L diversité des voix féminines Dans « LES ENFANTS DU ...
Transcript of L diversité des voix féminines Dans « LES ENFANTS DU ...
République Algérienne Démocratique et Populaire Ministère de L’enseignement Supérieur
et de la Recherche Scientifique
Université Larbi Ben M’Hidi, Oum El Bouaghi Faculté des Lettres et des Langues
Département De Français
Mémoire de Master
Thème :
Présenté par :
CHAIB Wided
Sous la direction de :
BOULAHBAL karim
Devant le jury :
Président: Mme. ZEGHIB Nardjas. Maitre assistant. Université d’Oum
El Bouaghi.
Rapporteur: M. BOULAHBAL Karim. Maitre assistant. Université d’Oum El Bouaghi.
Examinateur: M.BOUZIDI Attef. Maitre assistant.Université
d’Oum El Bouaghi.
Promotion : 2015-2016
La diversité des voix féminines
Dans
« LES ENFANTS DU NOUVEAU MONDE »
D’ASSIA DJEBAR
Remerciements
force pour accomplir ce travail.
Je tiens à exprimer ma gratitude et ma profonde reconnaissance à
mon encadreur, monsieur BOULAHBAL.K pour ses conseils et ses
Sans oublier les plus sincères remerciements à tous mes
enseignants.
Dédicaces
Je dédie ce modeste travail :
- A mes chères parents pour leur affection et tendresse.
- ; Imen, Meriem, Faten et Hanine.
- A mon cher frère : Achraf.
A toute
Sommaire :
INTRODUCTON .........................................................................................................................07
Première partie : Auteur et personnages
I. La question de la langue :............15
II. personnages féminins : ..........................................................................................................21
1-Définition du personnage ......................................................................................21
2- Le personnage selon Philipe HAMON .............................................................22
3- Etude des personnages féminins .........................................................................23
Les Femmes engagées ..............................................................................27
Les Femmes militantes ............................................................................28
Les Femmes libérées ................................................................................31
Les Femmes traditionnelles ....................................................................31
4-Aspect généraux des personnages féminins .....................................................34
5-Personnages et rôles ..............................................................................................36
Deuxième partie: La Structure du roman
La narratologie .............................................................................................................................39
I. Le narrateur ................................................................................................................................40
1- Le statut du narrateur .................................................................................................40
2- ....................................................................................................41
A)La voix narrative.................................................................................................41
-La voix hétérodiégétique...........................................................................42
- La voix homodiégétique ............................................................................42
- La voix autodiégétique..............................................................................42
B) Le temps de la narration: ............................................................................. 44
- La narration ultérieure................................................................................44
-La narration antérieure................................................................................45
- La narration simultanée...............................................................................46
-La narration intercalée..................................................................................47
C)La perspective narrative ....................................................................................48
-La Focalisation zéro .................................................................................48
-La Focalisation interne .............................................................................48
-LaFocalisation externe ...............................................................................48
3-Les récits enchâssés .......................................................................................................50
4-Le Temps du récit..........................................................................................................52
A- du récit : .................................................................................................52
- nalepse ......................................................................................................52
- La prolepse ....................................................................................................55
B- La vitesse du récit : ...........................................................................................56
- La pause ..........................................................................................................56
- ..........................................................................................................56
-La scène .............................................................................................................58
-Le sommaire .....................................................................................................59
.........................................................................................60
Conclusion .....................................................................................................................................65
Annexes .........................................................
Bibliographie...............................................................................................................................78
Sitographies..................................................................................................................................79
Résumé ............................................................................................................80
Introduction
7
francophone du Maghreb à la production des écrivains : Mouloud FARAOUN,
Mouloud MAMMERI, Driss CHRAIBI, Mohamed DIB
après les années 1950.
La condition sociale de la femme au Maghreb est fortement marquée par
les traditions sociales et religieuses .La femme nait dans une société spécifique, un
contexte historique particulier et une classe sociale donnée qui constituent autant
La littérature féminine algérienne a commencé par développer des thèmes
sociaux identiques à ceux des écrivaines Tunisiennes et marocaines 1en tant que porte parole et voix de toutes celles qui dans nos pays
interdictions sociales et familiales.
La période des années 90 connait beaucoup de noms féminins qui
Leila SEBBAR » avec ses deux
premiers romans : « On tue la petite fille »(1978), « Le pédophile et la maman »
(1980). « Malika MOKADEM » et « Nina
BOURAOUI », « Maissa BEY » qui cherchent toujours à décrire le souci des
1 BOUGERRA Mohamed Ridha, Histoire de la littérature du Maghreb, Ellipses, P.210.
8
française pour dévoiler un peut de son in
toujours pour préoccupation la défense de la fem
« Loin
de Médine » en 1991 dont lequel elle rappelle que la femme a été :
« au centre de la vie du prophète Mohamed et enfin porteuse de bombes en
pleine guerre de libération nationale. » 2
et la révolte contre toutes formes
De son vrai nom Fatima- Zohra Imalayène, Assia DJEBAR est née à
au lycée Fénelon à paris où elle a continue ses études universitaires.
En 1955, elle entre à l'Ecole Normale Supérieure de jeunes filles de Sèvres
, en 1956 soutenant la grève de la faim des étudiants
algériens, puis la grève des examens à laquelle ils appellent, elle quitte Sèvres et
écrit son premier roman La Soif qui paraît en 19573. Trois autres romans suivent :
Les Impatients (1958)4, Les Enfants du nouveau monde (1962) et Les Alouettes
naïves (1967)5 et une pièce de théâtre.
- algérienne enseigne en tant que
professeur d'Histoire moderne et contemporaine du Maghreb à la Faculté des
lettres de Rabat, puis à l'université d'Alger. Assia DJEBAR est employée, au centre
aidant les immigrés6.
2 BOUGERRA Mohamed Ridha, Histoire de la littérature du Maghreb, Ellipses, P. 213. 3 DJEBAR, Assia, La Soif, Julliard, 1957. 4 DJEBAR, Assia, Les impatients, Julliard, 1958. 5 DJEBAR, Assia, Les Alouettes naïves, Julliard, 1967. 6 CHEURFI Achour, Ecrivains Algériens, Dictionnaire biographique. Edition CASBAH, Alger, 2003, P. 147.
9
En 1980, elle s'installe à Paris. Elle enseigne la littérature française depuis
1997 à l'université de Bâton Rouge aux Etats- Unis. Elle entre en 1999 à
l'Académie royale de Langue et de Littératures françaises de Belgique, elle a
- Unis. Depuis 2001, elle enseigne au
département d'Etudes françaises de New-York Université.
En 2005, e après
l'avoir été à l'Académie royale de Belgique, en 1999. Elle est la première personne
du Maghreb à connaitre cet honneur. Assia DJEBAR est aussi réalisateur
cinématographique ; son premier film « La Nouba des Femmes du mont chenoua »
est sorti en 1977. Elle a obtenu de nombreux prix littéraires ; Prix de la critique
internationale à Venise en 1979 pour son premier Film et le Prix Maurice
Maeterlinck (Bruxelles), 1995. International Literary Neustadt Prize (USA), 1996.
Prix international de Palmi (Italie), 1998. Le deuxième film « La Zerda ou les
» en 1979.
« Prix Assia DJEBAR du roman », un prix littéraires algérien crée en 2015 pour
promouvoir la production littéraire algérienne. Elle a écrit également des
nouvelles, récits, poèmes, essais et a pratiqué également le théâtre, une seule pièce
théâtrale « ». Son engagement pendant la guerre d'indépendance la
conduit en Tunisie et au Maroc pendant la durée du conflit.
et nous laisse une production littéraire riche et remarquable.
Notre corpus « Les enfants du nouveau monde» est le troisième Roman
DJEBAR publié en 1962 aux éditions René Julliard à Paris de «312 »
pages, réédité en 2012 aux éditions Seuil. Le titre du roman « Les enfants du
nouveau monde »
sociale, à savoir l'indépend
10
Quant au corps du roman, il contient neufs chapitres chacun porte comme titre
un prénom dont les quatre premiers et le sixième portent des noms de femmes
pour titres: Cherifa, Lila, Salima, Touma, Hassiba .Et quatre Personnages
masculins : Hakim, Khaled, bob, Ali.
pendant cette période douloureuse du pays. Il constitue une espèce de diversité de
la société féminine de l'époque. Assia DJEBAR représente dans ce texte
romanesque « Les enfants du nouveau monde » un tableau saisissant de la vie
quotidienne du peuple algérien durant la guerre: hommes et femmes, mariés et
célibataires, adultes et adolescents, bourgeois et paysans, policiers et
révolutionnaires.
dimensions sérieuses, la fin des années cinquante et le début des années
soixante
n
habitants de la ville contemplent ce spectacle qui deux ou trois fois par mois se
déroule à la montagne contre les maquisards. Des souvenirs interrompent
régulièrement la narration des évènements de ce jour de mai 1956, pour rejoindre
divers moments déterminants dans le passé des personnages. On rencontre
plusieurs types de femmes : Lila, petite bourgeoise, libérée, hantée par la mort de
ration de son père et le départ de son mari Ali
qui rejoint les combattants. Chérifa et Amna partagent la même cour et dont
l'amitié est exemplaire; Salima, l'institutrice qui sera arrêtée et torturée, elle
symbolise le noyau intellectuel qui rejoint le maquis. Hassiba dont le prénom
symbolisant la résistance féminine puisqu'il renvoie au nom de Ben Bouali ; jeune
fille de seize ans destinée à partir pour le maquis à cause des malheurs qui ont
frappé sa famille. Autres personnages féminins : Suzanne, femme d'Omar avocat
qui a quitté la ville, et Touma, la brebis égarée qui a décidé d'épouser le côté le
plus facile de la culture occidentale.
11
Ainsi, les personnages masculins sont : Hakim, un inspecteur de police
e avec les français en torturant ses compatriotes.
Khaled, un avocat arabe éduqué en France. Ali, étudiant ; le mari de Lila qui
du peuple algérien. Bob, européen avec lequel Touma bravait son frère et la ville
entière. Autres personnages
afin de venger son honneur. Bachir, adolescent qui se pose des questions sur la
finalité de ses études en cette période de guerre. Youssef, responsable politique
local, époux de Chérifa.
écrivaine qui nous a quitté, une perte pour la littérature maghrébine et en
particulier algérienne. Nous somme
française. Le titre du roman est aussi révélateur et suggestif « Les enfants du
nouveau monde »annonce un avenir meilleur pour la g
algérienne pendant une période très importante et significative pour nous qui est la
-ci de son cadre
traditionnel. Ce roman nous plonge dans les luttes, les souffrances, et les victoires
des algériens et des algériennes.
Au cours de la lecture du roman, notre curiosité a été aiguisée par un certain
nombre de questions dont voici les plus importantes:
Dans un premier lieu, ce qui nous a marqué est les intitulés des chapitres,
la question : rivaine
se base-t-elle dans ce roman sur les femmes ?
12
x traditions avec toutes les normes
socioculturelles et religieuses, alors que les personnages Hassiba et Salima sont
; une multitude
qui envahisse le texte, ce qui nous pousse à poser cette question : pourquoi ce
choix de personnages féminins de différentes classes sociales et de différents
caractères
homogène avec cette diversité des personnages ?
particulière du temps. Pourquoi ce va et vient vers le passé des personnages ?
Ainsi, une question centrale se pose ; Comment Assia DJEBAR a pu
structurer son texte avec cette diversité des voix féminines et cette alternance entre
le passé et le présent au sein de sa narration ?
de travail
ine et la
défendre.
leurs solidarités et résistance dans ce conflit. Elle vise aussi à nous montrer le défit
13
contribué dans la construction de ce texte romanesque. Malgré que parfois elles
passé des personnages.
premier lieu Nous allons convoquer la question de la langue française et
conception du personnage selon Philippe HAMON.
Il y aura une lecture textuelle approfondie tout en repérant les personnages
.
Alors que dans la deuxième partie nous allo
son ouvrage « Figure III », ainsi que « Discours du récit ». Ainsi, nous passerons
à l
voix et la perspective narrative et enfin les niveaux narratifs.
Ainsi, dans la mesure où le temps joue un rôle important chez les
accordée au temps dans notre corpus.
Première partie :
Auteur et personnages
15
I. La question de la langue française Assia
DJEBAR :
La question de la langue française dans la littérature maghrébine est une
question fondamentale. Les écrivains maghrébins sont souvent considérés
Comme le dit Charles BONN:
« La littérature maghrébine de langue française est en grande
partie cette danse de désir mortel devant un miroir fabriqué par
re1
pour les
de la colonisation. Des anciennes relations entre le Maghreb et la France, ce
qui donne un aspect spécifique à la question de cette langue au Maghreb.
Comme le souligne les spécialistes de littérature maghrébine de langue
française, la question de la langue « [...] est une question vitale qui engage 2
Assia DJEBAR est Parmi les plus célèbres écrivains
algériens de langue française, berbérophone par sa mère, arabophone par son
père, écrivant dans la langue française qui était pour elle une langue
1 BONN Charles, Le roman algérien de langue française. Vers un espace de communication littéraire décolonisé ?
(Disponible sur www.limag.refer.org/Textes/Manuref/bibliselective.htm) 2 Cf. NOIRAY Jacques, Littératures francophones. I. Le Maghreb, Paris, Belin, 1996, p. 116.
16
Assia DJEBAR
« [...] considère la question de la langue comme problème
numéro un de la littérature nord-africaine. Elle manie
parfaitement la langue française, mais elle ne paraît pas
satisfaite, son but étant de parvenir à une expression artistique
bilingue franco-arabe.
En ce qui concerne le français, la romancière cherche à
-à-dire par la poésie,
dit-
re des personnages, plus mon travail devenait une lutte
français, peut seul traduire la coexistence dans la conscience
passage
profonde. »3
Le bilinguisme est un problème complexe qui ne touche pas seulement
des auteurs algériens dit Assia DJEBAR et elle rappelle les problèmes du
bilinguisme de Senghor . En plus, elle « la langue de la
culture fut aussi importée » 4
Elle fait ses débuts en littérature en 1957avec son premier roman La
Soif
érale des étudiants musulmans algériens.
étudiants musulmans algériens, décident la grève des cours.
3 DEJEUX Jean, Littérature maghrébine de langue française. Introduction générale et Auteurs, Ottawa, Editions Naaman, 1973, p. 270. 4 Ibid., p.272.
17
vous, mais, vous aussi, vous dites non. Vous suivez le mot
que vous ne sauriez perdre votre temps, vous écrivez votre
premier roman. Et la jeune Fatma-Zorah, vingt ans, décide,
Djebar :
beau choix ! Assia Djebar est née au mois de janvier 1957, chez
René Julliard.»5
Elle précise dans le journal « Jeune Afrique
réfugiés algériens en Tunisie. Ce qui présente un auteur engagé. 6
La langue française pour Assia DJEBAR
langue comme un problème majeur chez les écrivains nord-africains, la
romancière cherche à arabiser le français en passant par la beauté ; la poésie
dit-elle :
« Dans mes derniers romans, explique Assia Djebar, plus
avail devenait une
mais qui, en français, peut seul traduire la coexistence
5 REMY Pierre- . Disponible sur le site (www.academie-francaise.fr/discours-de-reception-et-reponse-de-pierre-jean-remy) 6 ASHOLT, Wolfgang. CALLE- GRUBER, Mireille et COMBE, Dominique, éd, Colloque de Cerisy, 2010. Presse Sorbonne nouvelle, « Assia DJEBAR, Littérature et transmission ». (Disponible sur le site : https://books.google.com/books?isbn=2878544870). (Consulté le 22 /12 /2015 à 14 :00)
18
une fluidité, une intimité profonde. »7
déchirement, une profonde blessure. Une impossibilité de se dire est
fortement annoncée dans son roman « »ce roman est
con :
« Deux passés alternent donc ; [dit Assia Djebar] je
pense que le plus important pour moi est de ramener le
langue française. Je tent
ainsi. »8
; langue de
franç
dessiner le passé de son pays tout en solidarité avec les femmes algériennes
qui avaient subi cette histoire, elle joue le rôle de porte-parole de ces femmes.
ématique intéressante, une arme de contestation,
un refus de la tradition.
Assia DJEBAR
était inépuisable :
7 DEJEUX Jean, Littérature maghrébine de langue française. Introduction générale et Auteurs, Ottawa, Editions Naaman, 1973, p. 270. 8 Cf. MOTIMER Mildred, Research in African Literatures, vol. 19, no , Les femmes dans le roman algérien. Histoire, discours et texte . Disponible sur le site (https://books.google.com/books.). (Consulté le 22 /12 /2015 à 14 :00).
19
«Ainsi, dirais-
langue en mouvement, une langue rythmée par moi pour me dire
ou pour dire que je ne savais pas me dire, sinon hélas dans
non, entre trois langues et dans ce triangle irrégulier, sur des
e précision différents, trouver mon
française, devenue la mienne, tout au moins en écriture, le
français donc est lieu de creusement de mon travail, espace de
ma méditation ou de ma rêverie, cible de mon utopie peut -être,
je dirai même ; tempo de ma respiration, au jour le jour.»9
En 2005, elle évoqua les rencontres qui tracèrent son parcours, en
Georges Vedel :
chaleureux dialogues avec de grands maîtres des années 50 :
Louis Massignon, islamologue de rare qualité, pour mes
recherches alors en mystique féminine, du Moyen Âge,
arabisant, Jacques Berque qui me réconfortait, hélas, juste
avant sa mort, en pleine violence islamiste de la décennie passée
n des rares à
9 (Extrait de « La littérature maghrébine de langue française », Ouvrage collectif, sous la direction de Charles BONN, Naget KHADDA & Abdallah MDARHRI-ALAOUI, Paris, EDICEF-AUPELF, 1996). Disponible sur www.limag.refer.org/Textes/Manuref/bibliselective.htm. (Consulté le 22/12/2015 à 13 :17)
20
peu plus tard, le poète Pierre Emmanuel qui siégea parmi
vous.»10
Assia DJEBAR
ent algériennes,
reconnaissant même le rôle joué par les femmes étrangères dans la lutte
nationale. Dans notre corpus de recherche « Les enfants du nouveau monde »,
le personnage féminin « Suzanne »qui reçoit ainsi les parents des jeunes
arrêtés par les colons, fait des démarches pour trouver un avocat à Alger afin
de défendre Salima qui est arrêtée. 11 Les héroïnes de ce roman voulaient
prendre la parole et défendre leurs droits.
de la
cause des femmes, la soif de liberté devient un thème principal dans sa
production littéraire.
Assia DJEBAR
; celle du colonisateur,
Après deux romans centrés sur la vie sentimentale de jeunes héroïnes
« libérées
dans ses rapports avec son
élément féminin dans ses romans. « Les alouettes naïves »et « Les enfants du
nouveau monde » où elle décrit le développement remarquable de la situation
de la femme algérienne avant, pendant et après la guerre de libération.
Pour la romancière « le vrai point de départ pour moi
auquel est réduite la femme dans la société musulmane.12
10Ibid.
11 DJEBAR Assia, Les enfants du nouveau monde, Paris, Points. 1962. P. 12BOUGUERRA Mohamed Ridha, Histoire de la littérature du Maghreb, littérature francophone, Ellipses, P.212.
21
II. Personnages féminins :
Nous nous sommes inspirés dans notre étude du personnage, qui
travaux de Philipe HAMON que nous allons résumer.
1-Définition du personnage :
Le mot « personnage » vient du latin « persona »5, il est apparu au xv
ème siècle. Persona
agere : agir. Le personnage
désigne donc le caractère représenté par le masque, incarné par un acteur celu i
qui agit. La notion du personnage est définie par Vigner comme :
« La notion du personnage est assurément une des meilleurs
de si
13
Aussi le mot personnage est défini par le dictionnaire littéraire par :
« Le terme personnage est apparu au XVème siècle, il vient du
scène comme il peut signifiait aussi une personne réelle ayant 14
13 VIGNER Gérard, Lire Du Texte Au Sens, édition, Clé International ; Paris, 1992, Page 88-89. 14 WWW. Fabula. Com.
22
2-Le personnage selon Philipe HAMON :
Du point de vue sémiologique le personnage définit par Hamon comme
un morphème doublé, manifesté par un signifiant discontinu (constitué par un
certain nombre de marques) renvoyant à un signifié discontinu (le "sens" ou la
"valeur" d'un personnage), il sera donc défini par des relations de
ressemblance, d'opposition, de hiérarchie qu'il contracte sur le plan du
signifiant et du signifié, successivement ou/et simultanément, avec les autres
Nous c
les travaux de Philipe HAMON :
poème, le problème des modalités de son analyse et de son
fixation traditionnels de la
critique (ancienne ou moderne) et des théories de la littérature
»15
La lecture
-
15 HAMON Philipe, le Personnel du roman, paris, première parution dans la collection Histoire des idées et critique littéraire, 1983, P. 9.
23
La production : Le personnage est produit par un auteur, un producteur.
Toutefois, certains personnages exposent leur envie de vivre séparément de
leur créateur.
Classification des personnages féminins :
Puisque nous allons centrer notre étude sur les personnages féminins.
Nous allons les classer selon leur importance :
-Chérifa.
-Lila.
-Salima.
-Touma.
-Amna.
-Hassiba.
-Suzanne.
-Zineb.
3-Etude des personnages féminins :
Philippe HAMON propose de considérer le personnage comme un
signe, composé de signes linguistiques au lieu de l'accepter comme centré sur
la notion de personne humaine. Il le définit comme une construction mentale
que le lecteur opère, à partir d'un ensemble de signifiants épars dans le texte :
sexe, âge, qualités physiques, richesses, aptitudes intellectuelles ou manuelles,
niveau de langue, courage, lucidité.
24
Tableau n=1: construction mentale des personnages. Personn
age
sexe âge Qualités
physiqu
es
Riches
se
Aptitudes
intellectuelles
ou manuelles
courage lucidit
é
Niveau
de
langue
Chérifa fem
me
29an
s
voilée - Femme
traditionnelle
audacie
use
- -
Lila 24an
s
charman
te
riche cultivée - - universi
taire
Salima 31an
s
- - institutrice résistant
e
consci
ente
bon
Touma 19-
20an
s
Brune
avec des
yeux
vifs
- - libérée aucune -
Amna - - - -
Prend le
risque
de
monter
sur son
mari
- -
Hassiba 16an
s
Yeux
noirs,
des
cheveux
roulés
- - engagée consci
ente
-
Suzanne 24an
s
- - - - - -
Zineb - - - - - - Etudes
25
au
collège
«
faudrait peut-être appeler
du texte plutôt que le personnage »16
En effet,
:
du personnage est défini par ses caractéristiques physiques et morales
et aussi par les déférentes qualités spirituelles et émotionnelles que lui prête
Le faire :
HAMON affirme que le faire du personnage est en liaison à son être, ce
personnages aux règles de la société mettent au fait le personnage comme
16 HAMON Philippe, pour un statut sémiologique du personnage, Poétique Du Récit, seuil, Paris, 1977, P.120.
26
Les rôles actantiels: Greimas propose une autre grille dite « modèle
actanciel ». Pour lui le mot personnage connoté psychologiquement cède la
place au mot «acteur
anthropomorphe « un portrait humain » ou non anthropomorphe.
Par ailleurs, les rôles actantiels se répartissent en trois axes sémantiques : le
savoir, le vouloir (le désir), le pouvoir.
: les éléments qui permettent de tirer, et de faire
une distinction entre les personnages principaux des personnages secondaires.
Philippe HAMON définit ces traits comme « des procédés différentiels,
à designer le héros »17
Philippe HAMON :
Philippe HAMON centre le personnage à travers les critères suivants
Nous allons centrer notre analyse sur les personnages féminins, dans
notre corpus « Les enfants du nouveau monde » dont nous trouvons une
diversité des voix féminines.
Nous trouvons que le destin de nombreuses femmes est inscrit dans un
contexte bien déterminé, celui de « la ». Afin de mieux
décrit :
« Dans chaque maison où vivent ordinairement quatre à cinq
familles, une famille par chambre, il se trouve toujours une
17 HAMON Philippe, pour un statut sémiologique du personnage, paris, seuil ; 1977, P.154.
27
femme, jeune, vieille, peu importe, qui prend la direction du
choeur : exclamations, soupirs, silences gemissants quand la
montagne saigne et fume, couplets passionnés »18
mais pas seulement. Car dans ce monde qui vacille des femmes
frères, des jeunes filles cheminent des heures dans la montagne
pour aller soigner les blessés.
réalité existante durant ce printemps 1956, une réalité atroce, sanglante. Mais
our
et de la fraternité.
a)Les femmes engagées :
Chérifa : femme libérée voilée, audacieuse qui refuse la maternité, elle ne
maternité. Elle décide également de quitter son x-
réaction courageuse dans une société et un entourage qui ostracise toute
femme ne se conformant pas aux règles de la communauté :
« - ! répéta Chérifa doucement, peut-
être elle-même effrayée de son éclat premier, elle qui aurait
« Je ne
veux pas !... »19
18 DJEBAR Assia, Les enfants du nouveau monde, Paris, Points, 1962, P. 14. 19 DJEBAR Assia, Les enfants du nouveau monde, Paris, Points, 1962, P. 27.
28
Elle a traversé la ville car elle doit avertir son époux Youssef du danger
implacable des hommes algériens ou français.
b) Les femmes militantes :
Hassiba :
e et des cheveux roulés en
famille, elle est prête à se battre et rejoindre le maquis et travailler pour la
s après
elle est éduquée par des médecins et devient une infirmière au maquis.
«
: « Que
sais-tu faire ? »et elle a répondu : « Rien. »Elle a appris
ensuite, pendant trois mois, à soigner, à faire des pansements,
des piqures. Enfin, on lui a dit :
la vie à la montagne est dure. Il te faudra marcher chaque nuit.
La nuit est à nous. Nous marchons. »20
Son engagement la conduit à braver les contraintes sociales et
femme révolutionnaire et engagée.
20 DJEBAR Assia, Les enfants du nouveau monde, Edition, Points, 1962, P.207.
29
Lila : elle est belle, charmante, aux cheveux en désordre ; yeux verts longue,
mince ; au regard fier, absorbante, égoïste même « « charmante», oui, elle le
-même pour provoquer Ali »21. Elle est solitaire « Je
suis seule, se dit Lila ; je vais habiter seule. Quelle importance ? » 22. Elle
souffre du départ de son mari Ali, elle a une volonté rigoureuse de prétendre
idéale ; une patiente amoureuse loin de son mari :
« Lila commença donc
; elle se plia, avec
moins de reconnaissance que de plaisir ébloui, à cette
limiterait en même temps. »23
étudiants, paru étrange dans leur monde, elle rêve et pense à lui. Elle parle de
souvent la mort ; sa mère est morte :
« Je cours ! Je suis sortie de chez nous, une vieille maison
blanche vers le haut, pas très loin de la caserne. Je cours. Je
pleure, je crie tout en courant. Je crie : « Ma mère est
morte !morte !».24
Elle est tourmentée par la mort de son bébé le jour même de sa
les filles doivent être armées.
Elle a un esprit autonome et libéral, elle va se lancer après le départ de
son mari Ali à chercher un appartement, le concierge européen ne sait pas 21 Ibid. p. 56. 22 Ibid. p. 34. 23 Ibid. p. 39. 24 DJEBAR Assia, Les enfants du nouveau monde, Edition Points, 1962, P. 59-60.
30
occidentales. E Ali
contrairement à Amna et Chérifa. Elle détient cet esprit de son père Rachid.
Salima : elle partage des liens familiaux avec Lila, elle est timide, raidie,
résistante. Elle a rejoint le mouvement révolutionnaire par idéologie, parce
symbolise le noyau intellectuel qui rejoignit le maquis, emprisonnée et
interrogée, torturée et arrêtée, elle a une conscience professionnelle. Elle
musulmane à poursuivre ses études.
« Etait-ce vraiment hier, cette époque ? Voilà quinze ans, ou
poursuivre ses études
comme les autres, se cloitrer ; une chance, en somme. Mais sa
Fallait- ? Elle se revoyait alors à quinze
ans, décider, le jurer, se conduire
en homme
plus tôt possible, le reste de sa famille. » 25
Zineb :
faire des études de français
difficilement accepté de se retrouver cloitrée comme les autres malheureux et
25 Ibid. P. 93.
31
continue à le refuser. Elle a le courage de défendre son droit et de lutter contre
son frère.
Suzanne : amie de Lila, elle est forte, pleine de sérieux, dure. Refuse de
partir avec son mari Omar qui voulait le départ en dehors de la patrie à la
lui.
c)Les femmes libérées :
Touma :
les arabes. Elle aime le regard des hommes sur elle, elle y voit une forme
; elle a une relation avec un commissaire français Martinez, et lui
donne des renseignements sur les compatriotes, elle bavarde avec tout les
hommes occidentaux. Elle fume et fréquente les bars et boit de
« Touma ne dit mot. Elle boit. Elle a commandé un whisky ; un
second. » 26
venger leur honneur et prouver aux compatriotes que lui est digne de
confiance :
« Le corps de Touma est resté sur le sol, appuyé ainsi à demi,
sur le coté ; le cercle des hommes a eu le temps (« son frère !-
!-il a vengé son honneur !-Dieu ait pitié de
lui ! ») de contempler à loisir la victime abattue. Puis ils se sont
mis à reculer » 27
d) Les femmes traditionnelles :
26 DJEBAR Assia, Les enfants du nouveau monde, Edition Points, 1962, p. 232. 27 Ibid. P. 245.
32
Amna : femme traditionnelle, elle a deux jumeaux, amie et voisine de Chérifa
a maison ce
soir-là. Elle décide de mentir sans aucune crainte sur son mari Hakim, elle est
aussi consciente de la gravité de son geste.
Tableau n=2 : caractéristiques physiques et psychologiques/Tenue
personnages Caractéristiques
physique
Caractéristiques
psychologique
Tenue/habit
Chérifa voilée Audacieuse-
courageuse
Voile
Lila Charmante-
belle
Bruyante-
mince-cheveux
en désordre-
yeux verts
Solitaire-
engagée
amoureuse-
égoïste
Salima Raidie-timide Résistante-
solitaire-engagée
Touma Jeune fille-
brune-yeux vifs
Libérée-
Amna Volonté-femme
traditionnelle
33
Hassiba Yeux noirs-
cheveux roulés
Souriante-
révolutionnaire
Robe blanche
Suzanne forte Dure-froide-
pleine de sérieux
Zineb courageuse
détaillée, nous nous sommes rendu compte que la totalité des personnages ont
caractéristiques. Alors que tous les personnages féminins ont des traits
psychologiques. Nous trouvons que la romancière se concentre beaucoup plus
sur les traits physiques et psychologiques que sur la tenue et les habits pour
donner une force morale et physique à ses personnages et signaler leur rôle.
34
4- Aspect généraux des personnages féminins :
Tableau n= 3
personnages
Lieu de résidence Antécédents
familiaux
Niveau familiaux Origine social
compagne ville pauvre riche Non
cultivée
cultivée Petit
bourgeoi
-sie
simple
Chérifa
+
+
+
+
Lila
+
+
+
+
Salima
+
+
+
+
Touma
+
Amna
+
+
+
+
35
Hassiba
+
+
+
+
Suzanne
+
+
+
+
Zineb
+
+
+
Nous remarquons que les personnages féminins possèdent plusieurs
points en commun, la plupart entre eux habitent dans la même ville sauf
Hassiba qui est arrivée à nouveau dans cette ville. Il existe celles qui font
partie de familles riches telles que Lila, Suzanne, Zineb ou encore Amna ; la
que Salima, Chérifa, Hassiba.
36
5- Personnages et rôles :
Tableau n=4
Roman Personnages Rôle
Les enfants du
nouveau monde
Chérifa Femme de
Youssef/amie et
Les enfants du
nouveau monde
Lila
Rachid
Les enfants du
nouveau monde
Salima Institutrice,
intellectuelle
militante
Les enfants du
nouveau monde
Touma Fille libérée aux
Les enfants du
nouveau monde
Amna Femme de Hakim et
mère de quatre
enfants
Les enfants du
nouveau monde
Hassiba Jeune fille qui a voulu
rejoindre le maquis
37
Les enfants du
nouveau monde
Suzanne
mère
Nadia
Les enfants du
nouveau monde
Zineb
Le tableau suivant nous permette de souligner les différentes activités
sociales des personnages féminins. Notre analyse se repose sur les critères
suivants : âge, statut social, enfants, voyage.
Tableau n=5 : Activités sociales des personnages féminins.
Personnages âge Statut social enfants Voyage
Chérifa 29ans mariée - -
Lila 24ans mariée + - -
Salima 31ans célibataire - -
Touma 19-20ans célibataire - -
Amna - marié Quatre
enfants
-
Hassiba 16ans célibataire - -
Suzanne 24ans marié Une fille -
Zineb - marié - -
38
ans et trente et un ans sauf les personnages d et de Zineb
donné. Ainsi ces personnages ne voyagent pas, ils sont stable dans leur ville.
Amna et Suzanne, alors
que Lila avait un enfant mais qui est mort le jour même de sa naissance.
Deuxième partie :
La structure du roman
39
La narratologie :
Le terme de narratologie est proposé par Tzvetan Totorov en 1969, puis deux
autres chercheurs Mieke Bal et Gérard GENETTE ont approfondi les recherches
sur la discipline de la narratologie.
Nous allons reprendre dans notre analyse la narratologie de Gérard
GENETTE (1972-1983), dans la mesure où sa théorie est plus « formelle »
ou « modèle ». 1
resse au contenu mais aussi à la façon de présenter
méthodologique qui analyse la structure interne du récit. Selon lui le récit
«
»2.
«
ts,
»3
« En troisième sens qui est apparemment le plus ancien, récit désigne
encore un évènement »4
niveaux où Gérard GENETTE
littéraire, nous commençons en premier lieu par :
1 GENETTE Gérard, Figure III, Paris. Edition Seuil, 1972, p. 71
2 Ibid. 3 Ibid. 4 Ibid.
40
- :
- La narration : est racontée, on
- Le récit :
narration à travers le choix du langage.
roman, de personnages, temps, lieu
Le roman se co porte comme titre un
nom de personnage, dont la plupart sont des femmes. Le narrateur nous raconte
des évènements différents.
Nous analysons quelques extraits de notre corpus, selon le théoricien
GENETTE dans son ouvrage Figure III
du narrateur.
I. Le narrateur :
peut être interne c'est-à-
1-Le statut du narrateur :
Poser des questions
étude sur le statut du narrateur, Gérard GENETTE distingue deux éléments
a) : ient le narrateur dans
b) Le niveau narratif : le narrateur est un objet du récit ou bien non :
41
Un narrateur extradiégétique : Le narrateur est extérieur au récit,
à sa diègese, il est totalement effacé.
Un narrateur intradiégétique : Le narrateur est un protagoniste du
récit, un objet du récit.
histoire, il nous révèle uniquement ce qui se passe dans son roman.
2- :
que nous convoquerons dans notre analyse selon la vision de GENETTE.
A-La voix narrative :
on
Gérard GENETTE.
« On distinguera donc ici deux types de récits
évidentes, hétérodiégétique, et le second homodiégétique ».5
« Qui
raconte ? » 6 . Est-
5 GENETTE Gérard, Nouveau discours du récit, Paris, Seuil, 1983, p.252. 6 JOUVE Vincent., La poétique du roman, Edition seuil, p. 25.
42
roman ?7Raconte-t-il son histoire en récit premier ou est-il lui-
récit ?8
- La voix hétérodiégétique :
- La voix homodiégétique : le narrateur est un personnage qui participe et
intervient dans le déroulement des évènements.
- La voix autodiégétique : le narrateur dans ce cas est un héros de son
récit.
« Dans le vieux quartier arabe, au pied de la montagne,
les maisons à façade blanche crépie à la chaux se
ressemblent.
maintenant agrandie, le seul faubourg-celui où les familles
pour y trouver, près des sources et des vergers proches, un
peu de fraicheur-
ruelles, de silence qui ne se troublent à présent que des
chuchotements, coupés soudain de cris stridents, des enfants
que les mères voudraient en vain retenir chez elles. »9
Le narrateur nous révèle dans cet extrait la façon dont laquelle les familles
dédales de ruelles et de problèmes. Mais la guerre est toujours là.
7 JOUVE Vincent., La poétique du roman, Edition seuil, p. 25. 8 Ibid. 9 DJEBAR. Assia, Les enfants du nouveau monde, Paris, Point, P.13.
43
« La garde peut survenir à tout moment ; à peine ont-elles
alors le temps de les faire rentrer précipitamment, de leur
bâillonner la bouche pour étouffer contre la porte leurs
leur chambre, chaque mère avec sa couvée, assise là, à même
le carrelage ou sur un matelas, des heures entières et, par la
porte au rideau soulevé, grande ouverte sur la cour et les
bassins, de contempler avec calme le spectacl
annoncé la garde et qui commence : la montagne dans les
feux de la lutte. »10
dessus nous constatons que le narrateur nous présente
le lieu où se passe le récit ; une ville au pied de la montagne, ainsi que le temps ; le
printemps. La peur des mères sur leurs enfants durant cette période de lutte et de
guerre ; de prendre le silence et couper la voix lorsque les soldats passaient, afin
la
montagne.
Donc, le narrateur nous délivre ce qui se passe uniquement et ne participe
hétérodiégétique.
10Ibid. P.13.
44
B- Le temps de la narration :
GENETTE propose de distinguer deux sortes de temps:
: qui peut évoquer une année, toute une vie ou plusieurs
générations comme peut être une journée.
Du récit
volumes.
Dans notre roman ; le 8 mai 1945.
GENETTE présente quatre types de narration :
-La narration ultérieure : le narrateur raconte
au passé.
-La narration antérieure : le narrateur annonce ce qui va se passer dans
-La narration simultanée : rapporter directement ce qui se passe sur scène,
-La narration intercalée :
un commentaire ou une description, mixte de narration ultérieure et simultanée.
Nous trouvons que notre corpus« Les enfants du nouveau monde » comporte
les quatre types de la narration définis par GENETTE :
La narration ultérieure : la
plus- que-
45
« -midi-
arrivé à la ville par le train de treize heures, il était venu, dès
accepté et reçu de lui les premiers conseils-, Salima fut
reconduite à sa cellule. La vue du lit la réconforta ; elle pensa
dormir enfin plusieurs jours puisque maintenant il semblait
Elle ne put trouver si vite le sommeil.
a été un lien avec le monde extérieur qui
, jusque- a interrogé sur sa mère, sur sa
famille, mais il ne savait rien : il avait été informé par Suzanne, il
promettait d
après. »11
La narration antérieure : le narrateur nous raconte les pensées de
« J et je commencerai : « Une question à te poser, si
».Cette
première phrase ainsi, en arabe, sur le ton amical de relations
qui se respectent, puisque aussi bien nous sommes voisins,
malgré notre froideur, peut-être même parents-sa mère, la
vieille Aicha, me rappelait volontiers que nos familles sont
poserai donc ma question et il me répondra. Il sera bien
aperçoit la pharmacie.) Oui, Youssef sera obligé de rompre
»12
11 DJEBAR. Assia, Les enfants du nouveau monde, Paris, Point, P.157. 12Ibid. P.79.
46
Nous allons trouver aussi la narration antérieure lorsque Hakim voit
:
« La jeep passe devant le magasin de Youssef. Celui
ci, derrière sa vitrine, fait signe à son aide de ne pas
sortir. Hakim le voit. « », pense-t-il. Il pose
sa main sur le bras du chauffeur ; ! Je
rentrai chez Youssef, je , .
Une fois là-bas, je ne laisserai pas faire les spécialistes
du « travail ». Certainement, nous aurons plus de
» 13
La narration simultanée : en utilisant le présent, le narrateur nous
présente ce qui se passe, comme si la scène se déroule dans le présent. Lila
son absence en pleurant :
« Lila se remet à pleurer :-Encore, mon Dieu ! Je vais
être fatigué d assure »
prend un mouchoir, lui essuie
les joues, le front.
- assure-proteste Lila avec un sourire pâle mais
ses larmes coulant. Je ne souffre pas tellement maintenant !
-pleure une bonne fois pour toutes ; oublie-toi. Cela te
fera du bien, tu verras !
Lila pose la tête sur les genoux de Suzanne. « Que
est bon », se dit-elle, ainsi allongée sur le lit et sentant avec
parfum habituel de Suzanne contre elle et le goût, en même
13 DJEBAR. Assia, Les enfants du nouveau monde. Paris, Point, P. 81.
47
temps, de ses propres larmes ! « est
ainsi à la dérive auprès
accueillir est bon de se défaire au sommeil, quelle
! »14
La narration intercalée : le narrateur utilise le passé (passé simple et
) et le présent (de la narration) alternativement dans le
récit.
« Quand ce jour-là, le spectacle commence, à neuf heures du
matin environ, Chérifa se trouve est en train de
laver à grande eau pour rafraichir la maison. Aux premières fumées
aperçoit
montrer sur la terrasse pour les voir, elle averti Amna, sa voisine.
; elle soupire : « pas
encore. » Amna, dans sa chambre, pousse déjà de petits cris aigus en
appelant ses jumeaux.
Chérifa déverse
la cuisine, se hâte pour le repas ; le couffin que Youssef, son mari, a
rapporté du marché avant de partir traine dans un coin. Elle fait les
préparatifs habituels, absente, attristée que Youssef ne revienne pas
pour le déjeuner. Un moment plus tard, elle est installée, comme
»15
14 Ibid. P .108. 15DJEBAR. Assia, Les enfants du nouveau monde. Paris, Point, P. 20/21.
48
C- La perspective narrative :
Le narrateur peut
« focalisation » :
«
de « champs »c'est-à-dire en fait une sélection de
] »16
GENETTE distingue trois types de point de vue ou de focalisations :
- La focalisation zéro (narrateur Dieu) : le narrateur sait plus que les
personnages ; un narrateur omniscient. Sa vision est illimitée(les pensées
- La focalisation interne (focalisé) : le narrateur est intervenu dans
ne connait pas les pensées des personnages.
- La focalisation externe (non focalisé) : le narrateur est un simple
observateur, il réagit donc comme un témoin. Il est incapable de deviner les
neutre.
Dans cet extrait, Le narrateur nous rapporte les sentiments et les pensées de
Li :
« Elle pensait, mais sans détermination véritable, à Ali, à son
absence. « il faut que je lui parle
partir. Je veux participer »Elle ne lui parlait pas. Au fil
16 GENETTE Gérard, Nouveau discours du récit, Paris, Seuil, 1983, P. 252
49
des jours, elle guettait cette autre vie qui mangeait les
-midi, et qui devenait de
plus en plus envahissante, une mer lente, qui approchait.
Devant lui, elle se prenait à agir comme une épouse jalouse
Que
craignait-elle ? Que fuyait-elle ? Elle se disait à elle-même,
avec tant de précaution : « Si Ali partait ?... » Où pouvait-il
partir donc ?en prison, pourquoi pas ?au maquis, pourquoi
pas ? Trois déjà de ses camarades les plus proches avaient
disparu ;
parlé. Non. Il ne pouvait partir. Il ne devait pas partir. »17
Nous trouvons que le point de vue du narrateur est porté pour la
« focalisation zéro »
personnage de Lila. Elle nous présente également le monologue de cette dernière.
Dans un autre passage le narrateur nous transmet les pensées et les émotions
focalisation zéro :
« Rien de pire, se dit-
de la morte, tandis que, dans le gris finissant du jour,
la lueur des bougies
rejeté
17 DJEBAR. Assia, Les enfants du nouveau monde, Paris, Point, P.66.
50
disait venu de Dieu pour ne pas avoir à le justifier- »18
Dans un autre passage le narrateur a changé son point de vue à une
focalisation externe, en retraçant la situation de Chérifa et les femmes dans le
vieux quartier durant le commencement du spectacle de manière objective. Sans
leurs sentiments:
« Ce matin donc où Chérifa, après avoir lavé la cour,
abandonné dans la cuisine le repas à préparer
installée dans sa chambre, ,
tandis que le spectacle commence, comme dans un
cirque immense devant le public féminin du vieux
quartier, Hakim le policier entre à une heure
inhabituelle :dix heures à peine. »19
Nous avons constaté que le narrateur ne prend pas la même perspective
narrative tout au long du roman.
3-Les récits enchâssés :
abyme, dans notre roman Les enfants du nouveau monde nous remarquons que ces
récits jalonnent le roman.
Citant comme exemple lorsque le narrateur nous décrit le dialogue qui se
:
18 DJEBAR. Assia, Les enfants du nouveau monde, Paris, Point, P. 25. 19Ibid. P.69.
51
« Suzanne est prévoyant Tandis
expli
: »Je viendrai !
», et referme la porte. »
« Le
soleil, maintenant presque au haut de sa course, frappe
dru la chambre. Repu, le bébé somnole, sur les genoux
larges de sa mère. Amna halète, les yeux fixés devant
elle, quelque part dans un buisson égaré de son âme.
. Elle est
seule. » 20
Dans un autre passage le narrateur nous retrace la situation de Chérifa en
traversant la ville, afin de prévenir Youssef du danger. Puis, on découvre une autre
histoire, celle de Touma; la femme libérée qui confronte les cafés .
« Chérifa traverse la place en diagonale
hésité longtemps. Elle se rappelle que le quartier
où se trouve le magasin de Youssef est de
mesure du regard la nudité
»
«
glacier est installé. Touma, assise seule, les genoux
pliés hauts, est attablée devant une pêche melba. Sa
cet endroit, y vient presque chaque jour : bien en
évidence, sous les yeux des consommateurs des deux
20 DJEBAR Assia, Les enfants du nouveau monde, Paris, Point, P. 117.
52
cafés voisins, elle imagine le désir des hommes qui la
» davantage de pouvoir
contempler ».21
Nous allons trouver que les allers et les retours dans la narration donnent à
écits enchâssés
augmentent la complexité et la structure du roman, en rien la cohérence du texte.
4-Le Temps du récit :
Selon la théorie de GENETTE : « le récit est une séquence deux fois
e temps du récit (temps du
signifiée temps du signifiant) »22
A- :
toire.
narration ou du récit, ce désordre chronologique désigné par GENETTE par
anachronie.23Les anachronies narratives sont des formes de discordance entre
:
:
- back : «Toute évocation 24
21Ibid. P. 128. 22 GENETTE. Gérard, « le récit pur », figure III. Paris, Seuil, 1972, p. 329. 23Ibid. p. 79. 24 GENETTE Gérard, discours du récit, Edition Seuil, 1972, p. 28.
53
Dans notre roman les analepses sont fréquentes pour rejoindre des
moments déterminants dans le passé des personnages, à travers des histoires
entrecroisées:
Chérifa :
« Quand, ce jour-là, le spectacle commence, à neuf
heures du matin environ, Chér ifa se trouve dans la cour
maison.
montagne,
terrasse pour les voir, elle avertit Amna, sa voisine. » (p20)
Lila :
« - Je me souviens, murmurait-elle, je cours dans la rue. Une
quartier sur laquelle les enfants dégringolent avec les petites
-mêmes, une planche sur quatre
roues. Je cours ! Je suis sortie de chez nous, une vieille
maison blanche vers le haut, pas très loin de la caserne. Je
cours. Je pleure, je crie tout en courant. Je crie : « Ma mère
est morte !morte ! »Et je me souviens des faces des
marchands, dans
: « Maman est
morte !morte ! ».(p 59-60)
« Lila se souvient de son père qui lui portait son
, seul parmi
54
les mères européennes qui ne pouvaient comprendre la
fierté de ce jeune homme (il avait alors vingt-cinq au
plus). »(p182)
Salima :
« Elle a
manifesté une estime profonde pour Suzanne,
alors laissée rêveuse. »(p157)
« Il est si vieux, pense Salima. Des cheveux gris, une barbe
courte, presque blanche, des épaules courbées, un panta lon
de clochard. trois ou quatre fois.
; combien de nuits assise ainsi
entre les interrogatoires ? De ce passé, il ne lui reste plus en
mémoire que la réalité atroce de la chaise, et les couloirs, les
bureaux vides à travers lesquels on la faisait passer en pleine
nuit, quand elle revenait dans sa cellule où elle pouvait
ensuite rester une journée entière oubliée, ou, quelquefois, le
déambuler de nouveau à travers ce qui lui semblait un
labyrinthe au bout duquel, des heures entières et debout elle
devait se battre. » (p85).
« Ainsi, ,
mais qui la
: elle parcourait, par
exemple, avec conscience toutes les revues pédagogiques, en
elle disait à Mahmoud, dans les moments de conversation
55
qui terminaient leurs rencontres dans la capitale, où elle se
rendait chaque jeudi : « Un jour, après notre indépendance,
on en aura besoin ! » Il répondait, avançait des chiffres,
,
en admirant son ouverture constante aux moindres problèmes
La prolepse :
: tuant à 25
Chérifa :
« Reviendra-t-il ? » se dit-elle et elle regarde
devant elle, par la porte ouverte, bien que de là, elle ne
puisse rien voir ; seulement un coin de ciel sombre,
quelques étoiles. La nuit est belle en cette saison.
Demain, pas de spectacle. La vie
reprendra. La vie ?...Certes, Youssef a tout prévu :elle
besoin de vendre ses bijoux
Youssef se chargera seul du magasin ; chaque mois, il
lui apportera de quoi vivre. Si Youssef meurt,
»Reviendra-t-il ? »
» (p259).
25 GENETTE Gérard, Figures III, Edition seuil, 1983, p. 41.
56
B--La vitesse du récit :
La vitesse du récit définit par Gérard GENETTE comme étant « le rapport
mois et années, et une longueur: celle du texte, mesurée en lignes et en pages»26
:
La pause :
ou bien un commentaire : « ; elle oublie sa solitude, et le
présent, et le silence. »(p61).
Le narrateur établie dans cet extrait un commentaire sur la relation entre Omar
et Lila :
« Entre eux, jamais de scènes ; des mises au
point, tout au plus
déchirements. »(P106)
travers le regard de Suzanne :
« mais Suzanne la connaissait si bien
pour souffler, et ercevoir que son égoïsme seul, sa
»(P109)
: : « Une
bien grande opération »(p71).
ste une grande opération ce jour là. Mais il ne
donne aucune information sur cette histoire.
26 GENETTE Gérard, «Discours du récit», dans Figure III, Paris, Seuil, 1972, P.123.
57
-
Mais, pendant une période de six ans, elles ne se voient que par hasard. Donc,
nous constatons que le narrateur passe sous silence sur ce qui se passe, et pourquoi
cette distance entre les deux ?
« temps
du collège, Lila à Suzanne. Pendant six ans se voir, se parler
à peine, comme par hasard puis, au terme, se reconnaitre ; un
vrai dialogue, un seul. » (p104)
1945, sans donner des renseignements sur ce qui se passe ce jour de mai :
« Ali racontait donc cet incident à Lila, expliquant en même
temps comment, après les manifestations du 8 mai 1945, les
arrestations qui avaient suivi, la surveillance policière, et les
soubresauts des partis nationalistes dont la vie ne pouvait
un travail de fond, coups de pioche enfoncés dans la croute
sommeil, nuit trompeuse dans les brumes de laquelle
esprits des hommes ; terre broyée, terre ouverte du peuple à
une lumière secrète. »(P149)
Le narrateur cite le mot « guerre » sans donner aucune infirmation sur les
évènements de cette guerre :
« -Je veux dire, la guerre »(P210)
58
Nous remarquons également que le temps entre treize heures et dix-heures
199 à la page 200.
La scène : ralentir le rythme du récit :
« très grande, sombre. Un lit à
baldaquin, au fond, prend dans la pénombre une allure
une armoire en bois verni ; des
.
Chérifa regarde. En face, sur le sol, Amna est assise. Son
corps lourd, empesé ; ses jambes enflées, allongées devant
elle ; sa figuire rougeaude aux joues épanouies ; ses yeux
larges avec leur expression larmoyante. Cette femme git là,
ier-né quand Hakim est entré
brusquement. »(P72)
Dans le passage suivant, le narrateur nous raconte en détail la façon dans
laquelle Chérifa marche pour traverser la ville, ainsi que le regard des hommes
vis-à- :
« Chérifa dont la démarche lente, légèrement
balancée, va attirer les regards des hommes qui jouent
sur les terrasses, bavardent ou boivent thé et café,
Chérifa dont
pour la première fois, dans cette rue longue dont elle
fixe le
voudrait pouvoir, comme autrefois dans les fêtes,
passer sereine et indifférente ; mais son voile ne la
protège pas. ;
59
déjà des yeux se lèvent tre une
silhouette alanguie rôdant au soleil. Ils ont noté
aussitôt la finesse de la cheville, les souliers non
éculés-ce ne sont pas des babouches de vieille-, le
voile de soie différent de celui des filles du fleuve. La
raideur enfin, les yeux fixes qu ,
chacun des spectateurs les remarquent aussi. »(P122)
Le sommaire :
:
« Cette halte finit. Par sa présence, Ali avait réussi à tirer peu à peu Lila de ce
» (p63).
de son mari Ali, sans donner des détails.
Dans un autre extrait :
« Le même jour, des massacres avaient eu lieu dans
des villes martyres
pas une terre commune, ni même seulement une
misère partagée mais du sang versé ensemble et dans
le même jour, les mêmes chants interrompus. »(P171)
-dessus, le narrateur nous résume ce qui se passe dans ce
jour de massacre dans les autres villes du pays, la solidarité et le sacrifice du
peuple pour leur patrie.
60
II. :
Après une lecture attentive et minutieuse, nous constatons que le temps
occupe une place importante pour les personnages de notre corpus dans la mesure
istoire débute à neuf heures du matin et se
termine à la fin du même jour :
« Quand, ce jour-là, le spectacle commence, à neuf heures du
laver à grande eau pour rafraichir la maison. »27
Ainsi, le personnage de Lila qui rejoint le lit longtemps, souf
de son mari se lève. Mais, elle reste perdue pendant une période de deux à trois
heures :
« Lila se leva du lit où longtemps elle était restée assise.
Avait-elle oublié le présent : deux, trois heures ainsi perdu,
elle ne savait plus. »28
à la maison et interroge sa femme Amna sur Youssef, le mari de Chérifa :
« Ce matin donc où Chérifa, après avoir lavé la cour,
spectacle commence, comme dans un cirque immense devant
27 DJEBAR Assia, Les enfants du nouveau monde, Paris, Point, P. 20. 28 Ibid. P. 60.
61
le public féminin du vieux quartier, Hakim le policier entre à
une heure inhabituelle : dix heures à peine. »29
A cette heure même Saidi, arrêté comme un suspect dans la liste que Touma
fait au commissaire Martinez :
« - On a arrêté Saidi ce matin, à dix heures
30
moment où elle se dirige vers le commissariat :
« -Quelle heure ? demande brièvement Hakim au
chauffeur, tandis que la jeep, après ce long détour dans
le quartier du centre, se dirige vers le commissariat.
-Onze heures, inspecteur. » 31
Suzanne répète encore cette heure en chuchotant :
« Et moi ? A dix heures du matin,
! Deux heures !...Je le
laisse parler, puis je crie « et moi ? »- Elle crie : « Et moi ? »
-là, à dix heures du
matin, Suzanne répète, en chuchotant :
-Il est parti ! »32
29 DJEBAR Assia, « Les enfants du nouveau monde », Paris, Point, P. 69. 30 Ibid. P. 200. 31 Ibid. P. 99.
62
Le personnage de chérifa est un exemple de la solidarité des femmes avec
quart :
« : « Onze heures
moins le quart !...onze heures ! Il faut faire quelque chose ! »33
rester attendre son mari :
« -Je d treize heures
fermeture habituelle ! Si Youssef ne revient pas, je fermerai !
pruderie méfiante. Il va pour lui fermer la porte au nez : pas
de femme ici.
- Je suis son épouse, proteste Chérifa, et devant sa mine
incrédule ! Je suis sa femme et je
»34
A treize heures et à neuf heures, le train « la Micheline » vient de la
capitale remonte à la place des armes a :
« Deux fois par jour, la Micheline, un
municipalité de la ville voici quelques années, vient de
la capitale
éloign
32 DJEBAR Assia, « Les enfants du nouveau monde », Paris, Point, P. 113. 33 Ibid. P.119. 34Ibid.
63
treize heures
et à dix-neuf heures, des terrasses des cafés
environnants, les consommateurs encore présents
peuvent surveiller les départs et dévisager les nouveaux
venus. Cela alimente leur conversation. » 35
35 DJEBAR Assia, « Les enfants du nouveau monde », Paris, Point, P. 165.
CONCLUSION
65
Conclusion :
Nous arrivons au terme de notre analyse que nous avons pu mener sur
« Les enfants du nouveau monde »
dans lequel elle prend la parole de la femme pendant cette période de guerre,
féminine qui se révolte.
Nous avons élaboré ce modeste travail, à travers deux parties chacune
comporte deux chapitres. Dans la première partie, intitulée « Auteur et
personnages », nous avons deux chapitres le premier porte comme
titre ».
Alors que nous avons consacré, le deuxième chapitre à l
personnage, il porte comme titre « personnages féminins ». Nous avons mené
une analyse bien détaillée sur les personnages féminins au sein de notre
corpus.
Dans la deuxième partie intitulée « structure du roman », nous avons
pproche narratologique selon Gérard GENETTE. Nous avons
consacré le premier chapitre au « statut du narrateur », et le deuxième
à « »
Ainsi, nous avons trouvé une diversité des voix féminines, dans la
mesure où chaque personnage représente une catégorie, une femme différente
la femme algérienne dans ce combat. Ces voix interfèrent pour donner une
cohérence, une vivacité
voix.
66
personnages féminins, la multiplicité de ces derniers fait ressortir
s permette de
mieux comprendre le rôle de chaque femme.
toujours narratrice et porte parole de ces dernières.
narrative au sein du texte, ce qui rend le texte plus vivant et dynamique.
Ainsi, les retours en arrière et les souvenirs qui interrompent
régulièrement la narration jouent un rôle important dans le roman.
s prolepses
participent dans la construction du roman, et en particulier la complexité de
Nous signalons aussi que le temps occupe une place centrale chez les
-back
donne une envie de remonter dans les souvenirs des personnages.
En sommes, nous trouvons que « Les enfants du nouveau monde » est
dans la diversité des voix féminine
femmes dans une parfaite harmonie, et une construction assez particulière à
temps.
67
spécifique et particulier, porte parole et voix des femmes dans une période
e,
ce qui ouvre la question sur la condition de femme pendant la guerre à travers
ces voix féminine.
De ce fait, y a-t-il un reflet de la femme algérienne dans la société dans
un pays colonisé et qui cherche sa libération ?
69
70
« comme le reste de
, a subi, un
siècle et demi durant, dépossession de ses richesses naturelles, déstructuration
de ses assises sociales
deux langues identitaires, le berbère séculaire, et la langue arabe dont la qualité
poétique ne pouvait alors, pour moi, être perçue que dans les versets coraniques
qui me restent chers. Mesdames et Messieurs, le colonialisme vécu au jour le
jour par nos ancêtres, sur quatre générations au moins, a été une immense plaie
! Une plaie dont certains ont rouvert récemment la mémoire, trop légèrement et
par dérisoire calcul électoraliste. En 1950 déjà, dans
puissant de sa parole, comment les guerres coloniales en Afrique et en Asie
-
française, la vôtre, Mesdames et Messieurs, devenue la mienne, tout au moins
71
en écriture, le français donc, est lieu de creusement de mon travail, espace de
ma méditation ou de ma rêverie, cible de mon utopie peut -être, je dirais même
tempo de ma respiration, au jour le jour : ce que je voudrais esquisser, en cet
ni pour mes seuls livres, mais pour les ombres encore vives de mes confrères
qui, dans
la décennie quatre-vingt-
à Dieu, mon pays cautérise peu à peu ses blessures. Il serait utile peut-être de
rappeler que, dans mon enfance en Algérie coloniale (on me disait alors
étudiant à Carthage puis à
littéraire abondante, dont le chef-
est un roman picaresque dont la verve, la liberté et le rire iconoclaste
conserve une modernité étonnante.... Quelle révolution, ce serait de le traduire
Tertullien, né païen à Carthage en 155 ap. J.-C., qui se convertit ensuite au
toute de rigueur puritaine. Il suffit de citer deux ou trois de ses phrases qui,
surgies de ce IIe siècle chrétien et latin, sembleraient, soudain, parole de
-le vite en
langue arabe, pour nous prouver à nous-
72
spécialité seulement «islamiste»
algérien, naît le plus grand Africain de cette Antiquité, sans doute de toute
notre littérature : Augustin, né de parents berbères latinisés... Inutile de détailler
le trajet si
scène du jardin qui entraîne sa conversion, son retour à la maison paternelle de
deux décennies, contre les donatistes, ces Berbères christianisés, mais âprement
raidis dans leur dissidence. Après vingt ans de luttes contre ces derniers, eux
n temps, étant plus en contact
certes avec leurs ouailles parlant berbère, Augustin croit les vaincre :
s
plus tard, il meurt, en 431 dans Hippone, assiégée par les Vandales arrivés
détruire. Ainsi, ces grands auteurs font partie de notre patrimoine. Ils devraient
être étudiés dans les lycées du Maghreb : en langue originale, ou en traduction
française et arabe. Rappelons que, pendant des siècles, la langue arabe a
lluminé depuis vingt ans déjà, de la nuit
des femmes du Mont Chenoua. Il me semble que celles-ci dansent encore pour
moi dans des grottes secrètes, tandis que la Méditerranée étincelle à leurs pieds.
ue leurs sourires,
-à-dire de guérison. Car mon français, doublé par le
velours, mais aussi les épines des langues autrefois occultées, cicatrisera peut-
de
précocité et la variété prodigieuse du savoir, quatre siècles avant Pic de la
Mirandole, étonna lettrés »
73
Entretien (World Policy Journal «WPJ », En février 2012
David Andelman et Charlotte Pudlowski
WPJ : Dans votre livre « », il y a beaucoup de
el est le rôle de
chaque langue arabe, français dans un monde marqué par une telle
fragmentation des langues et des nations?
A.DJEBAR :
arabe à la maison, tout en étant professeur. Au début nous vivions dans un petit
village perdu dans les montagnes. Nous apprenions, parlions et écrivions
parlions arabe.
langue du Coran, il était assez rare de
au Maroc et en Tunisie. Sauf que la Tunisie et le Maroc étaient plus
Algérie moins fermement sous contrôle français. La
pression du pouvoir français dans les écoles était bien plus forte en Algérie car
Il y avait réunissait
il
société, son
statut économique et social.
WPJ : -il arrivé à la langue arabe en Algérie après la libération?
A.DJEBAR :
74
une langue pour le reste du monde.
WPJ :
A.DJEBAR : Parce que le français était la langue qui avait été enseignée
dans les écoles et les gens y étaient habitués. Comme mon père par exemple, il
parlait en arabe avec ses amis mais il achetait des journaux français. Le concept
hui en Algérie. Connaître deux langues
fait partie de la culture, le français, ainsi que les versions populaire et littéraire
WPJ :
A.DJEBAR : uelque sorte allergique à la forme
. Assia Djebar,
étroitement lié à ses colonisateurs français, la domination de la langue française
WPJ :
gouvernement en termes de choix des langues parlées ou à enseigner dans les
écoles? Un gouvernement a-t-il le droit de décider d
pays?
A.DJEBAR :
dirigeants nationalistes qui avaient contribué à obtenir cette indépendance
bien le français que les Français eux-mêmes.
75
Même en prison, les prisonniers à qui je rendais visite parlaient tantôt arabe,
tantôt français. Eux aussi étaient bilingues.
Algérie quand les dirigeants de la
nation parlent à leur propre peuple, ils parlent arabe et utilisent même un accent
parlent en Europe ou aux Européens, ils ont recours au français. Par exemple, si
je ne vous connaissais pas, ou parce que je suis une femme, même si vous étiez
impersonnel, or les femmes doivent être très discrètes dans la société arabe.
WPJ : Vous préférez écrire en arabe ou en français?
A.DJEBAR : Oh, certainement en français. Mon arabe est bien plus
primitif. A mon époque il y avait encore une certaine élite musulmane, mais
dont les membres envoyaient leurs enfants dans des écoles françaises pour
menuiser.
Quel
Je me le demandais justement.
WPJ :
A.DJEBAR : Je me le demandais justement. Ils me sollicitent chaque
semaine et je ne sais même pas à quoi correspond ce rôle. Je participe aux
discussions, nous
ssion ou une autre.
76
WPJ : A propos des abus de la langue pensez-vous que la langue arabe
permet de tergiverser davantage que le français?
A.DJEBAR :
langue très riche. Vous pouvez jouer avec la langue arabe tout aussi
très moderne pas une langue archaïque. Par ailleurs, il se trouve que le français
classique, un français très littéraire. En arabe, il y a
davantage de nuances non pas dans la signification des mots mais dans les
différents niveaux de la société, ce que la langue est capable de révéler.
WPJ : Le français possède une institution conçue spécifiquement pour
sauvegarder la pureté de la langue. Suggèreriez-vous la création du même
A.DJEBAR : Quand je suis en colère, je ne sais pas comment insulter les
Une langue est quelque chose de vivant. Elle montre son meilleur visage si
vous êtes courtois ou si vous parlez avec des nuances. Chaque personne
entretient une relation très personnelle avec les langues. En français, je
avez dans votre esprit, à vous. Quand je suis en colère, je ne sais pas comment
WPJ : Quelle est la langue, ou les langues, que vous conseilleriez aux
A.DJEBAR : Le problème pour ces enfants est de décider quelle autre
langue que la leur ils doivent apprendre. En arabe, il y a les problèmes de la
77
pas le choix. Pour une première langue il y a la langue maternelle, ensuite la
contacts. Cela dépend de ce que vous faites, de votre métier. Aucune langue
.
WPJ :
Est-ce que cela vous attriste? Est-ce que cela appauvrit les cultures dans
lesquelles cela se produit?
A.DJEBAR : perte totale
de la langue. Elle peut devenir plus pauvre, moins nuancée. Bien entendu elle
disparaît si les gens arrêtent totalement de la parler. Une disparition est toujours
triste.
78
BIBLIOGRAPHIE :
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- GENETTE Gérard, discours du récit, Edition Seuil, 1972.
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1977, seuil, Paris.
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Ouvrages généraux: -ASHOLT Wolfgang. CALLE- GRUBER Mireille et COMBE Dominique, éd,
Colloque de Cerisy, 2010. Presse Sorbonne nouvelle, « Assia DJEBAR, Littérature
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(https://books.google.com/books?isbn=2878544870 ). (Consulté le 22 /12 /2015 à
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-BOUGUERRA Mohamed Ridha, BOUGUERRA Sabiha, Histoire de la littérature
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-DEJEUX, Jean, Littérature maghrébine de langue française. Introduction générale
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79
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Articles : -(Extrait de « La littérature maghrébine de langue française », Ouvrage collectif,
sous la direction de Charles BONN, Naget KHADDA & Abdallah MDARHRI-
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- REMY Pierre- Disponible sur le
site (www.academie-francaise.fr/discours-de-reception-et-reponse-de-pierre-jean-
remy)
Entretiens : - Cf., MORTIMER,
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, Les femmes dans le roman algérien. Histoire, discours et
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Sitographies : -www.academie-francaise.fr/discours-de-reception-et-reponse-de-pierre-jean-
remy. (Consulté le 21 /12 /2015 à 13 :30)
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13 :17)
- www.presse-algerie.net/.../37861-extraits-du-discours-d-rsquo-assia-djeb ....
Extraits du discours d'Assia Djebar prononcé à son ... (consulté le 7/3/2016 à20 :25)
-www.slate.fr/story/97735/assia-djebar-gardienne-langue-francaise (Consulté le
8/05/2016 à 17 :01).
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Résumé
« Les enfants du nouveau monde »
Mots- clefs : Littérature féminines, diversité des voix, personnages féminins,
narratologie, temps.
81
Sumarry
The analysis that we conducted on "Children of the New World" Assia
DJEBAR, allows us to better understand the diversity of women's voices in the
novel through the study of the female characters and the structure of the novel.
Key-words: women's literature, diversity of voices, female characters, narratology, time.
82