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Presse Book
Tragi-comédie d'August Strindberg.
Mise en scène : Frédéric FAGE
Avec :
Maroussia Henrich
Benjamin Lhommas
Julien Rousseaux
Aurélie Nezri
Colombe Villaume
Musique Stéphanie Renouvin et Olivier Bovis
Photographe : Slimane Brahimi
Styliste : Yohann Fayolle
Réalisation audiovisuelle : Valérie Marinho de Moura Contact : [email protected] 0663863380
Eva Quintard ARTISTIKREZO.com Le 12/01/2016
Les Créanciers - Auditorium Saint-Germain- des-Prés Actualités - Spectacle
Les Créanciers D'August Strindberg
Mise en scène Frédéric Fage Avec Maroussia Henrich, Benjamin Lhommas, Julien Rousseaux Du 12 au 27 janvier 2016 à 20h
Tarifs : Pl. de 18 à 34€, TR 9/13€
Auditorium Saint- Germain-des-Prés 4, rue Félibien 75006 Paris M°Odéon
www.mpaa.fr
Si l'amour n'est pas une monnaie, il n'est pas
un acte gratuit non plus : Il laisse des créances dans le coeur des amants.
Dans les liens qui se tissent, les serments qui s'échangent, chacun est créancier de
l'autre et peut à tout moment venir reprendre ses gages. Créanciers est une double
histoire d'amour qui se solde entre une femme - romancière renommée- et deux
hommes follement épris d'elle.
Il est question de jalousie, de vengeance, de manipulation, Subtilement, à la manière
d'une histoire à suspens, vont se découdre les liens jusqu'au terme de l'aventure que
l'on croirait sortie d'Othello de Shakespeare.
Dans un espace ouvert à l'imaginaire, trois personnages très dessinés illustrent
l'analyse des relations amoureuses d'un poète visionnaire au coeur tourmenté.
" Je ne tarderai pas d'avantage à vous dire l'admiration sans bornes que j'ai conçue
pour " Les Créanciers " qui reste et restera la seule oeuvre dramatique faite
uniquement pour la scène, dont je veuille me souvenir ".
André Breton
Le sentiment amoureux et d'abandon, la créance affective, est un sentiment
intemporel et Trans générationnel. Il est d'autant plus fort quand il est vécu pour la
première fois. Nos premières amours n'ont-elles pas été d'une violence rare
lorsqu'elles ont pris fin ? L'idée de vengeance n'a-t-elle pas germée dans nos esprits
meurtris ? Et nos rêves n'étaient-ils pas empreints de la plus dure des vérités.
Lagrandeparade.fr
Les Créanciers : une tragi-comédie qui rappelle le prix de
l'amour
Écrit par Guillaume Chérel Catégorie : Théâtre Mis à jour : jeudi 7 janvier 2016 20:45 Affichages : 1771
Par Guillaume Chérel - Lagrandeparade.fr/ « Je ne
tarderai pas davantage à vous dire l’admiration sans bornes que j’ai conçue pour « Les Créanciers » qui
reste et restera la seule œuvre dramaturgique, j’entends faite uniquement pour la scène, dont je veuille me
souvenir. »Ainsi parlait André Breton de cette pièce « modernisée » par Frédéric Fage, le metteur en scène,
et qui sera « donnée » (comme on disait jadis) à l’Auditorium Saint-Germain (Paris Vie), du 12 au 27 janvier
2016. Mais avant d’en dire plus, rappelons qui était August Strindberg (1849-1912).
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Johan August Strindberg est un écrivain (et dramaturge) suédois. Fils d’un commissionnaire maritime, il
passe pour un esprit révolté et romantique. Refusant de se plier à la discipline universitaire et attiré par les
grands hommes de lettres, il décide de se consacrer à l’écriture et s’illustre comme l'un des pères du théâtre
moderne. Ses débuts d’auteur s’avèrent particulièrement délicats (1872, « Maître Olof ») et ses premiers
écrits - dans le style naturaliste - traitent généralement du rôle traditionnel attribué aux sexes par la société
(qu'il estimait injuste). La célébrité arrive avec son roman « La Chambre rouge » (1879) : une description
du milieu artistique, littéraire et journalistique de son époque. Évoluant dans les milieux socialistes et
anarchistes, August Strindberg est admiré du prolétariat, est apprécié dans les pays communistes (Cuba,
Union soviétique…) et marie sa fille Karin à l’un des leaders bolcheviques Vladimir Mikhaylovich Smirnov.
A la fin des années 1880, August Strindberg renie les convictions socialistes et se lie d’amitié avec Friedrich
Nietzsche avec qui il correspond. Suite à un problème financier (on y vient…), il se brouille avec ce dernier
et se tourne vers le mysticisme. Il subit ensuite une période de trouble intérieur et de crises qui s'achève en
1897 par l'écriture d'un livre en français, « Inferno ». Après sa période naturaliste, dont l'œuvre phare est
« Mademoiselle Julie » (1888), August Strindberg trouve son inspiration dans le symbolisme et passe pour
l’un des pionniers de l'expressionnisme européen. Deux des pièces de cette époque remportent un vif
succès : « La Danse de mort » (1900-1901) et « La Sonate des spectres » (1907). Ses relations avec les
femmes sont orageuses (il a été marié à trois reprises sans succès) et ses propos et ses actes ont souvent
été vus comme misogynes. Nous y voilà… Voici donc le pitch : un homme (Gustave) vient réclamer des
comptes à son ancienne épouse (Tekla), une romancière devenue célèbre grâce à son second mari (Adolf),
peintre-sculpteur qui a lancé sa carrière. Dans « Les Créanciers », August Strindberg met en place un trio
amoureux au sein duquel les bénéfices sentimentaux équivalent à des lignes de crédits. Ce trio, le metteur
en scène Frédéric Fage, formé par Jean-Laurent Cochet, le confie à Maroussia Henrich, Benjamin
Lhommas et Julien Rousseaux, tous les trois excellents ; comme la danseuse qui illustre la femme
castratrice, ou passionnée, tout dépend du point de vue : « Adolf est un personnage très actuel, beau,
tatoué et très attachant, explique Frédéric Fage. Gustave, quant à lui, répond à un style très bobo. Seule
Tekla correspondra à une beauté classique, diaboliquement rousse et dangereusement attirante. ». Notons
la beauté du premier tableau, c’est le cas de le dire, tant la silhouette du mari tourmenté ressemble à Marat
assassiné dans sa baignoire. Le plan fixe est superbe. De l’art pictural on passe au cinéma de Woody Allen,
ou plutôt d’Ingmar Bergman évidemment, tant les dialogues sont vivants, subtilement intelligents.
Or donc, dans les habits de notre XXIème siècle, trois jeunes beaux comédiens ont pour charge de
renouveler le genre de cette tragi-comédie :« pour élargir sa diffusion à un public plus large, notamment
auprès des jeunes ». Le pari est gagné. Le décor n’est plus vraiment d’époque mais rien n’a changé en ce
qui concerne les relations amoureuses, plus qu’ambigües. Gay-friendly, on va dire… Que ce soit entre
hommes et femmes, ou plus largement entre amants. Il suffit d’avoir vécu en couple plus de quelques mois,
entre vingt et trente ans (les années d’apprentissage et de passion fougueuse) pour s’identifier aux
personnages... Pour Strindberg, si l’amour n’est pas une monnaie, il n’est pas un acte gratuit non plus : il
laisse des « créances » dans le cœur des amants. Dans les liens qui se tissent, le serments qui s’échangent,
chacun est créancier de l’autre et peut à tout moment venir reprendre ses gages, ou demander des comptes.
« Les Créanciers » est une double histoire d’amour qui se solde entre une femme – femme libre et
amoureuse, rappelons-le – et deux hommes follement épris d’elle. Il est évidemment question de jalousie,
de vengeance, de manipulations et de ressentiments, plus que de sentiments ; bref de rapports de force (il
y a un prétendu « faible », assez fort pour mourir d’amour ; un faux fort, trop cérébral et narcissique pour
aimer vraiment ; et une femme libre qui ne peut pas tout maîtriser : mais peut-on demander à l’océan
Atlantique de se maîtriser ?). C’est le récit intemporel et « transgénérationnel » (limite transgenre, queer,
car bisexuel entre les deux hommes) du trio amoureux. Que ce soit en Suède, à la fin du XIXe siècle, où
de nos jours, la femme veut assumer son désir d’indépendance, comme elle l’entend. Dans un espace
ouvert à l’imaginaire, en face d’elle, deux personnages masculins illustrent l’analyse toute personnelle d’un
poète visionnaire au « cœur tourmenté »… Pour ne pas dire amateur de « prise de tête », comme dirait un
« djeune » bobo de 2016.
Les Créanciers
D’August Strindberg
Mise en scène : Frédéric Fage.
Avec Maroussia Henrich, Benjamin Lhommas, Julien Rousseaux.
Musique : Stéphanie Renouvin et Olivier Bovis.
- Les 12, 13, 18, 19, 25, 26 et 27 janvier 2016 à l’Auditorium Saint-Germain, 4, rue Félibien – 75006 Paris.
Tel : 01 46 34 68 58
Posted in: Théâtre. Tagged: August Strinberg, August Strindberg, Benjamin Lhommas, Frédéric Page, Julien
Rousseaux, Maroussia Henrich. Leave a Comment
OnSortOuPas.fr
Posted by guy courtheoux on 13/01/2016
LES CREANCIERS d’August Strindberg, c’est à
l’Auditorium Saint Germain
4.98/5 (99.53%) 1127 votes
Une transposition très actuelle de Strindberg, avec des comédiens jeunes et magnifiques.
Selon Strinberg, l’amour n’est pas une monnaie, mais n’est pas un acte gratuit pour autant/ Il laisse
des créances dans le coeur des amants. Ici, pour Les Créanciers, on découvre une double histoire
d’amour, deux hommes qui aiment , ont aimé, aiment encore la même femme. Jalousie, vengeance,
et surtout manipulation sont au menu de ce beau texte. le metteur en scène, Frédéric Fage a
transposé l’action de nos jours avec un côté homoérotique sous-jacent, qui se ressent dès les
premières images où les deux comédiens, Benjamin Lhommas et Julien Rousseaux, apparaissent
torse nu ou simplement avec une veste ou un foulard pour couvrir le haut. Légers attouchements
entre tous les personnages, y compris celui de Tekla (Maroussia Henrich) donnent une atmosphère
particulière à cette pièce qui se situerait dans une chambre d’hôtel près de la mer, où se seraient
rencontrés les personnages, et auraient vécu une histoire.
On ajoute que tout cela se déroule dans un monde d’artiste, une auteure, un artiste peintre ou
sculpteur, dans un décor assez rudimentaire. L’ouverture de la pièce avec une danseuse qui évolue
dans ce décor, avec un des comédiens couché sur un sofa, dont on ne voit que le haut, nu semble-t-
il, met les spectateurs dans l’ambiance.
Les comédiens sont tous parfaits, à la plastique impeccable, chacun, chacune, dans un style
différent, mais qui ne peut laisser personne insensible. Certes on n’est pas ici dans la comédie, loin
s’en faut, mais écouter ce texte, voir ces personnages évoluer vous offre une bonne soirée.
Profitez de ces quelques représentations à l’Auditorium St Germain pour vous régaler avec un beau
texte.
Les Créanciers c’est les 13, 18, 19, 25, 26 et 27 Janvier à 20h00
Réservations au 01 46 34 68 58 ou sur billetreduc.com
INFUSIONREVUE.wordpress.com August Strindberg, Les Créanciers, mise en scène Frédéric Fage Publié le 18 janvier 2016 par INFUSIONREVUEPoster un commentaire
Une femme danse, évolue gracieusement sur scène, les voiles noirs de son vêtement l’accompagnent dans chacun de ses mouvements créant une aura étrange autour d’elle. Elle
passe, fugacement, sur scène. Cette femme, c’est Tekla, l’épouse d’Adolf, un artiste brillant,
peintre mais aussi sculpteur, qui pourtant ne croit pas en lui.
Désespoir artistique. Car oui, si Tekla commence à être connue dans le domaine des lettres,
Adolf semble plonger dans une sorte de gouffre sans fond. La première scène le montre ainsi
avachi sur un grand lit, dormant profondément, comme cherchant désespérément à oublier. A
oublier quoi ? Son absence d’inspiration, ou le fait que sa femme le vampirise presque ? Car,
trônant à côté du lit, une toile, inachevée et une sculpture de femme. Le décor entier, plutôt
minimal, suggère le vide dans l’existence de ce personnage : des fauteuils attendant que l’on s’y
asseye.
Manipulation. Dans cet espace, apparaît soudain un personnage, Gustav, d’apparence amicale.
Au milieu de la désillusion il lève un voile sur les raisons qui peuvent expliquer cette incroyable
dépression. Apparaissant juste au bon moment, redonnant confiance à Adolf et révélant un aspect
de Tekla qu’il ne faut pas sous-estimer : ne serait-ce pas elle qui aurait volé les idées de son
mari ? Une phrase de la préface de Strindberg l’illustre bien à ce sujet : « Existe-t-il un être plus
méchant, plus mesquin, plus dur, plus cruel que la femme ? (…) Je n’ai pas vu « un seul »
mariage où l’homme n’était pas dupé, soumis, avili par la femme… ». Le propos de Strindberg
est donc de s’interroger sur les relations au sein du mariage. En discutant avec Gustav, Adolf en
arrive donc à la conclusion que sa femme « prend sans jamais donner ».
Un jeu de voix. Tekla est donc bien présente pour le spectateur, dans les paroles de Gustav et
d’Adolf. Mais jusqu’à quel point cela peut-il être vrai ? Les absents ont toujours tort : libre
comme l’air, elle va où elle veut mais n’est pas au courant des commérages glissant sur elle. Quel
intérêt peut avoir Gustav à aider Adolf ? Il se présente comme son ami, mais ne le connaît que
depuis aujourd’hui, depuis son arrivée dans cet hôtel, au bord de la mer. La venue du troisième
personnage pourra peut-être éclairer ceci. L’entrée de Tekla sur scène est tout d’abord annoncée
par une nouvelle danse, sensuelle, au travers de laquelle les magnifiques costumes confectionnés
pour la pièce lui donnent une grande élégance. Décolleté plongeant, regard sûr, tout le jeu de
l’actrice participe à la montrer telle que décrite dans les dialogues précédents. Mais pas
seulement : car elle révèle une part de fragilité qui pourrait expliquer cette volonté d’écraser les
deux hommes qu’elle a ou qu’elle côtoie. Ce serait sa réponse à une structure sociale trop étroite
pour elle.
Pris au piège. Des cadres enserrent Tekla, mais tous semblent en être vicitmes. Car, plus
qu’esclave de sa femme, Adolf est surtout pris entre deux feux : entre les deux anciens amants,
puisque Gustav est le premier mari de Tekla, venu prendre son impôt de bonheur. Car, créancier,
oui, il l’est bien à sa manière. Il cherche vengeance. Le dispositif mis en place par Fédéric Fage
dans sa mise en scène permet de montrer à tour de rôle comment chaque être ne trouve pas sa
place dans l’espace où il se trouve.
Forte de réflexions profondément modernes, la pièce Les Créanciers, publiée en 1888, nous
touche au plus profond de nous-même, nous révélant l’ambiguïté de l’idée de domination d’un
être sur l’autre.
Eléonore Genest.
http://www.journal-laterrasse.fr
Auditorium Saint-Germain / d’August Strindberg / mes Frédéric Fage
LES CRÉANCIERS Publié le 21 décembre 2015 - N° 239
Le metteur en scène Frédéric Fage transpose brillamment Les Créanciers, d’August Strindberg,
dans notre temps présent. Un garçon tatoué, un jeune bobo, une jeune femme à la beauté
classique : trois possibilités de tensions amoureuses. Lassez-vous séduire…
Benjamin Lhommas, Maroussia Henrich et Julien Rousseaux, les trois comédiens réunis dans Les Créanciers. Crédit : Slimane Brahimi
Un homme (Gustave) vient réclamer des comptes à son ancienne épouse (Tekla), une romancière
devenue célèbre grâce à son second mari (Adolf), peintre-sculpteur qui a lancé sa carrière… Dans Les
Créanciers, August Strindberg met en place un trio amoureux au sein duquel les bénéfices
sentimentaux équivalent à des lignes de crédits. Ce trio, le metteur en scène Frédéric Fage le confie à
Maroussia Henrich, Benjamin Lhommas et Julien Rousseaux. « Adolf sera un personnage très actuel,
beau, tatoué et très attachant, explique Frédéric Fage. Gustave, quant à lui, répondra à un style très
bobo. Seule Tekla correspondra à une beauté classique, diaboliquement rousse et dangereusement
attirante. » Dans les habits de notre XXIème siècle, les trois jeunes comédiens auront pour charge de
renouveler le genre de cette tragi-comédie « pour élargir sa diffusion à un public plus large,
notamment auprès des jeunes ». Cela en allant chercher du côté de la violence, de la fougue,
inhérentes aux premières amours.
Manuel Piolat Soleymat
http://www.theatrorama.com/
JANVIER 21, 2016
Les Créanciers, l’absence en balance
«Deux êtres, ou plus, unis par le lien de la vie commune, forment en quelque sorte un système clos, à l’intérieur duquel la somme d’énergie spirituelle est constante : elle ne peut croître chez l’un sans diminuer chez l’autre, c’est pourquoi ils se la disputent si âprement. » (Alfred Jolivet) C’est un jeu cruel de vases communicants, « Les Créanciers » de Strindberg, le portrait d’un « entre-trois » tyrannique où chacun puise dans l’autre jusqu’à la lie. Dans sa mise en scène, redorant la pièce d’une couche contemporaine, Frédéric Fage explore ce bas-fond intime et infini pour l’abreuver.
La scène est un espace divisé en trois, surmonté d’un instantané qui rappelle des tableaux de nu romantiques. Il y a une sculpture grandeur nature incomplète, un lit sur lequel dort un homme dénudé, et le croquis d’une nature morte composée d’un fauteuil et de quelques fleurs sur un guéridon à l’intérieur duquel sont enfermées des chaussures d’enfant. La dominante est rouge et se trace sous des airs contemporains reprenant lascivement « Making love forever ». Le triptyque évoque déjà la mort, ou un fantasme amoureux qui aurait la flamboyance de la jeunesse et la fièvre d’un mauvais songe. Au centre, Adolphe, artiste peintre, attend sa femme Tekla, tout temps et muse suspendus. C’est un autre qui le rejoint, Gustave, premier époux de Tekla, mi-vampire, mi- Méphistophélès, un crâne transparent tissé dans le dos.
Les deux hommes échangent autour d’une figure absente, ce modèle qui a servi d’empreinte initiale à la statue qu’Adolphe ne parvient pas à terminer et qu’il recouvre d’une étoffe noire. Tekla, pour l’instant invisible, est pourtant déjà partout, emplissant l’ancien et le nouvel époux dans leurs êtres et discours, et occupant également chaque objet du huis clos : de la matière à sculpter au miroir, des lettres aux photographies et au tableau en fond de scène, jusqu’à apparaître une première fois dans l’esquisse d’une danse. Celle qui danse est un ange de la mort, symbole d’une transfiguration qui atteindra finalement tous les personnages de Strindberg. Chacun a l’autre en écho, dans un rapport qui oscille dramatiquement entre fascination et détestation. Chacun a « donné à l’autre
CATHIA ENGELBACH
jusqu’à ne plus rien posséder », (se) donnant, (se) dévorant, s’effaçant lui-même. Ainsi, même en pleine présence, tous s’échappent.
Confusion des sentiments
Le triangle suppose une lame tranchante à chaque aspérité. Strindberg l’affirme en évoquant son théâtre : ce n’est pas la victoire ni la finalité qui l’intéressent, mais bel et bien la lutte, l’intermédiaire. Et cette lutte concerne, pour Frédéric Fage qui a souhaité donner à la pièce une teinte atemporelle, autant les êtres entre eux qu’en eux-mêmes. Reprenant à son compte la formule nietzschéenne, il trace des « Créanciers » une ligne qui part d’une matérialisation de la faute (« Schuld » en allemand) pour conduire à la dette reliant les personnages entre eux (« Schulden »). D’un tribut financier éclatent ainsi des colères et des déchirements conduisant à l’examen, par la suggestion, des faiblesses et des tortures psychologiques, cher à l’auteur et qui se retrouve dans toute son œuvre théâtrale et littéraire.
Devenant volontairement une peinture hors époque, la pièce se focalise sur la psyché et les reflets qui relient Tekla, Adolphe et Gustave. Les deux hommes, l’épouse et son mari, puis l’épouse et son ancien mari, se ressentent les uns dans les autres à travers des traces imperceptibles que tous distillent en toute chose et en tout être, par des bruits résonnant depuis une autre pièce, par la chaleur d’un siège qui a tout juste été occupé, par des empreintes. Parfois, leurs échanges établissent des renversements de caractères et d’identités : Tekla parle d’elle à la troisième personne – celle de l’absence – joue le rôle de la mère auprès d’Adolphe et celui de l’enfant victime auprès de Gustave. La danseuse qui la personnifie passe alors d’ange à veuve noire, réduisant dans un même temps le trio à un simulacre, confondant portraits et sentiments. Strindberg voulait « tout savoir », à travers une étude fine et profonde de la pensée et d’un siècle marquant le retour au tragique. « Tout savoir » des choses concrètes et de la force impalpable des affections. Par les voies de Tekla, modèle libéré de son socle, Adolphe, artiste déchu, et Gustave, médecin en diable, Frédéric Fage file l’image jusqu’à la renverser et « regarder sous les paupières ».
Les Créanciers
D’August Strindberg
Mise en scène : Frédéric Fage
Avec Maroussia Henrich, Benjamin Lhommas et Julien Rousseaux
Musique : Stéphanie Renouvin et Olivier Bovis
Photographie et conseiller artistique : Slimane Brahimi
Audiovisuel : Valérie Marinho de Moura
Stylisme : Yohann Fayolle
Les Créanciers par Frédéric Fage, ce que l’amour coûte
Le 18/01/2016
L’Auditorium Saint-Germain-des-Prés accueille Les Créanciers d’August Strindberg,
dans une mise en scène de Frédéric Fage, jusqu’au 27 janvier 2016. Une tragi-comédie
autour d’un trio amoureux, tourmenté et fiévreux. Notre avis sur cette pièce dans
laquelle la romance a un prix.
Synopsis :
Une mise en scène étoffée et contemporaine
Dans sa vision de Les Créanciers, Frédéric Fage offre une mise en scène très riche.
Adolf (Julien Rousseaux), un jeune peintre et sculpteur, est marié à Tekla
(Maroussia Henrich), une femme plus âgée, romancière. Il est profondément
épris de son épouse, une créature volcanique autant que volage, qui lui cause
de nombreux tourments. Pourtant, il lui a tout donné, l’introduisant dans les
cercles littéraires, l’aidant à s’accomplir dans sa carrière. Il confie son
affliction et ses inquiétudes à Gustave (Benjamin Lhommas), un professeur de
langues anciennes, qui se montre attentif aux déboires d’Adolf pour mieux le
manipuler. Gustave est en effet le premier mari de Tekla, ce qu’Adolf ignore.
Peu à peu, la conversation à propos de Tekla entre ces deux hommes prend la
couleur du crime annoncé… car Gustave imagine un scénario dans lequel
Tekla devra répondre de ses dettes.
Les décors résonnent avec la thématique de la pièce : teintés de rouge, ils évoquent
assez naturellement et l’amour et le sang. Le pourpre sied parfaitement à l’intrigue
autour d’une passion triangulaire qui se termine dans la douleur. Est-ce un salon, est-ce
une chambre d’hôtel, peu importe. Les comédiens se meuvent dans cette atmosphère
rougeoyante et changent de costumes au fil de l’intensité grandissante de l’histoire de
ce trio.
Gustave, l’illusionniste cynique, qui viendra réclamer sa créance à son ancienne
épouse, finira en noir, tandis qu’Adolf, au destin tragique, dont l’âme est finalement la
plus pure parmi les trois personnages, mourra en blanc.
Frédéric Fage enrichit à raison sa mise en scène en faisant appel à la danse et à la
musique. Une musique actuelle accompagne les moments cruciaux de la pièce,
accentuant ainsi la gravité des sentiments, la profondeur du châtiment.
La pièce est également ponctuée par une chorégraphie réalisée divinement par une
jeune danseuse qui symbolise merveilleusement bien la passion.
Tout dans la mise en scène de Frédéric Fage entraîne le spectateur dans cette
atmosphère à la fois bouillonnante des folies amoureuses et extrêmement lourde,
pesante, du créancier qui vient saisir son dû.
Un parti-pris résolument contemporain, donc, que Frédéric Fage explique : “Mon but
dans ce projet est, tout en respectant les codes de cette tragi-comédie, de renouveler
son genre pour étendre sa diffusion […] et ce, sans trahir les intentions et la philosophie
de l’auteur”.
Un tableau diabolique parfaitement dessiné
Les trois comédiens rentrent chacun parfaitement dans la peau du personnage qu’ils
doivent incarner.
Julien Rousseaux est parfait dans le rôle d’un jeune éphèbe amoureux, épuisé, brisé,
voyant dans Gustave une figure tutélaire qui peut le sauver mais qui le mènera à sa
perte.
Le jeu de Benjamin Lhommas, ténébreux, démoniaque, est très juste. Il rend
parfaitement bien la complexité de la personnalité de Gustave, un irrésistible
manipulateur guidé par son envie de vengeance envers Tekla qui l’a fait souffrir. Un
personnage à la fois terriblement attirant — il séduira presque à nouveau Tekla lorsqu’ils
se retrouvent — et paradoxalement d’une froideur extrême.
Maroussia Henrich donne vie à une Tekla sublime, rousse, sensuelle et volage. L’actrice
remplit son contrat de femme forte et incandescente mais fragile, cédant sous le poids
des remords, impuissante face à la vengeance de Gustave.
Les Créanciers aborde le thème intemporel du malheur amoureux. Si le
spectateur attend naturellement de l’intensité dans les émotions, une perte de contrôle
des personnages face à la passion, la pièce fait preuve d’une originalité géniale en
plaçant la vengeance sous le sceau de froides créances.
Les Créanciers n’offrent pas vraiment le spectacle d’un déchaînement aveugle de
sentiments car l’amour a un prix et l’exécution de la vengeance sera méthodique et
froide.
Frédéric Fage saisit parfaitement le message de Strindberg et livre une mise en scène
audacieuse qu’il faut saluer. Le spectateur n’est pas convié à découvrir l’autel d’un crime
amoureux mais à assister à un recouvrement infernal de créances.
Une pièce à voir avec délectation.
Tekla : Ainsi, tu viens présenter tes créances ?
Gustave : Je viens reprendre ce que tu m’as volé et non ce que je t’ai donné. Tu avais
volé mon honneur et je ne pouvais plus le retrouver qu’en prenant le tien. N’avais-je pas
raison ?
Auditorium Saint-Germain
4 rue Félibien
75006 PARIS
01 46 34 68 58
Les 12, 13, 18, 19, 25, 26 et 27 janvier 2016 à 19h45
Sous-titrée « Récit d’un sentiment intemporel et transgénérationnel », cette version a une
nette tendance à l’esthétisme. Passons sur le décor, qui voudrait bien dire beaucoup mais
n’est que bric-à-brac, surtout sur la grande scène de l’Auditorium. Plus intéressante est
l’approche des personnages : le metteur en scène a voulu les rajeunir, pourquoi pas… et
actualiser la pièce. Affèteries, musiques et nudités (torse et ventre pour les hommes,
jambes pour la femme), on craint le pire. Et puis les meilleures intentions, pour
intellectuelles qu’elles soient, se calment pour laisser la place au dialogue de Strindberg et
http://www.regarts.org/
LES CRÉANCIERS
à l’action. Un drame humain et psychologique, entre trois personnages, deux hommes et
une femme. Les deux sont amis, Adolf et Gustaf et la femme, Tekla est, pour ainsi dire la
pièce rapportée, celle que l’on ne comprend pas, et dont le pouvoir effraie.
Car toute la pièce est assez violemment misogyne. « La femme, enlève-lui les jupes, que
reste-t-il ? » entend-on. Mais aussi : « L’imagination, c’est la bête qui se cache dans l’âme
des hommes. » On voit bien que Strindberg, nourri de sa propre histoire et de ses démons,
a voulu frapper haut et fort sur le thème du couple. Son œuvre frôle le mélo, sans y tomber,
pour atteindre au plus noir du drame.
La cruauté du texte, assez rapidement, s’impose aux comédiens qui nous la transmettent
au plus serré, avec justesse. Cette rencontre de deux hommes, dont un, sculpteur est
« mal » marié et a l’impression d’avoir « donné, donné et donné » à sa femme sans rien
recevoir en retour, nous touche. Il est un des « créanciers » du titre. Les conseils avisés de
l’ami sont lourds d’ambiguïté. Et que dire de la scène entre l’ami et la femme… apportant
une surprise de taille, que nous ne révélerons évidemment pas.
Il est toujours intéressant de voir des personnages « tout d’une pièce » qui se nuancent
ensuite : à ce jeu, Benjamin Lhommas et Julien Rousseaux sont très efficaces. Quant à
Maroussia Henrich, dans le rôle de Tekla, elle est tout simplement excellente.
Gérard Noël Le 06/01/16
http://www.sortiraparis.com Sortiraparis.comLes créanciers de Strindberg à l’Auditorium Saint-Germain Publié le 6 janvier 2016 Par Marine S.
Infos pratiques
Du 12 janvier 2016 au 27 janvier 2016 Plus d'informations
Auditorium saint-germain
4 rue Félicien
75006 Paris 6
Les créanciers, pièce d’August Strindberg, sera donnée à l’Auditorium Saint-Germain du 12 au 27
janvier 2016.
D’August Strindberg, il n’est principalement connu, et de ce fait, monté, que la pièce Mademoiselle Julie. Si il
ne peut être remis en question la qualité de cette œuvre, bienvenus sont les metteurs en scène qui s’attaquent à
d’autres partitions du travail de l’auteur suédois. Les créanciers, pièce publiée en 1889, pièce qu’adorait André
Breton, sera ainsi présentée du 12 au 27 janvier 2016 à l'Auditorium Saint-Germain, par Frédéric Fage. Cette
pièce peu populaire met en lumière les similitudes qui existent entre les créances financières et les relations
amoureuses.
En amour, ne donne-t-on pas sans compter, en tissant des liens, échanger des serments ? Pour Strindberg, un
amant peut réclamer à tout moment ses gages. Pour illustrer son propos, il a inventé une histoire compliquée
entre trois personnages : une femme, à l’heure du désir de libération de son sexe à la fin du XIXème siècle, et
deux hommes, follement épris d’elle.
Une histoire sentimentale à trois têtes qui illustre une idée bien précise de l’amour par un auteur visionnaire.
Infos pratiques :
Les créanciers, à l’Auditorium Saint-Germain, du 12 au 27 janvier 2016.
Du lundi au mercredi à 20h.
Tarifs : 18€
Les Créanciers d’August Strindberg par
Frédéric Fage 12 janvier 2016/dans Agenda, Paris, Théâtre /par Stéphane Capron
Pour l’immense auteur suédois qu’est August Strindberg, si l’amour n’est pas une monnaie, il
n’est pas un acte gratuit non plus : Il laisse des créances dans le coeur des amants. Dans les liens
qui se tissent, les serments qui s’échangent, chacun est créancier de l’autre et peut à tout moment
venir reprendre ses gages.
Créanciers est une double histoire d’amour qui se solde entre une femme – romancière renommée
et deux hommes follement épris d’elle. Il est question de jalousie, de vengeance, de manipulation
dans la société suédoise de la fin du XIX° siècle où la femme veut assumer son désir
d’indépendance et de liberté. Subtilement, à la manière d’une histoire à suspens, vont se découdre
les liens jusqu’au terme de l’aventure que l’on croirait sortie d’Othello de Shakespeare. Dans un
espace ouvert à l’imaginaire, trois personnages très dessinés illustrent l’analyse des relations
amoureuses d’un poète visionnaire au cœur tourmenté.
Les Créanciers d’August Strindberg
Avec Maroussia Henrich, Julien Rousseaux, Benjamin Lhommas
Metteur en scène : Frédéric Fage
du 12 janvier 2016 au 27 janvier 2016
Auditorium Saint-Germain
4 Rue Félibien, 75006 Paris-6E-Arrondissement, France
Mots-clés : August Strndberg
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Les créanciers : dissection scénique d'un triangle
amoureux
Publication : 20 janvier 2016
Par Florence Yérémian - Sur scène, il y a Tekla, belle et insoumise.
Romancière célèbre, elle vit dans le désir de séduire et laisse sournoisement tourner en orbite tous
les hommes qui la convoitent. Parmi eux se trouve son propre mari, le pauvre Adolf. Tendre et
sincèrement épris de sa muse, il lui est soumis et ne peut exister qu’à travers son ombre.
En contrepoint de cette figure docile s'élève aussi Gustave, l'ex-époux de Tekla. Aussi malicieux
que nonchalant, il empoisonne mentalement tous les êtres qu'il approche…
Enfermés dans une sorte de huis-clos amoureux, ces trois personnages vont pas à pas disséquer les
ambivalences de leurs relations : entre vengeance, domination et jalousie, ils vont successivement
tenter leur chance pour essayer de ressortir vivant de leur dépendance affective. Lascive et forte en
caractère, la ravissante Maroussia Heinrich s'impose dans le rôle de Tekla, il émane de cette jeune
actrice une assurance inflexible emprunte de séduction.
À ses côtés, Julien Rousseaux joue les maris tourmentés. Fragile et indécis dans le rôle d’Adolf, il
s'est laissé envoûter par Tekla qui lui a volé son âme autant que sa foi. Déambulant torse-nu dans
sa salopette, le comédien propose certaines audaces par rapport au texte de Strindberg - notamment
son questionnement homosexuel - mais il pousse un peu trop le registre de l’infantilité.
Reste enfin Gustave, le dernier larron de cette triple crise conjugale. Avec sa barbiche noire et ses
petits yeux brillants, il apparaît aussi perfide que diabolique. Interprété par Benjamin Lhommas,
cet être vil instaure le doute et la suspicion tout au long de l'histoire. Le timbre grave et déployé,
ce talentueux acteur possède une véritable musique charnelle dans la voix et il en joue
magnifiquement. Arpentant la scène nus-pieds les mains dans les poches, il retire progressivement
le masque affable de son protagoniste pour laisser émerger ses véritables pensées. De par son aspect
machiavélique et reptilien, Benjamin Lhommas nous fait parfois songer à Micha Lescot dans le
Tartuffe de Bondy.
C’est en tout cas sa figure étrange qui resort de cette partition Strindbergienne très misogyne où la
femme ne semble exister qu’à travers le bon vouloir de son conjoint ! Si l’on se fie aux dialogues
de ce grand auteur suédois, la femme serait un être vide que l'homme éduquerait en lui apprenant
à réfléchir, à écrire et en lui procurant de surcroit une position sociale… Triste constat plus que
dépréciatif à l'égard du sexe faible… Fort heureusement, la pièce de Strindberg est surtout une
oeuvre qui triture magnifiquement la complexité des sentiments humains. Transposée au XXIe
siècle par le metteur en scène Frédéric Fage, elle montre à quel point la liberté amoureuse n’est
qu'une illusion rassurante car chaque être est, en fait, le créancier affectif d’un autre.
En regardant cette danse à trois se déployer sur scène, le spectateur ne peut en effet que constater
la triste versatilité de l'amour : passant de la tendresse la plus pure à la compassion, ce si noble
sentiment finit bien souvent par prendre le sombre visage du mépris, voire de la haine. A bien y
réfléchir, en ce bas monde, tout n’est qu’une sombre histoire de manipulation et de chantage. A se
demander si l’amour, en fin de compte, ne se monnaye pas comme le reste…
Les créanciers de Strindberg? Une mise en scène intense, de jeunes comédiens talentueux, un texte
dense au flux incessant.
Bravo pour la somptueuse affiche de la pièce réalisée en clair-obscur: très caravagesque !!
L’édito Web de Christophe Barbier dans L'express.fr du 22/01/16 :
http://videos.lexpress.fr/actualite/politique/video-sarkozy-un-retour-
qui-commence-par-un-mensonge-l-edito-de-christophe-
barbier_1756535.html
- « Allez voir, jusqu'au 27 janvier à l'auditorium Saint-Germain à Paris, Les Créanciers. Étrange
pièce d'August Strindberg sur la manipulation, sur le venin qui peut se glisser dans une vie
multi-conjugale. Il y a dans cette pièce des vérités psychologiques sur le XXe siècle qui
appartiennent à un homme qui était du siècle d'avant. Il y a des cruautés sur l'autre sur le
sentiment qui font frémir. La mise en scène est extrêmement esthétisante, l'interprétation est
très charnelle, il y a quelque chose de malsain qui en même temps est délicieux. »-
MYTF1News
Les coups de cœur culture de Christophe Combarieu, LCI :
7min 52sle 10/01/16 à 09h17
« Une vision particulièrement originale du chef-d'œuvre de Strindberg. Les Créanciers. Vu
comme un récit d'un sentiment intemporel et transgénérationnel. Ce sera du 12 au 27
janvier à l'auditorium Saint-Germain à Paris. Bien souvent, l'ouvrage a été monté avec des
costumes et des décors d'époque, il n'y avait pas jusqu'à présent de version contemporaine
transposée dans le temps présent. C'est chose faite, avec le metteur en scène Frédéric Fage
qui propose cette pièce comme un huis clos, lui-même le dit : "une femme, deux hommes,
trois possibilités."
Benjamin Lhommas, Maroussia Henrich et Julien Rousseaux. André Breton parlait
justement de ces créanciers comme la seule œuvre dramatique faite uniquement pour la
scène dont je veuille bien me souvenir. »
BFM BUSINESS
Christophe Mory
Le 20 janvier 2016.
http://bfmbusiness.bfmtv.com/mediaplayer/video/la-
tendance-culturelle-jean-echenoz-publie-envoyee-
speciale-une-parodie-de-roman-d-espionnage-2001-
739476.html
« Dans les créanciers, c'est le cœur qui parle parce que ce sont des créanciers d'amour.
C'est-à-dire, ce que l'on doit à ceux qu'on a aimé ou qui nous ont aimé.
C'est Strindberg, alors justement dépêchez-vous parce qu'il n'y a plus que trois
représentations. C'est à l'auditorium Saint-Germain à Paris 06.
C'est une histoire absolument incroyable. Strindberg est suédois, c'est vraiment noir,
misogyne, terrible. Est-ce qu'une femme peut aimer deux hommes ? Et bien oui ! mais c'est
n’est pas la maîtresse qui va coucher avec l'un ou avec l'autre, c'est de l'amour très fort.
Elle s'est mariée avec un Gustav et puis ils ont divorcé et elle a écrit un livre qui s'appelle
l'imbécile pour parler de son ex-mari.
Elle est désormais mariée à un jeune homme, un jeune peintre qui est vraiment l'homme
infantilisé par l'amour. Il est un peu l'homme bébé alors que l'autre est l'homme viril. Elle
aime ces deux hommes à la fois, elle a besoin de ces deux figures viriles dans sa vie pour
pouvoir être comme deux poumons mais c'est une femme très honnête, en amour et avec
elle-même. C'est un piège cette histoire, les créanciers qui est terrible. Il y a toute une
réflexion sur le temps qui passe. Et le mari dit à un moment donné de toute façon tu es
dans le retour d’âge (malgré le jeune âge de la femme) et tu es incapable de séduire à
nouveau et là, l'ex-mari arrive. D'où le piège et la vengeance.
Toutes les femmes en voyant ce spectacle vont retrouver leurs propres contradictions. Ce
n'est pas d'ailleurs une contradiction mais une constitution.
La mise en scène de Frédéric Fage, mérite d'être soulignée parce qu’au théâtre on aime
voir des images et là vous avez des images. Vous avez des choses très fortes et il y a une
danseuse absolument incroyable qui fait une danse magnifique sur une version de Roxane.
Vous avez la chair de poule. C'est vraiment un très beau spectacle. »
Les Créanciers Du 12 janvier 2016 au 27 janvier 2016
Auditorium Saint Germain, Paris.
theatre,les créanciers,auditoirum,saint germain Paris.
Si l'amour n'est pas une monnaie, il n'est pas un acte gratuit non plus : Il laisse des
créances dans le coeur des amants. Auteur : August Strindberg Artistes : Maroussia
Henrich, Julien Rousseaux, Benjamin Lhommas Metteur en scène : Frédéric Fage
Les Creanciers
Entrez dans les coulisses de la pièce "Les Créanciers" à l'Auditorium Saint-
Germain qui se joue du 12 au 27 janvier 2016.<br /> <br /> Frédéric Fage vous
présente cette oeuvre d'August Strindberg qu'il a mis en scène, entouré des comédiens Maroussia Henrich, Julien Rousseaux, Benjamin Lhommas et de son équipe.
http://www.webmag.tv/video/les-creanciers
Reportage réalisé par Adrien Fichelle et Zakaria BELKHADEM
Contact : [email protected] 0663863380
LES CRÉANCIERS
Studio Hébertot (Paris) mars 2016
Tragi-comédie de August Strindberg, mise en scène de Frédéric Fage,
avec Maroussia Henrich, Benjamin Lhommas, Julien Rousseaux,
Colombe Villaume et Aurélie Nezri.
De la tragi-comédie en un acte d'August Strindberg, Frédéric Fage a tiré
un spectacle à la fois tout à son récit et d'une grande beauté
formelle.Suspense, trafic de sentiments, jeu de chat et de souris dans une
ambiance "fin de siècle" qui n'est pas rappeler les ambiances des nouvelles
de Vllliers de l'Isle-Adam, tout est bon pour remplir la scène d'un combat à
fleuret moucheté qui va dégénérer du mélodrame bourgeois à la pure
tragédie.
Certes, on aurait peut-être aimé voir des comédiens plus aguerris à
l'exercice mais la triplette Maroussia Henrich, Benjamin Lhommas, Julien
Rousseaux ne démérite jamais.
En manipulateur mondain, genre Lord Henry du Portrait de Dorian Gray,
Benjamin Lhommas est parfaitement à l'aise et réussit à trans former la
fragilité de son partenaire Julien Rousseaux en abîme existentiel. Ballottée
de l'un à l'autre, aux accents d'une "danse de mort" qui rappelle une autre
œuvre du maître suédois, Maroussia Henrich marque bien son territoire.
Le rendu pictural du travail scénique de Frédéric Fage est vraiment à
souligner. Aussitôt le rideau levé, le spectateur sera ailleurs. Dans un pays
suranné aux odeurs capiteuses, aux décors lourds, à une époque où la
femme, objet de désirs interdits, sent le souffre mais commence à savoir en
jouer. On pense à Félicien-Rops, à Gustave Moreau, voire aux pré-
raphaélistes anglais, à la littérature de Pierre Louÿs ou de Rémy de
Gourmont.
Rarement, dans le théâtre d'aujourd'hui, on aura eu la conviction que c'est
la scénographie qui est première pour éclairer un texte et en donner une
vision cohérente.
S'attaquer à Strindberg n'est pas chose facile, Frédéric Fage permet de
mettre un pied dans son univers. S'il y pénètre par la porte dérobée d'un
texte prétendument mineur, il n'en faut pas moins louer sa démarche.
Philippe Person Froggy's Delight
Les Créanciers au Studio Hébertot
Donnez votre avis Envoyez à un ami Publié par Rémy
Ce que j'aime depuis que j'écris pour Paris Tribu, c'est voir des pièces que je n'aurais pas spécialement choisies en priorité, et être totalement embarqué dans un univers que je connais peu. Ce fut le cas avec « Les Créanciers » de Strindberg dans la superbe salle du Studio Hébertot. Si l'amour n'est pas une monnaie, il n'est pas un acte gratuit non plus : Il laisse des créances dans le coeur des amants. Dans les liens qui se tissent, les serments qui s'échangent, chacun est créancier de l'autre et peut à tout moment venir reprendre ses gages. « Les Créanciers » est une double histoire d'amour qui se solde entre une femme - romancière renommée - et deux hommes follement épris d'elle. Ce que j'ai aimé immédiatement c'est les voix des comédiens. Des vrais voix de théâtre, puissantes, touchantes et maîtrisées, ça joue quoi ! Trois rôles bien définis : Julien Rousseaux, en artiste tourmenté, pétillant et très attachant, Benjamin Lhommas, en manipulateur exquis et Maroussia Henrich, dangereusement attirante. Même si trop dans l'emphase pour moi à certains moments, les comédiens se donnent corps et âme dans leur rôle. J'avais la chance d'être au premier rang et les regards ne trompent pas. Ils ne décrochent pas une seconde, on est totalement embarqué dans cette tragique histoire d'amour. Frédéric Fage signe ici une très belle mise en scène. J'aime voir les corps des comédiens bien en place. C'est fluide. Tout est bien réfléchi avec plein de détails. L'espace, le choix des matières des costumes, des couleurs ou des accessoires, tout est maîtrisé jusqu'à la chevelure de l'actrice. Rien n'est laissé au hasard. Tout est mis en oeuvre pour succomber aux charmes
de l'un, puis de l'autre, pour finalement ne plus savoir à qui faire confiance. L'histoire monte crescendo. Il est question de jalousie, de vengeance, de manipulation, Subtilement, à la manière d'une histoire à suspens, vont se découdre les liens jusqu'au terme de l'aventure que l'on croirait sortie d'Othello de Shakespeare. La scène finale est sublime. Maroussia Henrich y est d'une justesse incroyable, totalement impliquée et profondément émouvante. L'intervention de la danseuse est un parti pris très intéressant et rajoute encore de la beauté à cette pièce. Pour ma part j'aurais aimé qu'elle intervienne plusieurs fois pour décrire l'état dechaquepersonnage. C'est beau, sensuel, intense et puissant.Une belle découverte ! Rémy D'Arcangelo le 20 mars 2016 http://www.paristribu.com/
SPECTACLE CREANCES AMOUREUSES… 19 MARS 2016 LAISSER UN COMMENTAIRE
Les Créanciers met en scène une femme et deux hommes dans un affrontement des sentiments
qui va crescendo. Ce très beau texte de Strindberg, qui date de 1888 mais témoigne d’une
grande modernité, évoque l’amour en couple et ses déceptions, ce que l’on doit à l’autre, ce
qu’on lui prend pour ne jamais lui rendre mais dont on lui est éternellement redevable. Un jeu
de créances amoureuses dont nul ne sort indemne.
Crédits photo : Slimane Brahimi
Frédéric Fage met en scène dans cette pièce la jalousie, la soif de vengeance et les manipulations
entre les trois personnages de ce huis-clos, qu’il sous-titre « Récit d’un sentiment intemporel et
transgénérationnel ». Son objectif est de transposer la pièce au temps présent, tout en respectant les
codes de cette tragi-comédie. Il renouvelle ainsi le genre afin d’étendre la diffusion du texte à un
public plus large.
La performance de Benjamin Lhommas, qui interprète le rôle de Gustaf, est à saluer, parfait mélange
de noirceur et de séduction. L’intensité monte au fil du texte, avec des acteurs qui expriment
parfaitement toute leur douleur et leur frustration avec une excellente maitrise du texte.
Le metteur en scène a choisi de ponctuer sa pièce par deux scènes dansées qui viennent donner vie à
la statue du sculpteur. Même si l’intention artistique de souligner l’état psychologique du
personnage tourmenté de l’artiste est parfaitement mise en scène par une interprétation est d’une
grande qualité, nous avons trouvé que cela diluait quelque peu le drame au lieu de le renforcer.
Les Créanciers est une pièce d’une belle intensité parfaitement interprétée, à découvrir jusqu’au 23
Avril au Studio Hébertot à Paris, du mardi au samedi à 21h et le dimanche à 15h.
par Clémence Vernoux · 23 mars 2016
L’amour n’est pas sans conséquence. Source de bonheur, il laisse tout autant de marques
dans les cœurs déchirés des amants, des créances. Les liens tissés et les promesses
partagées rendent chacun créancier de l’autre, susceptible de venir reprendre ses
gages, tôt ou tard…
Le Studio Hébertot nous invite à découvrir l’œuvre majeure du grand écrivain suédois
August Strindberg, Les Créanciers, le temps de trente représentations magistrales.
La pièce de théâtre Les Créanciers est le « récit d’un sentiment intemporel et
transgénérationnel », un triangle amoureux dont aucun ne ressortira indemne.
L’histoire d’une passion nourrie par deux hommes, pour une femme flamboyante et
dangereusement séductrice, Tekla. Adolf, jeune artiste beau et puissant, a volé Tekla à
Gustave. Ténébreux et manipulateur, ce dernier a soif de vengeance et vient de reprendre
à Tekla ce qu’elle lui a volé, son honneur.
Venant captiver Adolf, il saura tout d’abord le charmer, devenir son ami (voire même le
séduire ?) et lui redonner goût à la création, avant de le tourmenter encore davantage sur
sa relation avec Tekla.
Puis venant à bout de son plan machiavélique, il piègera Tekla et mènera son couple
à sa destruction.
Adaptée pour la première fois de manière contemporaine, ce huit-clos se déroule
dans une pièce hors de tout cadre spatio-temporel. Une chambre d’hôtel au bord de la
mer ? Un salon ? Une sculpture et un tableau de Tekla créés par Adolf, un sofa ni
vraiment lit ni canapé, une psyché et un fauteuil, un paravent et une commode viendront
aménager le cadre du drame.
La pièce est rythmée par une musique étonnante, entre tango et chanson à texte, sur
laquelle une jeune danseuse s’élève avec grâce, symbolisant l’intensité des tourments qui
habitent Adolf.
Le choix de mise en scène de cette pièce de la fin du XIXe siècle invite le spectateur à
s’interroger. Se déchirerait-on encore autant par amour aujourd’hui ? Les sentiments
amoureux sont-ils encore si purs, si intenses, à l’heure où nos relations se font et se
défont d’un claquement de doigts, ou plutôt d’un simple clic sur nos smartphones ?
L’amour n’est pas sans conséquence. Source de bonheur, il laisse tout autant de marques
dans les cœurs déchirés des amants, des créances. Les liens tissés et les promesses
partagées rendent chacun créancier de l’autre, susceptible de venir reprendre ses
gages, tôt ou tard…
Le Studio Hébertot nous invite à découvrir l’œuvre majeure du grand écrivain suédois
August Strindberg, Les Créanciers, le temps de trente représentations magistrales.
La pièce de théâtre Les Créanciers est le « récit d’un sentiment intemporel et
transgénérationnel », un triangle amoureux dont aucun ne ressortira indemne.
L’histoire d’une passion nourrie par deux hommes, pour une femme flamboyante et
dangereusement séductrice, Tekla. Adolf, jeune artiste beau et puissant, a volé Tekla à
Gustave. Ténébreux et manipulateur, ce dernier a soif de vengeance et vient de reprendre
à Tekla ce qu’elle lui a volé, son honneur.
Venant captiver Adolf, il saura tout d’abord le charmer, devenir son ami (voire même le
séduire ?) et lui redonner goût à la création, avant de le tourmenter encore davantage sur
sa relation avec Tekla.
Puis venant à bout de son plan machiavélique, il piègera Tekla et mènera son couple
à sa destruction.
Adaptée pour la première fois de manière contemporaine, ce huit-clos se déroule
dans une pièce hors de tout cadre spatio-temporel. Une chambre d’hôtel au bord de la
mer ? Un salon ? Une sculpture et un tableau de Tekla créés par Adolf, un sofa ni
vraiment lit ni canapé, une psyché et un fauteuil, un paravent et une commode viendront
aménager le cadre du drame. La pièce est rythmée par une musique étonnante, entre
tango et chanson à texte, sur laquelle une jeune danseuse s’élève avec grâce, symbolisant
l’intensité des tourments qui habitent Adolf.Le choix de mise en scène de cette pièce de
la fin du XIXe siècle invite le spectateur à s’interroger. Se déchirerait-on encore autant
par amour aujourd’hui ? Les sentiments amoureux sont-ils encore si purs, si intenses, à
l’heure où nos relations se font et se défont d’un claquement de doigts, ou plutôt d’un
simple clic sur nos smartphones ?
LES CREANCIERS PAR YVON BEDU
Le côté obscur d’August Strindberg habille de noirceur subtile et
jubilatoire le Studio Hébertot avec cette adaptation des Créanciers,
transposée de nos jours. Le styliste et créateur Yohann Fayolle apporte son
visionnaire et fougueux talent à une partie des costumes féminins du cast..
Ce qui livre une ténébreuse touche de prestige supplémentaire à une tragédie de
choix qui vous emporte dans les méandres de l’âme humaine et des relations
amoureuses sous la forme d’un triangle vénéneux.
C’est un peu le bal des vampires dans sa version la plus noire, qui suffoque de
possession extatique et de passion vengeresse par son trio fatal d’interprètes
assoiffés d amour à mort !!! Maroussia Henrich, Benjamin Lhommas et Julien
Rousseaux incarnent les cinglants créanciers dont le sombre talent virtuose n’a
d’égal que la finesse du metteur en scène, Frédéric Fage, débiteur de choix pour
cette pièce envoutante qui vous possède le corps et l’âme jusqu’à la dernière
minute.
Au Studio Hébertot jusqu au samedi 23 avril.
le 16/04/2016
Avignon 2016 :
14 juillet 2016 On parle des "CRÉANCIERS" à l'antenne de NOSTALGIE, ce matin:
« Une belle surprise au Collège de la Salle avec une adaptation des Créanciers de Strindberg. La troupe des îles du vent place ici l’intrigue dans un décor très esthétique et le jeu des comédiens permet de ressentir toute l’intensité dramatique de cette pièce dont on croyait avoir fait le tour. Entre tension psychologique et rhétorique portée haut, on ressort de ce spectacle tout chamboulé et plus sûr de rien. »
Yves POEY
7/10 1700
J.F. Kennedy avait souvent coutume de répéter : « Je pardonne à ceux qui m'ont offensé, mais j'ai la liste
! », ce qui revient à peu près à dire que la vengeance est un plat qui se mange froid.
Ici, dans ces « créanciers », non seulement elle se mange froid, cette vengeance, mais elle se mange à
trois.
En effet, dans cette pièce écrite en 1888, au sortir d'une récente rupture, (d'où probablement le caractère
plutôt misogyne de ce texte), Strindberg va étudier la notion de créance amoureuse.
Les trois personnages en scène vont tour à tour venir présenter leur créance à l'un ou aux deux autres
protagonistes.
Adolf (Julien Rousseaux), artiste-peintre, sculpteur, est marié à Tekla (Maroussia Heinrich, lascive à
souhait) romancière à succès, femme libre et émancipée sexuellement, qui doit en grande partie son
succès à son mari qui « lui a appris l'orthographe » et l'a présentée aux cercles littéraires en vogue.
Au lever de rideau, Adolf est rejoint par un certain Gustav (l'excellent Benjamin Lhommas), qui petit à
petit va distiller son poison : le mari va se mettre à douter de son épouse et de son amour et va lui
demander des comptes.
Puis, tout au long de cette heure et quart, le tension va monter, et l'on va finir par apprendre par petites
touches subtiles que Gustav n'est autre que l'ex-mari de Tekla.
Elle l'a trompé, puis abandonné : lui aussi va finir par présenter sa terrible créance qui va engendrer le
chaos.
La grande réussite de la mise en scène de Frédéric Fage, après avoir transposé cette pièce de nos jours,
(les personnages sont devenus des sortes de bobos près du Canal St Martin, dans le XIXème), c'est
d'avoir su parfaitement faire monter la sauce et la tension.
J'ai été déstabilisé en permanence : on ne sait pas qui manipule qui, on ne sait jamais trop sur quel pied
danser.
De ce point de vue, Benjamin Lhommas est parfait : il parvient parfaitement à graduer son jeu : de
primesautier et apparemment léger, il devient machiavélique et véritablement pervers lorsqu'il déploie sa
stratégie.
Alors, évidemment, on peut se demander s'il a l'âge du rôle : dans cette version, les deux hommes ont
quasiment le même âge, alors que le texte fait référence à un Gustav-premier-mari plus âgé. C'est un
professeur de littérature déjà bien établi.
Mais bien entendu, le théâtre est l'art des conventions.
On peine également parfois à s'identifier aux personnages, mais il est vrai que le texte est tellement
dense, qu'il importe de ne rien rater...
L'amour peut-il être totalement gratuit, ou doit-il forcément s'accompagner de créances inéluctables ?
L'amour se monnaye-t-il ?
C'est à ces trois questions qu'il nous faut essayer de répondre, une fois le rideau tiré.
Eh non, le théâtre n’est pas encore complètement mort en Avignon ! Il existe encore des metteurs en scène et des comédiens qui bravent la mode de l’adaptation d’un roman ou autre « écriture de plateau » pour se saisir d’un bon vieux texte de théâtre, i.e. écrit pour être joué sur une scène, et essayer de le traduire fidèlement (ce qui n’interdit évidemment pas de faire preuve de modernité : la matière théâtrale n’est pas figée, le même texte peut donner lieu à bien des interprétations, et chaque époque a sa propre lecture du passé).
Même dans le IN, il peut arriver de tomber sur une (vraie) pièce de théâtre (voir notre billet n° 10 consacré au Radeau de la Méduse). C’est plus fréquent dans le OFF, sans que l’on puisse dire pour autant que ces pièces y soient les plus nombreuses, car il laisse de plus en plus de place aux adaptations d’œuvres littéraires, aux seuls en scène (comiques ou non), à la danse, au (nouveau) cirque, etc. Aussi est-ce un événement quand on tombe successivement sur deux (vraies) pièces, l’une moderne et l’autre contemporaine, dans des genres très différents mais toutes les deux à recommander sans hésiter.
Les Créanciers
Une pièce de Strindberg au sommet de son art, à quarante ans, créée en 1889, un an après Mademoiselle Julie, l’immense succès sans cesse repris de cet auteur, une pièce plus proche de nous néanmoins par le thème et non moins intense. Point de domestiques ici mais trois « bobos », un peintre, Adolphe, sa femme écrivaine, Tekla, un professeur, Gustave, qui se débattent dans les affres de la passion et de la jalousie avec des mots qui pourraient être ceux d’aujourd’hui. Loin de paraître comme une facilité, la transposition dans notre monde accentue au contraire l’actualité des propos entendus sur le plateau. Aucune facilité, en tout état de cause, dans la mise en scène de Frédéric Fage qui joint à une attention pointilleuse sur les costumes, les accessoires, les lumières, l’environnement sonore, une direction d’acteurs précise et exigeante. Après la première scène entre Adolphe et Gustave, une grande danseuse aux battements impressionnants illustre d’une manière aussi puissante qu’originale l’adoration que les deux hommes portent à Tekla.
Une adoration non dépourvue de chagrin et de rancune. Pas de financiers dans cette pièce : les deux hommes détiennent (ou croient détenir) une autre sorte de créance sur Tekla. Alors que, inconscients pygmalions, ils lui ont (croient-ils) tout appris, elle les a maintenant dépassés et surtout, crime entre les crimes, elle ne les aime plus (croient-ils encore).
Emmenés par un machiavélique Benjamin Lhommas aux yeux perçants et au strabisme inquiétant, ses camarades accomplissent également de belles performances d’acteur : Julien Rousseaux (Adolphe) mal à l’aise dans son corps pourtant sculptural et Maroussia Henrich (Tekla) élégante et séduisante comme il convient et infiniment moins perverse que les deux autres ne l’imaginent.
Frédéric Fage pousse ses comédiens dans des attitudes qui n’étaient pas de mise dans les salles fréquentées par la bourgeoisie corsetée du XIXe siècle finissant. La passion se fait charnelle sans tomber pour autant dans la nudité de rigueur dans le festival homonyme (le IN comme on aura compris) et les rapports entre les deux rivaux traduisent parfois, du moins chez Gustave, une attirance physique dont on ne sait si elle est réelle ou si elle n’est qu’une arme de plus pour déstabiliser Adolphe.
Bref un très beau spectacle, le premier depuis le début du festival dont nous avouons n’être pas sorti indemne.
https://alchimieduverbe.com/ LES CRÉANCIERS D’AUGUSTE STRINBERG DANS UNE MISE EN SCÈNE DE FRÉDÉRIC FAGE PAR LA TROUPE DU VENT DES ÎLES MOOREA.
Nous avons pu assister à la générale du spectacle présentée au Collége de la Salle ce mercredi 6
Juillet
Le metteur en scène nous livre une réflexion contemporaine sur ce texte d’August Strindberg
donnée à entendre et à voir dans une mise en scène et une direction d’acteurs pleines d’injonctions
angoissées et saisissantes. Le metteur en scène dans son projet dramaturgique reste fidèle à
l’auteur suédois tout en donnant à entendre le texte dans une forme renouvelée rendant compte à
mon sens avec intelligence des passions convulsives qui imprègnent l’agir des personnages.
L’ensemble se construit autour d’un érotisme plissé, partagé entre l’étreinte et la fadeur du désir
sauvage, entre des sentiments irrigués par l’amour et des supplantations possédées par la haine de
l’orgueil blessé des personnages. Le metteur en scène décrit sa pièce comme un huis clos,
révélateur de notre enfermement, de nos limites à se dire les choses et notamment dans le couple.
La troupe interroge ainsi ces différentes « créances », ce que l’on doit à l’autre en quelque sorte,
l’idée que des êtres s’approchant mutuellement et se fondant en couple puissent se construire et
se détruire l’un l’autre. Mais la pièce de Strindberg et l’interprétation flamboyante des comédiens
dépassent ce que l’on pourrait considérer comme des banalités sur le couple.
Il semble que le metteur en scène a su tirer une grande part des richesses de ce texte, et a su
mettre en valeur quelque chose qui est évidemment présent dans le texte, à savoir l’érotisme des
corps, l’idée des échanges qui seraient à la fois des caresses et des coups de couteaux. Cependant,
Frédéric Farge paraît insuffler à son texte quelque chose d’une pulsion non plus seulement intime
ou intérieure mais plastique. Les dispositifs qui entourent les comédiens, qu’il s’agisse d’une
scénographie qui évoque vaguement l’atelier d’un artiste, ou bien encore de l’utilisation en simili
d’images projetées qui sont des représentations artistiques de ce qui se déroule sur scène, ou bien
même d’interstices musicaux et chorégraphiques, participent de l’émergence d’un monde non pas
seulement psychologique attaché à la matière textuelle mais bien artistique, et c’est ce qui reste
très difficile à réaliser lorsque l’on monte une pièce d’un auteur tel que Strindberg.
Si l’on s’attache à déniveler l’histoire, il s’agirait d’une sorte de récit à la fois vécu comme prisme
du déchirement du couple mais aussi comme déchéance et mort de l’art. En effet, le personnage
d’Adolph, représenté en demie-teinte et incarné par Julien Rousseaux, désespère de ce que son
amante ou sa femme ne lui soit ni entièrement conquise ni entièrement dévouée. La sculpture
présente sur scène qu’il est censé avoir réalisé est assez révélatrice de ce que l’art pour lui ne
saurait se vivre sans passions, parce que l’art est à la fois politique et poétique, qu’il vient des
idées et qu’il croit en l’espoir et en l’amour. Alors fatalement quand on ne croit plus à l’amour, ce
qui est le cas d’Adolph, créer, c’est arracher des fragments. Créer une statue sans visages, un
simple buste sans vie, c’est jouer de l’illusion sans illusions.
Le personnage de Tekla incarné par Maroussia Henrich revêt à la fois une dimension érotique et
une concentration morbide inquiétante. Il reste que pourtant éprise et amoureuse d’Adolph, elle
fait montre d’une passion folâtre et désinvolte, en réalité éprise d’elle même, et je ne sais si cela
constitue un choix de costume pour le metteur en scène, mais la robe qu’elle revêt au cours de la
scène avec Gustav, qui s’agrémente de sortes de bracelets arrimés à ses poignets qui se perpétuent
en petites chaînes qui rejoignent un collier proche d’un torque, forme une image impérissable de
son égotisme. Le personnage de Gustav quant à lui interprété par Benjamin Lhommas apparaît
comme un ange destructeur à l’ombre de son accomplissement, la référence à la peinture de
Jérome Bosch dans le texte est en cela parfaitement explicite. Il serait l’ancien mari de Tekla et
devient par nécessité l’ami d’Adolph.
En définitive, le récit est grandi par l’ardeur des comédiens dont l’énergie reste pure et
angoissante, convulsive tout en étant exigeante et claire. La compagnie nous dévoile ainsi avec art
et discernement un grand texte classique tout en accordant à la dramaturgie un vrai travail de fond
artistique et humain, un spectacle en somme qui n’est pas en mesure de décevoir tant on est
intranquille de découvrir son déchirement à travers le retour de Gustav, une sorte de mari
prodigue.