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Jean-François CHAUVEL Management, gestion et gouvernance des ONGBenjamin DURIEZ Séminaire de Philippe RyfmanAurore MITTELBERGER le 1er février 2010Barbara THOREZ
MANAGEMENT, GESTION ET GOUVERNANCE DES ONG
PRINCIPALES QUESTIONS, OUTILS ET TECHNIQUES
SOMMAIRE
LES PRINCIPALES QUESTIONS.......................... .....................................................2
I.ETHIQUE.......................................................................................................................................3
II.INSTITUTIONALISATION ET RENFORCEMENT DES NORMES VS LIBERTE........................3
III. PROFESSIONALISATION VS HUMANISME.............. ..............................................................4
LA GOUVERNANCE ET LES PRATIQUES RH................. .........................................8
I. GOUVERNANCE EN ONG..........................................................................................................8
II. POLITIQUES ET PRATIQUES RH..................... ........................................................................9
II.1.Au siège...................................... .................................................................................9
II.2.Sur le terrain ….............................. ...........................................................................12
GESTION DE LA PLANIFICATION ET DES RESSOURCES FINAN CIERES.........18
I. LA PLANIFICATION................................ ..................................................................................18
II.UNE GESTION DES RESSOURCES FINANCIERES QUI DOIT ETRE TRANSPARENTE.....20
BIBLIOGRAPHIE...................................... .................................................................21
ANNEXE.....................................................................................................................23
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Jean-François CHAUVEL Management, gestion et gouvernance des ONGBenjamin DURIEZ Séminaire de Philippe RyfmanAurore MITTELBERGER le 1er février 2010Barbara THOREZ
LES PRINCIPALES QUESTIONS
La gestion et la gouvernance des ONG ne se limite pas à des critères strictement techniques et
structuraux. La gestion des finances et des ressources humaines, la planification des projets au
siège et sur le terrain, sont fondées sur des principes éthiques, l'essence même des acteurs non
gouvernementaux de la solidarité.
Dans un monde globalisé, les ONG sont néanmoins confrontées à une forme de concurrence,
qui nécessite une structuration solide et répondant à des critères exigeants, notamment en terme
de transparence. Les politiques tendent à s'universaliser, et les ONG se voient soumises à une
pression normative de plus en plus contraignante. Pourtant elles peuvent y gagner en légitimité,
en efficacité, et en professionnalisme. Elles signent des accords de partenariats efficaces et
impulseurs de nouvelles initiatives.
Ainsi les ONG se trouvent tiraillées entre le respect de l'éthique associative et leur intérêt
institutionnel. L'éthique s'annonçant comme une évidence, il n'en est pas de même pour l'intérêt
institutionnel, qui renvoie à une notion de "business"' des entreprises, essentiellement dans la
question financière (efficacité commerciale). Bien que l'argent soit "le nerf de la guerre" et que le
travailleur solidaire reste, malgré sa particularité d'un engagement moral, une "compétence à
rémunérer", la réalité des exigences apparentées au management de l'entreprise lucrative au
sein des ONG reste un sujet tabou.
Professionnalisation, planétarisation, institutionnalisation, transnationalisation et engagements
partenariaux, croissance interne et externe, évaluation ; autant de "gros mots" à prendre
aujourd'hui en considération dans le management des ONG. Les ONG "urgentistes" se lancent
dans des actions de développement par le biais de la "réhabilitation", les ONG de développement
s'attaquent au climat et aux catastrophes naturelles. Elles ont évolué dans leur actions et leur
fonctionnement, et exigent des restructurations du mode de gestion et une reconsidération des
priorités.
Afin de comprendre les enjeux de la gestion, du management et de la gouvernance des ONG,
soulevons les grandes questions qui s'y rapportent.
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I. ETHIQUE
La plupart de ces questions sont connexes à la notion d'éthique, de manière plus ou moins
directe. Les ONG y puisent toute leur légitimité, et l'intègrent à tous les niveaux de leur gestion,
en interne et en externe. Bien que les problématiques soient intimement liées, nous pouvons
isoler quelques thèmes majeurs.
Sur le plan strictement éthique, les ONG se soucient, depuis quelques années, du suivi de leur
personnel. Ce suivi peut prendre différents aspects, allant de l'aide psychologique à la réinsertion
professionnelle. Depuis 2005, les volontaires de retour de mission peuvent même bénéficier
d'aides financières du ministère des affaires étrangères.
Toujours dans un soucis de respect des fondements de l'ONG et dans une démarche
ethnocentrée, on voit une nette tendance à l'attribution des postes à responsabilités au personnel
local (nous le verrons plus en détails) dans l'intention d'un meilleur ciblage des attentes du terrain
et d'une réponse plus adaptée.
Cette démarche d'hétérogénéisation du personnel, libre et interne à chaque ONG, peut
aujourd'hui s'imposer (et de plus en plus) de manière plus normative. C'est le cas de la résolution
1325 du Conseil de Sécurité des Nations-unies, signée en 2000 et relative à la "sexospécificité",
un mot barbare pour qualifier le "genre", soit la prise en compte des rapports sociaux de sexe et
la valorisation de la femme dans les actions de solidarité, surtout dans la construction de la paix.
II. INSTITUTIONALISATION ET RENFORCEMENT DES NORMES VS LIBERTÉ
Concentrées depuis toujours sur l'identification et la légitimité des projets, les ONG pensent
aujourd'hui à la mise en place et à l'évaluation de leurs actions. La concurrence, la
transnationalisation, la planétarisation, la mise en place d'une diplomatie non-gouvernementale,
incluent une responsabilisation des ONG et un renforcement des codes de conduites. Ces codes,
destinés à normer l'action humanitaire internationale et à "imposer" des règles communes, font
débat depuis une dizaine d'années. Ils ont à eux seuls fait l'objet d'un colloque européen en
1999, intitulé ETIKUMA. En voici quelques illustrations (tirées ou non du colloque).
Depuis 1989, le donateur peut accorder sa confiance aux ONG ayant reçu l'agrément du Comité
de la Charte. Ce "label" assure la transparence financière des associations et fondations, et est
attribué par un comité indépendant des pouvoirs publics. En France, l'Afnor Certification (fusion
entre l'Association française pour l'assurance de la qualité (Afaq) et de l'association française de
normalisation (Afnor)) a mis en place le label "Gouvernance et Gestion responsable des
associations et fondations". Il a pour objectif de rassurer les partenaires, les donateurs, et les
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bailleurs, grâce à la certification d'un groupe déjà reconnu en entreprise. C'est grâce à une grille
de "critères de la labellisation" que se fait l'évaluation (cf. Annexe). Les exemples sont nombreux,
et nous terminerons sur celui du projet SPHERE puisqu'il nous renvoie à l'actualité avec Haïti. Ce
projet lancé en 1997 (prochaine révision pour fin 2010), a pour objectif d'améliorer la qualité des
actions humanitaire lors de "catastrophes" (génocides, catastrophes naturelles, conflits, etc.). Il a
abouti à la création d'un Manuel contenant une Charte Humanitaire, et a identifié des Normes
Minimales dans cinq domaines essentiels de l'assistance humanitaire: approvisionnement en eau
et assainissement, nutrition, aide alimentaire, aménagement des abris et des sites, et services
médicaux. C'est la première fois que les ONG, l'ONU, et des établissement d'enseignements
réfléchissent ensemble aux stratégies d'interventions.
Alors peut-on appliquer les mêmes règles et les mêmes méthodes dans toutes les ONG, sans
tenir compte de leur taille, leurs domaines d'intervention, leur "culture"? Ne constituent-elles pas
un frein à la liberté d'action? Certaines associations vont jusqu'à parler de bureaucratisation, et
pensent que l'idée même d'une gestion des ONG constituerait un obstacle à l'humanisme, surtout
sur le terrain.
Évidemment, il faut rapidement recadrer le discours pour constater que les ONG transnationales
avouent y gagner en efficacité, et se voient valorisées sur la scène internationale.
Face à la multiplication de normes, les attentes des bailleurs et des donateurs se renforcent dans
la réponse des ONG à ces codes de conduite, qui semblent être un gage de légitimité et de
crédibilité. Sous cet angle, se conformer aux normes peut être favorable, particulièrement dans la
recherche et la diversification des financements.
III. PROFESSIONALISATION VS HUMANISME
La professionnalisation est un grand débat actuel dans la construction des "ONG modernes". Elle
agit en interne par des changements de gestion des ressources humaines, et en externe avec
par exemple la création de partenariats avec d'autres acteurs (Nations-unies, États, Entreprises,
etc.).
En interne. Face aux exigences des bailleurs de fonds, les ONG appliquent des protocoles
strictes de gestion des cycles de projet. Beaucoup d'ONG gardent une souplesse en interne et se
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contentent de pratiquer le cadre logique pour répondre aux exigences des bailleurs. Dans un
document sur les ONG belges francophones, on opposera ainsi le "management par
opportunisme" (celui destiné aux bailleurs) au management par résultats (celui jugé "bon" par
l'ONG en interne). Dans ce même rapport, une ONG parle d'un outil de "manipulation politique",
que l'on peut "retourner comme une crêpe" pour satisfaire le bailleur. Ainsi il semble que les
outils de gestion et évaluation des projets n'ai pas encore trouvé leur crédibilité au sein de toutes
les ONG, surtout des plus petites.
Parallèlement, on voit un changement dans le domaine des ressources humaines : baisse du
bénévolat, répartition des tâches au Nord et au Sud, "formatage" de la communication par
l'investissement dans le "Street marketing", planétarisation. Pour répondre à la demande, les
ONG recrutent des profils d'experts ciblés et expérimentés, qui n'entrent pas dans le statut de
bénévole ; elles les recrutent comme salariés. Elles investissent également une partie de leur
budget dans la communication et n'hésitent pas à confier leurs supports à des entreprises.
Si ces nouvelles démarches commerciales sont critiquées, elles produisent de toute évidence un
gain d'efficacité et d'argent.
Reste à retranscrire ce résultat auprès du public, par exemple en exposant la progression
opérationnelle, en offrant une faible rémunération aux employés, et en insistant sur une
augmentation du budget dédié aux actions, supérieure aux frais de fonctionnement.
En externe. Pour des missions ponctuelles, les ONG, et certaines parmi les "petites", emploient
des experts en externe. Cette démarche leur permet un investissement minimum pour une
efficacité maximum. Elle a l'inconvénient d'une difficulté d'accès à ces experts déjà en poste.
De plus, les ONG internationales sont aujourd'hui investies dans la gestion de partenariats, qui
peuvent faciliter leur gestion interne. Exigeants peu d'investissement humain et financier, ils
permettent aux ONG de s'insérer dans de nouveaux réseaux influents, avec des partenaires
privés pouvant constituer un appui financier, ou de organisations internationales leur permettant
d'alléger l'investissement personnel de légitimation.
Précisons enfin que sur les problématiques liées au management des ONG, les organisations du
sud se voient exposées à d'autres questions plus spécifiques comme celle de la gouvernance
dans un pays sans démocratie.
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Ainsi nous pourrions résumer les conditionnalités actuelles du management, de la gestion et de
la gouvernance des ONG sous le schéma suivant :
La balance a été volontairement illustrée en déséquilibre, montrant toute la complexité de trouver
un juste milieu qui soit en accord avec le bon fonctionnement de l'ONG et ses états d'âme. Il est
important de voir cette illustration comme une balance nécessaire entre les valeurs morales et
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Éthique associative, Idéalisme,Militantisme, Désintéressement,réflexe culturel, Liberté
Intérêt institutionnel , Réalisme,Professionnalisation , Recherched'efficacité, Efficacitécommerciale, Codes de conduite
Management, Gestion, Gouvernance
Légitimité, Transparence, Efficacité,Crédibilité, Visibilité
Recherche d'équilibre
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l'intérêt institutionnel, sans pour autant les opposer en les associant respectivement au "bon" et
au "mauvais".
Il existe aujourd'hui une ambiguïté croissance pour les ONG, partagées entre l'optimisation de
leur efficacité, et leur liberté de gestion. Les dilemmes précédemment évoqués ne sont pas
moins des questions internes qu'externes aux ONG. En effet, cette ambivalence multiple prend
sa source dans l'image qu'elles veulent bien offrir aux donateurs, dont elles dépendent si ce n'est
en totalité, au moins suffisamment pour devoir les séduire et leur rendre des comptes.
De la professionnalisation des ONG, découlent des problématiques traditionnellement traitées
dans les entreprises lucratives, ou pour utiliser le mot qui fait peur, "commerciales".
On peut se demander en quoi l'institutionnalisation ou la bureaucratisation sont un "mauvais
point" pour les ONG, si ces processus leur font gagner en efficacité opérationnelle. Au sein des
ONG, la peur de cette bureaucratisation vient d'une crainte fondamentale de la perte de contrôle
de soi-même. La diversification des métiers et l'endurcissement des normes de gestion,
pourraient les conduire à la perte du fil conducteur de leur raison d'être, l'humanité. Ce sentiment
n'est pas généralisé, et des ONG comme MSF ont toujours revendiqué le besoin du "politique" et
sont ouvert à l'utilisation des méthodes modernes de management. La position rationnelle de
MSF ne l'empêche pas de garder toute sa légitimité et sa symbolique. Selon leur histoire et leur
fonctionnement (actions, financements, etc.), les ONG semblent adopter des approches
différentes, allant de la position défensive à l'utilisation sans complexe des méthodes de
management d'entreprise.
Ici se pose la question légitime d'une mort des ONG pour laisser place à des entreprises de
solidarité internationale. Pourquoi ne pas envisager que la solidarité puisse être une profession,
et que l'emprunt d'un modèle entrepreunarial ayant fait ses preuves en management et en
gestion, puisse être compatible avec un engagement humanitaire profond et renforcé par une
optimisation de l'efficacité.
C'est cette complexité et cette perpétuelle balance entre "le pour et le contre", qu'il faut garder à
l'esprit lors de la suivante analyse du management, de la gestion et de la gouvernance des ONG.
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LA GOUVERNANCE ET LES PRATIQUES RH EN ONG
I.LA GOUVERNANCE
La gouvernance associative est importante dans la définition des politiques des ONG.
Globalement, deux modèles existent : un traditionnel de la corporate governance, dit de la
« valeur actionnariale » (satisfaction des actionnaires) ; un autre dit de la « valeur partenariale »
(satisfaction des parties prenantes). C’est ce dernier modèle qui a été considéré comme le plus
adapté aux entités à caractère non lucratif.
La gouvernance associative a une importance particulière en ce qui concerne la direction de
l’ONG et plus précisément le Conseil d’Administration.
- Direction :
La question centrale est de savoir si les dirigeants (présidents, directeurs) doivent se consacrer à
plein temps, et donc s’ils doivent être rémunérés. Vu les exigences croissantes, cette question
est devenue pertinente et MSF-France a choisi cette option. Un décret du 20 janvier 2004 de
l’administration fiscale autorise la rémunération du Président d’une association ainsi que celle de
deux autres membres du conseil d’administration.
Cependant, beaucoup d’ONG ne choisissent pas cette solution. Ainsi, MDM-France (avant 2009)
avait une présidence exécutive non rémunérée, assurée par un médecin engagé dans
l’humanitaire ; HI-France a une présidence non exécutive pesant peu par rapport au supérieur de
l’équipe salariée. Le modèle qu’avait adopté ACF-France à l’époque de la présidence par J-C.
Rufin était encore autre : le président non exécutif n’interfère pas dans les décisions
opérationnelles mais sa réputation lui offre un rôle d’animateur et permet la représentation de
l’ONG.
- Conseil d’administration :
La définition de leur mandat et de leur rôle est importante : fonction politique relative aux
orientations stratégiques générales ou fonction opérationnelle.
Selon P. Ryfman, aucun modèle ne s’est imposé en Europe alors qu’aux États-Unis, la tendance
est à la distinction entre le CA et la structure permanente. J. Carver a même théorisé cela en
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précisant que les administrateurs représentent les intérêts des parties prenantes, à commencer
par les destinataires finaux.
En ce qui concerne le choix des membres du CA, il se pose la question de savoir si ce
recrutement doit se faire sur la base de leurs connaissances ou expériences préalables quant au
milieu ONG ou alors, si c’est davantage leur regard extérieur qui est recherché. Là encore, ce
n’est pas tranché mais la plupart des ONG pratiquent la formation des administrateurs une fois
ceux-ci en fonction.
II. POLITIQUES ET PRATIQUES RH
Les ressources humaines sont au cœur de la réussite ou non des projets de développement et
d’urgence. La complexité des contextes d’intervention impose une grande attention pour cette
gestion. Cependant, à cause d’une relative imprévisibilité des entrées financières, le
fonctionnement d’une ONG, sur le terrain ou au siège, est qualifié de « sous-staffé », la charge
de travail étant importante par rapport au nombre de personnel.
D’une manière générale, force est de constater que les ONG définissent clairement les postes à
pourvoir (cf. les annonces sur Coordination Sud par exemple) et atteignent des niveaux
comparables aux entreprises. Cette définition des postes se fait en général en amont, dès la
conception d’un projet ou programme.
II.1. Au siège
A. Le personnel salarié
Si au siège, la plupart du personnel est salarié (CDD ou CDI), le recours aux stagiaires, et dans
une moindre mesure au Service Civil Volontaire, est répandu, de réels postes étant ainsi
tenus (notamment assistant de desk). La stabilité de l’équipe est largement assurée et au CCFD,
la tradition veut qu’une personne reste 9 ans maximum. Les niveaux de salaires sont de 30% à
50% inférieurs à ceux du secteur lucratif. Ceci est une particularité française car dans les ONG
du monde anglo-saxon, les grilles salariales sont identiques.
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B. Les bénévoles
Les associations doivent être très attentives lorsqu'elles ont recours aux bénévoles.
En effet, le bénévolat est une forme de collaboration présente dans de nombreuses associations.
Pourtant, elle ne dispose d’aucun statut spécifique, ce qui implique un risque de requalification de
cette relation en salariat.
Ce risque se situe à un double niveau, le lien de subordination et la rémunération. Par exemple,
si l’action du bénévole est encadrée de façon trop stricte, une requalification de cette relation en
contrat de travail est envisageable. Une telle requalification n’est toutefois possible que dans la
mesure où le bénévole bénéficie également d’une indemnisation ou d’avantages en nature.
L'URSSAF est très attentive aux relations association/bénévoles. Elle a de nombreuses fois
requalifié des bénévolats en salariat. Les associations redoublent donc d'attentions.
On peut le remarquer dans l'entretien avec le Directeur des Ressources Humaines du CCFD-
Terre solidaire qui me précisent rapidement : « Les bénévoles (...) viennent fournir un appui
ponctuel (quelques heures par semaine, quelques jours par an) et dans le cadre d'une mission
bien définie, avec des activités simples, sans resp onsabilité, sans lien de subordination.
Quelques exemples : ouverture du courrier ou appui au mailings, traitement des dons, revues de
presse, accueil,... »
Les relations bénévoles/salariés
Les relations bénévoles/salariés sont atypiques et propres au monde associatif. Plusieurs
éléments expliquent ce caractère particulier. Dans une grande majorité, les dirigeants associatifs
se reconnaissent bien sûr comme employeurs, lorsqu'ils le sont, mais ont des difficultés
psychologiques et organisationnelles à accepter et assumer leur statut de "patron". Ils
n'envisageaient pas, le plus souvent, ce type de positionnement lorsqu'ils formulaient leur accord
pour contribuer au fonctionnement de l'association en siégeant au conseil d'administration. Cela
est particulièrement vrai pour les dirigeants d'une association de petite taille. Un autre facteur
explique ce caractère atypique des relations bénévoles/salariés, par rapport à celles qui existent
entre employeurs et employés dans le monde de l'entreprise, c'est la place qu'occupent, dans
l'esprit des acteurs associatifs, le militantisme et le souci d'utilité sociale. Humanisme,
engagement et convivialité teintent dès lors, souvent, les relations inter personnelles dans
l'association que ce soit entre bénévoles ou entre bénévoles et salariés. Cet aspect positif doit
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être néanmoins nuancé du fait des tensions entre dirigeants et membres du personnel que l'on
peut constater dans certaines structures associatives.
Les raisons de ces dissensions peuvent être :
- une définition peu claire des missions et rôle de chacun
- un manque de lisibilité quant à la personne ou à l'instance qui a autorité sur le
salarié
- un projet associatif non ou mal défini amenant les acteurs de la structure à viser des
objectifs différents
- une divergence de vue, dans l'équipe des bénévoles, sur la pertinence de recourir à
l'emploi salarié dans l'association (compte tenu, nous l'avons dit, de la place
importante du militantisme dans l'histoire de la vie associative)
- la différence de statut, certains bénévoles ayant l'impression de faire la même chose
que le salarié, mais sans contrepartie
- des niveaux d'implication et d'attentes différents, le bénévole devant jongler entre
contraintes familiales, professionnelles, ou relatives à d'autres mandats associatifs, et
le salarié étant beaucoup plus présent dans la structure avec, souvent, une envie
d'avancer plus vite que ne le permet la disponibilité des élus
- un mode relationnel entre les personnes basé sur une logique de concurrence, et par
fois de pouvoir, plus que sur des logiques de coopération au service du projet
associatif
- la faiblesse fréquente des salaires et des perspectives d'évolution professionnelle du
salarié du fait de la difficulté, pour les associations, à trouver les financements pour
pérenniser et développer les emplois
- des conditions et moyens de travail quelquefois estimés insuffisants par le salarié
Le recours aux bénévoles n'est pas le même selon les organisations. On peut distinguer deux
types d'ONG : celles dont la vocation est plus de « mobilisation sociale » sont normalement
dotées d'une forte base militante (CCFD, OXFAM, Croix Rouge) et les ONG opérationnelles
beaucoup plus professionnalisées (MSF, Handicap International).
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Le cas du CCFD-Terre Solidaire (issu d'un entretien avec le DRH et un bénévole) :
Le CCFD a une gestion du bénévolat de son réseau très abouti. Une vraie responsabilisation et
un véritable engagement à la cause des bénévoles permet leur fidélisation.
On distingue les bénévoles du réseau des bénévoles du siège.
Les bénévoles du réseau sont environ 15 000, et ont différentes activités :
- administratives et logistiques (transmission de l'information, mise à jour des bases de données
collecte et membres, permanence dans les délégations diocésaines,...)
Ils sont appuyés par des salariés dont la fonction est intitulée Accompagnateurs d'Équipes
Bénévoles.
- évènementielles et de sensibilisation (animations, fêtes, campagnes, activités pédagogiques,
jeux...)
Ils sont appuyés par des salariés dont la fonction est intitulée Animateurs-Formateurs.
- politiques et organisationnelles (lien avec l'Église au niveau local, bureau de la délégation,
relation avec les collectivités territoriales, les mairies...)
Ils sont appuyés par des salariés dont la fonction est intitulée Chargés de mission régionale.
Tous les bénévoles sont libres de participer aux activités selon leur planning personnel
(nombreux sont ceux qui ont une activité salariée à côté de leur engagement). Seuls les
bénévoles dit "structurants" (activités politiques et organisationnelles) sont des élus (présidents,
trésoriers et secrétaires des 100 délégations diocésaines) avec un mandat de 3 ans
renouvelable.
Les bénévoles du siège sont peu nombreux comparativement à d'autres associations (une
vingtaine pour 180 salariés), et ne remplissent pas des fonctions qui pourrait être salariées. Ils
viennent fournir un appui ponctuel (quelques heures par semaine, quelques jours par an) et dans
le cadre d'une mission bien définie, avec des activités simples, sans responsabilité, sans lien de
subordination.
Il peut arriver que les ONG fassent appel à un organisme extérieur pour trouver un appui
bénévole sur une mission précise : le CCFD utilise par exemple l'association Passerelle &
Compétences. L'association France Bénévolat a aussi été créé pour répondre aux besoins
spécifiques des ONG en bénévoles aux compétences de pointes.
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II.2. Sur le terrain
Deux choix s'offrent aux ONG sur le terrain : le recours a du personnel expatrié
(volontariat ou salariat) ou le recours a du personnel national ou local.
A. Le volontariat de terrain
Le statut actuellement privilégié est celui du volontariat, d’autant plus pour les premières
missions, mais le nombre de CDD est en forte augmentation. Le volontariat correspond en effet à
l’idéal de désintéressement et répond à la nécessité d’apporter des compétences techniques
précises. De plus, le volontariat est aussi souvent présenté comme une fin en soi, en ce sens
qu’il participe à la formation et à l’éducation de la jeunesse européenne, le témoignage ayant un
sens fort au retour. La gestion des volontaires doit donc tenir compte de cette particularité.
Le statut de volontaire est clairement défini par la loi (2005 pour le volontariat de solidarité
internationale) et impose à l’ONG de former le futur volontaire avant le départ, l’encadrer durant
l’expatriation, lui apporter les assurances et la couverture sociale ainsi que les frais de voyage et
une indemnité de subsistance (qui est un vrai salaire dans les grandes ONG), et l’accompagner à
son retour.
La sélection des volontaires se fait de manières diverses selon les ONG (entretiens, tests,
diplômes exigés ou non). Il s’agit de trouver le candidat le plus en adéquation avec le poste à
pourvoir bien que de nombreux facteurs soient imprévisibles, au premier rang desquels
l’évolution de la personnalité du volontaire une fois en poste. Il s’agit surtout d’éliminer les plus
fragiles et les plus à risque. La formation constitue une préparation au départ et aborde en
général des domaines extrêmement variés : ONG, poste et mission du volontaire, contexte du
pays et culture, problématiques générales du développement, etc. Selon P. Valéau, la principale
faiblesse de ces préparations est de ne pas être poursuivie sur le terrain (avec une sorte de
formation continue).
L’encadrement durant la mission du volontaire est important mais rendu difficile du fait de
l’éloignement. De plus, le volontaire devant s’approprier le projet, une grande autonomie lui est
souvent laissée et son lien de subordination avec la hiérarchie est plus faible que pour un salarié.
Cependant, l’ONG doit garantir un minimum de quantité et de qualité du travail fourni par le
volontaire mais n’a qu’un faible pouvoir. Des techniques de recadrages, de discussions sont
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utilisées, légitimées par un écart aux valeurs portées par l’ONG (il est difficile de parler de
sanction).
En ce qui concerne l’évaluation du travail des volontaires, celle-ci doit tenir compte à la fois de la
performance technique mais aussi de la manière d’obtenir les résultats (comportements, respect
des populations, conformité aux valeurs de l’ONG).
Mais le volontariat trouve ses limites dans la durée. Soit le volontaire reprend des fonctions dans
le secteur lucratif, soit il souhaite poursuivre dans le milieu ONG mais le volontariat ne peut être
satisfaisant. Le recours systématique au volontariat priverait l’ONG de compétences et
entraînerait un turnover insurmontable. La problématique du statut du personnel de terrain est
effectivement importante et sa résolution susceptible d’améliorer significativement la gestion des
activités. En effet, le turnover pose des problèmes d’acclimatation, de transmission des
informations et la variété des personnalités entraîne des changements fréquents de manière de
gérer. Cela limite l’efficacité des projets et bride le personnel local. En 2001, la durée moyenne
d’une mission chez MSF-France était de 5,1 mois (toutes catégories de mission confondues). Par
contre, le turnover présente l’avantage de conserver un dynamisme grâce à la motivation sans
cesse renouvelée par l’arrivée d’un nouveau volontaire et son regard extérieur.
B. Le salariat de terrain
Ainsi, un autre statut sur le terrain, plus habituel en RH, est celui du salariat. Il s’agit de CDD la
plupart du temps. Cela est proposé aux postes d’encadrement et de fonctionnement des
délégations régionales la plupart du temps. La cohabitation avec les volontaires fonctionne bien
(par rapport aux difficultés entre bénévoles et salariés).
Mais, certaines ONG (comme HI-France) pratiquent de plus en plus une politique RH pour
conserver leur personnel compétent et propose des CDI aux personnels de terrain (poste à fortes
responsabilités, au niveau national ou régional). De plus, la possibilité de partir en famille se
développe, toujours dans le souci de permettre à son personnel de concilier expatriation et vie
privée. Grâce à cela, la durée moyenne de travail au sein de HI-France est de 6,26 années
contre 3 ans et 9 mois pour les volontaires.
Cependant, les ressources financières limitent fortement l’adoption de ces politiques de
fidélisation et les réservent aux plus grandes ONG.
Le tableau ci-dessous reprend les principaux arguments en faveur du salariat expatrié et du
volontariat expatrié (extrait du Guide Synergie Qualité édité par Coordination Sud).
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C. Intégrer le personnel local
Le recours aux personnels expatriés (volontaires ou salariés) se justifie largement dans les
contextes d’urgence mais pose un problème dans le cadre du développement de plus long
terme. En effet, les compétences nécessaires dépassent alors une simple maîtrise technique et
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Les arguments en faveur du salariat expatrié Les arguments en faveur du volontariat expatrié
Les critères suivants peuvent être utilisés pour :�décider de recourir au salariat pour les expatriés�choisir les postes à passer en statut « salarié »
Critères propres à l’organisation (exemples) : �volonté de fidéliser les meilleures compétences
au travers du salariat (le volontariat étant limitédans le temps). La cible : les personnes quisouhaitent faire carrière dans l’humanitaire.
�volonté de faciliter la gestion des personnes : lesdroits et devoirs du salarié sont clairs (plus clairs
que ceux du volontaire)
Critères propres au poste ou au programme : �la mission est une priorité politique
�les compétences recherchées sont rares�le poste comprend un haut niveau de
responsabilités : taille importante des équipes àmanager (expatriés et/ou personnel national),
nombreux projets à manager, le ou les projets àmanager sont financés par des bailleurs multiples=> complexité des rendus narratifs et financiers
Dans ce type de contexte, le salariat présente lesavantages suivants (du point de vue de l’organisation) :
�renforcement du lien de subordination siège-terrain
�le salariat peut être un « plus » pour recruter ouune exigence de la part de professionnels
confirmés
Du point de vue des expatriés, le salariat peut présenterles avantages suivants :
�le salariat est une forme de reconnaissance dumétier de la personne
�c’est un statut qui facilite le retour en France(droits aux indemnités ASSEDIC).
� C’est un statut cohérent avec laconception qu’ont certains expatriés de leur
passage dans une ONG humanitaire : c’est « unmoment » de leur vie
� Volontariat et témoignage ont maille àpartir : de retour en France, les volontaires
irrigueront la société civile avec destémoignages directs sur des réalités lointaines.
Multiplier ces opportunités de témoignagesindividuels (au travers d’une promotion duvolontariat) peut être en soi un objectif de
l’organisation.
� Le volontariat permet de valoriserl’engagement humanitaire des personnes
� Les volontaires ont une libertéd’interpellation, un regard neuf et donc critiquesur le terrain (valeur ajoutée par rapport aux
acteurs expérimentés)
� C’est un statut qui amène de lacréativité dans l’organisation : un fort brassage
permet le passage dans l’organisation denombreuses personnalités
� Le coût d’un volontaire est moins élevéque celui d’un salarié : à ressources égales
l’organisation peut donc envoyer davantage devolontaires que de salariés sur le terrain
Jean-François CHAUVEL Management, gestion et gouvernance des ONGBenjamin DURIEZ Séminaire de Philippe RyfmanAurore MITTELBERGER le 1er février 2010Barbara THOREZ
la situation exige un lien plus fort avec la population destinataire et l’objectif de renforcer
l’autonomie locale.
Dans la plupart des ONG, la place du personnel local est en train d’évoluer, en quantité et en
responsabilités. On peut énumérer trois catégories de postes : prise en charge de l’expatrié
(cuisinier, gardien …), support logistique et administratif (chauffeur, secrétaire, interprète…) et
opérations (personnels de santé, animateurs, formateurs…). La dernière catégorie prend de
l’importance grâce à plusieurs facteurs : augmentation du nombre de diplômés locaux et
amélioration de la qualité des systèmes éducatifs locaux, précarité extrême de certaines
missions d’urgence empêchant l’expatriation, pression extérieure (des gouvernements locaux et
du public au Nord dénonçant des pratiques discriminantes et interrogeant le désintéressement
affiché).
Expatrié Personnel local
Investissement
dans l’emploi
La motivation première réside
rarement dans la recherche d’un
emploi.
Mais il ne faut pas négliger cet
aspect.
La recherche d’un emploi est
importante vu les forts taux de
chômage et les conditions salariales
attractives a sein des ONG. Certains
ont tout de même une motivation
sociale.
Contexte local
Étranger quels que soient ses efforts
d’intégration.
Connaissance profonde : langue,
culture, aspect politique,
géographie…
Durée du travailPériode déterminée le plus souvent
et courte.
Durée indéterminée en général.
Les missions de terrain comportent souvent une grande part de négociations et de représentation
auprès des autorités, et une autonomie importante en gestion financière. Cette particularité
permet le développement d’arguments pour le maintien des responsabilités aux mains des
expatriés : ceux-ci sont indépendants par leur extranéité et évitent la pression sociale, ethnique
ou familiale ; moindre probité des employés locaux.
Cependant, une politique d’intégration des personnels locaux offre des avantages non
négligeables et permet de pallier les difficultés énumérées. En effet, une meilleure représentation
de ce personnel au sein des instances de gouvernance et d’expression, des processus de
formation continue (souvent utilisés mais rarement structurés) et une politique de promotion
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interne permettent de renforcer la dimension humanitaire de l’engagement du personnel local
ainsi que sa probité.
Cela met donc en valeur la présence plus durable du personnel local garantissant la continuité
des programmes, sa connaissance du contexte et de plus, dans les contextes d’urgence, le
personnel local est plus rapidement opérationnel vu sa proximité géographique. Le recours au
personnel local augmente aussi la rationalité économique, les frais de déplacements et les coûts
salariaux étant moindres.
L’intégration du personnel local exige donc un réel engagement de l’ONG. Le management doit
s’organiser de manière à passer de la priorité donnée à la nationalité à l’identification des
compétences. L’organisation des structures permanentes au siège et sur le terrain est alors
importante et selon E. Comte et E. Quéinnec, une répartition des desks par types ou contextes
d’intervention permettrait de « consacrer beaucoup plus d’attention institutionnels au problème
du travail local ». Cela nécessite ensuite une exploitation de ces compétences « selon une
logique décentralisée », reproduisant sur le terrain une organisation favorisant leur management.
Ainsi certaines ONG ont fait le choix de donner une forte autonomie aux personnels locaux
comme Frères des Hommes ou Human Rigths Watch (y compris dans des zones à forte
insécurité).
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GESTION DE LA PLANIFICATION ET DES RESSOURCES
FINANCIÈRES
Après nous être interrogés sur les problèmes éthiques et la gestion des ressources humaines,
nous avons souhaité nous questionnés sur les défis relatifs à la planification des projets et aux
ressources financières qui leur sont allouées. Quels sont les éléments importants dans ce
domaine ? Sur quels outils les ONG peuvent-elles se baser ?
I. LA PLANIFICATION
Dans le milieu des ONG, nous assistons à une demande de planification de plus en plus
importante. Mais d’où vient-elle ? Et comment est-il possible d’effectuer une planification
réussie ?
Dès les années 1980, la vision cyclique du projet et de la planification par objectifs ont gagné du
terrain au sein de nombreux organismes de coopération bilatérale ou multilatérale. Cette vision
est synthétisée dans le cadre logique. La gestion du cycle de projet a été utilisée dans la
coopération multilatérale dès 1990 et elle s’est imposée dans la culture des ONG françaises
depuis une dizaine d’années, principalement à cause de l’augmentation des cofinancements de
ces associations par les bailleurs de fonds internationaux.
L’adoption de ce cycle, qui comprend plusieurs phases de l’identification à l’évaluation indique
bien qu’il y a une prise en compte des facteurs externes, de leur influence possible sur le projet
et des nécessités d’adapter la planification au fur et à mesure de son avancement. Ainsi cela
provoque une certaine complexification de la planification.
Les bailleurs de fonds se montrent de plus en plus exigeants lors des demandes de subventions.
Ces dernières doivent nécessairement être accompagnées d’indications précises concernant les
objectifs et les résultats attendus, les effets prévisibles sur l’environnement, l’impact sur les
rapports de genre… Des indicateurs de mesure doivent être mis en place pour quantifier les
différents éléments du projet.
Différents outils de planification se sont mis en place et sont eux aussi de plus en plus souvent
exigés par les bailleurs. Le principal d’entre eux est le cadre logique. Ce dernier intègre les
activités prévues, les résultats attendus, les objectifs spécifiques et globaux. Les indicateurs
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doivent normalement être objectivement vérifiables et comprendre une cible quantitative,
qualitative ainsi que la notion du temps nécessaire. Cependant ce document comprend
également une colonne « hypothèses » qui permet de recenser l’ensemble des risques et des
conditions hors du contrôle du projet. Ainsi la vulnérabilité plus ou moins forte de la planification
est prise en compte.
De nombreux autres outils existent et peuvent être utilisées par les ONG pour les aider à mieux
formuler et planifier leurs projets, même s’ils ne sont pas obligatoirement demandés par les
bailleurs de fonds. Parmi les plus courants, nous pouvons citer le diagramme de Pareto, l’arbre
d’objectifs, le QQOQCC1 ou encore le diagramme causes-effets ou le chronogramme.
Les projets de développement sont mis en place dans des univers d’une grande complexité, et
qui de plus, peuvent changer rapidement. Ce contexte influe nécessairement sur le projet et peut
conduire à modifier son déroulement. La planification ex ante bute donc toujours sur des
problèmes informationnels. Les études empiriques confirment à quel point les projets de
développement se déroulent rarement comme prévu.
De plus, la précision de planification demandée par les bailleurs de fonds va également à
l’encontre des approches de plus en plus participatives qui sont mises en place. Celles-ci sont de
plus en plus courantes pour des raisons éthiques et surtout parce que c’est une condition
essentielle à l’appropriation du projet par la population.
Ce qui semble le plus faisable est encore d’ajuster la planification régulièrement en fonction
d’évaluations intermédiaires ; cela permet un meilleur pilotage du projet, malgré l’imprévisibilité
relative du contexte. Quand à l’évaluation finale, elle peut être effectuée par rapport à la
planification effectuée et aux objectifs définis, mais elle peut aussi évaluer la planification en
tenant compte de sa logique, son degré de réalisme ainsi que sa possibilité d’adaptation au
milieu.
Mais même si une ONG fait preuve de planifications de projets réussies, et que cela montre des
qualités dans sa gestion, celles-ci ne pourront servir l’image de l’ONG que si cette dernière fait
également des efforts pour montrer sa bonne gouvernance et notamment sa transparence à ses
donateurs potentiels.
1 Qui doit répondre aux questions : Quoi, Qui, Ou, Quand, Comment, Combien
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II. UNE GESTION DES RESSOURCES FINANCIÈRES QUI DOIT ÊTRE
TRANSPARENTE
En quoi la transparence est-elle importante ? Comment juge-t-on de la transparence d’une
ONG ? Les ONG peuvent-elles être aidées dans ce domaine ?
Si la notion de transparence renvoie de façon générale au fait que l’ONG laisse clairement
paraître ses objectifs et la façon dont elle s’organise pour les atteindre, elle rejoint tout de même
le plus souvent la notion de transparence financière. La question de l’utilisation des fonds par les
ONG a pris une certaine importance en France depuis le milieu des années 1990 à la suite d’un
grand scandale concernant la découverte de malversations au sein de l’association de lutte
contre le cancer, l’ARC, dont les dirigeants ont détourné des sommes à leur profit. Cela a été de
nouveau le cas assez récemment, en octobre 2009, où des détournements ont été constatés
dans 17 associations françaises.
Afin d’éviter ces désagréments les ONG sont contraintes à redoubler de vigilance dans la gestion
des fonds collectés. Nombre d’entre elles se sont dotées de codes de bonne conduite et de
règles de transparence plus strictes afin de rassurer leurs donateurs. Depuis 1989, existe
notamment le Comité de la Charte2 qui propose une charte de déontologie à ses associations
membres auxquelles il délivre, en échange d’un droit de contrôle, un agrément attestant la
transparence et la bonne gestion de l’ONG. D’autres organismes de contrôle peuvent être cités
tels que la Cour des Comptes.
Et il faut souligner également l’importance des plate-formes dans le domaine de la transparence.
En effet, nous pouvons citer l’exemple de Coordination SUD qui aide ses membres dans des
démarches de transparence ainsi que dans leur réflexion sur l’éthique au travers du groupe de
travail ad hoc « Ethique et transparence » qui produit des recommandations et des outils. Cette
plate-forme leur assure aussi un appui méthodologique.
De façon plus large, afin d’améliorer la gestion et les programmes des ONG, Coordination SUD
propose également le « guide synergie qualité ». Ce dernier, conçu après deux années de travail
avec plusieurs ONG françaises, définit des principes et des exemples de bonnes pratiques pour
cinq axes thématiques : l’éthique humanitaire, la gouvernance associative, la gestion des
ressources humaines, le cycle de projet et la participation des populations.
2 http://www.comitecharte.org/
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BIBLIOGRAPHIE
Ouvrages :
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Zimet Joseph, Les ONG : de nouveaux acteurs pour changer le monde, Paris, Ed Autrement,
2006
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HADJAJ-CASTRO H., Pratique des ONG belges francophones en matière de gestion des
interventions, Note de diagnostic, 2004.
IGALENS J. et QUEINNAC E, Les organisations non-gouvernementales (ONG) et le
management. Ed. Broché, 2004.
RYFMAN P., Une histoire de l'humanitaire, Ed. La découverte, Coll. Repères, 2008.
RYFMAN P., Les ONG, Ed. La découverte, Coll. Repères, 2009.
Sites :
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http://www.coordinationsud.org/spip.php?rubrique43
http://www.coordinationsud.org/spip.php?article15779
http://www.sphereproject.org/
http://www.passerellesetcompetences.org/pcsite/index.php?
option=com_content&view=article&id=3&Itemid=3
http://www.francebenevolat.org/
Collectifs
Contestataires, contestées... Quel avenir pour les ONG dans la nouvelle gouvernance
mondiale? / Gatecrashers, controversial organisations, what future for NGOs in the global
governance?, Ouvrage bilingue Français/Anglais, Ed. DALLOZ / IRIS, 2008, sous la direction de
Handicap International.
Normer le monde, Ed L'Harmattan, Coll. Logiques Politiques, 2009, sous la direction de Yves
SCHEMEIL et Wof-Dieter EBERWEIN.
Opération des Nations-Unies en Côte d'Ivoire, Mieux comprendre la résolution 1325, bureau
de l'inforamtion publique, 2000.
Fiche officiel du label "Gouvernance et gestion responsable des associations et fondations",
rapport Afaq / Afnor.
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Acte de Colloque
ETIKUMA 99, Les codes de conduite : référence éthique et gage d'efficacité pour les actions
humanitaires du IIIe millénaire, Colloque européen de l'éthique humanitaire, Lyon 10 et 11
décembre 1999, sous la direction de Beboît MIRIBEL de Bioforce et de Philippe RYFMAN du
DESS Développement et Coopération Internationale de la Sorbonne.
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Annexe .
Critères pour l'obtention du label "Gouvernance et gestion responsable des associations et
fondations" accordé par l'Afnor Certification :
CRITERES DE LABELLISATION
Domaine 1 : DEFINITION ET CONFORMITE DU CHAMP
ET DU PERIMETRE D'INTERVENTION DE L’ORGANISME
1.1) Mission – Finalité - Objet social
1.2) Activités – Bénéficiaires
1.3) Valeurs et principes
1.4) Étendue juridique et géographique de l’organisme
1.5) Agréments et/ou reconnaissances obtenues dans le champ public
Domaine 2 : GOUVERNANCE
2.1) Réglementation applicable
2.2) Statuts
2.3) Dispositions complémentaire: règlement intérieur, procédures...
2.4) Comités consultatifs (conseil et contrôle)
2.5) Equipe dirigeante
2.6) Responsabilités – Autorités – Délégations de pouvoir
2.7) Stratégie – Politiques et objectifs
2.8) Sélection et planification des projets
2.9) Dispositifs d’évaluation des activités de l’organisme
2.10) Prévention des conflits d’intérêts
Domaine 3 : GESTION
3.1) Maîtrise des activités opérationnelles
3.1.1) Activités inhérentes à la mission de l’organisme
3.1.2) Activités commerciales complémentaires
3.2) Gestion des ressources
3.2.1) Gestion des ressources financières
3.2.2) Gestion des ressources humaines
3.2.3) Gestion des ressources matérielles
3.2.4) Gestion des achats
3.2.5) Gestion des données relatives aux donateurs et aux financeurs
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3.2.6) Gestion des partenariats et des relations externes
3.2.7) Gestion des enregistrements et traçabilité
Domaine 4 : COMMUNICATION
4.1) Principes de communication
4.2) Informations relatives aux activités et informations financières
4.3) Communication
Domaine 5 : MESURE, ANALYSE ET AMELIORATION DES PER FORMANCES
5.1) Traitement et suivi des réclamations
5.2) Ecoute des parties intéressées (membres, bénéficiaires, donateurs, salariés…)
5.3) Mesure des performances
5.4) Définition et suivi d’actions d’amélioration
Domaine 6 : AMELIORATION DE LA DEMARCHE LABEL – Domaine Facultatif
6.1) Amélioration de la démarche Label
6.2) Audits internes
6.3) Revue annuelle
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