L'accompagnement à la socialisation d'enfants accueillis en SESSAD – Un projet éducatif comme...
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Transcript of L'accompagnement à la socialisation d'enfants accueillis en SESSAD – Un projet éducatif comme...
Unité de Formation : MARSEILLE
DIPLOME D’ETAT D’EDUCATEUR SPECIALISE
Session juin 2011
DOMAINE DE COMPETENCE 2.2:
« Conception du projet éducatif spécialisé »
MEMOIRE
L’accompagnement à la socialisation D’enfants accueillis en SESSAD
Un projet éducatif comme outil d’intervention
NOUGE – Fanny
Remerciements
A travers ce mémoire de fin de formation d’éducatrice spécialisée, j’ai pu
acquérir des connaissances et expériences pertinentes pour la poursuite de mon parcours
professionnel.
Cependant, je tiens à préciser que cet écrit n’a pu être réalisé dans ces conditions
favorables, que par le soutien et l’accompagnement dont j’ai bénéficié.
Je souhaite remercier tout d’abord, l’ensemble de l’équipe du SESSAD pour son
accueil chaleureux qui m’a été réservé durant mon stage de dernière année.
Ce document a également nécessité d’une aide dans sa construction par des
formateurs de l’IMF Marseille. Je remercie ma tutrice de mémoire pour ses conseils
ainsi que ma responsable de filière pour son investissement et son soutien dans mon
parcours de formation.
Mes remerciements s’adressent aussi à toutes les personnes s’étant investies
dans la relecture de mon mémoire et contribuant à son amélioration. Je ne pourrai
malheureusement tous les citer ici.
Pour finir, je souhaite remercier tout particulièrement celui qui est en partie à
l’origine de mon inscription dans cette formation, pour son soutien au quotidien.
Sommaire
Introduction 1
Chapitre 1 - Ma démarche de recherche-action : Le diagnostic 3
I) Contexte juridique et social des ITEP………………………...... 3
II) Le SESSAD : une modalité d’intervention en milieu ouvert…... 5
III) Mes interrogations sur l’accompagnement à la socialisation….. 7
IV) Accompagnement, socialisation et trouble du comportement : entre théorie et pratique…………………………. 10
V) De ma recherche à l’action : Problématique et hypothèse……. 20
Chapitre 2 - Un projet éducatif : La mise en action 24
I) La notion de projet : Une anticipation présente du futur………. 24
II) Un projet d’ouverture à l’environnement……………………... 26
III) Les sorties éducatives collectives comme moyen d’action…… 31
IV) L’évolution des enfants dans cette démarche de projet………. 35
V) Une évaluation-régulation de l’élaboration à la mise en œuvre. 47
Conclusion 50
Bibliographie………………………………………………………….. 51
Sommaire des annexes……………………………………………… 52
1
Introduction
Dans ma vision, ce mémoire est un outil de finalisation de mon parcours de
formation d’éducatrice spécialisée. Ainsi, dans cet écrit, je souhaite faire part de mon
positionnement professionnel actuel en tant qu’éducatrice en formation, me projetant
dans mon futur poste.
Mes positions se sont construites et déconstruites au fur et à mesure de mon
parcours scolaire, universitaire et professionnel. Après une licence professionnelle en
intervention sociale à l’IRTS de Perpignan, j’ai souhaité poursuivre mes expériences,
par une formation d’éducatrice spécialisée en deux ans à l’IMF Marseille. Ainsi, j’ai pu
articuler pratique et théorie à partir des différents stages professionnels, de mes lectures
et des échanges durant les temps de didactique professionnelle.
En particulier, mon stage d’observation en Maison d’Enfants à Caractère Social
(MECS) a été l’occasion de me rendre compte de cette nécessité de prendre du recul par
rapport à mon intervention directe. D’ores et déjà, j’ai ressenti l’importance d’espace de
régulation dans ma pratique auprès de personnes en souffrance. Lors de la suite de ma
formation, je me suis attachée à mettre en avant mes écrits professionnels, les échanges
avec l’équipe ou encore les temps d’analyse de la pratique, comme régulateur de mon
intervention.
Mon choix de réaliser mon stage de professionnalisation, en Service d’Education
Spécialisé et de Soin à Domicile (SESSAD) d’un Institut Thérapeutique Educatif et
Pédagogique (ITEP) a été motivé par plusieurs éléments. Tout d’abord, c’est la
possibilité de découvrir le secteur médico-social de manière approfondie en neuf mois
de stage. De plus, le SESSAD est un service en milieu ordinaire où l’intervention de
l’éducateur se fait de façon ambulatoire au sein d’une équipe pluridisciplinaire. Cette
conception assez particulière m’a amenée à vouloir l’expérimenter dans cette dernière
année de formation.
En SESSAD, l’intervention de l’éducateur se base principalement sur le
maintien dans une scolarité ordinaire de l’enfant ainsi que son inscription dans son
environnement. Ainsi, la socialisation se veut être une des missions principales du
SESSAD et en particulier de l’éducateur. Ce point m’a particulièrement intéressée,
2
certainement au vu de ma formation universitaire en sociologie.
Dans le cadre de mon mémoire, je me suis interrogée sur ce concept de
socialisation qui est l’objet de nombreuses attentions. En effet, cette entrée en société
est posée comme essentielle notamment dans l’enfance. Ce sont principalement l’école
et la famille qui jouent ce rôle mais également toute inscription dans la cité.
Ma posture d’éducatrice spécialisée en formation m’amène à me questionner sur
la façon dont sera appréhendé ce concept. Il me semble important de le définir et de le
déconstruire car il sera révélateur des orientations choisies dans les dispositifs
d’accompagnement éducatif.
Avec cette thématique de la socialisation, il s’agit là encore, de faire des allers-
retours entre théorie et pratique. Ainsi, mon mémoire se découpe en deux parties, la
première sur ma démarche de recherche et la deuxième sur sa mise en œuvre à partir
d’un projet éducatif. Tout au long de mon écrit, j’ai tenté de faire ces liens entre
réflexion théorique et intervention pratique.
Le contexte et le cadre de ma réflexion se situent à partir de la présentation d’un
ITEP dans son ensemble et du SESSAD en particulier. Ainsi, mes interrogations sur
l’accompagnement à la socialisation de l’éducateur se veulent contextualisées. Mes
recherches pratiques et théoriques sur les notions et concepts d’accompagnement, de
socialisation et de trouble du comportement viennent étayer ma problématique et mon
hypothèse d’intervention.
Ces premiers éléments viennent faire cadre au projet éducatif mis en place. Au-
delà d’une recherche sur la notion de projet, c’est la réflexion sur les éléments et les
étapes du projet qui s’est posée. Les sorties éducatives ont été choisies comme moyen
d’action dans un projet global d’ouverture à l’environnement. La création de conditions
adaptées a permis de noter certaines évolutions pour les enfants concernés par ce projet.
Par ailleurs, les réflexions n’étant pas figées, la réalisation du projet est venue modifier
la façon dont certains éléments avaient été pensés. Ainsi, les espaces de régulation ont
été l’occasion de va-et-vient entre projet pensé et projet réalisé.
3
Chapitre 1 - Ma démarche de recherche-action : Le diagnostic
La recherche-action est définie dans l’ouvrage de MA. Hugon et C. Seibel,
chercheurs en sciences de l’éducation : "Il s'agit de recherches dans lesquelles il y a une
action délibérée de transformation de la réalité ; recherches ayant un double objectif :
transformer la réalité et produire des connaissances concernant ces transformations"1.
Mon mémoire de fin de formation s’inscrit dans cette démarche, celle-ci se situant dans
un contexte juridique et social que je souhaite développer.
I) Contexte juridique et social des ITEP
Je réalise mon stage dans un Service d’Education Spécialisée et de Soin à
Domicile (SESSAD) rattaché à un Institut Thérapeutique Educatif et Pédagogique
(ITEP). Tout d’abord, je présenterai de manière détaillé le contexte de mon intervention
à partir des missions, du cadre légal et du public accueilli en ITEP, pour mieux saisir en
quoi il est confronté à la problématique soulevée par mes interrogations.
L’ITEP dans le secteur médico-social actuel
Les ITEP sont des structures médico-‐sociales financées par l’assurance
maladie et sous la responsabilité de l’Etat. Ils ont été légalement définis par le
décret du 6 janvier 2005 n°2005-‐11 établissant les conditions techniques
d’organisation et de fonctionnement des ITEP.
Ce décret transforme les Instituts de Rééducation en Institut Thérapeutique
Educatif et Pédagogique et spécifie les missions et actions particulières des ITEP :
favoriser le maintien du lien des personnes avec leur milieu familial et social,
promouvoir leur intégration dans les différents domaines de la vie, dispenser des
soins, accompagner au développement des personnes accueillies au moyen d’une
intervention interdisciplinaire.
Pour répondre à ces missions, une équipe pluridisciplinaire conjugue des
actions thérapeutiques, éducatives et pédagogiques. Le partenariat est un outil
central pour cette équipe ouverte sur l’environnement de la personne.
1 Hugon et Seibel, Recherches impliquées, Recherches action : Le cas de l'éducation, De Boeck,
Belgique, 1988.
4
L’accompagnement réalisé se fait dans le cadre d’un projet personnalisé adapté
aux besoins. Ce projet propose des modalités d’accompagnements diversifiées,
modulables et évolutives tout en tenant compte de la situation singulière des
personnes et de leur famille.
La loi 2002-‐2 du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-‐sociale a
réaffirmé le principe de l’usager « au cœur du dispositif » en lui reconnaissant des
droits : respect de la dignité, intégrité, vie privée, intimité, sécurité, libre choix des
prestations, accompagnement individualisé, recherche du consentement éclairé,
confidentialité des données et accès à l’information le concernant.
Pour cela, sept nouveaux dispositifs ont été mis en œuvre, favorisant
l’exercice des droits : cinq documents avec le livret d’accueil, la charte des droits et
des libertés, le règlement de fonctionnement, le contrat de séjour, le projet
d’établissement et deux instances avec la personne qualifiée ou le médiateur et le
conseil de vie sociale.
Les orientations en ITEP sont notifiées par la Commission des Droits et de
l’Autonomie des Personnes Handicapées (CDAPH) de la Maison Départementale des
Personnes Handicapées (MDPH). Ainsi, l’ITEP se situe dans le secteur du handicap
avec une règlementation spécifique.
La loi 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances des
personnes handicapées a pour la première fois dans la législation française, donné une
définition précise du handicap : « Constitue un handicap (…) toute limitation d’action
ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une
personne en raison de son altération substantielle, durable ou définitive d’une ou
plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un
polyhandicap ou d’un trouble de santé invalidant »2.
La volonté de cette loi est de changer le regard que la société porte sur le
handicap et la considération dans laquelle elle tient la personne handicapée. Elle
souligne la nécessité de changer de manière importante la façon de reconnaître les
conséquences individuelles et sociales liées aux handicaps. Le point principal reste la
2 Article 2 de la loi 2005-12 du 11 février 2005.
5
reconnaissance d’une compensation des conséquences du handicap : « La personne
handicapée a droit à la compensation des conséquences de son handicap quels que
soient l’origine et la nature de sa déficience, son âge ou son mode de vie »3.
Cette loi prévoit un renforcement de l’accessibilité aux différents pôles de la
« vie sociale » : école, emploi, cadre bâti, nouvelle technologie, transport. Pour cela,
elle affirme le principe de participation effective des personnes handicapées à la vie
sociale, elle-même organisée autour du principe d’accessibilité généralisée.
Les enfants accueillis en ITEP
L’orientation de la MDPH notifie dans tous les dossiers un diagnostic
« trouble du comportement ». Or, aucune définition consensuelle n’a été donnée de
cette notion. Une partie de mon mémoire sera consacrée à ce terme qui fait
d’ailleurs débat.
Les établissements s’appuient sur le décret du 6 janvier 2005 qui précise
les personnes accueillies en ITEP: « Les ITEP accueillent des enfants, adolescents
ou jeunes adultes qui présentent des difficultés psychologiques dont l’expression,
notamment l’intensité des troubles du comportement, perturbe gravement la
socialisation et l’accès aux apprentissages. Ces enfants, adolescents et jeunes
adultes malgré des potentialités intellectuelles et cognitives préservées, sont
engagés dans un processus handicapant qui nécessite le recours à des activités
conjuguées et un accompagnement personnalisé »4. Cette tentative de définition
sera déconstruite dans la partie de recherche théorique de mon mémoire.
Le contexte juridique et social des ITEP fait ressortir plusieurs points importants qui
seront repris tout au long de mon mémoire :
- Une vision du handicap en évolution,
- Un attachement à la responsabilisation des personnes,
- Les troubles du comportement difficiles à définir.
3 Article 11 de la loi 2005-12 du 11 février 2005. 4 Article D.312-59-1 du décret du 6 janvier 2005 n°2005-11.
6
II) Le SESSAD : une modalité d’intervention en milieu ouvert
Les SESSAD ont vu le jour dans un contexte de prévention où l’orientation en
internat n’était plus considérée comme une modalité unique d’accompagnement. La
sociologue Andrée Charpy précise : « Dans le contexte d’une rénovation de l’action
sociale et médico-sociale les organisations nécessairement évolutives produisant les
services destinés aux personnes handicapées doivent s’adapter. »5
La création des SESSAD a eu lieu dans les années soixante où la volonté était de
maintenir l’enfant en difficulté dans son milieu familial et son milieu de vie. « A
domicile » signifie dans tous les lieux de vie de l’enfant : école, famille, centre de
loisirs, etc.
Dans ce mouvement, de nouvelles modalités d’accompagnement se mettent
en place, parmi eux les SESSAD. Ils proposent un travail visant l’intégration des
enfants en situation de handicap. Ainsi, la volonté est à la fois de maintenir une
continuité et de favoriser une rupture des modalités institutionnelles.
Le SESSAD où j’effectue un stage a vu le jour en 1993. Ce service accueille 50
enfants et adolescents de 4 à 14 ans présentant des troubles du comportement. Le
SESSAD est une des modalités d’accueil de l’ITEP avec l’internat et le semi-internat.
Le projet d’établissement de mon lieu de stage concerne l’ensemble du
dispositif ITEP. Les missions qui y sont précisées sont : la protection, le soin et la
thérapie, la scolarisation et l’éducation sous l’angle de la construction de la
socialisation. De manière générale, le SESSAD tente de prévenir l’exclusion d’un
enfant de son milieu de vie scolaire, social et familial.
Sa particularité par rapport au semi-‐internat ou à l’internat, est liée au
maintien d’une scolarité dans le milieu ordinaire. Cette dernière peut-‐être
aménagée mais ne nécessite pas une inscription en établissement spécialisé. Ainsi,
l’intervention de l’équipe du SESSAD favorise le maintien de l’intégration scolaire.
Afin de mettre en place un accompagnement individualisé suivant les besoins de
chacun, le SESSAD est composé d’une équipe pluridisciplinaire combinant trois
5 A. Charpy, Mémoire le travail en SESSAD considéré comme facteur d’innovation, septembre 2004.
7
aspects : l’aspect thérapeutique, l’aspect éducatif et l’aspect pédagogique. Un projet
personnalisé d’accompagnement est proposé suite à une période de bilan réalisé par
l’ensemble des professionnels.
L’élaboration de ce projet permet d’adapter les réponses éducatives,
thérapeutiques et pédagogiques proposées aux besoins de l’enfant et de sa famille.
La spécificité du SESSAD dans le dispositif ITEP, c’est d’intervenir dans
l’environnement de l’enfant pour favoriser une intégration scolaire et sociale. Pour
cela, le SESSAD a pour fonctionnement une équipe pluridisciplinaire composée de
médecin-‐psychiatre, psychologue, assistante sociale, éducateur spécialisé,
psychomotricien, instituteur spécialisé.
Le SESSAD a plusieurs particularités notables :
- C’est une modalité du dispositif ITEP,
- Une intervention directe dans l’environnement de l’enfant et de sa famille,
- Les enfants sont maintenus dans une scolarité en milieu ordinaire.
Le projet d’établissement centre la mission d’éducation « sous l’angle de la
construction de la socialisation »6. Ainsi, « dans la mesure où les enfants présentent des
troubles du comportement qui se manifestent dans leur relation aux autres, l’éducation
et la socialisation sont les missions élémentaires de l’institution »7.
Dès lors, une des missions principales de l’éducateur spécialisé dans un SESSAD
consiste à accompagner l’enfant à se socialiser dans son milieu ordinaire.
III) Mes interrogations sur l’accompagnement à la socialisation
Au cours de mon stage, j’ai constaté des écarts entre ce qui était dit
« officiellement » sur la notion de socialisation et ce que j’ai pu observer.
Je pensais au début de mon stage que cette vision centrale de la mission de
socialisation, entraînerait une inscription dans la cité et dans le droit commun des plus
6 Projet d’établissement de l’ITEP, juillet 2010. 7 Ibid.
8
étroites, comme je l’avais lu dans le projet d’établissement : « Les enfants et adolescents
pris en charge à l’ITEP provoquent à l’évidence des tensions avec leur environnement.
Pour autant, ces tensions doivent être prises en compte comme des tensions
symptomatiques de la capacité de « vivre ensemble ». Il ne saurait être question de
reléguer l’institution en dehors de la cité. »
Pour y répondre le SESSAD travaille de manière individuelle à une « ouverture
vers l’extérieur » selon le projet et les besoins de l’enfant. Ainsi, j’ai par exemple
accompagné un enfant et sa famille à une inscription dans un club de football.
De manière collective, le SESSAD propose des ateliers à visée thérapeutique
(Théâtre, Conte, Musicothérapie, Equithérapie, etc). J’ai constaté sur une douzaine
d’ateliers collectifs mis en place que seulement trois étaient réalisés à l’extérieur du
SESSAD. Sur ces trois ateliers, deux sont organisés d’une façon où les enfants sont peu
confrontés aux autres (Transport en voiture du SESSAD, créneau horaire spécifique).
Je me suis alors demandée si cette minorité d’ateliers réalisés à l’extérieur n’était
pas un frein pour cette mission de socialisation. Ne fallait-il pas favoriser les activités
extérieures ? Est-ce que la socialisation ne passe pas nécessairement par une
confrontation aux autres, aux règles de la cité ? Qu’en est-il de cette capacité du vivre
ensemble et de la prise en compte de la différence ?
Par ailleurs, il me semble que la nature même des troubles des enfants accueillis
au SESSAD a à voir avec une vision sociale, une attente de la société liée à des
comportements attendus.
Le décret du 6 janvier 2005 concernant les ITEP précise un accueil d’enfants
dont les troubles « perturbent gravement la socialisation et l’accès aux apprentissages ».
Par perturbation de la socialisation, j’entends aussi bien difficulté à se construire comme
un être social sur le plan individuel, mais aussi perturbation au niveau collectif de
l’équilibre de ce vivre ensemble.
Ces troubles du comportement renvoient donc à un rapport à une norme, qui
s’inscrit dans une idée d’un comportement socialement acceptable.
9
Mes recherches sur une définition des troubles du comportement m’ont amenée
difficilement à en saisir les enjeux. La Classification Française des Troubles Mentaux
de l'Enfant et de l'Adolescent (CFTMEA) place les troubles de la conduite et du
comportement dans la catégorie clinique. Cette classification ne nous éclaire pas
davantage sur une définition des troubles du comportement.
Ce manque de lisibilité pose question quant à l’accompagnement qui est proposé
alors même que les définitions et les contours des troubles ne sont pas nettement
identifiables.
Pour ma part, j’ai constaté des situations très diverses des enfants accueillis en
SESSAD. Il y a aussi bien des enfants inhibés avec des difficultés d’expression, des
enfants très actifs, des enfants présentant des troubles autistiques ou psychotiques. Une
multitude de possibilités parmi lesquelles même les professionnels ont du mal à se
retrouver.
Lors d’un atelier de l’étude thérapeutique, un groupe de cinq enfants se retrouve
hebdomadairement au SESSAD pour un travail sur l’investissement dans les
apprentissages. A partir de temps cadré, la volonté est de prendre plaisir autour du
travail scolaire. Plusieurs enfants se confrontent : « Je n’ai rien à faire ici c’est que pour
les handicapés » me dit Florent8. Je lui demande pourquoi et il me dit que Mathieu est
fou, qu’il n’arrête pas de crier. Je lui explique que chaque enfant à ses difficultés et que
le SESSAD vient les aider à un moment donné. Lola, elle, ne réagit pas alors que
Mathieu lui crie dans les oreilles. Alban commence à insulter ce dernier qui maintenant
se met à rire. Eva elle, fait alliance avec Alban mais n’intervient pas directement auprès
de Mathieu.
En repensant à cette scène, il est vrai qu’elle vient particulièrement illustrer
l’idée d’une multitude de difficultés et de comportements. Confronté les uns aux autres,
les images que chacun peut renvoyer peuvent parfois être difficiles, comme pour Florent
qui dit ne rien avoir à faire là.
Cependant, mes observations m’ont permis de noter une unité dans une vision
inadaptée que la société porte sur ces enfants, le retard au niveau des apprentissages
étant l’exemple le plus visible. 8 Dans le respect de leur anonymat, le prénom de tous les enfants a été modifié.
10
Un certain nombre de points m’interroge : Les troubles du comportement qu’est
ce que c’est ? Quelle est la place du regard de la société dans ces troubles ? Qu’en est-il
du lien entre socialisation et trouble du comportement ?
Ces deux constats, d’un côté peu d’ouverture dans les ateliers collectifs et de
l’autre des difficultés sociales me mettent face à un paradoxe. En effet, l’éducateur se
situe dans une situation complexe où il doit d’un côté prendre en compte le regard et les
représentations de la société sur les troubles de l’enfant et en même temps favoriser
l’ouverture vers cette même société.
Il se situe dans une position de médiation, à l’intersection entre la prise en
compte de la réalité psychique d’une part et de la réalité sociale de l’enfant d’autre part.
Ainsi, il me paraît important de questionner la posture de l’éducateur dans sa vision de
l’autre et de lui-même, ce qui va l’amener à accompagner d’une façon qui lui est propre.
Il me semble pertinent d’aborder la socialisation de ce point de vue et de
m’interroger sur l’accompagnement de l’éducateur. Il s’agit alors de réfléchir à
comment accompagner à la socialisation d’enfants ayant des troubles du
comportement ?
IV) Accompagnement, socialisation et trouble du comportement : entre théorie et pratique
Je souhaite aborder dans cette partie les notions principales de ma question
de départ afin de mieux en saisir les enjeux. A partir de plusieurs conceptions
théoriques sur les notions d’accompagnement, de socialisation et de trouble du
comportement, je souhaite faire part de ma propre façon de les envisager. Ainsi,
ces visions orienteront mes choix dans la mise en projet de ma réflexion.
Les troubles du comportement
Une définition précise des troubles du comportement n’a jamais fait
consensus. Partons tout d’abord de la notion de comportement. Selon le
dictionnaire Larousse, c’est « l’ensemble des réactions d’un individu, une conduite ».
11
Au sens psychologique du terme, c’est « l’ensemble des réactions, observables
objectivement, d’un organisme qui agit en réponse à une stimulation ».
Ces réactions évoquées dans les deux définitions sont des réactions à quoi ? A
qui ? Que vient-elle signifier ?
Un comportement selon Françoise Dolto est un « langage à décoder »9. Il vient
signifier quelque chose à l’autre qu’il ne peut pas dire. Elle nous met en garde de ne
jamais confondre l’être avec ses comportements. « Par exemple, un nourrisson qui
vomit n’est pas un vomisseur. Un enfant qui vole n’est pas un voleur. En substantivant,
nous dévitalisons un être humain. Nous le classons comme une chose, nous confondons
l’être et le paraître, l’individu avec sa façon de s’exprimer. (…) Cela signifie quelque
chose, de l’ordre de la vie relationnelle entre humains, chacun sujet de désirs et pas
seulement objet fonctionnant. »10
Au niveau sociétal, lorsqu’un comportement est considéré comme déviant, il va
s’opérer un certain contrôle social pour que la personne se situe à nouveau dans une
norme. Le terme déviance vient du latin « De via » qui signifie hors du chemin, hors de
la voie. La voie symbolisant la norme. La déviance n'existe alors que par rapport à la
norme, elle lui est entièrement liée. Dès l'instant où il y a une norme, il y a forcément
une déviance qui lui est associée.
Becker dans son ouvrage Outsider se demande comment les groupes sociaux ou
la société arrivent à créer de la déviance. Selon l’interactionnisme symbolique, courant
dont fait partie cet auteur, l’élément constitutif de la déviance n’est pas le comportement
en tant que tel du supposé déviant, mais le fait que la société le qualifie ainsi : « Le
déviant est celui auquel cette étiquette a été appliquée avec succès ».11
Lorsqu’un enfant est accueilli en SESSAD, c’est qu’il a, à un moment donné, un
comportement déviant, qui ne correspond pas aux attentes sociales. Ainsi, lorsqu’un
enfant ne sait pas tenir une journée en classe ou n’est pas entré dans les apprentissages à
l’âge de 10 ans par exemple, il peut être posé le diagnostic de trouble du comportement.
9 F. Dolto, L’enfant dans la ville, éd. Gallimard, Paris, 1998, p.19. 10 Ibid. 11 H. Becker, Outsiders. Etude de sociologie de la déviance, éd. Métailié, Paris, 1985.
12
C’est le décret du 6 janvier 2005 qui précise actuellement les contours de ce
qu’on définie par la notion trouble du comportement : « Les ITEP accueillent des
enfants, adolescents ou jeunes adultes qui présentent des difficultés
psychologiques dont l’expression, notamment l’intensité des troubles du
comportement, perturbe gravement la socialisation et l’accès aux apprentissages.
Ces enfants, adolescents et jeunes adultes malgré des potentialités intellectuelles
et cognitives préservées, sont engagés dans un processus handicapant qui
nécessite le recours à des activités conjuguées et un accompagnement
personnalisé. »12
C’est une vision assez handicapante des troubles que rencontrent ces
enfants qui est mise en avant dans cette définition. Cette notion de « processus
handicapant » renvoie à une conception sociale des troubles. Cela rejoint la volonté
de la loi du 11 février 2005 de considérer l’environnement comme le lieu de reflet
des difficultés. Le travail sur l’adaptation de l’environnement au handicap de
manière générale, est un changement profond. Les enjeux d’une telle loi, sont alors
complexes en s’attachant à ce principe que la société produit du handicap. Cette
évolution décentre un travail auparavant uniquement basé autour de l’adaptation
des personnes handicapées, vers un mouvement de responsabilisation de la
société qui doit également s’adapter pour rendre moins handicapantes les
situations.
Avant ce décret de 2005, les ITEP étaient des Instituts de Rééducation (IR)
accueillant également des enfants ayant des troubles du comportement. Dans un
article du docteur Loisy, les enfants des IR sont présentés comme des sujets
souffrants, utilisant leur comportement comme l’expression de leur mal-‐être :
« Les enfants des IR, se manifestent par leur comportement, ne pouvant ou ne
sachant pas verbaliser leur émotion, leur mal-‐être physique et/ou psychique, du
fait de leur jeune âge et/ou de la non capacité d’écoute de leur entourage. Ils
emploient pour s’exprimer ce qui est à leur disposition, c'est-‐à-‐dire leur
comportement. » Cela rejoint l’idée de F. Dolto que tout comportement est langage
à décoder.
12 Article D.312-59-1 du décret du 6 janvier 2005 n°2005-11.
13
Au-‐delà de cette souffrance, c’est également une inadaptation sociale qui
était posée avant 2005. En effet, le rapport de l’Inspection Générale des Affaires
Sociales (IGAS) sur les IR en 1999 évoquait concernant la notion de trouble du
comportement : « Cette notion véhicule, derrière des stéréotypes imprécis et
désuets (de type « enfants caractériels »), une reconnaissance quasi officielle d’un
handicap de nature très vague pour une population mal définie, dont on sait
seulement qu’elle est trop inadaptée à l’institution scolaire pour y demeurer, et pas
assez caractérisée pour l’élaboration d’un diagnostic exclusivement médical et
univoque »13. Comment ne pas s’interroger face à une définition aussi imprécise de
la réalité des difficultés et aux choix des orientations concernant les dispositifs
d’accompagnement ?
A ce sujet l’Association des ITEP et de leur Réseau (AIRE), évoque dans un
de ses articles que la mission des professionnels n’est pas de trouver à ses enfants
une case mais de « les accompagner dans la découverte et la construction d’une
place en tant qu’individu et en tant que citoyen »14.
Il me semble que le flou clinique existant dans la définition des troubles du
comportement entraine ce genre de dérive et amène à une catégorisation
excessive. Les propos du professeur Mises15 illustrent cette idée. Selon lui, la
« définition » du public concerné par les ITEP propose un repérage « ouvert ». Il
évoque les contours des troubles du comportement à partir de ce qu’ils ne
regroupent pas, comme si ce qu’ils regroupaient était impossible à définir
précisément.
En pratique, sur mon lieu de stage, c’est le décret du 6 janvier 2005 qui sert
de base juridique pour évoquer les enfants accueillis à l’ITEP. Des caractéristiques
génériques sont également évoquées dans le projet d’établissement16 : « Des
troubles du narcissisme, une très faible estime de soi, un contrôle extrêmement
difficile des émotions, une détresse existentielle et une forte quête affective, un
mode relationnel où le repli et l’affrontement défensif dominent, une instabilité
13 Rapport sur les IR, présenté par M. Gagneux et P. Soutou, collection rapports publics IGAS, 1999. 14 Position de l’AIRE à propos des « jeunes dits incasables », Paris, sept 2009. 15 Membre du conseil scientifique de l’AIRE et à l’origine de la Classification Française des Troubles
Mentaux de l’Enfant et de l’Adolescent (CFTMEA). 16 Projet d’établissement de l’ITEP, juillet 2010.
14
motrice et psychique, un brouillage intergénérationnel. » Au-‐delà de ces
caractéristiques génériques, le projet d’établissement précise des caractéristiques
spécifiques liées à l’environnement local : « Une grande précarité sociale, une
origine urbaine, des phénomènes d’inter-‐culturalité ».
Le SESSAD a également fait une étude sur trois ans à partir de la
Classification Française des Troubles Mentaux de l’Enfant et de l’Adolescent
(CFTMEA) pour mieux saisir au niveau clinique quels enfants étaient accompagnés
en SESSAD. Il en ressort au niveau quantitatif : psychose 7,8%, troubles
névrotiques 25%, pathologies limites et troubles de la personnalité 6,5%, troubles
réactionnels 14%, déficience mentale 1,5%, troubles du développement et des
fonctions instrumentales 17,2%, troubles des conduites et du comportement 11%,
variations de la normale 17,2%. Cette étude renvoie encore une fois, aux multiples
diagnostics cliniques possibles qui se retrouvent en SESSAD.
Ce qu’il me semble important de retenir de cette partie sur la notion de troubles du
comportement, c’est tout d’abord la difficulté actuelle de trouver une définition
précise de ce que sont les troubles du comportement. Cette notion regroupe ainsi une
multitude de diagnostics cliniques.
Dans mon intervention, il s’agit de ne pas perdre de vue la caractéristique commune
de ces enfants qui se situe dans le regard que porte la société sur leurs
comportements considérés comme inadaptés. De plus, il sera également important
d’être vigilante à la prise en compte des difficultés particulières que chaque enfant
rencontre et ainsi proposer des objectifs adaptés à chacun.
La socialisation
En pratique, sur mon lieu de stage, le projet d’établissement17 précise la mission
d’éducation « sous l’angle de la construction de la socialisation ». Ainsi, « dans la
mesure où les enfants présentent des troubles du comportement qui se manifestent dans
leur relation aux autres, l’éducation et la socialisation sont les missions élémentaires de
l’institution. Elles passent par le respect d’autrui comme le sujet, par l’énonciation des
règles de vie en société, par le respect de l’intimité et la construction de l’identité. »
17 Projet d’établissement ITEP, juillet 2010.
15
La socialisation est un concept en sciences humaines qui a été abordé de
plusieurs façons suivant les domaines de référence. Ainsi, selon le dictionnaire de
sociologie « c’est un concept occupant une place ambigüe en sociologie : centrale pour
certains, secondaire pour d’autres. »18 Je souhaite tout d’abord revenir sur ces
différentes conceptions à partir de l’ouvrage de C. Dubar, la socialisation19.
E. Durkheim le fondateur de la sociologie française a évoqué la socialisation à
partir de sa vision holiste du social. Ainsi, elle peut être pensée comme une inculcation
par les institutions des manières de faire, de sentir et de penser. J. Piaget a critiqué cette
approche. De courant relationniste, ce dernier met en avant la place des interactions
dans le processus de socialisation et ainsi l’individu comme acteur.
Selon M .Mead de courant culturaliste, la socialisation n’est pas un concept
universaliste. La socialisation étant vue comme un apprentissage de la culture, il en
existe autant de formes que de cultures elles-mêmes.
T. Parsons et les fonctionnalistes défendent l’idée « que les sociétés pour
survivre, doivent reproduire à la fois leur culture et leur structure sociale. Elles ne
peuvent le faire qu’en assurant l’intériorisation des fonctions sociales vitales par les
enfants tout au long de leur socialisation. »20
Pour P. Bourdieu et JC. Passeron, la reproduction sociale a bien lieu mais les
institutions comme l’école imposent symboliquement la culture bourgeoise. A un
niveau individuel, selon eux, « les habitus de classes incorporés au cours de la
socialisation, sont conçus comme un processus d’imprégnation des conduites aux
destins les plus probables assurant ainsi subjectivement la reproduction légitime des
positions d’origine. »21
C’est Berger et Luckman qui vont amener la distinction entre socialisation
primaire et secondaire. La socialisation primaire est subie par l’individu pendant son
enfance. Elle permet qu’il devienne membre de la société. La socialisation secondaire,
c’est tout ce qui va se passer par la suite, c’est-à-dire l’incorporation de l’individu 18 G. Ferréol, Dictionnaire de sociologie, éd. Colin, 2010. 19 C. Dubar, La socialisation, éd. Colin, 2009. 20 T.Parsons, Family, socialization and interaction process, 1955, cité par C. Dubar dans l’ouvrage la
socialisation. 21 Bourdieu et Passeron, la reproduction – Elément d’une théorie du système d’enseignement, 1970, cité
par C. Dubar dans l’ouvrage la socialisation.
16
socialisé dans de nouveaux secteurs du monde. Ainsi, la socialisation n’est plus vue que
dans l’enfance mais tout au long de la vie. Ce concept est « la construction d’un monde
vécu qui peut être déconstruit et reconstruit tout au long de l’existence, et dont chacun
doit apprendre à en devenir l’acteur. »22
Enfin, le dernier grand courant à avoir étudié le concept de socialisation, c’est le
courant constructiviste de M. Weber et G. Simmel. Ils évoquent la notion de monde,
comme lieu de vie dont l’individu est acteur. « Les processus de socialisation
permettent les coordinations des actions et la négociation des mondes qui sont toujours
des mixtes d’intérêts et de valeurs. »23
Ces grands courants de pensée ont amené chacun avec leur spécificité, une
approche du concept de la socialisation. Au-delà même, c’est la vision de l’homme et
du social que cela vient interroger. A ce sujet, C. Dubar amène à rapprocher le concept
d’identité avec celui de socialisation pour apporter sa propre grille de lecture.
D’après lui, il existe deux axes d’identification d’un acteur social : le premier lié
à un contexte d’action donné et le second à une trajectoire personnelle et subjective.
Chacun se définit à partir de l’articulation de ces deux axes. C. Dubar parle de
différentes formes identitaires entre « les définitions officielles attribuées par autrui et
les identifications subjectives revendiquées par soi et soumises à la reconnaissance
d’autrui. »24 Il distingue alors la socialisation relationnelle, « des acteurs en interaction
dans un contexte d’action » et la socialisation biographique, « des acteurs engagés dans
une trajectoire sociale ».
L’individu est ainsi vu comme acteur d’une socialisation qui lui est propre. Le
système culturel n’est pas un ensemble contraignant mais recoupe des sous-groupes
ayant des valeurs qui lui sont associées (Famille, école, travail, pair, etc). Chacun fait le
choix d’un investissement plus ou moins important de ces sous-groupes et vient à les
hiérarchiser. Ainsi, « c’est en prenant conscience de l’existence de ces sous-groupes et
des différentes représentations ou valeurs qui y sont associées que l’individu acquiert la
22 P. Berger, T. Luckman, La construction sociale de la réalité, éd. Colin, 1966. 23 C. Dubar, La socialisation, éd. Colin, 2009. 24 Ibid, p.11.
17
capacité de s’en distancier et donc de procéder à un agencement original et
personnel. »25
Cette partie théorique sur la socialisation est beaucoup plus dense au vu des
nombreuses visions de ce concept. Les différentes conceptions se retrouvent dans l’idée
que la socialisation immerge l’individu dans le social. Elles se différencient dans une
place plus ou moins importante qui est donnée à l’individu comme acteur de ce
processus.
La base de mon intervention partira d’une vision de la socialisation où l’individu est
partie prenante de son apprentissage et de l’intériorisation des modèles culturels. En
pratique sur mon lieu de stage, cela s’illustre par exemple, par un accompagnement à
une inscription dans le droit commun (Centre aéré, club, etc.) à partir des ressources de
l’enfant, de sa famille et de son territoire. Chacun est amené à prendre un rôle et à
devenir acteur de ce processus de socialisation. Mon projet tentera de viser cet objectif.
Une telle vision de la socialisation renvoie à une posture de l’éducateur qui envisage
l’autre comme ayant des marges de manœuvres possibles dans son projet de vie. Ainsi,
cela vient interroger également la notion d’accompagnement.
L’accompagnement
L’accompagnement est une notion au carrefour de beaucoup d’autres. C’est tout
à la fois « guider (orienter, conseiller) », « escorter (aider, protéger, surveiller) » et
« conduire (diriger, enseigner, éduquer, former, initier) ». Selon M. Paul, docteur en
sciences de l’éducation, « l’intersection de ses fonctions se trouve dans la veille : être en
position d’accompagnement, c’est être en veille par rapport à une personne ».26
L’accompagnement social est une démarche qui vise à « aider les personnes en
difficulté à résoudre les problèmes générés par des situations d’exclusion et à établir
avec elles une relation d’écoute, de soutien, de conseil et d’entraide. »27
Accompagner fait ainsi référence à un cheminement côte à côte de deux
personnes. Le compagnon, cumpagnere est « celui qui partage le pain avec », dans
25 O. Pougnaud, P. Ropers, C. Soris, Accompagnement social et éducatif spécialisé, éd. Vuibert, 2009. 26 Conférence de M. Paul au C2R Bourgogne, Le concept d’accompagnement, 2004. 27 UNIOPSS, Guide pratique de l’accompagnement social, éd. Syros, 1995.
18
l’idée de partage des temps de vie, peines et joies. Dès lors partager selon l’éducateur
spécialisé P. Gaberan : « ce n’est ni imposer ni forcer l’autre à prendre ce qui lui est
tendu par l’éducateur.»28
Il existe trois modèles de l’accompagnement présentés par M. Paul :
- Thérapeutique : « L’important est de mobiliser les ressources de la personne
face à un dysfonctionnement passager et non de se substituer à elle en lui fournissant le
remède. »
- Maïeutique : « Le but est d’aider les hommes à « accoucher d’eux-mêmes ». Il
faut chercher à mobiliser les ressources de la personne en la mettant en contact avec son
intériorité. Le rôle tenu est simplement celui de facilitateur en s’appuyant sur sa propre
expérience ».
- Initiatique : « Le but de l’accompagnement initiatique est le changement de
statut par le biais de rite de passage. La personne accompagnée passe du statut de passif
à celui d’actif, c’est-à-dire comme membre actif de sa communauté ».29
Ces trois modèles n’envisagent pas la vision de l’accompagnant et de
l’accompagné de la même façon. Ainsi, suivant que l’établissement ou le professionnel
se situe dans telle ou telle conception, l’accompagnement sera réalisé différemment. Les
dispositifs d’accompagnement reposent donc sur des principes spécifiques.
Le projet d’établissement de l’ITEP où je suis en stage évoque une approche de
l’accompagnement au sens thérapeutique d’après M. Paul. « L’accompagnement
proposé en ITEP leur permet de prendre conscience de leurs ressources et difficultés.
Ces composantes sont indispensables à mobiliser chez l’enfant ou l’adolescent, car elles
permettent de travailler leur rapport à l’environnement »30.
28 P. Gaberan, Cent mots pour être éducateur, éd. Erès, 2007, p.118. 29 Conférence de M. Paul, Le concept d’accompagnement, 2004. 30 Projet d’établissement de l’ITEP, juillet 2010.
19
Selon le guide pratique de l’accompagnement social de l’Union Nationale
Interfédérale des œuvres et Organismes Privés Sanitaires et Sociaux (UNIOPSS), la
relation d’accompagnement comporte cinq caractéristiques :
« - Asymétrique : met en présence deux personnes d’inégales puissances ;
- Contractualisée : association sur la base d’une visée commune ;
- Circonstancielle : est due à un contexte, à la traversée d’une période ;
- Temporaire : ne dure qu’un temps, elle a un début et une fin ;
- Co-mobilisatrice : implique de s’inscrire, l’un et l’autre dans un mouvement. »
Ainsi, l’accompagnateur se situe entre une exigence institutionnelle de répondre
aux attentes de celle-ci tout en devant considérer la personne accompagnée dans sa
singularité. P. Fustier évoque cette position dans le travail social entre celle du don et
celle du service contractualisé : « L’ambivalence est constitutive de ce domaine et
concourt à la réussite de cette mission paradoxale : donner de soi à autrui et être payé
pour le faire. La vérité est dans l’entre deux, dans l’indicible du payé et du gratuit, du
pensé et de l’impensable, du dit et du non-dit, dans la conservation du paradoxe que
s’ouvre l’espace potentiel de la liberté »31. Cette citation vient interroger un
accompagnement pensé comme « côte à côte », mais où une personne est un
professionnel et crée de fait un déséquilibre. Ce paradoxe n’est pas une impasse mais au
contraire selon P. Fustier un espace de liberté, au sens d’ouverture vers des possibles
dans cet accompagnement.
La notion d’accompagnement renvoie à une vision générale de l’éducation et de
la façon dont l’éducateur va envisager sa place et celle de l’autre. Selon J. Ardoino,
l’approche pédagogique non directive entraîne deux idées fondamentales. D’une part, la
personne est seule capable de choisir où elle souhaite aller et comment elle s’y prendra.
D’autre part, l’éducateur à l’écoute de l’autre doit accepter le fait que cet autre est
« auteur, acteur et metteur en scène de ses actes »32. Ainsi, l’éducateur dans sa
31 JM. Servin, Critique du lien d’accompagnement entre don et contrat de P. Fustier, lien social. 32 J. Ardoino, De l’accompagnement en tant que paradigme, Revue pratiques de formation/Analyses,
Université Paris 8, Formation Permanente, N°40, 2000, p.5 à 19.
20
« modeste » intervention, tente de faciliter ses ressources en faisant place de tiers avec
les difficultés rencontrées.
Il me semble important de retenir que la notion d’accompagnement renvoie à deux
positions à savoir comment on envisage l’autre et comment on s’envisage soi. Je
conserve comme vision que l’accompagnement mise sur les capacités des personnes à
développer leurs propres ressources et faire leurs propres choix dans la volonté de
réaliser leur projet de vie. Ainsi, l’éducateur doit adopter une posture en conséquence,
c’est-à-dire à l’écoute de l’autre acteur.
Une situation concrète vient illustrer ces propos. Un enfant que j’accompagne et qui est
dit par l’équipe inhibé et en difficulté de faire des demandes à l’adulte, m’amène un
jour un document d’inscription pour un atelier rugby, tous les mercredis matin près de
son domicile. Je lui demande ce que c’est et il m’explique qu’il voudrait bien faire cette
activité. Je l’interroge pour savoir où il a trouvé ce dossier. Youri33 me dit qu’il l’a
demandé à l’école. Au retour, je fais part à sa mère de sa demande. Elle s’en saisit et
fait les démarches après que je les lui ai explicitées car elle ne lit pas bien le français.
Ainsi, dans une position pour ma part de médiation et d’écoute, Youri a su se
positionner et amener une demande. Sa mère et lui ont su s’appuyer sur leurs
ressources pour la concrétiser.
Pour faire lien avec la mise en projet, cela aura pour incidence de mettre en avant
l’enfant comme en capacité de faire des choix. Il s’agira également de réaliser des
espaces de discussion où chacun sera en mesure d’échanger sur ses propres choix.
V) De ma recherche à l’action : Problématique et hypothèse
Synthèse de la problématique
Ma question de départ qui était comment accompagner à la socialisation des
enfants ayant des troubles du comportement, a quelque peu évolué au vu des éléments
théoriques et pratiques de la partie précédente.
En effet, les éléments évoqués convergent principalement vers une vision de
33 Le prénom de cet enfant a été modifié par respect de son anonymat.
21
l’éducation comme émancipatrice. Comme le défend J. Ardoino34, la volonté est de
s’adapter au groupe pour qu’il survive mais également être autorisé à avoir sa propre
pensée et être autonome. Ainsi, l’enfant est vu comme acteur de la socialisation, acteur
de son projet de vie. Je souhaite également considérer au cas par cas les situations au vu
des ressources et des difficultés de chaque enfant et de son environnement familial et
social. J’interroge alors comment l’éducateur spécialisé peut-il accompagner à la
socialisation d’enfants ayant des troubles du comportement à partir de leurs places
dans un projet éducatif ?
Hypothèse d’intervention
L’hypothèse d’intervention est une réponse possible à la problématique. Elle est
l’aboutissement de la phase exploratoire. C’est une proposition que je souhaite mettre
en épreuve à l’aide d’un projet éducatif. Elle respecte ainsi les nouvelles exigences du
Diplôme d’Etat d’Educateur Spécialisé (DEES) d’une articulation étroite entre réflexion
et action.
L’hypothèse que je souhaite explorer comme fil conducteur de mon action
correspond à l’idée qu’être dans une démarche de projet éducatif d’ouverture peut
amener chacun à faire ses propres choix et à se construire par rapport à son
environnement.
Selon l’Agence Nationale de l'Evaluation et de la qualité des établissements et
Services sociaux et Médico-sociaux (ANESM), « la stratégie d’ouverture a pour objectif
de développer ou de maintenir le lien social des personnes tout en leur assurant un cadre
de vie rassurant et structurant ».35 Elle a pour but de favoriser l’insertion mais aussi de
permettre une meilleure autonomie dans la vie sociale ou encore de maintenir la place
de chacun dans la cité. C’est également un outil pour faire évoluer les représentations
sociales.
Rencontrer l’extérieur à partir de sorties éducatives peut permettre aux enfants
de vivre des situations qui peuvent être sources d’apprentissage quant à la question de
comportements socialement attendus. Dans une double visée, cette ouverture peut 34 J. Ardoino, Les avatars de l’éducation, PUF, 2000. 35 ANESM, Ouverture de l’établissement à et sur son environnement, Recommandations de bonnes
pratiques professionnelles, 2008, p.10.
22
amener une découverte de la ville au sens d’exister dans un espace collectif qu’est la
cité. Ainsi, la valorisation des capacités dans ce groupe que je souhaite mettre en avant
est un moyen d’inscription dans une forme de citoyenneté.
En pratique, ce projet consiste à une découverte de la ville à partir de « lieux de
vie » dans le souci d’une démarche citoyenne. Ainsi, il s’agit de travailler la valorisation
de capacités individuelles dans un espace collectif.
Le projet éducatif mis en place se situe à l’intersection de quatre exigences :
- Institutionnelle : mon projet s’inscrit dans la lignée du projet d’établissement ;
- Formatrice : ce projet tente d’être au plus près des attendus du diplôme ;
- Professionnelle : il vise également à la construction de mon positionnement ;
- Personnelle : il reflète un engagement.
Cette partie traite de ce lien complexe entre réflexion et action. Il s’articule dans mon
mémoire, dans un souci d’apport théorique pour étayer ma pratique. Ainsi, ma
réflexion sur la place de l’enfant dans un projet sera le fil conducteur de mon
intervention éducative.
23
Ce premier chapitre sur ma démarche de recherche-action, a permis de mettre en avant
plusieurs idées posant le cadre de la mise en place de mon projet.
Il faudra notamment retenir que les missions de l’ITEP visent à accompagner des
enfants de 4 à 14 ans ayant des troubles du comportement. Pour y répondre, le
SESSAD, service ambulatoire de l’ITEP accueille des enfants scolarisés en milieu
ordinaire et travaille à ce maintien. L’éducateur dans ce cadre est sollicité pour
accompagner ce mouvement d’inscription dans la réalité sociale. Ainsi, le soutien dans
ce processus de socialisation est mis en avant chez ces enfants qui ne correspondent pas
directement aux attentes sociales.
Le SESSAD dans lequel j’effectue mon stage est donc confronté à ma réflexion sur
l’accompagnement à la socialisation de ces enfants. Pour avancer dans cette recherche,
j’ai tenté de l’éclairer à partir d’éléments théoriques dans ce premier chapitre mais
également en mettant en place un projet éducatif. Ce dernier présenté dans ce second
chapitre, vise à la valorisation des capacités de chacun dans une démarche d’ouverture.
24
Chapitre 2 - Un projet éducatif : La mise en action
Je souhaite en premier lieu, dans ce chapitre, aborder la notion de projet pour en
saisir les enjeux. En effet, cette dernière est très à la mode dans de nombreux domaines,
comme la politique, le travail, la formation ainsi que dans le secteur social et médico-
social qui nous concerne plus particulièrement. Après la présentation de l’émergence de
cette notion, je m’arrêterai sur son utilisation actuelle dans le travail social.
I) La notion de projet : Une anticipation présente du futur
L’émergence de cette notion
Étymologiquement issu du latin pro-jacere, signifiant jeter en avant, c’est au
XVe siècle que le projet a été pour la première fois, utilisé dans le domaine de
l’architecture. Il désigne alors des éléments placés en avant d’un bâtiment comme un
balcon. C’est alors une projection dans l’espace et dans le temps de ce qui va être
amené, à être construit. Dès lors, il existe une dissociation dans le temps du projet et de
son exécution.
Au XVIIIe siècle, la dimension relationnelle du projet a été évoquée par le
philosophe J. Fichte36, qui le voit comme une possibilité de sortir de soi. En effet, au
niveau collectif c’est une mise en interaction du sujet et de son environnement. Se pose
alors qu’un projet évolue suivant la société où il se situe, et notamment dans la façon
dont le lien social est envisagé. Se projeter dans la société actuelle ne regroupe pas les
mêmes enjeux qu’il y a plusieurs siècles. Selon J. Rouzel, « pour anticiper dans le 36 Philosophe Allemand du XVIIIe siècle.
25
temps, il faut qu’une culture ait une conception du temps linéaire, permettant la
projection en avant »37. Une construction cyclique entraîne d’avantage une tendance au
rituel plus qu’au projet. Actuellement, notre conception linéaire du temps amène cette
notion comme centrale.
En sociologie, la notion de projet a été travaillée par M. Crozier38 dans le
domaine de la sociologie des organisations. Orienté vers l’acteur, il cherche à
réintroduire sa place dans un système ainsi qu’une marge de manœuvre visant l’action
et la mise en projet. Dans ce cadre, le projet est alors vu comme une forme de liberté
individuelle de pensée mais aussi d’action.
L’ouvrage de JP. Boutinet sur l’anthropologie du projet fait référence
aujourd’hui pour tenter de le définir. Selon lui, le projet est « une anticipation opératoire
partiellement déterminée »39. Ainsi, c’est une façon d’appréhender l’avenir dans une
visée de le modifier mais de manière « jamais totalement réalisée, toujours à reprendre,
cherchant indéfiniment à polariser l’action vers ce qu’elle n’est pas »40. Dans cette
vision, un projet tente de combler un manque qui serait propre à tout humain. A la
recherche d’un idéal possible, « la mise en projet est alors permanente »41.
Le projet aujourd’hui en travail social
Cette notion est utilisée à plusieurs niveaux dans le travail social depuis
notamment, la réforme des annexes XXIV42. Il existe ainsi le projet associatif, le projet
d’établissement ou de service, le projet personnalisé, le projet éducatif d’activité, etc.
Même à des niveaux différents ces conduites de projet ont pour similitude de « donner
du sens à l’action qu’elles anticipent »43.
Depuis la loi du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale, le
projet d’établissement et le projet personnalisé d’accompagnement sont devenus des
obligations juridiques. Ainsi, c’est le droit des personnes accompagnées qui est
37 J. Rouzel, Le travail d’éducateur spécialisé, éthique et pratique, éd. Dunod, 2000, p.49. 38 Sociologue français du XXe siècle. 39 J-P Boutinet, Anthropologie du projet, 1990. 40 Ibid. 41 Ibid. 42Les annexes XXIV du 27 octobre 1989 fixent les conditions techniques d’autorisation des établissements et des services prenant en charge des enfants ou adolescents présentant des déficiences intellectuelles ou inadaptés. 43 J-P Boutinet, Anthropologie du projet, 1990.
26
réaffirmé à travers ces documents se situant au plus près des situations. De manière
synthétique, le projet personnalisé découle du projet d’établissement qui lui-même
découle du projet associatif.
A partir des éléments de définition du projet, il me semble important de préciser
plusieurs de ses enjeux, notamment dans le cadre de la mise en œuvre d’un projet
personnalisé en travail social.
Le projet, permanent dans notre société est une forme de concrétisation ou non
d'un désir formulé quelques temps auparavant. Tentant de répondre à un manque, il peut
être assimilé à un outil de désir. Cependant, le projet n'est pas sa réalisation. Ainsi, dans
cette démarche de mise en mouvement se met au travail notre recherche d’un idéal du
bonheur. Il ne s'agit peut-être pas alors de réaliser à tout prix les projets mis en place
mais davantage de créer les conditions et à faire advenir la personne en tant qu'être
désirant.
Ainsi, le projet appartient à un sujet. L’éducateur est alors le médiateur en
accompagnant à la formulation des désirs de la personne ou en faisant tiers avec
l'équipe. Il s’agit également pour le professionnel de prendre en compte les exigences
institutionnelles car tout projet est soumis à contraintes.
Dans le cadre de ma recherche-action, la notion de projet est centrale. Plusieurs
éléments sont importants à retenir :
- Un projet est une anticipation d’une action future qui reflète un désir humain
de se projeter vers un mieux-être.
- C’est un outil pour l’éducateur pour mettre au travail certaines difficultés des
personnes accompagnées, tout en se basant sur leurs capacités opératoires.
- Le projet renvoie également à la façon dont j’envisage l’autre accompagné et
dont je m’envisage en tant qu’éducatrice.
II) Un projet d’ouverture à l’environnement
Un projet s’appuie sur une méthode précise qui amène à déconstruire chaque
27
élément apporté : Qui ? Quoi ? Pour qui ? Pourquoi ?, etc. Ainsi, à travers ces sous-
parties, je souhaite aborder l’ensemble de mes choix d’intervention et en faire part dans
une démarche clinique. Il s’agit de questionner mes propres intentions mais également
les intentions institutionnelles et repérer à quels niveaux elles se rejoignent et
conduisent à faire un projet.
Le porteur de projet
Dans un premier temps, il me semblait que la question du « pour qui » devait
être la première à figurer dans cette présentation du projet. Cependant, au fur et à
mesure de la mise en place du projet, je me suis interrogée sur ma propre implication
professionnelle mais aussi personnelle. Selon J. Rouzel, « Un projet naît d’une
intention, d’une idée. Le porteur de projet doit s’impliquer dans cette projection. »44
Cette mise au travail n’est pas des plus évidentes mais elle amène à s’interroger sur sa
posture et sa vision de l’éducation.
Pour ma part, cette proposition de projet était au début de ma réflexion, un outil
éducatif pour se distancier d’une vision « figée » des troubles du comportement. C’était
également une possibilité d’intervenir collectivement à l’extérieur du SESSAD et ainsi
amener à une ouverture vers l’environnement. Ma vision a quelque peu évolué à partir
de la réalisation du projet en m’appuyant sur les observations des situations rencontrées.
En effet, il me semble aujourd’hui mettre de plus en plus en avant la place centrale des
enfants dans ce projet et leur degré de participation.
Ce projet reflète également les valeurs qui m’ont amenée à choisir le métier
d’éducatrice. L’égalité, la solidarité et la liberté des personnes sont les valeurs qui
soutiennent mon intervention au quotidien. Ainsi, à partir de ce projet, j’ai souhaité les
mettre en avant et faire des choix d’actions en gardant en toile de fond ces valeurs qui
me sont fondamentales.
Le projet « découverte de ma ville »
Suite à mes constats exposés dans le premier chapitre de mon mémoire, mon
idée consiste en une découverte de Marseille à partir de « lieux de vie ». Cette ouverture
44 J. Rouzel, Le travail d’éducateur spécialisé, éthique et pratique, éd. Dunod, 2000, p.57.
28
vers l’extérieur se veut une des réponses à la mission de socialisation du SESSAD. Cet
espace collectif est un outil de mise au travail de la dynamique de groupe mais
également de l’ouverture vers l’environnement.
Ainsi, j’ai choisi son nom « découverte de ma ville », au début de ma réflexion.
Il correspond à un positionnement qui implique l’enfant (« ma ville ») à partir de son
propre regard.
Méthode d’intervention
Après mes premières réflexions et échanges avec l’équipe, j’ai souhaité assez
rapidement me situer dans l’action. Sans négliger la nécessité de poser un cadre avec
des finalités précises, c’est l’occasion de donner une place importante à l’action et à la
régulation qui en découlent. Ce raisonnement inductif est une façon de penser qui va du
particulier au général. Ainsi, l’expérience et l’observation sont la base du projet et de
son avancement et non le programme, ce qui est pensé en amont.
De plus, au-delà des temps informels, j’ai souhaité appuyer ce projet sur des
espaces de régulation pour faire des va-et-vient entre la pensée et l’action. Ainsi, des
temps d’échange sont prévus avant chaque sortie avec les familles, pendant avec les
enfants et après avec l’éducatrice qui intervient avec moi dans ce projet. Un bilan écrit
est réalisé à chaque fois pour faire un point sur le déroulement mais aussi faire des
réajustements avec ce qui a été fixé au préalable de l’action. Enfin, un temps d’échanges
avec les éducateurs référents apporte des éléments qui font lien entre l’enfant dans ce
groupe et son accompagnement au SESSAD de manière générale.
Les finalités de l’intervention
Les finalités du projet se situent à plusieurs niveaux mais soutiennent le même
fil conducteur dans mon intervention, à savoir la place des enfants dans ce projet
éducatif.
Il s’agit tout d’abord d’être dans un groupe. Pour des enfants ayant des
difficultés principalement au niveau relationnel, se situer dans un groupe de pairs est
une mise au travail de celles-ci. Au sein d’un groupe, il y a également des règles, règles
qui sont interrogées, mises à mal mais qui font cadre. L’éducateur garant de ce dernier a
une position à questionner sans cesse dans ce temps collectif. De cette finalité, se
29
dégage un indicateur qui viendra poser s’il y a eu évolution. Il s’agira à partir d’analyse
d’observations de s’attacher à repérer chaque enfant dans sa relation aux pairs et sa
relation à l’adulte.
De plus, à partir de la découverte de lieux emblématiques de Marseille, une des
finalités recherchée est d’être acteur de son environnement. Comme cela a été exposé
dans la partie théorique sur la socialisation, je défends une vision de l’enfant acteur de
son environnement et de son projet de vie. Ainsi, les sorties éducatives dans ces
différents lieux sont une façon de se saisir des potentiels du territoire. Il s’agit d’éveiller
une certaine curiosité à un environnement leur renvoyant parfois leurs difficultés à être
dans ce vivre ensemble. Pour l’évaluation de cette finalité, sera mise en exergue la
relation à l’environnement pour chaque enfant.
Enfin, ce projet se veut un lieu de repère espace-temps. Plusieurs outils,
présentés dans les parties suivantes, seront utilisés pour arriver à cette finalité. Pour des
enfants accueillis en SESSAD ayant parfois du mal à se situer, le cadre de ce projet
apporte une certaine sécurité. Néanmoins, l’intervention se veut souple notamment dans
la façon dont chaque enfant aura de s’en saisira. Cette finalité sera posée par rapport aux
repérages dans la ville au niveau de l’espace et au repérage dans le projet au niveau du
temps.
Après avoir posé ces finalités par écrit, j’ai fait le choix d’échanger à ce moment
avec les membres de l’équipe. Ces échanges avec les professionnels de l’équipe
pluridisciplinaire de manière informelle et lors d’une réunion d’équipe ont enrichi ma
réflexion. Une éducatrice m’a fait part de sa volonté de vouloir participer à ce projet
avec moi dans sa conception et sa réalisation. Les échanges avec l’équipe ont été
également le moment d’interroger les enfants qui allaient être concernés par le projet.
Les enfants concernés par le projet
Le groupe du projet « découverte de ma ville » concerne cinq enfants accueillis
au SESSAD. Les enfants ont intégré le groupe suivant leur projet personnalisé
d’accompagnement. Ainsi, lors de la réunion hebdomadaire où les projets sont
constitués en équipe pluridisciplinaire, certains enfants ont été pressentis comme
pouvant participer au groupe au vu de ses finalités. Ces choix ont été motivés par des
difficultés d’inscription dans l’environnement mais également des difficultés à se situer
30
dans un groupe de pairs.
Lors de la signature du projet personnalisé, une présentation du projet
personnalisé global et notamment du projet « découverte de ma ville » a été faite à
chaque famille et enfant. En effet, leur accord est nécessaire pour la poursuite de
l’accompagnement SESSAD.
Les cinq enfants pressentis sont accueillis indifféremment sur les deux antennes
du SESSAD. Ainsi, j’avais connaissance de la situation de certains enfants mais pas de
tous. A ce moment de mon projet, j’ai réalisé des recherches sur chaque enfant à partir
d’échanges avec les éducateurs référents et les membres de l’équipe pluridisciplinaire
mais également à partir des dossiers des enfants.
Ophélie45 a huit ans, elle est arrivée au SESSAD en avril 2010. Elle et sa mère
sont très en demande d’être aidées. Son accompagnement est principalement basé sur un
travail dans sa relation à l’autre, adulte et pair.
Accueilli depuis juin 2009 au SESSAD, Youri a dix ans. Il est motivé et en
demande que l’on s’occupe de lui et d’apprendre. Il est accompagné dans un soutien au
niveau de ses apprentissages et de la verbalisation de ses émotions.
Florence a elle onze ans. Elle est dite sociable et présentant de bonnes capacités
d’évolution, par l’équipe. Un travail sur l’image de soi et son processus d’individuation
est engagé ainsi qu’un soutien dans les apprentissages.
Amandine, onze ans, est arrivée au SESSAD au cours de mon stage en
septembre 2010. Elle est très en demande par rapport au SESSAD et montre des
potentialités avec les autres. Sa place d’enfant et la continuité des liens relationnels sont
deux axes principaux de son projet personnalisé. Il est également question de travailler
son investissement dans les apprentissages.
Enfin, Florent a onze ans et est entré au SESSAD en septembre 2010. Il est en
demande d’aide. Le travail du SESSAD se situe autour des pré-requis aux
apprentissages ainsi que la verbalisation de son mal être.
Le projet « découverte de ma ville » concerne donc cinq enfants accueillis en SESSAD
45 Les prénoms des enfants ont été modifiés, dans le respect de leur anonymat.
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pour diverses difficultés ainsi qu’une éducatrice et moi-même. Se situer dans une
dynamique de groupe, être acteur de son environnement et se repérer dans l’espace et
le temps sont les finalités de ce projet d’ouverture. Relatée de manière clinique, ma
démarche se veut au plus près des situations de chaque enfant.
III) Les sorties éducatives collectives comme moyen d’action
A partir des éléments de la partie précédente et d’autres échanges avec
l’éducatrice qui participe à l’élaboration du projet, nous avons proposé un écrit46 de
présentation de celui-ci à la demande de la chef de service. Puis assez rapidement, nous
nous sommes lancées dans une première sortie éducative après avoir fixé son
déroulement de manière générale.
Le déroulement type des sorties
Pour être en accord avec les finalités, nous nous sommes appuyées sur des
éléments faisant cadre à notre intervention.
Tout d’abord, nous avons décidé d’être en lien avec les familles des enfants du
groupe lors de chaque sortie éducative. Ainsi, nous avons demandé aux familles
d’accompagner leur enfant à chaque fois au SESSAD et à la même heure. Cette espace
d’échange permet aux familles d’avoir une place dans le projet en se tenant informées
de l’avancement du projet. De plus, à la fin de chaque sortie, nous (ma collègue
éducatrice et moi-même) avons raccompagné chaque enfant à leur domicile en prenant
également le temps de discuter du déroulement de l’après-midi et des futures sorties.
Nous avons également posé l’importance de prendre les transports en commun
pour se déplacer dans la ville. En effet, non seulement ce choix justifiait le fait que les
enfants pouvaient refaire cette sortie par leurs propres moyens mais également cela a été
46 Voir en Annexe n°1, l’écrit de présentation du projet « découverte de ma ville ».
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un moyen de se repérer. Ainsi, à plusieurs reprises nous nous sommes arrêtés devant un
plan de la ville pour chercher où nous étions, où nous allions, où ils habitaient, où était
le SESSAD, etc.
Nous avons proposé une découverte des lieux dans un groupe mais nous
souhaitions que de manière individuelle chacun ait son espace de découverte. Ainsi,
nous avons utilisé un appareil photo pour garder trace de chaque sortie. Chaque enfant
avait la possibilité de prendre trois photos à chaque fois. La proposition était de prendre
en photo « ce qui te marque, te questionne, te plaît dans ce lieu ». Cela pouvait aussi
bien être des personnes, que le lieu dans son ensemble, ou une partie, etc. Ces photos
allaient constituer un « carnet de voyage » reprenant toutes les sorties.
Enfin, le dernier moment de chaque sortie était un temps de goûter. Convivial,
ce moment était également l’occasion de discuter de ce qui avait été découvert mais
également de ce que nous allions découvrir. La décision de la future ou des futures
sorties était prise en groupe à ce moment-là.
Les différentes sorties du groupe
Le choix de l’ensemble des sorties de manière précise, n’a pas été fixée avant la
première sortie. La volonté de ne pas tout programmer a été choisie pour laisser place
aux souhaits des enfants, à la décision du groupe. Ainsi, l’éducatrice et moi-même
avons prévu la première sortie pour impulser la dynamique du groupe. Puis, les sorties
suivantes ont été une décision commune.
Le rythme des sorties a dû être pensé en amont pour des raisons institutionnelles.
Ainsi, nous avons choisi une sortie par mois d’octobre à avril. Ce choix a été fait en
adéquation avec les finalités de se repérer dans le temps. Il a également pris en compte
les disponibilités des enfants, qui étaient parfois sur d’autres activités, de l’éducatrice
réalisant le projet qui travaille à mi-temps au SESSAD et de moi-même en stage et donc
soumise aux aléas des regroupements à l’école. Dans un premier temps, j’évoquerai une
brève description de ces huit rencontres, puis viendra une analyse plus approfondie dans
les prochaines parties.
Notre Dame de la Garde le 27 octobre 2010
Cette première sortie est l’occasion de rediscuter avec les familles et les enfants
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de l’ensemble du projet. Nous demandons aux familles de signer une autorisation
parentale pour prendre en photo leur enfant durant les différentes sorties.
Le lieu de Notre Dame de la Garde a été choisi principalement pour sa position
en hauteur de la ville. Ce lieu avec un panorama sur Marseille est l’occasion de
nombreuses questions : Où j’habite ? Où est la gare ? Le vélodrome ? Combien y a-t-il
d’habitants à Marseille ? Etc. Chacun s’interroge à différents niveaux. Nous sommes
entrés dans la basilique mais peu d’échanges ont émergé de ce lieu. L’idée principale
était de prendre du recul quant à ce territoire et venir se situer au-dessus pour en avoir
une vision globale et complexe. Avec ce décor en fond, la présentation et l’élaboration
du projet avec les enfants prennent forme.
La Vieille Charité le 24 novembre 2010
La Vieille Charité avec la visite de son musée d’archéologie et de celui d’arts
Africains, Océaniens et Amérindiens a été formulée à la demande d’une enfant,
demande qui a été soutenue par la suite par le groupe.
Cette visite a confronté les enfants aux règles dans un musée parfois difficiles à
respecter (ne pas courir, ne pas toucher les œuvres d’art, ne pas crier, etc). Ces règles
sont alors discutées, questionnées. Les limites doivent être rappelées et explicitées.
Dans cet espace les contraintes sont importantes pour le groupe. A plusieurs reprises,
nous choisissons de faire des pauses dans la visite (goûter, photo) pour entrecouper la
longueur de l’après-midi.
La bibliothèque de l’Alcazar le 21 décembre 2010
La découverte de la bibliothèque à ce moment du projet, est due aux aléas
climatiques qui ne nous ont pas permis de faire la sortie prévu à l’extérieur.
La bibliothèque est un lieu où l’écrit prédomine. Certains enfants sont ainsi
confrontés à leurs difficultés quant à l’apprentissage de la lecture. Chacun alors
découvre l’endroit à sa façon, certains en demandant des informations aux
documentalistes, d’autres en allant vers les ordinateurs ou les bandes dessinées. Là
encore le lieu a ses propres règles (peu de bruit, pas le droit de courir). Ces contraintes
sont parfois importantes et entraînent une agitation qui nécessite pour certains d’être
isolé du groupe pour s’apaiser. La visite se clôture par une demande du groupe
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d’amener chez eux les documents d’inscription à la bibliothèque.
Atelier photo au SESSAD le 19 janvier 2011
Nous sommes à peu près à la moitié du nombre de sorties, cet atelier photo est
l’occasion de se poser au SESSAD et de faire un point sur le projet.
Toutes les photos prises individuellement à chaque sortie sont distribuées ainsi
que des documents d’informations des différents lieux. Il a été proposé de réaliser un
document récapitulatif des visites effectuées de manière individuelle ou collective.
Chacun a souhaité faire sa propre création à partir de ses photos. Certains enfants ont
décidé de ramener le document crée chez eux, d’autres ont souhaité le laisser au
SESSAD. Nous avons également participé à l’activité.
Théâtre Massalia le 2 février 2011
Cette sortie pour aller voir une pièce de théâtre est une découverte assez passive
pour le groupe. En effet, assis dans une salle, dans le noir, sans pouvoir exprimer en
direct ses ressentis était complexe pour certains. Cet espace fermé nécessite une
attention particulière difficile à tenir durant cinquante minutes. La discussion avec les
actrices à la fin de la pièce a permis d’avoir une place plus active dans la découverte.
Palais du Pharo et plage des Catalans le 22 février 2011
Suite à la dernière sortie, la demande du groupe est de pouvoir jouer dehors. La
découverte du Palais du Pharo se fait principalement sur les pelouses et les jeux aux
alentours. Les enfants du groupe sollicitent à plusieurs reprises leurs pairs présents pour
jouer. Les interactions entre eux sont moins présentes.
Ile du Frioul le 23 mars 2011
La journée à l’île du Frioul qui avait été demandée au début, a été la dernière
sortie du projet, pour des raisons de coût. La traversée en bateau a permis au groupe de
se sentir voyager, tout en restant à Marseille. La découverte des fonds marins a pris une
bonne partie de la journée ainsi que des jeux autour de l’eau. Cette dernière sortie a été
l’occasion d’amener par des échanges la fin du projet.
Atelier photo le 13 avril 2011
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Cette dernière rencontre a permis de finir le projet à partir des photos prises lors
des dernières sorties. Tous ont souhaité ramené une partie de leur création chez eux.
Une exposition du projet a été faite à partir d’un plan de Marseille, en y indiquant les
différents lieux visités. L’ensemble des œuvres ont été exposé dans la salle d’attente du
SESSAD à la demande du groupe.
Les différentes sorties éducatives ont été un moyen d’action pour viser les
finalités fixées par le projet. Ainsi, un cadre précis est venu poser notre intervention
éducative. Pensées dans un projet d’ensemble, ces différentes sorties ont été le lieu
d’une évolution de chaque enfant.
IV) L’évolution des enfants dans cette démarche de projet
Dans cette partie, je me situe d’ores et déjà dans une forme d’évaluation de
l’évolution des enfants au fur et à mesure de l’avancée du projet. Ainsi, la situation de
chaque enfant sera retranscrite de manière clinique, à partir de leur arrivée au SESSAD,
tant sur la façon dont s’expriment leurs troubles que sur le choix de ce projet et sur leur
évolution au sein de ce dernier. Les indicateurs tels que la relation aux pairs, la relation
aux adultes, le rapport à l’environnement et les repères espace-temps seront alors
abordés.
Youri
Youri a dix ans et est arrivé au SESSAD en juin 2009. Une importante
inhibition, des difficultés à entrer dans les apprentissages ainsi que des carences
éducatives de la famille sont à l’origine de cette demande d’orientation.
Observation et projet personnalisé au SESSAD
Les parents de Youri sont nés aux Comores et arrivés en France en 1997. Les
cinq garçons de la fratrie sont nés en France, à Marseille. Les trois aînés dont Youri sont
nés d’une première union. Leur père est décédé suite à un accident vasculaire cérébral
en 2002, lorsque Youri avait 2 ans. Deux autres enfants sont nés d’une nouvelle union.
Youri n’a eu aucun suivi avant d’arriver au SESSAD, celui dans un Centre Médico-
Psycho-Pédagogique (CMPP) n’ayant pas abouti.
Au niveau de sa scolarité, Youri est actuellement en CM1. Il a redoublé son CP.
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Au début de sa prise en charge au SESSAD, il avait un retard important de langage,
ainsi qu’un retard de manière générale dans les apprentissages. Il n’était pas lecteur.
Une institutrice spécialisée l’aidait dans ses difficultés une fois par semaine. En classe,
sa maîtresse trouvait qu’il parlait peu voire pas du tout. L’école faisait part d’une mère
peu présente dans sa scolarité.
Aujourd’hui, Youri est pratiquement lecteur et le passage à l’écrit est en train de
se faire. Il s’est libéré au niveau du langage. Il est acteur en classe et parle même parfois
trop et à n’importe quel moment. Toujours en décalage au niveau des apprentissages, il
était accueilli en CE1 tous les matins jusqu’en janvier. Cette classe était plus adaptée à
son niveau en maths et français. Depuis janvier, perturbant trop la classe par son
comportement, cette intégration n’a plus été possible. Il est donc actuellement toute la
journée en CM1 avec toujours un suivi une fois par semaine avec une institutrice
spécialisée. Une Classe d’Intégration Scolaire (CLIS) pour l’année prochaine, a été
demandée à la dernière équipe de suivi en mars.
Au domicile, sa mère dit qu’il est épanoui et que c’est à l’école qu’il est inhibé.
Chez lui, Youri dit jouer et parler avec ses frères. Il va à l’école Coranique à la demande
de sa mère.
Dans son environnement, avec ses pairs, notamment à l’école, Youri joue avec
ses camarades. Il est bien intégré dans sa classe. Lorsqu’il ne connaît pas les enfants, au
SESSAD par exemple, il a tendance à se replier sur lui-même. Il n’est pas inscrit au
centre aéré ni le mercredi ni les vacances. Cependant depuis janvier, à sa demande,
Youri est inscrit au club de rugby de son quartier.
En groupe, au SESSAD, Youri a des difficultés à jouer avec les autres et à entrer
en relation avec eux. Il a une relation avec ses pairs assez inhibée. Avec l’adulte, il peut
avoir des difficultés à répondre aux sollicitations (questions le concernant, demande de
choix, etc). En groupe, avec l’éducateur ces difficultés sont présentes mais
s’amenuisent. Youri est en mesure de faire des demandes. Néanmoins, il lui est toujours
difficile d’exprimer ses émotions.
Son projet personnalisé se situe dans l’accompagnement à verbaliser ses
émotions ainsi qu’une aide dans ses apprentissages. Ainsi, Youri a un suivi en
psychomotricité et orthophonie une fois par semaine. Le suivi éducatif se base
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principalement sur le lien école-famille-SESSAD. Depuis mars, un suivi psychologique
hebdomadaire est mis en place. Youri fait également partie du projet « découverte de
ma ville ».
Ses enjeux dans la participation au projet
Suite à une réflexion d’équipe, ce projet a été proposé à Youri au vu de ses
difficultés relationnelles avec l’autre, pair et adulte. C’est également la possibilité pour
lui de s’inscrire dans une dynamique de groupe autre que le groupe classe. Cet atelier
qui a lieu le mercredi et pendant les vacances dans Marseille est une façon
d’accompagner Youri vers l’extérieur.
La relation avec ses pairs dans le projet
Au début du projet, Youri avec ses pairs était très en retrait. Sans être dans
l’isolement non plus, Youri était là, présent mais peu dans l’échange avec les autres.
Lors de la première rencontre Ophélie lui demande « Tu t’appelles comment ? » Youri
ne la regarde pas dans les yeux, baisse la tête et répond tout bas « Youri ». Ophélie n’a
pas entendu. Youri répète alors un tout petit peu plus fort. Ophélie le questionne encore
« Tu as quel âge ? Tu es en quelle classe ? » Youri répond brièvement puis se tourne et
va devant l’ordinateur. Ophélie vient alors me voir et me demande s’il est handicapé.
Dès le départ, j’ai un sentiment de décalage par rapport à certains enfants plus dans
l’agitation.
Youri s’est assez rapidement, lors des sorties, bien entendu avec Florent. C’est
principalement dans le jeu qu’ils se sont retrouvés. Florent lui court après, puis c’est le
tour de Youri. Ils découvrent les différents lieux en explorant ensemble. « Regarde
Youri » dit Florent en lui montrant une jolie pierre et voilà qu’ils se mettent à se
l’envoyer et s’amuser avec. Ensemble, ils parlent peu et je ressens en eux une
immaturité importante dans laquelle ils se rejoignent et qu’ils partagent ensemble.
Youri semble à ce jour, toujours dans la réserve avec les autres. Il est cependant,
en capacité même avec ces difficultés d’être en relation avec ses pairs. Lors de la sortie
au Palais du Pharo, il a d’ailleurs sollicité de lui-même un groupe d’enfant de son âge,
qu’il ne connaissait pas et qui jouaient au football. Il me semble qu’à ce niveau-là Youri
a plus confiance en lui, confiance qui lui permet d’aller plus vers les autres.
38
La relation à l’adulte dans le projet
Avec l’adulte dans le groupe, Youri a du mal à être dans l’échange. Il lui est
difficile d’exprimer ce qu’il ressent lorsque je le sollicite sur ses ressentis. Ma relation
avec lui est particulière vu qu’il est le seul du groupe, dont je suis en coréférence le
projet au sein du SESSAD. Je suis donc amenée à le voir beaucoup plus régulièrement
que les autres enfants.
A notre rencontre, c’est un enfant avec lequel j’ai eu des difficultés à entrer en
relation. En effet, Youri est assez inhibé alors que dans mes représentations les troubles
du comportement se situaient plutôt dans l’agitation. Au fil du temps et des différentes
rencontres avec lui, sa mère, son institutrice et ses différents intervenants du SESSAD,
je me suis positionnée plus à l’écoute et moins dans la sollicitation. En étant moins dans
l’attente, je me suis aperçue que cette différence de regard avait des effets. Ainsi, il a été
possible pour Youri de faire plusieurs demandes (inscription au rugby, demande d’être
sorti plus souvent de l’école) mais également de venir m’interroger sur des questions le
concernant (orientation l’an prochain, future sortie du groupe). Dans le projet
« découverte de ma ville », cela s’est également répercuté dans sa position face à
l’éducateur. Youri, au fur et à mesure, s’est autorisé à faire des propositions de sorties
au sein du groupe (plage, bibliothèque).
Son rapport à l’environnement dans le projet
Youri par rapport à l’environnement lors des différentes sorties s’est montré au
début assez en retrait. Il s’autorise peu à être dans la curiosité de découverte des lieux et
des personnes. Ainsi, il ne se situait qu’au sein du groupe et allait peu interpeller les
possibles autour de lui. Au fil des sorties, il a pu être plus confiant et pouvoir aller vers
les autres même sans les connaître. Peut-être cette ouverture lui a-t-elle permis de faire
la demande d’une inscription dans son quartier dans un club de rugby au mois de
janvier. Youri dans son environnement paraît plus à l’aise, en capacité de vouloir le
découvrir.
Ses repères espace-temps
Le repérage dans le temps et l’espace reste encore complexe pour Youri. Dans la
ville, les déplacements sont encore difficiles s’il n’est pas accompagné. Youri a
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tendance à être ailleurs et ne pas faire attention au danger de la circulation. Dans son
quartier, il est en mesure de se déplacer seul. Youri a bien investi les photos à prendre à
chaque sortie. Lors de l’atelier photo au milieu du projet, cela a été l’occasion pour lui
de faire preuve de grande créativité. Le repérage du projet dans son ensemble paraît être
saisi, Youri interrogeant les différentes sorties au fur et à mesure, faisant souvent
référence à la dernière sortie au Frioul.
Florence
Florence est une jeune fille de onze ans, arrivée au SESSAD l’été dernier. Son
accueil a été demandé par l’école qui constatait une inhibition intellectuelle et des
troubles du comportement au niveau alimentaire.
Observation et projet personnalisé au SESSAD
Les parents de Florence sont séparés. Elle vit avec sa mère et ne voit plus son
père depuis 2007. Elle est la troisième enfant d’une fratrie de quatre. Avant le SESSAD,
Florence était suivie dans un CMPP par une orthophoniste et une psychologue. Cet
accompagnement s’est arrêté à son entrée au SESSAD.
Au niveau scolaire, Florence a redoublé le CE1. Elle rencontre des difficultés
dans les apprentissages. Elle est parfois isolée dans la cour de récréation. En classe, elle
peut participer mais parfois de manière « hors-sujet ». Une proposition d’orientation en
6ème SEGPA a été faite lors d’une Equipe de Suivi de Scolarisation (ESS).
Au domicile, sa mère semble être dans le surmaternage. Leur relation mère/fille
paraît très proche. Son éducateur référent évoque un manque de cadre éducatif.
Avec ses pairs, Florence paraît inhibée au premier abord. Quand elle est en
confiance, elle sait libérer la parole. Ainsi, elle peut même faire preuve de complicité
avec d’autres enfants. Florence n’est inscrite dans aucun club ou centre aéré, elle ne le
souhaite pas.
Lors des activités éducatives en groupe au SESSAD, Florence est une enfant
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assez épanouie et plutôt bavarde. Elle apprécie d’aider les autres. Avec l’éducateur,
c’est une enfant curieuse et intelligente. Elle fait part de bon raisonnement et d’une
certaine maturité dans ses questionnements. Florence est consciente de ses difficultés.
En relation individuelle avec l’éducateur, Florence souhaite également souvent
aider les autres. Elle se montre protectrice et attentive avec eux. Le surpoids de Florence
rend difficile ses déplacements. De plus, son habillement n’est pas toujours adapté
(toujours le même, pas adapté au temps, etc.).
Suite à ces observations, un projet personnalisé a été proposé à Florence et à sa
famille. L’équipe a tout d’abord noté des éléments ressources avec de bonnes capacités
d’évolution et une jeune fille sociable. Les domaines à renforcer se situent autour des
apprentissages, de l’image de soi et de son processus d’individuation. Pour mettre en
place ces éléments, plusieurs axes de travail lui ont été proposés : un accompagnement
éducatif, deux rendez-vous hebdomadaires avec une orthophoniste en libéral, un suivi
psychologique hebdomadaire au SESSAD, l’atelier théâtre et le projet « découverte de
ma ville ».
Ses enjeux dans la participation au projet
Suite à une réflexion d’équipe, ce projet a été proposé à Florence aux vues du
travail mené par le SESSAD autour de son estime de soi. Ainsi, se confronter aux autres
dans un groupe sécurisant et valorisant, est une possibilité de prendre confiance en elle.
C’est également une façon d’accompagner Florence vers l’extérieur, elle qui a des
difficultés à trouver sa place même à l’école.
La relation avec ses pairs dans le projet
Au début du projet, la relation de Florence avec ses pairs était parfois
compliquée. Tantôt se positionnant comme une « éducatrice », tantôt assez isolée, il
était difficile pour Florence de se situer à une place d’enfant. Dans la salle d’attente
avant de partir en sortie, le groupe d’enfants s’amuse et commence à s’agiter. Ophélie
court, Florent sort tous les jouets et Youri poursuit Ophélie dans le SESSAD. Florence
intervient alors, « Mais arrêtez, vous faites n’importe quoi !». Ophélie lui rétorque « Oh
mais ça va toi, on dirait que t’es pas une enfant, tu ne sais pas rigoler ». Cécilia,
l’éducatrice intervient et évoque un départ dans le calme ce qui apaise petit à petit le
41
groupe. Plus tard, nous reprendrons cette discussion avec Florence.
Il a fallu du temps pour que Florence s’autorise plus à être dans le jeu avec les
autres. Néanmoins aujourd’hui, elle arrive à se situer dans le groupe même si elle a
toujours besoin de s’isoler durant les sorties. Florence semble moins anxieuse par
rapport aux autres mais son image d’elle-même reste un point à travailler.
La relation à l’adulte dans le projet
Avec l’adulte dans le groupe, Florence est plutôt à l’aise dès nos premières
rencontres. C’est une enfant que je ne connaissais pas avant le début de projet. Florence
se montre curieuse et pose des questions assez matures par rapport aux lieux découverts.
Avec une certaine retenue, elle arrive néanmoins à exprimer son anxiété dans certaines
situations, à faire part de ses souhaits pour les futures sorties et à échanger avec les
éducatrices sur ses questionnements.
Florence s’attache rapidement aux personnes autour d’elle. Ainsi, à plusieurs
reprises durant nos rencontres, elle évoquait la fin du projet et mon départ. Malgré des
échanges sur cette fin qui semblait l’inquiéter, Florence paraissait particulièrement
bouleversée. Cette situation au premier abord m’a touchée, je me suis sentie assez
démunie par rapport à ce trop plein d’affect. Ma difficulté était de me situer entre un
attachement personnel au groupe et à Florence et une distance professionnelle
m’amenant à replacer le projet dans l’accompagnement SESSAD qui lui ne s’arrêterait
pas à mon départ. Cette situation paradoxale principalement visible dans ma relation
avec Florence m’a amenée à me questionner quant à ma position dans un moment de fin
de projet (comment penser la fin ? comment échanger sur cette question avec les
enfants, les familles ? comment me situer dans une fin de stage également ? Etc).
Son rapport à l’environnement dans le projet
Florence par rapport à l’environnement s’est montrée assez à l’aise par rapport
aux difficultés qui étaient pointées à son arrivée au SESSAD. Durant les sorties, elle
interpelle de manière adaptée les personnes ressources dans les différents lieux
(documentaliste, actrice, etc). Florence semble avoir pris confiance en elle à ce niveau-
là. Lors de la visite à la bibliothèque, elle avait demandé les documents d’inscription.
Son éducateur référent pensait l’accompagner avec sa mère dans cette démarche. Durant
42
notre rencontre suivante, Florence m’explique qu’elle est allée avec sa mère rendre les
documents d’inscription. Elles y vont ensemble tous les samedis, regarder et emprunter
des livres. Florence s’est saisie seule de cette opportunité.
Ses repères espace-temps
Le repérage dans le temps et l’espace ne semblaient pas être une difficulté pour
Florence au début du projet. Les différentes sorties l’ont amené néanmoins à mieux
saisir les lieux ressources dans la ville. Les déplacements qui étaient pointés comme
compliqués pour elle, n’ont pas été une difficulté dans ce projet. L’atelier photo a été
très investi par Florence, qui a choisi de ramener sa création à la maison pour le montrer
à sa mère. Dans le temps, elle semble ne pas avoir de difficultés particulières si ce n’est
une grande appréhension par rapport à la fin du projet alors qu’il venait de commencer,
mais cette difficulté est plus d’ordre affective.
Amandine
Amandine ne s’est pas inscrite dans l’accompagnement du SESSAD et par
conséquence n’a pas pu faire partie du groupe. Après quelques bilans, sa mère n’a plus
donné de nouvelles. Etant déscolarisée et ne venant pas aux soins proposés par le
SESSAD, une information préoccupante a été réalisée conjointement avec l’école. A ce
jour, la prise en charge SESSAD est suspendue.
Florent
Florent onze ans, est suivi au SESSAD depuis septembre 2010. Son orientation a
été signifiée principalement par son école, faisant part de difficultés dans les
apprentissages, d’une importante inhibition ainsi que d’une souffrance psychique.
Observation et projet personnalisé au SESSAD
Florent est le deuxième enfant d’une fratrie de sept. Son père est inconnu. C’est
la tante de Florent qui a sa garde. Le droit de visite de sa mère est peu exercé du fait de
sa vie dans la marginalité. Une mesure AEMO était en place jusqu’au jour de la pré-
admission au SESSAD en juin 2010.
Au niveau scolaire, Florent rencontre des difficultés en lecture et dans le passage
43
à l’écrit. Actuellement en CM2, sa maîtresse a noté des somnolences en classe assez
inquiétantes. Une orientation en SEGPA est prévue pour la rentrée prochaine.
A l’école, Florent n’a pas de difficultés relationnelles particulières avec les
autres enfants. Il n’est pas inscrit en centre aéré ou dans un club.
En groupe au SESSAD, Florent a de bonnes relations avec ses pairs. Il entre en
contact facilement. Avec l’adulte, il est également à l’aise.
Son projet personnalisé au SESSAD fait état d’une demande d’aide importante
ainsi que de capacités cognitives efficientes. Florent a néanmoins besoin de soutien dans
les apprentissages ainsi que dans l’expression d’un mal-être dans un lieu sécurisé
comme le SESSAD. Un suivi éducatif et psychologique lui a été proposé ainsi qu’une
participation à l’atelier cirque et le projet « découverte de ma ville ».
Ses enjeux dans la participation au projet
Suite à une réflexion d’équipe, ce projet a été proposé à Florent avec l’idée de
lui permettre d’être investi dans un espace qui lui est propre. En effet, Florent semble
avoir des difficultés à se situer dans un groupe autre que celui de sa fratrie. Ainsi, ce
groupe est l’occasion pour lui de s’ouvrir vers l’extérieur et vers d’autres possibles.
La relation avec ses pairs dans le projet
Au début du projet, Florent est plutôt à l’aise avec les autres enfants du groupe.
Lors de la première sortie, il semble moteur dans le groupe et à l’initiative de plusieurs
jeux. Avec Youri, le contact se fait assez rapidement et ils apprécient de passer du
temps ensemble un peu isolés du groupe.
Florent à plusieurs reprises, a été absent ce qui a compliqué la continuité de son
inscription dans le groupe. Ainsi, durant les dernières rencontres, il était beaucoup plus
en retrait. Florent semblait fatigué, même épuisé. Un jour alors que j’allais le chercher
chez lui, il est arrivé avec des yeux très gonflés et rouges. Il m’a expliqué qu’il venait de
se réveiller. J’ai cru alors qu’il venait de faire une sieste vu qu’il était 14h. Il m’a
répondu qu’il dormait depuis hier soir sans donner plus d’explication. Durant l’après-
midi, Florent semblait encore fatigué et pris de somnolence. Cette situation me
paraissant assez inquiétante, a été reprise avec son éducatrice référente.
44
Avec les autres et dans les activités en général, Florent paraît présent
physiquement mais ailleurs, peu investi. Florent semble à ce jour, pris dans des
difficultés personnelles qui le rendent assez indisponible dans sa relation aux autres.
La relation à l’adulte dans le projet
Avec l’adulte, il est au départ avenant et recherche l’échange. Ces discussions
sont principalement basées sur des histoires qu’il raconte. Comme en dehors de la
réalité, il est difficile de le ramener à des choses concrètes. A plusieurs reprises, il faut
le reprendre car il peut être distrait et ne pas regarder la route durant les trajets. Lorsque
je l’interroge sur lui Florent semble se refermer et éviter toute conversation. Une sorte
de carapace de protection se met alors en place.
Ma relation avec Florent m’a interrogée dans le sens où je me suis, à un moment
donné, interrogée sur le sens du projet pour lui. En effet, étant pris par des difficultés et
un mal-être pesant, je me suis demandée si Florent en était là dans sa prise en charge au
SESSAD. Ainsi, je me suis interrogée sur la place qu’il pouvait avoir dans le groupe,
sur ce qui pourrait l’amener à s’investir, et sur le fait tout simplement qu’il puisse
prendre du plaisir. L’éducatrice et moi-même avons fait l’hypothèse d’un travail sur sa
valorisation au sein du groupe en passant par son autonomie. Ce choix lui a permis à
certains moments d’avoir sa place dans le groupe.
Son rapport à l’environnement dans le projet
Florent s’est montré assez en retrait et plutôt passif par rapport aux différents
lieux découverts. Comme dans sa relation aux autres, Florent semble absent. Il ne
montre que peu d’expression par rapport à ce qu’il vit. Il est difficile de dire qu’une
évolution a eu lieu dans son rapport à l’environnement.
Ses repères espace-temps
Le travail mené sur l’autonomie avec Florent a été l’occasion de l’investir dans
les déplacements du groupe. Ainsi, à plusieurs reprises, nous avons demandé à Florent
d’être notre guide lors de différents trajets. Cette mise en avant lui a permis de mieux se
repérer dans l’espace et notamment d’identifier les lieux de mise en danger. Le repérage
dans le temps au niveau du projet ne lui a pas posé de difficultés importantes malgré ses
absences.
45
Ophélie
Ophélie est une jeune fille de huit ans, arrivée au SESSAD en avril 2010. Cette
orientation a été justifiée par une agitation et une instabilité importante au niveau de
l’école. Ophélie rencontrait également des difficultés relationnelles avec l’autre.
Observation et projet personnalisé au SESSAD
Ophélie est fille unique. Elle ne voit plus son père depuis mai 2009. Il n’a plus
d’autorité parentale sur elle. Sa mère travaillant de nuit, sa grand-mère maternelle s’en
occupe la journée. Avant le SESSAD, Ophélie était suivie dans un CMP par un
psychologue.
A l’école, Ophélie est en CE2 et peut montrer une grande instabilité en classe.
Cela est très difficile pour l’enseignante. Elle a un niveau correct en lecture mais la
compréhension est parfois difficile. Ophélie est souvent punie à cause de son agitation.
Ses difficultés de concentration rendent son attention souvent compliquée.
Avec ses pairs à l’école, Ophélie ne cherche pas le contact avec les autres. Elle
n’est plus inscrite au centre aéré qui s’est arrêté suite à son comportement. Avec
l’adulte, Ophélie recherche l’exclusivité. Elle se situe dans la proximité et manque de
distance.
Le projet personnalisé d’Ophélie discuté en équipe pluridisciplinaire, fait part
d’une demande très importante d’être aidée venant d’elle et de sa mère. Le travail mené
avec Ophélie se situe principalement dans sa relation avec l’autre, adulte et pair. Ainsi,
a été proposé un suivi éducatif, une participation aux ateliers conte, cirque, des
rencontres mère-enfant-pédopsychiatre et le projet « découverte de ma ville ».
Ses enjeux dans la participation au projet
Suite à une réflexion d’équipe, ce projet a été proposé à Ophélie aux vues de ses
difficultés relationnelles avec l’autre, pair et adulte. C’est bien la possibilité pour elle de
mettre au travail ses difficultés dans une dynamique de groupe autre que le groupe
classe, qui lui est proposée.
La relation avec ses pairs dans le projet
46
Ophélie est assez envahissante dans la relation avec ses pairs. Elle questionne,
provoque, se chamaille. Assez rapidement, elle invite au rejet des autres enfants.
Florence vient me voir lors de la première sortie et me demande « Pourquoi elle est
comme ça elle ? » en parlant d’Ophélie qui était très agitée. Elle peut renvoyer des
choses parfois difficiles, aux autres du groupe qui sont plutôt sur un versant
d’inhibition.
Ophélie n’a investi aucune relation particulière avec les autres enfants. Elle
semble toujours être dans le même schéma avec ses pairs à savoir une agitation
permanente qui rend difficile sa relation avec les autres.
Sa relation à l’adulte dans le projet
Sa relation à l’adulte est également complexe. Ophélie a du mal à se situer et a
des difficultés dans la distance avec l’éducateur. Ma relation avec elle m’a beaucoup
interrogée. En effet, Ophélie m’amène rapidement dans des discussions personnelles qui
nécessitent que je mette de la distance et que je fasse référence au cadre de notre
relation éducatrice-enfant. A d’autres moments, cela se situe complètement à l’opposé,
Ophélie peut se mettre en danger et m’amène à intervenir de manière ferme, puis à
reprendre cela ensemble. J’ai eu parfois l’impression de passer mon temps à jongler,
entre proximité et distance, situation parfois complexe à vivre.
Aujourd’hui, Ophélie semble avoir bien investi ce projet. Elle dit vouloir venir
aux sorties, alors qu’au début il était impensable pour elle qu’elle soit avec d’autres
enfants.
Son rapport à l’environnement dans le projet
Ophélie à de nombreuses reprises, a sollicité les adultes présents lors des
différentes sorties. Elle sollicite beaucoup mais arrive à le faire de manière adaptée. De
manière récurrente, elle a tendance à vouloir le regard de l’adulte porté sur elle. Sur le
mode de la séduction, Ophélie a envie de bien paraître. Elle se montre néanmoins
curieuse dans les différents lieux et Ophélie peut avoir des échanges très intéressants.
Ses repères espace-temps
Les déplacements ont souvent été compliqués avec Ophélie. En effet, elle peut
47
parfois se mettre en danger et mettre en danger le groupe. Elle a alors du mal à faire
redescendre son agitation malgré nos interventions. Cependant, elle a un très bon
repérage dans le centre ville. Depuis Notre-Dame, elle sait se situer, ainsi que dans les
transports en commun. Lorsqu’elle ne s’éparpille pas, Ophélie peut montrer de grandes
capacités d’apprentissage dans ce domaine. Présente à toutes les rencontres, Ophélie n’a
pas rencontré de difficultés particulièrement dans le repérage espace-temps du projet.
V) Une évaluation-régulation de l’élaboration à la mise en œuvre
L’évaluation n’est pas l’étape finale du projet. D’après J. Rouzel47, l’évaluation
vient mesurer l’écart entre projet pensé et projet réalisé et lui donner du sens. Ainsi,
dans cette vision, l’évaluation commence dès le début du projet, lorsqu’on fixe des
objectifs et des indicateurs observables dans l’action. Elle a ainsi lieu tout au long du
projet.
L’évaluation-régulation
Il existe différentes formes d’évaluations : contrôle, problématisation, bilan, etc.
J’ai choisi de prendre en compte dans mon projet l’évaluation-régulation qui me
semblait la plus adaptée.
L’évaluation-régulation part du principe que l’action modifie et fait évoluer les
objectifs. Dans le cadre d’un projet éducatif, cette idée me semble tout à fait adaptée
dans le sens où la pratique fait référence. C’est ce que j’observe du groupe d’enfants
dans l’action qui m’amène à repenser le projet. Cette forme d’évaluation permet selon J.
Rouzel48, « de faire le point sur les finalités, de les comparer avec l’action réalisée et
d’interroger l’engagement de chacun ». L’évaluation-régulation permet ainsi de gérer
les écarts au fur et à mesure de l’avancée du projet.
Les espaces de régulation
Pour mettre en œuvre cette forme d’évaluation, je me suis appuyée sur des
espaces de régulation, pensés dès le début du projet.
47 J. Rouzel, Le travail d’éducateur spécialisé, éthique et pratique, éd. Dunod, 2000, p.49. 48 Ibid.
48
Avec les enfants du groupe, nous avons pensé le temps du goûter comme un
temps d’échange sur la sortie et le projet dans son ensemble. Ce moment a été
l’occasion de prise de paroles de chacun dans un groupe, de prise de positions,
d’argumentations de ces idées mais également de prise de décisions. Cet espace a
permis de travailler les règles de la citoyenneté basées sur le respect de l’autre. Ces
échanges ont fait avancer le projet dans la direction que le groupe a choisi.
Les échanges avec les éducateurs référents des enfants participant au projet
« découverte de ma ville », ont permis de faire le lien entre l’enfant dans le groupe et
dans son accompagnement au SESSAD dans son ensemble. Ces échanges informels ont
abouti à l’écriture des bilans semestriels concernant l’ensemble du suivi.
L’espace de régulation qu’il me semble important de développer correspond aux
échanges que nous avons eu après chaque rencontre, avec l’éducatrice intervenante dans
le projet. Ce temps avait pour objectif de faire le point sur les observations de la sortie
et la concordance avec les finalités du projet. Cet espace a été l’occasion de repenser les
différents temps du projet comme le goûter, l’atelier photo, l’implication des familles, la
fin du projet.
Lors de la première sortie, nous nous sommes rendues compte de l’importance
au-delà des finalités du groupe, de fixer des objectifs spécifiques par enfant au vu de
leurs difficultés. Ainsi, à partir de nos observations, nous avons privilégié par exemple
un travail sur l’autonomie pour Florent, la confiance en soi pour Florence, etc. Ces axes
spécifiques étaient régulièrement repensés au fur et à mesure de l’avancée du projet
pour évaluer s’ils étaient toujours d’actualité.
Pour réaliser ces échanges, au départ nous avions fait le choix par sortie,
d’évoquer chaque enfant et son comportement et de le retranscrire par écrit. Après
plusieurs sorties, nous avons opté pour une grille d’observation basée sur les indicateurs
fixés. Ce choix nous a permis de mieux cibler ce qu’il se passait au niveau de l’action.
Ainsi, à partir de la relation aux pairs, à l’adulte, à l’environnement et dans le repérage
espace-temps, l’évolution de chaque enfant était plus structurée et donc plus visible.
Ces échanges ont également abouti à la fin du projet, à un écrit bilan49 qui est
resté dans le service. Une restitution orale lors d’une réunion d’équipe a également eu 49 Voir en annexe n° 2 le document « écrit-bilan » du projet.
49
lieu, pour faire le point sur le projet et envisager une éventuelle poursuite.
L’évaluation-régulation m’a apporté dans ma future pratique, une vision de
l’évaluation que je qualifierai d’adaptée, à l’intervention éducative. En effet,
l’éducateur dans sa volonté de transformation des situations vers un mieux-être est
amené à penser l’action comme primordiale. L’évaluation-régulation va même au-delà
puisqu’elle attribue également à la pratique, un rôle dans le retour à la pensée du
projet dans son ensemble.
Ce deuxième chapitre concernant la mise en œuvre de ma réflexion, a tenté de
retranscrire les différents éléments constituant le projet éducatif.
La modalité choisie de se projeter, est venue apporter un mouvement à ma réflexion sur
l’accompagnement à la socialisation. La démarche de projet se situe dans une
dynamique de changement intéressante, dans le cadre d’une visée éducative. Ainsi,
l’espace collectif formé, a permis de proposer des conditions adaptées à l’évolution des
enfants, dans leurs difficultés principalement relationnelles.
En respectant, ma volonté d’être la plus fidèle à la vie du groupe, la retranscription des
éléments pratiques a été complexe. En effet, l’écrit vient quelque peu, figer l’action et
ses effets. Ainsi, je me suis attachée à créer des espaces de régulation venant repenser
les finalités du projet par rapport aux observations du groupe. De manière générale,
cette expérience a été l’occasion de faire évoluer mon positionnement professionnel,
tout en étant dans l’intervention éducative.
50
Conclusion Cette recherche est venue me conforter dans l’idée de l’importance dans mon
intervention, de concilier pratique et théorie. En effet, la mise en projet qui est utilisée
dans le travail social actuel, ne va pas de soi. Elle nécessite un travail important de
recherches et donc de prendre le temps.
Ainsi, ce mémoire m’a permis de me rendre compte de la nécessité de poser un
certain nombre d’éléments avant de me situer dans l’action. Echanger ses idées avec
d’autres membres de l’équipe, faire une recherche plus théorique, se poser par écrit,
s’interroger par rapport au cadre d’intervention, sont autant d’éléments qui permettent la
mise au travail d’une idée, au départ souvent personnelle.
Au-delà de cette notion de projet, c’est ma vision de l’éducation que j’ai
interrogée durant toute ma recherche. Aujourd’hui, je me situe dans une conception de
l’éducation comme visant une transformation de la situation des personnes vers un
mieux-être. Ainsi, l’éducateur a une position de médiateur, comme j’ai pu en faire
l’expérience en SESSAD, entre réalité sociale et réalité psychique de la personne
accompagnée. Cette réflexion sur la socialisation vient poser l’importance de l’action de
l’éducateur dans l’accompagnement à l’inscription sociale.
Cette façon de considérer l’éducation vient également poser des interrogations
éthiques. Venir interroger la place des personnes accompagnées dans l’intervention est
complexe, comme j’ai pu l’illustrer dans ce mémoire. Questionner sa propre place l’est
peut-être encore plus. Cette relation à l’autre vient bouleverser, interroger mais c’est
également le point d’appui du travail éducatif.
En tant que future professionnelle, ce mémoire m’a permis de mettre à jour les
51
limites de mon intervention. Ainsi, les écarts entre ce qui avait été fixé et ce qui s’est
effectivement passé ouvrent sur un questionnement. Les représentations sont alors à
déconstruire pour qu’elles ne restent pas figées. Il me semble aussi que la pratique seule
peut amener à dériver des objectifs pensés en amont. Le sens de l’intervention est alors
à interroger sans cesse, notamment grâce aux espaces de régulation, outils
indispensables à l’éducateur spécialisé.
51
Bibliographie
Ouvrages
ANESM, Ouverture de l’établissement à et sur son environnement, Recommandations de bonnes pratiques professionnelles, 2008.
J. Ardoino, Les avatars de l’éducation, PUF, 2000.
H. Becker, Outsiders. Etude de sociologie de la déviance, éd. Métailié, Paris, 1985.
J-P Boutinet, Anthropologie du projet, 1990.
F. Dolto, L’enfant dans la ville, éd. Gallimard, Paris, 1998.
C. Dubar, La socialisation, éd. Colin, 2009.
G. Ferréol, Dictionnaire de sociologie, éd. Colin, 2010.
P. Gaberan, Cent mots pour être éducateur, éd. Erès, 2007.
Hugon et Seibel, Recherches impliquées, Recherches action : Le cas de l'éducation, De Boeck, Belgique, 1988.
O. Pougnaud, P. Ropers, C. Soris, Accompagnement social et éducatif spécialisé, éd. Vuibert, 2009.
UNIOPSS, Guide pratique de l’accompagnement social, éd. Syros, 1995.
J. Rouzel, Le travail d’éducateur spécialisé, éthique et pratique, éd. Dunod, 2000.
Articles
Position de l’AIRE à propos des « jeunes dits incasables », Paris, sept 2009.
J. Ardoino, De l’accompagnement en tant que paradigme, Revue pratiques de formation/Analyses, Université Paris 8, Formation Permanente, N°40, 2000.
A. Charpy, Mémoire le travail en SESSAD considéré comme facteur d’innovation, septembre 2004.
Rapport sur les IR, présenté par M. Gagneux et P. Soutou, collection rapports publics IGAS, 1999.
Conférence de M. Paul au C2R Bourgogne, Le concept d’accompagnement, 2004.
JM. Servin, Critique du lien d’accompagnement entre don et contrat de P. Fustier, lien social.
52
Sommaire des annexes
Annexe n°1 : Présentation du projet « découverte de ma ville » ………....p.I
Annexe n° 2 : Document « écrit-bilan » du projet…………………………...p.III
I
Annexe n°1 : Présentation du projet « découverte de ma ville »
Ce projet consiste à une découverte de « lieux de vie » dans Marseille pour des enfants
accueillis en SESSAD ayant peu d’inscription dans leur environnement. Cette ouverture
vers l’extérieur se veut une des réponses à la mission de socialisation du service.
Finalités
* Se situer dans une dynamique de groupe
- Respect des règles en collectivité - Echanges notamment par rapport aux prises de décision dans le choix des sorties - Interactions et liens avec ses pairs
* Etre acteur de son environnement
- Exploiter les lieux ressources (Bibliothèque, musée, théâtre, etc.) - S’approprier les lieux sans être simplement observateur (Photo, interaction, exploration des sites)
* Se repérer dans le temps et l’espace
- Utilisation des transports en commun et référence au plan de la ville - Atelier création retraçant les différentes sorties du groupe
Modalités
Le projet concerne un groupe de 4 à 5 enfants d’âge hétérogène. Ces enfants seront
choisis par l’équipe du SESSAD comme des enfants ayant besoin d’être stimulé à
l’ouverture aux autres et à leur environnement. L’accompagnement se fera par 2
éducatrices du SESSAD : Une éducatrice et Moi-même éducatrice en stage au
SESSAD.
Les sorties auront lieu dans des endroits différents, selon les propositions du groupe et
des éducateurs. La première sortie est d’ores et déjà prévue à Notre Dame de la Garde
en s’intéressant entre autre au panorama proposé de l’ensemble de la ville et des
possibilités de sorties futures.
II
Le projet se déroulera sur 8 mercredis après-midi, pendant les vacances et hors vacances
scolaires durant 6 mois. A la fin de chaque sortie, un goûter sera prévu par le SESSAD.
Le goûter sera prévu comme un temps d’échange autour des prochaines sorties et des
ressentis des enfants.
Une valorisation du projet sera réalisée à travers une création manuelle, à partir de
photos et de documents informatifs des lieux visités. Deux temps y seront consacrés,
une à la moitié et l’autre à la fin du projet. Ces moments seront également l’occasion de
parler des différentes sorties, et par ce biais de travailler le rapport au temps.
Budget
La première sortie nécessitera un budget exceptionnel pour marquer le coup à Notre
Dame de la Garde. Ensuite, une à deux sorties pourront être payantes notamment celle
qui clôturera l’année, mais également suivant les propositions des enfants. Pour le reste,
il sera privilégié les endroits gratuits ou à moindre coût et accessibles en transport en
commun dans l’optique que ces lieux puissent être investi par l’enfant et sa famille. Le
goûter sera fourni par le SESSAD par le biais de la restauration du semi internat. Un
budget sera également nécessaire pour les deux ateliers création.
Evaluation
Un temps de discussion est prévu avec le groupe, pendant le goûter pour parler de la
sortie, envies des enfants pour les futures. Un temps de régulation est prévu après
chaque sortie, ainsi qu’un écrit pour faire le point et réévaluer le projet. Le bilan général
du projet se ferra oralement en équipe afin d’évoquer l’évolution des enfants, une
évaluation générale du projet et une éventuelle reconduction l’année prochaine.
Fanny Nougé, Stagiaire éducatrice SESSAD.
III
Annexe n° 2 : Document « écrit-bilan » du projet
Au final : 4 enfants ont participés au projet
8 rencontres (6 sorties Notre Dame, Vielle Charité, Bibliothèque, Théâtre,
Palais du Pharo et Frioul et 2 ateliers créations)
Evaluation par finalités :
* Se situer dans une dynamique de groupe
- Groupe formé assez rapidement, bonnes interactions
- Temps de groupe et échanges bien investis
- Respect et écoute de l’autre
- Certains enfants sont plus ou moins moteurs du groupe dans les prises de décision
- Echange autour des connaissances, des expériences de chaque des différents lieux.
* Etre acteur de son environnement
- Appareil photo bon médiateur pour découvrir les lieux chacun à sa façon
- Exploration des lieux souvent dans l’interaction (Documentaliste, Guide au musée, comédienne, etc.)
- Exploitation des lieux ressources (Demande des documents d’inscription à la bibliothèque, découverte de nouveaux lieux)
- Place donnée aux enfants, dans les choix des sorties a permis d’être plus actif.
* Se repérer dans le temps et dans l’espace
- Finalité complexe à évaluer, peut-être moins travaillait que les autres. A adapter à l’âge des enfants.
- 1ère sortie Notre Dame a permis de se situer en hauteur et voir les possibilités, dernière sortie au Frioul nous a fait prendre du recul par rapport à la ville.
- Atelier création a permis de se poser dans le projet, au milieu et à la fin. Repérage dans le temps à partir des photos et des documents des lieux, dans l’espace à partir du plan de Marseille.
IV
Conclusion : L’idée d’un atelier éducatif
- Travail sur la relation à l’adulte et aux pairs
- Côté ludique a permis d’accrocher
- Dynamique intéressante
Pour une éventuelle reconduction
- Un groupe de 4-5 enfants permet des interactions
- 6 mois maximum
- Peut-être plus fréquent pour plus de continuité
- Conservé l’idée que le groupe reste fixe
Un point sera fait oralement de manière plus précise par enfant, avec chaque éducateur
référent des enfants participants.