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50RECOMMANDATIONS
INSTITUTIONSpour NOS
parti-socialiste.fr
RAPPORT
Laurent DutheilSecrétaire national en charge du pôle « Préparation de l’avenir »
Nicolas SfezSecrétaire national adjoint en charge des Institutions
PréSeNté par
50RECOMMANDATIONS
INSTITUTIONSpour NOS
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RAPPORT
50RECOMMANDATIONS
INSTITUTIONSpour NOS
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AVANT-PROPOS 5MEMBRESDUGROUPEDETRAVAIL 6INTRODUCTION 81.Lerapportambigudessocialistesauxinstitutions 82. Lafractureentrelescitoyensetlesinstitutions 9
PREMIÈRE PARTIE : RÉNOVER LA VIE POLITIQUE 12
CHAPITRE 1er : Renforcer l’expression du peuple 141.Étendrel’usageduréférendum 152.Instaurerunvéritabledroitdepétition 18CHAPITRE 2 : Mieux représenter le peuple 201.Unmodedescrutinpluséquitable 212.Uneparitérenforcée 223.Unnon-cumulplusstrict 23CHAPITRE 3 : Une démocratie exemplaire 241.Unedéontologieplusexigeante 252.Uneimmunitéprésidentielleréduite 31CHAPITRE 4 : Une démocratie plus égalitaire et intégratrice 34
DEUXIÈME PARTIE : ÉQUILIBRER LES POUVOIRS 40
CHAPITRE 1er : Une représentation parlementaire renforcée 421.DesdéputésélusavantlePrésident 432.Ungouvernementquiprocèdedel’Assembléenationale 443.Unrôlerenforcépourl’Assembléenationaledanslaprocédure
derévisionconstitutionnelle 454.Untravailparlementairemodernisé 47CHAPITRE 2 : Un pouvoir exécutif mieux contrôlé 521.Lerégimedesnominationsparl’exécutifclarifié 532.Despouvoirsprésidentielsmieuxencadrés 543.DesAutoritésadministrativesindépendantespluslégitimes 56CHAPITRE 3 : Une justice enfin indépendante 601.Uneorganisationassurantl’indépendanceduCSM 612.Descompétencesgarantissantl’indépendancedel’autoritéjudiciaire 64CHAPITRE 4 : Une justice constitutionnelle plus légitime 681.Desjugesrenforcés 702.Uneinstitutionjuridictionnalisée 723.Uncontrôledeconstitutionnalitérenforcé 74
LES 50 recommandations 76
SOMMAIRE
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À la fin de l’année 2014, le Premier secrétaire a souhaité que le Parti socialiste mène une réflexion approfondie sur les institutions de la Ve République et ses possibles évolutions. L’objectif de cette réflexion doit contribuer à répondre au malaise démocratique qui résulte de la coupure croissante entre les citoyens et leurs représentants.
Il a confié la responsabilité de cette mission à Laurent Dutheil, Secrétaire national chargé du pôle « Préparation de l’avenir », et à Nicolas Sfez, secrétaire national adjoint en charge des institutions qui ont animé un groupe de travail composé d’universitaires et de praticiens.
Ce rapport est le fruit d’un travail collectif. Nous remercions chacune et chacun des membres du Groupe de travail pour leur disponibilité et leur réactivité et sans lesquels ce document n’aurait pu voir le jour.
AVANT-PROPOS
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Membres permanents
Véronique Champeil-Desplats Professeurdedroitconstitutionnelàl’universitédeParisOuest-NanterreLaDéfenseResponsableduCentredeRecherchesetd’EtudessurlesDroitsFondamentaux(CREDOF)Directricedelarevuedesdroitsdel’homme
Marie-Anne CohendetProfesseurdedroitconstitutionnelàl’UniversitédeParisIPanthéonSorbonne
Mathieu DebatisseMagistrat
Manuel DelamarreAvocatauConseild’EtatetàlaCourdeCassationMaîtredeconférencesàSciencesPoParis
Francis HamonProfesseuréméritedel’UniversitédeParisSud
Hubert LesaffreAncienassistantdeRobertBadinteretancienconseillerjuridiquedeJean-PierreBelChefdubureaududroitdel’organisationjudiciaireauministèredelajustice
Jean-Christophe MénardAvocatàlaCourMaîtredeconférencesàSciencesPoParis
Françoise Toubol-FischerAvocateàlaCourAncienneconseillèretechniqueauxcabinetsdeRobertBadinteretdePierreJoxeAncienneconseillèredeRobertBadinter,PrésidentduConseilConstitutionnel
Michel TroperProfesseuréméritededroitconstitutionnelàl’UniversitéParisOuest-NanterreLaDéfense
MEMBRES DU GROUPE DE TRAVAIL
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Nous exprimons tout particulièrement notre reconnaissance aux différents rapporteurs des thématiques traitées : Vincent Bréhier, Véronique Champeil-Desplats, Mathieu Debatisse, Manuel Delamarre, Francis Hamon, Jean-Christophe Ménard et Françoise Toubol-Fischer.Nous tenons à dire notre profonde gratitude à Michel Troper dont les analyses ont nourri et enrichi l’ensemble de nos réflexions et de nos travaux.
Laurent Dutheil et Nicolas Sfez
Membres non-permanents
Philippe Bluteau Avocat à la cour, Enseignant à Paris II et à Versailles Saint-Quentin
Patrice Bergougnoux Préfet honoraire
Roland Cayrol Politologue Directeur de recherche associé à Sciences Po Paris
Jean Grosset Membre du Conseil économique, social et environnemental
Vito Marinèse Conseiller au groupe socialiste de l’Assemblée Nationale chargé des questions institutionnelles Chargé de cours à Sciences Po Paris et à l’université de Paris Ouest-Nanterre La Défense
Olivier Rozenberg Professeur à Sciences Po Secrétaire Général du Groupe d’Etudes sur la Vie et les Institutions Parlementaires (GEVIPAR)
Guillaume Sacriste Maître de conférences en sciences politiques à l’Université Paris I Panthéon Sorbonne
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1.Le rapport ambigu des socialistes aux institutions
Au fil de notre histoire, les socialistes ont considéré les questions institutionnellescommesecondairesetentretenuavecellesunerelationcomplexeetcontradictoire.
Les socialistes du début du XXe siècle, inspirés par le marxisme et la culture jacobinen’acceptentleparlementarismequ’aunomdeladéfensedel’enracinementdelaRépubliquemaisniJaurès,niBlum,netranchentclairementlaquerelleentrepartisansdeladémocratiedirecte et militants de la démocratie représentative si bien que la SFIO est confrontéependanttoutecettepériodeàlacontradictionentresoninsertioncroissantedanslesystèmeparlementaireetsavolontéconstantederesterunpartideclasserévolutionnaire.
À défaut de doctrine proprement institutionnelle et malgré de nombreux débats, lessocialistes, divisés, ne sont pas en mesure sous la IVe République d’opposer un projetd’ensemble à l’offensive des droites visant à renforcer le pouvoir exécutif, à asseoir lebicamérisme,àpermettreleréférendumetlecontrôledeconstitutionnalitédeslois.
LeParti socialisted’Épinayne tranchepasdavantage,aumoinsen théorie, laquerelleentreparlementaristesetprésidentialistesmais,danslapratique,lacentralitédel’électionprésidentielleetlapersonnalisationdupouvoirsontacceptéesparlessocialistessouslaprésidencedeFrançoisMitterrandquiécritdès1972:«l’expériencem’aapprisque lesinstitutionssontbonnesoumauvaisesselonceluiouceuxqui lesappliquent».Soussaprésidence,lePartisocialisteneproposeaucunemodificationdenosinstitutions.
L’instauration du quinquennat et l’inversion du calendrier électoral qui subordonne lesélections législatives à l’élection présidentielle s’imposent au parti socialiste et seracommentée par François Hollande dans son livre Droit d’inventaires dans les termessuivants:«c’estcejour-làquefutvraimentdécidéelafindugouvernementparlementairedelaFrance.»
INTRODUCTION
Les socialistes ont longtemps développé un rapport ambigu avec les questions institutionnelles (1.) qui doit
pourtant être clarifié afin de pouvoir réduire la fracture entre les citoyens et les institutions (2.).
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AucongrèsdeDijonen2003,estmiseàl’ordredujourlathématiquedelaVIeRépubliqueavantquelecongrèsduMans,en2005,nel’abandonne.
EndépitdelavolontédessocialistesderééquilibrerlespouvoirsenfaveurduParlement,legroupeparlementaire,aunomdelaméfiancevis-à-visdeNicolasSarkozy,refusedevoterlarévisionconstitutionnellede2008bienqueplusieursdesesmembresaientsouhaitédansunetribune«donnerunechanceàlaréforme».
Àl’automne2010undocumentdesynthèsesurlesinstitutionspilotéparManuelVallsàlademandedeMartineAubryestprésentéaubureaunationaldu25janvier2011sousletitresuivant:«PourquoiilfautgarderlaVeRépublique».Certainesdesidéesdecedocumentserontreprisesdansleprojetsocialistepourl’électionprésidentiellede2012.
Chacuns’accordeaujourd’huiàconsidérerquelaréformeconstitutionnelleresteàfaire.D’autantqu’avecladéfiancegénéraliséeàl’égarddupolitiqueetlacriseéconomiquequis’enlise, les traditionnelles critiques sur la Ve République se font plus virulentes et lesappelsàunchangementdeRépubliquesemultiplient.
Ladroiteetl’extrêmedroite,chacunepourcequilaconcerne,dramatisentl’enjeuàdesseinetparlentdecrisederégime.NotrePremiersecrétairelesaccusede«jouerlacrise»pourmieuxservirleurthèsedurecours.
Àgauche,desvoixdeplusenplusnombreusesconsidèrentquecetteConstitutionbouclierainstauréune«démocratiesanslepeuple»etquelafractures’élargitentreunesociétéenmouvementetdesinstitutionsquiseraientdevenuesplusrigidesquesolidescommel’aencorerelevélamissionBartolonedanssonrapportsurl’avenirdesinstitutions:«Refaireladémocratie»présentéle2octobre2015.
Il apparaît ainsi indispensable aux socialistes de préciser leur réflexion institutionnelledanscecontextedefortedéfiancecitoyenne.
2.La fracture entre les citoyens et les institutions
Àla fois plus autonome et plus individualiste, l’expression politique citoyenne estincontestablementdevenueplusdéfianteetpluscritique.Ladéfiancequis’estinstallée
etquis’estgénéraliséeàl’encontredesinstitutionscommedupersonnelpolitiqueafaitlelitd’unecrisedelareprésentationetsusciteuneréticencecroissanteàl’égarddetouslestypesdemédiationpolitique.D’unepartladéfianceàl’égarddelaclassepolitiqueet des institutions fragilise tous les mécanismes de la représentation démocratique.D’autrepart, le rapportauxélectionss’estbeaucoupmodifiéet l’électoratestdevenuintermittent.Enfin, ledéveloppementdesmédiasencontinuetdesréseauxsociauxamodifiélerapportautempspolitique.L’instantanéitéetladémultiplicationdesmessagesontaccélérédefaçonspectaculaireledésirdevoirseréaliserlapromessepolitiquemaisaussilerisquequelecitoyensoitconstammentfrustréetmécontent.
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Les Français, s’ils ne rejettent pas dans leur immense majorité les rouages dela représentation démocratique privilégient de plus en plus des formes d’actionspolitiquesautonomesetspontanées,de faitplusprotestataires.Cesdifférentscerclesdecontestationn’ontpas lamêmecapacitédemobilisationetdediffusionmais tousinterrogentlesmécanismesactuelsdereprésentationdémocratique.Dansuncontextede crise sociale et économique devenue endémique, la radicalité comme la violencepolitique peuvent gagner en légitimité, se nourrir d’un désenchantement à l’égarddusystèmepolitiqueactueletdeses représentantsetdébouchersurunmouvementantisystèmed’ampleur.UnrécentsondageIpsos-Sopra-Steriaréalisépourl’associationLirelasociété,publiédansleMondedu11mars2016,attestedecetteréalité.D’aprèscetteenquête,malgréleurintérêtpourlapolitique,lesFrançaisportentunregardnégatifsurlesystèmepolitiqueetsesacteurs;88%despersonnesinterrogéesjugentquelesystème démocratique fonctionne mal et que leurs idées ne sont pas suffisammentreprésentées.Lediscréditàl’égarddelaclassepolitiqueseconfirmequand93%dessondés estiment que leurs représentants agissent pour leur intérêt personnel et nondansl’intérêtgénéral,tandisque77%pensentqu’ilssontcorrompus.Ceteffondrementdelaconfiancedescitoyensenversleursreprésentantsestégalementtrèsfortchezlessympathisantssocialistesquisont66%àsesentirdeplusenplusmanipuléspar lesdécisionsdespouvoirspublicset62%àêtreignorés.LesFrançaissouhaitentcependantune amélioration du système politique et plébiscitent davantage d’élus issus de lasociétécivile (96%)ouplusdeconsultationdescitoyens,notammentpar référendum(91%). Ilssouhaitentégalementl’interdictiontotaleducumuldesmandats(90%),uneparitéabsolueentrehommesetfemmeschezlesélus(86%)etl’utilisationduscrutinproportionnelintégrallorsdesélectionslégislatives(79%).
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NousfaisonsnôtreslesanalysesdePierreRosanvallonsurladissociationentrelégitimitédesgouvernantsetconfiancedesgouvernés:unmondepolitiquedavantagerégiparlejeudespersonnalitésquepardesdébatstranchés,unvolontarismeaumomentdel’électionetunréalismedansl’action,unedémocratieélectoralebaséesurlapersonnalisationetl’incarnationetunedémocratiededécisionfondéesurladémultiplicationdesinstancesdedébatetdecontrôle.Àcetégard,lapratiqueactuelledelaVerépubliquenousplacedansunesituationsingulière:laprésidentialisationrenforcesanscesselapolarisationautourduChefdel’Étatdotédepouvoirsconsidérablesetdonctenupourresponsabledetout.
Unemajeurepartiedelasociéténesereconnaîtplusdansl’ordreinstitutionnel,rejettelesdiscoursquienémanentetsouhaitepenserhors,voirecontrecetordre.Lafractureentrelasociétéetlesinstitutionsestréelle;etlaVeRépubliquesembleparfoisprotégerdavantagelesgouvernantsquelesgouvernés.
Plutôtqued’invoquerunecrisederégimeinéluctable,nousproposonsdedébattresanstaboudesdéfautsdefabricationd’unrégimeencriseetdesconditionsdanslesquelleslesFrançaispourraientànouveausereconnaîtredansleursinstitutions.Telestl’objetdenotreréflexionetlesraisonsdenosrecommandationsquis’inscriventdansuneréflexionpluslargesurladémocratie.Celles-cis’articulentautourdedeuxaxes:Larénovationdelaviepolitique(premièrepartie)etlerééquilibragedespouvoirs(secondepartie).
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PREMIÈREPARTIE
RÉNOVER LA VIE POLITIQUE
RÉNOVER LA VIE POLITIQUE
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Le groupe de travail a souhaité mettre au cœur de sa réflexion la question de la participation citoyenne. S’il demeure convaincu de l’importance du système représentatif – seul système politique à-même de garantir que les personnes chargées de prendre des décisions seront amenées à rendre des comptes aux électeurs en fin de mandat – il estime également que ce dernier doit être complété par des mécanismes permettant aux citoyens de s’exprimer entre les échéances électorales, et de participer directement à l’élaboration des choix collectifs.
Certes, l’instauration de tels mécanismes ne saurait constituer une « solution miracle » de nature à endiguer, à eux seuls, la montée de la défiance qui ronge le lien entre les citoyens et leurs représentants. Pour autant, les membres du groupe de travail sont convaincus que - combinés avec les évolutions institutionnelles décrites dans le présent rapport - des mécanismes d’expression directe améliorent la confiance de nos concitoyens en leurs institutions, enrichissent le débat public et renforcent notre démocratie.
Dans cette perspective, le groupe a choisi de se concentrer sur deux sujets : le référendum législatif et le droit de pétition. Le rapport ne traite donc pas de la démocratie participative dans son ensemble (budgets participatifs, jurys citoyens, référendums locaux, « community organizing », « empowerment » etc.), sujet qui mériterait à lui seul un rapport.
Le groupe de travail n’a ainsi pas, une fois encore, cherché à fournir une étude exhaustive mais à faire ressortir des recommandations fortes de nature à favoriser un renouveau démocratique. Ses réflexions ont porté sur le référendum (1) et sur le droit de pétition (2).
CHAPITRE 1ER
Renforcer l’expression du peuple
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1.Étendre l’usage du référendum
Lerecoursauréférendumalongtempsétéperçuavecméfiance.Leréférendumétaitutilisécommeun instrumentderenforcementde l’exécutifaudétrimentdesautres
pouvoirs,ouvrantinfinelavoieversunrégimecésariste.
Ainsi, la gauche a longtemps été réticente à l’idée de recourir à cet instrument. Pourautant,ilseraitfauxd’affirmerquelessocialistess’ysonttoujoursopposés.AinsiFrançoisMitterrandrappelaiten1988,danssaLettreàtouslesFrançais:«QuantàpermettreauxFrançaisdetrancherparréférendumlesproblèmesmajeursquinaissentdel’évolutiondenotresociété,j’ainaguèresouhaité(àproposdel’école)quecelafûtpossible.Jelesouhaitetoujours.MaissouslagarantiequeleConseilconstitutionnelémetteunavispublicsurlaconformitédelaquestionréférendaireà laConstitutionetaux lois fondamentalesdelaRépublique.Jepenseaussiqu’ilseraitbond’avancernosréflexionssurl’éventualitéduréférendumd’initiativepopulaire.D’unmaniementplusdélicatdansunpaysdelatailledelaFrancequedansuncantonsuisse,cetteréformerépondraitàuneaspirationréelle.J’inviterainoslégistesàsepenchersurlesujet».
Poursapart,legroupedetravailconsidèrequelerecoursauréférendumneprésentepluslesdangersprécédemmenténoncés.Ilestpossibledefavoriserunusagevertueuxdecedernier,dèslorsquesontinstaurésuncertainnombredegaranties.
S’agissant d’une potentielle dérive «césariste», le groupe note que le référendum alargementperdusoncaractèreplébiscitaire.Depuis1969,laplupartdesréférendumssesontsoldésparunéchecpourlepouvoirexécutifenraisond’unefaibleparticipationoud’unrésultatopposéàlasolutionpréconisée.
Al’inverse,legroupedetravailconstatequelorsquelaquestionposéeportesurdeschoiximportants,leréférendumetlacampagnequileprécèdesontdesmomentsderevitalisationdémocratique.Leréférendumsurletraitéconstitutionneletledébatquecelui-ciasuscitéenconstituel’undesmeilleursexemples.
Unemeilleureutilisationduréférendumappelleunerefontedel’article11delaConstitution.
En vertu du premier alinéa de l’article 11 de la Constitution du: «Le Président de laRépublique, sur proposition du Gouvernement pendant la durée des sessions ou surpropositionconjointedesdeuxassemblées,publiéesauJournalofficiel,peutsoumettreauréférendumtoutprojetdeloiportantsurl’organisationdespouvoirspublics,surdesréformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nationetauxservicespublicsquiyconcourent,outendantàautoriserlaratificationd’untraitéqui,sansêtrecontraireàlaConstitution,auraitdesincidencessurlefonctionnementdesinstitutions».
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RECOMMANDATION N° 1 :
ÉTENDRE lE DOMAINE Du RÉfÉRENDuM Aux quEsTIONs DE sOCIÉTÉ
Leréférendumlégislatifdevrait,selonlesmembresdugroupe,embrasserl’ensembledesmatièreslégislativesdéfiniesàl’article34delaConstitution.Silechampduréférendumdel’article11aeneffetétéélargiauxquestionséconomiquesetsocialesen1995etauxquestions environnementales en 2008, rien ne justifie selon le groupe de travail, qu’ensoientexclueslesquestionssociétales,àconditionbienévidemmentqu’uncertainnombredemécanismesdeprotectiondeslibertéssoientprévues.Àcetitre,ilpourraitêtreenvisagéuncontrôle(àprioriouàpostériorideladécisiondemiseenplaceduréférendum?)duConseilconstitutionnelsurlaquestionouletextesoumisàréférendumafindes’assurerque ce dernier n’est pas susceptible de porter atteinte aux droits et libertés que laConstitutiongarantit.
RECOMMANDATION N° 2 :
METTRE fIN Au MONOpOlE DE l’ExÉCuTIf EN MATIèRE DE RÉfÉRENDuM
Legrouperemarqueque laConstitution françaiseest l’unedesraresàconfierauseulexécutiflepouvoirderecourirauréférendum.Ilestimequ’ilestindispensabledemettrefinàcemonopoleafinde faireduréférendumunvéritableoutildémocratique.Pourcefaire,ilproposedelemettreégalementàladispositiondupouvoirlégislatif.L’Assembléenationalepourraitainsi,àlamajoritéabsoluedesesmembres,déciderdesoumettreuntexteàréférendum.
RECOMMANDATION N° 3 :
INsTAuRER uN RÉfÉRENDuM à ChOIx MulTIplEs
Legroupeestimequele«référendumàchoixmultiples»ou«référendumssimultanés»,constitue également une piste intéressante de nature à dépersonnaliser l’exercice duréférendum, et à permettre au peuple français d’opérer un certain nombre de choixfondamentaux.
Siaucunprojetn’obtientlamajoritéabsolue,ilssonttousconsidéréscommerejetés.Pourêtreadoptéunprojetdoitdoncrecueillirplusde50%dessuffragesexprimés,lequorumétantde50%desinscrits.
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RECOMMANDATION N° 4 :
INsTAuRER uN vÉRITAblE RÉfÉRENDuM D’INITIATIvE CITOyENNE
Larévisionconstitutionnellede2008,initiéeparNicolasSarkozy,ainstauréunsimulacrederéférendumd’initiativecitoyenne.Ilsuffitpourleconstaterdelireledeuxièmealinéadel’article11delaConstitution:«Unréférendumportantsurunobjetmentionnéaupremieralinéapeutêtreorganiséà l’initiative d’un cinquième des membres du Parlement, soutenue par un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales.Cetteinitiativeprendlaformed’unepropositiondeloietnepeutavoirpourobjetl’abrogationd’unedispositionlégislativepromulguéedepuismoinsd’unan.(…)Si la proposition de loi n’a pas été examinée par les deux assembléesdansundélaifixéparlaloiorganique,lePrésidentdelaRépubliquelasoumetauréférendum(…)»
D’une part, ce ne sont donc pas les citoyens qui ont l’initiative mais bien les seulsparlementaires. D’autre part, les seuils prévus pour déclencher ce mécanisme sont defaitinatteignables:1/5èmedesparlementaireset1/10èmeducorpsélectoral,celasignifieconcrètement185parlementairessoutenuspar4,5millionsdepersonnes.Encomparaison,1à2%ducorpsélectoralseulementestrequisenEspagneouenItalie-soitenviron500000personnes-pourprovoquerunréférendumd’initiativecitoyenne.Enfin,mêmesiuntextevenaitàrecueilliruntelsoutienenFrance,ilneseraitpasnécessairementsoumisàréférendum.Celaimpliqueraitsimplementqueletextesoit«examiné»-etnonadopté-parlesdeuxassemblées,conformémentàl’article11danssarédactionactuelle.
Legroupeproposed’instaurerunvéritableréférendumd’initiativecitoyennequiprésenteraitlescaractéristiquessuivantes:
▶l’initiativeappartiendraitauxcitoyenseux-mêmes:unseuilde2%ducorpsseraitrequis,soitenviron800000personnespourdéclencherlaprocédure.Néanmoins,afin de limiter les tentatives d’obstruction de l’action gouvernementale, unélecteurnepourraitsignerparanqu’uneseuledemandetendantàl’organisationd’unréférendum;
▶letexteproposéseraittoutd’abordexaminéparleConseilconstitutionnelafindevérifiersaconformitéàlaConstitution.Danslecascontraire,l’initiativecitoyennenesauraitprospérer;
▶letexteaccompagnéd’uneétuded’impact,établiparunorganismeindépendant,seraitparlasuitesoumisauParlement.Celui-cipourraitsoitdéciderdel’adoptermettantfinainsiàlaprocédure,soitdelerejeter.Danscederniercas,letexteseraitnécessairementsoumisàréférendum.Toutefois,leParlementauraitégalementlapossibilitétoutenrejetantletexte,d’élaborerunecontre-propositionquiseraitalorségalementsoumiseauxcitoyenslorsduréférendum;
▶le textesoumisàréférendumserait réputéadoptédès lorsque laparticipationserait au moins égale à 50%, qu’il aurait recueilli la majorité des suffragesexprimésetaumoins35%desélecteursinscrits(quorumd’approbation).
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Enfin, le groupe soutient également l’adoption d’une loi organique visant à encadrerl’ensemble des campagnes référendaires, notamment d’initiative citoyenne, afin degarantirlatransparencedespropositions(éviterquecetinstrumentsoitdétournépardesorganisationséconomiquesoudesgroupessociauxenvuededéfendreexclusivementleurintérêtcatégoriell’existenced’undébatéquitableentrepartisansetadversairesduprojet.Danscecadre,uneduréeminimaledecampagne–del’ordrede6à9mois–pourraitêtreretenue.
2.Instaurer un véritable droit de pétition
PilierdelaRévolutionfrançaise,ledroitdepétitionaétéprogressivementdélaissé.Ilpourraitnéanmoins,selonlesmembresdugroupedetravail,constitueruninstrument
extrêmementutilepourrenforcer les liensentre lescitoyenset leursreprésentants,enfavorisantundialogueconstantentrelesassembléesetlasociété.
Enl’étatactuel,lesconditionsd’exercicedudroitdepétitionsontlargementinsatisfaisantesetprivecedroitdetouteportée.
Ledroitdepétitionestdéfiniparl’article4del’ordonnancedu17novembre1958relativeaufonctionnementdesassembléesparlementairesetparlesarticles147à151duRèglementdel’Assembléenationale.Envertudecestextes:
«LespétitionsdoiventêtreadresséesauPrésidentdel’Assemblée.Ellespeuventégalementêtredéposéesparundéputé,quifait,enmarge,mentiondudépôtetsignecettemention(…)LePrésidentdel’Assembléenationalerenvoielespétitionsàlacommissioncompétentepourleurexamen.LacommissiondésigneunrapporteurAprèsavoirentendulesconclusionsdurapporteur,lacommissiondécide,suivantlecas,soitdeclasserpurementetsimplementlapétition,soitdelarenvoyeràuneautrecommissionpermanenteàl’Assembléeouàunministre,soitdelasoumettreàl’Assemblée».
Surlescinqdernièreslégislatures,aucunepétitionn’aétésoumiseàl’Assemblée.
Rappelonségalementquedepuislarévisionconstitutionnelledu23juillet2008,leConseiléconomique,socialetenvironnementalpeutêtresaisiparvoiedepétitiondetoutequestionàcaractèreéconomique,socialouenvironnemental.«LebureauduCESEstatuesursarecevabilitéetdansundélaid’unanàcompterdecettedécision,leConseilseprononceparunavisenassembléeplénièresurlesquestionssoulevéesparlespétitionsrecevablesetsurlessuitesqu’ilproposed’ydonner.L’avisestadresséauPremierministre,auprésidentdel’Assembléenationale,auprésidentduSénatetaumandatairedelapétition.IlestpubliéauJournalofficiel».
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Cependant,cerecoursprésentepeud’intérêtpourlescitoyens.D’unepart,lapétitiondoitêtre«présentéedanslesmêmestermesparaumoins500000personnesmajeures,denationalitéfrançaiseourésidantrégulièrementenFrance»,chiffredifficilementatteignable.D’autrepart,lecontrôleexercésurlarecevabilitéestétroit.LeCESEaainsifaitl’objetdenombreusescritiquesàlasuitedudébatsurlemariagepourtous.Le15février2013,«LaManifpourtous»aeneffetdéposéauCESEunepétitioncitoyennerassemblantplusde500000signaturesafinqueceConseilrendeunavisrelatifauprojetdeloiouvrantlemariageauxcouplesdemêmesexe.LeCESEarejetécettedemandeaumotifque«lasaisineduCESEpouravissurunprojetdeloirelèveexclusivementduPremierMinistre».Cependant,letribunaladministratifdeParis,le30juin2014,aannuléladécisiondubureauduCESEpourillégalité.LebureauduCESEafaitlechoix,àl’unanimité,denepasfaireappeldecejugement.
RECOMMANDATION N° 5 :
INsTAuRER uN vÉRITAblE DROIT DE pÉTITION
Legroupede travailestimequ’ilseraitsouhaitablederénover lesconditionsd’exercicedudroitdepétition.Ledroitdepétitionpourraiteneffetconstituerunvéritablepouvoird’interpellationdesélusparlescitoyens,entrelesélections.Sansquelapétitionneconsisteàsoumettreuntexteprécis-commedanslecasduréférendumd’initiativecitoyenne-ellepermettraitl’inscriptiond’undébatàl’ordredujourdel’Assembléenationale,obligeantlesreprésentantsàsepositionnersurunsujetdonnéetàrépondreauxcitoyenssurtelleoutellequestion.Enpratique,unepartiedelasemainedecontrôlepourraitêtreréservéeauxdébatsportésparlespétitionsquiontrecueilliaumoins100000signatures.
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Le Parlement est aujourd’hui insuffisamment représentatif de la diversité de la société française : sous-représentation des femmes, sur-représentation des cadres supérieurs (fonction publique ou chefs d’entreprises), faible présence des élus issus de la diversité… Même si une partie importante du travail doit être fait au sein des organisations politiques, le groupe de travail a néanmoins identifié un certain nombre de leviers d’action : modes de scrutin (1), parité (2) et non-cumul (3).
Mieux représenter le peuple
CHAPITRE 2
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1.un mode de scrutin plus équitable
Lemodedescrutinconstitueunélémentessentieldelégitimationdupouvoirpolitique.Le choix d’une modalité particulière d’élection des parlementaires peut avoir des
conséquences fortes sur la structuration de la vie politique du pays. Pour l’AssembléenationalecommepourleSénat,legroupedetravailaexploréplusieurspistesderéforme.
Assurerlareprésentativitédeladiversitépolitiquedupays,poursuivrelalonguemarcheverslaparité,favoriserdesmajoritésparlementairesstables,telssontlesobjectifsquedoitrecherchertouteréformedumodedescrutinauxélectionslégislatives.
Le groupe de travail a identifié trois scénarios différents :l’applicationauxlégislativesduscrutinbinominalappliquéauxélectionsdépartementales; l’introductiond’unedosedeproportionnelleetuneproportionnelleintégraleauniveaunationalavecprimemajoritaireetdeslistesrégionales.
Pourcestroisscénarios,legroupedetravails’estprononcécontreuneréductiondunombrededéputésquirisqueraitdeconduireàdescirconscriptionstropétendues(aumoinsdanslesdeuxpremiersscénarios)etàunéloignementdesdéputésdeleurterritoired’élection.
RECOMMANDATION N° 6-1
MIsE EN plACE D’uN sCRuTIN bINOMINAl
Lepremierscénarioconsistedoncàreprendrepourleslégislativeslescrutinrécemmentappliquéauxdépartementales,àsavoirlescrutinbinominalmixtemajoritaireàdeuxtours.Cemodedescrutinauraitl’immenseavantagedegarantirlaparitéauseindel’Assembléenationalecequiconstitueraitunprogrèsconsidérable.Lemaintiend’unscrutinmajoritaireintégralauraitnéanmoins lesmêmesconséquencesque lescrutinactuel,àsavoirunesous-représentation à l’Assemblée des petits partis dont les scores cumulés peuventreprésenterunepartsignificativede l’électorat.Celasupposeraitaussiunredécoupageélectoraldegrandeampleurpuisquelenombredecirconscriptionsseraitdivisépardeux(cequirendraitd’ailleursdifficilelemaintiendelarègled’undéputépardépartement).
RECOMMANDATION N° 6-2
MIsE EN plACE D’uNE DOsE DE pROpORTIONNEllE
Le deuxième scénario consiste à intégrer une dose de proportionnelle pour l’élection desdéputéscequipermettraitl’expressiondesprincipauxpartispolitiquessansbriserl’acquisdufaitmajoritaire.Legroupedetravailaconsidéréquel’électiond’unecentainededéputésauscrutinproportionnelsurunebasenationalepermettraitd’atteindrecetobjectif.Unredécoupageélectoral,moinsimportantquedansleprécédentscénarioseraitégalementnécessaire.
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RECOMMANDATION N° 6-3
MIsE EN plACE D’uN sCRuTIN pROpORTIONNEl INTÉgRAl
Untroisièmescénarioa,enfin,étédiscutéconsistantàallerjusqu’auboutdeladémarcheproportionnelle.Pourlegroupedetravail,uneproportionnelleintégralen’apasdesensdansdescirconscriptionstropétroites.C’estpourquoilesystèmede1986n’apasétéretenu(avaientalorsétéretenuesdeslistesdépartementalescequiréduitl’effetreprésentatifdelaproportionnelleet,surtout,rendimpossiblel’instaurationd’uneprimemajoritaire).Ilsembleparcontrenécessairedefavoriserl’émergenced’unemajoritéstable.C’estpourquoiilestproposédereprendrelesystèmedeprimemajoritaire,parexemple25%,utilisépourlesélectionsrégionales(cequisupposeuneélectionàdeuxtourspourquedesalliancesdegouvernementseforment).Enfin,pourassurerl’implantationlocaledesdéputésetéviterunetropgrandecentralisationdanslaconstitutiondeslistes,ilestproposé,enprenanticiencorepourmodèlelesystèmedesrégionales,deconstituerdeslistesrégionales.
RECOMMANDATION N° 7
AMÉNAgEMENT Du MODE DE sCRuTIN sÉNATORIAl
LaquestiondelaplaceduSénatdanslesinstitutionsalonguementoccupélegroupedetravailquia,aufinal,retenul’hypothèseconsistantàaménagerledispositifexistantafind’en corriger les défauts les plus flagrants, tout en préservant la vocation du Sénat dereprésentationdescollectivitéslocales.
Celaconduit, toutenconservant leprinciped’unsuffrageuniversel indirect, àmodifiersignificativementlemodedescrutingrâceauxdispositionssuivantes:
▶rééquilibrageducollègeélectoralenfaveurdesdépartementsetdesrégionsafinderéduirelasurreprésentationdescommunesrurales.Seraientégalementintégréeslesintercommunalités,dèslorsqu’ellesserontéluesausuffrageuniverseldirect;
▶généraliserlescrutinproportionnelenleportantauniveaurégional,cequipermettrauneplusgrandediversitédanslareprésentation.
2.une parité renforcée
Lesrécentesélectionsdépartementales l’ontprouvé,seuleunecontrainte juridique fortepermetd’avancerdanslaparitéetlerenforcementdelaplacedesfemmesdanslavie
politique.Lescrutinbinominalmixteaainsipleinementjouésonrôlemodernisateurpuisquel’onestpasséde16,3%defemmesconseillèresgénéralesà50%deconseillèresdépartementales.Deuxfaiblessesfortessubsistentnéanmoinsdansledispositifactuel:lesfemmessontd’abordencore sous-représentées dans les exécutifs locaux (16,7% des présidences de conseilsrégionaux,10%desprésidencesdesconseilsdépartementauxet16%desmaires);etellessontencorelargementminoritairesauParlement(25%dessénateurset26,9%desdéputés).
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RECOMMANDATION N° 8
RENfORCER lEs sANCTIONs fINANCIèREs EN CAs DE NON-REspECT DE lA pARITÉ
Faceàcettesituation,legroupedetravailaretenulapropositionconsistantàalourdirlessanctionsfinancières,àsavoirlasuppressiondela1èretranchedefinancementpublic,pourlespartisnerespectantpaslaparitédescandidatsauxélectionslégislatives.Cetteproposition,figurantdéjàdanslespropositionsdupartiPouruneRépubliquenouvelledefévrier2011,n’apasétérepriseparlarécenteloirelativeàl’égalitéentreleshommesetlesfemmes,comptetenudesincertitudesquantàsaconstitutionnalité.Elleconstituenéanmoinsunengagementfortenfaveurdelaparité.C’estpourquoilegroupedetravailproposederéviserlaConstitutionsurcepoint.Parailleurs,l’introductiond’unscrutinbinominaloud’unedosedeproportionnelle,voired’uneproportionnelleintégraleauxlégislativesetlerecoursàuneproportionnelleintégralerégionaliséepourlessénatorialesauraientuneffettrèspositifsurlaparité.
3.un non-cumul plus strict
Les limitations au cumul des mandats ont été systématiquement portées et mises enœuvrepardesmajoritésprogressistes;laloidefévrier2014enestletémoignageleplus
récent.Cetteloi,quinedoitpourtantentrerenvigueurqu’en2017,adéjàproduitdeseffets,signequelesmentalitésévoluent,àgauchecommeàdroite,conformémentausouhaitdesFrançais:ainsi,alorsquel’Assembléenationalecomptait101députésexerçantunmandatdeconseillergénéral(horsParis),seulement67sedéclaraientcandidatset51ontétéélus.Lenombrededéputésexerçantsimultanémentunmandatdeconseillerdépartementaladoncétédivisépardeux(alorsmêmequecelaresteraautoriséaprès2017…).
RECOMMANDATION N° 9
lIMITER lE CuMul DANs lE TEMps
Ilsembleaujourd’huinécessaired’allerplusloinencoredansl’encadrementducumuldesmandats.Si,surlaquestiondumandatunique,legroupedetravailn’apasadoptédepositiondéfinitive,ils’estunanimementprononcépourunelimitationducumuldansletempsquidoitpermettreunvéritablerenouvellementdesélusetunemeilleurereprésentationdelasociétéfrançaiseauParlementavecplusdefemmes,plusdediversitédeparcoursoud’originesdesélusdelaNation.Ilestdoncproposédelimitercecumulàtroismandatsidentiquessuccessifs,limitationquivaudraitaussibienpourlesparlementairesquepourlesélusdesexécutifslocaux.
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Le groupe de travail a été très attentif aux exigences de transparence qui fonde une démocratie exemplaire. Deux points ont été plus particulièrement envisagés : la déontologie (1) et les immunités (2).
Dans un contexte caractérisé, d’une part, par une défiance croissante des citoyens à l’égard des élus et, d’autre part, par une mise en cause récurrente de la probité de la classe politique, le groupe de travail a souhaité engager une réflexion sur la réforme des règles en matière de déontologie des parlementaires et des membres du Gouvernement afin de contribuer à restaurer la confiance du peuple dans ses représentants.
Dans cette perspective, le groupe de travail estime que la règle de droit peut être utilisée comme un moyen, tantôt pour inciter, tantôt pour contraindre les élus et les membres du Gouvernement à plus d’intégrité et d’exemplarité.
Par ailleurs, le Parti socialiste doit se réapproprier la question de la déontologie et de la probité et dans la vie politique afin d’apparaître comme la première formation politique à être force de propositions concrètes sur une thématique à l’égard de laquelle la société civile est particulièrement sensible.
CHAPITRE 3
Une démocratie exemplaire
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1.une déontologie plus exigeante
Le groupe de travail s’est intéressé plus particulièrement à la déontologie desparlementaires, à la présence des représentants d’intérêts, au cumul d’activités,
à la prévention des conflits d’intérêts et du risque d’enrichissement personnel desparlementaires,ainsiqu’àladéontologiedesmembresdugouvernement.
Enpremier lieu, ladéontologiedesparlementairesestprévue,concernant lesdéputés,auxarticles80-1etsuivantsdurèglementintérieurdel’Assembléenationaleet,s’agissantdessénateurs,auxarticles92etsuivantsdurèglementintérieurduSénat.Lerespectdecesprincipesdéontologiquesestconfiéàl’Assembléenationale,àun«Déontologue»et,s’agissantduSénat,àun«comitédedéontologieparlementaire»composéuniquementdesénateurs.
Lestatutdesorganeschargésdefairerespecterladéontologiedesparlementairesdiffèresensiblementd’uneassembléeàl’autre.Eneffet,leDéontologuedel’Assembléenationaleestdésignéà lamajoritédestroiscinquièmesdesmembresdubureaude l’Assembléenationale,surpropositiondesonPrésidentetavecl’accordd’aumoinsunprésidentd’ungrouped’opposition.Ilexercesesfonctionspourladuréedelalégislatureetsonmandatn’estpasrenouvelable.
Àl’inverseduDéontologuedel’Assembléenationale,lecomitédedéontologieparlementaireduSénatestunorganecollégialcomposédeneufsénateursenexercice lesquelssontdésignésàlareprésentationproportionnelledesgroupespolitiquesduSénat.
Onrelèveraencorequecertainesdesrèglesdéontologiquesprévuestantparlerèglementintérieurdel’AssembléenationalequeceluiduSénatcomportentdesdispositionspourlemoinsimprécisesetdontledegréd’applicabilitéestvariable.
Ainsi, par exemple, de l’article 99bis du règlement intérieur du Sénat qui énonce, sansplusdeprécisions,que«lecomitédedéontologieparlementaireassistelePrésidentetleBureauduSénatdanslapréventionetletraitementdesconflitsd’intérêtsdessénateursainsiquesurtoutequestiond’éthiqueconcernantlesconditionsd’exercicedumandatdessénateursetlefonctionnementduSénat».
Delamêmemanière,lesénoncésdessixarticlesdu«Codededéontologie»desdéputésrevêtentuneportéeplusdéclarativeetsymboliquequeprescriptive.
Outre l’imprécision de certaines de ces règles, il n’est prévu, à l’égard du Déontologuede l’Assemblée nationale et du comité de déontologie parlementaire du Sénat, ni droitd’auto-saisinenipouvoird’instructionoudesanction.Lesavisdecesdeuxorganessontparailleursconfidentiels. Ilsne lientpas lebureaude l’assembléeparlementaire, seulcompétentpourdéciderdel’éventuellesanctionàinfligerauparlementaireconcerné.
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ConcernantlecomitédedéontologieduSénat,lefaitqu’ilsoitcomposédesénateursenexercicesoulèvenécessairementlaquestiondel’indépendanceetdel’impartialitédecetorgane.
Danscecontexte,legroupedetravailproposedeuxaxesderéflexionalternatifs.
RECOMMANDATION N° 10
MODIfIER lEs DIspOsITIONs DEs RèglEMENTs DEs AssEMblÉEs RElATIvEs à lA COMpOsITION ET Aux ATTRIbuTIONs DEs ORgANEs ChARgÉs DE fAIRE REspECTER lA DÉONTOlOgIE DEs pARlEMENTAIREs
Précisément,legroupedetravailproposede:▶substitueraucollègedessénateursunDéontologueduSénatdésignéselondes
modalités identiques à celles du Déontologue de l’Assemblée nationale, à savoirparlestroiscinquièmesdesmembresdubureauduSénat,surpropositiondesonPrésidentetavecl’accordd’aumoinsunprésidentd’ungrouped’opposition;
▶prévenirlesrisquesdesurvenancedeconflitsd’intérêtsentrelamissionexercéeparleDéontologueetl’exercicesimultanéd’uneactivitéprofessionnellesoit,d’unepart,enpubliantladéclarationd’intérêtsetdepatrimoineduDéontologuesoit,d’autrepart,eninstaurantunrégimed’incompatibilitésprofessionnellesaveccettefonction;
▶doterlesorganeschargésdefairerespecterladéontologieparlementairedudroitdes’autosaisiretdupouvoird’instruire;
▶rendrepubliclesavisetlesconsultationsdélivrésparlesorganeschargésdefairerespecter ladéontologieparlementaire,sousréservedurespectdudroità lavieprivéeetlaconfidentialitédesdonnéespersonnellesduparlementaire.
RECOMMANDATION N° 11
MODIfIER lA RÉpARTITION DEs COMpÉTENCEs DANs lE DOMAINE Du CONTRôlE Du REspECT DEs RèglEs DÉONTOlOgIquEs
Précisément,legroupedetravailproposeque:▶laHauteAutoritépourlaTransparencedelaViePubliquesoitsaisiepouravis,parles
bureaux des assemblées parlementaires, pour les questions d’ordre déontologique.Danscecontexte,l’avisdelaHauteAutoritéseraitmotivéetrendupublic;
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▶la Haute Autorité puisse transmettre son avis au parquet dans tous les cas oùellerelèverait,aprèsqueleparlementaireaitétémisenmesuredeproduiresesobservations,unmanquementgraveoupourlequelellenedisposepasd’explicationssuffisantes.
Entrecesdeuxaxesderéformes,legroupedetravailarépartisesvoixdemanièreégalesansqu’unedécisiondéfinitivenesoitretenueenfaveurdupremieroudusecondaxederéflexion.
En deuxième lieu, l’encadrement de la présence des «représentants d’intérêts» dansl’enceinteduParlementestrelativementrécente(2009pourl’Assemblenationaleet2010pourleSénat).
Comme l’asoulignéTransparency InternationalFrancedansson rapportdu21octobre2014, la question du «lobbying» ne se réduit pas qu’à un seul enjeu d’accès desreprésentants d’intérêts aux membres des assemblées parlementaires. Cette questionconcerneégalementl’influencedesreprésentantsd’intérêtssurladéterminationdeschoixdepolitiquespubliquesetdeleurcontenu.
Maislaquestiondelaparticipationdesreprésentantsd’intérêtsauxdécisionspubliquesdoitêtreappréhendéeautrementqu’endestermesnégatifs.Eneffet, lesreprésentantsd’intérêts sont susceptibles de fournir aux parlementaires un éclairage pertinent surl’applicationdelaloietsurlesmoyensdel’améliorer.
Actuellement,l’obligationprincipalefaiteauxreprésentantsd’intérêtsconsisteàs’inscriredansun«registredesreprésentantsd’intérêts»lequeldonnedroit,encontrepartie,àunaccèsfacilitéauxparlementaires.L’inscriptionsurleregistreestparailleursmentionnéelorsque les représentants d’intérêts ont été auditionnés dans le cadre d’un travailparlementaire.
Lerèglementdel’Assembléenationaledisposeégalementensonarticle221°d.)quelesannexesdesrapportsrendussurlesprojetsetpropositionsdeloiopèrent«unedistinctionentrelesauditionsmenéesauprèsdereprésentantsd’intérêtsinscritssurleregistreetlesautresauditions».
Pourfavoriserlatransparenceetl’informationdupublicsurlesmodalitésd’élaborationde la loisanspourautant interdire laprésencedesreprésentantsd’intérêtsauseinduParlement,legroupedetravailestimenécessaired’améliorerlatraçabilitédesinterventionsdesreprésentantsd’intérêtsafind’éviterqu’unparlementairenereprenneuneprisedeposition,ouunargumentaire,proposéspardesreprésentantsd’intérêts.
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RECOMMANDATION N° 12
MIEux ENCADRER l’ACTIvITÉ DEs REpRÉsENTANTs D’INTÉRêTs
Legroupedetravailpropose:▶derendrepublique,dèsledépôtdelapropositionouduprojetdeloijusqu’àl’entrée
envigueurdelaloi,nonseulement,commec’estlecasactuellement, lalistedel’ensembledesreprésentantsd’intérêtsauditionnésmaiségalementlesréunionsorganisées,lesconsultationsmenéesetlescontributionsreçues;
▶dans la continuité des propositions formulées par la Haute Autorité pour laTransparence de la Vie Publique dans son rapport d’octobre 2014, que lesparlementaires,quidéposeraientdesamendementsinspiréspardesreprésentantsd’intérêts,enfassentmentionlorsdesdébatsenséanceetencommission.
En troisième lieu, sur le cumul d’activités, la prévention des conflits d’intérêts et laprévention du risque d’enrichissement personnel des parlementaires, il convient derappeler que les articles 1 et 2 de l’ordonnance n° 58-1210 du 13 décembre 1958portant loi organique relative à l’indemnité des membres du Parlement prévoient leversementd’uneindemnitéparlementaire«calculéeparréférenceautraitementdesfonctionnairesoccupantlesemploisdel’Etatclassésdanslacatégorieprésentementdite"horséchelle"»et«complétéeparuneindemnitéditeindemnitédefonction»soit,au1erfévrier2015,unmontantbrutmensueltotals’élevantà7100,15euros.
S’ajouteàcetteindemnitéparlementaireleversementd’«uneindemnitéreprésentativede frais de mandat» (IRFM), destinée à faire face aux dépenses liées à l’exercicedu mandat parlementaire non directement prises en charge ou remboursées par leParlement.
Afin de prévenir la survenance de conflits d’intérêts et le risque d’enrichissementpersonnel des parlementaires dans le cadre de leurs mandats, l’article 20 de la loin° 2013-907 du 11 octobre 2013 sur la transparence de la vie publique prévoit ainsique laHauteAutoritépour laTransparencede laViePubliquereçoitdesdéputésetdes sénateurs «leurs déclarations de situation patrimoniale et leurs déclarationsd’intérêts,enassurelavérification,lecontrôleet,lecaséchéant,lapublicité».
Toutefois,cedispositifn’apaspermisd’excluredéfinitivementlerisqued’uneutilisationdel’IRFMquis’avèresoitirrégulièresoitnonconformeàsonobjet.
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RECOMMANDATION N° 13
RÉfORMER lE RÉgIME DE l’IRfM
Legroupedetravailproposedoncderéformerlerégimedel’IRFMenproposant,d’unepart,unsystèmededéclarationauprèsduDéontologuedesdépenseseffectuéesparlesparlementaireset,d’autrepart,d’autoriserlaHauteAutoritépourlaTransparencedelaVie Publique à effectuer des contrôles ponctuels et, le cas échéant, des demandes decommunicationdejustificatifsauxparlementaires.
RECOMMANDATION N° 14
METTRE EN plACE uN sTATuT DE l’Élu pRENANT EN COMpTE lEs CONDITIONs DE CuMul ENTRE lEs MANDATs pARlEMENTAIREs ET DEs ACTIvITÉs pROfEssIONNEllEs
Le mandat parlementaire reste compatible avec l’exercice simultané des fonctions deprofesseur d’université, d’une profession libérale règlementée ou bien encore d’uneactivitédeconseil.Cettedernièrehypothèsen’esttoutefoispossiblequ’àlaconditionqueleparlementaireexerçaitcesfonctionsdeconseilantérieurementàsonmandat.
Lapossibilitélaisséeàunparlementairedecumulerl’exercicedesonmandatavecuneactivitédeconseilfacilitetoutefoislasurvenancedeconflitsd’intérêts.
Bien que souhaitable, le groupe de réflexion n’a pas estimé opportun de proposerl’interdictiondecumulerunmandatparlementaireavecuneactivitédeprofessionnelle,etcepourdeuxraisons:
▶d’une part, en raison des difficultés tenant à l’applicabilité d’une telle mesure.Pour ne prendre que l’exemple du cumul d’un mandat parlementaire avec laprofession dite d’«avocat d’affaires», cette appellation ne correspond à aucunedesspécialisationsénuméréesparl’arrêtédu28décembre2011fixantlalistedesmentionsdespécialisationdesavocats.Quellequesoitsaspécialisation(droitfiscal,droitbancaire,droitpublic,droitdessuccessions,etc.),toutavocatestsusceptibled’exercer dans le domaine des «affaires» (si tant est que l’on puisse délimiterprécisémentcesecteur);
▶d’autre part, en raison d’un risque de «fonctionnarisation» du Parlement, unparlementaire issudelafonctionpubliqueayant,à l’expirationdesonmandat, lagarantiederéintégrersoncorpsd’origine,àl’inversedeceluiissudusecteurprivé.
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Legroupedetravailproposedoncdecréerungroupedetravailadhocchargéderéfléchiràlamiseenplaced’unstatutdel’éludestinéàfavoriser,d’unepart,unereprésentationéquitableauParlementdel’ensembledesprofessionsdusecteurpublicetprivéet,d’autrepart,leretouràlavieprofessionnelled’unparlementairedontlemandatn’auraitpasétérenouvelé.
Cegroupeadhocdevranotammentréfléchirà lapossibilitéd’instaurerunmécanismedeprotectiondessalariésexerçantunmandatparlementaire,devalidationdesacquisdel’expérience du parlementaire et, éventuellement, d’intégration directe dans la fonctionpubliqued’unparlementairedontlemandatvientdes’achever,sousréservedurespectduprinciped’égalitéd’accèsauxemploispublics.
Enquatrièmelieu,enmatièrededéontologiedesmembresduGouvernement,ledispositifen vigueur concerne principalement les incompatibilités et la prévention des conflitsd’intérêts.
L’article23alinéa1erdelaConstitutiondisposeeneffetque«lesfonctionsdemembreduGouvernementsontincompatiblesavecl’exercicedetoutmandatparlementaire,detoutefonctiondereprésentationprofessionnelleàcaractèrenationaletdetoutemploipublicoudetouteactivitéprofessionnelle».
Lesarticles4et11de la loin°2013-907du11octobre2013sur la transparencede laviepubliqueprévoientenoutreque,danslesdeuxmoissuivantleurentréeenfonctions,chacundesmembresduGouvernementainsiquelesmembresdescabinetsministérielsadressentunedéclarationdesituationpatrimonialeetunedéclarationd’intérêtsàlaHauteAutoritépourlaTransparencedelaViePublique.
Ils’ajouteenoutreàcedispositifune«Chartededéontologie»,présentéelorsduconseildesministresdu17mai2012,quechaqueministreaétéinvitéàsigner.
Cettechartes’articuleautourdescinqaxessuivants:«solidaritéetcollégialité»,«concertationettransparence»,«impartialité»,«disponibilité»,«intégritéetexemplarité».
Cependant,cetteChartededéontologieestdépourvuedetoutevaleurjuridique.
Parailleurs,ledispositifenvigueurnetientpascomptedetroissériesdedifficultés:▶lecontrôledelaconformitéaveclaloifiscaledesministres,ministresdéléguéset
dessecrétairesd’Etatavantleurentréeenfonctions;
▶lecumuldes fonctionsdemembresduGouvernementaveccellesdedirigeantsdepartis politiques, de mandataire financier d’un parti politique ou de groupementssusceptiblesderecevoirdesdonsoudescotisationsouvrantdroitàdéductionfiscale;
▶l’accèsdesreprésentantsd’intérêtsauxmembresduGouvernement.
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RECOMMANDATION N° 15
RENfORCER lEs OblIgATIONs DÉONTOlOgIquEs DEs MEMbREs Du gOuvERNEMENT ET lEs ÉTENDRE Aux plus hAuTs MAgIsTRATs
Concernant les membres du gouvernement, le groupe de travail estime souhaitable deréfléchirsurl’opportunité:
▶d’interdire le cumul des fonctions de membres du Gouvernement avec celles dedirigeantd’unpartipolitique;
▶d’insérerdanslaloin°2013-907du11octobre2013surlatransparencedelaviepubliquel’obligationfaiteauxministres,auxministresdéléguésetauxsecrétairesd’Etatde justifierde la régularitéde leursituationfiscale lorsde leurentréeauGouvernement;
▶d’établirunregistredesreprésentantsd’intérêtscommunauGouvernementetauParlement,etauConseilEconomiquesocialetenvironnemental.
Concernantles jugesconstitutionnels, legroupedetravailproposequelesplushautsmagistratsdupays(présidentdelaCourdecassation,Vice-présidentduConseild’État,Procureurs généraux…) remplissent également des déclarations de patrimoine etd’intérêtspoureux-mêmeset leursconjointsetqu’ellessoienttransmisesà laHauteAutoritépourlaTransparencedelaViePublique.Ilestproposéd’étendrecetteobligationauxmembresdedroitcommeauxmembresnommésduConseilconstitutionnel.
Legroupede travail proposequecetteobligationfiguredans le texteduprojetde loiorganiqueencoursdedébatàl’Assembléenationalesur«l’indépendanceetl’impartialitédesmagistrats».Ladroites’opposeàcetteproposition.Nousconsidéronsqu’elleestundesélémentsdelaRépubliqueexemplairequenoussouhaitonspromouvoiraunomdunécessairerenforcementdelaconfiancedescitoyensdanslajustice.
2.une immunité présidentielle réduite
L’article67de laConstitution telqu’ilaétémodifiépar la loiconstitutionnelledu23février2007disposequelePrésidentdelaRépublique
«(…)nepeut,durantsonmandatetdevantaucunejuridictionouautoritéadministrativefrançaise, être requis de témoigner non plus que faire l’objet d’une action, d’un acted’information,d’instructionoudepoursuite.Toutdélaideprescriptionoudeforclusionestsuspendu.Lesinstancesetprocéduresauxquellesilestainsifaitobstaclepeuventêtrereprisesou engagées contre lui à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la cessation desfonctions.»
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Ilressortdecesdispositions,qu’enl’état,lePrésidentnepeutêtrepoursuividevantunejuridictionmêmecivile.
RECOMMANDATION N° 16
suppRIMER l’IMMuNITÉ EN MATIèRE CIvIlE Du pRÉsIDENT
Le groupe a considéré que l’immunité en matière civile ne se justifie plus. En effet, lePrésident peut intenter des actions en justice mais ne peut pas être assigné devantune juridiction civile. Ainsi, le Président de la République peut demander la réparationd’un dommage sans possibilité pour la personne poursuivie de former une demandereconventionnelle.
Unprojetdeloiconstitutionnelleaétédéposéenmars2013quimodifiel’article67delaConstitution.Ilprévoitqu’enmatièrecivile,lePrésidentdelaRépubliquepourrafairel’objetd’uneactiondanslesconditionsdudroitcommundanslamesureoùellen’estdenatureniàcompromettrel’accomplissementdesachargeniàporteratteinteàladignitédesafonction.
LegroupedetravailsouscritàceprojetdeloiquiaétéadoptéenConseildesministresmaisquin’apuêtreadoptéparleParlementréunienCongrès,fautedemajorité.
RECOMMANDATION N° 17
pERMETTRE lEs pOuRsuITEs pÉNAlEs CONTRE lE pRÉsIDENT
Pourcequiconcernel’immunitépénale,dèslors,quelePrésidentdelaRépubliqueexercelaréalitédupouvoir,ilnesauraitêtrepénalementirresponsable.Ladistinctionentrelesactesaccomplisdansouendehorsdel’exercicedesfonctionsnese justifieenrien.LePrésidentdelaRépubliquepeuteneffet,êtreamenéàcommettre,dansl’exercicedesesfonctions, des actes qui constitueraient des infractions pénales s’ils étaient le fait d’uncitoyenordinaire.Lesrèglesconstitutionnellesactuellesn’auraientpaspupermettredejugerleMaréchalPétain.
LareconnaissanceparlaFrancedelacompétencedelaCourpénaleinternationale(CPI)affaiblitlaportéedecetteimmunitépénale.LePrésidentdelaRépubliquepourraitêtreeneffetêtretraduitdevantlaCPI,tandisqu’ilnepourraitpasl’êtredevantunejuridictionnationale.
Ildoittoutefoisbénéficierd’unecertaineimmunitédemanièreàéviterqu’unharcèlementpermanentlemettehorsd’étatd’exercersesfonctions.
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Legroupede travailproposedoncdedonnerà laHauteCour la facultéd’autoriser lespoursuitespénalescontrelePrésidentdelaRépublique,aprèsavoirprononcéladestitution.
Lestextesseraientdoncmodifiéscommesuit:
ARTICLE 67.«LePrésidentdelaRépubliquen’estresponsabledesactesaccomplisencettequalité,queselonlesmodalitésprévuesauxarticles53-2et68.
Enmatièrerépressive,ilnepeut,durantsonmandatetdevantaucunejuridictionouautoritéadministrativefrançaise,êtrerequisdetémoignernonplusquefairel’objetd’uneaction,d’unacted’information,d’instructionoudepoursuite.
En matière civile, une action mettant en cause le Président de la République ne peutêtre engagée pendant la durée de son mandat qu'après autorisation de la commissiondesrequêtesmentionnéeàl'article68-1,danslesconditionsfixéesparlaloiorganique.Les actions civiles engagées à son égard ne doivent être de nature ni à compromettrel'accomplissementdesacharge,niàporteratteinteàladignitédesafonction.
Les instances et procédures auxquelles l’application des deux précédents alinéasfait obstacle peuvent être reprises ou engagées contre lui à l’expiration d’un délai d’unmoissuivantlacessationdesfonctions.Lesdélaisdeprescriptionoudeforclusionsontsuspendusjusqu’àcettedate.»
ARTICLE 68.«LePrésidentde laRépubliquenepeutêtredestituéqu’encasdemanquementàsesdevoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat. La destitution estprononcéeparleParlementconstituéenHauteCour.
LapropositionderéuniondelaHauteCouradoptéeparunedesassembléesduParlementestaussitôttransmiseàl’autrequiseprononcedanslesquinzejours.LaHauteCourestprésidéeparleprésidentdel’Assembléenationale.Ellestatuedansundélaid’unmois,àbulletinssecrets,surladestitution.Sadécisionestd’effetimmédiat.
DanslecasoùlemanquementparlePrésidentdelaRépubliqueàsesdevoirsestconstitutifd’uncrimeoud’undélit,laHauteCourdéclenchelespoursuitespénales.»
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Dès 1981 et sans discontinuité jusqu’à ce jour, le PS s’est engagé à élargir le droit de vote aux étrangers pour les élections locales.
Il n’a pourtant eu de cesse que de repousser cette réforme, soit parce qu’au regard du calendrier politique, le moment n’était pas opportun, soit parce qu’il ne fallait pas faire le lit du FN qui a pourtant trouvé bien d’autres sujets pour étendre son influence, soit parce que la gauche n’obtiendrait pas la majorité des 3/5ème requise pour la faire adopter par le Congrès, annonçant ainsi un échec jamais vérifié.
Une démocratie plus égalitaire et intégratrice
CHAPITRE 4
35
LaCommissionaestiméindispensabled’avancerdemanièredécisivesurcettequestion.Unregardd’abordsurcettequestionauxsièclesprécédents.
La Constitution du 24 juin 1793 déclarait :«TouthommenéetdomiciliéenFrance,âgédevingtetunansaccomplis,toutétrangerdevingtetunans,qui,domiciliéenFrancedepuisuneannée,yvitdesontravail,ouacquiertunepropriété,ouépouseuneFrançaise,ouadopteunenfant,ounourritunvieillard,toutétranger enfin qui sera jugé par le Corps législatif avoir bien mérité de l’Humanité estadmisàl’exercicedesDroitsdecitoyenfrançais.»
Ellen’atoutefoisjamaisétéappliquée.
Ledroitdevotedesétrangersn’apasétéreconnudanssonprincipedepuis1799.
Eneffet,lesrésidentsétrangersn’ontpasétéinclusdanslesuffrageuniverselmasculindes plus de 21 ans adopté en 1848 par modifications successives, étendu en 1944 auxfemmes,puisen1946aux«indigènes»descolonieseten1974auxplusde18ans.
Depuis1981,l’élargissementdudroitdevoteauxétrangerspourlesélectionslocalesfaitl’objetdepromessesconstantesetréitérées,quinesesontjamaisconcrétisées.
Ledébataétérelancéaprès l’adoptionen1992duTraitédeMaastrichtquiébauche lanotiondecitoyennetéeuropéenneenaccordantledroitdevoteetd’éligibilitéauxrésidentsétrangers de pays membres de l’Union européenne aux élections européennes etmunicipales.Cetteclauses’estappliquéepourlapremièrefoisauxélectionseuropéennesde1994.
Enrevanche,ilafalluattendre2001pourqu’ellesoitappliquéeauxélectionsmunicipales,faisantainside laFrance ledernierpaysàprendre lesdispositionspour transposer ladirectiveeuropéennede1994précisantsesmodalitésd’application.Ilyalieudepréciserque lesrésidentscommunautairesnepeuventêtreélusmairesouadjointsaumaireetque,s’ilssontélusconseillersmunicipaux, ilsnepeuventpasparticiperàl’électiondessénateursquisontdesreprésentantsdelaNation.
Au 1er janvier 2014, 1 397 conseillers municipaux n’étaient pas français: 409 étaientbritanniques,323belges,177portugais.Lenombredecandidatsétrangersaaugmentélorsdesélectionsmunicipalesdemars2014parrapportauxélectionsprécédentesde2008.Laprésencedecesconseillersmunicipauxétrangers,ressortissantsdepaysmembresdel’Unioneuropéenne,nefaitpasdébat.Elleestd’ailleurssansdouteignoréedebeaucoupdeFrançais.
Ilconvientdoncdes’interrogersurlespectreduvotedesétrangersvenantdepaystiersauqueladhéraienten201160%desFrançais,cettemêmeproportionyétantopposéeen2014(sondageOdoxaITELEetLeParisien/Aujourd’huienFrance).
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Comme l’a justement relevéPatrickWeil,«il yaunpeuplusde3millionsd’étrangersen France qui n’ont pas demandé à être Français, c’est leur droit. Les étrangerscommunautaires(venantdel’Unioneuropéenne)ontdéjàledroitdevote.Or,ilsontsouventpeuoumoinsderelationavec laFrancequedesétrangersnoneuropéens,quiyviventdepuisvingtouquaranteans,parlentlefrançaisetpaientleursimpôts.Ledroitdevotedesétrangersrésidentsauxélectionsmunicipalesestdoncunequestiond’égalitéetdejustice»
SilesFrançaissonthésitantssurcettemesure,c’estenpartieparcequ’ilsimaginentdescommunautés étrangères constituer des listes entre eux, voire des émissaires de Daechinvestir les conseils municipaux. De surcroît, ils sont conscients que beaucoup de cesétrangerssontoriginairesdepaysquiignorenttoutdufonctionnementdémocratique.Iln’ajamaisétéorganisésurcettequestiondevraidébatpublic,permettantdeledéconnectertotalementdeceluisurl’immigrationauquellesopposantsfontsystématiquementréférence.Pourtant, il ne s’agit ni de faire voter n’importe quel étranger nouvellement arrivé, ni defavoriserunvotecommunautariste.Descritèresdoiventnécessairementêtrefixés.
RECOMMANDATION N° 18
DONNER lE DROIT DE vOTE ET lE DROIT D’êTRE ÉlIgIblE à DEs REssORTIssANTs DE pAys TIERs AyANT uN lIEN RÉEl AvEC lA fRANCE
Parler du vote des étrangers n’a pas de sens, les ressortissants des pays de l’UnionEuropéennen’étantpasconcernésetceuxdespaystiersn’ayantnaturellementpastousvocationàvoterouàêtreélus.
Cescritèresquiseraientcumulatifsdevraientêtredéfinisdesortequenepuissentêtreélecteursetéligiblesauxélectionsmunicipalesquedesressortissantsdepaystiersayantunlienréelaveclaviedelacité:
▶ceux titulaires d’une carte de séjour, ce qui exclut les étrangers en situationirrégulièreetceuxquin’ontqu’uneautorisationprovisoiredeséjour;
▶ceux titulaires d’une carte de résident ou d’un certificat de résidence (pour lesAlgériens) de 10 ans, ce qui exclut les étrangers détenant une carte de séjourtemporairede1andontlapérennitédelarésidenceenFrancen’estpasgarantie.
Ilconvientderappelerqu’auxtermesdel’articleL.314-8ducodedel’entréeetduséjourdesétrangersetdudroitd’asile,lacartede10ansnepeutêtredélivréequ’àl’étrangerqui justified’unerésidence ininterrompued’aumoinscinqannéesenFrance,conformeauxloisetrèglementsenvigueur,quidisposederessourcesstablesetsuffisantespoursubveniràsesbesoinsetqueladécisiond’accorderouderefusercettecarteestpriseparlepréfetentenantcomptedesfaitsquel’étrangerpeutinvoqueràl’appuidesonintentiondes’établirdurablementenFrance(notammentfamilleenFrance,insertionprofessionnelle).
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À l’occasionde l’instructionde lademande, ilestnotammentvérifiéque l’intéressén’apasdecasierjudiciaire,qu’iln’apasdedettefiscaleetc.Enrésumé,accèdeàcettecartel’étrangerdontlepréfets’estassuréqu’ilrespectelesloisdelaRépublique.
Lacartede10ansestparailleurs,enapplicationdel’articleL.314-11ducodeprécité,délivréedepleindroit,sousréservedelarégularitéduséjourà9catégoriesd’étrangersquionttousdesattachesfortesaveclaFrance(parexemple,enfantétrangerd’unFrançais,réfugiépolitiqueetc.).
D’autrepartetàl’instardesrésidentscommunautaires,lesétrangersressortissantsdepaystiersseraientexclusdesfonctionsdemaireoud’adjointaumaireet,encasd’électioncommeconseillermunicipal,interditsdeparticiperàl’électiondessénateurs.
D’autrespropositionsontétéavancées,maisellesdoiventêtreécartées.
Ilaainsiétéproposédes’inspirerduRoyaumeUniquiaccordeledroitdevoteauxélectionsmunicipalesauxseulsressortissantsduCommonwealthenleréservantauxressortissantsdes57Etatsmembresdel’Organisationinternationaledelafrancophonie(OIF).
Or,leCommonwealthresteencoreaujourd’huiunepuissanteentitégéopolitiqueauseindelaquelleles53Étatsquilecomposentsontunislesunsaveclesautresvialeursouverain,actuellementlareineElisabethII,porteurdutitrepourchacund’eux.Enrevanche,l’OIFpoursuitunbut trèsdifférent:ellechercheàdonnercorpsàunesolidaritéactiveentreles80Étatsetgouvernementsquilacomposent(57membreset23observateurs)etseprésente comme une communauté de destin consciente des liens et du potentiel quiprocèdentdupartaged’unelangue,lefrançais,etdesvaleursuniverselles.
LacomparaisonentreleCommonwealthetl’OIFn’estdoncpaspertinente.
Il a également été proposé de n’accorder que le droit de vote, à l’exclusion du droitd’éligibilité.
Cettedemi-mesureaprès30ansd’attenteseraitextrêmementchoquante,tantentermesdejusticequed’équité.
Enpremierlieu,lerisquequelesétrangersressortissantsdepaystiersdirigentlapolitiqued’unecommuneestinexistant.Eneffet,toutcommelesétrangersdel’UnionEuropéenne,ilsnepourraientpasaccéderauxfonctionsdemaireoud’adjointaumaire.
Ensecondlieu,l’idéedeladissolutiondelacitoyennetéeuropéennen’estdestinéequ’àfairebarrageàcetteréforme.
Il faudrait d’abord démontrer qu’il existe une citoyenneté européenne, concept dont lemoinsqu’onpuissedireestqu’ilaencorebeaucoupdecheminàfaire.
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Ensuiteetcommel’écritjustementPatrickWeil,ilconviendraitd’établirdefaçoncertainequelesressortissantsdel’UnionEuropéennesontplusliésàlaFrancequelesétrangersvenantdepaystiersqui,souventcontrairementauxpremiers,viventenFrancedelonguedate,connaissentbienlesinstitutionsdelacommunedanslaquelleilshabitentdepuisdesannéesetdontl’achèvementdel’intégrationsupposequ’ilspuissentêtreélusauseinduconseilmunicipal.
Pourrésumer,soitledroitdevotedesétrangersayantdefortesattachesaveclaFranceestinstituésansautresréservesquecellesdestinéesàpréserverlasouveraineténationaleetsansfauxsemblants,soitlePSal’honnêtetéd’yrenoncerpurementetsimplementcarleprixpolitiqueàpayerluiparaîttropimportantparrapportauxeffetspositifsescomptés.
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DEUXIÈMEPARTIE
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ÉQUILIBRER LES POUVOIRS
ÉQUILIBRER LES POUVOIRS
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Le groupe de travail considère que l’un des maux de la Ve République résulte de l’affaiblissement du rôle et de la place de l’Assemblée nationale au profit d’une part de l’exécutif et d’autre part du Sénat.
Une représentation parlementaire renforcée
CHAPITRE 1ER
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1.Des députés élus avant le président
Laloiorganiquedu20décembre1995disposequelespouvoirsdel’Assembléenationaleexpirentlepremiermardid’avrildelacinquièmeannéequisuitsonélection.Cetteloi
organiqueaétémodifiéeparcelledu15mai2001quifixeladated’expirationdespouvoirsdel’Assembléenationaleletroisièmemardidumoisdejuindelacinquièmeannéequisuitsonélection.
Cettedispositionrevient,danslapratique,àorganiserlesélectionslégislativespeuaprèsl’électionprésidentielle.Venantaprèsl’électionprésidentielle,lesélectionslégislativesontainsiétéramenéesàunefonctionsubsidiairedevotedeconfirmation.
Denombreusesréservessesontexpriméessurcecalendrierdepuissonadoptionquifaitdel’électionprésidentiellelemomentdécisifdelaviepolitiquefrançaisedanslamesureoùelleconfèreauprésidentunemajoritédedéputéscenséslesouteniretfaitdoncdeluil’acteurcentraldesinstitutions.
Ilenrésultequelaprésidentialisationdurégimes’estencoreaccentuéedufaitdecetteréformecommeentémoignelapratiquedupouvoirdeNicolasSarkozyquiaconsidéréquesonPremierministren’étaitqu’uncollaborateur.
Selon legroupede travail, les raisonsqui,à l’époque,ontconduitàcette réformesontsurtoutliéesausouhaitalorsexpriméparlesprincipalesforcespolitiquesd’empêcherdenouvellescohabitationsetd’éviterainsiunpouvoirfragmenté.
Àl’expériencedestroisquinquennatsquisontintervenusdepuislaloiorganiquede2001,ilapparaîtque l’inversionducalendrieracontribuésignificativementà laconcentrationexcessivedespouvoirsetàlaprésidentialisationdurégime.Certes,desinitiativesontétéprises par François Hollande pour en limiter les aspects les plus symboliques commela suppression du délit d’offense au Président ou l’engagement pris de respecter lesdispositions de l’article 20 de la Constitution, mais, dans les faits, tous les problèmesremontentauPrésidentquicontinuededéciderdetout.
Cette domination se traduit au moins de trois manières. En premier lieu, la majoritéparlementaire est celle que le Président a largement contribué à faire élire à la suitedesonélection.Endeuxième lieu, il choisit lePremierministreet leGouvernementeta lapossibilitéde les révoquer.En troisième lieu, il a la tentationconstantesousde laVeRépublique,de faireduParlementunechambred’enregistrement.Onauranotéquecettedominationn’empêchepaslestensionsentrelesdifférentspouvoirsinstitués,quecesoitentrelePrésidentdelaRépubliqueetlePremierministreouentrel’exécutifetleParlement.
Certes,ilsemblealéatoiredeconsidérerquelesimplefaitd’élirelesdéputésavantlechefdel’Étatsuffiraitàrestaurerlafonctionparlementaire.L'effacementduParlementn'est
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pasnéde laseule instaurationde l'électionduPrésidentde laRépubliqueausuffrageuniversel direct en 1962 ni de l’inversion du calendrier. Il procède d’un contexte plusglobalquitouchenonseulementnotreRépubliquemaisaussi,pluslargement,touteslesdémocratiesoccidentales.
Il existe cependant une différence cruciale entre la France et les autres démocratiesparlementaires.Danscelles-cilepouvoirestexercéparunorganeexécutifresponsable,legouvernement,quipeutêtrerévoquéàtoutinstantparlesreprésentantsdupeuple.Àl’inverse,enFrance,lepouvoirestconcentrédefaitentrelesmainsduPrésidentquin’estpasresponsabledevantlareprésentationnationale.
RECOMMANDATION N° 19
ÉlIRE lEs DÉpuTÉs uN MOIs AvANT l’ÉlECTION pRÉsIDENTIEllE
Le groupe de travail propose donc de revenir sur la réforme de 2001 et de procéder àl’électiondesdéputésaumoisunmoisavantl’électionprésidentielle.
Legroupedetravailabienconsciencequelefaitdefaireprécéderl’électionprésidentielleparl’électionlégislativerendmoinsimprobableunenouvellecohabitationsurtoutencasdedissolution,dedestitutionoudedémission.Cependant,cettemodificationducalendrierélectoralpourrait,comptetenudelatripartitiondelaviepolitiquefrançaise,conduireàunesituationquineseraitniunecohabitationopposantlamajoritéparlementaireauPrésident,niunesoumissiondelamajoritéparlementaireàcelui-ci.
Le groupe de travail, hostile à l’hyper présidentialisation voit dans l’hypothèse d’uneabsencedemajoritéparlementairedesoutienauPrésident,unealternativepossibledanslaconstructiond’unemajoritérépublicaine.
2.un gouvernement qui procède de l’Assemblée nationale
Afin de renforcer le lien entre le Premier ministre, le gouvernement et l’Assembléenationale,ilestproposéderendreobligatoirelerecoursàlaprocéduredel’article49,
al.1delaConstitutionauxtermesdelaquelle:
«Le Premier ministre, après délibération du Conseil des ministres, engage devantl’Assemblée nationale la responsabilité du Gouvernement sur son programme ouéventuellementsurunedéclarationdepolitiquegénérale.»
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RECOMMANDATION N° 20
RENDRE l’usAgE DE l’ARTIClE 49-1 OblIgATOIRE
Enl’état,l’usagedecesdispositionsn’estqu’unesimplefaculté.L’entréeenfonctionduPremierministreetduGouvernementest,enapplicationdel’article8delaConstitution,immédiateetnedépendpasd’uneinvestiture.AfinderenforcerlaplaceduParlement,ilestproposéderétablirune investitureobligatoire. Ilsuffitpourcelad’imposer,parunerévisiondel’article49,alinéa1er,undélaiquipourraitêtred’unmoismaximum.
Les Premiers ministres qui ont fait usage de l’article 49, al. 1 de la Constitution ontgénéralementprésentéunedéclarationdepolitiquegénérale.Ilestproposédesupprimerdansletextelafacultédeprésenterunedéclarationdepolitiquegénéraleetdeneretenirquecelledeprésenterunprogramme.
Afindelimiterlerisquedevacancedupouvoir,ilestproposéqueledécomptedesvotessefassedanslesconditionsprévuesparl’article49-2c’est-à-direquenesoientdécomptésque lesseulsvotesnégatifsetqu’ilestainsi instauréuneprésomptiondeconfiancedel’Assembléenationaleàl’égardduGouvernement.
L’article49-1seraitdoncainsimodifié.«LePremierministre,aprèsdélibérationduConseildesministres,engage,dans un délai de un mois, devant l’Assemblée nationale la responsabilité du Gouvernement sur sonprogramme;
Levotenepeutavoirlieuque48heuresaprèsl’engagementdelaresponsabilité.Seulssontrecenséslesvotesenfaveurdurefusd’investiture».
3.un rôle renforcé pour l’Assemblée nationale dans la procédure de révision constitutionnelle
Danslecadredelaréflexionsurlerééquilibragedesinstitutionsenfaveurdel’Assembléenationale, ilaparuopportunàlaCommissiondes’interrogersurlerôledechaque
chambreetduPrésidentdelaRépubliquedanslaprocédurederévisionconstitutionnelle.
Laprocédurederévisionde laConstitution, tellequ’elleestprévuepar l’article89C,sedécomposeentroisphases.
D’abord,l’initiatived’unerévisionconstitutionnelleappartientconcurremmentauxdéputés,auxsénateursetauPrésidentdelaRépublique(surpropositionduPremierministre).Cettepartiede laprocédurenesuscitepasdedébatparticulieret,surcepoint, lestatuquosemblelégitime.
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Ensuite vient la phase parlementaire. Une fois qu’un projet ou une proposition de loiconstitutionnelleaétédéposé,celui-cidoitêtre,enapplicationdel’article89C,«votéparlesdeuxassembléesentermesidentiques»selonlaprocédureétablieparl’article42C.
Enfin,l’adoptiondéfinitivedelarévisionconstitutionnellesefaitparréférendumconvoquéparlePrésidentdelaRépublique.Cependant,dansl’hypothèseoùlarévisionaétéintroduitepar voie de projet de loi constitutionnelle, le Président peut préférer au référendum laconvocationduCongrès.Danscecas,leprojetderévisionn’estapprouvéques’ilréunitlamajoritédestroiscinquièmesdessuffragesexprimés.
Ainsi,larévisionseheurteactuellementaudoubleobstacled’unéventuelblocageparleSénatetd’unéventuelrefusduPrésidentdelaRépubliquedeconvoquerleCongrèsoudesoumettreletexteàreferendum.
Pouryremédier,legroupedetravailproposedeuxorientations:
RECOMMANDATION N° 21
suppRIMER lE vETO sÉNATORIAl
Encasd’accordentrelesdeuxchambres,legroupedetravailneproposepasdemodifierlaprocéduredel’article89C.
Parcontre,danslecasoùlesdeuxchambresneparviennentpasàs’accordersuruntexteidentique, le groupe de travail propose de permettre à l’Assemblée nationale d’avoir lederniermotetdes’inspirerde laprocédure législativeordinaireprévueà l’art45de laConstitution.
Cettepositionesttraditionnelleàgauche.ElleanotammentétéproposéedansleRapportPouruneRépubliquenouvelle!remisen2007parJean-PierreBelàlacandidatesocialisteSégolèneRoyal.Danslemêmeesprit,maisnevisantpasspécifiquementlevétosénatorial,leComitéconsultatifpourlarévisiondelaConstitutioninstituéparFrançoisMitterrandetprésidéparleDoyenVedelaproposélapossibilitédesoumettreauréférendumunprojetouunepropositiondeloiconstitutionnelle,quiauraitétéapprouvéparl’unedesassembléesàlamajoritédestroiscinquièmesdessuffragesexprimés.Cetteidéeaensuiteétérepriseparle«ComitéBalladur».
Ilconvientnéanmoinsdemaintenirlaspécificitédelaloiconstitutionnelleennefacilitantpas,outremesure,lapossibilitéderéviserlaloifondamentale.Àcettefindeuxhypothèsesontétéémises.LapremièreconsisteàreprendrelespropositionsfaitesparlesComitésVedelpuisBalladuren instaurantun votequalifiéauseinde l’Assembléenationale.Lasecondeconsisteàprévoir,danslecadreduréférendumportantadoptiondéfinitivedelarévisionconstitutionnelle,lamiseenplaced’unquorumdeparticipationélectorale.
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Le groupe de travail propose d’une part que le projet de révision ne soit approuvé parl’Assembléenationaleques’ilréunitlamajoritédes3/5dessuffragesexprimésetd’autrepartqueleprojetsoumisàréférendumnepuisseêtreadoptéqu’avecunquorumde50%desinscritsafindedonneràlarévisionconstitutionnelleunevéritableassisepopulaire.
RECOMMANDATION N° 22
suppRIMER lE « vÉTO pRÉsIDENTIEl »
LePrésidentdelaRépubliquepeutaujourd’huis’opposeràuneréformeconstitutionnelleenrefusantdelamettreàl’ordredujourduCongrèsouenconvoquantunréférendum.Letexteconstitutionneln’estpasclairsurlepointdesavoirs’ils’agitd’uneobligationousimplementd’unefaculté.Néanmoins, lapratique institutionnellemontrequeplusieursPrésidents ont décidé de ne pas aller au terme d’une procédure de révision qui avaitpourtantpassélestadedelaphaseparlementaire.CelafûtnotammentlecasdelaréformeduquinquennatproposéeparGeorgesPompidouquin’apasétésoumiseauCongrèsalorsqu’elleavaitétévotéeparl’AssembléenationaleetleSénat.Legroupedetravailpropose,quelesassembléessoientd’accordounonsurleprojetoulapropositiondeloiportantrévisionconstitutionnelle,qu’untexteadoptésoitparlesdeuxchambressoitparlaseuleAssembléenationaledanslecadredelaprocéduredel’article45C, soit obligatoirement soumis par le Président de la République au Congrès ou auréférendumdanslesconditionsdéterminéesàl’article45Cetàlamajoritéqualifiée.
Renforcerlerôledel’Assembléenationaleenluipermettantdedépasseruneoppositiondu Sénat, si elle se manifeste, s’inscrit dans la tradition de la gauche. Permettre àl’Assemblée,grâceàunvoteàlamajoritéqualifiéedecontinueruneprocédurederévisionconstitutionnellerempliraitcetobjectiftoutenincitantlepeupleàparticiperpleinementàl’élaborationdelaloiconstitutionnelle.
4.un travail parlementaire modernisé
Les députés élus à l’issue des élections législatives de 2017 ne pourront plus cumulerleur mandat parlementaire avec une quelconque participation à un exécutif local; cechangement profond aura des conséquences certaines sur les méthodes de travail duParlement.
Par ailleurs, la réforme constitutionnelle de 2008 a significativement modifié certainsaspectsdutravailparlementaire(examendutextedelacommissionenséance,ordredujourpartagéetc.)maissansforcémententirertouteslesconséquences.
Ilesttempsd’acheverlamodernisationdutravailparlementaireenlerendantplusefficacetoutenrenforçantlespouvoirsdesparlementaires.
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RECOMMANDATION N° 23
RÉfORMER lA pROCÉDuRE lÉgIslATIvE
L’article45delaConstitutionquifixelaprocédurelégislativen’aquetrèspeuévoluédepuis1958etsesgrandsprincipesn’ontpasbougé:horsprocédureaccélérée,deux lecturesdanschaquechambreavantéventuelleconvocationd’unecommissionmixteparitaire;encasd’échecdelaCMP,deuxnouvelleslecturesavantunelecturedéfinitiveparl’Assembléenationale.
L’«environnement»constitutionneldel’article45aluiconsidérablementévolué:unordredujourdésormaispartagéquilaissebeaucoupmoinsdeplacesauxprojetsdeloiportésparleGouvernement;unediscussionenséancepubliquequiportesurletexteélaboréparlacommission;unencadrementdelaprocédurepardesdélaisdontseull’engagementdelaprocédureaccéléréepermetdes’exonérer.
Au final, on aboutit à une procédure législative excessivement longue puisqu’en casd’échecde laCMPetsansprocédureaccélérée,sept lecturesserontnécessairesavantl’adoptiondéfinitive.Etsil’onprendencomptel’examenencommission,quiestdevenuunemini-séancepublique(présenceduGouvernement,publicitédesdébats),l’onpeutmêmeestimerquecesont13 lecturesquisontdésormaisnécessairescequiestassurémentexcessifmêmepourlesplusferventsdéfenseursdelanavetteparlementaire.Ceciconduitd’ailleursleGouvernementàfaireunusageimmodérédelaprocédureaccélérée.
Legroupedetravails’estdoncprononcépouruneréformedelaprocédureparlementairequiconcilietroisobjectifs:lemaintiend’unenavetteparlementaire,facteurd’unecertainequalitédelaloi;laréductiondunombredelecturessuccessivesafind’accélérerletravailparlementaire;lerenforcementdesgarantiesentermesdedélaid’examenpourlesparlementaires.
Decestroisobjectifsdécoulentlespropositionssuivantes:▶considérer que la première étape de l’examen du projet ou de la proposition de
loi est un débat général, sans dépôt d’amendements. Il précède la saisine de lacommissioncompétentedel’uneoul’autredesChambres;
▶prendreacteque lepassageencommissionconstituedésormaisune lectureensoietétablirquelaprocédurededroitcommunestunelectureparchambreavantl’éventuelleconvocationd’uneCMP;
▶permettreauxdeuxconférencesdesprésidentsdedemanderque,pourcertainstextesimportants,deuxlecturessoientprévues;
▶dans cette logique, la procédure accélérée ne servirait plus qu’à s’exonérer desdélaisd’examenetilconviendraitalorsdelimiterparsessionlenombredetextespouvantenbénéficier(3ou5textesparexemple);
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▶ledélaiavantl’examenparlapremièrechambreseraitportéàhuitsemainesalorsqu’ilestaujourd’huidesixsemaines;
▶en cas d’échec de la CMP, l’étape des nouvelles lectures serait supprimée et lederniermotseraitdirectementdonnéàl’Assembléenationale.
RECOMMANDATION N° 24
CONsERvER lEs OuTIls Du pARlEMENTARIsME RATIONAlIsÉ TOuT EN AssOuplIssANT l’ARTIClE 40
Concernant les outils du parlementarisme rationalisé (article 49-3C, vote bloqué,recevabilitéfinancière),legroupedetravailaconsidéréquel’éventuelleintroductiond’unedosedeproportionnelledevaitsecombineraveclesoutiendel’actiongouvernementale.
Dans cette hypothèse, le groupe de travail ne juge pas nécessaire d’aller plus loin quelaréformede2008sur l’encadrementdu49-3oud’introduireunelimitationdunombred’utilisationsduvotebloquéparleGouvernement.
Surlarecevabilitéfinancièredesinitiativesparlementaires(article40delaConstitution),legroupedetravailaparcontreestiméutile,sansenremettreencauseleprincipe,uneévolutiondelaprocédure:qu’aucontrôlesystématiqueapriori,audépôt,soitsubstituéeunecapacitéd’oppositionduGouvernementàquireviendrait lafacultédes’opposer,oupas,auxinitiativesparlementairescoûteusespourlesfinancespubliques.Celadonneraitune plus grande marge de manœuvre pour les parlementaires tout en conservant au
Gouvernementlapossibilitédes’opposerauxinitiativeslespluscoûteuses.
RECOMMANDATION N° 25
AugMENTER lEs MOyENs DE CONTRôlE Du pARlEMENT
Les activités de contrôle du Parlement se sont considérablement renforcées depuisunedizained’annéeset ilestprobablequelafinducumuldesmandatspermettraauxparlementaires d’y consacrer plus de temps encore. D’autant que l’introduction desemainesdeséancepubliqueconsacréesaucontrôledonneuneplusgrandevisibilitéàcetravail.
Le groupe de travail a d’abord souhaité que se poursuive le rapprochement entre leParlementet laCourdescomptesquiavocationàdevenir le«brasarmé»ducontrôleparlementaire.
Il a ensuite préconisé le renforcement des pouvoirs des commissions d’enquête ensupprimant l’interdiction qui leur est faite actuellement d’enquêter sur des faits dont
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l’autorité judiciaire est saisie. Afin de renforcer leurs pouvoirs, il serait nécessaire deréfléchir à modifier l’article 432-13 du code pénal. Dans certaines hypothèses limitéesd’enquêteetd’investigation, l’introductiond’undélit deparjuredevant lescommissionsparlementairesdansnotrearsenal répressifpermettraitdeconsidérablement renforcerl’autorité et l’influence des commissions parlementaires. Comme le soulignait GuyCarcassonne,leParlementsaura«commecelasefaitàl’étranger,s’abstenird’empiétersur les attributions de l’autorité judiciaire, tout en se livrant à un travail utile avec sesmoyensetsalégitimité».
RECOMMANDATION N° 26
suppRIMER lA RÉsERvE pARlEMENTAIRE
Legroupedetravails’estprononcépourlasuppressiondelaréserveparlementaire,lessommesainsiéconomiséespouvantêtreutilementaffectéesàunfondsdesoutienàlavieassociative.
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Plutôt que de procéder à une mise en cause des pouvoirs présidentiels, il apparaît plus opportun au groupe de travail, d’une part, de se concentrer sur un équilibre des relations entre le Président de la République et le Premier ministre concernant le pouvoir de nomination, d’autre part, de permettre au pouvoir législatif d’être mieux associé à certaines des décisions prises par le Président de la République.
Un pouvoir exécutif mieux contrôlé
CHAPITRE 2
53
1.le régime des nominations par l’exécutif clarifié
L’article13,alinéa2delaConstitutiondisposequelePrésident«nommeauxemploiscivilsetmilitairesdel’État».Enson3ealinéa,l’articledisposeque:«Lesconseillersd’Etat,
legrandchancelierdelaLégiond’honneur,lesambassadeursetenvoyésextraordinaires,lesconseillersmaîtresàlaCourdescomptes,lespréfets,lesreprésentantsdel’Etatdanslescollectivitésd’outre-merrégiesparl’article74etenNouvelle-Calédonie,lesofficiersgénéraux, les recteurs des académies, les directeurs des administrations centrales,sontnommésenConseildesministres.»Cettelisteestétendueparl’ordonnancedu28novembre 1958 portant loi organique concernant les nominations aux emplois civils etmilitairesdel’Etatpriseenapplicationdu4ealinéadel’article13.L’ordonnanceprécitéeprévoitégalementquesontnommésenConseildesministreslesemploisdedirectiondanslesétablissementspublics,lesentreprisespubliquesetlessociétésnationalesquandleurimportancejustifieinscriptionsurunelistedresséepardécretenconseildesministres.
Ainsi, il ressort de la combinaison de ces textes, que le périmètre des emplois dont lanominationdoitêtrefaitepardécretenConseildesministresestétablilui-mêmeparundécretenConseildesministres.Sibienqu’aucunenominationn’échappeauPrésidentde laRépubliqueetque lepouvoirdenominationduPremierministrequiestpourtantexplicitementprévuparl’article21,alinéa1delaConstitutionestdevenuvirtuel.
RECOMMANDATION N° 27
RÉsERvER Aux EMplOIs MIlITAIREs ET CEux RElEvANT DE lA CONDuITE DE lA DIplOMATIE lA NOMINATION pAR DÉCRET EN CONsEIl DEs MINIsTREs
Legroupede travailsouhaiteque lePremierministrepuisseexercereffectivementsonpouvoir de nomination et qu’en conséquence la liste des emplois concernés par unenominationenConseildesministresoupardécretprésidentielsoitprécisémentétablieparlaConstitutionsansqu’ilsoitpossible,commeactuellement,d’ydéroger.Legroupedetravailproposequel’article13delaConstitutionsoitmodifiédetellesortequeseulslesemploismilitairesetceuxrelevantdelaconduitedeladiplomatiesoientnomméspardécretenConseildesministres.
La mise en œuvre de cette nouvelle répartition nécessite de réviser l’article 13 de laConstitutionetd’abrogerlaloiorganiquedu28novembre1958.
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RECOMMANDATION N° 28
RENfORCER lEs pOuvOIRs DE CONTRôlE Du pARlEMENT suR lEs NOMINATIONs
LegroupedetravailaégalementsouhaitérenforcerlecontrôleexercéparleParlementsurlesnominations.Lesystèmeactuel,introduitparlarévisionconstitutionnellede2008prévoitqu’«Uneloiorganiquedéterminelesemploisoufonctions,autresqueceuxmentionnésautroisièmealinéa,pourlesquels,enraisondeleurimportancepourlagarantiedesdroitsetlibertésoulavieéconomiqueetsocialedelaNation,lepouvoirdenominationduPrésidentde la République s’exerce après avis public de la commission permanente compétentedechaqueassemblée.LePrésidentdelaRépubliquenepeutprocéderàunenominationlorsquel’additiondesvotesnégatifsdanschaquecommissionreprésenteaumoinstroiscinquièmesdessuffragesexprimésauseindesdeuxcommissions.Laloidéterminelescommissionspermanentescompétentesselonlesemploisoufonctionsconcernés.»(art.13,alinéa5delaConstitution)
D’unepart, legroupede travailproposequ’enapplicationde la recommandationn°27relativeàl’exerciceparlePremierministredesonpouvoirdenominationl’article13alinéa5soitmodifié.
D’autrepart,ilestproposéquetouteslesnominationsfaitesparlePremierministresoientsoumises pour approbation au Parlement à l’exception d’une liste d’emplois qui devraêtredéterminéeparuneloiorganiqueetquiseracomposéedesemploisreprésentantlegouvernementet/ouparticipantdirectementàlamiseenœuvredesapolitique(directeursd’administrationcentrale,préfets,recteurs,directeursd’Agencerégionaledesanté).Pourles autres, le pouvoir de nomination du Premier ministre s’exerce après avis public dela commission permanente compétente de chaque assemblée. Nous proposons que lanominationsoiteffectivedèslorsqu’ellerecueillelamajoritédessuffragesexprimésauseindelacommissioncompétentedel’unedesassemblées.
Cettepropositionpourraégalementêtreétendueauxnominationsfaitesparlesprésidentsdesassemblées.
2.Des pouvoirs présidentiels mieux encadrés
RECOMMANDATION N° 29
AMÉNAgER lEs CONDITIONs DE MIsE EN œuvRE DE l’ARTIClE 16
Lagaucheatoujoursprônésasuppressionetenadénoncél’exercice.Certainsmembresdu groupe s’inscrivent dans cette tradition. D’autres membres du groupe de travailestiment quant à eux que ce dispositif peut s’avérer utile notamment face un contexte
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internationalincertainetauxmenacesterroristes.Dansl’hypothèsed’unmaintiendecetarticle, ilestcependantproposéunaménagementdesconditionsdesamiseenœuvre.Ilconvientdedistinguersondéclenchementdesonexercice.Ainsi, legroupede travailproposequ’ilrevienneauBureaudel’Assembléenationale,surpropositionduPrésidentde laRépublique,dedéclencher l’article16de laConstitution. (Dans l’hypothèsed’unecohabitationpeuprobabledepuislequinquennat,maispasimpossiblepuisquelePrésidentpeut toujoursdissoudre l’Assembléenationale,et voir l’oppositiongagner lesélections:leBureaurisquedesystématiquementrefuserlapropositiondemiseenœuvrepourdesmotifspoliticiens.)LePrésidentdelaRépubliquedemeureraitl’autoritécompétentepourexercerlespouvoirsprévusparl’article16delaConstitution.
RECOMMANDATION N° 30
ENCADRER lEs CONDITIONs D’INTERvENTION DEs fORCEs ARMÉEs
Aux termes de l’article 35 de la Constitution, l’engagement d’une intervention militairerelèvedelacompétenceduPrésidentdelaRépublique.LeGouvernementdoitcependanteninformerleParlementenapplicationdel’article35delaConstitution.
De plus, il appartient au Gouvernement, depuis la révision de 2008, de solliciter duParlementl’autorisationdeprolongeruneinterventionau-delàd’undélaidequatremois.Nousrecommandonsderéduirecedélaiàsoixantejours.
Il convient cependant de relever qu’une fois l’autorisation du Parlement obtenue, leGouvernementn’apasà lasolliciterdenouveauquelquesoit ledélaide l’interventionmilitaire.Ainsi,danslecadred’uneinterventionmilitairequiseprolongerait,leParlementneseprononceraitplus.Cettesituationn’estpassatisfaisante.ElleconduitàunréeldéficitdecontrôledémocratiquesurunaspectessentieldelapolitiqueétrangèredelaFrance.De plus, les durées des opérations se sont au cours des dernières années réduites etl’engagementdesforcesarméesadefortesrépercussionsbudgétaires,quidoiventêtresuivies et contrôlées par le Parlement. Ces exigences doivent être combinées avec lesnécessitéesopérationnelles.
Il semble donc souhaitable d’insérer dans la Constitution une disposition obligeant leGouvernement à revenir régulièrement devant le Parlement, afin de l’informer dans lecadre d’un débat public de la situation militaire et de solliciter, à intervalles réguliers,l’autorisationdeprolongerl’interventionmilitaire.
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RECOMMANDATION N° 31
pERMETTRE Au pARlEMENT DE MIEux CONTRôlER lA CONDuITE DE lA pOlITIquE DIplOMATIquE
LeComitéBalladuravaitproposéquelescommissionscompétentesdesassembléesou,selon lecas, leurprésident, soient tenus informésdesnégociationsencoursetque leParlement puisse également adopter, en matière internationale, des résolutions. Cettepropositionquin’appellepasdemodificationdelaConstitutionaétérepriseparlegroupedetravail.
Enoutre,legroupedetravailsouhaiteégalementque,danslecadredelapréparationdesConseilseuropéens,lePrésidentdelaRépubliquepuisseêtreauditionnéparl’Assembléenationale.
3.Des Autorités administratives indépendantes plus légitimes
LesAutoritésadministrativesindépendantes(AAI)sontdescommissionsgénéralementcomposéesdehautsfonctionnairesetdespécialistes.Ellesprésententtroiscaractères:
▶lelégislateur(oulepouvoirconstituant)leuraassignéunemissionparticulière.
▶ellebénéficientd’uneassezlargeautonomieàlafoissurleplanorganique(leursmembresnepeuventpasêtrerévoquésencoursdemandat)etsurleplanfonctionnel(ellen’ontpasàsuivredesinstructionshiérarchiquespourl’accomplissementdeleurmission).
▶ellesdisposentdepouvoirslimitésmaisnonnégligeables(consultationobligatoiredanscertainscas,pouvoirréglementairesurdesquestionsponctuelles,pouvoirdeprononcercertainessanctionsadministrativesetc).
Onacommencéàencréeraudébutdesannées1970.Depuisellessesontmultipliées.On en compte aujourd’hui au moins une cinquantaine. Mais leur existence suscite descontroverses.D’uncôté,lesAAIposentproblèmeauregarddelathéoriedémocratique:selon cette théorie, le Parlement contrôle les administrations par l’intermédiaire duGouvernementquiestleurchefhiérarchiquesuprême.Or,pardéfinition,uneAAIéchappeà l’autorité hiérarchique du gouvernement. Elles risquent donc d’échapper au contrôledesreprésentantsdupeuple.Maisd’unautrecôté,sitouteslesautoritésadministrativesétaient soumises à l’autorité hiérarchique du gouvernement, il y aurait des situationsoùcelui-ciseraitàlafoisjugeetpartie:parexempleencasdelitigerelatifàunfichierinformatique tenu par une administration, en cas de demande d’accès à un documentadministratif même non informatique, ou en cas de contestation du partage du tempsd’antenneentredifférentscandidatsaucoursd’unecampagneélectorale.Danstouslescasoùl’administrationrisquedesemontrerpartiale,etoùlerecoursàlajusticeapparaît
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commeunesolutiontroplente,troplourde,ettroponéreuse,ilpeutyavoirintérêtàcréeruneAAI.
LesAAIprésententdoncuneutilitécertaine.Laquestionestdesavoirs’ilestpossibledelessoumettreàuncontrôledémocratiquesanscompromettreleurindépendance.
Une réforme tendant à établir un statut législatif des AAI est actuellement en coursd’examenauParlement.ElleapourorigineunepropositiondeloiadoptéeparleSénatenpremièrelecturele4février2016.L’Assembléenationalel’aadoptéeenpremièrelecturele28avril2016maisavecplusieursamendementsetlanavettedoitdoncsepoursuivre.Dansl’ensemble,onconstatequelesauteursdelapropositiondeloionteuàpeuprèslesmêmesidéesquelesmembresdugroupedetravails’agissantducontrôleexercéparleParlementsurlesAAImaisnonencequiconcernelemodedecompositiondecesmêmesAAI.
Aujourd’hui, lesAAIsontsoumisesàunencadrementconstitutionnelrelativementstrictquinefigurepasdanslaConstitutionelle-mêmemaisrésultedelaseulejurisprudenceduConseilconstitutionnel.
Enpremierlieu,leConseilconstitutionnelrappelletoujoursque,d’aprèsl’article21delaConstitution,lePremierministreesttitulairedupouvoirréglementaireauplannational.Le législateur peut, certes, déléguer à une autre autorité publique le soin de fixer desnormespourlamiseenapplicationd’uneloi,mais«àconditionquecettehabilitationneconcernequedesmesuresdeportéelimitéetantparleurchampd’applicationqueparleurcontenu».Parconséquent,uneAAInepeutparticiperàl’exercicedupouvoirréglementairequedefaçontrèsmarginale.
Endeuxièmelieu,leConseilconstitutionnelveilleàcequ’uneAAInepuissepasempêcherlePremierministred’exercersonpouvoirréglementairedansundomainequelconque.
Entroisièmelieu,lelégislateurpeuttoujoursmodifierouabrogerlestatutd’uneAAIaveceffetimmédiatmêmelorsquecetteAAIexercesonactivitédansunematièretouchantàunelibertépublique.Pourillustrercepoint,celaapermisaugouvernement,en1989,d’écarterlesprésidentsdessociétésnationalesdeprogrammesAntenne2,etFR3sansattendrelafindumandatquileuravaitétéconfiéparleCSA.Lelégislateuramodifiélestatutdecesprésidentsenprévoyantqu’iln’yauraitplusqu’unseulprésidentpourlesdeuxsociétésdeprogramme.LeConseilconstitutionnelauraitpudéciderquelechangementn’entreraitenvigueurqu’àl’expirationdesmandatsencours.Maisilnel’apasfait.Ilajugéquelaloiétaitd’applicationimmédiatecequisignifiequelelégislateurpeutmodifieràn’importequelmomentlestatutd’uneAAI.
Compte tenu de cet encadrement constitutionnel, les AAI à statut législatif ne peuventpas jouer pendant longtemps un rôle important sans l’accord du gouvernement. Si legouvernementestgênéparl’actiond’uneAAI,ilpeutaisémentyremédierendemandantaulégislateurdemodifierlestatutdecetteAAIoudetransférersescompétencesàun
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autreorganisme.C’estainsiqueNicolasSarkozyapumettrefinàl’actiondelaHALDEentransférantaudéfenseurdesdroitslamissiondeluttercontrelesdiscriminations.
LegroupedetravailasouhaitéquelaloiétablisseunesortedestatutgénéralquineviseraitaucuneAAIenparticuliermaisquis’appliqueraitàtoutes.CestatutgénéralpourraitcodifierlestroisprincipesdégagésparleConseilconstitutionneletquiontétérappelésci-dessus(caractèremarginalde laparticipationd’uneAAIà l’exercicedupouvoir réglementaire;rôleessentiellementconsultatifdesAAI,etdoncimpossibilitédesubordonnerl’exercicedupouvoirréglementaireduPremierministreàl’avisconformed’uneAAI,dansquelquedomainequecesoit;possibilitépourlelégislateurdesupprimeruneAAIoudemodifiersescompétencesaveceffet immédiat).Mais ildevraitégalementposerquelquesrèglesconcernantlemodedecomposition,defonctionnementetlecontrôledesAAI.
LapropositiondeloiétablissantunstatutgénéraldesAAIencoursd’examenauParlementprécitéeprévoitdesrèglesrelativementsouplesconcernantlemandatdesmembresdesAAIdontladuréepourraitêtrede3à6ansetquineseraitrenouvelablequ’uneseulefois.NulnepourraitêtremembresimultanémentdeplusdedeuxAAI.Ilyauraitincompatibilitéentrelafonctiondemembred’uneAAIetcelledechefd’unexécutiflocal.
RECOMMANDATION N° 32
hOMOgÉNÉIsER lE sTATuT DEs AuTORITÉs ADMINIsTRATIvEs INDÉpENDANTEs
Cesrèglesparaissentraisonnables.Maislesrecommandationsdenotregroupedetravailneseretrouventpastoutesdanslapropositiondeloi.
Le groupe de travail a ainsi adopté plusieurs recommandations :▶comptetenudufaitquelesAAIsontnombreuses,etqu’ellesjouentdanscertainsdomaines
unrôleimportant,ilseraitsouhaitablequelaConstitutioncessed’ignorerleurexistenceetétablisseunesortedestatutgénéralquineviseraitaucuneAAIenparticuliermaisquis’appliqueraitàtoutes.Cestatutgénéralpourraitcodifierlestroisprincipesquel’onadégagésdelajurisprudenceduConseilconstitutionneletquiontétérappelésci-dessus(caractèremarginaldelaparticipationd’uneAAIàl’exercicedupouvoirréglementaire;rôleessentiellementconsultatifdesAAI,etdoncimpossibilitédesubordonnerl’exercicedupouvoir réglementaireduPremierministreà l’avisconformed’uneAAI;possibilitépour le législateur de supprimer une AAI ou de modifier ses compétences avec effetimmédiat).
▶au terme d’une discussion assez longue, le groupe est parvenu à la conclusion qu’ildevraityavoiruneincompatibilitéentrelemandatparlementaireetlaqualitédemembred’uneAAI.Cetteincompatibilitésejustifieparlefaitqueleparlementairedanslecadredel’exercicedesonmandatestappeléàcontrôlerl’activitédesAAIetqu’ilestdoncjugeetpartiedufonctionnementdel’AAI.Cetterecommandationneseretrouvepasdansla
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propositiondeloi.Celle-ciprévoitbienuneincompatibilitéentrelemandatparlementaireet la qualité de membre d’une AAI mais également une exception pour les membresnommésencettequalité,c’est-à-diredanslecasoùlaloicréantl’AAIaprévulaprésencedeparlementairesensonsein.
▶legroupedetravailsouhaitequelemodedecompositiondesAAIsoitplusnettementpluraliste,c’est-à-direquelespersonnalitésnomméessurlapropositiondesgroupesparlementairesdel’oppositionsoientennombreàpeuprèségalàceluidespersonnalitésnomméessurlapropositiondesgroupesdelamajorité.Depuis2008,l’article13delaConstitutionprévoitque,pourcertainsemplois,lepouvoirdenominationduPrésidentdelaRépubliques’exerceaprèsavispublicdelacommissionpermanentecompétentedechaqueassemblée.LePrésidentnepeutprocéderàunenominationlorsquel’additiondesvotesnégatifsdanschaquecommissionreprésenteaumoinstroiscinquièmesdessuffragesexprimésauseindesdeuxcommissions.
▶legroupedetravailpropose,d’unepart,quelarègledel’article13soitinverséeetquele Président de la République ne puisse procéder à une nomination qu’à la conditionquel’additiondesvotespositifssoitaumoinségalauxtroiscinquièmesdessuffragesexprimés.Legroupedetravailproposed’autrepartquetouteslesnominationsauseindesAAIsoientsoumisesàcetteprocédurealorsqu’actuellementelleneconcernequecertainsemploissélectionnésparuneloiorganique«enraisondeleurimportancepourlagarantiedesdroitsetlibertésoulavieéconomiqueetsocialedelaNation».LegroupedetravailestimequecesdeuxréformessuffiraientàgarantiruncertainpluralismeauseindetouteslesAAI.
▶legroupede travailsouhaiteque,à toutmoment, leprésidentet lesautresmembresd’uneAAI,demêmequesonsecrétairegénéral,puissentêtreconvoquésparleprésidentd’unecommissionparlementairepourrépondreàdesquestionsaucoursd’uneaudienceetqu’ilsnepuissentpasrefuserdeserendreàcetteconvocation.Cetterecommandationcorrespondauxarticles22et23de lapropositionde loi.Danssonarticle24,celle-ciprévoitenoutrel’obligationpourlegouvernementdeprésenterchaqueannée,enannexeauprojetdeloidefinances,unrapportsurlagestiondesAAIetdesAPI.
▶legroupedetravailsouhaiteégalementque,pourchaqueAAI,unetelleauditiondevantune commission parlementaire ait lieu au moins une fois par an, à l’occasion de lapublicationdesonrapportannuel.
▶enfin,legroupedetravailestimequelesmembresdesAAIdevraientêtresoumisauxmêmesobligationsdedéclarationd’intérêtsquecelles imposéesauxélusetquecesdéclarationsdevraientêtrepubliées.Cetterecommandationcorrespondàl’article13delapropositionde loiquiprévoitqu’aucunmembred’uneAAInepeutparticiperàunedélibérations’ilyaunintérêtausensdelaloided’octobre2013relativeàlatransparencedelaviepublique.
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Les enjeux de cette réforme sont intimement liés au fonctionnement régulier de l’Etat de droit dans la mesure où l’une des conditions de la liberté politique des citoyens est l’exercice par les juges puissent de leurs fonctions de manière indépendante des autres pouvoirs.
Ils sont également liés à la question des moyens et du budget de la justice et des arbitrages systématiquement opérés en faveur du Ministère de l’intérieur qui sont particulièrement éclairants sur les priorités retenues.
Un équilibre doit impérativement être trouvé, afin de redonner à la justice, sa place au sein des institutions régaliennes. On mesure ainsi l’état d’une démocratie à l’aune des moyens comparatifs alloués au Ministère de la Justice et au Ministère de l’Intérieur dont le déséquilibre en faveur du second ne cesse de s’alourdir.
Une justice enfin indépendante
CHAPITRE 3
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«Je garantirai l’indépendance de la justice et de tous les magistrats: les règles denominationetdedéroulementdecarrièreserontrevuesàceteffet;jeréformeraileConseilsupérieurdelamagistrature».CetengagementducandidatFrançoisHollandecorrespondàuneattenteforteetancienne,tantdumondejudiciaireébranléparlesattaqueslancéespar la classe politique contre l’autorité judiciaire, que de l’opinion publique notammentdepuisl’affaired’Outreau.
SeulunCSMrefondé,débarrassédetouteintrusionpolitique,auxcompétencesélargiesàl’ensembledesmagistratsdusiègeetduparquetetdontl’autonomiedefonctionnementestgarantieparlaConstitution,estàmêmederépondreàcesattentes
Aujourd’hui,malgrél’adoptionle26avril2016parl’AssembléeNationaleduprojetdeloiconstitutionnelleportantréformeduCSM, ilestàcraindrequel’oppositionduSénatdefasseunefoisdeplusblocageauCongrès.Entoutétatdecause, letexteadoptéest lefruitd’uncompromisquineportepaslamarquedelarénovationcomplètedusystèmeconstitutionneldegarantiedel’indépendancedelajustice.
Eneffet,cetterénovationsedoitd’êtreplusambitieuseetnepasserésumeràuneréformedustatutduparquet, aussinécessairesoit-elle,maisconcernerplusgénéralement lesmécanismesconstitutionnelsgarantissantl’indépendancedel’autoritéjudiciaire,telquecelaseconçoitdansunEtatdedroit.
Pourlegroupedetravail,silaréformeduCSMpasseparunemodificationdesacompositionet de son organisation, ce projet d’envergure doit également s’attacher à l’étendue desescompétencesafinde faireduCSMla«clefdevoûtede l’indépendancede l’autoritéjudiciaire»selonl’expressiondeJeanGicquel.
1.une organisation assurant l’indépendance du CsM
Le CSM ne saurait garantir l’indépendance de la justice s’il n’est pas lui-même uneautoritédontlefonctionnementprésentederéellesgarantiesd’autonomienotamment
àl’égarddupouvoirexécutif.
RECOMMANDATION N° 33
MODIfIER lA COMpOsITION Du CsM
L’histoire du CSM est fortement marquée par sa très grande proximité avec le pouvoirexécutifcequiapparaîtdésormaisentotalecontradictionaveclesobjectifsdesesmissionsetlesstandardseuropéensquiprésidentaufonctionnementdesconseilsdejusticedansl’Unioneuropéenne.
L’évolutionduCSMs’inscritdansuneruptureprogressiveaveclepouvoirexécutif.
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Eneffet,malgrélesdifférentesréformes,l’article64delaConstitutionprévoittoujoursqueleprésidentdelaRépubliqueest«garantdel’indépendancedel’autoritéjudiciaire».
Il est suggéré de supprimer toute référence au président de la République dans lefonctionnement du CSM et il est proposé que la Constitution dispose: «La justice estrendueconformémentauxloispardesmagistratsindépendants.»
Afind’éviterlescritiquessoulevéesparlaquestiondelacompositionduCSM(majoritédemagistratsoudenon-magistrats), tantôtalimentant lecorporatisme, tantôtmettantencausel’indépendancedelajustice,legroupedetravailretientlechoixdelaparitéauseinduCSMcommecelaaétéproposéparleDoyenVedeldanssonrapportauprésidentdelaRépubliquede1993ouencoreparÉdouardBalladurdanslesconclusionsdurapportdu Comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage desinstitutionsdelaVeRépubliquede2007.Atitred’exemple,leConseilsupérieurdelajusticede Belgique ou du Conseil de nomination des magistrats au Danemark connaissent laparitéentrelesmagistratsetdenon-magistrats.
Le CSM serait donc composé de :
▶cinqmagistratsdusiègeélusparlesmagistratsdusiège;
▶cinqmagistratsduparquetélusparlesmagistratsduparquet;
▶deuxconseillersd’ÉtatélusparleConseild’État;
▶deuxmagistratsissusdelaCourdecassation(undusiège,unduparquet);
▶quatorzepersonnalitésqualifiées.
Actuellement, s’agissant des personnalités extérieures, deux sont nommées par leprésidentdelaRépublique,deuxparleprésidentdel’AssembléeNationale,etdeuxparceluiduSénat.
Conformémentàcequiaétéévoquéenamont,afinderenforcerl’indépendanceduCSMàl’égarddel’exécutif,lepouvoirdedésignationduPrésidentdelaRépubliquedevraêtresuppriméetlesquatorzepersonnalitésserontnomméesparlepouvoirlégislatif:septparleprésidentdel’Assembléenationale,septparleprésidentduSénat.
Telquecelasepratiquemajoritairementdanslespaysdel’unionEuropéenne(Belgique,Bulgarie, Hongrie, Italie, Portugal, Roumanie et Espagne notamment) le président del’Assembléenationaleet leprésidentduSénatnommeraientchacunseptpersonnalitésqualifiéesaprèsavoirrecueillil’approbationparunvoteàlamajoritéd’aumoinsdestroiscinquièmesdessuffragesexprimésdel’assembléequ’ilpréside.
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Enoutre,afindegarantirplusencorel’indépendanceduConseil,lenonrenouvellementdumandatdesmembresdoitêtrelarèglecommeenEspagneetenRoumanie.
LaprohibitionducumuldesfonctionsdemembreduCSMaveccertainesfonctionsdoitêtremaintenue.
Enfin,afind’éviterlerisquedel’absentéismedecespersonnalitésilestenvisagédelesrémunérerpourqu’ils’agissed’uneactivitéàtempsplein.
RECOMMANDATION N° 34
ÉlIRE lE pRÉsIDENT Du CsM pAR sEs MEMbREs
Depuislarévisioninstitutionnellede2008,laformationplénièreetlaformationdusiègesontprésidéesparlepremierprésidentdelaCourdecassation,laformationduparquetparleprocureurgénéralprèslaCourdecassation.
Si cette organisation a eu pour objectif de limiter la présence de l’exécutif au sein duConseil,celaapunuireàlacohérenceduCSMetàsavisibilitédansl’espacepublic,quiauxyeuxdescitoyensn’étaitpassuffisammentincarnéparunepersonnalitéidentifiée.
Afin de donner au CSM les moyens de son expression et de son organisation interne,le groupe de travail estime qu’il doit être prévu l’élection du président du CSM par lesmembresquilecomposentpouruneduréeàdéterminer.Cesderniersdevraientéliredanslesmêmesconditionssonvice-président,chargédesuppléerleprésident.
Le président du CSM, préside les formations plénière et disciplinaire et sa voix estprépondéranteencasdepartageégaldesvoixdansl’unedesformations.
RECOMMANDATION N° 35
RÉuNIR l’ENsEMblE DEs MEMbREs Du CsM DANs sA fORMATION plÉNIèRE
Lerôledelaformationplénièreresteinchangéetconsisteprincipalementàémettredesavisgénéraux.
Pourlegroupedetravail,comptetenudecettefonctiontrèsspécifique,riennes’opposeàcequelaformationplénièreréunissel’ensembledesmembresduCSM,malgrélefaitqu’elleseraitcomposéemajoritairementdemagistrats.
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2.Des compétences garantissant l’indépendance de l’autorité judiciaire
RECOMMANDATION N° 36
pERMETTRE Au CsM DE s’AuTOsAIsIR
Larévisiondu23juillet2008aréduitlerôleduCSMàlaformulationd’avissurdemandeduprésidentdelaRépubliqueoudugardedesSceauxlimitantainsisonexpressionàlaseuledemandepolitique.
S’agissantdelapossibilitépourleCSMdesesaisird’officedetoutequestionrelativeàl’indépendancede l’autorité judiciaire,à ladéontologiedesmagistratsetauxprojetsderéforme législative concernant l’organisation judiciaire afin d’émettre des avis libres etspontanés, legroupedetravailn’apastrouvédeconsensus.Certainssont favorablesàcettepossibilité,d’autresradicalementopposésconsidérantqu’ilyaunrisquedeprisedepositioncorporatiste.
Ces avis pourront également être sollicités par le seul Président de la République autitredelamissionreconnueàcedernierparl’article5delaConstitutiondegardiendufonctionnementrégulierdespouvoirspublics,telquecelaexisteaujourd’hui.
RECOMMANDATION N° 37
AlIgNER lEs RÉgIMEs DE NOMINATIONs pAR lE CsM
Àl’heureactuellelaformationdusiègeduCSMproposelesnominationsdesmagistratsàlaCourdecassation:premierprésident,présidentsdechambre,conseillers,conseillersréférendaires et auditeurs. Elle propose aussi celles des premiers présidents de courd’appeletdesprésidentsdetribunaldegrande instance.Pourtous lesautresemplois,95% des magistrats du siège continuent d’être nommés ou promus sur proposition dugardedesSceaux.
Laréformeproposéeviseàgarantiruneplusgrandeindépendancedelajusticedanslesprocessusdenominationdemagistrats.
LepouvoirdepropositionduCSMdoitdoncêtreétenduàtouslesposteshorshiérarchieainsiqu’àtouslespostesaupremiergradeausiège.
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RECOMMANDATION N° 38
ÉTENDRE lEs pOuvOIRs DE pROpOsITIONs DE NOMINATIONs Du CsM
Demême,selonleGroupedetravail,cepouvoirdepropositiondoitégalementconcernerlesmagistratssuivantsduparquet:procureurgénéralprèslacourdecassation,avocatsetsubstitutsgénéraux,procureursgénérauxetprocureursdelaRépubliqueainsiquetouslesposteshorshiérarchieetdupremiergrade.LespropositionsdenominationsserontfaitesparlaformationparquetduCSM.
Dèslorsceseraitplusde70%desemploisdanslamagistraturequiseraientnomméssurpropositionduCSM.
Concernantlesmagistratsausecondgrade,ilsserontnomméssuravisconformedelaformationduConseilsupérieurdelamagistraturecompétenteàleurégardqu’ils’agissedesmagistratsdusiègeouduparquet.
Cetteréformepermettradesatisfaireauxexigenceseuropéennesconcernantladéfinitiondel’autoritéjudiciairetoutenrenforçantleprinciped’unitéducorpsjudiciaire.
RECOMMANDATION N° 39
ÉlARgIR lEs COMpÉTENCEs DE lA fORMATION plÉNIèRE Du CsM
Afindegarantirl’indépendancedesonexpression,laformationplénièredontlacompositiona été définie précédemment devra pouvoir se prononcer d’office ou à la demande duprésident de la République sur les questions relatives à l’indépendance de l’autoritéjudiciaire,àladéontologiedesmagistratsetauxprojetsderéformelégislativeconcernantlajustice.
Enoutre,elledevraégalementpouvoirêtresaisiepar toutmagistratd’unequestiondedéontologieleconcernantafinquecelle-cirendeunavis.
RECOMMANDATION N° 40
RÉsERvER lE pOuvOIR DIsCIplINAIRE Aux MEMbREs Du CsM
LarévisionconstitutionnelleattenduedoitaccorderauCSMlacompétencepourstatuersur les poursuites disciplinaires à l’encontre des magistrats du parquet. L’initiative despoursuitesappartientconcurremmentauGardedesSceauxetauCSMlui-même.
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S’agissant de la composition des formations disciplinaires, l’option retenue tant par legouvernementdanssonprojetinitialqueparl’Assembléenationaledanslaversionqu’ellea adoptée en juin 2014 prévoit que le premier président de la Cour de cassation et leprocureurgénéralprèslaCourdecassationsiègentauCSMsansenêtremembres,etuniquementdanslesformationsdisciplinairesqu’ilsprésident.Pourtant,pourlegroupedetravailriennejustifiel’adjonctiondemagistratsnonélusdanslesformationsdisciplinaires,ausurpluss’ilslesprésident.
Aussi,legroupedetravailsouhaitereveniràdesprincipesorthodoxes,enproposantdesformationsdisciplinaires,composéesuniquementdesmembresduCSM.
Ainsi, la formation compétente à l’égard des magistrats du siège comprendrait neufmagistrats du siège, un des dix magistrats du parquet et les dix membres qui ne sontpasmagistratsetcellecompétenteàl’égarddesmagistratsduparquetcomprendraitneufmagistrats du parquet, un des dix magistrats du siège et les dix membres qui ne sontpasmagistrats.Chaqueformationstatueraitcommeconseildedisciplinedesmagistratsqu’ellereprésente(siègeouparquet).EllesseraientprésidéesparleprésidentduCSM.
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Le groupe de travail se prononce, dans sa très grande majorité, pour une réforme en profondeur de l’organisation et du fonctionnement du Conseil constitutionnel dans le sens d’une juridictionnalisation accrue de cette institution. Quelques-uns estiment toutefois que beaucoup de progrès ont déjà été réalisés en ce sens et que seules des améliorations procédurales ponctuelles resteraient nécessaires...
Une justice constitutionnelle
plus légitime
CHAPITRE 4
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LesréformesduConseilconstitutionneldoiventprendreenconsidérationlatendancedefonddejuridictionnalisationducontrôledeconstitutionnalité,etdelaprocéduresuivie
devantlesdifférentesinstitutionsquienontlacharge.EncouragéeparlaCoureuropéennedesdroitsdel’homme,cettejuridictionnalisationestd’autantplusnettelorsquelesorganesdecontrôleseprononcentsurrecoursdesindividusinvoquantlaviolationdeleursdroitsetlibertésconstitutionnellementgarantis.AinsileprofildesmembresouledéroulementdelaprocéduredevantleConseilConstitutionneldoiventrespecterdenouvellesexigences.
EnFrance,onpeutdaterde lafindesannées1980 (époquede laPrésidenceBadinter)lespremièrespréoccupationssignificativesdejuridictionnalisationdelaprocéduredanslecadreducontrôleapriori,ainsid’ailleursquedanslecadreplusparticulierducontentieuxélectoral. Celles-ci se sont accentuées avec l’institution de la question prioritaire deconstitutionnalité (QPC), dans la mesure où les hypothèses dans lesquelles la Coureuropéennedesdroitsdel’Hommepourraitconnaîtredelitigesayantfaitl’objetd’uneQPCs’avèrentstatistiquementplusnombreuses.
Historiquement, les partis de gauche se sont montrés hostiles au contrôle deconstitutionnalité, considéré comme un obstacle à la souveraineté parlementaire et àl’expressiondelavolontégénérale.Lesdébatsconstitutionnelsde1946sont,surcepoint,trèséclairantsquantàlapositiondeprincipedelaSFIOetduPCF.Cetteméfiancelatenteenverslecontrôledeconstitutionnalitén’estsansdoutepaspourriendansl’absencedesoutienduPSàl’initiativedelaQPC.
Mais,depuisquelquesdécennies,lespositionnementssurlecontrôledeconstitutionnalitéontévolué.Au-delàdenosfrontières,lesappartenancespartisanesnesontplussignificativessurlesappréciationsportéesàl’égardducontrôledeconstitutionnalité.Àcetitre,onpeutaffirmerquelespartisdegauchesesontralliésàcecontrôle,notammentparcequeles«Cours»ou«Tribunaux»constitutionnelsaprèsleschutesderégimesautoritairesetdedictatures,sesontvusconfierunrôledeprotectionetdegarantiedesdroitsetlibertés,notammentenEspagne.Demêmeetplusrécemment,danscertainsEtatsoùlespartisdedroitedureontgouvernéetcontrôlél’ensembledespouvoirs(politique,économique,médiatique),lesCoursconstitutionnellesontpuapparaître,auxyeuxdecertains,commelederniercontre-pouvoirouledernierrempartdelaprotectiondesdroitsetdeladémocratiecommeentémoignelerôledujugeconstitutionnelenItaliesousleGouvernementdeSilvioBerlusconi.
Cettelégitimationducontrôledeconstitutionnalitéparlafonctiondeprotectiondesdroitsetlibertés,etleralliementpossiblequ’iloffreàlagaucheopèrentaussienFrance.
Onobserveratoutefois,quecen’estpasparcequ’uneinstitutionapourmissiondeprotégeret de garantir les droits et libertés, qu’elle l’exerce d’une façon optimale ou qu’elle estdémocratique.L’engagementoul’activismedes«juges»enlamatièrerésultedemultiplesfacteurs,d’uncertainnombredecontraintesjuridiques,institutionnelles,politiqueset,sansdouteaussi,deleurprofilprofessionneletdelaconceptionqu’ilssefontdeleurfonction.
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Eu égard à cette remise en perspective générale, nos propositions visent, non pas àaccroitrelespouvoirsduConseilconstitutionnel,maisplutôtd’enmodifierlacompositionetlefonctionnement,danslesensd’unejuridictionnalisationrenforcéedel’institution.
1.Des juges renforcés
RECOMMANDATION N° 41
suppRIMER lEs MEMbREs DE DROIT Du CONsEIl CONsTITuTIONNEl
Tout d’abord, le groupe propose la suppression des membres de droit. Cette qualité,conféréeauxanciensprésidentsdelaRépublique,imaginéeen1958afindeménagerunesortiehonorableaudernierPrésidentdelaIVeRépubliqueRenéCoty,nesembleplusdutoutadaptéeaurôleassuméaujourd’huiparleConseilconstitutionnel.
La règle multiplie en outre les situations dans lesquelles des membres du Conseilconstitutionnel se trouvent confrontés, dans le cadre de la QPC, à des dispositionslégislativesdontilsonteuàconnaître.
Enfin,comptetenuduquinquennatetdel’allongementdeladuréedelavie,lenombred’anciensprésidentsdelaRépubliquepourraitfinirparêtreconséquent.
RECOMMANDATION N° 42
pORTER lE NOMbRE DEs MEMbREs Du CONsEIl CONsTITuTIONNEl à 12
Cetteaugmentationasalogique,auvudel’accroissementdel’activitéduConseilproduitparl’introductiondelaQPC.
Enoutre,cepassageàdouzemembrespeutêtreintéressantpour:▶créeréventuellementdeuxchambres,commecelaexistedanscertainssystèmes
(Allemagneparexemple).Ainsi,desaffairesdemoindreimportancepourraientêtrejugéesparuneformationrestreinte;
▶permettreàl’institutiondedisposer,danslecadredelaQPC,d’unnombresuffisantdemembrespouvantseprononcer.
Quatremembresaulieudetroisseraientainsinomméstouslestroisans.
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RECOMMANDATION N° 43
MODIfIER lA pROCÉDuRE DE NOMINATION DEs jugEs CONsTITuTIONNEls
Sixjugesconstitutionnelsseraientélusparl’Assembléenationaleàlamajoritédesdeuxtiers,(aprèsavoirétéauditionnéspubliquement?)
TroisjugesconstitutionnelsseraientélusparleSénatàlamajoritédesdeuxtiers,(aprèsavoirétéauditionnéspubliquement?)
Trois juges seraient nommés par décision conjointe du Président de la République etdu Premier ministre (Décision conjointe? CAD: décret signé par les 2? quid en cas decohabitation?)
Les juges seraient renouvelés par tiers. Ainsi, à chaque renouvellement, l’Assembléenationalenommeraitdeuxjuges,leSénatetl’exécutifennommeraientunchacun.
Le groupe estime, sur le modèle d’autres Cours constitutionnelles européennes et dumodedenominationdesjugesàlaCourdejusticedel’Unioneuropéenne(surlemodèledesauditionspratiquéesparlesmembresducomitéprévuàl’article255TFUE),ilconvientd’introduireuneconditiondecompétencejuridique.
IlproposequelesmembresduConseilconstitutionnelsoientélusounommésparmidesmagistrats,desprocureurs,desprofesseursd’Université,desavocatsoudespersonnalitésqualifiéesauxcompétencesjuridiquesreconnues,etayantchacunexercéleurprofessionoufonctionjuridiquespendantplusdequinzeans.
Le groupe propose également que les personnes nommées ou élues au Conseilconstitutionnel n’aient pas exercé un mandat politique national ou une fonctiongouvernementaledanslescinqannéesquiprécèdentlanomination.
RECOMMANDATION N° 44
ÉlIRE lE pRÉsIDENT Du CONsEIl CONsTITuTIONNEl
Le Président du Conseil constitutionnel ne doit plus être choisi par le Président de laRépublique comme c’est le cas aujourd’hui, ni même d’ailleurs par quelque autoritépolitiquequecesoit.
IlestproposéquelePrésidentsoitéluparsespairs,àchaquerenouvellementtriennal.
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RECOMMANDATION N° 45
RAppElER lE DEvOIR DE RÉsERvE DEs MEMbREs Du CONsEIl CONsTITuTIONNEl
Legroupeproposetoutd’abordderappelerledevoirderéservedesmembresetdepréciserleurobligationdenepasprendrepartpubliquementauxdébatspolitiquespendantladuréedeleurfonction.Ils’agitderaviveretderenforcerlesprocéduresdesanctionauxmanquementsàcesobligations(Décretn°59-1292du13novembre1959surlesobligationsdesmembresduConseilconstitutionnel).Sil’indépendancedesmembresrenddifficiled’envisageràcetégarddessanctionsquisoientprononcéesparuneautreinstancequeleConseillui-même,ilpeutêtreproposéqueledépôtd’unedemandedeprocédureenmanquementauxobligationssoitouvertàtoutcitoyenouauxautoritésdesaisinesprévuesàl’article61alinéa2(PrésidentdelaRépublique,lePremierministre,lePrésidentdel’Assembléenationale,lePrésidentduSénatousoixantedéputésousoixantesénateurs).
RECOMMANDATION N° 46
AssIsTER lEs jugEs CONsTITuTIONNEls pAR DEs RÉfÉRENDAIREs
S’agissant de l’organisation interne, il est proposé que chaque membre du Conseilconstitutionnelsoitassistédedeux«référendaires»(surlemodèledecequiexisteauseindelaCourdejusticedel’Unioneuropéenne).
Ilestproposéquecesréférendairessoientchoisislibrementparchaquemembredansunviviercomposédemembresdes juridictions judiciairesetadministratives,deprofesseursagrégésoumaîtresdeconférencesendroitoud’administrateursdesassemblées,d'avocats?
Ces référendaires allégeraient les tâches du service juridique actuel et limiteraientl’influence du Secrétaire général dans la préparation des décisions, chaque membre,assistédesesréférendaires,étantpleinementresponsabledecettepréparation.
2.une institution juridictionnalisée
RECOMMANDATION N° 47
juRIDICTIONNAlIsER lA pROCÉDuRE DEvANT lE CONsEIl CONsTITuTIONNEl
En ce qui concerne le contrôle a priori, la possibilité serait conférée aux membres duParlement(lerapporteurdelaloidanschaquechambre,lesmembresdelacommissiondeslois)devenirdéfendrelaloipourlamajorité,etdevenirdéfendrelasaisinepourl’opposition.
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S’agissantdelaQPC,deuxévolutionspourraientêtreenvisagées.
D’unepart,lapossibilitéseraitofferteauxmembresduParlement(lerapporteurdelaloidanschacunedesdeuxchambres)devenirdéfendrelaloi,afinquecelle-cinesoitpassystématiquementetexclusivementdéfendueparlegouvernement.
D’autre part, lors des audiences de QPC devant le Conseil, il conviendrait d’améliorerl’oralité et le contradictoire, en prévoyant que les conseillers constitutionnels puissentposerdesquestionsauxpartiesaulitige.
RECOMMANDATION N° 48
AuTORIsER lA publICATION D’OpINIONs sÉpARÉEs DEs jugEs CONsTITuTIONNEls
Les décisions du Conseil constitutionnel, conformément à la tradition des juridictionssuprêmes françaises, sont brèves. Ceci tranche déjà avec la plupart des coursconstitutionnellescomparables,quiseprononcentpardesdécisionsassezlongues.Quiplusest,larègleestdanscespayslapratiquedesopinionsdissidentes(Allemagne,Etats-Unis,Italie,Espagne…).
LapublicationdetellesopinionspermettraitdemieuxéclairerlesdébatsetlesmotifsquiontconduitàladécisionduConseil.
De telles opinions peuvent être riches de promesses (ainsi, aux Etats-Unis, durant lesannées1930,deuxmembres importantsdelaCoursuprême,OliverWendellHolmesetLouis Brandeis ont rédigé des opinions dissidentes capitales, considérées aujourd’huicommelesocledudroitconstitutionnelpositif).
RECOMMANDATION N° 49
OffICIAlIsER lA pRATIquE DEs pORTEs ÉTROITEs DEvANT lE CONsEIl CONsTITuTIONNEl
Legroupedetravailaestiménécessaired’encadrerlapratiqueditedes«portesétroites»qui consiste, pour des personnes intéressées, à adresser des observations au Conseilconstitutionnel.
Cetusagedoitêtreofficialiséetrendupublicafind’évitertoutesuspicion.L’interventiondegroupesdepressionentoutgenreétantinévitable,ilnes’agitpasdelesinterdiremaisaucontrairederendrelapratiqueplustransparente.
Autitredel’officialisationetdel’encadrement,ilestproposédeprévoirdeuxtypesdetierce-
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intervention.Lapremièreseraità l’initiativeduConseilconstitutionnel:celui-cipourraitsollicitertoutepersonneougroupement(amicicuriae)surunpointdedroit.Lasecondeconsisterait à permettre à toute personne ou groupement d’adresser spontanément auConseilconstitutionneldesobservationscitoyennessuruneaffaireencours.
Les délais de dépôt des observations des amici curiae ou des observations citoyennesseraientlessuivants:
▶dans le cadre d’une décision a priori: 15 jours à compter du jour de la saisine;3joursencasd’urgence;
▶dans le cadre d’une QPC: 1 mois. Passé ce délai, tout document serait déclaréirrecevable.
Autitrede l’information, ilestproposéd’exigerque leConseilconstitutionnelvisedanssesdécisionsetpubliesursonsitetouteslesobservationsoudocumentsqu’ilrecevraitdequelquecitoyen,associationougroupementquecesoitserapportantàunedécision,enfaisantapparaîtrelenomdeleursauteurs.Ildresseraitaussilalistedesobservationsdéclaréesirrecevables.
3.un contrôle de constitutionnalité renforcé
LedébatsurlapossibilitéqueleConseilcontrôlelaloiauregardnonseulementdelaConstitutionmaisaussidestraitésrevientdefaçonrécurrente.Entermestechniques,
ils’agiraitderevenirsurlajurisprudencedite«IVG»(15janvier1975).Danscettedécision,leConseilestimaitinadéquatdesanctionnerunedispositionlégislativesurlefondementdenormesinternationales.
Or,en40anslescirconstancesontchangé.
RECOMMANDATION N° 50
INTÉgRER lA CONvENTION EuROpÉENNE DEs DROITs DE l’hOMME Au blOC DE CONsTITuTIONNAlITÉ
Tout d’abord, le Conseil constitutionnel admet lui-même, qu’en matière de droits del’Hommelaconditionderéciprociténes’appliquepas(décisiondu22janvier1999,CPI).Plusparticulièrementencedomaine,nombreuxsontceuxquiontsoulignélaconcordanceentrelesdroitsgarantisauxniveauxconstitutionneleteuropéens.Dèslors,leConseilsetrouveensituationdeconfrontationdirecteaveclaCoureuropéennedesdroitsdel’Homme,etdepuisl’intégrationdelaChartedesdroitsfondamentauxdel’UnioneuropéenneparmilesnormesderéférenceducontrôledelaCourdeJusticedel’Unioneuropéenne,aveccelle-ciaussi.Àcetégard,lechocestintervenulorsquelaCoureuropéennedeStrasbourgapourlapremièrefoisprislecontrepiedd’unedécisionduConseilconstitutionnel(CEDH,28
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octobre1999,décisionZielinski,PradaletGonzalezetautres).Depuislors,touss’accordentsurlefaitque,sanslesciterexplicitementdanssesdécisions,leConseilprêteuneattentionsoutenueàcellesdelaCoureuropéennenotammentpourlesQPC.
Legroupedetravailestdivisésurlessuitesàdonneràcetteévolution.
Certains proposent de la consacrer dans la Constitution en précisant dans le texteconstitutionnel que le Conseil décide dans le respect ou à la lumière des droits etlibertésreconnusdanslaConventioneuropéennedesdroitsdel’Hommeetdeslibertésfondamentales.
D’autressontopposésàcetteproposition,soitparcequ’ilsnesouhaitentpaslierleConseilconstitutionnelauxdécisionsdelaCoureuropéennedesdroitsdel’Hommeetparricochetà la jurisprudence de sa Cour, soit parce qu’ils font valoir que les juges judiciaires etadministratifsseraientainsiprivésd’unepartiede lapossibilitédeseprononcersur laconventionnalitéd’uneloiquiauraitétéconsidéréeconformeàlaConventionparleConseilconstitutionnel.
50LES
RECOMMANDATIONSRECOMMANDATIONS
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1 Renforcer l’expression du peuple
RECOMMANDATIONN°1 ▶ Étendreledomaineduréférendumauxquestionsdesociété
RECOMMANDATIONN°2 ▶ Mettrefinaumonopoledel’exécutifenmatièrederéférendum
RECOMMANDATIONN°3 ▶ InstaurerunréférendumàchoixmultiplesRECOMMANDATIONN°4 ▶ Instaurerunvéritableréférendumd’initiativecitoyenneRECOMMANDATIONN°5 ▶ Instaurerunvéritabledroitdepétition
2 Mieux représenter le peuple
RECOMMANDATIONN°6-1 ▶ Miseenplaced’unscrutinbinominalRECOMMANDATIONN°6-2 ▶ Miseenplaced’unedosedeproportionnelleRECOMMANDATIONN°6-3 ▶ Miseenplaced’unscrutinproportionnelintégralRECOMMANDATIONN°7 ▶ AménagementdumodedescrutinsénatorialRECOMMANDATIONN°8 ▶ Renforcerlessanctionsfinancièreencasdenon-respect
delaparitéRECOMMANDATIONN°9 ▶ Limiterlecumuldansletemps
3 Une démocratie exemplaire
RECOMMANDATIONN°10 ▶ Modifierlesdispositionsdesrèglementsdesassembléesrelativesàlacompositionetauxattributionsdesorganeschargésdefairerespecterladéontologiedesparlementaires
RECOMMANDATIONN°11 ▶ Modifierlarépartitiondescompétencesdansledomaineducontrôledurespectdesrèglesdéontologiques
RECOMMANDATIONN°12 ▶ Mieuxencadrerl’activitédesreprésentantsd’intérêtsRECOMMANDATIONN°13 ▶ Réformerlerégimedel’IRFMRECOMMANDATIONN°14 ▶ Mettreenplaced’unstatutdel’éluprenantnotamment
encomptelesconditionsdecumulentrelesmandatsparlementairesetdesactivitésprofessionnelles
RECOMMANDATIONN°15 ▶ Renforcerlesobligationsdéontologiquesdesmembresdugouvernementetlesétendreauxplushautsmagistrats
RECOMMANDATIONN°16 ▶ Supprimerl’immunitéenmatièrecivileduPrésidentRECOMMANDATIONN°17 ▶ PermettrelespoursuitespénalescontrelePrésident
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4 Une démocratie plus égalitaire et intégratrice
RECOMMANDATIONN°18 ▶ Donnerledroitdevoteetd’êtreéligibleàdesressortissantsdepaystiersayantunlienréelaveclaFrance
5 Une représentation parlementaire renforcée
RECOMMANDATIONN°19 ▶ Élirelesdéputésunmoisavantl’électionprésidentielleRECOMMANDATIONN°20 ▶ Rendrel’usagedel’article49-1obligatoireRECOMMANDATIONN°21 ▶ SupprimerlevetosénatorialRECOMMANDATIONN°22 ▶ Supprimerle«vétoprésidentiel»RECOMMANDATIONN°23 ▶ RéformerlaprocédurelégislativeRECOMMANDATIONN°24 ▶ Conserverlesoutilsduparlementarismerationalisé
toutenassouplissantl’article40RECOMMANDATIONN°25 ▶ AugmenterlesmoyensdecontrôleduParlementRECOMMANDATIONN°26 ▶ Supprimerlaréserveparlementaire
6 Un pouvoir exécutif mieux contrôlé
RECOMMANDATIONN°27 ▶ RéserverauxemploismilitairesetceuxrelevantdelaconduitedeladiplomatielanominationpardécretenConseildesministres
RECOMMANDATIONN°28 ▶ RenforcerlespouvoirsdecontrôleduParlementRECOMMANDATIONN°29 ▶ Aménagerlesconditionsdemiseenœuvredel’article16RECOMMANDATIONN°30 ▶ Encadrerlesconditionsd’interventiondesforcesarméesRECOMMANDATIONN°31 ▶ PermettreauParlementdemieuxcontrôlerlaconduite
delapolitiquediplomatiqueRECOMMANDATIONN°32 ▶ HomogénéiserlestatutdesAutoritésadministratives
indépendantes
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7 Une justice enfin indépendante
RECOMMANDATIONN°33 ▶ ModifierlacompositionduCSMRECOMMANDATIONN°34 ▶ ÉlireleprésidentduCSMparsesmembresRECOMMANDATIONN°35 ▶ Réunirl’ensembledesmembresduCSMdans
saformationplénièreRECOMMANDATIONN°36 ▶ PermettreauCSMdes’autosaisirRECOMMANDATIONN°37 ▶ AlignerlesrégimesdenominationsparleCSMRECOMMANDATIONN°38 ▶ Étendrelespouvoirsdepropositionsdenominations
duCSMRECOMMANDATIONN°39 ▶ ÉlargirlescompétencesdelaformationplénièreduCSMRECOMMANDATIONN°40 ▶ RéserverauxseulsmembresduCSMlepouvoir
disciplinaire
8 Une justice constitutionnelle plus légitime
RECOMMANDATIONN°41 ▶ SupprimerlesmembresdedroitduConseilconstitutionnel
RECOMMANDATIONN°42 ▶ PorterlenombredesmembresduConseilconstitutionnelà12
RECOMMANDATIONN°43 ▶ Modifierlaprocéduredenominationdesjugesconstitutionnels
RECOMMANDATIONN°44 ▶ ÉlirelePrésidentduConseilconstitutionnelRECOMMANDATIONN°45 ▶ RappelerledevoirderéservedesmembresduConseil
constitutionnelRECOMMANDATIONN°46 ▶ AssisterlesjugesconstitutionnelspardesréférendairesRECOMMANDATIONN°47 ▶ JuridictionnaliserlaprocéduredevantleConseil
constitutionnelRECOMMANDATIONN°48 ▶ Autoriserlapublicationd’opinionsséparéesdesjuges
constitutionnelsRECOMMANDATIONN°49 ▶ Officialiserlapratiquedesportesétroitesdevantle
ConseilconstitutionnelRECOMMANDATIONN°50 ▶ IntégrerlaConventioneuropéennedesdroitsde
l’Hommeaublocdeconstitutionnalité
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NOTES
parti-socialiste.frparti-socialiste.fr
mai 2016