed. Seuil (p.258)
117
l’homme et donc peut être rendu nocif. Traditionnellement l’air des villes est
considéré comme plus pur que celui des campagnes. L’exercice physique est
considéré comme indispensable et les régimes de santé détaillent précisément les
activités à réaliser. C’est la marche à pied qui est le plus préconisée. L’alimentation
est fondamentale pour l’équilibre du corps et son bon fonctionnement. Le sommeil
permet de favoriser la digestion et est également décrit l’importance de l’hygiène
corporelle.
Les régimes sont différents en fonction des personnes auxquelles ils
s’adressent. Il y aura donc des différences entre les traités sur l’hygiène du petit
enfant et ceux concernant le vieillard. Cette médecine préventive est basée sur la
prise en compte des « Six causes » décrites par Galien. Les « choses non
naturelles »178 sont les suivantes : l’air ambiant, l’inanition du corps, la nourriture et la
boisson, le mouvement et le repos, le sommeil et la veille, les émotions ou passions.
Peuvent s’y ajouter le bain et l’activité sexuelle, le vêtement ou le logement, en
fonction du climat ou des saisons179.
Les régimes de santé ont pour objectif de permettre aux hommes d’accéder à
un équilibre du corps, aussi bien entre le corps et son environnement qu’à l’intérieur
du corps. Fidèle au principe de la théorie des humeurs, tout déséquilibre entraine la
maladie. Fleur de Lys en medecine, n’est pas un livre de régime de santé à
proprement parler, mais nous y retrouvons, tout au long des parties traitant de « la
cure » des maladies présentées, des conseils d’hygiène alimentaire. Ainsi lorsqu’il
parle de la fièvre pestilenciale, il préconise une alimentation légère, sans excès en
temps pestilence (« Et si se doit bien generalement garder de trop boyre, de trop
mengier. [Folio 17 R] »). Dans le cadre de la médecine évacuatrice, la diète est
conseillée aux malades : ils doivent se nourrir de viande légère en petite quantité. « Il
doit user de petits poussins et oyseaulx champestres et de poissons scamoux et de
eufs moles et de extremités de pourceaux, de moutons, de cabris, de orgiat
d’avenant et de brifuement de toutes ces choses qui sont de legiere digestion qui ne
racroissent point matiere, ne engroissent, ne qui ne concipent, ne enflent. » [Folio 12
R]. Bernard de Gordon consacre cependant quelques pages à présenter brifement
178 Jacquart Danielle, La médecine au temps des califes, Paris 1996, p.173 179 Le Coz Raymond, Les chrétiens dans la médecine arabe, éditions l’Harmattan, 2006, p. 170
118
les principes d’un régime de santé dans le chapitre VIII de fastide (du livre V) dans
un paragraphe qu’il appelle de ce nom. « Cest le traicte de regime de sante. Par la
grace de Dieu nous entendons a faire ung traité long de regime de santé, mais par
grace de matiere nous voulons cy dire briefment sur le regime de santé ».
L’environnement du malade doit également être pris en compte : ainsi il peut
être proposé d’aérer la maison et de l’embaumer de fumées de plantes médicinales
afin de restaurer un air pur non vicié propice au rétablissement de l’équilibre du
corps. « Item note que en effimere [fievre] qui vient par chaleur on doit mettre fleurs
froides au lit, c’est a entendre de present antour le lit pour alterer l’air, non pasque les
flours touchent a la chair nue car ce seroit doubte que les porres se clousissent »
[folio 4V].
119
« Au Moyen Âge, ce qui est déterminant c’est l’emprise d’une pensée
religieuse. La Bible reste le texte de référence expliquant l’univers et la société et
réglant les comportements culturels, politiques et sociaux »180. La religion est
omniprésente mais n’influence pas particulièrement Bernard de Gordon ; elle a juste
une place naturelle et légitime dans son mécanisme de pensée et de raisonnement.
Son écrit est le reflet de la vision du monde tel que peut le décrie un intellectuel de
son époque. Au delà de la part scientifique de l’ouvrage, nous accédons au
mécanisme de pensée de l’homme du début du XIVème siècle. Bernard de Gordon
nous permet d’appréhender son monde, avec ses peurs, ses croyances et sa vision
de l’univers. Comme nous le montre l’historien Michel Pastoureau181, l’homme du
Moyen Age n’a pas le même ressenti que nous pouvons avoir aujourd’hui par rapport
à l’environnement. Il cherche des réponses concrètes, rassurantes ou effrayantes, à
ses interrogations en puisant dans la Bible et la religion.
L’étude de l’incunable Fleur de lys en medecine de Bernard de Gordon nous
permet de mettre en avant la pensée médicale du début du XIVème siècle. Le
discours médical proposé est issu de l’héritage antique et des connaissances arabes,
enrichi par les observations personnelles de l’auteur, de son expérience et de sa
culture. Lettré et scientifique il propose de nombreuses recettes médicamenteuses
qu’il détaille avec précision et nous fait part de ses commentaires. L’auteur, médecin
et enseignant reconnu de la jeune université de médecine de Montpellier, tient des
propos pouvant être considérés comme étant une des bases de connaissances qui
ont permis le développement de l’école de médecine de la ville. En effet, sa pratique
en médecine traite de l’ensemble des affections du corps et des soins que l’on peut
apporter. Il met en avant à de nombreuses reprises l’art et la place de la profession
médicale dans la société ce qui indique clairement l’émergence de l’identité
professionnelle médicale. Erudit et pédagogue, Bernard de Gordon transmet ses
connaissances simplement et n’hésite pas à donner ses conseils aux étudiants.
L’université de médecine de Montpellier va connaître un rayonnement dans tout
l’Occident devenant un centre d’étude privilégié et réputé. Bernard de Gordon
appartient à la première génération de médecin de l’université de médecine de
180 Le Goff Jacques, Un long Moyen Âge, coll. Pluriel, hachette littératures, éditions Tallandier, 2004 (p. 30) 181 Pastoureau Michel, Bestiaire du Moyen Age, éditions Seuil, octobre 2011
120
Montpellier. Tout comme son contemporain, Arnaud de Villeneuve, il infleuence la
pensée des futurs gands médecins qui feront le renom de l’école de médecine de
Montpellier, tels que Guy de Chauliac, Jean de Tournemir ou Gérard de Solo qui le
citent dans leurs écrits. Cependant, la place de Bernard de Gordon dans le
développement de l’université de médecine de Montpellier reste à définir. En effet, il
est reconnu comme étant un médecin de qualité et un enseignant de renom à travers
ses ouvrages, mais nous avons peu de traces de son engagement dans l’institution
universitaire montpelliéraine.
ANNEXES
I)
Table des annexes
Introduction ...................................................................................................... p.126
Transcriptions d’extraits de Fleur de Lys en medecine ............................... p.127
I) Premier livre ..................................................................................... p.127
1- « Le premier livre partle de fievre en general » ................ p.129
2- « Le second parle de fievre effimere » ............................... p.130
3- « Le tiers parle de fievre causon » ...................................... p.136
4- « Le quart de fievre tierchaine » .......................................... p.141
5- « La V de fievre synoque » .................................................. p.147
6- « Le VI de fievre quartaine » ................................................ p.151
7- « Le VII de fievre cotidienne » ............................................. p.156
8- « Le VIII de fievre composte » ............................................. p.161
9- « Le IX de fievre ethique » ................................................... p.162
10- « Le X de fievre pestillenciale »........................................... p.165
11- « Le XI de sueur »................................................................. p.167
12- « Le XXI de lepre » ............................................................... p.171
13- « Le XXVII de maladie des ongles si comme panarice,
spasme, lepre et ongle blanc et de macule putrifiée et
fendures et des semblables » ............................................. p.188
II) Livre III .............................................................................................. p.189
1- « Le XXVII des passions des gingives » ............................. p.189
III) Livre IV .............................................................................................. p.191
1- « Le IX de pleuresis » .......................................................... p.191
IV) Livre VI ............................................................................................. p.202
1- « Le XII de la pierre des reins » .......................................... p.202
V) Livre VII ............................................................................................. p.206
1- « Le VIII des menstrus retenus » ........................................ p.206
VI) Présentation des sommaires des six autres livres de Fleur de lys en
medecine ........................................................................................................................ p.210
Références de Bernard de Gordon dans ses écrits ....................................... p.217
Lévitique .......................................................................................................... p.218
Extrait du texte de la traduction française du manuscrit H 317 De passionibus
mulierum ........................................................................................................... p.221
Symboles et allégories dans l’ouvrage Fleur de lys en medecine ................ p.223
Synthèse des chapitres traitant de la fièvre .................................................. p.235
Comparaison entre les textes : la peste .......................................................... p.245
Lexique ............................................................................................................. p.246
Bibliographie .................................................................................................... p.256
126
Abréviations utilisées par l’auteur :
A = Avi. = Avicenne (ou Avicene)
G = Ga. = Galien
Y = Yppo. = Hippocrate
Ouvrage de Bernard de Gordon
Imprimé l’an 1495
Ex libris P C Marchant
Doctoris medici Biscuntini
« Cet ouvrage le plus étendu, le plus clair et le plus méthodique qui soit sorti
de la plume de Gordon, est un traité complet de la manière de guérir toutes les
maladies alors connues. Production supérieure à tout ce qui avait paru dans le
genre, elle fut justement admirée, et plusieurs fois imprimée.
Cette édition est rare, elle se trouve décrite dans L’esprit des journaux, de
février 1781, page 281 »
127
Le premier livre
[folio 1R] Cy commence la pratique de tres excellent docteur et maitre en
medecine, maistre Bernard de Gordon, qui s’appelle fleur de lys en medecine.
Socrate fut interrogué et aulcun demandé comment on pourroit tres bien dire.
Et il respondit « Se tu ne dis fors ce que tu scauras tres bien, certainement nous ne
scavons nulle chose, fors ce que nous disons souvent, est ce qui est commun, et ce
que tout homme reçoit. Et pour ce que la povreté ou faiblesse de l’engin ne peult
soustenir choses difficilles et estranges, pour ce j’ay fiance au Seigneur des sciences
a faire et traicter aulcunes choses communes et profitables pour le proffit de ceuls
qui sont humbles, c’est assavoir ung livre pratique. Et pour ce qui je escrips aux
humbles, ceux qui sont orgueilleux en sont déboutés et leur convient separer des
aultres, car ils desprisent les escrips communs, et ont vergoigne de dire une chose
puisqu’elle est dicte une fois. Et toute fois, dit Seneque, que une chose n’est pas trop
dicte quant elle ne fit pas asses dicte. Et Orace dit que une chose peult estre
recordee dix fois. Donc pour ce que la memoire de l’omme est foible, je n’ay point de
vergogne a dire et a repeter aux humbles aulcunes choses communes de pratique,
c’est assavoir de medicine et de cirurigie, car si comme dit Galien au livre qui
s’appelle De ingenio sanitatis. Nul ne se peult mieulx approcher a Dieu que en
estudiant en verité et pour verité. Donc en l’onneur de l’aignel celeste qui est
splendeur et gloire de Dieu le pere, je intitule et appelle ce livre cy Fleur de lis de
medicine, en latin lilium medicine. Car au lis sont plusieurs fleurs et en chascune
fleurs sont VII fueilles blanches et VII grains ainsi comme dorés, et semblablement
ce livre contient sept parties. La premiere est d’or clere et respendissans, car elle
traite des maladies universelles et commence aux maladies de fievres. Les aultres VI
parties seront blanches et transparans par leur grant demonstrance. Ce present livre
fut commencé par la grace de Dieu au noble estude de Montpellier, apres ce que je
eux leu par l’espace de XX ans. Ce fut l’an de Nostre Seigneur mill.ccc. et trois au
mois de juillet. La premiere partie de cestui livre contient XXX chapitres comme il
appert cy apres.
128
Le premier chapitre parle de fievre en general.182
Le second parle de fievre effimere.
Le tiers de fievre causone.
Le quart de fievre tierchaine.
La V de fievre sanguine.
Le VI de fievre quartaine.
Le VII de fievre cotidiennes.
Le VIII de fievre composte.
Le IX de fievre etique.
Le X de fievre pestillenciale.
[Folio 1V]
Le XI de sueur.
Le XII de vairolles.
Le XIII de vermes et enveninemens.
Le XIIII de morsure de serpens et des aultres bestes venimeuses reptiles.
Le XV de pointure de mouches qui s’appellent veppes especialment de leur
morsure.
Le XVI de morsure de chien enragé et de maladie qui s’appele ydrosorbie.
Le XVII parle de douleur
Le XVIII des apostumes chaulx, engendrés par voye de adustion avec les
dependances.
Le XIX de veruques, de porreaux, de acrocordines et lupins et semblables de
antrac ou charboncle.
182 Ajout à la main : « et des fièvres de Saint François ».
129
Le XX des apostumes frois
Le XXI de lepre
Le XXII de morphée
Le XXIII de scabie
Le XXIIII de pustulles
Le XXV de playes et de solution de continuité.
Le XXVI de flux de sang qui flue trop abondamment
Le XXVII de maladie des ongles si comme panarice, spasme, lepre et ongle
blanc et de macule putrifiée et de fendures et des semblables.
Le XXVIII de arsure de feu ou d’eau chaulde ou de fer chault
Le XXIX de ragadies et des ulceres des piés et des mains.
Le XXX de messagiers et de ceux qui cheminent par chemin.
Le premier chapitre parle de fievre en general.
Fievre es chaleur innaturelle muée en ardeur. Toutes fievres sont chauldes,
mais non pas de chaleur naturelle, car chaleur naturelle est conservatrice : et chaleur
non naturelle est destructive et corruptive et est ardant et adustive, car aultre chaleur
qui vient ou par yre ou par labeur ne fait pas fievre mais grand mutacion fait fievre et
a donc les operacions naturelles sont blecées sensiblement. Donc comme il fait ainsi
que fievre soit propre passion de cueur : et que le cueur soyt embrasé et enflammé,
les espris de vie qui viennent du cueur et yssent avec sang ils vont par tout le corps
et le eschauffent hault et bas comme en lipie et es semblables. Car fievre est plus
griesve maladie de toutes : si comme G183 le dit au VIIe du livre qui s’appelle De
ingenio sanitatis. Et pour ce, nous voulons commencer a maladie de fievre, et pour
ce, tu dois scavoir que sont trois manières de fievres : c’est assavoir fievre effimere
130
qui est es esperis de vie, fievre putride qui est es humeur et fievre etique qui est es
membres fermes et solides.
Item fievre ont quatre temps si comme ont les aultres maladies, c’est
assavoir : commencement, accroissement, estat et declinacion. Et qui vouldra
scavoir les differences et les gendres et les manieres et aussi toutes les especes de
fievres et la congnoissance des temps des maladies [folio 2R] ainsi que elles sont
distinguées et divisées par la digestion et par les peroximes si voyse a nostre livre de
prenostication : car en ce livre la, par la grace de Dieu, nous avons mis et assemblé
les dits de Avicene, de G et de Ypocras et des aultres dont nous voulons commencer
a fievre effimere.
Cy parle de une fievre qui s’appelle effimere. (Cap. II)
Effimere c’est une fievre qui vient par destemprance des esperis et selon la
nature, elle ne s’estent pas oultre le tiers jour. En ceste matiere, tu dois entendre
cincq choses. La premiere est des causes de effimere. La seconde est des signes.
La tierce est de la prenostication. La quarte de la cure. La quinte de la clarification
des dictes maladies, non obstant que de fievre effimere soyent plusieurs causes
comme est fluc de sang, trop rafaiter, ire, gloutonnie, faim, trop veiller, lincopie, et
plusieurs semblables. Toutes fois, toutes ces choses on peult ramener a quatre. La
premiere chose de effimere est choses extrinseques et foraines eschauffans ou
estoupans actuellement ou potentiallement les pores si comme est chaleur de soleil
ou de feu ou de baing ou de estuves avec choses chauldes ou par eaue froide et
briefment pour toutes choses qui cloent porres et retiennent vapeur.
Et pour ce, tu dois scavoir que selon la diversité des vapeurs et des corps sont
engendrées diverses fievres car se le corps est chaults et sec : et que les vapeurs
chauldes et seches sont retenues par ce que les pores sont cloz ou par aultre chose
semblable, a donc legierement s’engendre fievre effimere. Et le corps est chault et
moiste et vapeurs chauldes et moistes soyent retenues : a donc legierment en vient
fievre putride. La seconde cause de fievre effimere ce sont viandes, beuvrages et
medecines chauldes, si comme vin fort, pur et viel aux oignons porrés euforibium et
les semblables mesmement en ceulx qui ne l’ont point acoustumés. La tierce cause
est mouvement et eschauffement de corps et de voulenté, si comme labourer,
couroucer et les semblables. La quarte cause ce sont apostemes des inguignes et
131
aisselles et les semblables. Et s’il y a aucunes aultres causes elles pevent estre
ramenées es causes devant dictes.
Les signes de fievre effimere aucuns sont generauls, aucuns sont especiaulx.
Vecy les generaux. Effimere ne vient pas par choses antecedentes, mais choses
primitives et communement elle ne vient pas avec rigour. Le poulx et l’orine ne sont
pas trop bons de chaleur naturelle : ne la chaleur n’est pas pongitive ne mordicative
au taster, ains est ainsi que chaleur de homme couroucé ou qui a trop labouré. Et
communement elle se termine de sueur humide naturelle. Et dit Avicenne que se on
met ung tel malade en ung bain et quil ne luy viegne, aucune horipilation ou hirsure
c’est signe de effimere.
De cy les signes especiaulx se effimere vient par chaleur de soleil ou par
chose semblable, a donc la teste est [folio 2V] chaulde et les yeulx et se on taste la
face le cuir et le pouls, ils se debatent et esmeuvent de plus en plus. Mais se la
fievre vient par trop grant froidure, la beaulté de la face se mue et devient livide et
s’elle est causée par choses stiptiques et opilatives, on sent le cuir sec et ainsi
comme estendu et son sent le cuir, on sent ainsi que chaleur occulte et se on tient
longuement la main sur le cuir on sent chaleur ague. Et se elle vient par viandes ou
par beuvrages a juz, on sent chaleur entour la region du foye et l’orine est tainte. Et
s’elle vient par labeur et par travail, on a foiblesse par tout le corps et douleur es
jointures. Et se c’est par ire ou pas couroux, les yeulx sont apparans et engrossis et
la face est rubiconde, et se c’est par tristesse, les yeulx sont concaves et enfossez et
se c’est par luxure, on sent les choses de dedens chaudes estendu et deficatives. Et
se ces signes si especiaulx ne souffisent nous recourrons au jugement du patient.
Item des choses primitives on ne doit pas faire grant compte car les engins de
curer maladies ne viennent pas des causes primitives, mais viennent de l’essence et
nature de la maladie ou du membre. Si comme le tesmoingne Galien prince des
medecins, au vuitiesme livre de ingenio sanitatis au troisiesme chapitre. Nonobstant
que aulcuns se pensent bien avoir fait une grant philosophie se ils peuvent devenir
es causes primitives par les signes du corps, mais cecy ne fait rien a la cure,
touteffois il fait bien a avoir aulcun congnoissance. Et vecy exemple : prenons que le
cuir du patient effimere soit dur et aspre, et roide et opilée, donc se on congnoisse la
maladie, le medicin doivt eschauffer, subtilier et couvrir par quelconque cause que
132
soit ou par sumac, ou par galles, ou par galbanum, ou par baing d’eaue froide, ou de
vive, ou semblables. Donc quant je cognois la maladie, je la puis curer par quelque
cause que ce soit et ainsi les causes primitives ne font riens a la cure, non obstant
que elles vallent a cognoistre car puisque reste que aulcuns sont baigniés en eaues
stiptiques, je scoy que les porres sont espessis.
Pronostication, Fievre effimere, selon Avicenne est de legiere cure et de
difficile congnoissance et celluy qui la congnoist peut dire cest fievre sera bien et tost
terminée, car « effimere » de sa racine « ne dure pas oultre », ung jour naturel et est
dicte de « essimon » en grec qui signifie « ung jour », « poisson » en latin car, le dit
poisson meurt le jour qu’il naist, et ainsy est il de ceste fievre car sa nature elle ne
dure pas oultre XXII n heures. Et a donc elle se termine par sueur vaporative, non
pas trop. Touteffois pour la malice du regime et par la nature du corps, cest fievre
dure jusques au second jour ou jusque au quart et quant elle passe ce n’est pas
effimere.
Item se elle ne pose apres le escay, le poulz est divers et la orine indigeste,
c’est signe qu’elle est passée en fievre putride, meismement quant ce qui y sont du
corps est moult puant. Et le corps est sec et aride au taster cest double de fievre
ethique et non fievre effi [folio 3R] mere donc.
Cure. Donc a curer fievre effimere du commencement, on donne viande de
legiere digestion, si comme est orgiat ou une petite poulle et vin blanc avec plante
d’eau et ne doivent point mengier jusques en la declinacion de la fievre. Touteffois, tu
dois scavoir que ceux qui sont atenuis on doivt aultrement ouvrer, ce dit G au livre
De ingenio sanitatis. Car se le patient collorique, megre et atenues qu’il aye moulte
labouré et aye esté au soleil chault ou en chose semblable et la fievre le preigne en
nulle guise on ne lui doit faire tenir diette ou jeune de troys jours. Ainsi tantost, on luy
doit bailler viande ou il cherroit en ethique ou il mourroit, et s’il est de forte vertu on
ne le doit repaistre devant en declination et ainsi patiens qui ont effimere se
conviennent en plusieurs choses, et aussy se convienent en baing car en declinacion
tous ceulx qui ont fievre se peuvent baigner. Toutes fois ceulx se doibvent garder qui
sont enclins a fievre putride si comme sont opileis remplis et qui ont crapuleis et
ceulx qui ont catarre. Se le catarre n’estoit adjusté si comme le dit Avicenne, car en
tel caterre on peult faire baing en declinacion.
133
Item on peut faire cure especial car on fait aultrement en malade chaulx,
aultrement en frois, aultrement en opileis, aultrement en non crapuleis. Donc se
aulcune ont fievre effimere par causes chaudes, il doivt user de choses froides et
speciallement en la teste s’il vient par eschauffement de soleil ou ire et par choses
semblables.
Donc ce, c’est catarre « (…) sandalorum…camomille…IIaque…in
aceti…rosarum... » bulliante l’eviter una undatione et en faictes aulcunement au
patient recepvoir la fumée. Et se la douleur estoit au chief moult grande avec grant
chaleur et qu’il ne peust dormir «(…) seminis papaveris albi…in albi…aceti aque
rosarum…succi latuce patulace…semis ». Et les meslés et mettes au feu ainsi qui
appartient et y boutez des drapeaulx et les mettes au front du patient.
Item l’air de la maison soit aulcunement refroyde part grant plante d’eaue et
par fueilles de saulse et aussi par bon vin aigre et par nenufar et par les semblables.
Le lieu doivt estre sur terre et pas romatique et la porte et les fenestre soient devers
septentrion. Mais en declinacion de la fievre on le doivt baignier en eaue doulce en
laquelle soyent roses, camomille, mellilot et nenufar. Et puis on le doit repaistre
d’orgiat, d’avenat ou de amidon ou d’une jeune poulaille et des semblables et doit
user de vin blanc bien foible avec d’eaue et soit tout refroidie et mis au millieu d’ung
parfont puis d’eaue doulce et puis doivt dormir et reposer. Et se la fievre estoit venue
par froidure et par les porres qui furent cloz, on les doit mettre en maison qui soit
atremprement chaulde et couvrir competamment et le doivt on froter doucement. Et
en declinacion s’il y’a opilation [folio 3V], on le doit froter et faire suer en air chault et
puis le doit on mettre en eaue avec camomille et mellilot et luy doit on faire menger
agnaulx jeunes ou poussins et vin, se on avait doubte de forte opilation et de
repletion de corps. Et doys entendre que ou est forte opilation et repletion se on se
doubte de fievre putride, adonc on doit faire fleubotomie, mais regulierement en
aultre fievre effimere ne compte point evacuation se ce n’est en crapule ou en patient
qui soit fort opile et remply. Et se l’effimere estoit par viandes chauldes, on doit
mettre choses froides sur la region du foye et ce c’estoit par chosesd froide et avec
revme on doit suffumiguer le chief de encens avec ung petit de roses et ce c’est par
ire on le doit faire estre doulx et debonnaire. Se c’est par tristesse on luy dit faire joye
et lyesse, se c’est par faim on lui doit donner a menger attemprement ainsi qu’il
appartient et se c’est par sincopim, on doit conforter les membres principaulx et ainsi
134
des aultres par leur contraire, mais pour ce que effimere qui est avec opilation meine
souvent a fievre putride pour ce on doit seigner le patient et froter et puis estuver et
froter avec farine d’orge et de ceses de feves et de mitre. Et, s’il avenait qu’il eust
aucune horipilation, il ne doit pas estre en baing dit Avicenne. Et il avoir crapules il se
doit fort travailler ou estre au soleil chault, et se les veines sont estroites et qu’il face
une reupe fumeuse on se doit doubter de fievre putride, mais il advient peu souvent
en eructuation s’elle n’est aceteuse. Adonc se la viande est en l’estomac, on doit
vomir et apres se le ventre n’est lache, on doit faire suppositoires ou clysteres et en
declination baings et puis donner viandes, car longue abstinence luy appartient en
crapulle nauseative se la matiere est digeste on peult faire fleubotomie et se la fievre
est lache on doit conforter la digestion de l’estomac par dyacrion pipereon et luy doit
on donner poissons de gravelle, mais au patient qui crapulle et vomit la meilleur
medecine, c’est s’il a fluc de ventre voluntairement. Mais se c’estoit par aposteme
des enjunctiones des membres principaulx ou pour furoncles ou pour scabie ou
chose semblable, on luy face tenir abstinence et face fleubotomie et prengne
medecine et soyent cures ainsi qu’il appartient, si comme nous dirons en leurs lieux
et pour ce qu’on appelle pou souvent le medecin pour fievre effimere, je n’en vueil
plus parler di celle.
Pour declairer ce que diste est et plusieurs choses qui sont a dire, tu doys
entendre briefment selon l’entencion de G en son premier livre des differences de
fievres en corps humains ne sont que trois choses : c’est assavoir membres solides
humeurs et espris et selon ce sont diverses fievres, car se les membres solides se
sureschauffent.
Premierement et subjectivement cest fievre ethique et resemble a de baing fait
en paroit ou en estuve selon Avicenne. Mais se les humeurs se eschauffent
premierement et subjectivement, ainsi vient et est fievre putride et ressemble a l’eaue
du baing. Et se les esperis [folio 4R] se eschauffent premierment et principalement
ce sera fievre effimere et ainsi ils ne sont que trois manieres de fievres et ainsi il
s’ensuit que nulle fievre ne peult apres luy laisser effimere, mais effimere laisse bien
après luy autre fievre pour ce que en chascune fievre tout seschauffe, mais non pas
subjectivement et pour ce qui est en chose ferme ce qui est au subtil cessera.
135
Et ainsi se l’eschauffement des membres et des humeurs cesse tantost
cessera l’eschauffement des esperis, et ainsi nulle fievre ne laisse apres luy effimere,
mais le contraire peu bien advenir, car se calefaction des esperis cesse
subjectivement non pas pour ce cessera l’eschauffement des choses solides et des
humeurs et ainsi il appert que les autres fievres peuvent ensuivir effimere, mais
effimere ne peut ensuyvir les aultres.
Secondement, tu dois entendre que fievre est appellée chaleur innaturelle
pour ce ne sera pas cause et effec, car elle est causée de chaleur innaturelle, car la
chaleur qui est en la matiere est le cause et chaleur qui est actuellement enflammée
au cueur est l’effect.
Tiercement, tu dois noter que la chaleur naturelle et innaturelle pevent estre
tout ung en espece on en semblance, car c’est toute chaleur et est en ung lieu si
comme au cueur dont fiue chaleur ardant du cueur qui est embrazé, car fievre n’est
pas aultre chose que chaleur naturelle muée en ardeur et ainsi chaleur naturelle et
non naturelle pevent bien estre ensemble en corps mixte et pourtant ils engendrent
nouvelle espece si comme en fievre. Aulcuns vient qu’il y’a difference car l’une vivifie
et l’autre mortifie et ainsi et le peut estre ensemble car elle trait disposition naturelle
elle fait vie et digere la matière de la viande et de la maladie et quant elle traictera
dispositon innaturelle, elle corrumpt et mortifie.
Item suppose que chaleur et esperis se different et par adventure que non
toutesfois pour ce ne sera ce pas aultre fievre en chaleur naturelle et aultres en
esperis.
Item tu dois noter que souvent effimere vient avec apostemes des inguignes
et des aisselles et des semblables plus que a aultres grans apostemes, pour ce que
ce sont evinentoires des nobles membres et pour les esperis sont enflambés
legierement et y vient effimere car celle matiere n’est pas si putrifiée.
Les aultres apostemes, si comme sont feroncles et les semblables et scabie
sont engendrez le plus de matiere corrumpue et putrifié et mesmement quant cest es
parties de dedens et en tel cas s’ensuyt fievre putride et pour ce dit Ypo. en vubes
toute fievre est mauvaise fors effimere, car puis que la matiere est cause efficente
elle peche plus par quantité par sa male qualité.
136
Item tu doys entendre comment fievre vient par vomir, par tristesse, par
dormir par sincopim et par les semblables et si refroident. Si te dit que que c’est par
accident et mesmement il advient en nausée ou en vomir, en persone colerique ou
quelles fumés que sont chauldes et seches et agues si sureschauffent [folio 4 V],
mais en aultres personnes et en aultres cas c’est pour les esperis qui sont estrains et
par les porres si sont cloz et par choses semblables. Item note que effimere n’est pas
avec rigueur pourtant qu’elle n’est pas communement en matiere putride infecté et
horrible.
Item note que en effimere qui vient par chaleur on doit mettre fleurs froides au
lit, c’est a entendre de present entour le lit pour alterer l’air, non pasque les flours
touchent a la chair nue car ce seroit doubte que les porres ne se clousissent et de
fievre putride.
Item en cure d’effimere n’est pas bon de rafaiter affin que les esperis ne
senflamment. Et en ceste matiere ycy je ne vueil plus parler, j’ay paour que je ne
soye trop long.
De fievre appellé causon ca. III
Causon est fievre continue, engendrée de colle dedens les vaisseauls en
membre noble ou en lieu prochain du cueur. Fievre causonique ou elle est
engendrée de colle rouge pure ou de fleume salse en telle maniere que la colle
peche aucunes fois par raison de la qualité ou de la quantité ou l’ung ou de l’autre.
Dont elle se enflamme fort et comme colle rouge soit moult enflambée et plus que
autre, car elle est en l’estomac ou au foye, ou en membre prochain du cueur, mais
tiercheine continue est de matiere putrifiée es voynes qui sont loing du cueur et
causon est es voynes prochaines. « Causon » signifie embrasement et vient peu aux
anciens et se ils les ont c’est signe de perdicion et comomunement il vient es jeunes,
et quant les aultres choses particulieres y sont tant est il plus fort. Et aussy est il fait
selon Avicenne de fleume salse putrifié et enflammé en y ceulx lieux. Decy le
souverain signe grant embrasement en tout le corps sans repos et le sueffron a grant
peine avec maul, mais accident si comme est frenezie et mal dormir. Aulcunes fois
fort dormir, noirseure et seicheur de la langue, sincopim, ictericie, tremeur, fluc de
137
ventre, aulcunes fois retencion de la fiente, petit poulx hatif, urine rouge et subtille.
Touteffoys ce multiplie et se diversefie l’orine, car au commencement elle est crue
pour multitude de opilacion aucunes fois taincte pour la resolucion de la colle,
aulcune fois elle est livde et trouble par grant putrefaction.
Et se causon est de colle citrine ou de fleume salse toutes les choses seront
plus foibles et la douleur aussi et les aultres choses particulieres sont proporcionées
au fleumes et pour ce qu’il tourmente par XX VIII heures et aulcunes fois il semble
que elle soit interpolée par VI heures pour causes du temps d’yver ou pour ce qu’il a
fait dyette convenable ou chose semsible.
Pronostication. Ceste maladie est de briefve terminacion avec terribles
accidens et se tous bons signes apparessent au commencement de la maladie il
sera guerry au quart jour ou devant. Aulcunes fois, elle se estant jusques au
septiesme jour. Et ceste maladie ne peult souffrir fors accidens longuements. Les
bons signes [folio 5R] ne les maulvais il ne les fault pas mettre cy, car nous les
avons mis en aultre lieu et aussy met Ypo.
La cure. En la cure de ceste maladie y fault considerer les causes de la
maladie et le temps et la nature des accidens et pour ce que putrefaction avec forte
opilacion est cause de ceste maladie. Au commencencement, on doibt oster la
opilacion en frotant le pis, le ventre et les costes et les parties qui plus doullent de vin
aigre blanc et oly camomile et de eaue rose, en frotant doulcement et longuement.
Mais contre la maladie, il convient refroidir et estaindre la flamme de la chaleur et
ramener la grant subtilité de la medecine a aulcun moyen et c’est contre les
malefices et les farcinoux qui cuident que choses ingrossatives ne compettent point
avec chauses subtiliatives.
Decy, ung sirop : « (…) lentignis aque fontis portulace, ungule caballine […] III
(…) rubearum electarum (…) mucacelini spodii florum nenufar (…) I aque lib. (…) se
panis zuccre (…) I vini malorum granatorum (…) II fiat sirupus clarificatur sicut decet
et condiatur lento igni ». La matiere soit digerée et purgée « cassiaf(…) et tamarins et
mirabolans citrins » et les semblables. Et se c’est de fleume salse on y doivt
adjoutster « apium, brucus, speragus » et les semblables. Et est la medicine laxative
on y doit adjouster « mirabolis (…) » et doit on ordonner la cure selon le temps de la
maladie, car se la maladie se termine ou quart jour ou avant on ne luy doivt donner
138
nulle viande se la vertu le peult souffrir. Et s’elle se terminoit apres le quart jour et la
vertu fut foible, on luy doit donner viande selon la convenance des choses
particulieres.
Et vecy que on luy donnera : milgraine sirop iulep, tizaine d’orge coulée ou
non coulée, lait d’amande, du brouet de ceses, laitues portulaces, pain baignié en
eaue, du brouet de poule jeune cuicte avec plante de laictues, orgiat, avenat,
amandat, l’ung ou l’autre selon la discretion du medicin.
Et pour ce que aulcuns poulz sont fors lung plus ou moins selon la nature de
la age, de la complection du temps, de la region de la coustume et de l’office que a le
patient. Selon ces choses cy et aultres le sage medicin ordonne la diette et le regime
selon la doctrine de G. au livre du regime en celle partie Duo assumpto etc Et la
viande ne se doivt pas tant seullement ordonner selon le temps de la maladie mais
aussi le remede et la medicine.
Et pour ce que ceste maladie est perilleuse et vient avec terribles et grans
accidens et se doubtons la matiere de sinchonies en l’estat pour ce au
commencement cest bon de purgier : « florum boraginis florum violarum (…)
prunoruz triginta. Fiat decoctio et resolvatur in decoctione cassisa(…). Munda
thamarindotrum (…) » Et soit donnée au matin a l’aube du jour. Mais en l’estat ou
ung petit devant on ne doivt ainsi que rien fere, ne menger aulcune viande, ne boire
abeuvraige, ne medicine ne [folio 5V] aultre chose, mais en la fin de l’estat, se nous
voyons que nature soit endormie en expellant, bon seroit de esmouvoir nature et par
diverses manieres selon ce que nature se esmeut a divers eumentoires, car se
nature mouvoit la matiere en haut, adonc nous devrions ayder nature en boutant
soyes de porcs dedens les nazilles. Soudainement s’elle va a l’estomac fay vomir, se
aux intestins fay suppositoire ou crystere, se c’est aux conduis de l’orine fay
diuertique et frication entour icelle partie. S’elle va en tout le corps, aide nature par
choses attemprement chauldes.
On ne doit point faire saignée et s’elle doit estre faite, il n’avient pas souvent
pour cause de opilacion ou des aultes choses particulieres.
Dist est de la cause et de la maladie et du temps. Nous voulons dire des
accidens et premierement de frenesie selon G en toute maniere est mortelle. Dont au
139
commencement, on doit mettre sur le chief despuis la grant commisere du chief
jusques aux yeuls et aux oreilles estoupés de chesvene baignées en suc de lettues,
de morelle, d’eaue rose et de vin aigre et soit tiede. Et quant XXIIII heures seront
passées, on luy doit mettre sur le chief ung chiennet chault vif fendu parmi l’espine
du dos ou on y doit mettre le polmon chault d’ung mouton coullu et se vous n’en aves
assez si le reschauffez en eaue chauldes.
Et se la fievre cessoit et que l’alienation demourast pour la matiere qui y va :
on doit fomenter souvent le chief et laisser cheor de haults eaue de decoction de
camo184., de mellilot, d’orge, et de violette et des semblables. Et s’il y’avoit stupeur
pour habundance de vapeurs montans au chief, on luy doit fort froter les extremitez
et les doyt on fort loyer. Et s’il avoit fort veillé qu’il ne peust dormir, prennez farine de
poyure blanc et le destrempez d’eufz en eaue rose et boutez de drapeles dedens et
les mettez sur le front et sur les temples.
Contre soif et secheur de langue « (…)psilii et seminis citomo run cen. Fiant
sacculi parui » et soyent mis en eaue froide et les tenez sur la langue ou feuille de
bortoulages baignées en eaue froide : ou une piesse de pomme tenune baignée en
eaue froide et soit la langue baignée souvent d’eaue froide meslé avec vin aigre fort
et ainsi nettoier la langue et la bouche d’une cane ou d’une touaille et soit lavée au
miel mesle avec plante d’eaue et ung petit de vin aigre.
Item a la soif et a la fievre vault moult attraire air froit et doyes l’air refroider et
amoistir ainsi preng plante d’eaue froide meslée avec vin aigre et en arousez bien la
chambre et y mettez feuilles de vigne blanche et feuille de canes et de sauge et de
nenufar et des semblables. Et fait une forme pour cheoir l’eaue de hault toujours en
ung bacin et soit le buhot long et graille a ung chief comme une petite plume et gros
a l’autre et sera grant melodie au patient.
Et se icterici venoit devant le VII jour, si le commandes a Dieu et s’elle venoit
après le VII, elle soit curée ainsi que nous dirons cy après et luy doit on laver la face
de vin aigre blanc tiede et soit distillé aux [folio 6R] yeuls vin de pomme grenate
tiede.
184 Camo. pour camomille ?
140
Et se sincopin venait on le doit arouser de eaue rose et faire adorer camphore,
sandalz et plantage d’eaue rose et en doit on mettre sur la poitrine et luy doit on
donner pain baigné en vin avec plente d’eaue rose au acetosite citri. Ou prenés une
gelline et le lardés et rotissés, et getté par-dessus eau rose en laquelle soit ambre et
girofle et luy faites ung petit odorer et le faites estre ung petit au souleil et garder qu’il
ne si eschauffe trop et luy faites odorer sandalz, mutascelinos et luy frotes les
extremités et lui faites plusieurs aultres choses semblables. Et se le ventre estoit trop
lache, on luy doit donner de sirop mirtin ou sirop de citoniis. Et s’il estoit constipé, si
lui faites ung suppositoire ou cristere ou vous luy donnée sirops violatz ou les
semblables.
Declaration. Et vecy merveille comment en maladie de causon ou est
inflacion dernierement peult estre matiere crue. Je dy que ce peult estre pour
aulcune de ces quatre manieres ou c’est par colere citrine ou par fleume salse ou
crapule nouvelle peut estre matiere crue entour les premieres veines en telle
maniere que ceste matiere n’a point de subject de fievre mais colere rouge est
premiere putrifiée es lieux prochains au cueur et crudité est entour le foye.
De Fleume salse et de colere citrine, je dy que peut este grande putrefaction
et aussi forte chaleur et aussi opilacion grande ou pour ce que es veines du polmon
ou de l’estomac ou du foye ou es lieux pres du cueur et aussi grande inflacion, mais
crudité est par cause de matiere.
Secondement, aulcuns pourroient doubter des vues ou resine d’yver comme
ils peuvent appartenir car il y’a doulceur et si sont de dure digestion. Je dy que ils y
peuvent bien appartenir et competer ou pour cause de la soif pour ce que ils
refroident ou pour cause de fort appetit, si comme il est escrit : « parum deterior
cibus et potus etc. »
Tiercement, tu dois noter par maniere de question se colere se peult
enflammer en fievre sans putrefaction, ainsi que fait le sang en sinoque et sont
plusieurs opinions de medecins et la meilleur opinion est que non, car la colere est
moult loing de attemprance et quant elle surmonte, elle est detruite legierment et
putrifiée, mais le sang quant il surmonte, il peult faire fievre sans putrefaction, car il
n’est pas tant loing de attemprance comme est de colere.
141
Quartement, tu dois entendre que causon est maladie plus perilleuse es
anciens car feu est fort qui ne s’estaint en l’eaue. Mais en jeunes gens, causon est
plus perilleuse que aux anciens et plus perilleuse que aux enfans, selon Avicenne,
car j’assoit ce que es jeunes, il soit selon la convenance des choses particulieres et
de la cause et des choses particulieres antecedentes, toutes fois quant est des
choses particulieres et aussi subjequentes et communicantes la vertu de dissolve et
le corps aussi, et ainsi la matiere est moulte perilleuse es jeunes et es enfans a moult
de humidité qui resiste a grant chaleur dissolvant, mais il n’est pas ainsi es jeunes
gens.
Quintement, [folio 6V] tu dois entendre que bolisme peult estre en causon
pour cause de faiblesse de l’estomac de dissolucion du corps.
Item, tu dois noter que eaue froide peult moult valoir en causon ou cas que la
vertu soir forte et la matiere digeste et que la maladie soit en declinacion et que la
patient ne soit point opile et que la matiere ne soit crue et qu’il ne soit apostume, et
qu’il aye grant soif, et que l’eaue froide soit doulce, et qu’il aye acoustumes a boire et
que il boyve a une fois tant comme il pourra tirer sans reprendre son alaine et c’est
ce dist Ga. au livre du regiment.
Item, tu dois entendre que fleubotomie en ce cas selon mon advis ne se doit
point faire, car son ostoit le frain a la colere, la matiere se eschaufferoit et enflameroit
et ainsi elle seroit plus cursible de par aventure le corps n’estoit pletonique ou que il
fust souvent opile et les semblables.
Et ainsi recevons le conseil de Avicenne qui dit au chapitre fleubotomie que on
doit retarder tant que on peult.
Le IIII chapitre « de fievre tierchaine »
Terchaine, c’est fievre putride de engendre de colere incessivement.
Tu dois scavoir que colere est double, c’est assavoir colere rouge pure et
l’autre non pure par commixtion de fleume et l’appelle on colera nota.
Item, colere ou elle se putrifie dedens les veines et arteres et engendre
continue, ou elle se putrifie hors et engendre fievre interpolée. Donc tierchaine est
engendrée de colere rouge pure es veines et es arteres du corps, mais causon vient
142
de colere pure qui estes veines de l’estomac ou du foye ou es lieux prochains du
cueur et ainsi tout est par dedens en causon et en tierchaine continue et ainsi elles
sont curée par une maniere.
Tierchaine interpollée est causée de colere putrifié hors des veines et pour ce
elle a periodes et interpollations, car la matiere se putrifie quant elle est entassée et
qu’elle ne se peult eventer et qu’elle se destruit et eschauffe le cueur ou par la fumée
putride qui va au cueur et que l’une partie eschauffe l’autre, tant qu’il vient au cueur
et engendre la fievre, donc, fievre tierchaine continue est remise soubz causon, car
cy nous n’entendons plus a parler de la interpollée.
Signe, Les signes du tierchaine sont prins de choses naturelles pour ce que le
patient est jeune colorique et ainsi des aultres ou ils sont prins des choses non
naturelles et pour ce qu’il est en este ou que le patient a couru ou menge chose
chauldes et ainsi des aultres. Du ils sont prins des choses hors nature car elle
commence en rigueur ainsi que se on poignoit d’aguilles et adonc le poulz est
occulte et après hatif et tousjours égal, l’orine est citrie et tenue et se termine avec
plente de sueur. Les signes de tierchaine note sont aultres selon l’administracion du
fleume et la convenance des choses particulieres.
Pronostication, Tierchaine vraye est terminée en sept periodes audedens et
ainsi tierchaine terminée au XXIII jour ou dedens quatorze jours et se tourmente en
douze heures ou dedens et se interpolle XXXVI heures. Le premier periode est
faible. [folio 7R]. Le second plus fort. Le ters tres fort et la quart passe tout car la est
l’estat et sont a donc les accidens tres mauvais. Le quint commence a affaiblir et le
VI affaiblit plus et le VII est moult petit ou nul, au commencement du peroxime et
aussi en la fin est sueur.
Et pour ce que cest maladie vient avec terribles accidens et si ne peult souffrir
ignorance de medecin, ne la folie du malade, donc affin que nous puissons plus
honnestement resister contre les perilz qui sont a venir et que l’onneur du medecin
soit gardée, c’est bon de dire toujours les perils qui sont a venir. Donc prenons que le
medecin soit appellé apres la tierce proxime et il luy semble que on doit faire saignée
et que le sirop soit a administrer et soit fait ce que on doit faire selon la voye de
rayson et s’il n’a rien pronostiqué. Donc vient le quarte proxime qui est le plus fort
lors les gens d’entour diroient que la saignée l’auroit occis ou le sirop qu’il auroit
143
prins, et ainsi le medecin seroit blasmé, mais s’il dit les périls en chescunes maladie
il sera loé et non pas blasmé. Decy, donc regle generalle que le medecin ne doit
point ouvrer en aulcune maladie s’il n’a devant pronostication.
Cure. Donc a faire cure on doit considerer la maladie et la cause de la
maladie et la nature des accidens et le temps de la maladie et la nature des
medecins et des viandes.
On doit avoir plusieurs entencions, car en curant, on doit bien considerer la
cause et la nature de la maladie et distrasié donc, par cause de putrefaction ou de
corruption, on doit subtiler et donner medecine subtilatives et aperitives ; pour cause
de la matiere appartiennent medecines moyennement ingrossatives, mais pour
cause de la distrasie qui est froide et humide appartiennent medecines calfactives et
dissicatives. Et pour ce que les accidens sont plusieurs, si comme quant on repose
mal ou quant on veille trop et grant malice de souffrir la maladie.
Et pour ce a tels maladies appartiennent en aulcune maniere medecines
stupefactives et pour ce une seule medecine ne peult pas accomplit toutes ces
choses et pour ce il fault mettre plusieurs choses ou sirop pour les causes cy devant
dictés et aussi au chapitre de la tierchaine vrayes.
Decy le sirop : « (…) endivie (…) papaveris albi. (…). Fiat siurpus clarificatus
(…) » et quant la matiere sera digeste, on la purgera par telle maniere : « florum (…)
florum violarum, (…) fiat decoctio et in decoctione resolvatur cassia (…) mundata
tamarindorum, (...) » et soit donnée devers le matin. Mais pour cause des accidens
commencons aux plus legieres est assavoir quant est des veillés. « Olei rosarum,
olei nenufaris, aque rosarum, aceti albi, albuminis ovorum. Lactis mulierum quantum
de omnibus misceantur » et puis cecy bien chault. [folio 7V] boutés de drapeaulx et
les mettre au front et aux temples pour faire dormir. Et ce ces choses cy n’y valent on
doit montrer petit a petit a plus fortes choses, si pouvons mettre avec ung petit de
papaver car pour cause de son anarcosité et il est domestique, ce dit Avicenne et
puis pouvons aller au suc de laitues, de mourelle, de mandragore et de juscquiame
et semblables, et aussi y peult on mettre opium avec saffran et se repose et « rubea
trociscata ». Et s’il avait veille avec douleur de chief, il doit odorer camphore, vin
aigre, eaue rose, sandalz, camomille, meillilot et les semblables qui dessechent
matiere humide et se le patient avais stupeur, on doit froter les extremités fort et s’il
144
vomissait et qu’il eust mal reposé et clameur resonant avec malice de souffrir, on le
doit suffumiguer de narcotiques et pour cause de opilacion et de putrefaction, on luy
doit froter ventre de vin blanc et de vin aigre blanc et de huile de camomille et de
eaue rose. Mais des aultres accidens, on doit faire ainsi que dist est causon. Les
electuaires peuvent estre succre, « ros.viol.diagragantum frigidium.triasandali.diapa
paver » et les semblables.
Et se ce estait tierchaine, noté que on doit mettre avec les choses devant
dictes « apium, bruscus, speragus », et les semblables, selon la convenance ou
concordances des choses particulieres. Et c’estait femme ou fleumatique ou s’il estait
temps d’iver ou grant opilacion on y pourroit adjouster « radicem, feniali, petro,
lactuce, spicenardi, scolopendrie, lupulus » et les semblables.
Et en la medecine evacutive nous y pouvons ajuster « (…) reubarb, diagredi »
et les semblables selon la convenance des choses particulieres. Je n’en vueil pas
plus nommer, ne traicter pour cause de briefveté. Et de, nous parlons de la cure pour
cause du temps de la maladie. A donc, tu dois entendre que quant est de de la
nature des medecine que au commencement on doit donner aulcunes medecines
legieres et laxatives, si comme « cassia fistula tamarindorum » avec decoction de
prunes, de viollettes. Et apres le tiers acces, on peult faire saignée et se il y avait
aulcunes choses particulieres qui se concordassent si comme est force vertue :
replecion de corps en estat on ne doit rien faire, ne donner viande, ne aultre chose
medicinale se aulcune chose n’y contredis, si comme chose sinchorace et plente de
resolucion et les semblables.
Item des viandes, on en donne plus ou moins selon ce que l’estat se eslonge
plus ou moins, mais par comparacion au peroxime qui est devant l’acces par trois
heures, par devant on ne luy doit donner nulle viande : ne en l’acces aussi jusques a
tant qu’il vienne a manifesté declinacion. Se affaiblissement ou liquefaction du corps
ne l’empesche ou deffende et lui doit on deffendre le dormir au commencement de
l’acces se la douleur des accides ne l’empechait. La viande que luy appartient est si
comme dit est en causon. « Orgi, avena, amidon, .artemasia. Spinar… lavées en
eau froide, lactues portula...cucu, cocombre » : cahourde de prunes meu. poires,
pommes cuites, brouet de cezes, broet de poucins [folio 8R] ou de poulles, lait
d’amandes, poissons de gravelles et les semblables.
145
Item tu dois scavoir que huilles et fruis on humeurs aquatiques et putrefactives
et pour ce est bon a luy obstenir, mais peu souvent, on voit obeissans pour ce il
convient plusieurs choses considerer a ouvrer de diverses choses selon la diversité
des choses particulieres, donc venons es choses qui font de l’art le mieux que nous
pouvons, car la maniere du regime vient selon la venue des choses particulieres. On
pourroit dire en quelle fievre est plus grant putrefaction, je di que se nous parlons de
grant putrefaction quant es accides qui sont fors et furieux, plus grant putrefaction est
en fievre colique et se nous parlons de grandesse quant a continuation sans
interpolation.
Je dy que plus grant est en fievre sanguines. Et se nous parlons de grandesse
quant a continuation, et a force de esrachet plus grant est en fievre fleumatique en
melencolique.
Item on peut demander se vomir est bon en tiersainne. Je dy qu’en tiersainne
et en toute fievre interpolée c’est bon vomir au commencement du proxime, car
sensibleté touche proxime en en alegé et mesmement, quant on vomit de volenté ou
par manière legiere et qu’on purge aulcune chose de la matiere antecedente, car
nature pourra mieulx ouvrer sur la matiere, conjoinctement selon l’entencion
d’Avicene, au chapitre de fievre quartaine, et aussi le dit Ypocras qui dit : « ubi
chotidie rigores fiunt etc » c'est-à-dire sont rigoures, chacum jour la s’aperceut fievre
chacum jour car apres rigour vient sueur et egestion et les semblables. Et ainsy le
corps est mundiffiés et celle la fievre et verrons sensiblement que quant aulchun a
fievre interpolée et que ou proxime n’a nulle evacuation et a donc au temps de
l’interpolation, le patient est tout pesant et petit alegiés. Et s’il avait esté au proxime
mundifié au jour de l’interpolation il luy semble qu’il soit du tout sane.
Donc, c’est bon qu’au commencement de la rigour, on le face vomir
atemprement et ainsi est ce en la fin du proxime de souffrir la sueur.
Item on puet faire doubte se oxizacra et sirop acetoux sont profitables en
tiersainne, car il assubtillent et la matiere est subtile, nous avons cette matiere
determinée.
A nostre entention, faire amphorisme «quibuscum que in causon etc ».
Toutefois, je dy en matiere subtile n’appartiennent pas medecines, ne choses
146
subtilles, ne subtiliatives, quant est a leur digestion selon ce que le determine
Avicene au chapitre de cure de fievre putrie en general, ainsy appartiennent choses
ingrossatives. Et, dit Avicene que ceulx qui dient le contraire ne doibvent pas esté
oys. Et aussi, se dit G. au XII chapitre du livre d’Inge.sanitatis, mais en tiersaine
quant est la reduction de la matiere et de la discrazie n’appartiennent pas choses
froides et seches, mais froides et moistes, et pour cause de l’opilation et de la
putrefaction y peut apartenir oxizarca et sirupus acetosus. Et pour ce avec eulx, on
peut rozes et spodium et les semblables, si comme dit est au chapitre de causon et
pour ce ma constume si est ce que en telz cas je y ajouste siropum violarum. Donc
pour cause de la age du sexe ou du temps [folio 8V] ou de la complexion ou de la
duresse des entrailles et opilation et des choses semblables, les acteurs y font
mettre oxizacra et sirupum acetosum. Mais quant est pour la matiere et discrazie, il
n’y appartient point de ceste matiere. Sont diverses oppinion et je m’en rapporte aux
maistres qui scavent ouvrer.
Item, on peult doubter se l’eschile se peult putrifier de la fievre car les acteurs
ne font point mention de fievre putride, si non des humeurs. Et je dy quant a present
que l’eschile et les humidités tiersses se pevent bien putrifier, car putrefaction est es
humeurs et en choses liquides qui ne se dissolvent pas et passent en nature
d’aulcune humeur non naturelle par maniere d’aulcune ebulition de calefaction et de
adustion et ainsy fievre putrides sont fievres hummorales.
Item on peult demander se quant une humeur est corrumpue se les aultres le
sont, puis que elles sont ensemble. Je dy que ce n’est pas choses necessaire pour
ce que les humeurs sont distinguées par leurs propres fourmes et par propres sieges
et par leur propre mouvemens et a chacune font regime, sa proprieté et son propre
attemprement et ainsy une humeur peult perdre son attemperance et la tremperance
de l’autre ne sera pas perdue et pour ce ce n’est pas necessite que se une humeur
est corrumpue que les aultres le soient. Item on peult doubter se melencolie ou
matiere est corrumpue que les aultres le soyent car il y’a fort (…). Je dy si comme dit
est que se (…) est corrumpue pour ce ne le (…) pas les aultres car les choses
particulieres qui font avec l’un ne sont pas avec les aultres.
Item tu doibs noter, que quant une humeur est corrumpue et putrifié en chair
en l’estomac ou foye ou au poulmon et briefment en quelcunque convavité quant ce
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n’est pas de nature se il n’y a point de eventation ne de regime, elle se corrumpt la et
y’a manière de putrefaction. Et doibs scavoir que tiersaine vraye engendrée de cole
naturelle vien plus en regions froides. Mais tiersaine note qui est causée de cole
innaturelle vient plus en region chauldes, car elle est causée de chose qui sont sans
nature. Et pour ce tu dois scavoir qu’en tiersaine sanguine peult bien apartenir apres
le tiers ou le quart perihoime, car aultrement jamais la matiere ne devendrait curable
et seroit faicte de fievre simple double et double continue, si comme nous le veons
souvent, et ja soit ce que la sanignée ne evacue la matiere conjoincte toutes foys,
elle evacue la matiere antecdente.
Cy parle de fievre nommée synoque.
Synoque est fievre continue causée de sanc putrifié dedens les vaisseaux.
Mais sinoqua est fievre continue qu’est proportionée a fievre effimere causée par
habundance de sanc. Tu doibs scavoir que quant aulcune est accoustumé de
esbastre et il le laisse soubdainement et il use de plante, de viande mesmement qui
engendre sanc bon ou sanc aquatique, qui est engendré de fruys. Se de tel chose
ou de semblable habunde [folio 9R] le sang, s’il habunde trop, il engendre fievre
continue qu’est semblable a effimere, causée de sang non putrifié er se dont tel sang
on fait sangnié, il ne cherra point en putrefaction sicomme G le dit au IV livre de
Ingenio sanitatis.
Mais si le sang habunde, il peche par cause de la quantité et don sa male
qualité, il engendre continue de sang putrifié qui s’apelle synochué. Et a III espaces
la premiere est s’appelle a numentifica qui va toujours en croissant et en montant car
la dissolution est plus grande que la resolution est la pire de toutes la seconde
espece est appellée permastica. Va toujours en devisant et est la meilleur de toutes
car la resolution et consumption est grande que la dissolution.
La tierce espece est appellée homotena et la, toutes les choses sont egales
toujours est en l’estat, car autant grande est la resolution que la dissolution et pour
ce dit G au second chapitre de Cresi que il ne peult faire seullement fievre singuliere
simple toujours est elle composte, car quant le sang se putrifie l’une partie se puertit
en cole, l’autre en melencolie et pour ce il ne met que VI especes de fievres simples
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singulieres. C’est assavoir fievres qui est proportionnée de cole et fievre qui est
proportionnée de fleUme, et fievre qui est proportionnée de melancolie.
Signes des signes, aulchuns sont antecedens, aulchuns presens, et
aulchuns subsequens.
Les signes antecedens, c’est gravité de Ceste inflation ou enfleure des
espaules, repletion de veynes, rougeur de face, douleur et tourment de tout le corps
et les semblables.
Les signes present c’est douleur du front, aparence de lampes ardans, petite
frenesie, turbation de pensée tenebreux, les yeux, le poulz plain ou rempli.
Unctuosité et diversité et douleur de la bouche, orine rouge, espelle livide et puant.
Les signes subsequens est face enflée, moleste de tout le corps, aulchune
fois viennent morbille et vairoles, et carbonde et sont moulte mauvais signe qui
souloyent venir en temps de ces signes demonstrant que le sang est putrifié et sont
affaiblies en sang non putrifié, car ils sont proportionés a effimeres.
Pronostication. Ses pustules livides y aparent ou noires signifient mort.
Item se ou ventre on oit son comme tonnoirre, si comme di Avicenne, se
larmes apparaissent pour la grande et mauvaise malaise de la maladie et repreignent
fort a malaise son alayne et qu’il oye prefocacion et apostemes grandes aux veynes
de la canne : et s’il se sent aulcunement grevé apres dormir tous ces signes en
quelque manière que ce soit signifient mort.
Aparence de tardive ou de legiere digestion ou ingestion signifient maladie qui
est appelée crysie brief ou long incontinent, salut ou mort en raportant a la vertu.
Et pour ce en toutes maladies quelcunques quelle soyent, on doyt bien ces
choses diligamment considerer et mediter car selon ce on saura prenostiquer et
bailler diette ainsi qu’il appartient.
Cure, toute la cure et le regime de cest maladie est bien presques en donnant
la saignée. Et est ainsi l’entencion [folio 9V] de G au IX. Livre de Ingenio sanitatis
que on face saignié jusques a sincopim et reprent les hommes qui ont paour de cela.
Et me semble que c’est plus seur de faire la saignié a plusieurs fois, tant que la
149
matiere defaille et non pas le malade, car je ayme mieulx que la maladie soit ung peu
alongié, que on deist que je l’eusse fait mourir, car les signes de forte vertu decoivent
aulcuneffois. Donc, se la vertu est forte et que les aultres choses particulieres si
accordent faictes saingnié au matin et au soir par plusieurs fois et se on ne le faisoit
et fust au VI jour ou en quelconque heure que ce fust selon G au IX de Ingenio
sanitatis, on face ventouze entre les espaules, se les choses particulieres ne se
accordent. Et s’il y avait crapule, on face fricacions vers les extermités et forte
astinence et faictes suppositoires et cristeres, et ces choses sont bonnes en ce cas.
Et quant la crapule sera digeste faictes saignié, donc faictes lui verser de sirop « (…)
scara… nenufar, florum, violarum…granatorum panis zuccri…fiat sirupus. Et s’il ne
povoit dormir, si mettes au sirop « Paveris albi ». Et s’il a tous ostés le vin de pomme
grenates et y mettre une passe « mundate ab arillis (…) sebesten ». Et il avait
passion cardyaque, si y mettes roses (…) spodium coriandrum. Et s’il avait
constipacion, si y mettés de prunes avec cassis. Et aussi on y doit mettre plusieurs
choses diverses selon la diversité des accides. En veille, sil ne peult dormir, faictes
ainsi que dit est devant et en stupour ainsi que dit est. Et s’il a grant soif, faictes
sachés de persilium ou faites telle pillules (…) et en mettres dessoubz la langue et
desus. Et tenes le ventre lache de « cassiaf, manna, amarindarum et prunis » ou par
ocristi laxatif dya prunis tres sarracoita. Et la maison soit appareilliée, et l’air si dit est.
Item, donnés viande pou ou assés selon la languesse ou briefveté de la maladie.
Donc on luy donnera orgiat avenant et mie de pain lavée trois fois en eaue lait
d’amandes avec mie de pain et pommes grenates et meslées ensemble et si luy
peult on donner asizaccra sirupus, acetosus iulie Sirupus Violaceus. Sirupus
nenufare et aussi ydromel, si comme aulcune le vient supposé que ce feust ydromel
aquatique.
Mais maintenant on treuve hommes et femmes tant delicats, qu’ils ne
vouldriont riens prendre des choses devant dictés. Et ainsi que en peril, on leur otroie
a prendre brouet de petite poule et soit cuite en plante d’eaue avec une lectue ou
avec semence froide. Et se on leur octroye a prendre vin, si prennés. II. ampoules
l’une pleune de vin et l’autre d’eaue et mettes mes bouches l’une contre l’autre que
l’eaue soir taincte. Et quant elle sera taincte si en bonnes au patient et l’apellelon vin
franc ou mettes grant plante d’eaue bouillant ou vin ou vous luy donné ce breuvage.
150
[folio 10R] « aque font lib.aceti albi. lib. se. panis zuccri pulverizati. III.
Misceantur » et semblera estre vin francoys ainsy que vert, et garde qu’il ne soit trop
aigre, ne trop petit a l’espreuve beoir le pourras.
Clarification, se on demandait que l’engin de curer maladies est plus fort ou
celuy de la maladie ou celuy de la vertu. Je dy que le plus fort c’est l’engin qui est
prins de la maladie. Touteffois aulcune fois est plus fort l’engin qui est prins de la
vertu selon diver ses ententions. Pour ce, tu dois scavoir que ils sont plusieurs
engins de curer : aulcuns sont a digerer, aulcuns a conserver, aulcuns a evacuer,
aulcuns a donner choses semblables, aulcuns a donner choses contraires. Donc
aprenons que pour cause de l’age et de la vertu et de la coustume, on doye donner
choses semblables en fievre.
Et la fievre seulement commande a donner choses particulieres. Je dy en ce
cas que l’engin qui est prins de la maladie est le plus fort, car nonobstant toutes les
aultres choses particulieres on donra chose contraires, et pour ce dit G. au VIII de
Ingenio sanitatis que la consideration qui est prins de la maladie destruit et anienti
toutes les aultres considerations. Mais, se nous parlons de l’engin prins de par la
evacuation si que la maladie commandast a faire evacuation, et la vertu commandast
le contraire, en ce cas on doibt plus croire a la vertu que a la maladie, et c’est ce que
G. disait au Regiment que la plus subtile consideration est prinse de la vertu.
Exemple : fievre sanguine est toujours avec plante de sang et pour ce, quant est de
la nature de la maladie on doit faire saignié. Mais la vertu est faible et ne pourrait
souffrir la saignée. Et pour ce, en ce cas on doit plus croire a la vertu que a la
maladie. Nous avons ordonné la table des engins laquelle on doit bien estudier. Item
on peult doubter se le sang sue se putrifie. Je dy que oy pour II causes, car il a
humidité qui est matiere et si a chaleur qui est cause de putrefaction. Item on peult
demander se fievre interpolée se peult engendrer de sang et de ce, sont oppinions.
Toutes fois je treuve G au IX de Ingenio qui met fievre interpolée de sang et vyatique
aussy et asses rayson car il peult estre que le sang se putrifie loing du cueur, si qui la
chaleur ne peut venir au cueur et ainsy elle ne sera pas continue. Et aulcune foys, il
ne sera pas si loing que la chaleur ne puisse bien venir au cueur, et ainsy elle sera
interpolée.
151
Item on peult demander comment sont distingués les temps de la maladie
pour la diversité de leurs manieres. Je dy que nonobstant qu’ils ne soient pas
distingués quant a leur accident, touteffois ils sont distingués quant a la digestion.
Item se la saingnié n’a esté faite au commencement, s’il la faites apres, se la
vertu le peult souffrir, nonobstant l’oppinion de Serapion185 car G. le vuelt.
C’est le VI chapitre qui parle de quartaine.
Quartaine est fievre putride, engendré de matiere melencolique. La cause de
la quartaine c’est que elle multiplie matiere melencolique et la putrifié ce dyt Avicene.
Et dois scavoir qu’il est aulcune quartaine [folio 10V] continu et aulcune interpolé,
aulcune vraye et aulcune non vraye. Vraye quartaine est engendrée de melancolie
naturelle avec convenance en concordance des autres choses particulieres qui soit
melancoliers en temps de autom et qu’il aye mengié viande multiplians melancolie et
les semblables.
Non vraye quartaine est engendrée par melancolie par voye de adustion et
aussi peult estre adusté melancolie naturelle et fleume et cole et sang par trop grans
labeurs et par mengier viandes trops chauldes et par fortes maladies et par choses
semblables.
Signes. Elle commence avec froidure congelant et par horripilation et
confraction du dos, le poulz est occulte et petit et apres est plus hatif et se termine
avec plante de sueur, car la maladie est seche et ainsy ne demeure chose fumeuse,
ne adusté apres proxime, ains est du tout extirpée, selon G. au livre des fievres.
L’orine est remise et tenue au commencement, mais despuis le peroxime elle est
moult coulourée, pour ce que les vaines sont moult estroites et la façon est atenuée
et le temps qui est autom et les aultres choses semblables qui ont est esté devant et
dure l’acces XLVIII heures et se interpole XIV heures, mais les signes en quartaine
remisse sont bien congnus et varrient selon la variacion des humeurs, car se la
quartaine est de sang adustée une pleuce de poulz et une undée et l’orine se tire a
rougeur et spissitude, et le temps est de ver que on appelle printemps et devant
185 Sérapion : Ibn Sérapion, médecin arabe du IX me siècle, qui rédigea le « Kunnas », livre de médecine traduit par Gérard de Crémone au XII me siècle.
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furent maladies sanguines et les semblables. Et mesmement en fievre colorique sont
signes qui appartiennent a cole, c’est assavoir que on a eu maladie colorique, et le
poulz est hatif et l’orine est coulourée et tenue, et est le temps de esté, et amengier
chose chaudes et labourer au soleil et les semblables.
La quartaine de fleume a orine espelle et remisse et a molesse au poulz et
long a peroxime et petitesse de sueur. El selon la diversité des especes de fleume et
de cole, se diversefient les signes et ainsi de melancolie. Donc on doit considerer les
signes selon la diversité des humeurs et des especes.
Prenostication. La quartaine de sang c’est la meilleur et la plus briefve de
toutes puis celle de cole et puis celle de fleume et puis celle de melancolie. La
quartaine communement dure ung an, car ainsi que les maladies agues ensuivement
le mouvement de la lune, ainsi les croniques ensuivent le mouvement du soleil.
Aulcune fois elle dure par XXII ans, si comme le dit Avicenne. Toutes maladies es
quartenaires sont saluables et le quartenaires a moult de dignités car a peine est il
inaniaque ne melencolieux, ne ladre, ne spasmat de replecion, car toutes la matiere
melancolique est avec duresse de esplain ou de foye ou empostumes d’aultres
semblables et est tres maulvaise et maine ydrosipizie et est bon regime. Et si il tient
mal regime ce sera tres longue maladie ou mortelle.
Decy la cure, de cetste maladie on doit plusieurs choses considerer premier
que on ne donne point chose chaulde, car elle adurcit le sang et ainsi font mal ceulx
qui donnent [folio 11R] prassium ou poivre ou gingembre s’ils ne estoient represses.
Secondement, on ne doit pas donner choses trop froides, car elles congellent
la matiere et ainsi font mal ceux qui donnent suc de leictue et narcotiques.
Tiercement, on ne doit pas donner choses trop seches car la matiere est trop
seche d’elle mesmes, et ainsi elle s’endurciroit plus et ainsi font mal ceux qui
donnent choses dures et rosties et frictes, acetouses et stitiques, c’est a entendre se
elles ne sont bien proporcionnées avec aultres choses.
Quartement, on ne doit pas au commencement trop evacuer, car la matiere
ne peult etre digeste et pour ce en digestion de quartaine nous sommes souvent de
ceulx car gens qui usent au commencement boivent petit et manguent petit et bien
dorment, ils ont au commencement de la quartaine l’orine assez bien coulourée et la
153
ypostasie aussi, et semble que ce soit de la matiere de la maladie et non est ainsi est
de la viande. Donc nous congnoissons la digestion de la matiere de la maladie par la
mitigacion des proximes et pat leur aligence.
Quintement, on doit considerer que on ne donne point viande trop subtille ne
en trop petite quantité, car l’estat est moult loué du commencement.
Et pour ceulx errent se semble qui ostent toutes chairs et vin jusques a XX
jours ou XL car la vertu se affoiblit trop et ne peut resister a la maladie.
Sextement, tu dois scavoir qu’on ne doit donner chose qu’agroisse ou
engroisse la matiere, si comme sont huilles, chaulx crus, fruis et chairs grosses et
choses qui sont de dure digestion ou prin ses en trop grant quantité et les
semblables.
Item tu dois noter diligemment qu’au jour de l’acces, on le doit faire mengier et
petit par trois heures ou par quatre ou par V devant le proxime et aussi apres en la
fin du proxime quant il sera arradicat en tout le proxime ou on ne luy donne riens.
Item nous devons considerer que devant le proxime et au commencement du
peroxime on le doit faire vomir legierment et en le la fin suer.
Item du commencement, on ne doit point administrer fors digestis, ne fors
evacuatis, mais on doit aler de gré en degré, du faible au fort.
Adonc au commencement on doit digerer la matiere par oximel simple et puis
on le doit purgier par evacuatif pareil et proporcionnel. Et puis apres, on la doit
digerer par oximel siquillitique et evacuer par fort evacuation. Adonc, au
commencement on doit evacuer par dyacene dyaboriginiaco. Et en apres, avec
yceulx, on doit mettre aulcune porcion de yerarufini tant seullement.
Item, on ne doit donner nulle oppyacé et se le corps n’est bien mundifiés et en
declination.
Item tu dois digemment entendre a la duresse et aux oppilucion et apostemes
de l’esplain et du foye car en ce est la plus grant partie de la cure. Dist est des
choses universelles que on doit tres bien garder, nous voulons dire des choses
particulieres. Fievre quartaine qui est seule simple et singuliere avec convenance ou
154
concordance de ces choses particulieres doit estre ainsy traicté pour la matiere ainsy
digerée : « (…) endivie feniculi (…) speragi graminis (…) [folio 11V] (…) Conterantur
fortiter et temperatur (…) ». Ce sirop soit prins avec decotion de bourrage et de
fumiterre au matin et au soir trois petites cuilleres avec IX cuillieres de la dicte
decoction. Ce sirop cy oste souverainement opilacion de l’esplain et pour ce il vault
en plusieurs choses.
La matiere soit evacuée par ceste maniere (en latin dans le texte) et soit
donné au matin devant l’acces par ung jours ou environ. Et quant le digest sera
donné a plusieurs fois et petit a petit et en petite quantité.
Adonc on pourra evacuer par plus fortes dyacene, dyabore (…) ces pillules
soyent données quant le patient va dormir et que l’estomac soit vuide et soit de nuit
apres l’acces. Et quant nous luy verrons la teste enclinée, on le doit estuver et en
l’estuve on doit mettre les choses qui sont au sirop avec plante d’eaue sans le sucre
et le miel soit en plus grant quantité et a chacune fois, tu luy donra de aurea
alexandrina et de tyriaque (...) et misceantur Et pour ce qu’il se complaint moult de
froit et horipilacion, pour ce au commencement on luy doit mettre les piés et les
mains en eaue chaulde ou mettres y tuilles chauldes ou luy frotés et eschauffés les
extremités de drapeaulx chaulx, ou mettes ces choses cy ou col des piés et des
mains (…) salis communis (…) et distemperentur fortiter cum aceto. Et quant le corps
sera eschauffé, ung petit si le ostes ou le mettes en ung baing d’eaue chaulde et ne
soit pas trop chaults et n’y soit pas tant longuement qu’il sue ou oignes luy d’espine
du dos de arogon. Et les extremités de marciacon on preingne une, de mirre
pulverisée avec vin blanc chault ou une de teriaque avec suc de mente, suc de
calamenti prins devant l’acces avec vin cure la quartaine.
Donc repos et toutes choses humettatives valent en toute quartaine, mais les
choses eschauffans et refroidans se diversefient selon la diversité des especes de
fievre. Donc parlons de quartaine sanguine.
En cest quartaine, on doit faire saigné de la veine basilique et soit la matiere
digerée par sirop de boriginco et de fumoterre. Et soit mundifiée cuz decoction
borragis et polipodici aussi cassiafi et tamarindorum. Ceste quartaine et est legiere a
curée. La quartaine de cole soit ainsi curée « oxizacre sirupi violacer sire de
fumoterre (…) misceantur ». Et puis soit ainsi purgié « florum borragis, florum
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violarum [folio 12R] liquirici mundate liquiricie mundate vue mandate epi thimi (…)
decotio cum cero caprino et in decoctione temperentur cortice mirabolarum
citrinorum indorum bene gommosorum (…) frixentur lento igni et colentur » et soient
donnés au matin.
Se la quartaine est de fleume la matiere soit ainsi digerée « oxizacre
commposita eximellis diuretice sirupi de fumoterre (…)». Et puis soit ainsi purgier
« florum boraginis florum violarum polipum turbith aussi liquire mundate (…)
passarum mundaturum ab arillis abscinicii diagranati lacte (…)» et soit donnée au
matin. Decy pillules qui valent en toute quartaine « corticem oim (…) fiant pillule ».
On en peult donner III ou IIII selon la concordance des choses particulieres.
La diete. Il doit user de petits poussins er e oyseaulx champestres et de
poissons scamoux et de eufs moles et de extremités de pourceaux, de moutons, de
cabris, de orgiat d’avenant et de brifuement de toutes ces choses qui sont de legiere
digestion qui ne racroissent point matiere, ne engroissent, ne qui ne concipent, ne
enflent. Ains doivent subtiliser et lachier et ouvrir. Toutes fois et ces choses cy soyent
diversifiées selon le temps de la maladie en quantité et en qualité en en ordonnance.
A ce appartienent bourrages, fenoil, percin, brouet de cezes, prunes, cerises doulces
et matures, spinarches, vectes, safrain et les semblables. Et Avicenne loue moult
vomir devant mengier et apres mengier.
Clarification. Tu dois entendre que a forte maladie convient forte medecine et
selon ce en quartaine medidicine fortes y appartiennent, pour ce tu dois scavoir que
aulcune medicine est forte pour cause de sa quantité et non pas de sa qualité si
comme est oximel, diuretique et miraboleus. Aulcune medicine est forte par cause de
sa qualité, si comme oximel, squilliticum, yeratuf. Et pour ce en quartaine au
commencement ne competent ponit fortes medicienes qui sont fortes par quantité et
par qualité, car le subtil se resolveroit et le gros de mourroit mais d’une partie elle y
peut bien appartenir, si comme se la medicine est faible en qualité on en peult bien
en donner en bonne quantité et se elle est forte en qualité, on en donne en petite
quantité et soit au commencement ou en la fin. On peult demander se melencolie se
peult putrifier, car elle resiste a putrefaction par ces II qualités. Je respons que
nonobstant que melencolie soit froid et seche en vertu toutes fois accidentellement
elle est clere et fluante et avec ce elle se eschauffe et amoistit pour les vapeurs
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retenues qui la blessent et pour ce quant elle se putrifie elle demoure moult, et pour
ce sont passées XL ung heures avant que les [folio 12V] deux qualités soient
vaincues pour ce que la matiere est hors des veisseaux.
Item on peult demander se la fleume se peult adurcir car il resiste contre
adustion par ces II qualités. Je respons qu’il se peult bien adurcir car sa froidure et
son humidité ne sont pas seules, ne seches ou elle s’adurcit par mixtion d’aulcune
parties chauldes adustés si comme est cole.
Item on peult demander de la affliction ou interpolation briefve ou longues de
ces fievres. Je dy que la affliction est briefve ou longue selon ce que la matire est
convenable a este resolvée ou non resolvée et la interpolation et la interpretation est
longue ou brief selon ce que la matiere resiste a putrefaction pou ou asses. Donc
melencolie tourmente longuement car la matiere est grosse et si n’est pas
convenable pour resolver et se interpolé moult car ces II qualités resistent a
putrefaction. Fleume toumente fort car la matiere est moulte visqueuse et pour ce
elle se resolve legierement et interpole petit car l’umeur est moult apre et l’est a
putrefaction pour cause d’umidité. Et pour ce ou elle ne interpole point ou elle est en
repos dedens les vaisseaux. Cole torment petit car tantost elle est resolve et son
interpolation est entre quartaine et cotidienne pour ce quelle se putrifie tard pour
cause de sa secheur.
Item, tu dois scavoir que baing compete en quartaine en la fin quant est pour
cause de la maladie. Mais il compete au commencement pour cause des acidens.
Le VII chapitre est de fievre cotidienne
Cotidienne est fievre de fleume putride. Et se la matiere est putrifiée dedens
les vaisseaux elle engendre continue selle, est dehors elle engendre interpolée et
se elie est de fleume froit, elle commence avec froidure congelative mesmement se
le fleume est vitré et se c'est par chaleur a donc on a grant soif et est causée de
fleume salse. Mais en fleume naturel est I petit de froit et de soif. La cause de cest
fievre c'est oizeuze et replection vomitive et pour ce elle vient voulontiers en yver et
en ancien homme et en enfant et en personnes moistes et fleumatiques et en
pescheurs et en femmes qui ont eruebrations actouzes et qui ont catharre qui
descent a l'estomac et virent toutes les choses qui engendrent humeur fleumatique.
157
Et si comme y font plusieurs especes qui sont en engendrées des aultres fievres
ansy sont il de ceste fievre. Cotidienne ne vraye commence avec ung petit de
froidure des extremités avec petit poulz et occulte et quant elle vient a estat la
chaleur n'est pas forte. Ansi est lente et occulte et le poulz est toujours divers et se
termine avec ung petit de sueur l'orine au commencement est remisse ou foible et
des signes nous n'en parlons plus par cause de briefte.
Prenostication. Fievre fleuniatique est forte a esrachier pour la multitude de
la matiere et pour la groisseur et pour la viscosité et si comme on treuve pour fievre
colorique continue aussi treuve on peu fievre cotiddienne. [folio 13R] qui soit
interpolée car la clausure des porres est forte et la humidité est grande et pour ce la
putrefaction est communement continuee. Et se au commencement du peroxime
nous voyons vomir voluntairement et en la fin plante de sueur c'est tres bon signe,
car il signifie maladie briefve et saluable car c’est signe que la matiere n'est pas
moult grosse, ne unctueuse et que les porres ne sont pas estrains trop.
Cest fievre vient voulontier avec plante baaillier et alegance et avec stupeur et
petit soif et aux tumeurs de la face et couleur livide et legierement il cherroit en une
maladie qui s'appelle subech et a continuelle douleur de estomac, donc le medecin
affin que on aye fiance en luy aulcune foys doibt dire aulcune chose des choses
passées, aulcune foys des choses presentes et aulcune foys des choses avenir.
Cure. La cure est selon la diversité des especes. Mais la simple
congnoissance est assés legierement congneur et par ce on peult congnoistre la
composte et la vraye maladie est curée, tantoust on peult curer l'aultre maladie pour
ce nous voulons commencer la cure de vraye cotidienne.
Donc en cotidienne de fleume vitre et moult bonne tizanie avec (…) petit de
poivre et pour ce que la matiere est froide nous demonstrerons aultres choses selon
la proportion de la matierre. Donc en cotidienne de fleume salse veult
merveilleusment boire eaue doulce, tant chaulde que on la peult boire pour fleume
158
salse si comme nous dizons au chapitre de soif, car oncques n'en peus avoir remede
de fleume se ce n'a est par beuvrage d'eaue doulce tres chaulde. Adonc on face les
aultres choses selon la portion de la chaleur, car il n'apartient pas a dire toutes les
choses particulieres. Et se la cotidienne est de fleume naturel, tu feras ainsy. Au
comment cy et en chacune maladie on doit entendre a la cause et se tu ne congnoys
la cause tu ne peus curer la maladie.
Secondement, tu doibs entendre a la maladie pour ce dit G au quint de
Ingenio sanitatis sempante aciem etc.
Tiercement, tu doys entendre es accidens car ils ont douleur, donc ostons la
cause de la cotidienne et en toute fievre putride par medecines de opilatives et
subtiliantes les porres par le dedens. Mais par dehors vous feres frications entour le
ventre et les costes aulcunes foys fort, aulcunes foys doulcement puis de la main,
puis des drapeaulx asprès selon la diversité des choses particulieres « aque dulcis
(…) vini albi (...) aceti albi (…) radicis apii (…) I olei camomile (…) ». Et de ce vous
en froteres le ventre, les costes et le dos, c'est merveille pour destouper les porres et
le faites souvent et longuement et soit la medicine chaulde.
Secondement, or veons a la maladie donc au commencement la matiere soit
digeste de ysope bouillie en sirop actous et puis soit purgier par ceste decoction « ()
florum borraginis et spolipodie turbith (...) [folio 13V] (…) fiat decoctio. Et in
decoctioue temperentur (…) » soit donnée bien matin.
Secondement, la matiere composte soit digeste par oximel diuretique et soit
purgier par ierapigra.
Tiercement. Elle soit ainsy digere « (…) fiat sirupus » et quant la matiere sera
digeste on les purgera par ces pill. cy a qui sont de si grant vertu que nulle fievre
cronique n'oze estre devant « (…) fiant pill. » On peult user de ces pill. Depuis dei
jusques (…) et les peult on aguiser des ezula ou des dy agredium ou des II ensemble
et les donné en ung mois apres leur confection. L'ordonnance di celle soit appetissée
ou agreuse selon la convenance des choses particulieres.
159
Et quant la purgation, sera faite en la declination de la maladie, on peult
estuver le patient et en l'estuvr on peut mettre les choses qui sont mises ou sirop
mais en plus grant quantité exepté le sucre et le miel avec une plante d'eaue et a
lissue de l'estuve on luy donnera de cyriaca parbata a chascune fois (…) et en la fin il
se peult baignier.
Item en cotidienne quant on voit orine moult coulorée et espesse se on fait
saingnié et la vertue est forte ce n'est pas mal fait. Dit est de la cause et de la
maladie : nous voulons dire des accidens, donc au commencement du proxime on
luy doit mettre ses extremités en eaue chaulde et quoy soit bouilli camomille et
mellilo et le doit on faire bouillir legierement par decoction de raphanum en eaue ou
par ydromel ou par sirop acetoux ou par oximel diuretique et luy donnés demi (…) de
zucre. Et la fin du proxime faites le suer et luy mete une vecie darain pleine d'eaue
chaulde aux plantes des pies et soit l'air attrempé. Et s'il vomissoit trop si confortes
l'estomac de mente et de choses semblables et s'il avait stupeur, si luy faites odorer
storacen calamute et frotés fort les extremités. Et pour ce que la douleur de
l'estomac est continuelle si l'emplastres ainsi « mente absincii panis assi madesti in
aqua rosarum et cuz rosis simultricis fiat emplast » Et s'il estoit constipé si luy faites
suppositoires ou cristere. Et au cistere avec les choses communes que on y met si y
mettes suc de bletes et de yerapigra. Et vecy la dyecte mais pour ce que elle
interpolle pou ne povons parfaitement ordonner la viande, donc on ne luy donnera
nulle viande par IIII heures devant l’acces, on le doit faire mengier quant la fievre
largue le moins. Et vecy la viande [folio 14R] qu'il leur appartient, cest assavoir le
brouet de cezes, la mie de pain, III fois baignié en eaue, orgiat aduenat, lait
d'amandes et poussins cuitz avec laictue et avec portulace et les semblables. Et puis
petit a petit la universalle declinacion aux plus fortes viandes doit monter tant que on
viengne aux viandes accoustumées et ainsi doit on faire en toute maladie.
De declaracion. Tu dois scavoir que le legierement vomir en fievre cotdienne
au commencement peult signifier digestion et est a bien, mais la digestion est occulte
et non pas complete pour ce que la matiere n’est pas moult grosse, ne viscouze, ne
froide que les conduis, ne sont estrais et la matiere est asses appareillée a digestion,
aultrement une ventroit elle pas au commencement du proxime avec vomissement
legier et voluntaire, et en la fin n’y seroit pas sueur et avec ce c’est moult bon quant
l’orine antecedente est appeticée, car tout le peroxime en est alegié et peult estre
160
ansi que une maniere de crisis particuliere, car la matiere est ainsi que digeste autant
que elle est obeidient a vertu expulsive. Donc on doit faire vomir legierment, en toute
fievre interpolée au commencement du peroxime. Item tu dois noter que comme en
fievre fleumatique voyue estre plante de sueur puis que la matiere est humide,
touteffois en la fin est peu de sueur du peroxime, ains est difference constitutive
selon l’entencion de G., la cause si est car la fleume naturelle est froit gros et
visqueux et pour cela matiere est a perte a luy convertir en sueur et donc celle si
convertis cest signe de remission ou apetissement des choses qui sont dictes et est
bon signe.
Tiercement. On doit considerer que au commencment l’orine est tenue, non
obstant que la matiere soir humide et plantureuse pour ce que la matiere est
indigeste est les conduis sont estoupés et la matiere grosse et n’est pas convenable
a expulsion, mais quant elle se commence a digerer et nature cominence a ouvrer
adonc elle s’espessit et pour ce c’est signe de commencement de digestion occulte.
Quartement, tu dois scavoir que en cotidienne de fleume salse ou dons on a
soifes aultres non. Item saches quant est de present, que en toute quotidienne
appartient vin quel qu’il soit, pour ce que la matiere est grosse et visqueuse ou plus
ou moins, touteffois il convient que le vin soit foible et qu’il aye moult d’eaue et que
on luy donne puis viande et soit en lieu de beuvrage pour adrecer, subtiler et
conforter, et ne se peut estaindre et avec ce le vin est foible et y’a plante d’eaue. Et
j’asoit ce quelle digere, touteffois ne le doit on point administrer devant mengier, car il
est penetratif et pour ce doit on doubter qu’il ne blesse les nerfs ou la pensée.
Item note que comme la matiere soit grosse et par consequent preste a
expellir et a evacuer par bas et la matiere est en l’estomac, et ce qui est en l’estomac
legierement se purge par vomir, pour ce je dist que au commecement du peroxime
cest meilleur vomir que aller a selle.
Item tu dois noter que pain levé avec une petite [folio 14V] quantité de sel
selon G est meilleur que aultre, car le vin est moult visqueulx et se tel pain estait
bouilli en eaue tant vauldrait il mieulx et luy doit on faire prendre l’eaue non par
maniere de beuvrage et le sel qui y est ne retient pas la nature de sel, car il est en la
composicion ainsi comme l’eaue et ay de l’eaue a penetrer et si n’a point de accuite
de quoy on doye fere compte.
161
Item tu dois scavoir que baignier en eaue doulce en vraye declinacion e toute
la maladie pour mondifier, mais non pas en aultre temps, car il amoistirait trop et la
matiere est moiste, et toutes fois elle est si visqueuse et ne peut dissolver par
baignier. Et pour ce, on dit veoir que eaue bouillie donnée en manière de beuvrage
est meilleur, car en bouillant les parties de l’eaue se rerefient et ainsi les parties vont
au fons et puis sont coulée et ainsi elle est meilleur en quelcunque fievre que n’est
autre eau.
Item tu dois scavoir que les humeurs s’esmeuvent en diverses heures pour
cause de la racine de hault et de bas. Donc le sang se mue du matin et ensuit le
mouvement du soleil car il si conforme pour ce que le soleil est en orient, et aussi
pour cause de la racine bas, car nature de nuit a engendré le sang a plante et pour
ce nature qui est sage le esmeut en ycelle heure apres sa generacion affin qu’il se
nectoye des fumosités. La cole se mue a heure de tierce qui ensuit le quadre chault
et aussi par cause de conformité et par cause des choses basses, elle s’esemeut
affin que elle ne blesse le sang.
Melancolie se meut appres a heure de nonne qui ensuit l’autre quadre en
l’autre quartier qui est plus froit affin que par son mouvement le sang soit enventes et
purgiés de ses super fluites melancolique, le flevme est esmeus a vespres qui ensuit
le quadre froit et moiste. Et par cause des choses basses nature qui est sage sans
fin selon G. au livre des cretiques, elle esmeut pour purgier ses super fluites affin que
le sang demeure pur et net et ainsi dois tu entendre de toutes les altres choses qui
s’ensuivent.
Item tu dois scavoir que les humeurs grosses se meuvent plus de nuit pour la
forte chaleur, et pour ce que elles ont mestiers de fort moteur pour ce se meuvent,
elles adonc mais le subtil se assiet de jour pour cause de conformité.
Le VIII c. parle de fievre composte.
Dis que nous avons dist de fievre simple nous voulons dire de fievre
compostes, et quant a present ils sont V manieres de fievres compostes, des quelles
la premiere est appellée sextene, septene et ainsi des aultres. La seconde est
appellée fievre erradicaté. La tierce epialia. La quarte causonides. La quinte
162
emytriceus. Vrayement en somme tu dois scavoir que melancolie et fleume se
meslent et font fievre et ceste composition est aulcunes fois faicte de fleume vitré,
aulcunes fois de fleume acetoux et ainsi des aultres selon la diversité des
compositcions. Aulcunes fois elle interpolle plus ou moins et se tourmentent auclunes
fois [folio 15 R] de six heures en six heures ou de sept en sept, ou de neuf en neuf.
Aulcunes fois elle se esmeut de mois en mois ou d’an en an et pour ce qu’elles sont
curées ainsi que leurs relatives a qui elles sont raportées, pour ce je n’en parle plus.
Item, fievre erratique est causée de plusieurs humeurs putrifiés en divers lieux
et adustes, c’est quant elles viennent ensemble de la vient fievre quartaine
mesmement selon Ypo. vers le temps des de automne, mais telles fievres ne errent
point car chascune fuit le mouvement de la matiere, mais il nous semble que elles
errent pour la diversité de leur peroximes selon le mouvement des planettes. Les
compostes sont curée selon la natnre de leur simple. Fievre officilia est causée de
fleume vitrey que quoy une partie se putrifie dedens les vaisseaulx et eschauffe les
parties dedens, et l’aultre part qui n’est pas putrifiée se dissolve et refroide les parties
dehors. Fievre liparia est au contraire, toutes fois aulcuns vient que c’est
composicion est faicte de cole, on la cure ainsi que que on fait les simples.
Causonides, est fievre composte de sang et de cole putrifiés dedens les vaisseaulx
et se la mixtion est egalle, on l’appelle causon synochons et s’il y’a plus de cole on
l’appelle causon. Sinochides et s’il y’a plus de sang synochus causonides et sont
curées ainsi que les relatives.
Enutlice, c’est une fievre composte de continue et interpolée et sont plusieurs
compostes toutes fois on les peult ramener a trois especes plus congneues de
cotidienne continue et tiersienne interpolée. La seconde espece est causée de
tiersiene continue et cotidienne interpolée. La tierce espece est cansée de quartaine
continue et tiersaine interpolée. Etpour ce que toutes les especes viennent peu
souvent et quant elle viennnent on les cure ainsi que les simples, pour ce je n’en
vueil plus parler
Le IX chapitre parle de fievre ethique
Ethique est fievre continue d’une forme dans vice des humeurs et le subget
c’est le cueur et les membres solides et dois scavoir qu’ils sont deux ethiques
aulcune est avec fievre et l’autre sans fievre et l’appelons ethique vieille en telle
163
manière que la chaleur est moult estendu et la chaluer est egale ou ainis que egale
et froideur tellement que ces deux ne surmontent pas moult.
Toutesfois aulcune fois elles excedent, si comme en vieillars tellement que
aulcunes fois celle ethique vieille est en jeunes enfans de VII ans ou de XIIII ans.
Ethique qui a fievre a trois especes. La premier est quant la humidité du cueur et des
memebres cordials est consumée et est semblable de l’uylle et de la lampe. La
seconde espece est quant la humidité est consumée et est semblable de l’uyle qui
est dedens le brhin. La tierce espece est quant le glutinun est consumé et est
semblable de l’humidité substancielle et du lichin.
Cause. La cause de fievre ethique ce sont toutes choses qui eschauffent et
enflament le cueur et les membres solides et pour ce aulcunes fois vient ethiques
que des fievres precedentes de effimere et se de causon des semblables
mesmement quant ont leur commande comme de ebstinence non raisonnable et
quant on oste boire eaue froide on leur l’a [folio 15V] bevroit a doner tieulx malades
sont legierement consumés, mesmement ceulx qui sont chaulx et secs et qui sont
amaigris car ceulx qui sont gras et charnuz ne viennent pas legierment a celle
consumption. Fievre ethique vient sans fievre precedente si comme de grant
tristesse et angoisse et de yre et de fatigation de l’ame et du corps et prison et
briefment par toutes choses qui ataine le corps et vient aussy pour le vice du foye et
du cuer, du poulmon et du pis si comme en ptisique en enpyma et en apostumes.
Les signes de fievre ethique c’est quant il a plus grant chaleur en l’artere que es
aultres lieux prochains donc quant la fievre est egale d’une forme et qui n’a en luy
nulle diversité quant est de luy ne au premier jour, ne au second, ne au tiers et que le
cuir se turne a une secheur, c’est signe quel est la en la premiere espece de ethique.
La premiere espece d’ethique dit Avicenne est moult forte a pargnoistre et
legiere a curer, la cause si est car la premiere espece peult estre sans secheur, si
comme G. le declaire au livre des differences de fievre. En la seconde espece de
ethique apart secheur notable et avec ce en quelque heure que le patient mengue, il
est plus enflammé et le poulz se haste plus, exemple de chaulx vive on leur met
eaue froide. En la tierce espece les yeulx sont concaves et le cuir est tendu et le
ventre se tire au dos et le poulz est chaulx et vide et dur en manière dit corde tendu,
164
et l’orine est ainsy que oly et se elle chiet sure. Une pierre elle sonne rauque. Le
signe de ethique vieille c’est le poulz petit et tardif et orine tanué et remissé.
Pronostication. La premiere espece est de legiere cure, la seconde de forte
cure et la tierce ne se peult curer se Dieu ne la cure, si comme du chien quant la
propre substance et humidité est parfumée pour huille, que on y mette on ne la peult
rectifier ainsy est il quant les humidités semblables du cueur et des aultres membres
sont de gastes ou assez pres consumés. Mais la moyenne fievre n’a moyennement,
car s’elle est curée c’est a grant paine, et quant les ungles se courbe adonc elle est
en estat et quant les cheveux cheent la mort aprocheet le fluc de ventre y vient, il est
pres, quant les jambes commencent d’enfler il ne peult plus vivre ains mourent
communement dedens III jours et ceuls qui ont ethique ne congnoissent pas bien
chaleur, car le male complexion diverse est faicte egale et ne congnoit on pas
sensiblement et quant fievre fievre ethique est compostes avec putride elle est forte a
cognoiste.
De cy la cure. Se ethique vient par eschauffement du foye ou par apostumes
ou par choses semblables, on les doit premierement curer. En ethique competent
choses froides et humides et non pas seullement froides ou tropt froides, car elles
desechent si comme dit Avicenne ne choses moistes avec chauldes, car elles
eschaufferient et decherient plus et Avicene met exemple du vin, donc choses froid
es humides ensemebles y competent si comme est tizaine succré et lait aussy, et lait
clere de quoy on osté le beurre. Donc lait apartient aulx tiziques ou cas que fievre
putride n’y seroit meslée [folio 16R], si comme dit G au XI de Ingenio sanitatis. Et le
meilleur lait qui appartient c’est lait de femme, apres lait de anesse, et apres de
chienne, et apres de vache, son peut on le doit boire de la mamelle de la vache et
son ne peut pernes ung vaisseau plain d’eaue chaulde et le chauffez et luy faites
boire tost, car le lait corumpt tantost ainsi que le lait se corrumpt tantost ainsi que fait
semence. Et se nous doubtons que le lait se corrumpe en l’estomac si le faites
bouillir une unde et y mettez ung petit d’eaue et de sel et de miel ou mettez y cailloux
durs et chaulx ou une piece de fer chaulde ou dit lait et le prenez tost et saignement
qu’il ne se corrumpe. Item baigner y est bon ou en estuve et y soit mis II fois le jour et
que la viande soit digestes en l’estomac et ne soit pas l’eaue chaulde, mais ung petit
plus que tiede et n’y doit pas suer et ne estre longuement et lissue on le doit mouiller
soudainement d’eau ainsi que froide car baing d’eaue chaulde sans ung petit de froid
165
apres ne vault apres riens ce dit G, ne eaue froide, ne vault riens, se la chaulde ne
va devant et que administrera le lait et le baing diligement il y trouvera grant remede,
et les bestes doivent estre nourries en bonnes pastures qui se tirent a secheur, si
comme nous dirons au chapitre de tysique. Cancres d’eaue doulce y sont bonnes,
mais on en doit oster les extremitez et le remanant, on doit fort laver de lessive faite
de cendre et de vigne tant que la mal oudeur en soit oster, apres on le doit cuie en
eaue d’orge, et lui donnez orgiat avenat et amidon, car il luy sont bons quant ils sont
cuitz avec lai de vache eburré et mye de pain baignée en plusieurs eaues froides
doulces, et puis meslée avec le lait, poissons qui ont escame qui sont d’eaue nettes
et oeufz molets et brouet de cezes y sont bons et aussi sont chairs de vollile excepté
ceulx qui vivent de rapine es eaues et les doit on cuire en plante d’eaue avec d’orge
et avec coriandre nouvelle ou laictue ou avec fruitz frois, si comme sont melons et les
semblables, vin cler subtile avec plantes d’eaue leur est bon.
Item on leur doit oindre le pis de c’est onguent «(…) sufficit fiat ungentum ».
Item il usera de cest electuaire « (…)cum aqua fontis juxeta ignem lentissime ». Et se
fievre putride y estoit meslée on peut adjouster avec les choses centissim en [folio
16V] « divia lectuca cicorea scariola » et les semblables et le peut devant dit. Mais en
ethique vieille compete lait et miel et brouet de chaire toutesfois miel en en fievre
ethique est moult nuysable. Et se en fievre ethique on avait flux de ventre, on doit
donner lait cuit de cailloux d’eaue qui soit bien chault et mis au lait avec muliostic ou
sumac ou mirtilz ou lentilles escorcées et cuites en eaue.
De plus dire je m’en excuse car nous en avons assez dit sur le livre de G. des
differences de fievres et sur le XI chapitre de Ingenio sanitatis.
Le X chapitre de fievre pestilenciale
Fievre pestilentiales sont celles qui viennent en temps pestilence et de
corrumption, quant les blez et lait et les eaues sont corrumpues.
Tu dois scavoir qu’ils sont aulcunes fievres que nous appellons diverses
maladies qui vient par miction de desconvenable de VI choses non naturelles et elles
sont communes a tous. Aulcunes sont maladies de regions, si comme ptisis et
empivia qui sont de montagnes et flux de ventre et ydropisie en valée. Et en
aulcunes regions sont aulcuns arbres et son mengue du fruit, ils engendrent de ler
166
proprieté vocium et ungle. Et sont aulcunes eaues qui de leur proprieté engendre
opilacion de esplain et du foye et male couleur. Et sont aulcunes maladies que ont
appelle pestilentiales ou epaticales, et enfendrent en temps de pestillence
corrumpues et toutes ces maladies sont mauvaises et de male terminacion pour ce
que les membres principaux en leur racines sont blessés en ce temps ou par effect
des planetes, mais materiellement ils sont corrumpus par les choses de bas car ia,
soit ce que l’air et la age et les corps simples ne se corrumpent pas en leur nature,
toutes fois par cause de leurs vapeurs corrumpues qui se meslent elles sont
corrumpues et se corrumpent, les bestes et les blez et les fruits et ainsi les corps des
aultres. Et corrumpent ainsi les corps humains car l’air corrumpu environne tout le
corps et va au cueur et le corps nourry de viandes et de beuvrages corrumpus.
Donc les vapeurs sont resolvées par la vertue des estoilles et des planetes et
les vens portent leurs vapeurs entant que une grant pestilence viene en aulcune
partie du monde, et selon la diversité des corps sont engendrées diverses maladies
et fievres, en aulcuns sanguines, en aulcuns fievres coloriques et ainsi des aultres
selon la diversité des dispositions et aulcuns n’en sont pas blecés, aulcuns en
escapent et aulcuns meurent, car l’action se fait selon la disposition de la matière.
Signe. Aucluns sont communs, aulcuns sont propres, le signe de pestilence
qui doit avenir, c’est quant appret l’estoille comette comme chandelle ronde quant
maintenant est chaleur maintenant froideur et ung jour ou en divers jours et que lait
est obscur et espes et semble qu’il pleuve et ne pleut point et que este est chault et
moiste et les oyseaul laissent leur nids et leurs œufs sur terre et plusieurs bestes
reptiles apparent ce sont signes de impedimie qui doit advenir. Decy les propres
signes de fieuvre pestillencielle, c’est que la chaleur [folio 17R] de dehors est lente
et dedens forte avec soif et secheur de langue, et ne peut on pas sonstenir la maldie
ne vient reprendre son alayne et douleur des entrilles, et tout ce qui y est du corps
est puant, si comme l’aleyne, l’egestion, la sueur et l’orine.
Prenosticacion. Toutes sont de male determinacion avec terribles accidens
et s’ensuyvent souvent veirolles morbiles, et maladies venimeuses et communement
decoivent les medecins, car l’orine appert a la fois bonne et lipostasie aussi, mais
non pas de la matiere de la maladie, mais de la viande, car nature n’ose envait la
maladie pour la malice. Et quant on atent bon crisis a donc vient la mort, donc
167
saches que des maladies agues on n’en peut pas certainement jugier, ne de mort, ne
de vie.
C’est la cure. On peut preserver se le temps est froit en odorant « muscum
lignum, aloes garifolum, scoracem calamitam, ambra » et les semblables
aromatiques ou en mengant. Et se le temps est chault, on le face par choses
aromatiques froides, si comme sont « rose sandali, camphora et acetositas citri ».
Donc la cure en fievre peut estre telle que on rectifie l’air selon la nature du temps,
car en este en refroidant de fueilles de saulx et de canes et de vignes blanche et
coucombre avec plante d’eaue froide et de vin aigre et eaue de rose et les
semblables . Et doit odorer roses « sandal camphore » et nenufar et toutes choses
acetouses luy sont bonnes, si comme lait aigre et herbe acetouse et mygraines et sur
de rezins aigres et acetosite de cytrons et de lymons et citrangles et vin aigre. Et si
se doit bien generalement garder de trop boyre, de trop mengier et de rafaiter en
temps de pestillence et se la maladie estoit sanguine faites saigniée avec les autres
choses particuluieres qui y appartiennent. Et se elle est colorique on le doit purger
ainsi qu’il appartient et ainsi des autres. Donc on peut faire un tel syrop « (…) scci
boraginis, succi buglose, succi mellisse, succi (…) dulcium, succi acetose, succi
endivie, succi scariole (…) se rosarum (…) sandali muscali (…) II camphore (…) I
Aceti albi, III conficiant cum aqua rosa optima panis zuccri lib I fiat sirupi (…) ». Item,
il doit user de cest electuaire « zuccri rosa, triasandali (…) auri puri XX (…) iacintoruz
(…) misceant»
Et se le malade a les extremitées froides, on luy doit froter et commencer par
dedens et tirer par dehors, et s’il a l’apetit foible, on le doit conforter par choses
aromatiques et ecetouses. Ce cy est de clerici sur le premier livre qui d’appelle Liber
regimanis acutoris.
Le XI chapitre parle de sueur
Sueur est vapeur humide resolvée de dedens le corps et est espece pres de
la superficie du cuir. La cause de fieuvre est toute choses qui resolve en matiere en
sueur vapeur. Et doy scavoir que aulchune vapeur est seche et de ce viennent les
168
cheveulx, si comme nous dirons ycy apres. L’autre est moiste et de la vient sueur.
Aulcunes fois sueur vient par cause estrange, si comme par chaleur.
[folio 17V] du soleil ou du feu, du vent meridiona ou par trop fort laborer ou
par trop de couverte ou par baignier et les semblalbes, mais aulcunes fois sueur
vient par dedens par cause de chaleur dissoluent, et pour ce je dy qu’aulcune sueur
est naturelle et celle qui est faicte par bonne vertue regitive, elle elegit tousjours et
est bonne a souffrir et c’est aulcune sueur non naturelle, qui est faicte de chose
innaturelle et fait mal et gravance a souffrir.
Signe. Des signes aulcuns sont prins de la quantié, aulcuns de la qualité,
aulcunes fois y a grant quantité, aulcunes fois petite. Plante de sueur vient par nature
qui resolve fort ou pour ce que la matiere est aquatique subtille chaude, vapoureuse
et humide, ou pour les porres qui sont clers ou pour ce que la contentives est foible
et le expulsive et forte. Petite sueur vient ou pour ce que le resovlent est foible, ou
que le matiere est grosse et petite et les porres sont espes et condempses et la
contentive est forte et le expulsive foible, et ainsi avons-nous congnoissance de sa
quantité. Et vecy de la qualité, car se on prent drapeaul et ils soient bagnies en la
sueur et qu’ils se traient a rougeur c’est signe de sang, se a couleur citrine c’est cole,
se a blancheur c’est signe de fleume, se noirsure ou liveur c’est melencolie. Item on
prent signe par l’odeur greve et fetide signifie corrumption. Et aulcune fois une goutte
chiet en la bouche du patient et est doulce et singifie sang. Aulcune fois est amere et
signifie cole, se elle est salée elle signifie fleum salse et ainsi des aultres humeurs.
Prenosticacion. Toute sueur qui vient apres le signe de digestion se c’est en
jour cretique et que elle soit par tout le corps avec aligance c’est bon signe. Et se
aulcune de ses condicions de fault c’est mal signe, et pour ce sueur au
commencement de maladie signifie ades mal, car la matiere n’est pas digest, car elle
vient par force du sinchomach et non par force de nature, et pour ce au
commencment selon nature, nulle evacuation n’est bonne.
Donc sueur doit apparoir apres les signes de digestion complete en la fin de
l’estat. Et pour ce en nul temps de la maladie elle n’est bonne, se ce n’est en la fin de
l’etat, car en declinacion elle degette vertu, car crisine se fait point en declinacion,
mais en la pire euvre se c’est vraye crisis avec que toutes ses condicions, c’est
assavoir qu’elle soit certaine complete et demonstrée.
169
Item la saconde condicion est necessaire que elle soit en jour cretique, car en
tout bon crisis selon G. concourt et euvre la racine de bas et des corps souverains, et
pour ce y convient que ce soit en jour cretique se nature n’atendoit les benefices du
monde, car toujours crisis est faicte en la fin du quadre ou du demi quadre, et s’il
n’est ainsi quant a la lune, toutes fois c’est il ainsy quant aus signes du zodiaque la
tierce condicion y est necessaire, c’est que la sueur sort en tout le corps, car c’est
signe que la vertu est fate qui la peut expeller par toutes pars. Et se elle est une par
tant seulement c’est signe que la vertu est foible, soit chaude ou froide [folio 18R] ou
continue ou non. Et pour ce sueur chaulde ou chief tant seulement en fieuvre
continue ou cotidienne signifie mal et la froide signifie mort, se la fieve est ague et se
elle est lente c’est longue maladie. Item sueur vient plus du lieu ou est la maldie,
sueur qui vient maintenant et maintenant non, elle maulvaise. La quart consideration
y est necessaire, c’est qu’elle soit avec alegance sueur qui est avec foiblesse de
poulz est male, car supposé que les choses particulieres se concordent se le patient
ne le peult souffrir, c’est maulvaise sueur et ainsi generalement sueur qui vient avec
foiblesse de vertu et est male et ainsi peut on prenostiquer de sueur.
C’est la cur. Du nous voulons esmouvoir la sueur ou oster, se nous le
voulons oster tu dois entendre que nulle evacuacion naturelle et non naturelle ne doit
estre ostée jusques vers le tiers jour, se la vertu le peult souffrir, car ce seroit doubt
qu’elle ne alast au cueur et aux aultres membres nobles. Donc on doit remouvoir les
draps et eventer petit a petit de eventoires, ou on luy doit arouser la face d’eaue
froide ou d’eaue rose ou de vin aigr, on luy doit oindre le pis de huilles frois, si
comme huylle rosat, huylle de saulx et de nenufar et des semblables et emplastrez le
pis de sandal et de camphore et me semble que c’est chose legiere a oster sueur
sulement par es mouchoirs, se par adventure le patient n’avoit sincopis a donc le doit
on eviter. Se nous voulons prenostiquer ou c’est fievre ou non, on se non le doit
oindre de « aragon, de marciatous agrippa dyaltear » et faire estuve et couverte et
feu et les semblables. Et se fievre y est prenés camomille, mellilot et semence froide
en les mettes en ung sachet et puis en eaue chaulde puis les espreignes et luy
mettes au coste ou aux piedz ou aux mains ou vous en faites suffumigaion ou prenés
ung vaisseau d’araing pleine d’eaue chauldes et luy mettés aux extremiés.
Clarificacion. Tu dois entendre puis que nous avons parlé en brief de fievre
et fievre communment se termine par sueur pour ce avons mis ce chapire cy pour
170
scavoir quelle sueur est profitable et quelle non, pour ce tu doys scavoir si comme dit
l’acteur Ga. sur c’est amphorisme. D’entres yeme et vere etc, que toute sueur est
oultre nature ou par la cause efficiente, ou par matiere ou d’aulcune chose
particuliere. Car se la vertue estoit forte et la matiere obediente et les porres et l’air et
les choses particulieres fussent en comvenable proporcion, la matiere evaporeroit
insensiblement et se aulcune sueur appert c’est que elle repugne et resiste a
resolucion insensible et ainsi toute sueur en aulcune manière est contraire. Toutes
fois en faisant comparacion a la maladie, car la vertu est plus forte et purge la
matiere de la maladie, le patient en est allegé et celle sueur est dite naturelle, toutes
les aultres sont innaturelles et sinthomaiques et maulvaises et les aultres bonnes.
Secondement, tu dois entendre que sueur materiellement vient de la seconde
[folio 18 V] digestive, toutes fois elle vient effectivement de la tierce, car les vapeurs
qui sont dedens les porres des membres sont boutées hors et ainsi sueur peut estre
la super fluite de la seconde et de la tierce digestion selon diverse manière et
d’entendre.
Tiercement, tu doibz scavoir que se sueur vient des causes de dedens
communement elle vient plus de nuit que de jour, et plus en yver et en dormant. Mais
s’elle vient par causes de dehors, elle vient plus en veillant et de jour et d’esté. Item,
grasse gens suent plus que les maigres, se la grosseur des humeurs et les porres
qui sont especis ne l’empechent et vient plus devant que derriere, car la partie de
devant est plus chaulde et plus clere et est plus en mouvement que en repos.
Quartement, note que se le médecin vers la fin de l’estat voit que nature soit
negligente et endormie tant qu’elle ne puisse expeller sueur, a donc il la doibt
esmouvoir attemprement car le medecin c’est le ministre de nature.
Quintement, tu doibs noter que en continue sueur est plus grande que en
fievre interpolée en considerant tant seulement une sueur. Mais se nous considerons
la sueur de tous les periodes, la sueur est plus grande en interpollée et moindre en
continues. Item, se nous voulons esmouvoir sueur, nous la devons torchier, ainsi le
nous commande G. car quant quant sueur demeur et on ne la torche, elle clot et
estoupe les porres et ainsi torchier la sueur sans esventer le esmeut, on doibt
toujours trochier l’ordure, car elle corrumpt le membre ou elle est.
171
Le douziesme chapitre parle de vairolles morbiles.
[folio 34V]
Le XXI chapitre parle de cure de lepre.
La lepre c’est maladie consimile corrumpant la forme et la figure et la
composicion des membres et blessé et vient de matiere melancolique esparse par
tout le corps.
Tu dois entendre que matiere melancolique ou elle se espant par tout le coprs
ou a partie. S’elle va par tout le corps ou elle se putrifie ou non, s’elle se putrifie de la
vient fievre melancolique, s’elle ne se putrifie point ou elle va a la chair ou au cuir.
S’elle va au cuir elle fait morphée. S’elle va a une partie ou elle s’assemble ainsi que
au cuir dehors et ne se adurist et engendre a donc ques veruques et neux et s’elle va
dessoubz le cuir plus et qu’elle ne s’adurisse, elle engendre sclirosim et duresse, et
se elle se endurist ou la matiere est grosse ou fort subtille, se elle est grosse elle
engendre le [folio 35R] chancre, s’elle est subtille elle engendre herpestiomene, et
ainsi herpestiomene se engendrer de melancolie aduste et d’adustion d’humeurs
chauldes si comme dit est. Donc il appert que lepre est maladie consimile ou c’est
accident de maladie consimile et ainsi y sont III maladies en lepre, c’est assavoir
consimile, officiale et commune.
Consimile est pour la maladie complexion froide et seche qui est propre cause
et erreur de la vertu assimilative et pour ce dit G au VI de morbo. que lepre en grant
erreur de vertu assimilative en chair. Encore dit G. des vertus naturelles, qui quant
vertu digestive erre en disseminant a donc s’engendre ethique et quant elle erre en
assimilant c’est lepre et quant elle erre en unissant c’est ydropisie.
Donc male complexion chauldes et seche qui est en chair pour matiere
melancolique ne peut celle matiere corrumpue faire resembler a bonne chair rouge et
vray, elle engendre chair fleumatique ainsi que s’eparée ains et graveleuse et ainsi
s’engendre lepre.
Donc il appert que lepre c’est maladie consimie et c’est maladie officiale par
complexion est tant male qu’elle corrumpt la forme et la figure. Et c’est maladie
172
commune car finablement elle dissolve continuité se la mort n’y survient et pour ce
estoit ce bien dit lepre est maladie corrumpant forme et figure et composition des
membres et finablement dissolve continuité qui vient de matiere melancoliqe esparce
par tout le corps, donc lepre c’est tres grant erreur de vertu assimilative en chair.
Cause. Lepre ou elle est introduite du ventre ou de après. S’elle est de ventre
c’est pour ce qu’il est engendré en temps de menstrus ou qu’il est filz de lepreux ou
pour ce que lepreux avait dormi avec la femme grosse et ainsi s’engendre lepre.
Mais se c’est après l’enfantement ce peut estre pour ce que l’air en mauvais et
corumpu et pestilencieux ou pour ce qu’il continu viande melancolique, si comme
lentilles et aultres legums et chaires melancoliques, si comme loups, renars, ours,
chevaulx et lievres et toutes bestes a IIII pies, si comme asnes et les semblables, car
en aulcunes regions on mengue toute sauvagine. Item lepre vient par trop converser
avec mesaux ou par rafait une mesele ou par gesir avec femme qui a dormi avec ung
mesel se la semence est encores en la matrice, car la femme n’est pas meselle pour
dormir avec un ladre s’elle ne le continuoit trop car la matrice est trop espesse, mais
se ung homme sain y dormoit et que la semence fut encores en la matrice il
conviendroit qu’il fust meseau, car les porres du membres sont petis ou mascle et la
infection va tantost par tout le corps et pour ce on se doit garder et s’il le convenoit
faire on doibt estudier pour faire yssir hors la semence de la matrice en alterant, en
sautant, en estant, en esternuant, en baignant et en nettoyant la matrice d’eaue nete
et qu’on attende longtemps et en plusieurs autres manieres qu’il ne convient pas
racompter pour bouter hors de la matrice semence corrumpue.
Et chacun se doit bien garder qu’il ne dorme avec femme meselle, et advient a
Montpellier que une contesse y estoit venue laquelle estoit meselle et fut en la fin en
ma cure et ung bachelier en medecine l’abouboit et dormit avec elle et l’engroissa et
il devint parfaitement meseau et celuy est bien [folio 35 V] eureux qui se chastie par
aultruy.
Item mengier lait et poisson ensemble engendrent lepre.
Item trop mengier viandes chauldes qui eschauffent le sang ou trop mengier
viandes froides et seches et melancoliques come dit est engendrent mezelerie. Donc
tous colleriques extenuent qu’ils sont moult chaulx et adustés qui ont le foye chault
se doivent garder, car ils sont emmy chemin. Et non obstant que la cause prochaine
173
de lepre c’est matiere melancolique et male complexion froide et seche et ainsi ne
n’est il que une espece, toutesfois en considerant les causes antecedentes il y’a
quatre maniere de lepre. Car se la cole se adurit et que elle passe en melancolie de
la vient une lepre qui s’appelle leonine qui tantost croist. Et quant le sang se adurist
de la vient allopicie et est le moins male de tous. Et en apres se endurit melencolie et
de la vient elephancia et croist le plus tard et se guerrist le plus longuement et la
fleumese adurist aussi et de la vient lepre tyria et est moyennement entre les autres.
Signe. Decy vrais signes sans faulte, c’est assavoir depilacion de surcils gros.
Les surcilz, rondesse des yeulx, nazilles elargians par dehors et estroictes par
dedens et respire en malaise, et parle du nez, la couleur de la face est livide et clere
et reluisant et est sur couleur fusque et morte et terrible, la face en regardant
fermement petites et retraictes les oreilles. Mais par un signe nous ne devons pas
juger, car ils sont souvent equinoques, mais par plusieurs car a donc ques est plus
certain. Et si a plusieurs aultres signes, si comme pustulles croissances et
consumpcion des membres et des muscules et mesmement de ceux qui sont entre le
poulz et l’autre doit en suivant et insensibilité des extremités et fendures et infections
du cuir.
Item le sang se on lave ainsi qu’il appartient tu trouveras au fons choses
noires terrestres aspres et espandues et graveleuse et plusieurs aultres qui mettent
les acteurs, mais il me souffit ceulx que on peut veoir, si comme nous le
demonstrerons cy apres et telz signes sont manifestes par les quelz le malade peut
estre separé du peuple.
Et vecy les signes occultes qui signifient lepre commencée. C’est assavoir
couleur rouge de la face qui se trait a noirsure et l’aleine se commence muer et la
vois devient rauque et les cheveux comencent a agrelir et apetisser et la sueur et
leur aleine devienent puans et apparessent mors, melancoliques et s’est on pesant
et grave le corps. Et en aulcuns lieux appart scabie et pustulles et morphée et par
tout le corps commence disposicion prudent, touteffois se sa fourme et sa figure ne
se corrumpt on ne le doit pas separer du peuple, mais on le doit bien menacier.
Decy les signes qui signifient peril et aprochance a lepre, c’est assavoir
corrosion qui est du cartilage qui est entre les trous des nazilles et quant il chiet es
fendures des mains et des piés et quant paresse en chient et leurs grosses et
174
disposicions de couleur glanduleuse respirer a grant peine, la voix rauque comme de
chat, terrible regard, couleur noire, le poulz occulte et petit. Decy les signes de
l’umeur qui peche.
Se la lepre est causée de sang, la couleur se trait a rougeur obscurcie, la face
subrubiconde avec plusieurs ulceres rouges. Les [folio 36R] yeulx sont rouges et les
paupierres enversées et de chose legiere, le sang yst des nazilles, l’oudeur est
griefue et puanteur en tout le corps, l’orine est ainsi que rouge et respesse. Et se
c’est de cole, la couleur se trait a couleur citrine et noire, pointive et mordicacion en
la face et es paupueres, il se courousse legierement. La maladie est tirannie. L’orine
se trait a couleur citrine et atenuite aulcune fois il a impetigine et serpigine et se
multiplie tost.
Et se c’est de fleume la couleur est blanche et se trait a noirsure, il a la face
sur enfleure et les extremités avec ques aulcunes resolucions et furfures et scames
blanches. L’orine est blanche et se trait aspicitude avec aucune globosité saigneuze.
Et se c’estoit de melancolie la face se trait a noirsure trouble. Et se l’air est
trop chault ou il se esmeut ou il se courousse la couleur sera rouge, trouble, tournant
a noirsure. Et se l’air est froit, la couleur est livide et se trait a noirsure il a plusieurs
neux entour le corps. Les meurs sont melancoliques, il a stupeur et insensibilité,
l’orine est tenue et remisse. Et se c’est de sang, on l’appelle allopicia. Se de cole
leonine, se de melancolie, elephancia, se de fleume tyria.
Prenosticacion. Nous pouvons certainement prenostiquer que jamais puis
que la lepre est apparente corrupcion de fourme et de signée il ne sera cure, mais on
luy peut prolongier la vie et ce peut on empescher par medicine que la matiere
venimeuse ne voise au cueur, ne aux membres principaulx. Car tu dois scavoir que
lepre commence premierement par dedens et puis se demonstre en la face et es
extremités et puis se rentre de dens et adonc c’est la mort, car les membres nobles
ne pevent soutenir tant grant mistere pour la matiere qui est tant horrible et pour la
mal complexion froide et seche qui est contraire au commencemens de vie. Et pour
ce disait A. comme se pourra curer lepre qui est chancre universel quant on ne peut
curer chancre particulier.
175
Allopicie qui est moins perilleuse est plus legiere a curer au commencement la
leonine vient plustost en augmentacion. Elephancie vient plus tard a augmentacion
comme dit est, et est plus tard curée, mais tyrie se tient moyennement.
Cure
Premierement, on doit faire saignié et sache que puisque la maladie est
confermée que l’on le congnoist par corrumpcion de la fourme et de la figure, la
saignié ne proffite pas moult ne forte medicine, car elles esmeuvent et ne evacuent
point et se refroident et dessechent et ostent la vertu et purgent pou ou nyant de la
matiere de la maladie, car elle n’est pas es vaines adonc mais es membres.
Et se saignié compete en lepre confermée, c’est quant la lepre est de sang et
que le sang habunde moult. Du car c’est en femme pour ce qu’elle retient ses
menstrues ou ses emoroydes, ou que le patient ne peut pas bien respirer et se
doubton de suffocacion, aultrement n’y appartient point saignié et vauldrait mieulx
des petites veines que des grandes. Du que on face ventouze avec scarificacion
entre les espaules ou sans scarificacion es jambes, mais au commencement
appartient mieulx saignié, car la matiere est es vaines, donc on la doit faire quant il
appartient et ainsi qu’il appartient.
Toutesfois nous [folio 36V] voyons les ouvriers errer, car ilz le font
indifferemment, si devons bien regarder.
Secondement, on doit considerer des medicines et de la digestion de la
matiere au commencement quant elle est curable car quant elle est confermée on n’y
doit riens fere pour curer, mais pour prolongier, et le doit on dire devant. Et se le
medecin en estoit fort requis. Premierement on doit digerer la matiere ainsi « (…)
succi fumiterre, succi scamonee et scabiose, succi lapaci acuti (…) boraginis (…)
floruz scrie, epithimi, cuscute, polipodii aneti liquiricie mundate (…) mellis rosatis et
panis zuccri (…) III fiat sirupus clarifictus ». Et se humeurs chauldes dominent si
mettes avec « sirupus endivie, scariole, letuce a acetum ». Et se matieres froides
dominent, si mettes avec le dit sirop « origanum et calamentu anthos sticados anissi
maratri ». Et se estoit en femme par retencion de mensrrus si y mettes « arthemizia
samua et serpilus » selon la diversité des temps de l’an et des aultres choses
particulieres on y doit mettre ou ajouster. Car s’il est poure et la matiere est chaulde
176
on la doit digerer de oxizacra avec sirop de fumoterre et se la cause est froide de
oximel diuretique et squillitique et sirop de fumoterre. Et s’il estoit riche et delicat on
doit digerer la matiere par ces ellectuaires « (… ) dyamber, dyacameron, dyarodon,
juli dyamar gariton». Et s’il est poure par dyanthos et dyarison. Et se la cause est
chaulde de si y mettes avec « zuccri rosarum et triasandali». Et quant la matiere sera
digeste au tiers lieu il fault venir aux medicines. Medicines fortes ellectives ne
doibvent estre données que une fois emmy printemps et emmy auton une fois. Mais
medicines legieres on les peut donner plusieurs fois ou par adventure chacun jour
jusques a une bonne selle ou deux ou petit plus selon la convenance des choses
particulieres « (…) sene epithimi polipodii aneti (…) mundum datarum ab arillis
liquiricie mundum (…) fiat decoctio cum cero caprino et in decotio temperatur cortices
mirabolanorum (…) emblicorum bene (…) frixeni lento ingni et (…) ». Et en donnés
jusques a demi livre au matin. C’este decoction est moult proffitable si la doit on
diligemment garder. Et se humeur chauldes dominoit en la matiere, si mettes avec
« (…) citrinorum (…) cum mastice et bulliant in saculo ».
Et se la matiere estoit fleumatique si y mettes encore « mirabolam cerbuli (…)
turbith cum esula (…) et masticis bullitis in saculo et in decoctione ». Decy les
medicines fortes c’est assavoir « theodoricon, (…) emperisticon acuatiz cum pulpa
colloquintidum in parua (…). ». Et se la cole domine si y mettes avec ce ellectuaire
donc « succo rosarum » et se le fleume domine yerapigra. En matiere chaulde
donnés ces pillules « (…) ellectuariuz de succo rosaruz oxizacra (…) interiorum
colloquntidum (…) fiant » pillule. Et se c’est fleume froide « (…) yerapigra (…) III
espule (…) fiant » pillule. Et se melancolie domine [folio 37R] « dyacene (…) pulpe
colloquintidum (…) fiant » pillule. Ces doses cy se varient selon la concordance des
choses particulieres, car aulcunes sont fors, aulcuns sont froibles, aulcunes
demeurrent en climat chault, aulcuns en froit, si le lesse a la discrecion du medicin,
car toutes medicines de electuaires sont perilieuses et toutes colloquintides car
entre les fortes elles y conviennent seullement.
Donc affin que vous puissiés eschever le peril de ces dictes medicines. Alés
vous en I jardin ou il y aye plante de rafanum, de percil, de fenouil et en ostés les
racines mais non pas du tout et les pertuises d’une aleyne ou de une grosse aguille
et soyent lardées de elle boro nigro et soyent couvertes ainsi qu’il appartient et les
laisse desoubz terre XL jours ou plus. Et quant vous en vouldrés user ostes tous les
177
lardes et de remenant faictes oximel. C’est ung merveilleux digestif et evacuatif. Du
vous le evacuerés ainsi par tout l’an et par aventure il souffiroit « (…) puluerem
epichimi » preng de c’este pouldre checun jour une cuilliere avec cler lait de chievre il
est de si grant vertu que se aulcun est disposé a lepre et il acoustume c’est medicine
il ne sera point meseau. De la maniere du laxatif, nous en parlerons quant nous
parlerons des serpens laxatifz, et si parlerons des caparu purges et des cauteres.
Donc se le corps est mundifie purge le chief « (…) celidonie tanisie nasturcii
auripigmenti agni casti pulegii origani (…) se macropiper (…) muscate (…) et III
bulliant in vino albo et addanture olei sizammini (…) et bulliant simul et colentur ». Et
puis prenes laine succide ou coton estoupés de chanue et les baigniés en la dicte
caladure et puis en degoutte une goutte ou II es nazilles du patient et faictes cecy au
matin devant mengier, cecy le fera estarnuer ou pissier et purgera les superfluites du
cervel et aquosites et les semblables. Du vous y mettes suc de marjoraine et suc de
la moyenne escorce de sambuc. Du faictes ung esternutoire de ceste pouldre « (…)
pulverus castozei et (…) et ellectuarii ». Du faictes ung tel masticatoire « (…) euforbii
piretri piperis castorei sinapi (…) cum oximelle squillitico et modico cere fiat
cerotum » et en prenés le gros d’une feve et machiés douclement ente vos dens.
Donc purgiés le chief par aulcunes de ces manieres devant dictes et puis faictes
cauterés deux jambes d’essoubz le genouil en la concavité qui est sus le nuiscle et
faictes ainsi es bras et faictes fecions ou col et ventouzes entre les espaules avec
scarificacion et faictez cauterés au chief en quatre parties sur les commissures se le
patient le peut souffrir et tenés ces choses cy au moins XIIII jours.
Quintement, venons au baing le patient doit estuvé et en l’estuve mettés ces
choses cy « fumusterre scabina lapacium acutum anthos (…) sitcados camomille et
melliloti » et en mettés largement et faictes reré le chief et les surcils. Et l’aues tout le
chief de cest decoction « (…) piretri stafigrazi euforbi macrpiper nucus muscate
sulphurus vini auripigmenti ruberi sinaper oloe pulverizentur et bulliant in aceto imulto
et pernes » ung drapel aspre et le boutes [folio 37V] en ladite decoction et en frotez
fort le corps du chief jusques au piés devant et derriere et puis le lavés d’eaue
chaude doulce et puis luy donnés .I.(…). de triaques avec vin de decotion de
fumoterre. La maniere de toutes ces choses cy est telle, quant il sera levé au matin il
yra esbatre attrempement et si s’efforcera de bouter hors toutes fuperfluitez et puis il
178
entrera es estuves et la il sera froté par tout le corps et puis le lavera on ainsi
souvent par plusieurs jours et par plusieurs mois continuelement ou interpolement
ainsi que le patient le poura soufrir.
Et quant il y sera hors du baing et que tout sera fait ainsi que dit est, avant que
on luy baille la triaque on luy oidra le corps de cest unguent pour conserver les
humidités du corps « (…) gallarus et mirabolanorum et oleum sisaninum et bulliant in
aceto » et les oignes. Apres toutes ces choses cy faites encores estuvés des
d’herbes et oignes tout le corps de ceste eaue « (…) lilii iari draguntee (…) et
distillent par allembicum et addatur aqua de (…) fabarul aqua rosa ultramarin optiba
et gariofil et (…) muscate » Et de ceste eaue lavé chun jour la face et le chief et tout
le corps. Ces choses cy embellissent et palient et aussi fait sang de lievre chault se
la face et tout le coprs en est oing.
Sixiesmement, or venons aux serpens de lieux bien secs qui on le dos noir et
luy loyez vers les extremitez le chief et la queue et le bates tres bien de petites
verges et puis souldainement II hommes luy copent l’un la teste et l’autre la queue
tout ensemble et le laissez debatre sur la terre et tant plus se demenera et plus
ystera de sang et mieulx vouldra.
Et pius vous l’eschorcerez et le lavrés d’eaue doulce ou salée chaulde et puis
de vin pur et de telz serpens vous luy enferez menger en toutes manieres que vous
pourés secretement, car briefment a parler pour meseaux après mundification du
corps nous n’avons autre voye. Donc prenés la dit chair du serpens et la cuisés en
eaue jusques a la separacion des os avec la teste, de fenoil et de anet et pain bien
cuit et avec sel et puis lui faites menger la chair et humer le broet ou autrement la
chair soit appareillée ou broyée avec une alle de geline et .I. petit de gingembre et de
pain de sucre et en faites .I. blanc menger. Du aultrement la dite chair du serpens
soit appareillé avec pouldre de coriande et gingembre et soit mis en orthocrée que
on appelle ruissolle. Du ladite chair ainsi appareillée soit broyée fort avec pouldre de
gingembre et noix muscade et pain de sucre et en soit fait ellectuaire. Du perne
serpens vifz et le mettes en tres bon vin avec « epitimius » et avec sernr et
« polipodiu et anisium » et les semblables et avec « summitates feniculi et aneti » et
luy faites boire et le vin avec ung petit d’eaue. Du que toutes ces choses en temps
de vendenges soyent mises en moust et le vaisseau ne soit pas tout plein. Et quant
179
le vin sera esclacy vous le mettres en ung aultre vaisseau pour le garder. Ce vin cy
lasche le ventre chescun jour deux foys ou troys et est viande et beuvrage et
medicine et tout le corps soit lavé de la decoction du serpens et quant il aura asses
usé de serpens et que nous le verrons fort escumer et avoir scothomie et aussi
sincopim et grant tumeur en tout son corps, c’est [folio 38R] tres bon signe, car
serpens sont bons en toutes manieres aultrement nul n’est cure ne perserve et si y
vault moult triaque. Tontes ces choses cy doibvent estre faictes et que le corps soit
premierement mundifié.
Septiesmement, nous venons a oster les bossectes et eminences et y’a
plusieurs manieres de elles elever. Aulcuns les copent en croix et les aultres les
ostent par corosis, les aultres les cauterizent mais vecy la meilleur maniere de elever
c’est que vous pernes le neu ou bossette a ung croc ou unes pincetes et le coppes
tout hors d’un rasoir et faictes ainsi de tous se le patient le peut souffrir. Et
assembles le sang que en ystra et le mesles tres bien avec litargie bien pulverizé et
toute la face et tout le lieu en soit emplastré et le laissiés ainsi jusques a trois jours et
puis le lavés d’eaue de bren qui s’appelle « aqua furfu… ».
Et faictes ainsi de toutes les aultres eminences et puis les oignes de cest
oignement « (…) virgini citrini lib .se. ungenti fusti, ungenti ad scabien litargiri .III.
misceant » et en oignes toute la face ou les aultres lieux et soit ainsi ung jour ou une
nuit. Et quant il vouldra mengier on le lavera d’eaue de decotion de bren. Et s’il estoit
delicat on le doit premierement suffumiguer la face d’eaue d’une decoction de ces
herbes « (…) malue bismalue la pacci acuti fumiterre ». Et puis doit on oindre le lieu
de l’art et puis coper. Et s’il doubte la incision on doit corroder le lieu et cauaterizer
par ceste pouldre « (…) tartari viride eris salis armoniaci calcis vive (…) pulverizent ».
ceste pouldre soit meslée avec vin aigre et soit mise en une cassette de cire et soit
mise sur le lieu que vous vouldrés corroder ou cicatrizer ou cauterizer affin que les
lieux voisins ne se corrumpent.
Huictiesmement, nous voulons venir a la opilacion des nazilles, faictes une
tete et soint ointe de oingnement citrin et sur la tente mettes de ceste pouldre « (…)
litargiri aristologie rotonde tartari fiat pulvis ».
Du faictes ung tuel de aurea alexandrina, et lavés les nazilles chescun jour de
vin tiede en demenant et en trayant par les nazilles. Item note de le regeneracion des
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pelz et des surcilz, donc les surcilz soyent scarifiés et y mettes sansues et puis les
oignes de cest oingnement « (…) capilli veneris recentis, laudani (…) bulliant in oleo
laurino ». Du faictes cest oignement «(…) talpaz combustant corticis avellanarum
nucum astanearum et cum hoc apes muscas omina comburantur et tunc accipe
capilli veneris recentis spicenardi, et laudani, bulliant omnia in oleo laurino et addatur
cera et fiat unguentum ». Et quant la scarification sera faicte si en oingnes les surcilz.
Item note de celluy qui dormy avec femme que ung mezel avait rafaitie. Il sent
pointures et mordicacions entre cuir et chair et puis sent chaleur par tout le corps et
puis froidure et insompnites, tantost on le doit saignier en plusieurs parties et par
plusieurs fois. Et puis doit on faire toutes les choses devant dictes. On doit digerer la
matiere et evacuer et puis estuver et puis faictes ls cauteres et le gouvernes comme
dit est devant par tout. De la diete premierement il ne doit point raffaitier soit
atrempre ou non ne par quelque [folio 38V] cause qu’il soye mesel ne mengier
choses chauldes si comme aux : cives, vin fort, poivres, pourreaux. Il doit fuir toutes
choses froides melancoliques, si come tous leguns excepté le broet des cezes, il ne
doit mengier chair de lievre, ne chair sauvage, ne salure, ne saulces, ne chose
putrefactible, si comme lait, poissons, chair de porc, chair de lart. Il ne doit suer ne
grant sollicitude et labeur et grant chaleur et froidure et air pestillencieux et lieux
puans, et briefment toutes choses qui atenuent le corps et ostent humeurs et
refroident et beffechent le corps, et tous fruis, et fritures, et rostissures et cuites en
pastés. Il doit estre en air cler et net arriere de fleume et superfluites et doit toujours
contrester a la maladie. Item en leonine et en allopucie on doit eslire air froit. Tyria et
en Elefancia on doit elire air qui se traye a chaleur.
Le pain doit estre de deux parties de fourment net qui soit venu en terre haulte
et legiere non pas fumée et l’autre partie d’orge necte et soit d’un jour a l’autre. Il doit
boire vin cler net et bien odorant citrin, l’eaue soit necte, clere de fontaine sans nulle
saveur, et qui coure vers orient. Il doit mengier le plus chair de volatilles domestiques
ou sauvaiges qui sont en usage excepté ceulx qui habitent en eaues et en mares.
Des bestes privées a quatre piés il mengera les extremités, de chevreau et de agnelz
alaitans et de porcelles qui habitent en montagnes mais non pas des sauvages. Il
peut user de jeunes congnilz et tendres non pas oultre six moys, et des caprilz et
serfs aussi jeunes. Item mengusse espinars, fenoils, percin, spinarus, bletes, laictues
et herbes froides et cerfueil en chose chaulde, mais en chose froide il mengera eufz
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moles de gelines. Et peu menger poisson escaumes de eaues nectes courans et lait
et non pas froumage, se quant il respire en malaise mais qu’il ne soit corrumpu en
l’estomac et ne mengusse que le lait s’il luy peut souffrir. Il se doit esbattre
attremprement devant mengier et aler en air attrempe ou qu’il se frote et galonne. Du
baing et des accidens de lame et des aultres choses face ainsi que dit est devant.
Declaracion. Ceste matiere est sourdre et orde et a mestier de grant
declaration et se nous la faisons l’ongue nulz ne le doit avoir pour mal. Et
premierement vecy une doubte pour ce que je le vueil scavoir s’il peut estre que
aulcuns soit parfaictement mezeaux sans avoir nul signe en la face et semble que
oy, car il peust estre que les membres de la face sont fors et les extremités sont
foibles et quant la matiere vient a la face nature les enuoye aux extremités et ainsi
les signes apparessent es extremités et non pas en la face et des signes signifians
mort, aulcuns apparessent es extremités et rien en la face. Et veons une partie
spasmés et l’autre non et si veons la digestive estre corrumpue en une partie et en
l’autre non. Donc il peut estre que les extremités seront mezellezs et le corps non et
touteffois riens ne apparra en la face. Et vecy qu’il advint, il fut ung homme qui eust
corrumpu les dois des piés, et des mains qu’il n’y avoyt ne fourme ne figure avec
solucion de continuité [folio 39R] que des trois jointures n’en appressoyent que une
tant estoyent ors et puans et riens n’apparessoit en la face. Et je escrivain vis le
pareil pour certain. Donc il semble par cest exemple que aulcuns soient mezeaux
confermés puisque les ongles cheent et que les piés et les mains sont deffigurée, du
tous sans ce que nul signe de lepre apparesse en la face. Au contrait dit G. et
Avicenne, et tous les aultres acteurs, car quant ils mettent les signes de lepre ils
commencent aux signes de la face. De ceste question je respons : Dieu scait comme
il en est, mais sans prejudice je dy qu’il ne peut estre que aulcun soit mezeau que les
signes de lepre n’apparessent manifestement en la face, toutes fois il pourroit estre
plus foible en la face en comparacion que es aultres lieux, mais il ne peut este que
aulcun signe ne apparesse en la face. Decy la rayson car les memebres nobles
dedens en noyent la matiere melancolique aux membres de dehors, et les legiere
elle est recente en membre rare et tenne et comcave et en la face sont telz membres
et concaves pour telle matiere recepvoir mesmement pres de lueil. Et pour ce on
prent fors signes selon les yeulx soyt de mort ou de vie, soyt en meurs ou
phisonomie. Et pour ce dit G. au livre de crisis, que lueil demonstre la disposicion de
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lame en temps de sanité et en temps de maladie. Et quant la matiere melancolique
corrumpue est receue en la concauité du nerf obtique elle trouce et rode la matiere
de quoy s’engendrent les surcils et pour ce ils tombent. Et pour ce que la matiere est
grosse et terrestre nature ne la peut assimiler et ainsi les surcils engroissent et
viennent neux et pustulles tout en tour. Et puis par la malice qui est la malice et en la
matiere corrumpue les lacertes qui vienent aux yeulx se retrayent, et ainsi
s’engendre spasme et lueil se arrondist. Et ainsi nous avons quatre choses, c’est
assavoir comment les cheveux des surcilz cheent, et comment les surcils
s’engroissent, et des neux et excrescences qui y viennent tout entour et des yeulx
qui s’arondissent. Et puis quant la matiere va au nerf de l’ouye par les temples de
dehors elle le trayt a luy et le affoiblit, et ainsi il appert en plusieurs que les aureilles
soyent retraictés et maigres et froides. Et quant celle matiere est receue es
concavités des mains et du pulmon elle les ratrayt, et cure la fourme et la figure et les
estraint par dedens. Et pour ce que la matiere se espant par dehors elle eslargit les
nazilles et a le regart horrible, et la voix appetisse et devient rauque et respire fort et
les membres ou est ceste maladie se fendent et tombent. Donc les signes de lepre le
plus apparessent en la face que en aultre partie du corps. Pour la disposicions du
lieu qui n’est pas telle que les aultres parties, si comme concavité, rarice subtilité et
tendresse.
Donc se ne peut estre que lepre soit confermée et que riens n’en apparesse
en la face, mais ils apparessent plus en la face que ailleurs. Item tu dois scavoir si
comme dit est dessus que en lepre a trois maladies. C’est assavoir : Consimile,
Officiale et Commune.
La consimile c’est maladie par luy, car lepre est erreur de vertu assimilative en
chair et par ce nous nou congnoissons, ne jugon point lepre.
Officialle, c’est ainsi que corruption de forme et de figure et jugons que c’est
lepre.
Et aussi en apostumes sont trois maladies, consimile, officiale et commune.
Consimile c’est maladie a par luy, tumeur c’est maladie officiale car s’il ne y’a
tumeur dehors, nous ne disons par qu’il y aye apostume. Donc par les officiales nous
venons en congnoissance des maladies et pour ce G au II de mordo et accidenti, il
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prenoit les signes sur la corruption de forme et de figure. Et vecy les parolles de G.
au malades : le nez devient large, l’ayne grosses et les aureilles subtilles, encores dit
G. que male digestion n’engendre point maigresse, mais elle mue l’espece de
maladie, si comme on le voyt en morphée et en lepre. Et par ces parolles on peut
conclure que nul ne doit estre juge meseau s’il n’a pas manifestement corruption de
forme et de figure. Et vous diray pourquoy je recorde tant souvent corruption de
forme et de figure pour ce qu’il poura qu’il me semble au jour duy on juge
meschamment les meseaulx qui le peut entendre s’il entende. Donc je respons aux
argumens au premier je dy qu’il peut bien estre que les signes de lepre aulcunes fois
sont plus apparens en aulcunes parties que en la face pour la force des membres de
la face, mais il ne peut este que aulcuns signes ne soyent aparans en la face. Et a
l’exemple de l’omme devant dit je respons que ce n’estoit pas lepre, ains estoit une
maniere que archetique et de scabie et ulcere des ungles corrumpt la forme et la
figure des mains. Et de ce nous dirons plus au chapitre des maladies des ungles et
se vous dy que je demanday souvent se nul signe n’apparoit en la face du dit homme
et ves qui ainsi XII ans a tout celle punaisie et ordure des piés et des mains et me
sembles que ce n’estoit pas lepre, car il neust peu viure si longuement en ceste estat
que la face n’eust este corrumpue. Dieu en scait la verité. Decy la seconde
dubitacion se le lepre est maladie de tout le corps ou de partie et semble que non
premierement pour cause de la matiere melancolique qui aduste et corrumpue
contraire a nature et pour cause de male complexion froide et seche contraire aux
principes de vie et pour cause de la corrumption de l’ordenance et disposition des
membres consimiles et officialz donc comment se pourroit faire que tant grant
corruption fust par tout le corps et que la persone peust vivre. Au contraire dit Avi. qui
dit que lepre est ung chancre de tout le corps et c’est maladie de partie. Je respons
que lepre peut estre appellée maladie cmmune et maladie de partie car se par lepre
nous entendons male complexion froide et seche assimilative en chair corrumpant,
ainsi lepre peult estre dite maladie, mais se par lepre nous entendons ce qui s’enfuit
apres celle male complexion, ainsi lepre est accident. Et ainsi nous pouvons dire
diversement que lepre c’est maladie, accident selon divers regars et diverses
consideracion et ainsi peut on dire de spame que cest maladie et accident.
Si dois entendre que a chunne action surviennent trois accidens et maladie en
est cause. Assimiler nourrissement c’est [folio 40R] une action. Ceste action aulcune
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fois est appetisse, aulcune fois est corrumpue. Donc quant la action de assimiler
nourrissement en chair est corrumpue, ou que elle corrumpt le nourrissement c’est
figure de lepre, car la chair recoit la matiere melancolique froide et seche et pour ce
elle ne peut assimiler a luy le nourrissement ne convertir en chair rouge chaulde et
moiste. Ains engendre chair rouge fleumatique graveleuse et separée qui n’est pas
vraye chair et ainsi s’engendre maaldie horrible si comme lepre, si comme G. le dit
au VI de morbo. Donc lepre c’est erreur de vertu assimilative en chair. Donc lepre
peut estre dicte maladie de tout car la matiere est envoyée a tout le corps, selon ce
que dit Avicenne.
Secondement, car elle se demonstre en toutes parties integrales, comme
sont les membres consimiles et les membres officiaux avec convenable unité qui
sont le tout et pour ce elle peut estre appellée maladie de tout.
Tiercement, cest maladie de tout car elle commence par dedens et se
demonstre par dehors et se retourne dedens adonc c’est la mort et pour ce qu’elle
occupe dehors et dedens on peut dire que c’est maladie de tout.
Quartement, on peut dire que c’est maladie de tout, car elle corrumpt toutes
les vertus et de vertu animale il appert car les lepreux ont ymaginacions et songes
terribles et insensibilité es extremités, de vertu vitale il appert en la voix et en ce
qu’ilz respirent mal, de vertu naturelle il appert orde couleur et de regard terrible, de
vertu universelle il appert en la destruction de tous les membres.
Quintement, on peut dire que cest maladie de tout, car finallement elle
corrumpt tout. Item on peut dire que c’est maladie de partie car les membres sont
fors l’un plus que l’autre, aulcun recoivent matiere, aulcuns non, et pour ce elle se
demonstre premier en aulcuns, si comme es yeux et es nazilles et aulcune fois es
yeux et non pas es nazilles et pour ce on le peut appeler maladie de partie. Et ne
dois pas entendre que c’este vertu assimilative soit corrumpue au foye, ne au cueur,
ne es membres principaulx, ne aux membres fermes et radicals, si comme sont les
nerf, arteres et les os, car avant qu’ils peussent souffrir celle corrumpcion vendroit la
mort pour ce qu’ils sont nobles et fors et enuoyent les superfluites aux membres
foibles et pour ce dit on qu’elle commence dedens le corps, car la vertu des
membres de dedens enuoye la matiere aux membres de dehors. Et pour ce les
vaines et les nerfs et les arteres et les os pour ce qu’ilz sont fermes ilz ne recoivent
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point matiere grosse. Item yceulx membres sont naturellement frois et secs et portent
tant longuement misere, car ilz seroyent trop loing de leur atrempance aincois
vendroit la mort mais la chair qui flue et reflue et qui est membre chault et moiste elle
peut recevoir plusieurs corrumpcions et alteracions et mutacions sans mort. Et pour
ce que la lepre voit que nul membre du corps ne la veult soustenir fors la chair tant
seullement pour ce demeure elle en la chair. Donc lepre est maladie de chair et non
pas du cueur, ne des os, de des nerfs etc.
La tierce dubitacion est se lepre male complexion est egale ou diverse, G. dit
que elle est diverse, c’est [folio 40V] complexion naturelle et le mal complexion qui
survient, car se elle estoit egale tantots viendroit la mort.
Quartement, on peut doubter se saignié appartient point en lepre puis que la
figure appartient corrumpue car la matiere est adonc en voye des membres de
dedens a ceulx de dehors et ce on faisoit saignié on feroit rentrer la matiere dedens
et mieulx vaulx que que la matiere corrumpue soit dehors que dedens pres des
memebres nobles tantost on mouroit, car apprement saignié n’apartient point en
lepre se ce n’est par accident comme dit est se le sang domine et habunde trop ou
qu’il fust cause de la maladie ou qu’il fust trop remply ou que on se doubtast de
suffocacion ou que on doubte de putrefacion es vaines et aultres causes devant
dictés. Touteffois je vous dy que je ay veu les medicins errer lainteffoiz en la saignié
des meseauxn car ilz ne tendoyent a aultre mes ques a tirer tout le sang.
Quintement, on peult doubter se le baing d’eaue doulce appartient point en
lepre. Et se aulcun acteur disoit que non, je dy que c’est verité de baing simple, car
tiel baing ne mondifie fors ce que est pres du cuir et pour ce il vault en serpigine et
en impetigine. Mais en lepre la matiere est parfonde et le baing d’eaue doulce y
seroit trop peu. Et pour ce nous y avons mestier de plus fors, si comme estuves avec
herbes et aultres choses, si comme dit est. Et puis il soit lavé d’eaue doulce ainsi le
baing y compete bien.
Sextement, tu dois entendre que la cause prochaine de le lepre, c’est
humidité causée de humeur melancolique qui retient proprieté et disposicion de
humeur qui habunde. Du c’est humeur horrible que nature de chair ne le peut
perfaitement assimiler a luy. Et ainsi la vertu assimilative est corrumpue et engendre
lepre. Et chacune humeur peut estre cause de lepre, mais non pas la plus prochaine,
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car la nulle humeur n’a tant grant contrarieté a nature humaine, si comme a
melancolie. Et pour ce il fault que les aultres humeurs se adurissent, et que elles
soyent transmuées en melancolie et celle melancolie passe outre en humidité que
n’est pas parfaictement digeste, ne blanchie, ne n’ectoye, ains est humidité pudente
terrestre et horrible en telle manière que nature la ne peut parfaictement assimiler.
Septiesmement, tu dois noter que putrefaction de matiere que est cause de
lepre ce n’est pas putrefaction de choses liquides et fluentes, si comme en fievre ne
ce n’est pas putrefaction de quoy est causée saignié, ni virulence comme en
apostumes. Et se aulcun disait qu’il y eust putrefaction c’est a entendre adustion et
incineracion et ainsi la matiere de lepre est putrefiée.
Huitiesmement, tu dois noter que entour de la tierce digestion qui est au foye
peut estre cause lontaigne de lepre, mais erreur vertu immutantive en chair est cause
prochaine.
Neufyesmement, tu dois entendre que matiere de lepre c’est humeur
melencolique adusté et engendrée comme cendre, et pour ce elle fait divers
sinthomes et pour ce que une partie va esconduis de l’orine, pour ce y trouve on
gravelle, l’autre partie va es muscules et les degastes et mesmement la muscule qui
est entre le poulz de la main [folio 41R] et l’antre doit en suyvant par causé de
subtilité et l’autre partie va au pulmon et a la canne et es lacertes des voyes qui
respireut et des yeulx, pour ce on spasme et retrait et mue toutes parties, si comme
dit est devant. Toutes fois cette vapeur va aux surcilz es nazilles et a la face et les
engrocist et enfler et ainsi par divers tormens elle enfle le corps humain.
Dixiesmement, note que matiere de lepre non obstant que elle ne soit pas es
membres principaulx toutesfois elle est tant male que en la matrice on ne la peut
corriger et pour ce c’est maladie hereditaire qui va boir en boir et podagre aussi, car
toute matiere incorruptible et insensible engendre maladie hereditaire et infixie et
corrumpt luy et son voisin, si comme sont fievre ague, et peoulz ou poillerie et
scabie, feu de saint et atrait et lippe ou cassir et lepre.
Item XI, vecy une doubte merveilleuse comme se peult estre que ung mezel
engendre et s’il en engendre comment il engendre masle pour ce que le sperme et
corrumpus et distempere en sustance et en complexion et ces choses empeschent
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generacion et mesmement de masle. Je respons que no obstant que ces ces choses
empechent toutes fois generacion est plus empeche par la defaute de conception
que par le peché du sperme, et pour ce non obstant que le sperme du mezeau soit
corrumpu en sustance, toutes fois la complexion se peut bien alterer et muer car il
peut estre que le mezeau est de bon regime et que le temps est atrempe et la
matrice aussi et la complexion est corrigée, ainsi peult il engendrer comme nous le
veons. Du on peult dire que tous lepreux n’engendre pas mais celluy qui n’a pas
encore grande corrupcion en luy et qui a les membres de dedens sains, non obstant
que ceulx de dehors soyent non sains, et car le sperme descent des membres
principaulx, pour ce il peut engendrer et masle et femelle, mais non pas sains
simplement, car la semence est inficie non obstant qu’elle ne soit pas corrumpue, et
pour ce il engendre semblable a luy, ainsi comme fait le podagrique, suppose que la
matiere ne veniste ne du pié, ne de la chair. Item note que en nulle manière ne par
nulle voye que le meseau aye participacion a femme n’y est bon se ce n’est en
matiere sanguine devant sa confirmatcion, car elle refroide ainsi que fait saignié et
pour ce saignié en lepre confermée ne y compete point, car il seroit trop refrody et il
a mestier de chaleur, et de moisteur de quantité atrempée quant est de sa nature. Et
se on argue que avoir participacion a femme compete en manie. Je dis que en ceste
maniere de maladie qui s’appelle manié, n’a pas si grant corrupcion, ne incineracion
comme il y’en a en lepre, et pour ce en manié, peut competer habitacion a femme, et
en lepre la matiere est corrumpue et venineuse aussi. Et quant on esmeulst matiere
venimeuse se elle infectionne et envenime les parties voisines. Et avoir habitacion a
femme esmeut les humeurs et la matiere venimeuse, et le mesle avec les humeurs,
et aussi car elle refroide et seche, et tous lepreux sont fois et secs en racine quant
est de la matiere de la maladie. Pour ce je dy [folio 41V] que en lepre rafaiter n’y
compete poin non obstant l’opinion et l’erreur commune des gens qui dient que
rafaiter vault conte lepre et si la cure.
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[ folio 49R] De panarice et vertigine XXVII
Panarice c’est ung apostume chault douloureux en la racine de l’ongle
aulcunes fois avec ulcere, aulcunes fois sans ulcere et fait saigniée virulente et
adonc le voit n’est pas sans peril, la diete soit donnée subtille devant et puis
medicine. Donc quant le corps sera mundifié au commencement faites une emplastre
« (…) fait in aqua (...) Et opponaci et camfora et farina oredei et aceto. ». Et en
l’augmentant oignes le lieu de bordure de l’aureille et en l’estat oignes l’apostume de
« musillago psilii facta cum lacte » et la fin de l’estat ouvres le d’une aguille et en
declination vous y mettrés farine de lupin et miel et s’il y avait ulcere on le doyt curer
par aloé et par encens et par arcenic Et se fendure estoit en ongles on le doyt oindre
de mastic dissolu en huyle de zizanine. Et se il y avait spasme et corbelle aux ungles
et mezelerie mindifié le coprs et purge melancolie et le oigne de graisse de gelline et
hyle de zizannine et puis soit raclé de voirre et puis soit emplastre de semence de lin
et gomme de cypres. Et se nous voulons que les ongles cheent oignées les de huile
daux ou soufre et de arsenic et de vin aigre et se par froissure sang noir mort estoit
desoubs l’ongle on doit forcer l’ongle doulcement et laisser fluer le sang et puis le
fomentés de vin blanc et camomille. Et se aux ongles estoit blancheur layde on le
doit oindre de noix de cyprés et de farine de lupin avec vin aigre et s’il y avait couleur
citrine on le doibt oindre de vin aigre et huyle de eruca.
Clarification. Tu dois entendre que les ongles sont la superflute du cueur et
pour ce ils sont ainsi que les emonctoires du cueur et toutes fois apanarice
competent reparcutifs, si comme es autres apostumes et plus, car ils sont moult
sensibles et pour ce c’est grant doleur et pour ce choses froides y competent et aussi
font narcotiques, ne la matiere n’est pas tant venimeuse non obstant qu’elles soit
chaude que on n’y doye mettre reparcutifz car j’assoit ce qu’il se tourne a couleur
verde et livide et noire toutes fois cecy en fait plusieurs par la disposicion du lieu que
par la maladie de la matiere. Et quant est de la nature de panarice la matiere n’est
pas tant adusté que on n’y puisse mettre reparcutifz et aussi de c’est emonctoire qui
a tant longue voye au cueur que la matiere peut bien estre consumée et evaporé
avant qu’elle vienne au cueur. Donc on ne doit point doubter le malice de la matiere
que on ne face saignée de la partie contraire que on y mette repercutifs. Vray est
que quant on le gouverne mal il y vient virulence et adonc se devroit on bien doubter
que le doit ne soyt perdu.
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Secondement, note que les dens et les ongles et le os sont des superfluites
[folio 49V] dessus les os non pas quant a la premiere matiere radicale mais par
semblance, car ils sont engendrés de matiere grosse et terrestre. Et dois noter que
les ongles sont engendrés des superfluites des mains et des piés, car la se terminent
les veynes et les arteres et sont es extremités en lieu de darmures et pour grater et
pour prendre les choses menues et pour les dois estre plus fors. Et pour ce quant les
ungles sont gros et rudes ils signifient l’omme rude et indigne car humeur grosses
habundent en leur corps et se les ungles sont subtils ils signifient le contraire.
[folio 122R] Livre III, Le XXVII chap. des passions des gingives.
Passions de gingives sont plusieurs, si comme molificacion car elles
saignent legierement et sont humies et pleines d’umeurs et ont croissance de chair et
diminucions, corrozion, pourriture, chancre et fistule, apostumes et par consequent
feteur pour cause de putrefacion des gingives.
Cause : La cause de ce peut estre ainsi que dist est des aultres passions des
dens et de la bouche, car de l’estomac montent humeurs corrompues aceteuses ou
fumeuses et corrompent [folio 122V] les gingives ou les aultres parties corrompues
de la bouche ou cest du chief et flue aux gingive ou ce peut estre pour male
complexion de gingives. Les signes sont souvent ditz car se cest de l’estomac il y’a
douleur agravative et se cest du chief semblablement se le canest chaulde il y’a
chaleur, rougeur et pointure. Se la cause est froide on sent froidure de coloracion
mendre douleur et les semblables.
Prenostication : dlce racions et corrozions de gingives s’il dure longuement
ce devient chancre se la matiere est seche et melancolique ou en fistule s’elle est
humide fleumatique les adustes et chauldes sont moult males.
Cure : En passion des gingives se les particularités si accordent, faites
saignée de la cephalique et puis venteuses ou col avec scarification. Et puis des
veynes des lesstres et puis des veines qui sont dessoubz la langue et puis scarifies
les gingives mesmemement quant elles se augmentent en enflent ou putrifient ou
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corrompent et puent et puis purges le corps selon la exigence de l’umeur pechant et
de la partie patiente or venons aux choses particulieres donc en petite mollificacion
et au commencement d’apostume on doit gargariser diamoron avec saffran ou faites
bouillier en vin et en « aceta galla sumac balaustia olibanuz ou aubun » et faites
gargarismes ou melsles les avec miel et oines au faites fricacions et ointures et
choses semblable et de sel rosty et alun rosty et de galle rostie et frite mises en vin
aigre. Mais se il y avait corozion putride, chance ou fistule faisons ainsi : gargarizes
les et les fomentes des choes diuretiques et puis de oximel squilitique et puis il usera
de ceste medecine « …alluminis, sallis communis et assent psidia..copularum
glandium…radicis aristologie rotonde : piperis longi cinamomi spicentardi …gommi
arabici dragraganti pulverisentur ista et bulliant in aceto et addatur mel et
conservetur » et de ce vous en oinderés les gingives corrozés et chancreuses en
chescun jour, mais premierement vous devez laver la bouche de vin de decoction de
fueilles de olyves et oximel quilitique. Et faites ces choses cy deux fois ou trois le jour
tant qu’il soit parfitemet cure et guery. Cecy cure sans nulle doubte gingive mollifiée
et corozée putrifiée, fetide et chancreuse, toutes fois vecy moult especialles a chance
« …aristologie rotonde tartar…alluminis assis stercorum…feris ferri combusti
gallarum balaustic pulverisentur et cul succe foliorum olivarum conficiatur » et en
oindre les gingives chancreuse et se la ulceration estoit profonde et que le lieu fust
ensistule il usera de ceste medecine qui s’ensuyt « …arcenici…vitrioli…gallarum
psidie…se pulverisentur et conficientur…cum aceto squilitici ». Et quant tu en
vouldras user tu en destemperas ung de vin aromatique et en metteras entout la
tente et le boutteras en la fistule. Vrayement ceste medecine est de si grant vertu
[folio 123R] que elle mortifie fistulle en quelconque lieu que elle soit ou cas que le
patient tiendra diette subtile et que le corps sera bien mundifié et la medecine puisse
aller jusques au fons de la fistule. Et pour ce quant fistule est encharnée at
aparfondie en l’os de la mandible adonc il convient descouvrir et regarder bien le lieu
et que on y mette eaue de arcenic distillé et puis la medecine des os et peult on
cauteriser le lieu d’une aiguille de cuyure et pour ce que par ces medecines vient
plus grant douleur et chaleur il le connvient mitiguer par huylle rosat et eaue rose et
vin aigre et aubuns d’œufs et sumac et pour e maintenant y doit on mettre mitigatifz
maintenant aultres choses. Et quant nous veons que l’os est sain et la chair saine ne
faison plus ceste operacion, mais lavons la bouche chescun jour de vin de decoction
d’encens et de mirre et puis rengendrons la chair par telle manière « …aloe mirre
191
sarcole masticis thuris sanguinis… » vous en oindrés chescun jour le dit lieu. Et s’il y
avait apsotume chault gargarisés de decoction de plantage : « portulace rosaruz
psidi balaustie gallarum » et les peut on confire par telle manière que on en face
ointure, ou emplastre ou gargarisme. Et se l’apostume estoit froit adjoustes avec les
choses devant dictes et ce que s’ensuyt ycy « alllumine… » et mel et le meurisseies
ainsi par telle manière « … farine…farine volatilis molendini succi yris portantis
colorem purpureum…galline recentis et…porcine et oleo…et fiat
emplastrum…unguentnum ». Et se l’apostume est froid si adjoustes « olibanum… ».
Et se feteur venoit des gingives nous le pouvons bien congnoiste ainsi. Frotes les
gingives du doit et tastes se le doit put, car il pue c’est des gingives. Item laves la
bouche de vin se le vin put c’est des gingives. Donc faites se que dist est et se les
scarifies et laisses moult de sang fluer et gargarises vin de decoction de
« olivani…corticis citri cinamomi…spicenardi » et puis tenes en la bouche pillules
faite de alipta muscata. Etse la can estoit moult chaulde gargarises eaue de
decoction par sirop portulace : « violarum sandal et camphora » et puis tenes
toujours en la bouche pillues faites de triasand avec eaue rose et « acetosite de citri
et sand et muscatet. »
Declaration : tu dois entendre que sang de dragon est de froide complexion
et a une vertu de conglutiner et deffent humeurs de venir au lieu et attrempe moult
bien les medeciurs chauldes et beaucoup d’autres choses aussi. Et par ainsi il peult
engendrer chair non pas de pure entencion, car telles choses sont chauldes et
seches et si comme aloes « thus mirra sarcola…aristologie » et les semblables. Mais
il engendre chair en dessechant et en conglutinant la humeur et en deffendant que la
humeur n’y vienne en reprimant la chaleur des autres. Et pour ce es ulceres la ou
[folio 123V] il nous fault rengendrer chair nous y pouvons mettre sang de dragon.
[folio 142R] Livre IV chapitre IX
Le IX chapitre de pleuresis
Pleuresis c’est ung apostume chault des lacertes, ou des pannicles, ou des
couvertes des costes de dedens du four du pis. [folio 143V] Tu dois entendre que
pleuresis est double : vraye et non vraye. La non vraye est es lacertes ou en la chair
192
des coustes de dehors ou es costes faulces qui sont sont dessoubz le diaframe
soyent dedens ou dehors comme se c’estoit fait de ventosite, mais pleuresis vraye
est faite es couvertures des coustes par dedens, mesmement ou les couvertes sont
conjoinctes aux coustes, car il y a une pannicle qui euvre les coustes par dedens et
ung aultre qui divise les membres nutritifs et l’appelle on dyaframe et ung aultre qui
divise le pis du long en II parties. Or est il ainsi qu’en iceulx coUvertures es parties
loing des costes ne se peut engendrer apostume, mais il vient bien es parties la ou
ils se conjungent aux costes, car il y a veines et arteres et aucunes carnosites et
humeurs et la se peut engendrer apostume. Donc pleuresis vraye c’est une
apostume des couvertes des costes par dedens et est chault ou pour ce que la
matiere en chaulde ou pour ce qu’il aquis chaleur et putrefaction et s’engendre
pleuresis en chescun coste ou dextre et ou senestre mais ou senestre c’est le plus
perilleux, mais il se termine plus legierment. Et celle du couste dextre est moins
parilleuse mais elle se termine plus longuement et en plusieurs manière aulcunes
fois insensiblement par evaporation et est la meilleur terminacion aulcunes fois par
resudacion et va au polmon et le boute on hors par toussir. Aulcunes fois se termine
par sanie et va par la canne du polmon, aulcunes fois il va a la concavité du pis et
est mundifié en XL jours car quant le polmon se dilat il tort, icelie matiere de pleuresis
s’endurcit et va aulcunes fois aux voyes de l’orine par veine grande, aulcunes fois va
aux intestins ou aux aultres memebres si comme nous verrons au chapitre des
signes.
Cause : Pleuresi est causée de causes extrinseques ou de cause
intrinseques. Les causes extrinseques si comme par trop grant chaleur ou froideur et
mesmement quant trop grant mouvement et survient et vient de boire trop de vin pur
ou par trop boyre eaue froide ou quant le vent de bize vente et puis auster. Ou il
vient selon la disposicion et la proprieté des temps de l’an et pour ce il vient plus
souvent en printemps, mais de sa proprieté il vient plus en yver quant est de fleume
es anciens il vient peu et se il vient c’est grant peril et vient peu de rompure. Se c’est
de cause intrinseques adonc la cause antecedente est replecion du chief et de tout le
corps et mesmement quant grant froidure vient soudainement en l’air la cause
prochaine c’est communement colere. Secondement sang, tiercement fleume,
quartement melancolie.Dentosite peut estre cause non pas pleuresis.
193
Signe : Aulcuns sont qui signifient pleuresis aucuns signifient humeurs
pechant, aulcuns temps de maladie, aulcun temps de translacions de matiere a
aultre partie, aulcuns signifient salut, aulcuns morts, aulcuns sont qui sont distingués,
prenostiques sont compris en iceulx et n’en fault point faire de rubrice. Et par ceulx
cy nous congnoistrerons quant la maladie sera longue ou petite et la longueur de
l’estat depuis le commencement et en ce se despent tout la cure [folio 144R] donc
les signes qui signifies pleuresis sont III selon G186 au livre de crisi. Le premier c’est
douleur du couste avec pointure, car il y a quatre causes de douleur. Male
complexion, solucion de continuité et mal matiere qui est hors des orifices des
veines. Le second signe c’est fievre continu, car la matiere est putrifiée es lieux
prochains au cueur. Le tiers c’est difficulté de trespirer par compression du polmon.
Le quart c’est tousse communicant pour ce qu’il resude au cannals. Le quint ce peut
estre poulz serin, car la matiere est fleumatique. Decy les signes de l’umeur pechant,
se la matiere est colere l’orine citrine et intense et retenue et le pouls dur hatif et
souvent et douleur ague pongitive moult intens et le sput citrin. Et les aultres signes
de colere enalant par les choses naturelles et non naturelles et contre nature. Se
c’est par cause de sang l’orine sera rouge et espesse et le pouls plein et le sput sur
rouge. Et doit entendre que sput vermeil est moult mal signe, car il signifie veine
rompue et adonc doit on faire cure contraire, si comme en ydropizie ave fievre, car
pleuresis a mestier de mundificatifs et veyne ouverte de constrictifs. Sput subrouge
c’est bon signe au commencement car il demonstre dnnacion de sang qui se digere
legierement et vient du pannicule par voye de resudacion, non pas par voye de
rempure. Donc on congnoit sang pas ces signes et par las aultres qui demonstrent
dominacion de sang. Du congnoit fleume car l’orine est remisse et espesse et le
poulz desordonné et plente de salive et son crachement est fleumatique et son
dormir et grave. Matiere melancolique on le congnoit par ce que douleur n’est pas
moult intense, ne ague. Le sput est petit et livide. Urine remisse et les aultres signes
qui signifient melancolie et ne vient pas souvent de melancolie. La tierce espece est
prinse des significacions des temps de maladie selon Ga en son livre de crisis. Donc
tout le temps auquel on ne crache riens ou on crache indigest, ou liquide, ou
aquatique ou gros et viscoux et globeux, ou a moult grant peine et labeur de tousse
c’est commencement de maladie. Quant on commence a cracher aultrement digest
186 Gallien
194
avec aulcune allegance et au moins de travail c’est augmentacion, quant le sput est
blanc et legier et egal avec legiere tousse et allegane c’est estat. Et quand ces
choses cy commencement de la maladie est loing toute la maladie sera longue et
quant le commencement est brief toute la maladie est brifefve. Pleuresis de colere en
estre en jeune homme et fort est de briefve terminacion et se toutes les choses
particulieres ne si accordent, il se terminent communement en quatorze jour. Et
quant la matiere est moult froide et le temps et le temps moult froit adonc il prolongue
et se estent jusyes a XX jours, aulcunes fois a XXXIIII et aulcunes fois plus. Et de ce
dit Ypocras de pleuresis non vraye ou de pleuresie de matiere froide que tels
apo[folio 144V]stumes attendent a eulx ouvrir aulcuns jusques a XX jours, aulcuns a
XL, aulcuns a LX par necessité et ainsi je dy par aulcune conjecture prochaine a
verité, on congnoit l’estat par les longacion du commencement. Donc si comme on
congnoit les temps de maladie par l’orine en maladie du foye et des veines et es
maladies de l’estomac et des intestins par egestion, ainsi congnoit on les temps de
maladie en passions du pis et du polmon par le sput. Donc en maladie du pis et du
polmon on doit le sput considerer dilligamment, aultrement nous ne scaurions
prenostiquer, ne bailler, ne cure. Donc vecy regle en pleuresis et en periplemonie qui
plus crache, plus se allegit. Et pour ce que plus approche estat plus allegit car en
pleuresis saluable estat n’est pas pire des humeurs, pourtant qui si comme la matiere
en resudant yst du pannicle ainsi elle est boutée hors et va ainsi tousjours en
allegant, car il n’y a point cy d’estat quant aux accidens, mais quant a digestion. La
quart espece des signes est prinse des choses qui signifie en translacion. Donc la
matiere de pleuresis sinthomatique est transmise au cueur et le signe c’est sincopin,
aulunes fois va au polmon et le signe c’est douleur ague, mais douleur ou difficulté
de respirer est encore plus grande, aulcunes fois se teansmue a ptisique dequoy le
signe c’est callefaction plus grande apres menger que devant. Aulcunes fois va es
nerfs, le signe c’est spasme, toutes ces delegacions sont tres mauvaises, aulcunes
elle est envoée derriere les aureilles a donc ce pouroit estre bon signe avec plusieur
aultres bons signes. Le quint espece des signes est prins des choses qui distinguent
les signes distinctifs entre apostume du foye, le pouls va par undées et douleurs est
dessoubz le diaframe, en la dextre partie et la tousse est seche, la douleur n’est pas
ague. Et se cestoit en cime legestion est ainsi que laveur de chair et c’est ou gilbns
l’orine est espesse et confuse, et la tumeur est en manière d’une glance. Et vecy les
signes qui distinguent entre pleuresis et periplemonie, car periplemonie le pouls va
195
par undées, la douleur n’est pas ague et respire a plus grant peine et a on douleur
entre les espaules et les mandibles sont rouges. Et veci les signes qui signifient
frenesis, noirsure de la langue et secheur et grine remisse et paravant on n’a pas eu
douleur es costes. Le VI signes est prins de choses qui sihnifient salut c’est sput
legier et egal avec petite tousse avec alienacion du patient et qu’elle se contivue et
qu’elle appare tost au commencement sans doubte c’est signe de saluts mesmement
quant les aultres signes si accordent si comme bien dormir, bon appetit , bonne
patience et que les medecines que on y appareille y valent et que l’egestion ne soit
point trop clere, mais soit joincte et egale et a heure acoustumée et que l’orine se tire
a aulcune rougeur et commence a faire resudance. Vecy une bonne regle pour
l’orine selon Ysaac. Orine est maladie de foye et de veine a certaine significacion soit
bonne ou male en maladie qui sont hors des veines, [folio 145R] si comme en
pleuresis et es semblables. Se l’orine est louable c’est bon se ce n’est certain signe
de salut des aultres il pourra mourir. Se l’orine est m()le et indigeste et ainsi des
aultres males condicions c’est certain signe de mort, car puis que digestion deffault
en la racine elle deffault bien es rames. Le VII signe est prins de prenosticacion de
mort. Se tous les III signes de pleuresis sont moult intenses ou apparans ils signifient
mort, si comme douleur forte en jeunes hommes quant la vertu du tout est
tresbuchée par force de douleur et aussy forte difficulté de respirer et souvent, car
frequentacion eschauffe et chaleur fait frequentacion. Et aussi tousse de grand
labeur qui empesche dormir et aussi fievre tres forte qui est plus agravant de toutes
maladies, si comme il est escrit ou livre d’ingenio et aussi de sput on prent signes
mortels, si comme quant le sput est livide, noir, viscoux avec tousse de grant labour
et aussi quant on ne le peult expeller par foiblesse de vertu et des lacertes et est
signe de viscosité et de grosseur de mtiere. Et tu dois entendre que en en toute
maladie materielle du pis se on le peult expeller ou se on l’expelle soudainement et
la gravelle demeure c’est signe mortel suppose que la matiere fust digeste car elle
estouffe. Egestion clere et souvent est male l’orine ussi trop tenue ou espesse livide
moult noir ce sont signes mortels et aussi pouls foiblesse et entens que en pleuresis
et en quelconque maladie son euvre droitement sans faire erreur se le patint ne se
alegit par les medecins devement appliquées avec les choses universelles et
particulieres et il va en agravant c’est tres mal signe et mortel et en telles maladies
on ne y doit pas arester.
196
Cure : Au commencement on doit considerer s’il est constipé se faites cristere
ou suppositoire selon la convenance des choses particulieres et puis faites
calefactoires sur le lieu, car ou ils curent ou ils digerent, se le corps n’est pas plain il
curent et se le corps est plain ils augmentent la douleur et se digerent quant
universelle purgacion precede, se la douleur descent la matiere esr grave et pesante,
adonc la doit on purger par violets et cassiaf(…) et mannat, toutes fois G vouloit que
plusieure chose seroit en toute dolour montant ou descendant faire saignée, donc en
pleuresis se le corps est plain et vertu forte faites premier saignée selon Avicenne de
la saphenes dicelluy coste et puis se plenitude y est de la basilique de l’autre coste
et se il ne voulait faire des saphenes faite de la basilique de l’opposite coste et dois
cy entendre que selon la doctrine de G sur celle partie : Quando dolor spatulas etc.
Du foye vient une veine et va au cueur et se divise apres et monte droittement
jusques à deux guide gi, mais depuis qu’elle vient du cueur ung ramel yst hors du
troncs droit vers dextre et senestre et font la basilique en la curvature du bras. Ces
deux basiliques tirent du puis et pource ce seroit chose egale quant a ce de saignée
de quelconque que ce fust fait, car la distance est egale, mais aultres choses ya, car
les veines capillaires qui nourrissent les haultes costes elles ont colligance avec les
veines capillaires qui viennent de la basilique et ainsi au commencement saignes le
corps. [folio 145V] Mundifies le corps plein faites d’ung mesmes coste et attrairoit on
ou lieu par les veines capillaires et feroit on augmenter le lieu et se en maladie
confermée en corps qui ne fut pas plein, ne pletoriques on le faisoit de la partie
contraire. Adonc on attrairoit la matiere corrumpue aux memebres nobles. Donc je
conclus que au commencement se le corps est pletorique on doit faire saignée de la
basilique de la partie contraire ou de la saphène di celle partie et puis et puis de la
basilique di celluy coste. Et di G que se on ne peut trouver la basilique que on le face
de la veine moyene et se on ne la trouve que on face de ca cephalique car de
quelconques partie que on la face, on fait evacuacion de tout le corps. Et note que
on doit bien regarder a a saignée et a la medecine que la veru du patient ne soit
foible, car vertu cure les maladies. Apres faites calefactoires et se la matiere est
melancolique faites calefactoires d’une esponge ou d’ung vaisseau d’arain ou de
voirre ou de terre et ainsi des aultres et mettes un drapeau. Se la matiere est grosse
et viscouse faites calefactoires de o(…) fenugrec et bran e soyent broyés et mettes
en ung sachet et faites bouillir en eaue avec ung petit de vin aigre puis les exprimes
fort et les mettes sur le coste. Et quant il commence a refroider mettes ung aultre
197
chaults. Et se la matiere estoit sanguine aquatique faites calefactoires de sel et de
mil rosty et puis le mettes en ung sac et mettes tout chault sur le coste et puis il
usera de cestuy beuvrage en gargarisant et humant et tenant longuement en la
bouche « radicis brusti, spangi graminis (…) endivi, scariole (…) I capelli veneris
recentis ordei (…) quattuorse (…) minorum et mariorum, semis papaveris albi,
liquiricie munda (…) bebarum (…) mellis (…) panis sucre (…) fiat sirupus (…) et
semis » et se la matiere estoit froide et le temps froit et la matiere fust difficile a yssir
nous y pourons adjuster de melle « alias (…) et parum de aceto et ysopi et apii (…)
et parum de aceto » et se la tousse estoit foible et nous ne doubtons les choses qui
distinguent le pis on y pouroit ces choses devant dictes ne aidassent ainsi que elles
devroient faisons ung tel emplastre maturatif et mitigatif puis que nous veons que la
maladie convient prolonguer « radicis malue, orobit, (…) conquassantur et bulliant in
aqua et fiat emplastrum cuz oleo zizannini ». Et se la matiere estoit moult chaulde
faites unguent de pulveum et beur sans sel ou de gresse de cane et huille violat et
cire blanche et ces huiles et unguens peuvent estre mis en laine succide et soit mis
sur le pis et luy laisses une heure ou deux et mettes puis ung puis aultre.
Diette. La diette se doit diversifier selon la elongacion de l’estat ou regart du
commencement, quant il crache petit on luy doit donner petit et quant il crache asses
on luy doit donner largement, quant la maladie est de tarde ter[folio 146R]minacion
on lui doit plus donner car la vertu ne la pouroit souffrir et quant la maladie est brifve
il peut estre content de petit viande, car la vertu le pourra bie souffrir, quant il crache
petit on lui doit donner petit en comparacion a ce que on luy a donné devant a une
fois car la vertu est foible et ne la pouroit digerer a une fois et se il crache moult il
semble que la vertu soit forte et ainsi luy doit on donner largement de viande en
comparacion a ce que on luy a donné devant a une fois et j’assoit ce que nous luy en
donnons petit en comparacion on a tout la maladie, c’est pour ce que la maladie est
de briefve terminacion, donc on ne peut ordonner diette son ne congnoit les
longacion de l’estat du commencement. Le pleuretique soit content d’eaue d’orge
coulée ou se non donnés lui eau d’orge sans rien oster, c’est a dire tisane espesse et
se la maladie est prolonguée il mengera .I. petit d’orgeat au matin et moins le soir. Le
pleuretique peut user de .VIII. beuvrages. Premierement de eaue d’orge quant nous
voulons nourrir et refroider et mundifier. Secondement y peut user de ydromel
aquatique c’assavoir : (…) .I. mel. et lib.I. d’eaue de fontaine se nous voulons plu fort
198
mundifier. Tiercement il peut user de vin blanc foible aquatique creu en montaigne
avec plente d’eaue quant nous voulons plusieurs conforter vertu on se doit garder de
ces deux beuvrages au commeucement quant la matiere est chaude. Le .IIII.
beuvrge est sirop julep, c’est eaue de fontaine avec pain de succre quant il est
delicat et nous voulons refroider. Le .V. beuvrage peut estre suc de milgrain doulce
avec plente d’eau de fontaine quand nous voulons amoistir et conforter. Le .VI. peut
estre tel « (…) mellis aceti (…) se panis zuccre (…) misceantur ». C’estuy beuvraige
vault moult pour les delicatz quant nous voulons refroider et mundifier. Le .VII.
beuvrage peult estre brouet de jeune poulle quant la personne est delicate et foible
et plein de fastide. Preng une poulle blanche et la cuys avec plente d’eaue de
fontaine et avec laictues et semences froides sans sel et sans chair salée et sans
aultre chose et le faites tant cuire que la chair se separe des os et luy faites user de
cestuy brouet par intervalles et ostes la gresse se il en y avoit. Le .VIII. beuvrage
peut estre s’il avoit soif et insomnite qu’il ne peust dormir et secheur de langue, c’est
assavoir sirop violat ou sirop de nenufar ou sirop de papaver avec plente de sirop
julep ou avec eaue d’orge ou avec eaue de fontaine et les semblables. Et dit
Avicenne que on ne doit pas despriser le miel en passions des memebres spirituels
ou des medecins avec miel, mesmemment quant la matiere est grosse et compacte
et le temps est froit et ainsi des aultres et soit appareillée et represses ainsi qu’il
appartient au pleuretique. Et se ces choses ne souffisent il poura bien user de avenat
de farine de froument cuite au four appareillée avec du lait de amande et puis apres
poura user de la couleur de bran et aussi en son cas il pourra bien user de poissons
a escames de eaues moult nettes fort courans et puis soyent cuyts avec sel et [folio
146V] percil et eaue. Donc on doit engrossit le regime selon la elongacion de l’estat.
Et toutes ces choses cy et les semblables soyent laissées a la discrecion du
medecin. Il peut aussi user d’eaue de malues, de bourages, de violettes et de buglos
et peut user de spinars et de laictues et peut user de passules mundées et de
amandes et de jujube et de cucurbitus et vio. et se la matiere estoit chaulde usera
de jus de caules de ysope avec miel et suc de citrons pain s’il est sans levain il n’y
compete point, car il opile, mais pain levé vault a rompre l’apostume et pour ce on ne
lui doit donner que pain levé après rompure et declinacion se l’apostume n’attendoit
trop. Donc en declinacion on luy donner mie de pain trois fois foye baignée en eaue
et peult on donner aussi œufs molets et decocion de chair de chevreau et de
aigneau et pommes cuites et milgraine doulces, toutes fois tu dois entendre aulcunes
199
regles que vecy et sont X. Ne faites jamais saigniée, ne ne donne viande engrant
douleur ou en grant torment se la vertu ne choit par voye e inanicion, jamais ne faites
saigniée ne medecine, se ce n’est en temps de tres grant necessité et ce ces choses
cy ne si accordent, c’est assavoir que la maladie soit en declinacion et la matiere
grosse et viscouse et la vertu soit forte et la tousse et difficulté de alaine soit grande
et que on en donne en petite quantité avec plente de ptisane, aultrement pour sa
force en la voye pluieurs en sont mors.
Item aulcuns mettent repercutis au commencement de pleuresis et je ne suis
point dicelle opinion, car son les applique par dedens ils engrocissent et estraident et
acruissent et font putrifier ou on les met dehors et adonc ils ne peuvent epercuter,
car les veines dempsite des costes. Itez ce ne seroit pas repercuter, mais se seroit
plus faire venir matiere au lieu, car on reparte la matiere derrier et non pas devant.
Item aulcuns se efforcent de curer pleuresis par attractifz le corps mundifient
et metent ventosites sur le lieu et emplastre de sinapis et les semblables. Mais je ne
suis pas bien de leur condicion, ne opinon pour ce que que la matiere n’est pas
traictable pour la nature du lieu et pour ce que toujours se doit on doubter de
augmentacion de l’apostume pour la violence tractation. Item plusieurs se efforcent a
mitiguer les accidens, si comme alienacions, infomités, soif, constipaion, laxacion et
les semblables et a ceulx ci je me accorde fors entant que se au comencement se
pleuretique et la maladie est curable. Tel malice de sinthomes n’y vient point mais
prenons qu’il soit cure certainement c’est persit de y mettre conseil et les remedes.
Vous les trouverez en leurs lieux ne pour ce ne fault point prolonguer. Et se nous
prolongons et il nous faille meurir fait ung tel sirop « … » [folio 147R] Et preng les
choses devant dictes et ce qu’il s’en suit c’est orobi « …columbini oppoponcis… » et
en faites emplastre et le mettes sur le coste. Et se on fait sort que (…) de rompure de
sanie et de tousse et de telle choses alons au chapitre de tousse et de asma et
empima187 et de ptisi et vous trouveres plente de mundificatif et pour ces choses il ne
fault point plonguer levure. Donc nous voulons dire de ptisane, preng orge gros plain
et peseant bien meur, non pas trop ancien ne trop nouvel sans nulle male odeur ou
saveur et sans mixtion d’aultre chose et soit coueilly en année plentureuse non pas
corrompue ne pestillencialle et soit creu en terre haulte et venteuse non fumée, ne
187 Probablement de empysème
200
pres de mares, ne pres de lieux corrompues et soit le grain garde lieu evaporable. Et
de tel orge tu en prendras une livre et le casseras avec son ecorche et le mettras en
une oulle de terre vitrée avec xX livres d’eaue de fontaine et fay bouillir petit feu fait
de boys sec non corrompue et soit le feu sans fumiere et cler et net et arbre de
genevrier ou chasne et le fay boullir tant que la moytié soit consumée et puis le
laisses refroider puis le coules doulcement et soit gardée nettement. Ceste eaue a
toutes bontés en abstergant, en mundifiant, en penetrant, en refroidant et ainsi des
aultres. Et dois entendre que orge a tout son esorche absterge et mundifie mais sans
escorche elle nourit plus et conforte et se nous voulons quelle nourisse plus si la
passion tant bouillir que les deux parties de l’eaue en soient confumées et soit ainsi
que espesse et la beuves ainsi. Et l’appelle Ypocras ptisana cum toto et la premiere
en l’appelie ptisane coulée. Et se nous voulons faire orgeat osts l’escorches de l’orge
et laves en plusieurs eaues doulces pui la cuyres autant que chair de vache puis le
broyes tres tout en ung mortier et puis le destempes de lait d’ainelle et le coules et le
cuises a petit feu tant qu’il commence a especir. Aulcun sont ptisane ainsi. Ils mettent
orge froisse en une ammolle ou en une buyre et l’emplissent de eaue et la metten en
une chaudiere pleine d’eaue qui boult sur le feu et font la bouillir, l’ammoulle sans
fumée elle est bonne pour les delicats. Et note que decoctions se font de plusieurs
grains si comme d’espiaultre, avoine, froument cezez, orobus et fenugrec et
plusieurs aultres. Mais selon Ypocras et tous les saiges la decoction de l’orge passe
tout et requiert pardon quant je mensuis si brief des peche comme la matiere soit
difficille et perillieuse, mais je lay autrement traicté sur les regimes si comme vous
scauses. Et quant il sera en convallescence vous le baignerés et la partie du patient
mundifieres et conforterés.
Declaracion : Tu dois entendre que pleuresis n’est pas seullement apostume
ou dyaframe, mais aussi pannicles de dedens les costes, si comme Ga. Le dit en
cest amphorimse « Accibe eructationes ect… ». Item se pleuresis est engendrée de
plenitude et habundance cest plus de sang et selle est engendrée par voye de
penetracion elle est plus de colere et penetre plus et elle est engendré par voye de
treume degoutant elle engendrée de fleume et [folio 147V] selle est engendrée par
voye de congestion elle est engendrée plus de melancolie absoluement et plus
souvent elle est engendrée de colere. Et selon ceste raison et le plus souvent elle est
engndrée en printemps quant est de dnnacion de sang et plus este quant est de
201
dominacion de colere fors tant qu’elle se evapore legierment est plus en authon
quant est de dominacion de melancolie, mais accidentellement plus quant cest de
colere engendrée en esté et plus en yver de fleume par luy mais accidentellement
plus quant cest de colere engendrée en esté et conservée par authon et par yver et
adonc penetre aux pannicles et selon ceste raison pleuresis est petit causée es
anciens et selle y est causée ce sera le plus de fleume et est moult perilleuse pour
cause de foiblesse et de vertu e se c’est de jeunes gens elle est moult perilleuse
pour trop grant sentement, car en jeunesse cest plus de colere et en adolescence
ceste plus de sang. Tiercement nous devons entendre que sput rouge par luy et seul
est mal signe, car il signifie veine rompue a donc y competent medeinces contraires
comme dist est et s’il est melse avec blancheur cest bon adonc y est subrouge.
Quartement note que en coprs plein au commencement on doit faire saignée de
partie opposite et s’il n’est pas tant plein et la maladie soit confermée faites de
dicelles partie et se les humeurs sont froides avec multitude encores y peut competer
saigner et en douloureux descendant qui est la plus seure voie selon G. Et doit on
faire en corps plein selon Avic. Premierement de la saphene dicel luy coste et se il en
mestier plus se le faites de la basiliques dicel luy coste. Item note que on ne doit
donner ulle forte medecine en pleuresis quoy que les anciens en dient et aulcunes
de maintenenant se baignent et delittent en tenant ceste voye. Mais disputacions ce
ne semble pas chose raisonnable donc donnes « …jujube…buglosa viol. prunes »
et les semblables et par ces medecines cy ne sera jamais peril et en fait aussi
suppositoires et cristeres lenitif. Et dois entendre si comme dist est qui repercutifs ne
competent point en pleureis et selles y competent point en pleuresis et selles y
competent en aulcunes manière, si comme le vouloit Eb Mesué elle competent droit
a leniere et s’aulcun estoit present et que dieu luy eust donné telle grace
d’congnoistre tel commencement iniciant et qu’il eust porté en sa moin ou en sa
bource medecine repercutive ce eust este grant chose, mais telles choses ne
peuvent avenir. Si mes merveilles du bon cheme sue comment il s’endormit ainsi tout
seul. Item note que maturatifs ne competent point en pleuresis, se ce n’est qie la
maladie se plongue et novons point d’aultre voie. Donc mundifie parfaitement le
corps et y mettes evaporatifs car la sanie est moult perilleuse. Item note que vapeurs
montant au chief se refroident et tombent sur les panicles et les foulent et putrifies et
eschauffent et ainsi engendre pleuresis.
202
[folio 173R] Livre VI, Le XII chapitre de la pierre des reins
La pierre est une maladie officiale adjoustée en membre oultre nature et
s’engendre aulcunes fois en la vecie, aulcunes fois es reins et en maintes
concavités selon G. Les causes aulcunes sont prochaines, aulcunes lontaignes. Les
causes prochaines sont trois. La premiere c’est matiere grosse visqueuse, si comme
est sanie ou fleume ou melancolie ou sang gros. La seconde est chaleur excedent.
La tierce ce sont les conduis estrois vecy comme elle s’engendre quant aulcune
matiere grosse et visqueuse se tient en aulcune conduit et chaleur est forte elle
embrase icelle matiere et la veult digerer et esmouvoir et assimiler et elle ne peut et
elle ne peut l’empeschement de la matiere. Addonc elle resolve le subtil et le gros
demeur et s’endurcit et devient pierre. Les causes lointaignes aulcunes sont
extrinseques, si comme toute viande qui engendre sans gros, si comme pain a lis et
opire et mal adoube, vin nouvel et qui est gros : eau trouble , froumage ancien faves
frites et aultres legumes oyseaux qui habitent en eaues chair de bestes sauvages
poissons sans escames [folio 173V] et les semblables. Causes instrinseques ce
sont indigestions crues d’umeurs et crapule et foiblesse de vertue expulsive et quant
ces choses s’acordent la pierre se forge.
Signe : Les signes que pierre s’engendre c’est quant l’orine est trouble,
espesse avec plusieurs gravelles et se fait soudamement tenue avec douleur dicelle
parties sans soubt la pierre est engendrée et se la pierre estoit engendrée et il vient
en l’orine pulseur gravelles avec urine espesse elle signifie dissolucion de la pierre.
Et note que ceulx qui ont plente gravelle et urine espesses ils n’ont pas souvent la
pierre, toutes fois s’il avenoit elle seroit moult dure entre les aultres. Item la pierre de
la vecie setrait a rougeur et est pus mole et plus petite. On congnoit que la pierre est
en la vecie par douleur du penil et du cul et veult tousjours picer et pice a grant peine
et quant il pice il veult chier et le cul sault hors. Se c’est en enfance il a prurite en la
racine de la verge et luy tent la verge et luy fault tousjours froter en la racine. Tu dois
entendre que douleur est aulcunes fois plus interpolée, aulcunes fois moins selon ce
que la pierre est grande ou grosse, car la grande fait plus grant douleur uant elle est
la voye de l’orine. Et quanr la pierre est es reins adonc on a grant douleur en l’espine
du dos etes hanches et luy semble que on les paingne tousjours aulcunes foiselle
descent bas. Item note que la pierre des reins s’engendre plus souvent es grasses
gens et aux anciens pour foiblesse de vertu exoulsive a si grant distance, mais en
203
gent maigres et en enfance jeunes elle vient plus souvent en la vecie car vertu
expulsive l’expelle plus loings.
Prenosticacion : La pierre de vecie et des reins cest maladie qui va d’voir en
voir ce dit Avic.
Cure : premier il fera diette contraire a cause qu’il engendre pierre il tiendra
diette subtile et de le legiere digestion en toutes les VI choses non naturelles et
usera de suppositioites et cristeres grand et lenitifs et puis usera de vomir qui moult y
vault s’il prent laxatif il doit estre foible et lenitif et n’en prengne pas souvent car il
attrait la matiere au lieu contre douleur et sinthomes et faites le porter fort sur une
charrette ou sur ung cheval trotant et mal portant et le faites descendre degrés et
valées et puis le faites baignier jusques a la couroie en un baing ou soit mis ceci
« … ». Et quant il saillira du baing vous l’emplastrées de fenu grec, de semence de
lin et d’uille zizannine et puis luy donnes tiriaque nouvellle. Or venons a la cure, se la
pierre est ou col de la vecie et qu’il ne puisse picer leves luy les hanches fort en hault
et les hurtes et frotes la verge et le penils et la pierre yra au fons de la vecie et pourra
picer. Et puis devons entendre a rompre la pierre, se en l’orine sont gravelles nous
coulerons l’orine et feront secher la gravelle se elle est molle et traictable cest moult
grant esperance de romprela pierre. Se elle est ferme dure et aspre cest doubte.
Decy les medecines qui de leur proprieté elective et merveilleuse rompent la pierre,
cest assavoir lapis [folio 174R] judaicus lapis spongie cinis scorpiona cinis
scorpionum cinis leporis combusti cini (…) ovorum a quibus exiverumt pulli cinis
avicule qui vocatur cauda tremula cinis yrcia qua raphani distillata lingua serpentis
sczilla que valet contra venenum. Et pour ce que ceste cure est difficile nul ne le doit
avoir mal se nous la poursuivons tres diligement plus particulierement.
Cure : La cure de la pierre est triple. L’une est preferuative, l’autre mitiative
de douleur et l’autre vraye douleur. La mitigative de douleur cest se on ne peut picer
et que on aye gran douleur au penil et es lieux prochains et en ce cas il usera de
bain « … » et e embroque souvent eaue sur le penil et quant il faudra du baing a
chescunes fois il usera de tiriaque jusques (…) avec brouet de cezes et se on trouve
tiriaque nouvelle tant vaut mieulx. Item faites ceste emplastre et le mettes sur le penil
«…fiat emplastrum ». Ceste cure on l’appelle mitigative ou blanditive et se ainsi la
douleur ne estoit mitiguée on doit faire vomir par semence de raphanum et par
204
attriplices ou par suc de moyenne num et par attriplices ou par suc de moyenne
escorche de sambuc ou par noix vomite cecy vault aux trois manieres devant
dictees. Item « …viol.mercuri….olei olivarum… » et de cecy vous y mettres
souffisamment selon la discrecion du medecin et faites cristeres. Se nous voulons
faire cure perseruative il fera telle diete s’il peut il ne mengera de nulle chair fors de
volille commune qui n’abitent en eaues n’en mares. Il usera de cezes noirs et de
huille de cartamon et de vin blanc trempe avec eaue de cezes noir, raphanum et son
eaues distillées perserue d’avoir la pierre et aussi fait vomir souverainement et aussi
fait cristere et dormir sur le dos et I petit oyselet qui s’appelle hoce cul nouvel ou sale
cuit en eaue ou rostu ou seche puis pulverisé en tout ou en partie et aussi fait I bouc
ancien son le nourit derbes diuretique, si comme fenoil percil orge saxifrage milim
solis bethonica et puis en esté on le doit decouler et recueillit le sang et secher pr
pieces et puis pulveriser ceste poulde perferue et cure. Item baing naturel et y valent
et s’ils ne font pres pennes soufre et le faite bouillir en eaues et puis boutes une
esponge et la mette si le penil. La cure vraye de pierre qui est en rompure suppose
les choses devant dictes avec bon regime et bonne diette et que le corps ne soit pas
pletorique, ne reumatique, ne trop extenué. On fait ainsi la cure « …cinis
scorpionum… » il usera de cecy a la quantité de II ave l’anes au matin et au soit avec
eaue de decoction de psilin de tribuli marin. Item pinde le penil [folio 174V] d’uille de
de scorpions et vecy comment la fait « …scopriones… »de ceste huil, vous oindrée
le penil chacun jour II fois ou III ou panes laine lavée et la boutes et la dicte huille et
la mettes continuellement toute tiede sur le penil. Item s’il ne peut picer pour ce que
la pierre est trio grande et estoupe le conduit qui est petit faites ainsi qu’il tienne le
chief bas et hurtes la vecie et frotes et comprimes et la pierre se descendra en la
vecie et poura picer et sera remede temporel ou boutes le doit en son cul et
comprimes la pierre ou prennes l’esprove et la boutes par la verge du vit et boutes
arrier la pierre ou prenes (…) de la confiture devant (…) et la destempes en eaue de
raphanum avec lait et le coules et gettes souvent de celle couleure a la ciringue item
il usera de cest electuaire « …diaprunis…misceant ». Item bolille roste et crevices de
fleuves rostis luy sont bonnes viandes en ce cas. Vomir apres menger luy vault moult
il doit fuit grant replecion de viandes et de beuvrage il se doit deporter
attempreement de mant menger il doit fuit toutes viandes grosses come chair de porc
fresche char de beuf fromage dur œufs durs caules leguns excepté brouet de cezes,
il doit fuir poissons que nost escame. Il usera de bourage de « fenoil spangi cala…»
205
et mal il ne prendra point de medecine laxative, mais il usera de vomir devant
menger et apres par aulcuns intervalles, car il conforte merveilleusement toute
lopacion. La cure de la pierre qui se doit faire par la main du cirgien quant est de
present je le laisse.
Declaracion : Tu dois entendre que pierre s’engendre de matiere cuite non
pas parfaitement et est visqueuse. Se elle estoit toute crue elle ne se pouroit
coaguler pour l’umidité superflue et se elle estoit seche elle ne se pouroit espessir
mais se pulveriseroit et pour ce il convient quelles soit visqueuse. Et quant chaleur
naturelle fait action en matiere crue et visqueuse elle la cuyt et oste le subtil et le
gros demeure et s’endurcit donc il se cuit mails il ne se digere point pour la matiere
qui est inobedient. Se condement note que pierre peut estre engendrée de sanie se
la froidure est ostée, mais non pas souvent et pour ce ne s’engendre pas souvent es
femmel pour leur froidure et les conduis qui sont larges et les voyes sont briefves.
Tiercement note que pour engendrer pierre III choses sont necessaires come dit est
premier chaleur forte qui exale le subtil et consume et parconsequent le remanant
s’endurcist et devient pierre, mais froit en congelant ne le pouroit faire en corps
humain ains bien droit la mort qui tat grande froidure fust en corps humain a ce fait
aussi le lieu qui est estroit et pour ce il appartient que pierre ne peut estre engendrée
seulement de melancolie jassoit ce que le contraire soit dit mais cest a entendre de
melancolie seule et non pas souvent et vecy la cause pour quoy elle ne se peut
engendrer car elle n’a point de viscosité ainsi comme a fleume si se peut meulx
pulveriser qui assemble. Et se la pierre est engendrée de [Folio 175 R] de viande
chaudes ce n’est pas pour ce quelles soyent melancolique, ains pour ce quelles sont
indigestibles et fleumes crue s’engendre de toute viande soit sanguine colorique ou
melancolique selle n’est bien digerée, en l’estomac et ou foye s’engendre humeur
crue qui appartient a fleume et telle matiere est convenanble a engendrer pierre. Et
note que en l’estomac peut estre moult de te tele matiere et chaleur forte et que les
conduis sont larges et en tels trop peu s’engendre la pierre. Item note que la pierre
en anciens se s’engendre pas ainsi tost que es enfans car les enfans abundent plus
en matiere fleumatique et en chaleur pour cause de la age et aussi pour le mal
regime di ceux ils abundent plus en fleume et ont le col de la vecie estroit et la
s’assemble la matiere et de la pierre et quant ils sont parcrus les conduis
206
sellargissent et yssent hors les superfluites et pour ce es aultres a ages en suivant
comme es anciens la pierre sengendre plus es reins
Transcription livre VII
[folio 185R ] Le VIII chapitre des menstrus retenus :
Menstrus fluent naturellement depuis leXIII an jusques XLV ou LX ans
aulcunes fois plus tost ou plustart selon la diversité des membres et des autres
choses particulieres aucunes fois ils sont retenu naturellement aulcunes fois oultre
nature : comme jusques a XII ans ou XIIII et outre XXXV ou XL ou LX ans et entre
deux selons diversités des choses particulieres. Et sont retenus naturellement
comme en concepcion : et ils fluent ce n’est pas souvent pas souvent. Item menstrus
fluent selon la age de la lune, car ils viennent aux pucelles ou premier quarton : et es
jeunes ou second quart et es vieille ou tiers et es anciennes ou quart et pour ce nous
pouvons juger que jeunes gens se doyvent saignier en nouvelle lune et les
anciennes en vieille lune.
Cause : Menstrus sont retenus ou par cause extrinsque comme par trop
deporter par trop de de fain ou par trop de gresse par fievre ptisique ydropizie par
playes et les semblables. Se c’est par cause intrinseque c’est ou pour cause du vertu
ou du membre ou d’umeurs, se c’est par cause de vertu c’est par aulcune
complexion qui affoiblit vertu, si comme male complexion chaude quant elle excede
ou froide ou seche ou moiste. Elle affoiblit vertu et n’expelle point la superfluite ou
elle expelle en lieu non convenable et aucune fois les menstrues retenu, sont envoyé
aux nazilles aulcunes fois aux emouroydes et ainsi des aultres, aulcunes fois ils dont
retenus pour le membre ou pour le conduit estroit ou estoupe, si comme la matrice et
l’orifice des veines se c’est pour humeurs c’est pour quantité pour ce qu’il y a trop
petit de sang au corps en qu’il est trop gros, ou trop visqueux, ou trop froit et ainsi
des aultres qualités.
Signe : Se menstrus sont retenu pour cause froide la femme est moult [folio
185V] descoulourée et sompnolente avec ung petit de soif le poulz est tardif et l’orine
remisse : aulcunes fois elle met hors superfluites musillagineuses par les intestins.
Se c’est par cause chauld elle est coulourée et soif et le poulz hatif et l’orine itense
207
avec les aultres signes chaulx ou on peut faire par ceste manière qui n’est pas moult
honneste. Panes ung drapel net et delie et la baignes es menstrus puis le mettes
secher et puis le laves et s’il se tire a couleur citrine c’est colere. S’il est blanc c’est
fleume, ce c’est a liveur c’est melancolie. Et par ce on congnoit l’umeur pechant et la
cuse de la retenue et la cause de sterilité et des semblables. Et aussi on le congnois
par la manière du corps qui est retenu ou gras ou par ire et playes ou trop labourer et
fievre et les aultres causes primitives sont congneues par les causes devant dites.
Prenosticacion : Se menstrus sont retenus oultre naturel le medecin peut
pronistiquer quant aux membres d’amont de inanie epilence. Et quant est des
membres spirituels comme tousse ptisique et suffocacion et quant aux membres
nutritifs de nausee et ydropisie et quant est membres bas on a podagre. Donc c’est
profit de esmouvoir menstrus qui sont retenus oultre nature.
Cure : Au commencement se les choses particulieres si accordent faites
saignee des II basiliques pour la cause antecedente et puis de II saphenes pour la
cause conjoinctes et quand on atraye la matiere vers le parties basses et puis
mondifies la matiere selon l’exigence de l’umeur pechant et quant le corps sera altere
mondifie il usera de diuretiques et de apperitifs et les medecines qui esmeuvent
l’orine esmeuvent menstrus. Decy les choses materielles qui esmeuvent menstrus :
« … ». Et prenes une de ces choses cy ou plusieurs et en peut on faire pessaire ou
emplastre ou unguent ou beuvrage ou electuaire ou qui on gette en la matrice
aulcune decoction de ces choses cy. Se la femme estoit corrumpues et s’elle n’estoit
corruompu on luy fera baing emplastre unguens et les semblables et luy laves bien
fort les pies, les jambes et les cuysses c’est bon pour esmouvoir menstrus et quand
on luy tienne longuement. Dentoses mises es cuisses y valent moult medecine
composte si comme je « … ». Et dois entendre que stomaticum lacativum quant on le
cuit on le doit mettre en concavité de cannes ou sambuc et quant il est refroide on
doit oster la fuste et ce la demoura dur commeune chandelle et en fera on ung
pessaire. Cecy esmeut merveilleusement menstrus se le corps est mondifie et aussi
fait mirre se on le pulverise et on le met ung sachet et on le boute en la matrice et
aussi fait celle quntida et fiels de bestes. Et note que s’ils estoyent de forte vertu si
comme est nigella et les semblables on les doit mettre en petite quantité et y doyvent
208
demourer I petit et non pas quant on dort car aulcunes fois il fait fievre ou la matrice
se ulcere. Et quant nous voulons [folio 185R] ouvrer des choses fortes on doit faire
cauteleusement mesmemmt en parsonner delicates. Et se la retenue estoit par cane
chaulde vecy les choses materielles : (…) Et se la retencion estoit par causes
primitives manifestes on les doit ramener a attemprance par leur contraires. S’elles
sont attenues on le doit faire tenir oyseuse et menger viandes moistes et se elles
sont grasses faites contraires se c’est pour ire se luy faites joye. Se c’est pour
maladie du corps on le doit curer premier.
Declaracion : Tu dois entendre que femmes jeunes qui sont oyseuses et qui
sont remplies de viandes elles habondent plus en menstrus pour ce qu’elles ont plus
super fluites et femmes qui labourent fort et menguent petit on peits menstrus pour
ce qu’elles ont peines ou elles n’en ont nuls. Et s’elles estoyent tellement oyseuses
qu’elles engroicissent et les veines se restraindissent et se opilassent, elles auroyent
moins de menstrus, mais ce seroit par acident. Item note que quant nous faisons
saignée en retencion de menstrus nous la devons faire parmie rement petit, car
vertue est oppressée et puis apres on la doit faire grande et forte, car vertu est
fortefie, mais en pleuresis non car la maladie est de legier mouvement et ne pouroit
soustenir. Item note que menstrus descendent de la seconde digestive. Et son disoit
que la semence est de la tierce digestion et que le corps est mundifié par l’un et par
l’autre. Je dy que ce n’est pas chose semblable en tout mais bien partie, car la
semence est superfluite de la tierce digestion, mais non pas menstrus car ils
seroyent blans donc menstrus viennent de la seconde digestive ou l’umeur
s’engendre et menstrus resemblent humeur. Item note que jassoit ce que le foye
resemble a sang et semble qu’il soit engendré de sang. Pour ce dient les aucteurs
que le foye c’est sang coagulé, toutes fois il est engendré des premieres semences
et est blanc en raine ainsi que sont les aultres membres radicals se le sang en est
oster purge du tout et appert aussi qu’il est cuit. Item note que les femmes ont
sperme car elles ont la tierce digestive et ont dydont et caillons et les aultres
membres principaulx. Et se Arist.188 dit qu’elles n’ont point de sperme c’est a
entendre par comparacion aux hommes car sperme de femme est indigest et
aquatique. Sperme de femme d’omme est glanduleux et blanc, mais sperme de
femme est trop loing de ceste nature. Pour ce disoir il que les femmes n’ont point de
188 Aristote
209
semences et appert, car elles se corrompent par elles et ont delectacion en leur
propre semence. Item note que femmes ont plustost menstrus que les hommes ne
ont spermes par foiblesse de vertu qui default, mais i n’est pas ainsi es hommes.
Item note que menstrus viennent en temps determiné, car nature enten en aulcune
manière soy aider et pour ce il ne est pas impur les aultres superfluites ne sont pas
ainsi aidées et sont impure et aidés et pour ce elles ne gardent ne ordre, ne periode.
Item note que en retencion de menstrus femmes desirent plus pour le gatillement
ainsi que prurite que sont les menstrus, mais non pas en flux, ne apres le flux. Item
note que retenion de menstrus appetice l’appetit [folio 185V] de viande, car il remplit
et resmeut habiter, car il pointille. Item note que comme les aultres bestes ayent
menstrues, toutes fois ils apparent pas manifestement pour cause de petite quantité
ou pour ce qu’ils se meuvent en poils et en cornes. Et j’assois ce que semence de
bestes brustes habonde de plus en superfluite, toutes fois le males ont plus grans
cornes et plus grans veaures c’est par la force de vertu qui l’expelle plus loing et plus
fort.
Item note que au chapitre des mammelles dis est se les hommes ont menstru
ou lait et les semblables. Ites note que femmes grasses charnues ont moult de
menstrus, mais les grasses froides et moistes habondent plus ou second quartier se
ce n’estoit fantastiquement par cause de rarificacion comme dit est. Item note que
menstrus aviennent plus en printemps par cause de force et de vertu et a ce baing
stiptique y peut bien bien competer car le sang ne passe point les veines intraseques
et ainsi il ne va pas aux membres nobles ainsi il passe dehors par le mediastines.
210
Présentation des sommaires des six autres livres de Fleur de lys en
medecine
Cy commence le second livre qui traitcte de toutes maladies du cervel jusques
a la maladie des yeulx et contient trente chapitres.
Le premier chapitre parle de allopicie
Le second des cheveulx qui cheent
Le tiers de l’asprete des cheveulx
Le IIII de canicie et orner les cheveulx
Le V de furfures de cheveulx
Le VI de pustules de la teste
Le VII de fane qui est fenge ou chief
Le VIII parle des tignes du chief
Le IX des poils ou pouls du chief
Le X de la douleur du chief
Le XI de vertigne et scotomie
Le XII de liatrgie et de mygraine
Le XIII de mémoire corrumpue
Le XIIII de congelacion
Le XV de de dormir et somme innaturel
Le XVI de parler de stupeur
Le XVII de veille et de veiller
Le XVIII de manie et de melancolie
Le XIX d’amour qui s’appelle hereos
Le XX est de yvrongnie
211
Le XXI parle de frenesie
Le XXII de sternutation ou esternuer
Le XXIII parle de incurvés
Le XXIIII de epilence
Le XXV de appoplexie
Le XXVI de paralisie
Le XXVII de spasme
Le XXVIII parle de tremeur
Le XXIX parle de jectigacion
Le XXX de torture ou torsure
Cy comme me tiers livre qui parle de la maladie des yeulx
Le premier chapitre est de la nothomie des yeulx
Le second parle des passions er maladies de la conjuctive et sont XIII c’est
assavoir obtalmier, ongle, macule, rouget, pannicule : pouldre qui chiet es yeulx
duresse, pruritr, apostume, graveleux, ulcere et sanie, excressence de chair et
diminuition et fistulle ou lacrime
Le tiers de la corné et de ses maladies
Le quart de passion de tuver come de dilatacion et constriction de la pupille
Le V de faiblesse de la veuve
Le VI de passions qui appartiennent a l’oeul. Et premier de borgne ou
strabosite
Le VII des passions des pauperes et sont XVI maladies
Le VIII des passions des aureilles
Le IX des aureilles qui cornent et sonnent
212
Le X de douleur d’aureilles et des apostumes de dedens
Le XI de ulcere et sanie d’aureilles
Le XII de sang qui est es aureilles et de laquosite qui y demeure
Le XIII de chose qui chiet en l’aureille et de l’opilacion d’aureille
Le XIIII d’apostume qui vient en la racine des aureilles par dehors
Le XV des passions du nas
Le XVI de reume et corize
Le XVII de flux de sang des nazilles
Le XVIII de sternutacion
Le XIX des maladies de la bouche et premierement de fendure de la leste
Le XX des passions de la langue
Le XXI de flux de salive et default de odeur
Le XXII de pueur de bouche
Le XXIII des passions de la bouche
Le XXIIII des lentignes de la face
Le XXV des passions des dens
Le XXVI des dens qui sont perforés
Le XXVII des passions des gingives
Cy commence le quart livre qui parle des membres spirituels et de leurs passions
contient XIIII chapitres comme il appert cy apres
Le premier chapitre de Squinance
Le second parle des passions de la bule
La tierce des raucedine et mutation de voix
213
Le quart de la tous
Le V de ptisique
Le VI de cracher du sang
Le VII parle de epimate c’est des putanieux
Le VIII de difficulté de respirer et asmat
Le IX de pleuresis
Le X de periplemonie
Le XI de tremeur de cueur
Le XII de sincopin
Le XIII des passions des mammelles
Le XIIII de trop grant habundance de sang
Cy commence le V livre qui parle des passions des membres nutritifs
Le premier chapitre parle de difficulté de transgloutir
Le second de faiblesse d’appetit
Le tierce de faiblesse et indigestion, de douleur et de male complexion
d’estomac
Le quart de appetit canin
Le V de soif
Le VI de reupeur et eructacion
Le VII de s’engloutir
Le VIII de fastidie et regime de santé de corps
Le IX de de abhominacion et de nauzée
214
Le X de de vomir et des appendences
Le XI de inflacion de l’estomac
Le XII de torture des intestins
Le XIII de lieuteré
Le XIIII de dessinteré
Le XV de tenasmon
Le XVI de recapitulacion de tous flux de ventre et contient XXII chapitres
Le XVII de passion iliaque
Le XVIII de passion colique
Le XIX de mitachin
Le XX de vermes
Le XXI des passions du cul de condilomata
Cy commence VI livre qui parle des passions du foye, des reins, et de la vecie
et contient XVI chapitres
Le premier chapitre parle de male complexion du foye
Le second de opilacion
Le III de apostume du foye
Le IIII de flux de sang du foye
Le V de Hydropisie
Le VI de ictericie
Le VII de passion de l’esplain
Le VIII de passion de reins
215
Le IX de apostume de reins
Le X de ulceres de reins
Le XI de picer du sang
Le XII de pieres de reins
Le XIII de la vecie et commence a la passion diabetique
Le XIIII de strangure
Le XV de ceulx qui picent au lit
Le XVI de dissurie
Decy le VII livre qui parle des passions des membres generatifs, de l’omme et
de la femme
Le premier chap. est de petit habiter
Le second de satiriazie et priapisme
Le tiers de gomorrée
Le quart de pollucion de nuit
Le V des passions du vit
Le VI d’apostume et playe des coillons
Le VII de creveure
Le VIII des maladies des femmes
Le IX de trop grant flux de menstrus
Le X de retencion de la matrice
Le XI de d’apostume de la matrice
216
Le XII de playe du con
Le XIII de precipitation de matrice
Le XIIII de sterilité de femmes
Le XV du regime de femme grosse
Le XVI de difficulter d’enfanter
Le XVII de retencion de secondine
Le XVIII de male de matrice
Le XIX de passion sciatique
Le XX du nombrile et de gilbosite et de varuques et de douleur au dos
Le XXI des antidotes et remedes pour passions depuis le chief jusques au
piés
Le XXII des remedes et medecines qui valent contre passions des membres
spumels
Le XXIII des antidotes qui valent contre passion des membres nutritifs, si
comme est l’estomac, l’esplain et le foye et les aultres semblables
Le XXIIII des antidotes et medecines qui valent contre passion de reins et de
la vecie et des jonctures
Le XXV des medecines pour faire femme bellle
217
REFERENCES DE BERNARD DE GORDON DANS SES ECRITS
Source : Demaitre Luke E., Doctor Bernard de Gordon : professor and
practitioner, éditions Pontifical Institue of Médieval Studies, 1980
218
LEVITIQUE
Extrait du Lévitique, chapitre 15 :
1. L'Éternel parla à Moïse et à Aaron, et dit :
2. Parlez aux enfants d'Israël, et dites-leur : Tout homme qui a une gonorrhée
est par là même impur.
3. C'est à cause de sa gonorrhée qu'il est impur : que sa chair laisse couler
son flux, ou qu'elle le retienne, il est impur.
4. Tout lit sur lequel il couchera sera impur, et tout objet sur lequel il s'assiéra
sera impur.
5. Celui qui touchera son lit lavera ses vêtements, se lavera dans l'eau, et sera
impur jusqu'au soir.
6. Celui qui s'assiéra sur l'objet sur lequel il s'est assis lavera ses vêtements,
se lavera dans l'eau, et sera impur jusqu'au soir.
7. Celui qui touchera sa chair lavera ses vêtements, se lavera dans l'eau, et
sera impur jusqu'au soir.
8. S'il crache sur un homme pur, cet homme lavera ses vêtements, se lavera
dans l'eau, et sera impur jusqu'au soir.
9. Toute monture sur laquelle il s'assiéra sera impure.
10. Celui qui touchera une chose quelconque qui a été sous lui sera impur
jusqu'au soir ; et celui qui la portera lavera ses vêtements, se lavera dans l'eau, et
sera impur jusqu'au soir.
11. Celui qui sera touché par lui, et qui ne se sera pas lavé les mains dans
l'eau, lavera ses vêtements, se lavera dans l'eau, et sera impur jusqu'au soir.
219
12. Tout vase de terre qui sera touché par lui sera brisé, et tout vase de bois
sera lavé dans l'eau.
13. Lorsqu'il sera purifié de son flux, il comptera sept jours pour sa purification
; il lavera ses vêtements, il lavera sa chair avec de l'eau vive, et il sera pur.
14. Le huitième jour, il prendra deux tourterelles ou deux jeunes pigeons, il ira
devant l'Éternel, à l'entrée de la tente d'assignation, et il les donnera au sacrificateur.
15. Le sacrificateur les offrira, l'un en sacrifice d'expiation, et l'autre en
holocauste ; et le sacrificateur fera pour lui l'expiation devant l'Éternel, à cause de
son flux.
16. L'homme qui aura une pollution lavera tout son corps dans l'eau, et sera
impur jusqu'au soir.
17. Tout vêtement et toute peau qui en seront atteints seront lavés dans l'eau,
et seront impurs jusqu'au soir.
18. Si une femme a couché avec un tel homme, ils se laveront l'un et l'autre, et
seront impurs jusqu'au soir.
19. La femme qui aura un flux, un flux de sang en sa chair, restera sept jours
dans son impureté. Quiconque la touchera sera impur jusqu'au soir.
20. Tout lit sur lequel elle couchera pendant son impureté sera impur, et tout
objet sur lequel elle s'assiéra sera impur.
21. Quiconque touchera son lit lavera ses vêtements, se lavera dans l'eau, et
sera impur jusqu'au soir.
22. Quiconque touchera un objet sur lequel elle s'est assise lavera ses
vêtements, se lavera dans l'eau, et sera impur jusqu'au soir.
23. S'il y a quelque chose sur le lit ou sur l'objet sur lequel elle s'est assise,
celui qui la touchera sera impur jusqu'au soir.
24. Si un homme couche avec elle et que l'impureté de cette femme vienne
sur lui, il sera impur pendant sept jours, et tout lit sur lequel il couchera sera impur.
220
25. La femme qui aura un flux de sang pendant plusieurs jours hors de ses
époques régulières, ou dont le flux durera plus qu'à l'ordinaire, sera impure tout le
temps de son flux, comme au temps de son indisposition menstruelle.
26. Tout lit sur lequel elle couchera pendant la durée de ce flux sera comme le
lit de son flux menstruel, et tout objet sur lequel elle s'assiéra sera impur comme lors
de son flux menstruel.
27. Quiconque les touchera sera souillé ; il lavera ses vêtements, se lavera
dans l'eau, et sera impur jusqu'au soir.
28. Lorsqu'elle sera purifiée de son flux, elle comptera sept jours, après
lesquels elle sera pure.
29. Le huitième jour, elle prendra deux tourterelles ou deux jeunes pigeons, et
elle les apportera au sacrificateur, à l'entrée de la tente d'assignation.
30. Le sacrificateur offrira l'un en sacrifice d'expiation, et l'autre en holocauste
; et le sacrificateur fera pour elle l'expiation devant l'Éternel, à cause du flux qui la
rendait impure.
31. Vous éloignerez les enfants d'Israël de leurs impuretés, de peur qu'ils ne
meurent à cause de leurs impuretés, s'ils souillent mon tabernacle qui est au milieu
d'eux.
32. Telle est la loi pour celui qui a une gonorrhée ou qui est souillé par une
pollution,
33. pour celle qui a son flux menstruel, pour l'homme ou la femme qui a un
flux, et pour l'homme qui couche avec une femme impure.
221
Extrait du texte de la traduction française du manuscrit H 317 De passionibus
mulierum,
222
Traduction réalisée par Genevièe Pezeu-Gilabert en 1998.
223
SYMBOLES ET ALLEGORIES DANS L’OUVRAGE FLEUR DE LYS EN MEDECINE
Folio Contexte Symboles Signification189
LES CHIFFRES
10 V
« la quartaine commune dure
ung an »
Prenostication de la
fièvre quartaine
1 Symbole de l’homme debout. Symbole de l’être mais aussi
la Révélation.
2 R
« elle ne sestent pas oultre le
tiers jour »
11 R
« on le doit faire mengier et
petit par trois heures… »
35 R
« Y sont III maladies en
lepre »
Définition de la fièvre
Effimere
Cure la fièvre quartaine
Définition de la lepre
3 Représente la trinité. La perfection de l’unité divine.
35 R
« viande melancolique…toutes
bestes a IIII pies »
Cause de lèpre
4 On retrouve se nombre très souvent : les 4 évangélistes, les
4 docteurs de l’Eglise, les 4 grands prophètes, les 4
saisons, les 4 fleuves du paradis, les ‘ tempéraments, les 4
189 D’après : Cazenave Michel, Encyclopédie des Symboles, éditions le livre de Poche, 1989 Chevalier Jean, Gheerbrant Alain, Dictionnaire des Symboles, éditions Rober Laffont, 1982 Cocagnac Maurice, Les symboles bibliques, lexique théologique, éditions cerf, 2009
224
4 V
« Il sera guerry au quatre
jour »
11 R
« On le doit faire mengier et
petit par trois heures ou par
quatre… »
Pronostication de la
fièvre causon
Cure de la fièvre
quartaine
humeurs, les 4 points cardinaux. il désigne aussi le
tétragramme JHVH (Yahwé) : nom de Dieu.
11 R
« On le doit faire mengier et
petit par trois heures ou par
quatre ou par V devant la
proxime »
14 V
« ils sont V manieres de
fievres compostes »
Cure de la fièvre
quartaine
Définition de la fièvre
composte
5 Selon Sainte Hildegarde de Birgen le cinq représente
l’homme. Représente la structure de l’homme (2 bras, 2
jambes et la tête)
16 V
« VI choses non naturelles »
4 V
« Elle soit interpolée par VI
heures »
Définition de la peste
Présentation fièvre
causon
6 Création du monde, hexagramme (les 6 pointes = les 7
planètes (moins le soleil qui est au centre)
225
9 R
« Il ne met que que VI
especes de fievres simple
singulière »
9 V
« Faictes saignié au matin et
au soir par plusieurs fois et se
on ne le faisoit et fust au VI
jour »
Cause de la fièvre
synoque
Cure de la fièvre synoque
1 R
« Car au lis sont plusieurs
fleurs et en chascune fleurs
sont VII fueilles blanches et VII
grains ainsi comme dorés, et
semblablement ce livre
contient sept parties. »
4 V
« Aulcunes fois, elle se estant
jusques au septiesme jour »
Présentation du titre de
l’ouvrage
Pronostication de la
fièvre causon
7
Nombre symbolique important. Dans l’Apocalypse de Saint
Jean, le sept représente un élément structurant de son
texte (7 Eglises, 7 cornes, 7 coupes de la colère dans le
« livre à sept sceaux ». On retrouve ce chiffre dans l’ancien
testament. Au moyen âge chiffre important : les 7 âges de
la vie, les 7 dons du saint Esprit, 7 vertus, 7 arts et
sciences, 7 sacrements, 7 prières adressées au Seigneur
dans le Notre-Père.
226
5 V
« Et se icterici venoit devant le
VII jour, si le commandes a
Dieu et s’elle venoit après le
VII »
6 V
« Tierchaine vroye est
terminée en sept periodes »
15 R
« jeunes enfans de VII ans »
Pronostication de la
fièvre tierchaine
définition de la fièvre
ethique
6 V
« Tierchaine terminée au VIIII
jours »
Pronositication de la
fièvre tierchaine
9 Selon Pseudo-Denys l’Aréopagiste, les anges sont
hiérarchisés en neuf cœurs ce qui représente la perfection
de la perfection, l’ordre dans l’ordre, l’unité dans l’unité.
39 V
« Et ce nous dirons plus au
chapitre des maladies des
ungles et de vous dy que je
demanday souvent se nul
signe n’apparoit en la face du
Diagnostic de la lèpre 12 Nombre de l’élection. Représente l’Eglise, l’Eglise
triomphante, au terme des deux phases militante et
souffrante. Les 12 apôtres, L’arbre de vie portait 12 fruits…)
227
dit homme et ves que ainsi XII
ans a tout celle punaisie et
ordure des piés et des mains
et me semble que n’estoit pas
lepre »
6 V
« Tierchaine terminée au VIIII
jour ou dedens quatorze jours
et se tourmente en douze
heures »
10 V
« Se interpole XIV heures »
15 V
« jeunes enfans de VII ans ou
de XIIII ans »
Plan du 4 me
Pronostication de la
fièvre tierchaine
Signes de fièvre
quartaine
Définition de la fièvre
ethique
14 Deux fois 7
Plan du 6 me livre 16 Carré de quatre, ce nombre indique l’accomplissement de
la puissance matériel
11 R
« Qui ostent toutes chairs et
Cure de la fièvre
quartaine
20 Symbole d’unité
228
vin jusques a XX jours »
Plan du 5me
Livre / chapitre traitant de
la lèpre dans le 1er livre.
21 Symbole de la maturité / chiffre de la perfection dans la
bible / sagesse divine
2 V
« car sa nature elle ne dure
pas oultre XXII heures »
10 V
« Ainsi les cronique ensuivent
le mouvement du soleil.
Aulcune fois elle dure par XXII
ans.
Pronostication de fièvre
effimere
Prenostication de la
fièvre quartaine.
22 Représente l’homme dans l’espace et dans le temps
5 V
« Et quant XXIII heures seront
passées, on luy doit mettre sur
le chief un g chiennet chault vif
fendu parmis l’espine du dos »
10 V
« dure l’acces XXIIII heures »
Cure de la fièvre causon
Signes de la fièvre
quartaine
24 La Bible connaît 24 2’ classes de prêtres, 24 classes de
chantres, 24 classes de vieillards dans l’Apocalypse. Ce
nombre représente la double harmonie du ciel et de la terre.
Plan du 7me 25 (Représente la loi, selon St Augustin)
229
Plan du 3me livre 27
4 V
« Il tourmente pas XX VIII
heures »
Présentation fièvre
causon
28
Folio 1 V / Plan du 1er et 2me livre 30
6 V
« se interpolle en XXXVI
heures »
Pronostication de la
fièvre tierchaine
36 Nombre du ciel. C’est le nombre des solidarités cosmique. Il
représente la triade entre le ciel, la terre et les hommes.
37 R
« Alé vous en I jardin ou il
y’aye plante de rafanum (…)
et en osté les racines (…) et
les pertuisse d’une aleyne ou
de une grosse aiguille (…) et
les laisse desoubz terre XL
jours ou plus »
11 R
« Qui ostent toutes chairs et
vin jusques a XX jours ou XL »
Remède pour la lèpre
Cure de la fièvre
quartaine
40 Nombre de l’attente, de la préparation, de l’épreuve ou du
châtiment.
230
12 R
« Ce sont passées XL ung
heures avant que les deux
qualités soient vaincues »
Clarification de la fièvre
quartaine
41 Nombre de l’attente associé au nombre de vie
LES SYMBOLES
Titre de l’ouvrage Fleurs de
lys
Symbole de l’amour pur et virginal.
2
« « effiemere » de sa racine
« ne dure pas oultre », ung
jour naturel et est dicte de
« essimon » en grec « un
jour », « poissone en latin car,
le dit poisson meurt le jour
qu’il naist »
Définition de la fièvre
« effimere »
Poisson Figure du repas eucharistique. Du baptême ou du Christ.
3 R
« Le lieu doivt estre sur terre
et pas romantique et la porte
Orientation de la maison
quand un patient souffre
de fièvre effimere
Septentrion
= nord
Selon le livre Bahir190, le mal se tient au nord. Le nord est
le lieu de l’infortune
190 Texte complexe de la tradition juive appartenant à la tradition du Kabbale juif. Le livre du Bahir ou « livre de la clarté » a été diffusé depuis les centres juifs du Languedoc par des érudits comme Rabad de Posquières (1120 - 1197) et Isaac l'Aveugle (1160 -1235).
231
et les fenestres soient devers
septentrion »
37 R
« De la manière du laxatif,
nous en parlerons quant nous
parlerons des serpens
laxatifz »
Remède contre la lepre Serpent Ici serpent vision positive, peut faire penser au serpepent
d’airains qui permet de rester en vie.
Péché originel.
Renaissance (mue)
16 V
« Mais en ethique vieille
compete lait et miel et brouet
de chair toutes fois miel en
fievre ethique est moult
nuysable. »
Remède contre la fièvre
ethique vieille. Néfaste
dans la fievre ethique
naissante
Miel Les enseignements de Dieu sont comparables au miel
pour leur propriété de purifier et de conserver (Pseudo-
Deny l’aréopagiste) – symbole de douceur.
16 V
« Et de en fievre ethique on
avait flux de ventre, on doit
donner lait cuit de cailloux
d’eaue qui soit bien chaud »
Remède contre la fievre
ethique avec flux de
ventre
Cailloux Cailloux = pierre. La pierre et l’homme présentent un
double mouvement de montée et de descente. La pierre
symbolise la relation entre le ciel et la terre
Composition dans
différents remèdes contre
les fièvres.
Lait Le lait est considéré comme un met divin, il symbolise une
offrande pure. Mis en relation avec les forces lunaires on
lui attribue le pouvoir d’éteindre le feu.
232
16 V
« Fièvre pestilentiales sont
celles qui viennent en temps
de pestilence et de
corrumption, quand les blez et
lait et les eaues sont
corrumpues »
« le signe de pestilence
(…) et que lait est obscur et
espes. »
Mauvais lait en temps de
pestilence
Dans la bible nombreuses allusions bibliques au lait pur et
doux.
5 V
« on luy doit mettre sur le chief
ung chiennet chault vif »
Cure de fièvre causon Chien Il représente la confiance et la vigilance. Mais il est aussi
considéré comme le gardien de l’Au-delà. On sacrifiait un
chien aux morts pour qu’il lui serve de guide.
5 V
« parmis l’espine du dos (…)
on y doit mettre le polmon
chault d’ung mouton »
Cure de fièvre causon Mouton L’agneau est l’animal du sacrifice, qui rappelle la victoire
sur la mort. Il représente la résurrection.
6 V
« l aye grant soif, et que l’eaue
froide soit doulce, et qu’il aye
acoustumes a boire et que il
Clarification de la fièvre
causon
Eau Trois thématiques symboliques : 1-Eau source de vie 2)
eau purificatrice 3) eau régénératrice.
233
boyve a une fois tant comme il
pourra tirer sans reprendre
son alaine »
12 V
« vient volontiers en yver et en
ancien homme et enfant et en
personne moistes et
fleumatiques et en
pescheurs »
Définition de la fièvre
cotidienne
Pêcheur Le pêcheur d’hommes, titre donné à Saint Pierre dans
l’Evangile, désigne celui qui sauvera les hommes de la
perdition.
14 R
« Tu dois noter que pain levé
avec une petite quantité de sel
selon G est meilleur que
aultre »
Cure de la fièvre
cotidienne
Pain Nourriture essentielle et nourriture spirituelle. Pain levé
représente le symbole de la transformation spirituelle
14 V
« le sang se mue du matin et
ensuit le mouvement du soleil
car il si conforme pour ce que
le soleil est en orient »
Cure de la fievre
cotidienne
Soleil
Matrice Fécondité, régénération spirituelle
Semence Puissance de vie
234
Remède Vin Le pain et le vin sont transformés lors de l’Eucharistie en
chair et en sabs de Jesus-Christ – force, sève nouvelle.
235
SYNTHESE DES CHAPITRES TRAITANT DE LA FIEVRE191
Fièvre effimere
Définition : Fièvre qui ne dure pas plus de trois jours. (« ne reste pas oultre le
tiers jours » [folio 2 R]).
Causes :
Obstruction des pores de la peau
Viandes, boissons et « medecines chauldes ».
Efforts physiques intenses
Grosseurs sous les aisselles
Signes :
- Généraux : modification de l’urine et du pouls, chaleur modérée du corps,
présence de sueur.
- Spécifiques :
Fièvre dû au soleil : tête et yeux sont chaud au touché, le pouls
s’accélère.
Fièvre dû au froid : lividité de la face
Fièvre dû à une obstruction des tissus : peau sèche, chaleur aigüe
Fièvre dû à l’alimentation : chaleur au tour de la région du foie, urine
teintée.
Fièvre suite à un effort physique : faiblesse du corps, douleur des
articulations.
Fièvre dû à la colère, au chagrin : face rubiconde, yeux apparents.
Fièvre dû à la tristesse : les yeux sont concaves et enfoncés.
191 Le chapitre X traitant de « fièvre pestillenciale » n’est pas traité dans cette synthèse se reporter au chapitre traitant de la peste dans ce mémoire.
236
Fièvre dûe à la luxure : le corps est chaud et tendu.
Prénostication : fièvre qui par définition ne dure pas plus de trois jours (plus ou
moins un jour).
Cure :
Régime alimentaire (viande légère, vin blanc)
Si patient affaiblit : jeune de trois jours
Bain froid
Sufumation
Refroidir le patient aves des linges sur le front
Aérer la maison avec des fumées de plantes
Phlébotomie, clystère, suppositoire
Clarification : C’est l’apaisement des humeurs et des membres qui entrainent
l’apaisement de l’esprit. Si l’esprit ne s’apaise pas alors la fièvre peut se transformer
en un autre type de fièvre.
Fièvre causonique
Définition : fièvre continue. « Causon » signifie embrasement. Fièvre qui
touche le sujet jeune et moins les anciens.
Causes : colle dans les vaisseaux, dans les membres et proche du cœur et
foie. Mauvaise qualité ou quantité de la colle.
Signes :
237
Langue noire et sèche
Ictère
Tumeur
Fluc de ventre
Rétention des selles
Pouls faible et mal perçu
Hématurie
Prénostication : terrible maladie mais de durée brève. Mais si de bons signes
apparaissent au début de la maladie, elle sera terminée le quatrième jour ou avant.
Elle peut durer jusqu’au septième jours.
Cure :
Frotter le pis, le ventre et les côtes et les parties douloureuses avec
du vin blanc, de l’huile de camomille et de l’eau de rose.
Sirop
Sirop laxatif
Jeûne de quatre jours, puis alimentation légère
Application locale d’un chien jeune vif chaud et fendu sur la tête
Application d’un poumon de mouton sur l’épine dorsale
Phlébotomie en dernier recours.
Clarification : il peut boire beaucoup d’eau
238
Fièvre Tierchaine
Définition : fièvre putride engendrée par la colère intense. Il y’a la colère pure,
la colère rouge et la colère par amalgame des humeurs, la colère non pure. C’est
une fièvre terrible.
Causes : fièvre dû à la colère dans toutes les veines du corps. Les raisons de
l’autre tierchaine sont dues à la mauvaise élimination de la matière.
Signes :
Le pouls est occulte puis rapide
L’urine est de couleur citrin
Pronostication : dure 7 périodes. La première est faible, la seconde plus forte,
la troisième très forte, la quatrième est dangereuse, la cinquième faiblit, la sixième
affaiblit plus, la septième termine la fièvre. Présence de sueur au paroxysme de la
crise et en sa fin. C’est une grave maladie qui est souvent mortelle.
Cure :
Faire odorer
Sirop
Respirer des plantes et de l’opium, si il a mal
Si le patient est stuporeux on doit lui frotter les extrémités
Frotter le ventre de vin blanc et de vin aigre blanc et d’huile de
camomille et d’eau de rose
Faire saigniée après la troisième période de la maladie.
Clarification : on peut faire vomir le patient.
239
Fièvre Synoque
Définition : fièvre continue causée de sang putréfiée dedans les vaisseaux.
Cause : sang putréfié abondant.
Signes :
Inflammation des épaules
Réplétion des vaisseaux
Rougeur de la face
Douleur et tourment de tout le corps et des semblables
Douleur du front
Perturbation des esprits
Frénésie
Douleur de la bouche
Hématurie
Aisselles livides et puantes
Face enflée
Asthénie du corps
Apparition de tuméfaction (mauvais pronostic)
Pronostication : Les pustules livides ou noirs signifient la mort.
Cure:
Saignée
Suppositoires et clystères
240
Régime alimentaire léger
Clarification : La vertu est supérieure à la maladie. Si la vertu commande un
traitement contraire à celui de la maladie. C’est celui-ci qui doit être appliqué.
Fièvre quartaine
Définition : fièvre putride engendrée de matière mélancolique
Cause : multiple matières mélancoliques putréfiées. Il existe deux types de
fièvre quartaine : la fièvre quartaine vraie (engendré de mélancolie naturelle, la
plupart du temps apparait en automne et après avoir ingéré de la viande), la fièvre
quartaine non vraie (engendrée par mélancolie et par adustion de « fleume », de
« cole » et de sang, suite à un épuisement ou après avoir mangé de la viande trop
chaude et aussi après de fortes maladies.)
Signes :
Froidure congelant
Horripilation
Contraction du dos
Trouble du rythme du pouls
Sueur
Urine colorée
Pronostication : La fièvre quartaine aigüe dure 1 an car elle suit les
mouvements de la lune. La fièvre quartaine chronique dure 22 ans car elle suit les
mouvements du soleil. C’est une très longue maladie qui peut devenir mortelle.
241
Cure :
Ne pas donner de choses chaudes
Ne pas donner de choses trop froides
Ne pas donner de choses trop sèches
Ne pas trop évacuer la matière
Ne pas donner trop de viande subtile
Ne pas donner d’huile
Faire vomir légèrement
Ne pas donner de trop fort laxatif
Ne pas donner d’opiacé
Faire saignée si quartaine sanguine
Repas léger
Clarification : La mélancolie a deux qualités : elle est froide et sèche et quant
elle d’échauffe et devient putréfiée et elle devient molle. La mélancolie est vaincue
lorsqu’elle est hors des vaisseaux.
Fièvre cotidienne
Définition : Fièvre de fleume putride. La matière est putréfiée dedans les
vaisseaux.
Cause : vient par paresse, vient plus en hiver et aux anciens hommes et
enfants et aux pêcheurs et au femmes qui ont écoulements qui descendent à
l’estomac.
Signes :
Froidures des extrémités
242
Petit pouls
Sueurs
Pronostications : les pores sont clos mais l’humidité est grande, c’est pourquoi
la putréfaction y est continue. Si le patient vomit volontairement, c’est bon signe, cela
signifie qu’il la matière n’est pas trop grosse et que les pores ne sont pas trop
fermés.
Cure :
Tisane
Frotter doucement le ventre et les côtes
Purge
Diurétique
Faire vomir légèrement
Faire prendre un bain chaud
Suppositoire
Faire prendre du pain
Clarification : Les humeurs se modifient en fonction des heures.
Fièvre composte
Définition : fièvres simples. Il y’a plusieurs types de fièvres compostes.
Cause : causée de plusieurs humeurs putrifiées en divers lieux.
Cure : « on les cure ainsi que les simples, pour ce je n’en vueil plus parler »
Fièvre ethique
243
Définition : touche le cœur et les membres solides.
Il y’a trois types de fièvres ethiques :
« La premier est quant la humidité du cueur et des memebres
cordials est consumée et est semblable de l’uylle et de la lampe »
« La seconde espece est quant la humidité est consumée et est
semblable de l’uyle qui dedens »
« La tierce espece est quant le glutinun est consumé et est
semblable de l’humidité substancielle et du lichin »
Cause : Toute chose qui chauffe et enflamme le cœur et les membres solides.
Pronostication : Trois espèces de fièvre ethique : une légère, une moyenne
une forte. La guérison de la fièvre ethique forte ne peut exister que par l’intervention
de Dieu.
Signe : courbure des ongles, œdème des jambes, fluc de ventre
Cure :
Vin
Tisane
Lait de femme, d’annesse, de chienne ou de vache
Onguent
Lait et miel
Brouet
244
245
Comparaison entre le texte de Bernard de Gordon (1305) et le texte de Benoit Textor (1551) sur la description de la peste.
Extrait des transcriptions sur la fièvre
pestilenciale d’après l’ouvrage Fleur de Lys
en medecinede Bernard de Gordon
(Besancon, inc 1010)
Extrait du chapitre des Febres
pestilentiales de Bernard de Gordon,
Practica Gordoni dicta lilium, Venise
1498. (Montpellier, inc J322)
Benoit Textor, De la manière de
preserver de la Pestilence, et d’en guerir,
selon les bons autheurs, Jean de Tournes
et Guil Gazeau, Lyon, M D LI
Le X chapitre de fievre pestilenciale
Fievre pestilentiales sont celles qui viennent en temps
pestilence et de corrumption, quant les blez et lait et
les eaues sont corrumpues.
Signe. Aucluns sont communs, aulcuns sont propres,
le signe de pestilence qui doit avenir, c’est quant
appret l’estoille comette comme chandelle ronde quant
maintenant est chaleur maintenant froideur et ung jour
ou en divers jours et que lait est obscur et espes et
semble qu’il pleuve et ne pleut point et que este est
chault et moiste et les oyseaul laissent leur nids et
leurs œufs sur terre et plusieurs bestes reptiles
apparent ce sont signes de impedimie qui doit advenir.
Decy les propres signes de fieuvre pestillencielle, c’est
que la chaleur [folio 17 R] de dehors est lente et
dedens forte avec soif et secheur de langue, et ne
peut on pas sonstenir la maldie ne vient reprendre son
alayne et douleur des entrilles, et tout ce qui y est du
corps est puant, si comme l’aleyne, l’egestion, la sueur
et l’orine.
LEXIQUE
247
Les définitions suivies d’une étoile sont tirées du dictionnaire en ligne de
Moyen Français du Centre Nationale de Ressources Textuelles et Lexicales
(CNRTL), les autres du dictionnaire Godefroy.
Absterger* : nettoyer une plaie, un organe, un ulcère
Accoustumer* : habituer
Acrocordine* : sorte verrue
Acteuse* : acide
Actoux : vinaigre
Adustif* : brûlant
Adustion* : altération des humeurs due à l’échauffement, l’inflammation
Agelir* : diminuer de volume, devenir mince, devenir maigre
Agroisse* : fait grossir
Ains* : auparavant, avant
Alligence* : atténuation (d’un mal physique ou moral), soulagement
Alterer* : changer
Amole* : recipient, grande fiole renflée servant à contenir, chauffer, faire
macérer divers ingrédients.
Amouiller* : mouiller, impregner
Aperitif* : qui ouvre, qui facilite le mouvment des humeurs, de la matière
Apostume* : tumeur, abcès
Arogon* : onguent actif contre les maux de reins et les rhumatismes
248
Arsure : brûlure
Aspicer* : considérer
Attemprance* : avec modération ou en langage médical « mixture normale des
humeurs »
Attemprement * : avec modération
Avenat : avoine
Baillir* : donner
Bief* : petit cours d’eau
Bolisme* : appétit intense de courte durée, fringale
Bossette* : petite excroissance, bouton, enflure
Bran* : partie grossière du son ou froment
Brouet* : bouillon
Bube* : bouton sur la peau, pustules
Buhot* : tuyau
Buyre : cruche
Cahourde* : citrouille
Calefaction* : échauffement (dû à une cause externe ou interne)
Canet* : blanc
Canicie* : blanchissement des cheveux
Catarre* : flux d’humeur, rhume
249
Causon : fièvre brûlante et dangereuse
Chenu* : blanc
Chief : tête
Chier : s’en feliciter
Chyle* : produit de la digestion
Clarification* : éclaircissement
Clausure* : séparation, cloison
Clystere* : lavement
Cole* : bile
Colloquintide* : colloquinte
Commixtion* : mélange, amalgame
Complexion* : mélange des qualités premières
Consimile* : semblable
Con* : sexe feminin
Confraction* : cassure (d’un os par exemple)
Connil* : lapin
Consimile* : semblable
Corroder* : ronger
Couillu* : qui n’est pas châtré
Courroux* : chagrin, colère
Crapule* : excès d’alcool, ivrogne
Crisin* : crise
250
Crisis* : phase d’une maladie caractérisée par un changement décisif dans un
sens favorable ou funeste
Crudité* : état de ce qui est cru
Cuir* : peau
Denteux* : qui a de grosses dents
Destemprance* : déséquilibre
Discrasie* : mauvais équilibre de la complexion
Dyanthos* : électuaire à base de fleurs de romarin
Dyarodon* : électuaire à base de roses rouge
Elephancia* : sorte de lèpre donnant la peau rugueuse comme celle des
éléphants
Eminence* : protubérance, proéminence
Emmi* : « au milieu de… »
Emonctoire* : toute partie du corps servant à évacuer les humeurs superflues
provenant d’une autre partie du corps
Empysme* : empyème, affection pulmonaire purulente
Engroisse* : fait devenir gros
Enmi* : « dans, à l’intérieur de…, au milieu de… »
Esbattre* : pratiquer des loisirs qui implique un effort physique, se divertir
Escay : échéance
Eschile* : = chyle
Escorcher : mettre à nu (une veine, un organe…)
251
Esparce* : éclaire, étincelle, lueur
Esplain* : rate
Esquinance* : angine, inflammation de la gorge
Estouper : boucher
Estuver* : faire prendre un bain chaud
Etique : maigre
Eumentoire : attaché
Fumeterre* : plante à fleurs roses, utilisée comme dépuratif (fumeria
officinalis)
Furfure* : écailles provenant d’une excoriation
Fusque* : brun sombre, noir
Galonner : frotter fort
Geline* : poule
Glutiner : cicatriser, coller
Graveleux* : véhiculant des corpuscules semblables à du sable
Habiter* : séjourner, avoir un rapport sexuel
Herpestiomene* : ulcération gangréneuse
Homotone* : (d’une fièvre) qui conserve dans tous son cours le même degré
d’intensité
Impedimie : épidémie
252
Impetigine : impétigo. Maladie cutanée caractérisée par de petites éruptions et
un prurit
Inaniaque : affaibli
Inanier* : vider, épuiser
Inguine* : aisselle
Interpolation* : interruption périodique faisant partie d’un cycle
Issir* : sortir
Lacerte* : muscle
Lenitif* : qui adoucit, doux
Lichen* : espèce de dermatose
Lienterie* : diarhée dans laquelle subiste des aliments non digérés
Lipie : chassie (humeur sécrétée sur le bord de la paupière)
Lupin* : petite excroissance
Mesel* : Lépreux
Mesmement : de là même façon
Miraboleus* : Petit fruit de l’inde de la grosseur d’une petite prune, utilisé dans
les préparations médicinales
Mordicatif* : brûlant, piquant
Morphée * : Affection cutanée caractérisée par des taches ou des plaques de
couleur blanche auréolées de mauve
Muscule* : Muscle
253
Nitre* : Nitrate de potassium, salpêtre
Oiseuse* : paresse
Opile* : obstruer, empêcher les fonctions naturelles, anesthésié
Orobe* : plante légumineuse
Oximel* : préparation médicinale à base de vinaire et de miel
Oxizacra : oxicrat : mélange d’eau avec du vinaigre
Pane* : paroi abdominale, portion d’un organe
Pannicle* : membranes
Peroxime* : accès d’une maladie
Pertuise* : pratiquer un trou dans quelque chose
Pessaire : tampon
Podagre* : qui souffre de la goutte
Poindre * : piquer
Pongitif* : piquant
Pouaillerie* : infecté par les poux
Prenostication* : Ce qui permet de porter un jugement sur la durée, le
déroulement et l'issue d'une maladie à partir des premiers symptômes, pronostic
Ptisi (Phtisis) : maladie pulmonaire, infection pulmonaire
Rafaiter* : Avoir des rapports sexuels avec une femme, satisfaire
sexuellement une femme, réparer
Rafanum* : raifort
254
Ragadies * : fissure en particulier de l’anus
Rarité* : absence de densité, d’épaisseur, maigreur
Raucedine* : raucité
Repaistre* : nourrir, rassasier quelqu’un
Repure* : eructation
Reupe* : éructation
Rissole* : pate cuite à la grande friture contenant une farce de viande ou de
poisson
Sambuc* : sureau
Sandal* : substance aromatique qui se fabrique à partir du bois du santal
blanc, citrin ou rouge, et utilisée dans des préparations médicinales
Saner* : guérir
Sanie* : pus
Scabie : Galle
Scamoux* : A écailles – poissons scamoux –
Sclerose* : Sclérose, endurcissement pathologique d'une partie du corps
Scothomie* : vertige, étourdissement
Secondine* : membrane entourant le foetus
Septentrion : nord
Serpigine : maladie cutanée évoluant en rampant, dartres.
Spissitude* : Consistance épaisse
Stiptique* : Astringent
255
Suffumiguer, suffumigation* : Fumigation pénétrant dans le corps par un de
ses orifices, autres que les narines
Sumac* : plante de la famille du térébinthe, utilisée en médecine
Sur* : qui a un gout aigre, légèrement acide
Synoché* : fièvre continue
Temprement* : rapidement
Tenasme* : envie d’excréter sans effet
Tierchaine* : Fièvre tierce, avec crise le troisième jour, laissant un intervalle
d'un jour
Ventosité* : flatulence, vapeur caausée par les humeurs et qui n’est pas
évacuée
Vermes * : vers
Viatique* : ce qui est nécessaire au voyage
Vit* : pénis
Vule* : louette
Yre (ou ire) : colère
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