Votre taux d'ISO est élevé Comment faire en pratique ?
description
Transcript of Votre taux d'ISO est élevé Comment faire en pratique ?
Votre taux d'ISO est élevéComment faire en pratique ?
Pr Jacques FABRYDr Anne SAVEY C.CLIN Sud-Est
Avril 2007
Surveillance des infections nosocomiales
Habituellement définie comme un processus de collecte, de compilation et d'analyse des données ainsi que leur diffusion à l'ensemble de ceux qui ont besoin d'être informés
Problèmes non résolus Coût-efficacité de la surveillance
amélioration possible grâce aux systèmes d'information hospitaliers charge de travail
Qualité des données & comparabilité contrôle des données en routine benchmarking : ajustement des taux communication des résultats ?
Utilisation des données pour la prévention des infections à améliorer
Indicateurs (taux)
Services cliniques & équipes, CLIN, EOH
Recueil des donnéeslourd et fastidieux
Autorités de santéCCLIN, tutelles …
Une caricaturede la surveillance des infections
Et après ?...utilisation insuffisante
Objectif de l'exercice
Partager une expérience et des idées sur l'utilisation pratique des données de surveillance des infections nosocomiales (IN) pour améliorer la qualité des soins
à partir d'un cas concret
Contexte [1] Le service hospitalier
Service B de chir. orthopédique, dans un CH de 550 lits en France avec 25 lits d'hospitalisation et une salle de soins post-interventionnelle 3 salles dans le bloc, en lien avec 2 centres de SSR.
Contexte [2]L'équipe chirurgicale
3 chirurgiens seniors plus ceux de garde le week-end
5 anesthésistes 3 assistants en chirurgie 3 internes en chirurgie Ratio en personnel infirmier satisfaisant
Le chirurgien chef est un homme affable qui aime le golf et les vieilles décapotables anglaises. Il fait confiance à son équipe, n'est pas trop encombrant et au demeurant apprécié pour cela …
Contexte [3]La surveillance des ISO
depuis 2002, participation au réseau de surveillance ISO-RAISIN
motivations principales : accréditation et bilan standardisé (indicateur SURVISO) CPOM
avec le support du CCLIN Sud-Est qui coordonne le réseau sur l'inter-région 185 services dont 47 d'orthopédie
Contexte [4]
Vous êtes infirmière hygiéniste récemment nommée à l'EOH de l'établissement (mutée d'un SSR), responsable notamment du secteur chirurgie
Comme chaque année, le référent surveillance (un anesthésiste) reçoit les résultats du service provenant du réseau ISO Sud-Est et s'inquiète pour la première fois du caractère élevé du taux d'incidence
Il vous appelle pour une aide à l'interprétation des résultats (qu'il doit bientôt présenter en réunion du CLIN) et pour la conduite à tenir
Document A : service BTaux d'ISO pour 100 opérés
2.52.42.32.7
00.5
11.5
22.5
33.5
4
2002 2003 2004 2005
Taux d'ISO pour 100 opérés
score ASA > 2
Classe de contamination
III ou IV
Durée> P75
index NNIS de 0 à 3
+ 1 + 1
+ 1
Stratification par l ’index NNIS
Document B : service BTaux d'ISO selon l'index NNIS
66.8
5.4
9.1
1.61.41.51.4
43.53.23.6
0
2
4
6
8
10
2002 2003 2004 2005
NNIS 0 NNIS 1 NNIS 2-3
Document C : Taux d'ISO (NNIS 0)Comparaison service B / réseau Iso Sud-Est
1 1 0.9 1
0.7 0.7 0.7 0.6
1.5 1.41.6
1.4
00.20.40.60.8
11.21.41.61.8
2
1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005
RéseauService B
2.7 2.62.9
2.4 2.2 2.21.9 2
3.63.2 3.5
4
0
1
2
3
4
5
1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005
RéseauService B
Document D : Taux d'ISO (NNIS 1)Comparaison service B / réseau Iso Sud-Est
Document E : Taux d'ISO (NNIS 2-3)Comparaison service B / réseau Iso Sud-Est
6.8
9.110.4
4.7 5.2
5.46
6.16.96.4 5.86.4
0
2
4
6
8
10
12
1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005
Service BRéseau
Document FTaux d'ISO par type d'intervention
(2005)
Interventions 2005 NNIS 0 NNIS 1
NNIS 2-3
SpécialitéOrthop.
Service B 1.6 4 9.1Réseau 0.5 1.5 4.5
Osteo-synthèse
Service B 1.6 4.5 11.1*Réseau 0.6 1.6 4.5
Prothèse hanche
Service B 3.0 0.0* -Réseau 1.9 3.4 -
Prothèsegenou
Service B 0.0* 0.0* -Réseau 0.4 1.3 -
* Moins de 20 procédures
Document GDonnées bacteriologiques
Micro-organismes Réseau* Service B
S. aureus 47,6 52,1S. coagulase neg. 12,9 14,7Enterobacter sp. 8,2 10,0P. aeruginosa 7,5 8,7Entérobacteries (other) 7, 5 5,9
* CCLIN Sud-Est, 2005, 185 services
Conclusions intermédiaires [A-G]
En comparaison des autres services d'orthopédie du réseau Sud-Est, le service B observe plus d'ISO (même en ne gardant que les NNIS 0)
La tendance dans le temps ne baisse pas comme pour le réseau.
Pas de piste évidente du côté de la procédure en cause ou des micro-organismes
Que faire à ce stade ?
1. La différence est-elle réelle ?
Problème d'effectifs possible (ex. NNIS 3)
Utiliser des tests statistiques adaptés statistiquement significatif (p.) intervalle de confiance (IC)
Optimiser l'ajustement des taux en fonction des facteurs de risque stratification (NNIS, spécialité, intervention …) Ratio standardisé d'infection (RSI) : ratio observé /
attendu avec IC issu d'une analyse multivariée
http://cclin-sudest.chu-lyon.fr/reseaux/iso/rapport_ISO/Rapport_ISO_2005/V3.pdf
Difficulté statistique
ISO = événement statistiquement rare dans certaines spécialités (< 1 %)
Variations temporelles et spatiales des taux Simulation : 200 gestes opératoires, taux de 1% (2/200)
si taux passe à 3% (6/200) : du au seul hasard dans 28% des cas si taux passe à 4% (8/200) : la différence est juste significative
(P=0.05) Comparaison ►intervalle de confiance
T1 T2 20 / 200 = 10 % 30 / 200 = 15 %IC 95 % = [5,8 % - 14,2 %] IC 95 % = [10,1 % - 19,9 %]
2 – Le taux est-il valide ?
Exhaustivité rapide comparaison du nombre de patients inclus avec les données
administratives ou le cahier de bloc. résultat > 85% bons critères d'inclusion ? oui
Validation clinique des données en particulier revue des cas d'ISO
lors de réunion d'équipe spécifique chir/EOH non Qualité des données
correctes ? manquantes ? contrôles logiques… contrôle à la saisie en routine par le réseau ISO Sud-
Est Validation formelle (Se, Sp)
non fait en routine (1 seule évaluation réseau en 1998)
Qualité des données ? = ni très bon, ni trop mauvais sinon sensibiliser à la méthodologie de la surveillance et optimiser le circuit de collecte
3 – Peut-on expliquer l'écart ? par un recrutement ou des procédures particulières
description du case-mix ou des procédures comparaisons avec les années précédentes réalisation d'un listing avec discussion des cas
gravité particulière ? (âge, immunodép, Kc…) nouveau type de prise en charge ?
repérage de facteurs de risque non collectés dans la surveillance
analyse des micro-organismes en cause et de la répartition des cas dans le temps cas groupés ? épidémie ?
Pas d'épidémie ni de cas groupés, pas de FR particulier
4 – Remettre en question l'organisation et les pratiques de soins
Rasage préop.
Durée op. excessive
Manque de compétence de l'équipe chir.
Contaminationper-op.
Antibioprophylaxie manquante ou inadaptée
Autre site infecté
ISO
Un peu de bibliographie ?
Mauvaise antisepsie
Absence de douche pré-op.
Facteurs de risque liés à l'hôte
Hypoalbuminémie (2)Traitementimmunosuppr. (3)
Age avancé (1)Score ASA (1)
Altération de l’état général (1)
Cancer (3)
Malnutrition (2)
Diabète sucré (3)
Autre infection (1)Séjour pré-op.prolongé (1)
Obésité (1)
Relation entre ISO et f. de risque liés à l’hôte (1)certaine (2) probable (3) possibleSheretz et al. AJIC 1992, 20 : 263-270
ISO
ISO
Facteurs de risque liés à l'intervention
Relation entre ISO et f. de risque liés à l’intervention (1)certaine (2) probable (3) possibleSheretz et al. AJIC 1992, 20 : 263-270.
ISO
Durée d’interv.prolongée (1)
Classe de contamination (1)
Contaminationper-opératoire (1)
Rasage (1)Absence de doucheou savonnage (3)
Séjour prolongé (2)
Nbe personnesdans le bloc (3)
Trauma.tissu (2)
Inexpérience (3)
Maladresse duchirurgien (3)
Procéduremultiple (2)
Espace mort (3)
Mauvaisehémostase (3)
Faible activité (1)
Matériel étranger (3)
Urgence (3)
Drains (3)Piqûres des gants (3)
Interv. surbas abdomen (1)
Absence (1)d’antibioproph.
Type d’interv. (1)
ISO
Visite rapide du bloc par l'hygiéniste
Pas de durée prolongée du séjour préopératoire Durée d'intervention variable selon chirurgien Rare utilisation du rasoir (tondeuse ++) Douche + la veille
mais pas toujours le matin de l'opération. Antisepsie en 4 temps respectée Protocole écrit d'ATBP conforme à la conférence de
consensus mais prescriptions par l'anesthésiste peuvent différer
Plusieurs causes possibles d'ISO ! Alors quoi ?
Recherche des causes possiblesQuelle méthode?
Méthodes Avantages ConditionsAudit
(a priori)en 1e intention : identifie les failles possibles dans les pratiques de soins (hypothèse de départ)
Approche par comparaison (référentiel), critères dans grille d'audit, équipe entraînée sur plusieurs jours
Analyse de processus(a priori)
Analyse étape par étape du processus (éventuels points critiques)
Un seule procédure concernée, méthodologie valide maîtrisée.Approche multidisciplinaire.
Analyse des causes*
(a posteriori)Analyse en profondeur des cas (failles possibles).
Revue en détail d'une série de cas choisis pour identifier les dysfonctionnements et “causes racines”. Approche multidisciplinaire.
* Par exemple durant une revue “morbidité/mortalité”
Audit national préparation de l'opéré 2007 : 5 critères d'audit
Informer le patient (Réglementaire) Pratiquer au moins une douche préopératoire avec une solution
moussante antiseptique ( A1) Privilégier la non dépilation (B1)
si les conditions locales le justifient, privilégier la tonte ou la dépilation chimique
Pratiquer une détersion à l’aide d’une solution moussante antiseptique suivie d’une désinfection large du site opératoire (A1)
privilégier un antiseptique alcoolique (B3)
Traçabilité dans le dossier patient (Réglementaire)
5 – Réaliser d'un audit
Audit ATBP+ douches 50 observations sur dossier (rétrospectif) + discussion avec anesthésiste des écarts 1. Respect du protocole ATBP
dose, produit, heure d'administration, durée (réinjections) 2. Douche pré-opératoire le matin
avec savon antiseptique
Mesure du problème > 47% de non-conformité ABP
écarts non justifiés 26% de patients sans douche le matin de l'intervention
mauvaise information du patient, dépendance, équipement, programmation, urgence
6 – Opter pour une démarche de gestion des risques
Une investigation en profondeur semble nécessaire pour identifier les "vraies" causes de l'excès d'ISO dans le service B
Plusieurs approches des relations "cause-effet"
Approche scientifique (épidémiologique) pour établir la relation causale la seule approche rigoureuse, mais rarement généralisable
(données valides et pertinentes difficiles à obtenir)
Mise en évidence des causes possibles relations cause-effet à l'aide d'un groupe de travail sur le terrain nécessite une méthode validée, conduit à l'identification consensuelle (en l'absence de sanction)
des facteurs à l'origine de la chaîne d'évènements ayant entraîné l'évènement indésirable (cause racine)
il est plus facile d'améliorer un processus quand l'équipe identifie elle-même les origines potentielles d'un dysfonctionnement
Bravo ! vous faites de la gestion du risque !
2 méthodes principales Analyse de processus a priori
ex : AMDEC (analyse des méthodes de défaillance, de leurs effets et de leur criticité)
Revue de cas a posteriori analyse des causes racines ou autre approche systématique
utilisant une démarche cadrée pour explorer les différentes dimensions du problème, conduisant à l'identification de causes possibles par niveau et associée à des prises de décision
un groupe de travail avec des professionnels du service + extérieurs pour les 2
Une illustration de recherche des causes racines
Topique Causes immédiates
Observ. locales par l'équipe
Causes racines"Facteurs systémiques"
Mesures de contrôle
Antibio- prophylaxieabsente ou inadaptée
AB non prescrit
Prescription d'un autre AB
(non recommandé par protocole)
Prescription par un assistant non formé.
Absence de supervision
Un anesthésiste est désigné pour encadrer les prescriptionsUne formation est organisée
AB prescrit non
disponible
Tous les AB sont disponibles tout le temps
- -
AB prescrit non
disponible au bloc
AB prophylaxie a été administrée dans le
service
Pas de directive claire pour l'administration de l'ABP. Chaque chirurgien fait à sa
façon
¤ Administration de l'ABP au bloc immédiatement avant l'incision¤ …
ABP non administré
à temps
AB prophylaxie administrée 90 min.
avant l'incision
Etc. Etc. Etc. Etc. Etc.
Mise en place d'une revue "morbidité-mortalité"
Un groupe de travail a revu en détail les 6 derniers cas d'ISO 1 chir. 1 anesth, une IBODE 1 inf. hyg, 1 pharmacien)
Ils ont utilisés la méthode ALARM Vincent C et al. BMJ 1998; (316): 1154-1157
Le modèle nécessite que l'investigateur commence par examiner la succession d'événements conduisant à un accident ou à une issue défavorable et par considérer les actes des personnes impliquées.
Une revue "morbidité-mortalité"(2)
La méthode ALARM distingue 7 dimensions pour une procédure Contexte institutionnel Facteurs organisationnels et de gestion Facteurs liés à l'environnement de travail Facteurs d'équipe Facteurs individuels (personnel) Facteurs liés aux tâches à effectuer Facteurs liés aux patients
Plusieurs problèmes de management ont été identifiés responsabilité, supervision, formation, organisation au bloc, etc qui entraînent une variation des procédures et prescriptions
Quelle est la vraie cause des ISO dans le service B ?
Les causes profondespour le service B
Golf ?Golf ?Chirurgien-chef fantôme
Faible leadership & manque de management médical
Antibioprophylaxie absente
ou inadaptée
Manque de douches
pré-opISO
Absence de supervision, pas de
délégation par le responsable
Absence d'auto-évaluation et de formation continue
Manque de planification et de
coordination au bloc
Synthèse"Que faire en cas de taux élevé ?"
étape 1: remettre en question la validité du résultat ? Se, Sp, exhaustivité, critères d'inclusion, définitions … ! revoir l'organisation de la surveillance = amélioration de la qualité des données
étape 2 expliquer l'écart par un contexte particulier ? FR, case-mix, prise en charge, ! listing des cas, recherche de cas groupés, étude tendance = interprétation des données, émission d'hypothèses
étape 3 remise en question (aïe !) ? causes ? organisation des soins ? pratiques ? équipement ?... ! audits, révision protocoles, formation = démarche d'amélioration continue de la qualité et de gestion des risques
Décès par fièvre puerpérale chez les accouchées - Vienne XIXe
0
2
4
6
8
10
12
14
16
18
1841 1842 1843 1844 1845 1846
Déc
ès /1
00 a
ccou
chée
s Sage-femme (n = 17 791)
Etudiants médecine (n = 20 042)
% Décès moyen : 3,4 vs 9,9Chlorure de chaux
Ignaz Semmelweiss (1818-1865)
Observation du phénomène mortalité différente dans les 2 unités d'accouchement
Mesure du phénomène surveillance de la mortalité par fièvre puerpérale sur 6 ans 2 unités d'accouchement
Division des étudiants : 9,9 % Division sages-femmes : 3,4 %
Hypothèse transmission de "poison cadavérique" par les mains des étudiants
pratique d'autopsie par les étudiants collègue décédé après piqure anatom. avec symptômes id.
Ignaz Semmelweiss (1818-1865)
Mesures correctives prévention
cuvettes avec chlorure de chaux lavage des mains avant tout examen
Evaluation de l'impact chute du taux de mortalité
Généralisation des mesures transmission / autopsie mais aussi
personnes vivantes infectées matériel également désinfecté
Vers un concept plus global de la surveillance
Système d'information
hospitalier
Base de données
GRIExt
ract
ion
de
s do
nnée
s
Production des indicateurs
(taux d'infections ou taux d'ABiorésistance)
Services cliniques & équipesCLIN, EOH …
Autorités de santé(regional, national, international)
Sélection des cas pour analyse des causes racines
(gestion des risque)
Alerte & signalement
Contribution à l'évaluation
& Accréditation
Associer la démarche épidémiologique à celle de la gestion des risques ?