Madame Bovary de Gustave Flaubert - MR FRANCAIS
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Madame Bovaryde Gustave Flaubert
Support de cours | Mathieu Roduit | 2020-2021
Table des matiĂšres1. Biographie de Gustave Flaubert2. Structure du roman3. Les personnages4. Lâironie flaubertienne5. Analyses
5.1. PremiĂšre partie, Chapitre I (Incipit) : Le premier jour dâĂ©cole de Charles 5.2. PremiĂšre partie, Chapitre VI : LâĂ©ducation dâEmma5.3. DeuxiĂšme partie, Chapitre VIII : Les Comices agricoles
6. Conclusion
*. Le genre narratif*.1. Le temps du récit : la chronologie
*.1.1. La prolepse*.1.2. Lâanalepse
*.2. Le temps du rĂ©cit : le rythme*.2.1. Lâellipse*.2.2. Le sommaire*.2.3. La scĂšne*.2.4. Le ralenti*.2.5. La pause
*.3. Les fonctions du narrateur*.3.1. La fonction narrative*.3.2. La fonction de régie ou de contrÎle*.3.3. La fonction communicative*.3.4. La fonction métanarrative*.3.5. La fonction testimoniale*.3.6. La fonction modalisante*.3.7. La fonction évaluative*.3.8. La fonction explicative*.3.9. La fonction généralisante ou idéologique
**. Les registres littéraires**.1. Le registre comique**.2. Le registre ironique
***. Le portrait****. Le antihéros
1. Biographie de Gustave Flaubert
2. Structure du romanPremiĂšre partie DeuxiĂšme partie TroisiĂšme partie
Nombre de chapitres 9 chapitres 15 chapitres 11 chapitres
Nombre de pages 59 pages 137 pages 98 pages
Lieux(apparente progression)
Tostes (surtout la maison de Charles) Yonville-LâAbbaye (village fictif) Yonville-LâAbbaye et Rouen(ouverture du champ dâaction dâEmma)
TemporalitĂ© 1837-1840 â Chapitre I (1828-1836) 1841-1843 1844-1847 â Chapitre XI (1848-1856)
Amants / adultĂšres(apparente progression)
âą Charlesâą Vicomte de la Vaubyessard (adultĂšre
symbolique)
âą LĂ©on (platonique)âą Rodolphe
âą LĂ©on
Charles Jeune mariĂ© Mari trompĂ©VĆuf accablĂ© par les dettes, la
souffrance, la trahison et la mort
Emma Femme dĂ©sillusionnĂ©e Amante dĂ©sillusionnĂ©e Ătre humain dĂ©sillusionnĂ©
Fonctions Présenter les personnages et poser la situation
Enlisement dâEmma dans son quotidien Sentiment dâaccĂ©lĂ©ration, tension dramatique, effondrement
Schéma narratif
Situation initiale : vie paisible de Charlesavec sa premiĂšre femme et dâEmma avecson pĂšreNĆud : mariagePĂ©ripĂ©ties : bal de la Vaubyessard
PĂ©ripĂ©ties : naissance de BerthePĂ©ripĂ©ties : amour platonique avec LĂ©onPĂ©ripĂ©ties : histoire dâamour, comicesagricoles, puis rupture avec Rodolphe
PĂ©ripĂ©ties : histoire dâamour, avec LĂ©onPĂ©ripĂ©ties : les dettes sâaccumulentDĂ©nouement : suicide dâEmmaSituation finale : Emma morte, Charlesaussi, Homais reçoit la croix dâhonneur,LĂ©on se remarie
2. Structure du roman
I II III
I II III IV V VI VII
VIII IX I II III IV V VI VII
VIII IX X XI XII
XIII
XIV
XV I II III IV V VI VII
VIII IX X XI
Char
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Lâintrigueâą Une femme mal mariĂ©e sombre progres-
sivement dans lâadultĂšre et lâendettementpuis meurt.
âą Parcours de la jeunesse pleine dâespoirset de rĂȘves Ă la mort de lâhĂ©roĂŻne.
Rythmeâą ScĂšnes : ralentissement du rythme Ă
moments grandioses de la vie dâEmma(noce, bal de la Vaubyessard, comicesagricoles, ThĂ©Ăątre Ă Rouen, fiacre)
âą Sommaire Ă rĂ©pĂ©tition du mĂȘme (impar-fait de lâennui)
âą ScĂšnes : ralentissement du rythme Ă Moments symptomatique de la vie deCharles (1er jour dâĂ©cole, opĂ©ration dupied-bot), emblĂ©matique
âą Sommaire Ă rĂ©pĂ©tition du mĂȘme (impar-fait de la routine)
Doubles et symĂ©triesâą 2 femmes de Charles / 2 amants dâEmmaâą Bal de la Vaubeyssard / Bal masquĂ© Ă
Rouen⹠Valeur dérisoire des éléments redoublés,
monotonie itérative, dégradation
« Les perles composent le collier, mais câest le fil qui fait le collier. Or, enfiler les perles sans en perdre une seule et toujours tenir son fils de lâautre main, voilĂ la malice. » (Lettre Ă Louise Collet, 1853)
Emma⹠Absente du début et de la fin du roman
âą Tout de mĂȘme 33 sur 35 chapitres (9 ans en400 pages)
âą EnfermĂ©e dans le rĂ©cit comme elle lâest dans sonmariage, Ă©touffĂ©e par lâomniprĂ©sence de Charles
âą Sa vie nâaura Ă©tĂ© quâune parenthĂšse inutile, onentre dans le roman sans la connaitre encore, onquitte le roman au moment oĂč elle estparfaitement oubliĂ©e
âą AdultĂšre = chapitre central (chapitre XVIII surXXXV)
Charlesâą Biographie de Charles dans laquelle sâinsĂšre celle
dâEmmaâą Emma nâest que sa seconde femme
⹠Prologue (I, I) : 9 ans en 10 pages consacrées à lavie de Charles
âą Ăpilogue (III, XI) : une dizaine dâannĂ©es en 10 pagesconsacrĂ©es Ă la mort de Charles, Ă la vie de Bertheset Ă la croix dâhonneur de Homais
âą Vie circulaireâą Perd une femme, puis lâautreâą Ăternel retour du mĂȘmeâą Aucune Ă©volution du personnage
âą SociĂ©tĂ©âą Ăchec du couple Charles (simplicitĂ© et mĂ©diocritĂ©)
+ Emma (romantisme et miĂšvrerie)
âą RĂ©ussite de Homais qui sort son Ă©pingle du jeu(reçoit la croix dâhonneur) et victoire des valeursquâil incarne (anticlĂ©ricalisme, arrivisme,matĂ©rialisme bourgeois)
âą Conclusion ironique, voire mĂȘme cynique
2. Structure du roman
2. Structure du romanMariage
Bal Ă la Vaubyessard
Médiocrité de Charles
Retour Ă Tostes
Berthe est une fille
Naissance dâun enfant
Amour pour LĂ©on
Amour pour Rodolphe
Don Juan
Dettes
Lassitude
Achats compulsifs
I II III Suicide
La spirale de lâennuiâą CircularitĂ©
âą Passage de lâespoir au dĂ©sespoirâą Vie rĂ©pĂ©titive et monotoneâą Vie parsemĂ©s dâaccidents sans consĂ©quences (pavĂ© dans la marre)
âą Pas de progression, lassitudeâą Change de lieux et dâamants, mais ne trouve pas le bonheur
âą Engrenage tragiqueâą Enlisement de la situationâą PrisonniĂšre de sa vision du monde
3. Les personnagesEmma BovaryLâun des personnages fĂ©minins les plus cĂ©lĂšbres de lalittĂ©rature
âą Mythe littĂ©raire qui donne son nom Ă une façon dâĂȘtre au monde, lebovarysme (facultĂ© de lâĂȘtre de se concevoir autrement quâil nâest)
Onomastique
⹠« Madame Bovary !⊠Eh ! tout le monde vous appelle comme cela !âŠCe nâest pas votre nom, dâailleurs ; câest le nom dâun autre ! »
⹠Prénom « aima » + Nom « bovin » = oxymore (romanesque / trivial)
⹠Madame Bovary annonce la tragédie de son existence, le mariage
Grand charme physique
âą MĂȘme si son portrait est Ă peine esquissĂ© (longs cheveux noirs,silhouette mince)
âą Peut-ĂȘtre pour que le lecteur puisse sâen faire sa proprereprĂ©sentation
âą On le devine plus quâon ne la reprĂ©sente Ă travers lâĂ©rotisme quâelledĂ©gage
Pleine dâĂ©motions (discours indirect libre : interrogations,exclamations), mais dĂ©pourvue de rĂ©flexion
Victime dâelle-mĂȘme (conduite)
⹠Pensées égarées par un faux idéal suite à une « intoxicationlittéraire » (on peut concevoir Madame Bovary comme de lamétalittérature)
âą IncapacitĂ© Ă voir la rĂ©alitĂ© en face, naĂŻvetĂ© et forme debĂȘtise
âą Durant son Ă©ducation, elle ne retient que ce qui flatte sa nature ; ellene dĂ©veloppe aucun esprit critique et nâacquiert aucuneconnaissance
âą Le lecteur connait avant elle la mĂ©diocritĂ© de Charles,lâhypocrisie de Rodolphe, la fourberie de Lheureux, etc.
âą Faute de se comprendre ou de comprendre ce qui lui arrive, elleprĂ©fĂšre accuser la fatalitĂ© : « mais pour elle rien nâarrivait, Dieu lâavaitvoulu ! », « il lui semblait que la Providence sâacharnait Ă lapoursuivre » (dĂ©charge erreur fondamentale dâattribution)
⹠Quand elle ne se décharge pas sur Charles, bouc émissaire de sonmalheur
âą MalmariĂ©e, frustrĂ©e et nĂ©vrosĂ©e, condamnĂ©e Ă ne jamais retrouverdans son mariage lâidĂ©al de ses lectures
âą Sâabandonne Ă la faute non par passion, mais par ennui, par enviedâĂ©chapper Ă la mĂ©diocritĂ© de sa condition sociale, cherche unremĂšde dans le matĂ©rialisme et la sensualitĂ©, voire parfois dans laspiritualitĂ©
âą Ă la fois bourreau et victime, rĂȘve son existence plutĂŽt que de la vivreâą Projet de Flaubert dâĂ©crire « un livre sur rien » (ne vit pas)
Victime de la société (condition : « un homme, au moins, estlibre »)
âą DĂ©possession de sa vie de femme par le mariage et les frustrationsquâil engendre (aucune autonomie financiĂšre, aucune libertĂ©sexuelle)
âą Doit mentir pour obtenir ce quâelle veut et devient prisonniĂšre de sonmensonge Ă faussetĂ©
⹠Seule face à son destin, héroïne tragique sans confidente
âą Mort = parodie de tragĂ©die avec le personnage symboliquede lâaveugle Ă la place du chĆur (tragique ordinaire)
Mythe, universalité
âą Irrite, ennuie, en mĂȘme temps quâelle sĂ©duit
⹠« Madame Bovary, sans doute, souffre et pleure dans plus de centvillages de France, à la fois, à cette heure »
Don Quichotte
⹠« Enfin, notre hidalgo sâacharna tellement Ă sa lecture que ses nuitsse passaient en lisant du soir au matin, et ses jours, du matin au soir.Si bien quâĂ force de dormir peu et de lire beaucoup, il se dessĂ©chale cerveau, de maniĂšre quâil vint Ă perdre lâesprit. Son imagination seremplit de tout ce quâil avait lu dans les livres, enchantements,querelles, dĂ©fis, batailles, blessures, galanteries, amours, tempĂȘtes,et autres extravagances ; et il se fourra si bien dans la tĂȘte que toutce magasin dâinventions rĂȘvĂ©es Ă©tait la vĂ©ritĂ© pure, quâil nây eut pourlui nulle autre histoire plus certaine dans le monde. »
3. Les personnagesCharles BovaryTout entier rĂ©sumĂ© dans lâincipit du roman
⹠« Ridiculus sum »
âą Grotesque (qui fait rire par sa bizarrerie), clownesque
Définition négative « pas », « ni⊠ni⊠», « rien »
⹠Caractérisé par le néant
âą Projet de Flaubert dâĂ©crire « un livre sur rien »
Paradoxalement une place importante dans le roman
âą Sert Ă mettre en Ă©vidence la profondeur du dĂ©pit, du mĂ©pris, puis dela haine dâEmma
⹠Présenté essentiellement à travers ses yeux, peu par le narrateur
Ăpicurien, aime les plaisirs simples, vit au jour le jour (carpediem)
âą Le narrateur accorde une place importante aux repas et la digestionde Charles
⹠« il sâen allait ruminant son bonheur, comme ceux qui mĂąchentencore, aprĂšs diner, le gout des truffes quâils digĂšrent. »
MĂ©diocre intellectuellement
⹠Besogneux, pétri de bonnes intentions, mais échoue à ses examens
MĂ©diocre professionnellement
âą Pas mĂ©decin, mais Ă peine « officier de santĂ© » qui Ă©chouecomplĂštement lâopĂ©ration dâHippolyte
MĂ©diocre socialement
âą Incapable de reconnaitre ceux qui se moquent de lui, lui veulent dumal, ou le trompent
⹠Homme sans caractÚre, jouet de tous (ses parents lui choisissentses études, sa mÚre lui trouve une épouse, Homais le pousse à opérer Hippolyte, Emma gÚre ses finances, etc.)
⹠« La conversation de Charles Ă©tait plate comme un trottoir de rue, etles idĂ©es de tout le monde y dĂ©filaient dans leur costume ordinaire,sans exciter dâĂ©motion, de rire ou de rĂȘverie. »
⹠Meurt endetté et dans la solitude
MĂ©diocre comme Ă©poux
âą Veuf
⹠Mari trompé
âą Elle est une inconnue pour lui alors quâelle ne le connait que tropbien (vite fait le tour)
⹠Ses réactions lui apparaissent toujours comme un mystÚre
Figure lyrique et tragique qui meurt par amour
⹠Seul qui ait vraiment aimé Emma
âą Maladroit, mais cherche en toute occasion son bonheur
âą Mort romantique (meurt par amour), la douleur sincĂšrelâĂ©lĂšve au-dessus de la mĂ©diocritĂ©
âą Absence de rĂ©action lors du face-Ă -face avec Rodolphe =signe de mĂ©diocritĂ© ou dâun amour profond?
⹠Qui est le véritable héros du roman?
⹠En tout cas le seul qui est tourné vers autrui
⹠Pas narcissique, généreux
3. Les personnagesLĂ©on Dupuis
Clerc du notaire Guillaumin, pensionnaire du Lion dâOr et locataire dâHomais
Amant sentimental et plutÎt « féminin »
⹠Garçon sans envergure et sans personnalité
âą Partage le mĂȘme gout pathĂ©tique quâEmma pour les lectures niaises et pour les clichĂ©s Ă©culĂ©s dâunromantisme Ă lâeau de rose
âą Trouve en Emma une complice de rĂȘverie et se contente de cette amitiĂ© amoureuse
⹠Incarnation du « couillonisme profond »
Parodie dâamour oĂč les rĂŽles sâinversent
âą VirilitĂ© dâEmma et faiblesse « fĂ©minine » de LĂ©on
⹠« Il devenait sa maitresse plutĂŽt quâelle nâĂ©tait la sienne. Elle avait des paroles tendres avec des baisersqui lui emportaient lâĂąme. »
Amour Ă©chec
⹠« Emma retrouvait dans lâadultĂšre toutes les platitudes du mariage. »
Rodolphe Boulanger de la Huchette
Propriétaire du domaine et du chùteau de la Huchette
Amant viril et physique
⹠Tempérament brutal et intelligence perspicace
⹠Emprunte tous les clichés romantiques pour séduire Emma
âą Fait dĂ©couvrir Ă Emma lâivresse des sens
⹠Double viril et expérimenté de Léon, souligne le ridicule du clerc à travers un amour sensuel et uneattitude conquérante de séducteur
Jouisseur soucieux avant tout de son petit confort
âą Feint lâhumilitĂ© et la dĂ©contraction pour mieux souligner sa richesse, la qualitĂ© de sa toilette, son Ă©lĂ©gance,etc.
âą Se prend pour un dandy (aristocrate de lâesprit)
âą Personnage cynique et vulgaire
âą Don Juan incapable dâĂ©lĂ©gance vĂ©ritable (lettre de rupture, refuse de prĂȘter de lâargent, aucune attentionlors de la mort dâEmma)
âą Lâamour nâest pour lui quâun « tas de blague » et la conquĂȘte du cĆur dâune femme nâest quâune questionde stratĂ©gie
Amour Ă©chec
⹠« Ils se trouvaient lâun vis-Ă -vis de lâautre, comme deux mariĂ©s qui entretiennent tranquillement uneflamme domestique. »
« Rodolphe, qui, pour se distraire, avait battu le bois toute la journée, dormait tranquillement dans son chùteau ; Léon, là -bas, dormait aussi. »
3. Les personnagesMonsieur HomaisIncarne le pouvoir de la science et le positivisme
Son nom vient de « homme », homo en latin, son humanismeridicule propose une image déformée de la philosophie deslumiÚres
âą Il se rĂ©clame des valeurs de la raison, de la tolĂ©rance, du progrĂšs etnâa de cesse de dĂ©raisonner avec narcissisme (exercice illĂ©gal de lamĂ©decine, tyran domestique, opportuniste, charlatan, bavardvaniteux)
âą Caricature de lâanticlĂ©ricalisme extrĂȘme et ridicule
Incarne une bourgeoisie satisfaite, suffisante et sure de sesvaleurs
âą Se fait passer pour un savant, alors quâil nâa guĂšre publiĂ© quâun « fortfascicule » de 72 pages sur la fabrication du cidre, intitulĂ©prĂ©tentieusement « pomologie »
⹠Utilise des termes scientifiques (« coryza » pour rhume,« phlébotomie » pour « saignée », « stréphopode » pour « pied-bot »)et des formulations latines
âą Se fait appeler pharmacien au lieu dâapothicaire, fait peindre partoutson nom en lettres dâor
âą Pour cacher que derriĂšre cette vitrine se cache un abymedâignorance scientifique, incapable de soigner Emma Ă vĂ©ritabledictionnaire des idĂ©es reçues
ObsĂ©quieux devant plus fort que lui, il nâhĂ©site pas enrevanche Ă Ă©craser les faibles
âą Face aux Bovary qui viennent dâarriver, il offre ses services pour
mieux lier ses futurs dĂ©biteurs, dâautant plus quâexerçantillĂ©galement la mĂ©decine, il a besoin de se concilier lâofficier desantĂ©
âą MĂ©decine tout dâabord un excellent commerce
âą Abandonne Charles Ă la mort dâEmma et interdit ses enfants de voirBerthes
Triomphe final ironique
⹠Apothéose de la médiocrité
⹠Non seulement les vrais coupables ne sont pas punis, ils sontencore récompensés et honorés
âą Traduction du pessimisme fondamental de Flaubert qui dĂ©peint unmonde oĂč la sottise humaine, lâarrivisme et la mĂ©diocritĂ© satisfaite etle matĂ©rialisme triomphent
Abbé BournisienIncarne le pouvoir de la religion
âą Pouvoir dâun temps passĂ© maintenu par la force dâinertie delâhabitude, dĂ©trĂŽnĂ© par le positivisme (nouvelle idĂ©ologie qui voue unculte aux sciences et en qui est placĂ©e le salut des hommes) commelâannonce le triomphe dâHomais
Incarne mal la foi
⹠Pratique mécanique de la religion réduite à un rituel dénué de sens
âą Incapable dâentendre Emma, prĂ©occupĂ© par la discipline desenfants lors du catĂ©chisme et par lâorganisation des communions
âą Impassible face Ă la souffrance dâHippolyte
PrĂȘtre matĂ©rialiste
âą Ăgocentrique
⹠Gout pour la bonne chÚre (partagé avec Homais)
âą Avilit le christianisme quâil est censĂ© reprĂ©senter
Monsieur LheureuxIncarne le commerce et le pouvoir de lâargent
⹠Peinture du développement économique et de ses victimes
Figure du tentateur
âą Serpent de la GenĂšse
âą Permet dâaccĂ©der au bonheur matĂ©rialiste de lâavoir
Apparait comme par enchantement
⹠Surprend Emma aux cÎtés de Rodolphe, puis de Léon
Dénué de toute empathie
âą Vend toutes sortes de choses futiles (rideaux en soie, tapis dâOrient)
âą Utilise des moyens de pression, du chantage
⹠Profite de la fragilité de ses victimes
âą Artisan du suicide dâEmma
âą Sâacharne sur Charles aprĂšs la mort dâEmma
âą Sa fortune sâaccroit sur lâinfortune des autres
4. Lâironie flaubertienneDĂ©finitionDu grec ΔጰÏÏÎœÎ”ÎŻÎ± (eironeia), « ignorance feinte »
âą de ΔίÏÏÎœ (eiron), « celui qui pose une question en se prĂ©tendantcrĂ©dule » (cf. question rhĂ©torique), et de ΔίÏΔÎčÎœ (eirein), « parler ».
OrigineSocrate fut lâun des premiers Ă utiliser lâironie qui, chez lui, est unetechnique de questionnement
âą áŒÎœ ÎżáŒ¶ÎŽÎ± ᜠÏÎč ÎżáœÎŽáœČÎœ ÎżáŒ¶ÎŽÎ± (hĂ©n oÈda hĂłti oudĂšn oÈda), « je ne sais quâunechose, câest que je ne sais rien »
Ironie situationnelleIronie non intentionnelle qui apparait par le tĂ©lescopage de deuxrĂ©alitĂ©s antagonistesâą Le cambriolage dâun commissariat de police
âą Lâincendie dâune caserne de pompier
âą Le bouquet de mariĂ©e de la premiĂšre femme de Charles lorsquâEmma vienthabiter avec lui
âą LâopĂ©ration ratĂ©e du pied-bot
On parle habituellement dâ« ironie du sort » ou dâ« ironiecosmique » lorsquâon a lâimpression que le destin sâacharne surun personnage (karma)âą La tartine qui tombe toujours sur le mauvais cĂŽtĂ©
âą La chanson paillarde de lâaveugle lors de la mort dâEmma
âą Mort de RenĂ© assassinĂ© alors quâil a ratĂ© sa vie
4. Lâironie flaubertienneIronie verbaleSens commun
âą Forme dâesprit qui consiste Ă se moquer en disant le contraire de ce que lâonveut faire entendre
Sens technique
âą ĂnoncĂ© non littĂ©ral (cf. mĂ©taphore) dans lequel ce qui est dit (signifiant senslittĂ©ral) diffĂšre de ce qui est signifiĂ© (sens suggĂ©rĂ©)âą Lâironie implique souvent le rappel :
âą dâun Ă©vĂšnement antĂ©cĂ©dent (le « le pauvre homme ! » de Dorine dans Tartuffe)âą dâune norme sociale (la casquette neuve de Charles)âą dâune attente partagĂ©e en dĂ©calage avec la situation prĂ©sente (Charles « attentif comme
au sermon »)
âą LâinterprĂ©tation adĂ©quate par le destinataire ne peut se faire quâavec une priseen compte du contexte dâĂ©nonciation
âą Lâironie exprime lâattitude du locuteur, le plus souvent une attitude critiqueâą Permet dâattĂ©nuer ou dâaccentuer la critiqueâą Permet lâhumour, dire lâinverse de ce qui est attendu est surprenant et incongruâą Permet les messages entre initiĂ©s : ceux qui saisissent lâironie se reconnaissent
mutuellement, ce qui renforce la cohésion sociale⹠Permet à un locuteur de signifier quelque chose sans le dire directement (discours
ambigu), laissant Ă ses interlocuteurs la responsabilitĂ© de lâinterprĂ©tationâą TrĂšs utile en politique : un locuteur ayant produit un Ă©noncĂ© transgressif de maniĂšre
ironique pourra arguer que son discours était à prendre au premier degré⹠Un locuteur ayant produit un discours explicitement raciste ou sexiste, pourra prétendre
quâil ironisait
4. Lâironie flaubertienneProcĂ©dĂ©s stylistiques chez Flaubertâą Ironie omniprĂ©sente
âą Figures de styleâą Antiphrase : « Hivert venait le plaisanter. Il lâengageait [lâaveugle] Ă
prendre une baraque à la foire Saint-Romain, ou bien lui demandait, enriant, comment se portait sa bonne amie. » (TroisiÚme partie, chapitre V)
⹠Hyperbole : « Approchez, vénérable Catherine-Nicaise-ElisabethLeroux ! » (II, VIII, Comices agricoles)
⹠Litote : « C'est comme dans la Bible ; il y a..., savez-vous..., plus d'undétail... piquant, des choses... vraiment... gaillardes ! » (II, XIV, Discussionentre Homais et Bournisien)
⹠Guillemets, italiques, discours (in)direct libre à mise à distance,parole rapportée
âą Points de suspension Ă indice dâun commentaire non prĂ©cisĂ©
âą Discordance entre ce qui est dit et le contexte
âą Discordance entre la voix du personnage et celle du narrateur
Buts de lâironie chez Flaubertâą Lâironie permet la critique
âą De la mĂ©diocritĂ©, de lâesprit romanesque, du matĂ©rialisme bourgeois, dudonjuanisme, etc.
âą Lâironie renforce le pathĂ©tique et consiste en une premiĂšre littĂ©raire⹠« Ce sera, je crois, la premiĂšre fois quâon verra un livre qui se moque de
sa jeune premiĂšre et de son jeune premier. Lâironie nâenlĂšve rienau pathĂ©tique. » (Lettre Ă Louis Collet, 1852)
âą Lâironie permet dâaffronter les difficultĂ©s de la vie⹠« Lâironie pourtant me semble dominer la vie. â DâoĂč vient que, quand je
pleurais, jâai Ă©tĂ© souvent me regarder dans la glace pour me voir ? âCette disposition Ă planer sur soi-mĂȘme est peut-ĂȘtre la source de toutevertu â Elle vous enlĂšve Ă la personnalitĂ©, loin de vous y retenir. »
(Lettre Ă Louis Collet, 1852)
⹠« Quand est-ce quâon Ă©crira les faits au point de vue dâune blaguesupĂ©rieure, câest-a-dire comme le bon Dieu les voit, dâen haut ? »
(Lettre Ă Louis Collet, 1852)
4. Lâironie flaubertienneExemples dâironie1. « Mais ce nâĂ©tait pas tout que dâavoir Ă©levĂ© son fils, de lui avoir fait
apprendre la mĂ©decine et dĂ©couvert Tostes pour lâexercer : il luifallait une femme. Elle [la mĂšre de Charles] lui en trouva une : laveuve dâun huissier de Dieppe, qui avait quarante-cinq ans et douze-cents livres de rente. » (PremiĂšre partie, Chapitre I)
2. « GrĂące Ă ces travaux prĂ©paratoires, il [Charles] Ă©chouacomplĂštement Ă son examen dâofficier de santĂ©. On lâattendait le soirmĂȘme Ă la maison pour fĂȘter son succĂšs ! » (PremiĂšre partie, Chapitre I)
3. « Il se portait bien, il avait bonne mine ; sa rĂ©putation Ă©tait Ă©tablie toutĂ fait. Les campagnards le chĂ©rissaient parce quâil nâĂ©tait pas fier. Ilcaressait les enfants, nâentrait jamais au cabaret, et, dâailleurs,inspirait de la confiance par sa moralitĂ©. Il rĂ©ussissaitparticuliĂšrement dans les catarrhes et maladies de poitrine.Craignant beaucoup de tuer son monde, Charles, en effet,nâordonnait guĂšre que des potions calmantes, de temps Ă autre delâĂ©mĂ©tique, un bain de pieds ou des sangsues. Ce nâest pas que lachirurgie lui fĂźt peur ; il vous saignait les gens largement, comme deschevaux, et il avait pour lâextraction des dents une poigne dâenfer. »d (PremiĂšre partie, Chapitre IX)
Morale ambiguĂ« de Madame Bovaryâą ImpersonnalitĂ© du narrateur qui nâintervient pas pour porter un jugement
explicite sur ses personnages
⹠Dieu créateur qui laisse des créatures se disqualifier sous nos yeux
âą Satire constant des illusions, de la vanitĂ© et de la bĂȘtise des personnages
âą Critique non parce quâil juge, mais parce quâil ne juge pas, se contente de les montrer et de les faire parler
âą LittĂ©rature plus dans le « dit », mais dans le « dire »⹠Amour pitoyable, exploit manquĂ©s, Ă©vasion seulement rĂȘvĂ©es, mort dĂ©risoire Ă
roman sans romanesqueâą HĂ©ros idĂ©alisĂ© qui accomplit des exploits Ă femme que lâidĂ©alisation des lectures
conduit Ă lâĂ©chec⹠« Ce qui me semble beau, ce que je voudrais faire, câest un livre sur rien, un livre
sans attache extĂ©rieure, qui se tiendrait de lui-mĂȘme par la force interne de son style, comme la terre sans ĂȘtre soutenue se tient en lâair, un livre qui nâaurait presque pas de sujet ou du moins oĂč le sujet serait presque invisible, si cela se peut. Les Ćuvres les plus belles sont celles oĂč il y a le moins de matiĂšre. [âŠ] Câest pour cela quâil nây a ni beaux ni vilains sujets et quâon pourrait presque Ă©tablir comme axiome, en se plaçant au point de vue de lâArt pur, quâil nây en a aucun, le style Ă©tant Ă lui seul une maniĂšre absolue de voir les choses. »(Ă Louise Colet, 16 janvier 1852)
4. Lâironie flaubertienneExemples dâironie : Le pied-botLâarticle de journal Ă paraitre prĂ©sente Charles comme un hĂ©ros digne des plus grands dithyrambes (ironie situationnelle) Ă il y a ainsi un Ă©cart entre le portrait du mĂ©decin par Homais et les consĂ©quences de sa pratique mĂ©dicale, consĂ©quences annoncĂ©es plus tard par le narrateur et non non encore connues par les protagonistes de lâopĂ©ration (comique de situation)
⹠« M. Bovary, un de nos praticiens les plus distinguĂ©s » (l. 18 et 24-25) Ă superlatif apposĂ© rĂ©pĂ©tĂ© deux fois Ă pluriel prĂ©tentieux, pas dâautres mĂ©decins Ă Yonville
⹠« Honneur donc aux savants gĂ©nĂ©reux ! honneur Ă ces esprits infatigables qui consacrent leurs veilles Ă lâamĂ©lioration ou bien au soulagement de leur espĂšce ! Honneur ! trois fois honneur ! » (l. 37-39) Ă Anaphore de « honneur », rĂ©pĂ©tition du point dâexclamation, pĂ©riphrases pour dĂ©signer Charles : « savant gĂ©nĂ©reux », « esprit infatigable », ton hyperbolique, pluriel prĂ©tentieux
⹠« les deux savants jugĂšrent Ă propos de rĂ©tablir le membre dans lâappareil, et en lây serrant davantage, pour accĂ©lĂ©rer les choses. » (l. 59-61) Ă ironie verbale du narrateur dans sa pĂ©riphrase pour dĂ©signer Homais et Charles, ironie situationnelle, ils croient amĂ©liorer la situation, mais leurs gestes empressĂ©s par la panique aggrave la situation dâHippolyte
Lâarticle de journal Ă paraitre prĂ©sente la mĂ©decine comme lâaboutissement de la science qui va assurer Ă lâhumanitĂ© sa survie (ironie situationnelle) Ă il y a ainsi un Ă©cart entre la haute considĂ©ration de la mĂ©decine par Homais et ses rĂ©sultats mĂ©diocres dĂ©crits par le narrateur
⹠« Nâest-ce pas le cas de sâĂ©crier que les aveugles verront, les sourds entendront et les boiteux marcheront ! Mais ce que le fanatisme autrefois promettait Ă ses Ă©lus, la science maintenant lâaccomplit pour tous les hommes ! » (l. 39-43) Ă mĂ©taphore christique (Charles, le nouveau messie), avĂšnement de la mĂ©decine comme successeure de la religion
⹠« Comme par enchantement » (l. 29-30) Ă comparaison Ă un acte magique, dâailleurs pas compris par les auteurs mĂȘmes de cet acte
⹠« Tout porte Ă croire que la convalescence sera courte ; et qui sait mĂȘme si, Ă la prochaine fĂȘte villageoise, nous ne verrons pas notre brave Hippolyte figurer dans des danses bachiques, au milieu dâun chĆur de joyeux drilles, et ainsi prouver Ă tous les yeux, par sa verve et ses entrechats, sa complĂšte guĂ©rison ? » (l. 33-34) Ă fanatisme scientifique Ă la hauteur du fanatisme religieux, la prĂ©tention altĂšre la conscience et lâesprit dâanalyse, hypothĂšse « si » pas scientifique, mais profession de foi
Lâarticle de journal Ă paraitre prĂ©sente lâopĂ©ration comme un acte de philanthropie (ironie situationnelle) Ă il y a ainsi un Ă©cart entre la perception par les mĂ©decins et les propos du narrateur qui dĂ©crit les conditions de vie dâHippolyte
⹠« Notre petite citĂ© dâYonville sâest vue le thĂ©Ăątre dâune expĂ©rience chirurgicale qui est en mĂȘme temps un acte de haute philanthropie. » (l. 16-17)
⹠« Hippolyte dĂ©jĂ sâĂ©tait plaint dâen souffrir ; on nây avait pris garde ; il fallut reconnaitre quâil nâavait pas eu tort complĂštement ; et on le laissa libre quelques heures. » (l. 57) Ă litote, antiphrase « il nâavait pas eu tort complĂštement »
⹠« â Quâa donc notre intĂ©ressant strĂ©phopode ? » (l. 50) Ă Hippolyte est dĂ©shumanisĂ©, il est rĂ©duit par mĂ©tonymie Ă sa dĂ©formation et nâest plus quâun cas Ă Ă©tudier
⹠« Mais le percepteur, qui tous les jours y dinait, se plaignit avec amertume dâun tel voisinage. Alors on transporta Hippolyte dans la salle de billard. » (l. 67-68) Ă le confort dâun mourant est moins important que lâappĂ©tit dâun vivant
Situation dâHippolyte dĂ©crite par le narrateur omniscient
⹠« Ce qui nâempĂȘcha pas que, cinq jours aprĂšs, la mĂšre Lefrançois nâarrivĂąt tout effarĂ©e en sâĂ©criant :â Au secours ! il se meurt !⊠Jâen perds la tĂȘte ! » (l.44-46) Ă ellipse de 5 jours, on passe de la guĂ©rison magique au danger de mort
⹠« Spectacle affreux » (l. 54), « bouffissure » (l. 55), « couverte dâecchymoses » (l. 56), « tumĂ©faction livide » (l. 63), « phlyctĂšnes » (l. 67), « suintait un liquide noir » (l. 64) Ă champ lexical de lâhorreur
4. Lâironie flaubertienneExemples dâironie : Le pied-botHomais adopte un ton supĂ©rieur (ironie situationnelle) Ă il y a ainsi un Ă©cart entre sa prĂ©tention de membre du corps mĂ©dical et les rĂ©sultats auxquels il parvient
⹠« Je nâai pas mis le terme scientifique, parce que, vous savez, dans un journalâŠ, tout le monde peut-ĂȘtre ne comprendrait pas ; il faut que les masses⊠» (l. 21-23) Ă ton condescendant, vocabulaire pĂ©joratif « tout le monde », « les masses »
⹠« â Quâa donc notre intĂ©ressant strĂ©phopode ?Il se tordait, le strĂ©phopode, dans des convulsions atroces, si bien que le moteur mĂ©canique oĂč Ă©tait enfermĂ©e sa jambe frappait contre la muraille Ă la dĂ©foncer. » (l. 50-52) Ă ironie verbale par la reprise du mot strĂ©phopode par le narrateur qui souligne quâHomais et Charles nâont de connaissances mĂ©dicales que la connaissance des termes techniques
Lâarticle de journal Ă paraĂźtre dans le Fanal de Rouen est rĂ©digĂ© par Homais, qui a participĂ© Ă lâopĂ©ration dâHippolyte par Charles (ironie situationnelle) Ă il y a ainsi un Ă©cart entre la dĂ©ontologie et la pratique journalistique, le papier manque cruellement dâobjectivitĂ©
⹠« CâĂ©tait la rĂ©clame quâil destinait au Fanal de Rouen » (l. 10-11)
Emma a un regain dâintĂ©rĂȘt soudain pour Charles Ă Il y a un Ă©cart entre ses sentiments dans ce chapitre et ses sentiments le reste du roman, mais surtout un Ă©cart entre ses sentiments et les motivations qui devraient ĂȘtre sincĂšres et non intĂ©ressĂ©es
⹠« Ils parlĂšrent de leur fortune future » (l. 1-2) Ă les occurrences de pronoms pluriels pour dĂ©signer Ă la fois Charles et Emma comme couples sont rares dans le roman, la projection vers lâavenir Ă©galement, en gĂ©nĂ©ral Emma regrette son mariage et Charles se contente du prĂ©sent
⹠« elle se trouvait heureuse de se rafraichir dans un sentiment nouveau, plus sain, meilleur, enfin dâĂ©prouver quelque tendresse pour ce pauvre garçon qui la chĂ©rissait » (l. 4-6) Ă la tendresse nâest pas de lâamour, elle Ă©prouve de la tendresse et de lâempathie, « pauvre garçon » est surement lâexpression en discours indirect libre de ses pensĂ©es
⹠« LâidĂ©e de Rodolphe, un moment, lui passa par la tĂȘte ; mais ses yeux se reportĂšrent sur Charles : elle remarqua mĂȘme avec surprise quâil nâavait point les dents vilaines. » (l. 7-24) Ă la pensĂ©e pour Rodolphe est dĂ©placĂ©e, encore une fois, Charles est dĂ©fini de maniĂšre nĂ©gative
But de lâironie
⹠Se moquer de la médiocrité de Charles, Emma, Homais, et du positivisme
5.1. LâincipitUn incipit progressifâą Dramatisation immĂ©diate
âą commence par le premier jour de Charlesdans sa nouvelle Ă©cole
âą Saturation informativeâą commence par lâenfance, prĂ©sentation trĂšs
détaillée de la casquette, etc.⹠Présente ensuite la vie des parents, etc.
âą â Incipit traditionnel (statique) comme chezBalzac
Fonction 1 : CrĂ©ation dâun mondefictifâą Cadre spatiotemporel : province au
XIXe siĂšcle (plus ou moins contemporain deGustave Flaubert)âą Monarchie de Juillet (on lâapprend plus tard)
âą Portrait physique et psychique dâun CharlesBovary qui a tout dâun antihĂ©ros
Fonction 2 : Pacte de lecture⹠Roman réaliste
âą Recherches : technolecte de la chapellerieâą Absence de personnages dâexceptionâą Contexte provincial et bourgeois
âą Sous-titre : « Madame Bovary : MĆurs deprovince »
Fonction 3 : Accrocher le lecteur⹠Incipit déceptif, suscite du suspense
âą On ne commence pas par prĂ©senter ce que letitre semble indiquer comme le personnageprincipal : Madame Bovary Ă 1. Pourquoinâapparait-elle pas dĂšs lâincipit ? 2. Qui est-elle ?
1. Le personnage prĂ©sentĂ© dâabord comme le« nouveau » (l. 1, 9, 26, 47, 52, 65, 70 et74), puis est nommĂ© : « Charbovari » (l. 53),mais câest seulement Ă la ligne 60 que lâoncomprendra sa rĂ©elle identitĂ© : « CharlesBovary » (l. 60)âą Le nom « Bovary » (onomastique) Ă©voque les
bovidĂ©s, connotation (lenteur, bĂȘtise,conformisme, grossiĂšretĂ©, rudesse,lourdeur physique et psychologique)
2. On pense dâabord que câest sa mĂšre(Madame Bovary 1), puis sa femme(Madame Bovary 2), mais ça sera en rĂ©alitĂ©seulement Madame Bovary 3, sa secondefemme (effet de retardement)
5. Analyses
5.1. LâincipitUn narrateur ambiguâą Narrateur dâabord en focalisation interne (un
des Ă©coliers ou la masse des Ă©coliers)âą Pas dâaccĂšs aux pensĂ©es de Charles, que
des suppositions : « dâune quinzainedâannĂ©es environ » (l. 10), « devait le gĂȘner »(l. 13), « soit quâil nâeĂ»t pas remarquĂ© cettemanĆuvre ou quâil nâeĂ»t osĂ© sây soumettre »(l. 25-26)
âą TroisiĂšme personne du singulier (pronomindĂ©fini) : « on lâapercevait Ă peine » (l. 17) Ă point de vue dâun ou de plusieurs Ă©colier(s)
âą PremiĂšre personne du pluriel (narrateur + lesautres Ă©lĂšves + le lecteur) : « Nous Ă©tions Ă lâĂ©tude » (l. 1) Ă connivence avec le lecteur,isole encore plus Charles dont le lecteur esttĂ©moin de la maladresse, et acteur de lamoquerie (ambiguitĂ©) Charles exclut du«nous»
⹠Narrateur ensuite en focalisation omnisciente⹠Pronom impersonnel : « il fallait » (l. 22), « Il y
eut un rire éclatant des écoliers » (l. 43), « Cefut un vacarme » (l. 54)
âą AccĂšs aux pensĂ©es de Charles : « il ne savaitsâil fallait garder sa casquette Ă la main, lalaisser par terre ou la mettre sur sa tĂȘte »(l. 44-45), « Il se mit en mouvement, mais,avant de partir, hĂ©sita » (l. 62-63)
âą ConnaĂźt le passĂ© (analepse) et le futur(prolepse) de Charles : « GrĂące, sans doute, Ă cette bonne volontĂ© dont il fit preuve, il dutde ne pas descendre dans la classeinfĂ©rieure ; car, sâil savait passablement sesrĂšgles, il nâavait guĂšre dâĂ©lĂ©gance dans lestournures. CâĂ©tait le curĂ© de son village quilui avait commencĂ© le latin, ses parents, parĂ©conomie, ne lâayant envoyĂ© au collĂšge quele plus tard possible. » (l. 82 Ă 86)
⹠Narration pas neutre, distance ironique⹠Narration réaliste, mais excÚs de détail
(fonction de rĂ©gie) qui mettent en Ă©vidence legrotesque et le ridiculeâą Accumulation met en Ă©vidence lâampleur
des efforts Ă faire pour comprendre CharlesBovary : « parvenu Ă saisir le nom de CharlesBovary, se lâĂ©tant fait dicter, Ă©peler et relire »(l. 60-61)
⹠Met en évidence la disproportion entre letravail de Charles et ses résultatsmédiocres : « Grùce, sans doute, à cettebonne volonté dont il fit preuve, il dut de nepas descendre dans la classe inférieure »(l. 83-84)
⹠Sous couvert de réalisme, le narrateurchoisit de souligner par la juxtaposition de lalaideur du couvre-chef et de nouveauté quisignale une acquisition récente, tout lemauvais gout de Charles « Elle était neuve ;la visiÚre brillait. » (l. 35-36)
5. Analyses
5.1. LâincipitChronologie : Annonce des thĂšmes (effet proleptique)LâomniprĂ©sence de la cruautĂ©
âą ĂlĂšves sans pitié⹠« Toute la classe se mit Ă rire » (l. 38)⹠« Il y eut un rire Ă©clatant » (l. 43)⹠« huĂ©es de la classe » (l. 49-50)⹠« Ce fut un vacarme qui sâĂ©lança dâun bond, monta en crescendo, avec des Ă©clats
de voix aigus (on hurlait, on aboyait, on trépignait, on répétait : Charbovari ! Charbovari !) » (l. 54-56)
⹠« quelque rire Ă©touffĂ©. » (l. 58) ⹠«quelque boulette de papier lancĂ©e dâun bec de plume qui vĂźnt sâĂ©clabousser sur sa
figure » (l. 76-77) ⹠« Un voisin la fit tomber dâun coup de coude » (l. 39)
⹠Professeur médiocre et autoritaire qui encourage à se moquer de Charles
RythmeScĂšne entre coupĂ©e dâellipses
Premier jour dâĂ©cole
ĂvĂšnements symptomatiques du caractĂšre de Charles
Double métonymie⹠Casquette
âą Premier jour dâĂ©cole
5. Analyses
5.1. LâincipitThĂ©orie : Le PortraitDĂ©finition
âą Le portrait est une description dâun personnage
But
âą Faire comprendre au lecteur ce qui fait lâunicitĂ© du personnage
Moyens
âą Le portrait aborde gĂ©nĂ©ralement diffĂ©rents aspects (vĂȘtements, corpulence,regard, psychologie, sociologie, etc.)âŠ
⹠⊠prĂ©sentĂ©s selon un ordre logique (de haut en bas, vĂȘtements puisphysionomie, physique puis psychologie ou morale, etc.)âŠ
⹠⊠articulĂ©s Ă travers des connecteurs spatiaux (Ă lâavant, au-dessous, Ă lâintĂ©rieur, etc.)
âą Les temps dominants sont le prĂ©sent ou lâimparfait de lâindicatif
âą Le portrait comporte beaucoup dâadverbes, de verbes dâĂ©tat et de groupesnominaux expansĂ©s par de nombreuses Ă©pithĂštes ou complĂ©ments du nom
Typologie
⹠Le portrait est statique (description pure, donnée par le narrateur, constitue unepause dans le récit)
âą ou dynamique (alternance description et action)
Remarque
âą Le portrait peut ĂȘtre explicite (formulĂ© par le narrateur omniscient ou unpersonnage bien renseignĂ©)âŠ
⹠⊠ou implicite (si le lecteur est amené à faire des déductions)
âą La caricature est un portrait qui dĂ©forme le rĂ©el en exagĂ©rant les dĂ©fautsâą Elle permet une dĂ©nonciation par le rire des travers et des comportements dâune
sociĂ©tĂ© ou dâune personneâą Le portrait prend une visĂ©e satirique et argumentative quand il est Ă chargeâą La caricature recourt aux diffĂ©rents types de comique, Ă des comparaisons
péjoratives ou des hyperboles
âą Un portrait comique nâest une caricature que sâil a pour but de dĂ©noncer lestraits physique ou psychique dâun personnage
5. Analyses
5.1. Lâincipit1. Portrait « comique » de Charles1.1. Comique de mot
âą Incapable dâarticuler correctement les quelques pauvres syllabes qui sortent desa bouche : « Le nouveau articula, dâune voix bredouillante, un nominintelligible. » (l. 47), « Le mĂȘme bredouillement de syllabes » (l. 49)
⹠Incapable de prononcer son propre prénom : « Charbovari » (l. 53)
⹠Utilise des apocopes familiÚres : « Ma cas⊠» (l. 65)
âą Ne parle quâĂ travers des phrases nominales : « Charbovari » (l. 53), « Ma cas⊠»(l. 65)
1.2. Comique de geste
⹠Description clownesque (provoque pas le rire, mais la moquerie) :⹠Déguisé, ridicule : « habillé en bourgeois » (l. 1-2), mais « un gars de la campagne »
(l. 10)âą Habits trop petits : « gĂȘner aux entournures » (l. 13-14)âą Connotation pĂ©jorative : « un gars de la campagne » (l. 10), « comme un chantre de
village » (l. 11-12), « des poignets rouges habituĂ©s Ă ĂȘtre nus » (l. 14-15), « un pantalonjaunĂątre » (l. 15), « Il Ă©tait chaussĂ© de souliers forts, mal cirĂ©s, garnis de clous » (l. 16)
⹠Gestes ridicules :⹠« Il se leva ; sa casquette tomba. Toute la classe se mit à rire. / Il se baissa pour la
reprendre. Un voisin la fit tomber dâun coup de coude, il la ramassa encore unefois. » (l. 38-40)
5. Analyses
5. Analyses5.1. Lâincipit1. Portrait « comique » de Charles1.2. Comique de geste (suite)
⹠La casquette comme métonymie de Charles Bovary⹠Longueur et précision de la description disproportionnée pour un objet en
apparence sans intĂ©rĂȘtâą MĂ©tonymie : Portrait de Charles Bovary Ă travers quelque chose qui lui appartient
âą ĂlĂ©ments qui ne vont pas ensemble, dĂ©saccordĂ©s, maladroits : « composite » (l. 27)âą Ressemble Ă tout, mâest nâest rien « Ă©lĂ©ments du bonnet Ă poil, du chapska , du chapeau
rond, de la casquette de loutre et du bonnet de coton » (l. 27-29)⹠Multicolore : « rouge » (l. 32), « or » (l. 35), comme ses habits « vert » (l. 13), « noirs » (l. 13),
« bleus » (l. 15) et « jaunùtre » (l. 15), mal assortis à ses poignets « rouges » (l. 14)
⹠Multiples matiÚres : « coton » (l.29), « velours » (l. 32), « poils de lapin » (l. 32)⹠Multiple forme : « rond » (l. 28), « ovoïde » (l. 30), « boudins circulaires » (l. 31), « bande »
(l. 32), « losanges » (l. 32), « polygone » (l. 33)
âą MalgrĂ© la description, impossible de se le reprĂ©senter, nĂ©anmoins grotesque : « lalaideur muette a des profondeurs dâexpression comme le visage dâun imbĂ©cile »(l. 29-30), « une de ces pauvres choses » (l. 29)
⹠Mauvais gout de Charles ou de ses parents : « neuve » (l. 35) elle a donc été achetéeexprÚs, pour la rentrée scolaire de Charles
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5. Analyses5.1. Lâincipit1. Portrait « comique » de Charles1.3. Comique de caractĂšre :
âą TimiditĂ© :⹠« RestĂ© dans lâangle, derriĂšre la porte, si bien quâon
lâapercevait Ă peine » (l. 9), « fort embarrassĂ© » (l. 12), « gĂȘner aux entournures » (l. 13-14), « nâosant mĂȘme croiser les cuisses » (l . 18), « dĂ©contenan-ça » (l. 43), « dâune voix bredouillante » (l. 47), « bredouillement » (l. 49), parler devant la classe lui demande une « rĂ©solution extrĂȘme » (l. 52)
âą BĂȘtise :âą En retard sur les autres : « Si son travail et sa
conduite sont mĂ©ritoires, il passera dans les grands, oĂč lâappelle son Ăąge. » (l. 7-8)
âą Seulement une apparence dâintelligence : « lâair raisonnable » (l. 12), « le visage dâun imbĂ©cile » (l. 30)
⹠« sâil savait passablement ses rĂšgles, il nâavait guĂšre dâĂ©lĂ©gance dans les tournures » (l. 83-84)
âą PrĂ©sentĂ© comme le « nouveau » (l. 1, 9, 26, 47, 52, 65, 70 et 74), en italique pour insister sur ce trait, câest sa seule « qualitĂ© »
1.4. Comique de situation :
⹠Décalé⹠Connaßt pas les coutumes : « le nouveau tenait
encore sa casquette sur ses deux genoux » (l. 26-27) aprĂšs la priĂšre, alors que « le genre » (l. 24) voulait quâon la jetĂąt
⹠Il est « attentif comme au sermon » (l. 17-18) alors que les autres « dormaient » (l. 2)
âą On lui demande de reformuler parce quâon nâa pas compris et il rĂ©pĂšte la mĂȘme chose : « RĂ©pĂ©tez ! / Le mĂȘme bredouillement de syllabes se fit entendre « (l. 48-49)
âą Puni non par sa mauvaise attitude, mais par sa passivitĂ© : « Ă deux heures, quand la cloche sonna, le maitre dâĂ©tudes fut obligĂ© de lâavertir, pour quâil se mĂźt avec nous dans les rangs » (l. 19-20)
1.5 Conclusion intermédiaire
âą Tous les types de comiques
⹠Inadapté physiquement et socialement à source de moquerie
âą Premier jour dâĂ©cole Ă lâimage de toute sa vie (mĂ©tonymie) et en dit long sur le pathĂ©tique de Charles, sans envergures, passif, et grotesque
5. Analyses5.1. Lâincipit1. Portrait « comique » de Charles1.6 Un portrait finalement pathĂ©tique : fait rire malgrĂ© lui
âą Se donne de la peine en vain :âą casquette « neuve » (l. 35) pour son premier jour dâĂ©cole⹠« attentif comme au sermon » (l. 17-18) Ă vocabulaire de la dĂ©votion⹠« Plus haut ! cria le maitre, plus haut ! / Le nouveau, prenant alors une rĂ©solution
extrĂȘme, ouvrit une bouche dĂ©mesurĂ©e et lança Ă pleins poumons» (l. 51 Ă 53)
⹠« resta pendant deux heures dans une tenue exemplaire» (l. 74-75)⹠« mit en ordre ses petites affaires, régla soigneusement son papier » (l. 79-80)⹠« travaillait en conscience, cherchant tous les mots dans le dictionnaire et se
donnant beaucoup de mal » (l. 80 à 82)
âą Champ lexical de la pauvretĂ© au sens propre (pauvretĂ© matĂ©rielle) et figurĂ© (inspire la pitiĂ©)âą Ăducation nĂ©gligĂ©e : « CâĂ©tait le curĂ© de son village qui lui avait commencĂ© le latin,
ses parents, par Ă©conomie, ne lâayant envoyĂ© au collĂšge que le plus tard possible. » (l. 84 Ă 86)
⹠« une de ces pauvres choses » (l. 29), « pauvre garçon » (l. 44), « pauvre diable » (l. 61)
⹠Apeuré :⹠« des regards inquiets » (l. 65-66)⹠« les yeux baissés » (l. 77-78)
5. Analyses5.1. Lâincipit1. Portrait « comique » de Charles1.7 Charles le antihĂ©ros
âą DĂ©finitionâą Personnage central dâune Ćuvre de fiction qui ne prĂ©sente pas certaines des
caractéristiques du héros conventionnel, voire dans certains cas aucune
âą Typologie : il existe quatre types de antihĂ©rosâą Personnage « sans qualitĂ©s », ĂȘtre ordinaire vivant une vie ordinaire dans un cadre
ordinaireâą Charles Bovary, Homer Simpson, Charlie Chaplin dans Les Temps modernes
⹠Héros négatif, porteur de valeurs anti-héroïques et en général antisociales, mais sans qualités « héroïques »⹠Dexter dans la série éponyme, médecin légiste tueur en série de criminels
âą Walter White dans Breaking Bad, professeur de chimie en phase terminal du cancer qui fabrique de la drogue pour assurer lâavenir financier de sa famille
âą Jack Sparrow
âą HĂ©ros dĂ©cevant, porteur de qualitĂ©s hĂ©roĂŻques mais nâen faisant pas usage ou les utilisant mal ou Ă mauvais escient, ou qui tend Ă perdre ces qualitĂ©s, ou enfin qui se trouve dans un cadre oĂč ces qualitĂ©s ne sont plus apprĂ©ciĂ©es ou admisesâą Victor Frankenstein, BenoĂźt Brisefer, RenĂ©, Edouard aux mains dâargent
⹠Héros « décalé », personnage ordinaire, sans qualités, qui par les circonstances se trouve plongé dans une situation extraordinaire⹠Meursault, The Dude dans The Big Lebovski, le Joker de Todd Phillips, Alice au Pays des
Merveilles
âą Charles Bovaryâą Charles ne possĂšde ni la gloire, ni la force, ni la rage de vaincre, ni le courage, ni la
sagesse, ni lâintelligence, ni la grandeur, ni la gĂ©nĂ©rositĂ©, ni la magnanimitĂ©, ni aucune habiletĂ© exceptionnelle dans une activitĂ© noble ; il nâaccomplit aucun exploit, mĂȘme malgrĂ© lui ; nâest pas beau ; etc.âą Aucune qualitĂ©
âą Il est aux antipodes dâun Roland, dâun Rodrigue, ou mĂȘme dâun RenĂ©âą Il nâest pour autant pas mauvais ou intĂ©ressĂ©, il est juste mĂ©diocreâą Il est ainsi le hĂ©ros de la modernitĂ©, celui du rĂ©alisme et, plus encore que RenĂ©, du
dĂ©senchantement du mondeâą Pas de verticalitĂ©, dâhĂ©roĂŻsme
⹠Horizontalité du matérialisme
5. Analyses5.2. LâĂ©ducation dâEmma1. Portrait psychologique dâEmmaMadame Bovary â Emma Bovary
Femme de Charles à tragédie de son mariage
Couvent à lieu symboliqueCoupé de la réalité « sans jamais sortir » (l. 15), « femmes au teint blanc » (l. 16), repli sur soi et sur son intériorité
FrĂ©quente uniquement des femmes qui ont fait le vĆux de chastetĂ©, « vieille fille » (l. 43) Ă inexpĂ©rimentĂ©es en matiĂšre dâamour, reprĂ©sentation de lâhomme est complĂštement fantasmĂ©e, idĂ©alisĂ©eFrĂ©quente de femmes qui ne savent rien de lâextĂ©rieurĂ Favorise le « rĂȘve» (l. 1), et la « fantasmagorie» (l. 77)MĂ©taphore et la cause du repli sur son monde intĂ©rieurĂ Critique de cette institution religieuse qui encourage la dĂ©connexion avec le rĂ©elLieu dâĂ©ducation
13 ans Ă ignorant, rĂȘveur, jamais Ă©tĂ© confrontĂ© Ă la duretĂ© de la vie, naĂŻf, inluençableReligieux
â prend pas du tout au sĂ©rieuâ rĂ©alitĂ©, = belle histoires « aime bien » (l. 20) les histoires Ă jugement esthĂ©tiqueJĂ©sus Ă personnage de fictionaucune intĂ©rioritĂ©
EducationTriche par rapport aux rĂšgles
Critique littéraire, mise en abyme
Analepse
1. RĂȘverie dâEmma
obnubilée par ses lectures
attirée par le rocambolesque
Lectures
pervertissent son esprit
critique du romantisme
Critique Religion
X
2. Narrateur hétérodiégétique (objectivité, réalisme)
3. Contraste Charles-Emma
4. Ironie du sort (espérance, réalité)
5. Ironie du narrateur
5. Analyses5.2. LâĂ©ducation dâEmma1. Portrait psychologique dâEmma
Historique« choses historiques » (l. 61)
TrĂšs trĂšs vagues connaissance perdues « immensitĂ© tĂ©nĂ©breuse » (l. )mĂ©lange Saint-BarthĂ©lĂ©my et Louis XIconnaĂźt ce quâil y a sur les assiettes
EducationAmuse beaucoup
Triche par rapport aux rĂšglesĂducation nĂ©gligĂ©e de jeune bourgeoise qui de toute façon ne va jamais travailler
1. Analepse1. Déjà mariée avec Charles et narrateur, via sa fonction de régie décide de revenir
sur lâadolescence dâEmma2. Souligne lâabyme qui sĂ©pare Charles et Emma et annonce la tragĂ©die
3. Tout est déjà en place
1. RĂȘverie dâEmma
obnubilée par ses lectures
attirée par le rocambolesque
Lectures
Type de lecture (roman Ă lâeau de rose, lectures romantiques, lectures historiques)Mise en abyme critique de la littĂ©rature (Flaubert, via Emma et lâironie du narrateur, dĂ©finit ce quâest la mauvaise littĂ©rature)NĂ©gation restrictive «ce nâĂ©taient que (l. 53) «il nâĂ©tait question qu» (l.73-74) Ă tout est similaire et tout est mĂ©diocreAccumulation de mĂ©diocritĂ©RenforcĂ© par des hyperboles âvertueux comme on ne lâest pas» formule creuse mon dĂ©montrer le carectĂšre inaccessible des personnages, pour souligner la dimension stĂ©rĂ©otypĂ©e des lectursePĂ©jorati «graisser de la poussiĂšre»
« Amours, amants, amantes » (l. 53-54) Ă amour vĂ©ritable en principe au singulier (proleptique)« vertueux comme on ne lâest pas, toujours bien mis » (l. 58) Ă juxtaposition de lâapparence et de la vertu, mĂȘme pied dâĂ©galitĂ©
Pervertissent son esprit
critique du romantisme
2. Narrateur hétérodiégétique (objectivité, réalisme)
4. Ironie du sort (espérance, réalité)
5. Ironie du narrateur
6. TragĂ©die (meurt de ce quâelle lit, mĂ©canique, aveugle, chĆur de la tragĂ©die antique)
5. Analyses5.2. LâĂ©ducation dâEmma1. Portrait psychologique dâEmma1. Structure du roman : portrait Charles, puis Emma Ă incompatibilitĂ© (pas dâintĂ©rĂȘt commun, Charles est pragmatique et mĂ©diocre et Emma est rĂȘveuse), tragĂ©die Ă venir
2. Emma ressent de lâennui, dĂ©jĂ au couvent, caractĂ©ristique de sa personnalitĂ©, ennui vient de son manque dâexpĂ©rience et de ses lectures qui lui ont offert une vision dĂ©formĂ©e et idĂ©alisĂ©e de la rĂ©alitĂ©, aime le trouble, le rocambolesque, et tout ce qui chamboule le quotidien
3. Hermétique à la morale et à la foi, par contre elle aime bien les images et les histoires et les grands sentiments, croit pas à la réalité de la foi, mais considÚre la religion comme un conte fantastique, punitions = jeu
4.
5. Analyses5.3. Les comices agricoles1. Emma nâest quâun objet pour Rodolphe
1. Valeur marchande séduction à marchandage1. « soixante-et-dix francs » (l. 27)
2. « soixante francs » (l. 40)3. « vingt-cinq francs » (l. 59)4. « mĂ©daille dâor » (l. 31)5. « mĂ©daille dâargent » (l. 58)6. La valeur des prix est dĂ©crescendo, comme la valeur morale dâEmma Ă
mesure quâelle est sĂ©duite (chute morale)
2. SĂ©duction impersonnelle1. Jamais nommĂ©e2. Formules creuses3. ClichĂ©s romantiques4. Hyperboles5. Ă nâimporte quelle femme
3. SĂ©duction par lâhomme de la femme1. Emma est une proie, une « tourterelle captive » (l. 43)
4. Critique du romantisme1. CĆur de la femme est Ă conquĂ©rir par le preux chevalier2. Attitude dâEmma crĂ©e la prĂ©dation
1. Rodolphe est un instrument de libĂ©ration2. Rodolphe est aussi un objet3. Emma lâaime par dĂ©faut (elle nâest pas heureuse dans son
couple)
âą Ironie verbale : « M. Derozerays se leva, commençant un autre dis- cours. Le sien, peut-ĂȘtre, ne fut point aussi fleuri» l. 1-2(comique de mots)
1. RĂ©alisme de la scĂšne1. Narra&on polyphonique
1. Solistes (Rodolphe-Emma)2. Orchestre (orateurs et en creux la foule qui Ă©coute)
2. Focalisa&on externe3. ScÚne (discours directs)4. TrÚs cinématographique5. Portrait de la paysanne (on lit sur son corps toute
la souffrance de son existence, elle en porte les s&gmates)
5. Analyses5.3. Les comices agricoles
1. Fourberie/duplicité de Rodolphe1. Phrases à double-sens (proleptiques)
1. « Mais vous mâoublierez. Jâaurai passĂ© comme une ombre » (l. 35)
1. sens propre : amour impossible, se victimise, idée romatique de la romance impossible
2. sens second, implicite pour le lecteur (comique de situation) : annonce quâil va lâabandonner
2. Narrateur compare Emma Ă une « tourterelle captive » (l. 43), dĂ©calage entre le discours amoureux de Rodolphe et les propos du narrateur qui laisse apparaĂźtre de lâironie Ă une femme quâon aime nâest ni un objet quâon possĂšde, ni quâon rend prisonnier
3. ProcĂ©dĂ©s de sĂ©ductions1. Hyperboles « toute ma vie» (l. 30), « «jamais je nâai trouvé» (l. 32)
2. Formules creuse : « charme complet» (l. 32)
3. Métaphores romantiques: amour impossible/interdit, allusions au Vallon de Lamartine «deux fleuves» (l.19)
4. Exclamation naĂŻve et romantique
4. Emma dĂ©personnalisĂ©e1. Son prĂ©nom nâest jamais prononcĂ©
2. SĂ©duction nâa rien de personnel, Rodolphe aurait pu dire la mĂȘme chose Ă nâimporte quelle femme
5. Rodolphe nâaime pas Emma et ne sâintĂ©resse pas Ă elle, il veut juste la « connaĂźtre » au sens biblique, il ne sâintĂ©resse quâĂ ses charmes
2. Ironie situationnelle1. Déclaration burlesque (mélange de registre élevé et bas)
1. DĂ©claration dâamour (Ă©levĂ©)
2. Comices agricoles (bas)
1. Vocabulaire paysan : «bĂȘtes» (l. 10), « fumiers » (l. 29) Ă double sens 1. mĂ©lange dexcrĂ©ment dâanimaux de ferme et de paille 2. insulte (Rodolphe ?) «race porcine» (l. 40) Ă double sens 1. cochon 2. insulte Ă caractĂšre sexuel
2. Nom propre des personnages: « Cullembourg » (l. 40) «Tuvache» (l. 67)
3. Pas trÚs « romantique » comme contexte pour séduire (lac, jardin, montagne, parc, etc.)
1. Comice = naturel, mais pas nature
3. Juxtaposition de plusieurs rĂ©alitĂ©1. Juxtaposition gĂ©nĂšre de lâironie
2. On ne peut pas ne pas juger1. Hommes, verbe facile, actif (Rodolphe, Conseiller, etc., autorité) / femmes silencieuses,
passives (Emma, Mme Leroux, soumises et gĂȘnĂ©es)
2. Paris, oisiveté (Rodolphe) / Province, dure réalité (autres)
3. Bourgeoisie, richesse / prolétariat, paysannerie, pauvreté
4. Pseudo-romantisme / réalité terrible
5. «il faut que ça hurle par lâensemble, quâon entende Ă la fois des beuglements de taureau, des soupirs dâamour et des phrases dâadministrateur. »
7. AnalysesComique, satire et ironie