OSTÉOLYSE SPONTANÉE DU COL FÉMORAL -...
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OSTÉOLYSE SPONTANÉE DU COL FÉMORALÀ PROPOS DE 8 CAS ET REVUE DE LA LITTÉRATURE
G Bazille, T Moser, M Ehlinger, J Durckel, R-M Javier, P Adam, J-L Dietemann,
F Bonnomet, J-C DoschStrasbourg, France
L’ostéolyse spontanée du col fémoral est une entitérarement décrite dont les mécanismes physiopathologiques sont méconnus
La première observation est due à ROBACK et al. (1980) qui a décrit une ostéolyse complète du col fémoral survenue 21 jours après le diagnostic de fracture sous capitale non déplacée
INTRODUCTION
INTRODUCTION
En 1999, R.E. LAMBIASE rapporte une ostéolyse du col fémoral droit, chez une femme de 72 ans, sans notion de traumatisme, 23j après la réalisation de radiographie montrant l’intégrité du col
Nous proposons une étude de 8 cas d’ostéolyse du col fémoral survenant dans un délai rapide, et parfois associée à un traumatisme initial
Étude rétrospective8 patients
2 hommes et 6 femmesAgés de 53 à 78 ans ; moyenne d’âge : 69 ansNotion de traumatisme minime chez 2 patients
MATÉRIEL ET MÉTHODES
SymptomatologieDouleurs mécaniques de la hanche d’apparition brutaleImpotence fonctionnelle
Explorations radiologiquesRadiographies (n=8)Scanner (n=4)IRM (n= 2)Scintigraphie osseuse (n=2)
Analyse anatomopathologique (n= 5)
RÉSULTATS: cas 1
Observation 1 : Mme Alice O. , 53 ansAntécédents▪ éthylo-tabagisme, ménopause, ostéoporose fracturaire
traitée par fluor (col fémur gauche, branches ilio et ischiopubiennes droites et gauches)
Symptomatologie▪ Douleurs mécaniques de la hanche droite de survenue
aigue sans notion de traumatisme, début juillet 1990
• Aspect normal du col fémoral droit• Ostéolyse du col fémoral droit, bordure rectiligne du moignon cervical• Intégrité de la tête• Acétabulum normal• Opacités floconneuses de tonalité calcique ( « poudre d’os ») en projection articulaire
06/07/1990 03/08/90
RÉSULTATS : cas 1
Traitement par PTH droiteAnatomopathologie :
Pas de cellules tumorales, pas de prolifération angiomateuse, pas de microcristauxTravées osseuses normales
Etude histomorphométrique et dosage du fluor osseux compatibles avec une ostéomalacie fluorée
Au final ostéolyse spontanée du col fémoral développée en moins d’un mois
RÉSULTATS : cas 2
Observation 2 : Mme P. Marie Louise, 64 ans
ATCD : arthrose rachis lombaire et genoux
douleurs mécaniques de la hanche gauche d’apparition brutale début décembre 1994 ; pas de notion de traumatisme initial; Impotence fonctionnelle à la marche , s’aggravant rapidement
Hospitalisation mi février 1995, soit 2.5 mois après début des douleurs
Radiographies initiales normales (non retrouvées)
- Ostéolyse partielle du col fémoral gauche ainsi que de la tête fémorale- Aspect rectiligne du moignon cervical- Poudre calcique en projection du cadrant inféro interne de la cavité articulaire- Interligne articulaire pincé- Eculement modéré de l’acétabulum
15/02/1995
RÉSULTATS : cas 2
Traitement : PTH gauche
Pas d’analyse anatomopathologique réalisée,mais bonne évolution fonctionnelle à long terme
Au final ostéolyse spontanée du col fémoral développée en 2.5 mois
RÉSULTATS : cas 3
Observation 3 : Mme Z. Edith, 68 ans
ATCD : polyarthrite rhumatoïde traitée par corticothérapie au long cours, ostéoporose fracturaire ( fracture tassement Th12), gonarthrose bilatérale
Douleurs brutales avec notion de « craquement » suite à une manipulation de la hanche droite, mi décembre 1990. Aggravation de la symptomatologie avec perte totale d’autonomie en 15 jours
Radiographie du bassin réalisée en 1985, non retrouvée : intégrité du col fémoral droit
02/01/1991
- Ostéolyse du col fémoral droit étendue à la tête.- Bordures non rectilignes-« Poussière » calcique en regard des parties molles en dedans et sous le petit trochanter- Eculement du toit du cotyle
RÉSULTATS : cas 3
Traitement : PTH cimentée
Anatomopathologie : processus inflammatoire chronique riche en cellules mononucléées et lymphocytes en rapport avec la polyarthrite rhumatoïde
Une coxopathie destructrice inflammatoire est écartée :rapidité de l’ostéolyse persistance d’un interligne supéro externePas d’altération cartilagineuse en anatomopathologie
Au final, ostéolyse consécutive à un traumatisme initial, du col fémoral droit développée en 2 semaines
RÉSULTATS : cas 4
Observation 4 : Mme N. Elise, 78 ans
ATCD : arthrose, HTA
Douleurs mécaniques de la hanche gauche et impotence fonctionnelle évoluant depuis 15 jours sans notion de traumatisme
. radios réalisées 15j après apparition de coxalgies gauches
. Déformation de la tête fémorale gauche
. coxarthrose supéro externe gauche
31/07/1997
Majoration des douleurs et hospitalisation :
- Ostéolyse de la tête et du col fémoral gauche- Bordures rectilignes- Poudre calcique péri articulaire
11/08/1997
Scanner du 11/08/1997 :
Ostéolyse de la tête et du col gaucheFragments calciques péri articulairesFracture du fond du cotyle
gauche
Traitement : PTH
Anatomopathologie : synovite chronique modérée
Au final ostéolyse spontanée du col fémoral gauche survenue en moins de 1 mois
Chute mécanique en mai 1998 sur le côté gauche avec douleurs persistantes de la hanche droite :
Radiographies du bassin : pincement interligne coxo-fémoral droit majoréScintigraphie osseuse : hyperfixation de la branche iliopubienne gauche mais hanche droite sans anomalie de fixation
Majoration progressive des douleurs et déformation supérieure de la tête fémorale droite :
le 22/10/2001
Ostéolyse du col et surtout de la tête fémorale droite sans notion de traumatisme
Radio du 03/12/2001 :
Ostéolyse tête + col et poudre calcique supéro externe
Traitement : PTH droite
Anatomopathologie : sp
Au final, patiente ayant présenté deux ostéolyses spontanées du col fémoral sans notion de traumatisme.
Observation 5 : Mme E. Monique, 65 ans
ATCD : ostéoporose, connectivite avec corticothérapie au long cours, coxarthrose
Chute le 24/12/2007 sans traumatisme direct du bassin, dans un contexte de coxalgies gauches évoluant depuis plusieurs années
Pas de notion de traumatisme du bassin antérieur à cette chute
- Coxarthrose supéroexterne gauche- Intégrité de la tête et du col gauche- Dysplasie subluxante?
17/09/07
La patiente a réalisé une radio du bassin en septembre 07 pour coxalgies persistantes :
La patiente a bénéficié d’un scanner abdominopelvien dans les suites de sa chute :
- ostéolyse du col fémoral gauche déjà présente : origine donc probablement antérieure à la chute
26/12/07
Hospitalisée début janvier 2008 :
Radiographies du bassin du 10/01/2008
Radio centrée sur la hanche gauche :
▪ Ostéolyse du col et de la tête fémorale gauche
▪ Bordures rectilignes▪ éculement du toit du cotyle (signe
de la mouette)▪ Piqueté calcique péri articulaire
10/01/08
Ostéolyse de la tête et du col avec piqueté calcique inféro interne.
TDM 10/01/08
IRM :
RESULTATS : cas 5
Traitement : prothèse totale de hanche gauche avec reconstruction acétabulaire.
Anatomopathologie : pas d’anomalie
Au final, ostéolyse du col fémoral gauche développée entre le 17/09/07 et le 26/12/07 soit 3 mois et 10 jours.
Observation 6 : M. Achille, 69 ans
ATCD : obésité, cardiopathie valvulaire, tabagisme sevré, gonarthrose bilatérale, cirrhose biliaire primitive
Apparition d’une douleur de la hanche droite début mars 1991, avec impotence fonctionnelle, sans traumatisme initial
RÉSULTATS : cas 6
RÉSULTATS: cas 6
08/03/91
Déminéralisation diffusePincement articulaireAbsence de calcifications symphysairesAbsence d’ostéolyse du col fémoral
RÉSULTATS : cas 6Scintigraphie osseuse le 14/03/1991 :
Hyperfixation oblique du col fémoral DTête fémorale hypofixante
Scanner du 15/03/1991 :Fracture basicapitaleBascule antérieure
du col
Traitement : prothèse céphaliquePas d’analyse anatomopathologique
05/04/91
- Ostéolyse quasi complète du col fémoral- Bordures rectilignes du moignon du col- Piqueté calcique en regard du petit trochanter droit- Absence d’éculement acétabulaire
Au final, ostéolyse du col fémoral développée en 1 mois, dans un contexte de fracture basicervicale
RESULTATS : cas 7
Observation 7 : Mme B. Colette, 77 ans
ATCD : fracture tassement vertébral L5, canal lombaire étroit opéré en 1999
Douleurs d’apparition brutales début février 2008 du membre inférieur droit, sans notion de traumatisme, avec évolution rapide vers une impotence fonctionnelle complète du MID
04/02/08
- Radios réalisées à l’ apparition des douleurs- Intégrité de la tête et du col fémoral droits- Pincement global de l’interligne
07/03/08
-Ostéolyse partielle du col fémoral droit-Respect de l’interligne articulaire-Absence de poudre calcique intra articulaire
RESULTATS : cas 7
24/04/08
- Traitement : PTH droite
- Evolution fonctionnelle favorable
- Anatomopathologie : sans anomalie
Au total ostéolyse spontanée du col fémoral droit en moins de 1 mois
RESULTATS : cas 8
Observation 8 : M. H. Joseph, 76 ans.
ATCD : dyslipidémie, HTA, coxarthrose gauche
Symptomatologie : ▪ douleurs de hanche gauche chroniques d’aggravation
récente en février 2008▪ Impotence fonctionnelle totale à la suite d’un « faux
mouvement » sans traumatisme direct
12/02/08
Scanner du 12/02/08 :
- Pas de fracture - Pas d’ostéolyse- Pincement interligne articulaire- Calcifications intra articulaires : chondrocalcinose?
RESULTATS : cas 8
01/04/08 : angioscanner thoracique avec phléboscanner pour suspicion d’embolie pulmonaire :
Fracture du col sans notion de traumatisme .
IRM 29/04/08
Fracture du col avec ostéolyse partielle
RESULTATS : cas 8
Traitement : prothèse totale de hanche gauche avec reconstruction acétabulaire
Anatomopathologie et microbiologie : ostéonécrose aseptique de la tête fémorale. bactériologie négative, pas de cellules tumorales, pas de cristaux
Au final ostéolyse du col fémoral gauche post fracturaire sans notion de traumatisme, développée en 2.5 mois.
SYNTHÈSE DES OBSERVATIONSO. Alice P. marie
louiseN. Elise Z. Edith E. Monique M. Achille B. Colette H. Joseph
CLINIQUE :
âge 53 64 78 68 65 69 77 76 moyenne: 69 ans
sexe F F F F F M F M 6 F , 2 H
Délai apparition( par rapport aux débuts des symptômes)
< 1 mois 2.5 mois 11 J 2 sem 3,5 mois 1 mois < 1 mois 2,5 mois moyenne : 46 jours
Ostéopathie fragilisante
Ostéoporose fracturaire
_ _ Ostéoporose facturaire
ostéoporose _ _ _
symptômes
Coxalgies droites aigues sans trauma, mécaniques
Douleurs mécaniques sans trauma, impotence fonctionnelle
Douleurs mécaniques aigues sans trauma, impotence
Douleurs d’apparition brutale après manipulation.Craquementimpotence
Coxalgies chroniques et chute révélant l’ostéolyse.
Douleurs brutales sans trauma, impotence
Douleurs mécaniques sans trauma
Douleurs mécaniques majorées par 1 faux mouvement
Affections associées
EthylotabagismeOstéomalacie fluorée
Ménopausearthrose
Arthrosehta
PR connectivite Tabagisme, obésité, gonarthrose, cirrhose biliaire primitive,
Canal lombaire étroit,Fracture tassement vertébral
coxarthrose
SYNTHÈSE DES OBSERVATIONSRADIOLOGIE : O. Alice P. Marie
LouiseN. Elise Z. Edith E.Monique M. Achile B. Colette H. Joseph
topographie Col Col +++ et tête +
Tête col d et col g
Col + tête Tête + - col col col col Col=8Tête=4
Bordures rectilignes
Oui oui Oui non oui oui oui oui N = 7
Résidus calciques
Oui oui oui oui oui oui non non N =6
Persistance interligne articulaire
Oui pincement oui oui oui oui oui pincement N =6
Eculement toit du cotyle
non oui oui oui oui non non non N= 4
TDM - - + - + + - + N=4
IRM - - - - + - - + N=2
SYNTHÈSE DES OBSERVATIONS
Type d’ostéolyse spontanée 5
Post traumatique 1
Post fracturaire 2
Moyenne d’âge 69 ans
Délai moyen d’apparition 46 jours
Facteurs prédisposant Polyarthrite rhumatoïde 1
Ostéopathie fragilisante 3
Maladie autoimmune 2
Aspect radiologique Poudre calcique N= 6
Bordures rectilignes N= 7
Interligne conservée N= 6
Éculement toit du cotyle N= 4
DISCUSSION
Il s’agit donc de 8 patients ayant présenté une ostéolyse du col fémoral, spontanée (n= 5), post traumatique (n= 1), ou post fracturaire (n= 2), originale par son délai d’installation très court (46 j)
8 cas présentant d’ importantes similitudes sur le plan radiologique, mais le terrain est également proche :
▪ Femmes ( n= 6)▪ plutôt âgées (âge moyen 69 ans)▪ présentant une ostéopathie fragilisante plus ou moins sévère en rapport avec
l’âge et certaines affections associées (n = 3)
DISCUSSION
Le caractère spontané de l’ostéolyse ne peut être affirmé qu’après avoir éliminé certains diagnostics différentiels :
Maladie de Gohram – Stout ou ostéolyse massive idiopathiqueCoxarthrose destructrice rapideCoxopathie tabétiqueCoxopathies destructrices rapides▪ Coxites infectieuses▪ Coxites inflammatoires (spondylarthritique, rhumatoïde, psoriasique)▪ Coxites métaboliques : chondrocalcinose, hémochromatose, maladie de
Wilson, dialyse rénale au long cours)
DISCUSSION
Maladie de Gohram-Stout :
Ostéolyse massive régionale avec destruction partielle ou totale d’un osSporadique, d’étiologie inconnue, rareLiée à une prolifération vasculaire ou lymphatique locale, histologiquement bénigneTouche surtout l’enfant et l’adulte jeuneFémur : second site atteint par ordre de fréquence
DISCUSSIONDans nos observations :
Terrain très différent : ▪ Âge plutôt élevé, ▪ ostéopathie fragilisante
Aspect radiologique différent : ▪ ostéolyse à bords nets dans nos observations ▪ Lyse irrégulière, caractère effilé en sucre d’orge dans la
maladie de Gohram-Stout
Anatomopathologie :▪ Pas de prolifération angiomateuse retrouvée sur l’ensemble
des pièces opératoires analysées
DISCUSSION
Coxarthrose destructrice rapide :
Douleurs mécaniques d’aggravation progressive, puis inflammatoiresTouche plutôt la femme ; âge moyen 65 ansChondrolyse qui annule l’interligne en 2 ans, puis remodelage de la tête et du toit du cotyle de 1 à 5mm par anAspect radiologique :▪ pincement rapide de l'interligne articulaire▪ lyse osseuse avec contours mal limités▪ Peu d’ostéophytes, de sclérose sous chondrale ou de
géodes
DISCUSSION
Or dans nos observations :Si le terrain est le même : ▪ femmes de plus de 60 ans▪ Coxarthrose connue
L’aspect radiologique est différent : ▪ Ostéolyse très rapide : délai moyen 46 j▪ Limite rectiligne de l’ostéolyse (n=7)▪ Versant acétabulaire plutôt conservé (n= 4)
Coxarthrose destructrice rapide
DISCUSSION
Coxopathies métaboliques : chondrocalcinose
Arthropathie microcristalline (cristaux de pyrophosphate de calcium dihydratés )Genou (90%), poignet, main, hanche, symphyse pubienneSujets de plus de 60 ans, prédominance féminineAtteinte polyarticulaire, bilatérale et habituellement symétriqueCalcifications des cartilages, fibrocartilages, de la membrane synoviale, de la capsule et/ou des tendonsévolution très lente pouvant conduire à une découverte au stade d’arthropathie destructrice où le liseré calcique n’est plus visible
DISCUSSION
Dans nos observations :Ostéolyse rapide du col fémoral ( délai)Pas de calcifications intra articulaires retrouvées (hanche, bassin, genoux)Pas de cristaux retrouvés au sein des différents prélèvements
CONCLUSION
L’ostéolyse spontanée du col fémoral est une entité rare , affectant préférentiellement la femme âgée, atteinte d’ostéopathie fragilisante
elle se caractérise par son délai d’apparition rapide ainsi que par certains signes radiologiques :
Poudre calcique intra articulaireÉculement du toit du cotyle (signe de la mouette)Ostéolyse à bords netsInterligne articulaire conservé
Son mécanisme physiopathologique est méconnu mais semble à rapprocher des fractures pathologiques
RÉFÉRENCES
Gorham, L. W. and A. P. Stout (1955). "Massive osteolysis (acute spontaneous absorption of bone, phantom bone, disappearing bone); its relation to hemangiomatosis." J Bone Joint Surg Am 37-A(5): 985-1004.
Roback, D. L. (1980). "Posttraumatic osteolysis of the femoral neck." AJR Am J Roentgenol134(6): 1243-4.
Lambiase, R. E., S. M. Levine, et al. (1999). "Rapid osteolysis of the femoral neck after fracture." AJR Am J Roentgenol 172(2): 489-91.