L’inspiration de la Bible dans le manuscrit 24 1886 · publie un livre intitulé Seventh-day...
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Campus adventiste du Salève Faculté adventiste de théologie
L’inspiration de la Bible dans le
manuscrit 24 1886. Mise en miroir entre Calvin Stowe et Ellen White.
Mémoire Présenté en vue de l’obtention
du Master en théologie adventiste
par Roberto MARQUES
Directeur de recherche : Jean-Luc Rolland
Assesseur : Roland Meyer
Collonges-sous-Salève
Mai 2015
1
Remerciements
Gostaria de aproveitar esta oportunidade por agradecer algumas pessoas pelo
seu contributo na redacção deste trabalho.
Em primeiro lugar, ao meu director de tese, Jean-Luc Rolland, pelo seu
empenho e paciência. Embora tenha ainda uma longa caminhada diante de
mim, aprendi muito com o seu rigor e pensamento crítico.
Da mesma forma gostaria de agradecer as pessoas que, duma forma ou de
outra, corrigiram o meu texto. O meu muito obrigado à Marina Payet, ao Gabriel
Samperio e ao Jean-Jacques Henriot.
Agradeço também à minha família, amigos e colegas que sempre me
encorajaram. No entanto, tenho de fazer uma menção especial à minha noiva,
Catarina, pela sua paciência a ouvir os meus desabafos e cujo incentivo foi
fundamental nos momentos mais difíceis.
Por último louvo a Deus, por me ensinar a cada dia a andar humildemente com
Ele.
2
Introduction Générale
Depuis 18891, la question de l’empreinte littéraire d’Ellen White est
soulevée de manière cyclique en utilisant de façon répétée les mêmes textes –
entre autres les textes de : W.J. Conybeare et J.S. Howson2, de Calvin E.
Stowe3. C'est précisément sur la question de l’empreinte littéraire d’Ellen White
par rapport à Stowe que se trouve la problématique de notre travail. Les textes
en question sont le manuscrit 24 de 18864, intitulé Objections to the Bible,
d’Ellen White, publié dans sa totalité dans le livre Messages Choisies5, dans un
sous-chapitre portant le même titre, et le premier chapitre du livre Origin and
History of the Books of the Bible, de Stowe6.
Ces deux textes traitant de la question de l’inspiration biblique sont
utilisés comme un exemple de l’empreinte littéraire d’Ellen White. Dans un
article, William S. Peterson7 affirme qu'elle possède une «dette théologique»
par rapport aux idées de Stowe qui défendait une influence «subjective» de la
Bible8 : «Madame White, dans ce cas, s’approprie des idées et non seulement
des informations historiques9 ». En réaction à ce dernier document, un travail
non publié est rédigé en 1979 par David Neff10, qui tient la position inverse :
Ellen White ne s’était pas approprié les idées de Calvin Stowe puisque, sur
certains aspects, ils proposaient des notions différentes11. Plus récemment,
Alberto Timm12 a travaillé sur cette même question et, dans son article, il se
1 En 1889, Dudley Canright, ancien pasteur de l’église adventiste et proche du couple White, publie un livre intitulé Seventh-day Adventism Renounced dans lequel il remet en question la notion de l’inspiration d’Ellen White en s’appuyant sur l’accusation de plagiat et de l’emprunt littéraire. 2 Ces deux écrivains chrétiens ont écrit un livre sur le contexte historique et culturel dans lequel
Paul a écrit ses épitres. La question de l’emprunt littéraire se pose par rapport au livre Sketches from the life of Paul qu’Ellen White a publié en 1883. 3 Théologien américain du XIX
e siècle.
4 Désormais nous utiliserons le terme « manuscrit 24 » pour désigner ce document.
5 Ellen WHITE, Messages Choisies, vol 1, Dammarie les Lys, Vie et Santé, 2002, p. 21-24.
6 Calvin STOWE, Origin and History of the Books the Bible, Both the Canonical and Apocryphal,
Hartford, Hartford Publishing Company, 1868. 7 William PETERSON, « Ellen White's Literary Indebtedness », Spectrum 3 (1971/4), p. 73-84. 8 Selon Stowe, l’inspiration biblique était un processus par lequel le divin et l’humain ont
coopéré pour produire la Bible. Ainsi qu’il en est de Christ, la Bible est pleinement divine et pleinement humaine. Nous allons, dans la continuité de ce mémoire, présenter sa pensée plus en détail. 9 Idem., p. 78.
10 NEFF David, Ellen White's alleged Literary and Theological indebtedness to Calvin Stowe,
s.l.,s.éd.,1979. 11
Idem, p.19, 12
Alberto TIMM, « Divine Accomodation and Cultural Conditioning of the Inspired Writings »,
3
base sur la position de Neff pour défendre une inspiration dans laquelle Ellen
White « voulait tout simplement dire que Dieu ne choisit pas les mots
spécifiques utilisés dans la Bible13 ». En d’autres termes, les pensées sont
divines, mais les paroles étaient choisies par les auteurs bibliques.
Cette question reste un sujet pertinent pour aujourd'hui, en raison de ses
implications dans la discussion sur l'inspiration en général et, en particulier,
autour de l'inspiration d'Ellen White dans l'église adventiste. S’il est vrai qu’elle
utilise des sources «humaines» cela diminue-t-il l’autorité du ministère d’Ellen
White ?
L’analyse comparative entre le manuscrit 24 et le livre Origin and History
reste essentielle pour nous permettre d’approfondir cette question. Elle se
concentre sur la comparaison de ces deux ouvrages au niveau des mots et
expressions utilisés, sur ses structures et particulièrement sur les idées et
notions communiquées.
C’est aussi au niveau des concepts que nous faisons un recoupement
avec les principaux penseurs et leur approche sur ce sujet à leur époque du
protestantisme. De la même façon, nous allons comparer le manuscrit 24 avec
les notions défendues parmi les adventistes au moment de sa rédaction. Ces
deux comparaisons nous permettront de constater s’il y avait une originalité
dans les propos de Calvin Stowe et d’Ellen White ou si leur notion faisait déjà
partie de leur contexte théologique.
Les principales sources utilisées sont donc le manuscrit 24 et le livre
Origin and History, que nous avons déjà mentionné. Néanmoins, nous allons
aussi utiliser d’autres écrits publiés par Ellen White, qu’il s’agisse de livres ou
encore d’articles divers. La plupart des sources des autres auteurs adventistes
sont tirés des articles d’archives des magazines Review and Herald et Signes
of Times14. De la même façon, nous avons utilisé comme source primaire les
Journal of the Adventist Theological Society 19 (2008/1-2), p. 164. 13
Alberto TIMM, « Divine Accomodation and Cultural Conditioning of the Inspired Writings », p. 165. 14
Ces deux journaux adventistes sont l’une des principales sources de matériel adventiste publié à cette époque. Ces archives sont disponibles, au moment de la rédaction de ce mémoire, dans le site de la Conférence Générale de l’Eglise adventiste. http://documents.adventistarchives.org/default.aspx
4
ouvrages de certains auteurs du XIXe siècle. Cette démarche nous a permis de
proposer une contextualisation théologique du débat sur l’inspiration jusqu’à
l’année 1885, avant la rédaction du manuscrit 2415. Les sources secondaires
n’ont été utilisées que pour fournir des informations et des éléments utiles à la
contextualisation historique du matériel traité.
Notre mémoire est divisé en trois parties qui nous permettront de
répondre à notre problématique. La première partie examinera les positions
défendues parmi le protestantisme américain du XIXe siècle. De cette façon,
nous pourrons comprendre le contexte religieux sur l’inspiration biblique dans
lequel le manuscrit 24 et Origin and History est apparu. Cette première analyse
nous permettra également de mettre en lumière quelques tensions entre toutes
ces conceptions différentes et proposera une comparaison plus en détail des
ouvrages d’Ellen White et de Calvin Stowe. Dans la seconde partie, nous allons
étudier ce qu’Ellen White avait déjà écrit sur cette thématique avant 1885. Nous
allons également relever les notions défendues sur l’inspiration biblique à cette
époque parmi les adventistes et terminer notre réflexion sur une introduction à
l’ouvrage de Calvin Stowe. La dernière partie de notre mémoire sera consacrée
à une analyse comparative des documents d’Ellen White et de Calvin Stowe et
à réfléchir sur les implications de nos résultats.
15
Une observation du manuscrit original nous a permis de constater que la date de rédaction n’est pas 1886, comme sa désignation officielle pouvait le suggérer, mais en 1885.
6
A. Introduction
Cette première partie a pour objectif de présenter différentes approches
au sujet de l’inspiration biblique qui faisait partie du contexte religieux d’Ellen
White et de Calvin Stowe. Pour atteindre ce but, nous allons analyser deux
approches, notamment : Orthodoxe de Genève et le Séminaire de Princeton.
Nous étudierons également d’autres penseurs comme : Charles Briggs, Samuel
Coleridge et Friedrich Schleiermacher. Cette présentation nous permettra avoir
une vision synthétique du sujet traité et, dans la troisième partie, nous aidera à
positionner Ellen White et Calvin Stowe par rapport à leurs contemporains.
Cependant, et avant d’aller plus loin, il est nécessaire de noter que cette
présentation n’englobe pas tout le XIXe siècle mais s’articule jusqu’à l’année
1885, moment de la rédaction du manuscrit 24 d’Ellen White, qui est l’objet de
notre recherche. De la même façon, le choix de ces auteurs est sélectif et ne
prétend pas à être exhaustif. Cette liste est basée sur leur prépondérance pour
notre sujet. Ils sont présentés en plusieurs ouvrages historiques sur la théologie
et sur l’interprétation biblique au XIXe siècle16.
Parmi les auteurs choisis, nous sommes conscient que, pour certains
d’entre eux, l’ensemble de ces ouvrages ne seront pas traités dans notre
travail. Cette option est due au fait qu’une étude plus approfondie sur la
question sortirait du cadre de notre problématique, spécifiquement orientée sur
Ellen White et Calvin Stowe, et qu’elle est également liée aux contraintes de
l’espace disponible pour ce travail. Le choix des ouvrages est basé sur deux
raisons : en premier lieu parce que le document choisi reste représentatif de la
pensée de l’auteur17 et ainsi donc, le reste de son corpus littéraire n’ajoute pas
d’autres éléments pertinents pour notre travail. En deuxième lieu, parce que les
autres textes sortent de notre cadre temporel, c’est-à-dire entre 1800 et 1885.
16
Dans le but d’établir une liste des auteurs du XIXe siècle, nous avons pris pour référence les
ouvrages suivants : Karl BARTH, La Théologie protestante au dix-neuvième siècle. Préhistoire et histoire, trad. Lore JEANNERET, Paris/Genève, Librairie protestante/ Labor et Fides, 1969 ; Donald MCKIM (éd.), Historical Handbook of Major Biblical Interpreters, Downers Grove, Intervarsity Press, 1998 ; Frederic FARRAR, History of Interpretation. Eight Lectures Preached Before the University of Oxford in the Year MDCCCLXXXV, London, Macmillan and Co, 1886; Peter VAN BEMMELEN, Issues in Biblical Inspiration.Sanday and Warfield, Andrews University Seminar Dissertation Series 13, Berrien Springs, Andrews University Press, 1987. 17
Cette représentativité est aussi définie en employant les mêmes ouvrages de référence que nous avons utilisé pour établir la liste des auteurs de référence sur l’inspiration au XIX
e siècle.
7
Même si, comme nous l’avons déjà noté, notre objectif premier pour
cette partie n’est pas une présentation exhaustive, il est nécessaire de noter
que le débat sur l’inspiration biblique n’a pas débuté au XIXe siècle mais aux
siècles précédents avec des problématiques relatives aux concepts de
l’interprétation biblique de l’époque18. Au moment de la Réforme, les
théologiens protestants et catholiques étaient tout à fait d’accord au sujet de la
nature et de l’inspiration de la Bible : une conception verbale de la Bible où
même les mots utilisés étaient choisis par Dieu. Le rôle des auteurs humains
était considéré comme très secondaire et même accessoire dans tout le
processus19.
Nous voyons déjà, dans cette conception de l’inspiration20, une position
traditionnelle qui est restée dominante jusqu’à la deuxième moitié du XVIIᵉ
siècle21 quand un changement de paradigme s’est développé en ce qui
concerne la nature même de la Bible. Elle va commencer à être regardée non
pas comme un témoignage religieux, mais comme une représentation
historique du passé.
18
Plusieurs raisons peuvent être liées à la réflexion au sujet de l’inspiration de la Bible. Le siècle des lumières a permis l’apparition d’un nouveau regard sur l’Ancien et le Nouveau Testament. L’esprit scientifique et critique de l’époque pousse plusieurs individus à réfléchir sur l’origine, l’historicité et la nature du texte lui-même. Peter VAN BEMMELEN, Issues in Biblical Inspiration. Sanday and Warfield, Andrews University Seminar Dissertation Series 13, Berrien Springs, Andrews University Press, 1987, p. 56. 19
Richard Muller, professeur de l’histoire de la théologie distingué surtout dans l’étude de la période de la Reforme, l’affirme de façon catégorique : « Malgré l’intensité du débat sur la relation entre l’autorité biblique et ecclésiale de la Reforme, il n’y a pratiquement pas eu de désaccord entre protestants et catholiques à propos de l’inspiration du texte et de l’identification de Dieu comme auteur principal, et au sujet des prophètes et des apôtres comme auteurs secondaires du texte, en se basant dans l’analogie de la dictée. La plupart des théologiens et exégètes de l’époque supposaient que les prophètes et les apôtres parlaient avec leurs propres paroles et leur propre contexte historique mais que les mots et, bien plus important encore, le sens de ces mots étaient garantis par l’Esprit Saint comme la parole de Dieu. » Richard MULLER, «Biblical interpretation in the 16
th & 17
th centuries», Donald MCKIM (éd.), Historical
handbook of major biblical interpreters, Downers Grove, Intervarsity Press, 1998, p. 128. Sauf mention, toutes les citations d’ouvrages en anglais sont traduites par nos soins. 20
Il y a des auteurs qui nient que les Réformateurs avaient cette notion de l’inspiration biblique. C’est le cas de Werner JEANROND "History of Interpretation", in Anchor Bible Vol.3, David Noel FREEDMAN (éd.), New York, Doubleday, s/d, p. 438 et de Frederic FARRAR, Story of Interpretation, London, McMillan and Co, 1886, p. 339. Bien que la question reste ouverte et qu’une étude plus approfondie sur le sujet sortirait du cadre de ce mémoire, nous avons choisi d’adopter la position la plus consensuelle. 21
Richard MULLER, «Biblical interpretation in the 16th & 17
th centuries», p.140. John
WOODBRIDGE, Randal BALMER, Scripture and Truth, Grand Rapids, Baker Books, 1992, p. 225.
8
Ce changement a eu pour conséquence que la Bible était de plus en plus
«réexaminée à travers le prisme d’une nouvelle acuité historique et
empirique»22. Cette critique va déclencher l’apparition de points de vue tout à
fait divergents, comme par exemple l’inspiration partielle des écritures23. Au
XIXe siècle, le débat sur l’inspiration s’intensifie grâce à l’apport de facteurs
nouveaux24, notamment: la méthode historico-critique25, les nouvelles théories
scientifiques26 et la notion de progrès27 . Les courants et opinions présentés
dans les chapitres suivants nous montrerons jusqu’où cette diversité de
d’opinion sur l’inspiration a coexisté dans le monde religieux protestant
anglophone à cette époque.
B. Introduction à l’herméneutique orthodoxe de Genève
Dans le cadre que nous avons présenté, l'approche des théologiens
européens28 qui va débuter en 1817, est au plus près des positions
22
Gerald SHEPPARD, «Biblical interpretation in the 18th & 19
th centuries», in Daniel REID (éd.),
Dictionary of Christianity in America, Downers Grove, Intervarsity Press, 1990, p. 264. 23
Peter VAN BEMMELEN, Issues in Biblical Inspiration, p. 56. 24
Ibid., p. 58-70. 25
La méthode historico-critique est une méthode d’exégèse qui commence à se développer à cette époque et qui tente, de façon scientifique, d’étudier l’origine historique, le texte, la composition et la transmission de la Bible. Dans le XIX
e siècle, plusieurs érudits bibliques vont
remettre en question les faits historiques présents dans la Bible et baser ces événements bibliques sur des présupposés surnaturels. Kurt PETERSON, «Higher Criticism», in Brenda BRASHER (éd.), Encyclopedia of Fundamentalism, New York/London, Routledge, 2001, p. 220-222. 26
Parmi les théories scientifiques qui ont le plus apporté au débat, il y a la théorie géologique de l’uniformitarisme et la théorie de l’évolution. En 1830, Charles Lyell publie son livre Principles of Geology, dans lequel il propose que tous les processus géologiques observables aujourd’hui se sont toujours développés au même rythme et de la même manière. Cette pensée implique donc que les changements sur la surface de la terre se sont développés dans l’ordre de millions d’années. L’Origine des espèces apparaît en 1859, dans livre où Charles Darwin (1809-1882), scientifique anglais, défend l’hypothèse de la «modification des espèces par la sélection naturelle». Cette théorie qui, par la suite, prendra le nom d’"évolutionnisme", affirme que chaque être vivant est le résultat d’un processus évolutif qui l’amène de la simplicité à la complexité et à être de plus en plus adapté à son environnement. Ces deux visions remettront en question l’histoire biblique de la création et seront une source de conflit dans le milieu religieux. Florence DANIEL, «Actualisme/Catastrophisme, sciences de la Terre», in Bernard COUVELAIRE (éd.), François DEMAY (éd.), Dictionnaire des Idées, Encyclopaedia Universalis, 2005, p. 22-23. Jean GAYON, Armand de RICQLÈS, «Évolutionnisme, biologie», in Dictionnaire des Idées, p. 271-275. 27
Cette notion est présentée comme un concept philosophique général par Herbert Spencer (1820-1903), philosophe anglais qui en fera une application dans le domaine de la biologie dans le travail de Charles Darwin. Egalement appelé évolutionnisme philosophique, cette vision affirme que tous les domaines de la vie humaine, qu'il s'agisse de connaissances techniques, scientifiques ou même morales, croissent à chaque génération. L’humanité se perfectionne au fil de temps, en passant du plus simple au plus complexe. Hubert FAES, «Évolutionnisme, philosophie», in Dictionnaire des Idées, p. 275-276. 28
Même si ce courant de pensée sur l’inspiration de la Bible ne se limite pas géographiquement à la ville de Genève. Robert Haldane visite cette ville en 1816 dans un objectif missionnaire.
9
traditionnelles protestantes au sujet de l’inspiration. Parmi eux, deux noms ont
eu un rôle majeur29 dans la défense de leur point de vue face aux
questionnements que nous avons déjà mentionné : Robert Haldane et Louis
Gaussen.
Robert Haldane
Haldane était un théologien et évangéliste écossais qui a eu une œuvre
remarquable dans l’organisation d’un effort d’évangélisation des îles
britanniques. Il a également eu un parcours important dans le continent,
principalement à Genève et à Montauban. En 1816, il a publié un ouvrage dans
lequel il traitait de la question de l’inspiration biblique.
Pour cet auteur, l’inspiration de la Bible ne se résume pas aux idées ou
aux concepts présentés, mais elle se manifeste aussi dans les mots utilisés :
«Une écriture inspirée par Dieu implique, dans sa propre expression, que les
paroles sont les paroles de Dieu»30. Haldane n’accepte pas une notion "par
degrés", selon laquelle certaines parties de la Bible sont plus inspirées que
d’autres, dans le sens où elles possèdent une nature plus divine que d’autres.
Haldane défend l’idée que la Parole de Dieu est véritablement «dictée par
Dieu»31. Autrement dit, la Bible ne peut être appelée « Parole de Dieu » que si
elle est dictée par Dieu lui-même et que s’Il a personnellement choisi les mots
utilisés. C’est, aux yeux de Robert Haldane, la seule façon de garantir la fidélité
du message transmis.
Pendant cette visite, il fera plusieurs rencontres avec de jeunes étudiants genevois de théologie. Leur principal sujet de discussion était axé sur l’Epitre aux Romains. Cette visite revêtra une grande importance pour le nouveau mouvement revivaliste à Genève au XVIII siècle. Herman DE GOLTZ, Genève religieuse aux dix-neuvième siècle. Ou tableau des faits qui, depuis 1815, ont accompagné dans cette ville le développement de l’individualisme ecclésiastique du Réveil mis en regard de l’ancien système théocratique de l’Eglise de Calvin, trad. C. MALAN-SILLEM, Genève/ Bale, Henri Georg, 1862, p. 147. Version original. 29
Haldane et Gaussen auront une relation très proche même après leur rencontre à Genève. Ils se sont mutuellement écrits et, à propos d’un voyage de Gaussen vers l’Ecosse, ils ont pris divers rendez-vous. L’ouvrage de Gaussen aura une grande influence, grâce à la forte circulation de son ouvrage. Quelques citations apparaissent même dans les publications adventistes. Nous aborderons ce sujet dans le chapitre suivant. Alexander HALDANE, Memoirs of the Lives of Robert Haldane of Airthrey and of his Brother James Alexander Haldane, London, Alexander Macintosh, p. 558. Peter VAN BEMMELEN, Issues in Biblical Inspiration, p. 77. 30
Robert HALDANE, The Evidence and Authority of Divine Revelation. Being a View of the Testimony of the Law and the Prophets to the Messiah, with the Subsequent Testimonies, 3 édition, Hamilton Adams Co, London, 1839, p. 119. 31
Ibid., p. 207.
10
Notre auteur n’essaie pas d’expliquer le processus par lequel l’Esprit
Saint a travaillé avec les humains; cela reste pour lui un mystère32. Pourtant, il
propose à ses lecteurs quelques pistes. Dans l’acte de l’inspiration, Dieu prend
en compte la personnalité et le caractère individuel de chaque auteur alors que
dans le processus de dictée des messages, il utilisait les mots, les expressions
et le style propre à l’écrivain : «L’Esprit Saint pouvait dicter ses propres paroles
de telle façon qu'elles étaient aussi prononcées avec compréhension, dans
leurs termes »33.
Il considère incontestablement que, malgré cette appropriation du
langage individuel de chaque écrivain dans la rédaction de la Bible, elle reste
pleinement parole de Dieu : « […] parce que les mots ont été écrits par les
Prophètes et Apôtres, cela n’empêche pas qu’ils soient les paroles de Dieu»34.
C’est dans cette mesure aussi qu’elle est en même temps absolument divine et
absolument humaine.
Haldane nuance la notion d’une dictée divine en ajoutant que Dieu aurait
choisi certains mots dans le lexique individuel de l’auteur pour transmettre son
message. Dans cette conception de l’inspiration, l’autorité de la Bible dépend
complètement de cette notion, à savoir que Dieu choisit personnellement les
paroles utilisées. Gaussen, fortement influencé par Haldane, poussera cette
pensée plus loin encore.
Louis Gaussen
Gaussen, né à Genève, était pasteur, éducateur et professeur. Il est
devenu l'un des plus importants moteurs d’un mouvement revivaliste à Genève,
au sein duquel il a développé tout son ministère. Il a eu un impact considérable
à son époque, grâce à son livre intitulé Théopneustie ou la pleine inspiration
des Saintes Ecritures. Ce succès s'est étendu jusqu'aux Etats-Unis 35. En effet,
32
Robert HALDANE, The Evidence and Authority of Divine Revelation, p. 208. 33
Ibid., p. 214. 34
Ibid., p. 212. 35
Entre les années 1841 et 1896, son livre sera traduit et republié à 13 reprises aux Etats-Unis.
11
c’est dans ce pays que cet ouvrage aura le plus de répercussions, notamment
auprès du séminaire de Princeton36.
Dans cet ouvrage, l'auteur proclame que l’action du Saint-Esprit agit
toujours sur les écrits sacrés et jamais sur les scribes qui ont pour seule
fonction d’être des outils à la disposition de Dieu :
«[…]cette opération miraculeuse de l'Esprit Saint n'eut pas pour objet les écrivains sacrés, qui n'en furent que les instruments, et qui durent passer bientôt ; mais elle eut pour objet les livres saints eux-mêmes, qui furent destinés à révéler de siècle en siècle à l'Église les conseils de Dieu, et qui ne passeront jamais.»
37
La Bible possède une valeur parce que la participation humaine, dans sa
composition, a été complètement soumise à l’action de Dieu. Cela n’implique
pas un processus mécanique comme une espèce de «dictée divine». Dans une
lettre, il l’affirme : «C’est le fait de l’inspiration plénière des Ecritures qui m’est
cher et sacré, tandis que le mode m’en est inconnu et indifférent, parce qu’il
n’est pas révélé.»38 Comme pour Haldane, Gaussen défend l'idée que le
processus de l’inspiration ne peut être expliqué39. Alors, même si ce sont des
hommes qui parlent pour Dieu, le message est sacré parce que c’est Dieu qui
contrôle tout:
« Et si c'est toujours la parole de l'homme, puisque ce sont toujours des hommes qui la profèrent, c'est aussi toujours la parole de Dieu, parce que c'est Dieu qui les surveille, qui les emploie et qui les guide.
»40
Néanmoins, cette action n’anéantit pas la personnalité des écrivains en
question. En effet, Dieu agit de façon à soulever ces tempéraments
individuels41. C’est pour cela que le message est dans le même temps
pleinement humain et pleinement divin : « tous les versets, sans exception, sont
36
Dès la première publication en anglais, les critiques littéraires ont été très positives. Notons également que Benjamin Warfield, l'un des professeurs de théologie du Séminaire de Princeton aux États-Unis, l’a utilisé de manière régulière comme source de ses propres écrits sur l’inspiration. Dans le XX siècle, il sera aussi influent dans la rédaction de la section sur l’inspiration de la Bible dans The Fundamentals, ouvrage de référence du mouvement fondamentaliste, mouvement conservateur américain qui a commencé à se former au début du XX
e siècle. Pour plus d’informations sur l’influence de l’ouvrage de Gaussen, voir: Kenneth
STEWART, A Bombshell of a Book. Gaussen’s Theopneustia and its Influence on Subsequent Evangelical Theology, Evangelical Quarterly 75 (2003/03), p.215-237. 37
Louis GAUSSEN, Théopneustie ou la pleine inspiration des Saintes Ecritures, Paris, L-R-Delay, 1840, p. 3. L'ensemble des citations de Gaussen est dans sa version originale. 38
Louis GAUSSEN, La véritable doctrine de M. Gaussen sur l’inspiration des doctrines, Genève, Imprimerie P. Richter, 1917, p. 3. 39
Ibid., p. 3. 40
Ibid., p. 4. 41
Ibid., p. 4.
12
de l'homme; et tous les versets, sans exception, sont de Dieu; soit qu'il parle
directement en son nom, soit qu'il emploie toute la personnalité de l'écrivain
sacré.»42
C’est à cause de ce contrôle strict de la part de Dieu sur le processus de
formation et de transmission de la Bible, que nous pouvons affirmer que la Bible
ne contient pas d’erreurs quelles qu’elles soient43. Gaussen l'affirme en ces
termes:
«La théopneustie est la puissance mystérieuse exercée par l’Esprit de Dieu sur les
auteurs de la sainte Écriture, pour la leur faire écrire, pour les guider jusque dans l’emploi des paroles dont ils ont fait usage, et pour les préserver ainsi de toute erreur.»
44
Gaussen reprend d'ailleurs les mêmes idées de base qu'Haldane: une
inspiration verbale de la Bible dans laquelle le processus n’est pas expliqué.
Cette absence de justification de la manière dont le Saint-Esprit agissait avec
les humains, devient encore plus frappante lorsque l'on en approfondit leurs
notions. Haldane et Gaussen ont, pour objectif, non pas d'explorer le
phénomène de l’inspiration biblique, mais de défendre, selon eux, l’autorité de
la Bible. La valeur de la Bible advient de son inerrance, quelle que soit la nature
de ses affirmations et peu importe le sujet. Par conséquent, une inspiration
verbale est le seul moyen de garantir cette absence d’erreur; les auteurs
humains étant uniquement un moyen pour attendre le but final de transcrire
parfaitement la pensé divine en langage humaine. Comme nous l'avons déjà
remarqué, cette approche influencera fortement le Séminaire de Princeton.
C. L’approche du Séminaire de Princeton
Le Séminaire de Théologie de Princeton, créé en 1812 aux Etats-Unis, a
joué un rôle majeur dans le développement théologique américain45. Les
générations successives de professeurs auront un rôle très important dans la
défense de la vision orthodoxe reformée au sujet de l'inspiration biblique46.
Cette orientation orthodoxe réformée, basée sur les principes de la philosophie
42
Louis GAUSSEN, Théopneustie, p. 9,12,13. 43
Ibid., p. 16. 44
Ibid., p. 305. 45
William RIGENBERG, «Princeton University», in Daniel REID (éd.), in Dictionary of Christianity in America, Downers Grove, Intervarsity Press, 1990, p. 942-943. 46
Andrew HOFFECKER, «Princeton Theology», in Dictionary of Christianity in America, p. 941-942.
13
Scotish Realism47, apportait la confiance nécessaire à ses défenseurs pour
faire face aux positions théologiques les plus complexes et les plus érudites,
quelques fois les plus radicales aussi, de l’Europe. Le premier ouvrage que
nous allons étudier est la Systematic Theology de Charles Hodge, devenu
ouvrage de référence de l’orthodoxie reformée américaine48. Le deuxième
l’article est Inspiration écrit par Archibald Hodge - fils de Charles Hodge - et par
Benjamin Warfield, qui reste une contribution classique de leur point de vue49.
Charles Hodge
Charles Hodge est un nom qui, aujourd’hui même, reste connu dans les
milieux conservateurs américains à cause de l'influence de cet homme dans le
développement du département de théologie de Princeton. Entre 1826 et 1828,
il part pour l'Europe où il prendra connaissance des derniers développements
théologiques pour mieux défendre les positions conservatrices de Princeton50.
En 1857, il publie le premier volume de sa Systematic Theology, un ouvrage sur
la Théologie Systématique, dans lequel il détaille, entre autres, sa pensé au
sujet de l’inspiration.
L’inspiration biblique reste, selon Hodge, un processus exclusivement
surnaturel51 à travers lequel Dieu utilise les prophètes comme des
intermédiaires pour communiquer parfaitement avec les hommes52 ; En effet : «
L’objectif ou concept de l’inspiration est de garantir l’infaillibilité de
l’enseignement»53 . Pour garantir cette souveraineté : «les organes de Dieu
47
Il s’agit d’un courant philosophique du XVIII siècle qui a fortement influencé la pensée protestante américaine du XIX siècle. Cette pensée considérait que, même les personnes ordinaires, pouvaient atteindre une compréhension précise du monde réel à travers une étude empirique de ce monde et en utilisant des méthodes d'induction. Elle défendait aussi l'idée que tout être humain possède une connaissance intuitive de certains principes moraux. Richard POINTER, «Scottish Realism», in Dictionary of Christianity in America, p. 1061. 48
Ernest Sandeen affirme que c’est dans cet ouvrage que la théologie du Séminaire de Princeton est présentée dans sa forme la plus complète. Pour plus d’information, voir : Ernest SANDEEN, «The Princeton Theologie. One Source of Biblical Literalism in American Protestantism», Church History 31 (1962/3), p. 308. 49
L’importance de cet article est renforcée par le professeur de théologie John Battle : «cet article est devenu la « définition » de la doctrine de Princeton sur l’inspiration. John BATTLE, «Charles Hodge, Inspiration, Textual Criticism, and the Princeton Doctrine of Scripture», Western Reformed Seminary Journal 4 (1997/2), 28-41. 50
Andrew HOFFECKER, «Hodge, Charles (1797-1878) », in Dictionary of Christianity in America, p. 537-538. 51
Charles HODGE, Systematic Theology, 1 vol., 1 éd (1871), Grand Rapids, WM. B. Eerdmans Publishing Co., 1940, p. 168. 52
Ibid., p. 154. 53
Charles HODGE, Systematic Theology, 5 vol., p. 155.
14
dans la communication de sa volonté ont été contrôlés par Lui dans les mots
qu'ils utilisaient.»54
Cependant cette usage par Dieu ne limite pas les capacités des
hommes. Ce n’est pas un processus mécanique par lequel Dieu se limite à
dicter, mais il s’agit par contre de l’idée de prendre en compte les capacités et
caractéristiques individuelles du prophète :
« L’Eglise n’a jamais défendu ce qui a été stigmatisé comme la théorie de l’inspiration
mécanique. […] De plus, comme l’inspiration n’impliquait pas la suspension ou la
suppression des facultés humaines, de la même façon elle n’interférait pas avec le libre
exercice des caractéristiques mentales distinctives de l’individu. […] Il (Dieu) utilise des
hommes comme ses organes, chacun selon ses dons et capacités particulières. […] Il
n’y aucune raison de croire que l’opération de l’Esprit dans l’inspiration s’était révélée
dans la conscience des écrivains sacrés. De la même manière, ses opérations pour la
sanctification ne se révèlent pas dans la conscience du Chrétien. Les auteurs inspirés
ont écrit dans la plénitude de leurs propres pensées et sentiments, et ont employé le
langage et les modes d’expression qui leur était le plus naturel et approprié.
Néanmoins, ils parlaient ainsi qu’ils étaient guidés par l’Esprit Saint, et leurs paroles
étaient ses paroles.55
»
L’autorité divine des auteurs bibliques se reflète sur l’ensemble de
l’enseignement qu’ils présentent dans la Bible, les domaines théologiques et
religieux bien-sûr, mais aussi tout autre domaine où les prophètes enseignent.
En effet, les prophètes « sont infaillibles seulement comme professeurs, et
quand ils agissent comme porte-parole de Dieu56.» Dans ce cas, l’inspiration
englobe tous les mots qu’ils utilisent57.
Même si Charles Hodge possède une position très proche des courants
de Genève, il est facile de mettre en évidence une grande divergence. Selon
lui, la Bible n’est pas inerrante, ainsi que l’approche de Genève le concevait.
Cette dernière défendait la totale absence d’erreurs dans la Bible, alors que
Hodge émettait l’idée que l’inerrance provenait uniquement lorsque les
prophètes prononçaient leurs enseignements. Cette prépondérance donnée à
l’infaillibilité des auteurs bibliques uniquement dans leur rôle professoral reste
54
Charles HODGE, Systematic Theology, 5 vol., p. 137. 55
Ibid., p. 157. 56
Ibid., p. 165, Cf. p. 155, 154, 163, 169 57
Ibid., p. 164.
15
une nuance importante de sa pensée. J’aimerais mentionner enfin que Hodge
essaie de mettre en évidence l’aspect de la soumission volontaire et active des
auteurs à l’action du Saint-Esprit. Cette emphase est due aux critiques faites à
leur encontre, relevant qu’ils n’étaient que des machines utilisées par Dieu.
Archibald Hodge et Benjamin Warfield
Archibald Hodge et Benjamin Warfield était deux professeurs en
théologie de Princeton qui ont co rédigé un article important dans la conception
actuelle de l’inspiration verbale de la Bible58. En effet, la position présentée
dans cet article sera accepté en 189259 comme position officielle de l’Eglise
presbytérienne60.
Dans cet article, Hodge et Warfield défendaient l’idée que nous devrions
faire une distinction entre les écrits originaux - ceux que sont sortis de la plume
des auteurs - et les traductions courantes de la Bible, qui ont été corrompues à
cause de leur processus de transmission au fil du temps. Ce sont ces écrits
originaux qui méritaient, pour nos auteurs, la plus grande estime : « Elle ne
contient pas la parole de Dieu, elle est la parole de Dieu »61. L’inspiration : « ou
la surintendance de Dieu sur les écrivains dans tout le processus de l’écriture,
qui n’aura comme conséquence que l'infaillibilité absolue du registre dans
lequel la révélation, une fois générée, apparaîtra dans l’écrit original.»62 C’est à
cause de cette infaillibilité que :
« Néanmoins la foi historique de l’Eglise a toujours été, que toutes les affirmations de
l’écriture, quelles qu’elles soient : qu’il s’agisse de la doctrine spirituelle, de droit ou de fait
physique ou historique, ou encore du principe psychologique ou philosophique, sont sans
aucune erreur lorsque le ipsissima verba des écrits originaux sont déterminés et interprétés
dans leur sens naturel envisagé. […] et la précision, d'autre part, qui assure une déclaration
58
Benjamin Warfield sera l’un des savants qui écrira pour The Fundamentals, un ouvrage en 12 volumes qui fera débuter le mouvement fondamentaliste. Un tiers des articles qui appartenait à cet ouvrage défendait la vision traditionnelle de la Bible, notamment le concept de l’inerrance biblique. George MARSDEN, «Fundamentals, The», in Dictionary of Christianity in America, p. 468-469. 59
Andrew HOFFECKER, «Hodge, (A)rchibald (A)lexander (1823-1886) », in Dictionary of Christianity in America, p. 536-537. 60
L’Eglise presbytérienne des Etats-Unis est une dénomination qui a eu son origine en 1706. Tout au long de son histoire, elle a été une entité puissante dans le contexte religieux de ce pays. Louis WEEKS, « Presbyterian Church (U.S.A) », in Dictionary of Christianity in America, p. 931-932. 61
Archibald HODGE, Benjamin WARFIELD, « Inspiration », The Presbyterian Review (1881/6), p. 237. 62
Ibid.,p. 226.
16
correcte des faits ou des principes affirmés. C’est cette précision et elle seule, par opposition à
l'exactitude, que la doctrine de l'église soutient, sans exception, pour toute affirmation du texte
original de l'Écriture.»63
Néanmoins, avec cette notion, la Bible reste le produit d’une coopération
entre Dieu et l’homme où apparaissent les caractéristiques, les expériences et
les capacités individuelles de chaque auteur humain. En effet, «chaque auteur
a été mis dans une partie spécifique de l’ensemble de l’ouvrage pour lequel lui
seul était adapté de par ses capacités d’origine, d’éducation, d’information
particulière, et de sa position providentielle.»64 Les auteurs vont encore plus loin
dans leur démarche en affirmant que : «Chaque écrivain sacré était formé par
Dieu d’une manière spéciale, formé, doté, instruit, providentiellement
conditionné, et équipé d’une connaissance naturelle, surnaturelle ou
spirituellement transmise, afin que lui, et lui seul, puisse librement produire la
partie qui lui était attribuée.»65
Même s’ils pensent que les auteurs bibliques étaient choisis et
conditionnés par Dieu durant tout le processus, ils ont participé librement,
activement et de manière consciente66. Pour mieux expliquer cette apparente
incohérence, Hodge et Warfield utilisaient comme illustration l’instinct animal.
Même s’il existe des différences, nous pouvons voir là aussi, de quelle manière
Dieu suscite des activités spontanées qui amène le sujet d’une forme irrésistible
à un objectif prédéterminé, sans que ce sujet en comprenne la raison, et sans
que Dieu n’interfère ni sur les attributs individuels ni sur sa liberté de choix67.
Ainsi que nous venons de le constater, Archibald Hodge et Benjamin
Warfield proposent quelques nuances par rapport à leurs prédécesseurs.
Premièrement, et à l’opposé de Charles Hodge qui défend l’infaillibilité biblique
dans ce qu’elle enseigne, ils défendent l’infaillibilité des écrits originaux.
Deuxièmement, leur avis est que le processus de l’inspiration peut se faire par
des moyens naturels ce qui, pour Charles Hodge, était inadmissible.
63
Archibald HODGE, Benjamin WARFIELD, « Inspiration », p. 237-238. 64
Ibid., p. 229. 65
Ibid., p. 230. 66
Ibid., p. 231. 67
Ibid., p. 228.
17
Malgré l’importance de ce courant, surtout pour la pensée de l’orthodoxie
reformée de la fin du XIXe et du début du XXe siècle, il n’est pas resté
monolithique. Par rapport à l’herméneutique orthodoxe réformé de Genève,
même si ces deux pensées ont des différences superficielles, elles sont en
accord sur une inspiration verbale et inerrante de la Bible. Ce regard sur la
Bible du Séminaire de Princeton fera naître une grande opposition au sein de
l’Eglise presbytérienne des Etats-Unis sous la plume du théologien Charles
Briggs, auteur que l’on abordera dans le chapitre qui suit.
D. Charles Briggs
Charles Briggs était un auteur très controversé de la fin du XIX siècle au
sein de l’Eglise presbytérienne à cause de sa défense de la méthode historico-
critique et de sa critique sur l’orthodoxie de la théologie de Princeton. Lors d’un
discours public qu’il a réalisé en 1891, un procès d’hérésie a été tenu contre lui,
à la fin duquel il sera suspendu du corps pastoral presbytérien et mis à l’écart
de l’Union Theological Seminary - école dans laquelle il a enseigné - de l’Eglise
presbytérienne. Ce procès sera principalement basé sur son opinion sur
l’inspiration biblique et son autorité68.
Notre académicien a écrit un article69 en réponse à celui de Hodge et
Warfield que nous venons d’étudier, dans lequel il reprend une majeure partie
de leurs idées mais développe une position relativement différente par rapport à
la l’inspiration verbale70. Pour Briggs, il est nécessaire de faire une distinction
entre une inspiration pleine et une inspiration verbale, en d’autres termes, il est
possible de croire à une inspiration totale de la Bible sans pourtant accepter la
notion d’inspiration verbale71.
68
Bradley LONGFIELD, «Briggs, Charles Augustus (1841-1913) », in Dictionary of Christianity in America, p. 188. 69
Cet article reprend et résume les idées qu’il avait déjà présentées dans son livre Biblical Study consacré à des conseils sur l’étude la Bible. Pour appuyer cette Remarque, voir : Charles BRIGGS, Biblical Study. Its Principal Methods and History Together with a Catalogue of Books of Reference, New York, Charles Scribner’s Sons, 1883, p. 261. Cf. Charles BRIGGS, « Critical theories of the sacred scriptures in relation to their inspiration », The Presbyterian Review 2 (1881/7), p. 551. 70
Charles BRIGGS, « Critical theories of the sacred scriptures in relation to their inspiration », p. 551. 71
Ibid., p. 551.
18
L’«assurance dans l’autorité absolue de la Parole de Dieu»72 reste
quelque chose d’essentiel pour Briggs qui défend que les écrits originaux ne
contiennent pas d’erreurs, à l’exception de quelques inexactitudes
circonstancielles qui : «ne troublent pas l’infaillibilité des contenus sur la foi ou
sur les événements historiques ni sur les institutions dont ils sont
inséparables.»73
Cet auteur note pourtant une différence entre le sens du texte, qui est
essentiel pour lui, et les mots et lettres utilisés qui sont le moyen ou le « corps »
de la Bible, et donc secondaires : « L’écriture est comme le corps d’un homme,
dans lequel quelques composants existent dans le seul but de préserver le
reste, il peut être blessé sans pour autant produire la mort : le sens est l’âme de
l’écriture, et les lettres n’en sont que le corps ou le véhicule »74. La forme de la
Bible, c’est à dire les lettres, les paroles, la logique et la grammaire, ne sont que
des instruments utilisés pour transmettre le message divin75.
Penser autrement, c’est affirmer que la parole de Dieu ne nous est pas
accessible aujourd’hui, puisqu’il est impossible d’accéder aux sens originel76.
Ainsi, pour Briggs, c’est une incohérence de croire à une inspiration verbale qui
nous sépare de la parole de Dieu, et qui nie le fait que nous pouvons expliquer
exactement la même pensée de plusieurs façons différentes77. L’acte de
l’inspiration se concentre sur la pensée : « Sans doute que l’Esprit saint était
présent pendant tous les travaux des auteurs, faisant que ses énergies rentrent
dans l’exercice de leurs facultés, en les augmentant, en les dirigeant, de façon
à assurer une expression, sans aucune erreur, de la pensée conçue par
Dieu.»78
Comme les extraits de Briggs nous le montrent, il s’oppose très
fortement à la notion de l’inspiration verbale de la Bible et à toutes ses
implications. Selon lui, l’inspiration se centre sur la pensée de l’auteur et non
72
Charles BRIGGS, « Critical theories of the sacred scriptures in relation to their inspiration », p. 550. 73
Ibid., p. 552. 74
Ibid., p. 552. 75
Ibid., p. 553. 76
Ibid., p. 574. 77
Ibid., p. 572. 78
Ibid., p. 574
19
pas sur les mots qu’il dit ou écrit. Même s’il reprend la même idée de
l’infaillibilité des écrits originaux que soutient le Séminaire de Princeton, il
défend que cette infaillibilité n’est présente que dans le sens voulu par l’auteur
biblique.
E. Samuel Coleridge
Poète, théologien, philosophe, dramaturge, et détenant bien d’autres
titres encore, Samuel Coleridge reste une figure marquante de son époque.
Grâce à ses œuvres littéraires, il devient l’un des responsables principaux non
seulement d’un changement culturel, mais également d’un réveil du sentiment
religieux en Angleterre, son pays d’origine79.
En 1840, six ans après son décès, son éditeur publie un ouvrage basé
sur des lettres écrites par Coleridge intitulé Confessions of an Inquiring Spirit
dans lequel il s’oppose très fortement à l’inspiration verbale de la Bible : « la
doctrine en question se transforme immédiatement dans une tête de Mammon
colossal, un passage creux pour une voix, qui se moque des voix de plusieurs
hommes, et qui parle en leur nom, et pourtant elle ne reste qu’une seule voix
[…] »80 .
Par opposition à une inspiration verbale, il propose l’idée que c’est
l’esprit de la Bible qui est pleinement inspiré et infaillible, et non les mots
utilisés : « […] c’est l’esprit de la Bible, qui est infaillible et absolu, et non ces
phrases et paroles séparées […]»81.
Bien que la Bible possède une origine divine, elle est aussi le fruit de la
connaissance humaine de l’époque à laquelle elle a été rédigée82. Il n’est pas
concevable que la pensée et les discours de Dieu puissent être parfaitement
traduits à travers un langage humain : « comme si le sens de Dieu pouvait si
clairement et judicieusement être exprimé comme les propres paroles de
79
Paul ROZENBERG, « COLERIDGE (Samuel Taylor) 1772-1834», in Peter BAUMBERGER, Climatologie-Cytologie, vol. 6 de Encyclopaedia Universalis, Paris, Encyclopaedia Univesalis, 1993, p.83-84. 80
Samuel COLERIDGE, Confessions of an inquiring spirit, London, William Pickering, 1840, p. 32. 81
Ibid., p. 73. 82
Ibid., p. 83.
20
Dieu.»83 Pour Coleridge, Dieu ne peut être enfermé dans des paroles
humaines ; La Bible nous dirige vers l’objet de notre adoration, elle n’est pas
l’objet de cette adoration.
La Bible est le fruit de la coopération entre Dieu et l’homme. Des
hommes et des femmes imparfaits, mais qui aspirent à faire le bien84. Malgré
leur imperfection ils possèdent la compréhension nécessaire à notre salut85,
connaissance qu’ils ont laissé par écrit dans la Bible. Tous les éléments
présents dans la Bible qui ne contribuent pas à cette représentation ne sont pas
infaillibles86.
Il est intéressant qu’un savant des lettres, un poète et dramaturge
s’oppose si fortement à une inspiration verbale de la Bible. La dichotomie qu’il
présente entre les mots et l’esprit de la Bible soulève une conception de
l’inspiration qui agit sur la pensée humaine, dans un esprit de coopération entre
Dieu et l’homme.
F. Friedrich Schleiermacher
Cet homme est un théologien et philosophe allemand qui aura un rôle
fondamental dans le développement de l’herméneutique. Toutefois son action
ne se limitera pas seulement à cette discipline mais il sera un pionnier dans
plusieurs domaines de la théologie. L’une des caractéristiques de son travail est
l’emphase donnée au sentiment en tant que centre de l’être humain et par la
suite, de la religion, notamment le sentiment de complète dépendance de
Dieu87.
Avant d’expliquer la notion que Schleiermacher avait sur l’inspiration
divine de la Bible, il est important de noter quelques facteurs importants de son
regard sur les livres bibliques. Pour lui, l’Ancien Testament possède, par
rapport au Nouveau Testament, un rôle et une autorité clairement inférieur. Il ne
mérite sa place dans la Bible que grâce aux citations et mentions faites dans le
83
Samuel COLERIDGE, Confessions of an inquiring spirit, p. 57. 84
Ibid., p. 55. 85
Ibid., p. 82. 86
Ibid., p. 83. 87
Dietz LANGE, «SCHLEIERMACHER, Friedrich Daniel Ernst (1768-1834)», in Pierre GISEL (éd.), Lucie KAENNEL (éd.), Encyclopédie du protestantisme, Paris/Genève, Cerf/ Labor et Fides, 1995, p. 1419-1420.
21
Nouveau Testament tirées de l’Ancien Testament, et aux connections
historiques entre le culte chrétien et la synagogue juive88.
La révélation de Dieu est essentiellement faite à travers la personne du
Christ, toute autre révélation est dépendante de celui-ci. Ainsi toute l’activité
officielle des apôtres inspirés par l’Esprit-saint, dépend de cette révélation
primordiale : «Ainsi, l'expression orale et écrite des Apôtres comme amenées
par l'Esprit était simplement une communication avec une origine dans la
révélation divine du Christ. »89 Une révélation qui s’est présentée dans les
expériences qu’ils ont vécues avec le Christ, ses discours, sa vie90. Toutes
révélations postérieures, inspirées, se développent naturellement à partir de cet
événement essentiel : le ministère de Jésus.
« […] Christ Lui-même doit être le don divin originel de tout ce que les Saintes Écritures contiennent, pas dans les détails isolés, à titre d'inspiration, mais comme un seul don indivisible de connaissance à partir de laquelle les détails évoluent organiquement. Ainsi les discours et écrits des Apôtres inspirés par l'Esprit étaient tout simplement une communication basée sur la révélation divine dans le Christ. »
91
Pourtant, cette inspiration ne se limite pas à la rédaction des livres
bibliques ; au contraire, l’autorité et l’influence de ces ouvrages surgissent de
l’autorité et de l’inspiration divine présente dans leur vie d’apôtres du Christ. Les
livres sont l’un des fruits de la présence de l’Esprit saint agissant sur les
Apôtres eux-mêmes, alors que certains croyants ont d’autres fruits grâce à la
même action du Saint-Esprit :
« Ainsi l’inspiration particulière des Apôtres n’est pas quelque chose qui se limite exclusivement aux livres du Nouveau Testament. Ces livres partagent de cette inspiration qui, dans un sens plus étroit, conditionné par la compréhension pleine et pure de la chrétienté par les Apôtres, couvre l’ensemble des activités officielles de son ministère.»
92
En réalité, il n’existe pas de distinction entre l’inspiration des auteurs
bibliques et l’inspiration que chaque croyant expérimente93. L’inspiration de
l’individu humain par L’Esprit saint, qui l’anime et le régénère, produit des fruits
dans sa vie94. C’est cette dynamique qu’il nomme inspiration ; L’inspiration
88
Friedrich SCHLEIRMACHER, The Christian faith, s. l., T&T Clark, 1999, p. 608. 89
Ibid., p. 598. 90
Ibid., p. 600. 91
Ibid., p. 598. 92
Ibid., p. 599. 93
Ibid., 598, Cf. 560. 94
Ibid., p. 560,569.
22
biblique n’appartient pas à une catégorie séparée de l’inspiration. Au contraire,
la composition des livres bibliques s’insère dans la vie inspirée que les apôtres
ont vécue. Débattre des détails qui marquent la séparation entre l’élément
humain et l’élément divin de la Bible ne sert à rien pour le croyant95.
Le travail de Schleiermacher reste difficile à classer face aux autres
auteurs présentés dans cette partie. Cette difficulté advient du mépris de
l’Ancien Testament et du rôle unique donné au ministère du Christ comme
révélation divine. Il présente aussi l’inspiration biblique comme soumise à
l’action de l’Esprit saint dans l’Eglise ; Cette notion de Schleiermacher est
capitale parce que, contrairement aux autres auteurs étudiés, il ne se concentre
pas sur la définition de l’inspiration, mais au contraire il étudie en étudie le sens,
ainsi qu’il apparaît dans la Bible. Cette réflexion l’amène également à
développer la notion de la canonicité des livres bibliques. Tous ces éléments
restent des caractéristiques importantes de son approche au sujet de
l’inspiration, et le distingue des autres auteurs96.
G. Conclusion
Par rapport aux auteurs étudiés, la proximité entre les deux courants
orthodoxes de Genève et de Princeton sur une inspiration verbale et inerrante
de la Bible, est évident. Malgré l’influence de cette notion de l’inspiration
biblique dans le milieu protestant américain du XIXe siècle, elle a été opposée à
d’autres penseurs religieux parmi lesquels nous avons mis en évidence les plus
prépondérants. Après une observation attentive des positions des différents
auteurs, nous avons pu discerner les principaux points de tension entre eux,
notamment : l’inspiration du contenu, le point focal de l’inspiration et le mode
d’inspiration.
Par rapport au premier élément, l’inspiration du contenu, il reste à
préciser quelles informations de la Bible sont inspirées? Cette question est très
95
Friedrich SCHLEIRMACHER, The Christian faith, p.600. 96
Il est nécessaire de noter la proximité d’un théologien américain, Horace Bushnell, des positions défendues par Coleridge et Schleiermacher. Lui aussi soutenait l’imprécision des langages humains et l’idée que le langage imagé de la Bible devait être valorisé. Les tentatives d’exposer logiquement les vérités et textes bibliques sont nécessaires mais très limités. Les auteurs restreignaient la richesse et l’expressivité de la Bible. En effet, le langage imagé est le seul qui puisse le plus fidèlement transmettre les vérités bibliques. Pour plus d’informations, voir : Donald CROSBY, Horace Bushnell’s Theory of Langage. In the Contexte of Other Nineteenth- Century Philosophies of Langage, The Hague, Mouton, 1975, p. 41-45.
23
liée à celle de l’autorité de la Bible parce que la plupart des auteurs ne font pas
une distinction entre inspiration et autorité biblique. La majorité de ces auteurs
s’est concentrée sur cet unique aspect de l’inspiration. Autrement dit, en
développent leur pensée sur ce sujet, ils se sont contentés d’en définir ce qui
est normatif dans la Bible. Quelques auteurs affirment que seuls les sujets
théologiques sont inspirés, d’autres défendent l’idée qu’ils ne sont pas tous
inspirés. Enfin d’autres auteurs encore ont écrit que la Bible ne contient aucune
erreur, que le sujet soit théologique ou qu’il ne le soit pas.
Le deuxième aspect de l’inspiration, source de divergence entre les
auteurs étudiés, en est le point focal. Cet élément concerne le but de l’action du
Saint-Esprit, c’est-à-dire quel est le destinataire de cette opération. Une fois
encore, nous trouvons un clivage très net entre les courants orthodoxes qui
défendaient que cette action se trouvait dans le choix-même des paroles
utilisées et d’autres auteurs comme Briggs, qui affirmaient que l’action de
l’Esprit saint agissait sur la pensée mais pas sur les mots. Schleiermacher, pour
sa part, défendait que l’Esprit saint n’inspirait ni les paroles ni les pensées, mais
la personne elle-même.
Le troisième point de tension, le mode de l’inspiration, examine de quelle
manière l’inspiration s’effectue. En d’autres termes, de quelle façon le Saint-
Esprit a influencé les auteurs bibliques. Cet aspect de l’inspiration était le moins
développé parmi tous les éléments de ce sujet. Les auteurs orthodoxes étaient
partagés à ce propos. Certains affirmaient que c’était un mystère inexplicable,
d’autres en parlaient très brièvement et dans le seul but d’affirmer que n’était
pas à travers d’un processus «mécanique». Enfin quelques rares auteurs tels
que Schleiermacher ont exploré cette question plus en profondeur, disant que
le Saint-Esprit agissait sur les auteurs bibliques de la même façon qu’il agissait
sur tous les croyants dans leur vie concrète.
Comme nous venons de le voir, les principales conceptions sur
l’inspiration biblique aux XIXe se basaient surtout sur les aspects de l’inspiration
du contenu et sur le point focal de l’inspiration. Elles concernaient les
interrogations suivantes: l’inspiration était-elle verbale ou pas? Quels domaines
théologiques ou scientifiques étaient concernés? Cette même influence était-
24
elle inerrante? Les auteurs développaient très peu le mode par lequel l’Esprit
saint agissait avec les auteurs humains de la Bible.
Par rapport à notre problématique, cette étude nous a permis d’établir les
trois aspects de l’inspiration sur lesquels notre analyse des écrits d'Ellen White
et de Calvin Stowe doit être faite. Cela nous permettra non seulement de
trouver plus facilement des similitudes et des différences entre ces deux
auteurs mais aussi de les positionner plus aisément par rapport au débat
théologique sur l’inspiration biblique que nous venons d’étudier. Un des aspects
que nous devons approfondir d’avantage c’est de déterminer si Ellen White ou
Calvin Stowe ont approfondi l’aspect du mode de l’inspiration, élément le plus
négligé dans les pensées des auteurs étudiés. De cette façon, nous pouvons
éclaircir quelles ont été leur contribution individuelle pour ce débat sur
l’inspiration biblique au XIXe siècle.
Après avoir établi ce cadre théologique pour notre recherche, il est
nécessaire d'étudier l'aspect littéraire et historique de chacun des écrits dans
lesquels Ellen White et Calvin Stowe s’insèrent. De cette façon, nous pourrons
plus facilement comprendre et saisir leur pensée et probablement appréhender
les emphases données.
26
A. Introduction
Après une première partie centrée sur le contexte théologique au XIXe
siècle par rapport à l’inspiration biblique, il est maintenant nécessaire de nous
approcher d’Ellen White et de Calvin Stowe. Afin d’atteindre cet objectif, il nous
faut répondre à un certain nombre de questions qui auront une grande influence
dans la compréhension du manuscrit 24 et dans sa relation avec le livre Origin
and History.
Premièrement, il est impératif d’étudier ce qu’Ellen White avait écrit au
sujet de l’inspiration biblique avant 1885. Cela nous permettra de découvrir sa
conception sur ce thème avant sa lecture de Calvin Stowe et d’évaluer de
quelle façon cette étude pourrait ou pas, avoir une influence sur la pensée
qu’Ellen White présente dans son manuscrit.
Deuxièmement, nous sommes intéressés par les évènements qui ont pu
influencer la pensée d’Ellen White et par les conditions dans lesquelles elle a
rédigé son manuscrit. Ces éléments, concernant sa vie et l’Eglise Adventiste,
seront fondamentaux pour approfondir les nuances de sa pensée et pour établir
l’objectif de la rédaction du manuscrit 24.
Troisièmement, il est important par rapport à Calvin Stowe, de connaître
l’ensemble de son livre pour comprendre en détail sa vision de l’inspiration et
saisir de quelle manière cette notion s’articule avec le reste de son ouvrage.
Cette étape valorisera notre comparaison entre son livre et le manuscrit 24,
puisque nous aurons alors une idée plus claire des possibles relations entre sa
pensée et celle d’Ellen White.
Par rapport à ces divers objectifs que nous venons d’établir, notons que
cette partie se divisera en deux chapitres. Le premier concernera Ellen White
dans lequel nous procéderons à une recherche et à une analyse des textes qui
présentent sa vision de l’inspiration de la Bible avant 1885. Nous verrons
également certains éléments biographiques et historiques au sujet de la vie
d’Ellen White et de l’Eglise Adventiste. Le second chapitre sera dédié à Calvin
Stowe. Nous proposerons un résumé de son ouvrage et une analyse de sa
pensée sur l’inspiration biblique. Ce chapitre au sujet de ce dernier auteur
n’aura pas la même importance que celui d’Ellen White en raison de l’absence
27
d’éléments biographiques suffisants; Après une recherche détaillée sur sa vie,
nous n’avons pas obtenu de détails pertinents pour le contexte historique de
son ouvrage.
B. Contexte historique et littéraire du manuscrit 24 1885
La notion de l’inspiration biblique dans les œuvres d’Ellen White avant 1885
Jusqu’en 1885, Ellen White avait déjà accumulé une grande quantité
d’écrits, principalement des livres et des articles de presse. Pour cette raison, il
nous était nécessaire de vérifier si elle avait déjà abordé le sujet de l’inspiration
de la Bible et, dans ce cas, quelle était sa pensée avant la rédaction du
manuscrit 24.
Dans le but de trouver des textes pertinents de notre auteur avant 1885,
nous avons utilisé deux moyens. Le premier était de recueillir tous les textes
d’Ellen White empruntés par différents auteurs adventistes qui analysent son
regard sur l’inspiration. A partir de cette liste, nous avons trié ces textes à la
lumière de deux critères : la date de publication, avant 1885, et un
développement clair du thème de l’inspiration de la Bible. Une fois cette
procédure achevée, nous n’avons obtenu aucun résultat significatif pour notre
recherche, notamment parce que les textes utilisés par ces auteurs antérieurs à
1886 ne parlaient pas de l’inspiration biblique mais traitaient de l’inspiration du
Saint-Esprit dans le ministère d’Ellen White97.
Le second moyen que nous avons utilisé pour découvrir des textes à
analyser était le moteur de recherche inclus dans l’Ellen G. White Writings
Complete Published Edition 2007. Ce cd-rom possède tous les écrits
disponibles d’Ellen White; nous avons néanmoins exclus les compilations. En
parcourant cet outil, nous avons isolé quelques termes spécifiques liés à notre
97
Voici la liste des auteurs sur lesquels nous nous sommes basés : Roy GRAHAM, Ellen White. Co-Founder of the Seventh-day Adventist Church, American University Studies 7, New York, Peter Lang, 1986, p. 140-169. Herbert DOUGLASS, Messenger of the Lord. The Prophetic Ministry of Ellen G. White, Nampa, Pacific Press, 1998, p. 417-423. Gerard DAMSTEEGT, «The Inspiration of Scripture in the Writings of Ellen G. White», Journal of the Adventist Theological Society 5 (1994/1), p.155-179. Raoul DEDEREN, « Ellen White’s Doctrine of Scripture », supplement de Ministry, 1977, p. 24f-24j. Jud LAKE, Ellen White Under Fire. Identifying the Mistaker of her Critics, Boise, Pacific Press, 2010, p. 106-120, James BURRY, An Investigation to Determine Ellen White’s Concepts of Revelation, Inspiration, “the Spirit of Prophecy”, and Her Claims About the Origin, Production and Authority of Her Writings, Ann Arbor, UMI, 1991, p. 33-54.
28
thématique, notamment: inspiration, inspired, inspire, dictation, dictate ; ce qui
nous a donné une liste totale de 2'267 textes. Avec les critères précédemment
usités, il ne restait plus qu’un texte correspondant à nos recherches : le premier
chapitre, Bible Biographies, du volume 4 de la série Testemony for the Church.
Bible Biographies
Dans ce texte, Ellen White défendait l’idée que les personnages
bibliques avec leurs histoires étaient véridiques. Le fait que nous puissions y lire
leurs défauts et faiblesses pouvait être considéré comme un argument en
faveur de l’inspiration divine de la Bible :
« Les auteurs inspirés n’ont pas témoigné des mensonges, avec la peur que les pages de l’histoire sacrée allaient être obscurcies par la présence de faiblesses et de fautes humaines. Les scribes de Dieu ont écrit étant dictés par le Saint-Esprit. Ils ne possédaient eux-mêmes aucun contrôle sur le travail réalisé. Ils ont écrit l’histoire littérale, et des faits durs et interdits ont été révélés pour des raisons que nous, esprits limités, ne pouvons pas pleinement comprendre. (…) C’est un fait prouvé qu'il est humainement impossible de raconter impartialement l’histoire d’un contemporain et il s'avère tout aussi difficile de narrer, sans dévier de la vérité exacte, l’histoire d’une personne ou d’un peuple dont nous connaissons les faits. L’esprit humain est tellement sensible aux préjugés qu'il est pratiquement impossible de traiter un sujet impartialement. (…) Mais l’onction divine
98, soulevée au-dessus de la faillibilité
humaine, raconte l’histoire simple et vraie.99
»
L’aspect important de ce texte vient de l’utilisation du terme «dicté» pour
décrire le procédé de l’inspiration biblique. Ellen White ajoute encore que les
auteurs bibliques n’avaient «aucun contrôle sur le travail réalisé.» Pour arriver à
saisir sa pensée, il est nécessaire non seulement de préciser le sens du mot
«dicté» mais également de définir de quelle manière le Saint-Esprit a contrôlé
les auteurs de la rédaction de la Bible.
Pour clarifier quel était l’usage courant du terme «dicté» à l'époque de
notre auteur, nous avons utilisé le dictionnaire de Webster100, qui présente trois
sens différents pour ce mot : Premièrement: dire avec autorité ou prononcer un
ordre, un commandement ou une direction ; Deuxièmement: ordonner ou
instruire ce qui doit être dit ou écrit ; Troisièmement: suggérer, admonester ou
diriger par une impulsion sur l'esprit. Le choix sur quel le sens du terme qui sera
98
Plus tard, ce texte sera retravaillé et présenté sous la forme d’un article et, à ce moment-là, l’expression «onction divine» sera changée par «inspiration». Ellen WHITE, «Bible Biographies», Review and Herald 55 (1880/4), p. 49. 99
Ellen WHITE, Testimony for the Church, vol. 26, Oakland, The Pacific Press, 1876, p. 5- 6. 100
Noah WEBSTER, Chaucey GOODRICH, An American Dictionary of the English Language, Springfield, George and Charles Merriam, 1861, p. 361.
29
le plus appropriée va dépendre du contexte de l’expression. Par conséquent,
notre analyse des textes doit se baser sur ces trois options.
Pour arriver à une conclusion définitive sur l’usage du mot «dicté» et sur
lequel des sens elle donne à ce terme dans notre texte, nous devons
comprendre pour quelle raison les auteurs n’avaient «aucun contrôle sur le
travail réalisé». C’est dans la suite du texte qu’Ellen White explique comment
cette absence de contrôle se reflétait dans la rédaction de la Bible. En effet, de
l'avis de notre auteur, c’est une impossibilité pour l’humain de raconter de
manière pleinement objective les récits de la Bible. Pourtant ces derniers
semblent justement présenter cette caractéristique : «Mais l’onction divine,
soulevée au-dessus de la faillibilité humaine, raconte l’histoire simple et vraie.»
Dans la suite du texte, Ellen White affirme que ses propres écrits sont
semblables à ceux de la Bible dans la mesure où : « Dans sa providence le
Seigneur a décidé d’enseigner et avertir son peuple de plusieurs façons. Par un
commandement direct, par les écritures sacrées et par l’esprit de prophétie Il
leur a fait savoir sa volonté. Mon travail a été de parler simplement des fautes
et erreurs du peuple de Dieu. »101 A l'instar des auteurs bibliques : « J’ai
fidèlement mit devant eux leurs offenses et le moyen de les régler, selon les
instructions102 du Saint-Esprit. »103
Ainsi donc, le contrôle du Saint-Esprit ne se reflète pas seulement sur les
idées mais se révèle également dans la rédaction des textes sacrés, afin de
garantir que tous les faits sont présentés dans le texte. Quand nous lisons que
même les choses inconnues ou cachées104 sont révélées dans la Bible, cela
implique, de la part des auteurs bibliques, une démarche différente de celle
d’un simple historien. Le Saint-Esprit, par une action surnaturelle, a le rôle de
montrer aux auteurs bibliques ce dont ils n'avaient pas accès par des moyens
naturels. Les auteurs divins n’avaient pas le contrôle sur ce qui devait ou pas
apparaître dans la Bible ; elle raconte l’histoire vraie et complète.
101
Ellen WHITE, Testimony for the Church, vol. 26, p. 11. 102
Dans le texte original en anglais, l’auteur utilise le mot dictates. 103
Ellen WHITE, Testimony for the Church, vol. 26, p. 14. 104
Ibid., p. 10.
30
Nous pouvons donc conclure que le processus de l’inspiration biblique
décrit dans Bible Biographies est un processus dans lequel les auteurs sont
sous le contrôle du Saint-Esprit qui les emmène au-delà de leurs capacités
naturelles. Avec, quelques fois, des informations transmises par un moyen
surnaturel de la part de Dieu, leur objectif était de raconter objectivement et
véritablement l’histoire biblique. Ainsi, le mot «dicté» n’a pas une incidence sur
les paroles utilisées mais sur les événements racontés.
Conclusion
L’enquête que nous avons menée pour découvrir la pensée d’Ellen White
sur l’inspiration de la Bible ne nous a fourni qu’un seule texte utile à notre
recherche. Dans ce dernier, elle décrit le processus de l’inspiration par le mot
«dicté». Notre analyse nous a montré que l’action du Saint-Esprit implique un
contrôle strict sur les auteurs bibliques. Néanmoins, ce contrôle agissait sur la
rédaction des événements décrits, sur la fidélité des choses racontées et non
pas sur les paroles utilisées. De plus, rien dans le contexte de ce document ne
nous amène à conclure que ce contrôle était aussi présent dans le choix des
mots. Cependant, il nous est difficile d'imaginer comment garantir ce contrôle
sur la véracité absolue des événements sans qu'il n'existe aucun rapport sur les
mots choisis pour les raconter.
Même si ce texte reste pertinent sur la manière dont Ellen White utilise
«dicté» et l’expression «aucun contrôle sur le travail réalisé», pour exprimer sa
pensée, il ne nous permet pas d’avoir une notion claire sur l’inspiration biblique.
De la même façon, ce texte mis à part, nous n’en avons pas d’autres dans
lesquel elle explique et développe sa pensée sur notre sujet. Par conséquent,
nous ne pouvons pas préciser quelle était sa vision sur l’inspiration biblique
avant la rédaction du fameux manuscrit 24 de 1885.
Le fait que nous n’ayons pas une image claire de sa pensée avant 1885
ne nous permettra pas d’évaluer en détail de quelle manière Calvin Stowe a pu
l’influencer sur ce sujet. Néanmoins, nous avons pu constater que le manuscrit
24 est le premier texte d’Ellen White dans lequel elle traite de ce thème de
manière beaucoup plus détaillée. Ce fait valorise donc davantage son
importance par rapport aux autres textes relatifs à ce thème.
31
Le contexte historique du Manuscrit 24
L’absence de textes qui traitent de l’inspiration biblique avant 1886 nous
amène à être plus sensibles encore au contexte historique de ce manuscrit ;
des événements qui ont marqué la vie d’Ellen White mais aussi le vécu de
l’Eglise adventiste à cette époque. Nous allons étudier spécifiquement les
années 1883-88 et prendre en considération les événements et les conditions
qui ont influencé sa rédaction. Pour répondre à cette question, il est nécessaire
de nous replonger dans la période 1883-88, époque marquée par la discussion,
au sein de l’Eglise adventiste, sur l’inspiration biblique.
En 1883, la décision prise par la Conférence Générale de rééditer, avec
des corrections, la collection Testimony for the Church d’Ellen White provoque
un temps de réflexion entre les principaux responsables de l’Eglise de l’époque.
L’année 1888 est marquée par la publication d’une nouvelle édition de la
Tragédie des siècles, ouvrage retravaillé pendant les années précédentes.
L’importance de cet événement pour notre problématique vient de l’ajout d’une
introduction qui reste le premier texte publié par Ellen White dans lequel elle
traite la question de l’inspiration biblique de manière aussi détaillée.
Cependant, avant d’étudier cette période, il nous est nécessaire de
comprendre quelle était la notion de l’inspiration biblique défendue par la
majorité des membres de l’Eglise adventiste avant l’année 1883. Ainsi, nous
pourrons plus aisément comprendre les enjeux de la décision prise par la
Conférence Générale, les répercussions que cette décision aura dans les
années suivantes mais également l’importance du manuscrit 24 en contraste
avec cet arrière-plan.
Les conceptions sur l’inspiration de la Bible parmi les Adventistes avant 1883
Le seul livre adventiste publié durant cette période et abordant la
question de l’inspiration biblique était un livre écrit par le pasteur adventiste
Moses Hull, The Bible from Heaven, en 1863. En 1878 il sera amélioré et publié
à nouveau en collaboration avec l'auteur Dudley Canright, lui aussi pasteur
32
adventiste105. L’objectif de ce livre était de répondre aux objections des non
chrétiens sur la Bible.
Dans ce livre, Canright ne présente pas sa vision sur l’inspiration de
façon systématique, mais quelques citations nous permettent de conclure de
l’importance des mots dans sa conception : « c’est un fait indiscutable que notre
Bible est traduite directement à partir de paroles originales qui ont été écrites
par le moyen de l’inspiration.» Nous pouvons donc conclure, à partir de cette
affirmation de l’auteur, que les traductions sont fiables, non parce qu’elles ont
traduit la pensée de l’auteur biblique, mais parce qu’elles ont été traduites
directement des mots originaux. Dans un autre texte notre auteur déclare:
« Alors quelle est la volonté de Dieu en ce qui nous concerne ? Qu’est-ce qui lui est agréable ? (…) Comment pouvons-nous apprendre sur ces sujets si importants ? Nous devons avoir une révélation directe de Dieu qui répondra à toutes ces questions. De cette façon il peut nous dire clairement sa volonté, et nous déclarer notre devoir et notre destinée. Sans cela, nous sommes complètement dans l'ignorance. (…) Seuls quelques mots venus directement du ciel peuvent tranquilliser notre conscience sur ces choses
106.»
Un des points remarquable dans ce texte, à part l’emphase sur les mots
qui étaient déjà présents dans le texte antérieur, c’est cette notion de la Bible
venant « directement du ciel ».Pour Canright seul un texte ayant Dieu comme
auteur unique, donc une inspiration verbale, est suffisant pour répondre aux
besoins de l’Humanité107.
Un autre moyen au travers duquel les adventistes ont montré leur
opinion était le Review and Herald. Une recherche sur les archives de cette
revue108 nous a permis de constater quelques résultats intéressants.
L’utilisation d' «inspiration» comme terme de recherche a donné une quantité
ingérable de textes à étudier. Par conséquent, nous avons utilisé les termes «
thought inspiration », « verbal inspiration» et «biblical inspiration». En ce qui
concerne le terme «thought inspiration», il n’apparait qu’à partir de 1928. Les
105
Nous n’avons pas eu l’occasion de trouver un original de Hull, c’est pour cela que nous présentons seulement des citations de l’ouvrage de Canright. 106
Dudley CANRIGHT, The Bible from Heaven. A Summary of Plain Arguments for the Bible and Christianity, Battle Creek, Seventh-Day Adventist Publishing Association, 1878, p. 57. 107
Quelques années plus tard, en 1888, il publie un ouvrage où il renonce l’adventisme. Parmi les critiques qu’il fait se trouve son opposition au ministère d’Ellen White. Cette opposition est due à sa conception verbale de l’inspiration. Nous allons étudier cet ouvrage plus en détail un peu plus loin. 108
Cette recherche a été réalisée en utilisant le moteur de recherche disponible sur le site hébergeant les archives : http://docs.adventistarchives.org/documents.asp?CatID=27.
33
résultats pour les deux autres termes seront présentés plus loin. Par exemple :
en 1879 un auteur affirme : « Ce que Job, David, Esaïe et tous les prophètes
ont témoigné sur la résurrection n’est pas simplement leur propre langage mais
cela a été dicté par le Saint-Esprit et écrit pour notre instruction»109. Un auteur
anonyme en 1881, critique un adversaire de l’inspiration verbale de la Bible110.
De la même manière en 1882, Charles Lewis écrit : «c’est difficile (…) de
comprendre comment les auteurs d’un livre pouvaient être inspirés mais pas le
livre lui-même. Sans doute, il affirme là, qu’il ne croit pas à l’inspiration
verbale.»111
Dans la même lignée, dans la revue The Signs of the Times en 1880,
une republication d’un article apparu à l'origine dans le Christian Union - un
journal religieux sans dénomination - nous trouvons : « Ils (les auteurs
bibliques) ont été inspirés de façon différente d’une inspiration avec des
pensées sacrées, motivations et actions que le Saint-Esprit met dans l’âme du
croyant.» Toutes ces affirmations nous montrent une prédominance, au sein de
la communauté adventiste, de l’inspiration verbale de la Bible112.
Entre 1844 et 1883, les pionniers adventistes n’étaient pas concernés
par une notion précise de l’inspiration même s’ils ont eu besoin de défendre et
de renforcer l’autorité biblique par quelques affirmations. Néanmoins, l’Eglise
dans sa globalité, avait une vision infaillible de la Bible dans laquelle
l’inspiration empêchait la présence d’erreurs et de contradictions113.
109
Charles STONE, «The Ressurection», Review and Herald 54 (1879/4), p. 25. 110
s.a., «The New Version», Review and Herald 58 (1881/1), p. 9. 111
Charles LEWIS, «Mr. Beecher’s Latest Sensation» Review and Herald 59 (1882/4), p. 692-693 112
De la même façon, Alberto Timm affirme : « Que les Adventistes du Septième Jour regardaient les Écritures comme infaillibles est évident par la publication, sans critique, dans la Review and Herald des portions de textes des auteurs non adventistes qui défendaient cette vision.» Parmi les auteurs republiés nous trouvons Louis Gaussen et son ouvrage Theopneustia qui, comme nous l’avons déjà étudié, défendait une inspiration verbale de la Bible. Gilbert Valentine, lui aussi, affirmait que l’ensemble de la communauté adventiste, pendant la période que nous étudions, défendait, à quelques exceptions près, une inspiration verbale de la Bible. Pour plus d’informations, voir : Alberto TIMM, «A History of Seventh-day Adventist Views on Biblical and Prophetic Inspiration (1844-2000)», p. 486-542. Gilbert VALENTINE, W.W. Prescott. Forgotten Giant of Adventism’s Second Generation, Hagerstown, Review and Herald, 2005, p. 282. 113
Alberto TIMM, «A History of Seventh-day Adventist Views on Biblical and Prophetic Inspiration (1844-2000)», p.488. Timm remarque l’utilisation des citations de plusieurs auteurs qui défendaient cette notion dans la Review & Herald comme base de cette affirmation. Un des
34
Les années 1883-88
À partir de l’année 1883, les plus grandes crises vécues dans
l’adventisme de cette époque sont très étroitement liées aux notions de
l’inspiration, non seulement biblique, mais aussi dans l’application faite de cette
vision au sujet du ministère prophétique d’Ellen White.
En effet, ces années sont marquées par deux travaux de révision sur des
ouvrages d’Ellen White, où le langage sera corrigé. Le premier concerne la
révision des Testimonies114 qui sera introduite officiellement par la Conférence
Générale avec une déclaration de l’Eglise au sujet de l’inspiration. Cette
révision a engendré d’énormes problèmes pour ceux qui croyaient à une
inspiration verbale de la Bible et a engagé par la suite une discussion sur la
nature de l’inspiration.
La deuxième crise s’inscrit dans la révision du livre The Great
Controversy. La deuxième édition sera publiée en 1888, avec une introduction
qui est le premier texte publié par Ellen White dans lequel elle développe le
thème de la nature de l’inspiration et qui reste aujourd’hui encore une des
affirmations classiques sur ce sujet.
La révision des Testimonies
Une des crises vécues dans l’adventisme concerne la décision de la
révision d’une série d’ouvrages d’Ellen White appelés Testimonies à l’occasion
de la nécessité d’une réédition. Cette décision, prise en novembre 1883, verra
une grande contestation naître dans l’Eglise adventiste. Cette résolution affirme
que :
«Considérant que plusieurs de ces Testimonies ont été écrits dans des circonstances très défavorables, l’auteur étant en période de grande anxiété et de travail pour optimiser ses capacités critiques et ses compétences grammaticales. De plus, ils ont été publiés précipitamment telle célérité faisant que des imperfections sont passées sans être corrigées ; et –
Considérant que, nous croyons que la lumière donnée par Dieu à ses serviteurs se fait par l’illumination de l’esprit, en communiquant ainsi des pensées, et non (sauf rares
auteurs cité, Louis Gaussen, analysé dans notre première partie, est caractérisé par une inspiration verbale. 114
Le Testemonies est une collection d’ouvrages publiés par Ellen White constituée de lettres, d’articles, de prédications, de visions et d’autres textes destinés aux membres de l’Eglise adventiste. Pour plus d’informations, voir : George KNIGHT, «Ellen G. White’s Writtings» in Denis FORTIN (éd.), Jerry MOON (éd.), The Ellen G. White Encyclopedia, Hagerstown, Review and Herald, 2013, p. 126-129.
35
exceptions) les propres mots avec lesquels les idées devaient être exprimés ; pour ces raisons –
Résolu, la republication de ces volumes avec les changements linguistiques afin d’enlever ces imperfections, dans la mesure du possible, sans changer d’aucune manière la pensée de l’auteur.
115»
Comme dans le milieu adventiste l’inspiration biblique était étroitement
liée à l’inspiration du ministère d’Ellen White, cette décision apportera de graves
conséquences à qui défendait une influence verbale de la Bible. Le fait est que,
dans cette résolution, la Conférence Générale défendait l’action de Dieu qui se
concentrait sur les pensées en admettant même l’existence des erreurs
grammaticales. Ces affirmations étaient problématiques par ce qu’elles
attachaient l’autorité divine aux paroles inspirées de la Bible. Comme nous
l’avons vu dans l’inspiration verbale, l’autorité biblique advient du fait que c’est
Dieu lui-même qui choisit les mots pour garantir une parfaite transmission de sa
pensée. Ainsi, l’autorité d’Ellen White était due au même contrôle, de la part de
Dieu, sur ce qu’elle écrivait ou disait. Cette admission des erreurs dans les
écrits d’Ellen White les amenaient à réfléchir de la même façon sur de possibles
erreurs grammaticales dans la Bible. Cette dernière vision semblait être
impossible parce que c’était Dieu qui, personnellement, avait choisi les mots, et
Dieu ne commet pas des fautes.
À la suite de cette décision, l’opposition de ceux qui croyaient à une
inspiration verbale a freiné le travail de republication116. Une lettre envoyée par
Ellen White à Uriah Smith, en février 1884, nous montre jusqu’à quel point le
problème avait entraîné des dégâts : « On a reçu l’information de Battle Creek
que le travail fait sur les Testimonies n’est pas bien accepté. […] Je ne peux
pas voir cette situation de la même façon que mes frères la voient. Je pense
115
s.a., « General Conference Proceedings », Review and Herald 60 (1883/47), p. 741-742. 116
Pour plus d’informations sur l’opposition à la révision des Testemonies, voir : Allen THOMPSON, Inspiration. Hard Questions Honest Answers, Hagerstown, Review and Herald, 1991, p.273-276 . Jerry MOON, W.C.White and Ellen White. The Relationship Between the Prophet and Her Son, Andrews University Seminary Doctoral Dissertation Series 19, Berrien Springs, Andrews University Press, 1993, p. 122- 129. Denis FORTIN, «Testemonies for the Church (PPPA, RHPA, 1885-1909)», in Denis FORTIN (éd.), Jerry MOON (éd.), The Ellen G. White Encyclopedia, Hagerstown, Review and Herald, 2013, p. 1212-1214.
36
que les changements amélioreront le livre. Si nos ennemis en profitent, qu’ils le
fassent.117»
Ces tensions que nous venons de décrire, auront pour conséquence de
révéler différents courants de pensées dans l’Eglise adventiste sur l’inspiration
biblique. Quelques-uns défendaient d'un côté une vision verbale de l’inspiration
comme nous l’avons déjà pointé. Ce groupe s’est immédiatement opposé à la
révision des ouvrages d’Ellen White. De l’autre côté, un groupe - George Butler
à sa tête- soutenait une inspiration par degrés dans la Bible et dans le ministère
d’Ellen White118.
C’est en opposition avec la notion de l’influence verbale de la Bible qu’il
va publier, en 1884, une série d’articles qui défendra une notion d’inspiration
«par degrés» :
« Dieu n’a pas toujours inspiré les hommes de la même façon, d’où les degrés, mais il a diversifié ses méthodes.[…] Si ces positions sont correctes, c’est évident qu’il y a des degrés d’inspiration variés ; c’est-à-dire, que le Seigneur a donné à quelques-uns des auteurs de la Bible beaucoup plus de lumière qu’à d’autres, et ce, de manière plus directe donc plus claire
119»
Ce que Butler défend dans ces articles c’est une hiérarchie, parmi les
textes bibliques, de portion de textes qui devait posséder plus d’autorité que
d’autres à cause de cette gradation de l’inspiration. Cette pensée devait,
forcément, s’appliquer au ministère d’Ellen White :
« Nous croyons aussi que Dieu nous donne de la lumière à notre époque au travers de l’esprit de prophétie parmi son peuple. Nous croyons que les mêmes caractéristiques lui sont attribuées comme pour ceux qui avaient des visions anciennes. (…) Nous trouvons aussi la même nécessité de faire très attention à ne pas négliger les lumières importantes ni d’arriver à des conclusions erronées
120.»
117
Ellen WHITE, Selected Messages, vol. 3, Hagerstown, Review and Herald, 1980, p. 96-98; tiré de la lettre 11, 1884. 118
En 1883, Uriah Smith était convaincu que les écrits d’Ellen White étaient un exemple de cette inspiration. Ils n’auraient pas tous le même degré d’inspiration ou d’autorité. A cause de l'affirmation de cet homme en lien avec les articles de George Butler qui apparaissent en 1884 et le fait que tous les deux étaient très proches, il semble probable qu’il y ait un lien entre ces deux événements d’autant plus que Smith et Butler seront les leaders de la faction de l’adventisme qui opposera Ellen White à la Conférence Générale de 1888. Pour en savoir plus, voir : Frank HASEL, «Inspiration, Degrees of», in The Ellen G. White Encyclopedia, p. 895-897. Emmet VANDE VERE, Rugged Heart. The Story of George I. Butler, Nashville, Southern Publishing Association, 1979, p. 62-67. 119
George BUTLER, « Inspiration », Advent Review and Sabbath Herald, 61 (1884/3), p. 41. 120
George BUTLER, «Inspiration.- NO. 10», Advent Review and Sabbath Herald, 61 (1884/23), p. 361-362.
37
Un petit article, dans la Review and Herald, remarque que les documents
de Butler sur l’inspiration sont une bénédiction pour la précision de ce point de
la foi adventiste121. La position défendue par Butler dans ses articles aura une
grande répercussion dans les années qui suivent la publication de ses
documents122.
La révision du The Great Controversy
Entre 1885 et 1887, Ellen White fera un voyage en Europe dans le but
d’aider l’effort d’évangélisation engagé depuis 1864. Pendant cette période, elle
aura l’opportunité de faire des conférences, de prodiguer des conseils et d’aider
l’organisation de l’Eglise adventiste en Europe123. Elle aura également le
privilège de travailler sur une nouvelle version du volume 4 de la série The
Spirit of Prophecy. Cette version retravaillée sortira en 1888 avec le nom The
Great Controversy, faisant partie d’une nouvelle série d’ouvrages appelés
Conflict of the Ages124.
Cette version comportera un ajout très important par rapport aux éditions
précédentes. Ellen White profitera de cette occasion pour rédiger une
introduction, écrite en mai 1888 tout de suite après sa rentrée d’Europe, dans
laquelle elle développera sa pensée sur l’inspiration biblique125. Ce point est
important par rapport à notre manuscrit 24 parce que, même s’il a été écrit par
Ellen White en 1885, il ne sera publié qu’en 1954 dans le premier volume des
Messages Choisis.
L’importance de ce texte face aux positions avancées dans le milieu
adventiste de cette époque ne doit pas être atténuée. Au contraire des autres
adventistes, Ellen White défend dans l’introduction du Great Controversy que :
«Par le Saint-Esprit, l’être infini a illuminé le cœur de ses serviteurs. Il leur a
donné des songes, des visions, des symboles et des images tout en leur
121
s.a., s.t., Advent Review and Sabbath Herald, 61 (1884/10), p. 160. 122
George KNIGHT, Angry Saints. Tensions and Possibilities in the Adventist Struggle Over Righteousness by Faith, Hagerstown, Review and Herald, 1989, p. 85-89. 123
Daniel HEINZ, «Europe», in The Ellen G. White Encyclopedia, p. 810-813. 124
Denis FORTIN, «Great Controversy Between Christ and Satan, The», in The Ellen G. White Encyclopedia, 2013, p. 847-850. 125
Herbert DOUGLASS, Messenger of the Lord, p. 446-449.
38
laissant la liberté d’exprimer la vérité dans leur propre langue126.» Comme nous
pouvons le remarquer, Ellen White défend une action de Dieu qui n’agit pas sur
les mots choisis par l’auteur. La Bible est comparable à Jésus, dans sa double
nature, « où la vérité s’exprime dans le langage des hommes et nous offre une
union étroite de la divinité avec l’humanité127». Dans ce processus, un auteur
biblique a été « spécialement frappé par l’aspect du sujet se rapportant à son
expérience ou à sa capacité de compréhension128». Nous venons de le voir
pour Ellen White comme pour la rédaction de la Bible, l’auteur biblique participe
activement à la réflexion et à la compréhension des sujets traités et non
uniquement dans le choix des mots. Même si Dieu a une capacité bien
supérieure aux auteurs bibliques pour exposer ses vérités, elles restent
confiées à des «vases de terre», unis par une unité intérieure.
D’un côté, Ellen White préserve le caractère pleinement divin et donc
autoritaire de toute la Bible, en opposition à la notion défendue par George
Butler. De l’autre, elle défend aussi le caractère pleinement humain de cette
même Bible, en valorisant les contributions individuelles des différents auteurs
humains; des hommes qui ont apporté leur participation personnelle à
l’ensemble de la Bible.
Conclusion
Après ce premier chapitre dédié à la contextualisation du manuscrit 24
de 1885 écrit par Ellen White, nous avons pu constater que la plus grande
partie de la communauté adventiste défendait une inspiration verbale de la
Bible avant 1883. Dans cette même année, avec la décision de corriger les
erreurs grammaticales des Testemonies, basée sur une notion de l’inspiration
qui agit sur les pensées, l’Eglise adventiste commence à discuter la nature de
l’inspiration divine. Cependant, les implications de ce débat par rapport à la
Bible et au ministère d’Ellen White, amèneront Georges Butler, président de la
Conférence Générale, à proposer une nouvelle notion «par degrés».
126
Ellen WHITE, La Tragédie des Siècles, 8e éd. (1
re éd. 1926), Dammarie les Lys, Éditions Vie
et Santé,1983, p. 10. 127
Ellen WHITE, La Tragédie des Siècles, p. 10. 128
Ibid., p. 11.
39
Depuis le début de son ministère, Ellen White reste en silence dans ses
publications par rapport à ce sujet, même durant cette période de tensions au
sein de l’Eglise adventiste. C’est seulement en 1888, avec l’introduction du The
Great Controversy, qu’elle publie le premier texte dans lequel elle développe sa
pensée sur l’inspiration biblique en se démarquant des notions du milieu
adventiste. En effet, c’est dans ce même contexte que le manuscrit 24 est écrit
par Ellen White, au moment de ce débat sur l’inspiration biblique, mais avant la
publication du The Great Controversy. Ce point doit davantage valoriser le
manuscrit 24, d’autant plus qu’avant sa rédaction, nous n’avons pas d'autres
écrits d’Ellen White qui traitent de ce sujet si profondément.
C. Introduction à l’ouvrage de Calvin Stowe
Calvin Stowe était un théologien, professeur et éducateur américain.
Hormis ces aspects professionnels, nous n’avons pas de point pertinent le
concernant et en lien avec notre problématique de l’inspiration biblique. Nous
n’avons pas non plus d’éléments à présenter pour compléter le contexte
historique de son ouvrage comme nous l’avons fait pour Ellen White.
Il est cependant nécessaire de poser le contexte littéraire de ses idées
par rapport à l’ensemble de son livre et, en particulier, du premier chapitre.
C’est cette présentation de l’ouvrage qui nous permettra d’analyser comment
ses pensées sur l’inspiration biblique s’articulent avec le reste de son œuvre.
Aperçu générale du livre
Une analyse de l’ouvrage de Calvin Stowe au niveau de sa structure
nous a permis de constater qu’il se divise en deux grandes parties. La première
est constituée par les quatre premiers chapitres dans lesquels il établit les
principes de base pour le reste de son ouvrage comme : la nature de la Bible,
les évidences qui prouvent la véracité de la Bible et les biographies d’anciens
témoins qu’il utilisera dans le reste de son ouvrage. Dans la deuxième partie,
du chapitre cinq au chapitre quatorze, il présente les différents livres du
Nouveau Testament et les évidences de leur véracité en opposition aux livres
apocryphes en démontrant pour quelles raisons ils ne méritaient pas de faire
partie du canon biblique. Dans cette structure, nous ne sommes concernés que
40
par le premier chapitre de son livre qui traite spécifiquement de la question de
la nature et de l’inspiration de la Bible.
Stowe affirme dans sa préface que le livre possède un double objectif :
d’un côté il prétend démontrer et vérifier l’authenticité des livres du Nouveau
Testament et, de l’autre, il prétend dévaloriser les prétentions des livres
apocryphes à intégrer le canon du Nouveau Testament.
La manière qu’il utilise pour atteindre ses objectifs se base sur la
vérification de la chaîne de témoins qui justifie l'autorité et l'origine des auteurs
apostoliques. Par contre, dans le cas des livres apocryphes, leur absence du
canon biblique se trouve dans la vérification d'au moins un des critères
suivants: ils n’ont pas une origine apostolique, il est prouvé qu’ils sont une
falsification ou qu’ils aient été écrits par un auteur qui n’avait pas une autorité
apostolique.
Même si ce n’est pas le seul ouvrage portant cet objectif, il se distingue
des autres du fait que son public est composé par des laïques et des pasteurs
d’Eglises intéressés par ce sujet. Pour cette raison, Stowe s’est efforcé de
rédiger l’ouvrage dans un langage simple, clair et adapté à la société de son
époque.
Résumé du premier chapitre
Le premier chapitre a pour titre: « The common popular objections to the
Bible at the present day. What the Bible is not, what it is, and how to use it ».
Son objectif est d’établir la nature de la Bible en redéfinissant les concepts
initiaux de ceux qui veulent lire et étudier la Bible et, dans le même temps,
répondre aux objections communes des critiques.
Pour atteindre son objectif, Stowe présente huit éléments parmi lesquels
quelques-uns se centrent sur l’inspiration des livres bibliques. En premier lieu, il
commence par expliquer que la valeur de la Bible est due au plan du salut
présenté dans ses pages. Le pouvoir de la Bible se présente quand elle n’est
41
pas utilisée comme une relique mais lorsqu'elle s'inscrit dans un processus
dynamique avec les valeurs qu’elle présente129.
En deuxième lieu, il émet l'idée que la Bible était écrite durant une
longue période de temps, par plusieurs personnes, avec différents styles de
rédaction. C’est pour cette raison qu’elle dénote d'une harmonie extérieure très
faible130. Néanmoins, la véritable unité biblique se trouve dans le domaine
spirituel. Une uniformité qui est le résultat d’une idée générale : la rencontre
entre Dieu et l’homme131. Cette «idée», qui est le plan du salut pour toute
l’humanité, traverse toute l’écriture et permet d’harmoniser les diverses
rédactions en transformant les différentes parties de la Bible en un ouvrage
unique, où l’ensemble est plus grand que la somme de ses composants132.
Ainsi, la Bible détient son autorité de l’authentification de l’ensemble et non pas
de chaque partie individuelle133.
En troisième lieu, notre auteur présente le problème inhérent aux
langages humains qui sont naturellement imparfaits et limités : « La Bible n’a
pas été donnée dans un langage céleste ou surnaturel. (…) Mais chaque
langage humain est, de par sa propre nature, un langage imparfait »134.Il
continue en précisant que cette défectuosité est démontrée dans la pluralité de
sens qu’un mot peut avoir. Ainsi, chaque personne donne à chaque parole sa
couleur particulière, fruit de son éducation, de son tempérament, de ses modes
et de ses pensées135. Même si, pour des raisons pratiques, le langage humain
est suffisamment fonctionnel pour un usage courant136, quelques fois il est
difficile de comprendre pleinement le message biblique : «(…) présuppositions,
préjugés et inclinations personnelles contribuent à confondre l’esprit humain
dans sa lecture de la Bible137».
Ces constats nous amènent au point suivant qui suggère que la Bible
n’est pas le produit de Dieu comme auteur ou éditeur : « La Bible n’est pas un
129
Calvin STOWE, Origin and history of the books of the Bible, p. 11. 130
Ibid., p 14. 131
Ibid., p. 13. 132
.Ibid., p. 14. 133
Ibid., p. 15. 134
Ibid., p. 15. 135
Ibid., p. 17. 136
Ibid., p. 17. 137
Ibid., p. 18.
42
exemple de la capacité de Dieu comme auteur en nous montrant son mode de
penser, ni son raisonnement, ni sa rhétorique, ni son style de narration
historique.138 » En effet, l’action du Saint-Esprit agit sur l’homme et non pas sur
ses paroles ou ses pensées. L’auteur biblique «non de sa propre initiative mais
sur l’impulsion divine a créé certaines idées qu’il a exprimé en utilisant certaines
paroles139». Il y a dans la Bible une coopération étroite entre le divin et l’humain
et c’est cette coopération qui nous permet de dire que la Bible est la parole de
Dieu140. La plupart des objections à la Bible, peuvent être expliquées par une
culture différente de la nôtre et par l’existence du mal. Et même si la Bible
présente des sentiments et des attitudes moins nobles de la part des hommes
« saints », elle ne les présente pas comme des modèles à suivre, bien au
contraire. La révélation est progressive à tous les niveaux de la vie humaine,
elle chemine vers la maturité141.
En revenant sur les concepts de base pour l’étude de la Bible, notre
auteur défend dans son cinquième point, que la Bible n’est pas un traité
systématique et structuré, mais qu'elle s’ajuste à tous les siècles et à tous les
publics. Cette adaptation est présente précisément parce qu’il manque une
planification structurée. Elle fait appel à ce qui est le plus naturel de notre
existence : nos émotions142.
Sixièmement, Stowe explique comment la Bible arrive à avoir toute
l’humanité comme public cible. Même si elle est le fruit d’une époque très
spécifique, la Bible réussit à dépasser ces limitations et à présenter les grands
principes qui sont communs à toute l’humanité en s’exprimant d’une façon
assez simple pour une compréhension universelle : « c’est remarquable comme
la Bible aborde des aspects locaux et temporaires tout comme elle saisit les
grandes principes de vie qui sont communs à la nature humaine143».
Le septième point énonce l'idée que la Bible ne possède pas toutes les
réponses à nos questions essentielles mais qu'elle fait néanmoins appel à notre
138
Calvin STOWE, Origin and history of the books of the Bible, p. 18. 139
Ibid., p. 19. 140
Ibid., p. 18. 141
Ibid., p. 21. 142
Ibid., p. 22. 143
Ibid., p. 24.
43
foi en présentant Dieu comme quelqu’un digne de confiance à cause de sa
bonté, de sa sagesse et de son pouvoir. Cette foi doit exister avec les doutes et
non parce qu’ils n’existent pas : «Nous pouvons toujours avoir la foi mais la
connaissance n’est quelques fois pas disponible 144».
Dans le dernier point présenté, Stowe déclare que le seul objectif de la
Bible est de montrer le plan du salut, « comment échapper au mal dans lequel
nous sommes plongés et être plutôt réunis dans la paix et la joie avec Dieu145».
La Bible n’a pas été et n’est pas conçue comme un traité scientifique. Même si
elle fait référence à des phénomènes scientifiques, une confrontation entre la
Bible et la science n’est pas possible parce que la Bible n’a pas la prétention
d’être une référence scientifique « Ne cherchez pas dans la Bible ce qu’il n’a
pas mis »146. Notre compréhension de la Bible n’est pas uniforme, en raison de
sa complexité147. Nous pouvons approfondir cette connaissance avec l’étude, la
révérence et la prière148.
Cette présentation des idées de Stowe sur l’inspiration biblique dans
l’ensemble de son œuvre nous montre qu’elle n’est pas systématique de ses
pensées sur le sujet. Son objectif est de démontrer l’authenticité de la Bible au
plus grand nombre possible et, c’est dans ce sens que notre auteur développe
sa notion sur l’inspiration biblique, ce, afin d’argumenter contre quelques
objections faites à la Bible. De la même façon, nous pouvons conclure que
nous ne sommes concernés que par le premier chapitre de son livre. C’est ici
qu’il développe ces notions sur l’inspiration biblique et c’est ce chapitre que
nous devons analyser et comparer au manuscrit 24.
Il est intéressant de remarquer que Calvin Stowe et Ellen White se
rapprochent dans l’utilisation d’un langage simple et accessible, ainsi que dans
l’absence d’une présentation systématique de leur pensée par rapport à
l’inspiration biblique, bien que les deux ouvrages possèdent des objectifs tout à
fait différents. En effet le texte d'Ellen White se distingue de celui de Stowe
144
Calvin STOWE, Origin and history of the books of the Bible, p. 25. 145
Ibid., p. 29. 146
Ibid., p. 32. 147
Ibid., p. 35. 148
Ibid., p. 37.
44
dans la mesure où son texte faisait partie de son journal personnel. L’ouvrage
de Calvin Stowe, quant à lui, était un livre publié.
D. Conclusion
Comme les résultats de notre recherche nous l’ont montré, avant la
rédaction du manuscrit 24 en 1885, il y avait une absence d'ouvrages dans
lesquels Ellen White développait sa pensée sur l’inspiration biblique. Nous
avons trouvé un texte intéressant mais qui reste très insuffisant pour arriver à
une réponse satisfaisante sur sa compréhension de la Bible. Par conséquent, le
manuscrit 24 doit être mis en évidence, comme premier texte écrit par Ellen
White sur le sujet, même s’il n'a été publié qu’après son décès.
La période dans laquelle elle rédigeait le manuscrit 24, l’Eglise adventiste
discutait sur la nature de l’inspiration et sur ses implications. En 1888, notre
auteur publiait son premier texte sur l’inspiration biblique dans lequel elle
prenait une position qui contrastait avec les notions présentes dans le milieu
adventiste de l’époque. Par rapport aux analyses que nous avons faites, nous
pouvons nous poser la question de la relation entre le manuscrit et l’introduction
de The Great Controversy en 1888.
Dans la troisième partie qui nous attend, non seulement nous devrons
comparer notre manuscrit 24 avec l’ouvrage de Calvin Stowe - ce qui nous
permettra de voir si Calvin Stowe a contribué ou non à un possible
développement de sa pensée - mais nous devrons également observer
comment ce manuscrit se positionne face au texte d’Ellen White publié en
1888. Il nous sera nécessaire d'analyser comment il se positionne dans le
débat adventiste sur l’inspiration biblique de cette période.
46
A. Introduction
Après une première partie consacrée au cadre théologique dans lequel
nos auteurs étaient immergés, et une deuxième partie dédiée à quelques
éléments historiques et littéraires de leurs ouvrages, nous pouvons à présent
proposer une analyse sur leur notion de l’inspiration biblique. Cette troisième
partie a pour objectif primordial de préciser la pensée d’Ellen White dans le
manuscrit 24 afin de déterminer s’il existe une dépendance théologique en
rapport avec la pensée de Calvin Stowe. Si ce lien existe, nous aurons comme
but supplémentaire de l’évaluer en mettant en évidence les points de
convergence et de divergence entre eux.
Pour mener à bien la comparaison entre ces deux ouvrages, notre
troisième partie se divisera en deux chapitres. Le premier présentera les textes
et les comparera dans un cadre. Il proposera aussi une étude des similitudes et
des différences entre les deux écrits sur un plan littéraire, c’est-à-dire par
rapport aux mots et structures utilisés. Le deuxième chapitre concernera enfin
l’analyse des concepts théologiques présents dans les textes des auteurs, plus
spécifiquement en ce qui concerne l’inspiration biblique.
Avant d’aller plus loin, il est à noter que les deux rédactions étudiées ne
présentent pas la pensée des auteurs d’une façon définitive. Le manuscrit 24
faisait partie du journal personnel d’Ellen White ; il s’agissait donc un texte dans
son état brut. Ce détail est important parce que nous ne pouvons assurer qu’il
détenait la version finale de sa pensée sur le sujet de notre recherche. De la
même façon, nous devons prêter attention à Stowe : ce dernier ne parle de
l’inspiration biblique que dans l’introduction de son ouvrage. Par conséquent,
son objectif n’est pas de donner une présentation exhaustive du sujet ni d’en
expliquer tous les détails. Pour ces raisons, notre étude ne prétend pas être
une représentation définitive de leurs idées au sujet de l’inspiration biblique.
En ce qui concerne la relation entre les deux ouvrages, un effort a été
produit pour déterminer de quelle manière Ellen White a pu avoir accès à
l’ouvrage de Stowe. Le chercheur David Neff présente deux hypothèses pour
l’expliquer149 : soit Ellen White avait acquis cet ouvrage auparavant, ce qui reste
149
David NEFF, Ellen White’s Theological and Literary Indebtness to Calvin Stowe, p. 2.
47
plausible puisque ce livre faisait partie intégrante de sa bibliothèque personnelle
au moment de son décès ; soit elle a eu l’opportunité de lire Stowe grâce à la
bibliothèque de John Andrews en Europe150. À ces deux possibilités, nous
souhaiterions en présenter une troisième : parmi la correspondance qu’Ellen
White a entretenue pendant son séjour en Europe, elle mentionne qu’elle a pu
avoir accès à la bibliothèque personnelle d’Augustin Bourdeau151, un
missionnaire et pasteur adventiste. Il est intéressant de remarquer que cet
évangéliste était responsable de la mission en Italie, spécifiquement à Torre
Pellice, la même ville où Ellen White a écrit le manuscrit 24. Malgré de multiples
efforts, il ne nous a pas été possible de vérifier l’existence du livre de Stowe au
sein de cette bibliothèque personnelle ni d’avoir davantage d’éléments qui
permettraient de soutenir l’une des hypothèses de Neff qui expliquerait la façon
dont Ellen White aurait eu accès à l’ouvrage de Stowe.
Dans l’analyse que nous allons développer dans cette partie, deux outils
nous seront fort utiles : le premier est un cadre de comparaison. Ce dernier
présente les textes d’Ellen White et de Calvin Stowe et utilise différentes
couleurs dans le but de mettre visuellement en évidence les similitudes et les
différences entre eux, par rapport aux expressions et aux mots utilisés. Cette
approche nous permettra de remarquer plus aisément les éléments partagés
entre les deux ouvrages et d’analyser ces observations au premier sous-
chapitre. Deuxièmement, et après avoir noté l’emploi de quelques mots
importants différents de ceux de Stowe, nous allons utiliser un dictionnaire de
l’époque pour bien noter les différences et les nuances de choix d’Ellen White
en contraste avec les mots utilisés par Stowe.
B. Observation des textes
Objections to the Bible
«Il y a une grande variété d'esprits. Selon le niveau d'instruction et la formation intellectuelle, les mêmes mots font une impression différente. Il n'est pas facile à quelqu'un de communiquer à une personne de tempérament, d'éducation et d'habitudes mentales différents les pensées qui lui semblent claires et distinctes. Néanmoins cela peut suffire à une personne sincère et droite: les choses peuvent être exprimées avec assez de simplicité et de clarté pour tout usage pratique. Mais si l'on a affaire à quelqu'un de malhonnête, décidé à ne pas voir et comprendre la vérité, les paroles
150
John Andrews, pasteur adventiste, a été le premier missionnaire officiel de l’Eglise adventiste pour l’Europe. 151
Lettre 40, 1886.
48
dites seront détournées de leur sens naturel à l'avantage de l'individu. Celui-ci donnera une fausse interprétation aux paroles, dénaturera leur sens véritable, fera jouer sa propre imagination, puis se retranchera dans l'incrédulité, convaincu qu'on a cherché à le tromper.
Mes écrits ont subi un traitement analogue de la part de ceux qui désirent leur donner une fausse interprétation. Ils changent la vérité de Dieu en mensonge. Et tout comme ceux-ci traitent les écrits contenus dans mes articles et mes livres, les sceptiques et les incrédules traitent la Bible de la même manière. Ils la lisent bien décidés à la pervertir, à en faire une fausse application, à en détourner le sens. Ils affirment que l'on peut prouver tout ce que l'on veut par la Bible, que chaque secte se fait fort de prouver ses doctrines en invoquant son autorité, et que les doctrines les plus diverses peuvent être démontrées par la Bible.
La Bible a été écrite par des écrivains obligés de s'exprimer en un langage humain. C'étaient des hommes. Ils étaient inspirés par le Saint-Esprit. En raison de l'imperfection de l'intelligence humaine, ou de la perversité de l'esprit humain, toujours habile à s'évader loin de la vérité, il en est beaucoup qui lisent et comprennent la Bible conformément à leurs désirs. Ce n'est pas dans la Bible que se trouve la difficulté. Des politiciens discutent certaines lois constitutionnelles et en tirent des conclusions opposées.
Au lieu d'avoir été données aux hommes en une suite ininterrompue de déclarations, les Ecritures se sont enrichies pièce par pièce au cours de générations successives, chaque fois que la Providence divine jugeait utile de parler aux hommes en divers temps et en divers lieux. Les auteurs ont écrit selon qu'ils étaient mus par le Saint-Esprit. Il y a “d'abord le bouton, puis la fleur, ensuite le fruit”; “d'abord l'herbe, puis l'épi, puis le grain tout formé dans l'épi”. C'est exactement ce qui se passe en nous grâce à la Bible.
Les Ecritures ne manifestent pas toujours un ordre parfait ni une unité évidente. Les miracles du Christ ne sont pas relatés par ordre chronologique; ils sont présentés en rapport avec les circonstances qui ont commandé ce déploiement de puissance divine. Les vérités bibliques ressemblent à des perles cachées. Il s'agit de les chercher, de creuser le sol avec patience. Ceux qui s'arrêtent à la surface des Ecritures, n'en tirant qu'une connaissance superficielle qu'ils s'imaginent profonde, parlent des contradictions de la Bible et mettent en question son autorité. En revanche les cœurs qui vivent en harmonie avec la vérité et le devoir sonderont les Ecritures et seront prêts à recevoir des impressions divines. Une âme éclairée aperçoit une unité spirituelle, un long fil d'or courant à travers le tout; mais pour suivre ce précieux fil d'or il faut beaucoup de patience, de réflexion et de prière. D'âpres discussions au sujet de la Bible ont provoqué des recherches qui ont fait découvrir de précieux joyaux de vérité. Bien des larmes ont coulé, bien des prières ont été offertes, demandant au Seigneur de faire comprendre sa Parole.
La Bible ne nous a pas été donnée en un langage surhumain. Pour atteindre l'homme, Jésus a revêtu l'humanité. La Bible a dû être donnée en un langage humain. Or tout ce qui est humain est imparfait. Un mot peut avoir plusieurs significations; on ne trouve pas toujours un mot distinct pour exprimer une idée. La Bible se propose un but essentiellement pratique.
Les esprits portent des empreintes différentes. Tous ne comprennent pas de la même manière une expression ou une déclaration. Il en est qui comprennent les déclarations de l'Ecriture d'après leur mentalité et leurs désirs. Des idées arrêtées à l'avance, des préjugés, des passions contribuent puissamment à obscurcir l'entendement et à jeter la confusion dans l'esprit, même quand il s'agit de la lecture des Ecrits sacrés.
Les disciples qui se rendaient à Emmaüs avaient besoin d'être débarrassés de leurs fausses interprétations des Ecritures. Jésus chemina avec eux sans se faire connaître et leur parla en qualité d'homme. Commençant par Moïse et les prophètes, il
49
leur enseigna tout ce qui le concernait, montrant que sa vie, sa mission, ses souffrances et sa mort étaient conformes à ce que la Parole de Dieu avait prévu. Il leur ouvrit l'entendement et leur fit comprendre les Ecritures. Il lui fallut peu de temps pour remettre les choses au point et leur montrer l'unité et la véracité divine des Ecritures. Aujourd'hui les hommes ont bien besoin que leur entendement soit ouvert.
La Bible a été écrite par des hommes inspirés, mais ils n'ont pas employé un langage divin. Ils ont parlé le langage humain. Ce n'est pas Dieu qui a été l'écrivain. On dira souvent que telle expression ne sied pas à Dieu. Mais Dieu ne s'est pas exposé à notre jugement dans la Bible par des mots, de la logique ou de la rhétorique. Les écrivains de la Bible ont été les hommes de plume, non la plume même de Dieu.
Ce ne sont pas les mots de la Bible qui sont inspirés; ce sont les hommes. L'inspiration agit non pas sur les mots ou les expressions, mais sur l'auteur lui-même, à qui le Saint-Esprit communique des pensées. Quant aux mots, ils portent l'empreinte de l'individualité. L'Esprit divin se répand. Il s'unit à l'esprit de l'homme, si bien que les déclarations de l'homme sont la Parole de Dieu.
152»
The common popular objection to the Bible at the present day – What the
Bible is not, what it is, and how to use it.
«La Bible ne est pas une chaîne ininterrompue de livres, chapitres et versets, qui représente une série continue de paroles divines du début à la fin.
Ne cherchez pas une telle chose lors de votre lecture de la Bible, mais plutôt le contraire. Les écritures ont été données aux hommes peu à peu, au fil du temps, à la mesure que Dieu voyait les bonnes occasions - à plusieurs reprises et de plusieurs manières – c’est ce que dit la Bible d’elle-même; et pas tout à la fois, comme si vous devez avoir le bourgeon, les fleurs et les fruits, tous au même moment. L'analogie entre la nature et l’écriture, comme dans tout le reste, tient parfaitement. D'abord l'herbe, puis l'épi, et c’est après que le grain devient tout formé ; c’est ce que la Bible dit d’elle-même, et c’est bien cela que nous trouvons. Il y a peu d'unité extérieur dans la Bible, elle ne prétend pas à autre chose; vous ne devez nullement être secoués par les clameurs de ceux qui feraient de cette évidence une objection à l'autorité des Écritures. Ainsi, pourrait-on contester les miracles du Christ, et ajouter qu’ils ne sont pas données dans un ordre spécifique, en commençant avec le miracle le plus simple jusqu’au plus grand, ni avec un certain nombre de chaque type de miracle.
L’unité des écritures n’est pas externe, mais une unité interne, une unité spirituelle, l'unité d’une idée grandiose qui traverse l’ensemble, l’idée de réunir l’âme humaine avec Dieu, de qui elle a été si tristement séparé par le péché; à travers un processus continu de conflit et affliction.
153 »
«La Bible ne nous est pas donnée dans un langage céleste ou surhumain. Si cela avait été, elle n’aurait été d'aucune utilité pour nous, parce que chaque livre destiné pour les hommes doit lui être donnée dans le langage des hommes. Mais chaque langage humaine est, par nécessité et de sa propre nature, un langage imparfait. Aucun langage humain n’a un mot unique pour chaque idée distincte. Dans toute langue connue, le même mot est utilisé pour indiquer des choses différentes, et des mots différents sont utilisés pour indiquer la même chose. Dans tous les langages humains, chaque mot a plus d'un sens différent et chaque chose a généralement plus d'un nom.
154»
«Plus encore, les esprits humains sont différents dans les impressions qu'ils reçoivent du même mot; c’est sûr qu'un homme rarement donne à un autre, avec un
152
Ellen WHITE, Messages Choisies, vol 1, Dammarie les Lys, Vie et Santé, 2002, p.21-24 ; tiré du manuscrit 24, 1886. 153
Calvin Stowe, Origin and History, p.13 154
Calvin Stowe, Origin and History, p. 15
50
tempérament et éducation différentes, au travers du langage, exactement la même idée, avec la même forme et la même couleur, qui se trouve dans son propre esprit; Toutefois, si les hommes sont honnêtes et sensés, ils peuvent se rapprocher du sens voulu de l'autre, pour toutes questions pratiques.
Après, il y a l’objection que la Bible peut être utilisée pour tout dire et ne rien dire en même temps. C’est ce sur quoi toutes les sectes s’appuient : les doctrines les plus diverses peuvent être déduites. Ce malheur, elle le partage avec tout ce qui doit être exprimé dans un langage humain. Cette restriction est due à l’imperfection - défaut nécessaire du langage humain - et à la maladie et la perverse ingénuité de l’esprit humain. Ce n’est pas quelque chose de particulier à la Bible. Entendez deux avocats opposés qui soutiennent un point de la loi dans son application à un cas particulier. Écoutez deux politiciens contraires qui arguent en référence à la vraie intention d'une clause particulière dans la Constitution des Etats-Unis. N’y a-t-il pas là aussi une large place donnée à la diversité d'opinion et à l’opposition de raisonnement, comme dans l’interprétation d'un texte de l'Écriture, ou l'exactitude de n’importe quel point théologique? Pourtant, ces lois et les constitutions sont rédigées dans notre propre langue, en notre temps, tandis que la Bible nous est venue d'un autre siècle et en langues étrangères. Il suffit de penser que la Bible peut être comprise, et être si honnêtement étudiée, ainsi que toute constitution ou tout ensemble de lois peut être comprises. Ceci est suffisant à nos propos pratiques, et c’est pour des raisons pratiques que la Bible a été donnée.
Toutefois, préjugés et passions influencent abondamment et confondent les esprits des hommes quand ils lisent la Bible. Il ouvrit leurs compréhensions qu'ils pourraient comprendre les Écritures. Les hommes maintenant ont besoin d'avoir leur esprit ouvert
et rectifiés pour qu’ils puissent comprendre les Écritures.
IV. La Bible n’est pas un exemple de la compétence de Dieu comme écrivain, en nous montrant son mode de pensée, sa logique, sa rhétorique ou son style de narration historique. Combien de fois voyons-nous des hommes qui cherchant des passages isolés de l'Écriture, et en disant triomphalement que ces expressions sont indignes de Dieu, et qui ne pourraient pas être d’origine divine. Ces expressions sont maladroites, le mode de pensée est défectueux, illogique, de mauvais goût, le raisonnement n’est pas convaincant, le récit n’est pas fermement établi. Dieu ne se met pas à disposition pour un tel jugement dans la Bible, de même qu’avec la création, Il n’a pas promis que la Bible était toujours imprimée sur le meilleur des papier, avec le meilleur style et une parfaite absence d'erreurs typographiques, et qu'après son impression, les feuilles ne se seraient jamais déchirées, ni souillées, ni aucune de ses feuilles allez se perdre, ou que les apôtres et les prédicateurs doivent fréquemment être beau, avoir belle allure et possédant de beaux visages, sans aucune faute d’élocution. On doit toujours se rappeler que les auteurs de la Bible étaient « les écrivains de Dieu et non les stylos de Dieu ».
Ce ne sont pas les mots de la Bible qui ont été inspirés, ce ne sont pas les pensées de la Bible qui ont été inspirées; c’était les hommes qui étaient inspirés. L’inspiration n’agissait pas dans les mots de l’homme ni dans sa pensée, mais dans l’homme lui-même; De sorte qu’il, par sa propre spontanéité, sous l’impulsion du Saint-Esprit, conçoive certaines pensées et les exprime par certains mots, les paroles et les pensées reçoivent l’empreinte particulière de l’esprit humain qui les a conçues et exprimées, et lui appartiennent entièrement comme si l’inspiration n’avait pas eu de place La naissance et la nature du Christ offrent une illustration exacte. L'Enfant Jésus dans le sein de la Vierge, bien que né de Dieu sans un père humain, (comme il a été dit, «Le Saint-Esprit viendra sur toi et la puissance du Très-Haut te couvrira»), cet enfant vivait grâce à la vie de sa mère, il a grandi grâce aussi à sa mère. Participait de la nature de sa mère et était pleinement son enfant comme il aurait pu l’être si Joseph avait été son père, l'humain et le divin dans la jonction la plus intime et inséparable. C’est ce fait même de l'union combinée et inséparable de l'humain et le divin, qui constitue l'utilitaire, ce qui le rend adapté aux besoins des hommes, l'incarnation du Christ et le don des saintes écritures. L’inspiration est généralement une purification, une élévation et une intensification subjective de l’intellect humain, plutôt qu’une
51
suggestion et une communication objectives, bien que la suggestion et la communication ne soient pas exclues.
L’esprit divin est si diffus à travers l’esprit humain, et l’esprit humain si interpénétré par le divin, que pour l’instant les déclarations humaines sont la parole de Dieu.»
155
Cadre de comparaison entre les deux textes
Après ce regard sur les deux textes à étudier, nous allons maintenant
présenter un cadre qui nous permettra de comparer plus aisément les
documents d’Ellen White et de Calvin Stowe. La première colonne présente le
manuscrit 24 d’Ellen White tandis que la seconde expose les passages
correspondants que nous pouvons trouver dans le premier chapitre du livre de
Calvin Stowe. Ces deux colonnes sont organisées de façon à prévoir des
espaces supplémentaires afin de mettre en évidence les parties
correspondantes des deux textes côte à côte. Nous avons aussi utilisé des
différentes couleurs pour noter les divers degrés de proximité entre les textes,
dans l’usage des mots et des expressions, mais aussi des idées et des
concepts présentés :
Rouge - utilisation des mêmes mots importants dans la compréhension de la
pensée, ou utilisation verbatim des expressions ou des phrases.
Bleu – paraphrase stricte, où Ellen White change l’ordre des mots dans la
phrase, utilisation des synonymes ou des pluriels.
Jaune - paraphrase flexible où Ellen White transmet la même idée mais en
utilisant d’autres mots
Vert - simplification du matériel de Stowe
Gris – développement des idées de Stowe
Objections to the Bible Origin and History of the Books of the Bible
Human minds vary. The minds of different education and thought receive different impressions of the same words, and it is difficult for one mind to give to one of a «different temperament, education, and habits of thought by language exactly the same idea» as that which is clear and distinct in his own mind. Yet to honest
Moreover, human minds are unlike in the impressions which they receive from the same word; and it is certain that one man seldom gives to another, of «different temperament, education, and habits of thought, by language, exactly the same idea», with the same shape and color, as that which lies in his own mind; yet, if men are honest
155
Calvin Stowe, Origin and History, p. 17-19.
52
men, right-minded men, he can be so simple and plain as to convey his meaning for all practical purposes. If the man he communicates with is not honest and will not want to see and understand the truth, he will turn his words and language in everything to suit his own purposes. He will misconstrue his words, play upon his imagination, wrest them from their true meaning, and then entrench himself in unbelief, claiming that the sentiments are all wrong.
and right-minded they can come near enough to each other's meaning for all purposes of practical utility.
This is the way my writings are treated by those who wish to misunderstand and pervert them. They turn the truth of God into a lie. In the very same way that they treat the writings in my published articles and in my books, so do skeptics and infidels treat the Bible. They read it according to their desire to pervert, to misapply, to willfully wrest the utterances from their true meaning. They declare that the Bible can prove anything and everything, that every sect proves their doctrines right, and that the most diverse doctrines are proved from the Bible.
Here comes the in the objection that the Bible can be made to mean everything and anything, all sects build upon it, the most diverse doctrines are derived from it.
The writers of the Bible had to express their ideas in human language. It was written by human men. These men were inspired of the Holy Spirit. Because of the imperfections of human understanding of language, or the perversity of the human mind, ingenious in evading truth, many read and understand the Bible to please themselves. It is not that the difficulty is in the Bible. Opposing politicians argue points of law in the statute book, and take opposite views in their application and in these laws.
This infelicity it shares with everything else that has to be expressed in human language. This is owing to the imperfection, the necessary imperfection of human language, and to the infirmity and the perverse ingenuity also of the human mind. It is not anything peculiar to the Bible.
Hear two opposing lawyers argue a point of statute law in its application to a particular case. Hear two opposing politicians make their diverse arguments in reference to the true intent and force a particular clause in the United States Constitution.
The Scriptures were given to men, not in a continuous chain of unbroken utterances, but piece by piece through
The Bible is not one unbroken chain of books, chapters, and verse, representing one unbroken series of
53
successive generations,
as God in His providence saw a fitting opportunity to impress man «at sundry times and divers» places. Men wrote as they were moved upon by the Holy Ghost.
There is “first the bud, then the blossom, and next the fruit,” “first the blade, then the ear, after that the full corn in the ear.” This is exactly what the Bible utterances are to us.
divine utterances from beginning to end. Look for no such thing as this when reading the Bible, but rather the contrary. The scriptures were given to men piecemeal, throughout many ages, as God saw the right opportunities – «at sundry times and in divers» manners-
this is what the Bible says of itself; and not all at once, as if you must have bud, blossom and fruit, all in the same hour. The analogy here between nature and the word, as in everything else, holds perfectly. «First the blade, then the ear, and after that the full corn in the ear»; this is what the Bible says of itself, and is just what we find it to be.
There is not always perfect order or apparent unity in the Scriptures.
The miracles of Christ are not given in exact order, but are given just as the circumstances occurred, which called for this divine revealing of the power of Christ. The truths of the Bible are as pearls hidden. They must be searched, dug out by painstaking effort. Those who take only a surface view of the Scriptures will, with their superficial knowledge, which they think is very deep, talk of the contradictions of the Bible, and question the authority of the Scriptures. But those whose hearts are in harmony with truth and duty will search the Scriptures with a heart prepared to receive divine impressions. The illuminated soul sees a spiritual unity, one grand golden thread running through the whole, but it requires patience, thought, and prayer to trace out the precious golden thread. Sharp contentions over the Bible have led to investigation and revealed the precious jewels of truth. Many tears have been shed, many
There is but little of external unity in the Bible, it makes no pretensions to any such thing; you need not be at all shaken by the clamors of those who would make this obvious fact an objection to the authority of the scriptures. As well might it be objected to the miracles of Christ that they are not given in philosophical order, beginning with the less and going on to the greater, with just so many and only so many of each kind.
The unity of Scripture is not an external,
it is an internal, a spiritual unity, the unity of one grand idea running through the whole, the idea of reuniting the human soul to God, from whom it has been so sadly broken off by sin; and that too through a long continued process of sharp conflict and agonizing struggle.
54
prayers offered, that the Lord would open the understanding to His Word.
«The Bible is not given to us in» grand superhuman language. Jesus, in order to reach man where he is, took humanity. The Bible must be given «in the language of men».
Everything that is human is imperfect. Different meanings are expressed by the same word; there is not one word for each distinct idea. The Bible was given for practical purposes.
«The Bible is not given to us in» any celestial or superhuman language. If it had been it would have been of no use to us, for every book intended for men must be given to them «in the language of men». But every human language is of necessity, and from the very nature of the case, an imperfect language. No human language has exactly one word and only one for each distinct idea. In every known language the same word is used to indicate different things, and different words are used to indicate the same thing. In every human language each word has more than one meaning, and each thing has generally more than one name.
This much is sufficient for all practical purposes, and it is for practical purposes only that the Bible was given.
The stamps of minds are different. All do not understand expressions and statements alike. Some understand the statements of the Scriptures to suit their own particular minds and cases. Prepossessions, prejudices, and passions have a strong influence to darken the understanding and confuse the mind even in reading the words of Holy Writ.
Yet prepossessions, prejudices and passions come in so plentifully to darken and confuse men's minds, when they are reading the Bible.
The disciples traveling to Emmaus needed to be disentangled in their interpretation of the Scriptures. Jesus walked with them disguised, and as a man He talked with them. Beginning at Moses and the prophets He taught them in all things concerning Himself, that His life, His mission, His sufferings, His death were just as the Word of God had foretold. He opened their understanding that they might understand the Scriptures. How
He opened their understandings that they might understand the Scriptures.
55
quickly He straightened out the tangled ends and showed the unity and divine verity of the Scriptures. How much men in these times need their understanding opened.
Men in these times need to have their understandings both opened and straightened out, that they may understand the Scriptures.
The Bible is written by inspired men, but it is not God’s mode of thought and expression. It is that of humanity. God, as a writer, is not represented. Men will often say such an expression is not like God. But God has not put Himself in words, in logic, in rhetoric, on trial in the Bible.
«The writers of the Bible were God’s penmen», not His pen. Look at the different writers.
The Bible is not a specimen of God's skill as a writer, showing us God's mode of thought, giving us God's logic, and God's rhetoric, and God's style of historic narration. How often do we see men seeking out isolated passages of Scripture, and triumphantly saying that such expressions are unworthy of God, and could not have proceeded from Him. They are unskillful, the mode of thought is faulty, they are illogical, in bad taste, the reasoning is not conclusive, the narrative is liable to exception. God has not put himself on trial before us in that way in the Bible, any more than He has in the creation – any more than He has promised that the Bible shall always be printed for us on the best paper, with the best of type, and perfect freedom from typographical errors, and that after it is printed, it shall never be torn, nor soiled, nor any leaf lost: or that apostles and preachers shall be regularly handsome, men of fine forms and beautiful face, and faultless elocution. It is always to be remembered that «the writers of the Bible were “God's penmen», and not God's pens.”
«It is not the words of the Bible that are inspired»,
but the men «that were inspired. Inspiration acts not on the man’s words» or his expressions but on the man himself, who, under the influence of the Holy Ghost, is imbued with thoughts.
«It is not the words of the Bible that were inspired», it is not the thoughts of the bible that were inspired; it is the men who wrote the Bible «that were inspired. Inspiration acts not on the man's words», not on the man's thoughts, but on the man himself; so that he, by his own spontaneity, under the impulse of the Holy Ghost, conceives certain thoughts and gives utterance to them in certain words,
56
But the words receive the impress of the individual mind.
The divine mind is diffused. The divine mind and will is combined with the human mind and will; «thus the utterances of the man are the word of God.»
both the words and the thoughts receiving the peculiar impress of the mind which conceived and uttered them, and being in fact just as really his own, as they could have been if there had been no inspiration at all in the case. The birth and nature of Christ afford an exact illustration. The Holy Infant in the womb of the Virgin, though begotten of God directly without any human father, ( as it was said, the Holy Ghost shall come upon thee and the power of the highest shall overshadow thee),- this infant lived by his mother's life, and grew by the mother's growth, and partook of the mother's nature, and was just as much her child as he could have been if Joseph had been his father, the human and the divine in the most intimate and inseparable conjunction. It is this very fact of the commingled and inseparable union of the human and divine, which constitutes the utility, which makes out the adaptedness to the wants of men, both of the incarnation of Christ and of gift of the word. Inspiration generally is a purifying, and an elevation, and an intensification of the human intellect subjectively, rather than an objective suggestion and communication; though suggestion and communication are not excluded.
The Divine mind is, as it were, so diffused through the human, and the human mind is so interpenetrated with the Divine, that for the time being «the utterances of the man are the word of God.»
Les parallèles textuels
La lecture de ces deux textes nous a permis de constater qu’Ellen White
inverse, en deux cas, l’ordre de la structure de Stowe. Ses trois premiers
paragraphes sont en rapport avec la page 17 du livre de Stowe. Par contre, les
57
paragraphes 4 et 5 correspondent à la page 13, et le paragraphe 6 est proche
de la page 15. Le texte restant d’Ellen White suit de près l’ordre établi par
Stowe en reprenant les pages 18 et 19. Comme nous pouvons le constater,
cette nuance n’a pas une incidence particulière sur les idées présentées,
d’autant plus que dans l’ensemble, la proximité structurale des deux textes est
très claire156.
De la même façon, en observant ce cadre, nous notons une proximité
évidente entre ces deux documents sur les mots et les expressions utilisés. Le
cadre nous montre à quel point il y a très peu de phrases sans rapport direct
entre les deux auteurs : les parties non colorés dans notre cadre. Pourtant,
même ces éléments n’altèrent pas le sens du texte d’Ellen White de façon
significative par rapport à Calvin Stowe. Avant de nous plonger sur l’analyse de
ce cadre, il est important de noter la recherche menée par David Neff sur ce
sujet157. Parmi ses conclusions, il remarque que 68% du matériel littéraire du
manuscrit 24 se trouve dans l’ouvrage de Stowe et que 58% du manuscrit 24
est : «dominé par les mots et les expressions de Stowe.»158.
Sur les parties colorées en jaune dans le cadre, c’est-à-dire les
paraphrases flexibles, notons que même si quelques fois Ellen White utilise un
lexique différent, les idées transmises sont tout à fait proches de celles de
Stowe. Néanmoins, il nous paraît nécessaire d’observer plus en profondeur une
phrase en particulier dans laquelle elle utilise des mots différents de ceux de
Calvin Stowe et où David Neff voit un point de divergence très important entre
eux.
Changements importants
Le fait qu’Ellen White ait introduit des altérations par rapport à Calvin
Stowe dans les choix de quelques mots importants pour définir sa pensée,
mérite d’être étudié. Cela nous permettra d’établir si notre auteur diverge ou
pas, comme David Neff l’affirme, de la pensée de Stowe. Neff se base sur ces
156
David Neff défend la même idée dans son travail, à savoir qu’Ellen White utilise la structure de Stowe pour la rédaction du manuscrit 24. David NEFF, Ellen White’s Theological and Literary Indebtness to Calvin Stowe, s.l.,s.éd.,1979, p. 11. 157
David Neff présente une analyse très intéressante. Pour chaque phrase du manuscrit 24, il dénombre des mots qui sont dépendants de Stowe. Pour en savoir plus, voir : Ibid., p. 12. 158
Ibid., p. 11.
58
divergences pour appuyer l’idée que, dans la pensée d’Ellen White, l’homme
«ne contribue pas pour la révélation» et la différence essentielle entre sa
pensée et celle de Calvin Stowe est que ce dernier défend une position active
dans le processus de l’inspiration, tandis qu’Ellen White défend une position
passive : «L’homme ne conçoit pas les pensées révélées en lui-même, mais il
les reçoit de l’extérieur. De la même façon, il ajoute que pour Ellen White les
pensées inspirées ne sont pas «modifiées par l’esprit du prophète. Seuls les
mots, les manières de s’exprimer sont choisies et crées par le prophète159.» Ce
travail nous permettra aussi de mieux analyser leur pensée dans le chapitre
suivant.
Dans le manuscrit 24 nous pouvons lire : « L’inspiration n’agit pas sur les
mots de l’homme ni sur ses expressions, mais sur l’homme lui-même qui, sous
l’influence (influence) du Saint-Esprit, est imprégné (imbued) par des pensées.
Mais les paroles reçoivent les caractéristiques de l’esprit individuel» que nous
pouvons comparer avec le texte de Stowe : « L’inspiration n’agit pas sur les
mots de l’homme ni sur ses pensées, mais sur l’homme lui-même, de façon
que, par sa propre initiative, sous l’impulsion (impulse) du Saint-Esprit, il
conçoive (conceives) certains pensées et les prononce en utilisant certaines
paroles. Toutes deux - les paroles et les pensées - reçoivent les particularités
de l’esprit qui les a conçues et prononcées»160. Comme nous pouvons le
constater, Ellen White utilise influence plutôt qu’impulse et imbued plutôt que
conceives.
Pour analyser ces mots nous allons procéder de façon systématique : en
premier lieu, il nous faut comparer le sens donné par le dictionnaire et ensuite
analyser quel est la définition la plus adéquate pour chaque mot dans son
contexte littéraire spécifique. Cette démarche sera appliquée à la fois au deux
cas que nous venons de présenter.
Selon la définition du dictionnaire, le premier mot que nous allons
étudier, influence161, peut contenir plusieurs sens. Littéralement, il implique de
159
David Neff, Ellen White’s Theological and Literary Indebtness to Calvin Stowe, p. 19. 160
Calvin Stowe, Origin and History, p. 19. 161
Noah WEBSTER, Chaucey GOODRICH, An American Dictionary of the English Language, p. 603.
59
"faire couler" ou de "faire couler dans quelque chose". Ce terme peut faire
référence à des substances spirituelles ou autres, trop subtiles pour être
visibles. Généralement, il exprime un pouvoir qui agit d’une façon invisible avec
des conséquences perceptibles. Il peut également transmettre le pouvoir de
persuader quelqu’un par l’argumentation ou la motivation. Dans le domaine
religieux, ce mot peut être utilisé pour décrire l’action du pouvoir de Dieu dans
l’esprit humain. Dans le contexte de la phrase dans laquelle Ellen White utilise
ce terme, nous pouvons comprendre qu’il décrit le processus de l’inspiration.
Ellen White regarde ce processus comme un Dieu agissant, communiquant son
pouvoir divin dans l’être humain pour qu’il soit en mesure de rédiger la Bible.
De son côté, Stowe utilise le mot impulse162, défini premièrement par
"une force communiquée d’un corps à l’autre" ; deuxièmement par "une
influence qui agit sur l’esprit". Enfin, le terme impulse peut signifier "une
influence surnaturelle sur l’esprit". Dans notre contexte, ce mot présente
l’inspiration comme une action de Dieu qui pousse l’homme à concevoir des
pensées nouvelles et à les exprimer : «sous l’impulsion du Saint-Esprit, il
conçoit certaines pensées et les prononce en utilisant certaines paroles». En
effet, c’est ce pouvoir divin qui amorce la rédaction des textes bibliques et qui a
soutenu l’auteur durant tout le processus.
En comparant ces deux termes, nous arrivons à la conclusion que leurs
sens sont très proches. Les deux présentent un pouvoir, une action surnaturelle
sur l’esprit humain. Dieu, en agissant sur l’homme par le biais de l’inspiration,
est le premier responsable de la rédaction de la Bible. Les contextes des textes
étudiés ne nous donnent pas de raisons de penser qu'Ellen White voulait
présenter un autre sens que celui que présente Stowe.
Le deuxième mot, imbued163, est défini dans le dictionnaire par le terme
"imprégné", mais il soulève une action profonde. Notons également que dans
sa définition, l'auteur utilise les mots tinged164 et tinctured165. Ceux-ci nous
présentent l’idée d’être "imprégné avec quelque chose qui lui est étrange". Par
162
Noah WEBSTER, Chaucey GOODRICH, An American Dictionary of the English Language, p. 586. 163
Ibid., p. 578. 164
Ibid., p. 1155. 165
Ibid.
60
conséquent, grâce à l’usage du terme "imprégné" dans cette définition, nous
pouvons inclure dans le mot imbued le sens de la fécondation. Quand Ellen
White exprime : « (l’homme) sous l’influence du Saint-Esprit, est imbu de
pensées», elle veut transmettre l’idée que l’homme reçoit des pensées du
Saint-Esprit, quelque chose qui lui est étrange. Si l'on porte une analyse plus en
profondeur, nous pouvons également comprendre quelque part que l’esprit
humain est imprégné des pensées divines. Ainsi, il existe en un sens une
certaine passivité de la part de l’humain, réceptacle des pensées divines.
Néanmoins, cette passivité initiale entraîne une réaction: la rédaction de la
Bible en réponse à l’action de Dieu : «L’inspiration n’agit pas sur les mots de
l’homme ni sur ses expressions, mais sur l’homme lui-même.»
Cette notion de fécondation est importante parce que le mot
conceives166, utilisé par Stowe, a pour sens de "recevoir dans l’utérus et
procréer" ; de "créer quelque chose dans l’esprit" ; de "comprendre quelque
chose ; penser et réfléchir". Si l'on prend la phrase de Stowe : « sous
l’impulsion du Saint-Esprit, il conçoit certaines pensées et les prononce avec
certaines paroles», nous pouvons plus clairement en saisir le sens. Même si
Stowe note la capacité de l’homme de percevoir ou d'imaginer des choses, le
sens de recevoir dans son esprit l’impulsion divine, l’amène à créer des
pensées et des mots indispensables à la rédaction de la Bible. L’initiative et les
capacités créatives humaines restent dépendantes de l’action de Dieu sur l’être
humain. Comme pour Ellen White, Stowe nous dit que l’homme reçoit quelque
chose du Saint-Esprit, qu’il définit comme une impulsion divine. Cette réception
de la part de l’homme va mener au développement de certaines pensées et de
paroles particulières.
Une fois encore, les deux termes sont très proches et à nouveau le
contexte autour du mot ne nous permet pas de faire une distinction entre
l’usage qu'Ellen White donne au mot imbued et celui que Stowe donne à
conceives. A l'opposé de ce que David Neff affirmait, pour nos deux auteurs, il y
a une réception à l'intérieur de quelque chose en provenance de l'extérieur:
dans le cas particulier de Stowe une impulsion divine, tandis que pour Ellen
166
Noah WEBSTER, Chaucey GOODRICH, An American Dictionary of the English Language, p. 240.
61
White il s'agit de la réception des pensées divines. Lorsque l'on approche cette
notion du domaine de l’inspiration biblique, cela implique pour eux, que l’esprit
humain est imprégné par un élément divin. La précision d’Ellen White dans la
définition de cet élément comme étant des pensées divines sera très importante
par la suite alors que nous préciserons leur notion sur l’inspiration biblique.
Simplification ou développement du matériel de Stowe
Une des autres observations que nous pouvons faire grâce au cadre
présenté, est la présence de portions de texte dans lesquelles Ellen White
simplifie la pensée de Stowe - colorée en vert - ou à travers lesquelles elle
développe davantage certains des points spécifiques de l'argumentation de
Stowe - coloré en gris. Par exemple, le paragraphe suivant de Stowe : «
Écoutez deux avocats débattre au sujet d'un point de la loi et de son
application. Écoutez deux politiciens qui s’opposent en argumentant sur la vraie
intention et la force d’un point particulier de la Constitution des États-Unis.167»
réduit et simplifié par Ellen White dans le paragraphe suivant : « Politiciens et
opposants débattent de points de la loi et possèdent des points de vue opposés
sur l’application de ces lois. »
De la même façon, nous pouvons voir un autre exemple dans lequel elle
développe la pensée de Stowe, qui écrivait : « la maladie et l’ingénuité perverse
de l’esprit humain »168 en contraste avec le paragraphe du manuscrit 24 qui lui
correspond et dans lequel Ellen White va plus loin en disant : « la perversité de
l’esprit humain, astucieux à échapper à la vérité, plusieurs ne lisent et
n'interprètent la Bible que pour faire plaisir à leur propre personne.» Ce procédé
d’Ellen White, simplifiant ou développant certaines portions du texte de Stowe
et ajoutant des idées complémentaires, nous montre une analyse et une
rédaction active de sa part. Son manuscrit 24 semble être le fruit d’une étude
personnelle d’Ellen White du livre de Calvin Stowe et non seulement d'une
simple reproduction, d’autant que les deux documents présentent des profils
littéraires relativement différents. L'ouvrage de Calvin Stowe est un livre publié
tandis que celui d’Ellen White est tiré de son journal, il s'agit donc de ses notes
personnelles.
167
Calvin Stowe, Origin and History p. 17. 168
Ibid.
62
Conclusion
Après cette étude dédiée à l’observation de ces deux textes, nous
pouvons donc conclure que la majorité du texte d’Ellen White dépend de
l’ouvrage de Stowe sur un plan lexical mais également dans la structure
utilisée. Même sur certains mots différents qu’elle utilise et qui pourraient nous
conduire à penser qu'elle diverge de Stowe, ces termes possèdent pourtant un
sens très proche. Le contexte littéraire ne nous permet pas de supposer un
usage différent entre ses mots et celui de Stowe.
Un deuxième élément important est la présence des portions du
manuscrit 24 qui n’ont pas de parallèle direct avec le texte de Stowe - dans le
cadre présenté, ils n’ont pas de couleur. Ces parcelles de texte sont originelles
d’Ellen White, mais elles s’insèrent de manière organique dans la structure de
Stowe. C’est-à-dire qu'elles présentent des idées qui ne changent pas
significativement la structure commune entre Ellen White et Calvin Stowe. Ces
indices nous montrent encore à quel point le manuscrit 24 a été le fruit d’une
réflexion personnelle d’Ellen White. Cette étude sur l’utilisation qu’Ellen White
fait des expressions et des paroles de Stowe nous conduit à présenter les
convergences et les divergences de leur pensée au sujet de l’inspiration.
C. Analyse de la pensée d'Ellen White et de Calvin Stowe
Après avoir établi sur quel plan le manuscrit 24 est dépendant de
l’ouvrage de Stowe au niveau littéraire, nous entrons à présent dans une étape
d’analyse de la pensée d’Ellen White et de celle de Calvin Stowe. Cette
démarche nous permettra de préciser leur relation et de saisir leur positionnent
sur l’inspiration biblique.
Dans le cadre de cette analyse, le chapitre précédant avec l’étude que
nous avons faite sur les mots importants des textes, joue un rôle majeur parce
qu’il nous permettra d'évaluer de manière plus fidèle les nuances ou
divergences de pensée de chacun de ces auteurs. Par ailleurs, nous allons
utiliser les points de tension que nous avions notés dans la première partie. Ces
points, c’est-à-dire : l’inspiration du contenu, le point focal de l’inspiration et le
mode d’inspiration ; nous permettront de mieux les positionner entre eux, mais
également dans le contexte spécifique du protestantisme américain du XIXe
63
siècle et, pour Ellen White, dans son milieu adventiste. C’est sur ces trois
principaux points que nous allons organiser ce chapitre. Pour chacun d’eux,
nous comparerons et analyserons les positions présentées par Ellen White et
Calvin Stowe.
L’inspiration du contenu
Cette notion, ainsi que nous l’avons déjà expliqué dans la première
partie, a pour objectif de définir quel type d’informations contenu dans la Bible
est inspiré. Il est important de rappeler que la plupart des auteurs étudiés dans
la première partie développent principalement leur pensée sur cet aspect. Ils
ont axé leur travail à définir dans la Bible ce qui était ou n'était pas inspiré. Les
auteurs réfléchissaient par exemple aux renseignements scientifiques que la
Bible présente et s'interrogeaient sur l'éventuelle vérité absolue de ces récits.
De la même façon, ils se sont questionnés entre autres sur les domaines de la
théologie et de l'histoire. Nous allons d'abord étudier la pensée de Calvin Stowe
et, par la suite, la comparer avec celle d’Ellen White.
Pour Calvin Stowe, la Bible n’est pas une représentation parfaite de la
pensée divine : «La Bible n’est pas un exemple de la compétence de Dieu
comme écrivain, en nous montrant son mode de pensée, sa logique, sa
rhétorique ou son style de narration historique.»169 Cela est dû au fait que,
d’une part, la révélation est progressive : « Les écritures ont été données aux
hommes peu à peu, au fil du temps, à la mesure que Dieu voyait les bonnes
occasions »170.
D’autre part, le langage humain est limité par sa propre nature et par la
nature des hommes : « Ce malheur elle (la Bible) le partage avec tout ce qui
doit être exprimé dans un langage humain. Cette restriction est due à
l’imperfection - défaut nécessaire du langage humain - et à la maladie et la
perverse ingénuité de l’esprit humain171». Stowe développe plus encore cette
aspect de l’imperfection du langage humain en ajoutant que : «La Bible ne nous
est pas donnée dans un langage céleste ou surhumain». C’est-à-dire que la
Bible ne pourrait jamais être une transcription parfaite de l’esprit divin parce que
169
Calvin Stowe, Origin and History, p. 18. 170
Ibid., p. 13. 171
Ibid., p. 17.
64
nous somme d'abord des êtres humains et nous n’avons pas cette capacité de
compréhension. Ensuite, les langues humaines sont trop limitées, trop
imprécises pour être capables de livrer de manière conforme une telle
communication. Ainsi, le fait « la Bible peut être utilisée pour tout dire et ne rien
dire en même temps» est une conséquence de la « perversité et de l'ingénuité
de l’esprit humain». L’humain, de sa propre volonté corrompt les
enseignements bibliques.
Malgré tout, la Bible reste pour Stowe, pleinement compréhensible dans
son application pratique : « Ceci est suffisant à nos propos pratiques, et c’est
pour des raisons pratiques que la Bible a été donnée.»172 Elle révèle d'autant
plus son caractère divin non dans une unité superficielle et externe, mais dans
une unité interne et spirituelle : « L’unité des écritures n’est pas externe, mais
une unité interne, une unité spirituelle, l'unité d’une idée grandiose qui traverse
l’ensemble, l’idée de réunir l’âme humaine avec Dieu»173.
De son côté, Ellen White défend comme Stowe, que la Bible reste claire
pour toutes les questions pratiques c’est-à-dire, l'ensemble des interrogations
qui concernent le salut de l’homme et son quotidien. Même si dans la Bible : «
Dieu comme auteur n’est pas représenté», dans le processus de rédaction de
la Bible, Dieu a progressivement révélé sa volonté. De la même façon, Ellen
White affirme également l’idée de l’imperfection du langage humain de Stowe: «
À cause des imperfections de la compréhension humaine du langage, où la
perversité de l’esprit humain, astucieux s'échapper de la vérité».
Ellen White propose aussi la même emphase sur les grandes limites des
langages humains : « Tout ce qui est humain est imparfait». Autrement dit: la
Bible comme ouvrage humain, reste toujours imparfaite dans la transmission
même des vérités divines. Nous pouvons donc constater qu’elle s’attache
davantage à la perversion de l’esprit humain à cause de son expérience
personnelle. Elle soulève aussi «l’unité spirituelle» de la Bible qui se base sur
vérité essentielle présente dans tous les livres bibliques.
172
Calvin Stowe, Origin and History, p. 18. 173
Ibid., p. 13.
65
Ainsi que nous venons de le noter, nos deux auteurs s'accordent dans
leur opposition à une inspiration verbale de la Bible. Même si la Bible reste
divine, elle n’est pas rédigée par Dieu. Puisque tout ce qui est humain est
imparfait, et puisque la Bible n’est pas une représentation parfaite des pensées
divines, nous ne pouvons dire qu’elle est infaillible, même dans la transmission
et la présentation de ses idées. Ellen White et Stowe ne précisent pas de quelle
manière cette imperfection se reflète dans l’autorité des informations contenues
par la Bible. L’emphase donnée par les auteurs s'articule autour du plan du
Salut, la grande idée centrale qui traverse la Bible et qui en est l'essence et le
message même.
La conception et l'argumentation de nos auteurs reste très proche de
Coleridge, surtout sur les limites du langage humain, en opposition aux
approches réformées qui défendaient une inspiration verbale de la Bible : « […]
c’est l’esprit de la Bible qui est infaillible et absolu, et non ces phrases et
paroles séparées […]»174.Or, Coleridge émet l'idée que l’esprit de la Bible est
infaillible tandis que Calvin Stowe et Ellen White affirment que la Bible reste
elle-même, en toutes choses, imparfaite. Ellen White s’oppose au groupe
adventiste qui défendait la notion d'inspiration biblique verbale. Cette similitude
entre Calvin Stowe et Ellen White, sera partagée également avec le second
aspect de l’inspiration que nous allons analyser maintenant.
La focalisation de l’inspiration
Notre deuxième aspect de l’inspiration est la focalisation de l’inspiration.
Comme nous l'avions déjà défini dans la première partie de notre recherche, ce
concept concerne l’objet de l’action du Saint-Esprit, c’est-à-dire: en quoi Dieu
agit-il dans le processus de l’inspiration? Les positions avancées dans la
première partie sont variées, c’est pour cette raison que cet aspect de
l’inspiration est l'un des points de tensions existant. Parmi les différentes visions
sur l’inspiration biblique, les défenseurs de la "focalisation" soutenaient que
Dieu agissait sur les paroles utilisées, sur les pensées de la personne ou
encore sur la personne elle-même.
174
Samuel COLERIDGE, Confessions of an inquiring spirit, p. 73.
66
Au sujet de cette focalisation, Calvin Stowe déclare très clairement dans
son livre que l’action du Saint-Esprit se fait sur l’homme lui-même : « ce ne sont
pas les paroles de la Bible qui ont été inspirées, ce ne sont pas les pensées de
la Bible qui ont été inspirées ; c’était les hommes qui étaient inspirés.
L’inspiration n’agissait pas dans les mots de l’homme ni dans sa pensée, mais
dans l’homme lui-même ». Stowe précisait sa pensée autour de l'idée que
l’inspiration n’agissait ni sur les paroles, en raison des limites du langage
humain, ni sur les pensées de l’homme.
En lien avec Calvin Stowe, Ellen White transmet une idée voisine: « Ce
ne sont pas les paroles de la Bible qui sont inspirées, mais les Hommes qui ont
été inspirés. L’inspiration n’agit pas dans les paroles de l’homme ni sur ses
expressions, mais sur l’homme lui-même.» Comme nous pouvons le
remarquer, elle affirme comme Stowe, que l’inspiration agit sur l’homme. Il est
vrai qu’elle ne spécifie pas, comme Stowe, que le Saint-Esprit n’agit pas sur les
pensées. Cette nuance est importante, nous le soulignerons plus tard. Le
centre de sa pensée reste très proche de celle de Stowe : le point focal de
l’inspiration, c’est l’homme. Même si elle ajoute cette nuance, nous devons
nous garder de penser qu’Ellen White défendait une position différente de
Stowe par rapport à la focalisation de l’inspiration. D’autant plus qu'elle précise
que :
« La Bible a été écrite par des hommes inspirés, mais ne montre pas ni le mode de penser ni d'expression de Dieu. C’est celui de l’humanité. Dieu comme auteur n’est pas représenté. (…) Mais Dieu ne s’est pas présenté pour être jugé dans les mots, ni la
logique, ni la rhétorique de la Bible».
Les pensées présentes dans la Bible ne sont pas celles de Dieu. Par
conséquent, même si Ellen White n’affirme pas, comme Stowe, qu’elles ne sont
pas inspirées, de la même façon elle ne nie pas qu’elles soient inspirées. C’est
dans le troisième aspect de l’inspiration, à savoir "comment Dieu agit sur
l’homme" que nous allons préciser la pensée d’Ellen White sur ce point. Calvin
Stowe et Ellen White restent néanmoins pleinement d’accord sur la proposition
de base qui défend que c’est l’homme qui est l’objet de l’action de Dieu.
Dans leur contexte théologique, ils s’approchent beaucoup de
Schleiermacher qui relève ce qui suit :
67
« Ainsi l’inspiration particulière des Apôtres n’est pas quelque chose qui se limite exclusivement aux livres du Nouveau Testament. Ces livres partagent cette inspiration qui, dans un sens plus étroit, conditionné par la compréhension pleine et pure de la chrétienté par les Apôtres, couvre l’ensemble des activités officielles de son ministère.»
175
A l'inverse de la plupart des autres auteurs qui défendait l’inspiration sur
les pensées ou l'inspiration sur les mots, Schleiermacher proposait, comme
Calvin Stowe et Ellen White, une action du Saint-Esprit exercée sur l’homme.
Une inspiration agissante sur l’homme entier et sur ses écrits comme le fruit
d’un vécu intime avec Dieu. Après avoir établi que ces deux auteurs défendent
que Dieu agit sur l’homme, il nous paraît nécessaire d'analyser comment cette
action est produite. Nous le découvrons à présent avec le troisième aspect de
l’inspiration.
Mode d’inspiration
Cet aspect concerne le mode utilisé par le Saint-Esprit pour agir auprès
des humains dans le processus de l’inspiration. En présentant le mode utilisé
pour interagir et influencer l’action des écrivains bibliques, Ellen White et Calvin
Stowe sont allés plus loin encore dans leur raisonnement que la plupart des
auteurs que nous avons étudié dans la première partie.
Calvin Stowe présente une image très intéressante pour expliquer sa
compréhension au sujet de ce mode d’inspiration. Il présente le Christ
pleinement humain et pleinement divin comme une analogie précise de la Bible.
De la même façon, la conception de Jésus offre un parallèle dans la conception
de la Bible : « De sorte qu’il, par sa propre spontanéité, sous l’impulsion du
Saint-Esprit, conçoive certaines pensées et les exprime par certains mots, les
paroles et les pensées reçoivent l’empreinte particulière de l’esprit humain qui
les a conçues et exprimées, et lui appartiennent entièrement comme si
l’inspiration n’avait pas eu de place.» Il précise davantage encore sa pensée en
ajoutant :
« L’inspiration est généralement une purification, une élévation et une intensification subjective de l’intellect humain, plutôt qu’une suggestion et une communication objectives, bien que la suggestion et la communication ne soient pas exclues. L’esprit divin est si diffus à travers l’esprit humain, et l’esprit humain si interpénétré par le divin, que pour l’instant les déclarations humaines sont la parole de Dieu.»
175
Friedrich SCHLEIRMACHER, The Christian faith, p. 599.
68
Ces déclarations, liées à l’analogie de Jésus nous montrent que Stowe
voit la Bible comme le fruit d’une vraie et pleine coopération entre le divin et
l’humain. Un partenariat où il n’y a pas de supérieur mais au sein duquel
chacun apporte sa contribution pour le résultat final.
C’est la conception de Jésus qui nous apporte la clé pour bien
comprendre la pensée de Stowe. Comme Marie a reçu une semence divine et
a porté Jésus pendant la période de gestation, ainsi les auteurs bibliques ont
reçu une semence divine qui a pris naissance dans leurs esprits et qui a fait
croître des pensées et des paroles. Ainsi que Jésus était biologiquement le fils
de Marie, même si issu d’une fertilisation divine, de la même manière, les
pensées et les paroles sont le fruit de l’auteur humain, bien qu'il ait été sous
impulsion divine.
À partir de cette notion de Stowe, on pourrait se questionner : Est-ce que
cette idée enlève le caractère divin de la Bible ? Selon notre auteur, il n'en est
rien, sauf si l'on est prêt à dire que Jésus n’était pas divin parce qu'il est né
d’une femme humaine. Il est vrai que Stowe définit l’inspiration comme un
processus généralement subjectif, subjectivité qui, selon ses dires, est conçue
par les auteurs humains à partir d’une action inexplicable de Dieu. Autrement
dit, les pensées et les paroles humaines sont partiales mais ont comme base la
réception de quelque chose de divin par l’auteur qui a mis en marche ce
processus. L'action ne s’arrête pourtant pas là, mais elle renforce d’avantage
tout le processus subjectif qui suit : «une purification, une élévation et une
intensification subjective de l’intellect humain».
Bien que, dans la pensée de Stowe il y ait prédominance de la
subjectivité de l’inspiration, il ne nie ni l’objectivité, ni la suggestion ni la
communication objective. Entre Dieu et l’homme existe une coopération
presque symbiotique dans l’inspiration. C’est cette collaboration qui conduit des
êtres humains à prononcer la parole de Dieu.
De son côté, Ellen White présente sa pensée de façon plus concise que
Calvin Stowe. Elle aussi défend la même coopération pour rédiger la Bible : «
sous l’influence du Saint-Esprit il est habité par des pensées. Mais les mots
reçoivent l’impression de l’esprit de l’individu. L’esprit divin est diffus. L’esprit et
69
la volonté divine sont combinés avec l’esprit et la volonté humaine, ainsi les
déclarations de l’homme sont la parole de Dieu.» Pour nos auteurs, la Bible est
le fruit d’un partenariat étroit entre Dieu et l’homme. C’est cette notion qui est au
centre de leur pensée, bien qu'Ellen White nuance la position de Stowe en
ajoutant que les auteurs bibliques sont « remplis de pensées ».
Si, pour Stowe, l’élément divin provoque la réflexion de l’auteur qui, aidé
par le Saint-Esprit va aboutir en pensées et en paroles, il n'en est pas de même
pour Ellen White. Cette dernière note que cet élément divin est aussi pensées,
mais comme elle l'affirme dans son texte : « (la bible) ne montre ni le mode de
penser ni le mode d'expression de Dieu». Cela implique qu’elle voit dans
l’inspiration une action de réflexion, de méditation et même de compréhension
de la part de l’auteur face à ces pensées divines avec lesquelles il est rempli.
La différence entre Ellen White et Calvin Stowe est qu’elle précise cet élément,
déclencheur du début de la réflexion, comme étant des pensées
communiquées objectivement. Néanmoins, tous deux s'accordent sur cette
réflexion personnelle comme une partie de l’inspiration.
De même que la «subjectivité» de Stowe est soumise à la notion
principale de la coopération, l’«objectivité» d'Ellen White est, elle aussi,
soumise à cette même coopération. Nous mettons en évidence cette précision
parce qu’elle nous semble très explicite quand elle dit que «les mots reçoivent
l’impression de l’esprit individuel.»
Calvin Stowe et Ellen White face à leurs contemporains
Après l’analyse de ces pensées par rapport aux trois aspects proposés,
nous arrivons à une notion de l’inspiration biblique qui est une coopération entre
Dieu et l’homme. Dans cette relation étroite qui les lie, c’est l’homme qui est le
centre de l’action de Dieu, le réceptacle non pas des mots ou des expressions
mais du pouvoir divin. C'est ce dernier que Calvin Stowe ne précise pas, mais
qu’Ellen White décrit comme des pensées qui amènent l’homme à méditer et à
réfléchir. Cette action, même si elle part de la propre spontanéité de l'individu,
n’est pas destituée d’aucune participation divine. Dieu a été présent dans tout le
processus de rédaction de la Bible, en augmentant et purifiant les capacités
naturelles de l’homme. Même si la Bible est imparfaite et ne peut reproduire
70
fidèlement la pensée divine, comme toute chose humaine d'ailleurs, elle reste
pourtant la parole de Dieu.
Cette notion, défendue par Ellen White dans son manuscrit 24, rejoint les
principaux thèmes qu’elle défendra dans l’introduction du The Great
Controversy, que nous avons analysé dans notre deuxième partie. Dans les
deux textes elle exprime l'idée d’une inspiration agissante sur l’homme, et non
pas une simple communication directe du Saint Esprit des pensées et des
paroles divines. L’action de Dieu sur l’auteur l’amène à réfléchir sur ce qui a été
révélé, il est nécessaire qu’il le comprenne et l’interprète. Les capacités et les
caractéristiques individuelles de l'individu vont influencer sa réceptivité et sa
réflexion sur la vérité divine. Cette démarche l’amènera à créer, toujours avec la
contribution de Dieu, des pensées et à les exprimer d’une façon personnelle.
Ces aspects communs nous montrent la proximité de ces deux textes sur les
concepts présentés. De la même façon, ils nous permettent de constater que,
au moment de la rédaction du manuscrit 24, Ellen White s'opposait déjà à
l’inspiration verbale et à l’inspiration «par degrés» proposés dans le débat
adventiste sur l’inspiration biblique des années 80. Nous pouvons observer
dans cette introduction de 1888 une maturité de la pensée d’Ellen White qui
n’est pas présente dans le manuscrit 24. Tandis que dans le manuscrit elle
affirme que les auteurs sont « habités par des pensées», l'ouvrage The Great
Controversy développe que «l’être infini a illuminé le cœur de ses serviteurs. Il
leur a donné des songes, des visions, des symboles».
Alors que sa position reste singulière face aux notions de l’inspiration
biblique adventiste de l’époque, Ellen White rejoint les idées de Calvin Stowe
face à ses contemporains protestants de l’époque. Même s'il existe un
rapprochement entre sa pensée et quelques auteurs de son temps, il se
distingue par la profondeur de sa réflexion sur ce sujet. C’est de façon très
claire que nos deux auteurs se démarquent par une conception verbale de
l’inspiration comme elle était présentée dans les approches orthodoxes. Ainsi
que le défend Coleridge, l’imperfection des langages humains rend improbable
l'hypothèse que la Bible puisse être une représentation infaillible de Dieu, non
seulement par rapport aux expressions et aux paroles utilisées, mais aussi en
ce qui concerne les pensées qu’elle présente. Contrairement à Briggs, Calvin
71
Stowe et Ellen White, soutiennent que les idées de la Bible ne sont pas une
transcription de la pensée divine. Schleiermacher le défendait : dans la
rédaction de la Bible, c’est l’homme qui est inspiré. C’est en effet sur l’auteur
que Dieu agit, dans sa vie, ses capacités et son esprit. La grande contribution
de Calvin Stowe et d’Ellen White concerne le mode de l’inspiration, aspect le
plus «méprisé» pour les auteurs que nous avons précédemment étudié. Même
si Schleiermacher touche brièvement à cette notion, il n’approfondit hélas pas
suffisamment sa pensée.
Calvin Stowe et Ellen White ne se limitent pas à affirmer ce que
l’inspiration n’est pas. Ils explorent la signification de cette action de Dieu et
développe ses implications. Ils tentent d’expliquer, dans la pratique, le
déroulement de ce processus et de quelle manière Dieu interagit avec les
auteurs bibliques. Une analyse superficielle pourrait mener à conclure que cette
notion implique un compromis par rapport à l’autorité biblique. Nos deux
auteurs défendent néanmoins que ce moyen imparfait de la révélation de Dieu
reste parole de Dieu, pleinement divine et pleinement humaine. Lorsque l’on
compare Calvin Stowe et Ellen White avec leurs contemporains, nous
percevons que ces premiers ont poussé la réflexion de l’inspiration sur l’aspect
essentiel de cette action de Dieu.
Conclusion
Comme nous venons de le constater, nos deux auteurs s’accordent à
dire que la Bible est le fruit de la coopération divine et humaine. C’est cette
notion de base que tous deux transmettent, sur le mode d’inspiration, dans
leurs textes. Stowe précise que le Saint-Esprit agit sur l’homme, principalement
sur ses capacités intellectuelles. Pourtant, dans son analogie de Jésus et
l’utilisation du mot «concevoir», nous pouvons conclure qu’il existe tout de
même la transmission de quelque chose qu’il ne précise pas. Il spécifie que cet
élément ne concerne pas des pensées ni des paroles, mais il n’apporte aucun
complément à ce sujet. Ellen White, restant sur la même idée de la coopération,
diverge de Stowe dans le sens où ce qui démarre la réflexion de l’auteur est, à
son avis, une pensée. Sa conception soulève plutôt le côté objectif de
l’inspiration par rapport à Stowe, mais tous deux se rejoignent pourtant sur la
notion de partenariat entre Dieu et l’homme dans la création de la Bible.
72
D. Conclusion
Après avoir étudié ces deux textes sur un plan littéraire et théologique, il
nous est important de mettre en évidence quelques découvertes importantes.
Au niveau littéraire d’abord, nous avons constaté que le manuscrit 24 utilisait
bon nombre des éléments présents dans le texte de Stowe. Non seulement
Ellen White empruntait la même structure mais, comme Neff l’a montré, plus de
la moitié de ses phrases étaient dominées par le support de Stowe. Il est vrai
que quelques éléments sont uniques à Ellen White, cependant, même ce
matériel s’insère de façon naturelle dans la structure de Stowe.
Sur le niveau théologique ensuite, nous avons analysé les deux textes
par rapport à trois aspects particuliers : l’inspiration du contenu, la focalisation
et le mode de l’inspiration. Nous l’avons constaté, dans ces trois points, Ellen
White reste très proche des idées présentées par Stowe, bien que les
contributions personnelles qu’elle a ajouté ont modulé quelque peu sa pensée
de celle de Stowe.
Ces résultats nous montrent qu’Ellen White suit de près Calvin Stowe au
niveau littéraire et théologique. Elle n’utilise pas le support littéraire, la structure
et le lexique pour présenter une notion différente de Stowe, mais elle emprunte
les principales idées de cet auteur.
Le texte d’Ellen White montre que, même si elle reprend en général la
notion de Stowe sur l’inspiration, elle y ajoute ses propres nuances. Ce
manuscrit 24 reste fortement influencé par le texte de Stowe, mais diverge
légèrement en certains points, notamment en ce qui concerne le mode de
l’inspiration. Cette proximité doit être soulevée par le fait que le raisonnement
de Calvin Stowe est très différent de la plupart des auteurs que nous avons
étudié dans notre première partie.
Cette étude comparative des deux textes en lien avec notre
problématique nous montre que le manuscrit d’Ellen White est postérieur et
dépend de l’écrit de Stowe. Il en dépend non seulement au niveau littéraire,
ainsi que d’autres chercheurs l’ont affirmé, mais aussi sur un plan théologique.
Malgré les nuances présentées par Ellen White, sa pensée théologique sur
l’inspiration biblique, comme elle nous est présentée dans le manuscrit 24,
73
notre recherche démontre clairement qu’elle a été influencée par Stowe en des
points très importants comme la focalisation et le mode de l’inspiration.
74
Conclusion Générale
L’objectif principal de notre mémoire était proposer une réévaluation de
la question de l’empreinte littéraire chez Ellen White en comparant le manuscrit
24 et le livre Origin and History de Calvin Stowe. Notre travail nous a permis de
constater la grande proximité entre ces deux documents.
Une proximité au niveau de la structure, des paroles et expressions
utilisées, mais aussi dans les idées transmises par les deux auteurs. Ellen
White comme Calvin Stowe, défend une inspiration biblique qui agit sur
l’homme. Cet homme est rempli, par le Saint-Esprit, de pensées divines qui
l’amènent à réfléchir afin de comprendre, d’assimiler, de développer et
d’exprimer ce qu’il a reçu. Même si le Saint-Esprit est présent d’une façon
objective dans la transmission de ces pensées initiales, il reste présent de
manière subjective durant tout ce processus jusqu’à ce que le produit final soit
achevé. C’est cette coopération étroite, presque symbiotique, en ce que l’esprit
humain est pleinement rempli par le Saint-Esprit, qui permet que les paroles
écrites ou dites par des humains soit la parole de Dieu. Néanmoins, la Bible
n’est pas une représentation parfaite de la façon d’écrire de Dieu ni de la
pensée de Dieu. Elle reste imparfaite dans la transmission de la pensée divine
comme toute autre chose d’origine humaine.
A l’opposé de ce qu’affirme Neff et d’autres auteurs, les différences entre
la pensée d’Ellen White et de Calvin Stowe sur l’inspiration biblique sont
minimes. Nos deux auteurs sont très proches au niveau de la structure et du
lexique, mais également sur les principales notions sur ce thème. Ellen White
développe cependant quelques nuances par rapport à la pensée de Stowe. Par
exemple, elle spécifie l’élément déclencheur de la réflexion de l’auteur biblique,
comme des pensées divines objectivement communiquées, contrairement à
Stowe qui n’en fait pas mention. Or, ces nuances n’altèrent en rien le cœur du
concept de l’inspiration, partagé par ces deux auteurs.
C’est en comparaison avec leurs contemporains que la proximité entre
Calvin Stowe et Ellen White peut être valorisée. Les idées défendues par Stowe
et partagées par Ellen White, n’ont pas de parallèle dans le milieu protestant
américain ni dans l’Eglise adventiste de cette époque. Les propos de Calvin
75
Stowe apparaissent comme des innovations en contraste avec le contexte du
protestantisme du XIXe siècle. De la même façon, en développant la pensée de
Stowe et en spécifiant des pensées divines comme déclencheurs d’une
réflexion, Ellen White le rejoint, s’en distance et approfondit les principaux
concepts sur l’inspiration biblique de leur époque.
Nous avons pu constater qu’avec le manuscrit 24, Ellen White se
démarquent très clairement des positions défendues par l’Eglise adventiste de
son temps. Elle s’oppose de la même manière à l’inspiration verbale, notion
défendue par George Butler et au «thought inspiration». À notre connaissance,
elle était la seule à défendre cette notion de l’inspiration biblique parmi les
adventistes. Même si nous ne pouvons préciser de quelle manière Ellen White
a pu avoir accès à l’ouvrage de Stowe, tous ces indices nous montrent
qu’effectivement elle a repris l’ensemble de la pensée de Stowe dans la
rédaction du manuscrit 24.
Nous avons mis en lumière suffisamment d’éléments qui nous montrent
la proximité de ce manuscrit avec l’introduction du The Great Controversy : La
similitude de ces deux textes, la proximité des dates de rédaction, les idées
transmises, etc. Dans cette introduction que nous avons proposé, nous avons
présenté un texte qui note déjà une maturité de la pensée d’Ellen White,
maturité qui n’est pas visible dans le manuscrit 24. Un élément nous semble
être cohérent avec les différents styles qui ont été rédigés. A l’inverse de
l’ouvrage publié, le manuscrit 24 reste une partie du journal personnel d’Ellen
White de cette époque. Tous ces éléments nous mènent à penser de ce
manuscrit qu’il est une étape dans sa réflexion personnelle sur l’inspiration
biblique. Selon ces mêmes indices, nous devons percevoir l’introduction du The
Great Controversy comme un fruit plus mûr de cette même réflexion.
Au regard de notre travail, nous pouvons soulever les deux points
suivants : En premier lieu, le fait que dans la rédaction du manuscrit 24 Ellen
White s’approprie des idées de Calvin Stowe, ne doit mettre en cause ni sa
crédibilité personnelle ni son ministère. Ce manuscrit 24 appartenait à l’origine
à son journal personnel, il n’avait pas pour objectif d’être publié, mais était un
texte d’étude. Ensuite, ce manuscrit nous permet d’oser un nouveau regard sur
76
l’utilisation de ses sources dans le processus de rédaction. D’ailleurs, en
étudiant ces sources, Ellen White présente un processus à caractère très
ordinaire, dans lequel elle utilise aussi des documents «bruts» qui avaient
encore besoin d’être travaillés. Cette démarche nous permet d’avoir un regard
nouveau sur le ministère d’Ellen White et sur la rédaction de ses écrits.
De manière plus pratique, cette étude a pu nous fournir des pistes très
intéressantes sur la perception qu’Ellen White avait de son ministère. En raison
de son influence et de son importance pour l’Eglise adventiste, ses écrits sont
souvent utilisés d’une façon très littéraire et étroite. Dans ce manuscrit 24, elle
nous présente la fragilité des ouvrages humains. Cela doit d’avantage nous
faire respecter la Bible et le ministère d’Ellen White tout en restant lucides au
sujet de leurs «imperfections». Cette même imperfection de l’humain est aussi
présente dans la vie des croyants. Nous devons toujours être conscients que ni
nous ni nos frères ne sommes des véhicules parfaits de la volonté divine. Cette
pensée devrait nous rendre très humbles devant notre Dieu et devant les
personnes qui nous entourent.
Il est important finalement, de soulever quelques perspectives de
poursuite de ce travail de recherche. En premier, sur le thème de l’empreinte
littéraire, il serait nécessaire de procéder à des analyses comparatives des
autres sources d’Ellen White. Cela nous permettrait de poursuivre l’étude de
son processus de rédaction et, dans le même temps, d’approfondir notre
compréhension de son ministère au sein de l’Eglise adventiste. Deuxièmement,
alors que le manuscrit 24 ne peut plus être utilisé pour soutenir l’idée que la
théorie du «thought inspiration» a été défendue par Ellen White, il est
nécessaire de réévaluer l’œuvre d’Ellen White sur l’inspiration biblique. Un
nouveau regard sur les textes qui touchent à ce thème deviendrait alors
essentiel afin d’obtenir une idée plus claire et plus précis de sa compréhension
sur ce sujet. Par rapport à ce point, il serait encore fort utile de mettre en
évidence la proximité du manuscrit 24 et de l’introduction du The Great
Controversy. Il nous semblerait essentiel de procéder à une analyse
comparative entre ces deux textes, étude plus pointue encore que celle que
nous avons pu engager dans ce mémoire. Cette analyse pourrait être un bon
point de départ de cette réévaluation de la notion de l’inspiration biblique
77
présente dans l’ensemble des textes d’Ellen White. Par conséquent, cette
nouvelle recherche pourrait fournir de nouvelles pistes pour la compréhension
adventiste sur l’inspiration, non seulement biblique mais aussi en ce qui
concerne le ministère d’Ellen White.
78
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.
85
Table de Matières Remerciements ............................................................................................................................. 1
Introduction Générale ................................................................................................................... 2
I - La notion d’inspiration de la Bible dans le protestantisme anglophone du XIXᵉ siècle ............ 5
A. Introduction ...................................................................................................................... 6
B. Introduction à l’herméneutique orthodoxe de Genève .................................................... 8
C. L’approche du Séminaire de Princeton ........................................................................... 12
D. Charles Briggs .................................................................................................................. 17
E. Samuel Coleridge............................................................................................................. 19
F. Friedrich Schleiermacher ................................................................................................ 20
G. Conclusion ....................................................................................................................... 22
II – Contexte historique et littéraire des ouvrages de Calvin Stowe et d’Ellen White ................ 25
A. Introduction .................................................................................................................... 26
B. Contexte historique et littéraire du manuscrit 24 1885 ................................................. 27
La notion de l’inspiration biblique dans les œuvres d’Ellen White avant 1885 .................. 27
Le contexte historique du Manuscrit 24 ............................................................................. 31
Conclusion ........................................................................................................................... 38
C. Introduction à l’ouvrage de Calvin Stowe ....................................................................... 39
Aperçu générale du livre ..................................................................................................... 39
Résumé du premier chapitre............................................................................................... 40
D. Conclusion ....................................................................................................................... 44
III – Comparaison et analyse entre les œuvres de Calvin Stowe et Ellen White ......................... 45
A. Introduction .................................................................................................................... 46
B. Observation des textes .................................................................................................... 47
Objections to the Bible ........................................................................................................ 47
The common popular objection to the Bible at the present day – What the Bible is not,
what it is, and how to use it. ............................................................................................... 49
Cadre de comparaison entre les deux textes ...................................................................... 51
Les parallèles textuels ......................................................................................................... 56
Conclusion ........................................................................................................................... 62
C. Analyse de la pensée d'Ellen White et de Calvin Stowe ................................................. 62
L’inspiration du contenu ..................................................................................................... 63
La focalisation de l’inspiration ............................................................................................ 65
Mode d’inspiration .............................................................................................................. 67
86
Calvin Stowe et Ellen White face à leurs contemporains.................................................... 69
Conclusion ........................................................................................................................... 71
D. Conclusion ....................................................................................................................... 72
Conclusion Générale ................................................................................................................... 74
Bibliographie ............................................................................................................................... 78