Labiche Eugene Theatre 1

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  • Adaptation d'un texte lectronique provenant de la Bibliothque Nationale de France :http://www.bnf.fr/

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  • Le Major Cravachon Personnages Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V Scne VI Scne VII Scne VIII Scne IX Scne X Scne XI Scne XII Scne XIII Scne XIV Scne XV Scne XVI Scne XVII Deux papas trs bien ou la grammaire de Chicard Personnages Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V Scne VI Scne VII Scne VIII Scne IX Scne X Scne XI Scne XII Scne XIII Scne XIV Scne XV Le Roi des Frontins Personnages Acte I Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V

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  • Scne VI Scne VII Scne VIII Scne IX Scne X Scne XI Scne XII Scne XIII Scne XIV Acte II Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V Scne VI Scne VII Scne VIII Scne IX Scne X Scne XI Scne XII Scne XIII Scne XIV Scne XV Scne XVI Scne XVII Scne XVIII Un Jeune homme press Personnages Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V Scne VI Scne VII Scne VIII Scne IX Scne X Scne XI Le Club Champenois Personnages Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V Scne VI Scne VII

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  • Scne VIII Scne IX Scne X Scne XI Scne XII Scne XIII Scne XIV Scne XV Scne XVI Scne XVII Scne XVIII Scne XIX Embrassonsnous Folleville ! Personnages Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V Scne VI Scne VII Scne VIII Scne IX Scne X Scne XI Scne XII Scne XIII Scne XIV Scne XV Scne XVI Scne XVII Scne XVIII Scne XIX Un garon de chez Vry Personnages Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V Scne VI Scne VII Scne VIII Scne IX Scne X Scne XI Scne XII Scne XIII Scne XIV Scne XV

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  • Scne XVI La Fille bien garde Personnages Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V Scne VI Scne VII Scne VIII Scne IX Scne X Scne XI Scne XII Scne XIII Scne XIV Scne XV Scne XVI Scne XVII Scne XVIII Scne XIX Un chapeau de paille d'Italie Personnages Acte I Scne premire Scne II Scne III ScneVI Scne V Scne VI Scne VII Scne VIII Scne IX Acte II Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V Scne VI Scne VII Scne VIII Scne IX Acte III Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V

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  • Scne VI Scne VII Scne VIII Scne IX Scne X Scne XI Acte IV Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V Scne VI Scne VII Scne VIII Scne IX Scne X Scne XI Acte V Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V Scne VI Scne VII Scne VIII Scne IX Scne X Maman Sabouleux Personnages Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V Scne VI Scne VII Scne VIII Scne IX Scne X Scne XI Scne XII Scne XIII Scne XIV Scne XV Scne XVI Scne XVII Scne XVIII Scne XIX

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  • Scne XX Un Monsieur qui prend la mouche Personnages Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V Scne VI Scne VII Scne VIII Scne IX Scne X Scne XI Scne XII Scne XIII Scne XIV Scne XV Scne XVI Scne XVII Scne XVIII Scne XIX Scne XX Scne XXI Scne XXII Scne XXIII Les Suites d'un premier lit Personnages Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V Scne VI Scne VII Scne VIII Scne IX Scne X Scne XI Scne XII Scne XIII Scne XIV Scne XV Scne XVI Scne XVII Le Misanthrope et l'Auvergnat Personnages Scne premire Scne II

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  • Scne III Scne IV Scne V Scne VI Scne VII Scne VIII Scne IX Scne X Scne XI Scne XII Scne XIII Scne XIV Scne XV Scne XVI Scne XVII Scne XVIII Scne XIX Edgard et sa bonne Personnages Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V Scne VI Scne VII Scne VIII Scne IX Scne X Scne XI Scne XII Scne XIII Scne XIV Scne XV Scne XVI Scne XVII Scne XVIII Scne XIX Scne XX Scne XXI Scne XXII Scne XXIII Mon Ismnie ! Personnages Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V Scne VI

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  • Scne VII Scne VIII Scne IX Scne X Scne XI Scne XII Scne XIII Scne XIV Scne XV Scne XVI Scne XVII Scne XVIII Scne XIX Scne XX La Chasse aux corbeaux Personnages Acte I Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V Scne VI Acte II Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V Scne VI Scne VII Scne VIII Scne IX Acte III Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V Scne VI Scne VII Scne VIII Scne IX Scne X Acte IV Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V

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  • Scne VI Acte V Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V Scne VI Scne VII Scne VIII Scne IX Scne X Scne XI Les Marquises de la Fourchette Personnages Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V Scne VI Scne VII Scne VIII Scne IX Scne X Scne XI Scne XII Scne XIII Scne XIV Scne XV Scne XVI La Perle de la Canebire Personnages Scne premire Scne II Scne III Scne IV Scne V Scne VI Scne VII Scne VIII Scne IX Scne X Scne XI Scne XII Scne XIII Scne XIV Scne XV Scne XVI Scne XVII

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  • Scne XVIII Scne XIX

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  • Le Major Cravachon

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    Le Major Cravachon 14

  • Personnages

    ComdieVaudeville

    par Jess, Labiche et Lefranc

    Reprsente pour la premire fois, sur le Thtre du PalaisRoyal, le 15 fvrier 1844

    Personnages

    Acteurs qui ont cr les rles.

    Cravachon : MM. Lemnil

    Dervires : Berger

    Antonin, domestique de Cravachon : Dublaix

    Olympe, fille de Cravachon : Mmes Scriwaneck

    Amlie, amie de pension d'Olympe (rle travesti) : Aline Duval

    Un notaire : M. Lemeunier

    La scne se passe Saumur, en 1813.

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    Personnages 15

  • Scne premire

    Le thtre reprsente un salon. Ameublement simple, fleurets suspendus. Porte principale au fond. A droite, au premier plan, une porte et une table garnie. Au second plan, une chemine avec glace etpendule. A gauche, deux portes, l'une au premier, l'autre au second plan.

    Le notaire, Cravachon

    (Tous deux sont assis au milieu de la scne, au lever du rideau.)

    Cravachon, se levant. a suffit, monsieur... vous n'aurez pas ma fille.

    Le notaire, se levant. Comment... mais songez donc que je suis...

    Cravachon, brusquement. Quoi ? que voulezvous dire ? ... Que vous tes notaire imprial, que voustes honnte homme, que votre tude est paye... Eh bien ! aprs ?

    Le notaire. Il me semble que ces avantages...

    Cravachon. Ce ne sont pas l des avantages... Moi, monsieur, je suis le major Cravachon, je suis unhonnte homme aussi ; j'ai vu l'Allemagne, la Prusse et l'Italie, et je ne m'en vante pas, moi, monsieur... Etaujourd'hui, je suis commandant de la forteresse de Saumur, une prison d'Etat, monsieur, et je n'en suis pasplus fier pour a. Parbleu ! ... notaire, voiltil pas le diable !

    Le notaire, avec calme. J'ai suivi avec attention le fil de votre raisonnement, et je ne comprends pas...

    Cravachon. Ce n'est pas ncessaire... Vous n'aurez pas ma fille Olympe, c'est clair, c'est net... Ainsi,monsieur...

    Le notaire, crmonieusement. Monsieur, j'ai bien l'honneur d'tre avec une profonde considration...

    Cravachon, le reconduisant. Serviteur, monsieur, serviteur, de tout mon coeur.

    Le notaire sort.

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    Scne premire 16

  • Scne II

    Olympe, Cravachon

    Cravachon, revenant. J'ai cru qu'il n'en finirait pas avec ses salamalecs.

    Olympe, entrant. Eh bien ! papa, ce jeune homme... ce notaire...

    Cravachon. Je l'ai remerci poliment.

    Olympe. Encore ! ... Vous tes trop difficile aussi.

    Cravachon. Tiens ! je donne cent mille francs !

    Olympe. Songez donc, mon petit papa, je me fais vieille... dixneuf ans ! ... Et voil le sixime quevous congdiez... Six ! qui en pousent d'autres ! si ce n'est pas affreux ! ... Il n'en restera plus !

    Cravachon. Puisque je donne cent mille francs, sois donc tranquille. Quand on a un pre qui a vu lemonde, voistu, qui a dtrn des rois... qui a mang du cheval...

    Olympe. Oh ! ldessus, vous savez bien que tous les jours j'coute et j'admire... Mais... (Clinant.)dites donc, petit papa, si vous me les prsentiez, peuttre que mes avis...

    Cravachon. Une entrevue ! ... il ne manquerait plus que a ! ...

    Olympe. Alors, tchez qu'ils vous plaisent...Toutes mes amies de pension ont des maris.

    Cravachon. Tu appelles a des maris, toi ! ... tu t'y connais... ce sont des... a fait piti ! ... Un peu depatience, et nous t'en aurons un... comme je l'entends.

    Olympe. Et comment l'entendezvous ?

    Cravachon. Comment ? sacrebleu ! ... Je voudrais l... un... morbleu ! ... Voil l'homme qui terendrait heureuse ! ... et je le trouverai...

    Olympe. Serace bien long ?

    Cravachon. Estce que je sais, moi ? ... Tiens, au fait, j'en attends un ce matin de Paris... et tu sais queParis est le centre des lumires.

    Olympe. Oui, et des coups d'pe... Vous souvenezvous, il y a trois mois...

    Cravachon. Si je me souviens ! ... Je crois bien, une blessure superbe ! a me fait encore mal ! ...mais c'est gal, quel beau coup ! ... On a bien raison de dire : il n'y a qu'un Paris !

    Olympe. Je suis sre que c'est encore vous qui aviez tort.

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    Scne II 17

  • Cravachon. Oh ! non... cette fois, j'avais t insult ! ... mais insult ! ... Ah ! le digne jeunehomme ! je ne pense jamais lui sans plaisir.

    Olympe. Que vous avaitil fait ? car vous ne m'avez jamais dit...

    Cravachon. Ce qu'il m'avait fait, le brigand ! Tu vas voir. Je sortais du thtre Feydeau... Il faisait unbrouillard ne pas distinguer une vivandire d'un tambourmajor... je descendais la rue Vivienne en ruminant part moi le morceau d'Elleviou que je venais d'applaudir... Elleviou, tu sais ? c'est mon idole ! ... quandj'entends sur le trottoir, trois pas devant moi, une voix dans le brouillard, qui corchait le mme morceau.J'avais beau ralentir le pas, ou marcher plus vite, je ne pouvais pas me dptrer de ce maudit chanteur !Dame ! moi, a commenait m'chauffer les oreilles... Il tait vident que le particulier y mettait de lamchancet... Il s'tait dit : voil un bourgeois qui sort de Feydeau... Elleviou est son idole, bon ! je vais letaquiner...

    Olympe. Oh ! pouvezvous croire...

    Cravachon. Laisse faire, on connat son monde... Alors, moi, je lui crie : Hol ! h ! monsieur !monsieur ! chantez autre chose, vous m'ennuyez... Il me rpond par un grand clat de rire ! ... puis il entameavec son infernal fausset... quoi ? le morceau de Martin... Martin, tu sais ? c'est mon idole ! ... Milletonnerres ! je n'y tenais plus ! ... Ah ! pour le coup, mon oiseau, lui criaije en le rejoignant, nous allonschanger de musique ! ... Un duel ! a me va, j'ai froid aux doigts, qu'il me rpond sans ostentation... Voilun armurier, je vais chercher des outils... Et il part en chantant :

    Malbrough s'en vaten guerre,

    Mironton, ton, ton...

    Et faux ! toujours faux ! le gueux !

    Olympe. Il ne pouvait peuttre pas chanter autrement.

    Cravachon. Ca ne me regarde pas... J'arrte deux fiacres, chacun le ntre, il revient avec des pes,nous nous embarquons, et bientt nous voil hors Paris, dans la campagne, au milieu d'une belle route, mafoi ! mais il faisait noir... noir ! ... Mon inconnu fait en un clin d'oeil ranger les sapins sur les bascts, ilen dcroche luimme les lanternes, et, bon gr mal gr, nos cochers immobiles nous servent la fois decandlabres et de tmoins... quarante sous l'heure... Nous croisons le fer... Oh ! je vis tout de suite quej'avais affaire forte partie... (S'animant.) Aussi, comme nous nous comprenions, c'tait un plaisir ; tous noscoups taient mutuellement ports et pars... Sans presque nous voir, nous nous devinions dans l'obscurit,et...

    Olympe. Et vous tes rest sur la place avec une blessure !

    Cravachon. Oui, ce cher ami, il m'a dsoss l'paule... (Vivement.) Mais, je ne m'en plains pas, oh !Dieu !

    Olympe. Vous lui devez des remerciements, peuttre.

    Cravachon. Pourquoi pas ? car tous les jours on est bless... Qu'estce qui n'est pas bless ? ... Maispas comme a ! oh ! non ! pas comme a ! (Tristement.) Ah ! je ne regrette qu'une chose...

    Olympe. Quoi donc ?

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    Scne II 18

  • Cravachon. Tu ne le croiras pas... je ne sais pas encore comment il m'a touch... il faisait si noir... Jedonnerais dix napolons pour connatre ce coupl... car, enfin, je ne me dcouvre jamais, c'est connu. Estceen quarte ? Estce en tierce ?

    Olympe. La belle avance.

    Cravachon. Tu n'es pas artiste, toi... Ah ! si tu l'avais vu, ce brave jeune homme ! avec quellemodestie il s'est drob mes flicitations... Il est parti, l, tout bonnement comme le premier venu... Je l'ai peine vu, ce garonl, il me serait impossible de le reconnatre... (Regardant la pendule.) Diable ! dj dixheures ! et moi qui suis tmoin dans une affaire !

    Olympe. Encore !

    Cravachon. Oh ! presque rien... des commerants, des mazettes ! des pkins !

    Olympe. C'est toujours la mme chose ; quand vous ne vous battez pas, vous faites battre les autres !

    Cravachon. Il faut bien s'occuper... et prouver l'Empereur que je ne suis pas encore un invalide, bienqu'il ne me juge plus bon qu' faire un gelier... Oh ! je lui en veux ! ... Moi, le major Cravachon, moi quil'ai aid gagner la bataille de Marengo, m'employer garder des prisonniers d'Etat, des conspirateurs !

    Olympe. De mauvaises ttes comme vous... et que pourtant vous traitez avec une rigueur...

    Cravachon. Ah ! dame ! je ne connais que ma consigne, c'est vrai.

    Olympe. Jusqu' empcher ces pauvres dtenus de communiquer avec leurs femmes, leurs filles, leurssoeurs... Si ce n'est pas affreux !

    Cravachon. C'est l'ordre de l'Empereur... il ne veut pas que les femmes entrent ici... faut croire qu'il ases raisons pour a... Pour lors, bon, trs bien, assez caus... (Allant dcrocher les fleurets.) Voyons, mesfleurets... Toi, tu vas rentrer dans ton appartement... Si le prtendu en question arrivait, je veux l'examiner lepremier... Allons, sois bien raisonnable.

    Air : Adieu, tche de distraire

    Adieu, rentre chez toi, ma chre,

    Je m'en vais au plus tt rgler cette affaire !

    Aprs ce rendezvous d'honneur,

    Je ne veux m'occuper que de ton bonheur.

    Ensemble

    Cravachon

    Adieu,

    Etc.

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    Scne II 19

  • Olympe

    Oui, je rentre chez moi, mon pre,

    Quant vous, terminez vite cette affaire ;

    Aprs ce rendezvous d'honneur,

    Il ne faut s'occuper que de mon bonheur.

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    Scne II 20

  • Scne III

    Olympe, seule. Oui, sois bien raisonnable... Il me dit a chaque fois... ou bien il s'en va, sans riendire... boutonn jusqu'en haut... Alors j'ai encore plus peur... et pourtant, c'est la bont mme... Mais il atoujours t comme a... il faisait trembler ma pauvre mre.

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    Scne III 21

  • Scne IV

    Antonin, Olympe

    Antonin. Mademoiselle, c'est un jeune homme qui demande parler Monsieur.

    Olympe, part. Un jeune homme ! ... le futur, sans doute.

    Antonin. Je lui ai dit que Monsieur tait sorti.

    Olympe, part. Ah ! mon Dieu ! encore un que je ne verrai pas... (Haut.) Estce qu'il est parti ?

    Antonin. Non, il est l.

    Olympe, avec joie. Ah ! il est l.

    Antonin. Oui, il dit comme a que Monsieur, a lui est gal, qu'il aime mieux causer avecMademoiselle.

    Olympe. Ah ! mon Dieu ! que c'est dsagrable ! ... Ce qu'il a me dire est peuttre important... jene peux pas le renvoyer.

    Antonin. Oh ! que a ne vous chagrine pas, je vais lui dire que vous tes sortie. (Fausse sortie.)

    Olympe, le rappelant. Antonin ! Antonin ! ... Comment ! vous savez donc mentir ?

    Antonin. Dame ! puisque a vous ennuie de le voir.

    Olympe. Certainement... Surtout en l'absence de mon pre... mais un mensonge... Ah ! Antonin...faites entrer ce jeune homme.

    Antonin, sortant. Tout de suite, mademoiselle.

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    Scne IV 22

  • Scne V

    Olympe ; puis Amlie

    Olympe, s'arrangeant vivement devant une glace. Il va venir... vite ! vite... Bon ! mes cheveux quis'en vont ! Ah ! mon Dieu ! il ne voudra jamais m'pouser dans cet tatl... Le voici... tenonsdous droite.

    Amlie, en uniforme de lieutenant de hussards. Mademoiselle.

    Olympe, part. Je rougis, je rougis, comment faire ? (Ils se saluent tous les deux.) Monsieur... (Apart.) Un militaire ! ... tenonsnous encore plus droite.

    Amlie. Excusez, mademoiselle, la libert que j'ai prise...

    Olympe. Il n'y a pas de mal... Croyez, au contraire, monsieur que... je suis flatte...

    Amlie, riant aux clats. Ah ! ah ! ah !

    Olympe, part. Il rit !

    Amlie. Ah ! tu ne veux donc pas me reconnatre ?

    Olympe. Amlie ! ... Ah ! quel dommage !

    Amlie. Comment ?

    Olympe. Quel bonheur ! veuxje dire ! ... Comment, c'est toi... tu m'as fait une peur...Embrassemoi donc ! ...

    Amlie, l'embrassant. Cette chre petite Olympe ! ... Nous ne nous sommes pourtant pas revuesdepuis la pension. Mais je suis loin de t'avoir oublie ! Tiens, cette bague qui me vient de toi, je ne l'aijamais quitte.

    Olympe. Bonne Amlie ! mais pourquoi ce dguisement ?

    Amlie. Pourquoi ? oh ! c'est un grand secret... une bien grande audace... mais tu ne me trahiraspas... tu m'aideras au contraire... M. Cravachon peutil nous entendre ?

    Olympe. Non... Mais d'o vient ce mystre ?

    Amlie. Ecoute... Mon mari... car je suis marie...

    Olympe, part. Encore une !

    Amlie. Mon mari, M. Doffin, compromis dans une prtendue conspiration contre l'Empereur, a tarrt, il y a huit jours, et conduit ici, dans la citadelle commande par ton pre.

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    Scne V 23

  • Olympe. Ah ! mon Dieu ! ... tu as un mari sous cl !

    Amlie. Et tu sais qu'un ordre impitoyable, mais motiv par quelques abus, ferme depuis un certaintemps l'entre de cette forteresse, de cette prison, toutes les femmes quelles qu'elles soient... Pourtant, je nepouvais abandonner ainsi mon mari.

    Olympe. Je crois bien !

    Amlie. Pendant que des amis puissants sollicitent Paris son largissement, j'ai voulu toute force levoir, lui parler...

    Olympe. C'est si naturel !

    Amlie. Mais comment faire ? J'esprais d'abord que le titre de ton ancienne amie pourrait aplanir ladifficult... mais bientt la rputation de l'inflexible commandant vint m'ter tout espoir...

    Olympe. Alors ?

    Amlie. Alors j'ai pris un parti extrme, violent... j'ai pris les habits de mon frre l'officier, et, souscette enveloppe, je viens affronter la consigne du major et solliciter mon laissezpasser.

    Air : S'il apprend que pour sa matresse

    Gagnant ensemble tous leurs grades,

    Depuis longtemps mon frre et mon mari

    Sont bien connus pour d'anciens camarades.

    Sans crainte donc, je me prsente ici,

    Sous le costume et le nom d'un ami.

    Dans mon stratagme j'espre,

    Car l'amour triomphe moiti,

    Quand il a pour habit de guerre

    L'uniforme de l'amiti.

    Olympe. Pourvu que papa Cravachon se laisse prendre la ruse... Voyons, tournetoi, que jet'examine. (Elle la fait tourner autour d'elle.) L... marche un peu... encore... Eh bien ! ce n'est pas trop mal...tu peux faire illusion.

    Amlie. Ma foi, j'ai confiance. Ton pre ne m'a jamais vue, et pour peu que je fasse honneur monuniforme...

    Olympe, confidentiellement. Entre nous, je t'avouerai que je n'en suis pas contente du tout de papaCravachon... mais du tout, du tout !

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    Scne V 24

  • Amlie. Que veuxtu dire ?

    Olympe. Enfin, ma chre, en me regardant, certainement on le voit tout de suite, je suis bien d'ge...Eh bien, pourtant, je crois qu'il ne veut pas me marier.

    Amlie. Quel enfantillage !

    Olympe. Je parle trs srieusement... car, enfin, je suis demande de tous cts ; c'est incroyable...chacun veut m'pouser.

    Amlie, souriant. a ne m'tonne pas du tout.

    Olympe. Moi, je ne demande pas mieux... mais lui ne veut pas... Mes prtendus, on me les cache...ensuite, mon pre s'enferme avec eux... l... (Elle montre la premire porte gauche.) Je ne sais pas ce qui sedit... mais ce doit tre affreux ! ... car ils partent tous, et l'on n'entend plus parler d'eux.

    Amlie. Au fait, c'est trange !

    Olympe. C'est abominable ! Quelquefois, j'coute la porte... c'est mal, mais c'est par raison.

    Amlie. Eh bien ?

    Olympe. Je n'entends rien... Seulement, papa fait la grosse voix comme un bourdon, l'amoureuxdisparat et je continue rester fille.

    Amlie. Pauvre enfant ! ... a ne peut pourtant pas durer ainsi !

    Olympe. Je crois bien que a ne peut pas durer ainsi ! ...

    Amlie. Il faudrait savoir... Mais j'y pense... je ne peux voir mon mari que demain... aprs deux heureson n'entre plus... d'ici l, je puis m'occuper de toi, de ton bonheur... Je vais demander ta main ton pre.

    Olympe. Toi ! ... mais pas du tout !

    Amlie. Eh bien ! voyons, n'astu pas peur que je t'pouse ? De cette faon, j'aurai avec lui cetteentrevue si mystrieuse, si redoutable, et...

    Olympe. Eh bien ! oui... mais comment ?

    Amlie. Le meilleur moyen de prouver que je suis un homme, c'est de vouloir pouser une joliepersonne comme toi... Je suis ton nouveau prtendu.

    Olympe. Toi ? Mais prends bien garde !

    Amlie. Moi prendre garde ! ... (Elle s'avance menaante sur Olympe, qui recule effraye.) Unmilitaire, un officier, un hussard ! Maintenant, du papier, une plume... (Elle va la table place droite.)

    Olympe. Que vastu faire ?

    Amlie. Je vais crire ton pre... J'ai mon ide... ce sera court, mais nerveux ! (Elle crit.)

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    Scne V 25

  • Olympe. Comme nous allons nous amuser ! (Elle sonne. Antonin entre.) Antonin, prparez tout desuite pour Monsieur la chambre verte.

    Antonin. Oui, mademoiselle. (Il sort droite.)

    Amlie. Tiens, voici ma lettre... Trois lignes d'loquence. (Lisant.) "Monsieur, je suis gentil, bientourn, jeune et hussard ; j'aime Mlle votre fille, je vous demande sa main... Causonsen ! Nota. Je suispress, corbleu ! "

    Antonin, rentrant. Mademoiselle, la chambre est prte.

    Olympe. C'est bien.

    Amlie, Antonin. Mon garon, tu vas remettre cette lettre M. Cravachon.

    Antonin. a suffit.

    Amlie. Tout de suite, entendstu ?

    Antonin, se rangeant pour la laisser passer et saluant militairement. Oui, mon lieutenant.

    Amlie, passant. A la bonne heure, corbleu !

    Olympe, passant son tour devant Antonin. A la bonne heure, corbleu !

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    Scne V 26

  • Scne VI

    Antonin, seul. Eh ben ! ... ils entrent... tous les deux... Ne vous gnez pas. Avec a qu'il a l'airmauvais sujet, le hussard... il vous a un petit oeil ! ... J'ai bien vu des oeils, mais jamais, au grand jamais...Aprs a, c'est peuttre un mari... Imprudent ! s'il avait, comme moi, rflchi sur la matire... il se garderaitbien..

    Air : Je loge au quatrime tage

    Tout le drame du mariage

    Dans ma main est reprsent.

    Il montre sa main les doigts en l'air.

    La femme, premier personnage,

    Il indique le pouce.

    Se place sur le ct,

    Avec fortune,

    Il indique l'index.

    Et jeunesse,

    Il indique le mdium.

    Et beaut ;

    Il indique l'annulaire.

    Puis un mioche d'humeur foltre,

    Il indique le petit doigt.

    Mais le temps disperse tout cela !

    (Parl.) A son approche la fortune s'esquive par la droite (il baisse l'index), la beaut par la gauche (ilbaisse l'annulaire) et la jeunesse par le fond (il baisse le mdium), de faon qu'au dnouement...

    Il ne reste sur le thtre

    Que ces deux petits acteursl.

    Le pouce et le petit doigt restent levs et forment deux cornes.

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    Scne VI 27

  • Scne VII

    Antonin, Dervires

    Dervires. Hol ! h ! personne ! ... (Apercevant Antonin, brusquement.) M. Cravachon ?

    Antonin, part. Ah ! un monsieur... (Haut.) Vous demandez ?

    Dervires. M. Cravachon ? Estce que vous tes sourd ?

    Antonin, niaisement. Oh ! que non, monsieur, je ne suis pas sourd... (S'approchant.) Par exemple, j'aiun oncle qui l'est, sourd, mais qui l'est...

    Dervires. M. Cravachon ?

    Antonin, sans l'couter. Comme un pot, sauf votre respect.

    Dervires, s'emportant. Ah ! ! veuxtu me rpondre ?

    Antonin. Il est sorti. (Reprenant.) a lui est arriv bien drlement, allez...

    Dervires. Mlle Cravachon ?

    Antonin. Elle est occupe... elle cause avec un hussard.

    Dervires, part Un hussard !

    Antonin. Oui. (Reprenant.) Il ne s'attendait rien, le pauvre cher homme... quand, tout coup...

    Dervires, le poussant violemment. Ah ! vastu te taire, imbcile !

    Antonin. Oui, monsieur.

    Dervires. Vat'en ! j'attendrai :

    Antonin, s'en allant. Oui, monsieur.

    Dervires, traversant le thtre de droite gauche. Un hussard ! ... (Plus haut.) Ici.

    Antonin, revenant. Voil, monsieur.

    Dervires, traversant de gauche droite. Un parent, sans doute... Je suis bien bon de m'inquiter...

    Antonin, qui l'a suivi. Voil, monsieur. (Dervires se retourne, ils se trouvent face face.)

    Dervires. Quoi ? que veuxtu ? Tu ne me laisseras donc pas tranquille ? mille tonnerres !Vat'en ! mais vat'en donc !

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    Scne VII 28

  • Antonin. Oui, monsieur.

    Dervires le pousse dehors par les paules.

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    Scne VII 29

  • Scne VIII

    Dervires, seul. Par tous les diables ! ... Allons, bon ; voil que j'oublie dj mes recommandations...On m'a pourtant assez sermonn, Paris... Si vous voulez plaire la jeune personne, soyez doux, calme,conciliant ; ils croient que c'est facile, quand on a t toute sa vie emport, brutal, querelleur... vingtcinqmillions ! ... Bien ! voil que je rejure ! Allons, c'est dit, il faut que l'on me prenne ici pour un modled'amnit... On dit la demoiselle jolie, a mrite bien quelques sacrifices... Quelqu'un ! ... attention ! ...

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    Scne VIII 30

  • Scne IX

    Dervires, Olympe

    Olympe, sortant de la chambre de droite, et parlant la cantonade. Un peu de patience, donc ! il varentrer ! (A ellemme.) Estelle presse ! (Apercevant Dervires.) Ah ! un jeune homme ! ...

    Dervires, s'inclinant. Mille pardons... C'est sans doute Mlle Olympe Cravachon que j'ai l'honneur desaluer ?

    Olympe, faisant la rvrence. Oui, monsieur.

    Dervires. Excusez ma curiosit... mais elle vous paratra naturelle quand vous connatrez lesesprances que M. votre pre m'a permis de concevoir.

    Olympe. Comment, monsieur, vous seriez...

    Dervires. Un prtendu... oui, mademoiselle.

    Olympe, part, aprs l'avoir regard. Ah ! en voil un ! ... un vrai ! (Mme jeu.) Eh bien ! quel mala faitil ?

    Dervires. Mon nom ne vous est sans doute pas tout fait inconnu... Dervires.

    Olympe, part. Ah ! le joli nom... pour une femme ! (Haut, avec embarras.) Monsieur, je suis trshonore... de l'honneur que... et je vous en... remercie... (A part.) Oh ! non, on ne remercie pas... (Haut.)Mais mon pre est absent...

    Dervires. Je le sais, mademoiselle, et je bnis l'heureux hasard qui me permet de causer un momentavec vous. (A part.) Elle n'a encore rien dit, mais elle est charmante.

    Olympe. Puisque vous voulez m'pouser (Etourdiment.) mon intention n'est certainement pas de vousdcourager, monsieur, mais je dois vous prvenir que c'est trs difficile.

    Dervires. Quand on vous a vue, mademoiselle, les obstacles ne comptent plus. (A part.) Eh bien !mais a, a va.

    Olympe. Ah ! c'est qu'il s'agit d'abord de plaire mon pre... et mon pre... il refuse tout le monde.

    Dervires, part. Comme c'est encourageant ! ... Mais j'tais prvenu. (Haut.) Eh bien !mademoiselle, j'ose vous l'avouer, ce pre inflexible, m'effraierait beaucoup moins s'il m'tait permisd'esprer que vous ne m'tes pas tout a fait contraire.

    Olympe, vivement. Moi ? par exemple !

    Dervires. Il y aurait bien encore un moyen de s'entendre plus vite... Si vous tiez assez bonne, assezconfiante, pour me donner un petit aperu du mari que vous avez rv... car vous avez d en rver un

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    Scne IX 31

  • (Olympe fait un oui de tte.), je m'efforcerais alors de lui ressembler.

    Olympe. Comment, monsieur, vous voulez...

    Dervires. Je conois votre embarras... Mais n'estce pas le chemin le plus court, le plus sr pourjuger de la sympathie des caractres et ne s'engager qu'avec connaissance de cause ?

    Olympe, part. Il raisonne trs bien !

    Dervires. Ainsi, mademoiselle, parlez sans crainte.

    Olympe. C'est que je ne sais gure faire les portraits... Cependant, puisque vous insistez...

    Air de l'Herbagre

    Je veux d'abord qu'il ait beaucoup d'esprit,

    Qu'il ait bonne tournure ;

    Je veux encor qu'il soit assez instruit

    Et d'aimable figure ;

    Je veux aussi qu'il soit d'excellent ton,

    Qu'il ne parle pas politique,

    Qu'il n'aime pas jouer au boston,

    Et qu'il fasse un peu de musique.

    Dervires

    Vraiment, il vous faut tout cela ?

    Olympe

    Oui, j'ai rv ce maril,

    Vraiment il me faut cela,

    Car j'ai rv ce maril.

    Dervires (parl). Mais... je tcherai...

    Olympe

    A la rigueur je pourrais me passer

    D'une haute naissance,

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    Scne IX 32

  • Mais je voudrais qu'il st un peu valser,

    Et qu'il chrt la danse ;

    Pourvu qu'il fasse enfin ma volont,

    Qu'il soit toujours d'humeur joyeuse,

    Et qu'il n'aime pas trop sa libert,

    Je sens qu'il peut me rendre heureuse.

    Dervires

    Vraiment, il vous faut tout cela ?

    Olympe

    Oui, j'ai rv ce maril...

    Etc

    Dervires, part. Elle est ravissante !

    Olympe. Ah ! j'oubliais une condition... oh ! mais trs importante. Je ne pourrais jamais me rsoudre pouser un homme emport, querelleur, qui et des duels enfin !

    Dervires. Fi donc ! (A part.) Comme a se trouve.

    Olympe. Voil tout, monsieur.

    Dervires. C'est extraordinaire, tout ce que vous aimez, je l'aime, tout ce que vous dtestez, je ledteste.

    Olympe, avec joie. Vraiment ? Ah ! qu'on a bien raison de s'expliquer franchement ! ... voil ce queles parents ne veulent pas comprendre... Si mon pre savait que je vous ai vu... que je vous ai parl... Ah !mon Dieu ! je l'entends ! ... il ne faut pas qu'il se doute... (Saluant solennellement.) Monsieur, je vouspermets d'aspirer ma main.

    Elle sort par la seconde porte de gauche.

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    Scne IX 33

  • Scne X

    Dervires ; puis Cravachon ; puis Amlie

    Dervires, la regardant sortir. Et j'userai de la permission, je vous prie de le croire... Quelle bonnepetite nature : franche, nave, aimante... Je l'ai bien un peu trompe... mais je me corrigerai... c'est dcid,plus de querelles, plus d'affaires d'honneur... Je veux rivaliser de douceur avec le papa Cravachon, qui doittre, d'aprs les principes qu'il a donns sa fille, l'invalide le plus pacifique... On le dit un peu original...j'viterai de le froisser...

    Air de Julie

    Pour enjler ce pre de famille,

    Adoptons des moeurs de couvent,

    Je ferais des travaux d'aiguille,

    Je consens mme jouer au volant.

    Pour ta douceur, beaupre, on te renomme,

    De patience, eh bien faisons assaut :

    Pour pouser ta fille, s'il le faut,

    J'oublierais que je suis un homme.

    (Parl.) Ah ! le voici !

    Cravachon, entrant sans voir Dervires, une lettre la main, part. Les poltrons ! ... ils ont arrangl'affaire... et maintenant il djeunent... N'ontils pas eu le front de m'inviter ! ... "Messieurs, je ne djeunejamais entre mes repas."

    Dervires, part. Il a l'air bon diable ! mais il ne me voit pas...(Toussant.) Hum ! hum !

    Cravachon, l'apercevant. Hein ?

    Dervires, saluant. Monsieur...

    Cravachon. Vous tes enrhum.

    Dervires. Nullement.

    Cravachon. Que voulezvous ?

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    Scne X 34

  • Dervires, part. Diable ! il est brusque ! (Haut.) Monsieur, je m'appelle Dervires et je pense quemon nom...

    Cravachon. Ah ! trs bien, trs bien.

    Amlie, entrouvrant la porte de droite. Hein ? quelqu'un ! ...

    Pendant toute cette scne elle coute, moiti masque par la porte.

    Dervires. J'ose prtendre l'honneur...

    Cravachon. Vous voulez pouser ma fille ?

    Amlie. Comment, j'ai un rival ?

    Cravachon. Je suis enchant que nous soyons seuls ! ... (Avec intention.) J'ai l'habitude de causer enparticulier avec les prtendus.

    Dervires. C'est trop juste.

    Amlie, part. Enfin je vais connatre ce grand secret.

    Cravachon, remontant la scne. Vous permettez... (Il ferme la porte du fond.) On ne saurait tropprendre de prcautions pour n'tre pas drang.

    Dervires, part. Voil un singulier prambule.

    Cravachon, prsentant un fauteuil. Asseyezvous. (Il va chercher un autre fauteuil pour lui et voyantDervires encore debout.) Asseyezvous donc. (Ils s'asseyent.)

    Dervires, aprs un temps, part. Soyons insinuant. (Haut.) C'est en tremblant, monsieur...

    Cravachon. Permettez... (Il tousse.) Monsieur, je suis le major Cravachon, j'ai brl l'Allemagne, laPrusse et l'Italie, j'ai dtrn des rois, monsieur, j'ai mang du cheval...

    Dervires, gament. Sans sel ?

    Cravachon. Il n'en avait pas... Enfin je suis un honnte homme et je donne cent mille francs mafille... A vous maintenant... Allez. (Il s'enfonce dans son fauteuil et allonge les jambes.)

    Dervires, part. Il est drle, le beaupre. (Haut.) Ma foi, monsieur, je n'ai encore brl nil'Allemagne, ni la Prusse, ni l'Italie ; et je vous avouerai que l'occasion ne m'a jamais t prsente deconsommer du quadrupde en question... mais...

    Cravachon. Pardon... ditesvous a pour vous moquer de moi ?

    Dervires. Ah ! pouvezvous croire...

    Cravachon, reprenant sa premire question. Allez.

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    Scne X 35

  • Dervires. J'allais ajouter que je n'en crois pas moins possder les qualits ncessaires au bonheurd'une femme (Une pause. Cravachon reste dans la mme attitude. A part.) Eh bien ! il ne rpond pas.(Haut.) Monsieur...

    Cravachon. Allez, j'coute.

    Dervires, part. Allons. (Haut.) Vous ne me connaissez que par quelques recommandations toutesbienveillantes, et vous dsirez sans doute que j'entre dans quelques dtails sur ma position et sur ma fortune...Orphelin fort jeune et seul hritier d'une famille...

    Cravachon, immobile. La fortune ne fait pas le bonheur... passons.

    Dervires, avec tonnement. Ah ! la fortune ne fait pas... (Se ravisant.) Vous venez de dire l unebien grande vrit, monsieur, car enfin qu'estce que la fortune ? Mon Dieu ! la fortune ! ... c'est un fait...une... comment diraije ? ... Ah ! monsieur... bien peu de pres comprennent cela ! tandis que...l'ducation, par exemple... certainement il ne m'appartient pas de vanter la mienne, mais...

    Cravachon. L'ducation ne fait pas le bonheur... passons.

    Dervires, tonn. Ah ! l'duc... (Se ravisant.) J'allais le dire... l'ducation ! qu'estce que aprouve ? qu'on a t bien lev, pas autre chose... Ce qu'il faut pour faire le bonheur d'une femme, c'est uneme tendre, c'est un coeur brlant, c'est un amour...

    Cravachon. Oh ! l'amour ! ... l'amour ne fait pas le bonheur... passons.

    Dervires. Comment ! ... l'amour non plus ? ... (A part.) C'est un logogriphe que ce beauprel.

    Amlie, part. Ah ! qu'estce qui fait donc le bonheur ?

    Dervires. Alors, monsieur, pour tre vritablement heureux, quelles sont, je vous prie, les qualits...

    Cravachon. Ah ! ldessus, jeune homme, j'ai des ides... des ides moi, et... (Dervires tendl'oreille.) et je les garde... Mais vous ne m'avez pas encore dit un mot de votre existence de garon. (Il se lve.)

    Dervires, part, en se levant. Diable ! (Haut.) Je ne vous cacherai pas que, comme tous les jeunesgens, je me suis un peu amus.

    Amlie, part. Je ferais peuttre bien de m'en aller.

    Cravachon. Vrai ? eh bien ! vous avez bien fait... bah ! la jeunesse n'a qu'un temps ! Mais, il nes'agit pas de cela... Voyons, l... franchement... un gaillard comme vous doit avoir la tte chaude... vive... rienqu' vos oreilles a se voit...

    Dervires, part. Ah ! mon Dieu !

    Cravachon. Pour un mot, flamberge au vent !

    Dervires. Mais... (A part.) D'o saitil ?

    Cravachon. Voyons, combien avezvous eu de duels ? contezmoi a ; je suis un vieux loup, moi.

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    Scne X 36

  • Dervires, part. C'est un pige (Haut.) Moi, monsieur, je ne me suis jamais battu.

    Cravachon, brusquement. Ce n'est pas vrai.

    Dervires, avec vivacit. Monsieur...

    Cravachon. Ah ! vous voyez bien que vous vous tes battu ?

    Dervires, part. Quelle faute ! (Haut.) J'ai bien eu quelques petites altercations...

    Cravachon. A la bonne heure !

    Dervires, froidement. Mais j'ai toujours arrang l'affaire.

    Cravachon. Hein ?

    Dervires. Le duel est un prjug barbare ! ... Avezvous lu JeanJacques, monsieur ? ...

    Cravachon, firement. Je n'ai lu ni l'un ni l'autre, monsieur.

    Dervires, avec un feinte exaltation. Quel dommage ! vous auriez vu fltrie, dans ces pagesimmortelles, cette coutume jamais sanglante, vous auriez vu...

    Cravachon. Estce que vous avez t cur, monsieur ? Ah ! vous qui parlez, si on vous insultait ?

    Dervires, aprs un mouvement rprim. Je mpriserais l'insulte, monsieur.

    Cravachon, part. C'est ce que nous allons voir.

    Dervires. Mais ce n'est l pour nous qu'un simple sujet de conversation... et je crois que, sur lespoints essentiels, nous sommes peu prs d'accord.

    Cravachon. D'accord ! d'accord ! comme vous y allez, vous... mais, je ne vous connais pas.

    Dervires. Il me semble pourtant vous avoir donn des dtails assez prcis...

    Cravachon. Et qui vous dit que je les crois, vos dtails ?

    Dervires. Comment ? (Se calmant tout coup.) Je pense pourtant que vous ne doutez pas de maloyaut !

    Cravachon. Votre loyaut, votre loyaut... c'est un mot qu'on trouve tous les jours dans la bouche des...

    Dervires, vivement. Assez, monsieur.

    Cravachon, part. Trs bien.

    Amlie, part. Il l'insulte, prsent.

    Dervires, part. Qu'allaisje faire ! (Haut, avec beaucoup de calme.) Mais quoi bon nousemporter ? ... je suis persuad, monsieur, que vous n'avez pas eu l'intention de m'offenser...

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    Scne X 37

  • Cravachon, part, avec un geste de ddain. Incurable !

    Dervires. Et j'espre que ce mariage...

    Cravachon. Vous ! pouser la fille du major Cravachon... j'aimerais mieux la marier... un Anglais.

    Amlie, part. Jolie conclusion !

    Dervires. Mais...

    Cravachon. Voulezvous me laisser tranquille ! ... Je ne vous coute plus. (Il appelle.) Antonin !Antonin ! ... (A part.) Maintenant, il s'agit de voir l'autre.

    Antonin, entrant. Voil !

    Cravachon. Ds que la personne qui t'a remis cette lettre sera venue, tu l'introduiras dans mon cabinet.(A Dervires en lui tendant la main.) Je peux vous dire une chose... c'est que vous ne serez jamais mongendre. (Goguenard.) Serviteur, monsieur, serviteur. (Prs de sortir.) Ah ! pouah !

    Il sort par la premire porte gauche.

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    Scne X 38

  • Scne XI

    Dervires, Antonin, Amlie

    Dervires. Je n'y comprends rien... Je rve sans doute.

    Antonin, la porte de droite, appelant Amlie. H ! monsieur ! lieutenant !

    Amlie, sortant. A mon tour maintenant, s'il croit que je vais me laisser comme l'autre... ah ! maisnon ! mon uniforme me le dfend.

    Antonin. Le major vous attend dans son cabinet.

    Amlie, traversant le thtre. C'est bien.

    Dervires, en l'apercevant. Un officier ! D'o sortil ? (Il passe droite et change un salut avecAmlie.)

    Amlie. Pauvre jeune homme ! il me fait de la peine !

    Elle entre par la premire porte gauche.

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    Scne XI 39

  • Scne XII

    Antonin, Dervires

    Dervires, Antonin. Quel est cet officier ?

    Antonin. Cet officier ? c'est un militaire... Pour vous achever l'histoire de mon oncle...

    Dervires. Laisse l ton oncle, et dismoi...

    Antonin, poursuivant son ide. Le vtrinaire a prtendu que c'tait le serein qui lui tait tomb...

    Dervires, part. Maudit homme !

    Antonin. Sur les oreilles... Faut se mfier du serein !

    Dervires, le prenant au collet. Mais cet officier... cet officier... dismoi donc...

    Antonin. Eh bien ! quoi ? un hussard qui vient pour pouser Mademoiselle... (Reprenant.) Pour lors,quand mon oncle a vu...

    Dervires. Comment... estu sr ?

    Antonin. Parbleu ! puisque Monsieur le demande dans son cabinet... Pour lors...

    Dervires, se promenant avec agitation. Mais en ce cas, on s'est jou de moi ! Ah ! je me vengerai,oui, je me vengerai !

    Antonin. Pour vous achever l'histoire de mon oncle.

    Dervires. Eh bien ! que faistu l ? Vat'en donc, imbcile !

    Antonin. Merci, monsieur. (A part.) Dcidment ce n'est pas le moment de lui conter l'histoire de... ase retrouvera. (Haut.) Monsieur, a se retrouvera.

    Dervires. Eh ! va donc te promener, animal ! (Antonin sort.) Pendant que je m'tudiais l flatter cevieux maniaque... il y avait ici un autre tout prt qui coutait sans doute, et qui a t tmoin de... et unmilitaire encore ! Oh ! ce que j'ai t insult, mpris, conspu et je n'ai rien dit ! j'ai fait de la philosophieavec ce traneur de sabre, quand j'aurais d le... Moi qui me suis battu vingt fois sans motifs, il n'y a pasquinze jours encore, pour un carambolage... on me le contestait... et, maintenant qu'on m'insulte... Oh ! cen'est pas fini... je vais trouver le major, il est encore d'ge tenir une pe et... quant sa fille, j'y renonce...c'est dommage pourtant... Ah ! au diable le sentiment ! nous allons voir... je redeviens moi, je me retrouve,je me reconnais... Qu'on me reprenne faire le moraliste, vingtcinq millions de tonnerres ! Ah ! a fait dubien de jurer... morbleu ! ... sacrebleu ! ... (Il frappe du pied.)

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    Scne XII 40

  • Scne XIII

    Olympe, Dervires

    Olympe, entrant. Ah ! mon Dieu !

    Dervires, part. La petite... je crois qu'elle m'a entendu.

    Olympe. Eh bien ! monsieur, c'est joli... Qu'estce que vous faites donc l ?

    Dervires, embarrass. Moi ! je... je... je m'panchais !

    Olympe. Ils sont gracieux vos panchements... Avezvous vu mon pre ?

    Dervires. Je l'ai tellement vu, que je le cherche pour me couper la gorge avec lui !

    Olympe. Comment, avec mon pre ?

    Dervires. N'essayez pas de m'arrter... c'est impossible... Voyezvous, il m'a insult, il m'a outrag !

    Olympe. Lui !

    Dervires. Luimme ! aussi, adieu... J'en suis fch pour vous, qui tes bien bonne, bien douce,mais... (Fausse sortie.)

    Olympe, pleurant. Je le vois bien... vous ne voulez plus m'pouser...

    Dervires, revenant. Moi ! ... c'estdire... (A part.) Estelle gentille, mon Dieu ! (Haut.) Aucontraire, je veux bien vous pouser... mais... aprs.

    Olympe. C'est a, quand vous aurez tu mon pre.

    Dervires. Mais non... soyez donc tranquille... on ne sait pas... c'est peuttre lui qui me tuera.

    Olympe, pleurant. Alors, ce sera encore plus difficile.

    Dervires. C'est juste... je ne sais plus ce que je dis... Comment faire ?

    Olympe. Moi qui vous croyais si doux, si paisible... Tenez, je vois bien que vous m'avez trompe... etque votre caractre...

    Dervires. Justement, c'est que je n'y suis pas dans mon caractre, j'en suis sorti ! ...

    Olympe. Alors, rentrezy, monsieur, rentrezy.

    Dervires. C'est bien ce que je demande. (Bruit dans la chambre droite.)

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    Scne XIII 41

  • Olympe. Ciel ! j'entends la voix de mon pre.

    Dervires. Ah ! grce au ciel.

    Olympe. Qu'allezvous faire ?

    Dervires. Je vous en prie, laisseznous.

    Olympe. Je vous devine... je reste !

    Dervires. Je l'entends ! ... Je ne rponds plus de moi !

    Olympe, effraye. Oh ! mon Dieu ! cachezvous !

    Dervires. Moi, le fuir !

    Olympe. Ah ! je vous en supplie... dans l'tat d'exaspration o vous tes...

    Dervires. Je n'ai plus rien mnager... il m'a refus votre main... il l'avait peuttre accorded'avance cet officier de hussards.

    Olympe, part. Amlie. (Haut.) Le hussard, mais je n'en veux pas.

    Dervires. Il serait possible ?

    Olympe. A une condition... partez.

    Dervires. Et vous m'aimerez ?

    Olympe. Oui, oui, dpchezvous !

    Dervires. Et vous m'pouserez ?

    Olympe. Je ferai mon possible, allez, allez.

    Dervires. Mais o ? ... Ah ! cette chambre ? (Il se dirige gauche, deuxime plan.)

    Olympe. La mienne, non, non.

    Dervires, allant droite. Cellel ?

    Olympe, part. La chambre d'Amlie ! (Haut.) Monsieur !

    Dervires, entrant. Voyez ce que je fais pour vous !

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    Scne XIII 42

  • Scne XIV

    Cravachon, Amlie, Olympe

    Olympe, voyant entrer Amlie gauche. Ah ! Dieu soit lou !

    Cravachon. Allons, allons, jeune homme, du calme !

    Amlie. Morbleu ! ventrebleu ! sacrebleu !

    Olympe, part. Dieu ! Comme elle jure !

    Cravachon. Monsieur !

    Amlie. Je ne veux rien entendre !

    Cravachon. Mais...

    Amlie, frappant du pied. Ttebleue !

    Cravachon. Puisque je vous dis que c'est une ruse...

    Amlie. Je n'aime pas les ruses.

    Cravachon. Une plaisanterie.

    Amlie. J'abhorre les plaisanteries... vous m'avez insult !

    Olympe, part. Comment ! elle aussi !

    Amlie. a ne se passera pas comme a, mille bombes !

    Cravachon. A la fin, voil un homme. (Haut, avec effusion.) Mon ami, je vous dois une rparation...

    Olympe, part. Encore un duel !

    Cravachon. Touchez l : vous tes mon gendre.

    Olympe. Hein ?

    Amlie. Vrai ? ... Eh bien ! j'accepte ! ...

    Olympe, part. Par exemple ! ... (Haut.) Mais, papa...

    Cravachon. Te voil... avance ici... (Il la prend par la main et la prsente Amlie avec crmonie.)Monsieur, voil ma fille... c'est jeune, c'est timide, ne faites pas attention elle... (A Olympe.) Voici l'pouxque je t'ai choisi... il runit toutes les qualits...

    Thtre . 1

    Scne XIV 43

  • Olympe. Pourtant, papa...

    Cravachon. Pas d'observations... je connais Monsieur, je l'ai tudi, je l'ai prouv...

    Olympe. Si vous vous trompez...

    Cravachon. Je ne me trompe jamais.

    Olympe, part. L ! laissez donc faire les grands parents.

    Amlie, part. J'ai une envie de rire ! ... (Elle remonte la scne, en se donnant un air dcid.)

    Cravachon, Olympe. Regarde donc quel air dcid ! quelle tournure martiale ! ... C'est un hrosque je t'ai donn l, ma fille... et un jour... qui sait ? il deviendra peuttre marchal.

    Olympe. Oui, papa.

    Cravachon. Et toi on t'appellera Mme la marchale.

    Olympe. Oui, papa.

    Cravachon, Amlie. Alors, vous avez vu le feu ?

    Amlie. Si j'ai vu le feu ! j'en ai vu plus d'un.

    Cravachon. Ah ! bah !

    Amlie

    Air connu

    Oui, mon vieux,

    Courageux,

    En tous lieux,

    J'ai vu, par mes yeux,

    Un peu tous les feux.

    De retour,

    En ce jour,

    Je viens pour

    Connatre, son tour,

    Celui de l'amour ;

    Thtre . 1

    Scne XIV 44

  • J'ai vu le feu du canon,

    Feu de peloton,

    Feu de bataillon,

    Feu de bastion,

    Le feu du bivouac,

    Le feu du tillac.

    Mme celui... du cognac.

    Si je vous disais que le gouvernement a eu trois chevaux tus sous moi, monsieur.

    Cravachon. Et si je vous disais, moi, que j'en ai mang, monsieur !

    Amlie. De quoi, monsieur ?

    Cravachon. Du cheval, monsieur, et vous ?

    Amlie. Moi,

    Mon vieux,

    Etc.

    Cravachon, enthousiasm. Ah ! vous serez mon gendre ! vous serez mon gendre !

    Olympe, part. Elle va tant faire, qu'elle va faire renvoyer l'autre.

    Cravachon. Je vais crire au notaire.

    Amlie. A la bonne heure ! ... j'aime qu'on mne les choses rondement.

    Cravachon. Et quant cette permission que vous m'avez demande pour voir le capitaine Doffin, jevais vous la donner. (Il va la table droite.)

    Amlie, part. Ah ! enfin !

    Cravachon, crivant. Demain, dix heures, les portes vous seront ouvertes.

    Amlie. Merci, major.

    Olympe, bas Amlie. Tu n'y penses pas... Il y a ici un autre prtendu auquel tu nuis !

    Amlie, bas. Ah ! bah ! tu l'aimes ?

    Olympe, bas. Dame ! tu ne peux pas le remplacer.

    Thtre . 1

    Scne XIV 45

  • Amlie, part. Atelle peur ! (Elle indique par signes Olympe qu'elle va tcher d'arranger cela.)

    Cravachon, prsentant un papier Amlie. L, voil la chose... (Amlie prend le papier.) Et ce soir, lecontrat.

    Amlie et Olympe, part. Ce soir.

    Amlie. Major, je suis on ne peut plus flatt de votre alliance, mais je n'ai pu encore m'expliquer avecMademoiselle, et j'ignore si son coeur...

    Cravachon. Laissez donc ! elle vous adorera... un homme qui a eu trois chevaux tus sous legouvernement ! (A sa fille.) N'estce pas que tu...

    Olympe. Mais non, papa.

    Cravachon, bas Olympe. Veuxtu te taire ! ... (Haut Amlie.) Et puis, vous me plaisez, a suffit...Vous avez de a... c'est tout dire... Au moins, vous, vous saurez protger votre femme ; et si une figure luidplat dans la rue, elle n'a qu'un mot dire... vous mettez le particulier l'infirmerie, vous... et vous croyezque a ne flatte pas une demoiselle ?

    Amlie. Cependant...

    Cravachon. Je vous dis que vous tes mon homme et qu'elle vous chrira... Quant moi, je suis siheureux de vous avoir pour gendre, que si vous n'pousez pas ma fille, je me bats avec vous.. voyez...

    Thtre . 1

    Scne XIV 46

  • Scne XV

    Olympe, Cravachon, Amlie, Dervires ; puis Antonin

    Dervires, Amlie. Et si vous l'pousez, moi, je vous tue ! voyez !

    Amlie, part. Ah ! mon Dieu ! l'autre maintenant !

    Cravachon, part. Le poltron ! d'o sortil ?

    Dervires. Dcidezvous bien vite... je veux en finir.

    Olympe. Un duel ! mais c'est impossible.

    Cravachon, Olympe. Le hussard va lui appliquer son affaire.

    Dervires, Amlie. J'attends votre rponse.

    Cravachon, Amlie en faisant le geste de donner un soufflet. Comment, vous ne rpondez pas...

    Amlie. Si... si... Eh bien ! monsieur, c'est trs bien ! (Rsolument.) Nous nous battrons ! Cinqminutes, et je suis vous ! Major, ce jeune homme m'appartient, vous m'en rpondez.

    Cravachon. Bravo !

    Choeur

    Amlie et Dervires

    Air de la Prova

    Pour laver cet outrage,

    Je reviens l'instant.

    Revenez l'instant.

    Craignez tout de ma rage,

    Car il me faut du sang !

    Cravachon

    Comme il ressent l'outrage !

    Son rival n'est pas blanc !

    Thtre . 1

    Scne XV 47

  • Pour apaiser sa rage,

    Il lui faudra du sang !

    Olympe

    Pourquoi tout ce tapage ?

    On peut heureusement

    Apaiser tant de rage

    Sans rpandre le sang

    Amlie sort, Dervires reste un instant au fond comme pour accompagner Amlie de ses menaces.

    Olympe, revenant, Cravachon. Allez, papa, c'est affreux, toujours des querelles, des affairesd'honneur ; mais, cette fois, ce duel ne s'accomplira pas, car, puisqu'il faut vous le dire depuis ce matin vousguerroyez avec une femme, une de mes camarades de pension, ma meilleure amie.

    Elle sort.

    Thtre . 1

    Scne XV 48

  • Scne XVI

    Cravachon, part. Une femme... comment... (Examinant Dervires.) Il se pourrait... Au fait, cettepoltronnerie n'tait pas naturelle, et j'aurais d me douter... (Il s'approche de Dervires en riant.) Eh ! eh !eh !

    Dervires. La drle de figure !

    Cravachon, mignardement. Eh bien ! nous voulons nous battre... avec ces petites menottesl ! ... etles petits petons que voici ?

    Dervires, part. Qu'estce qui lui prend ?

    Cravachon. Ah ! vous croyez qu'on a les yeux dans sa giberne ? (Lui frappant doucement sur lajoue.) Petit lutin !

    Dervires. Eh ! morbleu, monsieur !

    Cravachon, tonn. Morbleu !

    Dervires, avec emportement. Ces plaisanteries... Si je ne respectais votre ge...

    Cravachon, part. Comment ! elle me cherche querelle, prsent ? Ah ! mais, ce n'est doncpas...(Haut.) Vous tes donc brave, vous ? ...

    Dervires. Je ne crains personne.

    Cravachon. Vous vous tes donc dj battu ?

    Dervires. Vingt fois !

    Cravachon Je n'y suis plus... (Haut.) O a ?

    Dervires. Partout ! ... Dernirement encore, Paris, onze heures du soir, entre deux fiacres.

    Cravachon, faisant un bond en arrire. Entre deux fiacres ! ... vous avez dit : entre deux fiacres !Chantez ! ou plutt non, non, ne chantez pas !

    Dervires. C'est a ! comment savezvous ? ...

    Cravachon. C'tait moi, mon ami ! c'tait moi !

    Dervires, part. Lui ! ... je suis perdu !

    Cravachon. Enfin je vous retrouve... Embrassezmoi donc...puisque je vous dis que c'tait moi ! ...

    Thtre . 1

    Scne XVI 49

  • Dervires. Vraiment ! Monsieur, je suis dsol ! ... j'espre du moins que vous tes entirementguri ?

    Cravachon. Du tout ! a me fait encore mal ! et c'est ce qui en fait le charme... Une gratignure, jel'aurais oublie tout de suite avec son auteur, mais vous, ce n'est plus a, aussi :

    Air : Connaissezvous le grand Eugne ?

    Je vous aimais sans vous connatre !

    Enfin, Dieu merci, vous voil !

    Vous vous tiez montr mon matre,

    Votre souvenir tait l ;

    Il tait grav l

    Il montre son coeur.

    Puis l

    Il montre son paule.

    Vraiment la circonstance est drle :

    Quand vous m'avez port ce coup vainqueur

    Vous n'en vouliez qu' mon paule,

    Et vous m'avez touch le coeur.

    Ah ! vous dnez avec nous, n'estce pas ? Voyons, veuxtu prendre quelque chose ?

    Dervires. Merci mille fois. (A part.) Quel homme singulier ! (Haut.) Je n'ose plus maintenant meprsenter devant Mlle votre fille.

    Cravachon. Ma fille... mais, au contraire, plus que jamais, puisque le hussard... Je suis fix sur lehussard. (Appelant.) Antonin !

    Antonin, entrant. Monsieur...

    Cravachon. O estelle ?

    Antonin. Qui a ?

    Cravachon. Le lieutenant !

    Dervires, part. Le lieutenant.

    Antonin. Il monte l'escalier... Je ne sais pas ce qu'il a, mais il est d'une joie...

    Thtre . 1

    Scne XVI 50

  • Cravachon, part. Eh bien ! la bonne heure ! nous allons rire.

    Thtre . 1

    Scne XVI 51

  • Scne XVII

    Cravachon, Amlie, Dervires ; puis Olympe et Antonin

    Amlie, Dervires Eh bien ! petit, sommesnous prt ?

    Dervires. Je suis vos ordres, monsieur.

    Cravachon, goguenard. Ah ! nous allons donc nous massacrer, nous tailler en pices ?

    Dervires. Les tmoins ?

    Amlie. Je viens de prvenir le mien, et dans un instant...

    Cravachon. Oh ! sans le connatre, j'ai mieux que cela lui offrir... un gaillard solide qui, une fois surle terrain... (Il appelle.) Olympe ! Olympe ! (Il monte la scne.)

    Amlie, Dervires. Monsieur, entre deux rivaux on se doit de la franchise... me voil prt vousdonner toute satisfaction... Mais, avant tout, j'ai un aveu vous faire... (A Cravachon qui s'est approch.)Pardon. (A Dervires.) Apprenez que depuis longtemps, (Avec fatuit.) je suis au mieux avec Mlle Olympe...depuis longtemps, je porte ce doigt le gage d'une affection...

    Dervires. Monsieur ! c'est une infme calomnie, et tout votre sang...

    Cravachon et Olympe, qui entre. Qu'y atil donc, messieurs ?

    Dervires. Votre tmoin ?

    Amlie. Le capitaine Doffin.

    Cravachon. Le prisonnier ! ... impossible !

    Amlie. Silence dans les rangs ! ... et lisez. (Elle lui prsente un papier.)

    Cravachon. Que voisje ! ... "Ordre de mettre en libert le capitaine Doffin, reconnu innocent." Lecapitaine !

    Dervires. C'est encore un nouveau prtexte... Finissons !

    Amlie. Je ne me bats jamais sans son consentement.

    Cravachon. Et pourquoi a ?

    Amlie. Parce que...

    Cravachon et Dervires. Parce que ? ...

    Thtre . 1

    Scne XVII 52

  • Amlie. Parce que... c'est mon mari.

    Dervires. Son mari !

    Cravachon. Comment, vous seriez...

    Olympe. Mme Amlie Doffin, une de mes bonnes amies. Tu n'aurais pas devin celuil, toi, qui asvu le monde !

    Amlie. Et mang du cheval !

    Cravachon. Ah ! vieux quinzevingts... Si je m'appelais Napolon, je donnerais des lunettes lagarde impriale.

    Dervires, Amlie Ah ! madame, que d'excuses !

    Cravachon. Oui ! je comprends... vous vouliez voir votre mari toute force, et... (A Olympe.) Elle esttrs espigle, ton amie, trs espigle. (Prenant Dervires part.) Ah ! ditesmoi donc, mon cher... il y aune chose qui m'intrigue depuis longtemps... Quel diable de coup m'avezvous donc port ?

    Dervires, de mme. Oh ! mon Dieu ! un coup bien simple... un coup de seconde.

    Cravachon, de mme. Ah ! que c'est bte ! j'aurais d parer cercle. (Avec solennit, haut.) Ma fille,voici l'poux que je vous ai choisi.

    Olympe, part. Ah ! enfin !

    Cravachon. Et j'espre cette fois avoir eu la main heureuse.

    Antonin, Dervires. Pour vous achever l'histoire de mon oncle... vous savez bien qu'il avait perdul'oue...

    Dervires, avec complaisance. Eh bien ?

    Antonin. Eh bien ! il ne l'a pas retrouve.

    Cravachon, Dervires. Dites donc, Dervires, si vous tiez bien gentil, vous me feriez rpter cecoupl, hein ? Avant la nuit, nous avons bien le temps de faire un petit assaut.

    Dervires. Avec plaisir (Antonin remet Cravachon ses fleurets ; celuici en donne un Dervires,et se met en garde. En ce moment, Olympe, qui a caus bas avec Amlie, se retourne.)

    Olympe. Mais, que faitesvous donc ?

    Cravachon. Ne t'inquite pas, nous rglons les clauses du contrat.

    Air final des Gants jaunes

    Il faut bien que je reconnaisse,

    Avant tout, son identit...

    Thtre . 1

    Scne XVII 53

  • Le coup qu'il m'a dj port ;

    Il me doit cette indemnit.

    Au public.

    Soyez, messieurs, de cette affaire

    Les tmoins dsintresss

    Grce votre concours, j'espre,

    Que nous n'aurons pas de blesss.

    Tous

    Grce votre concours,

    Etc.

    RIDEAU

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    Scne XVII 54

  • Deux papas trs bien ou la grammaire de Chicard

    Thtre . 1

    Deux papas trs bien ou la grammaire de Chicard 55

  • Personnages

    ComdieVaudeville en un acte

    par Eugne Labiche et Lefranc

    Reprsente pour la premire fois, Paris, sur le Thtre du PalaisRoyal, le 6 novembre 1844

    Personnages

    Acteurs qui ont cr les rles

    Poupardin, ngociant, pre de Camille : MM. Lemnil

    Tourterot, propritaire, pre de Csar : Grassot

    Csar, mdecin : Germain

    Glinotte, avou : MM. Lacourrire

    Mdard, domestique de Tourterot : Dubleix

    Camille, fille de Poupardin : Mlle Juliette

    La scne se passe Chtellerault.

    Thtre . 1

    Personnages 56

  • Scne premire

    Le thtre reprsente un salon avec trois grandes portes ouvertes au fond sur un jardin. Portes droiteet gauche. Chaises, fauteuils, etc.

    Mdard, seul ; puis Tourterot

    Tourterot, en dehors, droite, parlant Mdard. Enfin un djeuner chicocandard !

    Mdard, prs de la porte, droite, rpondant. Chicocandard... c'est clair... je comprends parfaitement...(Descendant la scne.) Eh bien, non ! ... prsent que je suis seul... je peux m'avouer a moimme... jen'y comprends rien du tout ! ... mon nouveau matre a un si drle de jargon ! ... Il parat que c'est depuis sonvoyage Paris... Ah ! il a de drles de mots tout de mme chicard... chicandard... chicocandard ! ... un vraitintamarre ! ... quoi... Si bien que je suis toujours me demander ce qu'il a dit, trois quarts d'heure aprs qu'ila parl... C'est ma faute, bien sr, c'est ma faute...

    Tourterot, entrant par la droite, un criteau la main. L ! ... voil mon criteau termin.. Mdard ! ...

    Mdard. Monsieur !

    Tourterot. Tu vas m'accrocher a audessous du balcon.

    Mdard. Oui, monsieur.

    Tourterot, montrant l'criteau. Qu'estce que tu dis de a, toi ? A brocanter, joli petit bazar entre couret jardin.

    Mdard. Vous avez un bazar ... ?

    Tourterot. Mon bazar ou ma souricire, comme tu voudras.

    Mdard, btement. Ah !

    Tourterot, l'imitant. Ah ! ... Il ne comprend pas ! ... quel serin que ce Mdard ! Mais je tepardonne... tu n'es pas forc de connatre les progrs de la langue ; tu es de Chtellerault... il faut te parler lepatois de Chtellerault... Toi, tu mettrais tout btement : A vendre, jolie petite maison, entre cour et jardin.

    Mdard. Vous vendez votre maison ?

    Tourterot. Oui, je... certainement. (A part.) C'est une couleur, mais qu'il ignore.

    Mdard. Eh bien, franchement, je n'aurais jamais compris...

    Tourterot. Vous tes si melons Chtellerault !

    Mdard. Possible ; Mais, quand on s'adresse aux melons... qu'on veut tre compris des melons, m'estavis qu'il faut leur parler le langage... melon.

    Thtre . 1

    Scne premire 57

  • Tourterot. Cet esclave pourrait dire vrai... Alors, va prendre l'ancien criteau qui est dans le grenier...Mais que va dire mon fils son arrive, en retrouvant sa paternit si rococote !

    Mdard. Votre fils ?

    Tourterot. Oui, mon fils, mon moucheron, qui arrive aujourd'hui de Paris, le foyer du beau langage... Ilm'appellera perruque... Ah ! dame ! c'est qu'il en pince crnement, lui ! ... Si tu l'entendais ! quelleplatine !

    Mdard. A Paris, tout le monde parle donc comme a ?

    Tourterot, Tout le monde ? ... Ah ! non ; les gens de la haute seulement, ceux qui donnent le ton... Ily a dixhuit mois, quand j'ai t passer une quinzaine avec mon jeune homme, alors simple carabin, je sentaismon Chtellerault d'une lieue, j'tais ce que l'on appelle un vrai cruchon ; mais peu peu je m'y suis mis, jeme suis fait prsenter dans les meilleures socits... Il y avait surtout un ami de Csar, un nomm le preLahire... Ah ! les belles ftes de nuit qu'il nous a donnes, celuil, dans son parc, boulevardMontparnasse ! ... c'tait princier... illuminations a giorno, orchestre Musard, montagnes russes et gardesmunicipaux... toutes les douceurs de la vie ! ... Ah ! je peux dire que j'ai got des plaisirs bien purs danscette chaumire ! ... J'y ai vu la jeunesse dore, tout ce qu'il y a de plus flambart dans la capitale, et il m'enest rest un certain vernis... Ah ! si Csar n'avait pas cess tout coup de m'crire, je dialogueraisaujourd'hui d'une faon un peu mouchique

    Mdard. Comment ! Estce que, dans ses lettres, M. votre fils...

    Tourterot. Il crit comme il parle... Quel style ! comme c'est fignol ! ... Tu n'es pas sans avoirentendu parler de Mme Svign... Eh bien, franchement, a la dgotte... Mais je ne sais pas pourquoi, depuisqu'il a t reu docteur, depuis six mois environ... ni, ni, fini, bonsoir vos poules, plus de correspondance...Et moi qui avais besoin d'tre entendu dans la chose... je me rouille... je me dgomme... je rentre dans monvieux cabriolet.

    Il tire une tabatire portrait de sa poche et prend une prise.

    Mdard, regardant la tabatire. Ah ! la belle femme !

    Tourterot, flatt. Tu trouves ? Eh ! eh ! eh ! ... c'est mon pouse, la dfunte papa... (Il se dsignedu geste.) Un assez beau facis, hein ? ... a flatte un veuf... Allons, va mettre l'criteau, va !

    Mdard. J'y cours, bourgeois, j'y cours !

    Il remonte.

    Tourterot. Comment, j'y cours ? ... Arrive donc ici, toi, phnomne... Dans le beau monde, on ne ditpas "Je cours ! ..." on dit : "Je me la casse..." ou bien : "Je me la brise."

    Mdard. a suffit, bourgeois... je me la brise.

    Il sort par le fond.

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    Scne premire 58

  • Scne II

    Tourterot, seul, regardant sa tabatire.

    Jobard ! lui aussi, il croit que c'est ma femme... Allons donc ! elle tait grle... Mais, un jour, enpassant devant le MontdePit, rue des BlancsManteaux... on vendait ceci... a tient vingtcinq grammeset a flatte un veuf... adjug papa. (Il prend une prise.) L ! ... maintenant, M. Poupardin et sa fille peuventabouler quand bon leur semblera... Il est cocasse, ce pre Poupardin : pourquoi ne pas dire tout bonnement sa fille : "Voil... tu es d'ge prendre un mari... j'y ai song... j'ai trouv ton blot... appuietoi sur mon aile,et en route pour Chtellerault, nous allons piger et le futur..." Eh bien, non... il lui faut des tournures... il avoulu l'amener ici sous prtexte d'acheter un bienfonds... il veut qu'elle rencontre mon rejeton par hasard...qu'il lui fasse l'oeil sans en avoir l'air, et que leur bonheur se bibelote ainsi en douceur et comme sansprmditation... C'est une ide qu'il a, je la respecte... Quant moi, j'ai tout uniment crit Csar : "Allons,ho ! du lest ! ... au reu de la prsente, file ton noeud vers le toit paternel ; j'ai lev pour toi une jeunepoulette que je brle de te conjoindre : c'est la fille d'un homme trs bien, membre de l'acadmie d'Etampes,et qui a publi d'immenses travaux sur l'i grec et le point d'exclamation... Quant la dot, cinquante milleballes, a doit t'aller, viensy ! " Et je l'attends, c'est bien plus nature.

    Thtre . 1

    Scne II 59

  • Scne III

    Mdard, Tourterot ; puis Poupardin

    Mdard, rentrant par la gauche. Monsieur, l'criteau est perch.

    Tourterot. Et le djeuner ?

    Mdard. Sur le gril.

    Tourterot, luimme. Et mon fils qui n'arrive pas ! ... O peutil tre ? ...

    Mdard, croyant qu'il n'a pas compris, en remontant. Sur le gril, monsieur.

    Tourterot. Quel haricot que ce Mdard !

    Poupardin, sur le seuil, au fond. "Maison vendre..." Je touche, ce me semble, au but de mesprgrinations. (A Mdard.) M. Tourterot, rentier ?

    Mdard, lui montrant Tourterot. C'est a, monsieur.

    Poupardin. Je viens pour... l'immeuble.

    Mdard sort par la gauche.

    Tourterot, s'approchant vivement et gaiement de Poupardin. Monsieur Poupardin, connu ! ... (Ils seserrent la main.) Et votre fille... votre accessoire ?

    Poupardin, mystrieusement. Il tait bon que je la laissasse un moment dans la carriole... ayant uneouverture vous faire seul seul.

    Tourterot. Ah ! ... allez.

    Poupardin. Personne ne peut nous our ?

    Tourterot. Personne.

    Poupardin, mystrieusement. J'prouve le besoin de me mettre nu devant vous.

    Tourterot, tonn. Ah ! ... allez.

    Poupardin. Monsieur, pres tous deux, nous nous distingumes, nous nous crivmes, nous nousconvnmes et bientt nous caressmes un projet d'alliance entre votre fils et ma...

    Tourterot. Et votre unique.

    Thtre . 1

    Scne III 60

  • Poupardin. Prcisment ; mais, avant de perptrer ledit projet... je dois vous dire que ma fille uniquen'est pas mon seul enfant... Il peut m'en surgir un nouveau d'un moment l'autre.

    Tourterot. Qu'importe ? Dans notre famille, nous ne tenons pas la monnaie ; vous couperez legteau en deux, voil tout... Et o estil, ce jeune biberon ?

    Poupardin. Platil ?

    Tourterot. L'autre, le numro 2.

    Poupardin. L'autre ? je l'ignore... (Avec fatuit.) Cela tient des circonstances...

    Tourterot. Ah ! gaillard !

    Poupardin. J'tais garon, alors, monsieur, et voyageur de commerce. Or, vous savez que, dans cettearme... Mais je ne sais si je dois...

    Tourterot. Allez donc ! ... je ne suis pas chipie, faites votre jeu.

    Air : Songez donc que vous tes vieux

    Pour bien lever son enfant

    Faut avoir connu la bamboche ;

    On est toujours plus indulgent

    Lorsque l'on n'est pas sans reproche.

    Du coeur on pardonn' les carts

    Quand pour l'amour on fut prcoce..,

    Et, pour bien marier ses moutards,

    Il faut qu'un pre ait fait la noce.

    Poupardin. Au fait, vous pourrez peuttre m'aider saisir certain fil... Il y a de cela vingtsix ans, unsoir, Chtellerault...

    Tourterot. A Chtellerault ? Ici ? Ah ! mais a me pique... je commence tre piqu...

    Poupardin. Dans l'intention vidente d'chapper aux douceurs de ce cheflieu, plus clbre par sacoutellerie que par son architecture, j'allais prendre la diligence. A cet effet, envelopp d'un carrick, et mavalise sous le bras, je longeais un sentier obscur que je n'hsiterai pas qualifier de ruelle...

    Tourterot. C'tait la grande rue.

    Poupardin. Lorsqu'une petite porte s'ouvre proximit... une voix flte en sort et articule : "C'est toi,Arthur ? " Je me nomme Edgard ! ... Mais, comme le timbre tait flatteur, je rponds : "C'est moi, Arthur !" Qu'eussiezvous fait ma place ?

    Thtre . 1

    Scne III 61

  • Tourterot. J'aurais coup dans le mme pont... d'autant plus qu'Arthur, c'est le petit nom papa.

    Il se dsigne.

    Poupardin. Ah ! ... Je franchis le seuil, le coeur plein d'motion et ma valise sous le bras... (Avecgaillardise.) Que vous diraije ? ...

    Tourterot, gaiement. Rien de plus... Compris !

    Poupardin. Quelques instants aprs, une lumire voisine vint, hlas ! trahir mon incognito... A lapremire lueur de ce gaz inattendu, la belle inconnue poussa un cri .. Ah ! ... Arthur, c'tait un autrevoyageur qu'elle attendait.

    Tourterot. C'est pnible !

    Poupardin. Je fis de vains efforts pour la calmer... elle se rvolta, s'emporta, se gendarma, et...

    Tourterot. Et elle vous flanqua la porte...

    Poupardin. Juste ! ... J'en fus navr... d'autant plus qu'en dbouchant chez MM. Laffitte et Caillard, jem'aperus que j'avais omis ma valise.

    Tourterot. Fichtre ! ... Elle contenait des valeurs ?

    Poupardin. Trois pantalons de nankin et une redingote de bouracan... Dj j'en avais fait le sacrifice,lorsque, un an aprs... elle vint me rejoindre Etampes...

    Tourterot. Votre inconnue ?

    Poupardin. Non... ma valise.

    Tourterot. Avec son contenu ?

    Poupardin. Amplifi d'un billet ainsi conu : "Ne cherchez jamais me connatre... Une dmarcheindiscrte pourrait compromettre l'avenir de notre fils." De notre fils ! Sign...

    Tourterot. Sign ?

    Poupardin. Trois toiles.

    Tourterot. Nous n'avons personne de ce noml !

    Poupardin. Je me conformai scrupuleusement ce voeu. J'avais ma valise et... Mais, en revoyantChtellerault, je n'ai pu me dfendre d'un certain tiraillement... Estce l'esprance qui m'agite ? ...

    Touterot, avec doute. Oh !

    Poupardin. Estce le cahot de la voiture ? ...

    Tourterot, affirmant. Ah !

    Thtre . 1

    Scne III 62

  • Poupardin. Je l'ignore... Mais je vous devais cet panchement. Maintenant, parlons d'autres choses...Voyons... ce mariage...

    Tourterot. Il vous bottera... D'abord, voyezvous, pour ce qui est du Csar...

    Mdard, introduisant Camille par le fond. Voici, mademoiselle.

    Il sort.

    Poupardin. Chut ! ... ma fille !

    Thtre . 1

    Scne III 63

  • Scne IV

    Camille, Poupardin, Tourterot

    Camille. Je vous drange ?

    Poupardin. Mais non ! viens donc ! (La prenant par la main.) Permettez que je vous prsente ma fille.

    Tourterot, saluant. Mademoiselle... (Bas Poupardin.) Chic ! ... trs chic !

    Poupardin, tonn. Hein ? ...

    Tourterot. Je dis : chic, trs chic.

    Poupardin. Elle dsirait que je la promenasse... j'ai pens qu'il tait bon que je m'excutasse et que jel'emmenasse...

    Tourterot, part. C'est un subjonctif jet continu que ce beaupre.

    Poupardin. Afin qu'ensemble nous vissions, nous dcidassions et nous terminassions...

    Tourterot. L'acquisition... (A part.) Il parle comme Napolon... Landais.

    Poupardin. Mais avant tout...

    Tourterot. Avant tout, nous casserons bien une petite crote.

    Poupardin. Soit, j'obtempre ce voeu.

    Tourterot, appelant. Mdard ! (Mdard parat.) Allons, Mdard, en avant la gobichonnade !

    Mdard, la droite de Tourterot. On y est, bourgeois.

    Fausse sortie.

    Tourterot. Et puis tu passeras chez Me Paillotet, le notaire. Tu lui diras qu'il vienne tout de suite.

    Mdard, revenant la gauche de Tourterot. Oui ! Dar.. dar... quoi ! ... dar... dar...

    Il sort par le fond.

    Tourterot. C'est a : dar... dar... Eh bien. mais il va, ce petit... il va trs bien.

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    Scne IV 64

  • Scne V

    Camille, Poupardin, Tourterot

    Tourterot, prenant Poupardin part. Dites donc, elle nous gne pour causer, votre demoiselle ; estcequ'elle ne va pas se pousser un peu d'air ?

    Poupardin. Hein ?

    Tourterot. Elle nous embarrasse, tezla. (Faisant geste de dplacer quelque chose.) Otezla.

    Poupardin. Ah ! trs bien ! ... un tour de jardin, trs bien ! ..

    Tourterot a peut se dire aussi comme a.

    Poupardin. C'est rationnel...

    Tourterot, Et champtre.

    Poupardin, sa fille. Dis donc, Camille... dans l'hypothse o la srnit de la temprature t'inviterait...

    Camille, avec une ingnuit maligne. A m'aller promener... Mais, papa, j'aime mieux rester, si celavous est gal...

    Poupardin, avec embarras. Comment donc ! ...

    Camille, remontant. Parlez de vos affaires... je n'coute pas.

    Poupardin, bas Tourterot. Auraitelle lev notre livre ?

    Tourterot, J'en ai le trac.

    Poupardin. Dpistonsla. (Haut.) Et la contenance de cet immeuble est de... ?

    Tourterot. Vingtdeux ares trentetrois centiares... ce qui nous donne...

    Camille, revenant eux. Bien du mal pour me cacher une chose que je sais parfaitement.

    Poupardin. Et quoi donc, s'il vous plat, ma fille ?

    Camille. Ne faites donc pas le discret : ma tante m'a tout dit avant de partir... Je sais qu'il s'agit d'unmari.

    Tourterot. C'est nous qui posions... Elle est bonne, je la trouve bonne, la petite.

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    Scne V 65

  • Poupardin. Comment ? ta tante... ! Ah ! c'est mal, je vitupre son indiscrtion... Enfin, monsieur,nous pouvons nous ouvrir, maintenant qu'elle sait tout.

    Tourterot. Ouvronsnous, a me chausse.

    Poupardin, part. Cet homme a une faon d'exprimer sa pense qui confond mon intellect.

    Tourterot, Camille. Primo, d'abord, et d'un, j'ai l'honneur de vous prsenter votre futur beaupre, unpetit gris qui n'est pas encore trop dchir, comme vous pouvez voir.

    Camille. Ah ! c'est M. votre Fils...

    Tourterot. Luimme... un amour d'homme... Vous m'en direz des nouvelles

    Camille. Ah ! ... c'est un joli cavalier ? ... Et... estil bien ple ? ...

    Tourterot. Je ne pourrais pas vous dire... parce que, comme il a une barbe qui lui prend l...jusquel... mais il doit tre ple... en dessous.

    Poupardin. Et sa clientle ? ... j'aimerais assez que vous touchassiez cette corde.

    Tourterot. Sa clientle ? ... Ah ! dame ! ... dans le commencement, il y a eu du tirage... mais,maintenant, a boulotte, surtout depuis qu'il a mis une queue son nom... depuis qu'il se fait appeler ledocteur Csarius... vous comprenez, Csar, Csarius... Il s'est fait Polonais, parce qu' Paris, en mdecine, sion n'est pas un peu Polonais... Il est si ficelle, mon jeune homme... (A Camille,) Vous verrez comme il estficelle.

    Camille, tonne. Ficelle !

    Poupardin. Ficelle !

    Camille. Et, Paris... un docteur... a se met bien, n'estce pas... a suit la mode ? ...

    Tourterot. Ah ! pour ce qui est de la tenue... tout ce qu'il y a de plus verdtre : pantalon cossais,burnous algrien, bret montagnard, la blague en sautoir et la bouffarde aux gencives. Quelle sensation il afaite Chtellerault la dernire fois qu'il est venu me voir ! ... on louait des fentres pour le voir passer. Maisaussi quelle bouffarde !

    Poupardin. Bouffarde ! Qu'entendezvous par ce substantif ?

    Tourterot. Sa bouffarde ? ... c'est Dagobert, sa pipe favorite, ainsi nomme parce qu'elle est culotte.

    Poupardin. A l'envers ?

    Tourterot, riant. Farceur ! ... Ah ! c'est qu'il est trs voluptueux sur les pipes... Faut voir chez lui, ilen a mis partout, jusque dans la bouche de ses ttes de mort.

    Camille. Il a des ttes de mort ?

    Tourterot. Dans tous les coins... C'est gentil, a meuble.

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    Scne V 66

  • Camille Ah ! l'horreur !

    Tourterot. Non... je vous assure que a fait trs bien, surtout ct d'un petit corch.

    Camille. Ah ! mon Dieu ! ... un corch aussi ?

    Tourterot. En cire... Ah ! le bel corch... c'est parlant ; et puis c'est commode... On entre, on ne saito placer son chapeau... (Il fait le geste,) Flac !

    Camille. C'est pouvantable... un corch ! ... Ah ! papa, je n'pouserai jamais un corch !

    Poupardin. Mais comprends donc, puisqu'il est mdecin, tout cela est pour lui d'utilit professionnelle.

    Tourterot. C'est avec a qu'il a appris dissquer.

    Camille. Il dissque ?

    Tourterot. Comme un ange ! ... et il vous coupe une jambe que c'est un plaisir ; psit ! c'est fait ! ...On ne s'en aperoit que lorsqu'on veut marcher... diton.

    Camille, part. Quel horrible portrait !

    Tourterot, part. J'espre que je le fais mousser.

    Camille, Poupardin. Allonsnousen, papa, je ne pourrais jamais consentir...

    Poupardin. Permets, ma fille... les biensances, les convenances. (A Tourterot.) Monsieur, j'apprciecomme je le dois l'honneur...

    Tourterot. Ne parlons pas de a... J'ai fait prvenir Me Pailloter le notaire, et...

    Poupardin. Mais, avant d'aller plus loin, il serait opportun, je crois, que nous apprciassions...

    Tourterot. Le futur ? ... Je la partage, monsieur, J'y abonde... Mais comment donc ! ... il va venir,vous pourrez l'allumer sous toutes ses faces... Oh ! mais je suis bien tranquille... il vous empaumera.

    Poupardin. Vous dires, monsieur ?

    Tourterot. Vous serez paum, je ne vous dis que a, vous serez paumaqu.

    Poupardin. Paumaqu !

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    Scne V 67

  • Scne VI

    Camille, Poupardin, Tourterot, Mdard

    Mdard, entrant par la gauche. Monsieur, le djeuner est servi.

    Tourterot. Ah ! ce n'est pas dommage... Et le notaire ?

    Mdard. Il va venir... il est en train de passer son habit noir.

    Tourterot. Trs bien !

    Poupardin, part. Ah ! ce pauvre notaire qui va se dranger

    Tourterot. En attendant, allons toujours tortiller.

    Poupardin. Qu'estce que vous voulez tortiller, monsieur ?

    Tourterot. Des aliments... des comestibles...

    Poupardin. Ah ! vous voulez dire satisfaire les organes nutritifs ? ... Viens, Camille...

    Camille. Mais, papa...

    Poupardin, bas. Bah ! cela n'engage rien. (Haut.) Ma fille et moi sommes prts faire honneur votre collation.

    Ensemble

    Air : Dansons, et mme aux cloisons

    (Trois Pchs du Diable)

    Tourterot

    Chaud, chaud

    Pendant qu'il est chaud,

    Il faut

    Prendre un djeuner d'assaut !

    Un sot

    Pourrait seul rester manchot

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    Scne VI 68

  • Tantt

    En face de mon fricot !

    Poupardin et Camille

    Chaud, chaud

    Pendant qu'il est chaud,

    Il faut

    Prendre un djeuner d'assaut !

    Bientt

    Nous allons dire au galop

    Un mot

    A ce qu'il nomme un fricot !

    Tourterot, Seul.

    Boire sans vergogne

    Un bourgogne

    Qui cogne,

    C'est pectoral

    Et a garnit l' bocal.

    Ensemble

    Reprise

    Chaud, chaud,

    Etc.

    Ils sortent par la gauche.

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    Scne VI 69

  • Scne VII

    Mdard, seul ; puis Poupardin

    Mdard. Tiens, ils vont djeuner ! ... Il suffit donc de se prsenter comme acqureur pour tre invit... ? C'est bon savoir ; quand je serai sans place, j'irai marchander des proprits.

    Poupardin, part, en entrant. Dcidment je me fais un vrai scrupule de dplacer inutilement cetofficier ministriel. (A Mdard.) Jeune homme, vous venez de chez Me Paillotet ?

    Mdard. Le notaire... oui, monsieur... un fameux notaire, allez ! il ne fonctionne jamais qu'en habitnoir.

    Poupardin. Eh bien, auriezvous l'extrme obligeance de vous y transporter incontinent ?

    Mdard, faisant mine de sortir. J'y cours !

    Poupardin. Pour lui dire ? ...

    Mdard, Mme jeu. Qu'il se dpche.

    Poupardin. Au contraire, pour le prier d'ajourner indfiniment sa visite.

    Mdard. Tiens ! (Haut.) Ca suffit, monsieur, je me la casse.

    Poupardin. L ! comme a, je djeunerai sans perplexit ; ce pauvre notaire !

    Il sort.

    Mdard. Il parat que la souricire ne leur sourit pas... et pourtant, ils djeunent : ce sont despiqueassiettes.

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    Scne VII 70

  • Scne VIII

    Glinotte, Mdard

    Glinotte, entrant, un paquet de lettres la main. Je les ai vus entrer ici... j'en suis sr !

    Mdard, Part. Le nouvel avou de Chtellerault ! Viendraitil aussi pour la maison ?

    Glinotte, part. Un domestique... tchons de savoir... (Haut.) Ditesmoi, jeune indigne ; ils sontici, n'estce pas ?

    Mdard. Ici, qui ?

    Glinotte. Un monsieur d'un ge... chauve... et une jeune personne d'une tournure...

    Mdard. Oui, Monsieur, Oui... ils djeunent.

    Glinotte. Ah ! ils djeunent ?

    Mdard. Oui ; et je dois vous prvenir que leur intention est aussi d'acqurir.

    Glinotte, Part. D'acqurir... qu'estce qu'il chante l ? (Haut.) Pourriezvous me fournir quelquesrenseignements ?

    Mdard. Volontiers... je crois que a fera votre affaire... position magnifique... et assure.

    Glinotte. C'est une bonne chose, parce que les assurances... et puis, je la crois gaie.

    Mdard. Trs gaie... Ah ! dame, vous savez... il y a des jours de souffrance !

    Glinotte. Qu'estce qui n'a pas ses jours de souffrance !

    Mdard. Pourvu que a soit bien bti et que a ne fume pas...

    Glinotte. Parbleu !

    Mdard. Ah ! drame, c'est qu' Chtellerault elles fument toutes.

    Glinotte. Comment ! les demoiselles... ?

    Mdard. Eh non ! les maisons.

    Glinotte. Je vous parle demoiselles, et vous me rpondez...

    Mdard. Mais non ! c'est moi qui vous parle maison et vous qui... Ne venezvous pas pour acheter laproprit ciincluse ?

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    Scne VIII 71

  • Glinotte. La proprit ? ... (A part.) Elle est vendre ! ... au fait, a me fournit une entre, et jeverrai par moimme... (Haut.) Eh bien, oui, puisqu'on ne peut rien vous cacher, je viens pour acqurir.

    Mdard. Alors, vous allez djeuner.

    Glinotte. Moi, Glinotte ?

    Mdard. Vous, Glinotte ; vous venez pour voir la proprit, vous venez pour l'acheter... pour lors,allez vous mettre table... c'est l'usage du pays.

    Glinotte, gaiement. Du moment que a fait partie du cahier des charges...

    Mdard. Allons, dpchezvous... Tenez, par l... Moi, j'ai une commission faire, et, comme apresse... bon apptit ! je me la brise ! ...

    Il