P SILOISEAU E MEURT C L E T I E R

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S I L’ OISEAU MEURT F R A N C I N E P E L L E T I E R A L I R E Extrait de la publication

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SI L’OISEAUMEURT

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PELLETIER

AA LL II RR EEExtrait de la publication

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À PROPOS DES JOURS DE L’OMBRE


« MERVEILLEUX, J’EN SUIS ENCOREÉMERVEILLÉE !!! [
] FRANCINE PELLETIER JOUE

AVEC NOS NERFS PENDANT 300 PAGES, ELLE JONGLE AVEC LE FUTUR, LE PRÉSENT,

L’ICI ET L’AILLEURS À MERVEILLE. »Les Chroniques de l’Imaginaire

« SI CE N’ÉTAIT PAS DE CET ƒIL QUI APPARAÎTD’ENTRÉE DE JEU SOUS LE SEIN DE SON HÉROÏNE,

CETTE DERNIÈRE SEMBLERAIT TOUT AUSSIACCESSIBLE QUE N’IMPORTE QUEL PERSONNAGE

D’UN ROMAN DE MARIE LABERGE. »Le Journal de MontrĂ©al

« ON SE LAISSE ENVOÛTER EN DOUCEURPAR L’INTRIGUE DES JOURS DE L’OMBRE, QUI MET

EN SCÈNE UN PERSONNAGE FÉMININAUQUEL ON S’ATTACHE RAPIDEMENT

ET QU’ON REGRETTE DE QUITTERAU MOMENT DE TOURNER LA DERNIÈRE PAGE. »

Voir – MontrĂ©al

« IMPOSSIBLE D’ARRÊTER LA LECTURETANT L’HISTOIRE COULE D’ELLE-MÊME. [
]

PELLETIER NOUS OFFRE DE BELLES SURPRISES,GRÂCE À UNE HISTOIRE BIEN FICELÉE

ET DES PERSONNAGES VIVANTS, ATTACHANTSET COMPLETS. À LIRE ABSOLUMENT. »

Brins d’éternitĂ©

« MAIS L’ÉCRIVAINE, COMME DIEU, EST DANS LES DÉTAILS, ET CE SONT EUX

QUI DONNENT AU RÉCIT SA PROFONDEUR – SANSOUBLIER SON CHARME DISCRET MAIS PÉNÉTRANT. »

SolarisExtrait de la publication

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DE LA MÊME AUTEURE

Livres jeunesse (extraits)

Le Rendez-vous du désert. Roman.Montréal, Paulines, Jeunesse-pop 59, 1987.

Mort sur le Redan. Roman.Montréal, Paulines, Jeunesse-pop 64, 1988.

Le Crime de l’Enchanteresse. Roman.MontrĂ©al, Paulines, Jeunesse-pop 66, 1989.

Monsieur Bizarre. Roman.Montréal, Paulines, Jeunesse-pop 70, 1990.

Le SeptiĂšme Écran. Roman.MontrĂ©al, Paulines, Jeunesse-pop 80, 1992.

La Saison de l’exil. Roman.MontrĂ©al, Paulines, Jeunesse-pop 82, 1992.

La PlanÚte du mensonge. Roman.Montréal, Paulines, Jeunesse-pop 89, 1993.

Le Cadavre dans la glissoire. Roman.Montréal, Paulines, Jeunesse-pop 92, 1994.

Cher ancĂȘtre. Roman.MontrĂ©al, MĂ©diaspaul, Jeunesse-pop 115, 1996.

Damien mort ou vif. Roman.Montréal, Médiaspaul, Jeunesse-pop 119, 1997.

Les Eaux de Jade. Roman.Montréal, Médiaspaul, Jeunesse-pop 134, 2000.

Le Crime de Culdéric. Roman.Montréal, Médiaspaul, Jeunesse-pop 141, 2001.

Livres adulte

Le Temps des migrations. Recueil.Longueuil, Le Préambule, Chroniques du futur 11, 1987.

Le Sable et l’Acier1. Nelle de Vilvùq. Roman.

Beauport, Alire, Romans 011, 1997.2. Samiva de Frée. Roman.

Beauport, Alire, Romans 016, 1998.3. Issabel de Qohosaten. Roman.

Beauport, Alire, Romans 019, 1998.

Les Jours de l’ombre. Roman.LĂ©vis, Alire, Romans 075, 2004.

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FRANCINE PELLETIER

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Illustration de couverture : STEVE BOLDUC

Photographie : DANIELLE COUTURE

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À E.V.qui trouvait que

ça manquait d’émotion

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TABLE DES MATIÈRES

PREMIÈRE PARTIE

La venue au monde . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1

DEUXIÈME PARTIE

L’envol . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83

TROISIÈME PARTIE

Turbulences . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 169

QUATRIÈME PARTIE

La chute . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 269

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PREMIÈRE PARTIE

LA VENUE AU MONDE

1Avec la conscience revint le dĂ©sir.À moins que ce ne fĂ»t le contraire, le dĂ©sir provoquant

l’étincelle, le mouvement vers la lumiĂšre? Plus tard, ilse questionnerait Ă  ce propos, quand il aurait recouvrĂ©son intĂ©gritĂ©, quand l’existence chez les LaganiĂšre res -semblerait Ă  un rĂȘve lointain. Sur le moment, ce fut unegĂȘne, un vague malaise. Dans la simplicitĂ© de l’affectionqu’il portait Ă  Marthe, soudain Ă©mergea une chose en coreindĂ©finie, et qui pourtant Ă©tait mal. Un frĂ©missement dansson corps, le durcissement de son membre. Le dĂ©sir.

Ses longues jambes Ă©tendues devant lui, son torseĂ  demi tournĂ© vers Paul, il manipulait un jouet, l’un deces cubes en bois peints sur lesquels Ă©taient gravĂ©es leslettres de l’alphabet.

Paul lui prit le cube, le posa par terre entre eux.— Regarde : m-a-n-u, Manu. C’est ton nom, ça.Manu rit, un rire de petit enfant, libre d’arriĂšre-pensĂ©e,

dĂ©gagĂ© de tout souci, le rire d’un ĂȘtre qui se contented’exister, qui n’a encore ni passĂ© ni avenir. Sur le visagede Paul se lisait satisfaction et fiertĂ©, comme chez ungrand frĂšre heureux des progrĂšs du benjamin. Paul avaitonze ans, ses joues montraient encore la rondeur del’enfance. Le petit Paul. Et le grand petit Manu.

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— Regarde, Manu, ça, c’est mon nom. P-a-u-l, Paul.Et il regarda, oui, il regarda, et tout à coup il vit un

mot surgi d’un autre temps, d’une autre vie. Il fronçales sourcils, se pencha, ses mains errĂšrent au-dessusdes cubes. Il prit le « n » de Manu, l’ajouta Ă  « Paul ».Et le garçon qui portait ce nom rit Ă  son tour, incons-cient de ce que le jeu avait provoquĂ©.

— Paul’n, ça ne veut rien dire.Il prononçait « paulenne », comme dans pollen.

Comme dans
Pauline !Manu hurla. Ses grandes jambes et ses longs bras

Ă©parpillĂšrent les jouets dans un mouvement convulsif.Le bruit alerta Johnny mais, par chance, Marthe ap -parut derriĂšre le mĂ©dicaide avant qu’il n’intervĂźnt etelle le renvoya dans son coin.

Il y en avait eu d’autres, avant, de ces espĂšces decrises. À travers le brouillard de l’oubli, Manu revoyaitles traits impassibles de Johnny quand il intervenait,ses mains aux articulations souples et pourtant rigides,sa poigne d’acier, l’expression de son visage que rienne pouvait troubler. Johnny ne cĂ©dait jamais. Johnnyne dormait jamais. Manu haĂŻssait Johnny.

Johnny n’était pas le seul mĂ©dicaide dont disposaitle docteur LaganiĂšre. Manu connaissait le vieux FrankiemĂȘme s’il n’avait jamais affaire Ă  lui. S’il restait mĂ© -fiant Ă  son Ă©gard, il ne dĂ©testait pas Frankie comme ilhaĂŻssait Johnny. Mais ce dernier avait Ă©tĂ© fourni audocteur spĂ©cialement pour prendre soin de Manu.Rien que pour s’occuper de lui. Pour lui faire cesdĂ©testables injections quotidiennes, pour l’obliger Ă avaler tous ces horribles mĂ©dicaments. Et pour Ă©viterque les crises ne dĂ©gĂ©nĂšrent.

Cette crise-lĂ  se termina comme les autres – oupresque. Marthe se prĂ©cipita prĂšs de Manu sur leplancher de bois de la chambre, et elle serra son

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grand petit bébé dans ses bras, le berça contre elle enmurmurant :

— Chut, chut, mon chĂ©ri, ce n’est rien, calme-toi
Elle disait toujours ça quand il s’énervait. Et Manu

s’apaisait toujours dans la chaleur de ses bras, dansl’odeur de son corps. Avec les cheveux de Marthe quichatouillaient son cou, les lĂšvres de Marthe qui ef -fleuraient son front, la poitrine de Marthe pressĂ©e contreson visage
 Les seins de Marthe.

Voilà. Le désir était réveillé.Le soir, Manu reçut la visite de la docteure Rami

Gurtu – enfin, il savait qu’elle n’était pas vraiment lĂ ,comme le docteur LaganiĂšre le lui avait expliquĂ©, cen’était que son image. Elle Ă©tait dĂ©jĂ  venue avant, decette façon-lĂ , mĂȘme si Manu ne s’en rappelait pastrĂšs clairement, elle avait mĂȘme traitĂ© Manu par mĂ© -dicaide interposĂ©.

Ce soir-lĂ , donc, elle posa beaucoup de questions.Manu avait criĂ© un nom. Il ne se souvenait dĂ©jĂ  pluslequel. La docteure Gurtu et le docteur LaganiĂšres’efforçaient de sourire, mais Manu comprenait qu’ilsĂ©taient prĂ©occupĂ©s. Il Ă©tait dĂ©solĂ©.

Il chercha trĂšs fort Ă  se rappeler, sourcils froncĂ©s.Le docteur LaganiĂšre lui dit de ne plus y penser. Manuvit bien que la docteure Gurtu n’était pas d’accord,qu’elle aurait insistĂ© – et Manu fut reconnaissant audocteur LaganiĂšre, parce qu’il avait peur. Il craignaitde se troubler et que Johnny soit encore obligĂ© d’inter -venir. Mais la docteure Gurtu s’en retourna comme elleĂ©tait venue, Manu quitta le fauteuil d’examen auquelil Ă©tait branchĂ© et le docteur LaganiĂšre lui ta potal’épaule gentiment.

Il y eut encore des crises aprĂšs, et du dĂ©sir. L’érec tionvenait parfois avant, parfois aprĂšs la crise. Il y avaitles Ă©rections de la nuit, celles qui Ă©veillaient Manu

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par leur violence, puis le laissaient confus et honteux.Ces nuits-lĂ , c’était un rĂȘve qui provoquait la chosemais, mĂȘme s’il ne se rappelait jamais ses rĂȘves, ilrestait persuadĂ© que ce n’était pas bien. Les Ă©rectionsdu jour naissaient au contact de Marthe. Aucune autrefemme ne lui faisait cet effet. Évidemment, la prĂ©sencepas tout Ă  fait rĂ©elle de la docteure Gurtu comptait Ă peine, mais Manu voyait d’autres femmes bien enchair.

Comme la pasteure La Rocca qui Ă©tait venue quel quesfois lui rendre visite afin de lui enseigner la vie de JĂ©sus.Manu connaissait JĂ©sus, bien sĂ»r, mais il n’en avaitpas soufflĂ© mot Ă  la pasteure pour ne pas la peiner,d’autant plus qu’elle parcourait – Ă  pied – un longchemin pour venir de sa ferme Ă  la GaiĂ©zza, la pro-priĂ©tĂ© des LaganiĂšre. Manu lui aurait volontiers Ă©pargnĂ©le trajet, car JĂ©sus ne lui semblait pas, du moins audĂ©but, quelqu’un de trĂšs intĂ©ressant. Mais Marthe ytenait, alors


Quand la pasteure venait voir Manu, elle apportaitun livre, un vrai livre en papier, illustrĂ©, et elle lui ra -contait JĂ©sus, son enfance entre ses frĂšres et ses sƓurs,avant qu’il ne reçoive l’appel de son pĂšre qui Ă©tait auxcieux et qui l’avait envoyĂ© sauver les gens des pĂ©chĂ©s.

Manu, lui, savait qu’il commettait tout le temps lepĂ©chĂ© de la chair.

Le docteur LaganiĂšre n’aimait pas quand la pas-teure venait rendre visite Ă  Manu. Oh, il ne disaitrien, mais Manu n’avait pas besoin qu’on lui disecertaines choses pour les comprendre. Quand elle lepouvait, la pasteure venait en l’absence du docteur.Le docteur, croyait Manu, tolĂ©rait la prĂ©sence de lapasteure pour faire plaisir Ă  Marthe, car Marthe aimaitbeaucoup JĂ©sus. Manu aimait plaire Ă  Marthe.

Un jour, la pasteure raconta la passion de JĂ©sus,avec les images du livre Ă  l’appui. Ce fut une Ă©trange

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expĂ©rience. JĂ©sus avait reçu des coups de fouet, etpuis les soldats s’étaient moquĂ©s de lui et lui avaientenfoncĂ© une couronne d’épines sur la tĂȘte. Manu savaitcombien ça pouvait ĂȘtre douloureux, parce qu’il avaitune fois glissĂ© la main dans la haie de sabrĂ©pine pourrĂ©cupĂ©rer une balle, dans le jardin, et ça lui avait faitvraiment mal. Mais en plus, JĂ©sus avait portĂ© une poutrede bois sur un long trajet pour se rendre au lieu de lacrucifixion. La pasteure ne narra pourtant pas l’épisodede la croix, car Manu ne lui en laissa pas le loisir. LascĂšne des coups de fouet, illustrĂ©e dans le livre de lapasteure, avait provoquĂ© une puissante Ă©rection.

Sur l’image, JĂ©sus Ă©tait dĂ©nudĂ© jusqu’à la taille. Ilportait une sorte de drap qui semblait sur le point deglisser et de dĂ©voiler le plus intime. Manu aurait bienaimĂ© savoir si JĂ©sus Ă©tait fait comme lui, parce quePaul n’avait qu’un tout petit pĂ©nis, alors que le sienĂ©tait Ă©norme. Le dos de JĂ©sus Ă©tait zĂ©brĂ© de profondesmarques dĂ©goulinantes de sang et son visage exprimaitune terrible souffrance.

Plus Manu regardait l’image, plus il s’agitait surson siĂšge. Est-ce que la pasteure se rendait compte dece qui lui arrivait ? Est-ce qu’elle voyait le pantalontendu lĂ  oĂč son membre se gonflait ? Manu se sentaitĂ  la fois anxieux et intĂ©ressĂ©. Que se passait-il dans lecorps de la pasteure quand elle racontait le martyrede JĂ©sus?

Quand elle en arriva Ă  la couronne d’épines, lapasteure effleura le front de Manu pour lui indiquerl’endroit oĂč JĂ©sus avait subi les blessures et, Ă  cecontact, Manu fut parcouru d’un frisson.

La pasteure avait une silhouette sans grĂące, desmembres vigoureux, un visage honnĂȘte, sans charme.En fait, pour Manu, elle n’était pas une femme, elleĂ©tait tout simplement la pasteure. Pourtant, ce jour-lĂ ,le lĂ©ger effleurement de sa main accentua le trouble

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de Manu Ă  un point tel que, n’y tenant plus, il se levaet se prĂ©cipita aux toilettes. La pasteure crut qu’il avaitun malaise et appela Johnny. Heureusement pour Manu,l’entrĂ©e en scĂšne du mĂ©dicaide avait toujours l’effetd’une douche froide. Quand Marthe survint Ă  son tour,la chose avait passĂ© et Manu prĂ©tendit qu’il avait eula nausĂ©e. Il espĂ©ra, sans conviction, que l’incidentserait oubliĂ©. HĂ©las, le docteur LaganiĂšre Ă©tait Ă  lamaison ce jour-lĂ . Ce fut la seule occasion oĂč Manule vit exprimer de la colĂšre (la pasteure ne l’avait-ellepas surnommĂ© « le bon docteur»?).

Manu n’entendit pas les paroles Ă©changĂ©es, biensĂ»r – une vitre sĂ©parait sa chambre de la salle d’examenet, en plus, la « conversation » eut lieu dans la cuisine,derriĂšre la porte de communication fermĂ©e –, mais levisage du docteur Ă©tait encore empourprĂ© quand ilvint dire bonsoir. Manu ne sortait jamais de sa chambreaprĂšs la nuit tombĂ©e – les petits garçons se couchentde bonne heure –, toutefois Marthe et le docteur, quandil Ă©tait Ă  la maison, venaient lui souhaiter la bonne nuit.

Quelle qu’eĂ»t Ă©tĂ© la «conversation» entre les adultes,la pasteure ne reparut pas Ă  la GaiĂ©zza avant longtemps.Plus tard, lorsque Marthe, prenant le relais, recom-mença Ă  enseigner les paroles de JĂ©sus, elle le fit sansle livre illustrĂ©.

Le lendemain de l’incident, Paul raconta le dĂ©partde la pasteure, trĂšs fĂąchĂ©e elle aussi, et comment elleavait traitĂ© le docteur de grossier libĂ©ral, lui dont ladĂ©funte Ă©pouse avait Ă©tĂ© une sainte. Maman, expliquaPaul, croyait en JĂ©sus. Comme Marthe.

La « crise » suivante survint Ă  cause d’un bĂ©bĂ©naissant, plus prĂ©cisĂ©ment Ă  cause du bĂ©bĂ© de Portia,la fille de la pasteure. Portia s’était installĂ©e chez samĂšre pour l’accouchement survenu quelques jours plus

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tĂŽt. Question de bon voisinage, il fallait lui rendrevisite pour la fĂ©liciter. Manu et Paul ne comprenaientpas pourquoi il fallait fĂ©liciter quelqu’un qui avait euun bĂ©bĂ©. Peut-ĂȘtre cela Ă©tait-il un simple prĂ©texte afinde rĂ©tablir de bonnes relations entre LaganiĂšre et LaRocca, supposa Paul. Quel que fĂ»t le motif qui poussaitMarthe, les garçons se rĂ©jouirent: une visite Ă  la fermedes La Rocca, cela signifiait des poursuites en criantpour effrayer le troupeau, des jeux de cache-cache avecCarlo et Giovani, les jeunes frĂšres de Portia, dans lehangar oĂč Ă©taient stationnĂ©s les gros tracteurs Ă  hy -drogĂšne, et puis des tentatives pour semer Johnny, censĂ©ne pas lĂącher Manu d’une semelle, des Ă©clats de rirequand le mĂ©dicaide butait contre les obstacles placĂ©s surson chemin, de la biĂšre bue en catimini malgrĂ© la soi-disant surveillance de Johnny, puis des tonnes de tartinesengouffrĂ©es sous le regard bienveillant de la pasteure.

Parfois, Paul et les frĂšres de Portia jouaient Ă  des jeuxque Manu ne comprenait pas bien, comme lorsqu’ilss’amusaient Ă  dire : « Sang de guerre » ou « MaladitaTerra » et que ça les faisait rire aux Ă©clats. Mais, dansl’ensemble, une visite aux La Rocca Ă©tait synonymede plaisir.

MĂȘme si on se trouvait sur les terres des La RoccadĂšs qu’on sortait de la maison – en fait, dĂšs qu’on avaittraversĂ© la route –, ce n’étaient encore que des champset des enclos Ă  bĂ©tail, Ă  travers lesquels serpentait unchemin Ă©troit creusĂ© d’orniĂšres par les roues des trac-teurs. Il fallait bien une heure de marche pour at teindrela ferme.

DĂšs l’arrivĂ©e, les garçons abandonnĂšrent les damesĂ  leur Ă©change de politesses sur le patio. Quant aubĂ©bĂ©, ce n’était qu’un paquet de couvertures dans unberceau d’osier. Cependant, la faim et la soif mirent unterme aux jeux, ramenant les garçons turbulents versla terrasse. À ce moment, Portia s’affairait Ă  changer la

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couche de son bĂ©bĂ© fille, mais les garçons ne jetĂšrentpas le moindre regard en direction de la table Ă  langer.À cause du bĂ©bĂ©, aucune collation n’était encore servie.De toute façon, Paul n’aimait pas les bĂ©bĂ©s, il l’avaitconfiĂ© Ă  ses compagnons, tout Ă  l’heure dans la grange,parce que bĂ©bĂ© Marie avait tuĂ© maman en venant aumonde, six ans plus tĂŽt.

L’agitation des garçons dĂ©plut au bĂ©bĂ© fille dePortia qui se mit Ă  pleurer, attirant vers elle l’atten-tion gĂ©nĂ©rale. Un mouvement de Portia dĂ©couvritsoudain cette petite chose vagissante, rouge de colĂšre,rouge comme, rouge comme


Manu ne se rendit pas compte qu’il s’était Ă©vanouiavant de revenir Ă  lui par terre, dans l’ombre de Johnny,entourĂ© par les bras de Marthe.

Le docteur LaganiĂšre vint les chercher en voitureet il y eut beaucoup de questions ce soir-lĂ  encore,mais l’émoi fut portĂ© au compte du rĂ©cit de Paul, unPaul tancĂ© vertement, et qui protesta, parce que cen’était pas sa faute s’il avait Ă©tĂ© obligĂ© de rendre visiteĂ  Portia et Ă  son bĂ©bĂ©, il dĂ©testait les bĂ©bĂ©s, papa lesavait bien, comment pouvait-il avoir oubliĂ© ce quele bĂ©bĂ© avait fait Ă  maman


Cette fois encore, Manu n’entendit pas la fin de ladiscussion. Marthe le ramena dans sa chambre et lelaissa tout seul. Il avait bien vu qu’elle avait du chagrinquand elle Ă©tait sortie. DerriĂšre la vitre, Johnny montaitla garde, et Manu lui dĂ©dia la plus affreuse grimacede son rĂ©pertoire.

Ensuite, il prit une longue douche, pendant laquelleil caressa son pĂ©nis jusqu’à l’explosion de plaisir, etc’était vraiment la meilleure idĂ©e du monde, faire çasous la douche, car l’eau ne laissait aucune trace dece qui Ă©tait mal. L’eau – comme l’eau du baptĂȘme,songea Manu – ne lavait-elle pas tous les pĂ©chĂ©s?

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2Manu n’avait pas une notion trùs exacte du temps

qui s’écoulait, car les jours se ressemblaient tous.Paul se rendait Ă  l’école le matin, pendant que Martherestait avec Manu. Elle avait commencĂ© Ă  lui enseignerĂ  lire, Ă  Ă©crire et Ă  compter. L’aprĂšs-midi, elle s’ab-sentait Ă  son tour pendant que Paul venait jouer avec lui.

Ni Paul ni Marthe ne quittaient la maison durantces « absences », bien entendu : ils allaient dans leMonde, ce mĂȘme Monde oĂč se trouvait la docteureRami Gurtu quand elle rendait visite Ă  Manu. Le Monde,c’était trĂšs compliquĂ©, et pourtant Manu parvenait Ă s’en construire une certaine image dans sa tĂȘte quandMarthe ou Paul lui en parlaient, comme s’il s’agissaitd’une chose qu’il savait dĂ©jĂ , un peu comme JĂ©sus qu’ilconnaissait avant que la pasteure le lui enseignĂąt.Quand on se « branchait » pour aller dans le Monde,la rĂ©alitĂ© disparaissait pour laisser place Ă  la virtualité– Ă  un monde oĂč tout Ă©tait possible.

Vint un jour oĂč Manu demanda pourquoi il nepouvait pas les suivre dans cette virtualitĂ©. Lorsque ladocteure Gurtu venait l’examiner, elle se « projetait »hors du Monde. Pourtant, Manu Ă©tait bel et bien branchĂ©

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pendant ces examens, afin que la docteure reçoive lesdonnĂ©es mĂ©dicales. S’il n’entrait pas dans le Monde, ilaccĂ©dait tout de mĂȘme Ă  sa pĂ©riphĂ©rie. Alors, pourquoine pouvait-il se rendre plus loin, pourquoi devait-il resterderriĂšre? Paul, Ă  qui il posa d’abord la question, rĂ© -pondit avec embarras que Manu n’était pas encore assezgrand – dĂ©claration fort paradoxale puisque ManudĂ©passait Paul de plus de cinquante centimĂštres.

Il s’adressa donc Ă  Marthe, qui avait rĂ©ponse Ă  toutmais qui, ce jour-lĂ , demeura un moment sans voix.

— Paul prĂ©tend que je ne suis pas assez grand
rĂ©pĂ©ta Manu, non sans toiser Marthe de toute sa hauteur.

Elle le considĂ©ra avec tendresse.— Il a voulu dire «pas assez vieux».Quand Marthe adoptait ce ton affectueux, d’habi-

tude, Manu fondait. Il se calait contre elle, quémandantune caresse comme un jeune chiot. Ce jour-là, il grom -mela :

— Carlo nous a expliquĂ© comment on fait les bĂ©bĂ©s,comment ils naissent, comment ils grandissent pourdevenir des petits garçons, et puis des papas commeEdegio, et puis des messieurs comme le docteurLaganiĂšre
 Moi, je suis grand comme un vieux, maisje suis quand mĂȘme un petit garçon. Est-ce que jesuis malade? Est-ce que c’est pour ça que je ne peuxpas aller dans le Monde avec vous deux?

Au fur et Ă  mesure qu’il parlait, le visage de Marthes’imprĂ©gnait de tristesse et Manu vint prĂšs de se croireĂ  l’agonie.

— Malade, soupira Marthe. Oui, on pourrait direque tu as Ă©tĂ© malade.

Elle avait parlĂ© au passĂ©, merci JĂ©sus ! Pourtant
— Pourquoi je prends encore tous ces mĂ©dicaments,

si c’est fini ?— Eh bien, tu n’es pas vraiment rĂ©tabli. Et puis, ta

maladie a endommagé des organes qui auront toujours

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besoin qu’on prenne soin d’eux de façon particuliĂšre.Mon chĂ©ri


Il pencha la tĂȘte, elle glissa les mains dans sescheveux, l’attira Ă  elle.

— Mon chĂ©ri, ton cerveau a Ă©tĂ© abĂźmĂ©, mais tu vasretrouver peu Ă  peu tes facultĂ©s, ta
 mĂ©moire. Il fautĂȘtre patient. Tu dois tout rĂ©apprendre.

Ce mot sur lequel elle avait butĂ© : mĂ©moire, ce mot,il pouvait le tourner et le retourner dans sa tĂȘte, dans sabouche, et mĂȘme s’en gargariser. Ce mot ne l’effrayaitpas : il avait Ă©tĂ© malade dans sa mĂ©moire. Et il Ă©tait entrain de guĂ©rir.

Cet aprĂšs-midi-lĂ , Marthe demanda Ă  Manu degarder la chambre. Manu venait Ă  peine de s’attablerdevant ses devoirs quand il vit, par la vitre de sĂ©para-tion, le docteur LaganiĂšre qui s’approchait.

— Tu permets que je te dĂ©range, mon garçon?MĂȘme s’il vivait sous son toit depuis un temps

indĂ©terminĂ©, Manu voyait peu le bon docteur, souventen tournĂ©e auprĂšs de ses patients dissĂ©minĂ©s dans toutle district. Quand le docteur soupait avec ses enfants,sa prĂ©sence donnait au repas une sorte de solennitĂ©qui intimidait Manu. AprĂšs tout, il rencontrait surtoutle docteur pour les examens mĂ©dicaux ou quand leschoses n’allaient pas, comme aprĂšs l’épisode du bĂ©bĂ©de Portia. Il piqua du nez sur sa feuille.

— Vous ne me dĂ©rangez pas.Il s’appliquait Ă  son devoir, installĂ© Ă  la table un

peu trop proche de lui. Manu aurait Ă©tĂ© plus Ă  l’aises’il avait pu reculer sa chaise de quelques centimĂštresmais, dans sa chambre, les pieds de tous les meublesĂ©taient vissĂ©s au plancher. C’était Ă  cause des crisesqu’il avait eues au dĂ©but, avant d’ĂȘtre un garçon rai-sonnable – de vraies grosses crises, disait Paul. Main -tenant, Manu ne risquait plus de se blesser ni de ravagerla piĂšce, mais il Ă©tait habituĂ© Ă  la disposition des

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Extrait de la publication

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meubles, comme il Ă©tait habituĂ© Ă  la minuscule sallede bain, Ă  la fenĂȘtre sans rideaux qui le sĂ©parait de lasalle d’examen et qui permettait Ă  Johnny de le sur-veiller. Il Ă©tait chez lui, mĂȘme s’il prenait maintenantses repas avec la famille dans la vaste cuisine, del’autre cĂŽtĂ© de la porte de communication.

Le docteur LaganiĂšre se pencha sur la table, undoigt posĂ© sur la feuille oĂč Manu avait conjuguĂ© leverbe « prendre ». En dessous, il avait Ă©crit : « J’ap -prends vite mais je ne suis pas patien.»

— Tu n’as pas eu le temps d’écrire le « t » final Ă patient, je crois.

Manu s’empressa d’ajouter la lettre, puis il leva latĂȘte vers son visiteur. Le docteur LaganiĂšre Ă©tait unbel homme, plus grand que Manu. Sous sa criniĂšrear gentĂ©e, son visage aux traits rĂ©guliers exprimait lagentillesse, mais son regard – les yeux de Marthe,Manu s’en rendait compte –, son regard restait sou-cieux.

— Tu sais pourquoi tu es ici, Emmanuel ?— Parce que j’ai Ă©tĂ© malade.— Non. Tu es ici parce que tu es un patient excep-

tionnel.Manu tressaillit. C’était la premiĂšre fois que le

docteur lui parlait ainsi, comme Ă  un adulte.— Tu as eu un accident. Ton cerveau a Ă©tĂ© trĂšs

abĂźmĂ©, comme Marthe te l’a dit.« Accident » n’avait pas Ă©tĂ© le terme employĂ© par

Marthe : elle avait parlĂ© de « maladie », Manu s’ensouvenait fort bien. Il n’en souffla mot, pourtant. Pourune fois que le docteur LaganiĂšre se montrait loquace,cela valait la peine d’écouter ce qu’il avait Ă  raconter.

— Le cerveau humain est une chose extraordinaire,Emmanuel. Tu sais, mĂȘme avant qu’on dĂ©veloppe larĂ© gĂ©nĂ©ration, le cerveau trouvait le moyen de contournerles connexions perdues. Mais lĂ , en plus, la docteure

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Gurtu et son Ă©quipe t’ont greffĂ© des cellules spĂ©cialesqui enseignent aux autres Ă  se rĂ©parer. Et quand ellessont incapables de complĂ©ter la rĂ©paration, les cel-lules spĂ©ciales se mettent Ă  leur place, elles essaient deremplacer les cellules abĂźmĂ©es. Tu vois, ton cerveautravaille trĂšs fort. Tu as d’abord rĂ©appris Ă  marcher, Ă parler, Ă  lire et Ă  Ă©crire


Il tapota la feuille.— Dans le Monde, Emmanuel, il y a des gens qui

ne savent mĂȘme pas lire, tu le sais ?Manu acquiesça mĂȘme si, en fait, non, il n’en savait

rien ; il savait peu de choses du Monde, puisqu’il n’yavait pas accùs.

Le docteur Laganiùre s’assit sur le lit avec un soupir.— Ce que je veux dire, c’est que tu es intelligent.

Tu retrouveras bientĂŽt toutes tes facultĂ©s.— Est-ce que ce sera trĂšs long, docteur?Il se voyait dĂ©jĂ  vieux comme le bon docteur, courbĂ©

sur sa feuille, encore en train d’aligner des additionsou de conjuguer des verbes. Le docteur sourit.

— Sais-tu depuis combien de temps tu es ici,Emmanuel ?

Il secoua nĂ©gativement la tĂȘte. Il ne gardait aucunsouvenir de son arrivĂ©e chez les LaganiĂšre.

— C’était il y a six mois, au dĂ©but de l’hiver.Il tenta de forcer la barriĂšre de sa mĂ©moire, en vain.— En six mois, Emmanuel, regarde les progrĂšs

que tu as accomplis. Ça te paraĂźt bien long mais, Ă l’échelle mĂ©dicale, je t’assure que c’est un rĂ©tablis -sement ultra-rapide.

— Ça veut dire
 Est-ce que je pourrai aller bientĂŽtĂ  l’école, moi aussi ?

Cette mise Ă  l’écart Ă©tait profondĂ©ment injuste.S’il Ă©tait intelligent, pourquoi ne pouvait-il se rendredans le Monde, Ă©tudier, comme Paul, et ensuite trouverun travail, comme Marthe?

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— La docteure Gurtu craint que te brancher aurĂ©seau nuise Ă  ta guĂ©rison. Non, il vaut mieux at -tendre pour aller dans le Monde.

— Quand je ne prendrai plus tous ces mĂ©dicaments?— Quand nous serons sĂ»rs que ça ne reprĂ©sente

pas un trop grand danger pour toi.Il montra la feuille.— Et puis, tu as un trùs bon professeur. D’accord,

je suis un peu partial quand il s’agit de ma fille, maisquand mĂȘme!

Ils rirent. Manu se sentait moins intimidĂ©, presquecomplice du mĂ©decin. L’entretien Ă©tait toutefois clos.Le docteur se leva et tapota l’épaule de Manu.

— Paul attend impatiemment de venir te rejoindre,tu devrais terminer tes devoirs pour jouer avec lui.

Le message Ă©tait clair : malgrĂ© tout, Manu restaitun grand petit garçon, un Ă©tat qu’il Ă©tait, pour tout dire,encore capable d’accepter.

— Merci, docteur, d’ĂȘtre venu me voir.Sur le seuil de la chambre, le mĂ©decin se retourna.— Il n’y a pas de quoi, Emmanuel. Si tu as des

questions, ne reste pas à les ruminer. Viens m’en parler.Il passa devant Johnny, en veilleuse dans l’autre

piĂšce, et adressa un petit geste d’au revoir Ă  Manuavant de disparaĂźtre par la porte de la cuisine. Manudemeura immobile, le menton dans la main. Oui, j’aiune question : pourquoi mon pĂ©nis devient dur quandMarthe me serre dans ses bras? Pourquoi est-ce queje sais que c’est mal? Et pourquoi y a-t-il des chosesque je sais avant de les apprendre? Plus d’une question,en fin de compte. Et qu’il ne poserait pas.

◆

Le lendemain, Marthe se lança dans un grand mĂ© -nage. Cela lui arrivait parfois. Entre l’enseignement Ă 

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Extrait de la publication

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ses Ă©lĂšves ordinaires et celui prodiguĂ© Ă  Manu, entrela prĂ©paration des repas et l’entretien de la maison,Marthe avait peu de loisirs. Aussi, de temps en temps,un jour de congĂ© Ă©tait-il consacrĂ© Ă  un nettoyage Ă fond. D’habitude, toute la famille Ă©tait enrĂŽlĂ©e, chacunse voyant octroyer une tĂąche Ă  sa mesure. Ce jour-lĂ ,toutefois, Marthe ne fit aucune annonce durant lepetit-dĂ©jeuner, et mĂȘme, elle commença le travailsans aviser personne.

Elle avait envoyĂ© les garçons dans le jardin. Ils nes’en plaignirent pas, car le jardin – ou, plutĂŽt, l’espĂšcede petite jungle qu’on appelait jardin Ă  la GaiĂ©zza –constituait un merveilleux terrain de jeux. Ils se fau-filĂšrent sous des buissons, s’écorchĂšrent les mains,sa lirent leurs vĂȘtements, jusqu’à ce qu’une envie d’uri-ner ramĂšne Paul Ă  l’intĂ©rieur. Comme il mettait dutemps pour ce qui d’habitude ne lui prenait que deuxminutes, Manu rentra Ă  son tour. Il perçut un bourdon -nement de voix en provenance de l’escalier et montaau second Ă©tage.

Paul se tenait dans l’embrasure d’une porte que Manuavait toujours vue fermĂ©e. Deux chambres restaientcloses en permanence dans la maison des LaganiĂšre :celle de Luc, l’un des frĂšres aĂźnĂ©s, et celle-ci, dontManu ne savait rien. Paul ne broncha pas lorsque Manule rejoignit et qu’il s’arrĂȘta Ă  son tour sur le seuil.

La chambre possĂ©dait une large fenĂȘtre qui laissaitabondamment entrer le soleil. Dans les rayons dorĂ©sdansaient les grains de poussiĂšre soulevĂ©s par Marthe,qui s’agitait dans la piĂšce comme si sa vie en dĂ©pendait.Les lieux Ă©taient encombrĂ©s : deux chevalets se dres-saient au milieu de la chambre, un plus petit remplissaitla moitiĂ© d’une table couverte de pots vides et de pin-ceaux dessĂ©chĂ©s ; des toiles peintes et des dessinsĂ©taient accrochĂ©s sur les murs, mais il s’en trouvaitaussi appuyĂ©s un peu partout, et mĂȘme roulĂ©s sur

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Extrait de la publication

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eux-mĂȘmes sur le plancher. Certaines Ɠuvres Ă©taient Ă l’encre noire, d’autres en couleurs. Elles reprĂ©sentaientdes fleurs, des oiseaux et des scĂšnes parfois abstraites– ou, alors, Manu n’en comprenait sim plement pas lesens. Cependant, de tout ce qu’il voyait ressortaientune grande beautĂ© et beaucoup de sĂ©rĂ©nitĂ©.

C’était d’autant plus Ă©trange que les murs de lamaison, ailleurs que dans cette piĂšce, ne comportaientaucun tableau, aucun dessin.

Marthe cessa soudain de s’agiter et se tourna versles garçons.

— J’ai dĂ©cidĂ© de redĂ©corer la maison.Paul adressa Ă  Manu un sourire ravi et lança, en

guise d’explication :— C’était l’atelier de maman.Beaucoup plus tard, Manu comprit que la rĂ©ou -

verture de cette chambre constituait la rĂ©ponse deMarthe Ă  l’épisode du bĂ©bĂ© de Portia, sa rĂ©plique ausilence de son pĂšre et aux cris de son jeune frĂšre. Surle moment, toutefois, Manu ne vit qu’une piĂšce quirĂ©clamait un bon dĂ©poussiĂ©rage. Il demanda :

— Qu’est-ce que tu veux qu’on fasse?Marthe les chargea de laver les fenĂȘtres du rez-de-

chaussĂ©e. Paul bougonna le restant de l’avant-midi.De quoi Manu s’était-il mĂȘlĂ©, pourquoi diable n’était-ilpas demeurĂ© dehors? Ils auraient pu se cacher dans lejardin pendant que Marthe se serait Ă©puisĂ©e Ă  lesappeler, mais non ! Manu, pour sa part, ne trouvaitrien de dĂ©sagrĂ©able Ă  se servir de ses mains, il aimaitsentir bouger son corps, laisser la sueur couler dansson dos et sur sa poitrine.

Les corvĂ©es terminĂ©es, Manu se versait un verred’eau au robinet de la cuisine quand un choc sourd lefit sursauter. Cela provenait de la vitre brillante de pro -pretĂ©. La surface lisse montrait une trace lĂ©gĂšre. CommePaul boudait au jardin, Manu crut que le garçon s’était

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Extrait de la publication

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vengĂ© en lançant quelque chose dans la fenĂȘtre.Furieux d’avoir eu peur tout autant que de voir la vitredĂ©jĂ  salie, Manu sortit en vitesse. Il s’arrĂȘta aussitĂŽt Ă l’extĂ©rieur. Étendu sur une chaise longue, Paul lisait,tout tranquille. Manu hĂ©sita. Il baissa les yeux, Ă  larecherche de l’objet incriminant, et Ă©touffa une excla-mation.

Dans l’herbe gisait une chose au corps bleuĂątre,striĂ© d’ocre et de vert, Ă  peine plus grosse que lepouce. Il la prit avec dĂ©licatesse. Une aile Ă©tait re -pliĂ©e, l’autre pendait de maniĂšre misĂ©rable ; les pattesĂ©taient recroquevillĂ©es; le bec effilĂ© bĂ©ait. C’était tiĂšdeet duveteux dans la paume de Manu. Il n’avait jamaisrien vu d’aussi joli. Il crut d’abord que l’oiseau Ă©taitmort, puis, en effleurant le corps d’un doigt lĂ©ger, ilperçut les battements affolĂ©s du cƓur minuscule. LespaupiĂšres entrouvertes montraient un regard sombreet fixe.

Tout à sa contemplation, Manu entendit à peinePaul l’apostropher.

— Qu’est-ce qu’il y a ?Manu leva la main jusqu’à tenir l’oiseau sous son

nez. Une crĂ©ature si petite ! Comment la secourir,comment l’empĂȘcher de mourir? Le pas de Paul froissal’herbe, sa voix se rapprocha.

— Qu’est-ce que tu as trouvĂ©, Manu?Il baissa ses mains en coupe, montrant le petit

amas de plumes.— Je crois qu’il s’est assommĂ© dans la vitre.— Il est mort ? demanda Paul, plus intriguĂ© que

désolé.Manu ramena aussitÎt les mains vers sa poitrine

pour protĂ©ger le blessĂ©.— Non. Et je ne veux pas qu’il meure.Paul haussa les Ă©paules.— Comment tu veux l’en empĂȘcher?

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— Je vais le soigner.Manu se dirigea vers la porte de l’annexe oĂč se

trouvait sa chambre, Paul sur ses talons.— Attends, Manu! Il est peut-ĂȘtre juste assommĂ©.

C’est arrivĂ© une fois Ă  Carlo. Quand l’oiseau est re -venu Ă  lui, il s’est tellement cognĂ© contre les mursqu’il a fini par se tuer pour de vrai. Il faudrait le mettredans une cage pendant qu’il est sonnĂ©.

Manu tourna sur lui-mĂȘme, indĂ©cis, comme si unecage allait apparaĂźtre dans le jardin. Paul ajouta :

— Je crois qu’il y en a une dans la remise. Je vaisla chercher.

Manu attendit avec patience, le petit corps inerteau creux de sa paume. L’oiseau vivait toujours, dumoins son corps restait tiĂšde – mais peut-ĂȘtre la cha-leur de sa main crĂ©ait-elle une illusion de vie? Manusentait son propre cƓur battre Ă  tout rompre. Il voulaitque l’oiseau vive. Sinon, ce serait trop injuste. Lapauvre bĂȘte avait heurtĂ© la vitre rendue indĂ©celable parla propretĂ©, et c’était lui qui l’avait si bien nettoyĂ©e.

Paul rĂ©apparut, portant une cage en osier qui n’au-rait pas rĂ©sistĂ© aux coups de bec d’un oiseau de plusgrande taille, mais qui pouvait sans risque accueillirune petite chose fragile comme celle que tenait Manu.

Paul posa la cage sur le siĂšge de son fauteuil et en -treprit de la dĂ©barrasser de la poussiĂšre, des toiles d’arai-gnĂ©e et des feuilles mortes qui s’y Ă©taient accumulĂ©es.

— C’était une cage dĂ©corative, expliqua le garçon,on n’y a jamais gardĂ© autre chose qu’une plante.

Il acheva son Ă©poussetage en soufflant au fond dela cage, puis en la secouant vigoureusement.

— Tu vas la briser ! s’inquiĂ©ta Manu.— Mais non. Approche
Paul ouvrit la porte de la cage. Manu hĂ©sita encore.— Il va avoir froid lĂ -dedans. Il faudrait lui faire

un nid.

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Avec un soupir rĂ©signĂ©, Paul entreprit de ramasserdes herbes sĂšches parmi les plantes sauvages du jardin.Il donna au paquet d’herbes une forme approximati -vement circulaire et le plaça au fond de la cage.

— Tiens, dĂ©pose-le.Manu passa une main dans la cage et, doucement,

en fit glisser son imperceptible fardeau. Le corps lĂ©gercollait Ă  sa main moite. Manu interprĂ©ta cela commele signe d’un lien entre lui et son protĂ©gĂ©. Il refermala porte et souleva la cage, pensif.

— Maintenant, tu peux le rentrer, Ă©mit Paul. Maisne viens pas te plaindre si Marthe est furieuse aprĂšs toi.

Manu ne rĂ©pondit pas. Pourquoi Marthe serait-ellefĂąchĂ©e s’il prenait soin d’un oiseau? Elle si bonne, sidouce, elle comprendrait.

Dans sa chambre, il posa la cage sur la table ets’assit, le menton sur ses mains croisĂ©es, pour con -templer son protĂ©gĂ©. Respirait-il encore ? Manu nedistinguait pas le moindre mouvement. Il rouvrit lacage, posa un doigt lĂ©ger sur la poitrine. Le petit cƓurbattait toujours.

Paul l’avait suivi. Il s’installa sur le coin du lit.— Tu vas passer le reste de la journĂ©e Ă  le regarder?— Je vais attendre qu’il se rĂ©veille.— Et s’il ne meurt pas, qu’est-ce que tu vas faire ?

Comment tu vas le nourrir et le soigner? Tu ne saismĂȘme pas de quelle espĂšce il s’agit.

Manu tourna briĂšvement la tĂȘte vers lui.— Je vais demander Ă  ton pĂšre. Il le saura, lui. Et

il saura le soigner.— Papa soigne les gens, pas les oiseaux.Manu ne daigna pas rĂ©pondre. Au bout d’un mo ment,

Paul reprit, plus conciliant :— Je vais t’aider, moi. J’irai me renseigner dans le

Monde, je saurai comment il s’appelle et comment ilse nourrit.

SI L’OISEAU MEURT 019

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Manu tourna vers Paul un visage empreint dereconnaissance.

— Tu es gentil. Mais je sais dĂ©jĂ  comment il s’ap-pelle.

— Ah, oui ?Manu esquissa un sourire malicieux.— Il s’appelle PhĂ©nix.

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Extrait de la publication

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FRANCINE PELLETIER



 est nĂ©e Ă  Laval en 1959. AprĂšs des Ă©tudes enenseignement du français Ă  l’UQAM, elle publie,Ă  partir de 1983, de nombreux textes de science-fiction, d’abord en revue, puis en anthologies etcollectifs. Elle a publiĂ© plus d’une quinzaine deromans pour jeunes adolescents, mais ce sont sesƓuvres pour le grand public qui ont obtenu leplus de reconnaissance. En 1988, son recueil LeTemps des migrations recevait le Grand Prix de lascience-fiction et du fantastique quĂ©bĂ©cois pourla nouvelle «La Petite Fille du silence», puis le prixBorĂ©al du meilleur livre de l’annĂ©e. Les deuxiĂšmeet troisiĂšme tomes de sa trilogie « Le Sable etl’Acier » ont Ă  leur tour reçu le Grand Prix 1999.De plus, Samiva de FrĂ©e, le deuxiĂšme vo lume decette tri logie, a reçu le prix BorĂ©al 1999 ainsi quele prix Aurora du meilleur roman de la science-fictioncanadienne.

Extrait de la publication

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EXTRAIT DU CATALOGUE

Collection «Romans» / Collection «Nouvelles»

001 Blunt – Les Treize Derniers Jours Jean-Jacques Pelletier002 Aboli (Les Chroniques infernales) Esther Rochon003 Les RĂȘves de la Mer (TyranaĂ«l -1) Élisabeth Vonarburg004 Le Jeu de la Perfection (TyranaĂ«l -2) Élisabeth Vonarburg005 Mon frĂšre l’Ombre (TyranaĂ«l -3) Élisabeth Vonarburg006 La Peau blanche JoĂ«l Champetier007 Ouverture (Les Chroniques infernales) Esther Rochon008 Lames sƓurs Robert Malacci009 SS-GB Len Deighton010 L’Autre Rivage (TyranaĂ«l -4) Élisabeth Vonarburg011 Nelle de VilvĂšq (Le Sable et l’Acier -1) Francine Pelletier012 La Mer allĂ©e avec le soleil (TyranaĂ«l -5) Élisabeth Vonarburg013 Le RĂȘveur dans la Citadelle Esther Rochon014 Secrets (Les Chroniques infernales) Esther Rochon015 Sur le seuil Patrick SenĂ©cal016 Samiva de FrĂ©e (Le Sable et l’Acier -2) Francine Pelletier017 Le Silence de la CitĂ© Élisabeth Vonarburg018 Tigane -1 Guy Gavriel Kay019 Tigane -2 Guy Gavriel Kay020 Issabel de Qohosaten (Le Sable et l’Acier -3) Francine Pelletier021 La Chair disparue (Les Gestionnaires de l’apocalypse -1) Jean-Jacques Pelletier022 L’Archipel noir Esther Rochon023 Or (Les Chroniques infernales) Esther Rochon024 Les Lions d’Al-Rassan Guy Gavriel Kay025 La Taupe et le Dragon JoĂ«l Champetier026 Chronoreg Daniel Sernine027 Chroniques du Pays des MĂšres Élisabeth Vonarburg028 L’Aile du papillon JoĂ«l Champetier029 Le Livre des Chevaliers Yves Meynard030 Ad nauseam Robert Malacci031 L’Homme trafiquĂ© (Les DĂ©buts de F) Jean-Jacques Pelletier032 Sorbier (Les Chroniques infernales) Esther Rochon033 L’Ange Ă©carlate (Les CitĂ©s intĂ©rieures -1) Natasha Beaulieu034 NĂ©bulositĂ© croissante en fin de journĂ©e Jacques CĂŽtĂ©035 La Voix sur la montagne Maxime Houde036 Le Chromosome Y Leona Gom037 (N) La Maison au bord de la mer Élisabeth Vonarburg038 Firestorm Luc Durocher039 Aliss Patrick SenĂ©cal040 L’Argent du monde -1 (Les Gestionnaires de l’apocalypse -2) Jean-Jacques Pelletier041 L’Argent du monde -2 (Les Gestionnaires de l’apocalypse -2) Jean-Jacques Pelletier042 Gueule d’ange Jacques Bissonnette043 La MĂ©moire du lac JoĂ«l Champetier044 Une chanson pour Arbonne Guy Gavriel Kay045 5150, rue des Ormes Patrick SenĂ©cal046 L’Enfant de la nuit (Le Pouvoir du sang -1) Nancy Kilpatrick047 La Trajectoire du pion Michel Jobin048 La Femme trop tard Jean-Jacques Pelletier049 La Mort tout prĂšs (Le Pouvoir du sang -2) Nancy Kilpatrick050 Sanguine Jacques Bissonnette051 Sac de nƓuds Robert Malacci052 La Mort dans l’ñme Maxime Houde

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053 Renaissance (Le Pouvoir du sang -3) Nancy Kilpatrick054 Les Sources de la magie JoĂ«l Champetier055 L’Aigle des profondeurs Esther Rochon056 Voile vers Sarance (La MosaĂŻque sarantine -1) Guy Gavriel Kay057 Seigneur des Empereurs (La MosaĂŻque sarantine -2) Guy Gavriel Kay058 La Passion du sang (Le Pouvoir du sang -4) Nancy Kilpatrick059 Les Sept Jours du talion Patrick SenĂ©cal060 L’Arbre de l’ÉtĂ© (La Tapisserie de Fionavar -1) Guy Gavriel Kay061 Le Feu vagabond (La Tapisserie de Fionavar -2) Guy Gavriel Kay062 La Route obscure (La Tapisserie de Fionavar -3) Guy Gavriel Kay063 Le Rouge idĂ©al Jacques CĂŽtĂ©064 La Cage de Londres Jean-Pierre Guillet065 (N) Treize nouvelles policiĂšres, noires et mystĂ©rieuses Peter Sellers (dir.)066 Le Passager Patrick SenĂ©cal067 L’Eau noire (Les CitĂ©s intĂ©rieures -2) Natasha Beaulieu068 Le Jeu de la passion Sean Stewart069 Phaos Alain Bergeron070 (N) Le Jeu des coquilles de nautilus Élisabeth Vonarburg071 Le Salaire de la honte Maxime Houde072 Le Bien des autres -1 (Les Gestionnaires de l’apocalypse -3) Jean-Jacques Pelletier073 Le Bien des autres -2 (Les Gestionnaires de l’apocalypse -3) Jean-Jacques Pelletier074 La Nuit de toutes les chances Eric Wright075 Les Jours de l’ombre Francine Pelletier076 Oniria Patrick SenĂ©cal077 Les MĂ©andres du temps (La Suite du temps -1) Daniel Sernine078 Le Calice noir Marie Jakober079 Une odeur de fumĂ©e Eric Wright080 OpĂ©ration Iskra Lionel NoĂ«l081 Les Conseillers du Roi (Les Chroniques de l’Hudres -1) HĂ©loĂŻse CĂŽtĂ©082 Terre des Autres Sylvie BĂ©rard083 Une mort en Angleterre Eric Wright084 Le Prix du mensonge Maxime Houde085 Reine de MĂ©moire 1. La Maison d’Oubli Élisabeth Vonarburg086 Le Dernier Rayon du soleil Guy Gavriel Kay087 Les Archipels du temps (La Suite du temps -2) Daniel Sernine088 Mort d’une femme seule Eric Wright089 Les Enfants du solstice (Les Chroniques de l’Hudres -2) HĂ©loĂŻse CĂŽtĂ©090 Reine de MĂ©moire 2. Le Dragon de Feu Élisabeth Vonarburg091 La NĂ©buleuse iNSIEME Michel Jobin092 La Rive noire Jacques CĂŽtĂ©093 Morts sur l’Île-du-Prince-Édouard Eric Wright094 La Balade des Ă©pavistes Luc Baranger095 Reine de MĂ©moire 3. Le Dragon fou Élisabeth Vonarburg096 L’Ombre pourpre (Les CitĂ©s intĂ©rieures -3) Natasha Beaulieu097 L’Ourse et le Boucher (Les Chroniques de l’Hudres -3) HĂ©loĂŻse CĂŽtĂ©098 Une affaire explosive Eric Wright099 MĂȘme les pierres
 Marie Jakober100 Reine de MĂ©moire 4. La Princesse de Vengeance Élisabeth Vonarburg101 Reine de MĂ©moire 5. La Maison d’ÉquitĂ© Élisabeth Vonarburg102 La RiviĂšre des morts Esther Rochon103 Le Voleur des steppes JoĂ«l Champetier104 Badal Jacques Bissonnette105 Une affaire dĂ©licate Eric Wright106 L’Agence Kavongo Camille Bouchard

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SUCCÈDENT SANS JAMAIS DÉCEVOIR. »

LE DEVOIR

Manu comprend trĂšs bien comment ongrandit : on est d’abord un nourrisson,comme le bĂ©bĂ© fille de Portia, puis un petitgarçon, comme Paul, son ami ; on devientensuite un homme, comme le mari de lapasteure La Rocca, puis enfin un vieuxmonsieur, comme le docteur LaganiĂšre. Cequ’il a plus de difficultĂ© Ă  concevoir, c’estpourquoi le petit garçon qu’il est a un corpsd’adulte en proie Ă  des crises terribles.De fait, Manu a Ă©tĂ© trĂšs malade. De grandssavants, comme la docteure Gurtu, ont ac -compli des miracles pour le ramener Ă  la vie,avant de le confier au docteur LaganiĂšre etĂ  sa fille Marthe
 Marthe qui l’aide Ă  toutrĂ©apprendre parce que Manu ne se rappellede rien.Lorsqu’il soigne un oiseau blessĂ©, ManurĂ©alise qu’il aime « aider » ; il dĂ©cide alorsd’étudier pour devenir un mĂ©decin. Maisquand les bribes de son passĂ© commencentĂ  l’assaillir, les Ă©vĂ©nements sordides qui s’ydĂ©voilent le bouleversent profondĂ©ment :se pourrait-il qu’il ait Ă©tĂ© un criminel dansson ancienne vie? Et si c’est le cas, pourquoiceux qui l’entourent ont-ils si hĂąte qu’ilrecouvre la mĂ©moire ?

S i l ’ o i s e a u m e u r t

T E X T E I N É D I T

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