Synthèse des travaux SEPL 2014-2015

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SOCIÉTÉ D’ÉCONOMIE POLITIQUE ET D’ÉCONOMIE SOCIALE DE LYON COMPLÉTER LES DISPOSITIFS DE FINANCEMENT POUR LA CROISSANCE DES ENTREPRISES DANS LA MÉTROPOLE LYONNAISE Synthèse des travaux de la session 2014-2015 Editeur : SEPL

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SOCIÉTÉ D’ÉCONOMIE POLITIQUE ET D’ÉCONOMIE SOCIALE DE LYON

COMPLÉTER LES DISPOSITIFS DE FINANCEMENT POUR LA

CROISSANCE DES ENTREPRISES DANS LA MÉTROPOLE

LYONNAISE

Synthèse des travaux de la session 2014-2015

Editeur : SEPL

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SOCIÉTÉ D’ÉCONOMIE POLITIQUE ET D’ÉCONOMIE

SOCIALE DE LYON

Sommaire

1 – Note de synthèse des travaux 2014 – 2015........................... 7 2 – Comptes-rendus des conférences de l’année 2014 - 2015

6 Octobre 2014 Pierre du PELOUX, Directeur Régional Rhône-Alpes de la Banque de France

« Dettes et fonds propres, banques et marchés : des financements complémentaires ».................................. 13

1er Décembre 2014 Christophe GRUY, Président du Groupe Maïa

« Des travaux publics à l’énergie renouvelable : une transition économique ».................................................. 21

En partenariat avec LYON PLACE FINANCIÈRE ET TERTIAIRE :

3 Février 2015 Sébastien TOUVRON, Président de Rhône-Alpes Création Philippe VIAL-GRELIER, Président de V3D

« Les relations entreprises-investisseurs depuis l’amorçage jusqu’à la cession ».................................... 25

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10 Mars 2015 Alain MARION, Professeur à l’IAE Université Lyon3, Expert en Evaluation d’entreprise près la Cour d’Appel de Lyon Bertrand RAMBAUD, Président du Groupe SIPAREX Philippe VALENTIN, Vice-Président de la CCI de Lyon, Président de Place d’Echange

« Pourquoi et comment renforcer les fonds

propres des PME ? Revisitons quelques idées reçues ».......................................................................... 33

27 Avril 2015 Bernard BUISSON, Président du Comité des Banques

Région Rhône-Alpes, Directeur Général Adjoint du CRÉDIT AGRICOLE CENTRE EST

Arnaud PEYRELONGUE, Directeur du Réseau Sud-Est de BPIFRANCE Michel THOMAS, ancien chef d’entreprise BTP , Président d’audience au Tribunal de Commerce de Lyon

« Les banques et les demandes de crédit :

vraies ou fausses difficultés »........................................ 39 Dîner de l’Hôte d’Honneur – 2 Juin 2015

Jean-Claude TRICHET, ancien Président de la Banque Centrale Européenne, Gouverneur Honoraire de la Banque de France

« La gouvernance économique et budgétaire

de la zone euro. Vers une fédération économique et budgétaire par exception »............................................. 47

5 – Annexes.................................................................................. 91

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Contacts Yves Minssieux, Président de la SEPL e.mail : [email protected] Marc Bonnet, Président d’Honneur e.mail : [email protected] Marie-Christine CHALUS-SAUVANNET e.mail : [email protected] Renée JIMBERT, Secrétariat Administratif e.mail : [email protected]

°°°°°° Le travail de synthèse a été coordonné par Yves Minssieux et Marc

Bonnet, Présidents d’Honneur, en partenariat avec Lyon Place Financière et Tertiaire et en lien avec l’I.A.E. Lyon.

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NOTE DE SYNTHÈSE DES TRAVAUX DE LA SEPL Session 2014-2015

Quelques réflexions sur le domaine financier

en région lyonnaise

°°°°°°°° Le paysage financier est globalement assez bien couvert au niveau de la région. Les réseaux bancaires se sont bien redéployés et nous gardons un bon niveau de compétences et une bonne réactivité par rapport aux besoins des entreprises. Ceci est le fruit d’une longue pratique de décentralisation financière dans notre région. Dans les années 80, les établissements bénéficiaient déjà d’une forte délégation qui leur permettait de traiter la quasi-totalité des dossiers en région. L’émergence du Second Marché a fait la renommée de la place de Lyon en matière de fonds propres et d’accompagnement des entreprises. Les crises successives (crise immobilière, crises financières) dans les années 2008-2013 ont entraîné de sévères révisions dans le suivi des risques et dans les contrôles. Le retour récent à la liquidité, grâce à l’action de la BCE, a ramené une meilleure souplesse au niveau des circuits financiers et l’écoute de nos interlocuteurs montre que, globalement, les entreprises parviennent à se financer dans des conditions satisfaisantes. Dans les relations banques-entreprises, nos travaux ont souligné l’importance de la qualité du management et du travail en équipe. Ils mettent en valeur la nécessité d’une pédagogie constante envers les dirigeants d’entreprise TPE/PME pour rappeler les attentes du banquier en terme de remontée d’informations sur le prévisionnel, comme sur les réalisations. Ceci s’applique aussi au discours qui explique les impacts réglementaires ou d’environnement de taux bas sur le modèle économique des banques. Pour les entreprises d’une certaine taille, la désintermédiation a apporté des solutions et un financement qui a complété l’offre

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bancaire classique. Cette possibilité n’est pas accessible pour les PME. Par ailleurs, le système bancaire n’a pas véritablement innové dans les produits offerts à certaines entreprises engagées dans de nouveaux modèles économiques, comme « l’ubérisation » par exemple. L’opportunité de rebondir et d’utiliser pleinement les moyens qui existent passe par un retour à la confiance de la part des acteurs économiques et financiers. D’une part les besoins en fonds de roulement ont été mesurés du fait d’une insuffisance de croissance et donc de chiffre d’affaires, d’autre part les entreprises attentives sont restées précautionneuses dans leurs investissements par manque de visibilité et par suite, de la pression des donneurs d’ordre pour les sous-traitants. De fait, la spirale positive investissement-innovation-exportation, n’a pas pu véritablement s’enclencher. Les entreprises qui ont surmonté la crise ont su prendre des mesures de gestion pour s’adapter à leurs marchés en tenant les coûts et les prix, notamment pour les entreprises familiales. Le paysage des fonds propres reste contrasté. D’un côté, une offre abondante en matière de développement et transmission dédiée aux PME et ETI, qui tend à favoriser des valorisations élevées sur les plus belles cibles par un mécanisme d’offre et de demande. De l’autre côté, des start-up qui peinent à financer leur développement, la faible présence du capital-risque ne venant pas couvrir cette fameuse « vallée de la mort ». La flexibilité entre les investisseurs et les substitutions d’actionnaires sont insuffisantes. Le domaine le moins bien pourvu aujourd'hui semble donc celui de l’accompagnement des jeunes entreprises, en particulier dans les nouvelles technologies où les investissements nécessaires au départ sont importants. Il en va de même pour les investissements immatériels de recherche-développement. Dans les deux cas, il y a besoin de renforcer les fonds propres, et nous sommes insuffisamment équipés au niveau du territoire. Le crowdfunding ne peut apporter qu’une partie des solutions à ce niveau. En France, en particulier, l’épargne est davantage orientée vers les produits les mieux sécurisés : assurance vie et immobilier, ce qui correspond à

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l’état d’esprit ambiant et à une culture d’épargne qui hésite fortement à investir dans des actions. Même si un certain nombre de bons projets innovants, correctement présentés, parviennent à trouver les fonds propres nécessaires, il faut encore renforcer sensiblement au niveau régional les moyens financiers mis à la disposition des entreprises, autant au niveau des fonds propres que des garanties (cautions pour accompagner les entreprises). Les écarts par rapport à nos concurrents étrangers, notamment allemands, sont très conséquents. Pourquoi nos entreprises familiales sont-elles trop souvent cédées ? Les entreprises de taille intermédiaire (ETI) familiales et patrimoniales de notre région sont handicapées par la fiscalité sur les transmissions et les anticipations sont souvent difficiles et nécessitent du temps. Leur nombre reste notablement insuffisant pour garantir un renouvellement dynamique de la base industrielle métropolitaine. Leur sous-capitalisation, voire leur sous-évaluation sur le second marché, freinent leur développement. Il faut aussi encourager l’esprit entrepreneurial au-delà des déclarations. Ceci nécessite une prise de conscience collective au niveau de tout le système de formation. Malgré la présence de LPFT et du hub de la finance, l’écosystème financier reste encore insuffisamment lisible ; il faudrait améliorer la mise en relation entre les types d’entreprises, leur phase de croissance (création, jeunes entreprises, entreprises matures seules ou dans un clusters, entreprises leaders …..) et l’offre financière. La présence d’une compétence à temps partagé au sein des clubs d’entreprises de zones artisanales et industrielles, serait sûrement de nature à renforcer ce couplage, en complément de l’action des Conseils de l’entreprise.

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COMPTES-RENDUS DES CONFÉRENCES DE

L’ANNÉE 2014-2015

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Conférence SEPL du 6 octobre 2014

« Dettes et fonds propres - Banques et marchés : des financements complémentaires »

Pierre du PELOUX, Directeur Régional Rhône-Alpes

de la Banque de France

°°°°°°° Le Président Yves Minssieux ouvre la conférence en indiquant qu’il s’agit de la première séance de l’année 2014-2015, au cours de laquelle la SEPL travaillera sur la question du financement de la croissance des entreprises de la région lyonnaise. Cette réflexion s’inscrit dans le prolongement du thème traité l’an dernier sur le développement international des entreprises de la région. L’assemblée générale de la SEPL venant de se tenir, Yves Minssieux tient à rappeler l’engagement de la CCI de Lyon et de LCL pour soutenir les activités de notre société de réflexion et de prospective. Il remercie aussi l’IAE Lyon, qui contribue au travaux de la SEPL, avec cette année la mobilisation des étudiants en Master Finances d’entreprise, programme dirigé par Edouard Chastenet et Alain Marion. Il présente le grand témoin de ce jour, Monsieur Pierre du Peloux, qui a rejoint Lyon il y a un an, après avoir été Directeur Régional de la Banque de France à Dijon. Il a également passé une partie de sa carrière à la Commission des Opérations de Bourse, à laquelle a succédé l’Autorité des Marchés Financiers. Exposé de Pierre du Peloux Pierre du Peloux introduit son propos en indiquant que de nombreux acteurs économiques se demandent si les entreprises françaises sont trop endettées ou insuffisamment capitalisées, ou encore si les contraintes bancaires vont se traduire par des restrictions de crédits. La structure des financements connaît des écarts considérables selon les secteurs, et il convient de distinguer les Grandes Entreprises, les Entreprises de Taille Intermédiaire (ETI : de 250 à

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5000 salariés et/ou 1,5 milliard d’Euros de chiffre d’affaires) et les Petites et Moyennes Entreprises (PME de 10 à 250 salariés) . Les Très Petites Entreprises sont celles qui ont moins de 10 salariés. La Banque de France recense les entreprises en prenant en compte le critère d’unité économique, même lorsque l’entreprise est divisée en plusieurs sociétés présentant des bilans distincts pour des raisons juridiques ou fiscales. On estime qu’il y a en France 2,7 millions de TPE, 182 000 PME, mais seulement 4800 ETI et 220 Grandes Entreprises. Les chiffres d’affaires totaux de ces trois catégories sont à peu près les mêmes, ainsi que les effectifs. Les sources de financement sont d’abord internes au travers des taux de marge brute qui étaient stables jusqu’en 2008, mais qui ont connu une forte baisse depuis la crise financière. En moyenne, les taux de marge brute à fin 2012 s’établissaient à 22% pour les grandes entreprises, contre 20 % pour les PME. Il y a toutefois une forte dispersion dans le cas des PME, à la différence des grandes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire : les 10 % les plus performantes ( premier décile) ont une marge moyenne de 30 %, mais les 10 % les moins performantes ont un taux de marge négatif, notamment parce que la crise a fait décrocher un certain nombre de PME. La deuxième source de financement est le crédit inter-entreprises. Il y a certes une loi qui limite à 90 jours le crédit inter-entreprises, mais celui-ci représente un montant global de 500 milliards d’Euros, alors que l’encours de crédit bancaire s’élève à 120 milliards d’Euros seulement. Ce sont donc les entreprises qui se financent entre elles. Si l’on passait à un encours de 60 jours au lieu de 90 jours, les PME gagneraient 15 milliards d’Euros de financement et il y aurait 6 milliards d’Euros de plus pour les entreprises de taille intermédiaire. Toutefois, ce mouvement de désintermédiation ne serait pas à l’avantage des grandes entreprises qui bénéficient le plus du crédit inter-entreprises. Les taux d’investissement en proportion des actifs immobilisés sont restés constants depuis la crise, même si les PME investissent relativement moins que les ETI et les grandes entreprises. La Banque de France mesure aussi la solvabilité des entreprises (endettement /fonds propres). Ce ratio de solvabilité est élevé avec une moyenne de 34 % pour les PME, de 2 points supérieur à celui des grandes entreprises et de 4 ou 5 points au dessus des ETI. Les 25 % de PME qui ont le ratio le plus élevé atteignent même 60 %

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de solvabilité contre 50 % pour le premier quartile des ETI et 45 % dans le cas des grandes entreprises. En revanche, les écarts se creusent entre les PME, puisque 25 % des PME les plus faibles n’ont que 18 % de solvabilité et 7 % des PME ont même des fonds propres négatifs. La structure de l’endettement connaît des écarts considérables selon les secteurs. 60 % de l’endettement financier vient du crédit bancaire dans les PME contre moins de 20 % pour les grandes entreprises et 15 % pour les ETI. En effet, grandes entreprises et ETI ont plus de facilité d’accès aux emprunts obligataires, tandis que les PME restent dépendantes des banques. Un enjeu important de politique économique est la désintermédiation car plus des deux tiers des financements proviennent du crédit inter-entreprises en France, contre un tiers aux Etats-Unis. La politique de la Banque Centrale Européenne est de faire baisser les taux d’intérêt en agissant sur les banques, en espérant qu’il y aura transmission aux clients. Toutefois, la proportion élevée de crédit inter-entreprises en France et en Europe atténue l’effet de cette action, à la différence des Etats-Unis où les impacts d’une baisse des taux d’intérêt sont plus rapides. La BCE souhaite par conséquent une diminution de l’intermédiation. La France a aussi un handicap car l’épargne est principalement orientée vers l’assurance vie en grande majorité plutôt que vers les entreprises :1400 milliards d’Euros sont investis en assurance-vie, soit les deux tiers de l’épargne totale . Il faut aussi ajouter que la nouvelle réglementation bancaire « Bâle 3 » exige que les banques accroissent leurs fonds propres, ce qui les amène à restreindre les crédits, risquant de freiner le recours aux crédits pour les PME si l’activité reprend. A la suite de cet exposé, Yves Minssieux ouvre le débat en donnant alternativement la parole aux étudiants de l’IAE et aux autres participants : Q. : Vous avez expliqué que le crédit aux entreprises devenait de plus en plus compliqué. On peut donc se poser la question des financements alternatifs tels que le crowdfunding. Est-ce une solution d’avenir pour les entreprises ou une source de financement marginale ?

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R. : Le crowdfunding est une collecte de fonds via internet. Cela peut prendre la forme de dons et en général ce sont des particuliers qui souscrivent au profit des entreprises. Cela peut prendre aussi la forme de prêts, avec ou sans intérêt, ou encore une souscription au capital d’une entreprise qui se crée. Les prêts de crowdfunding sont limités à un million d’euros. En outre, le montant ne peut pas dépasser 1.000 euros par personne, sauf s’il s’agit d’un prêt sans intérêt, dont le maximum peut s’élever à 4.000 euros. Ce mode de financement a fait l’objet d’un encadrement afin que cela reste raisonnable. Sur le principe, c’est formidable : via internet vous pouvez toucher des dizaines de millions de personnes et si vous communiquez bien, vous pouvez récolter beaucoup d’argent. C’est un levier de financement des entreprises, surtout pour celles qui démarrent mais il y a quand même un risque : comme le dispositif transite par internet, des gérants peuvent mettre la clé sous la porte ou encore être malintentionnés et partir avec les fonds. Ce fait s'est déjà produit, et l’Autorité des Marchés Financiers s’en est inquiétée afin d’éviter que les souscripteurs ne se méprennent pas sur le degré de sécurité de leurs placements. Q : Je parle au nom d’une PME de services et je souhaite vous parler du crédit aux PME ; vous connaissez l’adage : « on ne prête qu’aux riches » or depuis 2008, le taux de marge des PME a diminué de façon sensible et j’aimerais savoir ce que vous pensez de l’accès au crédit et du rôle des banques depuis cette période. Notre sentiment est que l'on est confronté à un durcissement. Pensez-vous que les banques jouent aussi bien leur rôle que dans les périodes précédentes ? R : C’est une question fréquente. En Rhône-Alpes nous suivons les bilans et encours de crédit pour environ 20.000 PME et nous constatons qu’il ne diminue pas, mais qu’il continue à augmenter depuis la crise à un rythme de 2 ou 3% par an. J’en déduis que le crédit bancaire aux PME ne s’est pas arrêté et qu’il n’y a pas une coupure des crédits pour les PME. Par contre, il nous arrive en tant que médiateurs d’être sollicités par des entreprises dont le crédit a été refusé par leur banque ? Cela concerne seulement une cinquantaine de dossiers par an. En règle générale, il s'agit d'entreprises qui connaissent des difficultés. Les banques font leur travail et doivent regarder avec pertinence à qui elles prêtent. C’était moins le cas avant la crise de 2008 où le crédit était plus

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facile, d’autant plus qu’il y avait une forte concurrence entre les banques. Aujourd’hui il y a toujours une concurrence bancaire importante, surtout dans notre région, mais cela dépend de la situation financière de l’entreprise et surtout de ses projets ou de la manière dont elle souhaite faire face à ses difficultés. Ce qui est jugé par les banquiers, ce n’est pas tant de savoir si vous êtes en perte ou si vous avez une faible rentabilité, c’est surtout de savoir par quel projet vous allez améliorer votre rentabilité. Remarque complémentaire de Jean-Luc Duflot (LCL) : au niveau macro-économique le PIB de la France est en croissance nulle, c’est à dire qu’il n’y a pas de croissance en volume et on est en inflation zéro, c’est-à-dire qu’il n’y a pas de croissance en valeur non plus. Il y a forcément un lien au niveau macro-économique entre la somme de toutes les demandes de crédits des entreprises et l’évolution du PIB. Ce zéro de croissance est une somme de facteurs comprenant des entreprises en croissance très tournées vers l’exportation et des sociétés qui pâtissent d’un marché domestique déprimé. Les entreprises qui exportent sont celles qui sont « désintermédiées », c’est-à-dire qui n’ont pas besoin des banques pour financer leur croissance. Nous observons aujourd’hui que la demande de crédit est globalement atone. Si l’on se pose la question des financements alternatifs, il faut observer que les français, peut-être par crainte de l’avenir, ont un taux d’épargne parmi les plus élevés en Europe. Une des difficultés est d’orienter les capitaux des particuliers vers le financement des entreprises. Nous n’en sommes qu’au tout début et il est encore difficile de dire si cela sera un succès ou non. En toute hypothèse, les banques travaillent pour que la commercialisation du Plan d’Epargne en Action orienté vers les PME et voulu par les pouvoirs publics, puisse se faire dans de bonnes conditions. L’objectif est de donner la possibilité à des PME d’avoir des micro-levées de fonds par l’intermédiaire de fonds classiques. Cela va consister à proposer aux épargnants d’investir dans ce type de produit pour pouvoir après le réinjecter dans les entreprises avec une fiscalité avantageuse en terme d’Impôt sur la Fortune et d’Impôt sur le Revenu. Il y a la même problématique avec l’assurance vie qui est aujourd’hui beaucoup trop investie en Euros sur le marché financier, essentiellement pour financer les dettes souveraines de l’Etat français et d’autres Etats. Il convient d’orienter une partie de cette épargne vers les unités de compte avec des avantages fiscaux

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pour inciter les ménages à investir dans les entreprises malgré un risque un peu plus grand. Il y a aussi la nécessité de la désintermédiation en France et en Europe qui est beaucoup plus lente qu’aux Etats-Unis. Les banques incitent à cette désintermédiation et elles structurent l’accès aux marchés financiers. A l’horizon de à 5 à 10 ans, nous aurons beaucoup avancé mais l’amorçage est un peu long. Remarque complémentaire de Michel Thomas (SEPL) : au travers de mon prisme du Tribunal de Commerce qui est confronté aux entreprises en difficulté, je constate que ces dernières ont beaucoup de mal à expliquer leur situation, leur projet, ce qui est pourtant indispensable pour obtenir un financement. Celles qui viennent au tribunal ont fait tout ce parcours initiatique et ont malheureusement beaucoup de mal à expliquer leur situation, à la comprendre et à trouver des solutions. Une entreprise en difficulté peut se redresser et heureusement nous en redressons quelques-unes. Par contre, vous n’avez pas évoqué un autre mode de financement : les cessions, le refinancement des créances clients et le factoring, qui financent le court terme et qui connaissent une accélération actuellement. Les banquiers proposent à leurs clients de remplacer des lignes court terme ou des découverts autorisés par du factoring ou par des produits équivalents avec une rentabilité bien meilleure et avec beaucoup moins de risques : les banques ont alors du papier, une facture, alors que de l’autre côté il n’y a rien ou seulement la caution du dirigeant. C’est un vrai problème car cela règle une difficulté à court terme mais pas celle du besoin de fonds de roulement à long terme. Beaucoup d’entreprises viennent actuellement devant le tribunal après avoir utilisé l’affacturage qui les appauvrit petit à petit car il diminue la marge. En outre, ce système obère les chances de redressement car lorsque l’entreprise arrive au tribunal, il n’y a plus d’actif, les machines sont en leasing, les bâtiments sont en location, et il n’y a plus de trésorerie. Nous voyons des entreprises de plusieurs centaines de salariés qui se présentent devant le tribunal sans un centime d’actif ni de trésorerie. Dans ces conditions, on ne peut pas redresser l’entreprise et il faut essayer de la céder dans l’urgence avec toute la casse que cela entraîne. Pierre du Peloux : vous avez raison sur le factoring, car dans mes statistiques il n’y a pas l’affacturage. J’ai lu un rapport intéressant

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de l’Observatoire du Financement des Entreprises sur le financement des TPE, paru cette année. Cet organisme a observé que les TPE se financent de deux manières : découvert et affacturage. Il est indiqué que l’affacturage, pour un certain nombre de petites entreprises, est probablement inadapté car il est coûteux, surtout lorsque les clients ne sont pas très connus, même s’il apparaît pratique car il permet de se décharger sur un établissement qui trie les créances clients en économisant un service de recouvrement.

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Conférence SEPL du 1er décembre 2014

Des travaux publics à l’énergie renouvelable : une transition économique

Christophe GRUY, Président du Groupe MAÏA

Le Président Yves Minssieux resitue la conférence de ce soir dans le programme de l’année sur le financement des entreprises de la région lyonnaise. Il présente le conférencier, Christophe GRUY, Président du groupe MAÏA dont le parcours a été remarquable au cours des dernières années. Chistophe GRUY rappelle tout d’abord qu’il a été pendant plusieurs années Trésorier de la CCI de Lyon et il se réjouit de retrouver ces lieux. Originaire du Pas de Calais, il a fait des études de topographe-géomètre et a commencé son parcours professionnel comme ouvrier pendant un an, ce qui lui a appris à bien connaître les hommes et la vie de chantier. Il a ensuite dirigé pendant quatre ans des chantiers de travaux publics ce qui l’a amené au management. Il a finalement choisi de rejoindre le groupe Bouygues où il a assuré la direction de nombreux chantiers importants, avec parfois plus de mille hommes placés sous sa responsabilité : hôtels, déviations, autoroutes, ponts et viaducs, ligne TGV dans la région de Liège. Au cours de cette longue expérience enrichissante où il fallait passer de nombreux week-ends en déplacement, il a appris à partager la vie des équipes sur les chantiers, en prenant aussi en compte leurs difficultés dans la vie hors du travail. De ces expériences, Christophe GRUY passe deux messages : « tout d’abord, au début de ma carrière, je ne pensais pas que je pouvais reprendre une société » « il n’y a que le travail qui compte, il faut apporter quelques chose : inventer, étonner et être courageux ». Après 15 ans dans un grand groupe, l’occasion se présente de reprendre une entreprise de la région lyonnaise : Maïa Sonnier, 180 personnes et 20 millions d’Euros de chiffre d’affaires. Christophe Gruy a investi au départ 34.000 euros, est devenu mandataire social puis a pris progressivement le contrôle de Maïa Sonnier grâce au

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soutien de ses banques. L’entreprise a connu une progression très régulière en quelques années sous son pilotage. La question s’est alors posée de la stratégie de l’entreprise, située sur le marché cyclique du génie civil et du bâtiment. Une première tentative a été de se renforcer dans le génie civil et dans le secteur de l’énergie avec la construction de barrages, comme l’ont fait Bouygues et Vinci. Il n’y a pas eu d’opportunités dans ce domaine dans un premier temps. L’entreprise s’est alors tournée vers l’éolien. Les montants d’investissement étaient énormes dans le cas de la première affaire: 2 millions d’Euros par éolienne, et il fallait en construire 6, ce qui a nécessité de solliciter les banques et OSEO. La stratégie a été poursuivie dans ce domaine et l’entreprise a maintenant 116 éoliennes, plus une trentaine en construction, et de nouvelles opportunités ont permis d’avoir aussi maintenant 3 barrages et de lancer des investissements dans le domaine de l’énergie solaire. Un associé à 49 % a été trouvé pour l’éolien, avec une filiale créée pour arriver à 250 éoliennes. L’entreprise est maintenant solidement structurée. Le dirigeant a gardé une relation de confiance avec les banques et Christophe Gruy suit toujours la trésorerie au jour le jour. Par ailleurs, le Groupe a maintenant son Siège Social près de Fourvière et a lancé, par ailleurs, une opération immobilière importante avec, notamment, un projet d’hôtel de 37 chambres sur le parc des hauteurs. Dans la partie construction, Christophe Gruy souhaite continuer à orienter l’entreprise vers le métier de l’ingéniérie et le management de projets comme a su le faire, à son échelle, le Groupe Technip. Les effectifs actuels comportent déjà une moitié d’ingénieurs, la réalisation étant de plus en plus sous-traitée. Une partie du groupe sera en charge des projets de production d’énergie, et une autre partie les exploitera. Christophe Gruy présente enfin quelques photos de ses grandes réalisations et remercie à cette occasion Bernard Sonnier. Ce dernier intervient et explique que son grand-père est venu à Lyon comme paveur. Il a repris l’entreprise en 1956 à l’âge de 23 ans et a racheté Maïa en 1964, qui a notamment construit l’auditorium de Lyon. Il y a eu des années difficiles, et l’entreprise a été rachetée en 1997. Il est heureux que le nom de la famille se perpétue sous le pilotage de Christophe Gruy.

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Yves Minssieux intervient pour évoquer le contexte de sa première rencontre avec Christophe Gruy. Ce dernier avait présenté et argumenté son projet de 30 millions d’Euros dans l’éolien et une solide relation de confiance s’est établie entre banque-entrepreneur.

°°°°°°°°° En conclusion, Christophe Gruy s’adresse aux étudiants de l’I.A.E. présents dans la salle et leur conseille de ne pas hésiter à démarrer sur le terrain, par le bas dans les entreprises. « C’est celui qui passe par le bas qui saura monter rapidement. Il faut avoir le diplôme, mais l’oublier tout en se servant de son intelligence. Mes aînés m’ont bien encadré et m’ont appris qu’il fallait toujours être volontaire pour tout ».

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Conférence de la SEPL et de LPFT du 3 Février 2015 « Les relations entreprises-investisseurs depuis l’amorçage

jusqu’à la cession »

Sébastien TOUVRON, Président de Rhône-Alpes Création Philippe VIAL-GRELIER, Président de V3D

Le Président Yves Minssieux introduit la conférence en présentant les participants de la table-ronde et le cycle des trois conférences avec Lyon Place Financière et Tertiaire sur le financement des entreprises. L’amorçage et le capital-risque seront étudiés dans le cadre de cette première conférence. Les deux suivantes traiteront du renforcement des fonds propres et du financement bancaire. Il donne la parole à Jean-Pierre LAC, Président de Lyon Place Financière et Tertiaire, qui rappelle que l’amorçage concerne l’univers des petites entreprises. En France, il semble plus facile de trouver de l’argent pour la phase d’incubation/amorçage que pour le développement. Dans un premier temps, Nicolas MILLET nous présentera comment la CCI de Lyon intervient aux côtés des créateurs dans leur phase de levée de fonds. Ensuite, un témoignage à « deux voix » d’un tandem entrepreneur-investisseur décrira leur relation : comment celle-ci se met en place, comment elle fonctionne, comment elle se termine. Sont alors présentés les participants à la table-ronde : Philippe VIAL-GRELIER, Président de V3D nous apportera un témoignage côté entreprise avec son ressenti, Sébastien TOUVRON, Président de Rhône-Alpes Création, permettra d’appréhender le côté investisseur et Nicolas MILLET représentera la CCI de Lyon qui joue le rôle d’intermédiaire. 1 – La réponse de la CCI de Lyon aux demandes des créateurs et porteurs de projets et le crowdfunding Yves Minssieux demande à Nicolas Millet quelles sont les demandes qui sont faites par les créateurs ou porteurs de projets à la CCI de Lyon et pourquoi et comment cette dernière a décidé de les accompagner aussi, via le crowdfunding. Nicolas Millet explique le contexte : il y a des entreprises qui connaissent une phase de croissance normale suite à leur démarrage et des entreprises qui surperforment. La problématique est de trouver des solutions adaptées aux situations des différentes entreprises, selon la phase dans laquelle

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elles se trouvent et quel que soit le secteur dans lequel elles interviennent. Environ 1000 entreprises sont accompagnées chaque année avec différents programmes avec la Région, l’ADIE, etc….Aujourd’hui vient s’ajouter l’économie désintermédiée avec internet et ses plates-formes de crowdfunding. Cependant, les business angels continuent d’investir quatre fois plus que les plates-formes de crowdfunding. La CCI de Lyon a signé un partenariat avec WeSeed. Au début du partenariat, il y avait 24000 utilisateurs dont 10 % actifs et 200 en Rhône-Alpes. Un an plus tard, ces chiffres atteignent 30000 internautes, dont 3200 en Rhône-Alpes. Dans le montage, on associe à chaque levée une holding pour structurer les 2ème et 3ème tours. Il existe une quarantaine de plates-formes de crowdfunding (dons, prêts et fonds propres). La CCI de Lyon s’appuie sur deux plates-formes : Deal Flow Avenue et Lyon Place d’Echange. La CCI a en Deal Flow une centaine d’entreprises qualifiées et environ une douzaine est en phase de vote par les internautes. Les projets reçoivent une centaine d’avis des internautes qui sont jugés pertinents par les dirigeants. Ensuite, viennent les phases d’audit et de levée de fonds. L’ensemble du processus de levée de fonds prend 3 à 4 mois. En conclusion, il y a bien des outils diversifiés et la nécessité d’adapter l’outil de financement au type de projet et de créer les conditions d’une relation de confiance. La parole est ensuite donnée à Sébastien TOUVRON et Philippe VIAL-GRELIER qui vont débattre sur les quatre phases de la vie du financement d’amorçage : l’incubation, l’amorçage, le développement et la sortie. 2 – Témoignage « à deux voix » d’un tandem entreprise/investisseur Après une brève présentation des intervenants, l’objectif est de comprendre comment se construit le projet, pourquoi on fait ou pas appel à un investisseur, comment on s’y prend pour que cela marche. La phase d’amorçage se déroule en quatre temps : une première phase d’incubation qui apporte la preuve du concept et la construction du business plan , la seconde phase d’amorçage avec la mise au point du produit et la validation du business model ; puis une phase de suivi de participation et enfin la sortie de la période d’amorçage pour aller vers la période développement. Sébastien TOUVRON, préside Rhône-Alpes Création créée il y a 20 ans par Alain MERIEUX pour apporter une solution de financement pour les entreprises en développement. Bertrand RAMBAUD complètera les propos lors d’une prochaine conférence. Au début des années 90, quelques pionniers de l’investissement se sont installés en France. Rhône Alpes Création a vocation à financer l’incubation de nouvelles entreprises

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qui vont créer de l’emploi qualifié et durable en Rhône-Alpes. La plupart des banques sont aussi dans le capital, dans une logique de co-investissement. Aujourd’hui une soixantaine d’entreprises sont financées et suivies. Les investissements sont orientés sur quatre domaines : mise au point du produit, lancement commercial, premiers développements et reprise d’entreprise de façon marginale. Philippe VIAL-GRELIER qui co-dirige la Société V3D. Cette entreprise met au point des solutions pour les opérateurs leur permettant d’évaluer la qualité de la voix. L’enjeu des opérateurs est de garder leurs clients en mesurant la qualité des appels de ces derniers. V3D emploie une trentaine de personnes pour une vingtaine de clients dont un certain nombre à l’international.

a) incubation et amorçage Philippe VIAL-GRELIER : en amont, il faut se poser la question si le projet a plus de chances de se réaliser avec des financements bancaires et s’il nécessite ou non un financement de capital-risque. Le métier du logiciel informatique fait partie des projets qui nécessitent ce type de financement. L’investisseur financier va ensuite participer au projet ; en cela, il faut bien s’entendre avec lui, le projet se présente avec des miles stones à atteindre pour la réalisation du projet.

Sébastien TOUVRON : Rhône-Alpes Création est en lien avec les experts-comptables, les banquiers, les universités et les CCI. Ce réseau lui permet d’identifier les entreprises qui peuvent avoir besoin de financements. Leur métier ne peut s’appuyer sur des chiffres vérifiables. La sélection va se faire davantage sur la base de l’équipe, sur des projets qui présentent de vrais avantages concurrentiels, la composante internationale, les projets qui se différencient par leur capacité à générer des cash-flow. Le cycle d’investissement n’est pas linéaire : il y a des moments avec plus ou moins de projets présentés. La structure va solliciter son réseau, ses experts, des universitaires pour évaluer le potentiel des projets présentés qui doivent apporter un plus par rapport à l’existant (sélection dite incrémentale).

Philippe VIAL-GRELIER : quand un entrepreneur va lever des fonds, c’est lui qui est confronté à un marché où il faut aller vite et maximiser les chances de succès. Pour cela il faut plusieurs partenaires. Pour choisir son partenaire financier, il faut connaître les contraintes (notamment réglementaires) sur sa durée d’accompagnement financier, la stabilité et ses interlocuteurs.

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Sébastien TOUVRON : le métier d’amorçage est un métier très sélectif. Beaucoup de projets sont écartés pour des questions de forme, de localisation. Si le Chargé d’Affaires est convaincu par les propos de l’entrepreneur, il fera en sorte d’accélérer le processus et de faire pitcher l’entrepreneur. Sur 250 dossiers, environ une centaine vont être écartés, 60 étudiés, 30 vont être pitchés et 15 passeront en Comité d’Investissements, environ 10 projets seront finalisés. Rhône-Alpes Création va ensuite mobiliser des co-investisseurs (business angels, autres fonds d’amorçage). Il faut compter 1 à 3 mois pour la sélection et environ 3 mois pour le montage juridique. En tout, il faut 4 à 6 mois . Il faut deux avis favorables minimum. Le principe est de donner environ 24 mois de financement car il faudra ensuite 6 à 12 mois pour trouver les financements pour un second tour de table. Philippe VIAL-GRELIER : il faut limiter le nombre de lignes d’investissements car c’est vite chronophage. Cette phase est une véritable course contre la montre. Il est important d’avoir une équipe autour de soi pour déléguer, faire en sorte que le quotidien et le projet continuent d’avancer en parallèle de la levée de fonds.

b) le suivi de la participation

Nicolas MILLET interroge les intervenants sur les outils à mettre en place pour gérer les relations entre l’entreprise et l’investisseur pendant une fois la levée d’amorçage effectuée.

Sébastien TOUVRON : la relation repose sur la confiance. Cette relation va être encadrée par un pacte d’actionnaires. L’entreprise devra communiquer un certain nombre d’informations et aura une certaine liberté de décision jusqu’à une certaine limite. Au-delà elle devra voir l’accord du board. L’investisseur ne souhaite pas s’immiscer dans la gestion de la société ; cependant, certains paramètres, comme le bonus du dirigeant, peuvent être soumis à l’approbation de l’investisseur.

Philippe VIAL-GRELIER : cela conduit à mettre en place une gouvernance qui est salutaire pour l’entreprise avec des comités du Conseil de Surveillance ou du Conseil d’Administration. Un reporting doit aussi être mis en place. Le reporting et le suivi permettent de se poser les bonnes questions.

Nicolas MILLET : quelles surprises peuvent survenir ?

Sébastien TOUVRON : ils ont beaucoup appris en regardant les projets. La première préoccupation est de structurer le Conseil d’Administration. On peut arriver dans des situations où l’entrepreneur se referme sur son

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projet. Le rôle du Conseil d’Administration est de faire lever la tête au Chef d’Entreprise et de lui ouvrir son carnet d’adresses si cela est opportun.

Nicolas Millet : Qu’est-ce qui surprend du point de vue de l’entrepreneur ?

Sébastien Touvron : le métier de capital-risque est très particulier et compliqué avec un certain nombre de mécanismes qui protègent l’investisseur et lui permet de maximiser ses gains. Lors d’un 2ème tour, la table de capitalisation se complexifie. C’est un métier difficile car le capital-risque consiste à donner un prix à quelque chose qui n’en a pas. Le but est de faire en sorte de satisfaire les actionnaires du 1er tour tout en maximisant la création de valeurs. Il est parfois difficile quand il faut repartir avec une valorisation plus basse, alors que dans l’histoire l’entreprise en a connu une meilleure. Il faut se fixer et se mettre d’accord sur des conditions de sortie. L’expérience montre qu’en général cela ne se passe jamais comme cela était prévu.

Le rôle du fonds d’amorçage est d’apporter aux entrepreneurs la pédagogie sur les différentes étapes.

c) la sortie

Philippe VIAL-GRELIER : la sortie est prévue dès l’origine de la relation dans le pacte d’entrée. L’objectif n’est pas de surperformer mais de faire gagner de l’argent. La valeur d’entrée est en fait souvent calée sur la valeur de sortie. Il faut faire abstraction pendant un certain temps à beaucoup de chose. Cela donne un challenge d’aller chercher une certaine valeur. Il faut s’intéresser à un business qui a une taille suffisante qui intéressera des acteurs qui peuvent avoir un ticket minimum.

Sébastien TOUVRON : la durée de financement est au maximum de 14 ans. La sortie peut être provoquée par une offre de reprise opportuniste acceptable par l’entrepreneur. En matière de pourcentage de réussite : sur une dizaine de projets accompagnés, il y en a 3 à 4 qui vont échouer, 4 à 5 vont être dans le mou du portefeuille (le fonds récupérera sa mise et couvrira les pertes des 3-4 précédents) et une « star ». Le segment du capital-risque est structurellement déficitaire. La rentabilité est légèrement négative sur 20 ans de – 0,6 %. Nous voyons aujourd’hui l’émergence de nouveaux fonds de capital-risque par des « corporate bencers ». Le but n’est pas la rentabilité, mais d’aller chercher des idées.

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3) Questions 1ère question : est-ce que le crowdfunding peut devenir la première source de financement du capital-risque ? Nicolas MILLET : le crowdfunding va trouver son rythme de croisière une fois qu’il aura trouvé son modèle. L’objectif est qu’il n’y ait pas d’acteurs dominants. Les investisseurs internautes veulent vivre par procuration une expérience de création. Chez WeSeed, après un 1er tour, les utilisateurs ont réinvesti dans de nouveaux projets. LPFT émet un certain nombre de réserves quant à la capacité d’émergence du crowdfonding. Un bémol est que ce dernier divise pour régner et se prive de la richesse de la relation qui peut exister avec un fonds d’amorçage. 2ème question : ne pourrait-on pas investir plus ? Sébastien TOUVRON : à l’échelle de Rhône-Alpes, on ne peut pas se satisfaire d’une dizaine de financements par an, ce qui reste très faible. Rhône-Alpes Création pourrait investir jusqu’à 40 % en nombre de dossiers. Aujourd’hui, cette Société a environ 70 participations en portefeuille qui sont suivies par 4 personnes. Sébastien Touvron nous met en garde contre une augmentation du nombre de dossiers par personne qui se ferait au détriment de la qualité du suivi des participations et de leur performance. De plus, dans les projets, la part publique ne peut excéder 50 % du fait des limites imposées par la Commission Européenne. Ainsi, il faut pouvoir mobiliser davantage les investisseurs privés. 3ème question (IAE) : y a-t-il des synergies possibles entre les entreprises dans lesquelles Rhône-Alpes Création a investi ? Sébastien TOUVRON : il y a une volonté de faire bénéficier les nouvelles participations de l’expérience des entreprises qui sont déjà passées par là. La connaissance est aussi mutualisée en mettant en relation le dirigeant d’une start-up avec un ancien entrepreneur. Par contre, il n’y a pas de stratégie de « build-up » 4ème question : qu’en est-il de la prise de risque pour les plates-formes de crowdfunding ? Nicolas MILLET : c’est l’AMF qui valide le statut de la plate-forme de crowdfunding. Par ces plates-formes, il n’y a pas de dispositifs comme Novacité qui accompagne pendant 3 à 5 ans les entreprises. Il est à noter

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au passage que le taux de pérennité à 5 ans est de 90 % dans le dispositif Novacité, contre un taux de pérennité normal de 34 %. Les plates-formes n’ont pas d’expertise dans tous les métiers. S’agissant d’un investissement au capital d’entreprises, il y a toujours une part de risque.

Sébastien TOUVRON : c’est une bonne chose qu’il existe des plate-formes de crowdfunding, mais tous les projets ne s’y prêtent pas. C’est le cas de V3D. Par contre, pour des produits destinés au grand public, cela peut aider à consolider l’étude de marché par la consultation du public. Jean-Pierre LAC : la CCI de Lyon, même en faisant du « co-branding » ne va pas prendre le risque de l’investisseur. Cela montre le dur métier de banquier et d’investisseur. Yves MINSSIEUX : avec un regard de banquier, l’investissement en fonds propres est un vrai métier. Le crowdfunding est un complément qui ne fera pas tout.

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Les Présidents Yves MINSSIEUX et Jean-Pierre LAC remercient les intervenants et la nombreuse assistance.

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CONFÉRENCE SEPL/ LPFT 10 MARS 2015

POURQUOI ET COMMENT RENFORCER LES FONDS PROPRES DES PME :REVISITER

QUELQUES IDÉES REÇUES Le Président Yves Minssieux (SEPL) et Jean-Pierre LAC, Président de LYON PLACE FINANCIERE et TERTIAIRE introduisent les conférenciers et rappellent que le thème de la séance porte cette fois sur le financement des PME et ETI en recherche de leviers de développement. Il s’agit par conséquent d’une phase différente et d’une typologie d’entreprises autre que la dernière conférence qui traitait surtout de création et de start up. Le parti pris est de remettre en cause certaines idées reçues, en s’appuyant pour cela notamment sur l’étude réalisée par Alain Marion, porteuse d’enseignements sur l’usage des fonds levés. Le président a préparé la séance avec les conférenciers en se demandant dans un premier temps si la demande de capitaux propres en PME de croissance est un impératif financier ou une volonté stratégique. Il pose notamment la question de savoir si cette demande de capitaux est ou non le reflet d’un impératif financier ou d’une volonté stratégique. Quel est le bien-fondé du calendrier choisi par les dirigeants d’entreprise pour augmenter leurs capitaux propres ? Faut-il anticiper ou attendre d’avoir des besoins pressants pour se préoccuper de lever des fonds ? Quel est le regard des autres partenaires financiers que les banquiers ? Le chefs d’entreprise ne craignent-il pas de modifier l’équilibre construit au fil des années ? Les dirigeants ne vont-ils pas trouver au bout du compte une somme de contraintes qu’ils vont juger rédhibitoires ? Comment les dirigeants peuvent-ils s’orienter entre les différentes solutions ? Rentrer en bourse, oui mais comment ? Les fonds ne se ressemblent-ils pas tous, ou bien comment faire son choix ?

1) Présentation d’Alain Marion, Professeur de finance à l’IAE Lyon

Il y a une demande de capitaux propres des PME en croissance: elle provient d’un impératif financier ou d’une volonté stratégique.

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L’appel à des investisseurs apparaît comme un impératif, mais la réalité est plus complexe. L’étude réalisée en 2014 avec le FSI (BPI) et la Caisse des Dépôts par l’Equipe de recherche en finance de l’IAE s’est intéressée aux PME de la région en croissance de 2007 à 2010 pendant laquelle il y a eu la crise de 2008, mais avec des entreprises dont la chiffre d’affaires a cru de 40 % sur cette période. Plus de 2000 entreprises ont fait l’objet de l’étude, et leur chiffre d’affaires allait de 2 à 50 Millions d’Euros. Leur taux de croissance médian était de 17 %. L’analyse du comportement financier de ces entreprises a été faite à partir d’un indicateur de besoin de financements externes, notamment sur la base de l’analyse de la croissance du besoin en fond de roulement. L’observation du comportement des entreprises montre dans un premier temps qu’il y a saturation des fonds propres, puis recours à l’emprunt, puis un appel à des investisseurs dans la moitié des cas d’entreprises en croissance. Sur les 2000 entreprises analysées, 2/3 sont performantes et 1/3 contre-performantes. Le quart des entreprises ont procédé à un renforcement de leurs capitaux propres. Il y a deux catégories paradoxales qui sont apparues dans l’analyse: dans les PME en croissance qui n’ont pas de besoins, 226 ont quand même procédé à une levée de capitaux. 30 % ayant un besoin ont renforcé leurs capitaux propres. Quand on s’intéresse aux entreprises sans besoin, mais qui ont quand même levé des capitaux, elles représentent 20 % de la population des entreprises, dont certaines sont encore en phase de démarrage et ont de moins de 5 ans tout en ayant un business plan crédible. La deuxième catégorie est celle des PME en croissance mais sans besoin, et qui ont malgré tout levé des capitaux propres. Ce renforcement des capitaux propres s’explique par la volonté de maîtriser l’incertitude et de réduire le risque. Certaines entreprises ont aussi voulu se doter d’une réserve financière, pour mieux saisir des opportunités afin d’accélérer la croissance. Certaines entreprises ont voulu se faire accompagner par un actionnaire actif ayant un rôle d’accompagnement stratégique, et un accès aux réseaux de ces investisseurs. Dans le cas des entreprises en croissance, il y avait un impératif de ressources externes. L’étude a permis d’observer qu’un tiers des capitaux levés a été fait par des entreprises contre-performantes et que certaines entreprises prennent l’argent quand il est là, même quand elles n’en ont pas besoin.

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2) Exposé de M. Bertrand Rambaud, Président du Groupe SIPAREX

M. Bertrand Rambaud rappelle que Siparex est un groupe d’origine lyonnaise créé il y a 40 ans pour financer les PME et ETI en croissance. 800 sociétés ont été accompagnées. Au total, le chiffre d’affaires des société qui ont été accompagnées est de 10 milliards d’Euros et emploient 70000 emplois. Le modèle de SIPAREX est d’entrer au capital pour 4 à 6 ans, on de sortir en doublant au moins le capital. Les sorties se font beaucoup par la bourse, ou par d’autres investisseurs ou des industriels. Le capital a besoin de respirer: tous les 5 ans, on se pose la question du contrôle et de la participation des cadres dirigeants au capital. Il ne faut pas être dépendant d’un calendrier rigide et être en alignement d’intérêt avec le dirigeant. M. Bertrand Rambaud apporte un éclairage sur le fait que des entreprises lèvent des fonds à un moment où elles n’ont pas un besoin pressant : l’argent aujourd’hui n’est pas cher, mais il faut avoir des fonds propres pour saisir les opportunités. Quand le dirigeant ne porte plus la totalité du risque, il est davantage libéré et agile pour faire des acquisitions. C’est également structurant d’avoir un investisseur comme SIPAREX dans son capital et ce n’est pas vécu comme une contrainte. On a l’exemple d’une agence de voyage où l’on a accompagné la transmission en amenant le dirigeant à recruter un directeur financier. Dix ans après, c’est devenu l’une des plus belles rentabilités du secteur et l’entreprise avait décuplé son chiffre d’affaires. Les dirigeants ont pu faire des acquisitions car ils étaient accompagnés. Il faut aussi noter qu’ouvrir son capital prend au moins 4 ou 5 mois et que l’on est dans une période de mutation au niveau des techniques financières : avant, on allait voir son banquier pour un emprunt, mais il faut maintenant une ingéniérie financière, et le fait d’avoir des partenaires financiers aide à communiquer avec les banquiers. Le monde de la finance a aussi beaucoup évolué depuis 5 ans. Il y a des fonds qui font des opérations spécialisées. Il y a quelques années, les structures financières étaient déséquilibrées, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui car les dirigeants ont pris en compte les connaissances financières. La désintermédiation est aussi une réalité. La bourse est une solution complémentaire par rapport à notre métier de Siparex et ouvrir une partie du capital

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permet de donner un rebond. Siparex a développé le Fonds régional d’investissement à 50 % public et 50% privé, avec 30 millions d’euros. Cela a permis de financer des entreprises en croissance. Le levier entre les fonds propres et ce qui a été apporté par les banques est de 1 à 4 car Siparex apporte la confiance. Siparex a un objectif de rendement élevé. Siparex a aussi développé un produit mezzanine, mi-fonds propres mi-dette. La finance, les banquiers, les conseils, ont péché ces dernières années par des opérations trop financières, et on a connu de l’excès jusqu’en 2010, car il y a des abus quand on a des niveaux de dettes très élevés. Toutefois, la profession bancaire se comporte bien dans l’ensemble sur la place de Lyon, où les professionnels sont prudents.

3) Exposé de Philippe Valentin, Président de Place d’Echange, Vice-Président de la CCI de Lyon

Philippe Valentin présente Place d’Echange : l’objectif de Place d’Echange est de chercher, au travers des CCI régionales, une offre originale par rapport à celle des banquiers en s’adressant aux PME et PMI de taille moyenne, sans forcément une forte croissance de chiffre d’affaires, mais à progression régulière, afin de les aider à se développer. Chaque entreprise est valorisée par un expert, y compris avec sa dimension immatérielle pour analyser sa valeur intrinsèque. Nous mettons en place une équipe ad’hoc en prenant en compte la proximité, car on est sur Rhône-Alpes, même si l’on veut se déployer au niveau inter-régional, mais on fait de l’accompagnement avec des dispositifs très efficients. Pour un chef d’entreprise, ouvrir son capital n’est pas facile et on constate que les dirigeants attendent souvent trop pour le faire. Place d’Echange permet d’augmenter les fonds propres de façon simple afin de financer des projets de développement tout en assurant la sécurité et la liquidité. Cela permet aussi de donner un horizon à 4 ou 5 ans, à la différence des prêts où il faut commencer à rembourser à court terme. Quand on injecte 500 000 Euros sur une entreprise qui a un vrai projet, cela change la donne et a un effet de booster en permettant de multiplier au moins par un facteur de deux la levée de fonds, ce qui permet d’avoir une ambition stratégique. Chez Place d’Echange on parle de capital patient et on s’inscrit dans la durée. Il faut donc la même constance de temps que dans l’entreprise.

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- Remarque de Jean Pierre Lac : Siparex et Place d’Echange sont tous deux utiles dans le cadre d’une véritable place financière régionale pour offrir des solutions de financement aux PME et ETI. Sur la région, il y a des solutions variées : la bourse, l’accès à Euronext, Place d’Echange, les business angels et des organismes de conseil. On a 15000 PME dans la région, dont 90 % détenues par leurs fondateurs, alors qu’il y a 90 % des ETI de la région qui sont détenues par des groupes externes à la région.

4) Débat

- Question de l’IAE: Quel est le rôle de l’investisseur dans la gouvernance ? B. Rambaud : Ce n’es pas à l’investisseur d’imposer les décisions. Il faut être humbles. Quand on est minoritaires, on ne peut pas bloquer les décisions. Je crois au rôle de poil à gratter et d’accompagnement des dirigeants. I - Question : quels sont les critères financiers pour LPE, et comment prendre en compte la valeur du capital immatériel ? P. Valentin : il faut que l’entreprise soit saine et mature avec une structure de bilan correcte et qu’elle ait un projet. Je suis très attaché à l’immatériel, mais le problème, c’est de mesurer. Dans l’analyse de l’expert indépendant, le ressenti consiste à pondérer, mais on ne peut pas tout quantifier. Une commission de LPE filtre, puis Alternativa reprend en considération la valorisation. Il y a aussi le réseautage. On est très vigilants et on sélectionne des entreprises qui veulent passer une étape. Question sur les critères de choix entre private equity et bourse ? B. Rambaud : dans le cas d’une affaire encore très familiale, le premier choix doit aller vers le dispositif de private equity. Si l’entreprise est déjà d’une certaine taille, et qu’il y a de belles perspectives de croissance, on peut aller vers la bourse. Beaucoup d’affaires ont commencé par le private equity.

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Question : Quel coût pour être sur LPE ? P. Valentin : Au départ, on voulait faire du low cost. Mais on revisite. Il y a un coût forfaitaire, mais il faut apporter un service de qualité. Le coût est de l’ordre de 12 à 13 % . On a bon espoir de faire une levée de fonds en 9 semaines. Il y a un forfait initial de l’ordre de 40 à 50 K€. Quand on lève 500 K€, cela n’est pas un problème. Sur la cible des PME avec 3 à 15 millions d’Euros, la levée de fonds nécessite un accompagnement. J.P. Lac: Les levées de fonds on est jusqu’à 1 million d’Euros sur LPE, alors qu’Alternext dépasse les deux millions d’Euros. Le coût du crowdfunding est de 10 % sur quelques centaines de milliers d’Euros. Les solutions de private equity sont moins chères que les solutions de bourse sur les petites levées de fonds. Il faut aussi noter que la désintermédiation a permis d’apaiser la relation avec les banquiers. Le crédit inter-entreprises était possible pour les grandes entreprises autrefois. La désintermédiation concerne maintenant les ETI et les plus petites entreprises.

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Conférence du 27 Avril 2015

LES BANQUES ET LES DEMANDES

DE CRÉDIT / VRAIES OU FAUSSES DIFFICULTÉS La séance est introduite par Jean-Roger Régnier, vice-président de la CCI de Lyon. Il rappelle que la CCI a pour mission d’accompagner les entreprises depuis la création jusqu’à la transmission. En particulier, la CCI a des modules de formation et des dispositifs d’accompagnement par des conseils en financement. Elle a aussi un rôle d’innovation, par exemple pour la plate-forme de crowdfunding. Un autre exemple est le dispositif de place d’échange, dans un objectif de capitalisme de patience et de proximité. Nous faisons en sorte de répondre à la demande des entreprises, avec une mise en réseau pour aider les entreprises à répondre aux problèmes de financement. La séance de ce soit va porter sur une réflexion relative aux demandes de crédit faites aux banquiers sur la place de Lyon. Le Président Yves Minssieux positionne la problématique du débat de ce jour, en partenariat avec Lyon Place Financière et Tertiaire. Il constate qu’il y a une réelle convergence d’intérêt entre les banquiers et les entreprises, mais qu’il y a une rumeur persistante sur le fait que les banquiers ne sont pas toujours au rendez-vous lors des demandes de crédits. Cette rumeur est contredite par les chiffres, puisqu’il y a eu 13 % d’augmentation des soutiens aux entreprises en volume financier l’an dernier. Il faut donc comprendre les clés d’une relation équilibrée et expliquer les bonnes pratiques. Il faut aussi rappeler que le cœur du métier de banquier est la mesure du risque, en évoquant les clés de lecture d’un dossier et la notation, ainsi que les garanties en tant qu’amortisseur du risque. En matière de crédit, on ne peut pas englober crédit de trésorerie et crédits d’investissements. Les banques doivent aujourd’hui faire face à une complexité croissante de l’environnement économique des entreprises, avec une productivité accrue et une forte pression concurrentielle. Les banquiers ne disent pas souvent non et n’aiment pas dire non, mais ils le font quand même dans plusieurs cas, notamment quand le

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chef d’entreprise n’a pas anticipé les besoins ou ne sait pas quel type de financement retenir : - doute sur les capacités de remboursement. - dossiers mal adaptés, notamment sur le montant et la durée des prêts, mais les chefs d’entreprise sont de mieux en mieux éduqués sur ces questions. - financement des pertes. N’oublions pas que la banque peut être poursuivie pour soutien abusif. - difficulté pour apprécier la nature des difficultés : conjoncturelles ou structurelles ? Présence de rupture de marché ou de rupture technologique. - Recours excessif au factoring, au risque de perdre toute capacité ultérieure de découvert.

Au cours de ce débat, nous parlerons ainsi de la relation entre banques et entreprises et de la question de la confiance.

1) Exposé de Bernard Buisson, Président du Comité des Banques

Région Rhône-Alpes, Directeur Général Adjoint du Crédit Agricole Centre Est

Le métier de banquier consiste à collecter de l’argent de nos clients, puis à faire des prêts. Il faut prendre en compte le poids des assurances vie et des OPCVM. Les avantages fiscaux de ce comportement d’épargne entraînent une augmentation de ces fonds. La crise financière de 2008 nous a appris que les banques pouvaient mourir du fait d’un risque de liquidité. Cette crise aurait pu entraîner une baisse des crédits. Par ailleurs, la réglementation a entraîné des nouvelles contraintes. Toutefois, la croissance des encours a été supérieure à la croissance du PIB au cours des dernières années. Le risque existe de ne pas être remboursé, ce qui nécessite que la grande majorité des autres crédits soient honorés. Il faut donc que les banques comprennent le marché sur lequel les entreprises évoluent. Il faut aussi comprendre les forces de l’emprunteur sur le marché. Les dirigeants sont considérés comme un facteur-clé de succès, comme la cohérence du projet pour l’entreprise. Le secteur bancaire a sans doute des progrès à faire pour mieux financer l’innovation. On prend en compte la transparence. On a fait l’erreur de laisser croire que le métier de

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banquier était en train de se banaliser. Il y a un vrai métier pour comprendre l’histoire de l’entreprise et la capacité de l’entreprise à rembourser un crédit. Il faut aussi instaurer un climat de confiance entre les entreprises et les banquiers. Cela prend du temps, et il faut bâtir cette relation par la transparence. Les dirigeants doivent comprendre que l’on ne ment pas à son banquier comme à son médecin. La transparence est nécessaire pour comprendre si la difficulté est conjoncturelle ou structurelle. Si on sait que la difficulté est structurelle, jamais un crédit d’investissement ne va être une solution pour une entreprise qui perd son marché. Il faut donc aller voir son banquier en amont. Les banquiers historiques sont les premiers financeurs et les entreprises ont tout intérêt à rester fidèles à leur banquier sur un projet risqué. Il faut aussi une force d’écoute et une force de conviction des deux côtés.. Les études les plus récentes montrent que 93 % des entreprises qui ont sollicité un crédit l’ont obtenu. L’important, c’est la qualité financière de l’emprunteur. Quand on demande la caution des dirigeants, c’est que l’on a quelques doutes. Le pire, c’est de se rendre compte qu’un crédit de trésorerie finance un déficit d’exploitation.

2) Exposé d’Arnaud Peyrelongue , Directeur du Réseau Sud-Est de BPIFRANCE

Je suis fier et heureux d’être banquier, car on aide les entrepreneurs à réaliser leurs rêves. Un pays ne peut se développer que s’il a un système bancaire puissant. La banque est un intermédiaire qui prend le risque du financement. En France, on a la chance d’avoir des banques puissantes. Une grande partie des financements en France se fait par le crédit, ce qui nécessite la confiance. Le crédit est un support associé au risque de financement, mais il est peu associé à la réussite de la banque, puisque la marge bancaire est très faible en France. Un million d’euros prêtés sur 7 ans, cela rapporte en moyenne 6000 euros à la banque. Les banques doivent toutes tenir compte d’un triangle pour accorder des crédits : le risque, la garantie et la marge. Compte tenu de la compétition, le marché ne permet plus de rémunérer correctement le risque. L’amortisseur est donc la garantie. A BPI France, on essaie d’apporter des fonds publics au départ, en essayant ensuite de

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passer le relais aux banques. Les solutions existent, mais il faut développer l’accompagnement, avec la place des CCI et des réseaux de dispositifs.

3) Intervention de Bruno Lacroix (Aldes)

Toute entreprise a besoin de son banquier. Il y a besoin de la confiance entre la banque et l’entreprise. Cela se construit progressivement dans le temps. Le dirigeant doit montrer ses projets et montrer qu’il sait rebondir sur des échecs. La vie d’une entreprise n’est pas un long fleuve tranquille. On a connu des turbulences et on a été suivi par tous nos banquiers, sauf un, mais tous les banquiers ne sont pas faits pour vous, et vous n’êtes pas faits pour tous les banquiers. Au moment des états généraux de l’industrie, on a constaté que l’offre de financement était abondante, mais que les entreprises avaient du mal à s’y retrouver dans ce maquis. On a donc créé une plate-forme avec la Banque de France, la Fédération des Banques, l’Ordre des Experts-comptables, etc….. On a défini des thématiques pour aider les chefs d’entreprise à s’y retrouver : innovation, création, international, reprise-transmission, reprise par les salariés, croissance externe, etc…. ; pour chaque thématique, on a trouvé un référent qui se met à jour des nouveautés, par exemple BPI France pour l’innovation et on a ainsi une mise à jour des offres de financement. On a voulu être plus qu’un catalogue. On a incorporé une dimension pédagogique pour les dirigeants, par exemple sur la notation Banque de France et du banquier. Même un directeur financier ne peut connaître les 130 offres de financement qui existent sur la région. Quand on boucle une nouvelle présentation pour le haut de bilan, ce ne sont pas les mêmes types de financement selon les stades de la vie de l’entreprise et le type d’entreprise. Une des grandes forces, c’est de présenter chaque financement sous forme de fiches, en indiquant les opérateurs de la région sur www.hubfi.fr . On a 4 à 5000 visiteurs par mois, dont la moitié venant de la région.

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4) Intervention de Michel Thomas , ancien chef d’entreprise BTP, Président d’audience au Tribunal de Commerce de Lyon

Il faut prendre en compte des besoins de financement différenciés selon que l’on vise une croissance externe ou une croissance externe. Une majorité d’entreprises cherche une croissance organique interne. L’un des avantages des augmentations de capital dans les deux cas est qu’il n’y a pas de cautionnement ou de mise en garantie, comme dans le cas des emprunts. La plus grosse difficulté, c’est la sous-capitalisation. Si ce problème n’est pas réglé au départ, le crédit n’est pas fait pour cela. Le crédit n’est pas fait pour financer la création. Il y aussi des seuils de croissance qui créent des difficultés. Il faut aussi parler des cas où le développement se passe mal ou que l’entreprise dépend de facilités de caisse. Quand un banquier a prêté de l’argent, et que ça explose d’un coup, on l’accuse de soutien abusif et d’être compromis dans la déconfiture de l’entreprise. Au Tribunal de Commerce, on voit intervenir les banques : quand une banque a consenti un crédit pour un projet et que l’entreprise va mal, on voit arriver le banquier qui va appeler la caution en garantie. Quand il y a une procédure de conciliation, avec un accord confidentiel pour sortir de la difficulté, cela marche dans 70 % des cas. L’entreprise doit montrer qu’elle sait d’où viennent ses difficultés et comment s’en sortir et ne doit jamais raconter d’histoires à son banquier ni à son commissaire aux comptes Le troisième cas, c’est le redressement judiciaire ou la sauvegarde: dans ce dernier cas, le banquier va évidemment être frileux, mais il va parfois soutenir dans la période de 6 mois ou un an.

5) Débat

Y Minssieux à Bernard Buisson : pouvez-vous expliquer les cas où vous répondez de façon négative aux demandes de crédit ? Bernard Buisson : les études les plus récentes montrent que 93 % des entreprises qui ont sollicité un crédit l’ont obtenu. L’important, c’est la qualité financière de l’emprunteur. Quand on demande la caution des dirigeants, c’est que l’on a quelques doutes. Le pire,

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c’est de se rendre compte qu’un crédit de trésorerie finance un déficit d’exploitation. Question d’Yves Minssieux à Bernard Buisson : on reproche aux banquiers des changements d’interlocuteurs. Bernard Buisson : je ne sais pas ce qu’est un comité de crédit. On fait un métier de relation entre personnes. Je demande aux collaborateurs de dire clairement en direct pourquoi on dit non à un projet. Il faut expliquer. Quand on fait un métier d’accom-pagnement global, le changement d’interlocuteur tous les cinq ans, c’est très bien. En revanche, il n’est pas normal que le dirigeant doive tout raconter à nouveau. Il y a donc des progrès à faire quand on change d’interlocuteur. Il faut aussi mieux former les banquiers à l’approche sectorielle : pouvoir poser les bonnes questions au dirigeant. Par ailleurs, il faut une approche dans la durée, et faire un bon bout de chemin ensemble. Si un dirigeant part pour un écart de taux très faible, le banquier a une mémoire. Nous avons aussi un problème avec la volonté de carrière des jeunes. Par ailleurs, les besoins des clients évoluent : ils veulent une réponse rapide aux courriels envoyés dans le week-end depuis leur téléphone portable. Question d’Y Minssieux à Arnaud Peyrelongue : pouvez-vous expliquez les cas où vous répondez de façon négative aux demandes de crédit ? Arnaud Peyrelongue : quand on explique à un dirigeant que le recours aux crédits est trop important : on lui dit qu’il faut rééquilibrer les moyens de financement. La caution personnelle est un vrai sujet. BPI France propose les garanties publiques, pour rendre le crédit possible. Notre rôle est de rééquilibrer le montage. Dans un monde qui va de plus en plus vite, il y a nécessité d’autres sources de financement que le crédit. Question sur les moyens de financement via le digital : tentation du crowdfunding, la banque internet, le factoring, etc ?

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Bernard Buisson : Le digital est une vraie rupture pour le secteur bancaire, même si cela concerne d’abord des particuliers. Cela touche même les crédits immobiliers et l’assurance-vie. La banque de détail en France doit réussir sa mutation. Il faut regarder avec intérêt l’innovation du crowdfunding. Il y a des solutions alternatives qui se développent. La désintermédiation a concerné d’abord les ETI. Il y a maintenant des fonds qui peuvent être des compléments par rapport au secteur bancaire. Le taux moyen des crédits est en ce moment de 1, 98 %. Les taux levés dans le crowdfunding sont de 8 %. On ne peut pas aller contre les évolutions. Il faut savoir conseiller les entreprises clientes: on accompagne les entreprises dans ce cas, et on oriente alors davantage les crédits vers les PME et les TPE. Question : Comment les banques classiques peuven-ellest mieux aider à financer la création et l’innovation ? Arnaud Peyrelongue : dans un réseau bancaire, il y a une difficulté à irriguer l’ensemble de l’offre. Un chargé de clientèle particulier a en gamme 150 produits. La création, c’est un segment sur lequel il faut une spécialisation. Bernard Buisson : il faut une force d’écoute et une force de conviction des deux côtés. A BPI France, on essaie d’apporter des fonds publics au départ, en passant ensuite le relais aux banques. Les solutions existent, mais il faut développer l’accompagnement, avec la place des CCI et des réseaux de dispositifs. Question : quel est l’impact des fonds d’investissement pour faciliter ensuite le crédit bancaire ? Arnaud Peyrelongue : le financement par les fonds propres est vertueux. Le financement par le haut de bilan permet de lever de la dette. Question d’un directeur financier : j’ai le sentiment qu’il faut aussi améliorer la transparence de la part des banquiers, par exemple en ce qui concerne la notation des entreprises. On manque de dialogue là dessus.

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Bernard Buisson : oui, on se rejoint sur le besoin de communication réciproque. Je lis toutes les réclamations. On n’a pas assez formé les exploitants sur la facturation. Il faut expliquer la tarification de nos services, ligne à ligne, ou pourquoi on ne suit pas des projets. Les chefs d’entreprise doivent connaître la notation de la Banque de France. Question : En France, on a des taux d’intérêt très bas, mais en Allemagne, ils sont plus élevés de 1 % Comment l’expliquez vous ? Bernard Buisson : il y a des éléments de concurrence qui sont différents. La concurrence joue pleinement en France. Arnaud Peyrelongue : des marges un peu plus importantes permettraient un taux d’acceptation un peu plus élevé. Certains risques ne trouvent pas leur financement.

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SOCIÉTÉ D’ÉCONOMIE POLITIQUE ET

D’ÉCONOMIE SOCIALE DE LYON

– : –

DÎNER-DÉBAT du MARDI 2 JUIN 2015

En l ’honneur de Mons ieur Jean-Claude

TRICHET

Sur l e thème :

« La gouvernance économ ique e t budgétai re

de la zone euro . Vers une fédéra t ion

économ ique e t budgéta i re par excep t ion ? »

(La séance est ouverte à 20h20) M.BONNET.- Mesdames, Messieurs, je vous

demande quelques instants d'attention, s'il vous plaît, pour entamer cette soirée. J’invite à me rejoindre à la tribune :

Monsieur Emmanuel Imberton, Président de la Chambre de Commerce de Lyon

Monsieur Yves Minssieux, Président de la Société d'Économie Politique et d'Économie Sociale de Lyon.

M. IMBERTON.- Merci de votre silence quasi religieux, vous savez que cette salle de la Corbeille est absolument magnifique, formidable, mais son acoustique malheureusement laisse de temps en temps un peu à désirer.

Je voudrais accueillir très chaleureusement Monsieur Jean-Claude TRICHET, ancien Président de la Banque Centrale Européenne, Gouverneur Honoraire de la Banque de France et

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Président du Groupe des Trente, qui nous fait l'honneur ce soir de venir partager avec nous sa vision sur le sujet ô combien d'actualité qui est la gouvernance économique et budgétaire de la zone Euro.

Je voudrais aussi saluer Yves Minssieux, Président de la SEPL qui nous fait le plaisir d'organiser à la CCI de Lyon cette conférence pour la clôture des travaux de la saison 2014-2015.

Clôturer un cycle sur le financement des entreprises ne pouvait naturellement pas se dérouler ailleurs que dans cette salle de la Corbeille, qui a abrité, vous le savez tous, pendant plus d'un siècle, la Bourse de Lyon.

Je laisserai à Yves MINSSIEUX le privilège de saluer les nombreuses personnalités qui sont ici présentes ce soir. Simplement, avant de lui laisser la parole, je voudrais dire quelques mots et saluer les élus de la Chambre de Commerce et d'Industrie, présents ici, et bien sûr le premier d'entre eux,

Jean-Paul Mauduy, Président de la Chambre Régionale de Commerce et d'Industrie.

Je voudrais également saluer un prédécesseur, Jean Agnès, qui nous fait le plaisir d’être présent ce soir,

et en profiter pour remercier tous les élus, les Vice-Présidents de la Chambre de Commerce qui sont à mes côtés.

Au nom de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Lyon, je suis très heureux de vous accueillir aussi nombreux ce soir pour ce dîner-débat exceptionnel que nous propose la SEPL, avec l'intervention de Jean-Claude TRICHET dans quelques instants.

La Chambre de Commerce et d'Industrie a tissé de longue date des liens très étroits avec la SEPL, qui est un lieu de réflexion, un think tank de la première heure, créé il y a plus de 150 ans. La SEPL est une forte valeur ajoutée pour la Chambre de Commerce et d'Industrie de Lyon, acteur de l'accompagnement des entreprises et du rayonnement du territoire.

Par vos réflexions, mon cher Yves, et vos propositions, vous permettez ici ou là l'ouverture de pistes et de chantiers très utiles pour notre territoire et que nous sommes capables, nous ensuite, avec nos équipes ici à la Chambre de

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Commerce et d'Industrie de Lyon, de traduire dans des actions concrètes.

La SEPL s'est souvent penchée sur les dimensions de l'activité économique et sociale, en faisant appel à des témoins ou à des experts de renom. D'ailleurs, quand nous consultons la liste de vos invités, nous voyons que les plus grandes personnalités françaises et étrangères ont été vos invités, mon cher Yves.

En 2015, vous avez organisé un cycle de conférence sur le thème du financement afin de révéler ce qui freine ou accélère l'émergence des meilleures solutions et, dans ce cadre du financement, les CCI ont bien sûr leur rôle à jouer et particulièrement depuis quelques années, nous avons fait du financement des entreprises une de nos priorités.

Je voudrais ici vous rappeler que nous sommes la première Chambre de Commerce et d'Industrie à avoir lancé il y a maintenant un an, une plate-forme de financement participatif avec la société WiSEED, une plate-forme de crowdfunding qui a obtenu ses premiers résultats en mettant en valeur un certain nombre d’entreprises de la région lyonnaise. Nous avons levé, grâce à cette plate-forme, depuis un mois, 1 million d’euros et je pense que nous dépasserons d'ici la fin du mois, 1,5 million d’euros. Je voudrais vous dire également que, près de 4 000 investisseurs potentiels originaires de Rhône-Alpes sont devenus les clients de cette plate-forme de crowdfunding.

Je voulais vous dire également que nous avons lancé Place d'Échange, nouvelle bourse régionale, créée par des chefs d'entreprise pour des chefs d'entreprise pour favoriser le financement des projets de croissance des PME par du capital de proximité en recréant du lien entre les entreprises, les investisseurs et l’environnement économique et social. C'est un dispositif unique en France qui a été compliqué à rendre opérationnel, qui l'est depuis juillet 2014 avec les premières cotations en Rhône-Alpes. C'est un modèle, il faut le dire également, dont s'inspire actuellement le Gouvernement pour la création de bourses régionales.

Enfin, je voudrais citer le programme Finances du plan PME dont la Chambre de Commerce et d'Industrie de Lyon assure la mise en oeuvre opérationnelle pour les PME, et enfin bien

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sûr, notre partenariat avec les Business Angels lyonnais et Lyon Place Financière et Tertiaire.

Je vous souhaite à tous une bonne soirée et laisse la parole au président de la SEPL.

(Applaudissements) M. MINSSIEUX.- Merci Monsieur le Président de

la Chambre de Commerce et d'Industrie de Lyon, merci, cher Emmanuel, d'avoir permis l'ouverture des portes de la Chambre dans ce lieu effectivement si emblématique, si beau, et si adapté à la soirée que nous organisons en l'honneur de Monsieur Jean-Claude TRICHET.

C'est un grand plaisir, Monsieur TRICHET, et un grand honneur de vous accueillir et vous voyez que le public est à la dimension de nos espérances. Merci à tous d'avoir marqué par votre engagement, votre implication, l'intérêt que vous portiez aux propos (c'est un peu pour vous mettre la pression) que Monsieur Jean-Claude TRICHET va tenir sur une actualité et des perspectives qui nous passionnent tous.

Je voudrais dire quelques mots qui relèvent du protocole, ainsi qu’il convient en début de réunion et saluer nos personnalités.

D’abord, l’État, qui est bien présent parmi nous, puisque nous en avons deux éminents représentants :

Monsieur Xavier Inglebert, Préfet, Secrétaire Général de la Préfecture du Rhône, Préfet Délégué à l'égalité des chances,

Monsieur Henri Reynaud, Ambassadeur de France et nouveau Conseiller diplomatique auprès du Préfet de la Région Rhône-Alpes.

Messieurs, soyez les bienvenus. Messieurs les Maires – car il y a l’État et puis les

collectivités territoriales – Monsieur Denis Broliquier, vous êtes chez vous,

ou bien nous sommes chez vous dans le 2è arrondissement.

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Monsieur Yves-Marie Uhlrich, vous êtes un fidèle de la SEPL et vous pilotez le destin d'Écully avec enthousiasme,

Monsieur Marc Grivel, vous êtes Maire de Saint-Cyr au Mont-d’Or.

Mesdames et Messieurs les élus, Mesdames et Messieurs les représentants du monde

consulaire et du monde diplomatique, vous savez combien j'y suis attaché,

Mon ami Gérard Herrbach, Consul du Grand-Duché du Luxembourg,

Monsieur Michel-Pierre Deloche, Consul du Danemark,

Monsieur Bruno Boccard, Consul d’Irlande, Monsieur Peter Verplanken, Conseiller

diplomatique économique pour la Flandre dans le sud de la France Le monde patronal et le monde économique est

présent à travers vous de façon très large, mais en premier chef, autour de :

Jean-Paul Mauduy, Président de la Chambre de Commerce et d'Industrie de la Région Rhône-Alpes. Cher Jean-Paul, merci de ton appui régulier que nous apprécions et que j'apprécie particulièrement. Merci à la Chambre de Commerce et d'Industrie de Lyon, je veux le redire parce que, derrière Emmanuel Imberton, il y a tout toute une équipe et je veux faire un clin d'œil à Alain Fauveau, Directeur Général, qui a été un complice très engagé dans cette réussite.

Et puis, nos amis du Medef, le Medef Rhône-Alpes représenté par Monsieur Stéphane FLEX, Délégué Régional

Et le Medef Lyon-Rhône autour de Jean-Louis Joly, Jean-Louis, merci de nous accompagner avec amabilité et gentillesse.

Monsieur le représentant du CESER, Jean-Louis Pivard en place de Madame Sybille Desclozeaux,

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Le monde universitaire est aussi présent, sur tes épaules, cher Bernard Sinou ; tu es bien connu dans cette maison, ancien Directeur Général et actuel Directeur Général de la Fondation de l'Université de Lyon, tu représentes aujourd'hui Alain Mérieux. Merci Bernard, car cette soirée ne serait pas celle-ci sans ton implication.

Jérôme Rive, merci d’être là, nous avons noué un partenariat très fort cette année. Vous voyez beaucoup de jeunes présents ce soir, et c'est Jérôme RIVE, avec le partenariat que nous avons tissé au niveau de l'Institut d’Administration des Entreprises, qui nous a permis de les convier. Vive la jeunesse !

Et puis les diplômés de Science Po, nous allons retrouver cela sur votre parcours, Monsieur TRICHET.

Le monde financier, l'espace financier est important dans l’histoire à Lyon et sa forte présence marque tout son intérêt. Merci à nos amis banquiers pour leur soutien.

La Banque de France, naturellement, tout honneur passe par la Banque de France : Pierre du Peloux, merci de t’être engagé avec les jeunes toi aussi dans cette organisation.

Lyon Place Financière et Tertiaire : nous avons noué un partenariat qui a été très agréable et, à mon avis, très efficace, pour parler de sujets financiers communs, mais avec des prismes de lectures différents. Merci à Jean-Pierre Lac et à Béatrice Varichon d'avoir rassemblé autour d'eux des représentants de la profession bancaire ; votre engagement dans nos actions de cette année a été vraiment très apprécié.

Le Comité des Banques de la Région Rhône-Alpes, cher Bernard Buisson, tu es toujours très engagé aussi dans nos opérations, tu as apporté l'appui du Crédit Agricole du Centre-Est dont tu es le Directeur général adjoint. Merci de cette complicité.

LCL, c’est le partenaire historique avec la Chambre de Commerce de Lyon de la SEPL. Jean-Luc Duflot, c’est ta dernière réunion à Lyon ce soir ou pratiquement la dernière ; merci de nous la consacrer, tu nous quittes, tu vas partir à Paris, mais merci pour ce que tu as continué à apporter au niveau lyonnais.

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Le CIC, je ne peux pas cacher mes origines ! Merci à Isabelle Bourgade de son appui dans cette organisation, dans la disponibilité dont je profite. Merci à Guirec Penhoat d’avoir trouvé les clients qui l'accompagnent.

Merci à vous chers amis. Et je voudrais citer les entrepreneurs qui nous ont

aussi donné leur appui. ISEOR autour de Marc Bonnet, Président

d’Honneur de la SEPL. Gaëtan de Sainte Marie, nom bien connu dans

cette ville, Gaëtan, merci pour ton appui. Mon ami Pierre Voutay, merci d'avoir ouvert ta

table à des jeunes et merci de ta complicité pour les partages que nous avons régulièrement.

Je voudrais aussi remercier ceux qui, en tant que bénévoles, se sont bien engagés dans cette soirée.

Un mot pour Madame Jimbert. Vous la situez tous, c'est elle qui est au cœur de la SEPL et de notre organisation. Merci Madame Jimbert…

(Applaudissements) Je crois que c'est ce soir votre dernier coup d'archet.

Il est magnifiquement travaillé. Merci à Madame Ferrandez et à Madame

Meissonnier qui donnent de leur temps et de leur disponibilité. Merci à vous tous, adhérents, ou futurs adhérents ;

vous êtes forcément l'un ou l'autre ce soir et en tous cas, merci pour votre présence.

Ce sujet de protocole étant traité, et si j'ai fait quelque oubli, ne m'en voulez pas car la qualité du public amène parfois à l'erreur, mais je peux vous certifier qu’elle n’est pas volontaire, bien évidemment, excusez la.

Je voudrais vous dire quelques mots sur la SEPL. Je vais faire court car résumer 150 ans d'histoire, ou 149 ans exactement, est un peu difficile, mais quand même, il faut savoir pourquoi on est là et dans quel contexte.

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La SEPL a été créée en 1866, il y a donc près de 150 ans, et elle s’est inscrite dans un grand changement qu'a connu notre pays dans la période libérale du Second Empire. Napoléon III partageait l'enthousiasme Saint-Simonien pour le progrès industriel. À cette époque, notre pays a connu une révolution économique gigantesque, en particulier grâce aux transports. Le développement des chemins de fer, qui avait démarré avec la monarchie de juillet, a permis une croissance exceptionnelle, le paysage économique ayant été complètement remodelé à cette occasion. Sur le plan immobilier, nous en savons quelque chose à Lyon, la rue de la République et la rue Édouard Herriot ont été tracées à cette époque ; on sait que ce Palais du Commerce, cher Emmanuel, a été ouvert en 1860, en plein dans cette période, tout comme le Parc de la Tête d'Or… Bref, la Ville s'est refaçonnée à cette époque.

Les écoles, puisque l’on parlait de formation et d'intérêt pour la formation, l'École Supérieure de Commerce que tu connais mieux que quiconque maintenant, celles dans lesquelles les uns et les autres nous travaillons notamment au niveau des élus de la Chambre : la SEPR, la Martinière, l'École Centrale ; elles ont trouvé leur fondement dans cette période.

L'activité industrielle, la soierie, je le dis pour rappel à Monsieur TRICHET, battait son plein à Lyon à cette époque et les trois quarts de l'emploi de la région émanaient de la soierie.

Et pour accompagner ce mouvement, il fallait des banquiers. On retrouve toujours les banquiers ! Et les banquiers se sont rendu compte à cette époque qu'il fallait faire la banque autrement et donc, il n'est pas étonnant que nous ayons vu apparaître des hommes comme Henri Germain qui, en 1863, a lancé la fondation du Crédit lyonnais. Il était avocat lui-même et a permis le positionnement de cette banque. Puis, en 1865, le CIC Lyonnaise de Banque, qui n’avait pas cette raison sociale, a vu le jour. Ce n'est pas par hasard que ces banques se sont constituées à cette époque, c’est en raison d’un besoin d'accompagnement de l'économie, d’ouverture sur le grand public, et d’un enracinement dans notre terroir industriel lyonnais.

La SEPL a été créée le 13 janvier 1866, mon successeur aura à gérer un anniversaire prestigieux ; cet anniversaire c'est celui de la création de cette organisation dans un restaurant qui s'appelait Casati installé, près d’ici, rue du Bât-

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d’Argent et qui a regroupé un certain nombre de personnes du monde économique lyonnais qui partaient de l'analyse qu'il fallait parler d'économie et d'économie politique pour que les patrons et les salariés trouvent la bonne capacité d'échange dans le travail, cette harmonie permettant d'éviter les conflits sociaux et de bien développer la vie des entreprises.

Cette initiative tient à la Chambre de Commerce et d’Industrie de Lyon. Le Secrétaire Général de la Chambre à l'époque, Monsieur Jean TISSEUR, était allé chercher un professeur à Genève qui s'appelait Henri DAMETH ; ils ont bâti des cours d'économie politique et ont ensuite, avec d’autres entrepreneurs, dont Henri GERMAIN et François-Barthélémy ARLES-DUFOUR, contribué à former cette Société d'Économie Politique de Lyon.

Je vous fais tout le parcours de cette société en une phrase ; elle a survécu pendant 150 ans comme cercle de réflexions, cercle de propositions qu’elle est toujours. L’année dernière nous avons travaillé sur le sujet de l'international avec des entrepreneurs qui sont dans la salle, Philippe EYRAUD que je reconnais, Bruno Boccard et puis cette année, nous nous sommes intéressés, comme nous l’avons évoqué tout à l'heure, au sujet de la finance à Lyon.

Nous avons choisi ce sujet de la finance en bonne intelligence et en partenariat avec Lyon Place Financière et Tertiaire et avec l'IAE, avec des thématiques sur :

Les dettes et fonds propres, Banques et marchés, Le problème de l'amorçage jusqu'à la cession, Pourquoi et comment renforcer les fonds

propres ? Les banques et les demandes de crédit. Je cite ceux que je vois par complicité : Pierre du Peloux, à nouveau, Sébastien Touvron, Rhône-Alpes Création, Alain Marion, professeur à l’IAE Lyon 3,

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Philippe Valentin dont on a parlé tout à l'heure au titre de Lyon Place d’Échange

Bernard Buisson, à nouveau, Directeur général du Crédit Agricole Centre Est,

Arnaud Peyrelongue, patron de BPI France, Michel Thomas que vous reverrez sur les

questionnements tout à l'heure. Dans ce contexte, Jean-Claude TRICHET, nous

sommes heureux que vous ayez accepté d'être notre hôte d'honneur. Vous êtes lyonnais et vous êtes banquier, ce sont des choses qui nous vont droit au cœur et je suis persuadé que votre témoignage va nous passionner.

Maintenant, je vais vous donner un point d'organisation, car lorsque l’on sait ce que l’on fait, la vie est plus simple. Nous allons, vous allez partager l'entrée. Pendant ce temps, pas de discours.

Ensuite, je reviendrai vous dire tout ce que je sais sur Monsieur Jean-Claude TRICHET, il y a beaucoup de choses à dire, mais je ferai très court car j'ai déjà abusé.

Puis, Monsieur TRICHET, vous serez à l'ouvrage. Et vous allez intervenir sur une durée de 30 à 40 minutes. Nous vous attendons sur cet exercice.

Ensuite, nous prendrons le plat chaud. Vous aurez droit à préparer vos questions que nos

amis Nicolas Millet, Marc Bonnet et Michel Thomas collecteront et synthétiseront autour de Michel Thomas.

Enfin, nous arrivons au moment du dessert et nous libérerons la séance.

Merci pour votre attention et bonne entrée. (Applaudissements) On parlait tout à l'heure de la production de la SEPL,

Marc Bonnet qui est au cœur de ce travail, a fait ce petit recueil : voilà ce qu'a produit la SEPL au cours des six dernières années à travers les conférences qui sont reprises et les synthèses qui sont

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faites. Tout ceci est porté par les services administratifs de la Chambre. Vous voyez que la cogitation a été élevée et tous ces documents sont à votre lecture. Merci.

(La séance, suspendue à 20h55 est reprise à 21h10) M. MINSSIEUX.- Je vous annonce et je vous

présente Monsieur Jean-Claude TRICHET que nous connaissons tous assez bien, mais que nous ne connaissons pas très bien.

Jean-Claude TRICHET, ancien Président de la Banque Centrale Européenne, Gouverneur Honoraire de la Banque de France, vous êtes actuellement Président de deux think tanks, le Groupe des Trente localisé à Washington, Président du Conseil de l'Institut Bruegel à Bruxelles, vous présidez la Commission Trilatérale Europe et vous êtes membre de l’Institut l’Académie des Sciences Morales et Politiques.

Vous êtes né à Lyon, nous vous avons bien repéré par rapport à ce point auquel, nous Lyonnais, sommes naturellement très sensibles.

Vous êtes Inspecteur général des Finances honoraire, ingénieur civil des Mines, vous êtes Diplômé de l'École nationale des Mines de Nancy, de l'Institut d'Études Politiques de Paris, de l'Université de Paris en Sciences Économiques, et de l’ENA (École Nationale d'Administration).

Vous avez fait un début de vie professionnelle dans le secteur privé, de 1966 à 1968 et vous avez été affecté à l'Inspection Générale des Finances en 1976, en travaillant plus directement au Trésor.

Vous devenez en 1976 Secrétaire général du CIASI, c’est un nom que certains d'entre vous ont en tête, le Comité Interministériel pour l'Assistance des Structures Industrielles.

Alors, séquence émotion, c'est grâce à ceci que nous nous sommes croisés il y a une quarantaine d’années. Jeune employé ou attaché de direction d'une grande banque lyonnaise, j'étais envoyé à la capitale pour soutenir, à l'instigation de mon audacieuse direction générale, un point de vue qui allait à l'encontre des choix politiques du moment concernant un grand dossier de

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place, dans le domaine du textile. Je n'en dirai pas plus pour éviter toute histoire de famille ! Bref, j'ai rencontré Monsieur TRICHET à deux ou trois reprises et j'ai particulièrement apprécié, surtout dans mon rôle de relais, le fait d’avoir été écouté et que le projet défendu par l'équipe lyonnaise a été retenu par le CIASI ; par voie de conséquence, l'entreprise a survécu et, en plus, j’ai pu ouvrir le compte de l'entreprise après. C’était affaire bien réussie. Excusez-moi Monsieur TRICHET d’évoquer ce point de complicité. Mais je pense que c'est ainsi qu’on tisse le fil de la confiance en matière d’entreprise et de banque et aussi entre banquiers. Et c'est ce qui nous a rapprochés à nouveau ce soir. Je voulais faire allusion à ce petit point de complicité.

En 1978, Jean-Claude TRICHET est nommé Conseiller Économique au cabinet du Ministre de l'Économie, puis la même année Conseiller du Président de la République.

Jean-Claude TRICHET est président du Club de Paris qui travaillait sur le rééchelonnement des dettes souveraines de 1985 à 1993.

En 1986, vous devenez Directeur du Cabinet du Ministre de l'Économie.

En 1987, vous êtes nommé Directeur du Trésor. De 1992 à 1993, vous êtes nommé Président du

Comité Monétaire Européen. Jean-Claude TRICHET est nommé Gouverneur de

la Banque de France en 1993, il met en oeuvre dans les années 81-90 la stratégie française de désinflation compétitive.

Le 29 juin 2003, Jean-Claude TRICHET est élu Président des Gouverneurs des Banques Centrales du Groupe des Dix, il est également Président des Banquiers centraux de la réunion de l’Économie Globale.

Et enfin, vous devenez Président de la Banque Centrale Européenne le 16 octobre 2003. Votre nomination prend effet à compter du 1er novembre 2003 et se termine le 1er novembre 2011.

On voit que vous avez chevauché la grande crise qui a ébranlé le monde.

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Jean-Claude TRICHET a été nommé personnalité de l’année par le Financial Times en 2007, par la revue internationale économique en 1991 et 2007, « Policy Maker of the year » par la revue International Economy Magazine en 1991 et en 2007, numéro 5 dans la liste des personnalités les plus influentes du monde par Newsweek en 2008, l'une des personnalités les plus influentes du monde par Time Magazine en 2011, vous avez reçu naturellement d'autres prix, dont le prix franco-allemand de la culture en 2006, la médaille d’or Ludwig-Erhardt en 2007, le prix international Charlemagne 2011 d’Aix-la-Chapelle, vous avez reçu le prix de l'économie mondiale en 2011 du Kiel Institute, et par ailleurs, les universités de Liège, Montréal, Stirling, Tel-Aviv, Bologne et Sofia vous ont conféré le titre de docteur honoris causa.

Voilà un formidable parcours, d’autant que vous avez acquis une incomparable expérience, s'appuyant sur l'analyse experte de situations, mais surtout les responsabilités assumées. Vous avez vécu une période exceptionnelle de crise financière, nous aussi d'ailleurs, mais vous l'avez vécue de façon active, engagé à la tête de la Banque Centrale Européenne. Cette période a bousculé l'économie mondiale et bien sûr européenne et vous avez su y faire front.

Nous attendons donc de vous avec impatience votre lecture actualisée des contextes mondiaux, européens et français, sur le plan économique et financier aujourd'hui, l'injection massive de liquidité, baisse massive de taux, jusqu'à quand ? Légère remontée de taux, jusqu’à quand ?

Par ailleurs, vous avez pratiqué les institutions politiques nationales, européennes, dans ce climat de vive tension, quels enseignements en tirez-vous pour améliorer l'efficacité de nos instances économiques et aussi la participation citoyenne dans nos instances politiques et économiques ?

Alors que deux sujets – et il y en a d'autres - bousculent particulièrement l'actualité : la crise grecque qui n'en finit pas se dénouer et l'annonce du référendum britannique qui va amener à remettre les cartes sur la table, ces réflexions sous-tendent le thème de la conférence de ce soir :

La gouvernance économique et budgétaire de la zone euro. Vers une fédération économique et budgétaire par exception ?

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Monsieur TRICHET vous avez la parole. Jean-Claude TRICHET.- Merci beaucoup de cette introduction extrêmement flatteuse et de cette invitation dans un lieu prestigieux, symbole de la globalisation à l'époque de la construction de cette merveilleuse Chambre de Commerce, Bourse Corbeille. Vraiment je suis très impressionné et je le suis d'autant plus en constatant que vos invités remplissent une salle immense. Donc, encore une fois, un grand merci. Je ne vais pas ré-énoncer les personnalités qui sont ici présentes, mais je voudrais quand même dire que je suis extrêmement sensible à l'invitation du Président de la Chambre de Commerce de Lyon et à la vôtre évidemment, Monsieur le Président de la Société d’Économie Politique et Sociale. Je voudrais aussi dire que je suis très touché par la présence du Préfet et de l'Ambassadeur Reynaud que j'ai connu à Francfort et avec lequel nous avons noué des liens d'amitié. C'est une illustration de l'Europe telle qu'elle fonctionne. Je voudrais dire aussi que je suis très impressionné de voir que le corps diplomatique et consulaire est extrêmement important à Lyon, et je voudrais saluer les Excellences qui sont dans cette salle. J’ajouterai que l'Université, évidemment ce n'est pas étonnant s'agissant de la SEPL, est elle-même bien représentée et je la salue. Laissez-moi aussi vous dire que je retrouve de très vieux amis, vous-même, puisque nous avons été en relations de travail il y a 40 ans, d'autres ici avec lesquels j'étais aussi en relation de travail. Nous avons, vous me corrigerez si je me trompe, fait tous nos efforts pour sauver Louison Bobet il y a 40 ans avec un ami qui est présent dans cette salle. Et cela me fait tellement plaisir de retrouver ce réseau d'amitié. En fait, cela n’est pas tellement étonnant puisque je suis né à Lyon, dans le 4è arrondissement et cela figure sur tous mes papiers.. À ce sujet, je dois dire aux Lyonnais ici présents que l'accent lyonnais a tendance à s’atténuer au fil du temps, car je ne le retrouve pas aujourd’hui.. Je vous signale en passant que le conservateur de l'accent lyonnais pur, était - là aussi, la globalisation parle - l'Ambassadeur des États-Unis en France, Félix Rohatyn. Ceux d'entre nous qui ont eu le privilège de travailler avec Félix Rohatyn, très grand banquier chez Lazard, très grand Ambassadeur, savent qu’il avait une manière de s'exprimer qui, pour moi, « gone » de la Croix Rousse, était absolument

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fabuleuse. Il disait avec un accent parfait : « En descendant, montez donc voir le petit comme il est grand » et c'était exactement l'accent le plus pur de Lyon. Je suis donc particulièrement ému d'être à Lyon ce soir. Je dispose très exactement de 40 minutes pour mon intervention et je sais que le Président de la Société d'Économie Politique est minutieux. J'enclenche donc mon système de compte à rebours. .Le thème que je voudrais aborder avec vous porte sur les points suivants : - la crise financière mondiale, son incidence sur l'Europe - les raisons pour lesquelles la gouvernance européenne, et en

particulier la gouvernance de la zone Euro, a présenté des insuffisances.

- les corrections que nous avons apportées à chaud, dans cette crise en Europe et aussi peut-être ouvrir des perspectives.

C'est la raison pour laquelle il y a un sous-titre à cette conférence à savoir : vers une fédération économique et budgétaire par exception. J’espère vous faire comprendre ce que j'entends par là.

D'abord, un mot de la crise mondiale que nous vivons encore aujourd'hui. C'est évidemment une naïveté de croire que la crise financière est terminée. La crise financière n'est pas terminée. Si elle l’était, les Banques Centrales du Japon, des États-Unis, d'Angleterre et la Banque Centrale Européenne ne feraient pas ce qu'elles font, c'est-à-dire ne pratiqueraient pas des politiques monétaires qui demeurent ultra accommodantes avec des taux d'intérêt à 0 ou très proches de 0 dans les deux sens d’ailleurs, en négatif ou en positif, elles ne pratiqueraient pas des mesures non conventionnelles sous des formes diverses au Japon, en Angleterre, aux États-Unis et chez nous en Europe. Soyons conscients du fait que nous sommes toujours dans une période tout à fait exceptionnelle. Si vous faisiez l'expérience de penser, d'imaginer ce que serait l'économie réelle américaine, japonaise, anglaise et européenne sans ces efforts extraordinaires de la Banque Centrale, vous pourriez aisément vous imaginer que l'économie réelle, l’économie financière bien sûr ne fonctionneraient plus du tout normalement. Sinon, il faut faire l’hypothèse que les banquiers centraux sont devenus extravagants

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partout dans le monde avancé. C'est une hypothèse fausse évidemment. Que s'est-il passé exactement ? En 2007 et 2008, les grands pays avancés,-non pas les pays émergents, non pas les pays en transition, non pas les pays en développement, comme on disait et comme on le dit encore-,ont rencontré la crise financière la plus grave depuis la deuxième guerre mondiale. Cette crise financière, aurait pu être la plus grave depuis la première guerre mondiale à mon avis, si les Banques Centrales n'avaient pas réagi de manière extrêmement rapide et extrêmement audacieuse, et si derrière les Banques Centrales, les Gouvernements eux-mêmes n'avaient pas réagi, eux aussi, de manière extrêmement rapide et très audacieuse en prenant des risques très importants. Un Gouvernement qui prend des risques est un contribuable qui prend des risques et c'était le cas aux États-Unis, en Angleterre, en Europe et depuis un certain temps, à vrai dire, au Japon. Nous avons échappé à une crise extraordinairement grave. J'ai dit qu’elle aurait pu être aussi grave que la crise de 1929-1930 s'il n'y avait pas eu une réaction extrêmement rapide des autorités et aussi, bien entendu, du secteur privé. Cette crise, comme je vous l’ai dit, manifeste toujours ses effets. Je vais vous résumer ci-après, les épisodes (bien entendu dans le temps qui m'est donné je suis obligé de simplifier un peu) qui ont caractérisé cette crise financière qui était annoncée : -un premier épisode va du 9 août 2007 jusqu'au 15 septembre 2008. du moment où le marché monétaire européen s'est trouvé complètement disloqué et où, le jour suivant, le marché monétaire américain et le marché monétaire anglais, tous les grands marchés monétaires des pays avancés, ont connu à cause de la crise des subprimes un moment de turbulences financières extrêmement grave, inédit, et pratiquement du jour au lendemain. Ceux qui sont banquiers parmi vous se souviennent que la Banque Centrale Européenne, j’en étais le Président à l'époque, a décidé de donner de la liquidité sans limites à toutes les banques commerciales de la zone Euro. On nous a demandé 95 milliards d'euros et nous les avons donnés immédiatement. . Personne ne s'attendait à ce que l'élément de dislocation du marché monétaire puisse être tel que, du jour au lendemain, on puisse avoir d’aussi importants besoins de liquidités sur la place

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européenne., période de turbulences financières qui dure un peu plus d'un an et qui correspond à une réévaluation générale des risques financiers dans les pays avancés. Les marges qui étaient très faibles se creusent, les primes de risques se creusent, la volatilité des marchés financiers qui était extrêmement faible sur la quasi-totalité des marchés prend beaucoup plus d'ampleur. Bref, réévaluation générale des risques dans un contexte de turbulences financières. C'est la première étape, si je peux dire, le premier épisode. Et cela frappe tous les pays avancés. L’épicentre de cette crise est clairement aux États-Unis c'est la crise des subprimes qui crée ces turbulences. -Ensuite, nous avons un deuxième épisode : les financiers, bien entendu, ont le souvenir du dépôt de bilan de Lehman Brothers le 15 septembre 2008. Ce deuxième épisode, je le résumerai en disant : menace grave et immédiate d’effondrement du système financier dans les pays avancés. C'est là que je reviens à la métaphore de la crise très grave de 1929-1930. Mon collègue Ben Bernanke aux États-Unis, Mervyn King à Londres, moi-même, nous voyons sous nos yeux le système financier occidental s'effondrer comme un château de cartes. En quelques demi-journées, la totalité du monde financier dans les pays avancés est en train de changer de comportement de manière tragique, et certains d'entre vous en ont un souvenir très précis. Puisqu’une institution financière américaine, une banque d'investissement américaine pouvait faire défaut et faire perdre beaucoup d'argent à ses contreparties, cela signifiait donc que tout le monde pouvait faire défaut. Par conséquent, il fallait se retirer de toutes les contreparties qu'on pouvait avoir, raccourcir formidablement ses horizons d'investissement, être aussi liquide que possible, réaliser le plus rapidement possible tous ses actifs. C'est ce que la totalité finalement des gestionnaires dans le monde ont commencé à faire. Nous avons arrêté, comme je le disais, avec des décisions extrêmement audacieuses et extrêmement rapides, précoces, ce tsunami financier qui déferlait. Et cela a été extrêmement difficile, extraordinairement laborieux et là aussi, je simplifie : nous avons évité la très grande dépression. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous n'avons pas le souvenir que cette crise était aussi dramatique que ce que je viens de vous décrire. Personnellement, j’en ai le souvenir car j'ai vu le château de cartes s'effondrer, mais nous l’en avons empêché. Il n'y a eu qu'un seul Lehman Brothers et

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pas une chaîne de Lehman Brothers à travers l'ensemble des pays avancés. Néanmoins, le choc sur l'économie réelle est considérable, et tous les industriels dans cette salle (qui est composée probablement d'un tiers de financiers, d’un tiers d'industriels et d'un tiers peut-être d'observateurs et d'universitaires) se souviennent que l'économie réelle au dernier trimestre de l'année 2008, au premier trimestre de l'année 2009 et au deuxième trimestre de l'année 2009 tombait comme une pierre, au point que toutes les anticipations, toutes les projections étaient erronées, elles étaient toujours trop optimistes. L'économie réelle plongeait beaucoup plus rapidement que tout ce que nous pouvions imaginer sur la base des modèles économiques que nous avions et les projections économiques que nous pouvions faire. Au point que moi-même à Francfort, je considérais que finalement il n'y avait que le contact direct avec les chefs d'entreprise et avec l’économie réelle qui pouvait nous donner une idée plus pertinente de ce qui était en train de se passer. Mes collègues dans le reste du monde faisaient la même chose. À la fin du deuxième trimestre de l'année 2009, l'économie des pays avancés arrête de plonger, nous atteignons une sorte de plancher, et nous rebondissons laborieusement, difficilement ; là je parle de l'ensemble des pays avancés, bien entendu, nous aussi en Europe et nous aussi en France et durant le dernier trimestre de l'année 2009, nous pouvions nous dire dans beaucoup de cercles d'observation et de cercles universitaires, que si nous avions évité la très grande dépression, nous n’avions pas évité la très grande récession. Il était clair que nous avions un monde financier extraordinairement fragile, qu’il nous fallait travailler sur le renforcement du système financier des pays avancés, et d'ailleurs de l'ensemble des pays du monde, pour faire en sorte que le système soit beaucoup plus résilient, pour donner à l’économie réelle les moyens de connaître une expansion raisonnable, après ce choc très brutal de la très grande récession. Voilà le programme pour les années à venir. -C’est alors qu’a commencé le troisième épisode de la crise mondiale des pays avancés. La crise qui était, à l'époque des subprimes et de post-Lehman Brothers, une crise financière mettant en cause la qualité des signatures privées, se transforme, en fait, en

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une crise financière des signatures publiques. La crise des risques financiers privés se transforme en une crise des risques souverains, c’est-à-dire des signatures des États. Mais la grande différence entre les deux premiers épisodes de la crise et le troisième, c'est que, alors que l’épicentre de la crise financière privée était aux États-Unis, l’épicentre de la crise financière publique, a traversé l'Atlantique et est arrivé en Europe, et plus particulièrement dans la zone Europe. La meilleure illustration que je puisse donner de cela, c'est mon collègue Ben Bernanke qui pointe son doigt sur moi à la fin de l'année 2009 à Francfort en me disant : « Jean-Claude, now it’s your turn ». Il voulait dire : j’ai eu le poids de la crise post-Lehman Brothers à New-York et à Washington jusqu'à présent, maintenant ce poids de la crise, je ne l'ai plus, mais toi, tu l'as » puisque nous avions le début de la crise des risques souverains Grèce –Irlande – Portugal, etc….. La bonne question évidemment est de se dire : comment se fait-il que la crise des risques souverains se soit localisée en Europe dans la zone Euro ? Pour quelles raisons avons-nous présenté au monde entier les signatures considérées par les investisseurs et les épargnants du monde entier comme étant les plus vulnérables ? Et voyez-vous, je fais le rapprochement, les non-banquiers me le pardonneront, entre ce qui s'est passé aux États-Unis où avant Lehman Brothers vous aviez eu les problèmes de Bear Stearns qui était une banque d'investissement sauvée par un sauvetage privé, puis Freddie Mac et Fannie Mae qui étaient deux grandes entreprises semi-publiques spécialisées dans les prêts hypothécaires et dans la sécurisation des prêts hypothécaires. Après Lehman Brothers, il y avait immédiatement AIG, très grande entreprise qui faisait à la fois beaucoup d'opérations sur les marchés et dans le secteur de l'assurance et derrière, d'autres entreprises encore qui apparaissaient comme étant potentiellement vulnérables, je pense à City et à d’autres banques. Donc, une chaîne de signatures privées dans l'ordre décroissant de la vulnérabilité, qui faisaient système en quelque sorte et qui convainquaient l'ensemble des opérateurs, des investisseurs, des épargnants du monde entier qu'il y avait là une vulnérabilité systémique, liée à l’existence d’une chaîne de signatures dans lesquelles on ne pouvait plus avoir confiance..

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De la même manière, dans la zone Euro, nous avions l'équivalent : c'était la Grèce, pays le plus vulnérable, signature la plus vulnérable à laquelle nous ne pouvions plus faire confiance, l’Irlande, seconde signature la plus vulnérable, le Portugal, troisième signature la plus vulnérable et l’Espagne, quatrième signature la plus vulnérable, qui étaient un peu l'équivalent de ces signatures privées que je viens d'évoquer. .Un épicentre de crise qui demeure, à mon avis, une crise des pays avancés, car cela ne voulait pas dire que l'on considérait la signature japonaise comme étant excellente ou même la signature américaine. Vous vous souvenez qu'il y a eu des dégradations de la notation de la signature américaine elle-même, un phénomène extrêmement grave de remise en cause de l'ensemble de la qualité des signatures. Mais le fait, flagrant et très douloureux pour les Européens, est que les pays les plus vulnérables, les signatures les plus vulnérables sont tous situés dans la zone Europe, en tous les cas, les premières sur la liste et donc la bonne question est :

Pourquoi, diable, nous sommes-nous trouvés avec les signatures les plus vulnérables dans le domaine des risques souverains dans la zone Euro ?

Question d'autant plus pertinente, je crois, que le paradoxe est considérable, car la zone Euro en consolidé avait en son sein à la fois les signatures vulnérables que je viens d’énoncer, mais aussi les meilleures signatures au sein des pays avancés, par exemple l'excellente signature allemande, l'excellente signature néerlandaise ou l'excellente signature autrichienne qui sont aussi dans la zone Euro. La zone Euro apparaissait comme étant en quelque sorte écartelée entre de très bonnes signatures et des signatures considérées comme très mauvaises par les investisseurs et les départements du monde entier.

Autre remarque : quand nous consolidions tout cela, les bonnes signatures et les mauvaises signatures, nous arrivions à une situation moyenne bien meilleure que celle du Japon, nettement meilleure que celle des États-Unis d’Amérique ou de l’Angleterre en ce qui concerne les déficits budgétaires annuels et à peu près de même niveau que celle de l'Angleterre et des États-Unis en ce qui concerne l'encours de dette en proportion du produit intérieur brut. En d’autres termes, ce n'était pas la zone Euro dans son ensemble qui posait problème, c'était le fait qu'elle apparaissait très

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hétérogène, avec à la fois le meilleur et le pire dans la présentation des signatures des pays souverains membres de la zone.

La bonne question est évidemment : pourquoi diable nous sommes-nous trouvés, nous, dans la zone Euro alors que nous étions bons, - au royaume des aveugles les borgnes sont rois - en termes de signatures, de qualité de la gestion budgétaire, de qualité de la gestion de la balance des paiements courants qui était meilleure que celle de tous les autres d’ailleurs, en tout cas certainement de l'Angleterre et des États-Unis :

Pourquoi diable avons-nous eu en notre sein des signatures très médiocres ? Là, je vais vous énoncer (mais considérez que ce sont des têtes de chapitre car vous avez été très sévère à mon égard en me donnant un temps très limité, je ne peux pas m'étendre trop) six raisons qui, à mes yeux, expliquent pourquoi nous nous sommes trouvés dans cette situation.

Première raison : nous n'avons pas respecté nos propres règles. Le pacte de stabilité et de croissance depuis le début de la zone Euro avait été négocié comme étant un élément essentiel de cohésion au sein de la zone Euro, la crise était en train de prouver que c'était bien vrai. Si nous avions eu des situations budgétaires convenables respectant le pacte de stabilité et de croissance, nous n’aurions évidemment pas présenté les signatures les plus médiocres du monde avancé. Mais il se trouve, et nous sommes pour la plupart citoyens français dans cette pièce, que nous avons nous-mêmes une tendance à l'irrédentisme en ce qui concerne la qualité de la gestion budgétaire, tendance horriblement fâcheuse, il faut bien le dire, mais clairement, les pays qui posaient problème en 2003 et 2004 au sein de la zone Euro, ce n’était pas la Grèce, le Portugal ou l’Irlande, c'était l’Allemagne et la France. Et donc, l’Allemagne et la France en 2003 - 2004 ont dit : « Nous ne voulons pas qu'on nous applique à nous-mêmes les règles du pacte de stabilité et de croissance, nous ne voulons pas que la Commission et le Conseil enclenchent un processus conduisant à des sanctions éventuelles contre nous (air connu) et bien entendu, nous demandons la renégociation du pacte de stabilité et de croissance ».

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La Banque Centrale Européenne par ma voix s'y est opposée au maximum, la Commission s'y est opposée, mais les grands pays ont réussi à avoir une majorité pour renégocier, et surtout, ont donné le plus mauvais exemple aux autres pays et notamment aux pays potentiellement très mal gérés que j'ai déjà énoncés. Vous voyez à quel point il est important de bien comprendre que la cohésion de la zone Euro en période très difficile de crise financière mondiale demande le respect du pacte de stabilité et de croissance. Celui-ci d'ailleurs, j'y reviendrai, a été renforcé dans la crise, parce que, précisément, l’une des leçons principales de la crise est qu'il fallait revenir à un pacte respecté aussi rigoureusement que possible. Ceci peut-être vous explique pourquoi, en tant que Président de la Banque Centrale Européenne et Gouverneur de la Banque de France, (je parle sous le contrôle du Directeur régional de la Banque de France que je salue avec beaucoup d'amitié et d'admiration parce que le travail qui est fait par la Banque ici est remarquable) je vous dis clairement, ne soyez pas surpris que les Banquiers centraux envoient ce message en permanence et ne soyez pas non plus surpris qu'il y ait d'innombrables voix pour dire constamment : « Non, ce n'est pas la peine, attendons, ne faisons pas ceci ou cela ». Effectivement, il est toujours un peu difficile de se gérer de manière aussi attentive que possible sur ce plan-là, mais c'est nécessaire, et particulièrement dans une zone à monnaie unique. Deuxième raison, et c'est le cas depuis le début, je ne peux pas dire que nous ne respections pas une règle, mais nous n'avions pas eu l'idée voulue, acceptée, de suivre de très près, avec un vrai pilier de gouvernance économique, les évolutions des indicateurs de compétitivité. Dans une zone à monnaie unique, vous avez la même monnaie, cette monnaie a le même pouvoir d'achat international, et elle a exactement le même coût international, si vous exportez, c'est l'Euro, c'est la même monnaie. Vous avez aussi évidemment la même politique monétaire qui s'applique à l'ensemble des pays. Si vous laissez l'ensemble de vos données nominales, et là je m'adresse particulièrement aux chefs d'entreprise, avancer beaucoup plus vite que la moyenne de la zone Euro, c'est-à-dire au total, si vous avez des revenus, des coûts, une inflation domestique,

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nationale qui en Euro va plus vite que la moyenne, vous perdez de la compétitivité par rapport à vos coûts unitaires de production ; le prix de vos marchandises, le prix de vos services, le prix de vos produits manufacturés deviennent progressivement plus élevés que la moyenne des prix, des coûts et des valeurs des produits manufacturés dans l'ensemble de la zone. Vous perdez de la compétitivité. Alors, il ne faut pas s'étonner bien entendu de voir qu’ensuite les parts de marché diminuent car l'ensemble des consommateurs nationaux, européens et mondiaux, eux, prennent le meilleur rapport qualité/prix. Et personne ne va leur enlever ce droit d'acheter au meilleur rapport qualité/prix. C'est d’ailleurs ce que nous faisons tous, bien entendu. Et donc, si nous laissons filer ces évolutions nominales dans une zone à monnaie unique, alors, nous perdons de la compétitivité. Je vais vous donner une idée des ordres de grandeur que j'observais moi-même de très près depuis 2005, car c'est depuis 2005 que la Banque Centrale Européenne a dit à l'ensemble des Gouvernements de la zone Euro : « Attention, vos indicateurs de compétitivité sont en train de diverger », et ils divergent depuis le début de l'Euro de manière persistante, c'est-à-dire qu'il n'y a pas de corrections. Et les écarts se creusent année après année. Donc, depuis 2005, la Banque Centrale Européenne distribuait les coûts unitaires de production et un certain nombre d'indicateurs de compétitivité à l'ensemble des Gouvernements de la zone Euro dans les réunions dites de l'Eurogroupe. Je vous indique trois chiffres pour que vous ayez en tête ce qui peut se passer dans une zone à monnaie unique. La plupart des ministres me disaient : « Ce n'est pas notre responsabilité que d'avoir le contrôle des coûts unitaires de production, il y a des partenaires sociaux, ils négocient, il y a une économie de marché, les chefs d'entreprise sont très attentifs à ne pas perdre de la compétitivité et par conséquent, vous nous reprochez des évolutions qui sont le fruit normal d'une économie de marché fonctionnant ». Alors, je les prenais au mot et je leur disais : « Prenons les salaires des fonctionnaires, vous êtes Ministre des Finances, vous êtes responsable des salaires des fonctionnaires. Les chiffres que je vous donne sont précis.

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Grèce, 1999, c’est le début de la zone Euro, (la Grèce n'y était pas encore mais de facto, elle y était déjà) ; donc du 1er janvier 1999 au 31 décembre 2009, c’est-à-dire au moment où commence vraiment la crise des risques souverains, l’augmentation des traitements et salaires des fonctionnaires en Euros a été : en Grèce de 117 %., Irlande: 110 %., Portugal: 75 %. , Espagne 65 % , moyenne dans la zone Euro : 36 %. , France : 36-37 % , Allemagne 20 %. :

117 % en Grèce/20 % en Allemagne : même monnaie, même zone monétaire mais un pays dans lequel les partenaires sociaux comme les pouvoirs publics ont été incroyablement attentifs à regagner leur compétitivité, avec un soin extraordinaire à ces évolutions nominales de revenus, de prix, de coûts, de coûts unitaires de production que j'évoquais. Résultat, vous le voyez : plus de chômage de masse dans le pays concerné. Dans l’autre pays, la Grèce, augmentation débridée, car dans ce pays tant qu’on était financé, au total, on gérait l'Euro à peu près comme on avait géré la drachme auparavant. Malheureusement, nous n'avions pas de suivi attentif des évolutions de ces indicateurs de compétitivité et le résultat naturellement est que les quatre pays que j'ai notés, étaient des pays pouvant avoir des problèmes sérieux sur le plan budgétaire ; il s’agissait aussi de pays ayant perdu énormément de compétitivité et qui, comme par hasard, se retrouvaient dans la liste des signatures vulnérables que j'ai déjà évoquées. Je ne vais pas plus loin, mais l'un des messages est : dans une zone à monnaie unique, une attention extrême doit être portée aux évolutions nominales, sinon, ou bien on perd de la compétitivité - et c’est ce qui s’est passé de manière tragique avec certains pays - ou bien on n’en regagne pas si on en avait perdu auparavant et si on était dans une situation difficile sur le plan des parts de marché des exportations et de la balance des paiements courants. L'Allemagne nous a donné un exemple extraordinaire de pays démarrant dans la zone Euro avec une faible compétitivité des coûts, un déficit de la balance des paiements courants et un chômage énorme. Quand on vous dit : « Mais l'Allemagne est forte, elle gagne forcément, car elle est forte ». Non, l'Allemagne n'était pas forte du tout au départ, elle était dans une situation très difficile. Simplement, elle a eu un consensus pour mener une

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stratégie de reconquête de sa compétitivité économique année après année et cela prend forcément du temps. C'est la même chose d'ailleurs pour les entreprises, il est rare que l'on puisse d'un seul coup se remettre en situation de compétitivité excellente, généralement, il faut faire des efforts sur une période relativement longue. J'ai un peu insisté sur ce point car, comme vous le voyez, pour moi, c’est très important, c'était la deuxième raison pour laquelle nous nous sommes retrouvés avec cette situation très fâcheuse.

Troisième raison : le fait que nous n'avions pas d'outils prêts nous permettant de répondre à une crise financière absolument gravissime. Ceci nous a rendus plus vulnérables en tant que système, il a fallu un traité pour créer le mécanisme de stabilité européen. À l'époque de Lehman Brothers, nous étions 15 pays dans la zone Euro, donc 15 capitales qui prenaient 15 décisions, ensuite 16, puis 17, etc., donc, beaucoup de difficultés, alors qu’aux États-Unis, il suffisait d'aller devant le Congrès des États-Unis pour avoir un programme efficace. Cela ne veut pas dire que c'était facile aux États-Unis ; vous vous souvenez peut-être que le premier programme pour faire face à Lehman Brothers qu’on appelait le programme TARP, a été d’abord refusé par le Congrès de États-Unis et comme il apparaissait, en effet, que la situation était gravissime, il a ensuite été voté. Mais ce n'est facile nulle part. Simplement, chez nous, il fallait passer par toutes les capitales européennes et c'était évidemment un handicap assez considérable en termes de riposte stratégique à la situation très difficile dans laquelle nous étions.

La quatrième raison importante aussi : nous n'avons pas d'union bancaire. Or, l'une des raisons de cet écartèlement entre les meilleures signatures et les moins bonnes n'est pas seulement lié au fait que la compétitivité avait divergé, que les situations budgétaires étaient très différentes, mais aussi au fait que la corrélation était extrêmement forte entre la qualité des signatures des ventes et la qualité des signatures des États, puisque les États eux-mêmes étaient, en quelque sorte, les garants des banques dans la crise gravissime, aux États-Unis comme en Angleterre, comme chez nous. Mais évidemment si la signature de l'État était très bonne, la signature des banques alors devenait meilleure, puisque le garant

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était solide. Si la signature de l'État n'était pas bonne, la signature des banques était elle-même très difficile et elles avaient beaucoup de mal à se refinancer, puisque le garant n’était pas solide. Donc, l'écartèlement au sein de la zone Euro a été amplifié par l'absence d'union bancaire. Vous notez bien que j'ai évoqué 4 causes. Premièrement, nous avons renforcé le pacte de stabilité et de croissance.Deuxièmement, nous avons créé de toutes pièces un nouveau pilier qui s'appelle la procédure de suivi des grands déséquilibres macroéconomiques, l'acronyme anglais c’est MIP (Macroeconomic Imbalances Procedure). Et les deux acronymes sont : pacte de stabilité et de croissance et suivi de ces grands déséquilibres. Je considère personnellement que les deux piliers de gouvernance sont également importants. On ne parle que du suivi budgétaire, on a grand tort. Le suivi des indicateurs de compétitivité est essentiel et singulièrement essentiel pour les chefs d'entreprise. Ils font eux-mêmes partie de la compétitivité d'ensemble. C'est pour cela qu'en France aujourd'hui la modération des revenus et des coûts est absolument essentielle, je dis bien essentielle, si nous voulons avoir un succès raisonnable progressivement dans la lutte contre le chômage, la reconquête de nos parts de marché et la croissance. J'avais évoqué six raisons, je viens de ne vous en donner que quatre. Sur les quatre, nous avons a pris des décisions : La première : pacte de stabilité et de croissance renforcé ; La seconde : nouveau pilier de surveillance macroéconomique des déséquilibres de compétitivité ; La troisième : nous avons effectivement maintenant un mécanisme de stabilité financière européen par un nouveau traité ; La quatrième : comme vous le savez, nous avons une union bancaire maintenant, qui, d’ailleurs, n'est pas achevée, qui demande certainement encore beaucoup de travail pour être achevée. Mais ce sont les quatre corrections en quelque sorte des quatre premières causes que j'ai évoquées pour expliquer la difficulté dans laquelle nous nous sommes trouvés.J'avais évoqué six causes, il y en a deux autres, mais ces deux autres ne sont pas propres à la zone Euro, mais propres à l'ensemble de l'Union Européenne, c’est-à-

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dire aux 27 pays et pas simplement aux 19. Et ces deux dernières causes sont :

-l'absence d'achèvement du Marché Unique Européen -l'absence de réel début de mise en oeuvre des réformes structurelles en Europe. Ces deux dernières grandes entreprises auxquelles les Européens se sentent obligés mais qu'ils mettent en oeuvre avec beaucoup de réticence, encore une fois, sont valables pour tous les membres de l'Union Européenne et pas simplement pour les pays de la zone Euro, mais elles sont aussi très importantes pour les pays de la zone Euro. Alors, j'avais dit que j'ouvrirai peut-être des perspectives. -La première perspective évidemment, c'est que je nous engage à respecter rigoureusement les nouvelles règles que nous avons posées. Nous venons de payer tellement cher le non-respect des règles précédentes ou l'absence de piliers de gouvernance dans certains domaines, que le respect aussi strict que possible de ce que nous venons de décider est très important. Ceci dit, et là je vais être très audacieux si vous le permettez, je suis très conscient du fait que je vais loin, je vais même tellement loin que ce que je vais suggérer est quand même assez improbable dans sa réalisation à relativement court et moyen terme mais après tout, nous parlons d'une entreprise qui a démarré il y a presque 65 ans et qui va se poursuivre historiquement, donc, nous avons le droit de raisonner à long terme, me semble-t-il. Un point me frappe dans tout cela : nous avons formidablement renforcé une sorte d'union politique de facto, parce que nous surveillons de près les budgets des différents pays. Cela veut dire que nous entrons dans leur mécanisme politique intime, nous entrons dans le mécanisme de l'Assemblée Nationale, nous entrons dans le mécanisme de débat budgétaire, la démocratie, après tout, est née du consentement à l'impôt. Nous sommes au cœur du fonctionnement de la démocratie politique. Lorsque nous posons le problème de savoir si l'ensemble de l'économie n'est pas en train de diverger dans ses évolutions nominales par rapport à ce qu'il faudrait faire dans une zone à monnaie unique, nous entrons nécessairement dans un champ où il y a les partenaires sociaux, où bon nombre d'autres entités fonctionnent dans nos démocraties et qui ont, elles-mêmes, si je

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puis dire, leur légitimité démocratique. Tout cela, appliquez-le à la Grèce aujourd'hui, et vous verrez à quel point les recommandations qui sont faites depuis le centre, peuvent trouver une réelle difficulté à s'appliquer lorsque le fonctionnement d'une démocratie particulière refuse finalement les recommandations ou s’efforce, disons, de les infléchir de manière extrêmement substantielle. Nous sommes au cœur d'une union politique de facto dans le domaine budgétaire, dans le domaine économique, et l'un des problèmes que nous rencontrons est qu'il n'y a pas de légitimité démocratique convaincante au centre ; nous avons au centre bien entendu la Commission. La Commission a la confiance du Parlement Européen élu au suffrage universel, la Commission a aussi la confiance des Gouvernements, les Gouvernements eux-mêmes sont des gouvernements légitimes, chacun dans sa propre démocratie. Donc, nous voyons bien que la construction n'est pas antidémocratique, mais, le dernier mot, qui le donne ? Le dernier mot, quand il y a un conflit sur le pacte de stabilité et de croissance est son application dans des circonstances évidemment très graves où le reste de l'Europe se dit : « Attention, nous allons nous créer de nouveaux problèmes monumentaux ». Le cas de la Grèce est évidemment un cas intéressant de ce point de vue où, encore une fois, l'application du nouveau pilier de gouvernance conduit un pays à diverger complètement et va créer inévitablement des problèmes à l'ensemble de la zone Euro ; d’ailleurs, comme vous l’avez vu, le système a été déstabilisé car plusieurs pays étaient dans cette situation. L’idée que j'ai, est la suivante, - et c'est pour cela que je l’appelle une fédération économique et budgétaire par exception : si un pays était en désaccord complet avec ce qui lui est recommandé, alors il demanderait l'arbitrage du Parlement Européen, naturellement dans la formation représentant des électeurs de la zone Euro, car il n'y a aucune raison que le Parlement Européen et que ses membres qui ne sont pas élus dans la zone Euro, puissent eux-mêmes prendre la décision ; mais là j'imagine que nous ne pouvons pas mettre en doute le caractère démocratique d'une décision importante qui correspondrait à un arbitrage entre le pays concerné et les institutions européennes (Conseils et Commissions). Ce processus serait une sorte de procédure d'appel au terme de laquelle les Parlementaires élus au suffrage universel, après contact très approfondi avec le Parlement du pays concerné, pourraient

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dire : « Finalement, nous assumons politiquement la décision suivante qui doit s'appliquer de plein droit dans le pays ». Alors, il me semble que là nous respectons le principe démocratique : ce sont les élus du peuple qui prennent démocratiquement, comme dans notre propre pays, en dernière analyse, les décisions budgétaires, les décisions relatives aux impôts, le niveau de la TVA, etc…... Ce serait également, me semble-t-il, le strict respect du principe dit de subsidiarité car on n'appliquerait pas cela pour tous les pays en permanence, on n'irait pas créer une fédération politique achevée au niveau d'un congrès européen qui prendrait toutes les décisions. Non, ce serait uniquement dans le cas très particulier d’un pays qui se serait mis dans une très mauvaise situation et où les institutions européennes lui diraient : « Il faut corriger cette situation » et où ce pays répondrait : « Non, je pense que vous vous trompez, vous et tous les autres, sur la base de vos majorités qualifiées, je demande un arbitrage suprême ». Et il me semble que nous avons le respect de ce principe dit de subsidiarité qui est très important pour les Européens, nous le voyons bien en ce moment. Les Européens n'ont pas envie que le centre leur dise tout ce qu'il faut faire. Ils veulent que le principe de subsidiarité soit strictement respecté. Troisième point : là, nous avons au moins un processus qui permet de prendre une décision, bonne ou mauvaise, pour le pays en question. Et une décision prise démocratiquement par une institution incontestable s’applique, point à la ligne. Voilà en quelques mots ce que je voulais vous dire, ce que j'entends par cette idée que nous pourrions aller dans la direction d'une fédération économique et budgétaire par exception. J'ajoute, comme je l'ai déjà dit, que c'est très audacieux. Cela demande évidemment un nouveau traité. Or, un nouveau traité est très difficile à imaginer, et beaucoup d'entre nous, et une partie de moi-même diraient : « Cela va quand même très loin, l'hypothèse de travail depuis le début c'est que nos démocraties convergent et qu'on n'en vienne pas à une situation où le centre impose à un pays des décisions dont il ne veut absolument pas ». Néanmoins, je vous rappelle que la jurisprudence de la Cour de Justice Européenne s'impose à tout le monde. Et que, de la même manière, même un pays qui a voté contre une directive, doit appliquer ladite directive.

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Donc, nous devons réfléchir très attentivement à toutes ces questions, et comme je vous l'ai dit, il faut réfléchir à long terme. Après tout, tout le monde disait avant la crise, après le référendum en France et au Danemark, « pas question d'avoir un nouveau traité ». Et puis, la crise a eu lieu et nous avons eu deux nouveaux traités : le fameux Fiscal Compact et le traité créant le mécanisme de stabilité financière européen. J'ai le droit de tenter de réfléchir à long terme, nous avons tous le droit et même le devoir, me semble-t-il, de tenter de réfléchir à long terme. Si vous aviez interrogé nos amis à New-York avant la crise, en leur disant : imaginez (expérience de pensée) que nous allons vivre la crise la plus grave depuis la deuxième guerre mondiale à Wall Street, crise financière tragique, que pensez-vous qu’il va arriver à l'Euro et à la zone Euro ? Moi qui suis au contact de nos amis américains et asiatiques, je peux vous dire qu’ils auraient répondu : « L'Euro va disparaître, et la zone Euro va se volatiliser ». C'est d'ailleurs les paris qui ont été faits par un très grand nombre de nos amis dans le reste du monde et c’est une partie de la difficulté que nous avons eue à surmonter. À la stupéfaction générale, l'Euro ne s'est pas volatilisé et même la première critique contre l'Euro, vous la connaissez bien, est : « L'Euro est beaucoup trop fort ». Constamment, dans la crise, en 2007, 2008, 2009, 2010 et 2011 et jusqu'à une période tout à fait récente, la principale critique contre l'Euro était qu’il était trop fort. Quel paradoxe pour une monnaie qui était censée ne pas perdurer ! Deuxième observation : quand nous avons eu la crise de Lehman Brothers, début de crise absolument gravissime, nous étions 15 pays dans la zone Euro, -et Dieu sait que je suis prêt à répondre aux questions sur la Grèce-, mais au moment où je vous parle ces 15 pays-là sont toujours dans la zone Euro et le plus extraordinaire c'est que, dans toute cette période, y compris celle où l’épicentre de la crise mondiale est chez nous et pas aux États-Unis, quatre nouveaux pays entrent dans la zone Euro ! : c'est-à-dire qu'à l’heure actuelle, nous ne sommes pas 15, mais 19, parce que la Slovaquie et les trois pays baltes sont entrés dans la zone Euro en période de crise gravissime. Je ne vais pas en tirer de conclusion définitive, mais cela signale que, pour comprendre ce qu’il se passe en Europe, il faut évidemment introduire l'élément politico-stratégique d'une

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entreprise historique forte, résiliente, même dans des périodes de crise très grave. Je ne suis pas naïf, il y a parmi nous probablement un bon tiers qui trouve que l'Euro ne marche pas du tout, que c'est même dangereux, que l'on n'aurait pas dû le faire. Nous sommes dans une démocratie et il est légitime que des points de vue soient très différents. Mais je dis à mes amis américains en particulier, anglais et asiatiques : « Vous croyiez à un moment que vous aviez raison et vous aviez parié d’ailleurs sur l'explosion de la zone Euro, mais, voyez-vous, cette construction historique va au-delà de la simple fusion monétaire, des simples considérations de nature économique, budgétaire, monétaire ». Elle correspond à une entreprise historique qu’à tort ou à raison les Européens ont lancée. Ils l’ont lancée en réalité il y a 65 ans et elle n'a cessé jusqu'à présent de progresser, y compris dans la période de stress test absolument dramatique que nous sommes encore en train de vivre, puisque, dans mon analyse, les pays avancés sont toujours en crise et, bien entendu, la zone Euro elle-même, indépendamment de ses problèmes de gouvernance propre, est un très grand ensemble avancé de la taille des États-Unis qui connaît aussi tous les problèmes des grands pays avancés. C'est sur cette dernière idée de résilience de notre construction historique que je voulais conclure. Ceux qui ont fait l'hypothèse que nous n'étions pas résilients, ont perdu beaucoup d'argent. Cela fait aussi partie en quelque sorte de la leçon de cette crise, ce qui ne veut pas dire que nous devons considérer naïvement que tout va pour le mieux : tout ne va pas du tout pour le mieux, comme je l'ai souligné, il y a même des choses que nous n'avons pas encore comprises nous-mêmes, des conditions nécessaires pour la réussite d'un pays dans une zone à monnaie unique, je veux dire, l'ensemble de notre opinion, le débat public, les discussions auxquelles nous participons ici ou là. Mais, ceux qui sont en dehors de l'Europe ne voient que notre audace et ils disent : « Les Européens sont incroyablement audacieux, cela ne peut pas durer ». Le paradoxe est que nous ne voyons pas notre propre audace, nous ne voyons pas qu’il est extrêmement audacieux d'avoir avancé un processus de ce genre ; nous avons une confiance qui ne doit pas être trop naïve dans le processus historique en cours qui, encore une fois, perdure depuis 65 ans et qui est de nature historique, c’est-à-dire de très long terme.

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M. THOMAS.- Après les nourritures intellectuelles, quelques nourritures terrestres, mais aussi un peu de travail. Je vous propose la chose suivante : il serait souhaitable qu'à chaque table vous ayez un échange sur les propos que vient de tenir Monsieur Jean-Claude TRICHET, et si ces échanges vous conduisent à des questions, à des interrogations, vous voudrez bien les inscrire sur un petit morceau de papier qu’avec quelques collègues, je me ferai un plaisir de venir ramasser. La règle du jeu voudrait que vous ayez la gentillesse de ne pas essayer de refaire la conférence, mais que vous posiez uniquement des questions brèves, sur des thèmes précis que j'essaierai ensuite de regrouper, de façon à ramener cela à quelques interrogations sur des thèmes cohérents, que je poserai ensuite, en votre nom, à Monsieur TRICHET pour qu’il y réponde avec le talent et toute la science qui sont les siens.

M. BONNET.- Si je peux vous demander quelques instants de silence, Monsieur Jean-Claude TRICHET va maintenant répondre à quelques questions, qui lui sont posées et en commençant par une question d’un jeune, d’un étudiant particulièrement concerné par l'avenir de l'Europe. Nous demandons à un étudiant de l’IAE qui a suivi les cours de Monsieur de Chastenet, de poser la première question. Un étudiant de l’IAE.- Bonsoir Monsieur TRICHET, je m’appelle Charles et suis étudiant à l’IAE à Lyon et aujourd'hui j'ai une question pour vous :

Vous proposez donc une fédération économique et budgétaire par exception, pour l'Europe, mais concrètement aujourd’hui, quels outils mettriez-vous en place face à la montée du souverainisme, de l'euroscepticisme et plus précisément avec l'exemple de la Grèce, de l’Espagne où il y a une montée de l’extrémisme, également en France où il y a une population qui est de plus en plus contre l'Europe ? Enfin, je citerai un exemple concret qui est celui du Royaume-Uni avec un référendum pour la sortie de l'Europe ? M. Jean-Claude TRICHET.- Ma réflexion est la suivante : d'abord, je crois que de même que je vous disais que la crise des pays avancés n’est pas simplement une crise européenne, mais une crise mondiale des pays avancés, je crois qu’il y a dans l'ensemble des pays avancés, aux États-Unis comme en Europe, comme en

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Angleterre, un problème très sérieux de frustration de nos concitoyens qui s'explique probablement par plusieurs éléments : nous sommes bousculés, nous en tant que pays avancés, par les pays émergents, nos rentes de situation diminuent, il faut faire place à la Chine, l’Inde, le Brésil, le Mexique. Cette frustration s'exprime de manière différente dans la zone Euro, hors de la zone Euro, aux États-Unis, hors d'Europe, mais le Tea Party ou l'extrême gauche démocrate américaine sont des phénomènes qui sont, à mon avis, d'une nature pas très différente de ce que nous observons, soit à l'extrême-droite, soit à l'extrême gauche en Europe et pas très différente de ce que nous avons observé ces derniers temps au Royaume-Uni avec le parti très nationaliste, très souverainiste, même s'il n'a pas du tout gagné les élections, ou de ce que nous observons dans une fraction du parti conservateur. Poussée de nationalisme, poussée de repli sur soi, frustration très importante, nées à la fois de la globalisation, probablement aussi du vieillissement des populations qui crée des problèmes supplémentaires assez considérables dans les pays avancés, et aussi, je dois dire, des progrès technologiques, car ces progrès technologiques obligent tous nos concitoyens à changer beaucoup plus rapidement qu'ils ne le souhaiteraient les uns et les autres. Il me semble que ce n'est pas l’Euro en l’occurrence qui est en cause en Angleterre ou aux États-Unis, et si l'Euro était la cause unique, alors nous aurions probablement à la fois des frustrations d'extrême-droite et uniquement d’extrême-droite ou des frustrations d’extrême gauche et uniquement d’extrême gauche dans la zone Euro. Donc, il me semble que nous avons à vivre pour un long moment avec cette frustration d’une large partie de notre population et dans tous les pays, de manière pas très surprenante, ce sont les plus démunis, les plus défavorisés, ceux qui sont le moins capables de s'adapter à ces changements perpétuels que nous connaissons, qui s'expriment le plus, soit dans le souverainisme, soit dans l'extrême-droite, soit dans l'extrême gauche. C'est ma première observation. Deuxième observation : j'ai eu la curiosité, et je vous recommande de le faire, de googliser l’eurobarometer. C'est une enquête d'opinion faite tous les six mois par la Commission Européenne. Et cet eurobarometer vous donne les réponses à des questions posées à tous les Européens comme : Avez-vous confiance dans votre

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Parlement national ? Avez-vous confiance dans le Parlement européen ? Avez-vous confiance dans votre Gouvernement national ? Avez-vous confiance dans la Commission ? Je vais vous surprendre beaucoup parce que vous n'avez sûrement jamais lu cela dans aucun journal, nos concitoyens européens et nous avec, avons, dans la réponse à ces questions, plus confiance dans le Parlement Européen que dans notre Parlement national, plus confiance (cela paraît complètement incompréhensible) dans la Commission que dans notre Gouvernement national et c’est vrai pour tous les Européens évidemment, mais c’est vrai aussi pour les Français vous l'imaginez bien, qui sont en permanence très frustrés et mécontents. Savez-vous quel est le niveau de confiance des Américains dans le Congrès des États-Unis ? 12 % ! ! Donc, phénomène de frustration, qui s'exprime tel que je le comprends de manière très forte contre tous les responsables. Nous sommes en situation difficile. On nous demande de faire des efforts. On nous bouscule, encore une fois, l'Inde, la Chine et les autres prennent notre place à nous, ouvriers, à nous, employés, à nous, ingénieurs, nous sommes mécontents de nos dirigeants quels qu'ils soient, qu'ils soient d'ailleurs dirigeants d'état aux États-Unis ou dirigeants fédéraux, qu'ils soient dirigeants nationaux ou dirigeants dans les institutions européennes. Simplement l'Europe et l'Euro sont un bouc émissaire commode au niveau de l'ensemble du système de communication, et il faut bien le dire très légitimement, de nombre de dirigeants nationaux. Il est plus simple de dire : « Ce n'est pas de ma faute, mais c’est la faute de l'Europe qui fonctionne extrêmement mal ». Ce n'est pas ce que pensent les personnes. Quand on les interroge, elles ne disent pas exactement cela. Donc, je vous le signale. Évidemment, je suis un peu biaisé, comme vous l’aurez compris je crois, aux projets historiques européens. Ce serait une naïveté que de dire : « Tout cela n'est pas grave ». Nous vivons tous exactement la même expérience, c'est très grave. Les pays avancés sont dans une situation très difficile et cela va être de plus en plus difficile car il sera de plus en plus pénible de ne plus dominer le monde, ni culturellement, ni technologiquement, ni industriellement et de devoir faire la place en gros, pour simplifier outrageusement, à la Chine qui va dominer, à l'Inde qui va peut-être aussi co-dominer et aux autres pays émergents. Les seuls pays émergents d’Asie (hors Inde et Chine) représentent une masse de 600 millions d'habitants

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qui auront probablement un niveau de vie supérieur au nôtre, c'est-à-dire plus que l'ensemble de l'Europe d’aujourd'hui, parce que ces gens-là sont extrêmement intelligents, actifs et industrieux. Regardez le Vietnam qui prend un essor absolument extraordinaire et qui, à lui tout seul, pèsera peut-être un jour nettement plus lourd que nous. Donc, vous voyez que je ne suis pas un « docteur Tant-Mieux » qui dit que tout va bien, mais je pense que le discours qu’on nous tient ne correspond absolument pas à la réalité sous-jacente. Et je pense évidemment que l'Europe, dans ce nouveau monde, est encore plus importante peut-être qu'auparavant. Dans un monde qui va être dominé par des géants absolus, l'idée de dire : « Nous allons nous « curiacer » et nous serons beaucoup plus tranquilles en étant divisés et désuni » est évidemment d’une naïveté totale. Encore faut-il que l'on sache quelles sont les conditions du succès. Et il est vrai que le succès de la zone Euro, le succès de la France dans la zone Euro comme des autres pays, c'est croissance et élimination du chômage de masse. Croissance et élimination du chômage de masse sont les objectifs centraux. C'est là que l'on juge un succès ou un échec.. M. THOMAS.- J'ai eu beaucoup de questions. Nous avons essayé avec Marc Bonnet de les regrouper dans quelques thèmes et merci à tous ceux qui se sont creusé la cervelle pour nous trouver des thèmes divers et variés. Le premier regroupement que je vous propose est celui qui concerne la position des différents États : la Grèce d'un côté et l'Irlande de l'autre, qu’est-ce qui n'a pas marché d'un côté et qu’est-ce qui a pu marcher de l'autre ? Donc, avec l'hypothèse de la Grèce qui pourrait peut-être sortir de la zone Euro, quelles conséquences pour elle ? Quelles conséquences pour la zone Euro ? M. Jean-Claude TRICHET.- Je vois le temps passer, donc je vais essayer d'être aussi concis que possible. La Grèce : son problème essentiel est un problème budgétaire complètement tragique, moins 15 % de produit intérieur brut, de déficit budgétaire en 2009-2010, balance des paiements courants moins 15 % du produit intérieur brut également. Ce sont des twin deficits à moins 15 %. Situation pire que toutes les autres. Défaut à la fois sur le plan fiscal et sur le

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plan de la gestion macroéconomique ; en plus, problème de fonctionnement de l'État absolument aberrant, pas d'État en réalité organisé depuis toujours, et bien entendu, aussi, chiffres qui apparaissent comme étant complètement faux, non pas d'ailleurs que les Grecs soient des menteurs abominables mais parce qu’eux-mêmes ne savaient pas quels étaient les bons chiffres. Ils étaient incapables de mettre au point les bons chiffres. Il a fallu la crise pour que la radiographie permette de déterminer exactement la situation. L’Irlande est un cas différent, l’Irlande est un pays qui était très ouvert, très flexible en réalité, mais qui a connu une énorme bulle immobilière et financière, avec une hypertrophie complète de ses banques et une crise immobilière absolument majeure, avec des exagérations de montée du prix des actifs, notamment immobiliers, mais pas simplement immobiliers et totalement dramatiques. Au total, comme vous avez vu, je vous l’ai déjà dit, perte de compétitivité considérable dans les deux pays. Et, pour l'Irlande, aggravation considérable du problème de l'État lui-même du fait que les banques avaient été contre-garanties par l'État et que donc l'État s'était collé en sus de ses problèmes propres, les problèmes bancaires et financiers. Je réponds à la question sur la Grèce :C'est un sujet évidemment absolument central, je vis moi-même avec le problème grec depuis le début de la crise des risques souverains, puisque, comme je vous l'ai expliqué, c'est avec ce pays qui était le plus vulnérable que cela a commencé. Crise suraiguë de la Grèce et du système européen de la zone Euro en mai 2010, nous évitons la crise gravissime, nous achetons d’ailleurs du trésor grec, du trésor irlandais et du trésor portugais en mai 2010. Puis, nouvelle crise gravissime en juillet-août 2011, défaut grec vis-à-vis des créanciers privés et un certain nombre de conséquences s'ensuivent, y compris tragiques pour l'Italie et l'Espagne. Nous achetons alors du trésor italien et espagnol pour arrêter la déstabilisation systémique de la zone Euro. Nouvelle crise, comme vous le savez, mi 2012. Au moment où Syriza est arrivée au pouvoir, même immédiatement avant son arrivée au pouvoir, la Grèce avait fait un énorme travail de moins

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15 % de déficit de la balance des paiements courants, elle était passée à 0 à peu près. Et de moins 15 % de déficit budgétaire, elle était passée à un surplus primaire non négligeable. Donc, paradoxalement, très gros travail de la Grèce qui n'avait pas fait autant de progrès que l'Espagne, mais qui avait fait des progrès assez considérables. Malheureusement, c'est à ce moment-là que le risque politique grec se matérialise de la manière que nous savons. Alors, je dirai pour simplifier, au moment où je parle, que la démocratie grecque va décider. Contrairement à ce qu'on lit dans les journaux, ce ne sont pas les pays créanciers, ce n’est pas le FMI, ce n’est pas le gouvernement allemand, ce n’est pas le Bundestag et ce n'est pas nous qui allons décider, ceux qui vont décider ce sont les Grecs. Décider veut dire ou bien accepter d'essayer de convaincre le monde entier.que l’on a un bon plan, ou bien ne pas essayer d’entreprendre cette démarche. Si finalement le Gouvernement grec n'a pas un plan considéré comme bon par (j'exagère) les Chinois, les Indiens, les Mexicains, les Brésiliens et l'ensemble des pays membres du FMI, s'il ne les convainc pas, il n’a aucune chance évidemment de remettre le pays sur ses pieds, de lui permettre d'avoir de la croissance et de la création d'emploi parce qu’il faut avoir la confiance pour pouvoir faire cela ; et la confiance est une, c’est un bloc : confiance du reste du monde, confiance des Européens et confiance de ses propres citoyens, concitoyens, agents économiques, entrepreneurs, ménages. Ou bien les Grecs ont cela et, dans ce cas, tous les problèmes peuvent se résoudre, ils peuvent avoir, en accord avec le FMI, certainement de la bienveillance de la part des Européens, on est du bon côté de l'embranchement historique , ou bien, ils continuent de sembler être convaincus que le reste du monde leur veut du mal, qu’ils obtiendront croissance et création d'emploi sans avoir la confiance de qui que ce soit, certainement pas des Européens et du reste du monde et dans ce cas-là, alors, clairement, ils choisissent la catastrophe. Et la catastrophe c'est objectivement une catastrophe épouvantable pour les Grecs, et une catastrophe très sérieuse pour la zone Euro, pour l'Europe, avec des aspects géostratégiques tout à fait importants, avec une zone de fracture, les Balkans, Chypre, le Proche-Orient ; nous sommes dans une zone où si un pays connaît des évolutions tragiques, ce qui serait le cas dans cette hypothèse,

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les conséquences sont assez considérables et ceux qui ont tendance à les sous-estimer font, à mon avis, une erreur majeure. C'est pour cela que je ne peux m'empêcher de me dire que l’alternative est tellement tragique avant tout pour les Grecs, qu'ils vont essayer de trouver des moyens compliqués, peut-être au prix de nouvelles élections référendaires, peut-être au prix d’un changement politique partiel, d’avoir le plan crédible dont je parlais, il y a un instant. M. THOMAS.- Vous avez utilisé à plusieurs reprises le mot confiance. Là c'était la confiance des Chinois, des Mexicains, etc. mais la confiance des Européens eux-mêmes c'est-à-dire comment peut-on envisager de restaurer la confiance car l'investissement qui est le moteur de la croissance ne peut se développer qu'à partir de la confiance et pas seulement, la croissance ne vient pas que de la consommation financée par la dette. Donc, il faut bien, d'une façon ou d'une autre, restaurer la confiance.

Existe-t-il des pistes que nous pourrions proposer pour restaurer la confiance des entrepreneurs, des consommateurs, des ménages, en général ? Et est-ce que quelque part les institutions européennes quelles qu'elles soient ont un pouvoir quelconque pour y parvenir ou pour inciter à la redécouverte de cette confiance ? M. Jean-Claude TRICHET.- De même que la confiance est un tout, je crois effectivement que les conditions de la confiance sont multiples. Il est évident que les institutions européennes ont un rôle très important à jouer dans cette direction, ne serait-ce qu'en assurant que la gouvernance future sera bien meilleure que la gouvernance passée, ce qui est quand même essentiel pour les chefs d'entreprise eux-mêmes qui ont besoin d'être sûrs de leur grand marché domestique qu'est l'Europe. Il y a bien entendu, des gestes plus ou moins symboliques très importants, le plan Juncker fait partie de ces gestes symboliques, qui, à mon avis, sont importants même s'il n'y a pas énormément d'argent public envisagé dans cette affaire, mais il y a la cristallisation du fait qu'il serait bon que toute une série de projets d'infrastructures dans les tuyaux dans les différents pays puissent sortir. L'argent, comme vous le savez, est abondant en Europe,

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l'argent à bon marché est abondant en Europe, partout en Europe. L'Europe dans son ensemble a un excédent de la balance des paiements courants d'environ 2,5 % du produit intérieur brut et la Banque Centrale Européenne est extrêmement accommodante. Nous sommes dans des circonstances où l'argent à moyen-long terme est à très bas taux d'intérêt, et de mon expérience constante, dans l'ensemble de l'Europe, abondant. Donc, nous avons là des éléments de renforcement de l'investissement qui sont importants. Ceci dit, chaque pays a des responsabilités énormes, la zone Euro est une zone dans laquelle il y a des règles de gouvernance uniques et dans laquelle il y a une politique monétaire unique, mais les politiques budgétaires ne sont pas uniques, les politiques de réforme structurelle ne sont pas uniques, les politiques de contrôle des coûts ne sont pas uniques, elles sont même très différentes de pays à pays, et chaque pays, chaque gouvernement, chaque parlement a des responsabilités énormes, pour maintenir, renforcer, préserver la confiance et c'est vrai dans tous les pays. Ceux qui ont fait des efforts considérables parce qu'ils y étaient obligés au demeurant, prenons l’exemple de l'Espagne, sont en ce moment en présence d'une économie qui va croître de 3 % en volume cette année, dans laquelle l'emploi est reparti et l'investissement également. C'est comme cela. C'est le fruit d'efforts passés assez considérables qui, encore une fois, étaient des efforts absolument obligés. Dans ma compréhension du système dans lequel nous sommes, vous avez la partie jouée par les institutions européennes (elle n’est pas mal jouée en ce moment y compris le Plan Juncker), la partie jouée par la Banque Centrale Européenne (vous porterez le jugement que vous souhaitez sur cette partie), la partie jouée par chacun des gouvernements nationaux. Et c’est aussi une leçon dans la zone Euro, la politique monétaire est la même partout, ce qui veut dire que les politiques nationales ne doivent pas être les mêmes partout, elles sont forcément différentes parce que nous ne partons pas du même point : l'Allemagne avait un déficit des transactions quand nous avions un excédent au début mais elle avait plus de chômage que nous ; aujourd'hui nous ne sommes pas dans la même situation car ils n'ont plus de chômage et nous en avons énormément. Nous avons à prendre les décisions qui sont appropriées compte tenu de notre propre situation.

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M. THOMAS.- Il nous reste deux questions : une question un peu technique et une peut-être plus personnelle, vous me pardonnerez.

Le quantitative easing jusqu'à quand ? En d'autres termes, y a-t-il, à votre sens, des limites à la voie adoptée par la gouvernance actuelle de la Banque Centrale Européenne ? M. Jean-Claude TRICHET.- Là aussi, vous allez dire : vous replacez toujours les choses dans un contexte plus général.Comme vous le savez, le quantitative easing au Japon est encore plus délibéré, volontaire et massif qu'aux États-Unis et que chez nous. Quantitative easing a eu lieu aux États-Unis et la trace du quantitative easing aux États-Unis c'est 4 trillions de dollars (4 000 milliards de dollars) qui sont dans le bilan de la Banque Centrale Américaine et qu’il n'est pas question de revendre. Ils restent dans le bilan de la Banque Centrale Américaine et cela exerce évidemment une pression considérable sur la finance américaine, et puis taux 0, bien sûr, au Japon et aux États-Unis, Angleterre même chose et chez nous accumulation d'accommodations monétaires, car beaucoup de décisions avaient été prises et il s’agissait de décisions off-balance-sheet. Off-balance-sheet voulant dire qu'avec l'OMT, nous avons pris la décision de ne pas laisser un pays être dans une situation très difficile, mais nous n'avons pas acheté de trésor des différents pays. C'est un engagement hors bilan, - l'ambassadeur le sait bien -, qui est considéré en Allemagne comme étant un engagement considérable représentant des trillions d’euros. Et en plus, nous avons fait le quantitative easing à l’américaine. Je crois que cette mesure était justifiée parce que nous avons eu effectivement une vraie menace de matérialisation du risque déflationniste et partout dans le monde c'est un risque très sérieux ; en Europe c'eut été un risque très très sérieux. Donc, la Banque Centrale Européenne, mes collègues du Conseil des Gouverneurs, ont pris cette décision. Bien entendu, au Japon comme aux États-Unis, comme en Europe, comme en Angleterre, l'hypothèse de travail est que l'on fait des efforts inédits, incroyables, les gouvernements vont faire leur devoir, c'est-à-dire remettre leur maison en ordre, le secteur privé

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va, lui aussi, faire son devoir, c’est-à-dire remettre ses propres affaires en ordre, ce qui n'est pas encore achevé pour un certain nombre d'entités financières en particulier. Et au total, comme l'économie de nos pays avancés va fonctionner beaucoup mieux, nous allons pouvoir tranquillement défaire ce que nous avons fait, revendre les valeurs du trésor que nous avons achetées ou les autres valeurs que nous avons achetées et progressivement sortir de manière ordonnée de cette extraordinaire accommodation que nous avons. L'hypothèse de travail est que la remise des maisons en ordre va être rapide et convaincante, car nous ne pouvons pas éternellement vivre avec une accommodation monétaire gigantesque et tous les effets négatifs qui vont avec, c'est-à-dire nouvelle bulle financière, argent extrêmement bon marché, recherchant désespérément des investissements risqués pour avoir plus d'argent, plus de taux d'intérêt représentant le risque, avec toutes les difficultés à venir. Si le travail d'assainissement notamment des Gouvernements et des Parlements n'est pas fait, alors, nous allons vers une nouvelle crise financière très grave. Cela me paraît aussi simple que cela et c’est la raison pour laquelle tous les banquiers centraux du monde sont aussi véhéments que possibles vis-à-vis des autres partenaires évidemment surtout des autorités publiques, pour leur dire : « Remettez vos maisons en ordre, si vos économies ont failli sombrer, c'est parce que les maisons notamment publiques, n’étaient pas en ordre. M. THOMAS.- Il me reste une question qui est posée par quelqu’un qui semble bien vous connaître. Vous craignez le pire, n’est-ce pas ? Nous avons eu un maire de Lyon qui s’adonnait de temps en temps, c’est bien connu, au plaisir très simple du haïku, ces petits épigrammes poétiques japonais.La question est la suivante : avez-vous toujours du temps pour la poésie ? M. Jean-Claude TRICHET.- Je craignais en effet le pire, mais c'est une question très gentille et très bienveillante. J'ai un peu plus de temps pour me replonger dans la poésie, en effet, que je n’en avais lorsque je travaillais à la Banque Centrale Européenne, encore que j’ai encore beaucoup de choses à faire comme vous avez bien voulu le signaler Monsieur le Président de la Société d’Économie Politique. Et donc je n’ai pas finalement tellement de

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temps, mais je considère effectivement que la poésie est le cœur de la littérature et qu'elle a quelque chose à voir avec ce dont je parle habituellement, c'est-à-dire la monnaie. La monnaie est censée conserver la valeur, se préserver elle-même, la monnaie dans son symbole le plus frappant est une pièce de métal précieux que l'on frappe et qui passe ensuite de main en main et qui ne change pas, qui restent inaltérée et encore une fois traverse les siècles. Or, un poème c'est un peu la même chose, un poème est un assemblage de mots qui est construit d’une manière telle qu'il demeure absolument identique à lui-même. On ne peut pas paraphraser un poème ; un poème c’est le poème. On peut paraphraser un texte écrit, on peut paraphraser un roman, on peut paraphraser de la prose, le poème ne se paraphrase pas, il est comme il a été frappé et il reste identique à lui-même. Le poème qui a été frappé par le poète grec, c'est le même poème que celui que nous avons aujourd'hui, le sonnet de Shakespeare qui a été frappé, le texte de Racine, ce sont les mêmes. Et c'est un peu, si vous voulez, non pas de mains en mains comme un pièce, mais de cerveau en cerveau que se transmettent ces assemblages de mots qui conservent leur valeur de manière inaltérée à travers le temps et ce rapprochement m'a toujours frappé ; accessoirement, pour les littéraires qui sont dans cette salle, l'essence même de la poésie, pour moi, c'est la poésie orale et elle est construite pour imprégner les mémoires, elle est bourrée d'effets mnémoniques, aussi bien le rythme, la rime mais les images aussi, les images de mémoire qui sont extrêmement puissantes en poésie. M. THOMAS.- Vous voyez que nos soirées de la Société d’Économie Politique réservent toujours de merveilleuses surprises.La dernière de ces surprises devrait être le mot qui va être prononcé par notre Président Yves Minssieux pour remercier Monsieur TRICHET de son intervention et j'appelle à nouveau Monsieur Imberton et Monsieur Yves Minssieux pour mettre un terme à cette soirée. Je vous remercie de votre attention. M. MINSSIEUX.- Chers amis, merci de votre assiduité, de votre curiosité, de votre attention. Merci infiniment à Jean-Claude TRICHET pour la façon dont il a su conceptualiser sa vie d’expériences en matière financière et de pratiques de politique puisque la Finance accompagne le mouvement, parfois elle vit un

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peu trop seule mais en général, elle est là pour accompagner les mouvements économiques et ce soir, vous avez fait vivre la Finance parmi nous, et vous avez fait vibrer cette pleine salle autour de cette thématique. Nous avons une pratique au niveau de la Société d'Économie Politique de Lyon pour notre dîner de gala, c’est d'offrir une médaille que je suis heureux de vous remettre pour le compte de la SEPL ; elle est frappée des symboles de la Ville de Lyon, vos références y ont été logiquement gravées, et nous y joignons une notice explicative pour votre érudition qui, nous l’espérons, vous intéressera.

La médaille de la SEPL est remise à Monsieur Jean-Claude TRICHET ( applaudissements)

M. IMBERTON.- Je crois que nous nous souviendrons longtemps de votre intervention ici dans cette magnifique salle. Et nous retiendrons, au-delà de la finance, le plaidoyer pour l'Europe que j'ai cru deviner à travers vos propos.Je suis très heureux de vous remettre la médaille de la Chambre de Commerce de Lyon.

La médaille de la Chambre de Commerce de Lyon est remise à Monsieur Jean-Claude TRICHET. M. MINSSIEUX.- Ceci étant, j’en profite pour vous dire que c'était, comme pour Madame Jimbert, mon dernier coup d'archet à la tête de la Société d’Économie Politique de Lyon. Je suis ravi de terminer ce parcours avec vous, Monsieur TRICHET et avec votre appui à vous tous. Je ne vais pas recommencer tout ce que j'ai dit tout à l’heure avec mon cœur. Merci à la Chambre pour tout ce que vous avez apporté et à nouveau pour avoir ouvert vos portes lumineuses pour cette belle soirée. Merci Emmanuel. M. IMBERTON.- Je voudrais particulièrement te remercier, Yves pour ton dévouement à la tête de la SEPL car je sais tout l’opiniâtreté qu’il faut pour mener une telle association. Bien sûr, tu as une équipe fidèle, tu trouves ici également des locaux qui sont à ta dimension et j'espère que tu pourras rester parmi nous, même si tu quittes la présidence. En tous les cas, merci pour tout ce que tu as fait. M. MINSSIEUX.- Merci Emmanuel et pour gérer le remplacement, rien ne vaut la féminité : mon successeur, si elle est

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élue, sera une dame, Gaëtane Hazeran, qui est au fond de la salle et que je salue. Bonne chance et bonne chance à l’équipe.

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A N N E X E S - Liste des Présidents de la Société depuis sa fondation... 93 - Composition du Conseil d’Orientation 2014-2015.......... 94

- Hôtes d’Honneur de la Société depuis 1877..................... 97 - Evocation des 149 années d’existence de la SEPL........... 98 - Hommage au Président Yves Minssieux........................... 110 - Hommage à Madame Renée Jimbert................................ 112 - Hommage à Yves Lhenry................................................... 115

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SOCIÉTÉ D’ÉCONOMIE POLITIQUE ET

D’ÉCONOMIE SOCIALE DE LYON

(fondée le 13 Janvier 1866)

« Société de libre examen et de libre discussion dont les membres se réunissent périodiquement à l’effet de conférer sur les

questions d’économie politique »

Liste des Présidents de la Société depuis sa fondation Emile VALENTIN 1866 Xavier d’HAUTHUILLE 1951 Pierre PIATO 1872 Henry DELEPOULLE 1954 Eugène FLOTARD 1877 Gilbert TOURNIER 1957 Edouard AYNARD 1886 Roger HOPPENOT 1960 Auguste ISAAC 1889 Louis DUPRE LA TOUR 1962 Auguste SEVENE 1892 Antonin DOUGEROLLE 1963 Auguste ISAAC 1893 Bernard ISAAC 1966 Jules CAMBEFORT 1896 Alexandre BRET 1969 Jean COIGNET 1899 André LOMBARD-PLATET 1972 Ennemond MOREL 1902 Jean PERRACHON 1975 Pierre VILLARD 1905 Michel LAFERRERE 1978 Maurice PIATON 1911 Jacques TOURNIER 1981 Francisque AYNARD 1917 Paul MALAPERT 1984 Louis PRADEL 1920 Laurent ARTRU 1987 Jacques de WATTEVILLE 1923 Patrick BERTRAND 1990 Henry MOREL-JOURNE 1926 Jean DEBAECKER 1991 Camille RIBOUD 1929 Maurice PANGAUD 1994 Alexandre CHARBIN 1932 Georges BIGEARD 1997 Jean CHAINE 1935 Jacques BICHOT 2000 Jean COURBIER 1939 Michel THOMAS 2003 Roger GROS 1942 Marc BONNET 2006 François TREVOUX 1945 Robert PARIS 2009 Hugues MOREL-JOURNEL 1948 Yves MINSSIEUX 2012

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Année 2015

COMPOSITION DU CONSEIL D’ORIENTATION ------------------------------------------

Président Yves MINSSIEUX Ancien Directeur Régional du CIC

Lyonnaise de Banque - Consul Honoraire de Belgique

Présidents d'Honneur Michel LAFERRERE Professeur Emérite à l'Université Jean Moulin Lyon III, Membre de l'Académie des Sciences, Belles Lettres et Arts de Lyon Paul MALAPERT Président d'Honneur de l'Association Nationale de la Navigation Fluviale Membre et ancien Président de l’Académie des Sciences, Belles Lettres et Arts de Lyon Patrick BERTRAND Ancien Vice-Président du Grand Lyon Ancien Directeur Régional du C.L. Agriculteur Jacques BICHOT Economiste Professeur Emérite à l'Université LYON 3 Membre Honoraire du Conseil Economique et Social Michel THOMAS* Président de la Mutuelle du BTP du Sud-Est Juge au Tribunal de Commerce Lyon, chargé de la formation et de l’intégration des juges Ancien Professeur associé des universités

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Marc BONNET* Professeur à l’Université Lyon3 (Sciences et Gestion) Directeur-Adjoint de l’ISEOR Robert PARIS* Ancien Président du Medef Rhône- Alpes Vice-Présidente : Gaétane HAZERAN* Crédit-manager consulting

opérationnel ARCANSAS -CMC PLUS

Présidente d’Honneur d’Action’elles Secrétaire Général Philippe HUET* Président Société BARTEC Trésorier Yves LHENRY Comptable Membres L C L représenté par Jean-Luc DUFLOT,

Directeur de la Direction du Réseau Rhône Alpes Auvergne

CHAMBRE DE COMMERCE représentée par son ET D'INDUSTRIE DE LYON Président Emmanuel IMBERTON Jean AGNES P.D.G COPARGEST Marie-Christine CHALUS-SAUVANNET Maître de conférences – Université Grenoble 2 Guillaume COCHET* Agent Général AXA Lyon,

Administrateur de l’AGEA (Syndicat des Agents Généraux d’Assurances) Ancien Président de la Fédération des Jeunes Chambres Economiques Rhône-Alpes

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Daniel FRELET Gérant DANELO Michel GIELLY* ancien Directeur du Réseau France à l'Institut Français de Gestion Alain ISAAC Directeur Honoraire CIAPEM

Renée JIMBERT Secrétaire Administrative et ex.

Secrétaire Générale de la SEPL Retraitée de la Direction Régionale

Rhône-Alpes Auvergne de LCL Lyon

Nicolas MILLET Directeur de la Direction des Stratégies Territoriales et de l'Aménagement du Territoire à la CCIL

Pierre du PELOUX de Directeur Régional de la Banque de SAINT-ROMAIN France Gaétan de SAINTE MARIE* Président PME CENTRALE – Ancien Président du CJD Lyon Vice-Président du bureau national du CJD Jacques-Olivier THIBAUT Chef d’entreprise Juge au Tribunal de Commerce Franck THOUNY Gérant de A2MICILE Pierre VOUTAY Expert Bâtiment * Membres du Bureau

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Personnalités les plus marquantes ayant

été les Hôtes d'Honneur de la Société d'Economie Politique et d'Economie

Sociale de Lyon depuis 1877

Paul LEROY-BEAULIEU, Emile VALENTIN, Maurice BLOCK, Raoul DUVAL, Hippolyte MAZE, Léon SAY, Franck CHAUVEAU, Francis

CHARMES, Alexandre RIBOT, Jules SIMON, Eugène FLOTARD, Georges PICOT, Agénor BARDOUX, TRARIEUX, Edouard AYNARD,

LEVASSEUR, de FOVILLE, Georges MICHEL, Ernest BRELAY, Emile CHEYSSON, Anatole LEROY-BEAULIEU, Jules CHARLES-

ROUX, Gustave NOBLEMAIRE, Luigi LUZZATTI, Paul BEAUREGARD, GUILLAIN, BOUDENOOT, J.THIERY, Lodovico GAVAZZI, André LEBON, COLSON, Auguste SOUCHON, André LIESSE, Charles BENOIST, Raphaël GEORGES-LEVY, Jacques

BARDOUX, Jules ROCHE, LEWANDOWSKI, André SIEGFRIED, Auguste ISAAC, Henry LE CHATELIER, H.W.STEED, Paul

REYNAUD, Charles RIST, C.J-GIGNOUX, de LASTEYRIE, Raoul DAUTRY, Fernand BAUDHUIN, Lucien ROMIER, René COURTIN, Jacques RUEFF, Georges VILLIERS, Bertrand de JOUVENEL, Roger

HOPPENOT, René MAYER, Pierre PFLIMLIN, Wilfrid BAUMGARTNER, Gaston BERGER, Gustave THIBON, Monseigneur

le COMTE de PARIS, Maurice ALLAIS, Jean CAPELLE, André GRANDPIERRE, Olivier MOREAU-NERET, Tibor MENDE, Valéry

GISCARD D'ESTAING, François PERROUX, François BLOCH-LAINÉ, Alfred SAUVY, Jérôme MONOD, Louis LEPRINCE-

RINGUET, Alain PEYREFITTE, Maurice COUVE de MURVILLE, Paul DELOUVRIER, François CEYRAC, Raymond BARRE, Jean

RIBOUD, Jean RIPERT, Jean Marcel JEANNENEY, Jean FOURASTIÉ, Ambroise ROUX, Albin CHALANDON, Yvon GATTAZ, Olivier

GUICHARD, Jacques MAISONROUGE, Michel DEBRÉ, Bertrand COLLOMB, Antoine RIBOUD, Pierre MOUSSA, Son Eminence le

Cardinal Albert DECOURTRAY, Yvon CHOTARD, Paul DOMINJON, Michel ALBERT, Jacques BARROT, Jean PEYRELEVADE, Hervé LAURENT, Jacques DERMAGNE, Jean AGNÈS, Claude BÉBEAR,

Thierry de MONTBRIAL Mike WHITBY, Michel CAMDESSUS, Son Eminence le Cardinal Philippe BARBARIN, Guy MATHIOLON, Jean-Pierre RAFFARIN, Gérard COLLOMB, Luc FERRY, Bernard BIGOT,

Alain MERIEUX, Jean BURELLE, Jean-Claude TRICHET

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ÉVOCATION DES 149 ANNÉES D’EXISTENCE DE LA SEPL

La Société d'Economie Politique a été officiellement fondée le 13 Janvier 1866, mais l'idée de créer une société d'économie politique n'est pas née spontanément il y a près de 150 ans. Il est donc nécessaire d'évoquer la naissance et les grandes étapes de la vie de notre Société, de rappeler la situation politique et économique de Lyon dans les années 1860 et les circonstances qui amenèrent certains lyonnais influents à former une association pour étudier en commun les questions économiques.

Replaçons-nous à cette époque du Second Empire. C'est une période de grande prospérité, de bouleversements économiques et sociaux, de bouillonnement d'idées. Napoléon III lui-même partageait l'enthousiasme saint-simonien pour le progrès industriel. En moins de deux décennies, le pays va connaître l'une des plus grandes mutations de son histoire. La France moderne a surgi dans les années 1860. Le Lyon moderne aussi, marqué par une progression spectaculaire de la population, le percement de larges artères, l'aménagement du parc de la Tête d'Or, l'essor de la soierie qui devient le premier produit français d'exportation.

On voit alors apparaître à Lyon chez les hommes d'affaires et les esprits cultivés, une préoccupation nouvelle : la réflexion économique. Voulant encourager cette aspiration, la Chambre de Commerce organise, à

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partir de l'hiver 1864, une série de cours d'économie politique donnés au Palais Saint-Pierre par le Professeur Henri Dameth, de Genève. A la même époque, un petit cercle d'une douzaine de personnes se réunissait régulièrement chez Jean Buy, avocat et écrivain, rue Mercière, pour discuter d'économie, de questions sociales, d'échanges internationaux. De la conjugaison de ces différents éléments va naître notre Société d'Economie Politique.

Le 13 janvier 1866, une table de quinze couverts était dressée dans un des salons du Restaurant Casati, Rue du Bât d'Argent. Les convives arrivèrent vers 18 h 30. Il y avait parmi eux Jean Guy et la plupart des membres de son Cercle, Henri Germain, Président Fondateur du Crédit Lyonnais, Jean Tisseur, Secrétaire de la Chambre de Commerce, Alphonse Courtois, statisticien, les Agents de Change Emile Bonnardel et Ferrand, des Avocats comme Paul Rougier et Elie Le Royer qui sera plus tard Président du Sénat, Victor Philippe, Directeur du Magasin Général des Soies et le Professeur Henri Dameth.

A la fin du repas, Alphonse Courtois expose l'objet de la réunion. Il s'agit de fonder une société de libre examen et de libre discussion dont les membres se réuniraient périodiquement pour conférer sur des questions d'économie politique. Ce projet, auquel chacun était préparé, fut approuvé à l'unanimité. Avant de se séparer on nomma une commission chargée d'élaborer un règlement (en fait, il n'y eut pas de règlement durant 140 ans) et l'on prit rendez-vous pour le mois suivant.

Le 22 février 1866, les fondateurs, auxquels se sont jointes cinq autres personnes, tiennent une nouvelle

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réunion chez Casati, sans dîner. La Société est déclarée définitivement constituée. Le choix d'un Président est délicat, le régime impérial se méfiant des associations et des remueurs d'idées. Emile Valantin, l'un des membres du cercle de Jean Buy, est élu Président. Sa fonction de Conseiller à la Cour Impériale devrait rassurer les autorités.

Des usages s'instaurent rapidement. Des séances bimensuelles ont lieu de novembre à avril. Elles se tiendront chez Casati jusqu'à la disparition du restaurant en 1900. A chaque séance, un membre de la Société présente un rapport sur un sujet qu'il connaît par expérience personnelle, suivi d'une discussion. Les sujets traités sont multiples. Dans les premières années de son existence, les questions concernent essentiellement la politique de libre-échange promue par le Second Empire. Mais très vite, tous les sujets sont abordés. Les différents secteurs économiques lyonnais sont analysés. Une attention particulière est accordée aux questions de transport : navigation, route, voie ferrée puis aéroport : Le Bourget, 1er aéroport français, date de 1912-1918. L’ouverture à l’international revient comme un leitmotiv. Enfin, les questions sociales ne sont pas oubliées. Aussi en 1889, sur proposition du Président Aynard, la Société d’Economie Politique ajoute-t-elle à son nom, l’expression « et d’Economie Sociale » voulant ainsi montrer que, dans ses études, elle prenait souci "du producteur non moins que du produit". Désormais, elle peut débattre de tous les sujets d'économie sans restriction.

Emile Valantin garde la présidence jusqu'en 1872, date où il est remplacé par Pierre Piaton, ancien notaire,

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un des fondateurs de Péchiney, qui conservera ses fonctions jusqu'en 1876. Cette année-là, la Société compte 200 membres. La même année, la Société, donnant suite à une proposition faite depuis longtemps par Paul Rougier, son très actif Secrétaire Général et premier titulaire de la chaire d'Economie Politique à la Faculté de Droit de Lyon, décide de publier à la fin de chaque session annuelle un volume contenant l'ensemble des rapports et des discussions, et distribué à tous les membres. Cette habitude s'est perpétuée pendant 75 ans et nous disposons de 59 volumes couvrant les années 1876 à 1950 inclusivement, qui reflètent d'une manière complète et vivante les activités de la Société durant cette longue période. Par la suite, le texte des interventions est archivé, et sauf exception, des résumés des rapports et conférences seront seulement diffusés chaque année auprès des élus et décideurs de la Région. C'est là notre contribution à la "société civile".

En 1877, une autre tradition s'instaure : celle de clôturer la session par un dîner où l'on reçoit un Hôte d'Honneur qui traite d'un sujet déterminé. La liste des Hôtes d'Honneur de la Société est impressionnante. En 1883, l'affluence fut telle pour la réception de Léon Say, ancien Ministre des Finances, qu'il fallut équiper spécialement la vaste salle des Folies Bergères pour contenir les 350 participants. Dans les mois suivants, la Société enregistrera une vague d'adhésions ; elle comptera alors plus de 750 membres.

Plusieurs Présidents ont, par leur puissante personnalité profondément marqué la Société. C'est le cas d'Edouard Aynard (Président de 1886 à 1889), banquier, qui fut par ailleurs Président de la Chambre de Commerce

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de Lyon et Vice-Président de la Chambre des Députés. Edouard Aynard aura pour successeur Auguste Isaac qui sera à deux reprises (et pour trois ans chaque fois), Président de la Société. Ce père de 11 enfants, ardent défenseur de la cause familiale, avait lui aussi un grand rayonnement. Il sera par la suite Président de la Chambre de Commerce, puis Député du Rhône en 1919 et Ministre du Commerce en 1920.

La présidence de Camille Riboud (1929-1932 fut également l'une des plus marquantes. Président de la Société Lyonnaise de Dépôts, Administrateur de nombreuses sociétés, cultivé, brillant, Camille Riboud était un homme d'action, un défenseur du libéralisme intellectuel dans lequel il voyait "la loi-même de l'esprit français". C'était surtout un humaniste. A la fin de son mandat, se félicitant de la vitalité de la Société, il déclarait "nous sommes une des associations les plus nombreuses et les plus prospères de notre ville".

Au cours de son existence, la Société d'Economie Politique a connu trois guerres sur le sol français. Aucune n'a interrompu ses activités. Il est bon de rappeler comment elle réagit après la défaite de 1940. Reportons-nous au 6 juin 1941. Un an s'était écoulé depuis l'effondrement de notre puissance militaire et trois cinquièmes du territoire national étaient occupés par l'armée allemande. Ce jour-là, les membres de la Société étaient conviés par Jean Courbier (Président de 1939 à 1942) à assister à une conférence du Comte Robert d'Harcourt sur les "Fausses Mystiques Contemporaines". Le courageux orateur allait longuement analyser la "mystique menteuse" qui, affirmait-il avec force, nous menace immédiatement, la mystique nationale-socialiste.

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Il ajoutait "Hitler n'est pas seulement un grand conquérant, il est surtout un grand pourrisseur…Il nous faut résister à cet assaut universel de la perversité". Et il concluait par ces phrases vibrantes d'espérance : "le pessimisme n'est pas permis…. Les puissances des ténèbres ont leur heure, elles n'ont pas toutes les heures. La dernière sera faite de clarté".

Aujourd'hui la Société d'Economie Politique est restée fidèle à ses traditions. Société de fait, elle n'a pas d'existence légale. A une demande des Renseignements Généraux concernant les statuts, il fut répondu par le Président Paul Malapert : "Nous nous sommes constitués en Société de fait en 1866, 35 ans avant la loi de 1901. Le Second Empire s'en est contenté, il faudra bien que la République en fasse autant…". Ce qui la caractérise, c'est une solide et ancienne tradition d'ancrage dans la cité, une vocation forte de recherche et d'analyse du monde économique et social qui l'enveloppe, une tradition d'ouverture et de dialogue qui lui permet d'aborder tous les sujets dans le respect des idées et convictions de chacun, sans succomber à quelque pression politique, philosophique, religieuse, corporatiste, professionnelle ou syndicale que ce soit.

Les membres de la Société représentent un échantillon très représentatif du milieu socio-économique dans lequel elle est insérée : ce sont des industriels, des commerçants, des enseignants, des chercheurs, des étudiants, des professions libérales, mais également aussi bien des actifs que des retraités, des cadres que des non cadres. Ils partagent un idéal de curiosité sur le monde dans lequel ils vivent, et sont en quelque sorte de parfaits

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représentants de ce qu'on appelle parfois la "société civile".

Elle compte environ 200 membres, continue à se réunir d'octobre à mai et à recevoir un Hôte d'Honneur au dîner de clôture de chaque session. De très grandes personnalités ont accepté de se livrer à cet exercice intéressant, parmi lesquelles on peut citer :

• des Professeurs Maurice Allais (Prix Nobel d'Economie), Alfred Sauvy, Louis Leprince-Ringuet, Jean Fourastié, Thierry de Montbrial

• des Personnalités politiques de premier plan : Jacques Barrot, Raymond Barre, Valéry Giscard-d'Estaing, Michel Debré,

• des personnalités économiques prestigieuses : François Ceyrac, Michel Albert, Antoine Riboud, Claude Bébéar, Yvon Chotard, Jacques Maisonrouge, Michel Camdessus

• des autorités morales : S.E. le Cardinal Albert Decourtray, Mike Whitby (Leader de la Ville de Birmingham.

La qualité des rapporteurs, l’amplitude des sujets proposés, les débats libres constituent la véritable richesse de la Société d’Economie Politique. Hier comme aujourd’hui, elle maintient cette tradition de qualité. Depuis 1876, le texte de ces conférences et des débats sont réunis en un volume. Jusqu’en 1950, ils firent l’objet d’une publication. Cette collection, intégrale, constitue une source non égalée pour comprendre l’évolution de l’économie régionale, nationale et internationale. Elle permet aussi d’appréhender les attentes des entrepreneurs et d’entendre leur expériences d’hommes de terrain. L’appel à des orateurs passionnants mais

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d’horizons différents, et l’alternance entre la théorie économique et la réalité économique constituent, aussi, un des attraits des travaux de la Société d’Économie Politique et d'Économie Sociale de Lyon. Comment travaillons-nous aujourd'hui ?

Nous pensons que les membres de notre Société attendent d’elle AUTRE CHOSE, et QUELQUE CHOSE DE PLUS que ce que leur propose pratiquement chaque soir la télévision et sur Internet : un débat ou une émission de qualité sur tel ou tel sujet de société, économique ou social. La Société a joué à ses origines un rôle reconnu de "creuset de réflexion et de proposition" sur le fonctionnement quotidien de notre ville et de notre région ; cela fut l'une des raisons les plus fortes de sa création le 13 janvier 1866. Je vous propose de renouer avec cette ambition.

Une possibilité consiste sans aucun doute à solliciter nos membres sur des sujets à caractère économique et social, donc en les consultant, en leur donnant la parole, en leur demandant même éventuellement des contributions formelles, et pourquoi pas écrites : il revient alors à la Société d'Economie Politique d'en faire la synthèse et de transmettre ses conclusions aux instances intéressées (Municipalité, Assemblées départementales et régionales, Parlementaires, Syndicats professionnels, Autorités administratives ou religieuses, etc.). Nos membres peuvent aussi se voir demander une contribution verbale lors de nos conférences débats, dont les sujets doivent donc les intéresser et les mobiliser. La Société d'Economie Politique pourra ainsi à notre sens redevenir

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un partenaire actif au sein de son environnement politique, économique et social.

Cela suppose que les sujets de réflexion économiques et sociaux abordés par nos conférenciers soient ambitieux, ne se limitent pas à de simples exposés sur l'état des lieux dans un domaine particulier, mais portent sur l'évolution envisagée à long terme de notre ville et de notre région, permettant ainsi à notre Société d'y apporter sa contribution.

Pour marquer cette volonté de notre Société de s'impliquer à nouveau activement dans son environnement, nous avons décidé depuis quelques années de donner une forme nouvelle à nos réunions (quatre à cinq débats par an au lieu de huit conférences, en plus de la réception annuelle d'un Hôte d'Honneur), réunissant parfois plusieurs intervenants, soit pour apporter des points de vue contradictoires, soit pour donner des éclairages différents sur des thèmes économiques et sociaux. La Société d'Economie Politique compte en son sein des salariés cadres et non-cadres, des indépendants, des responsables d'entreprises, des enseignants, des chercheurs, des étudiants, des retraités, qui peuvent trouver grâce à elle un moyen de faire connaître leur point de vue sur les questions qui les interpellent. Nos réunions peuvent ainsi permettre l'expression de la diversité de nos membres, en dehors de tout caractère politique, confessionnel, syndical ou catégoriel, et donner lieu à la remise aux responsables concernés d'une contribution représentant bien modestement une partie de l'avis de la "société civile", dont on parle tant et qu'on entend si peu.

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La Chambre de Commerce et d'Industrie de Lyon a d'ailleurs souhaité bénéficier de l'opportunité ainsi offerte en confiant à la Société d'Economie Politique un rôle permanent de "creuset de réflexion", lui permettant de "prendre le pouls" de l'opinion, de recenser ses attentes dans une perspective de long terme, et finalement d'anticiper les principales évolutions de notre environnement philosophique, technique, économique ou social.

Cela prouve que l'on peut vivre 150 ans, se renouveler constamment avec de nouveaux membres, s'adapter à des situations changeantes et continuer à jouer le rôle que l'on s'est fixé : celui de maintenir en mutuel contact les économistes spécialisés avec les gens de la pratique soucieux de comprendre les phénomènes économiques.

Ainsi, au cours des dernières années, des notes de synthèse ont été diffusées sur les thèmes de l’année en plus des comptes-rendus des conférences :

- en 2006-2007 : conditions du développement durable du tourisme d’affaires à Lyon et dans sa région

- en 2007-2008 : vers un projet de construction d’une métropole de Lyon et des agglomérations environnantes.

- en 2008-2009 : développement et renouveau des activités industrielles de la Région Urbaine de Lyon

- en 2009-2010 : renforcer les synergies entre recherche et industrie dans la métropole lyonnaise

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- en 2010-2011 : la formation outil indispensable à l’amélioration de la compétitivité des entreprises, et quelques séances hors sujet principal, telles les retraites, la crise économique ou le problème des déchets nucléaires.

- En 2011-2012 : la synergie entre la cité et le monde rural, plus quelques séances sur des thèmes d’actualité

- En 2012-2013 : les facteurs clé du succès de la dynamique industrielle et de l’ancrage des entreprises dans la métropole lyonnaise

- En 2013-2014 : Internationalisation des entreprises de la région lyonnaise

- En 2014-2015 : l’entreprise, cœur de croissance de la métropole lyonnaise, avec 3 conférences en lien avec Lyon, Place Financière et Tertiaire sur le domaine du financement des entreprises

Par ailleurs, un partenariat a été mis en place entre la SEPL et l’IAE/Université Lyon3, école de management ancrée dans le tissu économique lyonnais dont le positionnement est complémentaire de celui de l’EMLyon. Des professeurs de l’IAE sont intervenus en 2012-2013 en apportant un éclairage à caractère général sur les problématiques abordées par les grands témoins issus du monde des affaires dans notre territoire de la région urbaine de Lyon. En outre, de nombreux étudiants de l’IAE Lyon ont participé aux conférences. Cela a été pour eux un apport très enrichissant leur permettant de concrétiser leurs cours et leurs premières expériences de stage. Leurs questions, posées à partir d’un regard neuf

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sur le monde des affaires, ont également été très appréciées des conférenciers et des autres participants de la SEPL, tout en apportant des idées nouvelles pour le travail de synthèse de notre Association.

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HOMMAGE DU PRÉSIDENT YVES MINSSIEUX PAR MARC BONNET,

PRÉSIDENT D’HONNEUR

Depuis plusieurs décennies, Yves Minssieux a été au service de nombreux engagements citoyens. Nous voudrions seulement vous apporter le témoignage de son action dans le cadre de la Société d’Economie Politique et d’Economie Sociale de Lyon. Dans le prolongement de son mandat de vice-président de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Lyon, . Yves Minssieux a été élu président de la Société d’Economie Politique et d’Economie Sociale de Lyon en 2011 : Il s’agit d’un groupe de réflexion et de proposition a-politique créé il y a 150 ans pour formuler des propositions d’actions de développement économique et social de Lyon et de sa région. La SEPL s’est transformée en association loi 1901 depuis une dizaine d’années, afin de pourvoir à ses propres moyens de financement sous forme d’adhésions. Elle compte aujourd’hui 200 membres, pour la plupart représentants du monde économique. Depuis son origine, la SEPL a été hébergée par la CCI de Lyon et par le Crédit Lyonnais et elle publie des comptes-rendus de conférences et des notes de réflexion à l’attention des décideurs de notre territoire. Par exemple, les thèmes de travail des dernières années ont porté sur l’ancrage des entreprises industrielles dans la région, le développement des industries agro-alimentaires, les moyens d’amélioration du financement des PME-PMI de la région lyonnaise, les conditions du développement du tourisme d’affaires, le renforcement des coopérations entre université et industrie dans la région, la décentralisation coordonnée entre Lyon et les agglomérations environnantes (en évitant tout “ jacobinisme lyonnais”, etc. . Au cours des dernières années, le Président Minssieux s’est distingué dans son engagement citoyen et bénévole pour animer cette société et faire intervenir des personnalités de premier plan

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pour contribuer à des propositions. Parmi les personnalités que le Président Minssieux a récemment fait intervenir, nous pouvons notamment citer Jean-Claude Trichet (ancien Président de la BCE), Alain Mérieux, Jean Burelle (Plastic Omnium), Bruno Lacroix (Aldes),. Philippe Frantz (Reel SA),. Bruno Boccard ( Boccard Industries), ainsi que tous les partenaires de Lyon Place Financière et Tertiaire. Yves MINSSIEUX n’a pas cessé d’œuvrer au bénéfice du développement économique durable de Lyon et de sa région, notamment en tant que directeur régional de la Société Lyonnaise de Banque, Vice-Président de la CCI de Lyon, Président du Rotary Lyon Doyen, actuellement Consul de Belgique et précédemment Consul du Luxembourg, pour ne citer qu’une partie de ses nombreuses responsabilités. Pourtant, ces nombreuses charges ne l’ont pas empêché de se consacrer pleinement à l’animation de la SEPL. Il a réjeuni l’équipe, en faisant entrer des représentants de la Jeune Chambre Économique et du Centre des Jeunes Dirigeants. On peut notamment citer les noms des jeunes qui sont rentrés au bureau sous sa présidence : Marie-Christine Chalus-Sauvannet, Guillaume Cochet, Daniel Frelet, Gaétan de Sainte Marie et Franck Thouny. Il a aussi su fédérer l’équipe, en facilitant à la fois la qualité du travail, l’expression de tous, et une ambiance très conviviale. Merci Yves pou t’être mis au service du bien commun ; tu es un exemple pour nous tous, et nous sommes fiers aujourd’hui de te remettre la médaille d’honneur de la SEPL.

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HOMMAGE à Mme Renée JIMBERT,

Secrétaire Générale Honoraire, par Jacques BICHOT, PRÉSIDENT D’HONNEUR

(2000/2003) 15 septembre 2015

Chère Mme Jimbert, C’est un honneur et un plaisir d’être appelé à dire aujourd’hui, au nom de la SEPL, et en particulier au nom de tous les présidents de cette vénérable institution, des présidents dont vous avez été la Providence, combien votre dévouement et votre compétence ont été la cause première de l’activité et des succès de notre société. Tous les trois ans, un président est remplacé par un autre ; mais vous, la secrétaire générale, avez assuré la bonne marche et la continuité de la SEPL pendant près de 20 ans. Je peux témoigner du fait que, sans vous, la SEPL aurait végété, voire même aurait cessé d’exister. Qu’il s’agisse d’organiser les conférences ou les dîners de Gala, de contacter les uns, de relancer les autres, de tenir les comptes, de faire rentrer les cotisations, de faire éditer les plaquettes associées à nos activités, d’obtenir ou de cultiver l’appui d’institutions plus puissantes, à commencer par le CL et la CCI de Lyon, de palier les distractions des uns et les oublis des autres, tout reposait sur vos épaules. Vous avez commencé à vous occuper de la SEPL quand vous étiez l’assistante du directeur du CL à Lyon. Il existait depuis longtemps un lien particulier entre cette banque et la SEPL. Le directeur régional du CL faisait traditionnellement prendre en charge les travaux de secrétariat de la SEPL par les membres de son secrétariat de direction, qui se partageaient les tâches. Il advenait assez souvent que le directeur du CL devienne le président de la SEPL ; ce fut notamment le cas de Georges Bigeard auquel j’ai succédé à l’été 2000. Durant son mandat, le CL restructura sa direction régionale, faisant remonter à Paris un certain nombre de fonctions, si bien que ce secrétariat vit son format se réduire précisément au moment où vous avez pris votre retraite, à

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l’automne 1999. Vous avez alors proposé à Georges Bigeard de vous occuper entièrement du secrétariat de la SEPL, dont vous êtes devenue la secrétaire générale dans tous les sens du terme, c’est-à-dire comme membre du bureau, mais aussi comme « Maître Jacques », ainsi que vous me l’avez une fois écrit en citant Molière. Permettez-moi de citer à mon tour la réponse de Maître Jacques à Harpagon qui l’appelle : « Est-ce à votre cocher, Monsieur, ou bien à votre cuisinier, que vous voulez parler ? Car je suis l’un et l’autre. » Oui, vous fûtes le Maître Jacques de la SEPL, capable de tenir d’une main ferme les rênes d’un attelage composé parfois de chevaux ombrageux, ou distraits, voire paresseux, et capable également de vous occuper de l’intendance. Je rappellerai, sans souci d’exhaustivité, quelques-unes de vos responsabilités, toujours assumées à la perfection : suivi des relations avec les conférenciers et organisation de la conférence mensuelle, y compris l’envoi des invitations ; appels de cotisations ; relations avec les fournisseurs ; gestion des fichiers d’adhérents ; campagnes d’adhésions ; rédaction des CR de bureau ; etc., etc. Sans vous, qui avez effectué pendant une vingtaine d’années 90 % du travail nécessaire à la bonne marche de la SEPL, que serait devenue cette société ? Permettez-moi d’apporter maintenant un témoignage plus personnel, celui de la période de ma présidence, qui s’étend de l’été 2000 à l’été 2003. Vous aviez pris votre retraite du CL quelques mois avant mon entrée en fonction, mais vous conserviez au CL votre bureau et les facilités qui vont avec. Nous avons dû gérer une difficulté notable : la salle du Palais du Commerce où se tenaient les conférences mensuelles de la SEPL, mise gracieusement à disposition par la CCI, est devenue indisponible pour cause de longs travaux ; il a fallu trouver une solution de rechange, un moment au Cercle de l’Union, un autre moment dans une salle du CL, et vous avez organisé cela efficacement et dans des conditions financières qui n’ont pas trop obéré nos finances. Nous avons pu également organiser en 2002, en collaboration avec la CCI, un colloque très réussi en l’honneur du tricentenaire de notre partenaire la CCI de Lyon.

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Nos rapports n’ont jamais comporté la moindre familiarité : je ne me rappelle pas vous avoir jamais appelé autrement que Mme Jimbert, ni que vous m’ayez appelé autrement que Mr Bichot ou Président. Mais notre travail en commun, dans une complémentarité parfaite, dans un climat de courtoisie et d’estime mutuelle, m’a fait vous apprécier au plus haut point. Le nombre des personnes avec lesquelles j’ai travaillé en toute confiance, avec la certitude d’une fiabilité, d’une compétence et d’une conscience professionnelle irréprochables, est assez limité. Et incontestablement, vous figurez au premier rang de ce petit aéropage. Je pense donc que la SEPL a eu beaucoup de chance de bénéficier de si nombreuses années d’une secrétaire générale telle que vous. Que votre générosité lui ait bénéficié a été pour elle une véritable aubaine : tant d’associations auraient été heureuses que vous leur apportiez ce que vous avez apporté à la SEPL ! La médaille que je vais maintenant vous remettre au nom du bureau et de tous les anciens présidents est un modeste symbole de la reconnaissance de cet apport merveilleux. La SEPL a quelques raisons d’être fière de ses presque 150 ans d’existence ; elle a également des raisons d’être fière d’avoir été choisie par une femme de votre qualité pour y exercer un long et très efficace bénévolat.

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Hommage Yves LHENRY, Trésorier de la SEPL,

par Yves MINSSIEUX, Président Très Cher Yves Lhenry, vous avez pris en charge la comptabilité de la SEPL pendant sept années. Diplômé d’un master en comptabilité et tout en exerçant les fonctions de responsable financier d’une grande organisation, vous n’avez pas compté le temps que vous avez passé en soutien à Madame Jimbert. Toujours disponible, vous nous avez également rendu dans la plus grande discrétion de très nombreux services . Vous ne vous êtes jamais mis en avant, mais votre présence et votre travail ont permis à la SEPL de fonctionner sans que les présidents successifs n’aient à se préoccuper des rentrées de cotisations ni à piloter la trésorerie. Avec Madame Jimbert, vous avez réussi à créer une parfaite équipe pour assurer le fonctionnement quotidien de notre Association. En outre, votre gentillesse et votre bonne humeur constantes ont permis de surmonter bien des difficultés relationnelles. Vous êtes un modèle pour nous tous à la SEPL : votre travail au service de Lyon et de sa région reste discret, et pourtant indispensable, même si beaucoup ne s’en rendent pas toujours compte .Au nom de tous les membres du Conseil, je vous en remercie du fond du cœur. L’ouvrage que nous vous remettons en modeste signe de reconnaissance porte sur l’histoire de Lyon, cette ville qui est pour le moment votre cité d’adoption. Il montre qu’elle doit également sa prospérité à des personnes comme vous qui partagent vos valeurs: modestie, discrétion , honnêteté absolue, travail acharné, et souci du bonheur de tous. Vous incarnez à la perfection la maxime selon laquelle « Le bien ne fait pas de bruit".

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Les personnes désirant faire partie de la Société doivent en faire la demande auprès de Madame Anne-Marie LOURD Administration de la SEPL C/o LCL 18, Rue de la République 69002 LYON Tél. 04 78 92 28 07 Mail : [email protected] . cotisation annuelle en qualité de membre bienfaiteur : 100 euros (sans limitation supérieure) . cotisation annuelle en qualité de membre adhérent : 60 euros (10 euros pour les étudiants)