George Orwell Hommage a La Catalogne
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George Orwell
Hommage Ă la Catalogne
(1936-1937) Traduit de lâanglais par Yvonne Davet
Titre original :
Hommage to Catalonia
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Ne rĂ©ponds pas Ă lâinsensĂ© selon sa folie, de peur de lui ressembler toi-mĂȘme.
RĂ©ponds Ă lâinsensĂ© selon sa folie, afin quâil ne sâimagine pas ĂȘtre sage.Proverbes, XXVI
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NOTES DE LA TRADUCTRICE
Lâordonnance des chapitres dans la traduction française diffĂšre de celle de lâĂ©dglaise initiale.
Selon le désir de George Orwell (exprimé dans ses lettres à Yvonne Davejuillet 1946 et du 13 janvier 1947), les chapitres V et XI ont été reportés à la fin du l
appendice{1 }
. «Ils traitent de la politique intĂ©rieure de la rĂ©volution espagnole, Ă©crwell, et il me semble que le lecteur ordinaire les trouverait ennuyeux. Mais, en mmps, ils ont une valeur historique, surtout le chapitre XI, et il serait dommage dpprimer. En Ă©crivant ce livre, jâai tĂąchĂ© de concentrer mes rĂ©flexions politiques danux chapitres, et on peut les mettre Ă la fin sans interrompre le rĂ©cit. »
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SIGNIFICATION DES PRINCIPAUX SIGLES
P.S.U.C. : « Partido Socialista Unificado de Cataluña » : « Parti socialiste uniftalogne ». (à cette époque, dirigé par les communistes et affilié à la IIIe Internation
P.O.U.M. : « Partido Obrero de Unificación Marxista » : « Parti ou
unification marxiste ». F.A.I. : « Federación Anarquista Ibérica » : « Fédération anarchiste ibérique ». U.G.T. : « Unión General de Trabajadores » : « Union générale des travailleu
entrale syndicale socialiste, dominée à cette époque par les communistes.) C.N.T. : « Confederación Nacional del Trabajo » : « Confédération national
avail ». (Centrale syndicale anarchiste.)
J.S.U. : Union des Jeunesses du P.S.U.C. J.C.I. : Union des Jeunesses du P.O.U.M. I.L.P. : « Independent Labour Party » : Parti travailliste indépendant
ngleterre).
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I
Dans la caserne LĂ©nine, Ă Barcelone, la veille de mon engagement dans les mivis, debout devant la table des officiers, un milicien italien.
CâĂ©tait un jeune homme de vingt-cinq ou vingt-six ans, de forte carrure, les cheun jaune roussĂątre, lâair inflexible. Il portait sa casquette Ă visiĂšre de cuir farouchem
clinĂ©e sur lâĆil. Je le voyais de profil : le menton touchant la poitrine, les souoncĂ©s comme devant un casse-tĂȘte, il contemplait la carte que lâun des officiers pliĂ©e sur la table. Quelque chose en ce visage mâĂ©mut profondĂ©ment. CâĂ©tait le viqui est capable de commettre un meurtre et de donner sa vie pour un ami, le genage quâon sâattend Ă voir Ă un anarchiste â encore que cet homme fĂ»t peut-ĂȘtre biemmuniste. Il reflĂ©tait, ce visage, la bonne foi en mĂȘme temps que la fĂ©rocitĂ©, thĂ©tique respect aussi, que les illettrĂ©s vouent Ă ceux qui sont censĂ©s leur pĂ©rieurs. On voyait aussitĂŽt que ce milicien ne comprenait rien Ă la carte et quânsidĂ©rait la lecture comme un prodigieux tour de force intellectuel. Je ne sais
urquoi, mais jâai rarement vu quelquâun â jâentends, un homme â pour qui je mensi pris dâune sympathie instantanĂ©e. Au cours de la conversation, une quelcomarque rĂ©vĂ©la incidemment mon identitĂ© dâĂ©tranger. LâItalien releva la tĂȘte evement :
« Italiano ?En mon mauvais espagnol je rĂ©pondis :â No. InglĂ©s. Y tĂș ? â Italiano. »
Lorsque nous fĂ»mes sur le point de sortir, il vint Ă moi et me serra la main trĂšs est Ă©trange, lâaffection quâon peut ressentir pour un inconnu ! Ce fut comme ugue de nos deux cĆurs nous avait momentanĂ©ment permis de combler lâabĂźme dngue, dâune tradition diffĂ©rentes, et de nous rejoindre dans une parfaite intimitĂ©aisir Ă croire quâil Ă©prouva pour moi une sympathie aussi vraie que celle quâil mâinsais je compris aussi que si je voulais conserver de lui ma premiĂšre impression, ilait ne point le revoir ; et il va sans dire que je ne lâai jamais revu.
CâĂ©tait courant en Espagne, des contacts de ce genre. Si je parle de ce millien, câest que jâai gardĂ© de lui un souvenir vivace. Avec son uniforme minable et
age farouche et pathĂ©tique, il est demeurĂ© pour moi le vivant symbole de lâatmospute particuliĂšre de ce temps-lĂ . Il est liĂ© Ă tous mes souvenirs de cette pĂ©riode derre : drapeaux rouges flottant sur Barcelone, trains lugubres bondĂ©s de so
queteux roulant lentement vers le front, villes grises ravagĂ©es de lâarriĂšre, trancueuses et glaciales dans les montagnes.
On Ă©tait en dĂ©cembre 1936. Il y a de cela, au moment oĂč jâĂ©cris, moins de sept mcependant il me semble dĂ©jĂ quâil sâagit dâune Ă©poque trĂšs lointaine. Les Ă©vĂ©nemstĂ©rieurs la font oublier, bien plus complĂštement quâils ne font oublier 1935, ou
ssi bien. JâĂ©tais venu en Espagne dans lâintention dâĂ©crire quelques articles pouurnaux, mais Ă peine arrivĂ© je mâengageai dans les milices, car Ă cette date, et dans
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mosphĂšre, il paraissait inconcevable de pouvoir agir autrement. Les anarchistes avujours effectivement la haute main sur la Catalogne et la rĂ©volution battait encoreein. Sans doute, quiconque Ă©tait lĂ depuis le dĂ©but devait avoir lâimpression, mĂȘmedĂ©cembre et en janvier, que la pĂ©riode rĂ©volutionnaire touchait Ă sa fin ; mais pou
rivait alors directement dâAngleterre, lâaspect saisissant de Barcelone dĂ©passait tente. CâĂ©tait bien la premiĂšre fois dans ma vie que je me trouvais dans une ville
asse ouvriÚre avait pris le dessus. à peu prÚs tous les immeubles de quelque importaient été saisis par les ouvriers et sur tous flottaient des drapeaux rouges ou
apeaux rouge et noir des anarchistes ; pas un mur qui ne portĂąt, griffonnĂ©s, le marla faucille et les sigles des partis rĂ©volutionnaires ; il ne restait de presque toutelises que les murs, et les images saintes avaient Ă©tĂ© brĂ»lĂ©es. ĂĂ et lĂ , on voyaituipes dâouvriers en train de dĂ©molir systĂ©matiquement les Ă©glises. Tout magasin,fĂ© portait une inscription vous informant de sa collectivisation ; jusques aux caisseeurs de bottes qui avaient Ă©tĂ© collectivisĂ©es et peintes en rouge et noir ! Les garçonfĂ©, les vendeurs vous regardaient bien en face et se comportaient avec vous en Ă©gs tournures de phrases serviles ou mĂȘme simplement cĂ©rĂ©monieuses avaient po
oment disparu. Personne ne disait plus Señor ou Don, ni mĂȘme Usted : tout le mtutoyait, on sâappelait « camarade » et lâon disait Salud au lieu de Buenos dĂas. Iait pas dâautomobiles privĂ©es : elles avaient Ă©tĂ© rĂ©quisitionnĂ©es ; et tous les trams, tbon nombre dâautres vĂ©hicules Ă©taient peints en rouge et noir. Partout des plac
volutionnaires, avec leurs rouges et leurs blancs, se dĂ©tachaient de façon Ă©clatante murs, et, par contraste, les quelques affiches de naguĂšre qui y Ă©taient demeuaient lâair de barbouillages de boue. Sur les Ramblas, large artĂšre centrale de la nstamment animĂ©e par le va-et-vient de flots de gens, les haut-parleurs beuglaienants rĂ©volutionnaires tout le long du jour et jusquâĂ une heure avancĂ©e de la nuit.
us Ă©trange de tout, câĂ©tait lâaspect de la foule. Ă en croire les apparences, dans cette classes riches nâexistaient plus. Ă lâexception dâun petit nombre de femme
Ă©trangers, on ne voyait pas de gens « bien mis ». Presque tout le monde portaitements de prolĂ©taires, ou une salopette bleue, ou quelque variante de lâuniforme lice. Tout cela Ă©tait Ă©trange et Ă©mouvant. Une bonne part mâen deme
comprĂ©hensible et mĂȘme, en un sens, ne me plaisait pas ; mais il y avait lĂ un Ă©taoses qui mâapparut sur-le-champ comme valant la peine quâon se battĂźt pour lui. e je crus que la rĂ©alitĂ© rĂ©pondait Ă lâapparence, quâil sâagissait rĂ©ellement dâun
olĂ©tarien, et que des bourgeois ne restaient â beaucoup ayant fui ou ayant Ă©tĂ© tue ceux qui sâĂ©taient de leur plein grĂ© rangĂ©s aux cĂŽtĂ©s des ouvriers ; je ne me rendimpte que, tout simplement, en grand nombre les bourgeois aisĂ©s se terraientovisoirement, se dĂ©guisaient en prolĂ©taires.
LâatmosphĂšre sinistre de la guerre y Ă©tait aussi pour quelque chose. La ville avapect lugubre et nĂ©gligĂ© ; les routes, les maisons Ă©taient mal entretenues ; les rueit, nâĂ©taient que faiblement Ă©clairĂ©es par crainte de raids aĂ©riens ; les magasins, po
upart, avaient pauvre apparence et étaient à moitié vides. La viande se faisait raait à peu prÚs impossible de se procurer du lait ; on manquait de charbon, de sucessence, et trÚs sérieusement de pain. Déjà à cette époque les queues aux portes
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ulangeries sâallongeaient sur des centaines de mĂštres. Cependant, autant quâouvait juger, les gens Ă©taient contents, emplis dâespoir. Le chĂŽmage Ă©tait inexistantĂ»t de la vie encore extrĂȘmement bas ; on ne voyait que trĂšs peu de personnes vraimns la misĂšre et pas de mendiants, Ă part les bohĂ©miens. Et surtout il y avait la foi rĂ©volution et dans lâavenir, lâimpression dâavoir soudain dĂ©bouchĂ© dans une
Ă©galitĂ© et de libertĂ©. Des ĂȘtres humains cherchaient Ă se comporter en ĂȘtres humain plus en simples rouages de la machine capitaliste. Dans les boutiques des barbs « Avis au public », rĂ©digĂ©s par des anarchistes â les barbiers Ă©taient pour la plu
archistes â, expliquaient gravement que les barbiers nâĂ©taient plus des esclaves. D rues, des affiches bariolĂ©es conjuraient les prostituĂ©es de ne plus se prostituer. i venait juste de quitter les durs Ă cuire sarcastiques et cyniques des pays anglo-saxtait assez pathĂ©tique de voir ces Espagnols idĂ©alistes prendre Ă la lettre les cl
volutionnaires les plus rebattus. à cette époque, on vendait dans les rues, elques centimes, des romances révolutionnaires des plus naïves, célébrant tout
aternitĂ© prolĂ©tarienne et honnissant la mĂ©chancetĂ© de Mussolini. Maintes fois jâai vlicien presque illettrĂ© acheter une de ces chansons, en Ă©peler laborieusement les m
lorsquâil en avait saisi le sens, se mettre Ă la chanter sur lâair appropriĂ©.Pendant tout ce temps jâĂ©tais Ă la caserne LĂ©nine, sous prĂ©texte dâentraĂźnement front. Le jour oĂč je mâĂ©tais engagĂ© dans les milices on mâavait dit que le lendem
ĂȘme je serais envoyĂ© au front, mais en fait il me fallut attendre quâune « centuuvellement formĂ©e fĂ»t suffisamment entraĂźnĂ©e. Les milices ouvriĂšres, levĂ©es en tte par les syndicats au dĂ©but de la guerre, nâavaient pas Ă©tĂ© organisĂ©es sur la base dmĂ©e ordinaire. Les unitĂ©s de commandement Ă©taient : la « section » dâenviron trmmes, la « centurie » dâune centaine dâhommes, et la « colonne », terme appliquatique Ă toute troupe nombreuse. Auparavant quartier de cavalerie, dont on s
mparĂ© au cours des combats de juillet, la caserne LĂ©nine Ă©tait un superbe bĂątimenerre, avec un manĂšge et dâimmenses cours pavĂ©es. Ma « centurie » dormait dans ls Ă©curies, sous les mangeoires de pierre qui portaient encore les noms des chevautaille. On avait rĂ©quisitionnĂ© et envoyĂ© sur le front tous les chevaux, mais meurait imprĂ©gnĂ© de lâodeur du pissat et de lâavoine pourrie. Je suis restĂ© dans serne environ une semaine. Je garde surtout souvenir des odeurs chevalines,nneries de clairon chevrotantes (nos clairons Ă©taient tous des amateurs â je nâai co vĂ©ritables sonneries espagnoles quâen entendant celles qui nous parvinrent des li
scistes), du martÚlement de la cour par de lourdes bottes à semelles cloutées,ngues revues, le matin, sous un soleil hivernal, des parties forcenées de footbanquante par camp, sur le gravier du manÚge. Il devait y avoir dans la caserne un mhommes et une vingtaine de femmes, outre les épouses des miliciens qui faisaieisine. Il y avait alors des femmes enrÎlées dans les milices, en faible nombre, il est
ans les premiers temps de la guerre elles avaient, comme de juste, combattu cĂŽte Ă ec les hommes. En temps de rĂ©volution, cela paraĂźt tout naturel. DĂ©jĂ pourtant esprit avait changĂ© ; il fallait Ă prĂ©sent retenir les hommes Ă lâextĂ©rieur du mandant que les femmes y faisaient lâexercice, car ils se moquaient dâelles et les gĂȘnau de mois auparavant, aucun dâeux nâeĂ»t rien trouvĂ© de comique Ă voir une fe
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anier un fusil.La caserne tout entiĂšre Ă©tait dans lâĂ©tat de saletĂ© et dans la pagaille oĂč les milic
ettaient tout local quâils occupaient, Ă croire que câĂ©tait lĂ un sous-produit inĂ©vitabrĂ©volution. Dans tous les coins vous tombiez sur des amas de meubles brisĂ©s, de s
ndues, de casques de cavalier en cuivre, de fourreaux de sabres vides, et de vivres gse faisait un gaspillage scandaleux de vivres, surtout de pain : rien que dansambrĂ©e on en jetait une pleine corbeille aprĂšs chaque repas â câĂ©tait une honte emps oĂč la population civile en manquait ! Nous mangions Ă de longues tables
Ă©teaux, dans des Ă©cuelles Ă©tamĂ©es constamment graisseuses, et il nous fallait, ire, nous servir dâun affreux rĂ©cipient nommĂ© porrĂłn. Câest une espĂšce de bouteilrre, Ă goulot effilĂ© ; quand vous lâinclinez, le liquide jaillit en jet fluet, ce qui permire Ă distance, sans la toucher des lĂšvres, et on se la passe de main en main. Je Ăšve de la soif et rĂ©clamai une timbale dĂšs que je vis le porrĂłn ; pour mon goĂ»t,ssemblait par trop Ă un urinal, surtout lorsquâil y avait dedans du vin blanc.
Peu Ă peu on distribuait des uniformes aux recrues : mais comme on Ă©tapagne, tout Ă©tait distribuĂ© piĂšce Ă piĂšce et au petit bonheur, de sorte que lâon ne s
mais avec certitude qui avait reçu, et quoi ; et bien des choses, parmi celles qui aient le plus nĂ©cessaires, par exemple les ceinturons et les cartouchiĂšres, ne nous fustribuĂ©es quâau tout dernier moment, alors quâallait dĂ©marrer le train nous empors le front. Jâai parlĂ© dâ« uniforme » des milices ; peut-ĂȘtre eĂ»t-il Ă©tĂ© plus juste demultiforme ». LâĂ©quipement Ă©tait pour tous du mĂȘme type gĂ©nĂ©ral, mais jamais tot le mĂȘme chez deux miliciens. Ă peu prĂšs tout le monde, dans lâarmĂ©e, portailottes courtes de velours Ă cĂŽtes, mais Ă cela se bornait lâuniformitĂ©. Certains ports bandes molletiĂšres, dâautres des guĂȘtres de velours cĂŽtelĂ©, dâautres encore
mbiĂšres de cuir ou de grandes bottes. Tout le monde portait un blouson Ă ferme
lair, mais certains blousons Ă©taient en cuir, dâautres en laine, et ils Ă©taient de touteuleurs imaginables. Il y avait autant de sortes de casquettes quâil y avait dâhommait dâusage dâorner le devant de sa casquette de lâinsigne de son parti ; en outre, preut le monde portait, nouĂ© autour du cou, un foulard rouge ou rouge et noir. lonne de miliciens en ce temps-lĂ Ă©tait une cohue dâaspect surprenant. Mais il fautâon ne pouvait distribuer de vĂȘtements quâau fur et Ă mesure que telle ou telle uĂ©cutant dâurgence des commandes, en sortait ; et, compte tenu des circonstanceĂ©taient pas de mauvais vĂȘtements. Ă lâexception toutefois des chemises et
aussettes, misĂ©rables articles de coton qui ne protĂ©geaient pas du froid. JeprĂ©sente avec horreur ce que les miliciens ont eu Ă endurer, les premiers mois, qn nâĂ©tait organisĂ©. Il me tomba entre les mains, je mâen souviens, un journal v
ors de deux mois Ă peine et oĂč je lus que lâun des dirigeants du P.O.U.M., de reune tournĂ©e dâinspection sur le front, promettait de tĂącher dâobtenir que « chlicien eĂ»t sa couverture » : câest une phrase qui vous fait frissonner sâil vous est adormir dans une tranchĂ©e !
Le lendemain de mon arrivĂ©e Ă la caserne commença ce Ă quoi il Ă©tait comiqunner le nom dâ« instruction ». Il y eut au dĂ©but des scĂšnes de pagaille consternaur la plupart, les recrues Ă©taient des garçons de seize ou dix-sept ans, issus
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artiers pauvres de Barcelone, tout animĂ©s dâardeur rĂ©volutionnaire mais ignomplĂštement ce que signifie la guerre. On ne parvenait mĂȘme pas Ă les faire sâalignediscipline Ă©tait inexistante : si un ordre nâavait pas lâheur de plaire Ă un milicien, csortait des rangs et discutait vĂ©hĂ©mentement avec lâofficier. Le lieutenant-instruc
ait un vaillant et charmant jeune homme au frais visage, qui avait Ă©tĂ© officier de lâaguliĂšre et en gardait lâallure : il avait un maintien distinguĂ© et Ă©tait toujours tatre Ă©pingles. Et, bien que cela puisse paraĂźtre singulier, il Ă©tait un socialiste sincĂšdent. Plus encore que les hommes eux-mĂȘmes, il tenait Ă une Ă©galitĂ© sociale abs
tre les officiers et la troupe. Je me souviens de son air surpris et peinĂ© lorsqucrue non au courant lâappela Señor. « Comment ! Señor ! Quâest donc celuiappelle Señor ? Ne sommes-nous pas tous des camarades ? » Je ne crois pas quendit sa tĂąche plus facile. En attendant on ne soumettait les bleus Ă aucun entraĂźnemlitaire qui pĂ»t leur ĂȘtre de quelque utilitĂ©. On mâavait informĂ© que les Ă©tran
Ă©taient pas tenus de suivre « lâinstruction » (les Espagnols, Ă ce que je remaraient la touchante conviction que nâimporte quel Ă©tranger sây connaissait mieux quur tout ce qui avait trait au mĂ©tier militaire), mais naturellement je fis comm
tres. Jâavais le vif dĂ©sir dâapprendre Ă me servir dâune mitrailleuse ; je nâavais jamaccasion dâen manier une. Mais je mâaperçus avec consternation quâon ne seignait aucun maniement dâarmes. La prĂ©tendue instruction militaire consrement et simplement Ă faire lâexercice sur la place dâarmes, et le genre dâexerci
us dĂ©suet, le plus stupide : demi-tour Ă droite, demi-tour Ă gauche, marchmmandement, en colonne par trois, etc., bref toutes les inutiles idioties qapprenait Ă quinze ans. DrĂŽle de maniĂšre dâentraĂźner une armĂ©e de guĂ©rillas ! urtant lâĂ©vidence mĂȘme que si vous ne disposez que de quelques jours pour instsoldat, câest ce quâil a le plus besoin de savoir que vous devez lui enseigner :
otĂ©ger, Ă avancer en terrain dĂ©couvert, Ă monter la garde et Ă construire un parapetant tout, Ă se servir de ses armes. Or, Ă cette troupe dâenfants ardents quâon allait u jeter en premiĂšre ligne, on nâapprenait mĂȘme pas Ă tirer un coup de feu, ni Ă arragoupille de sĂ»retĂ© dâune grenade. Sur le moment je ne me rendis pas compte que crce quâon nâavait pas dâarmes Ă distribuer. Dans les milices du P.O.U.M. le manqusils Ă©tait tel que les troupes fraĂźches Ă©taient toujours obligĂ©es, Ă leur arrivĂ©e au femprunter ceux des unitĂ©s quâelles relevaient. Dans toute la caserne LĂ©nine, je âil nây avait pas dâautres fusils que ceux des sentinelles.
Au bout de peu de jours, bien que nous ne fussions encore vraiment quâune comparĂ©s Ă toute troupe digne de ce nom, on nous estima prĂȘts Ă paraĂźtre en publicus mena, le matin, aux Jardins publics, sur la colline au-delĂ de la place dâEspaĂ©tait lâhabituel terrain de manĆuvres de toutes les milices de partis et aussirabiniers et des premiers contingents de lâarmĂ©e populaire tout nouvellement forĂ©tait, lĂ -haut, un spectacle Ă©trange, exaltant. Dans tous les chemins et toutes les alrmi les parterres de fleurs, des hommes par escouades et compagnies marchaient, sens, puis dans lâautre, raidis, bombant le torse, sâefforçant dĂ©sespĂ©rĂ©ment dâavoirsoldats. Nul nâavait dâarme, pas un ne portait, complet, lâuniforme des milice
aucoup en arboraient des piĂšces dĂ©tachĂ©es. Lâemploi du temps ne variait jam
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ndant trois heures nous faisions des effets de torse au petit trot (le pas des Espagt trĂšs court et rapide), puis nous faisions halte, rompions les rangs et, assoiffĂ©s, ions en foule Ă mi-cĂŽte dans la boutique dâun petit Ă©picier qui faisait des affaires dâondant du vin Ă bon marchĂ©. Mes camarades me tĂ©moignaient tous beaucoup dâam
n qualitĂ© dâAnglais jâĂ©tais une espĂšce de curiositĂ© ; les officiers des carabiniers faismoi grand cas et mâoffraient Ă boire. Cependant, chaque fois que je pouvais m
tre lieutenant au pied du mur, je rĂ©clamais Ă cor et Ă cri quâon mâapprĂźt Ă me sune mitrailleuse. Je tirais de ma poche mon dictionnaire Hugo et je lâentreprenais
on exécrable espagnol :« Yo sé manejar fusil. No sé manejar ametralladora. Quiero apre
metralladora. CuĂĄndo vamos aprender ametralladora ? »Et toujours je recevais en rĂ©ponse un sourire tourmentĂ© et la promesse quâil y a
aniement de mitrailleuse mañana. Inutile de dire que ce mañana ne vint jamusieurs jours passĂšrent et les recrues apprirent Ă marcher au pas, Ă se mettre preec promptitude au garde-Ă -vous, mais si elles savaient par quel bout du fusil solle, câĂ©tait bien tout. Un jour, un carabinier armĂ© vint Ă flĂąner de notre cĂŽtĂ© au mom
la pause et nous permit dâexaminer son fusil. Il apparut que dans toute ma secoi exceptĂ©, nul ne savait seulement charger un fusil, encore moins viser.Pendant ce temps-lĂ je me battais avec la langue espagnole. Ă part moi, il nây
âun autre Anglais dans la caserne, et personne, mĂȘme parmi les officiers, ne connaimot de français. Ce qui compliquait encore les choses pour moi, câĂ©tait le fait que
mpagnons dâarmes, lorsquâils parlaient entre eux, employaient gĂ©nĂ©ralement le catseule façon de me tirer dâaffaire Ă©tait dâemporter partout avec moi un petit dictione je tirais vivement de ma poche dans les moments critiques. Mais câest encorpagne que je prĂ©fĂšre ĂȘtre un Ă©tranger plutĂŽt que dans la plupart des autres pays.
n se fait facilement des amis en Espagne ! Dans lâespace dâun jour ou deux Ă peinet dĂ©jĂ une vingtaine de miliciens pour mâappeler par mon prĂ©nom, me passeryaux et me combler de gestes dâhospitalitĂ©. Ce nâest pas un livre de propagandecris et je ne cherche pas Ă idĂ©aliser les milices du P.O.U.M. Le systĂšme des milicestier prĂ©sentait de graves dĂ©fauts, et les hommes eux-mĂȘmes formaient un ensemtĂ©roclite, car Ă cette Ă©poque le recrutement volontaire Ă©tait en baisse et beau
entre les meilleurs étaient déjà sur le front ou tués. Il y avait toujours parmi nourtain pourcentage de bons à rien. Des garçons de quinze ans étaient amenés au bu
enrĂŽlement par leurs parents, ouvertement Ă cause des dix pesetas par jour que touaque milicien, et aussi du pain, reçu en abondance par les milices et quâon portir en fraude de la caserne et apporter chez soi. Mais je dĂ©fie qui que ce soit douver brusquement, comme il mâarriva, au sein de la classe ouvriĂšre espagnole vrais peut-ĂȘtre dire : catalane, car hormis quelques Aragonais et quelques Andalouai Ă©tĂ© quâavec des Catalans â et de nâĂȘtre pas frappĂ© par le sens innĂ© quâils ont dgnitĂ© humaine, et surtout par leur droiture et leur gĂ©nĂ©rositĂ©. La gĂ©nĂ©rositĂ© pagnol, dans lâacception courante du terme, est parfois presque embarrassante : si demandez une cigarette, câest tout le paquet quâil vous force Ă prendre. Et aussi ieux une gĂ©nĂ©rositĂ© dâune nature plus profonde, une grandeur dâĂąme rĂ©elle don
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ncontrĂ© maint et maint exemple sous les apparences les moins prometteuses. Cerurnalistes et dâautres Ă©trangers qui firent un voyage en Espagne durant la guerreclarĂ© quâen secret les Espagnols Ă©prouvaient une amĂšre mĂ©fiance Ă lâĂ©gard de lrangĂšre. Tout ce que je puis dire câest que je nâai jamais observĂ© rien de tel. Jeppelle que, peu de jours avant mon dĂ©part de la caserne, un certain nombre dâhomrivĂšrent du front, en permission. Ils parlaient avec une vive Ă©motion de ce quâils av
et ressenti et ils Ă©taient enthousiasmĂ©s par des troupes françaises qui sâĂ©touvĂ©es dans le secteur voisin du leur devant Huesca. Les Français ont Ă©tĂ© trĂšs br
saient-ils ; et ils ajoutaient avec admiration : MĂĄs valientes que nosotros ! â « aves que nous ! » Naturellement je dis que jâhĂ©sitais Ă le croire ; alors ils expliquĂše les Français en savaient plus long quâeux pour ce qui Ă©tait de lâart de la guervaient mieux se servir des grenades, des mitrailleuses, etc. Mais la remarque gnificative. Un Anglais se fĂ»t coupĂ© la main plutĂŽt que dâen faire une semblable.
Tout Ă©tranger qui servait dans les milices passait ses premiĂšres semainprendre Ă aimer les Espagnols et Ă ĂȘtre exaspĂ©rĂ© par certains de leurs traitractĂšre. En ce qui me concerne, lâexaspĂ©ration alla parfois jusquâĂ la fureur.
pagnols sont capables de beaucoup de choses, mais pas de faire la guerre. Ils plonns la consternation tous les Ă©trangers sans exception par leur incompĂ©tence et surr leur inexactitude, Ă rendre fou. Le seul mot espagnol quâun Ă©tranger ne puisse pas apprendre, câest mañana â « demain » (littĂ©ralement : « demain matin »). DĂšs existe la moindre possibilitĂ©, les occupations du jour sont remises Ă mañana. Tr
toire que les Espagnols eux-mĂȘmes en plaisantent. Rien, en Espagne, quâil sâagissepas ou dâune bataille, nâa jamais lieu Ă lâheure fixĂ©e. En retard, dans la gĂ©nĂ©ralitĂ©s, mais de temps en temps â si bien que vous ne pouvez mĂȘme pas tabler sur le reĂ©sumĂ© â en avance. Un train qui doit partir Ă huit heures part normalement entre
dix heures, mais une fois par semaine peut-ĂȘtre, en vertu de quelque caprice persomĂ©canicien, il part Ă sept heures et demie. Ce sont de ces choses qui risquent de
ntrarier un peu. En principe jâadmire plutĂŽt les Espagnols de ne pas partager nrdique nĂ©vrose du temps ; mais, malheureusement, moi je la partage.
AprĂšs toutes sortes de faux bruits, de mañana et de remises, lâordre de notre dĂ©t brusquement donnĂ©, ne nous laissant quâun dĂ©lai de deux heures pour ĂȘtre prĂȘts, e la majeure partie de notre Ă©quipement ne nous avait pas encore Ă©tĂ© distribuĂ©e. Qusculade dans le magasin de lâofficier de dĂ©tail ! Et en fin de compte, plus dâun hom
t sâen aller avec un Ă©quipement incomplet. La caserne sâĂ©tait aussitĂŽt emplimmes comme jaillies de terre ; chacune aidait son homme Ă rouler sa couverturessembler son barda. Ă ma grande humiliation je dus me faire montrer la fattacher ma cartouchiĂšre, reçue Ă lâinstant, par une jeune Espagnole, la femmilliams, lâautre milicien anglais. Douce, les yeux noirs, dâune extrĂȘme fĂ©minitĂ©mblait faite pour nâavoir dâautre tĂąche dans la vie que de balancer un berceau ; mat elle avait vaillamment combattu dans la guerre de rues en juillet. Elle Ă©tait enceinnfant naquit juste dix mois aprĂšs le dĂ©but de la guerre : peut-ĂȘtre avait-il Ă©tĂ© corriĂšre une barricade.
Notre train devait partir Ă huit heures ; ce nâest que vers huit heures dix qu
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ficiers, harassĂ©s, trempĂ©s de sueur, rĂ©ussirent enfin Ă nous rassembler dans la cuel vif souvenir je garde de cette scĂšne ! Le tumulte et lâanimation ; les drapeaux rottant dans la lueur des torches ; en rangs serrĂ©s les miliciens, sac au dos et couveulĂ©e en bandouliĂšre ; et les appels et les bruits de bottes et de gamelles ; puis un furup de sifflet qui rĂ©clamait le silence et finalement lâobtint ; et alors lâallocutiotalan dâun commissaire politique qui se tenait sous les plis ondulants dâun immendard rouge. Enfin on nous mena Ă la gare, par le chemin le plus long â trois ou quomĂštres â, afin de nous faire voir Ă la ville entiĂšre. Sur les Ramblas on nous fit
lte, cependant quâune musique dâemprunt jouait quelques airs rĂ©volutionnaires.s de plus toute la montre du hĂ©ros-conquĂ©rant : acclamations et enthousiaapeaux rouges ou rouge et noir partout, foules bienveillantes se pressant suottoirs pour nous voir, adieux des femmes aux fenĂȘtres. Comme tout cela paraiors naturel ! Que cela paraĂźt Ă prĂ©sent reculĂ© dans le temps et invraisemblable !
Le train Ă©tait Ă tel point bondĂ© dâhommes quâil ne restait guĂšre dâespace inocr le sol â inutile de parler des banquettes. Au tout dernier moment la femmilliams arriva en courant sur le quai et nous tendit une bouteille de vin et un d
Ăštre de cette saucisse rutilante qui a goĂ»t de savon et vous donne la diarrhĂ©e.Et le train se mit en devoir de sortir de la Catalogne et de gagner le plateau dâArrampant Ă la vitesse, normale en temps de guerre, dâun peu moins de vingt kilom
âheure.
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II
Barbastro, bien que situĂ©e loin du front, avait lâair morne et saccagĂ©e. Des gromiliciens, en uniformes usĂ©s jusquâĂ la corde, arpentaient les rues, tĂąchant d
chauffer. Sur un mur en ruine je vis une affiche datant de lâannĂ©e prĂ©cĂ©dnonçant la date de la mise Ă mort dans lâarĂšne de « six beaux taureaux ». Q
pression dĂ©solante elle faisait avec ses couleurs fanĂ©es ! OĂč Ă©taient Ă prĂ©sent les bureaux et les beaux torĂ©adors ? MĂȘme Ă Barcelone, il y avait bien rarement Ă lâhtuelle une course de taureaux ; je ne sais pour quelle raison tous les meilleurs mataaient fascistes.
Ma compagnie fut envoyĂ©e par camions dâabord Ă Sietamo, puis vers lâecubierre, juste Ă lâarriĂšre-front de Saragosse. On sâĂ©tait disputĂ© Sietamo Ă trois repant que les anarchistes ne sâen fussent finalement emparĂ©s en octobre, aussi la ait-elle en partie dĂ©truite par les obus, et la plupart des maisons Ă©taient grĂȘlĂ©es de t
balles. Nous Ă©tions Ă 1 500 pieds au-dessus du niveau de la mer. Il faisait bigrem
oid, avec ce brouillard Ă couper au couteau qui montait on ne savait dâoĂčurbillonnant. Entre Sietamo et Alcubierre le conducteur du camion sâĂ©gara (câĂ©taose courante et une des particularitĂ©s de cette guerre) et pendant des heures rĂąmes dans le brouillard. La nuit Ă©tait avancĂ©e quand nous arrivĂąmes Ă Alcubiuelquâun nous pilota Ă travers les fondriĂšres jusquâĂ une Ă©curie Ă mulets oĂč nous ssĂąmes tomber sur de la balle et, nous y enfouissant, nous nous endormmĂ©diatement. La balle, quand elle est propre, nâest pas dĂ©sagrĂ©able pour y dorm
oins agrĂ©able que le foin, mais plus agrĂ©able que la paille. Ce nâest quâĂ la lumiĂšr
ur que je me rendis compte que celle oĂč nous avions dormi Ă©tait pleine de croĂ»tonin, de journaux dĂ©chirĂ©s, dâos, de rats morts et de boĂźtes de lait condensĂ© videsrds dĂ©chiquetĂ©s.
Nous Ă©tions Ă prĂ©sent Ă proximitĂ© du front, assez prĂšs pour sentir lâoractĂ©ristique de la guerre : dâaprĂšs mon expĂ©rience personnelle, une oexcrĂ©ments et de denrĂ©es avariĂ©es. Alcubierre nâavait jamais reçu dâobus et Ă©tait mdommagĂ©e que la plupart des villages de lâimmĂ©diat arriĂšre-front. Mais je croisĂȘme en temps de paix, on ne devait pouvoir voyager dans cette partie de lâEspagne re frappĂ© par la misĂšre toute particuliĂšre et sordide des villages aragonais. Ils sont
mme les places fortes, une agglomĂ©ration de minables petites masures de pierre rchis se pressant autour de lâĂ©glise, et mĂȘme au printemps lâon nây voit Ă peu prĂšs nrt une fleur. Les maisons nâont pas de jardins, seulement des arriĂšre-cours oĂčlatiles Ă©tiques patinent sur des couches de crottin de mulet. Il faisait un sale teouillard et pluie alternant. Les Ă©troites routes de terre, comme barattĂ©es, Ă©tansformĂ©es en bourbiers, profonds par endroits de deux pieds, oĂč les camionbattaient, leurs roues affolĂ©es, tandis que les paysans les franchissaient avec lossiĂšres charrettes qui Ă©taient tirĂ©es par des mulets, six Ă la file parfois, toujours at
flĂšche. Les continuelles allĂ©es et venues de troupes avaient mis le village dans unsaletĂ© indescriptible. Il ne possĂ©dait pas, nâavait jamais possĂ©dĂ©, quelque chose
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ssemblĂąt Ă un water-closet ou Ă un Ă©gout quelconque, et il ne restait nulle parpace dâun mĂštre carrĂ© oĂč pouvoir marcher sans devoir regarder oĂč lâon posait le Ă©glise servait depuis longtemps de latrines, et de mĂȘme tous les champs, sur quelntaines de mĂštres Ă la ronde. Je ne peux me remĂ©morer mes deux premiers moierre sans me souvenir des chaumes hivernaux avec leurs lisiĂšres encroĂ»
excrĂ©ments.Deux jours passĂšrent et lâon ne nous distribuait toujours pas de fusils. Lorsq
ait allĂ© au siĂšge du comitĂ© de la Guerre et quâon avait contemplĂ© la rangĂ©e de trous
mur â des trous faits par un feu de salve (câĂ©tait lĂ quâon avait fusillĂ© plusiscistes) â on avait tout vu des curiositĂ©s dâAlcubierre. LĂ -haut, en premiĂšre ligne,ait manifestement calme, on Ă©vacuait trĂšs peu de blessĂ©s. La principale distractait lâarrivĂ©e des dĂ©serteurs fascistes descendant du front sous bonne garde. Dan
cteur, une bonne part des troupes du cĂŽtĂ© adverse nâĂ©taient pas du tout fascistes, mposĂ©es de malheureux conscrits qui Ă©taient en train de faire leur service militairoment oĂč la guerre avait Ă©clatĂ© et qui nâĂ©taient que trop dĂ©sireux de sâĂ©chappermps Ă autre, par petites fournĂ©es, ils se risquaient Ă se glisser jusquâĂ nos lignes ;
ute eussent-ils Ă©tĂ© plus nombreux Ă le faire si leurs parents ne sâĂ©taient pas trouvĂ©rritoire fasciste. Ces dĂ©serteurs Ă©taient les premiers « fascistes » en chair et en os qyais ; et ce qui me frappa câest que la seule chose qui permĂźt de les distinguer de ntait le fait quâils portaient une salopette kaki. Ils avaient toujours une faim de and ils arrivaient et câĂ©tait bien naturel aprĂšs avoir passĂ© un jour ou deux Ă faire
urs et des dĂ©tours dans le no manâs land â mais lâon ne manquait jamaiomphalement citer cela comme une preuve que les troupes fascistes mouraienm. Jâai, un jour, eu lâoccasion de voir, dans la maison dâun paysan, un dĂ©ser
anger. CâĂ©tait un spectacle Ă faire pitiĂ© : un grand gars de vingt ans, trĂšs hĂąlĂ©
tements en loques, Ă©tait accroupi tout prĂšs du feu et mangeait gloutonnementeine gamelle de ragoĂ»t en se hĂątant le plus quâil pouvait et sans cesser de faire allergard craintif de lâun Ă lâautre des miliciens qui, debout en cercle autour de lugardaient manger. Je pense quâil devait ĂȘtre encore Ă demi convaincu que nous Ă©s « rouges » assoiffĂ©s de sang et que nous allions le fusiller dĂšs quâil aurait terminĂ©pas ; les hommes armĂ©s qui le gardaient lui tapaient sur lâĂ©paule et le rassuruyamment. Certain jour mĂ©morable, quinze dĂ©serteurs arrivĂšrent Ă la fois. On les mtriomphe Ă travers le village, en les faisant prĂ©cĂ©der dâun homme montĂ© sur un ch
anc. Je trouvai moyen dâen prendre une photographie plutĂŽt floue, que par la suite vola. Au matin de notre troisiĂšme jour Ă Alcubierre, les fusils arrivĂšrent. Un sergen
age rude et basanĂ© les distribua dans lâĂ©curie Ă mulets. Jâeus un accĂšcouragement quand je vis ce quâon me donnait : un Mauser allemand qui portait la1896 ! vieux de plus de quarante ans ! Il Ă©tait rouillĂ©, la culasse mobile fonction
al, la sous-garde en bois Ă©tait fendue, et il suffisait de jeter un seul coup dâĆil me pour voir quâelle Ă©tait irrĂ©mĂ©diablement corrodĂ©e. La plupart des autres fualement, Ă©taient mauvais, quelques-uns mĂȘme pires encore ; et lâon ne chercha ms Ă donner les meilleures armes aux hommes qui savaient sâen servir. Le meilleur
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lot fut donnĂ© Ă une petite brute de quinze ans, faible dâesprit, que tous appelaiearicĂČn (la « tapette »). Le sergent nous octroya cinq minutes dâ« instruction »nsista Ă nous expliquer la maniĂšre de charger un fusil et de dĂ©monter la culasse.mbre de miliciens nâavaient encore jamais eu un fusil entre les mains, et rares Ă©tapense, ceux qui savaient Ă quoi sert la mire. On nous distribua les cartou
nquante par homme, puis on nous fit mettre en rangs, barda au dos, et en route poont, Ă trois kilomĂštres de lĂ .
La « centurie », quatre-vingts hommes et plusieurs chiens, se dé
Ă©guliĂšrement sur le chemin en montant la cĂŽte. Ă toute colonne de miliciens achĂ© au moins un chien, comme mascotte. Un pauvre animal qui nous accompaait Ă©tĂ© marquĂ© au fer chaud, il portait lâinscription « P.O.U.M. » en Ă©normes lettresait une maniĂšre furtive de se glisser le long de la colonne comme sâil se rendait comâil y avait quelque chose dans son aspect qui clochait.
En tĂȘte de la colonne, Ă cĂŽtĂ© du drapeau rouge, allait Georges Kopp, nmmandant, un Belge corpulent, montĂ© sur un cheval noir ; un peu en avant un jvalier â de cette cavalerie des milices qui avait lâair dâune bande de brigan
racolait, escaladait au galop chaque éminence de terrain et, arrivé au sommet, pres poses pittoresques. Les splendides chevaux de la cavalerie espagnole avaient été sgrand nombre au cours de la révolution et avaient été remis aux milices qui,
tendu, Ă©taient en train de les Ă©reinter.La route serpentait entre des champs jaunis, incultes, laissĂ©s Ă lâabandon depu
oisson de lâannĂ©e prĂ©cĂ©dente. Devant nous sâĂ©tendait la basse sierra qui sĂ©cubierre de Saragosse. Nous approchions des premiĂšres lignes ; nous approchionmbes, des mitrailleuses et de la boue. En secret jâavais peur. Je savais quâactuellemfront Ă©tait calme, mais, Ă la diffĂ©rence de la plupart de ceux qui mâentouraient, jâ
sez ĂągĂ© pour me souvenir de la Grande Guerre, si je ne lâĂ©tais pas assez pour lâate. La guerre, pour moi, cela signifiait le rugissement des projectiles, et des Ă©
obus qui sautent ; cela signifiait surtout la boue, les poux, la faim et le froid. rieux, mais jâapprĂ©hendais le froid beaucoup plus que je ne redoutais lâennemi. Lfroid mâavait sans cesse hantĂ© pendant que jâĂ©tais Ă Barcelone ; jâavais mĂȘme passits blanches Ă me reprĂ©senter le froid dans les tranchĂ©es, les alertes dans les a
nistres, les longues heures de faction avec dans les mains un fusil givré, la boue glaje pataugerais.
Jâavoue, aussi, que jâĂ©prouvais une sorte dâeffroi en considĂ©rant mes compagnn ne peut sâimaginer Ă quel point nous avions lâair dâune cohue. Nous marchionsbandade, en gardant beaucoup moins de cohĂ©sion encore quâun troupeau de moutant dâavoir fait deux kilomĂštres, lâarriĂšre-garde de la colonne fut hors de vue. Etnne moitiĂ© de ces soi-disant hommes Ă©taient des enfants â jâentends tĂ©ralement, des enfants de seize ans au plus. Et cependant ils Ă©taient tous heureux
sentaient pas de joie Ă la perspective dâĂȘtre enfin sur le front. Comme nouprochions, les jeunes garçons qui, en tĂȘte, entouraient le drapeau rouge, se mireer : « Visca P.O.U.M. ! â fascistas-maricones ! » etc. Ils sâimaginaient pousser
ameurs guerriÚres et menaçantes, mais sortant de ces gosiers enfantins,
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oduisaient un effet aussi attendrissant que des miaulements de chatons. Il me semfreux que les dĂ©fenseurs de la RĂ©publique, ce fĂ»t cette bande dâenfants en guenrtant des fusils hors dâusage et dont ils ne savaient mĂȘme pas se servir ! Jemandai, il mâen souvient, ce qui arriverait si un avion fasciste venait Ă nous survomĂȘme lâaviateur se donnerait la peine de piquer sur nous et de nous envoyer une r
mitrailleuse. SĂ»rement, mĂȘme de lĂ -haut, il pourrait se rendre compte que Ă©tions pas de vrais soldats.
Comme la route sâengageait dans la sierra, nous obliquĂąmes vers la droit
mpĂąmes par un Ă©troit sentier muletier qui serpentait Ă flanc de montagne. Dans rtie de lâEspagne, les monts sont de formation curieuse : en fer Ă cheval, avecmmets assez plats et des versants trĂšs abrupts qui plongent dans de larges ravins pentes supĂ©rieures rien ne pousse, que des arbustes rabougris et de la bruyĂšre, esements blancs du calcaire saillent partout. Le front, dans ce secteur, nâĂ©tait pasne continue de tranchĂ©es, mais tout simplement un cordon de postes fortiformĂ©ment appelĂ©s « positions », perchĂ©s sur chacun des sommets. De loin on poir notre « position » situĂ©e Ă la courbe du fer Ă cheval : une barricade mal faite de
terre, un drapeau rouge qui flottait, la fumĂ©e de feux de cagnas. Dâun peu plus prĂšsuvait sentir une Ă©cĆurante puanteur douceĂątre qui mâest ensuite restĂ©e des semans les narines. Dans la crevasse qui se trouvait juste derriĂšre notre position on jpuis plusieurs mois toutes les ordures â il y avait lĂ une Ă©paisse couche putridoĂ»tons de pain, dâexcrĂ©ments et de boĂźtes de conserves rouillĂ©es.
Les hommes de la compagnie que nous relevions Ă©taient en train de rassemblerurbi. Ils venaient de passer trois mois en ligne ; leurs uniformes Ă©taient plaquĂ©ue, leurs bottes sâen allaient en morceaux, et ils avaient le visage envahi de barbpitaine commandant la position, qui se nommait Levinski mais que tous appel
njamin, Juif polonais de naissance mais parlant le français comme sa laaternelle, sortit en rampant de son abri pour nous accueillir. CâĂ©tait un jeune homenviron vingt-cinq ans, de petite taille, avec des cheveux raides et noirs et un pĂąle vdent, toujours trĂšs sale en cette Ă©poque de guerre. On entendait claquer lĂ -elques balles perdues. La position Ă©tait une enceinte semi-circulaire dâenv
nquante mĂštres de diamĂštre ; son parapet Ă©tait fait Ă demi de sacs de terre, Ă democs de calcaire. Il y avait trente ou quarante abris qui sâenfonçaient dans le sol cos terriers. Vite nous nous engouffrĂąmes, Williams, moi-mĂȘme et le beau-frĂšre espa
Williams, dans le plus proche abri inoccupĂ© qui nous parut habitable. Quelque parfront en avant de nous, de temps en temps un coup de fusil claquait, Ă©veiĂ©tranges Ă©chos roulants parmi les collines rocailleuses. Nous venions de laisser tomterre notre barda et nous Ă©tions en train de ramper hors de lâabri quand il y euveau un claquement et lâun des enfants de notre compagnie, qui Ă©tait au parapeeta en arriĂšre, le visage ruisselant de sang. Il avait voulu tirer un coup de feu et, j
is comment, avait trouvĂ© moyen de faire sauter la culasse ; les Ă©clats de douillaient dĂ©chiquetĂ© le cuir chevelu. CâĂ©tait notre premier blessĂ© et, ce qui ractĂ©ristique, il sâĂ©tait blessĂ© lui-mĂȘme.
Dans le courant de lâaprĂšs-midi nous prĂźmes notre premier tour de gard
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njamin nous fit visiter la position. En avant du parapet courait un rĂ©seau de bollĂ©s dans le roc, avec des crĂ©neaux trĂšs primitifs faits dâentassements de bloclcaire. Il y avait douze sentinelles, postĂ©es de loin en loin dans la tranchĂ©e, derriĂšrapet intĂ©rieur. En avant de la tranchĂ©e on avait disposĂ© du barbelĂ© ; au-delĂ , le verontagneux dĂ©valait dans un ravin qui semblait sans fond ; en face, des colnudĂ©es, par endroits simples escarpements rocheux, tout gris et hivernaux, sans tvie nulle part, sans mĂȘme un oiseau. Je risquai un coup dâĆil avec prĂ©caution par
eurtriÚre, cherchant à découvrir la tranchée fasciste.
« OĂč se trouve lâennemi ?Benjamin fit de la main un geste large :â Over zere (Benjamin parlait anglais â un anglais Ă©pouvantable) : LĂ -bas
utre cĂŽtĂ©.â Mais oĂč ? »DâaprĂšs lâidĂ©e que je me faisais de la guerre de tranchĂ©es, les fascistes eussent d
ouver Ă cinquante ou cent mĂštres. Or jâavais beau regarder, je ne voyais rien ; sans durs tranchĂ©es Ă©taient-elles bien camouflĂ©es. Mais tout dâun coup je dĂ©couvris
nsternation ce que montrait le geste de Benjamin : au sommet de la colline en facelĂ le ravin, Ă sept cents mĂštres au moins, le minuscule tracĂ© dâun parapet et un drauge et jaune â la position fasciste. Je fus indiciblement dĂ©sappointĂ©. Nulle part Ă©tions proches de lâennemi ! Ă cette distance nos fusils nâĂ©taient dâaucune utilitĂ©. Mt instant nous entendĂźmes des cris de surexcitation : deux fascistes, semblables dedes figurines grisĂątres, Ă©taient en train de grimper Ă quatre pattes le versant dĂ©nudcolline en face de nous. Benjamin se saisit du fusil de lâhomme le plus proche, visessa la dĂ©tente. Clic ! La cartouche rata ; cela me parut de mauvais augure.
Les nouvelles sentinelles ne furent pas plutĂŽt dans la tranchĂ©e quâelles entamĂš
e terrifiante fusillade au petit bonheur, sans rien viser en particulier. Jâapercevaiscistes, aussi infimes que des fourmis, qui se jetaient de cĂŽtĂ© et dâautre derriĂšrapet ; parfois un point noir, qui Ă©tait une tĂȘte, sâimmobilisait un instant, sâexpoec insolence. De toute Ă©vidence, il ne servait Ă rien de tirer. Mais au bout dâun oment la sentinelle Ă ma gauche, abandonnant son poste Ă la façon typiquepagnols, se coula auprĂšs de moi et se mit Ă me presser de tirer. Jâessayai dpliquer quâĂ cette distance et avec de tels fusils on ne pouvait toucher un hommer le plus grand des hasards. Mais ce nâĂ©tait quâun enfant et il nâarrĂȘtait pas de me
gne avec son fusil de tirer sur un des points noirs, et il grimaçait en montrant les dec lâair de convoitise dâun chien qui attend quâon lui jette un caillou. Je finis par mhausse Ă sept cents mĂštres et je lĂąchai le coup. Le point noir disparut. JâespĂšre qulle a passĂ© assez prĂšs de lui pour lui avoir fait faire un saut. CâĂ©tait la premiĂšre foa vie que je tirais un coup de feu sur un ĂȘtre humain.
Ă prĂ©sent que jâavais vu ce quâĂ©tait le front, jâĂ©tais profondĂ©ment rebutĂ©pelaient cela la guerre ! Nous nâĂ©tions mĂȘme pas Ă portĂ©e de lâennemi ! Je nâeus uci de ne pas laisser ma tĂȘte dĂ©passer du parapet. Mais un moment plus tard une ssa prĂšs de mon oreille avec un claquement rageur et alla sâenfoncer derriĂšre moi parados. HĂ©las ! je « saluai ». Toute ma vie je mâĂ©tais jurĂ© que je ne « saluerais » p
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emiĂšre fois quâune balle passerait au-dessus de moi ; mais il paraĂźt que câest un gstinctif, et presque tout le monde le fait au moins une fois.
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III
Dans la guerre de tranchĂ©es, cinq choses sont importantes : le bois Ă brĂ»lervres, le tabac, les bougies, et lâennemi. En hiver, sur le front de Saragosse, tel Ă©tait ur ordre dâimportance, lâennemi venait bon dernier. Les fascistes nâĂ©taient quntains insectes noirs que lâon voyait de temps Ă autre se dĂ©placer par bonds
Ă©occupation essentielle des deux armĂ©es Ă©tait de se protĂ©ger le plus possible du froiIl me faut dire en passant que durant tout le temps que jâai Ă©tĂ© en Espagne, je nâe trĂšs peu de combats. Je me trouvais sur le front dâAragon de janvier Ă mai, or e
nvier et fin mars il nây eut rien ou peu de chose Ă signaler dans ce secteur, excepruel. En mars on livra de sĂ©rieux combats autour de Huesca, mais personnelleme
y ai guĂšre participĂ©. Plus tard, en juin, il y eut lâattaque dĂ©sastreuse de Huesca au claquelle plusieurs milliers dâhommes trouvĂšrent la mort en un seul jour ; mais jâa
Ă© blessĂ©, mis hors de combat auparavant. Jâai rarement eu lâoccasion dâaffronter cen considĂšre habituellement comme les horreurs de la guerre. Aucun avion nâa ja
chĂ© de bombe dans mes alentours immĂ©diats, je ne crois pas quâun obus ait jaatĂ© Ă moins de cinquante mĂštres de moi, et je nâai pris part quâune seule fois Ă un c
corps. (Une seule fois, câest une fois de trop, je puis vous le dire !) Naturellement jis souvent trouvĂ© sous le feu nourri dâune mitrailleuse, mais la plupart du teassez loin. MĂȘme Ă Huesca on Ă©tait en gĂ©nĂ©ral relativement en sĂ©curitĂ©, si lâogligeait pas de prendre les prĂ©cautions raisonnables.
LĂ -haut, sur les hauteurs autour de Saragosse, câĂ©tait seulement lâennui combnconfort de la guerre de tranchĂ©es. On menait une vie aussi peu mouvementĂ©e que
un comptable de la City, et presque aussi rĂ©glĂ©e. Ătre en faction, aller en patroueuser ; creuser, aller en patrouille, ĂȘtre en faction. Au sommet de chaque Ă©minencescistes ou des loyalistes, un groupe dâhommes sales et loqueteux grelottant autouur drapeau et cherchant Ă avoir le moins froid possible. Et jour et nuit les balles pergarant dans les vallĂ©es dĂ©sertes et ne se logeant dans un corps humain que par que
re et invraisemblable hasard.Il mâarrivait souvent de contempler ce paysage hivernal en mâĂ©tonnan
nefficacité de tout cela. Quel caractÚre peu concluant a une guerre de ce genre ! Pluoctobre, on avait livré de furieux combats pour la possession de tous ces somm
is, le manque dâhommes et dâarmes, et surtout dâartillerie, rendant impossible tĂ©ration de grande envergure, chaque armĂ©e sâĂ©tait terrĂ©e et fixĂ©e sur les somâelle avait conquis.
LĂ -bas, Ă notre droite, se trouvait un petit avant-poste, Ă©galement du P.O.U.Mr lâĂ©peron Ă notre gauche, Ă sept heures de nous, une position du P.S.U.C. faisait faĂ©peron plus Ă©levĂ© sur les pics duquel sâĂ©grenaient plusieurs petits postes fasciste
Ă©tendue ligne faisait tant de zigzags quâon ne sây fĂ»t pas retrouvĂ© si chaque posavait battu pavillon. Les drapeaux du P.O.U.M. et du P.S.U.C. Ă©taient rouges, ceux
archistes, rouge et noir ; les fascistes faisaient généralement flotter le draonarchiste (rouge-jaune-rouge), mais parfois celui de la République (rouge-ja
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olet). CâĂ©tait un spectacle prodigieux â si lâon parvenait Ă oublier que chaque cime cupĂ©e par des troupes, et donc jonchĂ©e de boĂźtes de conserves vides et encroĂ»tĂ©jections. Sur notre droite la sierra sâinflĂ©chissait vers le sud-est et faisait place Ă la llĂ©e veinĂ©e qui sâĂ©tendait jusquâĂ Huesca. Au milieu de la plaine sâĂ©parpillaient, tels jetĂ©s, quelques cubes minuscules : câĂ©tait la ville de Robres, qui se trouvait en yaliste. Souvent, le matin, la vallĂ©e disparaissait sous une mer de nuages
mergeaient, comme posées à plat dessus, les collines bleues, ce qui donnait au paye étrange ressemblance avec une épreuve négative de photographie. Au-delà de Hu
y avait encore des collines de mĂȘme formation que la nĂŽtre, et que la neige panachaotifs variant de jour en jour. Au loin, les pics monstrueux des PyrĂ©nĂ©es, oĂč la neignd jamais, semblaient flotter dans le vide. MĂȘme en bas, dans la plaine, tout paraiort et dĂ©nudĂ©. Les collines, en face de nous, Ă©taient grises et plissĂ©es comme la peauĂ©phants. Presque toujours le ciel Ă©tait vide dâoiseaux. Je ne crois pas avoir jamais vys oĂč il y eĂ»t si peu dâoiseaux. Les seuls quâon voyait parfois Ă©taient des sortes de les vols de perdrix dont les bruissements soudains vous faisaient tressaillir, le soi
ais trÚs rarement, des aigles voguant lentement et généralement accueillis par
ups de feu quâils ne daignaient mĂȘme pas remarquer.La nuit et par temps brumeux, on envoyait des patrouilles dans la vallĂ©e qui parait des fascistes. CâĂ©tait une mission peu apprĂ©ciĂ©e : il faisait trop froid et le risâĂ©garer Ă©tait trop grand. Je vis bien vite que je pouvais obtenir lâautorisation dâalltrouille chaque fois que jâen avais envie. Dans les immenses ravins aux arĂȘtes viv
y avait ni sentiers ni pistes dâaucune sorte ; vous nâarriviez Ă trouver votre cheâaprĂšs y avoir Ă©tĂ© plusieurs fois de suite en reconnaissance, en prenant soin de reaque fois de nouveaux points de repĂšre. Ă vol dâoiseau le poste fasciste le plus prait Ă sept cents mĂštres de nous, mais Ă plus de deux kilomĂštres par lâunique
aticable. CâĂ©tait assez amusant dâerrer dans les vallĂ©es obscures tandis quâau-dessus tĂȘtes, trĂšs haut, les balles perdues passaient en sifflant comme des bĂ©casseaux. Mlait dâĂ©pais brouillards que lâobscuritĂ© de la nuit, et souvent ils persistaient tout lesâaccrochaient autour des sommets cependant que les vallĂ©es restaient claire
oximitĂ© des lignes fascistes il fallait avancer Ă pas de tortue ; câĂ©tait trĂšs difficile dplacer sans bruit sur ces pentes, parmi les arbustes craquelants et les pierres calci tintaient. Ce ne fut quâĂ la troisiĂšme ou quatriĂšme tentative que je trouvai moyervenir jusquâaux lignes fascistes. Le brouillard Ă©tait trĂšs Ă©pais et jâallai en ram
squâaux barbelĂ©s pour Ă©couter. Jâentendis les fascistes parler et chanter Ă lâintĂ©rieuste. Soudain je fus alarmĂ© dâentendre plusieurs dâentre eux descendre la pente danrection. Je me blottis derriĂšre un buisson qui me parut brusquement bien petit, chai dâarmer sans bruit mon fusil. Mais ils obliquĂšrent et je ne les vis mĂȘme erriĂšre le buisson oĂč je me cachai, je trouvai divers vestiges du combat antĂ©rieur : u
douilles vides, une casquette de cuir percĂ©e dâun trou de balle, et un drapeau rougs nĂŽtres de toute Ă©vidence. Je le rapportai Ă la position oĂč, sans sâembarrassentiment, lâon en fit des chiffons Ă nettoyer.
Jâavais Ă©tĂ© nommĂ© caporal ou, comme lâon disait, cabo, dĂšs notre arrivĂ©e au frvais le commandement dâun groupe de douze hommes. Ce nâĂ©tait pas une sinĂ©
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rtout au dĂ©but. La centurie Ă©tait une bande non entraĂźnĂ©e composĂ©e en majeure padolescents. ĂĂ et lĂ on trouvait dans les milices des enfants qui nâavaient pas pluze ou douze ans, en gĂ©nĂ©ral des rĂ©fugiĂ©s des territoires fascistes, quâon avait incorpmme miliciens parce que câĂ©tait le moyen le plus simple de pourvoir Ă leur subsista
n principe on les employait Ă lâarriĂšre Ă de lĂ©gers travaux, mais parfois ils parvenaifaufiler jusquâen premiĂšre ligne oĂč ils Ă©taient un danger public. Je me rappelle un bĂ©cile qui ne trouva rien de mieux que de jeter une grenade Ă main dans le feu ri « pour faire une farce » ! Au Monte Pocero je ne crois pas quâil sâen trouvĂąt a
oins de quinze ans, mais nĂ©anmoins la moyenne dâĂąge Ă©tait bien au-dessous de vs. On ne devrait jamais faire servir des garçons de cet Ăąge en premiĂšre ligne, car ilscapables de supporter le manque de sommeil insĂ©parable de la guerre de tranchĂ©ebut il Ă©tait Ă peu prĂšs impossible dâobtenir que notre position fĂ»t convenablemrdĂ©e pendant la nuit. On nâarrivait Ă faire lever les pauvres enfants de ma section q tirant par les pieds hors de leurs abris, et dĂšs quâon avait tournĂ© le dosandonnaient leur poste et se reglissaient dans la cagna ; ou bien, si mĂȘmmeuraient appuyĂ©s contre la paroi de la tranchĂ©e, en dĂ©pit du froid terrible il
rdaient pas Ă succomber au sommeil. Heureusement lâennemi Ă©tait on ne peut mtreprenant. Il y eut des nuits oĂč notre position eĂ»t pu ĂȘtre prise dâassaut par vingtouts armĂ©s de carabines Ă air comprimĂ©, ou tout aussi bien par vingt girl-guides armraquettes.
Ă cette Ă©poque et longtemps encore les milices catalanes restĂšrent constituĂ©e mĂȘmes bases quâau dĂ©but de la guerre. Dans les premiers jours de la rĂ©bellioanco elles avaient Ă©tĂ© levĂ©es Ă la hĂąte par les diffĂ©rents syndicats et partis politiqacune dâelles Ă©tait au premier chef une organisation politique infĂ©odĂ©e Ă son partitant quâau gouvernement central. Quand, au dĂ©but de 1937, on leva lâarmĂ©e popul
i Ă©tait une armĂ©e « non politique » organisĂ©e tant bien que mal selon le type nor milices de partis y furent thĂ©oriquement incorporĂ©es. Mais longtemps encore il nâchangements que sur le papier ; aucun contingent de la nouvelle armĂ©e populair
onta sur le front dâAragon avant juin, et jusquâĂ cette date le systĂšme des mimeura inchangĂ©. Le point essentiel en Ă©tait lâĂ©galitĂ© sociale entre les officiers emmes de troupe. Tous, du gĂ©nĂ©ral au simple soldat, touchaient la mĂȘme scevaient la mĂȘme nourriture, portaient les mĂȘmes vĂȘtements, et vivaient ensemblpied dâune complĂšte Ă©galitĂ©. Si lâenvie vous prenait de taper dans le dos du gĂ©n
mmandant la division et de lui demander une cigarette, vous pouviez le fairrsonne ne sâen Ă©tonnait. En thĂ©orie en tout cas, chaque milice Ă©tait une dĂ©mocratn une hiĂ©rarchie. Il Ă©tait entendu quâon devait obĂ©ir aux ordres, mais il Ă©tait atendu que, lorsque vous donniez un ordre, câĂ©tait comme un camarade pĂ©rimentĂ© Ă un camarade, et non comme un supĂ©rieur Ă un infĂ©rieur. Il y avaitficiers et des sous-officiers, mais il nây avait pas de grades militaires au sens habs de titres, pas de galons, pas de claquements de talons ni de saluts obligatoirestait efforcĂ© de rĂ©aliser dans les milices une sorte dâĂ©bauche, pouvant provisoirem
nctionner, de sociĂ©tĂ© sans classes. Bien sĂ»r, ce nâĂ©tait pas lâĂ©galitĂ© parfaite, maavais encore rien vu qui en approchĂąt autant, et que cela fĂ»t possible en temps de gu
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Ă©tait pas le moins surprenant.Mais jâavoue que, tout dâabord, je fus horrifiĂ© de la façon dont allaient les chose
front. Comment diable une armĂ©e de ce genre pourrait-elle gagner la guerre ? CâĂ©tae tout le monde disait alors, mais cette remarque, pour ĂȘtre juste, nâen Ă©tait pas mraisonnable. Car, Ă©tant donnĂ© les circonstances, il nâĂ©tait pas possible que les missent sensiblement meilleures quâelles nâĂ©taient. Une armĂ©e moderne, mĂ©canisĂ©ergit pas de terre, et si le gouvernement avait attendu dâavoir Ă sa disposition des troen entraĂźnĂ©es, Franco nâeĂ»t jamais rencontrĂ© de rĂ©sistance. Par la suite, il devin
ode de dĂ©nigrer les milices et de prĂ©tendre que les imperfections, qui Ă©taient dueanque dâentraĂźnement et dâarmes, Ă©taient la consĂ©quence du systĂšme Ă©galitaire. En
contingent des milices nouvellement mis sur pied était bien une bande indiscipln pas parce que les officiers appelaient les simples soldats « camarades », mais pe toute troupe non aguerrie est toujours une bande indisciplinée. Dans la pratiq
scipline de type dĂ©mocratico-rĂ©volutionnaire est plus sĂ»re quâon ne pourrait crans une armĂ©e prolĂ©tarienne, la discipline est, par principe, obtenue par consentemlontaire. Elle est fondĂ©e sur le loyalisme de classe, tandis que la discipline dâune a
urgeoise de conscrits est fondĂ©e, en derniĂšre analyse, sur la crainte. (LâarmĂ©e popui remplaça les milices Ă©tait Ă mi-chemin entre ces deux types.) Dans les miliceeĂ»t pas supportĂ© un seul instant le rudoiement et les injures qui sont monnaie courns une armĂ©e ordinaire. Les habituelles punitions militaires demeuraient en viguais on nây recourait que dans le cas de fautes trĂšs graves. Quand un homme refobĂ©ir Ă un ordre, vous ne le punissiez pas sur-le-champ ; vous faisiez dâabord appel
nom de la camaraderie. Les gens cyniques, sans expĂ©rience du maniementmmes, diront aussitĂŽt que ce nâest pas possible que cela « marche » jamais ; mait, Ă la longue cela «marche ». Avec le temps la discipline mĂȘme des pires conting
milices sâamĂ©liora Ă vue dâĆil. En janvier la tĂąche de maintenir Ă la hauteuruzaine de recrues inaguerries faillit me donner des cheveux blancs. En mai, jndant quelque temps fonction de lieutenant Ă la tĂȘte dâune trentaine dâhom
nglais et Espagnols. Nous avions tous plusieurs mois de front et je nâai jamais rencomoindre difficultĂ© Ă faire exĂ©cuter un ordre ou Ă trouver des volontaires pourssion pĂ©rilleuse. La discipline « rĂ©volutionnaire » dĂ©coule de la conscience politiqfait dâavoir compris pourquoi il faut obĂ©ir aux ordres ; pour que cela se gĂ©nĂ©rali
ut du temps, mais il en faut aussi pour transformer un homme en automate Ă forc
faire faire lâexercice dans la cour de quartier. Les journalistes qui se gaussĂšrenstĂšme des milices ont le plus souvent oubliĂ© que les milices eurent Ă tenir le fndant que lâarmĂ©e populaire sâentraĂźnait Ă lâarriĂšre. Et câest un hommage Ă rendreliditĂ© de la discipline « rĂ©volutionnaire » que de constater que les milices demeurĂšr le champ de bataille. Car jusquâen juin 1937 il nây eut pour les y retenir que yalisme de classe. Il Ă©tait possible de fusiller des dĂ©serteurs individuels â il y en rfois de fusillĂ©s â mais si un millier dâhommes eussent dâun commun accord dĂ©ciditter le front Ă la fois, il ne se trouvait aucune force pour les en empĂȘcher. Une arconscrits dans les mĂȘmes conditions â en lâabsence dâune police militaire â eĂ»t fos milices, elles, tinrent le front et Dieu sait pourtant quâelles remportĂšrent pe
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ctoires ; mĂȘme les dĂ©sertions individuelles furent rares. En quatre ou cinq mois danlices du P.O.U.M. je nâai entendu parler que de quatre dĂ©serteurs, et encore est-il Ă Ăšs certain que deux dâentre eux Ă©taient des espions qui sâĂ©taient enrĂŽlĂ©s pour recus informations. Au dĂ©but, lâĂ©tat Ă©vident de confusion, le manque gĂ©n
entraĂźnement, le fait dâavoir souvent Ă discuter cinq minutes avant dâobtenir lâexĂ©cuun ordre, me consternaient et me mettaient en fureur. Ma façon de concevoir les chait celle de lâarmĂ©e britannique et, Ă©videmment, les milices espagnoles diffĂ©rtrĂȘmement de lâarmĂ©e britannique. Mais, Ă tenir compte des circonstances, elles se
vĂ©lĂ©es des troupes meilleures quâon nâĂ©tait en droit dâattendre.Pendant ce temps-lĂ , la grande question câĂ©tait le bois Ă brĂ»ler â toujours le b
Ă»ler. Durant toute cette pĂ©riode il nâest probablement pas une page de mon joutime qui ne parle du bois Ă brĂ»ler â ou plutĂŽt du manque de bois Ă brĂ»ler. Nous Ă©ttre deux et trois mille pieds au-dessus du niveau de la mer, en plein hiver, et le
ait indescriptible. La tempĂ©rature nâĂ©tait pas exceptionnellement basse, plus dâunene gela mĂȘme pas, et souvent un soleil hivernal brillait pendant une heure velieu du jour ; et mĂȘme si le thermomĂštre disait quâil ne faisait pas froid, nous, n
ions bel et bien froid, je vous assure. TantĂŽt dâaigres coups de vent vous arrachatre casquette et vous Ă©bouriffaient, tantĂŽt des brouillards se rĂ©pandaient dananchĂ©e comme un liquide et vous pĂ©nĂ©traient jusquâĂ la moelle ; il plequemment, et il suffisait dâun quart dâheure de pluie pour rendre la situa
supportable. La mince couche de terre qui recouvrait le calcaire se transforpidement en glu glissante, et comme il fallait toujours marcher sur une pente, il possible de garder lâĂ©quilibre. Par les nuits sombres il mâest souvent arrivĂ© de tome demi-douzaine de fois sur vingt mĂštres, et câĂ©tait dangereux parce que cela signe de la boue enrayait la platine de votre fusil. Durant des jours et des jours, vĂȘtem
ttes, couvertures et fusils demeuraient enduits de boue. Jâavais apportĂ© autantements chauds que jâen pouvais porter, mais beaucoup dâhommes Ă©taient terriblemu vĂȘtus. Pour toute la garnison, une centaine dâhommes environ, il nây avait que dpotes que devaient se passer les sentinelles, et la plupart des hommes nâavaient quule couverture. Une nuit oĂč lâon gelait, je dressai dans mon journal intime une listetements dont jâĂ©tais revĂȘtu. Cela prĂ©sente lâintĂ©rĂȘt de montrer quel amas de vĂȘtemcorps humain est capable de transporter. Jâavais sur moi un tricot et un caleçon Ă©
e chemise de flanelle, deux pull-overs, une veste de lainage, une en cuir, une culot
lours Ă cĂŽtes, des bandes molletiĂšres, dâĂ©paisses chaussettes, des bottes, un trenchnforcĂ©, un cache-nez, des gants de cuir fourrĂ©s et une casquette en laine. Et je ssonnais pas moins comme gelĂ©e de viande. Je suis, il est vrai, singuliĂšrement senfroid.
Le bois Ă brĂ»ler Ă©tait la seule chose qui importĂąt rĂ©ellement. La question, au bois Ă brĂ»ler, câĂ©tait que, pratiquement, on ne pouvait pas sâen procurer parce quâavait pas. Notre triste montagne, mĂȘme Ă la meilleure saison, nâoffrait guĂšr
gétation, et des mois durant elle avait été parcourue en tous sens par des miliansis, si bien que depuis longtemps tout ce qui était un peu plus gros que le doigt aé brûlé. Tout le temps que nous ne passions pas à manger, à dormir, à monter la g
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ĂȘtre de corvĂ©e, nous le passions dans la vallĂ©e, en arriĂšre de notre position, cherche de combustible. Dans tous mes souvenirs de ce temps-lĂ , je nous regringolant ou grimpant Ă quatre pattes des pentes presque verticales dont le calcaints de scie mettait nos bottes en piĂšces, et fondant comme des oiseaux de proie suus minuscules brindilles. Trois hommes, aprĂšs deux heures de recherches, parvenapporter assez de combustible pour entretenir pendant une heure un maigre feu d
ardeur que nous apportions Ă notre chasse au bois nous transformait toutanistes. Nous classions, selon leur valeur comme combustibles, toutes les plante
ussaient sur ce versant : il y avait les bruyĂšres et les herbes diverses qui Ă©taient bour faire prendre le feu mais qui se consumaient en quelques minutes ; le romuvage et de tout petits genĂȘts Ă©pineux qui consentaient Ă brĂ»ler une fois que le feuen pris ; un chĂȘne rabougri, plus petit quâun groseillier, qui Ă©tait pratiquemcombustible. Il y avait une sorte de roseau dessĂ©chĂ© qui Ă©tait parfait pour allumu, mais il ne croissait quâau sommet dâune hauteur Ă notre gauche, et pour y arrivlait essuyer le feu de lâennemi. Si les mitrailleurs fascistes vous apercevaient, iinaient pas Ă vous envoyer pour vous tout seul une caisse de munitions. GĂ©nĂ©ralem
visaient trop haut et les balles passaient au-dessus de votre tĂȘte en chantant cos oiseaux, mais parfois cependant elles crĂ©pitaient et faisaient voler le calcaire en Ă©ut prĂšs de vous de façon inquiĂ©tante, et alors vous vous flanquiez le visage contre tus nâen continuiez pas moins Ă aller cueillir des roseaux ; rien ne comptait Ă cĂŽtis Ă brĂ»ler.
ComparĂ©es au froid, les autres incommoditĂ©s semblaient insignifiaaturellement nous Ă©tions tout le temps sales. Notre eau, de mĂȘme que nos vivres, rvenait Ă dos de mulets dâAlcubierre, et la part de chacun se montait environ Ă unr jour. CâĂ©tait une eau infecte, Ă peine plus transparente que du lait. En princip
vait la rĂ©server toute pour la boisson, mais jâen resquillais toujours une pleine gamur ma toilette du matin. Je me lavais un jour et me rasais le lendemain ; il nây a
mais assez dâeau pour faire les deux le mĂȘme jour. La position puait abominablemeâextĂ©rieur de lâenceinte, Ă lâentour de la barricade, il y avait partout des dĂ©jectrtains miliciens avaient pris lâhabitude de se soulager dans la tranchĂ©e mĂȘme, cgoĂ»tante alors quâil nous fallait aller et venir dans lâobscuritĂ©. Mais la saletĂ© ne m
mais un tourment. On fait trop dâembarras au sujet de la saletĂ©. Câest Ă©tonnant comsâhabitue vite Ă se passer de mouchoir ou Ă manger dans la gamelle qui sert Ă©galem
e laver. Et aprĂšs un ou deux jours lâon ne trouve plus dur de dormir tout habillĂ©. Npouvions naturellement pas ĂŽter nos vĂȘtements, ni surtout nos bottes, la nuit ; il fre prĂȘt Ă sortir sur-le-champ en cas dâattaque. En quatre-vingts nuits je ne meshabillĂ© que trois fois, mais je mâarrangeais pour enlever mes vĂȘtements danurnĂ©e de temps Ă autre. Il faisait alors encore trop froid pour quâil y eĂ»t des poux, rats et les souris pullulaient. Jâai souvent entendu dire quâon ne trouve pas e
ĂȘme lieu rats et souris ; mais si, lorsquâil y a assez Ă manger pour les deux espĂšces. Ă dâautres Ă©gards nous nâĂ©tions pas mal lotis. La nourriture Ă©tait assez bonn
us avions du vin en abondance. Les cigarettes nous Ă©taient distribuĂ©es Ă raison quet par jour, les allumettes tous les deux jours, et il y avait mĂȘme une distributio
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ugies. CâĂ©taient des bougies trĂšs minces, comme celles du gĂąteau de NoĂ«l ; pposions-nous quâelles provenaient du pillage dâĂ©glises. Chaque abri en recevait uces par jour, ce qui donnait environ vingt minutes de lumiĂšre. Ă cette Ă©poque il core possible dâacheter des bougies et jâen avais apportĂ© plusieurs livres avec moisuite la privation dâallumettes et de bougies nous fut un supplice. On ne se rendmpte de lâimportance de ces choses tant quâon nâen a pas Ă©tĂ© privĂ©. Pendant une anuit, par exemple, alors que chacun dans lâabri est en train de chercher Ă quatre p
n fusil en marchant sur le visage de son voisin, avoir la possibilité de battre le bri
ut devenir une question de vie ou de mort. Chaque milicien possĂ©dait un briqumadou et plusieurs mĂštres de mĂšche jaune. AprĂšs son fusil câĂ©tait ce quâil possĂ©daus important. Les briquets Ă amadou prĂ©sentaient le grand avantage de pouvoirttus en plein vent mais, brĂ»lant sans flamme, on ne pouvait sâen servir pour allume
u. Au plus fort de la disette dâallumettes, le seul moyen que nous avions de faire je flamme, câĂ©tait de retirer la balle dâune cartouche et de faire exploser la corditntact du briquet Ă amadou.
CâĂ©tait une vie singuliĂšre que nous vivions â une singuliĂšre façon dâĂȘtre en guer
peut appeler cela la guerre. Tous les miliciens sans exception lançaient des brocntre lâinaction et continuellement demandaient Ă cor et Ă cri quâon leur dĂźt pour qson on ne nous permettait pas dâattaquer. Mais il Ă©tait on ne peut plus clair qu
ngtemps encore il nây aurait aucune bataille, Ă moins que lâennemi ne commeorges Kopp, lors de ses tournĂ©es dâinspection pĂ©riodiques, nous parlait sans amba
Ce nâest pas une guerre, disait-il souvent, câest un opĂ©ra-bouffe avec morts. » Ăre, lâĂ©tat de stagnation sur le front dâAragon avait des causes politiques dont jâignout Ă cette Ă©poque ; mais les difficultĂ©s dâordre purement militaire â sans parleanque de rĂ©serves en hommes â sautaient aux yeux de tous.
Tout dâabord il y avait la nature du pays. Le front, le nĂŽtre et celui des fascinsistait en des positions trĂšs fortes naturellement, qui nâĂ©taient en gĂ©nĂ©ral accesse dâun cĂŽtĂ©. Il suffit de creuser quelques tranchĂ©es pour rendre de telles pprenables par lâinfanterie, Ă moins que celle-ci ne soit en nombre accablant. Dans nsition ou dans la plupart de celles qui nous environnaient, une douzaine dâhomec deux mitrailleuses auraient pu tenir Ă distance un bataillon. PerchĂ©s sur les sommme nous lâĂ©tions, nous eussions fait de magnifiques cibles pour lâartillerie, mais ait pas dâartillerie. Parfois je contemplais le paysage alentour et me prenais Ă dĂ©sir
! avec quelle passion ! â deux bons canons. On aurait pu dĂ©truire les positionnnemi lâune aprĂšs lâautre aussi facilement que lâon Ă©crase des noix avec un marais de notre cĂŽtĂ© il nây avait absolument pas de canons. Les fascistes, eux, trouvoyen de temps Ă autre dâamener un ou deux canons de Saragosse et de lĂącher quelus, si peu quâils ne parvinrent jamais Ă rectifier leur tir et les obus sâen allaient tomns les ravins dĂ©serts sans faire aucun mal. En face de mitrailleuses, lorsquâon nâa
artillerie, on nâa le choix quâentre trois solutions : se terrer Ă distance respectabsons Ă quatre cents mĂštres â, ou avancer Ă dĂ©couvert et se faire massacrer, ou enre des attaques de nuit de faible envergure qui ne changeront rien Ă la situanĂ©rale. En fait, on se trouve en face de lâalternative : stagnation ou suicide.
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Et en outre il y avait le manque total de toute espĂšce de matĂ©riel de guerreagine difficilement Ă quel point les milices Ă©taient mal armĂ©es Ă cette Ă©poquimporte quel bataillon scolaire dâun grand Ă©tablissement dâenseignement secondai
ngleterre ressemble bien davantage Ă une armĂ©e moderne. La mauvaise qualitĂ© demes Ă©tait si effarante que cela vaut la peine dâen parler en dĂ©tail.
Dans ce secteur du front il nây avait pour toute artillerie que quatre mortiers ulement quinze coups Ă tirer pour chacun. Naturellement on ne les tirait pas, ils Ă©ten trop prĂ©cieux, et lâon gardait les mortiers Ă Alcubierre. Il y avait des mitraille
ns la proportion dâune pour cinquante hommes environ ; elles Ă©taient assez vieais dâune prĂ©cision approximative jusquâĂ trois ou quatre cents mĂštres. En dehora nous nâavions que des fusils, dont la plupart Ă©taient de la ferraille. Il y en ava
rvice trois types. Dâabord le long Mauser : les fusils de ce type-lĂ dataient raremenoins de vingt ans, leurs hausses Ă©taient Ă peu prĂšs aussi utilisables quâun indicateuesse cassĂ©, et le rayage de la plupart dâentre eux Ă©tait irrĂ©mĂ©diablement corrodĂ©sil sur dix environ Ă©tait acceptable, cependant. Puis il y avait le Mauser courtousqueton, arme de cavalerie en rĂ©alitĂ©. Ceux-ci Ă©taient plus apprĂ©ciĂ©s que les au
rce quâils Ă©taient plus lĂ©gers Ă porter et moins encombrants dans la tranchĂ©e, et arce quâils Ă©taient relativement rĂ©cents et avaient lâair de bien fonctionner. En fait ouvait Ă peu prĂšs pas sâen servir : ils Ă©taient constituĂ©s de piĂšces dĂ©tachĂ©es dĂ©pareillcun fusil nâavait sa propre culasse et les trois quarts dâentre eux sâenrayaient au bo
nq coups. Il y avait enfin quelques Winchesters. Avec ces derniers il Ă©tait agrĂ©aber, mais leur tir Ă©tait tout Ă fait dĂ©rĂ©glĂ©, et comme ils Ă©taient armĂ©s de cartouches argeurs, on ne pouvait tirer quâun coup Ă la fois. Les munitions Ă©taient si raresaque homme, Ă son arrivĂ©e au front, ne touchait que cinquante cartouches doupart Ă©taient extrĂȘmement mauvaises. Les cartouches de fabrication espagnole Ă©t
utes sans exception faites de douilles récupérées et rechargées, et elles auraientnrayer les meilleurs fusils. Les cartouches mexicaines étaient meilleures, auss
servait-on pour les mitrailleuses. Les meilleures de toutes Ă©taient les munitionbrication allemande, mais comme elles nous Ă©taient fournies uniquement paisonniers et les dĂ©serteurs, nous nâen avions pas beaucoup. Je gardais toujours danche un chargeur de cartouches allemandes ou mexicaines pour mâen servir en cauation critique. Mais, en fait, quand cela arrivait, je tirais rarement un coup de vais bien trop peur de voir ce sale engin sâenrayer et jâavais trop souci de me rĂ©serv
ssibilitĂ© de faire Ă coup sĂ»r partir une balle.Nous nâavions ni casques ni baĂŻonnettes, presque pas de pistolets ou de revolves plus dâune bombe par groupe de cinq Ă dix hommes. La bombe employĂ©e Ă oque Ă©tait une terrible chose connue sous le nom de « bombe de la F.A.I. », pâelle avait Ă©tĂ© fabriquĂ©e par les anarchistes dans les premiers jours de la guerre.
ait faite sur le mĂȘme principe que la grenade Mills, mais le levier Ă©tait maintenu bn par une goupille, mais par un bout de cordon. Il fallait rompre le cordon et barrasser de la bombe au plus vite. Lâon disait de ces bombes quâelles Ă©tmpartiales » : elles tuaient lâhomme sur qui on les lançait et lâhomme qui les lançy avait plusieurs autres types de bombes, plus primitives encore, mais peut-ĂȘtre un
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oins dangereuses â pour le lanceur, jâentends. Ce ne fut quâĂ la fin mars que je vismbe valant la peine dâĂȘtre lancĂ©e.
Et en dehors des armes, il y avait Ă©galement pĂ©nurie dâautres choses de moiportance mais tout de mĂȘme nĂ©cessaires Ă la guerre. Nous nâavions, par exemplrtes ni plans ; le relevĂ© topographique de lâEspagne nâavait jamais Ă©tĂ© complĂštemt, et les seules cartes dĂ©taillĂ©es de cette rĂ©gion Ă©taient les vieilles cartes militaires
aient presque toutes en la possession des fascistes. Nous nâavions ni tĂ©lĂ©mĂštrengues-vues, ni pĂ©riscopes de tranchĂ©e, ni jumelles (Ă part quelques-unes qui Ă©taie
opriĂ©tĂ© personnelle de miliciens), ni fusĂ©es ou Ă©toiles Ă©clairantes, ni cisailles, ni oarmurier, et mĂȘme presque pas de matĂ©riel de nettoyage. Les Espagnols semblavoir jamais entendu parler dâĂ©couvillons dâaucune sorte et ils restĂšrent lĂ , Ă regaut surpris, lorsque je me mis Ă en fabriquer un. Quand vous vouliez faire nettoyer vsil, vous lâapportiez au sergent qui possĂ©dait une longue baguette de fusil en laquelle Ă©tant invariablement tordue Ă©gratignait le rayage. On nâavait mĂȘme pas dâhuiaissage pour fusil ; on se servait dâhuile dâolive quand on pouvait en trouver ; Ă diveprises jâai graissĂ© mon fusil avec de la vaseline, avec du cold cream, et mĂȘme ave
as de jambon. Et de plus, on nâavait ni falots ni lampes Ă©lectriques de poche â Ă oque il nây avait, je crois, pas une seule lampe Ă©lectrique de poche dans tout ncteur de front, et il fallait aller jusquâĂ Barcelone pour trouver Ă en acheter, et enn sans difficultĂ©s.
Et tandis que le temps passait et que parmi les collines crĂ©pitaient des coups dĂ©s au petit bonheur, jâen vins Ă me demander avec un scepticisme croissanriverait jamais rien qui mĂźt un peu de vie, ou plutĂŽt de mort, dans cette guerre de bĂ©tait contre la pneumonie que nous luttions, non contre des hommes. QuandanchĂ©es sont sĂ©parĂ©es par une distance de plus de cinq cents mĂštres, si quelquâu
uchĂ©, câest pur hasard. Naturellement il y avait des blessĂ©s, mais le plus grand nomentre eux sâĂ©taient blessĂ©s eux-mĂȘmes. Si jâai bonne mĂ©moire, les cinq premiers blee je vis en Espagne lâavaient Ă©tĂ© par nos propres armes â je ne veux pas libĂ©rĂ©ment, mais par accident ou Ă©tourderie. Nos fusils trop usĂ©s Ă©taient en eux-mĂȘdanger. Certains de ces fusils avaient la vilaine habitude de laisser le coup partir stapait la crosse par terre ; jâai vu un homme se faire ainsi traverser la main dâune bdans le noir, les recrues non aguerries Ă©taient toujours en train de se
utuellement dessus. Un soir, alors que le crépuscule tombait à peine, une sentinelle
r moi de vingt mĂštres, mais elle me manqua dâun mĂštre. Dieu sait combien de foila vie au manque dâadresse au tir des Espagnols ! Une autre fois jâĂ©tais partrouille dans le brouillard et jâavais pris soin, auparavant, dâavertir le commandanrde. Mais en revenant je butai contre un buisson, la sentinelle alarmĂ©e se mit Ă e les fascistes arrivaient, et jâeus le plaisir dâentendre le commandant de garde dordre Ă tous dâouvrir un feu continu dans ma direction. Naturellement je deme
endu Ă terre et les balles passĂšrent au-dessus de moi sans me faire la moiratignure. Il nây a rien qui puisse convaincre un Espagnol, tout au moins un jpagnol, que les armes Ă feu sont dangereuses. Une autre fois, assez longtemps atais en train de photographier un groupe de mitrailleurs avec leur mitrailleuse qui
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intĂ©e dans ma direction.« Surtout ne tirez pas, dis-je Ă demi par plaisanterie, tout en mettant au point.â Oh ! non, pas de danger quâon tire ! »Lâinstant dâaprĂšs il y eut un terrible rugissement et un flot de balles passa en tro
prĂšs de mon visage que jâeus la joue toute piquĂ©e par des grains de cordite. Ce nâs Ă©tĂ© fait exprĂšs, mais les mitrailleurs trouvĂšrent que câĂ©tait une bonne plaisanturtant, peu de jours auparavant, ils avaient vu un muletier tuĂ© accidentellement palĂ©guĂ© politique qui, en faisant lâimbĂ©cile avec un pistolet automatique, lui avait
nq balles dans les poumons.Lâemploi dans lâarmĂ©e, Ă cette Ă©poque, de mots de passe difficiles Ă©tait encore
tre source de dangers. Il sâagissait de ces fastidieux mots de passe doubles, oĂč ilpondre Ă un mot par un autre. Dâordinaire ils Ă©taient de caractĂšre exaltanvolutionnaire, comme Cultura â progreso, ou Seremos â invencibles, et il Ă©tait soupossible de parvenir Ă faire que les sentinelles illettrĂ©es se souviennent de ces ur intellectuels. Je me rappelle quâune nuit le mot de passe Ă©tait Catalunya â hequâun gars de la campagne Ă face de lune, nommĂ© Jaime Domenech, vint,
mbarrassĂ©, me demander de lui expliquer :« Heroica â quâest-ce que ça veut dire heroica ? »Je lui rĂ©pondis que cela voulait dire la mĂȘme chose que valiente. Un peu plus
revenant Ă la tranchĂ©e dans lâobscuritĂ©, il trĂ©bucha et la sentinelle lâinterpella :« Alto ! Catalunya !â Valiente ! » hurla Jaime, persuadĂ© quâil disait ce quâil fallait.Bing !Mais la sentinelle le manqua. Dans cette guerre, on eĂ»t dit que câĂ©tait toujours Ă
anquerait lâautre, dĂšs que câĂ©tait humainement possible.
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IV
JâĂ©tais depuis trois semaines sur le front quand un contingent de vingt Ă trmmes, envoyĂ© dâAngleterre par lâI.L.P., arriva Ă Alcubierre ; afin de grouper tou
nglais du secteur, on nous envoya, Williams et moi, les rejoindre. Notre nousition se trouvait au Monte Oscuro, de plusieurs kilomĂštres plus Ă lâouest et en vu
ragosse.La position Ă©tait perchĂ©e sur une sorte de colline calcaire en dos dâĂąne, et les aaient creusĂ©s horizontalement dans lâĂ -pic, comme des nids dâhirondelles de rivagnfonçaient dans le sol sur dâĂ©normes distances, on nây voyait goutte Ă lâintĂ©rieur
aient si bas de plafond quâon ne pouvait mĂȘme pas sây tenir agenouillĂ©, quant Ă sây bout, inutile dâen parler. Sur les pics Ă notre gauche il y avait deux autres positionO.U.M., dont lâune attirait tous les hommes du secteur parce que sây trouvaient mmes qui faisaient la cuisine. Ces femmes nâĂ©taient pas belles Ă proprement paais il nâen fut pas moins nĂ©cessaire de consigner la position aux hommes des au
mpagnies. Ă cinq cents mĂštres sur notre droite se trouvait un poste du P.S.U.C., ude de la route dâAlcubierre, Ă lâendroit prĂ©cis oĂč elle changeait de propriĂ©taire. Lapouvait suivre des yeux, grĂące Ă leurs phares, nos camions de ravitaillement dans
ajet sinueux depuis Alcubierre, et en mĂȘme temps ceux des fascistes venanragosse. On pouvait voir Saragosse elle-mĂȘme, un grĂȘle chapelet de lumiĂšre, telblots Ă©clairĂ©s dâun navire, Ă douze milles vers le sud-ouest. Les trouvernementales la contemplaient de cette distance depuis aoĂ»t 1936, et Ă lâhtuelle elles la contemplent toujours.
Nous Ă©tions, nous autres, Ă peu prĂšs une trentaine, y compris un Espagnol (Rabeau-frĂšre de Williams), et une douzaine de mitrailleurs espagnols. Ă Ă©vitablement, un ou deux flĂ©aux â car, tout le monde le sait, la guerre atticaille â, les Anglais formaient une troupe dâune exceptionnelle qualitĂ©, ysiquement que moralement. Peut-ĂȘtre le meilleur de nous Ă©tait-il Bob Smillie tit-fils du fameux leader des ouvriers mineurs â qui, plus tard, devait trouver lence une mort sinistre et dĂ©nuĂ©e de sens. Que les Anglais et les Espagnols se so
ujours bien entendus ensemble, malgrĂ© les difficultĂ©s quâentraĂźnait le fait de nerler la mĂȘme langue, en dit long en faveur du caractĂšre espagnol. Tous les Espagno
que nous dĂ©couvrĂźmes, connaissaient deux locutions anglaises. Lâune Ă©tait : «by », lâautre Ă©tait un mot dont les prostituĂ©es de Barcelone se servaient dans lpports avec les marins anglais, mais les typographes se refuseraient Ă lâimprimer,ains.
Rien ne se passait, ici non plus, tout le long du front : seulement le claquemenlles perdues et, mais trĂšs rarement, le fracas dâun mortier fasciste qui nous facourir dans la tranchĂ©e la plus Ă©levĂ©e pour voir sur quelle colline les obus Ă©clataennemi Ă©tait ici un peu plus prĂšs de nous, peut-ĂȘtre Ă deux ou trois cents mĂštres.
sition la plus proche Ă©tait exactement en face de la nĂŽtre, et les meurtriĂšres du nitrailleuse ne cessaient de nous induire Ă gaspiller des cartouches. Les fasciste
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nnaient rarement la peine de tirer des coups de fusil, mais envoyaient avec prĂ©cs rafales de balles de mitrailleuse sur tout homme qui sâexposait. NĂ©anmoins il se pen dix jours, ou mĂȘme plus, avant que nous eussions un blessĂ©. Les troupes en facus Ă©taient des Espagnols, mais, Ă en croire les dĂ©serteurs, il y avait parmi eux quelus-officiers allemands. Quelque temps auparavant il y avait eu lĂ aussi des Mauruvres diables, comme ils avaient dĂ» souffrir du froid ! â car dans le no manâs landait un cadavre de Maure qui constituait lâune des curiositĂ©s de lâendroit. Ă un kilomdeux sur notre gauche le front prĂ©sentait une solution de continuitĂ© et il y avai
ntier de campagne, enfoncĂ© et absolument couvert, qui nâappartenait ni aux fascistnous. Mais eux et nous avions lâhabitude dây aller patrouiller en plein jour ; comm
boy-scout, câĂ©tait assez amusant, encore que je nâaie jamais vu une patrouille fasrisquer Ă moins de plusieurs centaines de mĂštres. En rampant un bon bout de ter le ventre on pouvait faire une partie du chemin en traversant le front fascistĂȘme on pouvait voir la ferme, battant pavillon monarchiste, qui servait de quanĂ©ral aux fascistes de la rĂ©gion. Parfois nous lĂąchions sur elle une volĂ©e de coupsil, puis filions nous mettre Ă lâabri avant que les mitrailleurs aient eu le temps de
pĂ©rer. JâespĂšre que nous avons brisĂ© quelques vitres, mais câĂ©tait Ă plus de huit cĂštres, et avec des fusils comme les nĂŽtres on ne pouvait ĂȘtre sĂ»r de toucher Ă stance mĂȘme une maison.
GĂ©nĂ©ralement le temps Ă©tait clair et froid ; parfois ensoleillĂ© vers midi, ujours froid. ĂĂ et lĂ , Ă travers la terre des pentes, des crocus sauvages et desrdaient leurs becs verts ; il Ă©tait Ă©vident que le printemps venait, mais il venait
ntement. Les nuits Ă©taient plus glaciales que jamais. Lorsque nous Ă©tions relevĂ©rde au petit jour, nous raclions, rassemblions tout ce qui restait du feu de la cuisius tenions au milieu des braises ; câĂ©tait mauvais pour les bottes, mais rudement
ur les pieds. Mais il y avait des matins oĂč voir poindre le jour parmi les cimes vesque la peine dâĂȘtre hors de son lit Ă des heures impies. Je hais les montagnes, m
point de vue spectaculaire. Mais parfois, lorsque sur notre arriĂšre les mmmençaient Ă se dessiner sur le ciel blanchissant de lâaube, que les premiĂšres mieurs dorĂ©es comme des Ă©pĂ©es fendaient la nuit, puis que la clartĂ© allait croissant ets mers de nuages carminĂ©s sâĂ©tendaient au loin sur des distances inconcevables, ai, le spectacle valait la peine dâĂȘtre contemplĂ©, mĂȘme si lâon avait Ă©tĂ© debout touit et si lâon avait les jambes, des genoux aux pieds, engourdies de froid et si lâon Ă©ta
ain de maussadement se dire quâil nây avait pas dâespoir de recevoir rien Ă manger acore trois bonnes heures. Jâai vu le lever du jour durant cette campagne plus soue pendant toute ma vie passĂ©e â et que, je lâespĂšre bien, pendant tout le reste de m
venir.Nous Ă©tions Ă court dâhommes ici, ce qui signifiait des factions plus longue
vantage de corvĂ©es. Je commençais Ă souffrir un peu de la privation de sommeil quĂ©vitable mĂȘme dans la plus calme des guerres. IndĂ©pendamment des tours de gars patrouilles, il y avait constamment des alertes de nuit, et de toute maniĂšre il nâesssible de bien dormir dans un de ces sales trous dans la terre quand les pieds vous
al de froid ! Pendant mes trois ou quatre premiers mois sur le front, je ne pense
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oir passĂ© plus dâune douzaine de fois vingt-quatre heures sans dormir ; maivanche je nâai certainement pas eu douze nuits de sommeil ininterrompu. Vingente heures de sommeil au total par semaine Ă©taient la quantitĂ© normale. Le rĂ©sĂ©tait pas si fĂącheux quâon pourrait le croire : on sâalourdissait beaucoup et on core plus de mal Ă grimper et descendre les pentes montagneuses, mais on se seen et lâon Ă©tait constamment affamĂ© â et bon Dieu, Ă quel point ! Toute nourriture raissait bonne, mĂȘme les sempiternels haricots quâen Espagne on finit par ne uvoir sentir ! Notre eau, le peu que nous en recevions, venait de plusieurs kilomĂšt
s de mulets ou de petits Ăąnes martyrs. Je ne sais pour quelle raison les payagonais traitent bien leurs mulets, mais abominablement leurs Ăąnes. Lorsquâunfusait dâavancer, câĂ©tait la pratique courante de lui donner des coups de pied dansticules. On ne nous distribuait plus de bougies et les allumettes se faisaient rarespagnols nous apprirent Ă fabriquer des lampes Ă huile dâolive avec une boĂźte dencentrĂ© vide, un chargeur et un morceau de chiffon. Quand, par hasard, on avait unhuile dâolive, on obtenait avec tout cela, au milieu de la fumĂ©e, une flamme vacillviron quatre fois moins Ă©clairante que celle dâune bougie, tout juste assez pour
rmettre de trouver Ă cĂŽtĂ© de vous votre fusil.Il ne semblait y avoir aucun espoir dâun combat vĂ©ritable. Ă notre dĂ©part du Mcero, jâavais comptĂ© mes cartouches et mâĂ©tais aperçu quâen presque trois semain
avais tirĂ© que trois coups de feu. Tuer un homme demande, dit-on, un millier de bae compte-lĂ jâen avais pour vingt ans Ă tuer mon premier fasciste. Au Monte Oscur
onts Ă©taient plus rapprochĂ©s et lâon tirait plus souvent, mais jâai tout lieu de croirenâai jamais touchĂ© personne. En fait, sur ce front, et durant cette pĂ©riode de la guerritable arme nâĂ©tait pas le fusil, mais le porte-voix. Faute de pouvoir tuer lâennemdressait Ă lui en criant. Cette façon de faire la guerre est si extraordinaire quâelle m
e explication.Chaque fois que les fronts Ă©taient suffisamment rapprochĂ©s pour ĂȘtre Ă portĂ©
ix, il y avait toujours grand Ă©change de cris de tranchĂ©e Ă tranchĂ©e. Les nĂŽtres criaiFascistas-maricones ! » Les fascistes : « Viva España ! Viva Franco ! », ou, quanvaient quâil y avait en face dâeux des Anglais : « HĂ© ! les Anglais ! Retournez chez vous nâavons pas besoin dâĂ©trangers ici ! » Du cĂŽtĂ© gouvernemental, dans les milicertis, la propagande criĂ©e pour miner le moral de lâennemi sâĂ©tait forgĂ© sa techn
ans toute position qui sây prĂȘtait, on dĂ©signait pour cette tĂąche, parmi les mitraill
bituellement, des hommes que lâon munissait dâun porte-voix. En gĂ©nĂ©ral ils clame harangue prĂ©parĂ©e Ă lâavance, tout animĂ©e de sentiments rĂ©volutionnaires,pliquait aux soldats fascistes quâils nâĂ©taient que les mercenaires du capitalternational, quâils Ă©taient en train de se battre contre leur propre classe, etc., et quessait de passer de notre cĂŽtĂ©. Et tout cela Ă©tait rĂ©pĂ©tĂ© mille et mille fois, parmmes qui se relayaient ; parfois mĂȘme cette propagande se poursuivait durant preute la nuit. Il est Ă peu prĂšs certain quâelle Ă©tait efficace ; tout le monde sâaccordair lâune des causes de lâarrivĂ©e par petits groupes de dĂ©serteurs fascistes. Et, Ă y flĂ©chir, quand un pauvre diable de sentinelle â trĂšs probablement un socialiste oarcho-syndicaliste quâon a enrĂŽlĂ© contre son grĂ© â grelotte Ă son poste et quâil en
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tentir sans trĂȘve dans lâobscuritĂ© le slogan : « Ne te bats pas contre ta propre classa peut fort bien faire impression sur lui. Cela pouvait changer pour lui les chose
ut au tout, quant au fait de savoir quelle Ă©tait la vĂ©ritable dĂ©sertion. Ăvidemment çon dâagir ne concorde guĂšre avec la conception anglaise de la guerre. Jâavoue que jupĂ©fait et scandalisĂ© la premiĂšre fois que je la vis en Ćuvre. En voilĂ une idĂ©e dâess
convertir son ennemi au lieu de lui tirer dessus ! Ă prĂ©sent, je pense quâĂ tous povue câĂ©tait une manĆuvre lĂ©gitime. Dans lâordinaire guerre de tranchĂ©es, lorsquâos dâartillerie il est extrĂȘmement difficile dâinfliger des pertes Ă lâadversaire sans en
ut autant. Si lâon parvient Ă rendre indisponibles un certain nombre dâhommeovoquant leur dĂ©sertion, câest toujours cela de gagnĂ© ; et en fait les dĂ©serteurs sontles que les cadavres, parce quâils peuvent fournir des informations. Mais au dĂ©butus jeta tous dans la consternation : il nous semblait, Ă voir cela, que les Espagnoenaient pas cette guerre, leur guerre, assez au sĂ©rieux. Lâhomme chargĂ© dopagande criĂ©e au poste du P.S.U.C., plus bas Ă notre droite, Ă©tait passĂ© maĂźtre et. Parfois, au lieu de clamer des slogans rĂ©volutionnaires, il racontait tout bonnemx fascistes que nous Ă©tions bien mieux nourris quâeux. Dans son compte rendu
tions gouvernementales il avait tendance Ă ĂȘtre un peu imaginatif : « Des tarurrĂ©es ! » Et lâon entendait sa voix retentir en Ă©chos dans la vallĂ©e dĂ©serte : « Nnons justement de nous asseoir pour beurrer copieusement nos tartines. Ah licieuses tranches de pain beurrĂ©es ! » Je suis sĂ»r que, tout comme nous, il nâavaitde beurre depuis des semaines ou des mois, mais, dans la nuit glaciale, cette Ă©vocatartines beurrĂ©es faisait probablement venir lâeau Ă la bouche Ă plus dâun fasciste
e la faisait bien venir, Ă moi qui savais quâil mentait !Un jour, en fĂ©vrier, nous vĂźmes un avion fasciste approcher. Comme dâhabitud
a une mitrailleuse à découvert, on la pointa vers le ciel et nous nous couchùmes
r le dos pour bien viser. Nos positions isolĂ©es ne valaient pas la peine mbardement et, en gĂ©nĂ©ral, les rares avions fascistes qui passaient par lĂ faisaientour pour Ă©viter le feu des mitrailleuses. Cette fois-lĂ lâavion vint droit au-dessuus â trop haut pour que nous songions Ă tirer sur lui, et il en tomba non des bom
ais des choses dâun blanc Ă©clatant qui nâen finissaient pas de tournoyer dans uelques-unes vinrent avec un frĂ©missement dâailes atterrir dans notre posiĂ©taient des exemplaires dâun journal fasciste, le Heraldo de AragĂłn, annonçant la Malaga.
Cette nuit-lĂ il y eut une sorte dâattaque avortĂ©e des fascistes. Jâallais justemeneuter, Ă demi mort de sommeil, quand une violente rafale de balles passa au-dessus tĂȘtes et quelquâun dans lâabri cria : « Ils attaquent ! » Je saisis mon fusil et je grimn sans glissades, Ă mon poste qui se trouvait au sommet de la position, derriĂštrailleuse. LâobscuritĂ© Ă©tait totale et le tintamarre infernal. Cinq mitrailleuses, je pus arrosaient, et il y eut une sĂ©rie de lourdes explosions produites par des grenades fascistes lançaient sur leur propre parapet de la maniĂšre la plus stupide. Il faisaitire. En bas dans la vallĂ©e, sur notre gauche, je voyais les lueurs verdĂątres des coup
u, lĂ oĂč un petit groupe de fascistes, probablement une patrouille, Ă©tait en ntervenir. Les balles volaient autour de nous dans les tĂ©nĂšbres, crac-zip-crac ! Quel
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us passĂšrent en sifflant, mais il nâen tomba aucun prĂšs de nous et (comme Ă lâordinns cette guerre) la plupart dâentre eux nâexplosĂšrent pas. Tout de mĂȘme je passae moment lorsquâune autre mitrailleuse ouvrit le feu du sommet de la colline sur n
riĂšre â en rĂ©alitĂ© câen Ă©tait une quâon avait montĂ©e lĂ pour nous soutenir, mais soment nous pĂ»mes nous croire encerclĂ©s. Lâinstant dâaprĂšs, notre mitrailleuse sâenmme cela ne manquait jamais dâarriver avec ces mauvaises cartouches, et nây voutte nous ne pouvions retrouver la baguette de fusil Ă©garĂ©e. Manifestement il nây us rien dâautre Ă faire que se croiser les bras et se laisser tirer dessus. Les mitrail
pagnols dĂ©daignĂšrent de se mettre Ă lâabri, sâexposĂšrent mĂȘme dĂ©libĂ©rĂ©ment, et jenc en faire autant. Si peu importante quâelle ait Ă©tĂ©, cette affaire mâa cepenaucoup appris. CâĂ©tait la premiĂšre fois que je me trouvais Ă proprement parler sou, et Ă mon humiliation je dĂ©couvris que jâĂ©tais terriblement effrayĂ©. On Ă©prujours la mĂȘme chose, je lâai remarquĂ©, sous un bombardement violent : ce nâestnt dâĂȘtre touchĂ© que lâon a peur, on a peur parce quâon ne sait pas oĂč lâon sera toun ne cesse de se demander oĂč le projectile va au juste pincer, et cela donne au corpstier une trĂšs dĂ©sagrĂ©able sensibilitĂ©.
Au bout dâune heure ou deux la fusillade ralentit et sâĂ©teignit. Nous nâavionâun homme de touchĂ©. Les fascistes avaient fait avancer deux mitrailleuses dans anâs land , mais ils sâĂ©taient tenus Ă distance prudente et nâavaient Ă aucun momntĂ© de prendre dâassaut notre parapet. En rĂ©alitĂ©, ce nâĂ©tait pas une vĂ©ritable atta
avaient simplement voulu, en gaspillant des cartouches, faire joyeusement du ur cĂ©lĂ©brer la chute de Malaga. LâintĂ©rĂȘt principal de cette affaire, ce fuapprendre Ă lire les nouvelles de la guerre dans les journaux dâun Ćil plus incrĂ©dou deux jours plus tard les journaux et la radio donnĂšrent des comptes rendus d
fensive de grande envergure avec cavalerie et tanks (sur un versant Ă pic !) qui ava
agnifiquement repoussĂ©e par les hĂ©roĂŻques Anglais !Quand les fascistes nous avaient annoncĂ© la chute de Malaga, nous nây avions
u, mais le lendemain des bruits plus convaincants coururent et je crois que câest uux jours plus tard que la nouvelle fut officiellement reconnue vraie. Peu Ă peu tounteuse histoire transpira : on sâĂ©tait retirĂ© de la ville sans tirer un coup de fecharnement des Italiens sâĂ©tait portĂ© non sur les troupes, qui Ă©taient parties, maimalheureuse population civile, et certains de ses habitants qui fuyaient avaienursuivis et mitraillĂ©s sur plus dâune centaine de kilomĂštres. Ces nouvelles firent pa
froid sur tout le front car, quelle quâait Ă©tĂ© la vĂ©ritĂ©, tous dans les milices pensĂše la perte de Malaga Ă©tait due Ă la trahison. CâĂ©tait la premiĂšre fois que jâentenrler de trahison ou de dĂ©saccord quant aux buts poursuivis. Cela suscita dans prit le premier doute, vague encore, au sujet de cette guerre dans laquelle, jusquâaloavait semblĂ© quâil Ă©tait si magnifiquement simple de voir qui Ă©tait dans son droitns son tort.
Vers la mi-fĂ©vrier nous quittĂąmes le Monte Oscuro pour aller, avec touteoupes du P.O.U.M. de ce secteur, renforcer lâarmĂ©e qui assiĂ©geait Huesca. Ce fuyage dâune cinquantaine de kilomĂštres, en camions, Ă travers la plaine hivernale o
gnes taillĂ©es ne bourgeonnaient pas encore et oĂč les pampres de lâorge dâh
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mmençaient tout juste à surgir entre les mottes de terre. à quatre kilomÚtres deuvelles tranchées brillait Huesca, minuscule et claire comme une cité de maisonupées. Quelques mois auparavant, aprÚs la prise de Sietamo, le général comman troupes gouvernementales avait dit gaiement : « Demain, nous prendrons le c
uesca. » Il apparut quâil sâĂ©tait trompĂ©. Il y avait eu des attaques sanglantes, mais latomba pas, et « Demain, nous prendrons le cafĂ© Ă Huesca » Ă©tait devenue
aisanterie courante dans toute lâarmĂ©e. Si jamais je retourne en Espagne, je me fervoir dâaller prendre une tasse de cafĂ© Ă Huesca.
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V
Dans le secteur Ă lâest de Huesca, jusque fort avant en mars il ne se passa rienu prĂšs littĂ©ralement rien. Nous Ă©tions Ă douze cents mĂštres de lâennemi. Lorsqait refoulĂ© les fascistes dans Huesca, les troupes de lâarmĂ©e rĂ©publicaine qui tentte partie du front avaient avancĂ© sans excĂšs de zĂšle, aussi notre premiĂšre
ssinait-elle une sorte de poche. Par la suite il faudrait bien se porter en avant endroit â ce ne serait pas un boulot facile sous le feu de lâennemi â, mais pour lâinus faisions comme si lâennemi nâexistait pas ; notre unique prĂ©occupation Ă©tait dâaaud et suffisamment Ă manger.
Pendant ce temps, câĂ©tait la routine de tous les jours â de toutes les nuits surto tĂąches ordinaires. Ătre en faction, aller en patrouille, creuser ; la boue, la pluie
ameurs aiguĂ«s du vent, parfois la neige. Ce nâest que dans le courant dâavril que les nvinrent sensiblement moins froides. Ici en haut, sur ce plateau, les journĂ©es de mssemblaient beaucoup Ă celles dâun mois de mars dâAngleterre : un ciel bleu lumi
des vents hargneux. Lâorge dâhiver avait un pied de haut, des boutons pourprermaient sur les cerisiers (le front, ici, traversait des vergers abandonnĂ©s et des jartagers), et en cherchant dans les fossĂ©s, on trouvait des violettes et une espĂšc
cinthe sauvage, parente pauvre de la jacinthe des prĂ©s. ImmĂ©diatement Ă lâarriĂšront, coulait un merveilleux cours dâeau, vert, bouillonnant ; câĂ©tait la premiĂšrempide que je voyais depuis mon arrivĂ©e au front. Un jour, je mâarmai de rĂ©solutioe glissai dans la riviĂšre : mon premier bain depuis six semaines. Ce fut ce quâon peler un bain-Ă©clair car cette eau provenait en majeure partie de la fonte des neig
tempĂ©rature nâĂ©tait guĂšre au-dessus de celle du point de congĂ©lation.Et il ne se passait rien, jamais rien. Les Anglais avaient pris lâhabitude de dire quĂ©tait pas une guerre, mais une pantomime avec effusion de sang. Nous nâĂ©tions ine sous le feu direct des fascistes. Le seul danger, câĂ©taient les balles perdues qut que le front sâinflĂ©chissait en avant de chaque cĂŽtĂ©, venaient de plusieurs directus ceux qui furent blessĂ©s Ă cette Ă©poque, le furent par des balles perdues. Arinton reçut une mystĂ©rieuse balle qui lui fracassa lâĂ©paule gauche et lui estropia le bfinitivement, je le crains. Il y avait un peu de tir Ă obus, mais il Ă©tait extraordinairemefficace. Au vrai, nous considĂ©rions le sifflement aigu et le fracas dâexplosion des
mme une distraction innocente. Les fascistes nâenvoyaient jamais leurs obus sur nrapet. Ă quelques centaines de mĂštres en arriĂšre de nous il y avait une maisompagne, appelĂ©e La Granja et comprenant de vastes dĂ©pendances de ferme,rvaient de magasin, de quartier-gĂ©nĂ©ral et de cuisine pour tout le secteur. CâĂ©tait aison que les artilleurs fascistes tĂąchaient dâatteindre, mais ils en Ă©taient distantnq ou six kilomĂštres et jamais ils ne pointaient assez juste pour faire plus que briseres et Ă©corcher les murs. Vous nâĂ©tiez en danger que si le dĂ©but du tir vous surprprochant de la route ; alors les obus tombaient tout autour de vous dans les cha
n acquérait presque instantanément une curieuse aptitude à reconnaßtre au son à qstance de soi un obus allait éclater. Les obus que les fascistes tiraient à cette ép
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aient vraiment bien mauvais. Ils Ă©taient de cent cinquante millimĂštres et poueusaient des cratĂšres de seulement six pieds de large sur quatre de profondeur ; eoins un obus sur quatre nâexplosait pas. DâoĂč, naturellement, des contes romanes
sabotage dans les usines fascistes et dâobus non Ă©clatĂ©s dans lesquels, au lieu darge, on aurait trouvĂ© un chiffon de papier portant : « Front rouge » ; mais je nâmais vu un seul. La vĂ©ritĂ©, câest que ces obus Ă©taient de bien trop vieilles munitions
mes camarades ramassa un coiffage de fusĂ©e en cuivre qui portait une date, et c17 ! Les canons fascistes Ă©taient de la mĂȘme fabrication et du mĂȘme calibre qu
tres, et souvent lâon remettait en Ă©tat les obus non Ă©clatĂ©s et on en faisait renvoi pax fascistes. Il y avait, racontait-on, un vieil obus, gratifiĂ© dâun surnom,otidiennement faisait ainsi lâaller-retour sans jamais Ă©clater.
La nuit, on envoyait gĂ©nĂ©ralement dans le no manâs land de petites patrouillucher dans les fossĂ©s prĂšs des premiĂšres lignes fascistes pour Ă©couter les bruits (apclairon, coups de klaxon dâauto, etc.) susceptibles de nous renseigner sur lâactivitĂ©
uesca. Il y avait de constantes allĂ©es et venues de troupes fascistes et, jusquâĂ un ceint, on pouvait se faire une idĂ©e de leur importance dâaprĂšs les comptes rendus d
trouilles. En particulier, on nous recommandait toujours, si nous entendionoches de lâĂ©glise sonner, de le signaler. Les fascistes, Ă ce quâon disait, entendujours la messe avant dâaller au feu. Au milieu des champs et des vergers il y avaittes aux murs de boue abandonnĂ©es quâon pouvait explorer sans danger Ă la l
une allumette, une fois quâon avait bouchĂ© les fenĂȘtres. Parfois on tombait sur un bĂ©cieux, une hache par exemple, ou un bidon fasciste (qui, Ă©tant meilleur que les nĂŽait trĂšs recherchĂ©). On pouvait tout aussi bien explorer en plein jour, mais alors preut le temps Ă quatre pattes. Cela faisait une impression bizarre de ramper ainsi ps champs fertiles et dĂ©serts oĂč tout travail sâĂ©tait arrĂȘtĂ© juste Ă lâĂ©poque des rĂ©coltes
avait pas fait la moisson. Les vignes non taillĂ©es serpentaient sur le sol ; les Ă©piaĂŻs encore sur pied Ă©taient devenus durs comme pierre, les betteraves fourragĂšres etteraves Ă sucre sâĂ©taient transformĂ©es, par hypertrophie, en dâĂ©normes maneuses. Comme les paysans durent maudire lâune et lâautre armĂ©e ! Parfois on envos dĂ©tachements ramasser des pommes de terre dans le no manâs land . Ă un kilomdemi environ sur notre droite, lĂ oĂč les fronts Ă©taient le plus rapprochĂ©s, il y avarrĂ© de pommes de terre qui Ă©tait frĂ©quentĂ© Ă la fois par les fascistes et par nous. Noions de jour, eux de nuit seulement, car le carrĂ© se trouvait sous le feu de
trailleuses. Une nuit, Ă notre grande contrariĂ©tĂ©, ils y vinrent en nombre et nettoyĂšcarrĂ© de toutes ses pommes de terre. Nous dĂ©couvrĂźmes un autre carrĂ© un peu n, mais en un endroit qui nâoffrait aucun couvert, aussi Ă©tait-ce couchĂ©s Ă plat veâil fallait arracher les pommes de terre â une corvĂ©e Ă©puisante ! Si lâon Ă©tait repĂ©rĂ© mitrailleurs fascistes, il fallait sâaplatir comme un rat qui se tortille pour passer e porte, tandis quâĂ peu de mĂštres derriĂšre soi les mottes de terre Ă©taient hachĂ©es balles. Mais en ce temps-lĂ on trouvait que ça en valait la peine : les pommes de tfaisaient trĂšs rares. Si lâon parvenait Ă en avoir un plein sac, il Ă©tait possible, ertant Ă la cuisine, de le troquer contre un plein bidon de cafĂ©.
Et il ne se passait toujours rien, il ne semblait pas devoir jamais rien se pa
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Quand donc attaquerons-nous ? Pourquoi nâattaquons-nous pas ? », telles Ă©taienestions quâon entendait jour et nuit poser et par les Anglais et par les Espagnols. QrĂ©flĂ©chit Ă ce que se battre signifie, cela paraĂźt singulier que des soldats souhaite
ttre, et pourtant il est indubitable quâils le souhaitent. Dans la guerre de tranchĂ©es ois choses dont tous les soldats ont grande envie : un combat, davantage de cigarette permission hebdomadaire. Nous Ă©tions alors un peu mieux armĂ©s quâauparaaque homme avait cent cinquante cartouches au lieu de cinquante, et peu Ă peus distribuait des baĂŻonnettes, des casques dâacier et quelques bombes. Constamm
bruit courait quâon se battrait prochainement, et jâai depuis pensĂ© quâon dtentionnellement le faire courir, pour maintenir le moral des troupes. Point nsoin dâĂȘtre versĂ© dans lâart militaire pour comprendre que lâengagement principurrait avoir lieu de ce cĂŽtĂ© de Huesca, tout au moins Ă lâheure actuelle. Le patĂ©gique, câĂ©tait la route menant Ă Jaca, du cĂŽtĂ© tout Ă fait opposĂ©. Un peu plus
rsque les anarchistes dĂ©clenchĂšrent leur offensive sur la route de Jaca, notre tĂącus fut de livrer des attaques de diversion, afin dâobliger les fascistes Ă retirer
oupes de lâautre cĂŽtĂ©.
Pendant tout ce temps, six semaines environ, il nây eut quâun seul combat tre secteur : lâattaque, par la cavalerie de choc, du manicomio, asile dâaliĂ©nĂ©s dĂ©saftransformĂ© par les fascistes en forteresse. Il y avait plusieurs centaines de rĂ©fuemands qui faisaient la guerre avec le P.O.U.M. Ils Ă©taient organisĂ©s en un bataĂ©cial, quâon appelait le batallĂłn de choque ; du point de vue militaire, ils Ă©taient ut autre niveau que le reste des milices ; je dirais quâils Ă©taient plus vĂ©ritablemldats que tous ceux que jâai vus en Espagne, si lâon fait exception des gardes dâassa
certaines troupes des Brigades internationales. Lâattaque fut bousillĂ©e, cohabitude ! Combien, dans cette guerre, y eut-il dâopĂ©rations du cĂŽtĂ© gouvernementa
le furent pas, je me le demande ! Le bataillon de choc prit dâassaut le manicomio, troupes de je ne sais plus quelle milice, qui avaient reçu mission de le soutenmparant dâune hauteur voisine qui commandait le manicomio, eurent un g
Ă©compte. Le capitaine qui Ă©tait Ă leur tĂȘte Ă©tait un de ces officiers de lâarmĂ©e rĂ©gulun loyalisme douteux, que le gouvernement sâobstinait Ă employer. Soit paouvement de peur, soit par trahison, il alerta les fascistes en lançant une bombe âils Ă©taient Ă deux cents mĂštres. Je suis bien aise de pouvoir dire que ses hommĂ©diatement le tuĂšrent net. Mais lâattaque-surprise ne fut pas une surprise, e
liciens furent fauchĂ©s par un feu nourri et chassĂ©s de la hauteur, et Ă la tombĂ©e it le bataillon de choc dut abandonner le manicomio. Toute la nuit les ambulancivirent Ă la file sur lâabominable route qui descend vers Sietamo, achevant les gressĂ©s Ă force de les cahoter.
Nous Ă©tions tous, Ă prĂ©sent, pleins de poux ; bien quâil fĂźt encore froid, il fapendant assez chaud pour cela. Jâai acquis une large expĂ©rience personnelle de to sortes de parasites du corps et, comme pure saloperie, je nâai pas rencontrĂ© mieuxpou. Dâautres insectes, les moustiques par exemple, vous font bien plus mal, maioins ne sont pas une vermine Ă demeure sur vous. Le pou de lâhomme ressemble aun minuscule homard, et câest surtout dans votre pantalon quâil Ă©lit domicile. Ă m
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brĂ»ler tous vos vĂȘtements, il nâexiste pas de moyen connu de sâen dĂ©barrasser Danutures de votre pantalon il dĂ©pose ses Ćufs dâun blanc brillant, semblables nuscules grains de riz, qui Ă©closent et fondent leurs propres familles avec une cĂ©lrrifiante. Je crois que les pacifistes gagneraient Ă illustrer leurs brochureotographies agrandies de poux. Ma foi, la voilĂ bien la guerre dans toute sa splendla guerre tous les soldats sont pleins de poux, du moins dĂšs quâil fait suffisammaud. Les hommes qui ont combattu Ă Verdun, Ă Waterloo, Ă Flodden, Ă Senlac,ermopyles, tous sans exception avaient des poux grouillant sur leurs testicules. N
mpĂȘchions, jusquâĂ un certain point, les bestioles dâaugmenter en nombre en griurs lentes et en nous baignant aussi souvent que nous pouvions lâendurer. Les puls ont pu mâamener Ă entrer dans lâeau glaciale de cette riviĂšre.
On commençait Ă manquer de tout â de bottes, de vĂȘtements, de tabac, de savonugies, dâallumettes, dâhuile dâolive. Nos uniformes sâen allaient en lambeauaucoup dâhommes nâavaient pas de bottes, rien que des espadrilles Ă semelles de c
ans tous les coins on tombait sur des amas de bottes hors dâusage. Une fois nous aalimenter le feu dâun abri pendant deux jours presque exclusivement avec des bo
nâest pas mauvais comme combustible. Dans lâintervalle ma femme Ă©tait arrivrcelone et mâenvoyait rĂ©guliĂšrement du thĂ©, du chocolat, et mĂȘme des cigares lorsavait moyen de sâen procurer ; mais mĂȘme Ă Barcelone on commençait Ă manqueut, et particuliĂšrement de tabac. Le thĂ© Ă©tait une aubaine, mais nous nâavions pas dpresque pas de sucre. DâAngleterre on ne cessait dâenvoyer des colis aux hommentingent, mais ces colis ne nous parvenaient jamais ; vivres, vĂȘtements, cigarettut Ă©tait ou bien refusĂ© Ă la poste, ou bien confisquĂ© en France. Chose assez curieusule firme qui rĂ©ussit Ă faire parvenir Ă ma femme des paquets de thĂ© â et mĂȘme,s, exception mĂ©morable, une boĂźte de biscuits â fut The Army and Navy Stores. Pa
eille Army and Navy ! Elle sâacquitta noblement de son devoir, mais peut-ĂȘtre eĂ»trouvĂ© plus de satisfaction Ă voir ses marchandises prendre le chemin du camanco. Le pire, câĂ©tait le manque de tabac. Dans les premiers temps on nous stribuĂ© un paquet de cigarettes par jour, ensuite ce ne fut plus que huit cigarettesur, puis cinq. Finalement il y eut dix mortels jours pendant lesquels on ne stribua pas de tabac du tout. Pour la premiĂšre fois, en Espagne, je vis ce que lâonaque jour Ă Londres : des gens ramassant des mĂ©gots.
Vers la fin de mars je me fis Ă la main une plaie qui sâenvenima ; il dev
cessaire dây donner un coup de bistouri et de porter le bras en Ă©charpe. Il me fer dans un hĂŽpital, mais ça ne valait pas la peine de mâenvoyer Ă Sietamo pouressure si insignifiante ; je restai donc dans un prĂ©tendu hĂŽpital, Ă Monflorite, qui mplement un centre dâĂ©vacuation des blessĂ©s. Je sĂ©journai lĂ dix jours, une partimps au lit. Les practicantes (les infirmiers) me volĂšrent autant dire tous les objeleur que je possĂ©dais, y compris mon appareil photographique et toutes mes photo
ont tout le monde volait, câĂ©tait la consĂ©quence inĂ©vitable de la pĂ©nurie ; marsonnel des hĂŽpitaux damait le pion Ă tous. Plus tard, lorsque je fus hospitalrcelone, un AmĂ©ricain, volontaire des Brigades internationales, venu sur un bateau
t torpillĂ© par un sous-marin italien, me raconta quâil avait Ă©tĂ© transportĂ© Ă terre b
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quâen le hissant dans la voiture dâambulance les brancardiers lui avaient fauchontre-bracelet.
Tandis que je portais le bras en Ă©charpe, je passai plusieurs jours sereins Ă lader dans la rĂ©gion. Monflorite Ă©tait, comme les autres bourgades, un fouilliaisons de pierre et de torchis, avec dâĂ©troites ruelles tortueuses qui, Ă force dâavoirattĂ©es par les camions, finissaient par offrir lâaspect des cratĂšres de la lune. LâĂ©ait Ă©tĂ© sĂ©rieusement maltraitĂ©e et servait de magasin militaire. Dans tout le voisinay avait que deux fermes tant soit peu grandes, la Torre Lorenzo et la Torre FabiĂĄ
ulement deux maisons dâhabitation rĂ©ellement vastes, demeures, certainementopriĂ©taires fonciers qui rĂ©gentaient autrefois la contrĂ©e et dont les huttes misĂ©ras paysans reflĂ©taient la richesse. ImmĂ©diatement aprĂšs avoir franchi la riviĂšre, Ăšs du front, il y avait une grande minoterie avec, y attenant, une maison de campala paraissait scandaleux de voir se rouiller, inutilisĂ©es, les Ă©normes machines coĂ»tearracher, pour servir de bois Ă brĂ»ler, les trĂ©mies. Ă quelque temps de lĂ , pour fou
bois Ă brĂ»ler des troupes plus en arriĂšre du front, on envoya en camionstachements piller mĂ©thodiquement lâendroit. Ils dĂ©molissaient le plancher dâune p
y faisant Ă©clater une grenade Ă main. Il est fort possible que La Granja, dont ions fait notre magasin et notre cuisine, ait Ă©tĂ© autrefois un couvent. Elle compremmenses cours et communs couvrant un demi-hectare ou davantage, avec des Ă©cuur trente ou quarante chevaux. Les maisons de campagne, dans cette partispagne, nâoffrent pas dâintĂ©rĂȘt architectural, mais les fermes qui en dĂ©penden
erres blanchies Ă la chaux, avec des arcs plein cintre et de splendides poutres dent des bĂątiments empreints de grandeur, construits dâaprĂšs un plan qui nâa parier depuis des siĂšcles. Parfois il vous venait un sentiment de sympathie inavouĂ© ex-propriĂ©taires fascistes, Ă voir de quelle maniĂšre les miliciens traitaien
meures dont ils sâĂ©taient emparĂ©s. Dans La Granja, toute piĂšce dont on ne se ses avait Ă©tĂ© transformĂ©e en latrines â en une sorte dâeffroyable lieu de carnage oĂč lâoyait plus que meubles brisĂ©s et dĂ©jections. Le plancher de la petite chapelle aux mrcĂ©s de trous dâobus disparaissait sous une couche dâexcrĂ©ments Ă©paisse de plusuces. Dans la grande cour, oĂč les cuisiniers distribuaient Ă la louche les rationsait de quoi ĂȘtre Ă©cĆurĂ© en voyant toutes les immondices, boĂźtes de fer rouillĂ©, bottin de mulets, aliments avariĂ©s, qui jonchaient le sol. CâĂ©tait le cas ou jamaianter le vieux refrain militaire :
Il y a des rats, des rats, Des rats aussi gros que des chats, Dans le magasin de lâofficier de dĂ©tail ! Ceux de La Granja Ă©taient rĂ©ellement aussi gros, ou il sâen fallait de peu, que
ats ; grosses bĂȘtes bouffies qui se dandinaient sur des lits de fumier, si impudeâelles ne sâenfuyaient mĂȘme pas Ă votre approche, Ă moins que vous ne leur tssus.
CâĂ©tait bien le printemps, enfin ! Le ciel Ă©tait dâun bleu plus tendre ; lâair
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udain dâune douceur dĂ©licieuse. Les grenouilles sâappariaient bruyamment danssĂ©s. Autour de lâabreuvoir pour les mulets du village, je dĂ©couvris dâexquises peenouilles, de la dimension dâun penny et dâun vert si brillant que lâherbe nouvprĂšs, paraissait terne. Les petits campagnards sâen allaient, munis de seaux, Ă la chx escargots quâils faisaient griller vifs sur des plaques de fer. AussitĂŽt quâil mmencĂ© Ă faire meilleur, les paysans Ă©taient sortis pour les labours de printemps
gne typique de lâextrĂȘme imprĂ©cision que revĂȘt la rĂ©volution agraire espagnole, câesne pus jamais me rendre compte de façon certaine si la terre, dans cette rĂ©gion,
Ă© collectivisĂ©e ou si, simplement, les paysans se lâĂ©taient partagĂ©e entre eux. Jâai âen principe elle Ă©tait collectivisĂ©e, puisquâon Ă©tait en territoire du P.O.U.M. etarchistes. En tout cas, les propriĂ©taires Ă©taient partis, on Ă©tait en train de cultiveamps, et les gens paraissaient satisfaits. De la bienveillance que nous tĂ©moignaienysans, je mâĂ©tonne encore. Ă certains des plus vieux dâentre eux la guerre draĂźtre dĂ©nuĂ©e de sens ; ce quâil y avait dâĂ©vident, câĂ©tait quâelle Ă©tait cause de privattoutes sortes et de la vie triste et morne que tout le monde menait. Du reste, mĂȘm
s temps meilleurs, les paysans détestent avoir des troupes cantonnées chez eu
anmoins ils se montraient invariablement amicaux â rĂ©flĂ©chissant, je suppose, ur insupportables que nous fussions Ă dâautres Ă©gards, nous ne nous en dressionsoins comme un rempart entre eux et leurs ex-maĂźtres. La guerre civile crĂ©e dâĂ©trauations. Huesca se trouvait Ă moins de cinq milles de lĂ ; câĂ©tait la ville de marchs gens ; tous y avaient des parents ; durant toute leur vie, chaque semaine, ils Ă©taĂ©s y vendre leurs volailles et leurs lĂ©gumes. Et voici que depuis huit mois ils en Ă©tparĂ©s par une infranchissable barriĂšre de fils de fer barbelĂ©s et de mitrailleuses. Paa leur sortait de la mĂ©moire. Je parlais un jour Ă une vieille femme qui transportaices petites lampes en fer dans lesquelles les Espagnols brĂ»lent de lâhuile dâolive.
is-je en acheter une semblable ? demandai-je. â Ă Huesca », me rĂ©pondit-elle flĂ©chir, puis nous nous mĂźmes tous deux Ă rire. Les jeunes filles du village Ă©taienlendides crĂ©atures, Ă©clatantes de vie, aux cheveux dâun noir de jais, Ă la dĂ©malancĂ©e ; avec cela une façon de se comporter loyale, comme dâhomme Ă homme, direct de la rĂ©volution probablement.
Des hommes, vĂȘtus de chemises bleues en loques et de pantalons de velours ntes, coiffĂ©s de chapeaux de paille Ă larges bords, en train de labourer les chaarchaient derriĂšre des attelages de mulets dont les oreilles battaient au rythme des
avaient de bien mauvaises charrues qui ne faisaient quâameublir superficiellemel, sans pouvoir y creuser quelque chose qui mĂ©ritĂąt le nom de sillon. Tous lstruments dâagriculture Ă©taient dĂ©plorablement archaĂŻques, car tout Ă©tait commr le prix Ă©levĂ© du mĂ©tal. On raccommodait un soc brisĂ©, par exemple, et occommodait Ă nouveau, et tant de fois quâil finissait par nâĂȘtre plus quâun assemb
morceaux. Les rĂąteaux et les fourches Ă©taient en bois. Les bĂȘches, chez ces gensssĂ©daient rarement des souliers, Ă©taient chose inconnue ; pour creuser, ils avaientue grossiĂšre comme celles dont on se sert en Inde. Il y avait aussi une sorte de hi vous ramenait tout droit Ă la fin de lâĂąge de pierre. De la dimension environ d
ble de cuisine, elle était faite de planches jointes les unes aux autres et mortaisée
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ntaines de trous ; et dans chacun de ces trous Ă©tait coincĂ© un Ă©clat de silex quâon tenu de la forme souhaitĂ©e en sây prenant exactement comme les hommeenaient il y a dix mille ans. Je me souviens du sentiment presque dâhorreur qui sâ
mparĂ© de moi lorsque jâĂ©tais pour la premiĂšre fois tombĂ© sur un de ces instrumenntĂ©rieur dâune hutte abandonnĂ©e, dans le no manâs land. Cela me rendit maladee de penser Ă la somme de travail quâavait dĂ» exiger la fabrication dâune telle chosemisĂšre Ă ce point profonde qui faisait employer le silex au lieu de lâacier. Jâai de
rs ressenti plus de sympathie Ă lâĂ©gard de lâindustrialisme. Cependant il y avait da
lage deux tracteurs agricoles modernes, saisis sans doute sur le domaine de queand propriétaire foncier.
Une ou deux fois jâallai en me promenant jusquâau petit cimetiĂšre entourĂ© de mi se trouvait Ă environ un mille du village. Les morts du front Ă©taient en gĂ©n
ansportĂ©s Ă Sietamo ; il nây avait lĂ que les morts du village. Il diffĂ©rait singuliĂšremun cimetiĂšre anglais. Ici, aucune piĂ©tĂ© envers les morts ! Des buissons et une hmmune avaient tout envahi et des ossements humains Ă©taient Ă©parpillĂ©s partout. qui Ă©tait vĂ©ritablement surprenant, câĂ©tait lâabsence Ă peu prĂšs absolue dâinscript
igieuses sur les pierres tombales, bien que celles-ci datassent toutes dâavanvolution. Une seule fois, je crois, je vis le « Priez pour lâĂąme dâuntel » qui est cour les tombes catholiques. La plupart des inscriptions Ă©taient tout simplement profĂ©brant en de risibles poĂšmes les vertus des dĂ©funts. Une tombe peut-ĂȘtre sur quat
nq portait une petite croix ou une allusion de pure forme au ciel, et en gĂ©nĂ©ral elle Ă© plus ou moins grattĂ©e par le ciseau dâun athĂ©e zĂ©lĂ©.
Il me parut que les gens, dans cette partie de lâEspagne, sont authentiquemnuĂ©s de sentiment religieux â jâentends de sentiment religieux au sens classique. Crieuse, pas une seule fois au cours de mon sĂ©jour en Espagne je nâai vu quelquâu
gner ; il eĂ»t Ă©tĂ© pourtant plausible quâun tel geste fĂ»t devenu machinal, rĂ©volution.
Ăvidemment lâĂglise espagnole sera un jour restaurĂ©e (comme dit le proverbeit et les JĂ©suites reviennent toujours), mais il nâest pas douteux quâelle sâeffo
rsque la rĂ©volution Ă©clata, et sa faillite fut telle quâil serait inconcevable que mĂȘmoribonde Ăglise dâAngleterre en connĂ»t une semblable dans des circonstaalogues.
Aux yeux du peuple espagnol, tout au moins en Catalogne et en Aragon, lâĂglise
rement et simplement une entreprise dâescroquerie. Il est possible que larĂ©tienne ait Ă©tĂ© remplacĂ©e dans une certaine mesure par lâanarchisme dont lâinflut largement rĂ©pandue et qui a incontestablement quelque chose de religieux.
Le jour mĂȘme oĂč je revins de lâhĂŽpital, on nous fit avancer afin dâĂ©tablir la premne lĂ oĂč il Ă©tait logique quâelle fĂ»t, Ă un kilomĂštre environ plus en avant, le long tit cours dâeau qui coulait parallĂšlement au front fasciste dont il Ă©tait distant de nts mĂštres. Ce mouvement eĂ»t dĂ» ĂȘtre mis Ă exĂ©cution des mois auparavant. Sâil usquement lieu Ă prĂ©sent, câest que les anarchistes attaquaient du cĂŽtĂ© de la rouca et quâen avançant de notre cĂŽtĂ© nous obligions les fascistes Ă diviser leurs troupe
Nous passĂąmes de soixante Ă soixante-dix heures sans dormir, aussi mes souve
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mbrent-ils dans une sorte de brouillard, ou plutĂŽt ils se prĂ©sentent discontinus, coe suite dâimages : la corvĂ©e dâĂ©coute dans le no manâs land , Ă une centaine de mĂštrCasa Francesa, ferme fortifiĂ©e qui faisait partie de la premiĂšre ligne fasciste. ures Ă rester dans un affreux marĂ©cage, dans une eau sentant le roseau oĂč nos cfonçaient de plus en plus profond : lâodeur des roseaux, le froid qui engourdit
oiles fixes dans le ciel noir, les rauques coassements des grenouilles. On Ă©tait en avpendant je me souviens de cette nuit comme de la plus froide que jâaie connupagne. Ă cent mĂštres seulement en arriĂšre de nous les Ă©quipes de terrassiers Ă©taien
ein travail, mais, Ă part le chĆur des grenouilles, rien ne trouait le silence. Une ss, au cours de la nuit, jâentendis un bruit â celui bien connu que fait un sac de t
rsquâon lâaplatit Ă la pelle. Câest curieux comme, une fois de temps Ă autrepagnols peuvent rĂ©aliser des prouesses en matiĂšre dâorganisation ! LâopĂ©ration tiĂšre avait Ă©tĂ© magnifiquement concertĂ©e. En sept heures, Ă une distance de la premne fasciste variant entre cent cinquante et trois cents mĂštres, six cents homeusĂšrent une tranchĂ©e et construisirent un parapet sur douze cents mĂštres, et toutencieusement, au point que les fascistes nâentendirent rien et quâil nây eut, au cou
nuit, quâun homme de touchĂ©. Il y en eut davantage le lendemain, naturellementait assignĂ© Ă chaque homme sa tĂąche, mĂȘme aux plantons de la cuisine quâon erprise, une fois le travail achevĂ©, de voir soudain arriver avec des seaux deditionnĂ© dâeau-de-vie.
Et puis le lever du jour et les fascistes découvrant brusquement que nous étionnous semblait que la masse carrée et blanche de la Casa Francesa, bien que distanux cents mÚtres, nous dominait de tout prÚs et que les mitrailleuses des fenrnies de sacs de sable du dernier étage étaient braquées sur notre tranchée. Nstions tous à la regarder, nous demandant comment il se faisait que les fasciste
us avaient pas vus. Et soudain un dĂ©ferlement rageur de balles, et tout le monde der Ă genoux et de se mettre frĂ©nĂ©tiquement Ă creuser, afin de rendre la tranchĂ©e ofonde et dây amĂ©nager par excavation de petits abris latĂ©raux. Portant encore le brharpe, il ne mâĂ©tait pas possible de creuser et je passai la plus grande partie de urnĂ©e Ă lire un roman policier : La Disparition de lâUsurier, tel Ă©tait le titre. Je nuviens pas de lâintrigue, mais je retrouve avec une parfaite nettetĂ© les sensationsprouvai Ă ĂȘtre assis lĂ en train de le lire : sous moi la glaise un peu humide du fontranchĂ©e, le dĂ©placement continuel de mes jambes pour laisser passer des homme
hùtaient, courbés, le crac-crac-crac des balles à un ou deux pieds au-dessus de ma omas Parker reçut une balle qui lui traversa le haut de la cuisse, manquant de bienlui décerner, disait-il, un « D.S.O. »{2 } auquel il ne tenait guÚre. Il y eut, sur tou
ngueur du front, des morts et des blessĂ©s, mais ce ne fut rien en comparaison de ceĂ»t Ă©tĂ© si les fascistes nous avaient surpris la nuit pendant que nous nous portionant. MĂȘme encore Ă ce moment ils eussent pu nous massacrer sâils avaient nitiative de faire amener quelques mortiers. Ce fut une tĂąche malaisĂ©e de ramenerrriĂšre les blessĂ©s par lâĂ©troite tranchĂ©e bondĂ©e dâhommes. Je vis rĂąler un pauvre diculotte noire de sang, renversĂ© Ă bas de sa civiĂšre, agonisant. Il fallait porter les bler un long parcours, un kilomĂštre ou plus, car, mĂȘme lorsquâil existait une route
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itures dâambulance ne venaient jamais trĂšs prĂšs des premiĂšres lignes. Quand elleprochaient trop, les fascistes avaient la manie de les canonner â ce qui Ă©tait du stifiable, car personne dans la guerre moderne ne se fait scrupule dâemployer
mbulance pour transporter des munitions.Et puis, la nuit suivante, lâattente, dans la Torre FabiĂĄn, de lâattaque don
ntrordre fut donnĂ© au dernier moment par sans-fil. Dans la grange oĂč nous attendy avait, par terre, sous une mince couche de menue paille, une Ă©paisse li
ossements â ossements humains et ossements de vaches mĂȘlĂ©s â et lâendroit
festĂ© de rats. Ces immondes bĂȘtes sortaient du sol en foule, il en grouillait partout. une chose entre toutes dont jâai horreur, câest bien quâun rat me trotte dessus bscuritĂ©. Jâeus en tout cas la satisfaction dâen atteindre un dâun bon coup de poingnvoya en lâair.
Et puis lâattente, Ă cinquante ou soixante mĂštres du parapet fasciste, du signssaut. Une longue ligne dâhommes tapis dans un fossĂ© dâirrigation, avec les baĂŻonni Ă©mergent et le blanc des yeux qui luit dans le noir. Kopp et Benjamin accroupetorriĂšre nous, Ă cĂŽtĂ© dâun homme portant, attachĂ© aux Ă©paules par une courroie, un p
cepteur de T.S.F. Ă lâhorizon, du cĂŽtĂ© de lâouest, les Ă©clairs roses des coups de civis Ă intervalles de quelques secondes dâĂ©normes explosions. Et puis un pip-pip-pT.S.F. et lâordre transmis en chuchotant de nous tirer de lĂ pendant quâil en Ă©tait enmps â ce que nous fĂźmes, mais pas assez promptement. Douze pauvres gosses des JUnion des Jeunesses du P.O.U.M., correspondant aux J.S.U. du P.S.U.C.), qui avĂ© postĂ©s Ă environ quarante mĂštres seulement des fascistes, furent surpris par lâau
purent sâĂ©chapper. Tout le jour, sans autre protection que des touffes dâherberent rester lĂ , les fascistes leur tirant dessus chaque fois quâils bougeaient. Ă la tomla nuit sept dâentre eux Ă©taient morts, les cinq autres parvinrent alors Ă sâenfui
mpant dans lâobscuritĂ©.Puis, durant des jours dâaffilĂ©e, on entendit chaque matin le bruit des atta
rĂ©es par les anarchistes de lâautre cĂŽtĂ© de Huesca. Toujours le mĂȘme bruit, usquement, Ă un moment quelconque avant le point du jour, le fracas dâouvertuusieurs vingtaines de bombes explosant simultanĂ©ment â mĂȘme Ă des kilomĂštrestance, un fracas infernal et qui dĂ©chirait lâair â, et ensuite le grondement continu
massif de fusils et de mitrailleuses, lourd roulement ressemblant curieusement ulement de tambours. Peu Ă peu la fusillade gagnait de proche en proche toute
nes de retranchement qui encerclaient Huesca, et sortant en trĂ©buchant de nos us nous ruions dans la tranchĂ©e, pour nous affaler contre le parapet oĂč meurions Ă somnoler, tandis quâau-dessus de nos tĂȘtes tout Ă©tait balayĂ© par unsordonnĂ© et sans but.
Durant le jour les canons tonnaient par Ă -coups. La Torre FabiĂĄn, devenue nisine, fut en partie dĂ©truite par les obus. Ce qui est drĂŽle câest que, lorsque servez Ă distance prudente un tir dâartillerie, vous souhaitez toujours que le canoneigne le but, mĂȘme si celui-ci renferme votre dĂ©jeuner et quelques-uns de
marades. Les fascistes pointaient bien ce matin-lĂ ; peut-ĂȘtre y avait-il Ă lâĆuvretilleurs allemands. Ils encadrĂšrent parfaitement la Torre FabiĂĄn : un obus au-delĂ
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deçà , et puis wuizz-boum ! Les chevrons du comble qui Ă©clatent et sautent en lâairaque dâuralite qui tombe en vol planĂ© comme une carte Ă jouer quâon a projetĂ©e diquenaude. Par lâobus suivant, le coin dâun bĂątiment fut tranchĂ© de façon aussi e sâil eĂ»t Ă©tĂ© coupĂ© au couteau par un gĂ©ant. Mais les cuisiniers nâen servirent
oins le dĂźner Ă lâheure â exploit mĂ©morable ! Au fur et Ă mesure que les jours passaient, les canons que nous ne pouvions
ais que nous entendions commençaient chacun à prendre pour nous une personnstincte. Il y avait les deux batteries de canons russes de 75 mm qui tiraient de tout
arriĂšre de nous, et qui, je ne sais pourquoi, Ă©voquaient dans mon esprit lâimage os homme en train de frapper une balle de golf. CâĂ©taient les premiers canons rue je voyais â ou, plutĂŽt, que jâentendais. Leur trajectoire Ă©tait basse et leur tirpide, aussi entendait-on presque simultanĂ©ment lâexplosion de la gargoussflement et lâĂ©clatement de lâobus. En arriĂšre de Monflorite il y avait deux trĂšs nons qui ne tiraient que quelques coups par jour ; leur grondement Ă©tait profonurd comme lâaboiement au loin de monstres enchaĂźnĂ©s. LĂ -haut, Ă Mont-Ararteresse mĂ©diĂ©vale prise dâassaut lâannĂ©e prĂ©cĂ©dente par les troupes gouvernemen
Ă©tait, paraĂźt-il, la premiĂšre fois dans son histoire quâelle lâavait Ă©tĂ©) et qui gardaits accĂšs Ă Huesca, se trouvait une piĂšce dâartillerie lourde qui devait remonter loin XIXe siĂšcle. Ses gros obus passaient si lentement en sifflant que vous Ă©tiez certaiuvoir courir Ă cĂŽtĂ© dâeux sans vous laisser distancer. On ne peut mieux compareruit quâavec celui que fait un homme roulant Ă bicyclette tout en sifflant. Les mortieanchĂ©e, pour petits quâils fussent, Ă©taient les plus dĂ©sagrĂ©ables Ă entendre. Leurs nt en fait des sortes de torpilles Ă ailettes, de la forme de ces flĂ©chettes quâon lance jeux de bistrots, et Ă peu prĂšs de la dimension dâune bouteille dâun litre ; ils faisapartant, un fracas du diable, mĂ©tallique, comme celui de quelque monstrueuse sp
acier cendreux que lâon ferait voler en Ă©clats sur une enclume. Parfois nos avssaient tomber des torpilles aĂ©riennes dont lâĂ©pouvantable rugissement rĂ©percutĂ©cho faisait vibrer le sol mĂȘme Ă deux kilomĂštres de distance. En Ă©clatant, les obusnons fascistes antiaĂ©riens parsemaient le ciel de taches blanches semblables aux pages dâune mauvaise aquarelle, mais je nâen ai jamais vu sâĂ©panouir Ă moins llier de mĂštres dâun avion. Quand un avion pique de haut pour se servir dtrailleuse, le bruit, dâen bas, ressemble Ă un battement dâailes.
Dans notre secteur il ne se passait pas grand-chose. Ă deux cents mĂštres sur n
oite, lĂ oĂč les fascistes se trouvaient sur une Ă©minence de terrain plus Ă©levĂ©e, nardeurs descendirent quelques-uns de nos camarades. Ă deux cents mĂštres sur nuche, au pont sur la riviĂšre, une sorte de duel se poursuivait entre les mortiers fascles hommes qui Ă©taient en train de construire une barricade en bĂ©ton en travernt. Ces satanĂ©s petits obus arrivaient en sifflant, bing-crac, bing-crac !, faisancarme doublement diabolique quand ils atterrissaient sur la route asphaltĂ©e. Ă Ăštres de lĂ , vous Ă©tiez en parfaite sĂ©curitĂ© et pouviez contempler Ă votre aislonnes de terre et de fumĂ©e noire qui jaillissaient comme des arbres magiquesuvres diables autour du pont passaient une bonne partie de la journĂ©e Ă se rĂ©funs les petits abris quâils avaient creusĂ©s au flanc de la tranchĂ©e. Mais il y eut moin
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rtes quâon aurait pu sây attendre, et la barricade continua de sâĂ©lever rĂ©guliĂšrementur de deux pieds dâĂ©paisseur, avec des embrasures pour deux mitrailleuses et un non de campagne. Pour armer le bĂ©ton on devait se servir de vieux chĂąlits, le seul fut croire, quâon pĂ»t trouver pour cela.
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VI
Un aprĂšs-midi, Benjamin nous dit quâil avait besoin de quinze volontaires. Lâattla redoute fasciste, qui avait Ă©tĂ© dĂ©commandĂ©e lâautre fois, devait avoir lieu cette Jâhuilai mes dix cartouches mexicaines, ternis ma baĂŻonnette (car rien de tel qu
ïonnette qui brille pour vous faire repérer) et empaquetai une miche de pain,
uces de saucisse rouge et un cigare que ma femme mâavait envoyĂ© de Barcelone etgardais depuis longtemps en rĂ©serve. On nous distribua des bombes, trois Ă chacuuvernement espagnol Ă©tait enfin parvenu Ă en fabriquer de convenables. Dâaprincipe des grenades de Mills, mais avec deux goupilles de sĂ»retĂ© au lieu dâune. Unee celles-ci Ă©taient arrachĂ©es, il sâĂ©coulait un intervalle de sept secondes axplosion de la bombe. Leur principal inconvĂ©nient tenait Ă ce que lâune des goupait trĂšs dure Ă arracher, tandis que lâautre avait beaucoup de jeu : de sorte que lâon choix entre ou ne pas toucher aux goupilles avant le moment critique et risquer duvoir alors enlever la dure Ă temps, ou retirer celle-ci Ă lâavance et, dĂšs lors,
nstamment sur le gril avec cette bombe dans la poche qui pouvait exploser Ă stant. Mais du moins câĂ©tait une petite bombe commode Ă lancer.
Un peu avant minuit nous descendĂźmes tous les quinze, sous la conduitnjamin, Ă la Torre FabiĂĄn. Depuis le dĂ©but de la soirĂ©e il pleuvait Ă verse. Les forrigation dĂ©bordaient, et chaque fois quâen faisant un faux pas lâon dĂ©gringolait n dâeux, on avait de lâeau jusquâĂ la taille. Dans la nuit noire et sous les rafales de passĂ©s dans la cour de la ferme, indistincts, des hommes attendaient. Kopp rangua, dâabord en espagnol, puis en anglais, et nous expliqua le plan de lâattaqu
ne fasciste, en cet endroit, faisait un coude comme un L, et le parapet que nous devaquer Ă©tait situĂ© sur une Ă©lĂ©vation de terrain Ă lâangle du L. Une trentaine dâentre nmoitiĂ© Anglais, la moitiĂ© Espagnols, devaient, sous le commandement de Jorge Rtre chef de bataillon (un bataillon, dans les milices, comptait Ă peu prĂšs quatre cmmes), et de Benjamin, aller en rampant couper le barbelĂ© fasciste. Jorge lanceraemiĂšre bombe comme signal ; tous, alors, nous en enverrions une volĂ©e, refouler fascistes du parapet dont nous nous emparerions avant quâils nâaient pu se ress
multanĂ©ment, soixante-dix hommes des troupes de choc donneraient lâassaut sition fasciste voisine, qui se trouvait Ă deux cents mĂštres Ă droite de la premiĂš
iĂ©e Ă elle par un boyau. Afin que nous ne risquions pas de nous tirer mutuellemssus dans lâobscuritĂ©, nous porterions des brassards blancs. Mais juste Ă ce momenanton vint dire quâil nây avait pas de brassards blancs. On entendit dans le noir uneggĂ©rer sur un ton plaintif : « Ne pourrait-on sâarranger pour que ce soient les fasci en portent ? »
Il restait une ou deux heures Ă tirer. Dans la grange situĂ©e au-dessus de lâĂ©cuulets, les obus avaient fait de tels dĂ©gĂąts quâon nây pouvait aller et venir sans lum
moitié du plancher ayant été arrachée par un feu plongeant, on courait le danger d
ute de vingt pieds sur les pierres dâen bas. Lâun de nous trouva un pic et, sâen sermme dâun levier, dĂ©gagea du plancher une latte fendue ; en quelques minutes
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mes allumĂ© un feu et nos vĂȘtements trempĂ©s se mirent Ă fumer. Un autre camartit de sa poche un jeu de cartes. Le bruit â un de ces mystĂ©rieux bruits tmosphĂšre de la guerre engendre fatalement â courut quâon allait nous distribuefĂ© chaud arrosĂ© dâeau-de-vie. AussitĂŽt, tous de descendre Ă la queue leu patiemment, lâescalier Ă demi effondrĂ©, et de faire le tour de la cour sombrmandant çà et lĂ oĂč il fallait aller pour trouver ce cafĂ©. HĂ©las ! on ne nous distribuacafĂ©. Au lieu de cela, on nous rassembla, nous fit mettre en file indienne, et Jor
njamin foncÚrent dans les ténÚbres avec nous tous à leur suite.
Il continuait Ă pleuvoir et il faisait toujours trĂšs noir, mais le vent Ă©tait tombĂ©.ue sans nom. Les sentiers Ă travers les champs de betteraves nâĂ©taient plus quccession de mottes de terre, aussi glissantes que mĂąt de cocagne, entoummenses flaques. Bien avant dâĂȘtre arrivĂ©s Ă lâendroit oĂč nous devions quitter nopre parapet, nous Ă©tions tous tombĂ©s plusieurs fois et nos fusils Ă©taient tout couvboue. Au parapet une petite poignĂ©e dâhommes, notre rĂ©serve, Ă©taient en attente, e le mĂ©decin et une rangĂ©e de civiĂšres. Nous nous faufilĂąmes Ă travers la brĂšchrapet et pataugeĂąmes dans un autre fossĂ© dâirrigation. Bruits dâĂ©claboussemen
rgouillis. Encore une fois dans lâeau jusquâĂ la taille, et de la boue grassusĂ©abonde sâinfiltrant dans les bottes. Sur lâherbe, en dehors, Jorge attendait que ssions tous passĂ©. Puis, presque pliĂ© en deux, il commença dâavancer lentemenmpant. Le parapet fasciste Ă©tait Ă cent cinquante mĂštres environ. Notre seule chancrvenir, câĂ©tait de ne faire aucun bruit.
JâĂ©tais en tĂȘte avec Jorge et Benjamin. PliĂ©s en deux, mais la tĂȘte levĂ©e, mpions dans une obscuritĂ© presque absolue, en allant de plus en plus lentement. Nions le visage doucement battu par la pluie. Quand je regardais en arriĂšre, je disting hommes les plus proches de moi : un groupe de formes bossues, semblabl
Ă©normes champignons noirs, qui avançaient en glissant lentement. Mais chaquee je redressais la tĂȘte, Benjamin, qui Ă©tait coude Ă coude avec moi, me murmhĂ©mentement Ă lâoreille : « To keep ze head down ! To keep ze head down ! » (« GtĂȘte baissĂ©e ! Garde la tĂȘte baissĂ©e ! »). Jâaurais pu lui dire quâil nâavait pas besoin faire. Je savais par expĂ©rience que par nuit noire il nâest pas possible de voimme Ă vingt pas. Ce qui importait bien davantage, câĂ©tait dâavancer silencieusemen
mais ils venaient Ă nous entendre, nous serions fichus. Il leur suffirait dâarrosenĂšbres devant eux avec leurs mitrailleuses et il ne nous resterait pas dâautre altern
e fuir ou nous laisser massacrer.Mais sur ce terrain dĂ©trempĂ© il Ă©tait presque impossible de se mouvoir sans bn avait beau faire, les pieds collaient Ă la boue et Ă chaque pas en avant que lâon fa
entendait flop-flop, flop-flop. Et pour comble de malchance le vent Ă©tait tomalgrĂ© la pluie, câĂ©tait une nuit trĂšs calme. Les sons devaient porter loin. Il y eustant terrible lorsque, ayant heurtĂ© du pied un bidon, je mâimaginai que suromĂštres Ă la ronde tous les fascistes avaient dĂ» entendre. Mais non, pas un bruitcoup de fusil en rĂ©ponse, aucun mouvement dans les lignes fascistes. Nous avancrampant de plus en plus lentement. Je ne puis vous donner une idĂ©e de lâintensi
on dĂ©sir dâarriver. Simplement dâarriver assez prĂšs pour pouvoir lancer les bom
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ant quâils ne nous aient entendu approcher. En un tel moment, on nâa mĂȘme pas pulement une furieuse envie dĂ©sespĂ©rĂ©e de franchir lâintervalle de terrain. Jâai Ă©practement la mĂȘme chose en chassant Ă lâaffĂ»t un animal sauvage, le mĂȘme drturant dâĂȘtre Ă portĂ©e, la mĂȘme certitude comme en un rĂȘve que ce sera impossiblmme la distance sâĂ©tirait ! Je connaissais bien le terrain, il nây avait que cent cinquĂštres Ă franchir, mais ces cent cinquante-lĂ nous faisaient lâeffet de plus de milmper Ă cette allure on se rend compte, comme une fourmi pourrait le fairensidĂ©rables inĂ©galitĂ©s de terrain : ici, ce magnifique carrĂ© dâherbe souple ; lĂ , ce m
urbier et ces hauts roseaux bruissants quâil faut Ă©viter, et ce tas de pierres qui lĂšve presque tout espoir, tant il paraĂźt impossible de pouvoir le franchir sans fairuit.
Nous rampions depuis une Ă©ternitĂ©, me semblait-il, et je commençais Ă croireus nous Ă©tions trompĂ©s de direction. Mais voici que sur le fond noir de la vinrent faiblement visibles les grĂȘles lignes parallĂšles de quelque chose de plus core. CâĂ©tait le barbelĂ© extĂ©rieur. (Les fascistes en avaient Ă©tabli deux rĂ©seaux.) Jgenouilla, fouilla dans sa poche. CâĂ©tait lui qui avait notre unique pince coup
ep ! Snep ! Avec prĂ©caution nous soulevĂąmes et Ă©cartĂąmes la partie pendante. NendĂźmes que les hommes en arriĂšre de nous nous eussent rejoints. Il nous semâils faisaient un bruit Ă©pouvantable. Nous devions ĂȘtre Ă prĂ©sent Ă cinquante mĂštrerapet fasciste. Nous nous remĂźmes Ă avancer, courbĂ©s en deux. Ă pas de loupaissant le pied aussi doucement quâun chat lorsquâil sâapproche dâun trou de souis un arrĂȘt pour Ă©couter, puis un autre pas. Une fois je relevai la tĂȘte ; en silnjamin mâappliqua sa paume sur la nuque et avec violence la courba vers le sovais que le barbelĂ© fasciste nâĂ©tait quâĂ vingt mĂštres Ă peine du parapet. Il me paraivraisemblable que trente hommes pussent y parvenir sans quâon les entendĂźt. Le
ul de notre respiration devait suffire Ă nous trahir. Et pourtant, nous y parvĂźnmes. Nuvions Ă prĂ©sent distinguer le parapet fasciste ; sombre, sa ligne de faĂźte sâestompadressait devant nous, semblant nous dominer de haut. De nouveau Jorge sâagenou
uilla dans ses poches. Snep ! Snep ! Pas moyen de cisailler ça sans bruit.CâĂ©tait bien le rĂ©seau intĂ©rieur. Nous nous glissĂąmes au travers Ă quatre pattes e
u plus rapidement. Si nous avions à présent le temps de nous déployer, tout irait rge et Benjamin se mirent à ramper vers la droite. Mais les hommes en arriÚre
aient disséminés, avaient à se ranger en une seule file pour passer par la brÚche ét
atiquée dans le barbelé et, juste à ce moment, du parapet fasciste partit un éclair, une détonation. La sentinelle avait fini par nous entendre. Jorge se mit en équilibrgenou et balança son bras comme un joueur de boules. Sa bombe alla éclater que
rt au-delĂ du parapet. InstantanĂ©ment, beaucoup plus rapidement quâon ne lâeĂ»ssible, se dĂ©clencha, du parapet fasciste, un feu roulant de dix ou vingt fusils. Somute, ils nous attendaient. Un bref instant on pouvait voir les sacs de terre dans la lafarde. Nos hommes, restĂ©s trop en arriĂšre, lançaient leurs bombes et quelques-unles-ci tombĂšrent en deçà du parapet. Chaque meurtriĂšre semblait lancer des dardmme. Câest une chose quâon dĂ©teste toujours de se trouver sous le feu de lâennemi noir â on a lâimpression dâĂȘtre personnellement visĂ© par chaque Ă©clair de cou
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sil â, mais le pire, câĂ©taient encore les bombes. On ne peut en concevoir lâhorreurâon nâen a pas vu une Ă©clater Ă proximitĂ© de soi, et la nuit ; durant le jour il nây a q
acas de lâexplosion, dans lâobscuritĂ© il sây ajoute lâaveuglante clartĂ© rouge. Je mâĂ©taiserre dĂšs la premiĂšre dĂ©charge ; je restai tout ce temps couchĂ© sur le flanc dans la
uante, Ă lutter furieusement avec la goupille dâune bombe ; cette sacrĂ©e goupillulait pas sortir. Finalement je me rendis compte que je la tordais dans le mauvais sla sortis, me redressai sur les genoux, lançai la bombe avec force et me rejetai Ă tbombe Ă©clata vers la droite, Ă lâextĂ©rieur du parapet ; la peur mâavait fait mal viser.
oment prĂ©cis, une autre bombe Ă©clata en plein devant moi, si prĂšs que je sentaleur de lâexplosion. Je mâaplatis autant que je pus, enfouissant si violemment age dans la boue que je me fis mal au cou et crus ĂȘtre blessĂ©. Ă travers le frntendis derriĂšre moi la voix dâun Anglais dire calmement : « Je suis touchĂ©. » De fambe avait autour de moi blessĂ© plusieurs hommes, mâĂ©pargnant. Je me remis Ă gelançai ma seconde bombe. Jâai oubliĂ© oĂč celle-ci Ă©clata.
Les fascistes tiraient, les nĂŽtres, derriĂšre nous, tiraient, et jâavais parfaitemnscience dâĂȘtre au milieu. Je sentis le souffle dâune dĂ©charge et compris que j
rriĂšre moi un homme faisait feu. Je me dressai sur mes pieds et lui criai : « Nenc pas sur moi, bougre dâidiot ! » Ă ce moment je vis que Benjamin, qui Ă©tait Ă diinze mĂštres de moi sur ma droite, me faisait des signes avec le bras. Je couruoindre. Il fallait pour cela traverser la zone sous le feu des meurtriĂšres et jeuviens quâen la franchissant je me collai la main gauche sur la joue â geste stupidest ! comme si une balle pouvait ĂȘtre arrĂȘtĂ©e par une main ! â mais jâavais en hore blessure Ă la figure. Benjamin se tenait sur un genou et, le visage empreint dtisfaction diabolique, tirait avec son pistolet automatique en visant les Ă©clairs. Jait tombĂ© blessĂ© Ă la premiĂšre dĂ©charge et gisait quelque part, invisible
agenouillai Ă cĂŽtĂ© de Benjamin et, aprĂšs en avoir arrachĂ© la goupille, lançaioisiĂšme bombe. Ah ! pas de doute cette fois-ci ! Ce fut bien Ă lâintĂ©rieur du parapetbombe Ă©clata, dans lâangle, juste Ă cĂŽtĂ© du nid de la mitrailleuse.
Le tir des fascistes sembla trĂšs brusquement sâĂȘtre ralenti. Benjamin bondit sueds et cria : « En avant ! Chargez ! » Nous nous Ă©lançùmes sur la pente raide en hauquelle se dressait le parapet. Je dis « Ă©lançùmes », mais « gravĂźmes lourdement » sus juste ; le fait est quâon ne peut se mouvoir lestement quand on est trempĂ©, cou
boue de la tĂȘte aux pieds et avec cela alourdi par le poids dâun gros fusil, d
ĂŻonnette et de cent cinquante cartouches. Je ne mettais pas en doute quâil y eĂ»mmet, mâattendant, un fasciste. De si prĂšs, sâil tirait, il ne pourrait pas me manqurtant, je ne sais pourquoi, pas un instant je ne mâattendis Ă ce quâil tirĂąt, mais bquâil tĂąchĂąt de mâavoir Ă la baĂŻonnette. Il me semblait dĂ©jĂ sentir par avance le chos baĂŻonnettes se croisant, et je me demandais laquelle, de la sienne ou de la mierait la plus rĂ©sistante. Mais il nây avait pas de fasciste Ă mâattendre au sommet. Avegue sentiment de soulagement je mâaperçus que le parapet Ă©tait trĂšs bas et que lesterre offraient une bonne assiette pour le pied. En gĂ©nĂ©ral ils sont difficiles Ă fran
lâintĂ©rieur, tout avait Ă©tĂ© mis en miettes, un peu partout des poutres et de graaques dâuralite gisaient Ă terre dans un dĂ©sordre chaotique... Nos bombes av
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moli les baraquements et les cagnas. Pas une Ăąme visible. Pensant quâils devaienir aux aguets, cachĂ©s quelque part sous terre, je criai en anglais (Ă ce moment-arrivais plus Ă me souvenir dâun seul mot espagnol) : « Sortez de lĂ ! Rendez-vouucune rĂ©ponse. Mais, un instant plus tard, un homme, silhouette sombre dans le dur, sauta par-dessus le toit dâun baraquement effondrĂ© et fila vers la gaucheĂ©lançai Ă sa poursuite en donnant en pure perte dans le noir des coups de baĂŻonnmme je contournais le coin de ce baraquement je vis un homme â je ne sais si câĂ©ta
ĂȘme que celui que jâavais vu prĂ©cĂ©demment â sâenfuir par le boyau qui menait Ă lâa
sition fasciste. Je ne devais pas ĂȘtre bien loin de lui, car je le voyais trĂšs nettemenait nu-tĂȘte et paraissait nâavoir sur lui quâune couverture quâil tenait serrĂ©e autous Ă©paules. Si je mâĂ©tais mis Ă tirer, jâeusse pu le transformer en passoire. Mais de cre nous ne canardions les nĂŽtres, ordre nous avait Ă©tĂ© donnĂ© de nâemployer, unee nous serions Ă lâintĂ©rieur du parapet, que nos baĂŻonnettes ; et, du reste, lâidĂ©e de mâeffleura mĂȘme pas. Au lieu de cela ma pensĂ©e fit un bond de vingt ans en arriĂšrevis notre moniteur de boxe au collĂšge me montrant par une vivante pantommment il avait, avec sa baĂŻonnette, embrochĂ© un Turc aux Dardanelles. Je saisis
sil par la poignĂ©e de la crosse et je portai une botte au dos de lâhomme. Il sâen falluu que je ne lâatteignisse. Une nouvelle botte ; trop courte encore. Et nous fĂźmes un chemin en continuant, lui de se ruer dans le boyau, et moi de courir sur le rem
rĂšs lui, en cherchant dâen haut Ă lui piquer les omoplates, sans jamais y parvenir tot. Quand jây repense, câest pour moi un souvenir comique, mais jâimagine que pou
doit ĂȘtre moins comique.Naturellement, connaissant le terrain beaucoup mieux que moi, il eut vite fa
Ă©chapper. De retour Ă la position, je la trouvai pleine dâhommes et de vacarme. Le la fusillade avait quelque peu diminuĂ©. Les fascistes nous arrosaient toujours sur
tĂ©s dâun feu nourri, mais il venait de plus loin Ă prĂ©sent. Nous les avomentanĂ©ment refoulĂ©s. Je me souviens dâavoir pris le ton dâun oracle pour dNous pouvons tenir ici une demi-heure, mais pas plus. » Pourquoi dis-je une dure, je lâignore. En regardant par-dessus le parapet, Ă droite, on voyait dâinnombraairs verdĂątres poignarder les tĂ©nĂšbres ; mais câĂ©taient des coups de fusil tirĂ©s loius, Ă cent ou deux cents mĂštres. Nous avions pour tĂąche Ă prĂ©sent de fouillsition et de faire butin de tout ce qui en valait la peine. Benjamin et quelques au
aient dĂ©jĂ en train de chercher Ă quatre pattes dans les dĂ©combres dâun g
raquement ou abri situĂ© au centre de la position. Benjamin avançait en chancrmi les ruines du toit, tirant avec effort par sa poignĂ©e en corde une caissunitions, et plein dâune joyeuse agitation.
« Camarades ! Des munitions ! Il y en a en abondance, ici !â Nous nâavons pas besoin de munitions, dit une voix, câest de fusils que nous a
soin. »CâĂ©tait vrai. La moitiĂ© de nos fusils, sâĂ©tant enrayĂ©s Ă cause de la boue, Ă©ta
utilisables. Ils pouvaient se nettoyer, mais dans lâobscuritĂ© il est dangereux dâenun fusil la culasse mobile : on la pose quelque part Ă terre et ensuite on ne peut pltrouver. Jâavais une minuscule lampe Ă©lectrique de poche que ma femme avai
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heter Ă Barcelone, mais câĂ©tait tout ce que nous possĂ©dions Ă nous tous en famiĂšre. Quelques hommes qui avaient des fusils en bon Ă©tat se mirent Ă tirailler daniĂšre dĂ©cousue dans la direction des lointains Ă©clairs. Personne nâosait tirer pidement ; mĂȘme les meilleurs de nos fusils avaient une disposition Ă sâenrayerauffaient trop. Nous Ă©tions seize environ Ă lâintĂ©rieur du parapet, en comptant uux blessĂ©s. Un certain nombre de blessĂ©s, Anglais et Espagnols, gisaient Ă lâextĂ©rtrick OâHara, un Irlandais de Belfast qui avait un peu la pratique des premiers sonner, pansait les blessĂ©s, faisant la navette pour venir chercher des paquet
nsements, et, naturellement, chaque fois quâil revenait vers le parapet on lui ssus, bien quâil hurlĂąt sur un ton indignĂ© « P.O.U.M. ! »
Nous commençùmes Ă inspecter la position. Il y avait çà et lĂ plusieurs mortsaient mais je ne mâarrĂȘtai pas Ă les examiner. Ce que je cherchais câĂ©tait la mitraillndant tout le temps que nous avions passĂ© Ă plat ventre Ă lâextĂ©rieur du parape
avais cessĂ© de me demander vaguement pourquoi donc elle ne tirait pas. Je projetsceau lumineux de ma lampe Ă©lectrique Ă lâintĂ©rieur du nid de mitrailleuse. Crception ! La mitrailleuse nây Ă©tait pas. Le trĂ©pied, plusieurs caisses de munitions e
Ăšces dĂ©tachĂ©es se trouvaient encore lĂ , mais la mitrailleuse, elle, avait disparuvaient lâavoir dĂ©vissĂ©e et emportĂ©e dĂšs la premiĂšre alerte. Sans doute nâavaient-ilâexĂ©cuter des ordres, mais câĂ©tait stupide et lĂąche dâavoir fait cela, car sâils avaient lplace la mitrailleuse, il leur eĂ»t Ă©tĂ© parfaitement possible de nous massacrer jusq
rnier. Nous Ă©tions furieux. Nous avions Ă cĆur de nous emparer dâune mitrailleuseNous furetĂąmes dans tous les coins, mais ne trouvĂąmes que des choses nâa
Ăšre de valeur. ĂĂ et lĂ traĂźnaient, en quantitĂ©, des bombes fascistes â un type de bossablement infĂ©rieur, que lâon faisait exploser en tirant un cordon â et jâen misire dans ma poche comme souvenirs. On ne pouvait pas ne pas ĂȘtre frappĂ© p
nuement et la misĂšre des cagnas fascistes. Le fouillis de vĂȘtements de rechangeres, de victuailles, de petits objets personnels que lâon voyait dans nos propres caĂ©tait complĂštement absent ; ces pauvres conscrits non payĂ©s semblaient ne poss
e des couvertures et quelques quignons de pain mal cuit. Tout Ă fait Ă lâextrĂ©mitĂ© sition se trouvait un petit abri qui Ă©tait construit en partie au-dessus du sol et po
une minuscule fenĂȘtre. Nous projetĂąmes le faisceau de lumiĂšre de la torche Ă©lectriqavers la fenĂȘtre et aussitĂŽt nous poussĂąmes un hourra. Il y avait, appuyĂ© contre le ns un Ă©tui en cuir, un objet cylindrique de quatre pieds de haut et de six pouce
amĂštre. De toute Ă©vidence le canon de la mitrailleuse ! PrĂ©cipitamment nous fĂźmur de la cagna, cherchant la porte, et nous entrĂąmes pour dĂ©couvrir que lâobjet enfens lâĂ©tui de cuir nâĂ©tait pas une mitrailleuse, mais quelque chose qui, dans notre arpourvue de matĂ©riel de campagne, Ă©tait encore plus prĂ©cieux. CâĂ©tait une Ă©nongue-vue, dont le pouvoir de grossissement devait probablement ĂȘtre au moinixante ou soixante-dix fois, avec un pied pliant. Câest bien simple, une longuemblable, il nâen existait pas sur le front de notre cĂŽtĂ© et on en avait un trĂšs gsoin. Nous la portĂąmes dehors en triomphe et lâappuyĂąmes contre le parapet, ntention de lâemporter plus tard.
Ă ce moment prĂ©cis, quelquâun cria que les fascistes Ă©taient en train de nous ce
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est certain que le fracas de la fusillade Ă©tait devenu beaucoup plus intense. Maiute Ă©vidence, les fascistes nâallaient pas contre-attaquer de la droite, ce qui les aligĂ©s Ă traverser le no manâs land et Ă donner lâassaut Ă leur propre parapet. aient le moindre bon sens, ils allaient nous tomber dessus en nous prenant Ă reverntournant les abris, je me rendis de lâautre cĂŽtĂ©. La position avait Ă peu prĂšs la foun fer Ă cheval, les abris Ă©tant au centre, si bien que nous Ă©tions couverts sur la gar un autre parapet. De cette direction venait un feu nourri, mais ce nâĂ©tait pas ce qait de grave. Le point faible Ă©tait tout Ă fait de face, lĂ oĂč il nâexistait aucune protec
n flot de balles passaient juste au-dessus de nos tĂȘtes. Elles devaient venir de lâasition fasciste, de la plus Ă©loignĂ©e ; il Ă©tait manifeste que les troupes de choc au boumpte ne lâavaient pas conquise. Entre-temps le fracas Ă©tait devenu assourdisĂ©tait le grondement ininterrompu, comme un roulement de tambours, dâune fusiassive, que je nâavais eu jusquâalors lâoccasion dâentendre que dâune certaine distaur la premiĂšre fois, je me trouvais en plein milieu. Entre-temps la fusillade turellement gagnĂ© tout le long de la ligne de feu, sur des kilomĂštres Ă lâentour. Douompson, avec un bras blessĂ© ballant dont il ne pouvait plus se servir, Ă©tait ap
ntre le parapet et faisait feu dâune seule main dans la direction des Ă©clairs. Un homnt le propre fusil sâĂ©tait enrayĂ© lui rechargeait le sien.Nous Ă©tions quatre ou cinq de ce cĂŽtĂ©-ci de la position. Ce quâil nous fallait
utait aux yeux. Il fallait retirer les sacs de terre du parapet de front et construirerricade en travers de lâouverture non protĂ©gĂ©e du fer Ă cheval. Et il fallait faire ur lâheure les balles passaient au-dessus de nous, mais Ă tout instant lâennemi pou
minuer la hauteur de son tir ; et Ă en juger dâaprĂšs les Ă©clairs, nous devions avoir cous cent ou deux cents hommes. Nous nous mĂźmes Ă dĂ©gager les sacs de terre,
ansporter Ă vingt mĂštres de lĂ et Ă les empiler Ă la va-comme-je-te-pousse. Quelle
sogne ! CâĂ©taient de grands sacs de terre, pesant chacun un quintal, et lâon nâavaiop de toute sa force pour les Ă©branler ; et puis la toile de sac moisie se fendait et la tmide vous tombait dessus en cascade, vous dĂ©goulinait dans le cou et le long des me souviens que jâĂ©prouvais une profonde horreur de tout : du chaos, de lâobscuritpouvantable vacarme, des allĂ©es et venues dans la boue en manquant de tomberands efforts Ă dĂ©ployer en luttant avec ces sacs de terre sur le point de crever â et dr-dessus le marchĂ©, tout le temps encombrĂ© par mon fusil que je nâosais poseainte de le perdre. Jâen arrivai mĂȘme Ă crier Ă un camarade, tandis que nous avanc
chancelant, un sac de terre entre nous deux : « Et voilĂ la guerre ! Une fooperie, hein ? » Soudain nous vĂźmes de hautes silhouettes sauter Ă la file par-dessrapet de front. Lorsquâelles furent plus prĂšs de nous, nous pĂ»mes voir quârtaient lâuniforme des troupes de choc, et nous poussĂąmes des hourras, croyanttaient des renforts. Mais ils nâĂ©taient que quatre : trois Allemands et un Espa
ous apprĂźmes par la suite ce qui Ă©tait arrivĂ© aux hommes des troupes de choc. Innaissaient pas le terrain et dans lâobscuritĂ© ils nâavaient pas Ă©tĂ© menĂ©s au bon endtaient trouvĂ©s pris dans le barbelĂ© fasciste, et beaucoup dâentre eux y avaient Ă©tĂ© s quatre-lĂ , sâĂ©tant Ă©garĂ©s, nâavaient pas suivi le reste de la troupe, heureusement x ! Les Allemands ne parlaient pas un mot dâanglais, de français ou dâespagnol
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us. Difficilement et avec force gestes, nous leur expliquĂąmes ce que nous Ă©tions en faire et nous les persuadĂąmes de nous aider Ă construire la barricade.
Les fascistes avaient fini par amener une mitrailleuse. Elle Ă©tait visible, ragmme un pĂ©tard, Ă cent ou deux cents mĂštres de nous ; sans arrĂȘt les balles passa-dessus de nos tĂȘtes avec un crĂ©pitement Ă donner le frisson. Nous eĂ»mes bientĂŽtplace assez de sacs pour constituer un garde-corps bas derriĂšre lequel les quel
mmes se trouvant de ce cĂŽtĂ© de la position purent se coucher et tirer Je me tinoux derriĂšre eux. Un obus de mortier passa en sifflant et alla Ă©clater quelque part no manâs land. CâĂ©tait lĂ un nouveau danger, mais il leur faudrait bien quelnutes pour rectifier leur tir. Maintenant que nous avions fini de nous battre ave
audits sacs de terre, tout cela Ă©tait en un sens assez amusant : le fracas, lâobscupproche des Ă©clairs, et nos hommes, en rĂ©ponse, les prenant pour cibles. On ĂȘme le temps de rĂ©flĂ©chir un peu. Je me suis demandĂ©, il mâen souvient, si jâavais pjâai tranchĂ© par la nĂ©gative. Ă lâextĂ©rieur de la position, oĂč probablement jâavais c
danger moindre, je mâĂ©tais senti Ă demi malade de peur. Soudain on entenduveau crier que les fascistes Ă©taient en train de nous encercler. Cette fois, il nây
s de doute, les Ă©clairs Ă©taient beaucoup plus proches. Jâen vis jaillir un Ă vingt mĂštine. Il Ă©tait clair quâils sâouvraient un chemin et arrivaient par le boyau. Ă vingt mÚétaient Ă bonne distance pour lancer des bombes ; nous Ă©tions lĂ huit ou neuf se uns contre les autres et une seule bombe bien placĂ©e suffirait Ă nous rĂ©duire touettes. Bob Smillie, du sang coulant dâune petite blessure au visage, se redr
vement sur un genou et jeta une bombe. Nous nous fĂźmes tout petits, attenxplosion. Tandis quâelle fendait lâair, lâamorce fusa en rougeoyant, mais la boexplosa pas. (Au moins une sur quatre de ces bombes ratait.) Il ne me restait plumbes, exceptĂ© les fascistes, dont je connaissais mal le fonctionnement. En cria
mandai aux autres si quelquâun avait encore une bombe en rĂ©serve. Douglas Moylepoche et mâen passa une. Je la lançai et me jetai visage contre terre. Par un de
ups de chance comme il nâen arrive environ quâune fois par an, jâavais rĂ©ussi Ă envbombe exactement lĂ oĂč jâavais vu jaillir lâĂ©clair dâun coup de fusil. Il y eut dâabo
acas de lâexplosion et puis, tout de suite, une clameur atroce : des hurlements etmissements. Nous en avions toujours touchĂ© un ; jâignore sâil en mourut, mais cun doute il Ă©tait griĂšvement blessĂ©. Pauvre diable ! Pauvre diable ! JâĂ©proguement de la peine en lâentendant crier de douleur. Mais au mĂȘme instant, Ă la f
eur des coups de feu, je vis ou crus voir une silhouette debout prĂšs de lâendroit nait de jaillir un Ă©clair. Je levai vivement mon fusil et lĂąchai la dĂ©tente. De nouvearlement. Mais je crois que câĂ©tait toujours lâeffet de la bombe. Nous lançùmes en
usieurs bombes. Les éclairs que nous vßmes ensuite étaient beaucoup plus éloignnt mÚtres ou plus. Ainsi donc nous les avions repoussés, tout au momentanément.
Alors nous nous mĂźmes tous Ă jurer Ă qui mieux mieux, demandant pourantre lâon ne nous avait pas envoyĂ© de renforts. Avec un fusil-mitrailleur, ou avec vmmes armĂ©s de fusils en bon Ă©tat, nous pourrions tenir lĂ contre un bataillon.
oment, Paddy Donovan, qui Ă©tait commandant en second et que Benjamin avait en
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âarriĂšre chercher des ordres, escalada le parapet de front.« HĂ© ! Sortez tous de lĂ ! Ordre de nous replier immĂ©diatement !â Hein ?â Ordre de se replier ! Sortez de lĂ !â Mais pourquoi ?â Câest un ordre ! Retour Ă nos lignes, et en vitesse ! »DĂ©jĂ les hommes Ă©taient en train de franchir le parapet de front. Quelques
entre eux sâescrimaient Ă faire passer par-dessus une pesante caisse de munition
ngeai soudain Ă la longue-vue que jâavais laissĂ©e appuyĂ©e contre le parapet de lâatĂ© de la position. Mais Ă ce moment je vis les quatre hommes des troupes de choc, ute exĂ©cutant des ordres mystĂ©rieux quâon leur avait prĂ©cĂ©demment donnĂ©s, parturant dans le boyau. Il menait Ă lâautre position fasciste, et donc â sâils allaient jusâ Ă la mort certaine pour eux. DĂ©jĂ ils se fondaient dans lâobscuritĂ©. Je courus ax en cherchant Ă me rappeler quel est le mot espagnol pour dire « revenezalement je criai : « AtrĂĄs ! AtrĂĄs ! » Peut-ĂȘtre que ça disait bien ce que je voulais
Espagnol comprit et fit rebrousser chemin aux autres. Paddy attendait au parapet.
« Allons ! Grouillez-vous un peu !â Mais la longue-vue !â Je mâen fous de la longue-vue ! Benjamin attend Ă lâextĂ©rieur ! »Nous sortĂźmes de la position en escaladant le parapet. Paddy maintint Ă©car
rbelĂ© pour mâaider Ă passer. AussitĂŽt que nous eĂ»mes quittĂ© lâabri du parapet fascus nous trouvĂąmes sous une fusillade infernale ; les balles semblaient arriver sur tous les cĂŽtĂ©s Ă la fois. Une bonne part dâentre elles, jâen suis persuadĂ©, nous Ă©ta
voyĂ©es par les nĂŽtres, car tout le long du front tout le monde tirait. Dans querection quâon sâengageĂąt, une averse de balles en venait. Nous Ă©tions menĂ©s de-ci d
ns le noir, comme un troupeau de moutons. Et par surcroĂźt nous traĂźnions avec noisse de munitions conquise (une de ces caisses qui contiennent mille sept nquante balles et pĂšsent environ cinquante kilos), ainsi quâune caisse de bombusieurs fusils fascistes. En lâespace de quelques minutes, bien que les deux parapessent pas Ă plus de deux cents mĂštres lâun de lâautre et que la plupart dâentre nnussent le terrain, nous nous trouvĂąmes complĂštement Ă©garĂ©s. Nous avancionsard dans un champ boueux en glissant Ă chaque pas, ne sachant plus quâune chst quâon nous tirait dessus des deux cĂŽtĂ©s. Il nây avait pas de lune pour nous gu
ais il commençait Ă faire moins noir. Nos lignes Ă©taient situĂ©es Ă lâest de Huescaoposai de rester oĂč nous Ă©tions jusquâĂ ce que les premiĂšres lueurs de lâaube rmissent de savoir oĂč Ă©tait lâest et oĂč Ă©tait lâouest ; mais les autres sây opposĂšrent. NilĂ donc repartis Ă glisser, changeant de direction Ă plusieurs reprises et nous relaur charrier la caisse de munitions. Enfin nous vĂźmes se dessiner confusĂ©ment deus la ligne basse et plate dâun parapet. Ce pouvait ĂȘtre le nĂŽtre, mais ce pouvait ssi bien ĂȘtre celui des fascistes ; aucun de nous nâavait dâidĂ©e prĂ©cise Ă ce snjamin rampa sur le ventre Ă travers de hautes et blanchĂątres herbes folles et, lors
t à vingt mÚtres à peu prÚs du parapet, il se hasarda à pousser un qui-vive. LP.O.U.M. ! » lui répondit. Nous sautùmes sur nos pieds, retrouvùmes notre chem
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ng du parapet, pataugeĂąmes une fois de plus dans le fossĂ© dâirrigation â clapotemenrgouillis â et nous fĂ»mes hors de danger.
Ă lâintĂ©rieur du parapet Kopp attendait avec quelques Espagnols. Le mĂ©decin eancardiers Ă©taient partis. Tous les blessĂ©s avaient Ă©tĂ© ramenĂ©s, Ă ce quâil paraissxception de Jorge et dâun de nos hommes, du nom de Hiddlestone, qui Ă©taient disppp faisait les cent pas, trĂšs pĂąle. Jusquâaux bourrelets de graisse de sa nuque
aient pĂąles ; il ne prĂȘtait aucune attention aux balles qui, passant au-dessus du pars, crĂ©pitaient au niveau de sa tĂȘte. Nous Ă©tions, pour la plupart dâentre nous, assi
s talons, Ă lâabri derriĂšre le parapet. Kopp marmottait : « Jorge ! Coño ! Jorge !is en anglais : « If Jorge is gone it is terreeble, terreeble ! » Jorge Ă©tait sonrsonnel et lâun de ses meilleurs officiers. Brusquement il se tourna vers noumanda cinq volontaires, deux Anglais et trois Espagnols, pour aller Ă la recherchesparus. Moyle et moi, ainsi que trois Espagnols, nous nous proposĂąmes.
Nous Ă©tions dĂ©jĂ Ă lâextĂ©rieur de nos lignes lorsque les Espagnols murmurĂšrentmmençait Ă faire dangereusement jour. CâĂ©tait tout Ă fait vrai ; le ciel deveguement bleu. Un effrayant tapage de voix animĂ©es nous parvint de la redoute fasc
anifestement ils avaient rĂ©occupĂ© lâendroit en beaucoup plus grand nomâauparavant. Nous Ă©tions Ă soixante ou soixante-dix mĂštres du parapet quand ils duus voir ou nous entendre, car ils nous envoyĂšrent une bonne rafale qui nous fit er visage contre terre. Lâun dâeux lança une bombe par-dessus le parapet â signe cepanique. Nous demeurions allongĂ©s dans lâherbe, attendant lâoccasion favorabl
us remettre en route, quand nous entendĂźmes ou crĂ»mes entendre â je suis perse ce fut pure imagination, mais Ă ce moment-lĂ il nous sembla que câĂ©tait parfaitem
el â que les voix des fascistes se rapprochaient. Ils avaient quittĂ© leur parapet et ivaient. « Sauve-toi », hurlai-je Ă Moyle, et je sautai sur mes pieds. Et, bontĂ© div
mme jâai couru ! Un peu plus tĂŽt, cette nuit-lĂ , jâavais pensĂ© quâon ne peut pas coand on est trempĂ© de la tĂȘte aux pieds et alourdi par le poids dâun fusil ertouches ; jâapprenais Ă prĂ©sent que lâon peut toujours courir quand on croit avoir ousses une cinquantaine ou une centaine dâhommes armĂ©s. Mais si je pouvais coe, dâautres pouvaient courir encore plus vite. Dans ma fuite, je fus dĂ©passĂ© Ă ture par quelque chose quâon aurait pu prendre pour un essaim dâĂ©toiles filaĂ©taient les trois Espagnols qui, prĂ©cĂ©demment, avaient Ă©tĂ© en tĂȘte. Ils se retrouvĂšretre propre parapet avant dâavoir pu sâarrĂȘter et que jâaie pu les rattraper. La vĂ©ritĂ©
e nous avions les nerfs Ă bout. Mais, sachant que dans le demi-jour un homme ĂȘtre pas vu lĂ oĂč cinq le sont sĂ»rement, je repartis seul. Je rĂ©ussis Ă atteindre le batĂ©rieur et fouillai le terrain du mieux que je pus â ce qui nâest pas beaucoup dire, ce fallait rester Ă plat ventre. Ne trouvant trace nulle part ni de Jorge ni de Hiddlesrebroussai chemin, toujours en rampant. Nous apprĂźmes par la suite que Jorgddlestone avaient dĂ©jĂ Ă©tĂ© conduits plus tĂŽt au poste de secours. Jorge Ă©tait lĂ©gĂšrem
essĂ© Ă lâĂ©paule ; Hiddlestone avait Ă©tĂ© affreusement blessĂ© : une balle lui avait labbras gauche sur toute sa longueur, brisant lâos en plusieurs endroits, et tandis ait Ă terre, rĂ©duit Ă lâimpuissance, une bombe avait Ă©clatĂ© prĂšs de lui, lui infligcore dâautres blessures sur le reste du corps. Je suis heureux de pouvoir dire quâil
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abli. Il mâa racontĂ© plus tard que, pour regagner nos lignes, il avait parcouru une pstance en glissant sur le dos, puis il sâĂ©tait cramponnĂ© Ă un Espagnol blessĂ© eidant mutuellement, ils avaient rĂ©ussi Ă rentrer.
Il faisait maintenant tout Ă fait jour. Tout le long du front, sur des kilomĂštntour, des coups de feu dĂ©sordonnĂ©s et vides de sens tonnaient, comme la pluientinue Ă tomber aprĂšs un orage. Je revois lâaspect de dĂ©solation de tout, le sol fang peupliers Ă©plorĂ©s, lâeau jaune dans les bas-fonds de la tranchĂ©e ; et les visagesmmes, Ă©puisĂ©s, non rasĂ©s, balafrĂ©s de boue et noircis de fumĂ©e jusquâaux y
rsque je rentrai dans ma cagna, les trois hommes avec qui je la partageais Ă©taientongĂ©s dans un profond sommeil. Ils sâĂ©taient laissĂ©s tomber Ă terre encore tout Ă©quserrant contre eux leur fusil boueux. Ă lâintĂ©rieur de lâabri comme au dehors tout prĂ©gnĂ© dâhumiditĂ©. En cherchant bien, je parvins Ă rassembler assez de brind
ches pour faire un tout petit feu. Puis je fumai le cigare que jâavais gardĂ© en rĂ©seri, chose Ă©tonnante, ne sâĂ©tait pas brisĂ© au cours de cette nuit.
Nous apprĂźmes aprĂšs coup, comme il en va de ces choses, que lâengagement avasuccĂšs. Ăâavait Ă©tĂ© un raid pour obliger les fascistes Ă retirer des troupes de lâautre
Huesca, oĂč les anarchistes attaquaient Ă nouveau. Jâavais Ă©valuĂ© Ă cent ou deux cmmes les forces que les fascistes avaient jetĂ©es dans la contre-attaque maiserteur nous a dit, un peu plus tard, quâelles avaient Ă©tĂ© de six cents hommesentait trĂšs probablement â les dĂ©serteurs, pour des raisons Ă©videntes, cherchaiensinuer dans les bonnes grĂąces. CâĂ©tait bien dommage dâavoir dĂ» abandonner la lone ! Lorsque jây songe, la perte de cette magnifique piĂšce de butin me taqjourdâhui encore.
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VII
Il commença Ă faire chaud dans la journĂ©e, et les nuits elles-mĂȘmes Ă©taient ades. Sur un arbre hachĂ© par les balles, en face de notre parapet, des bouquets touffurises se formaient. Se baigner dans la riviĂšre cessa dâĂȘtre une torture, devint presquaisir. Des rosiers sauvages, aux fleurs roses grandes comme des soucoupes, sâĂ©gaill
rmi les trous dâobus, autour de la Torre FabiĂĄn. Ă lâarriĂšre du front on rencontraiysans qui portaient des roses passĂ©es derriĂšre les oreilles. Le soir, munis de rets vallaient chasser la caille. Vous Ă©tendiez le filet sur les pointes des herbes, vous
uchiez par terre et imitiez le cri de la caille femelle. AussitĂŽt toute caille mĂąle Ă povoix accourait vers vous et quand elle Ă©tait sous le filet, vous lui jetiez une pierre
ffrayer : alors elle prenait brusquement son essor et sâempĂȘtrait dans le filet. Oenait donc Ă©videmment que des cailles mĂąles â ce qui me heurtait commeustice.
Il y avait Ă prĂ©sent, tout Ă cĂŽtĂ© de nous sur le front, une section dâAndalous. J
is pas trĂšs bien comment il se faisait quâils se trouvassent sur ce front. Lâexplicaurante, câĂ©tait quâils sâĂ©taient cavalĂ©s de Malaga Ă une allure telle quâils avaient osâarrĂȘter Ă Valence. Bien entendu, cette explication Ă©tait celle donnĂ©e par les Catai faisaient profession de regarder de haut les Andalous, de les considĂ©rer commece de demi-sauvages. AssurĂ©ment les Andalous Ă©taient trĂšs ignorants. TrĂšs peu dâex â si tant est quâil y en eĂ»t â savaient lire, et ils paraissaient ne pas mĂȘme savoule chose quâen Espagne chacun sait parfaitement : Ă quel parti politiquepartenaient. Ils se prenaient pour des anarchistes, mais sans en ĂȘtre tout Ă fait s
ut-ĂȘtre, aprĂšs tout, Ă©taient-ils communistes. CâĂ©taient des hommes noueux, ayaurnure de paysans â peut-ĂȘtre bien Ă©taient-ils bergers ou ouvriers agricolesvaies â, et les soleils fĂ©roces du Sud avaient donnĂ© Ă leurs visages une colora
ncĂ©e. Ils nous Ă©taient trĂšs utiles, car ils possĂ©daient une dextĂ©ritĂ© extraordinauler des cigarettes avec le tabac espagnol dessĂ©chĂ©. On avait cessĂ© de nous distris cigarettes, mais Ă Monflorite il Ă©tait de temps Ă autre possible dâacheter des paqtabac de la plus basse qualitĂ©, fort semblables dâapparence et de texture Ă de la p
chĂ©e. Il avait un arĂŽme assez agrĂ©able, mais il Ă©tait si sec que, mĂȘme lorsque vous ussi Ă faire une cigarette, il quittait les rangs en vous laissant entre les doigt
indre vide avant que vous ayez pu tirer une bouffée. Mais les Andalous, eux, avaieic pour rouler des cigarettes parfaites, et une technique spéciale pour en replierds aux extrémités.
Deux Anglais, frappĂ©s dâinsolation, ne sâen relevĂšrent pas. De cette pĂ©riode uvenirs les plus caractĂ©ristiques, ce sont lâardeur du soleil de midi et, dans notre lmi-nus, avec les sacs de terre, le supplice endurĂ© par nos Ă©paules dĂ©jĂ mises Ă vif paups de soleil ; et lâĂ©tat pouilleux de nos vĂȘtements et de nos bottes qui sâen allatĂ©ralement en lambeaux ; et nos dĂ©bats avec le mulet qui apportait notre ravitaillem
qui ne faisait pas attention aux coups de fusil, mais prenait la fuite dĂšs quâĂ©clatair un shrapnel ; et les moustiques (qui venaient dâentrer en activitĂ©) et les rats
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aient un flĂ©au public et dĂ©voraient jusquâĂ nos ceinturons de cuir et nos cartouchine se passait rien ; juste, de temps Ă autre, un homme blessĂ© par la balle dâun t
olĂ©, et le sporadique tir dâartillerie, et les raids aĂ©riens sur Huesca. Maintenant qubres avaient toutes leurs feuilles, nous avions construit des plates-formes de canarmblables aux machans indiens, dans les peupliers en bordure de la ligne de feuutre cĂŽtĂ© de Huesca il nây avait pour ainsi dire plus dâattaques. Les anarchistes avabi de lourdes pertes et nâavaient pas rĂ©ussi Ă couper complĂštement la route de Jacaient bien parvenus Ă sâancrer de chaque cĂŽtĂ© et assez prĂšs pour tenir la route
ĂȘme sous le feu de leurs mitrailleuses et la rendre impraticable, mais la solutiontinuitĂ© avait un kilomĂštre de large et les fascistes avaient construit une route entee sorte dâĂ©norme tranchĂ©e qui permettait Ă un certain nombre de camions de faivette. Les dĂ©serteurs disaient quâil y avait dans Huesca beaucoup de munitions,
Ăšs peu de vivres. Mais il Ă©tait manifeste que la ville nâavait pas lâintention de capitult probablement Ă©tĂ© impossible de la prendre avec les quinze mille hommes mal ari Ă©taient disponibles. Plus tard, en juin, le gouvernement amena des troupes du fMadrid et concentra sur Huesca trente mille hommes avec un nombre considĂ©r
avions, mais la ville ne capitula toujours pas.Quand nous partĂźmes en permission, cela faisait cent quinze jours que jâĂ©tais sont, et Ă lâĂ©poque il me sembla que cette pĂ©riode avait Ă©tĂ© la plus vaine de toute ma
mâĂ©tais engagĂ© dans les milices pour combattre le fascisme, et jusquâĂ prĂ©senavais presque pas combattu, mâĂ©tais bornĂ© Ă exister comme une sorte dâobjet pans rien faire en retour de ma nourriture, si ce nâest souffrir du froid et du manqummeil. Peut-ĂȘtre est-ce le sort de la plupart des soldats dans la plupart des gueais aujourdâhui quâil mâest possible de considĂ©rer cette pĂ©riode avec un recul suffine regrette pas, somme toute, de lâavoir vĂ©cue. Bien sĂ»r, je voudrais avoir pu serv
uvernement espagnol un peu plus efficacement ; mais dâun point de vue personnel int de vue de ma propre Ă©volution â ces trois ou quatre premiers mois passĂ©s s
ont furent moins inutiles que je ne le crus alors. Ils formĂšrent dans ma vie une nterrĂšgne, entiĂšrement diffĂ©rent de tout ce qui avait prĂ©cĂ©dĂ© et peut-ĂȘtre de tout ct Ă venir, et ils mâont appris des choses que je nâaurais pu apprendre dâaucune aaniĂšre.
Le point capital, câest le fait dâavoir Ă©tĂ© tout ce temps-lĂ isolĂ© â car au front lâonesque complĂštement isolĂ© du reste du monde : mĂȘme de ce qui se passait Ă Barce
n ne pouvait avoir quâune vague idĂ©e â et parmi des gens que lâon pouvait, en gros ns trop se tromper, qualifier de rĂ©volutionnaires. Et ceci tenait au systĂšme des mii, sur le front dâAragon, ne subit aucune modification fondamentale jusquâen juin 1s milices ouvriĂšres, du fait quâelles Ă©taient levĂ©es sur la base des syndicatmposĂ©es, chacune, dâhommes ayant Ă peu de chose prĂšs les mĂȘmes opinions politiqrent pour consĂ©quence de canaliser vers une seule mĂȘme portion du territoire toe le pays comptait de sentiments les plus rĂ©volutionnaires. JâĂ©tais tombĂ© plus ou mr hasard dans la seule communautĂ© de quelque importance de lâEurope occidentalconscience de classe et le refus dâavoir confiance dans le capitalisme fussentitudes plus courantes que leurs contraires. Ici sur ces hauteurs, en Aragon, lâo
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raissait alors si vaine et sans Ă©vĂ©nement, jâattache Ă prĂ©sent une grande importale diffĂšre tellement de tout le reste de ma vie que dĂ©jĂ elle a revĂȘtu ce carachantĂ© qui nâappartient, dâordinaire, quâaux souvenirs plus anciens. CâĂ©tait, suoment, une sale histoire Ă vivre, mais mon esprit y trouve Ă prĂ©sent beaucoup Ă broissĂ©-je vous avoir fait comprendre lâatmosphĂšre de ce temps ! JâespĂšre y ĂȘtre parvpeu, dans les premiers chapitres de ce livre. Elle est toute liĂ©e dans mon esprit au lâhiver, aux uniformes en loques des miliciens, aux visages ovales des Espagnol
potement de morse des mitrailleuses, aux relents dâurine et de pain moisi, au
étain des ragoûts de fÚves versés dans des gamelles non lavées et engloutis à la hùteTout de cette période est demeuré dans mon souvenir avec une netteté singuliÚr
vis par la pensĂ©e des incidents qui pouvaient paraĂźtre trop insignifiants pour valoine quâon sâen souvĂźnt. Me revoici dans la cagna du Monte Pocero, sur la saillilcaire qui me tenait lieu de lit, et le jeune RamĂłn, son nez aplati entre mes omoplnfle. Je remonte en trĂ©buchant la tranchĂ©e fangeuse, Ă travers le brouillard qui enrtour de moi ses tourbillons de vapeur froide. Jâescalade une crevasse Ă flanontagne et, arrivĂ© Ă mi-hauteur, tout en tĂąchant de ne pas perdre lâĂ©quilibre, je dĂ©
us mes efforts pour arracher de terre une racine de romarin sauvage. Cependant quut, par-dessus ma tĂȘte, sifflent quelques balles perdues. Je suis couchĂ© par terre, cmilieu de petits sapins en contrebas et Ă lâouest du Monte Oscuro, en compagnipp, de Bob Edwards et de trois Espagnols. Des fascistes sont en train de gravir Ă lamme des fourmis, la hauteur grise, dĂ©nudĂ©e, qui se trouve sur notre droite. DeĂšs en face de nous, venant des lignes fascistes, une sonnerie de clairon retentit. Kpte mon regard et, dâun geste dâĂ©colier, fait un pied de nez au son. Je suis dans la uillĂ©e de La Granja, parmi la foule des hommes qui se bousculent, leur gamelle dâĂ©a main, autour du chaudron de ragoĂ»t. Le gros cuistot harassĂ© les Ă©carte avec la lou
une table, tout prĂšs, un homme barbu, porteur dâun Ă©norme pistolet automatachĂ© par une courroie au ceinturon, coupe les pains en cinq morceaux. DerriĂšree voix Ă lâaccent faubourien de Londres (la voix de Bill Chambers avec qui je meerellĂ© amĂšrement et qui fut par la suite tuĂ© Ă lâextĂ©rieur de Huesca) chante :
Il y a des rats, des rats, Des rats aussi gros que des chats, Dans le...
Un obus arrive avec un sifflement dĂ©chirant. Des enfants de quinze ans se jeage contre terre. Le cuistot disparaĂźt derriĂšre le chaudron. Chacun se relĂšve naud, tandis que lâobus plonge et Ă©clate cent mĂštres plus loin. Je fais les cent png du cordon de sentinelles dissimulĂ©es sous les rameaux sombres des peupliers. DfossĂ© extĂ©rieur dĂ©bordant, les rats barbotent en faisant autant de bruit que des louors que commencent Ă poindre derriĂšre nous les premiĂšres lueurs jaunes dâourore, la sentinelle andalouse, emmitouflĂ©e dans sa capote, se met Ă chanter. Eut entendre par-delĂ le no manâs land , Ă cent ou deux cents mĂštres de nountinelle fasciste chanter aussi.
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VIII
De Mandalay, en Haute-Birmanie, on peut aller par train Ă Maymyo, la princation de montagne de la province, au bord du plateau de Chan. Câest une dexpĂ©rience. On est, au dĂ©part, dans lâatmosphĂšre caractĂ©ristique dâune ville orientleil ardent, palmiers poussiĂ©reux, odeurs de poisson, dâĂ©pices et dâail, fruits mo
mides des tropiques, pullulement dâĂȘtres humains aux visages basanĂ©s â et lâonlement accoutumĂ© Ă cette atmosphĂšre quâon lâemporte avec soi tout entiĂšre, pour re, dans le compartiment de chemin de fer. Mentalement on est encore Ă Mandand le train sâarrĂȘte Ă Maymyo, Ă quatre mille pieds au-dessus du niveau de la meici quâen descendant du train, on entre de plain-pied dans un univers diffĂ©bitement lâon respire un air frais et pur qui pourrait ĂȘtre celui de lâAngleterrrtout autour de soi on voit de lâherbe verte, des fougĂšres, des sapins, etontagnardes aux joues roses qui vendent des paniers de fraises.
Mon retour Ă Barcelone, aprĂšs trois mois et demi de front, me rappela cela. Ce f
ĂȘme brusque et saisissant changement dâatmosphĂšre. Dans le train, durant tout le tsquâĂ Barcelone, lâatmosphĂšre du front persista ; faite de saletĂ©, de vacarme, dâinconvĂȘtements en loques, de privations, de camaraderie et dâĂ©galitĂ©. Le train, dĂ©jĂ rempliciens au dĂ©part de Barbastro, fut envahi Ă chaque arrĂȘt par toujours plus de payss paysans encombrĂ©s de bottes de lĂ©gumes, de volailles terrifiĂ©es quâils transporte en bas, et de sacs qui, sur le sol, dĂ©crivaient des boucles et se tortillaient et qcouvrit pleins de lapins vivants â et pour finir, dâun trĂšs important troupeaoutons quâon enfourna dans les compartiments en coinçant les bĂȘtes dans tou
paces vides. Les miliciens sâĂ©gosillaient Ă chanter des chants rĂ©volutionnairesuvraient le ferraillement du train, et ils envoyaient des baisers ou agitaientouchoirs rouge et noir chaque fois quâils voyaient une jolie fille le long de la voie fees bouteilles de vin et dâanis, lâinfecte liqueur aragonaise, circulaient de main en ms outres espagnoles en peau de bouc permettaient de faire gicler un jet de vin droit bouche de son ami dâun bout Ă lâautre dâun compartiment de chemin de fer, ceargnait beaucoup de dĂ©rangement. Ă cĂŽtĂ© de moi un gars de quinze ans, aux yeux nsait des rĂ©cits sensationnels et, jâen jurerais, complĂštement faux, de ses proploits sur le front Ă deux vieux paysans aux visages parcheminĂ©s qui lâĂ©couta
uche bĂ©e. BientĂŽt les paysans dĂ©firent leurs paquets et nous offrirent un vin violauant. Nous Ă©tions tous profondĂ©ment heureux, plus heureux que je ne puis lâexpriais lorsque le train, aprĂšs avoir traversĂ© Sabadell, roula dans Barcelone, nous ouvĂąmes soudain dans une atmosphĂšre qui nous Ă©tait, Ă nous et Ă ceux de notre sorine moins Ă©trangĂšre et hostile que si câeĂ»t Ă©tĂ© Paris ou Londres.
Tous ceux qui firent deux voyages, Ă quelques mois dâintervalle, Ă Barcelone duguerre ont fait la remarque quâil sây Ă©tait opĂ©rĂ© dâextraordinaires changementsose curieuse, quâils y fussent venus dâabord en aoĂ»t et de nouveau en janvier
mme moi, en dĂ©cembre, puis en avril, ce fut la mĂȘme constatation qui sâimposa Ă avoir, que lâatmosphĂšre rĂ©volutionnaire avait disparu. Ă quiconque sâĂ©tait trouvĂ©
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Ă»t, alors que le sang Ă©tait Ă peine sec dans les rues et que les milices Ă©taient logĂ©es hĂŽtels de premier ordre, Barcelone en dĂ©cembre ne pouvait que parbourgeoise » ; Ă moi, nouvellement arrivĂ© dâAngleterre, elle faisait lâeffet dâune olĂ©tarienne et dĂ©passant mĂȘme, Ă cet Ă©gard, tout ce que jâavais imaginĂ© possibĂ©sent les choses Ă©taient revenues en arriĂšre. Barcelone Ă©tait Ă nouveau une dinaire, un peu dans la gĂȘne et un peu Ă©raflĂ©e par la guerre, mais sans nul stĂ©rieur de la prĂ©dominance de la classe ouvriĂšre.
Le changement dâaspect des foules Ă©tait saisissant. Lâuniforme des milices e
opettes bleues avaient presque disparu ; tout le monde semblait porter les Ă©lĂ©gmplets dâĂ©tĂ© qui sont la spĂ©cialitĂ© des tailleurs espagnols. On voyait partoutmmes gras Ă lâair florissant, des femmes habillĂ©es avec recherche et des automosantes. (Il me parut quâil nây en avait toujours pas de privĂ©es : nĂ©anmoins il suff
mblait-il, dâĂȘtre une personnalitĂ© marquante pour avoir Ă sa disposition tomobile.) La ville regorgeait dâofficiers de lâarmĂ©e populaire rĂ©cemment crĂ©Ă©e,
homme qui commençait Ă peine dâexister Ă lâĂ©poque oĂč jâavais quittĂ© BarcearmĂ©e populaire comptait un officier pour dix hommes. Un certain nombre de
ficiers avaient servi dans les milices et avaient Ă©tĂ© rappelĂ©s du front pour recevoirstruction technique, mais la majoritĂ© dâentre eux Ă©taient des jeunes gens qui aveux aimĂ© aller Ă lâĂcole de guerre que sâengager dans les milices. Ils nâavaient pas
urs hommes des rapports tout Ă fait du genre de ceux qui existent dans une arurgeoise, mais il y avait une nette diffĂ©rence sociale, qui se traduisait parffĂ©rence de solde et dâuniforme. Les hommes portaient une sorte de grossiĂšre salopune, les officiers un Ă©lĂ©gant uniforme kaki, cintrĂ© comme lâuniforme dâofficiermĂ©e britannique, mais avec plus dâexagĂ©ration. Je ne pense pas quâil y en eĂ»t px plus dâun sur vingt qui eĂ»t dĂ©jĂ Ă©tĂ© au front ; nâempĂȘche que tous portaient, att
r une courroie au ceinturon, un pistolet automatique ; nous, au front, nous ne pouvaucun prix nous en procurer. Tandis que nous fendions la foule en remontant la ruaperçus que les gens braquaient les yeux sur nos dehors crasseux. Bien sĂ»r, comus les hommes qui ont passĂ© plusieurs mois au front, nous nâĂ©tions pas beaux Ă voissemblais, je mâen rendais compte, Ă un Ă©pouvantail. Ma veste de cuir Ă©taimbeaux, ma casquette de laine nâavait plus de forme et me glissait continuellemen
Ćil, de mes bottes il ne restait plus guĂšre que les empeignes distendues. Et nous Ă©tus plus ou moins dans cet Ă©tat, et par surcroĂźt sales et pas rasĂ©s ; il nây avait donc
Ă©tonnant Ă ce que les gens Ă©carquillassent les yeux. Mais jâen Ă©tais un peu dĂ©monta me fit sentir quâil avait dĂ» se passer un certain nombre de choses singuliĂšres au cs trois derniers mois.
Durant les quelques jours suivants, je vis Ă dâinnombrables indices que ma prempression nâavait pas Ă©tĂ© fausse. Un profond changement sâĂ©tait produit. Deux nnaient le ton Ă tout le reste. Dâune part, les gens â la population civile ântĂ©ressaient plus beaucoup Ă la guerre ; dâautre part, lâhabituelle division de la soriches et en pauvres, en classe supĂ©rieure et classe infĂ©rieure sâaffirmait de nouvea
LâindiffĂ©rence gĂ©nĂ©rale Ă lâĂ©gard de la guerre Ă©tait de nature Ă surprendre Ćurer passablement. Elle scandalisait ceux qui arrivaient Ă Barcelone venant de Ma
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mĂȘme de Valence. En partie elle tenait Ă ce que Barcelone Ă©tait Ă©loignĂ©e du vĂ©ritamp de bataille ; jâai remarquĂ© un mois plus tard quâil en allait de mĂȘme Ă Tarragla vie dâune plage Ă la mode continuait Ă peu prĂšs telle quâen temps ordinaire. M
ait significatif que par toute lâEspagne lâengagement volontaire fĂ»t en baisse denvier environ. En Catalogne, en fĂ©vrier, la premiĂšre grande campagne de propagur lâarmĂ©e populaire avait soulevĂ© une vague dâenthousiasme, mais sans beaucroĂźtre le recrutement. On nâĂ©tait en guerre que depuis quelque six mois lorsquuvernement fut obligĂ© de recourir Ă la conscription, chose qui nâa rien de surpre
ns une guerre avec lâĂ©tranger, mais qui paraĂźt une anomalie dans une guerre civile. cun doute cela tenait Ă ce que les espoirs rĂ©volutionnaires par lesquels la guerre mmencĂ© avaient Ă©tĂ© déçus. Si les membres des syndicats, qui se constituĂšrenlices et repoussĂšrent les fascistes jusquâĂ Saragosse dans les quelques prem
maines de la guerre, sâĂ©taient comportĂ©s ainsi, câĂ©tait dans une large mesure pâils croyaient se battre pour la prise du pouvoir par la classe ouvriĂšre ; mais il deveplus en plus Ă©vident que la prise du pouvoir par la classe ouvriĂšre Ă©tait une c
rdue, et lâon ne pouvait blĂąmer la masse du peuple, et particuliĂšrement le prolĂ©t
s villes (Ă qui incombe, dans toute guerre, civile ou Ă©trangĂšre, de fournir les hommoupe) de faire montre dâune certaine indiffĂ©rence. Personne ne souhaitait perderre, mais Ă la majoritĂ© des gens, il tardait surtout quâelle fĂ»t finie. On sentait celâon allĂąt. Partout on Ă©tait accueilli par la mĂȘme remarque de pure forme : « Ah ! erre... câest affreux, nâest-ce pas ? Quand donc finira-t-elle ? » Les gens politiquemnscients, eux, Ă©taient infiniment plus au courant de la guerre dâexterminaciproque entre anarchistes et communistes que du combat contre Franco. Pouasse du peuple, la disette Ă©tait le plus important. « Le front », on en Ă©tait venunser comme Ă un lointain lieu mythique oĂč les jeunes hommes disparaissaient et
bien ils ne revenaient pas, ou bien ils revenaient au bout de trois ou quatre moirgent plein les poches. (Un milicien recevait habituellement lâarriĂ©rĂ© de soldoment oĂč il partait en permission.) On nâavait pas dâĂ©gards particuliers pour les bleĂȘme pour ceux qui sautillaient en sâaidant de bĂ©quilles. Ce nâĂ©tait plus Ă la mode dns les milices. Les magasins, qui sont toujours les baromĂštres du goĂ»t publinotaient clairement. Lors de mon premier passage Ă Barcelone, ils Ă©taient, ceuvres et minables, mais sâĂ©taient spĂ©cialisĂ©s dans lâĂ©quipement des miliciens. Bonpolice, blousons Ă fermeture Ăclair, ceinturons et baudriers, couteaux de ch
dons, Ă©tuis Ă revolver Ă©taient en montre Ă toutes les devantures. Ă prĂ©sent les magaient, de façon marquĂ©e, plus de chic, mais la guerre avait Ă©tĂ© relĂ©guĂ©e au second pmme je mâen rendis compte un peu plus tard, en achetant mon fourniment avan
partir au front, il Ă©tait trĂšs difficile de se procurer certaines des choses dont on ablement besoin au front.
Pendant ce temps-lĂ se poursuivait une propagande systĂ©matique contre les miparti et en faveur de lâarmĂ©e populaire. La situation Ă©tait ici plutĂŽt singuliĂšre. De
vrier, toutes les forces armĂ©es avaient, thĂ©oriquement, Ă©tĂ© incorporĂ©es Ă lâapulaire et les milices Ă©taient, sur le papier, rĂ©organisĂ©es sur le principe de lâarpulaire, avec Ă©chelle diffĂ©rentielle de soldes, nomination officielle aux grade
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ssant par les cadres, etc. Les divisions Ă©taient formĂ©es de « brigades mixtes »aient censĂ©es se composer en partie de troupes de lâarmĂ©e populaire et en partilices. Mais les seuls changements qui avaient Ă©tĂ© effectivement opĂ©rĂ©s Ă©taientangements de noms. Par exemple, les troupes du P.O.U.M., quâon appelait auparadivision LĂ©nine, devenaient Ă prĂ©sent la 29e division. Comme, jusquâen juin, trĂšs pe
oupes de lâarmĂ©e populaire gagnĂšrent le front dâAragon, les milices purent conseur structure distincte et leur caractĂšre particulier. Mais sur tous les murs les agentuvernement avaient peint au pochoir : « Il nous faut une armĂ©e populaire », et
dio et dans la presse communiste on ne cessait de brocarder, et parfois de façonnimeuse, les milices, quâon reprĂ©sentait comme mal aguerries, indisciplinĂ©es, ermĂ©e populaire, elle, Ă©tait toujours dĂ©peinte comme Ă©tant « hĂ©roĂŻque ». On eĂ»t dit,oire presque toute cette propagande, quâil y avait quelque chose de dĂ©shonorant Ă rti au front comme volontaire et quelque chose de louable Ă avoir attendu dâĂȘtre enr la conscription. NâempĂȘche que pendant tout ce temps câĂ©taient les milices
naient le front, cependant que lâarmĂ©e populaire sâaguerrissait Ă lâarriĂšre, mais câĂ©tfait dont les journaux Ă©taient tenus de parler le moins possible. On ne faisait
filer dans les rues de la ville, tambours battants et drapeaux dĂ©ployĂ©s, les dĂ©tachemmilices retournant au front. On les escamotait en les faisant partir furtivementain ou par camions, Ă cinq heures du matin. Dans le mĂȘme moment, on commençvoyer au front quelques rares dĂ©tachements de lâarmĂ©e populaire ; et eux, comme guĂšre, Ă©taient promenĂ©s Ă travers toute la ville en grande pompe ; mais mĂȘme euxite de lâattiĂ©dissement gĂ©nĂ©ral de lâintĂ©rĂȘt pris Ă la guerre, Ă©taient accueillis ativement peu dâenthousiasme. Le fait que les troupes des milices Ă©taient Ă©galemr le papier, troupes de lâarmĂ©e populaire, Ă©tait habilement exploitĂ© dans la propagr la presse. Rien de louable nâarrivait qui ne fĂ»t automatiquement portĂ© Ă lâact
rmĂ©e populaire, tandis que toute faute, câĂ©tait aux milices quâon la faisait endossriva parfois Ă une mĂȘme troupe de recevoir des fĂ©licitations en sa qualitĂ© dâunitrmĂ©e populaire et des reproches en sa qualitĂ© dâunitĂ© des milices.
Mais, en dehors de cela, il y avait un changement saisissant dans lâatmospciale â ce quâil est difficile de comprendre si lâon nâa pas soi-mĂȘme vĂ©cu tout rsque jâĂ©tais arrivĂ© pour la premiĂšre fois Ă Barcelone, jâavais cru que câĂ©tait une villnâexistait guĂšre de distinctions de classe ni de grandes diffĂ©rences de richesse. Câen, en tout cas, ce quâelle avait lâair dâĂȘtre. Les vĂȘtements « chics » y Ă©taient dev
e exception, personne ne faisait de courbettes ni nâacceptait de pourboire ; les garrestaurant, les bouquetiĂšres, les cireurs de bottes vous regardaient bien en face et pelaient « camarade ». Je nâavais pas saisi quâil y avait lĂ surtout un mĂ©lange dâespocamouflage. La classe ouvriĂšre croyait en une rĂ©volution qui avait Ă©tĂ© commencĂ©e
mais consolidée, et les bourgeois étaient apeurés et se travestissaient momentanémouvriers. Dans les premiers mois de la révolution, il doit bien y avoir eu plus
lliers de personnes qui, de propos dĂ©libĂ©rĂ©, revĂȘtirent des salopettes et clamĂšrenots dâordre rĂ©volutionnaires, histoire de sauver leur peau. Ă prĂ©sent, tout reventat normal. Les restaurants et les hĂŽtels Ă©lĂ©gants Ă©taient remplis de gens richesvoraient des repas coĂ»tant cher, tandis que la population ouvriĂšre se trouvait de
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e hausse considĂ©rable du prix des denrĂ©es alimentaires, sans recevoir augmentation de salaire y correspondant. En plus de la chertĂ© de tout, il y riodiquement pĂ©nurie de ceci ou de cela, ce dont, naturellement, le pauvre souujours plus que le riche. Les restaurants et les hĂŽtels semblaient nâavoir guĂšrfficultĂ© Ă se procurer tout ce quâils voulaient ; mais, dans les quartiers ouvrierseues pour le pain, lâhuile dâolive et les autres choses de premiĂšre nĂ©cessitĂ© Ă©t
ngues de plusieurs centaines de mĂštres. NaguĂšre, dans Barcelone, jâavais Ă©tĂ© frappbsence de mendiants ; ils Ă©taient lĂ©gion Ă prĂ©sent. Ă la porte des charcuteries, en
s Ramblas, on voyait continuellement des bandes dâenfants pieds nus qui restaienendre que quelquâun sortĂźt, et alors ils se pressaient autour en demandant Ă grandss bribes de nourriture. En parlant, on nâemployait plus les formrĂ©volutionnaires ». Il Ă©tait rare, Ă prĂ©sent, dâĂȘtre tutoyĂ© et appelĂ© « camarade » paconnus ; lâhabitude Ă©tait revenue de dire Señor et Usted. Buenos dĂas commençmplacer Salud. Les garçons de restaurant avaient rĂ©intĂ©grĂ© leurs chemises empesĂ©e chefs de rayon courbaient lâĂ©chine comme Ă lâaccoutumĂ©e. Nous entrĂąmes, ma femmoi, dans une bonneterie sur les Ramblas, pour acheter quelques paires de ba
ndeur sâinclina en se frottant les mains, de ce geste qui leur Ă©tait habituel il y a vingente ans, mais quâon ne leur voit plus faire de nos jours, mĂȘme en Angleterre. De ftournĂ©e et Ă la dĂ©robĂ©e, on en revenait Ă lâusage du pourboire. Lâordre avait Ă©tĂ© dx patrouilles dâouvriers de se dissoudre, et de nouveau lâon voyait dans les ruerces de police dâavant-guerre. Il en rĂ©sultait, entre autres choses, que les music-ha bordels de premiĂšre classe, dont beaucoup avaient Ă©tĂ© fermĂ©s par les patrou
ouvriers, avaient immĂ©diatement rouvert{3 }. Ce qui se passait Ă propos du manqubac offrait un exemple de peu dâimportance mais significatif de la maniĂšre dont ait Ă prĂ©sent orientĂ© pour avantager les classes riches. Pour la masse du peuple il Ă©t
possible de se procurer du tabac que lâon vendait dans les rues des cigarettes bourlamelles de bois de rĂ©glisse. Jâen ai fait lâessai, une seule fois. (Beaucoup de gen
saient lâessai une fois, mais pas deux.) Franco occupait les Canaries, oĂč est cultivĂ©tabac espagnol. Donc, du cĂŽtĂ© gouvernemental, on ne disposait plus que des stockbac existant avant la guerre. Ils sâĂ©coulaient si rapidement que les dĂ©bits de touvraient plus quâune fois par semaine ; aprĂšs avoir fait la queue pendant deux boures, on pouvait, si lâon avait de la chance, arriver Ă obtenir un paquet de tabac de arts dâonce{4 }. En principe le gouvernement interdisait lâachat de tabac Ă lâĂ©tran
rce que câĂ©tait diminuer les rĂ©serves dâor, quâil fallait absolument garder pour les acarmes et de choses de premiĂšre nĂ©cessitĂ©. Dans la pratique il y avait une fournguliĂšre de cigarettes Ă©trangĂšres de contrebande des marques les plus chĂšres, des Lrike par exemple, qui offraient aux mercantis une occasion magnifique de bĂ©nĂ©cessifs. On pouvait acheter les cigarettes de contrebande au vu et au su de tous dantels chics et Ă peine moins ouvertement dans les rues, Ă condition de pouvoir payequet dix pesetas (un jour de solde de milicien). La contrebande se faisant Ă lâintens gens riches, on fermait les yeux sur elle. Si vous aviez suffisamment dâargent, iait rien que vous ne pussiez vous procurer en nâimporte quelle quantitĂ©, Ă lâexceprfois du pain qui Ă©tait rationnĂ© de façon assez stricte. Cette exposition au grand jou
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ntraste de la richesse et de la pauvretĂ© eĂ»t Ă©tĂ© impossible quelques mois aupararsque la classe ouvriĂšre Ă©tait encore, ou semblait ĂȘtre, au pouvoir. Mais ce sanquer Ă lâimpartialitĂ© que dâimputer cela uniquement au fait que le pouvoir politait passĂ© en dâautres mains. Cela tenait aussi en partie Ă la sĂ©curitĂ© dans laquellvait Ă Barcelone, oĂč il nây avait presque rien, Ă part un raid aĂ©rien de temps Ă autre, re penser Ă la guerre. Tous ceux qui sâĂ©taient trouvĂ©s Ă Madrid disaient que lĂ -basait tout autrement. Ă Madrid, le danger commun contraignait les gens de preutes catĂ©gories Ă un certain sentiment de camaraderie. Un homme, lâair bien nourr
ain de manger des cailles tandis que des enfants mendient du pain est un specvoltant, mais vous avez moins de chances de voir cela en un endroit oĂč lâon ennner le canon.
Un jour ou deux aprĂšs les combats de rues, je me rappelle ĂȘtre passĂ© dans lâuneus belles rues et de mâĂȘtre trouvĂ© devant une confiserie dont la devanture Ă©tait pleintisseries et de bonbons de la qualitĂ© la plus raffinĂ©e, Ă des prix renversants. Un magns le genre de ceux que lâon voit dans Bond Street ou rue de la Paix. Et je me souv
avoir éprouvé un sentiment de vague horreur et de stupéfaction en voyant q
uvait encore gaspiller lâargent Ă de telles choses dans un pays frappĂ© par la guerfamĂ©. Mais Dieu me prĂ©serve dâaffecter, pour ma part, une quelconque supĂ©riorrĂšs avoir manquĂ© de confort durant plusieurs mois, jâavais un dĂ©sir voracurriture convenable et de vin, de cocktails, de cigarettes amĂ©ricaines, et le restvoue mâen ĂȘtre mis jusque-lĂ de toutes les superfluitĂ©s agrĂ©ables que jâeus les mome payer. Durant cette premiĂšre semaine, avant que le peuple ne descendĂźt da
e, jâeus plusieurs prĂ©occupations qui agissaient lâune sur lâautre de façon curieuseemier lieu, comme je lâai dit, jâĂ©tais occupĂ© Ă me rendre la vie le plus agrĂ©able poss
n second lieu, Ă trop manger et trop boire, ma santĂ© sâen trouva toute cette semain
elque peu dĂ©rangĂ©e. Je me sentais patraque, me mettais au lit pour une demi-joue levais, refaisais un repas trop copieux, et me sentais de nouveau malade. Dâautre tais en pourparlers, clandestinement, pour acheter un revolver. Jâavais grande eun revolver â dans une guerre de tranchĂ©es il est beaucoup plus utile dâavoivolver quâun fusil â mais il Ă©tait trĂšs difficile de sâen procurer. Le gouvernemenstribuait aux agents de police et aux officiers de lâarmĂ©e populaire, mais se refusaitrer aux milices ; on ne pouvait en acheter, illĂ©galement, que dans les maga
andestins des anarchistes. AprĂšs toutes sortes de façons et dâembarras, un
archiste sâarrangea pour me faire avoir un tout petit pistolet automatique, une auvaise arme, inutilisable Ă plus de cinq mĂštres ; mais ça valait mieux que rien du , en plus de tout cela, je prenais des mesures prĂ©paratoires pour quitter les miliceO.U.M. et entrer dans quelque autre unitĂ© oĂč je recevrais lâassurance dâĂȘtre envoyfront de Madrid.
Jâavais dit Ă tout le monde, depuis longtemps dĂ©jĂ , que jâallais quitter le P.O.U.Mnâavais tenu compte que de mes prĂ©fĂ©rences personnelles, jâeusse choisi de rejoi anarchistes. Devenir membre de la C.N.T. permettait dâentrer dans les milices
A.I., mais on mâavait dit quâil Ă©tait plus probable que la F.A.I. mâenvoyĂąt Ă Terueladrid. Si je voulais aller Ă Madrid, câĂ©tait dans les Brigades internationales quâi
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lait entrer, et pour cela jâavais Ă obtenir la recommandation dâun membre du mmuniste. Je dĂ©nichai un ami communiste qui faisait partie du service de spagnol, et je lui expliquai mon cas. Il parut trĂšs dĂ©sireux de faire de moi une recrue demanda de persuader, si possible, quelques-uns des autres Anglais I.L.P. deivre. Si jâavais Ă©tĂ© en meilleure santĂ©, il est probable que jâaurais donnĂ© mon adhĂ©ance tenante. Il est difficile de dire aujourdâhui quelle diffĂ©rence cela eĂ»t fait. JâeĂšs bien pu ĂȘtre envoyĂ© Ă Albacete avant le dĂ©clenchement des troubles de Barcelns ce cas, nâayant pas vu de prĂšs les combats de rues, jâen aurais peut-ĂȘtre ten
rsion officielle pour vĂ©ridique. Par ailleurs, si jâavais Ă©tĂ© Ă Barcelone, duranoubles, sous les ordres des communistes mais nâen conservant pas moins un sentimrsonnel de loyalisme Ă lâĂ©gard de mes camarades du P.O.U.M., je me serais trouvĂ© e impasse. Mais jâavais droit Ă encore une semaine de permission et jâavais le plusir de rĂ©tablir ma santĂ© avant de retourner au front. Et puis â un dĂ©tail du genrux qui dĂ©cident toujours dâune destinĂ©e â il me fallait attendre que le bottier ait pubriquer une paire neuve de chaussures de marche. (LâarmĂ©e espagnole tout enayant pu arriver Ă mâen prĂ©senter dâune pointure assez grande pour mâaller.
pondis donc Ă mon ami communiste que je remettais Ă un peu plus tard de prendrspositions dĂ©finitives. En attendant jâavais besoin de repos. Je mâĂ©tais mĂȘme mis enaller avec ma femme passer deux ou trois jours au bord de la mer. En voilĂ une idmme sâil ne suffisait pas de lâatmosphĂšre politique pour me faire comprendre qu
Ă©tait pas chose faisable par le temps qui courait !Car sous lâaspect extĂ©rieur de la ville, sous ses dehors contrastĂ©s de luxe e
uvretĂ© grandissante, et sous lâapparente gaietĂ© de ses rues, avec leurs Ă©talages de flbariolage de leurs drapeaux et des affiches de propagande, et leur animation, couvafreux sentiment de rivalitĂ© et de haine politiques. Il nây avait pas Ă sây mĂ©prendre.
ns de toutes nuances disaient, envahis par un mauvais pressentiment : « Il ne varder Ă y avoir de la casse. » Le danger Ă©tait patent et facile Ă comprendre. Il rĂ©sidait ntagonisme entre ceux qui voulaient faire progresser la rĂ©volution et ceux qui voulnrayer ou lâempĂȘcher â autrement dit, dans lâantagonisme entre anarchistemmunistes. Politiquement, il nây avait plus Ă prĂ©sent dâautre pouvoir que celuS.U.C. et de ses alliĂ©s libĂ©raux. Mais en face de ce pouvoir il y avait la force irrĂ©soluembres de la C.N.T., moins bien armĂ©s et sachant moins bien ce quâils voulaienturs adversaires, mais puissants par leur nombre et par leur prĂ©dominance
usieurs industries-clefs. Avec une telle dĂ©marcation des forces, il Ă©tait fatal quâil ynflit. Du point de vue des membres de la GĂ©nĂ©ralitĂ© soumise Ă lâinfluence dirigeantS.U.C., la premiĂšre chose Ă faire, nĂ©cessairement, pour consolider leur position, c
dĂ©sarmer les ouvriers de la C.N.T. Comme je lâai dĂ©jĂ fait observer, la mesure ur dissoudre les milices de partis Ă©tait au fond une manĆuvre Ă cette
multanĂ©ment on avait remis en activitĂ© les forces de police armĂ©es dâavant-gurdes civils et autres, et on Ă©tait en train de les renforcer et de les armer puissammla ne pouvait avoir quâune seule signification. Les gardes civils, en particulier, Ă©te force de gendarmerie du type europĂ©en courant qui, depuis bientĂŽt un siĂšcle, av
rvi de gardes du corps à la classe possédante. Sur ces entrefaites, on avait rendu un
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on lequel toutes les armes dĂ©tenues par des particuliers devraient ĂȘtre livaturellement cet ordre Ă©tait restĂ© lettre morte ; il Ă©tait clair quâon ne pourrait preurs armes aux anarchistes que par la force. Pendant tout ce temps le bruit couujours de façon vague et contradictoire par suite de la censure des journaux, quâunrtout en Catalogne des petits conflits Ă©clataient. En plusieurs endroits les forcelice armĂ©es avaient attaquĂ© les forteresses des anarchistes. Ă PuigcerdĂ , Ă la fron
ançaise, on envoya une troupe de carabiniers sâemparer du bureau de la douanequel les anarchistes avaient eu jusque-lĂ la haute main, et Antonio MartĂn
archiste connu, fut tuĂ©. Des incidents analogues sâĂ©taient produits Ă Figueras eois, Ă Tarragone. Dans Barcelone, il y avait eu, Ă en croire des renseignements office sĂ©rie de bagarres dans les faubourgs ouvriers. Des membres de la C.N.T. et de lâUpuis quelque temps sâentre-assassinaient ; Ă plusieurs reprises les meurtres avaienivis de funĂ©railles colossales, provocantes, organisĂ©es dans lâintention bien dĂ©libattiser les haines politiques. Peu de temps auparavant, un membre de la C.N.T. avasassinĂ©, et câest par centaines de mille que la C.N.T. avait suivi son enterrement. Ă lavril, juste au moment de mon arrivĂ©e Ă Barcelone, Roldan Cortada, membre Ă©mi
lâU.G.T., fut assassinĂ©, probablement par quelquâun de la C.N.T. Le gouvernenna lâordre Ă tous les magasins de fermer et organisa un immense cortĂšge funrmĂ© en grande partie des troupes de lâarmĂ©e populaire, qui, en un point donnĂ©, mit ures Ă dĂ©filer. De la fenĂȘtre de lâhĂŽtel je le regardai passer sans enthousiasme. Il sax yeux que ces prĂ©tendues funĂ©railles Ă©taient tout bonnement un dĂ©ploiemenrces ; il suffirait dâun rien pour quâil y ait effusion de sang. Cette mĂȘme nuit nous fĂ»veillĂ©s, ma femme et moi, par le bruit dâune fusillade venant de la place de Catalognt ou deux cents mĂštres de lĂ . Nous apprĂźmes le lendemain que câĂ©tait un membre N.T. qui avait Ă©tĂ© supprimĂ©, probablement par quelquâun de lâU.G.T. Bien entend
ait tout Ă fait possible que tous ces meurtres eussent Ă©tĂ© commis par des agovocateurs. On peut aussitĂŽt apprĂ©cier lâattitude de la presse capitaliste Ă©trangĂšrce des dissensions communo-anarchistes en remarquant quâelle fit du tapage autoueurtre de Roldan Cortada, mais passa sous silence le meurtre en rĂ©ponse.
Le 1er mai approchait et il Ă©tait question dâune manifestation monstre Ă laqendraient part Ă la fois la C.N.T. et lâU.G.T. Les leaders de la C.N.T., plus modĂ©rĂ©saucoup de leurs sectateurs, travaillaient depuis longtemps en vue dâune rĂ©conciliec lâU.G.T. ; câĂ©tait mĂȘme le mot dâordre de leur politique que dâessayer de forme
ul grand bloc des deux centrales syndicales. LâidĂ©e Ă©tait de faire dĂ©filer ensembN.T. et lâU.G.T., qui feraient ainsi montre de leur solidaritĂ©. Mais au dernier momeanifestation fut dĂ©commandĂ©e. Il Ă©tait trop Ă©vident quâelle nâamĂšnerait quegarres. Câest ainsi quâil ne se passa rien le 1er mai. Quel drĂŽle dâĂ©tat de chorcelone, la ville soi-disant rĂ©volutionnaire par excellence, fut probablement la sle de lâEurope non-fasciste oĂč il nây eut pas de commĂ©morations ce jour-lĂ . voue que jâen fus plutĂŽt soulagĂ©. On pensait que le contingent de lâI.L.P. allait darcher, dans le cortĂšge, avec le groupe du P.O.U.M., et tout le monde sâattendait Ă sse. CâĂ©tait bien la derniĂšre chose Ă laquelle jâaspirais que dâĂȘtre mĂȘlĂ© Ă quelque absmbat de rues ! Ătre en train de dĂ©filer derriĂšre des drapeaux rouges sur lesquels
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scrits des mots dâordre exaltants, et ĂȘtre descendu par quelquâun de totalement incoi vous tire dessus au fusil-mitrailleur dâune fenĂȘtre dâun dernier Ă©tage â cidĂ©ment, ça nâest pas ma conception dâune façon utile de mourir.
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IX
Vers midi, le 3 mai, un ami qui traversait le hall de lâhĂŽtel me dit en passant : « une espĂšce dâĂ©meute au bureau central des tĂ©lĂ©phones, Ă ce que jâai entendu dire.sais pourquoi, sur le moment, je ne prĂȘtai pas attention Ă ces mots.
Cet aprĂšs-midi-lĂ , entre trois et quatre, jâavais descendu la moitiĂ© des Ram
rsque jâentendis plusieurs coups de feu derriĂšre moi. Je fis demi-tour et vis quelunes gens, le fusil Ă la main et, au cou, le foulard rouge et noir des anarchisteufiler dans une rue transversale qui partait des Ramblas vers le nord. Ils Ă©tanifestement en train dâĂ©changer des coups de feu avec quelquâun postĂ© dans une hur octogonale â une Ă©glise, je pense â qui commandait la rue transversale. Je pestantanĂ©ment : « Ăa y est, ça commence ! » Mais je nâĂ©prouvai pas grande surprisepuis des jours et des jours tout le monde sâattendait Ă tout moment Ă ce que « mmençùt. Je compris bien que je devais immĂ©diatement retourner Ă lâhĂŽtel voiĂ©tait rien arrivĂ© Ă ma femme. Mais le groupe dâanarchistes aux abords de la
ansversale refoulaient les gens en leur criant de ne pas traverser la ligne de feuuveaux coups claquÚrent. La rue était balayée par les balles tirées de la tour et
ule de gens saisis de panique descendirent prĂ©cipitamment les Ramblas pour sâĂ©loilieu de la fusillade ; dâun bout Ă lâautre de la rue on entendait le claquement
bliers de tĂŽle que les commerçants abaissaient aux devantures. Je vis deux officiermĂ©e populaire battre prudemment en retraite dâarbre en arbre, la main sur volver. Devant moi, la foule sâengouffrait dans une station de mĂ©tro au milieumblas pour se mettre Ă lâabri. Je dĂ©cidai aussitĂŽt de ne pas les suivre. CâĂ©tait risqu
meurer bloquĂ© sous terre pendant des heures. Ă ce moment, un mĂ©decin amĂ©ricain qui sâĂ©tait trouvĂ© avec nous au front vint Ă courant et me saisit par le bras. Il Ă©tait surexcitĂ©.
« Allons, venez ! Il nous faut gagner lâhĂŽtel FalcĂłn. » (LâhĂŽtel FalcĂłn Ă©tait une spension de famille dont le P.O.U.M. avait pris les frais dâentretien Ă sa charge e
scendaient surtout des miliciens en permission.) « Les camarades du P.O.U.M. vonunir. La bagarre est déclenchée. Nous devons nous serrer les coudes. »
« Mais de quoi diable sâagit-il au juste ? » demandai-je.Le docteur mâentraĂźnait dĂ©jĂ en me remorquant par le bras. Il Ă©tait bien
rexcitĂ© pour pouvoir faire un exposĂ© trĂšs clair de la situation. Il ressortait de ses paâil sâĂ©tait trouvĂ© sur la place de Catalogne au moment oĂč plusieurs camions remplrdes civils armĂ©s Ă©taient venus sâarrĂȘter devant le Central tĂ©lĂ©phonique, dont la plus employĂ©s appartenaient Ă la C.N.T. Les gardes civils avaient brusquement attais quelques anarchistes Ă©taient survenus et il y avait eu une Ă©chauffourĂ©e gĂ©nĂ©ralnclus de tout cela que lâ« espĂšce dâĂ©meute » du matin avait eu pour cause lâexigrmulĂ©e par le gouvernement de se faire remettre le Central tĂ©lĂ©phonique, et le âon y avait naturellement opposĂ©.
Comme nous descendions la rue, un camion qui filait Ă toute vitesse nous croiait bondĂ© dâanarchistes, le fusil Ă la main. Sur le devant, un jeune homme Ă©tait allon
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at ventre sur une pile de matelas, derriĂšre une petite mitrailleuse. Quand rivĂąmes Ă lâhĂŽtel FalcĂłn, une foule de gens grouillait dans le hall ; la confusion la mplĂšte rĂ©gnait, personne ne paraissait savoir ce quâon attendait de nous, et persoĂ©tait armĂ©, Ă lâexception de la poignĂ©e dâhommes des troupes de choc qui formaierde habituelle du local. Je traversai la rue pour me rendre au comitĂ© local du P.O.UuĂ© presque en face. En haut, dans la salle oĂč habituellement les miliciens venucher leur solde, grouillait aussi une masse de gens. Un homme dâune trentannĂ©es, grand, pĂąle, assez beau, en vĂȘtements civils, sâefforçait de rĂ©tablir lâord
stribuait les ceinturons et les cartouchiĂšres qui Ă©taient entassĂ©s dans un coin. Imblait pas jusquâĂ maintenant y avoir de fusils. Le docteur avait disparu â je crois avait dĂ©jĂ eu des blessĂ©s et quâon avait rĂ©clamĂ© des mĂ©decins â, mais il Ă©tait arrivtre Anglais. BientĂŽt, lâhomme de haute taille et quelques autres commencĂšrent Ă s
un arriĂšre-bureau des brassĂ©es de fusils et les firent passer Ă la ronde. Comme ons, lâautre Anglais et moi, quelque peu suspects, en tant quâĂ©trangers, perso
abord, ne voulut nous donner un fusil. Mais sur ces entrefaites, arriva un milicienvais connu sur le front et qui me reconnut ; on nous donna alors, encore quâun p
ntrecĆur, des fusils et un petit nombre de chargeurs.On entendait au loin le bruit dâune fusillade, et les rues Ă©taient absolument dĂ©seut le monde disait quâil Ă©tait Ă prĂ©sent impossible de remonter les Ramblas. Les ga
vils sâĂ©taient emparĂ©s de maisons admirablement situĂ©es pour constituer des positminantes, et de lĂ ils tiraient sur tous ceux qui passaient. Jâaurais risquĂ© le coup gagner mon hĂŽtel, mais le bruit courait que le comitĂ© local allait probablementaquĂ© dâun instant Ă lâautre et quâil valait mieux que nous restions lĂ . Partout da
cal, sur les marches de lâescalier, et dehors sur le trottoir, de petits groupes de ationnaient, qui parlaient avec agitation. Personne ne paraissait se faire une idĂ©e
aire de ce qui se passait. Tout ce que je pus apprendre, câest que les gardes civils avaaquĂ© le Central tĂ©lĂ©phonique et sâĂ©taient emparĂ©s de plusieurs points stratĂ©giques dominaient dâautres locaux appartenant aux ouvriers. Lâimpression gĂ©nĂ©rale Ă©tait gardes civils « en avaient » aprĂšs la C.N.T. et la classe ouvriĂšre en gĂ©nĂ©ral. Câest un
gne de remarque que, Ă ce moment-lĂ , personne ne semblait incrimineuvernement. Les classes pauvres de Barcelone regardaient les gardes civils commrtes de Black and Tans{5} et lâon paraissait considĂ©rer comme chose Ă©tablie qaient attaquĂ© de leur propre initiative. Lorsque je sus de quoi il retournait, je me s
oralement plus Ă lâaise. La question Ă©tait suffisamment claire. Dâun cĂŽtĂ© la C.N.Tutre cĂŽtĂ© la police. Je nâai pas un amour particulier pour lâ« ouvrier » idĂ©alisĂ© tel qreprĂ©sente lâesprit bourgeois du communiste, mais quand je vois un vĂ©ritable ouchair et en os en conflit avec son ennemi naturel, lâagent de police, je nâai pas beso
e demander de quel cĂŽtĂ© je suis.Un bon bout de temps sâĂ©coula et il semblait ne rien se passer dans notre coin,
ut de la ville. Il ne me vint pas Ă lâidĂ©e que je pouvais tĂ©lĂ©phoner Ă mon hĂŽtel voir si ma femme Ă©tait saine et sauve ; je tenais pour admis que le Central tĂ©lĂ©phonait cessĂ© de fonctionner â alors quâen rĂ©alitĂ© il ne fut hors de service que durant ures. On pouvait Ă©valuer Ă environ trois cents le nombre des personnes qu
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ouvaient dans les deux locaux : câĂ©taient surtout des gens de la classe la plus pauvrees mal frĂ©quentĂ©es en bas de la ville, aux alentours des quais ; il y avait quantitmmes parmi eux, certaines portant sur leurs bras des bĂ©bĂ©s, et une foule de prçons dĂ©guenillĂ©s. Je me figure que beaucoup dâentre eux nâavaient pas la moition de ce qui se passait et que tout simplement ils avaient couru se rĂ©fugier dan
caux du P.O.U.M. Il sây trouvait aussi pas mal de miliciens en permission et quelrangers. Pour autant quâil me fĂ»t possible dâen juger, il nây avait guĂšre quixantaine de fusils Ă rĂ©partir entre nous tous. Le bureau en haut Ă©tait continuellem
siĂ©gĂ© par une foule de gens qui rĂ©clamaient des fusils et Ă qui on rĂ©pondait quâil stait plus. Parmi les miliciens, de tout jeunes gars qui semblaient se croire en pique rĂŽdaient çà et lĂ , tĂąchant de soutirer des fusils Ă ceux qui en avaient, ou de lesucher. Lâun dâeux ne tarda pas Ă sâemparer du mien par une ruse habile et Ă ausclipser avec. Je me retrouvai donc sans arme, Ă lâexception de mon tout petit pistomatique pour lequel je ne possĂ©dais quâun chargeur de cartouches.
Il commençait Ă faire nuit, la faim me gagnait et il ne paraissait pas y avoir queose Ă manger Ă lâhĂŽtel FalcĂłn. Nous sortĂźmes Ă la dĂ©robĂ©e, mon ami et moi, pour
ner Ă son hĂŽtel qui Ă©tait situĂ© non loin de lĂ . Les rues Ă©taient plongĂ©es dansscuritĂ© totale ; pas un bruit, pas une Ăąme ; les tabliers de tĂŽle Ă©taient baissĂ©s Ă to devantures de magasins, mais on nâavait pas encore construit de barricades. Oaucoup dâhistoires avant de nous laisser entrer dans lâhĂŽtel ; la porte en Ă©tait fermf et la barre mise. Ă notre retour, jâappris que le Central tĂ©lĂ©phonique fonctionnait
e rendis dans le bureau dâen haut oĂč il y avait un appareil pour donner un couĂ©phone Ă ma femme. DĂ©tail bien caractĂ©ristique, il nây avait aucun annuaireĂ©phones dans le local, et je ne connaissais pas le numĂ©ro de lâhĂŽtel Continental ; ae heure environ de recherches de piĂšce en piĂšce, je dĂ©couvris un livret-guide qu
urnit le numĂ©ro. Je ne pus prendre contact avec ma femme, mais je parvins Ă ahn McNair, le reprĂ©sentant de lâI.L.P. Ă Barcelone. Il me dit que tout allait bien,rsonne nâavait Ă©tĂ© tuĂ©, et me demanda si, de notre cĂŽtĂ©, tout le monde Ă©tait sain et
comitĂ© local. Je lui dis que nous irions tout Ă fait bien si nous avions quelgarettes. Ce nâĂ©tait de ma part quâune plaisanterie ; toujours est-il quâune demi-hus tard nous vĂźmes McNair apparaĂźtre avec deux paquets de Lucky Strike. Il frontĂ© les rues oĂč il faisait noir comme dans un four, et oĂč des patrouilles dâanarchr deux fois lâavaient arrĂȘtĂ© et, le pistolet braquĂ© sur lui, avaient examinĂ© ses papier
oublierai pas ce petit acte dâhĂ©roĂŻsme. Les cigarettes nous firent rudement plaisir.On avait placĂ© des gardes armĂ©s Ă la plupart des fenĂȘtres, et en bas, dans la ruetit groupe dâhommes des troupes de choc arrĂȘtaient et interrogeaient les rares pass
n car de patrouille anarchiste sâarrĂȘta, tout hĂ©rissĂ© dâarmes. Ă cĂŽtĂ© du chauffeur,lendide jeune fille brune dâenviron dix-huit ans berçait sur ses genoux une mitrailngtemps jâerrai Ă lâaventure dans le local, vaste bĂątiment plein de coins et de recnt il Ă©tait impossible dâapprendre la topographie. CâĂ©tait partout lâhabituel gĂąchiseubles brisĂ©s et les chiffons de papier qui semblaient ĂȘtre les produits inĂ©vitables volution. Partout des gens qui dormaient ; sur un divan dĂ©moli, dans un couloir, uvres femmes du quartier des quais ronflaient paisiblement. Ce bĂątiment avait Ă©t
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usic-hall avant que le P.O.U.M. lâeĂ»t repris. Des scĂšnes Ă©taient demeurĂ©es dressĂ©es usieurs des salles ; sur lâune dâelles il y avait un piano Ă queue abandonnĂ©. FinalemdĂ©couvris ce que je cherchais : le magasin dâarmes. Jâignorais comment les chaient tourner et jâavais grand besoin dâune arme. Jâavais si souvent entendu direus les partis rivaux, P.S.U.C., P.O.U.M. et C.N.T.-F.A.I. amassaient tous pareillemenmes dans Barcelone, que je ne pouvais croire que deux des principaux locauxO.U.M. ne continssent que les cinquante ou soixante fusils que jâavais vus. La piĂšcrvait de magasin dâarmes nâĂ©tait pas gardĂ©e et la porte en Ă©tait peu solide ; il ne nou
s difficile, Ă mon ami et Ă moi, de lâouvrir en exerçant une pression sur elle. Une fntĂ©rieur, nous nous aperçûmes que ce que lâon nous avait rĂ©pondu Ă©tait la vĂȘme : il nây avait rĂ©ellement plus dâarmes. Tout ce que nous trouvĂąmes, ce fut envux douzaines de fusils de petit calibre, dâun modĂšle qui nâĂ©tait plus en usagelques fusils de chasse, et pas la moindre cartouche pour aucun dâeux. Je montreau demander sâil ne restait pas de balles de pistolet : ils nâen avaient pas. Toutus avions quelques caisses de bombes que lâun des cars de patrouille anarchistes ait apportĂ©es. Je mis deux bombes dans ma cartouchiĂšre. Elles Ă©taient dâun type
ossier, sâallumaient en en frottant le haut avec une espĂšce dâallumette, et Ă©taientjettes Ă exploser de leur propre initiative.De tous cĂŽtĂ©s, des gens Ă©taient Ă©talĂ©s par terre, endormis. Dans une piĂšce, un
eurait et pleurait, sans discontinuer. Bien quâon fĂ»t en mai, la nuit commençait Ă oide. Devant lâune des scĂšnes de music-hall les rideaux pendaient encore. Jâember un en le fendant avec mon couteau, mâenroulai dedans et dormis deux heun sommeil troublĂ©, je mâen souviens, par la pensĂ©e de ces sacrĂ©es bombes qui Ă©taen fichues de mâenvoyer en lâair si jamais je venais Ă rouler sur elles dâune façon unop appuyĂ©e. Ă trois heures du matin le bel homme de haute taille qui paraissait avo
mmandement me rĂ©veilla, me donna un fusil et me plaça en faction Ă lâunenĂȘtres. Il me dit que Salas, le chef de la police responsable de lâattaque du buntral, avait Ă©tĂ© mis en Ă©tat dâarrestation. (En rĂ©alitĂ©, comme nous lâapprĂźmes plus avait seulement Ă©tĂ© rĂ©voquĂ©. Tout de mĂȘme, ces nouvelles vinrent confi
mpression gĂ©nĂ©rale que les gardes civils avaient agi sans ordres.) DĂšs lâaube, les gbas, se mirent Ă construire deux barricades, lâune Ă lâextĂ©rieur du comitĂ© local, lâau
xtĂ©rieur de lâhĂŽtel FalcĂłn. Les rues de Barcelone sont pavĂ©es de galets carrĂ©s quels il est facile de construire un mur, et sous les galets il y a une sorte de caillo
i convient parfaitement pour remplir les sacs de protection. La construction derricades fut un spectacle Ă©trange et admirable. Jâaurais bien donnĂ© quelque chose uvoir le photographier ! Avec cette espĂšce dâĂ©nergie passionnĂ©e que les Espagploient lorsquâils sont tout Ă fait dĂ©cidĂ©s Ă se mettre Ă exĂ©cuter nâimporte quel tras hommes, des femmes, de tout petits enfants, en longues rangĂ©es, arrachaienvĂ©s ; certains les charriaient dans une voiture Ă bras que lâon avait dĂ©nichĂ©e quert, tandis que dâautres faisaient la navette en chancelant sous le poids de lourds sailloux. Sur le seuil du comitĂ© local, une jeune fille, une Juive allemande, portanntalons de milicien dont la garniture de boutons des genoux lui arrivait exactemenevilles, les regardait en souriant. Au bout de deux heures les barricades sâĂ©levaie
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uteur de tĂȘte, des guetteurs armĂ©s de fusils Ă©taient postĂ©s aux meurtriĂšres et, derne des barricades, un feu flambait et des hommes faisaient frire des Ćufs.
On mâavait de nouveau repris mon fusil, et il ne paraissait pas y avoir rien dâutre. Nous dĂ©cidĂąmes, lâautre Anglais et moi, de rentrer Ă lâhĂŽtel Continentaltendait au loin le bruit de pas mal de fusillades, mais pas du cĂŽtĂ© des Rammblait-il. En passant nous entrĂąmes dans les Halles. TrĂšs peu dâĂ©tals avaient ouveĂ©taient assiĂ©gĂ©s par une foule de gens des quartiers ouvriers au sud des Ramblas
oment mĂȘme oĂč nous entrĂąmes, un coup de feu claqua violemment au deh
elques panneaux de la verriĂšre du toit volĂšrent en Ă©clats, et la foule se rua verrties de derriĂšre. Quelques Ă©tals restĂšrent cependant ouverts, et nous pĂ»mes bacun une tasse de cafĂ© et acheter un morceau triangulaire de fromage de chĂšvre qurrai dans ma cartouchiĂšre Ă cĂŽtĂ© de mes bombes. Quelques jours plus tard, je fus ureux dâavoir ce morceau de fromage.
Au coin de la rue oĂč, la veille, jâavais vu des anarchistes commencer Ă tirer, sâĂ©laintenant une barricade. Lâhomme qui se tenait derriĂšre (jâĂ©tais, moi, de lâautre cĂŽrue) me cria de prendre garde. De la tour de lâĂ©glise, les gardes civils faisaient feu
stinction sur tous ceux qui passaient. Je mâarrĂȘtai un instant, puis franchis en couspace Ă dĂ©couvert. Effectivement, une balle passa en sifflant prĂšs de sagrĂ©ablement prĂšs. Quand je fus aux abords du siĂšge du comitĂ© exĂ©cutif du P.O.Uais encore de lâautre cĂŽtĂ© de lâavenue, de nouveaux cris dâavertissement me furessĂ©s par quelques hommes des troupes de choc qui se tenaient dans lâencadremeporte â cris dâavertissement dont, sur le moment, je ne compris pas le sens. Il y s arbres et un kiosque Ă journaux entre le siĂšge et moi (les avenues de ce genrepagne, ont un large trottoir central) et il ne mâĂ©tait pas possible de voir ce qontraient. Je parvins au Continental, mâassurai que tout allait bien, me lavai le visa
tournai au siĂšge du comitĂ© exĂ©cutif du P.O.U.M. (qui se trouvait Ă cent mĂštres plusns lâavenue) pour demander quels Ă©taient les ordres. Dans lâintervalle, le grondemdivers points, des tirs de fusils et de mitrailleuses Ă©tait devenu presque comparab
acas dâune bataille. Je venais juste de trouver Kopp et jâĂ©tais en train de lui demande nous Ă©tions censĂ©s faire quand retentirent en bas, dans la rue, une sĂ©rie dâexplosrayantes. Le fracas fut si violent que je fus persuadĂ© quâon nous tirait dessus avenon de campagne. En rĂ©alitĂ©, il ne sâagissait que de grenades Ă main, qui font le doleur bruit habituel lorsquâelles explosent parmi des bĂątiments de pierre. Kopp alla
nĂȘtre jeter un coup dâĆil dehors, redressa sa canne derriĂšre son dos, dit : « Allons nndre compte », et descendit lâescalier comme sâil allait se balader, lâair dĂ©tachĂ© comn habitude, moi le suivant. Juste un peu en retrait de lâencadrement de la porteoupe dâhommes des troupes de choc faisaient rouler des bombes sur la chaumme sâils jouaient aux quilles. Les bombes Ă©clataient vingt mĂštres plus loin en fafracas effroyable, Ă briser le tympan, auquel se mĂȘlaient les claquements des coup
sil. Au milieu de lâavenue, de derriĂšre le kiosque Ă journaux, une tĂȘte â câĂ©tait laun milicien amĂ©ricain que je connaissais bien â surgissait, qui avait exactementune noix de coco Ă un stand de foire. Ce fut seulement aprĂšs coup que je compris cpassait au juste. Dans la maison voisine du siĂšge du P.O.U.M. il y avait un cafĂ© ave
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tel au-dessus, appelĂ© le cafĂ© Moka. La veille, vingt ou trente gardes civils armĂ©s avnĂ©trĂ© dans le cafĂ©, puis, sitĂŽt le dĂ©clenchement des troubles, ils sâĂ©taient brusquemndus maĂźtres de toute la maison et sây Ă©taient barricadĂ©s. Il y avait lieu de croire qaient reçu lâordre de sâemparer du cafĂ©, Ă titre de mesure prĂ©alable Ă lâattaque ultĂ©rs locaux du P.O.U.M. De bonne heure le matin, ils avaient tentĂ© une sortie, des cfeu avaient Ă©tĂ© Ă©changĂ©s et un homme des troupes de choc avait Ă©tĂ© griĂšvement bun garde civil tuĂ©. Les gardes civils avaient refluĂ© dans le cafĂ©, mais lorsquâils avlâAmĂ©ricain descendre lâavenue ils avaient ouvert le feu sur lui, bien quâil ne fĂ»
mĂ©. LâAmĂ©ricain sâĂ©tait jetĂ© derriĂšre le kiosque pour se mettre Ă lâabri, et les homs troupes de choc lançaient des bombes pour faire rentrer Ă nouveau les gardes cns la maison.
Il suffit Ă Kopp dâun coup dâĆil pour saisir la situation ; il continua dâavancer earriĂšre un Allemand roux des troupes de choc qui venait juste dâarracher la goupil
retĂ© dâune bombe avec ses dents. Il cria Ă tout le monde de ne pas rester sur le seuireculer, et nous dit en plusieurs langues quâil fallait absolument Ă©viter une effusio
ng. Puis il sortit et sâavança sur la chaussĂ©e, sous les yeux des gardes civils, r
tensiblement son pistolet et le posa par terre. Deux officiers espagnols des mient de mĂȘme, et tous trois sâavancĂšrent lentement vers lâencadrement de la porte ordes civils se pressaient. Cela, on mâaurait donnĂ© vingt livres que je ne lâaurais pas sâavançaient, dĂ©sarmĂ©s, vers des hommes qui avaient perdu la tĂȘte et qui avaient
ain des fusils chargĂ©s. Un garde civil, en manches de chemise et blĂȘme de peur, sr le trottoir pour parlementer avec Kopp. Il ne cessait de montrer du doigt itation deux bombes non Ă©clatĂ©es qui gisaient sur la chaussĂ©e. Kopp revint vers us dire quâil valait mieux faire exploser ces bombes. Ă demeurer lĂ , elles constituadanger pour tous ceux qui passaient. Un homme des troupes de choc tira un cou
sil sur lâune des bombes et la fit Ă©clater, puis fit feu sur lâautre, mais la manqua. Jmandai de me passer son fusil, mâagenouillai et tirai sur la seconde bombe. Je reg
avoir Ă dire que, moi aussi, je la manquai. Câest le seul coup de feu que jâai tirĂ© du troubles. La chaussĂ©e Ă©tait jonchĂ©e de dĂ©bris de verre provenant de lâenseigne du
oka et deux autos qui Ă©taient garĂ©es Ă lâextĂ©rieur â lâune dâelles Ă©tait lâauto officielpp â avaient Ă©tĂ© criblĂ©es de balles et avaient eu leur pare-brise pulvĂ©risĂ© par lâexplos bombes.
Kopp mâemmena de nouveau en haut et mâexposa la situation. Nous dev
fendre les locaux du P.O.U.M. sâils Ă©taient attaquĂ©s, mais dâaprĂšs les instrucvoyĂ©es par les leaders du P.O.U.M. il nous fallait rester sur la dĂ©fensive et negager la lutte sâil Ă©tait possible de lâĂ©viter. Exactement en face de nous il y ava
nĂ©ma, appelĂ© le Poliorama, au-dessus duquel se trouvait un musĂ©e, et tout Ă farnier Ă©tage, dominant de haut le niveau gĂ©nĂ©ral des toits, un petit observatoire ux dĂŽmes jumeaux. Les dĂŽmes commandaient la rue et il suffisait donc de quelmmes postĂ©s lĂ -haut avec des fusils pour empĂȘcher toute attaque contre le siĂšg
O.U.M. Les concierges du cinĂ©ma Ă©taient membres de la C.N.T. et nous laisseraient venir. Quant aux gardes civils dans le cafĂ© Moka, on nâaurait pas dâennuis avec eux
avaient pas envie de se battre et se laisseraient volontiers persuader quâil faut que
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monde vive. Kopp rĂ©pĂ©ta que nous avions lâordre de ne pas tirer Ă moins quâon ne Ăąt dessus ou que nos locaux fussent attaquĂ©s. Je compris, sans quâil en soufflĂąt e les leaders du P.O.U.M. Ă©taient furieux dâĂȘtre entraĂźnĂ©s dans cette histoire, aient le sentiment quâils devaient faire cause commune avec la C.N.T.
On avait dĂ©jĂ placĂ© des sentinelles dans lâobservatoire. Les trois jours et nivants, je les ai passĂ©s sur le toit du Poliorama que je ne quittais que durant les cooments oĂč je faisais un saut jusquâĂ mon hĂŽtel pour les repas. Je ne courus anger, je nâeus rien de pire Ă souffrir que la faim et lâennui, et pourtant ce fut lâune
riodes les plus insupportables de ma vie tout entiĂšre. Je crois que lâon ne peut gvre de moments qui Ă©cĆurent et dĂ©sillusionnent plus et martyrisent les nerfs davane ces affreux jours de guerre de rues.
Je demeurais lĂ , assis sur le toit, et lâabsurditĂ© de tout cela me rempliĂ©tonnement.
Des petites fenĂȘtres de lâobservatoire on avait vue sur des kilomĂštres Ă la ronnnombrables perspectives de hauts immeubles Ă©lancĂ©s, de dĂŽmes de verre e
ntastiques toits ondulĂ©s de tuiles dâun vert brillant Ă reflets cuivrĂ©s ; Ă lâe
ntillement de la haute mer â câĂ©tait la premiĂšre fois que je voyais la mer depuis rivĂ©e en Espagne. Et cette Ă©norme ville dâun million dâhabitants Ă©tait plongĂ©e dansrte dâinertie pleine de sourde violence, dans un cauchemar de bruit sans mouvems rues inondĂ©es de soleil Ă©taient absolument dĂ©sertes. Nulle autre manifestation de les rafales de balles venant des barricades et des fenĂȘtres protĂ©gĂ©es par des sac
rre. Pas un vĂ©hicule ne circulait dans les rues ; çà et lĂ le long des Ramblasamways Ă©taient demeurĂ©s immobilisĂ©s Ă lâendroit oĂč le conducteur avait sautĂ© Ă rsque les combats avaient commencĂ©. Et tout le temps ce vacarme infernal, donlliers de bĂątiments en pierre renvoyaient les Ă©chos, continuait sans fin telle
mpĂȘte de pluie tropicale, tantĂŽt sâaffaiblissant au point quâon nâentendait plus qures coups de feu espacĂ©s, et tantĂŽt se ranimant jusquâĂ devenir une fusilsourdissante, mais ne sâarrĂȘtant jamais tant que durait le jour, et Ă lânctuellement recommençant.
Que diable se passait-il ? Qui se battait et contre qui ? Et qui avait le dessus ? quâil Ă©tait bien difficile de dĂ©couvrir au dĂ©but. Les habitants de Barcelone ont tellemabitude des combats de rues, et connaissent si bien la topographie locale, quâils sar une sorte dâinstinct quel parti politique occupera telle et telle rue et tel e
meuble. Mais un Ă©tranger, trop dĂ©savantagĂ©, sây perd. En regardant de lâobservatoie rendais compte que les Ramblas, avenue qui est lâune des principales artĂšres dle, constituaient une ligne de dĂ©marcation. Ă droite de cette ligne, les quartiers ouvaient unanimement anarchistes ; Ă gauche, un combat confus Ă©tait en train de se lns les ruelles tortueuses, mais sur cette partie de la ville le P.S.U.C. et les gardes caient plus ou moins la haute main. Tout au bout des Ramblas, de notre cĂŽtĂ©, autouplace de Catalogne, la situation Ă©tait si compliquĂ©e quâelle eĂ»t Ă©tĂ© tout Ă
ntelligible si chaque bĂątiment nâavait pas arborĂ© un pavillon de parti. Le principal prepĂšre, ici. Ă©tait lâhĂŽtel ColĂłn, quartier gĂ©nĂ©ral du P.S.U.C., qui dominait la plac
talogne. Ă une fenĂȘtre prĂšs de lâavant-dernier O de lâĂ©norme « HĂŽtel ColĂłn » qui sâ
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r la façade, ils avaient placĂ© une mitrailleuse qui pouvait balayer la place aveceurtriĂšre efficacitĂ©. Ă cent mĂštres Ă notre droite, un peu plus bas sur les RamblaS.U., Union des Jeunesses du P.S.U.C. (correspondant Ă lâUnion des Jeunemmunistes en Angleterre), occupaient un grand entrepĂŽt dont les fenĂȘtres latĂ©rotĂ©gĂ©es par des sacs de terre, faisaient face Ă notre observatoire. Ils avaient amenapeau rouge et hissĂ© le drapeau national catalan. Sur le Central tĂ©lĂ©phonique, poinpart de toute lâaffaire, le drapeau national catalan et le drapeau anarchiste flottte Ă cĂŽte. On avait dĂ», lĂ , sâarrĂȘter Ă quelque compromis provisoire, car le Ce
nctionnait sans interruption et de ce bĂątiment on ne tirait aucun coup de feu.Dans notre coin, câĂ©tait singuliĂšrement calme. Les gardes civils, dans le cafĂ© M
aient baissĂ© les rideaux de fer et sâĂ©taient fait une barricade en empilant les tables eaises du cafĂ©. Un peu plus tard, une demi-douzaine dâentre eux montĂšrent sur le toce de nous, et y construisirent avec des matelas une autre barricade, au-dessuquelle ils firent flotter un drapeau national catalan. Mais il Ă©tait visible quâils nâavcune envie dâentamer un combat. Kopp avait conclu avec eux un accord prĂ©cis : sâiaient pas sur nous, nous ne tirerions pas sur eux. Il Ă©tait maintenant devenu tout
mi avec eux et avait Ă©tĂ© plusieurs fois leur rendre visite dans le cafĂ© Moka. Les gavils avaient naturellement fait main basse sur tout ce quâil y avait dans le cafĂ© pouboire, et ils firent cadeau Ă Kopp de quinze bouteilles de biĂšre. En retour, Kopp
ait bel et bien donnĂ© un de nos fusils pour en remplacer un quâils avaient, ilvaient comment, perdu la veille. NâempĂȘche que lâon Ă©prouvait tout de mĂȘme une dmpression Ă ĂȘtre assis sur ce toit. TantĂŽt jâen avais tout bonnement par-dessus latoute cette histoire, je ne prĂȘtais aucune attention au vacarme infernal et passais
ures Ă lire une collection de livres des Ăditions Penguin que, par bonheur, jâahetĂ©s quelques jours auparavant ; tantĂŽt jâavais pleinement conscience de la prĂ©sen
nquante mĂštres de moi, dâhommes armĂ©s qui mâĂ©piaient. CâĂ©tait un peu commvais Ă©tĂ© Ă nouveau dans les tranchĂ©es. Plusieurs fois je me surpris Ă dire, par la forabitude, les « fascistes », en parlant des gardes civils. En gĂ©nĂ©ral, nous Ă©tionviron, lĂ -haut. Deux hommes Ă©taient placĂ©s de garde dans chacune des deux toubservatoire, tandis que les autres restaient assis en dessous sur le toit de plomb, tre abri quâun garde-fou de pierre. Je me rendais nettement compte quâĂ tout ins gardes civils pouvaient recevoir par tĂ©lĂ©phone lâordre dâouvrir le feu. Ils Ă©taient
mbĂ©s dâaccord de nous prĂ©venir auparavant, mais rien ne nous assurait q
ndraient leur promesse. Une seule fois, du reste, on put croire que le conflclenchait. Lâun des gardes civils en face de nous sâagenouilla et se mit Ă tirer, apr la barricade. JâĂ©tais en faction dans lâobservatoire Ă ce moment-lĂ . Je braquai sil sur lui en criant :
« HĂ© ! Ne tirez pas sur nous !â Quoi ?â Ne tirez pas sur nous, ou nous tirerons aussi.â Non, non ! Ce nâest pas sur vous que je tirais. Regardez lĂ , en bas ! » Avec son fusil il me montrait quelque chose dans la direction de la rue transver
bout de notre immeuble. Effectivement je vis un jeune homme en salopette bleu
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sil dans les mains, qui Ă©tait en train de se dĂ©filer Ă lâangle de la maison, et il Ă©tait viâil venait de tirer un coup de feu sur les gardes civils du toit.
« Câest sur lui que je tirais. Il a tirĂ© le premier. (Je crois que câĂ©tait vrai.) Navons pas envie de vous tuer. Nous sommes des travailleurs, nous aussi, tout cous ! »
Il me fit le salut antifasciste, que je lui rendis.Je lui criai :« Est-ce quâil vous reste encore de la biĂšre ?
â Non, il nây en a plus. »Ce mĂȘme jour, sans motif apparent, un homme, dans le local des J.S.U. un peu
s dans lâavenue, leva soudain son fusil et me tira dessus au moment oĂč je me penca fenĂȘtre. Peut-ĂȘtre faisais-je une cible trop tentante. Je ne tirai pas en rĂ©ponse. âil ne fĂ»t quâĂ cent mĂštres de moi, sa balle passa si loin du but quâelle nâeffleura ms le toit de lâobservatoire. Comme Ă lâordinaire la qualitĂ© du tir des Espagnols me sa
n me tira plusieurs fois dessus de ce local.Et ce diabolique tintamarre qui continuait indéfiniment ! Mais, autant que
uvais juger dâaprĂšs ce que je voyais et entendais, la lutte se bornait Ă ĂȘtre dĂ©fensiveux cĂŽtĂ©s. Les gens restaient simplement dans leurs locaux ou derriĂšre leurs barricamaintenaient un feu roulant contre les gens dâen face. Ă un demi-mille de
viron, il y avait une rue oĂč les principaux bureaux de la C.N.T. et de lâU.G.T. se faisesque exactement face ; il venait de cette direction un vacarme dâune interrifiante. Jâai passĂ© dans cette rue le lendemain du jour oĂč le combat prit fin ; les vs devantures Ă©taient percĂ©es comme des cribles. (La plupart des commerçantrcelone avaient collĂ© des bandes de papier entrecroisĂ©es sur leurs vitres, ausslaient-elles pas en Ă©clats lorsquâune balle les frappait.) Parfois le crĂ©pitement des ti
sils et de mitrailleuses Ă©tait ponctuĂ© par lâĂ©clatement de grenades Ă main. Et Ă de ltervalles, peut-ĂȘtre une douzaine de fois en tout, il y eut de formidables explosionsr le moment, je nâarrivai pas Ă mâexpliquer ; au bruit on eĂ»t dit des explosionmbes aĂ©riennes, mais câĂ©tait impossible car nulle part on nâapercevait dâavion. On par la suite â et il est trĂšs possible que cela soit vrai â que des agents provocatsaient sauter des explosifs en quantitĂ©s massives, afin dâaugmenter le vacarme nique gĂ©nĂ©rale. Il nây eut cependant pas de tir dâartillerie. JâĂ©tais toujours Ă tereille avec la crainte dâen entendre, car si les canons se mettaient de la partie,
udrait dire que lâaffaire se corsait (lâartillerie est le facteur dĂ©terminant dans la gurues). AprĂšs coup il y eut des contes Ă dormir debout dans les journaux Ă propotteries de canons qui auraient tirĂ© dans les rues, mais personne ne put montretiment qui eĂ»t Ă©tĂ© atteint par un obus. En tout cas, le son du canon est facilemconnaissable pour qui est accoutumĂ© Ă lâentendre.
Presque dĂšs le dĂ©but les vivres commencĂšrent Ă manquer. Avec difficultĂ© etveur de la nuit (car les gardes civils continuaient Ă canarder ceux qui passaient sumblas), de lâhĂŽtel FalcĂłn, on apportait Ă manger pour les quinze ou vingt milicientrouvaient au siĂšge de lâexĂ©cutif du P.O.U.M., mais il y avait tout juste assez pourmonde, aussi allions-nous, le plus grand nombre possible dâentre nous, mang
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ĂŽtel Continental. Le Continental avait Ă©tĂ© « collectivisĂ© » par la GĂ©nĂ©ralitĂ© et mme la plupart des hĂŽtels, par la C.N.T. ou lâU.G.T. ; et il Ă©tait, de ce fait, consmme terrain neutre. Les troubles nâeurent pas plus tĂŽt commencĂ© que lâhĂŽtel sâempaquer de gens qui formaient un assemblage trĂšs surprenant. Il y avait lĂ des journalrangers, des suspects politiques de toutes nuances, un aviateur amĂ©ricain au servicuvernement, plusieurs agents communistes (un gros Russe, entre autres, Ă enaçant, que lâon disait ĂȘtre agent du GuĂ©pĂ©ou, que lâon surnommait Charlie Chai portait, attachĂ©s Ă la ceinture, un revolver et une petite bombe bien fourbie), quel
milles espagnoles aisĂ©es dont les sympathies paraissaient aller aux fascistes, deuois blessĂ©s de la Brigade internationale, un groupe de conducteurs de poids lourdaient Ă©tĂ© immobilisĂ©s Ă Barcelone par le dĂ©clenchement des troubles au moment oaient ramener en France quelques gros camions avec un chargement dâoranges, e
certain nombre dâofficiers de lâarmĂ©e populaire. LâarmĂ©e populaire, dans semble, resta neutre durant toute la lutte ; quelques soldats sâĂ©chappĂšrent biensernes pour y prendre part, mais Ă titre individuel. Le mardi matin, jâen vis deuxrricades du P.O.U.M. Au dĂ©but, avant que le manque de vivres ne devĂźnt aigu et qu
urnaux ne se fussent mis Ă attiser les haines politiques, on avait tendance Ă considute lâaffaire comme une plaisanterie. Des choses comme ça, Ă Barcelone il en arraque annĂ©e, disaient les gens. Georges Tioli, journaliste italien et lâun de nos gr
mis, rentra le pantalon trempĂ© de sang. Il Ă©tait sorti pour voir ce qui se passait, et taâil Ă©tait en train de panser un blessĂ© qui gisait sur le trottoir, quelquâun, comme paait lancĂ© sur lui une grenade ; par bonheur, celle-ci ne lâavait pas gravement atteine souviens quâil fit la remarque quâĂ Barcelone on devrait numĂ©roter les pavĂ©s ;argnerait tellement de peine pour la construction et la dĂ©molition des barricades ! e souviens de ces deux hommes de la Brigade internationale que je trouvai as
attendre dans ma chambre dâhĂŽtel alors que jây arrivais fatiguĂ©, affamĂ© et sale ae nuit de faction. Leur attitude fut celle dâune totale neutralitĂ©. Sâils avaient
ellement des hommes de parti, ils mâeussent, je suppose, pressĂ© de changer de camĂȘme ligotĂ© et enlevĂ© les bombes dont mes poches Ă©taient bourrĂ©es ; au lieu de celcontentĂšrent de me plaindre dâavoir Ă passer ma permission Ă monter la garde sut. Ces mots peignent bien lâattitude gĂ©nĂ©rale : « Ce nâest quâune querelle entrarchistes et la police, câest sans importance. » En dĂ©pit de lâextension du combat embre des blessĂ©s et des morts, je crois que cette opinion Ă©tait plus proche de la v
e la version officielle prĂ©sentant lâaffaire comme un soulĂšvement prĂ©mĂ©ditĂ©.Câest vers le mercredi (5 mai) quâun changement sembla sâopĂ©rer. Les rues, avedeaux de fer des devantures baissĂ©s, prĂ©sentaient un aspect lugubre. ĂĂ et lĂ de rĂ©tons, forcĂ©s de sortir pour telle ou telle raison, se glissaient en rasant les murs, ags mouchoirs blancs, et, en un endroit, au milieu des Ramblas, oĂč lâon Ă©tait Ă lâabrlles, quelques hommes criaient les journaux dans le dĂ©sert. Le mardi, Solidar
brera, le journal anarchiste, avait qualifiĂ© lâattaque du Central tĂ©lĂ©phonique dâ« odiovocation » (ou si ce ne sont pas lĂ les termes, câen est lâidĂ©e), mais le mercreangea de ton et commença de conjurer tout le monde de reprendre le travail.
aders anarchistes firent transmettre partout ce mĂȘme message. Le bureau de La Ba
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journal du P.O.U.M., qui nâĂ©tait pas dĂ©fendu, avait Ă©tĂ©, Ă peu prĂšs en mĂȘme tempsCentral tĂ©lĂ©phonique, attaquĂ© et occupĂ© par les gardes civils ; mais le journal nâes moins imprimĂ© dans un autre local et lâon put en distribuer quelques exemplairhortait tout le monde Ă rester aux barricades. Les gens demeuraient lâesprit indĂ©cdemandaient avec inquiĂ©tude comment diable tout cela allait finir. Je doute
elquâun ait quittĂ© les barricades Ă ce moment-lĂ , mais tout le monde Ă©tait las de te absurde qui, de toute Ă©vidence, ne pouvait mener Ă rien, personne ne souhaitair tourner en guerre civile en grand, ce qui risquerait dâavoir pour consĂ©quence la p
la guerre contre Franco. Cette crainte, je lâentendis exprimer de tous cĂŽtĂ©s. Ă ce qs comprendre dâaprĂšs ce que les gens dirent sur le moment, la masse des membreC.N.T. voulaient, et avaient voulu dĂšs le dĂ©but, deux choses seulement : quâon remuveau entre leurs mains le Central tĂ©lĂ©phonique, et quâon dĂ©sarmĂąt les gardes ce lâon avait en haine. Si la GĂ©nĂ©ralitĂ© leur eĂ»t fait cette double promesse, ainsi que mettre un terme Ă la spĂ©culation sur les vivres, il nâest pas douteux quâen lâespac
ux heures les barricades auraient Ă©tĂ© dĂ©molies. Mais il Ă©tait visible que la GĂ©nĂ©ravait pas lâintention de cĂ©der. Et il courait de vilains bruits. On disait qu
uvernement de Valence envoyait six mille hommes occuper Barcelone, et que lle miliciens des troupes du P.O.U.M. et des anarchistes avaient quittĂ© le front dâArur sâopposer Ă eux. Seul le premier de ces bruits Ă©tait vrai. En regardant attentivemhaut de la tour de lâobservatoire, nous vĂźmes les formes basses et grises de bĂątimguerre cerner de prĂšs le port. Douglas Moyle, qui avait Ă©tĂ© marin, dit que ça avait
ĂȘtre des contre-torpilleurs britanniques. Et, en effet, câĂ©taient bien des corpilleurs britanniques, mais nous nâen eĂ»mes la confirmation que par la suite.
Ce soir-lĂ , nous entendĂźmes dire que sur la place dâEspagne quatre cents gavils sâĂ©taient rendus et avaient remis leurs armes aux anarchistes ; il y eut a
vulgation, de façon imprĂ©cise, de la nouvelle que la C.N.T. avait le dessus danubourgs, principalement dans les quartiers ouvriers. Nous semblions en passe dinqueurs. Mais ce mĂȘme soir Kopp mâenvoya chercher et, le visage grave, me diton les informations quâil venait de recevoir, le gouvernement Ă©tait sur le poin
ettre le P.O.U.M. hors la loi et de lui dĂ©clarer la guerre. Cette nouvelle me donnup. Pour la premiĂšre fois jâentrevis lâinterprĂ©tation qui serait probablement dorĂšs coup de cette affaire. ConfusĂ©ment je prĂ©vis quâune fois la lutte terminĂ©e on fomber toute la responsabilitĂ© sur le P.O.U.M., qui Ă©tait le parti le plus faible et, par
plus indiquĂ© Ă prendre comme bouc Ă©missaire. Et en attendant, câen Ă©tait fini, tre coin, de la neutralitĂ©. Si le gouvernement nous dĂ©clarait la guerre, nous nâaurs dâautre alternative que de nous dĂ©fendre. Et ici, au siĂšge du comitĂ© exĂ©cutif, uvions ĂȘtre certains que les gardes civils dâĂ cĂŽtĂ© recevraient lâordre de nous attaq
otre seule chance de salut Ă©tait de les attaquer les premiers. Kopp Ă©tait au tĂ©lĂ©phoendre les ordres ; si lâon nous apprenait de façon catĂ©gorique que le P.O.U.M. Ă©taitrs la loi, il nous faudrait prendre immĂ©diatement des mesures pour occuper le oka.
Je me rappelle quelle interminable soirĂ©e de cauchemar nous passĂąmes Ă fortre local. Nous fermĂąmes Ă clef le rideau de fer abaissĂ© devant lâentrĂ©e principal
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rriĂšre, nous construisĂźmes une barricade avec des dalles de pierre laissĂ©es pavriers qui Ă©taient en train de faire quelques rĂ©parations juste au moment oĂč
oubles avaient commencĂ©. Nous inspectĂąmes notre stock dâarmes. En comptant lesils qui Ă©taient en face, sur le toit du Poliorama, nous avions vingt et un fusils, donfectueux, environ cinquante cartouches pour chacun dâeux, et quelques douzainembes ; rien dâautre Ă part cela, que quelques pistolets et revolvers. Une douz
hommes, des Allemands pour la plupart, sâĂ©taient offerts comme volontaires aquer le cafĂ© Moka, sâil nous fallait en venir lĂ . Nous attaquerions par le
turellement, en pleine nuit, pour les prendre Ă lâimproviste ; ils Ă©taient plus nombrais notre moral Ă©tait meilleur, et certainement nous parviendrions Ă emporter la passaut, mais il y aurait des morts. Nous nâavions pas de vivres dans notre local, elques tablettes de chocolat, et le bruit avait couru quâ« ils » allaient nous couper ersonne ne savait qui, au juste, ce « ils » dĂ©signait CâĂ©tait peut-ĂȘtre le gouvernemi avait la haute main sur les usines de distribution dâeau, ou peut-ĂȘtre la C.rsonne ne savait.) Nous passĂąmes beaucoup de temps Ă remplir toutes les cuvns les lavabos, tous les seaux que nous pĂ»mes trouver, et finalement les qu
uteilles Ă biĂšre, vides Ă prĂ©sent, que les gardes civils avaient donnĂ©es Ă Kopp.JâĂ©tais dâune humeur Ă©pouvantable, et vannĂ© dâavoir passĂ© quelque soixante hepeu prĂšs sans dormir. On Ă©tait maintenant Ă une heure avancĂ©e de la nuit. En basmmes dormaient, Ă©tendus par terre derriĂšre la barricade. En haut, il y avait une pambre garnie dâun divan, dont nous avions lâintention de faire un poste de secours,e, est-il besoin de le dire, nous nous aperçûmes quâil nây avait ni teinture dâiodndes de pansement dans le local. Ma femme avait quittĂ© lâhĂŽtel pour venir oindre, pour le cas oĂč nous aurions besoin dâune infirmiĂšre. Je mâĂ©tendis sur le drouvant le dĂ©sir de goĂ»ter une demi-heure de repos avant lâattaque du cafĂ© Mok
urs de laquelle il Ă©tait Ă prĂ©sumer que je serais tuĂ©. Je me souviens de la sensatione insupportable que jâĂ©prouvai du fait de mon pistolet qui, attachĂ© Ă mon ceintue rentrait dans les reins. Et la chose suivante dont je me souvienne câest de mveillĂ© en sursaut, pour trouver ma femme debout Ă cĂŽtĂ© de moi. Il faisait grand jo
sâĂ©tait rien passĂ©, le gouvernement nâavait pas dĂ©clarĂ© la guerre au P.O.U.M., avait pas Ă©tĂ© coupĂ©e et, si lâon faisait abstraction de quelques fusillades par-ci pns les rues, tout Ă©tait comme Ă lâordinaire. Ma femme me dit quâelle ne sâĂ©tait pas scĆur de me rĂ©veiller et avait dormi dans un fauteuil, dans lâune des chambres s
vant.LâaprĂšs-midi il y eut une sorte dâarmistice. Le bruit de la fusillade sâĂ©teignit pu, et soudain, comme par un coup de thĂ©Ăątre, les rues sâemplirent de monde. Quelagasins commencĂšrent Ă relever leurs tabliers de tĂŽle et une foule Ă©norme envaharchĂ©, rĂ©clamant des denrĂ©es et se pressant autour des Ă©tals dâalimentation, bien qssent Ă peu prĂšs vides. Il est Ă remarquer, cependant, que les tramwaycommencĂšrent pas Ă circuler. Les gardes civils Ă©taient toujours derriĂšre leurs barricns le cafĂ© Moka ; ni lâun ni lâautre camp nâĂ©vacua les locaux fortifiĂ©s. Tout le murait çà et lĂ aux alentours, cherchant Ă acheter des vivres. Et de tous cĂŽtĂ©tendait poser la mĂȘme question anxieuse : « Pensez-vous que ça soit fini ? Pensez-
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e ça va recommencer ? » à « ça », au conflit, on y songeait à présent comme à une calamité naturelle, comme à un cyclone ou à un tremblement de terre, qui
appait tous pareillement et quâil nâĂ©tait pas en notre pouvoir dâempĂȘcher.ectivement, presque tout de suite â je crois quâen rĂ©alitĂ© il doit y avoir eu une trĂȘv
usieurs heures, mais ces heures nous firent lâeffet de minutes â le claquement souun coup de feu, comme une rafale de pluie en juin, provoqua un sauve-qui-peut gĂ©n tabliers de tĂŽle des magasins retombĂšrent avec un bruit sec, les rues se vidĂšmme par enchantement, les barricades se garnirent dâhommes ; « ça »
commencé.Je regagnai mon poste sur le toit avec un profond dégoût et une fureur concen
uand on est en train de prendre part Ă des Ă©vĂ©nements tels que ceux-ci, je suppose qt en train, dans une modeste mesure, de faire de lâhistoire, et lâon devrait, en tstice, avoir lâimpression dâĂȘtre un personnage historique. Mais non, on ne lâa jamrce quâĂ de tels moments, les dĂ©tails dâordre physique lâemportent toujouraucoup sur tout le reste. Pendant toute la durĂ©e des troubles, il ne mâest pas arrivĂ©ule fois de faire lâ« analyse » exacte de la situation, comme le faisaient avec
aisance les journalistes Ă des centaines de kilomĂštres de lĂ . Ce Ă quoi je songrtout, ce nâĂ©tait pas au juste et Ă lâinjuste dans cette dĂ©plorable lutte dâexterminaciproque, mais tout bonnement au manque de confort et Ă lâennui dâĂȘtre assis joit sur ce toit que je ne pouvais plus voir, et Ă la faim toujours grandissante, car aunous nâavait fait un vrai repas depuis le lundi. Et la pensĂ©e ne me quittait pas quâi
udrait repartir sur le front aussitĂŽt quâon en aurait fini avec cette histoire. Il y avaoi vous rendre furieux. Je venais de passer cent quinze jours au front et jâĂ©tais revercelone affamĂ© dâun peu de repos et de confort ; et voilĂ quâil me fallait passer
mps assis sur un toit, en face des gardes civils, aussi embĂȘtĂ©s que moi, qui, de temp
mps, mâadressaient de la main un salut en mâassurant quâils Ă©taient, eux aussitravailleurs » (une façon de me dire quâils espĂ©raient que je ne les tuerais pas), âils nâhĂ©siteraient pas Ă faire feu sur moi si on leur en donnait lâordre. CâĂ©tait peutlâhistoire, mais on nâen avait pas lâimpression. On aurait plutĂŽt dit une mauv
riode sur le front, comme lorsque les effectifs Ă©taient trop faibles et quâil fallait assnombre anormal dâheures de faction ; au lieu de faire acte dâhĂ©roĂŻsme, on
mplement Ă rester Ă son poste, malade dâennui, tombant de sommeil, et se ficerdument de savoir de quoi il retournait.
Ă lâintĂ©rieur de lâhĂŽtel, dans cette cohue de gens si diffĂ©rents entre eux, et doupart nâavaient pas osĂ© mettre le nez dehors, une abominable atmosphĂšre de suspait grandi. Diverses personnes Ă©taient atteintes de lâidĂ©e fixe de lâespionnage ssaient dans tous les coins pour vous murmurer Ă lâoreille que tous les autres Ă©ts espions, qui des communistes, qui des trotskystes, ou des anarchistes, ou de Dieui encore. Le gros agent russe retenait dans les encoignures, lâun aprĂšs lâautre, tou
fugiĂ©s Ă©trangers pour leur expliquer de façon plausible que tout cela Ă©tait un comarchiste. Je lâobservais, non sans intĂ©rĂȘt, car câĂ©tait la premiĂšre fois quâil mâĂ©tait dvoir quelquâun dont le mĂ©tier Ă©tait de rĂ©pandre des mensonges â si lâon fait excep
s journalistes, bien entendu. Il y avait quelque chose de repoussant dans cette par
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la vie dâun hĂŽtel chic se poursuivant derriĂšre des fenĂȘtres aux volets clos, danĂ©pitement des coups de feu. La salle Ă manger sur le devant avait Ă©tĂ© abandonnĂ©e aâune balle, entrant par la fenĂȘtre, eut Ă©raflĂ© un pilier, et les hĂŽtes sâentassaieĂ©sent dans une petite salle un peu sombre sur le derriĂšre, oĂč il nây avait jamais assebles pour tout le monde. Les garçons Ă©taient en plus petit nombre quâen termal â certains Ă©tant membres de la C.N.T. avaient rĂ©pondu au mot dâordre de la gnĂ©rale â et ils avaient momentanĂ©ment renoncĂ© Ă porter leurs chemises empeais les repas Ă©taient toujours servis avec une affectation de cĂ©rĂ©monie. Or, il nây
ur ainsi dire rien Ă manger. Ce jeudi soir, le plat de rĂ©sistance du dĂźner consista enule sardine pour chacun. LâhĂŽtel nâavait pu avoir de pain depuis plusieurs jours et lĂȘme commençait Ă manquer, au point quâon nous en faisait boire du plus en plus vdes prix de plus en plus Ă©levĂ©s. Ce manque de vivres dura encore plusieurs jours apr des troubles. Trois jours de suite, je mâen souviens, nous avons dĂ©jeunĂ© le matin
mme et moi, dâun petit morceau de fromage de chĂšvre, sans pain ni rien Ă boireule chose quâon avait en abondance, câĂ©taient des oranges. Les conducteurs de camançais en apportaient des leurs en quantitĂ© Ă lâhĂŽtel. Ils formaient un groupe dâas
de ; ils avaient avec eux quelques filles espagnoles trĂšs voyantes, et un Ă©nortefaix en blouse noire. En tout autre temps, le petit poseur de gĂ©rant dâhĂŽtel auraison mieux pour les mettre mal Ă lâaise, et mĂȘme leur aurait refusĂ© lâentrĂ©
tablissement, mais pour lâinstant ils jouissaient de la popularitĂ© gĂ©nĂ©rale parce quntraire de nous tous, ils avaient leurs provisions personnelles de pain et tout le merchait Ă les taper.
Je passai cette derniĂšre nuit sur le toit, et le lendemain la lutte eut vraimentarriver Ă son terme. Je ne crois pas quâil y ait eu beaucoup de coups de feu tirĂ©s ce j
le vendredi. Personne ne paraissait savoir de façon certaine si les troupes de Val
aient rĂ©ellement en train de venir ; elles arrivĂšrent prĂ©cisĂ©ment ce mĂȘme soiruvernement diffusait des messages mi-apaisants, mi-menaçants, demandant Ă chrentrer chez soi et disant que, passĂ© une certaine heure, quiconque serait tr
rteur dâune arme serait arrĂȘtĂ©. On ne prĂȘta guĂšre attention aux communicationuvernement, mais partout les gens disparurent des barricades. Je suis persuadĂ© qson en fut surtout le manque de vivres. De tous cĂŽtĂ©s lâon entendait faire
marque : « Nous nâavons plus rien Ă manger, il faut bien que nous retournionavail. » En revanche, les gardes civils, eux, purent rester Ă leur poste, Ă©tant assurĂ©
cevoir du ravitaillement tant quâil y aurait quelque chose Ă manger dans la aprĂšs-midi, les rues avaient presque repris leur aspect normal, abstraction faiterricades dĂ©sertĂ©es mais toujours debout ; la foule se pressait sur les Ramblasagasins Ă©taient presque tous ouverts, et â le plus rassurant de tout â les tramsaient demeurĂ©s si longtemps immobilisĂ©s, comme bloquĂ©s dans un embouteilbranlĂšrent brusquement et recommencĂšrent Ă fonctionner. Les gardes ccupaient toujours le cafĂ© Moka et nâavaient pas dĂ©moli leurs barricades, mais certentre eux portĂšrent des chaises dehors et sâassirent sur le trottoir, leur fusil en tras genoux. Jâadressai Ă lâun dâeux, en passant, un clin dâĆil, et reçus en rĂ©ponse un urire qui nâavait rien dâinamical ; il faut dire quâil mâavait reconnu. Au-dessu
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ntral tĂ©lĂ©phonique le drapeau anarchiste avait Ă©tĂ© amenĂ© et seul le drapeau catttait maintenant. Cela signifiait que dĂ©cidĂ©ment les ouvriers Ă©taient battusmpris â mais, du fait de mon ignorance en politique, pas si clairement que je lâeâ que lorsque le gouvernement se sentirait plus sĂ»r de lui, il y aurait des reprĂ©sa
ais, sur le moment, cet aspect de la situation me laissa indiffĂ©rent. Tout ce qussentais, câĂ©tait un profond soulagement de ne plus entendre ce maudit fracas dsillade, de pouvoir acheter quelque chose Ă manger et goĂ»ter un peu de repos eanquillitĂ© avant de retourner au front.
Ce dut ĂȘtre tard dans la soirĂ©e que les troupes de Valence firent leur entrĂ©e dale. CâĂ©taient les gardes dâassaut, formation analogue Ă celle des gardes civils etrabiniers (autrement dit, essentiellement destinĂ©e aux opĂ©rations de police) et trĂ©lite de la RĂ©publique. Tout Ă coup ils furent lĂ , comme sortis de terre ; on en vit patrouiller dans les rues par groupes de dix, des hommes grands, en uniforme gri
eu, avec de longs fusils en bandouliĂšre, et un fusil mitrailleur par groupe. En attenus avions une difficile opĂ©ration Ă mener Ă bien. Les six fusils dont nous nous Ă©trvis pour monter la garde dans les tours de lâobservatoire y Ă©taient demeurĂ©s et, c
e coĂ»te, il nous fallait les rapporter dans le local du P.O.U.M. La question Ă©tait dere traverser la rue. Ils faisaient partie du stock dâarmes rĂ©glementaire du local, mamener dans la rue, câĂ©tait contrevenir Ă lâordre du gouvernement, et si lâon nous attr
ec ces fusils dans les mains, nous serions sĂ»rement arrĂȘtĂ©s et, qui pis est, les fraient confisquĂ©s. Nâayant que vingt et un fusils pour le local, nous ne pouvions frir le luxe dâen perdre six. AprĂšs avoir longtemps dĂ©battu la meilleure façonocĂ©der, nous commençùmes, un tout jeune Espagnol Ă cheveux roux et moi-mĂȘme,sser clandestinement. Il Ă©tait assez facile dâĂ©viter les patrouilles des gardes dâassaunger, câĂ©tait les gardes civils du cafĂ© Moka, qui tous savaient fort bien que nous av
s fusils dans lâobservatoire et pourraient donner lâĂ©veil sâils nous voyaientansporter. Nous nous dĂ©shabillĂąmes tous deux en partie et nous nous passĂąmpaule gauche, en bandouliĂšre, un fusil, de maniĂšre Ă en avoir la crosse sous lâaissecanon enfilĂ© dans la jambe du pantalon. Ce qui Ă©tait fĂącheux câest que câĂ©taient de lausers. MĂȘme un homme aussi grand que moi ne peut porter un long Mauser dambe de son pantalon sans en ĂȘtre gĂȘnĂ©. Nous en eĂ»mes du mal pour, la jambe gamplĂštement raide, descendre lâescalier en colimaçon de lâobservatoire ! Une fois dae, nous nous aperçûmes quâil nây avait moyen dâavancer quâavec une extrĂȘme len
e lenteur qui permĂźt de ne pas flĂ©chir les genoux. Ă lâextĂ©rieur du cinĂ©ma, je vioupe de gens qui mâobservaient avec un grand intĂ©rĂȘt tandis que je me traĂźnais Ă partue. Je me suis souvent demandĂ© ce quâils purent bien sâimaginer que jâavais.tais blessĂ© de guerre, peut-ĂȘtre. En tout cas, nous parvĂźnmes Ă passer clandestinemus les fusils sans incident.
Le lendemain lâon vit des gardes dâassaut partout, arpenter les rues en conquĂ©rnâĂ©tait pas douteux que le gouvernement se livrait lĂ purement et simplement ploiement de forces destinĂ© Ă intimider la population qui, il le savait dâavancesisterait pas ; sâil avait eu la moindre crainte rĂ©elle de nouvelles Ă©meutes, insignĂ© les gardes dâassaut dans les casernes au lieu de les faire sâĂ©parpiller par p
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oupes dans les rues. CâĂ©taient des troupes splendides, de beaucoup les meilleures eĂ»t Ă©tĂ© donnĂ© de voir jusque-lĂ en Espagne, et jâavais beau me dire quâelles Ă©tans un sens, « lâennemi », je ne pouvais mâempĂȘcher de prendre plaisir Ă les regaais câĂ©tait avec une sorte dâĂ©bahissement que je les dĂ©taillais tandis quâils dĂ©ambulaĂ©tais habituĂ© aux milices en loques et Ă peine armĂ©es du front dâAragon, et jâasquâalors ignorĂ© que la RĂ©publique possĂ©dĂąt de telles troupes. CâĂ©taient, physiquems hommes triĂ©s sur le volet, mais ce nâĂ©tait pas tant cela, que leur armementĂ©tonnait. Ils avaient tous des fusils tout neufs du type connu sous le nom de «
sse » (ces fusils Ă©taient envoyĂ©s en Espagne par lâU.R.S.S., mais fabriquĂ©s, je croimĂ©rique). Jâen ai examinĂ© un. Il Ă©tait loin dâĂȘtre parfait, mais combien meilleur qufreux vieux tromblons que nous avions au front ! En outre, les gardes dâassaut avacun un pistolet automatique, et un fusil mitrailleur pour dix hommes. Nous, au fus avions une mitrailleuse pour environ cinquante hommes, et quant aux pistolex revolvers, nous ne pouvions nous en procurer quâillĂ©galement. Ă la vĂ©ritĂ©, bien qlâeusse pas remarquĂ© jusquâalors, il en Ă©tait ainsi partout. Les gardes civils e
rabiniers, qui nâĂ©taient nullement destinĂ©s au front, Ă©taient beaucoup mieux arm
comparablement mieux vĂȘtus que nous. Jâai idĂ©e quâil en va de mĂȘme dans touteerres, que toujours existe le mĂȘme contraste entre la police bien astiquĂ©e de lâarriĂš soldats loqueteux du front. Dans lâensemble, les gardes dâassaut sâentendirent
en avec la population au bout dâun jour ou deux. Le premier jour il y eut quelctions parce que certains gardes dâassaut â agissant par ordre, jâimaginmmencĂšrent Ă se livrer Ă des provocations. Ils montaient en bande dans les truillaient les voyageurs et, sâils trouvaient dans leurs poches des cartes de membre N.T., ils les dĂ©chiraient et les piĂ©tinaient. Il en rĂ©sulta quelques bagarres avecarchistes armĂ©s ; et il y eut un ou deux morts. TrĂšs vite, cependant, les gardes dâas
andonnĂšrent leurs airs de conquĂ©rants et les rapports avec eux devinrent plus amicest Ă remarquer quâau bout dâun jour ou deux la plupart dâentre eux avaient levĂ©
une fille.Les combats de Barcelone avaient fourni au gouvernement de Valence le prét
puis longtemps souhaitĂ©, dâassujettir davantage Ă son autoritĂ© la Catalogne. Les mivriĂšres allaient ĂȘtre dissoutes et seraient Ă nouveau rĂ©parties dans lâarmĂ©e populdrapeau de la RĂ©publique espagnole flottait partout sur Barcelone â câĂ©tait la prems, je crois, que je le voyais ailleurs quâau-dessus dâune tranchĂ©e fasciste. Dan
artiers ouvriers on Ă©tait en train de dĂ©molir les barricades, dâune façon aagmentaire du reste, car on a autrement plus vite fait de construire une barricade qumettre en place les pavĂ©s. Le P.S.U.C. eut la permission de laisser debout les barriclâextĂ©rieur de ses locaux, et en fait elles y demeurĂšrent dressĂ©es jusquâen juin.rdes civils occupaient toujours les points stratĂ©giques. On procĂ©da Ă de grandes saarmes dans les locaux fortifiĂ©s de la C.N.T., mais je suis persuadĂ© que beaucoup dâahappĂšrent Ă la saisie. La Batalla continuait Ă paraĂźtre, mais Ă©tait censurĂ©e au point
premiÚre page était presque entiÚrement blanche. Les journaux du P.S.U.Cbissaient pas la censure et publiaient des articles incendiaires réclamant la suppresP.O.U.M. Le P.O.U.M. était dénoncé comme une organisation fasciste déguisée e
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ents du P.S.U.C. rĂ©pandaient partout dans la ville un dessin caricatural qui reprĂ©seP.O.U.M. sous les traits de quelquâun qui, en ĂŽtant un masque dĂ©corĂ© du marteau faucille, dĂ©couvrait un visage hideux de fou furieux marquĂ© de la croix gammĂ©e. Il ident que le choix de la version officielle des troubles de Barcelone Ă©tait dĂ©jĂ arrĂȘtĂ©vaient ĂȘtre prĂ©sentĂ©s comme un soulĂšvement de la « cinquiĂšme colonne » fasmentĂ© uniquement par le P.O.U.M.
Ă lâintĂ©rieur de lâhĂŽtel, lâhorrible atmosphĂšre de suspicion et de haine Ă©tait devcore pire, Ă prĂ©sent que les combats avaient pris fin. En face des accusations lancĂ©
tĂ© et dâautre, il Ă©tait impossible de rester neutre. Le service des Postes fonctionnuveau, les journaux communistes de lâĂ©tranger recommençaient Ă arriver et faiseuve, dans leurs comptes rendus des troubles de Barcelone, non seulement dâun vioprit de parti, mais naturellement aussi dâune inexactitude inouĂŻe dans la prĂ©sentas faits. Je pense que certains communistes qui se trouvaient sur les lieux, ayant vi sâĂ©tait rĂ©ellement passĂ©, furent consternĂ©s en voyant ainsi travestir les Ă©vĂ©nem
ais naturellement il leur fallait se solidariser avec leur propre parti. Notre mmuniste entra une fois encore en communication avec moi pour me demander
voulais pas ĂȘtre mutĂ© dans la Brigade internationale.Je mâen montrai assez surpris :« Comment ! Mais vos journaux prĂ©tendent que je suis un fasciste, lui rĂ©pond
serais sĂ»rement suspect du point de vue politique, venant du P.O.U.M. !â Oh ! câest sans importance ! AprĂšs tout vous nâavez fait quâexĂ©cuter des ordresJe dus lui dire quâaprĂšs ce qui venait de se passer, il ne mâĂ©tait plus possibl
oindre aucune unitĂ© dirigĂ©e par les communistes. Que, tĂŽt ou tard, ce serait risâon se servĂźt de moi contre la classe ouvriĂšre espagnole. On ne pouvait savoir quaterait Ă nouveau le conflit, et si je devais, en des circonstances de ce genre, me s
mon fusil, je voulais que ce fĂ»t aux cĂŽtĂ©s de la classe ouvriĂšre et non contre elle. Ila rĂ©ponse de façon parfaite. Mais dĂ©sormais ce nâĂ©tait plus du tout la mmosphĂšre. Il ne vous Ă©tait plus possible, comme auparavant, de « diffĂ©rer Ă lâamiabde nâen pas moins aller ensuite boire un coup avec quelquâun qui Ă©tait censĂ©ment vversaire du point de vue politique. Il y eut quelques vilaines altercations dans le slâhĂŽtel. Cependant que les geĂŽles Ă©taient pleines et archi-pleines. Les combats une
rminĂ©s, les anarchistes avaient, naturellement, relĂąchĂ© leurs prisonniers, mairdes civils, eux, nâavaient pas relĂąchĂ© les leurs, et la plupart de ceux-ci furent jetĂ©
ison et y demeurĂšrent sans jugement, des mois durant dans plusieurs cas. Coujours, la police ayant lâhabitude de faire un gĂąchis, des gens absolument Ă©trangersĂ©nements furent arrĂȘtĂ©s. Jâai dĂ©jĂ parlĂ© de Douglas Thompson qui avait Ă©tĂ© blessbut dâavril ; nous lâavions ensuite perdu de vue, comme cela arrivait gĂ©nĂ©ralemrsquâun homme Ă©tait Ă©vacuĂ©, les blessĂ©s Ă©tant soumis Ă de frĂ©quents changemhĂŽpitaux. En fait il avait Ă©tĂ© Ă©vacuĂ© sur lâhĂŽpital de Tarragone, puis renvoyĂ© Ă Barcepeu prĂšs au moment oĂč commencĂšrent les troubles. Le mardi matin je le rencons la rue, tout effarĂ© dâentendre Ă©clater de tous cĂŽtĂ©s des fusillades. Il me poestion que tout le monde posait :
« Mais que diable se passe-t-il ? »
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Je lui expliquai tant bien que mal. Thompson dit aussitĂŽt :« Je ne vais pas me mĂȘler de tout cela. Mon bras nâest pas encore guĂ©ri. Je
tourner à mon hÎtel et y rester. »Il rentra à son hÎtel, mais malheureusement (combien il importe, dans la guer
es, de bien connaĂźtre la gĂ©ographie politique locale !) cet hĂŽtel Ă©tait situĂ© dans la pla ville sous la domination des gardes civils. Il y eut une descente dans lâhĂŽt
ompson fut arrĂȘtĂ©, jetĂ© en prison et gardĂ© huit jours dans une cellule si bondĂ©e de e personne nâavait la place de sây coucher. Il y eut beaucoup de cas semblables
mbreux Ă©trangers aux antĂ©cĂ©dents politiques douteux passaient leur temps Ă fulice sur leur trace, et ils vivaient dans la crainte constante dâune dĂ©nonciation. C
re encore pour les Italiens et les Allemands, qui nâavaient pas de passeports et Ă©tanĂ©ralement recherchĂ©s par les agents secrets du gouvernement de leur propre pls Ă©taient arrĂȘtĂ©s, ils Ă©taient exposĂ©s Ă ĂȘtre expulsĂ©s, refoulĂ©s en France, ce qui risq
entraĂźner leur renvoi en Italie ou en Allemagne, oĂč Dieu sait quelles horreurendaient. Une ou deux femmes Ă©trangĂšres rĂ©gularisĂšrent Ă la hĂąte leur situatioĂ©pousant » des Espagnols. Une jeune Allemande qui nâavait pas de papiers du
pista la police en se faisant passer durant plusieurs jours pour la maĂźtresse mme. Je revois lâexpression de honte et de dĂ©tresse que prit le visage de cette pafant quand le hasard me fit me heurter Ă elle juste au moment oĂč elle sortait dambre Ă coucher de cet homme ; bien entendu, elle nâĂ©tait pas sa maĂźtresse, maisnsait que certainement je croyais quâelle lâĂ©tait. Et lâon avait tout le temps le sentimominable quâon allait peut-ĂȘtre ĂȘtre dĂ©noncĂ© Ă la police secrĂšte par quelqusquâalors votre ami. Le long cauchemar des troubles, le fracas, la privation de nourrde sommeil, le mĂ©lange de tension et dâennui Ă rester assis sur le toit en me demandâune minute Ă lâautre je nâallais pas ĂȘtre tuĂ© ou obligĂ© de tuer, mâavaient mis les n
vif. Jâen Ă©tais arrivĂ© au point de saisir mon revolver dĂšs que jâentendais une porte bsamedi matin une fusillade Ă©clata brusquement au-dehors et tout le monde se m
er : « VoilĂ que ça recommence ! » Je me prĂ©cipitai dans la rue : ce nâĂ©taient querdes dâassaut en train de tuer un chien enragĂ©. Aucun de ceux qui se sont trouvrcelone Ă ce moment-lĂ ou durant les quelques mois suivants ne pourra oublier
mosphĂšre abominable engendrĂ©e par la peur, le soupçon, la haine, la vue des journsurĂ©s, les prisons bondĂ©es, les queues qui nâen finissaient pas aux portes des magalimentation et les bandes dâhommes armĂ©s rĂŽdant par la ville.
Jâai essayĂ© de donner quelque idĂ©e de ce que lâon Ă©prouvait Ă se trouver mĂȘlĂ©oubles de Barcelone, mais je doute dâavoir rĂ©ussi Ă faire comprendre toute lâĂ©trangette pĂ©riode. Lâune des choses que je trouve gravĂ©es dans ma mĂ©moire quand jeporte Ă ce temps-lĂ , ce sont les rencontres fortuites que lâon faisait alors, les bruserçus que lâon avait de non-combattants pour qui toute lâaffaire nâĂ©tait que vacanuĂ© de signification. Je me souviens dâune femme Ă©lĂ©gante que je vis flĂąner sumblas, un sac Ă provisions au bras et tenant en laisse un caniche blanc, tandis qu
sillade faisait rage une ou deux rues plus loin. On peut se demander si elle Ă©tait soucet homme Ă qui je vis prendre ses jambes Ă son cou pour traverser la plac
talogne complÚtement déserte, en brandissant un mouchoir blanc dans chaque m
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ce groupe important de gens, tous vĂȘtus de noir, qui essayĂšrent pendant prĂšs dure de traverser la place de Catalogne sans jamais y parvenir. Chaque fois qontraient le bout du nez au coin de la rue transversale, les mitrailleurs du P.S.U.C., ĂŽtel ColĂłn, ouvraient le feu sur eux et les faisaient reculer ; je me demande pourreste, car il Ă©tait visible que ces gens nâĂ©taient pas armĂ©s. Jâai pensĂ© depuis qu
vait ĂȘtre un cortĂšge funĂšbre. Et ce petit homme qui servait de gardien au musĂ©essus du Poliorama et qui paraissait considĂ©rer toute lâaffaire comme une excelcasion dâavoir de la compagnie. Il Ă©tait si content que des Anglais vinssent le voir
nglais Ă©taient si simpĂĄticos, disait-il. Il exprimait lâespoir que nous reviendrionndre visite aprĂšs les troubles ; en fait jây suis allĂ©. Et cet autre petit homme qui sâabns lâencadrement dâune porte et qui hochait la tĂȘte dâun air ravi en entendant le b
enfer de la fusillade sur la place de Catalogne et qui disait (sur le mĂȘme ton quâil eĂ»âil faisait beau) : « Nous revoilĂ au 19 juillet ! » Et les vendeurs dans le magasittier qui Ă©tait en train de me faire des chaussures de marche. Jây suis allĂ© avan
oubles, aprĂšs que tout fut fini, et quelques minutes durant le bref armistice du 5 Ă©tait un magasin cher, dont les vendeurs appartenaient Ă lâU.G.T., et peut-ĂȘtr
S.U.C. (en tout cas politiquement de lâautre bord), et savaient que je servais daO.U.M. Pourtant leur attitude fut celle de lâindiffĂ©rence absolue. « Ah ! câest alheureux tout cela, nâest-ce pas ? Et ça ne vaut rien pour les affaires ! Quel male ça ne cesse pas ! Comme sâil nây avait pas au front assez de sang versĂ© ! » et ainite. Sans doute quâil y eut des quantitĂ©s de gens, peut-ĂȘtre la majeure partiebitants de Barcelone, pour qui toute lâaffaire ne prĂ©senta pas la moindre lueur dâintpas plus dâintĂ©rĂȘt que nâen aurait suscitĂ© en eux un bombardement aĂ©rien.
Dans ce chapitre, jâai relatĂ© uniquement ce que jâai vu et senti par moi-mĂȘme. Jopose, dans un chapitre en appendice, placĂ© Ă la fin de ce livre, dâexaminer les ch
us un angle plus large â dâessayer de mon mieux de dĂ©terminer ce qui sâest rĂ©ellemssĂ© et quelles en ont Ă©tĂ© les consĂ©quences, la part du juste et de lâinjuste en tout celi fut le responsable, sâil y en eut un. On a tirĂ© un tel parti, politiquement, des trouBarcelone, quâil importe de se faire une opinion saine Ă ce sujet. On a dĂ©jĂ Ă©cr
ssus tant et plus, de quoi remplir plusieurs livres, et je ne crois pas exagérer en de ces écrits sont pour la plupart mensongers. Presque tous les comptes rendu
urnaux publiĂ©s Ă lâĂ©poque ont Ă©tĂ© forgĂ©s de loin par des journalistes, et ils Ă©taientulement inexacts quant aux faits, mais Ă dessein fallacieux. Comme dâhabitude
avait laissĂ© parvenir jusquâau grand public quâun seul son de cloche. Comme tous i se sont trouvĂ©s Ă Barcelone Ă cette Ă©poque, je ne vis que ce qui se passa dans in, mais jâen ai vu et entendu suffisamment pour ĂȘtre en mesure de rĂ©futer unmbre des mensonges qui ont Ă©tĂ© mis en circulation.
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X
Ce dut ĂȘtre trois jours aprĂšs la fin des troubles de Barcelone que nous remontĂąfront. AprĂšs les combats â et plus spĂ©cialement aprĂšs la pluie dâinjures dan
urnaux â il Ă©tait difficile, en pensant Ă la guerre, dâavoir encore tout Ă fait le mĂȘmeesprit naĂŻvement idĂ©aliste quâauparavant. Je pense quâil est impossible que personn
passer plus de quelques semaines en Espagne sans ĂȘtre dĂ©sillusionnĂ©. Le souvenivint de ce correspondant de journal rencontrĂ© le jour mĂȘme de mon arrivĂ©e Ă Barcequi mâavait dit : « Cette guerre est une supercherie, comme toute autre guerre ! » Cflexion mâavait profondĂ©ment choquĂ©, et Ă cette Ă©poque-lĂ (en dĂ©cembre) je ne croiâelle Ă©tait juste ; mĂȘme alors, en mai, elle ne lâĂ©tait pas, mais elle commençaitvenir. La vĂ©ritĂ©, câest que toute guerre subit de mois en mois une sorte de dĂ©gradaogressive, parce que tout simplement des choses telles que la libertĂ© individuelle etesse vĂ©ridique ne sont pas compatibles avec le rendement, lâefficacitĂ© militaires.
On pouvait dĂ©jĂ faire quelques conjectures sur lâavenir. Il Ă©tait facile de prĂ©voir
gouvernement Caballero tomberait et serait remplacĂ© par un gouvernement ploite dans lequel lâinfluence communiste serait plus forte (câest ce qui arriva unux semaines plus tard), gouvernement qui sâappliquerait Ă briser une fois pour toutissance des syndicats. Et pour ce qui est de la situation ultĂ©rieure â une fois Frttu â mĂȘme en laissant de cĂŽtĂ© les vastes problĂšmes posĂ©s par la rĂ©organisatiospagne, la perspective nâĂ©tait pas attrayante. Quant aux boniments des journaux re croire que tout ceci Ă©tait une « guerre pour la dĂ©mocratie », simple bourrag
Ăąne. Personne de sensĂ© ne sâimaginait quâil y aurait aucun espoir de dĂ©mocratie, m
sens oĂč nous lâentendons en Angleterre et en France, dans un pays aussi diviuisĂ© que le serait lâEspagne une fois la guerre terminĂ©e. Il y aurait fatalementctature, et il Ă©tait clair que lâoccasion favorable dâune dictature de la classe ouvriĂšressĂ©e. Autrement dit, les choses, dans lâensemble, Ă©volueraient dans le sens dâune elconque de fascisme, auquel, sans doute, on donnerait un nom plus poli et qui serce quâon Ă©tait en Espagne, plus humain et moins effectif que les variĂ©tĂ©s italienemande. Les seules alternatives Ă©taient une dictature infiniment pire avec Francoe, ou (chose toujours possible) que lâEspagne, une fois la guerre terminĂ©e, se tro
orcelée, soit selon des frontiÚres naturelles, soit en zones économiques.
Quelque issue quâon envisageĂąt, câĂ©tait une perspective attristante. Mais nsuivait pas que cela ne valĂ»t pas la peine de combattre pour le gouvernementre le fascisme sans fard et plus accentuĂ© de Franco et de Hitler. Quels que pusre les dĂ©fauts du gouvernement de lâaprĂšs-guerre, il y avait une chose certaine : e le rĂ©gime de Franco serait pire. Pour les ouvriers â le prolĂ©tariat urbain â peuta ne ferait-il, en fin de compte, que trĂšs peu de diffĂ©rence que lâun ou lâautre gag
ais lâEspagne est avant tout un pays agricole et les paysans seraient sĂ»rement avantr la victoire du gouvernement. Quelques-unes au moins des terres sa
meureraient en leur possession et, dans ce cas, il y aurait aussi une rĂ©partition de tns le territoire prĂ©cĂ©demment occupĂ© par Franco, et lâon ne rĂ©tablirait probablem
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s le servage de fait qui existait dans certaines parties de lâEspagne. Le gouvernemaĂźtre du pays Ă la fin de la guerre serait, en tout cas, anticlĂ©rical et antifĂ©odal. Il fhec Ă lâĂglise, au moins pour un temps, et moderniserait le pays â construiraitutes, par exemple, et encouragerait lâinstruction et la salubritĂ© publique ; pas maoses dans ce sens avaient dĂ©jĂ Ă©tĂ© faites mĂȘme en pleine guerre. Franco, au contrur autant quâil ne fĂ»t pas simplement le fantoche de lâItalie et de lâAllemagne, Ă©tax grands propriĂ©taires terriens fĂ©odaux et soutenait la rĂ©action clĂ©ricale et militaeine de prĂ©jugĂ©s Ă©touffants. Le Front populaire Ă©tait peut-ĂȘtre bien une superch
ais Franco était sûrement, lui, un anachronisme. Seuls les millionnaires et les manesques pouvaient souhaiter son triomphe.
En outre, il y avait la question du prestige international du fascisme qui, depuou deux, nâavait cessĂ© de me hanter Ă la façon dâun cauchemar. Depuis 1930
scistes avaient partout eu le dessus ; il Ă©tait temps quâils reçussent une raclĂ©e, etportait, presque, qui la leur donnerait. Si nous parvenions Ă repousser Ă la mer Frses mercenaires Ă©trangers, il en pourrait rĂ©sulter une immense amĂ©lioration dauation mondiale, mĂȘme si lâEspagne, elle, devait sortir de lĂ Ă©touffĂ©e sous une dict
avec tous les meilleurs de ses hommes en prison. Rien que pour cela dĂ©jĂ , il valaine de gagner la guerre.CâĂ©tait ainsi que je voyais les choses Ă cette Ă©poque. Je dois dire quâaujourdâh
ns le gouvernement NegrĂn en beaucoup plus haute estime que je ne le faisaioment oĂč il prit le pouvoir. Il a soutenu une lutte difficile avec un courage splendimontrĂ© plus de tolĂ©rance politique que personne nâen attendait. Mais je continoire que â Ă moins que lâEspagne ne se scinde, ce qui aurait dâimprĂ©visnsĂ©quences â le gouvernement de lâaprĂšs-guerre aura forcĂ©ment tendance Ă sciste. Encore une fois, je donne cette opinion pour ce quâelle vaut, et court le ri
e le temps me traite comme il a traité la plupart des prophÚtes.Juste à notre arrivée au front nous apprßmes que Bob Smillie, qui rentrai
ngleterre, avait Ă©tĂ© arrĂȘtĂ© Ă la frontiĂšre, emmenĂ© Ă Valence et jetĂ© en prison. Smillie Espagne depuis le mois dâoctobre. Il avait travaillĂ© durant plusieurs mois dan
reaux du P.O.U.M., puis sâĂ©tait engagĂ© dans les milices Ă lâarrivĂ©e des autres memlâI.L.P., Ă©tant bien entendu quâil ferait trois mois de front avant de rentre
ngleterre pour participer Ă une tournĂ©e de propagande. Ce nâest quâau bout dâun cemps que nous pĂ»mes dĂ©couvrir le motif de son arrestation. On le gardait incomuni
u secret), si bien que personne, pas mĂȘme un avocat, ne pouvait le voir. En Espagexiste pas â en tout cas, pas dans la pratique â dâhabeas corpus, et vous pouvezrdĂ© en prison durant des mois dâaffilĂ©e sans mĂȘme ĂȘtre inculpĂ©, a fortiori sans pjugement. Finalement nous apprĂźmes, grĂące Ă un prisonnier relĂąchĂ©, que Smillie
Ă© arrĂȘtĂ© pour « port dâarmes ». Les « armes » en question Ă©taient, je me trouvavoir, deux grenades Ă main dâun type grossier utilisĂ© au dĂ©but de la guerre, que Sm
mportait en Angleterre, ainsi que quelques Ă©clats dâobus et dâautres souvenirs, pouontrer au cours de ses confĂ©rences. Les charges et les amorces en avaient Ă©tĂ© retis grenades nâĂ©taient plus que de simples cylindres dâacier parfaitement inoffensiait Ă©vident que ce nâĂ©tait lĂ quâun prĂ©texte et quâon avait arrĂȘtĂ© Smillie Ă cause d
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pports bien connus avec le P.O.U.M. Les troubles de Barcelone venaient justendre fin et les autoritĂ©s Ă©taient, Ă ce moment-lĂ , extrĂȘmement soucieuses de ne lartir dâEspagne personne qui fĂ»t en mesure de dĂ©mentir la version officielle. Aquait-on dâĂȘtre arrĂȘtĂ© Ă la frontiĂšre sous des prĂ©textes plus ou moins futiles. Il estssible quâon nâait dâabord eu lâintention que de retenir Bob Smillie quelques julement. Lâennui, en Espagne, câest quâune fois que vous ĂȘtes en prison, en gĂ©nus y restez, quâil soit ou non question de passer en jugement.
Nous étions toujours à Huesca, mais on nous avait postés plus à droite, en face
doute fasciste dont, quelques semaines auparavant, nous nous étions pour un mommparés. Je faisais maintenant fonction de teniente (ce qui correspond, je crois, au g
sous-lieutenant dans lâarmĂ©e britannique) ; jâavais sous mon commandemententaine dâhommes, Anglais et Espagnols. On mâavait proposĂ© pour la nominatioade dâofficier de lâactive, mais lâobtenir câĂ©tait une autre histoire. Peu de teparavant encore, les officiers des milices refusaient de recevoir un grade officiela signifiait un supplĂ©ment de solde et Ă©tait en contradiction avec les prin
alitaires des milices ; mais ils Ă©taient Ă prĂ©sent obligĂ©s dâaccepter. La nominatio
njamin au grade de capitaine avait dĂ©jĂ paru Ă lâOfficiel, et Kopp Ă©tait en passe dmmĂ© chef de bataillon. Le gouvernement ne pouvait Ă©videmment pas se passerficiers des milices, mais Ă aucun il ne confĂ©rait de grade supĂ©rieur Ă celui de chetaillon, probablement afin de rĂ©server les grades plus Ă©levĂ©s aux officiers de lâarguliĂšre et aux nouveaux officiers sortant de lâĂcole de guerre. Par suite, il y avait tre division, la 29e, et sĂ»rement dans beaucoup dâautres, un curieux Ă©tat de chovisoire : le commandant de la division, les commandants des brigades etmmandants des bataillons avaient tous le mĂȘme grade, celui de chef de bataillon.
Il ne se passait pas grand-chose au front. La bataille engagée aux alentours
ute de Jaca sâĂ©tait apaisĂ©e et ne reprit que vers la mi-juin. Dans notre positioincipal ennui, câĂ©taient les canardeurs. Les tranchĂ©es fascistes Ă©taient Ă plus de nquante mĂštres, mais elles Ă©taient situĂ©es plus haut que les nĂŽtres et mmandaient sur deux cĂŽtĂ©s, notre front formant un saillant en angle droit. Le coiillant Ă©tait un endroit dangereux dont il avait toujours fallu payer le passage parorts et des blessĂ©s. De temps Ă autre les fascistes nous tiraient dessus avec des grenfusil ou dâautres engins analogues. Elles faisaient un fracas Ă©pouvantable et Ă©topres Ă vous faire perdre votre sang-froid parce quâon ne les entendait pas arriv
mps pour pouvoir esquiver, mais elles ne reprĂ©sentaient pas un grand danger : le âelles creusaient dans le sol avait un diamĂštre pas plus grand que celui dâun tubaleur des nuits Ă©tait agrĂ©able, mais durant le jour elle se faisait ardente, les moustivenaient un flĂ©au et, en dĂ©pit des vĂȘtements propres rapportĂ©s de Barcelone, mes presque aussitĂŽt pleins de poux. Ă lâextĂ©rieur, dans les vergers abandonnĂ©s danâs land , les cerises blanchissaient sur les arbres. Il y eut deux jours de prrentielles, les cagnas furent inondĂ©es, le parapet se tassa dâun pied. Il fallut ensser encore bien des journĂ©es Ă creuser et rejeter hors de la tranchĂ©e lâargile gluec les misĂ©rables bĂȘches espagnoles qui nâont pas de manche et qui se tordent cos cuillĂšres dâĂ©tain.
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On nous avait promis un mortier de tranchĂ©e pour la compagnie ; je lâattendais patience. La nuit, comme toujours, nous allions en patrouille, mais câĂ©tait ngereux quâauparavant parce quâil y avait dans les tranchĂ©es fascistes beaucoup
hommes et parce quâils Ă©taient devenus plus vigilants ; ils avaient Ă©parpillĂ© des biut contre leur parapet, Ă lâextĂ©rieur, et dĂšs quâils entendaient un tintement mĂ©tall
arrosaient avec les mitrailleuses. Dans la journée nous les canardions du no mnd. En rampant une centaine de mÚtres, on pouvait gagner un fossé que de harbes dissimulaient et qui commandait une brÚche dans le parapet fasciste. Nous av
abli un support Ă fusil dans ce fossĂ©. Si lâon avait la patience dâattendre assez longtefinissait gĂ©nĂ©ralement par voir une silhouette kaki franchir rapidement la brĂšche
Ă© plusieurs fois. Jâignore si jâai jamais touchĂ© quelquâun â câest peu probable ; jeĂšs mauvais tireur, au fusil. Mais câĂ©tait assez amusant, les fascistes ne savaient pas naient les coups, et jâĂ©tais persuadĂ© que jâen aurais un tĂŽt ou tard. Mais « ce frpent qui creva{6 } », câest moi qui fus touchĂ© par un tireur fasciste. Cela faisaitzaine de jours que jâĂ©tais de retour au front lorsque cela arriva. Lâensemblepressions et sensations que lâon Ă©prouve, lorsquâon est atteint par une balle offr
ntĂ©rĂȘt et je crois que cela vaut la peine dâĂȘtre dĂ©crit en dĂ©tail.Ce fut Ă lâangle du parapet, Ă cinq heures du matin. CâĂ©tait toujours lĂ une hngereuse parce que nous avions le lever du jour dans le dos, et si notre tĂȘte venpasser du parapet, elle se profilait trĂšs nettement sur le ciel. JâĂ©tais en train de px sentinelles en vue de la relĂšve de la garde. Soudain, au beau milieu dâune phrasntis... câest trĂšs difficile Ă dĂ©crire ce que je sentis, bien que jâen conserve un souvĂšs vif et trĂšs net.
GĂ©nĂ©ralement parlant, jâeus lâimpression dâĂȘtre au centre dâune explosion. Imbla y avoir tout autour de moi un grand claquement et un Ă©clair aveuglant,
ssentis une secousse terrible â pas une douleur, seulement une violente commomme celle que lâon reçoit dâune borne Ă©lectrique, et en mĂȘme temps la sensation dblesse extrĂȘme, le sentiment de mâĂȘtre ratatinĂ© sous le coup, dâavoir Ă©tĂ© rĂ©duit Ă s sacs de terre en face de moi sâenfuirent Ă lâinfini. Jâimagine que lâon doit Ă©prouvu prĂšs la mĂȘme chose lorsquâon est foudroyĂ©. Je compris immĂ©diatement que jâuchĂ©, mais Ă cause du claquement et de lâĂ©clair je crus que câĂ©tait un fusil tout prĂšoi dont le coup, parti accidentellement, mâavait atteint. Tout cela se passa en beauoins dâune seconde. Lâinstant dâaprĂšs mes genoux flĂ©chirent et me voilĂ tomba
nnant violemment de la tĂȘte contre le sol, mais, Ă mon soulagement, sans que celmal. Je me sentais engourdi, hĂ©bĂ©tĂ©, jâavais conscience dâĂȘtre griĂšvement blessĂ©, ne ressentais aucune douleur, au sens courant du mot.
La sentinelle amĂ©ricaine Ă qui jâĂ©tais en train de parler sâĂ©tait prĂ©cipitĂ©e vers mSapristi ! Ătes-vous touchĂ© ? » Des hommes firent cercle autour de moi. On fit unhistoires comme dâhabitude : « Aidez-le Ă se relever ! OĂč est-il blessĂ© ? Ouvrez-lemise ! » etc. LâAmĂ©ricain demanda un couteau pour fendre ma chemise. Je savaisen avait un dans ma poche et mâefforçai de le sortir, mais je mâaperçus que mon oit Ă©tait paralysĂ©. Ne souffrant pas, jâen ressentis une vague satisfaction. VoilĂ qure plaisir Ă ma femme, pensai-je ; elle qui Ă©tait toujours Ă souhaiter que je fusse bl
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ur que cela mâĂ©vitĂąt dâĂȘtre tuĂ© quand viendrait lâheure du grand combat. Câest aulement que jâen vins Ă me demander oĂč jâavais Ă©tĂ© touchĂ© et Ă quel point câĂ©tait grne mâĂ©tait pas possible de rien sentir, mais jâavais conscience que la balle mâavait frr-devant. Lorsque je voulus parler, je mâaperçus que je nâavais pas de voix, que juvais faire entendre quâun faible couic ; cependant Ă la seconde tentative je parvmander oĂč jâĂ©tais blessĂ©. Ă la gorge, me rĂ©pondit-on. Harry Webb, notre brancarait apportĂ© une bande de pansement et une de ces petites bouteilles dâalcool quâon stribuait pour nos paquets individuels de pansement. Quand on me souleva, un flo
ng jaillit de ma bouche, et jâentendis un Espagnol derriĂšre moi dire que la balle mâaversĂ© le cou de part en part. RĂ©pandu sur ma blessure, lâalcool, qui en temps ordineĂ»t cuit comme le diable, me procura une sensation de fraĂźcheur agrĂ©able.
On mâĂ©tendit Ă nouveau tandis que quelquâun allait chercher une civiĂšre. DĂšs qs que la balle mâavait traversĂ© le cou de part en part, je considĂ©rai comme chose Ă©te jâĂ©tais un homme mort. Je nâavais jamais entendu dire dâun homme ou dâun anâayant attrapĂ© une balle en plein milieu du cou il y eĂ»t survĂ©cu. Le sang coulait gouutte de la commissure de mes lĂšvres. « Ăa y est ! câest lâartĂšre », pensai-je. Je
mandai combien de temps on pouvait encore durer avec lâartĂšre carotide tranchĂ©e minutes, vraisemblablement. Tout se brouillait. Il doit bien sâĂȘtre Ă©coulĂ© deux minviron durant lesquelles je fus persuadĂ© que jâĂ©tais tuĂ©. Et cela aussi est intĂ©ressantux dire quâil est intĂ©ressant de savoir quelles seraient vos pensĂ©es en un tel moma premiĂšre pensĂ©e, assez conventionnellement, fut pour ma femme. Ma seconde pet une violente colĂšre dâavoir Ă quitter ce monde qui, tout compte fait, me convieen. Jâeus le temps de sentir cela trĂšs vivement. La stupiditĂ© de cet accident me renrieux. Que câĂ©tait absurde ! Ătre supprimĂ©, et pas mĂȘme dans une bataille, mais danal coin de tranchĂ©e, Ă cause dâun instant dâinattention ! Jâai songĂ©, aussi, Ă lâho
i avait tirĂ© sur moi, me suis demandĂ© comment il Ă©tait, si câĂ©tait un Espagnol oranger, sâil savait quâil mâavait eu, et ainsi de suite... Il ne me fut pas possible dâĂ©proon Ă©gard le moindre ressentiment. Je me dis que puisquâil Ă©tait fasciste, je lâeuss
je lâavais pu, mais sâil avait Ă©tĂ© fait prisonnier et amenĂ© devant moi Ă cet instant mlâaurais tout simplement fĂ©licitĂ© dâĂȘtre bon tireur. Mais peut-ĂȘtre bien que si lâo
ellement en train de mourir, on a des pensĂ©es toutes diffĂ©rentes.On venait juste de mâĂ©tendre sur la civiĂšre quand mon bras droit paralysĂ© red
nsible et commença à me faire bigrement mal. Sur le moment, je me figurai qu
vais me lâĂȘtre cassĂ© en tombant ; dâautre part, la douleur me rassura, car je savais sensations ne deviennent pas plus aiguĂ«s quand on est mourant. Je commençais ntir plus normal et Ă ĂȘtre navrĂ© pour les quatre pauvres diables qui transpiraiessaient, la civiĂšre sur lâĂ©paule. Il y avait un mille et demi jusquâĂ lâambulance, earche trĂšs pĂ©nible par des sentiers pleins de bosses et glissants. Je savais quelle suĂ©enait, pour avoir moi-mĂȘme aidĂ© Ă transporter un blessĂ© un ou deux jours auparavs feuilles des peupliers argentĂ©s qui, par endroits, bordaient nos tranchĂ©es, me frĂŽlvisage au passage ; je songeais quâil faisait bon vivre dans un monde oĂč poussaienupliers argentĂ©s. Mais la douleur dans mon bras ne cessait pas dâĂȘtre diaboliquerçant tour Ă tour Ă jurer, puis Ă me retenir autant que possible de jurer, parce
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aque fois que je respirais trop fort, une mousse de sang me sortait de la bouche.Le docteur rebanda ma blessure, me fit une piqĂ»re de morphine et mâĂ©vacua
etamo. Les hĂŽpitaux de Sietamo nâĂ©taient que des baraquements en bois hĂątivemnstruits, oĂč dâordinaire les blessĂ©s nâĂ©taient gardĂ©s que quelques heures en attenĂȘtre dirigĂ©s sur Barbastro ou LĂ©rida. JâĂ©tais hĂ©bĂ©tĂ© par la morphine, mais je soufcore beaucoup, quasiment incapable de bouger et avalant constamment du sang
ait caractĂ©ristique des mĂ©thodes dâun hĂŽpital espagnol : alors que jâĂ©tais dans cet infirmiĂšres inexpĂ©rimentĂ©es essayĂšrent de faire descendre de force dans ma gor
pas rĂ©glementaire de lâhĂŽpital â un repas comme pour quatre, composĂ© de soĆufs, de ragoĂ»t trĂšs gras, etc., et elles parurent toutes surprises que je ne mây prĂȘts. Je demandai une cigarette, mais on Ă©tait justement dans une pĂ©riode oĂč le tanquait et il nây avait pas une seule cigarette dans lâendroit. Ne tardĂšrent pparaĂźtre Ă mon chevet deux camarades qui avaient obtenu la permission de quitt
ont quelques heures.« Salut ! Tu es encore de ce monde, hein ? à la bonne heure ! Nous voulon
ontre et ton revolver, et ta lampe électrique. Et ton couteau, si tu en as un. »
Et ils sâĂ©clipsĂšrent en emportant tout ce que je possĂ©dais de transportable. Cabitude chaque fois quâun homme Ă©tait blessĂ© : tout ce quâil avait Ă©tait aussitĂŽt rĂ©pjuste raison, car, au front, des choses telles que montres, revolvers, etc., Ă©taĂ©cieuses, et si elles sâen allaient avec le fourbi dâun blessĂ©, on pouvait ĂȘtre sĂ»r quraient volĂ©es quelque part en cours de route.
Vers le soir, il Ă©tait arrivĂ©, un Ă un, suffisamment de blessĂ©s et de malades mplir quelques voitures dâambulance et lâon nous expĂ©dia Ă Barbastro. Quel voyageait accoutumĂ© de dire que dans cette guerre lâon pouvait sâen tirer si lâon Ă©tait bx extrĂ©mitĂ©s, mais que lâon mourait toujours dâune blessure au ventre. Je compren
Ă©sent pourquoi. Personne en danger dâhĂ©morragie interne ne pouvait survivre Ă omĂštres de cahotage sur ces routes empierrĂ©es en cailloutis, qui avaient Ă©tĂ© dĂ©fonr le passage des lourds camions et nâavaient jamais Ă©tĂ© rĂ©parĂ©es depuis le dĂ©but erre. Et pan ! et vlan ! et patatras ! les heurts se succĂ©daient comme une volĂ©ups ! Cela me ramenait au temps de ma petite enfance et Ă cet affreux supplice nomMontagnes russes » Ă lâExposition de White City. On avait oubliĂ© de nous attaches civiĂšres. Jâavais assez de force dans mon bras gauche pour me cramponner, maiuvre malheureux fut culbutĂ© au sol et dut souffrir mort et passion. Un autre
uvait marcher et qui Ă©tait assis dans un coin de la voiture dâambulance, la souilla tvomissant. LâhĂŽpital, Ă Barbastro, Ă©tait archi-comble, les lits si rapprochĂ©s quâiuchaient presque. Le lendemain matin, on embarqua un certain nombre dâentre ns un train sanitaire Ă destination de LĂ©rida.
Je suis restĂ© Ă LĂ©rida cinq ou six jours. CâĂ©tait un grand hĂŽpital oĂč se trouvaĂȘlĂ©s au petit bonheur malades du front, blessĂ©s et malades civils ordinaires. Danle, quelques hommes avaient dâhorribles blessures. Dans le lit voisin du mie
ouvait un jeune homme aux cheveux trĂšs noirs, qui souffrait de je ne sais qaladie et Ă qui on faisait prendre un mĂ©dicament qui rendait son urine aussi vertemeraude. Son urinal constituait lâune des curiositĂ©s de la salle. Un commu
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llandais parlant anglais, ayant entendu dire quâil y avait un Anglais dans lâhĂŽpital,e voir, se montra trĂšs amical et mâapporta des journaux anglais. Il avaitfreusement blessĂ© au cours des combats dâoctobre ; il Ă©tait parvenu tant bien que mhabituer Ă lâhĂŽpital de LĂ©rida et avait Ă©pousĂ© une des infirmiĂšres. Par suite dessure, lâune de ses jambes sâĂ©tait atrophiĂ©e au point de nâĂȘtre pas plus grosse que as. Deux miliciens en permission, dont jâavais fait la rencontre pendant ma premmaine au front, vinrent voir un ami blessĂ© et me reconnurent. CâĂ©taient des gaminx-huit ans environ. Ils restĂšrent plantĂ©s Ă cĂŽtĂ© de mon lit, tout gauches, sâefforçan
ouver quelque chose Ă dire et nây parvenant pas ; alors, pour me faire comprendre dtre maniĂšre quâils Ă©taient navrĂ©s que je sois blessĂ©, brusquement ils sortirent de ches tout le tabac quâils avaient, me le donnĂšrent et sâenfuirent avant que jâaie p
ur redonner. Que cela Ă©tait bien espagnol ! Je me rendis compte peu aprĂšs quâouvait acheter de tabac nulle part en ville, et que ce quâils mâavaient donnĂ© câĂ©tation dâune semaine.
Au bout de quelques jours je fus en Ă©tat de me lever et de me promener, le braharpe. Je ne sais pourquoi il me faisait beaucoup plus mal lorsquâil pendait. Je souf
ssi beaucoup, pour le moment, de douleurs internes, suites du mal que je mâĂ©taistombant, et jâavais presque complĂštement perdu la voix, mais pas un seul instaai souffert de ma blessure par balle elle-mĂȘme. Il paraĂźt en ĂȘtre gĂ©nĂ©ralement ainsup violent dâune balle produit une anesthĂ©sie locale ; un Ă©clat dâobus ou de bombe
des bords dĂ©chiquetĂ©s et frappe habituellement avec moins de force, doit provoqueruffrance infernale. Dans les terrains de lâhĂŽpital il y avait un jardin agrĂ©ablemprenait un bassin oĂč nageaient des poissons rouges et quelques petits poissons s noirĂątre : des ablettes, je crois. Je restais assis Ă les observer durant des heure
aniĂšre dont les choses se passaient Ă LĂ©rida me donnait un aperçu de lâorganisa
un hĂŽpital sur le front dâAragon ; jâignore sâil en allait de mĂȘme sur les autres fronrtains Ă©gards, câĂ©taient de trĂšs bons hĂŽpitaux. Les mĂ©decins Ă©taient des hompables, et il semblait ne pas y avoir insuffisance de produits pharmaceutiques eatĂ©riel dâĂ©quipement sanitaire. Mais il y avait deux graves dĂ©fauts qui furent causeis sĂ»r, que des centaines ou des milliers dâhommes sont morts, quâon eĂ»t pu sauver
Il y avait dâabord le fait que tous les hĂŽpitaux Ă proximitĂ© de la premiĂšre lrvaient plus ou moins de centres dâĂ©vacuation des blessĂ©s. Aussi nây recevait-on pains dâun vĂ©ritable traitement, Ă moins dâĂȘtre trop gravement blessĂ© pour
ansportable. En principe, la plupart des blessĂ©s Ă©taient directement envoyĂ©s Ă BarceĂ Tarragone, mais, par suite du manque de moyens de transport, ils mettaient souit ou dix jours pour y parvenir. On les faisait poireauter Ă Sietamo, Barbastro, Monrida, et dans bien dâautres endroits encore, et pendant tout ce temps-lĂ ils ne recevcun soin appropriĂ© Ă leur Ă©tat, câest tout juste si parfois on leur renouvelait nsement. On emmaillotait des hommes ayant dâaffreuses blessures par Ă©clats dâos os brisĂ©s, etc., dans une sorte de revĂȘtement fait de bandes de pansement et de pParis ; on Ă©crivait au crayon, sur le dessus, une description de la blessure, et en
nĂ©rale on nâenlevait ce revĂȘtement quâĂ lâarrivĂ©e Ă Barcelone ou Ă Tarragone, dix jus tard. Il Ă©tait Ă peu prĂšs impossible de faire examiner sa blessure en cours de ro
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docteurs, trop peu nombreux, ne pouvaient suffire Ă tout le travail et ils ne faisae passer rapidement prĂšs de votre lit en vous disant : « Mais oui, mais oui, on ignera Ă Barcelone. » Constamment le bruit courait quâun train sanitaire partirait rcelone mañana. Lâautre dĂ©faut Ă©tait le manque dâinfirmiĂšres capables. Apparemm
nâexistait pas en Espagne dâinfirmiĂšres diplĂŽmĂ©es, peut-ĂȘtre parce quâavant la gueravail Ă©tait fait surtout par des religieuses. Je nâai aucun sujet de plainte contrfirmiĂšres espagnoles, elles mâont toujours traitĂ© avec la plus grande gentillesse, mest pas douteux quâelles Ă©taient dâune dĂ©sastreuse ignorance. Toutes savaient comm
endre une température et quelques-unes savaient faire un pansement, mais à cernait leur compétence. Il en résultait que des hommes trop malades pour se su
aient souvent honteusement nĂ©gligĂ©s. Ces infirmiĂšres laissaient facilement un hoster constipĂ© toute une semaine, et rarement elles lavaient ceux qui Ă©taient trop faur se laver eux-mĂȘmes. Je revois un pauvre diable avec un bras cassĂ© me dire quâilstĂ© trois semaines sans avoir le visage lavĂ©. Elles laissaient mĂȘme les lits sans les usieurs jours de suite. La nourriture Ă©tait trĂšs bonne dans tous les hĂŽpitaux â nne, Ă la vĂ©ritĂ©. Plus encore en Espagne que partout ailleurs, il semble ĂȘtre de trad
gaver les malades. Ă LĂ©rida les repas Ă©taient terrifiants. Le petit dĂ©jeuner, verures du matin, se composait dâune soupe, dâune omelette, de ragoĂ»t, de pain, deanc et de cafĂ© ; et le dĂ©jeuner Ă©tait encore plus copieux â cela Ă un moment oĂč laande partie de la population civile Ă©tait sĂ©rieusement sous-alimentĂ©e. Une alimentgĂšre, câest une chose que les Espagnols paraissent ne pas admettre. Ils donnentalades la mĂȘme nourriture quâaux bien-portants â toujours cette mĂȘme cuisine rasse, oĂč tout baigne dans lâhuile dâolive.
Un matin, on annonça quâon allait envoyer le jour mĂȘme les hommes de ma sarcelone. Je me dĂ©brouillai pour envoyer Ă ma femme un tĂ©lĂ©gramme lui annon
on arrivĂ©e, et aussitĂŽt aprĂšs on nous entassa dans des autobus et lâon nous menare. Câest seulement au moment oĂč dĂ©jĂ le train commençait Ă rouler que lâinfirmieus accompagnait laissa incidemment Ă©chapper quâau demeurant ce nâĂ©tait prcelone que nous allions, mais Ă Tarragone. Je suppose que le mĂ©canicien avait ch
avis. « VoilĂ bien lâEspagne ! » pensai-je. Mais ce qui fut trĂšs espagnol, aussi, câest qnsentirent Ă arrĂȘter le train pour me donner le temps dâenvoyer un autre tĂ©lĂ©gramce qui fut plus espagnol encore, câest que ce tĂ©lĂ©gramme nâarriva jamais Ă destinati
On nous avait mis dans des compartiments de troisiĂšme classe ordinaire
nquettes de bois, et pourtant beaucoup dâentre nous Ă©taient gravement blessĂ©ittaient le lit ce matin-lĂ pour la premiĂšre fois. Il ne fallut pas longtemps pour qualeur et le cahotage aidant, la moitiĂ© des hommes sâĂ©vanouissent et que plusieussent Ă vomir sur le plancher. Lâinfirmier se faufilait parmi ces formes Ă©talĂ©es paqui avaient lâair de cadavres, portant une grande outre en peau de bouc pleine dâil faisait gicler par-ci par-lĂ dans une bouche. CâĂ©tait une eau infecte ; je me souvcore de son goĂ»t ! Nous entrĂąmes dans Tarragone au coucher du soleil. La voie fe
ngeait le rivage, Ă un jet de pierre de la mer. Tandis que notre train pĂ©nĂ©trait dare, un autre train militaire rempli dâhommes des Brigades internationales en sortagroupe de gens, sur le pont, leur faisait des gestes dâadieu. CâĂ©tait un train trĂšs l
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ein Ă craquer dâhommes et transportant, attachĂ©s sur des trucks, des canonmpagne auxquels se cramponnaient encore des grappes dâhommes. Dans mon souvt restĂ©e particuliĂšrement vive la vision de ce train passant dans la lumiĂšre dorĂ©ir ; les portiĂšres dĂ©filant, toutes garnies de visages bruns, souriants ; les longs caclinĂ©s ; les foulards Ă©carlates flottant â tout cela nous croisant et sâĂ©loignant dannt glissement, et se dĂ©tachant sur la mer couleur de turquoise.
« Extranjeros â des Ă©trangers â dit quelquâun. Ce sont des Italiens... » Visiblement câĂ©taient des Italiens : il nây a quâeux pour se grouper
toresquement ou rendre Ă la foule son salut avec autant de grĂące â une grĂącealtĂ©rait en rien le fait que la moitiĂ© dâentre eux tenaient, relevĂ©es en lâair, des boute
vin et buvaient Ă mĂȘme. Nous apprĂźmes par la suite que câĂ©tait lĂ une partieoupes qui avaient remportĂ© la grande victoire de Guadalajara en mars ; ces homaient Ă©tĂ© en permission et on les dirigeait Ă prĂ©sent sur le front dâAragon. Je crainse la plupart dâentre eux nâaient Ă©tĂ© tuĂ©s Ă Huesca, Ă peine quelques semaines plus ux dâentre nous qui se sentaient assez bien pour pouvoir se tenir debout avaient g portiĂšres pour acclamer au passage les Italiens. Une bĂ©quille fut agitĂ©e en dehors
mpartiment, des bras emmaillotĂ©s de pansements firent le salut rouge. On eĂ»t dbleau allĂ©gorique de la guerre, ces deux trains se croisant, lâun avec sa charge dâhomais glissant fiĂšrement vers le front, lâautre ramenant lentement des estropiĂ©s â etempĂȘchait pas les cĆurs de bondir comme toujours Ă la vue des canons sur les trui faisait renaĂźtre le sentiment pernicieux, dont il est si difficile de se dĂ©faire, querre, en dĂ©pit de tout, est bien chose glorieuse.
CâĂ©tait un trĂšs grand hĂŽpital que celui de Tarragone et il Ă©tait rempli de blessĂ©us les fronts. Quelles blessures on voyait lĂ ! On y avait une façon dâen soigner certai Ă©tait, je suppose, en conformitĂ© avec la plus rĂ©cente pratique mĂ©dicale, mais
frait un spectacle particuliĂšrement horrible. Elle consistait Ă laisser la blesmplĂštement Ă dĂ©couvert et sans pansement, mais protĂ©gĂ©e des mouches par une gvelopper le beurre tendue sur des fils de fer. Ă travers la gaze on pouvait voir la guge dâune blessure Ă demi cicatrisĂ©e. Il y avait un homme, blessĂ© Ă la figure etrge, dont la tĂȘte Ă©tait enfermĂ©e dans une sorte de heaume sphĂ©rique de gavelopper le beurre ; il avait la bouche obturĂ©e et il respirait au moyen dâun petit hĂ© entre ses lĂšvres. Pauvre diable, il avait lâair si seul, tandis quâil errait çà et lĂ , gardant Ă travers sa cage de gaze et ne pouvant pas parler ! Je suis restĂ© Ă Tarra
ois ou quatre jours. Mes forces me revenaient et un jour, en allant trĂšs lentemenrvins Ă descendre jusquâĂ la plage. Quelle drĂŽle dâimpression cela faisait de voir lun bord de mer se poursuivre presque telle quâen temps normal, les cafĂ©s Ă©lĂ©ganng de la promenade, et la bourgeoisie bien en chair de lâendroit se baigner et sâexp
soleil sur des chaises longues, tout comme sâil nây avait pas eu une guerre Ă moinsllier de kilomĂštres. Toujours est-il que jâarrivai juste pour voir un baigneur se noyee lâon eĂ»t cru impossible dans cette mer peu profonde et tiĂšde.
Enfin, huit ou neuf jours aprĂšs mon dĂ©part du front, on examina ma blessure. Ddispensaire oĂč les blessĂ©s nouvellement arrivĂ©s Ă©taient examinĂ©s, les docteurs artrĂšs grands ciseaux sâattaquaient aux cuirasses de plĂątre dans lesquelles des hom
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ant les cĂŽtes, les clavicules, etc., brisĂ©es, avaient Ă©tĂ© emballĂ©s aux centres dâĂ©vacuatrriĂšre immĂ©diat des premiĂšres lignes ; de lâencolure de lâĂ©norme cuirasse informyait sortir un visage, anxieux, sale, hĂ©rissĂ© de barbe dâune semaine. Le mĂ©decin, umme plein dâentrain, paraissant la trentaine, me fit asseoir sur une chaise, me sai
ngue avec un morceau de gaze rugueuse, me la tira en dehors tant quâil put, dirigeantĂ©rieur de ma gorge un miroir de dentiste et me dit de dire : « Eh ! » AprĂšs antinuĂ© Ă tirer jusquâĂ ce que jâeusse la langue en sang et des larmes pleins les yeue dit que jâavais une corde vocale paralysĂ©e.
« Quand retrouverai-je la voix ? demandai-je.â La voix ? Oh ! vous ne la retrouverez jamais », rĂ©pondit-il gaiement.Cependant il se trompait, comme le prouva la suite. Pendant deux mois enviro
pus guĂšre Ă©mettre quâun murmure, mais ensuite ma voix redevint normale et dçon assez soudaine, lâautre corde vocale sâĂ©tant mise à « compenser ». La douleuon bras Ă©tait due Ă ce que la balle avait traversĂ© un faisceau de nerfs dans la nuĂ©tait une douleur lancinante comme une nĂ©vralgie et dont je souffris sans rĂ©pit du
mois environ, tout particuliĂšrement la nuit, aussi ne pouvais-je que bien peu dor
avais aussi les doigts de la main droite Ă demi paralysĂ©s. Ă prĂ©sent encore, cinq rĂšs, mon index reste gourd ; drĂŽle de consĂ©quence pour une blessure au cou !Ma blessure Ă©tant une maniĂšre de curiositĂ©, plusieurs mĂ©decins lâexaminĂšrent
rce claquements de langue et que suerte ! que suerte ! Lâun dâeux me dĂ©clara toritĂ© que la balle avait manquĂ© lâartĂšre dâ« un millimĂštre ». Comment il savait ç
gnore ! Aucun de ceux que jâai rencontrĂ©s Ă cette Ă©poque â docteurs, infirmiacticantes ou patients â jamais nâa manquĂ© de mâassurer quâun homme qui a eu leaversĂ© dâune balle et qui y survit est le plus veinard des ĂȘtres. Je ne pouvais mâempĂȘ
penser que câeĂ»t Ă©tĂ© encore plus de veine de nâavoir pas Ă©tĂ© blessĂ© du tout.
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XI
Ă Barcelone, durant toutes les derniĂšres semaines que jây ai passĂ©es, on sentait ir quelque chose dâinsolite et de sinistre â atmosphĂšre de suspicion, de pncertitude et de haine voilĂ©e. Les troubles de mai avaient des consĂ©queextirpables. Avec la chute du gouvernement Caballero, les communistes Ă©ta
ttement arrivĂ©s au pouvoir ; la charge de lâordre intĂ©rieur Ă©tait Ă prĂ©sent aux mainnistres communistes et il ne faisait de doute pour personne quâils Ă©craseraient laux politiques dĂšs que la moindre occasion leur en serait fournie. Il ne se passaitcore â personnellement je ne me reprĂ©sentais mĂȘme pas du tout ce qui allasser â et cependant lâon avait continuellement le sentiment vague dâun dannscience dâune menace. ForcĂ©ment on avait, dans une telle atmosphĂšre, lâimpresĂȘtre un conspirateur, si peu quâon le fĂ»t en rĂ©alitĂ©. Il semblait quâon passĂąt toutmps Ă sâentretenir Ă voix basse avec quelquâun dans les coins des cafĂ©s, emandant si cette personne Ă une table voisine Ă©tait un espion de la police.
Il courait, par suite de la censure des journaux, toutes sortes de bruits alarmlui, entre autres, que le gouvernement NegrĂn-Prieto projetait de terminer la guerrcompromis. Jâinclinais alors Ă le croire, car les fascistes Ă©taient en train de ce
lbao et visiblement le gouvernement ne faisait rien pour sauver cette ville. On dĂ©plen partout des drapeaux basques, de jeunes quĂȘteuses faisaient tinter des troncs cafĂ©s et il y avait les habituelles Ă©missions au sujet des « dĂ©fenseurs hĂ©roĂŻques », Basques nâobtenaient aucun secours vĂ©ritable. On Ă©tait tentĂ© de croire quuvernement menait double jeu. Sur ce point je me trompais absolument
Ă©nements ultĂ©rieurs lâont prouvĂ© ; toutefois il semble quâon eĂ»t probablemenuver Bilbao en dĂ©ployant un peu plus dâĂ©nergie. Une offensive sur le front dâAraĂȘme non couronnĂ©e de succĂšs, eĂ»t forcĂ© Franco Ă dĂ©tourner une partie de son armle gouvernement ne donna lâordre dâattaquer que lorsquâil Ă©tait dĂ©jĂ bien trop tardt, Ă peu prĂšs au moment oĂč Bilbao tomba. La C.N.T. diffusa largement un traccommandait : « Tenez-vous sur vos gardes », en laissant entendre que « certain paisant par lĂ allusion aux communistes) complotait un coup dâĂtat. Un autre sentimiversellement rĂ©pandu Ă©tait la crainte que la Catalogne ne se trouvĂąt sur le point dvahie. Quelque temps auparavant, en remontant au front, jâavais vu les puiss
vrages de dĂ©fense que lâon construisait Ă pas mal de kilomĂštres en arriĂšreemiĂšres lignes, et les nouveaux abris contre les bombes que lâon creusait tout autourcelone. Les alertes de raids aĂ©riens et maritimes Ă©taient frĂ©quentes, fausses le uvent, mais le cri strident des sirĂšnes plongeait chaque fois la ville pour des heureite dans lâobscuritĂ© et les gens peureux sâengouffraient dans les caves. La police s espions partout. Les prisons Ă©taient encore bondĂ©es de dĂ©tenus dont lâarrestamontait aux troubles de mai, et elles continuaient Ă en absorber dâautres â toujturellement des anarchistes et des membres du P.O.U.M. â qui disparaissaient, pa
deux Ă la fois. Personne, pour autant quâon pĂ»t sâen rendre compte, ne passait jajugement, ni mĂȘme nâĂ©tait inculpĂ© â pas mĂȘme accusĂ© de quelque chose dâaussi p
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e dâĂȘtre « trotskyste » ; on Ă©tait tout bonnement jetĂ© et gardĂ© en prison, habituellemcomunicado. Bob Smillie Ă©tait toujours incarcĂ©rĂ© Ă Valence. Nous ne pĂ»mes prendre, si ce nâest que ni le dĂ©lĂ©guĂ© local de lâI.L.P. ni lâavocat engagĂ© nâavaiermission de le voir. On emprisonnait de plus en plus dâĂ©trangers des Brigternationales et des autres milices. En gĂ©nĂ©ral ils Ă©taient arrĂȘtĂ©s en tant que dĂ©sertĂ©tait un trait caractĂ©ristique de lâĂ©tat de choses que personne Ă prĂ©sent ne savait rtitude sâil fallait considĂ©rer un milicien comme un volontaire ou comme un sogulier. Quelques mois plus tĂŽt, Ă tout homme sâenrĂŽlant dans les milices on avai
âĂ©tant un volontaire il pourrait toujours, sâil le dĂ©sirait, obtenir son certificamobilisation Ă chaque fois que ce serait pour lui le moment de partir en permissiouvernement semblait maintenant avoir changĂ© dâavis et considĂ©rer un milicien com
soldat rĂ©gulier que lâon portait dĂ©serteur sâil essayait de rentrer dans son putefois personne nâavait de certitude Ă ce sujet. Dans certains secteurs du frontoritĂ©s continuaient Ă dĂ©livrer des certificats de dĂ©mobilisation. Ă la frontiĂšre, tantreconnaissait la validitĂ©, et tantĂŽt non. Dans ce dernier cas, câĂ©tait la prison su
amp. Le nombre des « déserteurs » étrangers finit par se chiffrer par centaines, ma
upart furent rapatriĂ©s quand on Ă©leva des protestations Ă leur sujet dans leurs pays.Des bandes de gardes dâassaut armĂ©s rĂŽdaient partout dans les rues, les gardes cupaient toujours les cafĂ©s et dâautres immeubles en des points stratĂ©giques, eand nombre des locaux du P.S.U.C. avaient encore leur protection de sacs de terurs barricades. En diffĂ©rents points de la ville on avait postĂ© des gardes civils erabiniers pour arrĂȘter les passants et examiner leurs papiers. Tout le mondecommanda de bien me garder de montrer ma carte de milicien du P.O.U.M., de ne se mon passeport et mon billet dâhĂŽpital. Laisser savoir quâon avait servi danlices du P.O.U.M. suffisait Ă vous mettre en danger. Les miliciens du P.O.U.M., ble
en permission, Ă©taient lâobjet de brimades mesquines â ils rencontraient, par exems difficultĂ©s pour toucher leur solde. La Batalla paraissait toujours, mais Ă©tait censpoint de friser lâinexistence ; Solidaridad et les autres journaux anarchistes Ă©t
alement soumis Ă de larges coupures. DâaprĂšs un nouveau rĂšglement, les pansurĂ©es des journaux ne devaient pas ĂȘtre laissĂ©es en blanc, mais comblĂ©es autres « papiers », aussi Ă©tait-il souvent impossible de savoir si quelque chose avaiupĂ©.
En ce qui concerne le manque de vivres, qui a sévi de façon variable durant to
urs de la guerre, on Ă©tait alors Ă lâun des pires moments. Le pain Ă©tait rare, et le mer Ă©tait falsifiĂ© avec du riz ; celui que les soldats recevaient Ă la caserne ominable, on aurait dit du mastic. Il nây avait que trĂšs peu de lait et de sucre, Ă peu s de tabac, Ă part les si coĂ»teuses cigarettes de contrebande. Le manque dâhuile dâont les Espagnols font une demi-douzaine dâemplois diffĂ©rents, se faisait sentir de f
guĂ«. Les queues de femmes pour lâachat dâhuile dâolive Ă©taient placĂ©es sourveillance de gardes civils montĂ©s, qui sâamusaient parfois Ă faire entrer Ă recu
urs chevaux dans la queue en tĂąchant de les faire marcher sur les pieds des femmestre petit dĂ©sagrĂ©ment, câĂ©tait le manque de menue monnaie. On avait retirĂ© dculation les piĂšces dâargent sans y avoir encore substituĂ© de monnaie nouvelle, si
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âil nây avait rien entre la piĂšce de dix centimes et le billet de deux pesetas et demius les billets au-dessous de dix pesetas Ă©taient trĂšs rares. Pour les gens les plus paua reprĂ©sentait une aggravation de la disette. Une femme ne possĂ©dant quâun bill
x pesetas risquait, lorsque enfin, aprĂšs avoir fait la queue pendant des heurxtĂ©rieur de lâĂ©picerie, son tour arrivait, de ne pouvoir rien acheter du tout, parcepicier nâavait pas de monnaie et quâelle ne pouvait se permettre de dĂ©penser dâun dix pesetas.
Il nâest pas facile de faire comprendre lâatmosphĂšre de cauchemar de cette Ă©po
nquiĂ©tude trĂšs singuliĂšre causĂ©e par les bruits qui couraient et se contredisaient les autres, par la censure des journaux et la prĂ©sence constante dâhommes armĂ©s. Il s facile dâen donner lâidĂ©e exacte parce que, pour le moment, ce quâil y a de capital e telle atmosphĂšre nâexiste pas en Angleterre. En Angleterre lâintolĂ©rance polit
est pas considĂ©rĂ©e comme chose admise. Il existe bien une certaine persĂ©culitique : si jâĂ©tais ouvrier mineur, je ne mâempresserais pas de faire savoir Ă mon pae je suis communiste : mais le « bon membre du parti », le gangster-gramophone litique continentale, y est encore une raretĂ©, et lâintention de « liquider »
« Ă©liminer » quiconque vient Ă nâĂȘtre pas du mĂȘme avis que vous nây paraĂźt pas enose naturelle. Cela ne paraissait que chose trop naturelle Ă Barcelone ! Du moment « stalinistes » dominaient il allait de soi que tout « trotskyste » Ă©tait en dang
advint somme toute pas ce que tout le monde craignait : un nouveau dĂ©clenchemenguerre des rues dont, comme prĂ©cĂ©demment, lâon rendrait responsables le P.O.U.M anarchistes. Par moments, je me surprenais Ă tendre lâoreille pour Ă©couter si
entendait pas les premiers coups de feu. On eĂ»t dit que quelque monstrueux ealfaisant planait sur la ville. Tout le monde sentait cela et en faisait la rĂ©flexionrmes curieusement semblables : « Oh ! lâatmosphĂšre de cette ville â câest effroya
n se croirait dans un asile dâaliĂ©nĂ©s ! » Mais peut-ĂȘtre ne devrais-je pas dire toonde. Certains visiteurs anglais qui parcoururent hĂątivement lâEspagne, dâhĂŽtetel, paraissent nâavoir pas remarquĂ© quâil y avait quelque chose qui clochait tmosphĂšre gĂ©nĂ©rale. La duchesse dâAtholl Ă©crit ( Sunday Express, 17 octobre 1937) :
« Jâai Ă©tĂ© Ă Valence, Ă Madrid et Ă Barcelone... dans ces trois villes un ordre pagnait, sans aucun dĂ©ploiement de force. Tous les hĂŽtels oĂč jâai sĂ©journĂ© Ă©taientulement « normaux », mais extrĂȘmement confortables, si lâon passe sur le manquurre et de cafĂ©. »
Câest une particularitĂ© des voyageurs anglais de ne pas vraiment croire Ă lâexistquelque chose en dehors des grands hĂŽtels. JâespĂšre quâon a trouvĂ© un peu de beur la duchesse dâAtholl.
JâĂ©tais au sanatorium MaurĂn, lâun des sanatoriums dirigĂ©s par le P.O.U.M. Il uĂ© dans la banlieue, prĂšs du Tibidabo, ce mont de configuration Ă©trange qui sâĂ©ruptement aux confins de Barcelone et du sommet duquel, selon la tradition, Srait montrĂ© Ă JĂ©sus les royaumes de la terre (dâoĂč son nom). La maison, qui paravant appartenu Ă quelque riche bourgeois, avait Ă©tĂ© saisie au moment dvolution ; la plupart des hommes qui se trouvaient lĂ , ou bien avaient Ă©tĂ© Ă©vacuĂ©ont pour maladie, ou bien avaient quelque blessure â amputation dâun membre
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emple â qui les avait rendus dĂ©finitivement inaptes. Il y avait dĂ©jĂ dans ce sanatousieurs Anglais : Williams, avec sa jambe abĂźmĂ©e, et Stafford Cottman, un jmme de dix-huit ans qui, prĂ©sumĂ© tuberculeux, avait Ă©tĂ© renvoyĂ© des tranchĂ©ethur Clinton dont le bras gauche brisĂ© Ă©tait encore attachĂ© avec une courroie sur us encombrants trucs mĂ©talliques, surnommĂ©s aĂ©roplanes, qui Ă©taient en usage danpitaux espagnols. Ma femme continuait de loger Ă lâhĂŽtel Continental et gĂ©nĂ©ralemme rendais Ă Barcelone dans la journĂ©e. Le matin jâallais Ă lâhĂŽpital gĂ©nĂ©ral subi
aitement Ă©lectrique pour mon bras. DrĂŽle de traitement : une suite de secou
ectriques, donnant une sensation de picotements, qui imprimaient aux divers gromuscles un mouvement de saccade â mais cela paraissait me faire du bien
trouvai lâusage de mes doigts et la douleur sâattĂ©nua quelque peu. Nous avions ux dĂ©cidĂ© que ce que nous avions de mieux Ă faire, câĂ©tait de rentrer en Angleterus tĂŽt possible. JâĂ©tais extrĂȘmement faible, jâavais, semblait-il, perdu la voix poun, et les mĂ©decins me disaient quâen mettant les choses au mieux jâen avais usieurs mois avant dâĂȘtre de nouveau apte au combat. Il me fallait me mettre tĂŽt ougagner un peu dâargent et Ă quoi cela rimait-il de rester en Espagne, en bouche inut
anger des rations dont dâautres avaient besoin. Mais mes motifs Ă©taient suroĂŻstes. Je nâen pouvais plus, jâĂ©prouvais un dĂ©sir intense de mâen aller loin de tout cn de cette horrible atmosphĂšre de suspicion et de haine politiques, de ces rues ple
hommes armĂ©s, des bombardements aĂ©riens, des tranchĂ©es, des mitrailleuses,ams grinçants, du thĂ© sans lait, de la cuisine Ă lâhuile, de la privation de cigarettes â
presque tout ce que jâavais appris Ă associer Ă lâidĂ©e de lâEspagne.Les docteurs de lâhĂŽpital gĂ©nĂ©ral mâavaient dĂ©clarĂ© inapte, mais pour obtenir
rtificat de dĂ©mobilisation, je devais passer devant un conseil de santĂ© dans lâunpitaux proches du front, et aller ensuite Ă Sietamo faire viser mes papiers au qua
nĂ©ral des milices du P.O.U.M. Kopp venait juste dâarriver du front, plein dâexultationait de prendre part Ă un combat et disait que Huesca Ă©tait sur le point dâĂȘtre pfin. Le gouvernement avait fait venir des troupes du front de Madrid et opĂ©rancentration de trente mille hommes et dâun trĂšs grand nombre dâavions. Les Itale jâavais vus Ă Tarragone alors quâils remontaient au front, avaient livrĂ© une attaquroute de Jaca, mais avaient eu beaucoup de morts et de blessĂ©s et perdu deux ta
Ă©anmoins la ville ne pouvait manquer de tomber bientĂŽt, disait Kopp. (HĂ©las ! elmba pas. Lâoffensive fut un effroyable gĂąchis et nâaboutit Ă rien, si ce nâest Ă une o
mensonges dans les journaux.) En attendant, Kopp avait Ă se rendre Ă Valence e entrevue au ministĂšre de la Guerre. Il avait une lettre du gĂ©nĂ©ral Pozasmmandait alors lâarmĂ©e de lâEst â lâhabituelle lettre dâintroduction dĂ©peignant Kmme une personne « de toute confiance » et le recommandant pour une affectaĂ©ciale dans le GĂ©nie (Kopp avait Ă©tĂ© ingĂ©nieur dans la vie civile). Il partit pour ValmĂȘme jour que je partis pour Sietamo, le 15 juin.
Je ne fus de retour à Barcelone que cinq jours plus tard. Notre camion beignit Sietamo vers minuit, et nous ne fûmes pas plus tÎt arrivés au quartier génér
O.U.M. que, avant mĂȘme de prendre nos noms, on nous fit nous aligner et on se mus distribuer des fusils et des cartouches. Lâattaque semblait ĂȘtre dĂ©clenchĂ©e et
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ait probablement appeler des troupes de rĂ©serve dâun moment Ă lâautre. Jâavais let dâhĂŽpital dans ma poche, mais je ne pouvais guĂšre refuser de me joindre aux au
me pieutai par terre, avec une cartouchiĂšre pour oreiller, et dans un Ă©tansternation profonde. Par suite de ma blessure, jâavais pour le moment les traquĂ©s â je pense que câest ce qui arrive dâordinaire en pareil cas â et la perspective trouver de nouveau sous le feu mâeffrayait terriblement. Mais comme toujours il
peu de mañana, en fin de compte on ne nous appela pas, et le lendemain matontrai mon billet dâhĂŽpital et dĂšs lors mâoccupai dâobtenir mon certifica
mobilisation. Ce qui exigea toute une sĂ©rie de voyages embrouillĂ©s et fatigants. Comhabitude on Ă©tait renvoyĂ© comme un volant dâhĂŽpital en hĂŽpital â pour moi cetamo, Barbastro, MonzĂłn, puis retour Ă Sietamo pour faire viser mon certificat, e fois de plus en route pour sâĂ©loigner du front, en passant par Barbastro et LĂ©ridaa alors que la convergence des troupes sur Huesca avait accaparĂ© tous les moyen
ansport et avait tout dĂ©sorganisĂ©. Je me souviens dâavoir dormi dans des endprĂ©vus â une fois dans un lit dâhĂŽpital, mais dâautres fois dans un fossĂ©, sur un
Ăšs Ă©troit dâoĂč je tombai au milieu de la nuit, et enfin, Ă Barbastro, dans une sorte dâ
nuit municipal. DĂšs quâon sâĂ©loignait de la ligne de chemin de fer, il nây avaitautre moyen de voyager que de sauter dans un camion de rencontre. Il fallait attebord de la route durant des heures, trois ou quatre heures de suite parfois
mpagnie de groupes de paysans maussades, chargĂ©s de canards et de lapins, en favain de grands signes Ă chaque camion qui passait. Quand finalement on tombaicamion qui ne regorgeĂąt pas dâhommes, de miches de pain et de caisses de munitĂ©tait rossĂ© et mis en bouillie par le cahotement sur ces mauvaises routes. Ja
cun cheval ne mâavait fait sauter aussi haut que ces camions. Le seul moyen pour squâau bout du voyage, câĂ©tait de se serrer les uns contre les autres et de se crampo
uns aux autres. Ă ma grande humiliation, je mâaperçus que jâĂ©tais encore trop fur grimper dans un camion sans ĂȘtre aidĂ©.
Je dormis une nuit Ă lâhĂŽpital de MonzĂłn, oĂč je venais pour ĂȘtre examinĂ© pnseil de santĂ©. Dans le lit voisin du mien, il y avait un garde dâassaut blessĂ© au-delâĆil gauche. Il se montra amical et mâoffrit des cigarettes. Je dis : « Ă Barcelone, us serions tirĂ©s mutuellement dessus », et cela nous fit rire. CâĂ©tait curieux comez tous lâĂ©tat dâesprit semblait changer dĂšs quâon se trouvait Ă proximitĂ© des premnes. Toutes ou presque toutes les mauvaises haines entre membres de partis politi
ffĂ©rents disparaissaient comme par enchantement. De tout le temps que jâai passont je ne me rappelle pas quâaucun membre du P.S.U.C. mâait une seule fois tĂ©molâhostilitĂ© parce que jâĂ©tais du P.O.U.M. Ce genre de choses, câĂ©tait bon dans Barcedans dâautres villes encore plus Ă©loignĂ©es du thĂ©Ăątre de la guerre. Il y avait un g
mbre de gardes dâassaut dans Sietamo. Ils y avaient Ă©tĂ© envoyĂ©s de Barcelone endre part Ă lâattaque sur Huesca. Les gardes dâassaut Ă©taient un corps qui, Ă lâoriĂ©tait pas destinĂ© Ă ĂȘtre envoyĂ© sur le front, et beaucoup dâentre eux ne sâĂ©taient enmais trouvĂ©s auparavant sous le feu de lâennemi. Ă Barcelone ils Ă©taient les maĂźtrerue, mais ici ils Ă©taient des quintos (des « bleus ») et devenaient copains avecfants de quinze ans des milices qui, eux, Ă©taient sur le front depuis des mois. Ă lâhĂŽ
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MonzĂłn, le docteur respecta lâhabituel programme : il tira sur ma langue, regarda a gorge Ă lâaide dâun petit miroir, et mâassura sur le mĂȘme ton joyeux que les autresne retrouverais jamais la voix, puis il me signa mon certificat. Tandis que jâattenur ĂȘtre examinĂ©, il y avait en cours, Ă lâintĂ©rieur du dispensaire, une terrible opĂ©rans anesthĂ©sique â pourquoi sans anesthĂ©sique, je lâignore. Hurlement de douleurlement de douleur, cela nâen finissait pas, et lorsquâĂ mon tour jâentrai dans la saldes chaises jetĂ©es de cĂŽtĂ© et dâautre, et sur le parquet des flaques de sang et dâurin
Les détails de ce dernier voyage se détachent dans mon souvenir avec une étonn
ttetĂ©. JâĂ©tais dans une tout autre disposition, beaucoup plus en humeur dâobservernâavais Ă©tĂ© depuis des mois. Jâavais mon certificat de dĂ©mobilisation sur lequel avaposĂ© le sceau de la 29e division, et un certificat du docteur me dĂ©clarant « bon Ă ri
Ă©tais libre de rentrer en Angleterre ; dĂšs lors je me sentais capable, pour la premiĂšreut-ĂȘtre, de regarder attentivement lâEspagne. Jâavais une journĂ©e Ă passer Ă Barbr il nây avait quâun train par jour. Je nâavais fait, naguĂšre, que jeter de rapides cĆil sur Barbastro, ce nâavait Ă©tĂ© pour moi quâun coin de la guerre â un endroit ueux, froid, rempli de camions assourdissants et de troupes miteuses. Il me parai
rangement diffĂ©rent Ă prĂ©sent. En y flĂąnant Ă lâaventure, je mâaperçus de lâexistencarmantes rues tortueuses, de vieux ponts de pierre, de dĂ©bits de vin avec de grandsintants de la hauteur dâun homme, et de mystĂ©rieux ateliers Ă demi souterrains oĂčmmes fabriquaient des roues de voiture, des poignards, des cuillers de bois ettres en peau de bouc. Je mâarrĂȘtai Ă regarder un homme fabriquer une outre couvris avec un vif intĂ©rĂȘt une chose que jâavais jusquâalors ignorĂ©e, câest que lâoncĂŽtĂ© poils de la peau Ă lâintĂ©rieur et quâon laisse le poil, si bien que ce que lâon boalitĂ©, câest de lâinfusion de poils de bouc. Jâavais bu Ă des outres des mois durant en ĂȘtre jamais avisĂ©. Et sur les derriĂšres de la ville, coulait une riviĂšre peu profon
rt jade ; il sâen Ă©levait perpendiculairement une falaise rocheuse, avec des habitanstruites dans le roc, de telle sorte que de la fenĂȘtre de votre chambre Ă coucher uviez cracher directement dans lâeau Ă vingt pieds au-dessous. Dâinnombrables pig
geaient dans les anfractuositĂ©s de la falaise. Et Ă LĂ©rida, sur les corniches de vieaisons tombant en ruine, des milliers et des milliers dâhirondelles avaient bĂąti lds ; Ă quelque distance, le dessin de cette croĂ»te de nids offrait lâaspect dâun mounĂ© Ă lâexcĂšs de lâĂ©poque rococo. Câest curieux Ă quel point durant presque lerniers mois je nâavais pas eu dâyeux pour de telles choses ! Depuis que jâavais
piers de dĂ©mobilisation dans la poche, je me sentais redevenu un ĂȘtre humain, eu un touriste aussi. Pour la premiĂšre fois Ă peu prĂšs jâavais le sentiment dellement en Espagne, dans le pays que jâavais toute ma vie souhaitĂ© visiter. Danlmes petites rues Ă©cartĂ©es de LĂ©rida et de Barbastro, il me sembla saisir une vgitive, une sorte de rumeur lointaine de cette Espagne que chacun porte dansagination : blanches sierras, chevriers, cachots de lâinquisition, palais maures, n
Ă©ories de mules serpentant, oliviers cendreux et bosquets de citronniers, jeunes mantilles noires, vins de Malaga et dâAlicante, cathĂ©drales, cardinaux, course
ureaux, bohĂ©miennes, sĂ©rĂ©nades â bref, lâEspagne. De toute lâEurope câĂ©tait le payait le plus hantĂ© mon imagination. Quel dommage que lorsque jâavais enfin pu y v
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it Ă©tĂ© pour nây voir que ce coin du nord-est, dans le bouleversement dâune gueresque uniquement en hiver.
Il Ă©tait tard lorsque jâarrivai Ă Barcelone, et il nây avait pas de taxis. CâĂ©tait inessayer de gagner le sanatorium MaurĂn qui Ă©tait situĂ© tout Ă fait Ă lâextĂ©rieur le ; je me dirigeai donc vers lâhĂŽtel Continental, en mâarrĂȘtant en cours de route ner. Je me souviens dâavoir eu une conversation avec un garçon trĂšs paternel Ă pr
pichets de chĂȘne, cerclĂ©s de cuivre, dans lesquels on servait le vin. Je lui disimerais bien en acheter un service pour le rapporter en Angleterre. Le garçon
pondit dâun ton plein de sympathie : « Oui, nâest-ce pas, ils sont beaux ? possible dâen acheter Ă prĂ©sent. Personne nâen fabrique plus â personne ne fabr
us rien. Ah ! cette guerre â câest lamentable ! » Nous tombĂąmes dâaccord que erre Ă©tait une chose lamentable. Une fois de plus je me fis lâeffet dâun touristerçon me questionna aimablement : Avais-je aimĂ© lâEspagne ? Reviendrais-jpagne ? Oh ! Oui, je reviendrais en Espagne. Le caractĂšre temps-de-paix de nversation sâest gravĂ© dans ma mĂ©moire, Ă cause de ce qui lâa immĂ©diatement suivi
Lorsque jâarrivai Ă lâhĂŽtel, ma femme Ă©tait assise dans le salon. Elle se leva et v
a rencontre dâun air si dĂ©gagĂ© que jâen fus frappĂ© ; puis elle me passa un bras autouu et, tout en souriant tendrement Ă lâintention de la galerie, me murmura Ă lâoreille« Va-tâen !â Comment ?â Va-tâen dâici tout de suite !â Comment ?â Ne reste pas ici ! Il faut vite tâen aller !â Tu dis ? Pourquoi ? Quâest-ce que tu veux dire ? »Elle me tenait par le bras et dĂ©jĂ mâentraĂźnait vers lâescalier. Ă mi-chemi
scendant, nous croisĂąmes un Français â je tairai son nom car, bien quâil nâeĂ»t aun avec le P.O.U.M., il sâest montrĂ© un vĂ©ritable ami pour nous dans le malheur. Enyant, lâexpression de son visage se fit soucieuse :
« Ăcoutez donc ! Il ne faut pas que vous entriez ici. Sortez vite dâici et allez cher avant quâils nâaient alertĂ© la police. »
Et voilĂ quâau bas de lâescalier un employĂ© de lâhĂŽtel, qui Ă©tait membre du P.O.lâinsu de la direction, jâimagine), sortit furtivement de lâascenseur pour venir memauvais anglais de mâen aller. Mais je ne saisissais toujours pas ce qui Ă©tait arrivĂ©
« Mais que diable veut donc dire tout cela ? demandai-je dĂšs que nous fĂ»mes sottoir.â Tu nâas pas appris ?â Non. Appris quoi ? Je nâai rien appris.â Le P.O.U.M. a Ă©tĂ© supprimĂ©. Ils ont saisi tous les locaux. En fait tout le mond
prison. Et lâon dit quâils commencent dĂ©jĂ Ă fusiller. »CâĂ©tait donc cela ! Il nous fallait trouver quelque endroit oĂč pouvoir parler. Tou
ands cafĂ©s sur les Ramblas Ă©taient infestĂ©s de police, mais nous dĂ©couvrĂźmes unanquille dans une rue Ă©cartĂ©e. Ma femme me raconta ce qui sâĂ©tait passĂ© pendant sence.
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Le 15 juin la police avait brusquement arrĂȘtĂ© AndrĂ©s Nin dans son bureau, ĂȘme soir avait fait irruption Ă lâhĂŽtel FalcĂłn et arrĂȘtĂ© toutes les personnes quouvaient, des miliciens en permission pour la plupart. Lâendroit avait Ă©tĂ© sur-le-chnverti en prison qui, en un rien de temps, regorgea de prisonniers de toutes sortendemain le P.O.U.M. avait Ă©tĂ© dĂ©clarĂ© organisation illĂ©gale et tous ses burerairies, sanatoriums, centres de Secours rouge, etc., avaient Ă©tĂ© saisis. Et pendan
mps la police arrĂȘtait tous ceux sur qui elle pouvait mettre la main qui Ă©taient comme ayant quelque chose Ă voir avec le P.O.U.M. En lâespace dâun jour ou deux
arante membres du comitĂ© exĂ©cutif furent tous, ou presque tous, incarcĂ©rĂ©s. Peut-se cachant, un ou deux dâentre eux avaient-ils rĂ©ussi Ă Ă©chapper ; mais la police adprocĂ©dĂ© (quâon ne sâest pas fait faute de largement employer des deux cĂŽtĂ©s dans
erre) qui consistait, quand un homme disparaissait, Ă arrĂȘter sa femme comme otay avait aucun moyen de savoir combien de personnes avaient Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©es. Ma feait entendu dire quâil y en avait eu environ quatre cents rien quâĂ Barcelone. Jâai densĂ© que dĂ©jĂ Ă cette date il devait y en avoir eu davantage. Et lâon avait opĂ©rrestations les plus imprĂ©vues. Dans certains cas la police avait mĂȘme Ă©tĂ© jusquâĂ
s hĂŽpitaux des miliciens blessĂ©s.Tout cela Ă©tait de nature Ă jeter dans une profonde consternation. Ă quoi diablemait-il ? Je pouvais comprendre, de leur part, la suppression du P.O.U.M., mais Ă
a leur servait-il dâarrĂȘter les gens ? Sans motif, autant quâil Ă©tait possible de sâen rempte. Manifestement la suppression du P.O.U.M. Ă©tait avec effet rĂ©troactif : le P.O.ant Ă prĂ©sent illĂ©gal, câĂ©tait enfreindre la loi que dây avoir auparavant appartmme dâhabitude, les personnes arrĂȘtĂ©es le furent sans avoir Ă©tĂ© inculpĂ©es.
empĂȘchait pas les journaux communistes de Valence de lancer de façon flamboye histoire de « complot fasciste » monstre, avec communication par radio
nnemi, documents signĂ©s Ă lâencre sympathique, etc. Je parlerai de cela plus en dĂ©tfin de ce livre{7 }. Fait significatif, ce nâest que dans les journaux de Valence quâon lparaĂźtre. Je ne crois pas me tromper en disant quâil nây eut pas un mot Ă ce sujet, opos de la suppression du P.O.U.M., dans aucun journal, communiste, anarchistpublicain, de Barcelone. Ce nâest pas par un journal espagnol que nous apprĂźmture exacte des accusations portĂ©es contre les leaders du P.O.U.M., mais pa
urnaux anglais qui parvinrent Ă Barcelone un ou deux jours plus tard. Ce que nouuvions pas savoir Ă ce moment-lĂ , câest que le gouvernement nâĂ©tait pas responsab
ccusation de trahison et dâespionnage, et que des membres du gouvernement allr la suite la repousser. Nous ne savions vaguement quâune seule chose, câest qcusait les leaders du P.O.U.M., et nous tous aussi probablement, dâĂȘtre Ă la soldescistes. Et dĂ©jĂ partout le bruit courait que des gens Ă©taient secrĂštement fusillĂ©s prisons. Ă ce sujet, il y a eu pas mal dâexagĂ©rations, mais il est certain quâil y a eutenus fusillĂ©s, et il ne fait guĂšre de doute que ce fut le cas pour Nin. AprĂšsrestation, Nin fut transfĂ©rĂ© Ă Valence et de lĂ Ă Madrid, et dĂšs le 21 juin on srcelone, de façon vague dâabord, quâil avait Ă©tĂ© fusillĂ©. Plus tard la nouvelle se prĂ©n avait Ă©tĂ© fusillĂ© en prison par la police secrĂšte, et son corps jetĂ© dans la rue. On ttte histoire de diffĂ©rentes sources, en particulier de Federica Montseny, ex-membr
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uvernement. Depuis lors, on nâa jamais jusquâici entendu dire que Nin fĂ»t viuand, un peu plus tard, les dĂ©lĂ©guĂ©s de plusieurs pays posĂšrent des questions Ă jet aux membres du gouvernement, ceux-ci tergiversĂšrent et tout ce quâils consentdire, ce fut que Nin avait disparu et quâils ignoraient absolument oĂč il Ă©tait. Certurnaux publiĂšrent un rĂ©cit selon lequel Nin se serait enfui en territoire fasciste. Aueuve ne fut fournie Ă lâappui, et Irujo, ministre de la Justice, dĂ©clara par la suitegence de presse « Espagne » avait falsifiĂ© son communiquĂ© officiel {8 }. Dâailleurs, en improbable quâon eĂ»t laissĂ© sâĂ©chapper un prisonnier politique de lâimportanc
n. Ă moins quâun jour dans lâavenir on ne le retrouve vivant, je crois que la supposi sâimpose est quâil a Ă©tĂ© assassinĂ© en prison.
Et ça nâen finissait pas, ces arrestations, cela dura des mois, tant et si bien qumbre des dĂ©tenus politiques, sans compter les fascistes, finit par sâĂ©lever Ă des mil
ne chose Ă remarquer, ce fut lâautonomie des policiers de bas rang. Un grand nomarrestations furent reconnues pour illĂ©gales, mais diverses personnes dont la relaxaait Ă©tĂ© ordonnĂ©e par le chef de la police furent derechef arrĂȘtĂ©es Ă la porte de la prlevĂ©es et incarcĂ©rĂ©es dans des « prisons clandestines ». Un cas typique, ce fut celu
urt Landau et de sa femme. Ils furent arrĂȘtĂ©s vers le 17 juin et immĂ©diatement Ladisparut ». Cinq mois plus tard sa femme Ă©tait toujours en prison, nâavait pas Ă©tĂ© jnâavait aucune nouvelle de son mari. Elle annonça son intention de faire la grĂšve m ; le ministre de la Justice lui fit alors savoir que son mari Ă©tait mort. Peu de terĂšs elle fut relĂąchĂ©e, mais pour ĂȘtre presque immĂ©diatement rĂ©-arrĂȘtĂ©e et Ă nouĂ©e en prison. Ce qui vaut aussi dâĂȘtre remarquĂ©, câest lâindiffĂ©rence absolue dont feuve les policiers, au dĂ©but en tout cas, quant aux rĂ©percussions de tous ordresurs actes pouvaient avoir sur la guerre. Ils nâhĂ©sitĂšrent pas Ă arrĂȘter, sans en amandĂ© auparavant lâautorisation, des officiers occupant des postes milit
portants. Vers la fin juin, JosĂ© Rovira, le gĂ©nĂ©ral commandant la 29e division, fut aelque part prĂšs du front par une Ă©quipe de policiers envoyĂ©s de Barcelone. Ses homvoyĂšrent une dĂ©lĂ©gation au ministĂšre de la Guerre pour protester. Et lâon dĂ©couvrile ministĂšre de la Guerre, ni Ortega, le chef de la police, nâavaient mĂȘme Ă©tĂ© infolâarrestation de Rovira. De toute lâaffaire, le dĂ©tail que je peux le moins digĂ©rer, âil ne soit peut-ĂȘtre pas de grande importance, câest le fait quâon ait laissĂ© les troupe
ont dans lâignorance totale de ce qui Ă©tait en train de se passer. Comme vous lâavemoi ni personne au front nâavions rien su de la suppression du P.O.U.M. Tou
artiers gĂ©nĂ©raux des milices du P.O.U.M., ses centres de Secours rouge, nctionnaient comme Ă lâordinaire, et le 20 juin encore et jusquâĂ LĂ©rida, Ă omĂštres Ă peine de Barcelone, personne ne savait rien des Ă©vĂ©nements. Les jourBarcelone nâen soufflĂšrent pas mot (ceux de Valence qui lançaient les hist
espionnage ne parvenaient pas sur le front dâAragon), et il est hors de doute que sirĂȘta tous les miliciens en permission Ă Barcelone, ce fut pour les empĂȘcher de remoligne porteurs de ces nouvelles. Le dĂ©tachement avec lequel jâĂ©tais retournĂ© au frojuin doit avoir Ă©tĂ© le dernier Ă partir. Je ne suis pas encore arrivĂ© Ă compre
mment la chose put ĂȘtre tenue secrĂšte, car enfin les camions de ravitaillement, etres, faisaient toujours la navette ; mais il nây a pas de doute, elle fut bel et bien t
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crĂšte, et, comme je lâai depuis appris de la bouche de beaucoup dâautres, les hommeont nâentendirent parler de rien encore pendant plusieurs jours. La raison de toutt suffisamment claire. Lâoffensive sur Huesca venait dâĂȘtre dĂ©clenchĂ©e, les miliceO.U.M. formaient encore une unitĂ© Ă part, et lâon craignit probablement que sliciens venaient Ă apprendre ce qui Ă©tait arrivĂ©, ils ne refusassent de combattre. ritĂ©, il ne se passa rien de tel quand la nouvelle fut connue. Dans lâintervalle il doir eu un grand nombre dâhommes qui furent tuĂ©s sans avoir jamais su queurnaux, Ă lâarriĂšre, les traitaient de fascistes. Câest lĂ le genre de choses quâon a du m
rdonner. Je sais bien que câĂ©tait une tactique courante de laisser ignorer aux troupeauvaises nouvelles, et peut-ĂȘtre quâen gĂ©nĂ©ral on a en cela raison. Mais câĂ©tait tout aose dâenvoyer des hommes au combat, et de ne pas mĂȘme leur dire que derriĂšres on Ă©tait en train de supprimer leur parti, dâaccuser leurs chefs de trahison et de prison leurs parents et leurs amis.
Ma femme commença de me raconter ce qui Ă©tait arrivĂ© Ă nos diffĂ©rents artains parmi les Anglais et les autres Ă©trangers avaient pu franchir la frontilliams et Stafford Cottman nâavaient pas Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©s lors de la descente de police
sanatorium MaurĂn et se tenaient cachĂ©s quelque part dans la ville. CâĂ©tait le cas aJohn McNair, qui Ă©tait allĂ© en France et Ă©tait revenu en Espagne aprĂšs la misĂ©galitĂ© du P.O.U.M. â acte tĂ©mĂ©raire, mais il ne sâĂ©tait pas senti le cĆur de rester Ă lndis que ses camarades Ă©taient en danger. Mais pour tous les autres amis, cntienne : « Ils ont « eu » un tel et un tel », « ils ont « eu » un tel et un tel »raissaient avoir « eu » presque tout le monde. Je pensai tomber de mon hauprenant quâils avaient Ă©galement « eu » Georges Kopp.
« Comment ! Kopp ? Je le croyais Ă Valence ? »Jâappris que Kopp Ă©tait revenu Ă Barcelone ; il Ă©tait porteur dâune lettre du mini
la Guerre au colonel commandant les opĂ©rations du GĂ©nie sur le front est. Il saen sĂ»r, que le P.O.U.M. avait Ă©tĂ© supprimĂ©, mais probablement ne lui Ă©tait-il pas vedĂ©e que la police pĂ»t ĂȘtre assez absurde pour lâarrĂȘter alors quâil Ă©tait en route poont avec une mission militaire urgente Ă remplir. Il Ă©tait venu faire un tour Ă lâhntinental pour reprendre ses valises ; ma femme Ă©tait Ă ce moment-lĂ sortie, et les lâhĂŽtel sâĂ©taient arrangĂ©s pour le retenir sous un prĂ©texte quelconque tandis q
pelaient la police. Jâavoue que jâeus un accĂšs de colĂšre lorsque jâappris lâarrestatiopp. Il Ă©tait mon ami personnel, jâavais servi sous ses ordres pendant des moi
Ă©tais trouvĂ© sous le feu de lâennemi avec lui et je connaissais son histoire. CâĂ©tamme qui avait tout sacrifiĂ© â famille, nationalitĂ©, situation â tout simplement nir en Espagne combattre contre le fascisme. En quittant la Belgique sans autorisen sâengageant dans une armĂ©e Ă©trangĂšre alors quâil Ă©tait dans lâarmĂ©e belge de rĂ©s
auparavant, en ayant aidĂ© Ă fabriquer illĂ©galement des munitions pouuvernement espagnol, il sâĂ©tait amassĂ© bon nombre dâannĂ©es dâemprisonneme
mais il revenait dans son propre pays. Depuis octobre 1936 il Ă©tait sur le front oĂčmple milicien, il Ă©tait devenu chef de bataillon, avait pris part Ă je ne sais combiembats et avait Ă©tĂ© blessĂ© une fois. Pendant les troubles de mai, comme jâen avairsonnellement tĂ©moin, il avait empĂȘchĂ© un combat local et avait ainsi probablem
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uvĂ© une dizaine ou une vingtaine de vies. Et en retour, tout ce quâils savaient ftait de le jeter en prison ! Câest perdre son temps que de se mettre en colĂšre, ma
alignitĂ© stupide de choses de ce genre met la patience Ă rude Ă©preuve.Ils nâavaient pas « eu » ma femme. Elle Ă©tait pourtant restĂ©e Ă lâhĂŽtel Contine
ais la police nâavait pas fait mine de lâarrĂȘter. Il sautait aux yeux quâon voulait la rvir dâappeau. Mais, deux nuits auparavant, au petit jour, six policiers en civil avt irruption dans notre chambre dâhĂŽtel et avaient perquisitionnĂ©. Ils avaient
squâau moindre morceau de papier en notre possession, Ă lâexception, heureusemen
s passeports et de notre carnet de chĂšques. Ils avaient emportĂ© mes journaux intius nos livres, toutes les coupures de presse accumulĂ©es depuis des mois (je meuvent demandĂ© de quelle utilitĂ© elles avaient bien pu leur ĂȘtre), tous mes souvenierre et toutes nos lettres. (Entre parenthĂšses, ils ont emportĂ© quantitĂ© de lettresvais reçues de mes lecteurs. Je nâavais pas rĂ©pondu Ă certaines dâentre elles et jeidemment pas les adresses. Si quelquâun, qui mâa Ă©crit au sujet de mon dernier liva pas reçu de rĂ©ponse, vient Ă lire ces derniĂšres lignes, quâil veuille bien y trouvercuses.) Jâappris par la suite que la police sâĂ©tait Ă©galement emparĂ©e des affaires
vais laissĂ©es au sanatorium MaurĂn, allant jusquâĂ emporter un paquet de linge ut-ĂȘtre sâest-elle imaginĂ© que des messages pouvaient y avoir Ă©tĂ© Ă©crits Ă lâempathique.
Il Ă©tait Ă©vident quâil y aurait moins de danger pour ma femme Ă rester Ă lâhĂŽtel,moins momentanĂ©ment. Si elle tentait de disparaĂźtre, ils seraient immĂ©diatement
ousses. Quant à moi, il me fallait me cacher sans plus tarder. Cela me révoltait. En ces innombrables arrestations, je ne parvenais pas à croire que je courais un da
elconque. Tout cela me semblait par trop absurde. CâĂ©tait ce mĂȘme refus de prendrieux des attaques ineptes qui avait conduit Kopp en prison. Je ne cessais de rĂ©pĂ©
Mais pour quelle raison trouverait-on nĂ©cessaire de mâarrĂȘter ? Quâavais-je fait ? Ă©tais mĂȘme pas membre du P.O.U.M. Oui, jâavais portĂ© les armes durant les troublai, mais comme lâavaient fait, disons, quarante ou cinquante mille autres. En ovais rudement besoin dâune bonne nuit de sommeil. Jâavais envie de courir le risqretourner Ă lâhĂŽtel. Mais ma femme ne voulut pas en entendre parler. Patiemmentexpliqua la situation. Peu importait ce que jâavais ou nâavais pas fait. Il ne sâagissai
une rafle de criminels ; il sâagissait dâun rĂ©gime de terreur. Je nâĂ©tais coupable dâate prĂ©cis, mais jâĂ©tais coupable de « trotskysme ». Le fait dâavoir servi dans les m
P.O.U.M. Ă©tait Ă lui seul amplement suffisant Ă me mener en prison. Il Ă©tait vainse cramponner Ă la notion anglaise quâon est en sĂ©curitĂ© aussi longtemps qspecte la loi. Dans la pratique la loi Ă©tait ce qui plaisait Ă la police quâelle fĂ»t. La sose Ă faire Ă©tait de me terrer et de ne pas laisser savoir que jâavais eu quelque rape ce fĂ»t avec le P.O.U.M. Nous fĂźmes la revue des papiers que contenaient mes poa femme me fit dĂ©chirer ma carte de milicien, qui portait « P.O.U.M. » Ă©crit en ractĂšres, ainsi que la photo dâun groupe de miliciens avec un drapeau du P.O.U.rriĂšre-plan ; câĂ©taient des choses de ce genre qui vous faisaient arrĂȘter Ă prĂ©senlait cependant que je garde mes papiers de dĂ©mobilisation. MĂȘme eux Ă©taiennger, car ils portaient le sceau de la 29e division et les policiers sauraient probablem
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e la 29e division, câĂ©tait le P.O.U.M. ; mais sans eux je risquais dâĂȘtre arrĂȘtĂ© comserteur.
Ce Ă quoi il nous fallait penser, câĂ©tait Ă sortir dâEspagne. Cela nâavait pas le mmun de rester ici avec la certitude dâĂȘtre tĂŽt ou tard emprisonnĂ©. Ă vrai dire, ux, nous eussions bien aimĂ© rester, simplement pour voir ce qui allait arriver. Mangeai que les prisons espagnoles devaient ĂȘtre de vraies pouilleries (en fait, elles Ă©tcore pires que je ne les imaginais) et quâune fois en prison on ne savait jamais qen sortirait, et que jâĂ©tais en mauvaise santĂ©, sans parler de ma douleur au bras. I
nvenu que nous nous rencontrerions le lendemain au consulat britannique, oĂč devssi aller Cottman et McNair. Cela nous prendrait probablement deux jours pour ettre en rĂšgle nos passeports. Avant de quitter lâEspagne, on avait Ă les faire timbreois endroits diffĂ©rents : par le chef de la police, par le consul français et par les autotalanes du service de lâimmigration. Le dangereux, câĂ©tait le chef de la poturellement. Mais peut-ĂȘtre le consul britannique pourrait-il sâarranger de mani
avoir pas Ă rĂ©vĂ©ler mes rapports avec le P.O.U.M. Ăvidemment il devait bien existerte des Ă©trangers suspects de « trotskysme », et trĂšs probablement nos nom
ouvaient-ils, mais avec de la chance nous parviendrions peut-ĂȘtre Ă la frontiĂšre avate. Car on pouvait compter sur pas mal de dĂ©sordre et de mañana. Heureusemtait lâEspagne, et non lâAllemagne. La police secrĂšte espagnole participait de lâesprGestapo, mais ne possĂ©dait guĂšre sa compĂ©tence.
Nous nous sĂ©parĂąmes donc. Ma femme retourna Ă lâhĂŽtel et moi je me mis Ă ns lâobscuritĂ©, en quĂȘte dâun endroit oĂč pouvoir dormir. JâĂ©tais, il mâen souvient, deauvaise humeur et excĂ©dĂ©. Jâavais tellement dĂ©sirĂ© une nuit dans un lit ! Je nâalle part oĂč aller, ne connaissais aucune maison oĂč pouvoir chercher refuge
O.U.M. nâavait pratiquement pas dâorganisation clandestine. Ses leaders sâĂ©t
rement toujours rendus compte que, trĂšs probablement, le parti serait supprimĂ© ; mais ils ne sâĂ©taient attendus Ă une chasse Ă la sorciĂšre de cette sorte et aussi Ă©ten
sây Ă©taient, en vĂ©ritĂ©, si peu attendus que jusquâau jour mĂȘme de la suppressioO.U.M. ils avaient poursuivi les travaux dâamĂ©nagement des locaux du P.O.U.M. (etres choses, ils faisaient construire un cinĂ©ma dans lâimmeuble du comitĂ© exĂ©cutifait Ă©tĂ© auparavant une banque). Aussi le P.O.U.M. Ă©tait-il dĂ©pourvu des lieux de renus et des cachettes que tout parti rĂ©volutionnaire devrait, cela va de soi, possĂ©der. it combien de gens dont la maison avait reçu la visite de la police dormirent dans la
tte nuit-lĂ . Je venais de passer cinq jours en voyages fatigants et pendant lesqvais dormi dans des endroits impossibles, mon bras me faisait diablement souffrilĂ maintenant que ces imbĂ©ciles me donnaient la chasse et quâil allait encore farmir par terre ! Ă cela, Ă peu prĂšs, se bornaient mes pensĂ©es. Je ne me livrais Ă aus rĂ©flexions politiques tout indiquĂ©es. Ăa ne mâarrive jamais pendant que les chnt en train de se passer. Il semble en aller toujours de mĂȘme chaque fois que je prrt Ă la guerre ou Ă la politique : je nâai jamais conscience de rien dâautre qu
nconfort physique et de mon dĂ©sir profond que prenne fin au plus vite toute audite absurditĂ©. AprĂšs coup il mâest possible de saisir la signification des Ă©vĂ©nemais tant quâils sont en train de se produire, je ne fais que souhaiter dâĂȘtre en deho
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ait ignoble, peut-ĂȘtre.Jâavais marchĂ© longtemps et me trouvai non loin de lâhĂŽpital gĂ©nĂ©ral. Je cherc
coin oĂč pouvoir mâĂ©tendre et oĂč la police ne viendrait pas fourrer son nez poumander mes papiers. Jâessayai dâun abri contre raids aĂ©riens, mais, creusĂ© de
aĂźche date, il ruisselait dâhumiditĂ©. Je pĂ©nĂ©trai alors dans les ruines dâune Ă©gliseait Ă©tĂ© incendiĂ©e Ă la rĂ©volution et dont il ne restait que les murs. Ce nâĂ©tait plus qurcasse : quatre murs sans toit entourant un amas de dĂ©combres. En tĂątonnant dami-obscuritĂ©, je finis par trouver une sorte de cavitĂ© dans laquelle je pus me cou
es blocs de maçonnerie brisĂ©s, ce nâest guĂšre moelleux comme couche. ureusement câĂ©tait une nuit chaude et je parvins Ă dormir quelques heures.
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XII
Le pis de tout, lorsquâon est recherchĂ© par la police dans une ville comme Barcest que tout ouvre si tard. Quand on dort Ă la belle Ă©toile, on sâĂ©veille toujours Ă lâaaucun des cafĂ©s de Barcelone nâouvre guĂšre avant neuf heures. Jâavais des heuendre avant de pouvoir boire une tasse de cafĂ© et me faire raser. Quâil me p
range, chez le coiffeur, de voir encore au mur lâaffiche anarchiste exposant les raila prohibition des pourboires ! « La RĂ©volution a rompu nos chaĂźnes », disait lâaffavais envie de dire aux coiffeurs quâils retrouveraient bientĂŽt leurs chaĂźnes sâilsenaient garde.
Je me remis à errer dans le centre de la ville. Au-dessus des immeubles du P.O. drapeaux rouges avaient été arrachés et à leur place flottaient des drap
publicains, et des groupes de gardes civils tiraient leur flemme dans lâencadrement rte. Au centre du Secours rouge, au coin de la place de Catalogne, les policiers sâĂ©t
musés à briser la plupart des vitres. On avait vidé de leurs livres les librairie
O.U.M., et collĂ© sur un panneau dâaffichage, un peu plus bas sur les Ramblas, un dearge contre le P.O.U.M. â celui qui reprĂ©sentait un visage fasciste se dissimurriĂšre un masque. Tout Ă fait au bas des Ramblas, prĂšs du quai, je tombai su
ngulier spectacle : une rangĂ©e de miliciens, encore en loques boueuses du front, vaucrus de fatigue, sur les chaises placĂ©es lĂ pour les cireurs de bottes. Je savais quaient â je reconnus lâun dâeux, en fait. CâĂ©taient des miliciens du P.O.U.M. qui Ă©trivĂ©s la veille du front, pour trouver le parti supprimĂ©, et qui avaient dĂ» passer lans les rues parce que la police avait fait des descentes dans leurs maisons. Tout mil
P.O.U.M. qui revint Ă Barcelone Ă cette date-lĂ eut le choix entre immĂ©diatemecher ou ĂȘtre immĂ©diatement jetĂ© en prison : rĂ©ception qui manque dâagrĂ©ment aois ou quatre mois de front !
CâĂ©tait une situation bizarre que celle oĂč nous nous trouvions ! La nuit, nous Ă©ts fugitifs traquĂ©s, mais dans la journĂ©e nous pouvions mener une vie presque normute maison connue pour donner asile Ă des adhĂ©rents du P.O.U.M. Ă©tait â ou ens risquait dâĂȘtre â placĂ©e sous surveillance, et il Ă©tait impossible dâaller dans un hĂŽtns une pension de famille, parce quâil avait Ă©tĂ© ordonnĂ© par dĂ©cret Ă tout tenan
hĂŽtel dâinformer immĂ©diatement la police de lâarrivĂ©e de tout nouveau cl
utrement dit, il fallait passer la nuit dehors. Dans la journĂ©e, en revanche, dans unelâimportance de Barcelone, on Ă©tait relativement en sĂ©curitĂ©. Les rues fourmillaien
rdes civils, de gardes dâassaut, de carabiniers et de policiers ordinaires, sans parleeu sait combien dâespions en civil ; mais ils ne pouvaient arrĂȘter tous les passants,us prĂ©sentiez une apparence normale, vous pouviez espĂ©rer passer inaperçu. Mlait Ă©viter de rĂŽder aux environs des locaux du P.O.U.M. et dâaller dans les cafĂ©s ostaurants dont les garçons vous connaissaient de vue. Je passai beaucoup de tempur-lĂ et le suivant, Ă prendre un bain dans lâun des Ă©tablissements de bains. L
Ă©tait venue que câĂ©tait lĂ un excellent moyen de passer le temps tout en me tenant vue. Malheureusement quantitĂ© de gens eurent la mĂȘme idĂ©e et quelques jours
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rd â jâavais alors dĂ©jĂ quittĂ© Barcelone â la police fit une descente dans lâun de ces bblics et arrĂȘta un grand nombre de « trotskystes » dans lâhabit du pĂšre Adam.
Ă mi-chemin, en remontant les Ramblas, je me trouvai nez Ă nez avec lâunessĂ©s du sanatorium MaurĂn. Nous Ă©changeĂąmes lâespĂšce de clin dâĆil impercepe les gens Ă©changeaient Ă cette Ă©poque et, sans avoir lâair de rien, nous rangeĂąmes pour nous retrouver un peu plus loin dans un cafĂ©. Il avait Ă©chaprrestation lors de la descente de police dans le MaurĂn, mais il Ă©tait maintenant, co autres, Ă la rue. Et en bras de chemise â il avait dĂ» fuir sans sa veste â et sans arg
me raconta quâun garde civil avait arrachĂ© du mur le grand portrait peint de Maurvait dĂ©truit Ă coups de pied. MaurĂn (lâun des fondateurs du P.O.U.M.) Ă©tait prisons fascistes et Ă cette Ă©poque-lĂ on croyait quâil avait Ă©tĂ© fusillĂ© par eux.
Je rencontrai ma femme au consulat britannique Ă dix heures. McNair et CottrivĂšrent peu aprĂšs. La premiĂšre chose quâils mâapprirent, ce fut que Bob Smillie ort. Il Ă©tait mort en prison Ă Valence â de quoi, personne ne le savait exactemenait Ă©tĂ© immĂ©diatement enterrĂ© et le dĂ©lĂ©guĂ© local de lâI.L.P. nâavait pas obutorisation de voir son corps.
Naturellement je supposai aussitĂŽt quâil avait Ă©tĂ© fusillĂ©. Câest ce que tout le mut Ă lâĂ©poque, mais jâai depuis pensĂ© que jâĂ©tais peut-ĂȘtre dans lâerreur. Un peu rd, on donna officiellement pour cause de sa mort une crise dâappendicite et prĂźmes par la suite, de la bouche dâun autre prisonnier qui avait Ă©tĂ© relĂąchĂ©, quâil
en vrai que Smillie avait Ă©tĂ© malade en prison. Peut-ĂȘtre donc que lâhistoirppendicite Ă©tait rĂ©elle. Le refus opposĂ© Ă Murray de lui laisser voir sa dĂ©pouille pore dĂ» Ă une pure malveillance. Mais jâai tout de mĂȘme ceci Ă dire : Bob Smillie nâe vingt-deux ans, et il Ă©tait physiquement lâun des hommes les plus vigoureux que
mais vus. De tous les Anglais et Espagnols que jâai connus, il avait Ă©tĂ© le seul, je cro
sser trois mois dans les tranchĂ©es sans un jour de maladie. Quand ils sont aussi rtants que cela, les gens, en gĂ©nĂ©ral, ne meurent pas de lâappendicite, sâils nvenablement soignĂ©s. Mais quand on a vu ce quâĂ©taient les prisons espagnoles isons de fortune que lâon utilisait pour les prisonniers politiques â on se rend coms chances quâavait un malade dây recevoir des soins appropriĂ©s Ă son Ă©tat. Ces prisne peut plus justement les comparer quâaux cachots des chĂąteaux du Moyen Ăge
ngleterre, il faudrait remonter au XVIIIe siĂšcle pour retrouver rien de comparablens Ă©taient parquĂ©s dans de petites piĂšces oĂč ils nâavaient quâĂ peine la plac
tendre, et souvent on les enfermait dans des caves ou dans dâautres lieux obscurs.sâagissait pas lĂ dâune mesure provisoire â on peut citer des cas de dĂ©tenus qui, duatre ou cinq mois, ne virent Ă peu prĂšs pas la lumiĂšre du jour. Et la nourriture
fecte et insuffisante : deux assiettes de soupe et deux morceaux de pain par juelques mois plus tard, cependant, il paraĂźt y avoir eu quelque amĂ©lioration danurriture.) Je nâexagĂšre pas ; demandez Ă nâimporte quel suspect politique ayan
mprisonnĂ© en Espagne. Les descriptions qui mâont Ă©tĂ© faites des prisons espagnoviennent dâun grand nombre de sources sĂ©parĂ©es, et sâaccordent toutes trop bien ees pour pouvoir ĂȘtre mises en doute ; du reste, jâai moi-mĂȘme pu jeter quelques c
Ćil dans une prison espagnole. Et un autre ami anglais, qui fut empris
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Ă©rieurement, Ă©crit que les souvenirs de son propre emprisonnement « rendent leSmillie plus facile Ă comprendre ». La mort de Smillie nâest pas une chose qu
isse aisĂ©ment pardonner. VoilĂ un jeune homme bien douĂ© et courageux, qui a rensa carriĂšre Ă lâuniversitĂ© de Glasgow pour venir combattre le fascisme et qui, con ai Ă©tĂ© moi-mĂȘme tĂ©moin, a rempli tout son devoir au front avec une bonne voloncourage sans dĂ©faillance ; et tout ce quâils ont su faire de lui, ce fut de le jeter en p
de le laisser mourir comme une bĂȘte abandonnĂ©e. Je sais quâau milieu dâune grannglante guerre il ne sied pas de faire trop dâhistoire au sujet dâune mort individu
ne bombe dâavion qui tombe dans une rue frĂ©quentĂ©e cause plus de souffrancesute une suite de persĂ©cutions politiques. Mais ce qui rĂ©volte dans une mort cole-lĂ , câest son extrĂȘme manque dâĂ -propos. Ătre tuĂ© dans la bataille â trĂšs bien, coi chacun sâattend ; mais ĂȘtre jetĂ© en prison, non pas mĂȘme pour quelque faginaire, mais uniquement par lâeffet dâune malveillance stupide et aveugle, et yssĂ© Ă mourir dans lâabandon, câest tout autre chose ! Je ne vois pas comment des ce genre â car le cas de Smillie nâest pas exceptionnel â peuvent rapprocher si peusoit de la victoire.
Nous allĂąmes, ma femme et moi, faire visite Ă Kopp ce mĂȘme aprĂšs-midi. Il rmis de venir voir les dĂ©tenus qui nâĂ©taient pas gardĂ©s incomunicados ; mais il nidemment pas prudent dây aller plus dâune ou deux fois. La police guettait les gentraient et sortaient et, si vous alliez voir trop souvent les prisonniers, vous vous clamme ami des « trotskystes » et gĂ©nĂ©ralement finissiez vous-mĂȘme en prison. CrivĂ© dĂ©jĂ Ă bon nombre de gens.
Kopp nâĂ©tait pas incomunicado et nous obtĂźnmes sans difficultĂ© lâautorisation ir. Au moment oĂč, venant de franchir les portes dâacier, on nous faisait pĂ©nĂ©trer daison, un milicien espagnol, que jâavais connu au front, en sortait entre deux ga
vils. Nos regards se croisĂšrent : une fois de plus lâimperceptible clin dâĆil. Et la premrsonne que nous vĂźmes Ă lâintĂ©rieur fut un milicien amĂ©ricain qui, peu de jparavant, Ă©tait parti pour rentrer chez lui. Ses papiers Ă©taient en rĂšgle, mais on neait pas moins arrĂȘtĂ© Ă la frontiĂšre, probablement parce quâil portait encore des culvelours Ă cĂŽtes, ce qui permettait de lâidentifier comme milicien. Nous passĂąmes l
tĂ© de lâautre comme si nous avions Ă©tĂ© complĂštement Ă©trangers lâun Ă lâautre. Ce felque chose dâaffreux. Je lâavais connu pendant des mois, jâavais partagĂ© une cagna, il avait aidĂ© Ă me porter quand on mâavait ramenĂ© blessĂ© du front ; mais on ne po
n faire dâautre. Les gardiens en uniforme bleu Ă©taient partout Ă Ă©pier. Il nous eĂ»al de reconnaĂźtre trop de monde.Cette prĂ©tendue prison Ă©tait en rĂ©alitĂ© le rez-de-chaussĂ©e dâun magasin. Dans
Ăšces, mesurant chacune vingt pieds carrĂ©s environ, serrĂ©es les unes contre les aue centaine de personnes Ă©taient parquĂ©es. Lâaspect de ce lieu Ă©tait tel quâon lâeĂ»
ut droit sorti dâune illustration du Recueil des causes cĂ©lĂšbres au XVIII e siĂšcle, avetĂ© et son odeur de renfermĂ©, son enchevĂȘtrement de corps humains, son absenc
eubles (il nây avait que le sol de pierre nue, un banc et quelques couvertures en loqson jour fuligineux, car les tabliers de tĂŽle ondulĂ©e des vitrines avaient Ă©tĂ© baissĂ©s murs encrassĂ©s des mots dâordre rĂ©volutionnaires, Visca P.O.U.M. ! Viv
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voluciĂłn !, etc., avaient Ă©tĂ© griffonnĂ©s. Cet endroit servait de dĂ©pĂŽt pour les prisonlitiques depuis des mois. Le tapage des voix Ă©tait assourdissant. CâĂ©tait lâheure dite et lâendroit Ă©tait Ă tel point bondĂ© de gens quâon avait du mal Ă sây mouvoir. Pre
us ces gens appartenaient aux couches les plus pauvres de la classe ouvriĂšre. On vs femmes dĂ©baller de misĂ©rables paquets de provisions quâelles avaient apportĂ©s
urs hommes emprisonnĂ©s. Il y avait plusieurs blessĂ©s du sanatorium MaurĂn parmisonniers. Deux dâentre eux Ă©taient amputĂ©s dâune jambe. Lâun des deux avai
mené à la prison sans sa béquille et était obligé de sautiller sur un pied. Il y avait a
jeune garçon de douze ans au plus ; ils arrĂȘtaient donc mĂȘme les enfants, il faoire. Il rĂ©gnait en cet endroit la puanteur Ă©cĆurante de tout lieu oĂč une foule de geouvent entassĂ©s sans amĂ©nagement sanitaire appropriĂ©.
Kopp, en jouant des coudes, se fraya un passage jusquâĂ nous. Il avait le mage poupin au teint frais que dâhabitude, et dans ce lieu infect il avait su garder prn uniforme et avait mĂȘme trouvĂ© moyen de se raser. Il y avait parmi les prisonniertre officier en uniforme de lâarmĂ©e populaire. Lui et Kopp se firent le salut mili
rsquâils se croisĂšrent cependant quâils luttaient pour se frayer un passage. Ce gest
ne sais quoi de pathĂ©tique. Le moral de Kopp semblait excellent. « Eh bien ! je supâon va tous nous fusiller », dit-il gaiement. Au mot « fusiller », je me stĂ©rieurement frĂ©mir. Il nây avait pas longtemps quâune balle sâĂ©tait ouvert un chns mon propre corps et la sensation en Ă©tait encore trop fraĂźche dans mon souveni
a rien dâagrĂ©able dâimaginer cela arrivant Ă quelquâun que lâon connaĂźt bien. oment-lĂ jâĂ©tais persuadĂ© que tous les principaux membres du P.O.U.M., et Kopp x, seraient fusillĂ©s. La premiĂšre nouvelle de la mort de Nin venait juste de filtrus savions que lâon accusait le P.O.U.M. de trahison et dâespionnage. Tout semnoncer un procĂšs monstre montĂ© de toutes piĂšces, suivi du massacre des ca
trotskystes ». Câest une chose terrible de voir votre ami en prison et de vous spuissant Ă le secourir. Car on ne pouvait rien faire ; mĂȘme pas faire appel aux autolges, puisquâen venant ici Kopp avait enfreint la loi de son propre pays. Ce fumme qui dut parler presque tout le temps ; car avec mon filet de voix aiguĂ« je nâarrs Ă me faire entendre au milieu de tout ce vacarme. Kopp nous parla des amis tait faits parmi les autres prisonniers et parmi les gardiens ; certains de ceux-ci Ă©tabraves garçons, mais il y en avait dâautres qui insultaient et frappaient les prisonn plus craintifs ; il nous parla aussi de la nourriture qui nâĂ©tait que de la « lavasse
chons ». Heureusement nous avions pensĂ© Ă apporter un paquet de victuailles et as cigarettes. Puis Kopp se mit Ă nous parler des papiers quâon lui avait enlevĂ©oment de son arrestation, et au nombre desquels se trouvait la lettre du ministĂšre uerre adressĂ©e au colonel commandant les opĂ©rations du GĂ©nie dans lâarmĂ©e de lâEslice sâen Ă©tait emparĂ©e et avait refusĂ© de la rendre, et lâon disait quâelle traĂźnĂ©sent dans le bureau du chef de la police. Cela pourrait changer les choses du touut si on la retrouvait.
Je compris aussitĂŽt de quelle importance cela pourrait ĂȘtre. Une lettre officieltte nature, contenant la recommandation du ministre de la Guerre et du gĂ©nĂ©ral Pablirait le loyalisme de Kopp. Mais le difficile Ă©tait de prouver lâexistence de la lettr
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e venait Ă ĂȘtre ouverte dans le bureau du chef de la police, on pouvait ĂȘtre sĂ»relque indicateur de la police la dĂ©truirait. Il nây avait quâune seule personneurrait peut-ĂȘtre obtenir quâon la rende, et câĂ©tait lâofficier Ă qui elle Ă©tait adressĂ©e. Kait dĂ©jĂ pensĂ© Ă cela et avait Ă©crit une lettre quâil me demanda de sortir clandestinemla prison et de mettre Ă la poste. Mais il Ă©tait Ă©videmment plus rapide et plus sĂ»r dpersonne. Laissant ma femme avec Kopp, je me hĂątai de sortir et, aprĂšs
ngtemps cherché un taxi, en trouvai enfin un. Je savais que tout était une questionutes. Il était alors cinq heures et demie environ, le colonel devait probablem
itter son bureau Ă six heures, et dâici au lendemain la lettre pouvait aller Dieu sâ ĂȘtre dĂ©chirĂ©e peut-ĂȘtre, ou Ă©garĂ©e dans le fouillis des documents qui deva
ntasser au fur et Ă mesure quâon arrĂȘtait suspect aprĂšs suspect. Le bureau du colonouvait dans le service du ministĂšre de la Guerre, prĂšs du quai. Comme je gravissaiste les marches, le garde dâassaut de faction Ă la porte me barra le passage de sa loĂŻonnette et dit : « Papiers ! » Je lui montrai mon certificat de dĂ©mobilisasiblement il ne savait pas lire et me laissa passer, impressionnĂ© par le vague mys « papiers ». Ă lâintĂ©rieur, câĂ©tait, autour dâune cour centrale, une immense gar
mpliquĂ©e avec des centaines de bureaux par Ă©tage ; et, comme on Ă©tait en Esparsonne ne savait le moins du monde oĂč pouvait bien se trouver le bureau querchais. Je ne cessais de rĂ©pĂ©ter : El coronel... jefe de ingenieros. EjĂ©rcito de Este ns souriaient et haussaient avec grĂące les Ă©paules. Chacun de ceux qui avaientinion mâenvoya dans une direction diffĂ©rente : en haut de cet escalier-lĂ , en baui-ci, le long dâinterminables couloirs qui soudain finissaient en culs-de-sac. E
mps passait. Jâavais la trĂšs singuliĂšre impression de me dĂ©battre en plein cauchemtte course prĂ©cipitĂ©e en montant et en descendant tous ces escaliers, les allĂ©enues de ces gens mystĂ©rieux, ces coups dâĆil jetĂ©s par des portes ouvertes dans
reaux chaotiques, avec des paperasses Ă©talĂ©es partout et des machines Ă Ă©quetant ; et cette fuite du temps et tout cela qui dĂ©cidait peut-ĂȘtre dâune vie...
Pourtant jâarrivai Ă temps et, Ă ma lĂ©gĂšre surprise, nâeus pas de peine Ă obtenirdience. Je ne vis pas le colonel ; mais son aide de camp ou secrĂ©taire, un petit offet, en Ă©lĂ©gant uniforme, aux grands yeux qui louchaient, vint sâentretenir avecns lâantichambre. Je me mis Ă lui dĂ©biter mon histoire. JâĂ©tais venu au nom de pĂ©rieur, le chef de bataillon Georges Kopp, qui, en route pour le front avec une misgente, avait Ă©tĂ© arrĂȘtĂ© par erreur. La lettre adressĂ©e au colonel... Ă©tait de na
nfidentielle et devait ĂȘtre retrouvĂ©e sans dĂ©lai. Jâavais servi sous les ordres de Kndant des mois, câĂ©tait un officier au caractĂšre le plus noble, son arrestation ne poure que le fait dâune erreur, la police avait dĂ» le confondre avec quelquâun dâautre, etvenais sans cesse sur lâurgence de la mission de Kopp, sentant bien que câĂ©tait le prt. Mais tout cela devait paraĂźtre une bien bizarre histoire, dans mon mauvais espai, aux moments dĂ©cisifs, retombait dans le français. Qui pis est, ma voix mâesque immĂ©diatement lĂąchĂ©, et ce nâĂ©tait quâau prix du plus violent effort que jâarrĂ©mettre une sorte de coassement. Et jâavais tout le temps peur quâelle me mamplĂštement et que le petit officier se lasse dâessayer de me comprendre. Je meuvent demandĂ© ce quâil avait bien pu sâimaginer au sujet de ma voix â sâil mâavai
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e, ou simplement affligĂ© dâune conscience pas tranquille.NĂ©anmoins il mâĂ©couta patiemment, hocha la tĂȘte un grand nombre de fois et d
n assentiment avec circonspection Ă ce que je lui dis. Oui, il semblait quâil devait y erreur. Mais certainement, câĂ©tait une chose Ă Ă©claircir. Mañana... Je protestai.
s mañana ! CâĂ©tait urgent. Kopp aurait dĂ©jĂ dĂ» ĂȘtre sur le front. De nouveau lâofrut ĂȘtre du mĂȘme avis que moi. Puis vint la question que je redoutais :
« Ce commandant Kopp, dans quelle unitĂ© servait-il ? »Le mot terrible avait Ă ĂȘtre dit :
« Dans les milices du P.O.U.M.â Du P.O.U.M. ! »Je voudrais pouvoir vous donner une idĂ©e du ton scandalisĂ© et alarmĂ© de sa vo
us faut vous rappeler ce que le P.O.U.M. passait pour ĂȘtre Ă cette Ă©poque-lĂ . On Ă©taus fort de la terreur panique de lâespionnage ; et probablement tous les publicains crurent-ils, lâespace dâun jour ou deux, que le P.O.U.M. Ă©tait une vganisation dâespionnage Ă la solde de lâAllemagne. Avoir Ă faire une telle rĂ©ponse ficier de lâarmĂ©e populaire, câĂ©tait comme dâentrer au Cercle de la cavalerie tout de
rÚs la panique causée par « La Lettre rouge »{9 }
en sây prĂ©sentant comme commun ses yeux noirs il me dĂ©visageait de biais. Il y eut un long silence, puis il dit lentem« Et vous dites que vous Ă©tiez avec lui au front. Alors vous serviez, vous aussi,
milices du P.O.U.M. ?â Oui. »Il fit demi-tour et sâengouffra dans le bureau du colonel. Jâentendis les Ă©clats d
nversation animĂ©e. « Tout est fichu », pensai-je. Nous ne pourrions jamais ravotre de Kopp. Et en outre jâavais Ă©tĂ© amenĂ© Ă avouer que jâĂ©tais moi-mĂȘme danO.U.M., et sans aucun doute ils allaient tĂ©lĂ©phoner Ă la police et me faire arr
mplement pour mettre un « trotskyste » de plus dans le sac. Lâinstant dâapendant, lâofficier rĂ©apparut, mettant son kĂ©pi, et dâun geste ferme me fit signe ivre. Nous nous rendions au bureau du chef de la police. CâĂ©tait loin, Ă vingt minued. Le petit officier marchait avec raideur devant moi, dâun pas de militaire. NĂ©changeĂąmes pas un seul mot durant tout le trajet. Lorsque nous arrivĂąmes au bu
chef de la police, une foule de gredins du plus redoutable aspect, visiblemdicateurs de police, mouchards et espions de tout acabit, fainĂ©antaient Ă lâextĂ©rieurords de la porte. Le petit officier entra. Il y eut une longue conversation enflammĂ©e
tendait sâĂ©lever des voix furieuses, on pouvait se reprĂ©senter les gestes violentsussements dâĂ©paules, les coups assenĂ©s sur la table. Manifestement la police refusandre la lettre. Ă la fin, cependant, lâofficier ressortit, tout rouge, mais tenant une lveloppe officielle. CâĂ©tait la lettre de Kopp. Nous avions remportĂ© une petite victoi, en lâoccurrence, nâapporta pas le moindre changement au sort de Kopp. La lettrlivrĂ©e en temps utile, mais les supĂ©rieurs militaires de Kopp ne purent rien pour leprison.
Lâofficier me promit que la lettre serait dĂ©livrĂ©e Ă son destinataire. Mais, et Kos-je. Ne pouvions-nous obtenir quâil fĂ»t relĂąchĂ© ? Il haussa les Ă©paules. Ăa, câĂ©taittre histoire. Ils ne savaient pas pourquoi lâon avait arrĂȘtĂ© Kopp. Il put seulemen
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omettre que serait faite lâenquĂȘte qui sâimposait. Il nây avait plus rien Ă dire, il mps de nous quitter. Nous nous saluĂąmes dâune lĂ©gĂšre inclination. Et alors il se pe chose inattendue et Ă©mouvante. Le petit officier hĂ©sita un instant, puis il fit unrs moi et me serra la main.
Je ne sais pas si je suis parvenu Ă faire sentir combien profondĂ©ment ce gestucha. Cela paraĂźt peu de chose, mais ce nâĂ©tait pas peu de chose. Il vous faut prĂ©senter les sentiments dont on Ă©tait animĂ© Ă cette date â lâhorrible atmosphĂšrspicion et de haine, les mensonges, les mille bruits qui couraient partout, les plac
ant sur les panneaux Ă affiches que moi et mes semblables nous Ă©tions des espscistes. Et il faut aussi se rappeler que nous nous trouvions alors Ă lâextĂ©rieur du bu
chef de police, devant cette sale bande de mouchards et dâagents provocateurs, etacun dâeux pouvait savoir que jâĂ©tais « recherchĂ© » par la police. Ce geste, câĂ©tait coserrer publiquement la main dâun Allemand pendant la Grande Guerre. Je supposequelque maniĂšre il Ă©tait arrivĂ© Ă la conclusion que je nâĂ©tais pas un espion fascist
alitĂ© ; nâempĂȘche que cette poignĂ©e de main, ce fut beau de sa part.Jâai racontĂ© ce petit fait, si futile quâil puisse paraĂźtre, parce quâil est en que
rte caractĂ©ristique de lâEspagne â de ces Ă©clats de grandeur dâĂąme que vous pouvezs Espagnols, dans les pires circonstances. Jâai de lâEspagne les plus pĂ©nibles souveais jâai bien peu de mauvais souvenirs des Espagnols. Seulement deux fois jeuviens dâavoir Ă©tĂ© sĂ©rieusement en colĂšre contre un Espagnol, et encore, quand jporte en arriĂšre, je crois que dans les deux cas jâavais tort moi-mĂȘme. Ils ont nteste une gĂ©nĂ©rositĂ©, une noblesse dâune qualitĂ© qui nâest pas exactement ducle. Câest ce qui permet dâespĂ©rer quâen Espagne, mĂȘme le fascisme pourrait pree forme relativement moins autoritaire et plus supportable. Peu dâEspagnols possĂš odieuses capacitĂ©s et lâesprit de suite quâexige un Ătat totalitaire moderne. On ava
e curieuse petite illustration de ce fait, quelques nuits auparavant, lorsque la pait venue perquisitionner dans la chambre de ma femme. En fait, cette perquisait Ă©tĂ© une chose trĂšs intĂ©ressante Ă observer, et jâeusse aimĂ© y assister, mais il est ute prĂ©fĂ©rable que je nâaie pas Ă©tĂ© prĂ©sent, car je nâaurais peut-ĂȘtre pas pu demelme.
La police mena la perquisition dans le style, aisément reconnaissable, du Guéde la Gestapo. Au petit jour, on donna de grands coups dans la porte, et six hom
trÚrent et immédiatement se postÚrent en différents points de la chambre, selon
structions prĂ©alablement donnĂ©es. Puis ils fouillĂšrent de fond en comble les Ăšces (il y avait une salle de bains attenante) avec une inimaginable conscience. Ils fsonner les murs, soulevĂšrent les paillassons, examinĂšrent le plancher, palpĂšrendeaux, explorĂšrent sous la baignoire et le radiateur ; vidĂšrent tous les tiroirs elises, tĂątĂšrent et regardĂšrent Ă contre-jour tous les vĂȘtements. Ils confisquĂšrent toupiers, y compris ceux du contenu de la corbeille Ă papier, et tous nos livres par-dessarchĂ©. Un dĂ©lire de dĂ©fiance les prit quand ils dĂ©couvrirent que nous possĂ©dionemplaire de la traduction française du Mein Kampf de Hitler. Si çâavait Ă©tĂ© le seul ouvĂ© chez nous, câen Ă©tait fait de nous. Car il tombe sous le sens que quelquâun qein Kampf doit ĂȘtre un fasciste. Mais aussitĂŽt aprĂšs ils tombĂšrent sur un exemplair
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brochure de Staline (Comment liquider les trotskystes et autres fourbes), ce qussura quelque peu. Dans un tiroir il y avait un certain nombre de paquets de papgarettes. Ils dĂ©firent chaque paquet et lâexaminĂšrent feuille par feuille, au cas queessages sây trouvassent Ă©crits. Pour venir Ă bout de leur tĂąche, ils sâaffairĂšrent ndant prĂšs de deux heures. Or, de tout ce temps, pas une seule fois ils ne fouillĂšre
Ma femme resta couchĂ©e tout le temps ; il Ă©tait Ă©vident quâil aurait pu y avoirmi-douzaine de fusils mitrailleurs cachĂ©s sous le matelas, sans parler de toutebliothĂšque dâĂ©crits trotskystes sous lâoreiller. Et cependant ces dĂ©tectives ne firen
e seule fois le geste de toucher au lit, ni mĂȘme ne regardĂšrent jamais dessous. Jis croire que ce soit lĂ une pratique courante de la routine du GuĂ©pĂ©ou. Il fauppeler que la police Ă©tait alors presque entiĂšrement sous le contrĂŽle des communis hommes Ă©taient probablement eux-mĂȘmes membres du parti communiste. Maaient aussi Espagnols, et faire sortir une femme de son lit, câĂ©tait un peu trop mander. Dâun tacite accord ils renoncĂšrent Ă cette partie-lĂ du travail, le rendant in tout entier.
Cette nuit-lĂ , McNair, Cottman et moi, nous dormĂźmes au milieu des hautes he
bordure dâun lotissement abandonnĂ©. CâĂ©tait une nuit froide pour la saison et aucuus ne put beaucoup dormir. Je me souviens des longues et mornes heures Ă traĂźnant de pouvoir prendre une tasse de cafĂ©. Pour la premiĂšre fois depuis que jâĂ©trcelone, jâallai jeter un coup dâĆil sur la cathĂ©drale ; câest une cathĂ©drale modernn des plus hideux monuments du monde. Elle a quatre flĂšches crĂ©nelĂ©es quiactement la forme de bouteilles de vin du Rhin. Ă la diffĂ©rence de la plupart des aulises de Barcelone, elle nâavait pas Ă©tĂ© endommagĂ©e pendant la rĂ©volution ; elle Ă© Ă©pargnĂ©e Ă cause de sa « valeur artistique », disaient les gens. Je trouve quarchistes ont fait preuve de bien mauvais goĂ»t en ne la faisant pas sauter alors quâi
aient lâoccasion, et en se contentant de suspendre entre ses flĂšches une banniĂšre rnoire. Cet aprĂšs-midi-lĂ , nous allĂąmes, ma femme et moi, voir Kopp pour la derns. Nous ne pouvions rien faire pour lui, absolument rien, quâaller lui dire au revosser de lâargent Ă des amis espagnols qui lui porteraient des provisions et des cigareais quelque temps plus tard, il fut mis incomunicado et il devint impossible de lui rvenir mĂȘme des vivres. Ce soir-lĂ , en descendant les Ramblas, nous passĂąmes decafĂ© Moka que les gardes civils occupaient toujours en nombre. CĂ©dant Ă pulsion, jâentrai et parlai Ă deux dâentre eux qui Ă©taient accoudĂ©s au comptoir, le
ssĂ© en bandouliĂšre sur lâĂ©paule. Je leur demandai sâils savaient quels Ă©taient ceuurs camarades qui sâĂ©taient trouvĂ©s lĂ en faction au moment des troubles de mai. Ivaient pas, et, avec le vague habituel des Espagnols, ne savaient mĂȘme pas ce nvenait de faire pour les retrouver. Je leur dis que mon ami Georges Kopp Ă©taison et passerait peut-ĂȘtre en jugement pour quelque chose qui avait trait aux troumai ; que les hommes qui Ă©taient postĂ©s dans le cafĂ© Ă cette Ă©poque savaient quâil
rĂȘtĂ© le combat et sauvĂ© quelques-unes de leurs vies ; quâil serait de leur devoir dâallmoigner. Lâun des deux hommes Ă qui je parlais Ă©tait un lourdaud maussadearrĂȘtait pas de secouer la tĂȘte parce quâavec le bruit de la circulation il avait du mtendre ma voix. Mais lâautre Ă©tait diffĂ©rent. Il rĂ©pondit quâil avait entendu certain
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s camarades parler du geste dâinitiative de Kopp ; Kopp Ă©tait buen chico (un chic tais dĂ©jĂ mĂȘme Ă ce moment-lĂ je compris que tout cela Ă©tait vain. Si Kopp venait japasser en jugement, ce serait, comme dans tous les procĂšs de ce genre, avecmoignages truquĂ©s. Sâil a Ă©tĂ© fusillĂ© (et câest le plus probable, jâen ai peur), ce seran Ă©pitaphe : le buen chico de ce pauvre garde civil qui faisait partie dâun sale systais avait gardĂ© en lui suffisamment dâun ĂȘtre humain pour savoir reconnaĂźtre une tion quand il en voyait une.
CâĂ©tait une existence extraordinaire, insensĂ©e, que nous menions. La nuit,
ons des criminels, et dans la journĂ©e de riches touristes anglais â ou du moins sions semblant de lâĂȘtre. MĂȘme aprĂšs avoir passĂ© la nuit Ă la belle Ă©toile,
erveilleux comme il suffit de se faire raser, de prendre un bain et de faire donneup de cirage Ă ses chaussures pour avoir tout de suite une autre allure. Le prudeĂ©sent, câĂ©tait de paraĂźtre le plus bourgeois possible. Nous frĂ©quentions les bartiers oĂč lâon ne nous connaissait pas de vue, nous allions dans des restaurants cnous nous montrions trĂšs anglais avec les garçons. Pour la premiĂšre fois de ma v
e surpris Ă Ă©crire des choses sur les murs. Les couloirs de plusieurs restaurants
rtent des Visca P.O.U.M. ! Ă©crits en aussi grandes lettres quâil me fut possiblndant tout ce temps-lĂ , tout en me tenant cachĂ© avec technique, je nâarrivaisaiment Ă me sentir en danger. Tout cela me paraissait trop absurde. JândĂ©racinable conviction anglaise quâ« ils » ne peuvent pas vous arrĂȘter Ă moinsus nâayez enfreint la loi. Câest la plus dangereuse des convictions Ă avoir en tempgrom politique ! On avait lancĂ© un mandat dâarrĂȘt contre McNair et il y avait de graances pour que le reste dâentre nous fĂ»t aussi sur la liste. Arrestations, descentelice, perquisitions continuaient sans arrĂȘt ; en fait, tous ceux que nous connaissioxception de ceux qui Ă©taient encore au front, Ă©taient Ă cette heure en prison. La p
ait mĂȘme jusquâĂ monter Ă bord des bateaux français qui, parfois, recueillaientfugiĂ©s, et Ă sây saisir de gens suspectĂ©s de « trotskysme ».
GrĂące Ă lâobligeance du consul de Grande-Bretagne â quelle semaine extĂ©nuanit avoir eue ! â nous Ă©tions parvenus Ă avoir en rĂšgle nos passeports. Le plus tĂŽt nrtirions, le mieux cela vaudrait. Il y avait un train qui devait partir pour Port-Bou Ă ures et demie du soir ; on pouvait donc normalement sâattendre Ă ce quâil parte it heures et demie. Il fut convenu que ma femme commanderait Ă lâavance un taxi,
rait ses valises, rĂ©glerait sa note et quitterait lâhĂŽtel au tout dernier moment. Car s
nnait lâĂ©veil aux gens de lâhĂŽtel, ils feraient sĂ»rement chercher la police. Je me rengare vers sept heures, pour mâapercevoir que le train Ă©tait dĂ©jĂ parti â il Ă©tait papt heures moins dix. Le mĂ©canicien avait changĂ© dâavis, comme dâhabiteureusement nous pĂ»mes prĂ©venir ma femme Ă temps. Il y avait un autre trainne heure, le lendemain matin. McNair, Cottman et moi, nous allĂąmes dĂźner dantit restaurant prĂšs de la gare et, en posant prudemment des questions, couvrĂźmes que le patron du restaurant Ă©tait un membre de la C.N.T. et dansspositions amicales Ă notre Ă©gard. Il nous loua une chambre Ă trois lits et ouavertir la police. CâĂ©tait la premiĂšre fois depuis cinq nuits quâil mâĂ©tait possible dvĂȘtir pour dormir.
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Le lendemain matin ma femme rĂ©ussit Ă se glisser hors de lâhĂŽtel. Le train pec Ă peu prĂšs une heure de retard. Jâoccupai ce temps Ă Ă©crire une longue lettrnistre de la Guerre exposant le cas de Kopp, disant quâil Ă©tait hors de doute quâil
Ă© arrĂȘtĂ© par erreur, quâon avait un urgent besoin de lui au front, que dâinnombrarsonnes pouvaient affirmer sous serment quâil ne sâĂ©tait rendu coupable dâauute, etc. Je me demande si quelquâun a jamais lu cette lettre, Ă©crite sur des feurachĂ©es Ă mon carnet de notes, dâune Ă©criture vacillante (mes doigts Ă©taient encorrtie paralysĂ©s) et dans un espagnol encore plus vacillant. En tout cas, ni cette lett
n dâautre nâeut dâeffet. Ă la date oĂč jâĂ©cris ceci, six mois aprĂšs ces Ă©vĂ©nements, Kil nâa pas Ă©tĂ© fusillĂ©) est toujours en prison, sans avoir ni passĂ© en jugement nculpĂ©. Au dĂ©but nous reçûmes de lui deux ou trois lettres que des prisonniers relĂąaient passĂ©es clandestinement et mises Ă la poste en France. Elles racontaient toutĂȘme histoire : emprisonnement dans dâinfects cachots obscurs, nourriture mauvaisuffisante, Ă©tat sĂ©rieux de maladie dĂ» aux conditions dâemprisonnement et refuins mĂ©dicaux. Jâai eu confirmation de tout cela par diffĂ©rentes autres sources, pa
nglais et des Français. Plus récemment Kopp a disparu dans une de ces « pri
andestines » avec lesquelles il est impossible dâavoir aucune sorte de communican cas est celui de vingtaines ou de centaines dâĂ©trangers et de qui sait combielliers dâEspagnols.
Enfin la frontiĂšre fut franchie sans incident. Notre train avait des premiĂšre claswagon-restaurant, le premier que je voyais en Espagne. Jusque dans ces der
mps les trains de Catalogne nâavaient eu quâune seule classe. Deux dĂ©tectives vinre un tour dans le train pour prendre le nom des Ă©trangers, mais, quand ils nous vns le wagon-restaurant, ils parurent convaincus que nous Ă©tions des gens respectaĂ©tait Ă©trange comme tout avait changĂ© ! Il y avait de cela seulement six mois, Ă lâĂ©p
les anarchistes Ă©taient encore au pouvoir, câĂ©tait dâavoir lâair dâun prolĂ©taire qui ndait respectable. Durant le trajet de Perpignan Ă CerbĂšre, un voyageur de commançais mâavait dit sur un ton solennel : « Vous ne devez pas entrer en Espagne mme cela. Enlevez votre col et votre cravate. Ils vous les arracheront Ă BarceloneagĂ©rait, mais enfin cela montrait quelle idĂ©e on se faisait de la Catalogne. Et,
ontiĂšre, les gardes anarchistes avaient fait faire demi-tour Ă un Français Ă©lĂ©gammtu et Ă sa femme, pour lâunique raison, je crois, quâils avaient lâair trop bourgeoĂ©sent câĂ©tait le contraire : avoir lâair bourgeois Ă©tait lâunique salut. Au bureau
sseports on regarda si nos noms ne se trouvaient pas sur la liste des suspects, Ăące Ă lâincapacitĂ© professionnelle de la police, ils nây Ă©taient pas, pas mĂȘme celucNair. On nous fouilla des pieds Ă la tĂȘte, mais nous nâavions sur nous rienmpromettant, Ă lâexception de mes papiers de dĂ©mobilisation, et les carabiniersus fouillĂšrent ne savaient pas que la 29e division, câĂ©tait le P.O.U.M. Ainsi donc ssĂąmes entre les mailles du filet, et aprĂšs juste six mois dâintervalle je foulai Ă nousol français. Les seuls souvenirs dâEspagne qui me restaient Ă©taient une outre en bouc et une de ces toutes petites lampes en fer dans lesquelles les paysans arago
Ă»lent de lâhuile dâolive â lampes qui ont exactement la forme des lampes en terre nt se servaient les Romains il y a deux mille ans â que jâavais ramassĂ©e dans que
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asure en ruine et qui, je ne sais comment, sâĂ©tait logĂ©e dans mes bagages.En fin de compte il apparut que nous Ă©tions partis juste Ă temps. Le tout pre
urnal que nous vĂźmes annonçait lâarrestation pour espionnage de McNair. Les autopagnoles sâĂ©taient un peu trop pressĂ©es de lâannoncer. Heureusement qurotskysme » nâest pas un cas qui justifie lâextradition.
Je me demande quel est le premier acte quâil sied dâaccomplir quand, arrivant ys en guerre, on met pied sur une terre en paix. Moi, je me prĂ©cipitai dans un bureabac et achetai autant de cigares et de cigarettes que mes poches en purent contenir.
us allĂąmes au buffet boire une tasse de thĂ©, le premier thĂ© avec du lait frais bu deen des mois. Il me fallut plusieurs jours avant de mâhabituer Ă lâidĂ©e quâon poheter des cigarettes chaque fois quâon en avait envie. Je mâattendais toujours un pouver le bureau de tabac fermĂ© et, Ă la devanture, la rĂ©barbative pancarte : Nobaco.
McNair et Cottman continuaient sur Paris. Ma femme et moi nous quittĂąmain Ă Banyuls, la premiĂšre station sur la ligne, sentant le besoin dâun repos. Noumes pas trĂšs bien reçus Ă Banyuls quand on sut que nous venions de Barcelone.
antitĂ©s de fois je me trouvai entraĂźnĂ© au mĂȘme Ă©change de propos : « Vous vEspagne ? De quel cĂŽtĂ© combattiez-vous ? Du cĂŽtĂ© du gouvernement ? Oh ! » â et froid marquĂ©. La petite ville semblait fermement pro-Franco, sans doute Ă cause
pagnols fascistes qui Ă©taient venus sây rĂ©fugier. Le garçon du cafĂ© que je frĂ©queait Espagnol et franquiste, aussi me jetait-il des regards de mĂ©pris en me servant Ă©ritif. Il en allait tout autrement Ă Perpignan qui en tenait obstinĂ©ment pourtisans du gouvernement et oĂč les diverses factions cabalaient les unes contrtres presque autant quâĂ Barcelone. Il y avait un cafĂ© oĂč le mot « P.O.U.M. » ocurait aussitĂŽt des amis français et les sourires du garçon.
Nous restĂąmes, je crois, trois jours Ă Banyuls. Trois jours Ă©trangement tourmeans cette calme ville de pĂȘcheurs, loin des bombes, des mitrailleuses, des queues limentation, de la propagande et de lâintrigue, nous aurions dĂ» nous sofondĂ©ment soulagĂ©s et heureux. Mais non, absolument pas. Le souvenir de tout ceus avions vu en Espagne revenait fondre sur nous, de façon beaucoup plus âauparavant. Sans trĂȘve nous pensions Ă lâEspagne, nous en parlions, nous en rĂȘv
epuis de nombreux mois nous nous Ă©tions promis, lorsque nous « serions sEspagne », dâaller quelque part au bord de la MĂ©diterranĂ©e nous reposer quelque te
peut-ĂȘtre pĂȘcher un peu ; mais voici quâĂ prĂ©sent que nous y Ă©tions, nous nâĂ©prouve dĂ©sappointement et ennui. Il ne faisait pas chaud, un vent persistant soufflait, laait maussade et agitĂ©e, et sur le pourtour du port une Ă©cume de cendres, de boutge et dâentrailles de poissons venait battre les pierres. Ăa peut paraĂźtre de la folie, dont nous avions lâun et lâautre envie, câĂ©tait de retourner en Espagne. Bien que
eĂ»t Ă©tĂ© dâaucune utilitĂ© pour personne et mĂȘme eĂ»t pu ĂȘtre trĂšs nuisible, oui, tous us regrettions de nâĂȘtre pas demeurĂ©s lĂ -bas pour y ĂȘtre emprisonnĂ©s avec les aucrains de nâavoir su vous donner quâune bien faible idĂ©e de tout ce que ces mois paEspagne reprĂ©sentent pour moi. Jâai racontĂ© quelques Ă©vĂ©nements extĂ©rieurs,
mment communiquer lâimpression quâils mâont laissĂ©e ! Tout pour moi est Ă©troitem
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ĂȘlĂ© Ă des visions, des odeurs, des sons, que les mots sont impuissants Ă rendre : lâos tranchĂ©es, les levers du jour sur des horizons immenses dans les montagne
aquement glacĂ© des balles, le rugissement et la lueur des bombes ; la pure et frmiĂšre des matins Ă Barcelone, et le bruit des bottes dans les cours de quartiercembre, au temps oĂč les gens croyaient encore Ă la rĂ©volution ; et les queues aux ps magasins dâalimentation, et les drapeaux rouge et noir, et les visages des milicpagnols ; surtout les visages des miliciens â dâhommes que jâai connus au front ent Ă prĂ©sent dispersĂ©s et Dieu sait oĂč, les uns tuĂ©s dans la bataille, dâautres mu
rtains en prison ; la plupart dâentre eux, je lâespĂšre, encore sains et saufs. Bonne cheux tous ! JâespĂšre quâils gagneront leur guerre et chasseront dâEspagne tourangers, les Allemands, les Russes et les Italiens. Cette guerre, Ă laquelle jâai prisrt si inefficace, mâa laissĂ© des souvenirs qui sont pour la plupart de mauvais souvecependant je ne puis souhaiter ne pas en avoir Ă©tĂ©. Quand on a eu un aperçu sastre tel que celui-ci â car, quelle quâen soit lâissue, cette guerre dâEspagne, de taniĂšre, se trouvera avoir Ă©tĂ© un Ă©pouvantable dĂ©sastre, sans mĂȘme parler du massdes souffrances physiques â, il nâen rĂ©sulte pas forcĂ©ment de la dĂ©sillusion e
nisme. Il est assez curieux que dans son ensemble cette expĂ©rience mâait laissĂ© uns seulement non diminuĂ©e, mais accrue, dans la dignitĂ© des ĂȘtres humains. Et jâese le rĂ©cit que jâen ai fait nâinduit pas trop en erreur. Je crois que devant un Ă©vĂ©nemmme celui-lĂ , personne nâest, ne peut ĂȘtre, absolument vĂ©ridique. Il est difarriver Ă une certitude Ă propos de quelque fait que ce soit, Ă moins dâen avoir Ă©tĂ©ĂȘme le tĂ©moin oculaire, et, consciemment ou inconsciemment, chacun Ă©crit en partu cas oĂč je ne vous lâaurais pas dĂ©jĂ dit prĂ©cĂ©demment au cours de ce livre, je vais re Ă prĂ©sent ceci : mĂ©fiez-vous de ma partialitĂ©, des erreurs sur les faits que jâammettre, et de la dĂ©formation quâentraĂźne forcĂ©ment le fait de nâavoir vu quâun
s Ă©vĂ©nements. Et mĂ©fiez-vous exactement des mĂȘmes choses en lisant nâimporte tre livre sur la guerre dâEspagne.
Parce que nous avions le sentiment que nous avions le devoir de faire queose, alors quâen rĂ©alitĂ© il nây avait rien que nous pussions faire, nous partĂźmenyuls plus tĂŽt que nous nâen avions dâabord eu lâintention. Ă chaque kilomĂštre quesait vers le nord, la France devenait plus verte et plus douce. Adieu les montagnes e
gnes ; nous allions revoir les prairies et les ormes. Lorsque jâavais traversĂ© Paris enndant en Espagne, il mâavait paru dĂ©chu et morne, tout diffĂ©rent du Paris que jâa
nnu huit ans auparavant, au temps oĂč la vie Ă©tait bon marchĂ© et oĂč lâon nâentendairler de Hitler. La moitiĂ© des cafĂ©s que jâavais frĂ©quentĂ©s Ă©taient fermĂ©s, fautentĂšle, et tout le monde Ă©tait obsĂ©dĂ© par le coĂ»t Ă©levĂ© de la vie et la crainte de la guaintenant, aprĂšs la pauvre Espagne, mĂȘme Paris paraissait gai et prospĂšrexposition battait son plein ; mais nous pĂ»mes Ă©viter de la visiter.
Et puis ce fut lâAngleterre â lâAngleterre du Sud, probablement le plus onctysage du monde. Il est difficile, quand vous faites ce trajet, particuliĂšrement qus vous remettez paisiblement du mal de mer, le derriĂšre flattĂ© par les coussinluche dâun compartiment de train-paquebot, de croire que rĂ©ellement il se pelque chose quelque part. Des tremblements de terre au Japon, des famines en C
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s révolutions au Mexique ? Ne vous en faites pas ; le lait sera sur le seuil demain mNew Statesman paraßtra vendredi. Les villes industrielles étaient loin, salissur
mĂ©e et de misĂšre rendue invisible par la courbure de la terre. Ici, câĂ©tait toujAngleterre que jâavais connue dans mon enfance : des talus de voie ferrĂ©e enfouis
xubĂ©rance des fleurs sauvages, des prairies profondes oĂč de grands et luisants cheoutent et mĂ©ditent, de lents cours dâeau frangĂ©s de saules, les vertes rondeursmes, les pieds-dâalouette dans les jardins des villas â et puis ce fut la morne immeisible des environs de Londres, les berges du fleuve boueux, les rues familiĂšres
fiches parlant de matches de cricket et de noces royales, les hommes en chapeau m pigeons de Trafalgar Square, les autobus rouges, les agents de police bleus â tout
ongĂ© dans le profond, profond, profond sommeil dâAngleterre, dont parfois jâai peurus ne nous rĂ©veillions quâarrachĂ©s Ă lui par le rugissement des bombes.
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APPENDICE I
LES DISSENSIONS ENTRE LES PARTIS POLITIQUES Au dĂ©but, je nâavais tenu aucun compte du cĂŽtĂ© politique de la guerre, et ce n
e vers le mois de fĂ©vrier quâil commença de sâimposer Ă mon attention. Si les horrla politique partisane ne vous intĂ©ressent pas, ne lisez pas ce qui suit, je vous en
est prĂ©cisĂ©ment pour vous permettre de ne pas le lire que je me suis efforcncentrer toute la substance politique de ce rĂ©cit dans ces deux Appendices. Mautre part, il serait tout Ă fait impossible dâĂ©crire sur la guerre dâEspagne en sâen teun point de vue exclusivement militaire. Car ce fut avant tout une guerre polit
ucun de ses Ă©pisodes, tout au moins pendant la premiĂšre annĂ©e, nâest intelligible elque connaissance de la lutte intestine des partis qui se poursuivait Ă lâarriĂšre du uvernemental.
Ă mon arrivĂ©e en Espagne, et durant un certain temps ensuite, non seulement intĂ©ressais pas Ă la situation politique, mais je lâignorais. Je savais quâon Ă©ta
erre, mais je ne me doutais pas de la nature de cette guerre. Si vous mâaviez demurquoi je mâĂ©tais engagĂ© dans les milices, je vous aurais rĂ©pondu : « Pour combatt
scisme », et si vous mâaviez demandĂ© pour quoi je me battais, je vous aurais rĂ©ponPour maintenir le respect de lâhumain ». Jâavais acceptĂ© la version News Chronw Statesman de la guerre : dĂ©fense de la civilisation contre lâexplosion de la
rieuse dâune armĂ©e de colonels Blimp{10} Ă la solde de Hitler. LâatmosphĂšrrcelone mâavait profondĂ©ment sĂ©duit, mais je nâavais fait aucun effort poumprendre. Quant au kalĂ©idoscope des partis politiques et des syndicats, avec
tidieuses appellations : P.S.U.C. â P.O.U.M. â F.A.I. â C.N.T. â U.G.T. â J.C.I. â J.SI.T., il mâexaspĂ©rait tout simplement. Lâon eĂ»t dit, Ă premiĂšre vue, que lâEspuffrait dâune Ă©pidĂ©mie dâinitiales. Je savais que je servais dans quelque choseppelait P.O.U.M. (si je mâĂ©tais engagĂ© dans les milices du P.O.U.M., câĂ©tait simplemrce que jâĂ©tais venu en Espagne avec un laissez-passer de lâI.L.P.), mais je ne me rens compte quâil y avait de graves diffĂ©rences entre les partis politiques. Quand, au Mcero, on me montra la position sur notre gauche en me disant : « Ceux-lĂ , ce soncialistes » (voulant dire par lĂ : des membres du P.S.U.C.), je rĂ©torquai, tout Ă©tonMais, ne sommes-nous pas tous des socialistes ? » Et je trouvais idiot que des gen
battaient pour lâexistence formassent plusieurs partis sĂ©parĂ©s. Pourquoi donc nenoncer une bonne fois pour toutes Ă ces niaiseries politiques et ne pas nous occclusivement de gagner la guerre ? telle Ă©tait de façon constante ma maniĂšre de Ă©tait, bien entendu, la maniĂšre de voir « antifasciste » rĂ©putĂ©e juste et propagĂ©e e par les journaux anglais, dans le but principalement dâempĂȘcher les gens de saiture rĂ©elle de la lutte. Mais en Espagne, tout particuliĂšrement en Catalogne, câĂ©taitaniĂšre de voir que personne ne pouvait indĂ©finiment conserver et ne conseracun, bien quâĂ contrecĆur, prenait parti tĂŽt ou tard. Car mĂȘme si quelquâun n
uciait pas des partis politiques et de leurs « lignes » contradictoires, il nâĂ©tait queident que son propre sort ne sây trouvait pas moins engagĂ©. En tant que milicie
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ait un soldat contre Franco, mais on Ă©tait aussi un pion dans la gigantesque lutte quraient deux thĂ©ories politiques. Quand, Ă flanc de montagne, jâallais Ă la recherchis Ă brĂ»ler en me demandant si rĂ©ellement câĂ©tait lĂ une guerre ou si le News Chrovait inventĂ©e ; quand jâĂ©vitais les mitrailleuses communistes pendant les Ă©meutercelone ; quand finalement je me suis enfui dâEspagne avec la police Ă mes trouss
ut cela mâest arrivĂ© trĂšs prĂ©cisĂ©ment de cette maniĂšre parce que je servais danlices du P.O.U.M. et non dans le P.S.U.C. Tant est grande la diffĂ©rence entre deuxnitiales !
Pour comprendre la dĂ©marcation des partis politiques du cĂŽtĂ© gouvernementut se rappeler de quelle maniĂšre la guerre avait commencĂ©. Au moment oĂč la lutclencha, le 18 juillet, il est probable que tout antifasciste en Europe sentimissement dâespoir. Car ici enfin, manifestement, une dĂ©mocratie affro
avement le fascisme ! Depuis des annĂ©es, les pays soi-disant dĂ©mocratiques avdĂ© devant le fascisme, Ă chaque pas. On avait permis aux Japonais de faire ce qulaient en Mandchourie. Hitler Ă©tait parvenu au pouvoir et sâĂ©tait mis Ă massacreversaires politiques de toutes nuances. Mussolini avait bombardĂ© les Abyssinie
nquante-trois nations (si je ne me trompe) sâĂ©taient contentĂ©es de faire un pieux taa cantonade. Mais voici que, lorsque Franco tentait de renverser un gouvernemodĂ©rĂ©ment de gauche, le peuple espagnol, contre toute attente, sâĂ©tait dressĂ© contrsemblait que ce fĂ»t â et câĂ©tait peut-ĂȘtre â le renversement de la marĂ©e.
Mais il y avait plusieurs points qui Ă©chappĂšrent Ă lâattention gĂ©nĂ©rale. En preu, Franco nâĂ©tait pas exactement comparable Ă Hitler ou Ă Mussolini. Sa rĂ©bellion e mutinerie militaire Ă©paulĂ©e par lâaristocratie et lâĂglise, et, Ă tout prendre, fubut surtout, une tentative non tant pour imposer le fascisme que pour restaurgime fĂ©odal â ce qui signifiait que Franco devait donc avoir contre lui non seuleme
asse ouvriĂšre, mais aussi diverses couches de la bourgeoisie libĂ©rale, celles-lĂ mĂȘi sont le soutien du fascisme quand il se propose sous une forme plus moderne. Et quelque chose de plus important encore : la classe ouvriĂšre espagnole ne rĂ©sista panco au nom de la « dĂ©mocratie » et du statu quo, comme il est concevable que norions en Angleterre ; sa rĂ©sistance sâaccompagna â on pourrait presque dire quâellte â dâune insurrection rĂ©volutionnaire caractĂ©risĂ©e. Les paysans saisirent la terrendicats saisirent beaucoup dâusines et la plus grande partie des moyens de transp
dĂ©truisit des Ă©glises et les prĂȘtres furent chassĂ©s et tuĂ©s. Le Daily Mail ,
plaudissements du clergé catholique, put représenter Franco comme un patlivrant son pays de hordes de « rouges » démoniaques.Pendant les tout premiers mois de la guerre, le véritable adversaire de Franco, c
t pas tant le gouvernement que les syndicats. DĂšs que la rĂ©bellion Ă©clata, les ouvbains organisĂ©s rĂ©pondirent par lâappel Ă la grĂšve gĂ©nĂ©rale, puis rĂ©clamĂšrent tinrent de haute lutte â les armes des arsenaux nationaux. Sâils nâavaientontanĂ©ment agi, et avec plus ou moins dâindĂ©pendance, on est en droit de pensermais Franco nâaurait rencontrĂ© de rĂ©sistance. Il ne peut Ă©videmment pas y avoirtitude Ă ce sujet. Mais il y a tout au moins lieu de le penser. Le gouvernement nân fait, ou si peu de chose, pour prĂ©venir la rĂ©bellion qui Ă©tait depuis longtemps prĂ©
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quand celle-ci Ă©clata, son attitude fut toute dâhĂ©sitation et de faiblesse, au pointspagne connut en un seul jour trois premiers ministres{ 11}. En outre, la seule mei pouvait sauver la situation dans lâimmĂ©diat, lâarmement des ouvriers, ne fut prisentrecĆur et sous la pression de lâimpĂ©rieuse volontĂ© populaire qui la demandands cris. Les armes furent distribuĂ©es, et dans les grandes villes de lâest de lâEsp fascistes furent vaincus, grĂące Ă lâeffort extraordinaire dĂ©ployĂ© principalement p
asse ouvriĂšre, aidĂ©e par certaines des forces armĂ©es (gardes dâassaut, etc.) demeuĂšles. CâĂ©tait lĂ le genre dâeffort que probablement seuls peuvent accomplir des
nvaincus quâils se battent pour quelque chose de mieux que le statu quo. Danvers centres de la rĂ©bellion, on pense que trois mille personnes moururent en unur dans les combats de rues. Hommes et femmes, armĂ©s seulement de rouleaunamite, franchirent, dans leur Ă©lan, les places Ă dĂ©couvert et prirent dâassauttiments de pierre occupĂ©s par des soldats exercĂ©s et armĂ©s de mitrailleuses. Les nidtrailleuses que les fascistes avaient placĂ©s en des points stratĂ©giques furent Ă©crasĂ©s taxis qui se ruĂšrent sur eux Ă cent Ă lâheure. MĂȘme si lâon nâavait pas du tout entrler de la saisie des terres par les paysans ni de lâĂ©tablissement de soviets locau
autres mesures rĂ©volutionnaires, il serait difficile de croire que les anarchistes ecialistes, qui Ă©taient lâĂąme et le nerf de la rĂ©sistance, accomplissaient de tels expur sauvegarder la dĂ©mocratie capitaliste qui ne reprĂ©sentait rien de plus Ă leurs yrtout Ă ceux des anarchistes, quâun appareil centralisĂ© dâescroquerie !
Cependant les ouvriers avaient en main des armes, et Ă ce stade des Ă©vĂ©nemengardĂšrent bien de les rendre. (On a calculĂ© que mĂȘme un an plus tard les anar
ndicalistes Ă©taient encore en possession de 30 000 fusils.) En beaucoup dâendroitysans saisirent les domaines des grands propriĂ©taires fonciers pro-fascistes. TouocĂ©dant Ă la collectivisation de lâindustrie et des transports, on tenta dâĂ©tabli
uvernement ouvrier rudimentaire au moyen de comités locaux, de patrououvriers remplaçant les anciennes forces de police pro-capitalistes, et de miouvriers levées sur la base des syndicats, etc. Naturellement le processus ne futiforme et il fut plus accentué en Catalogne que partout ailleurs. Il y eut des région institutions du gouvernement local demeurÚrent à peu prÚs sans changemen
autres oĂč elles coexistĂšrent avec les comitĂ©s rĂ©volutionnaires. Dans quelques locas communes anarchistes indĂ©pendantes sâorganisĂšrent, dont certaines restĂšrenercice pendant un an environ, jusquâau moment oĂč le gouvernement les supprima
violence. En Catalogne, pendant les tout premiers mois, la plus grande partiuvoir effectif Ă©tait aux mains des anarcho-syndicalistes qui contrĂŽlaient la plupardustries de base. Ce qui avait eu lieu en Espagne, en rĂ©alitĂ©, ce nâĂ©tait pas simpleme guerre civile, mais le commencement dâune rĂ©volution. Câest ce fait-lĂ que la prtifasciste Ă lâĂ©tranger avait pris tout spĂ©cialement Ă tĂąche de camoufler. Elle trĂ©ci lâĂ©vĂ©nement aux limites dâune lutte « fascisme contre dĂ©mocratie » et en ssimulĂ©, autant que possible, lâaspect rĂ©volutionnaire. En Angleterre, oĂč la pressus centralisĂ©e et le public plus facilement abusĂ© que partout ailleurs, deux versulement de la guerre dâEspagne avaient pu ĂȘtre publiĂ©es : la version de la droite squelle il sâagissait de patriotes chrĂ©tiens luttant contre des bolcheviks dĂ©gouttant
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ng ; et la version de la gauche selon laquelle il sâagissait de rĂ©publicains bien Ă©primant une rĂ©bellion militaire. La vĂ©ritĂ© intermĂ©diaire a Ă©tĂ© soigneusemssimulĂ©e.
Il y eut diverses raisons Ă cela. En premier lieu, la presse pro-fasciste rĂ©paneffroyables et mensongers rĂ©cits dâatrocitĂ©s, et des propagandistes bien intentiomaginĂšrent certainement rendre service au gouvernement espagnol en niantspagne fĂ»t devenue « rouge ». Mais la raison principale Ă©tait la suivante : Ă lâexceps petits groupements rĂ©volutionnaires qui existent dans tous les pays, le monde e
ait rĂ©solu Ă empĂȘcher la rĂ©volution en Espagne. Notamment le parti communiste, Russie soviĂ©tique derriĂšre lui, sâĂ©tait jetĂ© de tout son poids Ă lâencontre de la rĂ©voluĂ©tait la thĂšse communiste que, au stade actuel, faire la rĂ©volution serait fatal et qt Ă atteindre en Espagne ne devait pas ĂȘtre le pouvoir ouvrier, mais la dĂ©mocurgeoise. Il est Ă peine besoin de souligner pourquoi ce fut cette ligne-lĂ quâadalement lâopinion capitaliste « libĂ©rale ». Un Ă©norme capital Ă©tranger Ă©tait invespagne. La Compagnie des Transports de Barcelone, par exemple, reprĂ©sentaitllions de livres de capital anglais ; or les syndicats avaient saisi tous les transpor
talogne. Si la rĂ©volution se poursuivait, il nây aurait pas de dĂ©dommagement, ouu ; si la rĂ©publique capitaliste prĂ©valait, il nây aurait pas Ă craindre pourvestissements Ă©trangers. Et puisquâil fallait Ă©craser la rĂ©volution, cela simplifiandement les choses de prĂ©tendre quâil nây avait pas eu de rĂ©volution. De cette ma
pourrait dissimuler la signification vĂ©ritable de chaque incident ; prĂ©senter ansfert de pouvoir des syndicats au gouvernement central comme une Ă©tape nĂ©cesns la rĂ©organisation militaire. Il en rĂ©sulta une situation curieuse Ă lâextrĂȘme.
Espagne peu de gens saisirent quâil y avait une rĂ©volution ; en Espagne personne utait. MĂȘme les journaux du P.S.U.C., contrĂŽlĂ©es par les communistes et plus ou m
nus de faire une politique antirĂ©volutionnaire, parlaient de « notre glorivolution ». Et pendant ce temps la presse communiste dans les pays Ă©trangers clar tous les tons quâil nây avait nulle part signe de rĂ©volution, affirmait alternativeme la saisie des usines, lâorganisation des comitĂ©s ouvriers, etc., nâavaient pas eu lieâelles avaient eu lieu, mais Ă©taient « sans signification politique ». Selon le Dorker (du 6 aoĂ»t 1936), ceux qui disaient que le peuple espagnol se battait pouvolution sociale, ou pour quelque chose dâautre que la dĂ©mocratie bourgeoise, Ă©t
« franches canailles qui mentaient ». En revanche, Juan Lopez, membre
uvernement de Valence, dĂ©clara en fĂ©vrier 1937 que « le peuple espagnol versaitng, non pour la RĂ©publique dĂ©mocratique et sa constitution sur le papier, mais poe rĂ©volution ». Ainsi, au nombre des « franches canailles qui mentaient » se trouvanc des membres du gouvernement mĂȘme pour lequel nous recevions lâordre de ttre ! Certains des journaux Ă©trangers antifascistes sâabaissĂšrent mĂȘme jusqensonge pitoyable de prĂ©tendre quâon nâattaquait les Ă©glises que lorsquâelles serva
forteresses aux fascistes. En rĂ©alitĂ© les Ă©glises furent saccagĂ©es partout, commste, parce quâon avait parfaitement bien compris que lâĂglise espagnole Ă©tait ptĂ©grante dans la combine capitaliste. En lâespace de six mois en Espagne, je nâai vuux Ă©glises intactes, et jusquâaux environs de juillet 1937 aucune Ă©glise, Ă lâexceptio
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ux ou trois temples protestants de Madrid, ne reçut lâautorisation de rouvrir eĂ©brer les offices.
Mais, somme toute, il ne sâest agi que dâun commencement de rĂ©volution, deachevĂ©. MĂȘme au moment oĂč les ouvriers, en Catalogne Ă coup sĂ»r et peut-ĂȘtre aillrent le pouvoir de le faire, ils ne supprimĂšrent pas, ni ne changĂšrent complĂštemeuvernement. Ăvidemment ça leur Ă©tait difficile, Ă lâheure oĂč Franco Ă©tait en
enfoncer la porte, et tandis quâils avaient Ă leurs cĂŽtĂ©s des couches de la coyenne. Le pays Ă©tait dans un Ă©tat transitoire susceptible soit de se dĂ©velopper da
ns du socialisme, soit de redevenir une rĂ©publique capitaliste ordinaire. Les payaient en possession de la plus grande partie de la terre et il Ă©tait probable quâinserveraient, Ă moins que Franco ne triomphĂąt. Toutes les grandes industries avĂ© collectivisĂ©es et, en dĂ©finitive, ou elles le demeureraient ou le capitalisme sntroduit, suivant que tel ou tel groupement prendrait le pouvoir. Dans les prem
mps, et le gouvernement central et la GĂ©nĂ©ralitĂ© de Catalogne (le gouvernement catdemi autonome) pouvaient nettement ĂȘtre considĂ©rĂ©s comme reprĂ©sentant la cvriĂšre. Le gouvernement avait Ă sa tĂȘte Caballero, socialiste de lâaile gauche,
mprenait des ministres qui reprĂ©sentaient lâU.G.T. (la centrale syndicale socialiste)N.T. (la centrale contrĂŽlĂ©e par les anarchistes). La GĂ©nĂ©ralitĂ© de Catalogne futmps, remplacĂ©e en fait par un comitĂ© de DĂ©fense antifasciste{12}, formĂ© en majrtie de dĂ©lĂ©guĂ©s des syndicats. Par la suite, ce comitĂ© de DĂ©fense fut dissous nĂ©ralitĂ© reconstituĂ©e de maniĂšre Ă reprĂ©senter les centrales syndicales et les diffĂ©rrtis de gauche. Mais toutes les fois quâultĂ©rieurement lâon rebattit les cuvernementales, il en rĂ©sulta une Ă©volution vers la droite. Dâabord ce fut le P.O.i fut chassĂ© de la GĂ©nĂ©ralitĂ© ; six mois plus tard Caballero fut remplacĂ© par Necialiste de lâaile droite ; peu de temps aprĂšs, la C.N.T. fut Ă©liminĂ©e du gouvernem
alement, un an aprĂšs le dĂ©but de la guerre et de la rĂ©volution, il restaiuvernement composĂ© entiĂšrement de socialistes de lâaile droite, de libĂ©raux emmunistes.
Le glissement gĂ©nĂ©ral vers la droite date Ă peu prĂšs dâoctobre-novembre 1936oment oĂč lâU.R.S.S. commença de fournir des armes au gouvernement et oĂč le poummença Ă passer des anarchistes aux communistes. La Russie et le Mexique excecun pays nâavait eu assez de respect humain pour venir au secours du gouvernempagnol, et comme le Mexique, pour des raisons Ă©videntes, ne pouvait fournir des a
grande quantitĂ©, les Russes Ă©taient donc en situation de dicter leurs conditions. Out guĂšre douter quâelles furent, en substance : « EmpĂȘchez la rĂ©volution, ou aurez pas dâarmes », et que le premier coup portĂ© aux Ă©lĂ©ments rĂ©volutionnaviction du P.O.U.M. de la GĂ©nĂ©ralitĂ© de Catalogne, le fut sur les ordres de lâU.R.S.SniĂ© quâaucune pression directe ait Ă©tĂ© exercĂ©e par le gouvernement russe, maestion est de peu dâimportance, car on peut considĂ©rer comme exĂ©cuteurs dlitique russe les partis communistes de tous les pays, et lâon ne nie pas que câ
nstigation du parti communiste que fut menĂ©e lâaction contre le P.O.U.M. dâabord,ntre les anarchistes et contre la fraction Caballero des socialistes, et, en gĂ©nĂ©ral, coute politique rĂ©volutionnaire. Ă partir du moment oĂč lâU.R.S.S. commença dâinterv
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triomphe du parti communiste fut assurĂ©. En premier lieu, la gratitude envers la Rur les envois dâarmes et le fait que le parti communiste, surtout depuis lâarrivĂ©eigades internationales, paraissait capable de gagner la guerre, accrunsidĂ©rablement le prestige du parti communiste. En second lieu, les armes ruaient fournies par lâintermĂ©diaire du parti communiste et des partis alliĂ©s, qui fais
sorte que le moins dâarmes possible allĂąt Ă leurs adversaires politiques {13}
oisiÚme lieu, se déclarer pour une politique non révolutionnaire donnait mmunistes la possibilité de rassembler tous ceux que les extrémistes av
ouvantĂ©s. Il leur Ă©tait facile, par exemple, de rallier les paysans les plus riches sse de lâopposition Ă la politique de collectivisation des anarchistes. Les effectifs du mmuniste sâaccrurent Ă©normĂ©ment, et cela dans une large mesure par lâaffluencns des classes moyennes : boutiquiers, fonctionnaires, officiers de lâarmĂ©e, payĂ©s, etc. La guerre fut essentiellement une lutte triangulaire. Il fallait continuerttre contre Franco, mais simultanĂ©ment le gouvernement poursuivait un autre conquĂ©rir tout le pouvoir que pouvaient encore dĂ©tenir les syndicats. Cela fut faie suite de menus changements â une politique de coups dâĂ©pingle, comme quelq
dit â et, dans lâensemble, trĂšs intelligemment. Il nây eut pas de mouvement covolutionnaire gĂ©nĂ©ral et sautant aux yeux, et jusquâen mai 1937 il fut rarement beemployer la force. On pouvait toujours mater les ouvriers par le moyen dâun argumi se laisse aisĂ©ment deviner tant il va de soi : « Il faut que vous fassiez ceci, et cela,
ste, ou sinon nous perdrons la guerre. » Et chaque fois, inutile de le dire, il se tre ce quâexigeaient les nĂ©cessitĂ©s militaires câĂ©tait lâabandon dâune parcelle de ce quvriers avaient conquis pour eux-mĂȘmes en 1936. Mais lâargument portait toujrce que perdre la guerre Ă©tait bien la derniĂšre chose que voulussent tous les pvolutionnaires : la perte de la guerre, câĂ©tait la dĂ©mocratie et la rĂ©volution, le social
lâanarchisme devenant des mots vides de sens. Les anarchistes, seul volutionnaire suffisamment nombreux pour exercer un rĂŽle important, furent amender point aprĂšs point. On mit obstacle au progrĂšs de la collectivisation, on se dĂ©bars comitĂ©s locaux, on supprima les patrouilles dâouvriers et lâon remit en exercicrces de police dâavant-guerre, largement renforcĂ©es et puissamment armĂ©es ; everses industries de base qui avaient Ă©tĂ© sous le contrĂŽle des syndicats passĂšrent sorection du gouvernement (la saisie du Central tĂ©lĂ©phonique de Barcelone, qui a rigine des troubles de mai, fut un des Ă©pisodes de ce processus) ; enfin le
portant de tout, les milices ouvriĂšres levĂ©es sur la base des syndicats fuaduellement dissoutes et rĂ©parties dans la nouvelle armĂ©e populaire, armĂ©e «litique » de conception semi-bourgeoise, comportant des diffĂ©rences de soldes,ste privilĂ©giĂ©e dâofficiers, etc. Ătant donnĂ© les circonstances Ă cette date, ce fut vraimle pas dĂ©cisif ; il fut franchi en Catalogne plus tard que partout ailleurs parce que cque les partis rĂ©volutionnaires Ă©taient les plus forts. Il Ă©tait Ă©vident que la s
rantie que les ouvriers pouvaient avoir de conserver leurs conquĂȘtes, câĂ©tait de gaelques-unes des forces armĂ©es sous leur propre direction. Comme pour le reste, nom des exigences militaires que la dissolution des milices fut ordonnĂ©e, et persnia quâune totale rĂ©organisation militaire fĂ»t nĂ©cessaire. Il eĂ»t Ă©tĂ© tout Ă fait poss
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pendant, de rĂ©organiser les milices, de les rendre plus aptes Ă leur tĂąche, tout essant sous le contrĂŽle direct des syndicats ; mais, Ă la vĂ©ritĂ©, ce changement avait incipal but dâempĂȘcher les anarchistes dâavoir leur propre armĂ©e. Et puis, lâemocratique des milices en faisait des terrains propices Ă la croissance des ivolutionnaires. Les communistes ne lâignoraient pas et ils ne cessaient dâinvecrement contre le principe, dĂ©fendu par le P.O.U.M. et les anarchistes, de la solde Ă©ur tous, sans distinction de grades. Ce fut une « bourgeoisification » gĂ©nĂ©rale quu, une destruction dĂ©libĂ©rĂ©e de lâesprit Ă©galitaire des tout premiers mois d
volution. Tout cela fut si rapide que ceux qui firent deux voyages successifs en Espquelques mois dâintervalle se sont demandĂ©s sâils avaient bien visitĂ© le mĂȘme paysi, superficiellement et pour un court laps de temps, avait paru ĂȘtre un Ătat prolĂ©tamĂ©tamorphosait Ă vue dâĆil en RĂ©publique bourgeoise ordinaire avec lâhabit
vision en riches et en pauvres. Ă lâautomne de 1937, le « socialiste » NegrĂn dĂ©clara discours public : « Nous respectons la propriĂ©tĂ© privĂ©e », et tels membres des C
i, suspects de sympathies fascistes, avaient dĂ» sâenfuir du pays au dĂ©but de la guvinrent en Espagne.
Tout le processus est facile Ă comprendre si lâon se rappelle quâil dĂ©coullliance temporaire Ă laquelle le bourgeois et lâouvrier se voient contraints pascisme, sous certaines de ses formes. Cette alliance, connue sous le nom de Fpulaire, est essentiellement une alliance dâennemis, et il semble bien quâelle ne pu
mais se terminer autrement que par lâun des partenaires avalant lâautre. Le seul attendu dans la situation espagnole â et qui, hors dâEspagne, a Ă©tĂ© cnnombrables malentendus â câest que, parmi les partis du cĂŽtĂ© gouvernementammunistes ne se trouvaient pas Ă lâextrĂȘme gauche, mais Ă lâextrĂȘme droite. Rieailleurs qui dĂ»t surprendre, puisque la tactique du parti communiste dans les au
ys, particuliÚrement en France, a clairement montré que le communisme officielre tenu, actuellement en tout cas, pour une force antirévolutionnaire. Danssemble, la politique du Komintern est actuellement subordonnée (chose excus
ant donnĂ© la situation mondiale) Ă la dĂ©fense de lâU.R.S.S., dĂ©fense qui repose sustĂšme dâalliances militaires. En particulier, lâU.R.S.S. est alliĂ©e avec la France, pitaliste et impĂ©rialiste. Cette alliance ne peut ĂȘtre utile Ă la Russie que si le capitalançais est fort ; la politique communiste en France a donc eu Ă devtirĂ©volutionnaire. Et cela signifie, non seulement que les communistes français dĂ©f
prĂ©sent derriĂšre le drapeau tricolore en chantant La Marseillaise, mais aussi, ce quaucoup plus important, quâils ont eu Ă cesser toute agitation effective dans les coloançaises. Il y a moins de trois ans de cela, Thorez, le secrĂ©taire du parti commuançais, dĂ©clarait que les ouvriers français ne se laisseraient plus jamais refaire, quâo amĂšnerait pas Ă se battre Ă nouveau contre leurs camarades allemands {14}. Ijourdâhui lâun des patriotes les plus forts en gueule de France. La clef de la conduitrti communiste dans chaque pays est donnĂ©e par les rapports dâordre militistants ou possibles, de ce pays avec lâU.R.S.S. En Angleterre, par exemple, lâattitudcore incertaine ; de lĂ vient que le parti communiste se montre encore hostiluvernement national et quâil est censĂ© sâopposer au rĂ©armement. Mais que la Gra
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etagne en vienne Ă contracter avec lâU.R.S.S. une alliance ou un accord militaire, emmunistes anglais, tout comme les communistes français, nâauront plus alors le cĂȘtre autre chose que bons patriotes et impĂ©rialistes ; il y a des signes avant-coureua dĂ©jĂ . En Espagne, la « ligne » communiste fut, sans aucun doute, influencĂ©e pt que la France, alliĂ©e de la Russie, serait Ă©nergiquement opposĂ©e Ă un voisi
volutionnaire et remuerait ciel et terre pour empĂȘcher lâaffranchissement du Mpagnol. Le Daily Mail , avec ses contes de rĂ©volution rouge financĂ©e par Moscoompait de façon encore plus extravagante que dâhabitude. En rĂ©alitĂ© ce furen
mmunistes, plus que tous les autres, qui empĂȘchĂšrent la rĂ©volution en Espagne. Eu plus tard, quand les forces de lâaile droite furent pleinement au pouvoirmmunistes se montrĂšrent rĂ©solus Ă aller beaucoup plus loin que les libĂ©raux darsĂ©cution des leaders rĂ©volutionnaires{15}.
Jâai tentĂ© dâesquisser la marche gĂ©nĂ©rale de la rĂ©volution espagnole pendaemiĂšre annĂ©e parce que cela permet de mieux comprendre la situation Ă un momnnĂ©. Mais je nâentends pas suggĂ©rer que, en fĂ©vrier, je professais toutes les opinlitiques quâimplique ce que je viens de dire. Dâabord, les Ă©vĂ©nements qui mâĂ©clairĂš
mieux nâĂ©taient pas encore survenus, et, de toute maniĂšre, mes sympathies, Ă certards, sâorientaient tout autrement quâelles ne font aujourdâhui. Cela venait en partque le cĂŽtĂ© politique de la guerre mâennuyait et de ce que, spontanĂ©men
insurgeais contre le point de vue que jâentendais le plus souvent exposer â câest-Ă ui du P.O.U.M. et de lâI.L.P. Les Anglais parmi lesquels je me trouvais Ă©taient po
upart membres de lâI.L.P., quelques-uns Ă©taient membres du P.C. ; presque ssĂ©daient une Ă©ducation politique bien supĂ©rieure Ă la mienne. Pendant de lonmaines de suite, durant la morne pĂ©riode oĂč rien ne se passait autour de Huesca, jis trouvĂ© au sein dâune discussion politique qui ne finissait pour ainsi dire jam
rtout, dans les granges puantes et pleines de vents coulis des fermes oĂč lâon geait, dans lâobscuritĂ© Ă©touffante des abris souterrains, derriĂšre le parapet pendanures glaciales du milieu de la nuit, le dĂ©bat au sujet des « lignes » contradictoirertis se poursuivait sans fin. Parmi les Espagnols câĂ©tait la mĂȘme chose, et la plupar
urnaux que nous lisions faisaient la plus grande place aux dissensions partisanes. Ilu ĂȘtre sourd ou imbĂ©cile pour ne pas se faire quelque idĂ©e de ce que soutenait chrti.
Du point de vue de lâidĂ©ologie politique, trois partis seulement comptaient
S.U.C., le P.O.U.M. et la C.N.T.-F.A.I. (inexactement appelĂ©e : les anarchistesrlerai du P.S.U.C. en premier lieu, comme Ă©tant le plus important ; ce fut le partalement triompha, et, mĂȘme dĂ©jĂ Ă cette Ă©poque, visiblement il prĂ©dominait.
Il est nĂ©cessaire dâexpliquer que parler de la « ligne » du P.S.U.C., câest parler enla «ligne » du parti communiste. Le P.S.U.C. ( Partido Socialista Unificad
taluña) était le parti socialiste de Catalogne ; il avait été formé au début de la gur la fusion de différents partis marxistes, dont le parti communiste catalan ; m
ait Ă prĂ©sent totalement dirigĂ© par les communistes et affiliĂ© Ă la Troisternationale. Ailleurs en Espagne, lâunification entre socialistes et communistes nâs formellement eu lieu ; mais on pouvait partout considĂ©rer comme identiques le p
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vue communiste et celui de lâaile droite des socialistes. GĂ©nĂ©ralement parlanS.U.C. Ă©tait lâorgane politique de lâU.G.T. (UniĂłn General de Trabajadores), la cenndicale socialiste. Le nombre des membres de ces syndicats atteignait alors, pour tspagne, un million et demi. Ils comprenaient plusieurs sections de travail
anuels, mais depuis le dĂ©but de la guerre ils sâĂ©taient augmentĂ©s de membres asse moyenne qui avaient affluĂ© en grand nombre, car, aux premiers jours drĂ©volution », des gens de toutes sortes avaient jugĂ© opportun dâadhĂ©rer soit Ă lâU.it Ă la C.N.T. Les deux centrales syndicales se chevauchaient, mais des deux câĂ©ta
N.T. qui avait plus prĂ©cisĂ©ment le caractĂšre dâune organisation de la classe ouvriĂšrS.U.C. Ă©tait donc un parti Ă demi des ouvriers et Ă demi de la petite bourgeoiutiquiers, fonctionnaires, paysans aisĂ©s.
La « ligne » du P.S.U.C., qui fut prĂȘchĂ©e dans le monde entier par la prmmuniste et pro-communiste, Ă©tait en gros la suivante :
« Actuellement, une seule chose importe : gagner la guerre ; sans victoire danerre, tout le reste est sans signification. Ce nâest donc pas le moment de parler de ogresser la rĂ©volution. Nous ne pouvons nous permettre, ni de nous aliĂ©ner les pay
les contraignant Ă la collectivisation, ni dâeffaroucher les classes moyennesmbattent Ă nos cĂŽtĂ©s Et surtout, par souci de lâeffet utile, nous devons en finir avaos rĂ©volutionnaire. Nous devons avoir un gouvernement central fort Ă la placemitĂ©s locaux, et il nous faut une armĂ©e convenablement entraĂźnĂ©e et totalemlitarisĂ©e sous un commandement unifiĂ©. Se cramponner Ă des parcelles de pouvrier et rĂ©pĂ©ter comme un perroquet des phrases rĂ©volutionnaires, câest menertion non seulement vaine, non seulement gĂȘnante, mais contre-rĂ©volutionnaire, canduit Ă des divisions qui peuvent ĂȘtre utilisĂ©es contre nous par les fascistes. En ase de la guerre nous ne nous battons pas pour la dictature du prolĂ©tariat, nous
ttons pour la dĂ©mocratie parlementaire. Quiconque tente de transformer la guvile en rĂ©volution sociale fait le jeu des fascistes, et, par le fait sinon par lâintention
traßtre. »La « ligne » du P.O.U.M. différait de celle du P.S.U.C. sur tous les points,
turellement, sur celui de lâimportance de gagner la guerre. Le P.O.U.M. ( Partido ObUnificaciĂłn Marxista) Ă©tait lâun de ces partis communistes dissidents que lâon
paraĂźtre en beaucoup de pays au cours de ces derniĂšres annĂ©es, par suite de lâoppos« stalinisme », câest-Ă -dire au changement rĂ©el ou apparent, de la polit
mmuniste. Il Ă©tait composĂ© en partie dâex-communistes et en partie dâun ancien pBloc ouvrier et paysan. NumĂ©riquement, câĂ©tait un petit parti {16}, nâayant gnfluence en dehors de la Catalogne, et dont lâimportance tenait surtout Ă ce nfermait une proportion extraordinairement Ă©levĂ©e de membres trĂšs conscilitiquement parlant. En Catalogne, sa principale place forte Ă©tait LĂ©rida. IprĂ©sentait aucune centrale syndicale. Les miliciens du P.O.U.M. Ă©taient pour la pluembres de la C.N.T., mais les vĂ©ritables membres du parti appartenaient en gĂ©nĂ©
U.G.T. Ce nâĂ©tait cependant que dans la C.N.T. que le P.O.U.M. exerçait quefluence. La « ligne » du P.O.U.M. Ă©tait en gros la suivante :
« Câest une absurditĂ© de prĂ©tendre sâopposer au fascisme au moyen d
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dĂ©mocratie » bourgeoise. « DĂ©mocratie » bourgeoise, ce nâest lĂ quâun autre nom dcapitalisme, tout comme fascisme ; se battre contre le fascisme au nom d
dĂ©mocratie » revient Ă se battre contre une forme du capitalisme au nom dâune auts formes, susceptible Ă tout instant de se transformer en la premiĂšre. Le seul paendre en face du fascisme, câest le pouvoir ouvrier. Si vous vous proposez nâimpel autre but plus restreint, ou vous tendrez la victoire Ă Franco, ou, au mieux, sserez le fascisme entrer par la porte de derriĂšre. Dâici la prise de pouvoir, les ouvivent se cramponner Ă tout ce quâils ont conquis ; sâils cĂšdent sur quoi que ce so
uvernement semi-bourgeois, ils peuvent sâattendre Ă ĂȘtre trompĂ©s. Ils doivent ga milices ouvriĂšres et les forces de police ouvriĂšre constituĂ©es telles quâelles le
tuellement, et sâopposer Ă toute tentative pour les « bourgeoisifier ». Si les ouvrierminent pas les forces armĂ©es, les forces armĂ©es domineront les ouvriers. La guerrevolution ne doivent pas ĂȘtre sĂ©parĂ©es. »
Le point de vue anarchiste est moins facile Ă dĂ©finir. Ou plutĂŽt le teanarchiste » est abusivement appliquĂ© Ă une multitude de gens dâopinions trĂšs varĂ©norme fĂ©dĂ©ration de syndicats formant la C.N.T. (ConfederaciĂłn Nacional
abajo), avec ses quelque deux millions de membres, avait pour organe politiquA.I. ( FederaciĂłn Anarquista IbĂ©rica), la vĂ©ritable organisation anarchiste. Mais mmembres de la F.A.I., encore quâimprĂ©gnĂ©s, comme peut-ĂȘtre le sont la plupart
pagnols, de lâidĂ©ologie anarchiste, nâĂ©taient pas forcĂ©ment tous des anarchistes, auplus pur du mot. Et particuliĂšrement depuis le dĂ©but de la guerre, ils avaient Ă©vns le sens du socialisme ordinaire, ayant Ă©tĂ© forcĂ©s par les circonstances Ă participdministration en entrant dans le gouvernement. NĂ©anmoins ils diffĂ©rndamentalement des communistes au point que, pour eux comme pour le P.O.U.Mt visĂ© Ă©tait le pouvoir ouvrier et non la dĂ©mocratie parlementaire. Ils adoptaient le
ordre du P.O.U.M. : « La guerre et la rĂ©volution ne doivent pas ĂȘtre sĂ©parĂ©es », maontraient Ă ce sujet moins dogmatiques. Voici, en gros, ce que voulait la C.N.T.-F.A.IntrĂŽle direct exercĂ© sur chaque industrie (par exemple transports, industrie te
c.) par les ouvriers y appartenant. 2) Gouvernement au moyen de comitĂ©s locausistance Ă toutes les formes de rĂ©gime autoritaire centralisĂ©. 3) HostilitĂ© mpromis Ă lâĂ©gard de la bourgeoisie et de lâĂglise. Ce dernier point, le moins purtant, Ă©tait le plus important. Les anarchistes Ă©taient Ă lâopposĂ© de la majeure ps soi-disant rĂ©volutionnaires : si leur politique Ă©tait assez vague, leur haine du priv
de lâinjustice Ă©tait dâune intransigeante sincĂ©ritĂ©. IdĂ©ologiquement, communismarchisme sont aux antipodes lâun de lâautre. Pour la pratique â câest-Ă -dire quantrme de sociĂ©tĂ© souhaitĂ©e â il nây avait entre eux quâune diffĂ©rence dâaccent, Ă©conciliable : les communistes mettent toujours lâaccent sur le centralismfficacitĂ©, les anarchistes sur la libertĂ© et lâĂ©galitĂ©. Lâanarchisme a des racines profoEspagne, et il est probable quâil survivra au communisme lorsquâelle ne sera plus
nfluence russe. Pendant les deux premiers mois de la guerre, câĂ©taient les anarchius que tous les autres, qui avaient sauvĂ© la situation, et longtemps encore ensuitlices anarchistes, en dĂ©pit de leur indiscipline, furent sans conteste les meillmbattants dâentre les forces purement espagnoles. Ă partir environ de fĂ©vrier 193
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ut, dans une certaine mesure, parler en bloc des anarchistes et du P.O.U.M. Sarchistes, le P.O.U.M. et lâaile gauche des socialistes avaient eu le bon sens de ss le dĂ©but et dâimposer une politique rĂ©aliste, lâhistoire de la guerre eĂ»t pu ffĂ©rente. Mais en cette pĂ©riode du dĂ©but, oĂč les partis rĂ©volutionnaires semblaient
succĂšs entre leurs mains, câĂ©tait impossible. Entre anarchistes et socialanciennes jalousies subsistaient, et le P.O.U.M., en tant que marxiste, Ă©tait sceptiqgard de lâanarchisme, cependant que du pur point de vue anarchiste, le « trotskysmP.O.U.M. nâĂ©tait guĂšre prĂ©fĂ©rable au « stalinisme » des communistes. NĂ©anmoin
ctique communiste eut pour effet de rapprocher ces deux partis. Ce fut surtoustinct de solidaritĂ© Ă lâĂ©gard de la C.N.T. qui dĂ©termina le P.O.U.M. Ă prendre partsastreux combats de mai Ă Barcelone, et, plus tard, lors de la suppression du P.O.U anarchistes furent les seuls Ă oser Ă©lever la voix pour le dĂ©fendre.
Donc, gĂ©nĂ©ralement parlant, la dĂ©marcation des forces Ă©tait la suivante : dâun C.N.T.-F.A.I., le P.O.U.M. et une fraction des socialistes, tenants du pouvoir ouvrierutre, lâaile droite des socialistes, les libĂ©raux et les communistes, tenants uvernement centralisĂ© et dâune armĂ©e militarisĂ©e.
On saisit aisĂ©ment pourquoi, Ă cette Ă©poque, je prĂ©fĂ©rais le point de vue commucelui du P.O.U.M. Les communistes avaient une politique pratique prĂ©cise, nettemeilleure du point de vue du bon sens, dâun bon sens qui ne regardait que quelques avant. Et certainement la politique au jour le jour du P.O.U.M., sa propagande, etc
us mauvaise quâon ne saurait le dire ; il faut bien croire quâelle lâa Ă©tĂ©, sans cela il eĂ»lier un beaucoup plus grand nombre de partisans. Ce qui me confirmait alors dans inion, câĂ©tait que les communistes â du moins Ă ce quâil me semblait â poursuivativement la guerre, tandis que nous et les anarchistes nâagissions guĂšre. Cmpression gĂ©nĂ©rale en ce temps-lĂ . Les communistes avaient obtenu le pouvo
gement augmentĂ© le nombre de leurs partisans, en partie parce quâils avaient fait ax classes moyennes contre les rĂ©volutionnaires, et en partie parce quâils Ă©taienuls Ă paraĂźtre capables de gagner la guerre. Les armes russes et la magnifique dĂ©fMadrid par des troupes presque toutes sous contrĂŽle communiste, avaient fait d hĂ©ros de lâEspagne. Comme on lâa dit, chaque avion russe qui passait au-dessus dees faisait de la propagande communiste. Le purisme rĂ©volutionnaire du P.O.U.M.,e jâen reconnusse la valeur logique, me semblait assez vain. AprĂšs tout, la seule ci importait, câĂ©tait de gagner la guerre.
En attendant, lâinfernale querelle entre les partis se poursuivait sans trĂȘve danurnaux, par les tracts, sur les affiches, dans les livres â partout. Ă cette Ă©poqueurnaux quâil me fut le plus souvent donnĂ© de lire câĂ©taient ceux du P.O.U.M., La BaAdelante, et leurs critiques continuelles Ă lâĂ©gard du P.S.U.C. « contre-rĂ©volutionnae produisaient lâeffet dâun pĂ©dantisme ennuyeux. Quand, plus tard, jâai Ă©tudiĂ© de Ăšs la presse des communistes et du P.S.U.C., je me suis aperçu que le P.O.U.M. Ă©taitjet autant dire irrĂ©prochable, en comparaison de ses adversaires. Sans compter qussibilitĂ©s de propagande Ă©taient beaucoup moins grandes. Ă la diffĂ©rence mmunistes, il nâavait pied dans aucune presse Ă lâĂ©tranger, et en Espagne il Ă©taitsavantagĂ©, parce que la censure de la presse Ă©tait presque entiĂšrement tenu
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bordination par les communistes, ce qui signifiait que les journaux du P.O.quaient dâĂȘtre supprimĂ©s ou condamnĂ©s Ă une amende sâils imprimaient quelque cprĂ©judiciable aux communistes. Il faut dire aussi, Ă lâhonneur du P.O.U.M., que sprivait pas de prĂȘcher interminablement sur le sujet de la rĂ©volution et de citer LĂ©nauseam, il ne se permettait gĂ©nĂ©ralement pas de diffamations personnelles. Et
livrait à la polémique seulement dans les articles de ses journaux. Ses grandes afficouleurs, destinées à un plus large public (les affiches ont une grande importanc
pagne, Ă cause du nombre considĂ©rable dâillettrĂ©s), ne contenaient pas dâatta
ntre les partis rivaux, mais Ă©taient simplement antifascistes et rĂ©volutionnaires daniĂšre abstraite ; et de mĂȘme les chansons que chantaient les miliciens. Les attas communistes, câĂ©tait tout autre chose. Je parlerai de certaines dâentre elles
Appendice II. Je ne veux donner ici quâune brĂšve indication sur la maniĂšre donmmunistes menaient leurs attaques.
Ă lâexaminer superficiellement, le dĂ©saccord entre les communistes et le P.O.ait un dĂ©saccord de tactique. Le P.O.U.M. Ă©tait pour la rĂ©volution immĂ©diatemmunistes non. Selon eux, le plus tard elle aurait lieu, le mieux cela vaudrait. Il y
aucoup Ă dire sur lâune et lâautre position. En outre, les communistes prĂ©tendaientpolitique du P.O.U.M. divisait et affaiblissait les forces gouvernementalempromettait le succĂšs de la guerre, et Ă ce sujet aussi, bien quâen dĂ©finitive je nes de cet avis, on pourrait longuement discuter. Mais câest Ă prĂ©sent quâinterviectique particuliĂšre des communistes. Dâabord en tĂątant le terrain avec prĂ©caution,entĂŽt sans plus aucune retenue, les communistes se mirent Ă affirmer que le P.O.visait les forces du gouvernement non par erreur de jugement, mais de propos dĂ©li
dĂ©clarĂšrent que le P.O.U.M. nâĂ©tait rien de moins quâune bande de fascistes dĂ©guissolde de Franco et de Hitler, faisant sciemment le jeu de la cause fasciste en pouss
e politique pseudo-rĂ©volutionnaire. Le P.O.U.M. Ă©tait une organisation « trotskyste« cinquiĂšme colonne de Franco ». Cela impliquait que des milliers de gens de la cvriĂšre, y compris huit ou dix mille soldats en train de se geler dans les tranchĂ©eemiĂšre ligne, et des centaines dâĂ©trangers venus en Espagne pour combattre le fasc
ayant souvent sacrifiĂ© pour cela famille, situation et nationalitĂ© nâĂ©taient queaĂźtres Ă la solde de lâennemi. Et cette histoire fut rĂ©pandue dans toute lâEspagne paraffiches, et autres, et rĂ©pĂ©tĂ©e Ă satiĂ©tĂ© dans la presse communiste et pro-communistonde entier. Je pourrais remplir une demi-douzaine de livres avec des citations, sâi
aisait dâen faire collection. Ainsi donc, voilĂ ce que nous Ă©tions aux dires des communistes : des trotskystesscistes, des traĂźtres, des assassins, des lĂąches, des espions, etc. Jâavoue quâil y avaoi ne pas ĂȘtre charmĂ©, surtout lorsquâon pensait en particulier Ă certains de ceuxi de telles accusations Ă©taient portĂ©es. Imaginez tout lâodieux de voir un jeune Espaquinze ans ramenĂ© du front sur une civiĂšre, de voir, Ă©mergeant des couverturesage exsangue, hĂ©bĂ©tĂ©, et de penser que des messieurs tirĂ©s Ă quatre Ă©pingles sondres et Ă Paris, tranquillement en train dâĂ©crire des brochures pour prouver qutit gars est un fasciste dĂ©guisĂ©. Lâun des traits les plus abominables de la guerre, e toute la propagande de guerre, les hurlements et les mensonges et la haine, tout
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t invariablement lâĆuvre de gens qui ne se battent pas. Les miliciens du P.S.U.C. qunnus au front, les communistes des Brigades internationales quâil mâest arrivncontrer, ne mâont jamais, ni les uns ni les autres, appelĂ© trotskyste ou traĂźtressaient cela aux journalistes de lâarriĂšre. Tous ceux qui Ă©crivaient des brochures cous, et disaient de nous des infamies dans les journaux, restaient chez eux bien Ă lâtout au plus sâaventuraient-ils dans les salles de rĂ©daction de Valence, Ă des centakilomĂštres des balles et de la boue. Et, mis Ă part les libelles de la querelle entre p
ut lâinsĂ©parable de la guerre, â chauvinisme agressif, Ă©loquence de carrefour, b
prĂ©ciation de lâennemi â tout cela, ceux qui sâen chargeaient Ă©taient, comme toujs non-combattants, et certains dâentre eux eussent prĂ©fĂ©rĂ© faire cent kilomĂštreurant plutĂŽt que de se battre. Lâun des plus tristes effets de cette guerre pour moi, capprendre que la presse de gauche est tout aussi fausse et malhonnĂȘte que celloite{ 1 7 }. Jâai le ferme sentiment que de notre cĂŽtĂ© â du cĂŽtĂ© gouvernemental â erre est diffĂ©rente des guerres ordinaires, impĂ©rialistes ; mais on ne le devin
mais, dâaprĂšs le caractĂšre de la propagande de guerre. La lutte Ă©tait Ă peine dĂ©clenâinstantanĂ©ment journaux de droite et de gauche plongĂšrent Ă qui mieux mieux da
ĂȘme puisard dâinsultes. Nous nous souvenons tous des en-tĂȘtes du Daily Mail : «uges crucifient les religieuses », tandis quâĂ en croire le Daily Worker, la LĂ©rangĂšre de Franco Ă©tait « composĂ©e dâassassins, de pratiquants de la traite des blan
droguĂ©s et du rebut de tous les pays europĂ©ens ». Encore en octobre 1937, leatesman nous entretenait dâhistoires de fascistes se faisant une barricade avec les cenfants vivants (ce quâil y a bien de plus incommode comme barricade !), tandis Arthur Bryant dĂ©clarait que « scier les jambes dâun commerçant conservateur »
chose courante » en Espagne loyaliste. Ce ne sont jamais des combattants, ceuxrivent des sottises de ce genre ; peut-ĂȘtre croient-ils que le fait de les Ă©crire est pou
succĂ©danĂ© de combat ! Câest la mĂȘme chose dans toutes les guerres : les soldattent, les journalistes mĂšnent grand bruit, et jamais aucun grand patriote ne vieoximitĂ© dâune tranchĂ©e de premiĂšre ligne, si ce nâest en rapide tournĂ©e de propaga
mâest parfois un rĂ©confort de penser que les progrĂšs de lâaviation sont en traianger les conditions de la guerre. Peut-ĂȘtre la prochaine grande guerre nous rĂ©servlle un spectacle sans prĂ©cĂ©dent dans lâHistoire : un chauvin trouĂ© par une balle.
Par tout son cÎté journalistique, cette guerre était une escroquerie comme toutetres guerres. Mais avec cette différence que, tandis que les journalistes réser
bituellement leurs invectives les plus meurtriĂšres Ă lâennemi, dans ce cas-ci, au furesure que le temps passait, les communistes et le P.O.U.M. en venaient, en Ă©crivaettre dans leurs attaques rĂ©ciproques plus dâĂąpretĂ© quâĂ lâĂ©gard des fascistes. Pourtatte Ă©poque, je ne pouvais encore me rĂ©soudre Ă prendre tout cela vraiment au sĂ©rtte inimitiĂ© entre partis mâennuyait, mâĂ©cĆurait mĂȘme, mais je nây voyais qamaillis domestique. Je ne croyais pas quâelle tĂ»t de nature Ă rien changer, ni quâil s divergences de politiques rĂ©ellement inconciliables. Je me rendais compte qummunistes et les libĂ©raux se refusaient Ă laisser progresser la rĂ©volution ; je nendais pas compte quâils pouvaient ĂȘtre capables de la faire rĂ©gresser.
Il y avait Ă cela une bonne raison. Pendant tout ce temps-lĂ jâĂ©tais au front, e
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ont lâatmosphĂšre sociale et politique ne changea pas. Jâavais quittĂ© Barcelone au djanvier et je ne suis allĂ© en permission que fin avril ; durant toute cette pĂ©riode
ĂȘme plus longtemps encore â dans la bande du secteur dâAragon tenue par les tros anarchistes et du P.O.U.M., les conditions restĂšrent les mĂȘmes, extĂ©rieurementmoins. LâatmosphĂšre rĂ©volutionnaire demeura telle que je lâavais connue au dĂ©bu
nĂ©ral et le simple soldat, le paysan et le milicien continuaient Ă sâaborder en Ă©gaux,uchaient la mĂȘme solde, Ă©taient vĂȘtus et nourris de mĂȘme, sâappelaient « camaradse tutoyaient. Il nây avait pas de classe de patrons ni de classe de domestiques, i
ait plus de mendiants, de prostituĂ©es, dâhommes de loi, de prĂȘtres, de lĂ©cheurttes, plus de saluts militaires obligatoires. Je respirais lâair de lâĂ©galitĂ©, et jâĂ©tais aĂŻf pour mâimaginer quâil en allait de mĂȘme dans toute lâEspagne gouvernementalme rendais pas compte que, plus ou moins par hasard, je mâĂ©tais trouvĂ© isolĂ© da
action la plus révolutionnaire de la classe ouvriÚre espagnole. Aussi, quand mes camarades mieux instruits de la politique me disaient que
tte guerre on ne pouvait pas prendre une attitude purement militaire, que le choix tre rĂ©volution et fascisme, jâĂ©tais portĂ© Ă me moquer dâeux. Somme toute, jâaccepta
int de vue communiste qui se rĂ©duisait Ă ceci : « Nous ne pouvons pas parlevolution avant dâavoir gagnĂ© la guerre », et non le point de vue du P.O.U.M. qduisait Ă ceci : « Nous devons avancer si nous ne voulons pas revenir en arriĂšrsque, par la suite, jâai estimĂ© que le P.O.U.M. avait raison, ou, en tout cas, davanson que les communistes, ce ne fut pas tout Ă fait en me plaçant sur le terrain d
Ă©orie. Sur le papier, le raisonnement des communistes tenait debout ; le hic, câĂ©taiturs agissements rĂ©els ne permettaient pas de croire quâils le proposaient de bonn
mot dâordre si souvent rĂ©pĂ©tĂ© : « la guerre dâabord, la rĂ©volution aprĂšs », pouvait re pieusement tenu pour article de foi par le milicien moyen du P.S.U.C., cel
uvant penser en toute bonne foi que la rĂ©volution pourrait se poursuivre une foerre terminĂ©e, ce mot dâordre nâen Ă©tait pas moins de la poudre jetĂ©e aux yeux. oi travaillaient les communistes, ce nâĂ©tait pas Ă ajourner la rĂ©volution espag
squâĂ un moment plus propice, mais Ă prendre toutes dispositions pour quâelle mais lieu. Cela devenait de plus en plus Ă©vident au fur et Ă mesure que le temps pase de plus en plus le pouvoir Ă©tait arrachĂ© des mains de la classe ouvriĂšre, et que deplus de rĂ©volutionnaires de toutes nuances Ă©taient jetĂ©s en prison. Tout se faisa
m de la nĂ©cessitĂ© militaire, parce que câĂ©tait lĂ un prĂ©texte pour ainsi dire « tout fa
i permettait de ramener les ouvriers en arriĂšre, dâune position avantageuse Ă sition dâoĂč, la guerre finie, il leur serait impossible dâopposer de la rĂ©sistance ntroduction du capitalisme. Comprenez bien, je vous en prie, quâen parlant ains
est pas contre les communistes de la base, et encore moins contre les milliermmunistes qui moururent hĂ©roĂŻquement pour la dĂ©fense de Madrid, que jâen ai. nâĂ©tait pas eux qui dirigeaient la politique de leur parti. Quant aux communistes
acĂ©s, comment croire quâils ne savaient pas ce quâils faisaient !Restait tout de mĂȘme quâil valait la peine de gagner la guerre, mĂȘme si la rĂ©volu
vait ĂȘtre perdue. Mais en dernier lieu et Ă la longue jâen vins Ă douter que la politmmuniste menĂąt Ă la victoire. Il semble que peu de gens aient rĂ©flĂ©chi quâil conv
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appliquer Ă chacune des diffĂ©rentes phases de la guerre une politique diffĂ©renpropriĂ©e. Vraisemblablement les anarchistes ont sauvĂ© la situation pendant les emiers mois, mais ils Ă©taient incapables, au-delĂ dâun certain point, dâune rĂ©sistganisĂ©e. Vraisemblablement les communistes ont sauvĂ© la situation dâoctobcembre, mais quant Ă gagner complĂštement la guerre, câĂ©tait une tout autre histo
n Angleterre, la politique de guerre des communistes a Ă©tĂ© acceptĂ©e sans discusrce quâon nâa autorisĂ© la publication que de bien peu de critiques Ă son endroit, et pe sa ligne gĂ©nĂ©rale â en finir avec le chaos rĂ©volutionnaire, accĂ©lĂ©rer la produc
litariser lâarmĂ©e â faisait lâeffet dâĂȘtre rĂ©aliste et efficace. Il vaut donc dâen soulignblesse inhĂ©rente.
Afin dâentraver toute tendance rĂ©volutionnaire et de rendre la guerre mblable que possible Ă une guerre ordinaire, il leur fallut forcĂ©ment laisser se pes occasions stratĂ©giques qui existaient. Jâai dĂ©crit notre armement, ou plutĂŽt nanque dâarmement, sur le front dâAragon. Il ne fait guĂšre de doute que les communtinrent dĂ©libĂ©rĂ©ment les armes de crainte quâil nâen allĂąt trop aux mains des anarchi, ultĂ©rieurement, sâen serviraient pour atteindre un but rĂ©volutionnaire
nsĂ©quence la grande offensive dâAragon qui eĂ»t obligĂ© Franco Ă se retirer de Bilbaut-ĂȘtre de Madrid, ne fut jamais dĂ©clenchĂ©e. Mais cela Ă©tait, relativement, demportance. Ce qui fut beaucoup plus grave, câest quâune fois la guerre rĂ©trĂ©cie
mites dâune « guerre pour la dĂ©mocratie », il devenait impossible de faire aucun ar une vaste Ă©chelle Ă lâaide de la classe ouvriĂšre des autres pays. Si nous regardonts en face, il nous faut avouer que la classe ouvriĂšre mondiale a considĂ©rĂ© la gu
Espagne avec dĂ©tachement. Ă titre individuel, des dizaines de milliers dâhommes nus combattre, mais les dizaines de millions qui Ă©taient derriĂšre eux restĂšdiffĂ©rents. On a calculĂ© que durant la premiĂšre annĂ©e de la guerre, pour lâensembl
uple anglais, il a Ă©tĂ© souscrit aux divers fonds de lâ« Aide Ă lâEspagne » pour env0 000 livres â moitiĂ© moins, vraisemblablement, que ce qui a Ă©tĂ© dĂ©pensĂ© en une smaine Ă aller au cinĂ©ma. Câest par lâaction Ă©conomique â grĂšves et boycottages â ouvriers, dans les pays dĂ©mocratiques, eussent pu aider efficacement leurs camar
pagnols. Mais rien dans ce sens ne fut mĂȘme tentĂ©. Partout les leaders travaillistmmunistes dĂ©clarĂšrent quâil nây fallait pas songer ; et ils avaient Ă©videmment rassi longtemps quâils criaient Ă©galement de toutes leurs forces que lâEspagne « rou
était pas « rouge ».
Depuis 1914-1918, cela sonne sinistrement : « guerre pour la dĂ©mocratie ».nĂ©es durant, les communistes venaient eux-mĂȘmes dâenseigner dans tous les payslitants ouvriers que « dĂ©mocratie » nâĂ©tait quâun nom poli donnĂ© au capitalimmencer par dire : « La dĂ©mocratie est une escroquerie », et venir dire mainten
Battez-vous pour la dĂ©mocratie », ce nâest pas une bonne tactique. Si, ayant derriĂšremmense prestige de la Russie soviĂ©tique, ils avaient fait appel aux ouvriers de touys, non pas au nom de lâ« Espagne dĂ©mocratique », mais au nom de lâ« Espvolutionnaire », comment croire quâils nâeussent pas Ă©tĂ© entendus ?
Mais ce quâil y eut encore de plus grave, câest quâavec cette politique volutionnaire, il Ă©tait difficile, sinon impossible, de frapper Ă lâarriĂšre de Franco. Ă
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1937, Franco tenait sous sa domination une population plus importante quuvernement â beaucoup plus importante, si lâon compte les colonies â, et cela avecectifs militaires Ă peu prĂšs Ă©quivalents. Comme tout le monde le sait, si lâon apulation hostile dans le dos, il est impossible de maintenir lâarmĂ©e sur le chamtaille Ă moins dâavoir une autre armĂ©e tout aussi nombreuse pour garder les voiemmunication, empĂȘcher les sabotages, etc. Il est donc clair quâil ne se produirriĂšre de Franco aucun vĂ©ritable mouvement populaire. Il nâĂ©tait cependantoyable que sur son territoire le peuple, les ouvriers des villes et les paysans les
uvres en tout cas, aimaient et voulaient Franco ; seulement, à chacun des glissemgouvernement vers la droite, les raisons de le préférer devenaient moins évide
est irrĂ©futable, le cas du Maroc suffit Ă le montrer. Pourquoi nây eut-il paulĂšvement au Maroc ? Franco tentait dây Ă©tablir une dictature odieuse, et les Mauraient rĂ©ellement prĂ©fĂ©rĂ© au gouvernement de Front populaire ! La vĂ©ritĂ© manifst quâaucun effort ne fut tentĂ© pour fomenter un soulĂšvement au Maroc, car câeĂ»
effer une rĂ©alisation rĂ©volutionnaire sur la guerre. La premiĂšre chose quâil eĂ»t re pour convaincre les Maures de la bonne foi du gouvernement, câĂ©tait procl
ssitĂŽt la libĂ©ration du Maroc. Et nous pouvons imaginer si câeĂ»t Ă©tĂ© agrĂ©able ance ! La meilleure occasion stratĂ©gique de la guerre fut donc nĂ©gligĂ©e dans le poir dâapaiser le capitalisme français et britannique. La politique communiste teute Ă restreindre la guerre Ă la mesure dâune guerre ordinaire, non rĂ©volutionnerre pour laquelle le gouvernement se trouvait sĂ©rieusement handicapĂ©. Car une gucette sorte exige dâĂȘtre gagnĂ©e par des moyens matĂ©riels ; autrement dit, en fi
mpte, par une fourniture illimitĂ©e dâarmes ; or, le principal fournisseur dâarmeuvernement, lâU.R.S.S., Ă©tait, gĂ©ographiquement, trĂšs dĂ©savantagĂ© par rapport Ă lâIĂ lâAllemagne. Peut-ĂȘtre le mot dâordre du P.O.U.M. et des anarchistes, « la guerre
volution ne doivent pas ĂȘtre sĂ©parĂ©es », Ă©tait-il moins le fait dâun songe-creux quâil raissait tout dâabord.
Jâai indiquĂ© mes raisons de penser que la politique antirĂ©volutionnairemmunistes Ă©tait une erreur ; mais, dans la mesure mĂȘme oĂč de cette politique dĂ©ssue de la guerre, je souhaite ardemment de me tromper. Oui, puissĂ©-je me tromr quelque voie quâelle soit obtenue, je souhaite la victoire dans cette guerre. Il turellement pas possible de prĂ©dire actuellement ce qui arrivera. Il est de lâordreoses possibles que le gouvernement opĂšre de nouveau une conversion vers la gau
e les Maures se soulĂšvent de leur propre initiative, que lâAngleterre dĂ©cide dâachettrait de lâItalie, que la guerre soit gagnĂ©e par des moyens uniquement militairmment savoir ! Jâai exprimĂ© mon opinion ; le temps se chargera de montrer jusel point jâĂ©tais dans la vĂ©ritĂ© ou dans lâerreur.
Mais en fĂ©vrier 1937 je ne voyais pas les choses tout Ă fait sous ce jour. Jâalade dâinaction sur le front dâAragon, et jâavais conscience surtout de nâavoir pasffisamment part au combat. Je songeais souvent Ă cette affiche de recrutemercelone qui interrogeait les passants dâune maniĂšre accusatrice : « Quâavez-vousus, pour la dĂ©mocratie ? » et je sentais que tout ce que jâaurais pu rĂ©pondre, câĂ©
Jâai touchĂ© mes rations. » En mâengageant dans les milices je mâĂ©tais promis de tue
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sciste â aprĂšs tout, si seulement chacun de nous en tuait un, la race en seraiteinte â et je nâen avais encore tuĂ© aucun, câest Ă peine si jâen avais eu lâoccasionturellement, je souhaitais dâaller Ă Madrid. Personne dans lâarmĂ©e, quelle que fĂ»tinion politique, qui ne souhaitĂąt dâĂȘtre sur le front de Madrid. Pour cela il sobablement nĂ©cessaire de passer dans les Brigades internationales, car le P.O.avait Ă prĂ©sent que trĂšs peu de troupes Ă Madrid et les anarchistes moins quâau dĂ©b
Pour le moment, naturellement, je devais rester lĂ oĂč jâĂ©tais sur le front, nnonçai Ă tous mon intention, lorsque nous irions en permission, de demander Ă
utĂ©, si possible, dans les Brigades internationales. Ce serait me placer sous la dires communistes. Aussi plusieurs de mes camarades essayĂšrent de mâen dissuader, rsonne ne tenta dâintervenir. Câest une justice Ă rendre que de dire quâon ne faĂšre la chasse Ă lâhĂ©rĂ©tique dans le P.O.U.M., trop peu peut-ĂȘtre, Ă©tant donnĂ©constances ; Ă condition de nâĂȘtre pas pro-fasciste, personne nâĂ©tait inquiĂ©tĂ© utenir des opinions hĂ©tĂ©rodoxes. Jâai passĂ© une bonne partie de mon temps danlices Ă critiquer Ă©nergiquement la « ligne » du P.O.U.M. sans que cela mâait jausĂ© dâennuis. On nâexerçait mĂȘme pas de pression dâaucune sorte sur quelquâun po
re devenir membre politique du parti ; ce quâĂ©taient pourtant, je crois, la plupartliciens. Je nâai, quant Ă moi, jamais adhĂ©rĂ© au parti â jâen ai dâailleurs Ă©prouvgret plus tard, lors de la suppression du P.O.U.M.
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APPENDICE II
CE QUE FURENT LES TROUBLES DE MAI à BARCELONE Si la controverse politique ne vous intéresse pas, non plus que cette foule de p
sous-partis aux noms embrouillants (à peu prÚs comme ceux des généraux danserre chinoise), alors, je vous en prie, dispensez-vous de lire ce qui va suivre.
pugne dâavoir Ă entrer dans tous les dĂ©tails de la polĂ©mique entre les partis ; mme si lâon plongeait dans un puisard dâaisances. Mais il est nĂ©cessaire dâessĂ©tablir la vĂ©ritĂ©, dans toute la mesure du possible. Cette sordide bagarre dans unentaine a plus dâimportance quâil ne pourrait sembler Ă premiĂšre vue.
Il ne sera jamais possible de donner un compte rendu des combats de Barcesolument exact et impartial, parce que les documents nĂ©cessaires font dĂ©faut.storiens futurs nâauront rien sur quoi sâappuyer, Ă part une masse dâĂ©critopagande et dâattaques partisanes. Jâai moi-mĂȘme peu de donnĂ©es, en dehors de cei vu de mes propres yeux et de ce que mâont appris dâautres tĂ©moins oculaires q
ois dignes de foi. Il mâest cependant possible de rĂ©futer quelques-uns des menso plus flagrants et dâaider Ă tirer les choses au clair.
PremiÚrement, que se passa-t-il réellement ?Depuis un certain temps déjà la situation était tendue dans toute la Catalogne
nseignĂ© le lecteur (dans lâAppendice I) sur le conflit entre les communistes earchistes. Aux environs de mai 1937 les choses en Ă©taient arrivĂ©es au point quâune i
olente paraissait inĂ©vitable. La cause directe de la friction fut lâordre donnĂ© puvernement de rendre toutes les armes privĂ©es, dans le temps mĂȘme oĂč il dĂ©cid
Ă©ation dâune force de police « non politique » et puissamment armĂ©e, dont devrre exclus les membres des syndicats. Tout le monde comprit clairement la significatelles mesures et que, de toute Ă©vidence, le prochain coup consisterait Ă pre
ssession de quelques-unes des industries de base contrÎlées par la C.N.T. Ajoutez à ressentiment accumulé dans la classe ouvriÚre du fait du contraste croissanhesse et de pauvreté, et le vague sentiment général que la révolution avait été sabaucoup de gens furent agréablement surpris que le 1er mai se fût passé sans éme3 mai, le gouvernement décida de prendre possession du Central téléphonique do
nctionnement avait été assuré depuis le début de la guerre principalement par
availleurs membres de la C.N.T. ; on allĂ©gua quâil marchait mal et que mmunications officielles Ă©taient interceptĂ©es. Salas, le chef de la police (en passa-t-il ou non ses instructions ?) envoya trois camions de gardes civils armĂ©s sCentral, tandis que des policiers Ă©galement armĂ©s, mais en civil, faisaient dĂ©gagees avoisinantes. Ă peu prĂšs Ă la mĂȘme heure, des dĂ©tachements de gardes cmparĂšrent dâautres immeubles situĂ©s en des points stratĂ©giques. Quelle quâait pu
ntention vĂ©ritable, tout le monde crut que câĂ©tait lĂ le signal dâune attaque gĂ©nĂ©raC.N.T. par les gardes civils et le P.S.U.C. (communistes et socialistes). Le bruit co
ns toute la ville quâon attaquait les locaux de la classe ouvriĂšre, des anarchistes ascendirent dans la rue, le travail sâarrĂȘta et la lutte sâengagea immĂ©diatement. C
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it-lĂ et le lendemain matin lâon construisit par toute la ville des barricades, et la lutursuivit sans trĂȘve jusquâau matin du 6 mai. Toutefois ce fut une lutte, de pa
autre, surtout dĂ©fensive. Des locaux furent assiĂ©gĂ©s, mais, autant que je sache, aucut pris dâassaut et lâon nâemploya pas dâartillerie. En gros, les forces de la C.N.T., A.I. et du P.O.U.M. tenaient les faubourgs ouvriers tandis que les forces de pmĂ©es et le P.S.U.C. tenaient la partie centrale et rĂ©sidentielle de la ville. Le 6 mai il
armistice, mais on ne tarda pas à reprendre la lutte, probablement à causentatives prématurées de gardes civils pour désarmer les ouvriers de la C.N.T
ndemain matin, cependant, les gens commencĂšrent Ă quitter les barricades deopre mouvement. Ă peu prĂšs jusquâĂ la nuit du 5 mai, la C.N.T. avait eu le dessus eand nombre de gardes civils sâĂ©taient rendus. Mais il nây avait ni direction gĂ©nceptĂ©e, ni plan bien dĂ©terminĂ© â Ă la vĂ©ritĂ©, autant quâon en pouvait juger, pas de
tout, seulement une vague rĂ©solution de rĂ©sistance aux gardes civils. Les leaficiels de la C.N.T. se joignirent Ă ceux de lâU.G.T. pour demander instamment Ă toonde de reprendre le travail ; une chose primait tout : les vivres allaient manquer. telles conditions, personne nâĂ©tait suffisamment sĂ»r de lâissue pour continuer la l
ans lâaprĂšs-midi du 7 mai la situation Ă©tait presque normale. Ce soir-lĂ , six mille gaassaut, envoyĂ©s par mer de Valence, arrivĂšrent pour rĂ©primer le soulĂšvementuvernement donna lâordre de rendre toutes les armes, Ă lâexception de celles dĂ©ter les forces rĂ©guliĂšres, et durant les quelques jours suivants un grand nombre dâarent saisies. DâaprĂšs lâĂ©valuation officielle, il y aurait eu au cours des combats qunts morts et un millier de blessĂ©s. Quatre cents morts, câest peut-ĂȘtre une exagĂ©raais, comme il nây a pas moyen de vĂ©rifier, il faut bien accepter ce nombre pour exact
DeuxiĂšmement, quelles furent les consĂ©quences des troubles ?Ăvidemment, il est impossible de rien avancer avec certitude Ă ce sujet. Au
euve nâexiste que les troubles eurent un effet direct sur le cours de la guerre, massent-ils prolongĂ©s seulement quelques jours de plus, ils nâauraient pu manquer oir. Ils servirent de prĂ©texte Ă placer la Catalogne sous lâautoritĂ© directe de Valenter la dissolution des milices et Ă supprimer le P.O.U.M., et indubitablement ils onssi pour quelque chose dans le renversement du ministĂšre Caballero. Toutefois uvons ĂȘtre assurĂ©s que tout cela aurait eu lieu de toute maniĂšre. La question rĂ©ellsavoir si les travailleurs de la C.N.T. qui descendirent dans la rue ont gagnĂ© ou per
sister en cette circonstance. Ce nâest de ma part que simple conjecture, mais je p
âils ont gagnĂ© plus quâils nâont perdu. La saisie du Central tĂ©lĂ©phonique ne fut qisode dans tout un processus. Depuis lâannĂ©e prĂ©cĂ©dente on avait manĆuvrĂ© tirer graduellement aux syndicats leur pouvoir direct, et un mouvement continansfert se poursuivait pour passer du contrĂŽle de la classe ouvriĂšre Ă un conntralisĂ© conduisant Ă un capitalisme dâĂtat, ou, chose possible, Ă une rĂ©introductiopitalisme privĂ©. Le fait quâil y ait eu alors rĂ©sistance a probablement ralenti lâĂ©volun an aprĂšs le dĂ©clenchement de la guerre les ouvriers de Catalogne avaient perduande partie de leur pouvoir, mais ils Ă©taient encore dans une situation relativemvorable. Elle eĂ»t pu lâĂȘtre moins, sâils sâĂ©taient montrĂ©s disposĂ©s Ă subir passivemute espĂšce de provocation. Il est des cas oĂč il vaut mieux ĂȘtre vaincu aprĂšs avoir
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e de ne pas lutter du tout.TroisiĂšmement, quel dessein â Ă supposer quâil y en eĂ»t un â cachait cette Ă©me
est-il agi dâune sorte de coup dâĂtat ou de tentative rĂ©volutionnaire ? Et le but Ă©tĂ©cisĂ©ment de renverser le gouvernement ? Et cela fut-il concertĂ© dâavance ?
Ă mon avis, la lutte fut concertĂ©e dâavance en ce sens seulement que tout le mttendait Ă ce quâil y en eĂ»t une. Mais rien ne montra quâil y eĂ»t un plan arrĂȘtĂ©, ni tĂ© ni de lâautre. Du cĂŽtĂ© des anarchistes, presque certainement lâaction fut spontar elle fut lâaffaire surtout des simples membres. Les gens du peuple descendirent
rue et leurs leaders politiques suivirent Ă contrecĆur, ou ne suivirent pas du toutuls mĂȘme Ă parler en rĂ©volutionnaires, ce furent les Amis de Durruti, petit groupemtrĂ©miste faisant partie de la F.A.I., et le P.O.U.M. Mais je le rĂ©pĂšte, ils ne faisaientivre, ils ne menaient pas. Les Amis de Durruti diffusĂšrent une sorte de volutionnaire, mais seulement le 5 mai ; on ne peut donc prĂ©tendre que ce tract rigine des troubles, qui sâĂ©taient dĂ©clenchĂ©s dâeux-mĂȘmes deux jours auparavant
aders officiels de la C.N.T. dĂ©savouĂšrent dĂšs le dĂ©but toute lâaffaire. Il y avait Ă celas raisons. Dâabord, du fait que la C.N.T. Ă©tait toujours reprĂ©sentĂ©e dan
uvernement et dans la GĂ©nĂ©ralitĂ©, on pouvait ĂȘtre sĂ»r que ses leaders se montrerus conservateurs que leurs partisans. En second lieu, le but principal des leaders N.T. Ă©tait de parvenir Ă une alliance avec lâU.G.T. ; or la lutte ne pouvait manĂ©largir le fossĂ© entre la C.N.T. et lâU.G.T., tout au moins pour un temps. En troisu â mais ceci on ne lâa gĂ©nĂ©ralement pas su au moment â, les leaders anarchaignirent, si les choses allaient au-delĂ dâun certain point et si les ouvriers sâempara
la ville, comme ils Ă©taient peut-ĂȘtre en mesure de le faire le 5 mai, quâil se prode intervention Ă©trangĂšre. Un croiseur et deux torpilleurs britanniques avaient cerrt, et sans aucun doute il y avait dâautres navires de guerre non loin. Les jour
glais rĂ©vĂ©lĂšrent que ces navires se dirigeaient sur Barcelone « pour protĂ©ger les intitanniques », mais en fait ils sâabstinrent de faire quoi que ce soit : ils ne dĂ©barquĂšs dâhommes et ne recueillirent Ă bord aucun rĂ©fugiĂ©. Il ne peut pas y avoir de certie sujet, mais il Ă©tait pour le moins probable, parce que dans la nature des choses, quvernement britannique, qui nâavait pas remuĂ© le petit doigt pour sauver de Franuvernement espagnol, ne manquerait pas dâintervenir Ă temps pour le sauver dopre classe ouvriĂšre.
Les leaders du P.O.U.M. ne désavouÚrent pas la résistance ; en fait ils incitÚ
urs partisans Ă rester sur les barricades et mĂȘme donnĂšrent leur approbation (dantalla du 6 mai) au tract extrĂ©miste diffusĂ© par les Amis de Durruti. Il demeureande incertitude au sujet de ce tract dont aujourdâhui personne ne semble en mesuoduire un exemplaire. Dans certains journaux Ă©trangers on en parla comme daffiche incendiaire » dont tous les murs de la ville furent « tapissĂ©s ». Il nâyrtainement pas dâaffiche de ce genre. Ă force de recoupements jâai pu dĂ©terminer qact rĂ©clamait : 1) la formation dâun conseil rĂ©volutionnaire (junte) ; 2) lâexĂ©cutioux qui Ă©taient responsables de lâattaque du Central tĂ©lĂ©phonique ; 3) le dĂ©sarmems gardes civils. On ne sait pas non plus trĂšs prĂ©cisĂ©ment jusquâĂ quel point La Ba
prima son accord avec le tract. Personnellement, je nâai vu ni le tract ni La Batalla
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ur-lĂ . Le seul prospectus que jâaie vu pendant les troubles fut celui qui fut tirĂ© paut petit groupement de trotskystes (« bolcheviks-lĂ©ninistes ») le 4 mai, et qui se bodire : « Tout le monde aux barricades, grĂšve gĂ©nĂ©rale dans toutes les industries, ns les industries de guerre ». Autrement dit, il rĂ©clamait que lâon fĂźt ce que lâon jĂ en train de faire. Mais en rĂ©alitĂ© les leaders du P.O.U.M. eurent une attitude pl
hĂ©sitation. Ils nâavaient jamais Ă©tĂ© pour une insurrection tant que ne serait pas gaguerre contre Franco ; mais dâautre part, les ouvriers Ă©tant descendus dans la rue
aders du P.O.U.M. adoptÚrent, de façon assez pédantesque, la ligne de conduite mar
i veut que, lorsque les ouvriers descendent dans la rue, ce soit le devoir des pvolutionnaires dâĂȘtre Ă leurs cĂŽtĂ©s. De lĂ vient que, tout en lançant des mots dâovolutionnaires, sur « le rĂ©veil de lâesprit du 19 juillet », etc., ils firent tout leur posur limiter lâaction des ouvriers Ă la dĂ©fensive. Ils ne donnĂšrent jamais, par exemrdre dâattaquer aucun local ; ils commandĂšrent simplement Ă leurs partisans de r
gilants et (comme je lâai indiquĂ© dans le chapitre IX) dâĂ©viter autant que possiber. La Batalla Ă©galement publia des instructions dâaprĂšs lesquelles il nâĂ©tait permcune troupe de quitter le front{18}. Autant quâon en peut juger, je dirai qu
sponsabilitĂ© du P.O.U.M. se borne Ă avoir engagĂ© tout le monde Ă rester surricades, et probablement Ă avoir persuadĂ© un certain nombre de gens dây resterngtemps quâils ne lâeussent fait sans cela. Ceux qui furent en contact personnel aveaders du P.O.U.M. Ă cette date (je ne le fus pas moi-mĂȘme) mâont dit quâĂ la vĂ©ritĂ© cĂ©taient consternĂ©s par toute lâaffaire, mais quâils avaient le sentiment quâils devaieendre part. AprĂšs coup, naturellement, on tira comme toujours parti de tout litiquement. Gorkin, lâun des leaders du P.O.U.M., alla mĂȘme jusquâĂ parler, un
us tard, des « jours glorieux de mai ». Du point de vue de la propagande, cela a peutĂ© une bonne chose ; il est certain que les effectifs du P.O.U.M. sâaccrurent durant ce
temps qui sâĂ©coula entre les Ă©vĂ©nements de mai et sa suppression. Mais au poine tactique, ce fut probablement une erreur dâappuyer le tract des Amis de Durruti, oupement trĂšs restreint et normalement hostile au P.O.U.M. Vu la surexcitanĂ©rale et tout ce que lâon disait dans lâun et lâautre camp, ce tract ne voulait rien dirus, en rĂ©alitĂ©, que « restez aux barricades » ; mais en semblant lâapprouver, tandislidaridad Obrera, le journal anarchiste, le dĂ©savouait, les leaders du P.O.
cilitĂšrent la tĂąche Ă la presse communiste pour prĂ©tendre par la suite que les trouaient Ă©tĂ© une sorte dâinsurrection fomentĂ©e uniquement par le P.O.U.M. Toutefois
uvons ĂȘtre persuadĂ©s que la presse communiste aurait, de toute maniĂšre, trouvĂ© mle prĂ©tendre. Ce nâĂ©tait rien en comparaison des accusations qui furent lancĂ©eant et aprĂšs, sur de plus faibles apparences. Les leaders de la C.N.T. ne gagnĂšrenand chose par leur attitude plus prudente ; on les loua de leur loyalisme, mais, dĂšsccasion sâen prĂ©senta, on les Ă©vinça du gouvernement et de la GĂ©nĂ©ralitĂ©.
Autant quâon en peut juger dâaprĂšs ce que disaient les gens sur le moment, il nâlle part un vĂ©ritable dessein rĂ©volutionnaire. On trouvait derriĂšre les barricades susimples travailleurs de la C.N.T. et, parmi eux, probablement quelques travailleu
U.G.T. ; et ce quâils cherchaient ce nâĂ©tait pas Ă renverser le gouvernement, msister Ă ce quâils considĂ©raient, Ă tort ou Ă raison, comme une attaque de la polic
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t une action essentiellement dĂ©fensive que la leur et je doute fort quâon soit en drodĂ©peindre, ainsi que lâont fait presque tous les journaux Ă©trangers, comme
nsurrection ». Car une « insurrection » implique une action agressive et un plan prplus exactement parler, ce fut une Ă©meute â une Ă©meute trĂšs sanglante parce que deux camps on avait des armes Ă feu en main et quâon Ă©tait disposĂ© Ă sâen servir.
Mais sur le chapitre des intentions, que faut-il penser de lâautre camp ? Sâil ne s agi dâun coup dâĂtat anarchiste, sâest-il agi peut-ĂȘtre dâun coup dâĂtat communi
un effort concertĂ© pour Ă©craser dâun seul coup le pouvoir de la C.N.T. ?
Je ne le crois pas, bien que certains faits pourraient amener Ă pareil soupçon. gnificatif que quelque chose de tout Ă fait semblable (la saisie du Central tĂ©lĂ©phonr la police armĂ©e agissant dâaprĂšs des ordres reçus de Barcelone) se soit prodrragone deux jours plus tard. Et Ă Barcelone le raid sur le Central tĂ©lĂ©phonique ns un acte isolĂ©. En diffĂ©rentes parties de la ville des dĂ©tachements de gardes civils embres du P.S.U.C. sâemparĂšrent de locaux situĂ©s en des points stratĂ©giques, sactement juste avant le dĂ©clenchement des troubles, en tout cas avec une surprenomptitude. Mais ce quâil ne faut pas oublier, câest que cela sâest passĂ© en Espagn
n en Angleterre. Barcelone est une ville ayant dans son histoire un long passerres de rues. En de tels endroits les choses vont vite, les factions sont tonstituĂ©es, chacun connaĂźt la gĂ©ographie politique locale, et dĂšs que partent les premups de feu les gens sont aussitĂŽt en place presque comme dans des exerciceuvetage. Probablement les responsables de la saisie du Central tĂ©lĂ©phonttendaient-ils Ă des troubles â quoique peut-ĂȘtre pas sur une Ă©chelle si vaste aient-ils pris des dispositions pour y faire face. Mais il ne sâensuit pas quâils projetae attaque gĂ©nĂ©rale contre la C.N.T. Pour deux raisons, je ne crois pas que dâaucunait fait des prĂ©paratifs en vue dâune lutte gĂ©nĂ©ralisĂ©e :
1) Aucun des deux camps nâavait amenĂ© de troupes Ă Barcelone auparavanmbat se livra seulement entre ceux qui Ă©taient dĂ©jĂ prĂ©cĂ©demment Ă Barcelonrtout entre les civils et la police.
2) Les vivres manquĂšrent presque immĂ©diatement. Or tous ceux qui ont servpagne savent que lâunique activitĂ© de guerre Ă laquelle les Espagnols exceellement est le ravitaillement de leurs troupes. Il est fort improbable que si lâunversaires avait envisagĂ© une ou deux semaines de guerre de rues et une grĂšve gĂ©nĂ©
nâeĂ»t pas auparavant constituĂ© des rĂ©serves de vivres.
Venons-en enfin Ă la question du juste et de lâinjuste en cette affaire.On a fait un terrible raffut dans la presse Ă lâĂ©tranger, mais, comme dâhabitudeul son de cloche a pu se faire entendre. Si bien que les troubles de Barcelone onĂ©sentĂ©s comme une insurrection des anarchistes et des trotskystes dĂ©loyauxpoignardaient le gouvernement espagnol dans le dos », et ainsi de suite. Ce qui sâssĂ© nâĂ©tait pas tout Ă fait aussi simple que cela. Il est hors de doute que, lorsque
es en guerre avec votre ennemi mortel, il est prĂ©fĂ©rable de ne pas commencer par ttre entre vous dans votre propre camp ; mais il convient de ne pas oublier quâilre deux pour une querelle et que les gens ne se mettent pas Ă construire des barricns que lâon se soit livrĂ© Ă leur Ă©gard Ă des actes quâils considĂšrent comme
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ovocation.La source des troubles, ce fut lâordre donnĂ© par le gouvernement aux anarchiste
ndre leurs armes. Ce qui, dans la presse anglaise traduit en termes anglais, donna avait un extrĂȘme besoin dâarmes sur le front dâAragon oĂč lâon ne pouvait pa
voyer parce que les anarchistes mauvais patriotes les retenaient Ă lâarriĂšre. PrĂ©sensi les choses câest feindre dâignorer lâĂ©tat rĂ©el des choses en Espagne. Tout le mvait que les anarchistes et le P.S.U.C., les uns aussi bien que les autres, amassaienmes ; et quand les troubles Ă©clatĂšrent Ă Barcelone, cela devint encore plus manife
ns lâun et lâautre camp on exhiba des armes en abondance. Les anarchistes savaienen que mĂȘme sâils consentaient, pour leur propre part, Ă rendre leurs armes, le P.S.parti politiquement le plus puissant en Catalogne, nâen conserverait pas moins, lunnes ; et câest en effet ce qui se passa, lorsque les combats eurent pris finendant, dans les rues lâon voyait des quantitĂ©s dâarmes, qui eussent Ă©tĂ© les bienver le front dâAragon, et qui Ă©taient retenues Ă lâarriĂšre pour les forces de la police «litique ». Et sous tout cela il y avait lâinconciliable diffĂ©rend entre communistarchistes, qui devait fatalement conduire, tĂŽt ou tard, Ă quelque conflit. Depuis le d
la guerre le parti communiste espagnol sâĂ©tait Ă©normĂ©ment accru en nombre et caparĂ© la majeure partie du pouvoir politique ; de plus, des milliers de communrangers Ă©taient venus en Espagne et bon nombre dâentre eux dĂ©claraient ouvertemur intention de « liquider » lâanarchisme aussitĂŽt quâon aurait gagnĂ© la guerre coanco. Dans de telles circonstances lâon pouvait difficilement sâattendre Ă ce quarchistes rendissent les armes dont ils avaient pris possession dans lâĂ©tĂ© de 1936.
La saisie du Central tĂ©lĂ©phonique ne fut que lâĂ©tincelle qui mit le feu Ă une boi nâattendait que cela pour exploser. On peut tout juste admettre que les responsamaginĂšrent peut-ĂȘtre quâil nâen rĂ©sulterait pas dâĂ©meute. Companys, le prĂ©si
talan, aurait dĂ©clarĂ© en riant, peu de jours auparavant, que les anarchcaisseraient tout{19}. Mais ce nâĂ©tait assurĂ©ment pas un acte sage. Depuis des moihauffourĂ©es sanglantes entre communistes et anarchistes se succĂ©daient. La CataloparticuliĂšrement Barcelone, Ă©tait dans un Ă©tat de tension qui avait dĂ©jĂ donnĂ© lieu garres dans les rues, Ă des assassinats, etc. Et voilĂ que soudain le bruit courut ute la ville que des hommes armĂ©s Ă©taient en train dâattaquer les locaux donvriers sâĂ©taient emparĂ©s au cours des combats de juillet et Ă la possession desqueachaient une grande importance sentimentale. Il faut se rappeler que les gardes c
Ă©taient pas aimĂ©s de la population ouvriĂšre. Depuis des gĂ©nĂ©rations la guardia ut simplement Ă©tĂ© un apanage du grand propriĂ©taire terrien et du patron ; et les gavils Ă©taient doublement haĂŻs parce quâon soupçonnait, et fort justement, ntiments antifascistes dâĂȘtre des plus douteux{20}. Il est probable que ce quscendre le peuple dans la rue dans les premiĂšres heures, ce fut une Ă©motion tmblable Ă celle qui lâavait poussĂ© Ă rĂ©sister aux gĂ©nĂ©raux rebelles au dĂ©but de la guen sĂ»r, on peut soutenir que les travailleurs de la C.N.T. eussent dĂ» remettre le CeĂ©phonique sans protester. Sur ce sujet lâopinion de chacun dĂ©pend de la position face de la question gouvernement centralisĂ© ou contrĂŽle ouvrier ? On pourrait ar
ec plus de pertinence : « Oui, la C.N.T. avait trÚs probablement une excuse. Mais,
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mĂȘme, lâon Ă©tait en guerre et ils nâavaient pas le droit dâentamer une lutte Ă lâarriĂšront. » LĂ , je suis parfaitement dâaccord. Tout dĂ©sordre intĂ©rieur dut probablement anco. Mais quâest-ce qui, au fait, dĂ©clencha la lutte ? Que le gouvernement ait en le droit de saisir le Central tĂ©lĂ©phonique, il nâen reste pas moins vrai, et câe
mportant, quâĂ©tant donnĂ© les circonstances câĂ©tait une mesure qui devait fatalemclencher le conflit. CâĂ©tait un acte de provocation, un geste qui signifiait en rĂ©aliti Ă©tait vraisemblablement accompli pour signifier : « Câen est fini de votre pouvst nous, Ă prĂ©sent, qui sommes les maĂźtres ». Il nây avait pas de bon sens Ă sâattend
tre chose quâĂ de la rĂ©sistance. Si lâon garde un souci dâĂ©quitĂ©, on ne peut pas ne pndre compte que la faute nâĂ©tait pas â ne pouvait pas ĂȘtre, dans une affaire de rte â toute du mĂȘme cĂŽtĂ©. Si lâon a communĂ©ment acceptĂ© une version des Ă©vĂ©nemi ne fait Ă©tat que dâun seul son de cloche, câest tout simplement que les p
volutionnaires espagnols nâont pas pied dans la presse Ă©trangĂšre. Dans la prglaise, en particulier, il vous faudrait longtemps chercher avant de dĂ©couvrir, mporte quelle pĂ©riode de la guerre, quelque allusion favorable aux anarchpagnols. Ils ont Ă©tĂ© systĂ©matiquement dĂ©nigrĂ©s et, je le sais par ma propre expĂ©rien
t presque impossible dâobtenir lâimpression dâun Ă©crit pour leur dĂ©fense.Jâai tĂąchĂ© de parler des troubles de Barcelone objectivement, mais, Ă©videmmrsonne ne peut ĂȘtre absolument objectif Ă propos dâune question de ce genre. Onatiquement obligĂ© de prendre parti, et il doit apparaĂźtre assez clairement de quel cĂŽis. En outre, je dois inĂ©vitablement avoir commis des erreurs sur les faits, ulement dans cet Appendice, mais en dâautres parties de ce rĂ©cit. Il est trĂšs diffĂ©crire avec exactitude sur la guerre dâEspagne, car lâon manque de documents qui sotre chose que de la propagande. Je mets donc en garde tous mes lecteurs contrrtialitĂ© et contre mes erreurs. Toutefois jâai fait tout mon possible pour ĂȘtre honnĂȘt
n verra que mon compte rendu diffĂšre totalement de celui quâa donnĂ© la prrangĂšre, spĂ©cialement la presse communiste. Il est nĂ©cessaire dâexaminer la vermmuniste parce quâelle a Ă©tĂ© publiĂ©e dans le monde entier, parce quâelle nâa pas cpuis dâĂȘtre trĂšs frĂ©quemment complĂ©tĂ©e, et parce quâelle est probablement la nĂ©ralement acceptĂ©e.
Dans la presse communiste et pro-communiste, toute la responsabilitĂ© des trouBarcelone fut rejetĂ©e sur le P.O.U.M. Lâaffaire fut prĂ©sentĂ©e non comme une Ă©m
ontanée, mais comme une insurrection préméditée et préparée contre
uvernement, et fomentĂ©e uniquement par le P.O.U.M. avec lâaide dâun petit nom« incontrĂŽlables » abusĂ©s. Qui plus est, ce fut finalement un complot fasciste, mĂ©cution dâaprĂšs des ordres fascistes, et destinĂ© Ă dĂ©clencher Ă lâarriĂšre une guerre cĂ paralyser ainsi le gouvernement. Le P.O.U.M. Ă©tait la « cinquiĂšme colonn
anco » â une organisation « trotskyste » travaillant en accord avec les fascistes. SDaily Worker du 11 mai :
« Les agents allemands et italiens qui affluÚrent à Barcelone, sous prétext
prĂ©parer » le fameux « congrĂšs de la IV e Internationale », nâavaient quâune sande tĂąche. Ă savoir :
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« Ils devaient â avec le concours des trotskystes de lâendroit â prĂ©pareovoquant dĂ©sordres et effusions de sang un Ă©tat de choses tel quâil permĂźt lemands et aux Italiens de dĂ©clarer quâil leur Ă©tait « impossible dâexercer le conval des cĂŽtes catalanes du fait des troubles rĂ©gnant Ă Barcelone », et par consĂ©qâil leur Ă©tait « impossible de faire autrement que de dĂ©barquer des trouprcelone ».
« Autrement dit, ce quâils prĂ©paraient câĂ©tait une situation pouvant servir de prĂ©x gouvernements allemand et italien Ă faire dĂ©barquer tout Ă fait ouvertement su
tes catalanes des troupes de terre ou de lâinfanterie de marine, en dĂ©clarant quâils saient que « pour rĂ©tablir lâordre »...
« Pour cela, les gouvernements allemand et italien avaient un instrument toutlâespĂšce, lâorganisation trotskyste connue sous le nom de P.O.U.M.
« Le P.O.U.M., agissant avec le concours dâĂ©lĂ©ments criminels bien connus et rtain nombre de fourvoyĂ©s appartenant aux organisations anarchistes, conçut le ganisa et mena lâattaque sur lâarriĂšre, de façon Ă la faire exactement coĂŻncider ttaque sur le front Ă Bilbao », etc.
Dans la suite de lâarticle, les troubles de Barcelone deviennent lâ« attaquO.U.M. » et, dans un autre article de ce mĂȘme numĂ©ro de journal, on affirme que «
P.O.U.M. indiscutablement quâil faut imputer la responsabilitĂ© du sang verstalogne ». Inprecor du 29 mai dĂ©clare que les barricades Ă©levĂ©es Ă Barcelone le fuuniquement par des membres du P.O.U.M., organisĂ©s par ce parti en vue de che ».
Je pourrais faire encore un grand nombre de citations, mais tout celaffisamment clair : le P.O.U.M. Ă©tait entiĂšrement responsable et le P.O.U.M. agi
aprĂšs les ordres des fascistes. Je donnerai tout Ă lâheure encore quelques traitsmptes rendus parus dans la presse communiste ; on verra quâils se contredisent ex Ă tel point quâils en perdent absolument toute valeur. Mais il convient aupara
attirer lâattention sur plusieurs raisons a priori qui font que la version des troubleai, insurrection fasciste menĂ©e par le P.O.U.M., est autant dire incroyable :
1) Le P.O.U.M. nâavait ni lâimportance numĂ©rique ni lâinfluence nĂ©cessaire ovoquer des dĂ©sordres dâune telle ampleur. Encore moins avait-il le pouvoir dâordogrĂšve gĂ©nĂ©rale. Le P.O.U.M. Ă©tait une organisation politique sans base vĂ©ritable
syndicats et il nâeĂ»t guĂšre Ă©tĂ© plus capable dâorganiser une grĂšve Ă Barcelone sons par exemple, le parti communiste anglais le serait de dĂ©clencher la grĂšve gĂ©nGlasgow. Comme je lâai dĂ©jĂ dit, les leaders du P.O.U.M. ont pu par leur attintribuer quelque peu Ă prolonger la lutte ; mais, mĂȘme lâeussent-ils voulu qauraient pas pu en ĂȘtre les promoteurs.
2) Le prĂ©tendu complot fasciste se fonde sur une simple affirmation, que touts dĂ©mentent. On nous dit que le plan Ă©tait de permettre aux gouvernements allemitalien de dĂ©barquer des troupes en Catalogne : mais aucun transport de troemand ou italien nâapprocha de la cĂŽte. Quant au « congrĂšs de la IV e Internationaaux « agents allemands et italiens », câest un pur mythe ! Autant que je sache, il nâ
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ĂȘme jamais Ă©tĂ© question dâun congrĂšs de la IV e Internationale. On avait fait vaguemprojet dâun congrĂšs du P.O.U.M. et de ses partis-frĂšres (I.L.P. anglais, S.A.P. allem
c.) ; on en avait approximativement fixĂ© lâĂ©poque dans le courant de juillet â deux us tard â et pas un seul dĂ©lĂ©guĂ© nâĂ©tait encore arrivĂ©. Les « agents allemandliens » nâont pas dâexistence en dehors des colonnes du Daily Worker. Tous ceuxt passĂ© la frontiĂšre Ă cette Ă©poque savent quâil nâĂ©tait pas si facile que cela dâ« affluEspagne, et pas plus facile, du reste, dâen sortir.
3) Il ne se passa rien, ni Ă LĂ©rida, la principale place forte du P.O.U.M., ni s
ont. Il saute aux yeux que si les leaders du P.O.U.M. avaient voulu aider les fascisteraient donnĂ© lâordre Ă leurs milices de quitter le front et de laisser les fascistes pails ne firent ni ne suggĂ©rĂšrent rien de semblable. Et on ne ramena pas dâhomme
ont les jours prĂ©cĂ©dents, quoiquâil eĂ»t Ă©tĂ© assez facile de faire revenir clandestinemrcelone, sous divers prĂ©textes, disons un ou deux milliers de miliciens. Et il nâycune tentative, mĂȘme indirecte, de sabotage du front : aucun arrĂȘt dans les transpvivres, de munitions, etc. Je puis lâaffirmer, car jâai, par la suite, fait une enquĂȘte
jet. Et enfin surtout, une insurrection concertĂ©e, du genre de celle que lâon nous p
t nécessité des mois de préparation, une propagande subversive dans les milices, etl signe, nul bruit de tout cela. Le fait que les milices au front ne prirent aucune pinsurrection » devrait paraßtre, à lui seul, concluant. Si le P.O.U.M. avait réellem
Ă©parĂ© un coup dâĂtat, il est inconcevable quâil ne se fĂ»t pas servi des dix milliers envhommes armĂ©s qui constituaient la seule force quâil eĂ»t.
De ce qui prĂ©cĂšde il ressort assez clairement que la thĂšse communiste dnsurrection » du P.O.U.M. selon des ordres fascistes repose sur moins que rien. Jecore vous communiquer quelques extraits de la presse communiste. Les comndus communistes de lâincident-point de dĂ©part, de lâattaque du Central tĂ©lĂ©phon
nt de nature Ă ouvrir les yeux ; ils ne sâaccordent entre eux sur aucun point sauui de rejeter toute la responsabilitĂ© sur les adversaires politiques. Il est Ă remare dans les journaux communistes anglais, la responsabilitĂ© a dâabord Ă©tĂ© rejetĂ©e suarchistes, et seulement plus tard sur le P.O.U.M. Il y a une raison bien Ă©vidente Ă ut le monde en Angleterre nâa pas entendu parler de « trotskysme », tandis que trsonne de langue anglaise frissonne au mot « anarchiste ». Quâon fasse donc dâavoir que ce sont les anarchistes qui sont impliquĂ©s dans cette affaire et lâatmosphÚévention souhaitĂ©e sera crĂ©Ă©e ; aprĂšs quoi il ne restera plus quâĂ tranquillement
sser la responsabilitĂ© sur le dos des « trotskystes » ! Le Daily Worker du 6mmence ainsi : « Une bande dâanarchistes minoritaires a, au cours des journĂ©es de lundi et m
isi et tenté de conserver le bureau central des téléphones et télégraphes, et ils se s à tirer des coups de feu dans les rues. »
Rien de tel pour commencer quâun renversement des rĂŽles ! Les gardes c
aquent un local occupĂ© par la C.N.T., et voilĂ que câest la C.N.T. que lâon reprĂ©smme donnant lâassaut Ă son propre local â sâattaquant elle-mĂȘme en fait ! Dâautre
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Daily Worker du 11 mai déclare : « Le ministre de la Sécurité publique, Aiguade, Catalan de gauche, et le commis
nĂ©ral Ă lâOrdre public, Rodrigue Salas, des socialistes unifiĂ©s, envoyĂšrent la pmĂ©e de la RĂ©publique au Central tĂ©lĂ©phonique pour en dĂ©sarmer les emplembres pour la plupart des syndicats de la C.N.T. »
VoilĂ qui ne semble pas sâaccorder trĂšs bien avec la prĂ©cĂ©dente affirmati
anmoins le Daily Worker ne fit pas paraßtre la moindre insertion pour reconnaßtretait trompé la premiÚre fois. Le Daily Worker du 11 mai affirme que les tracts des ADurruti, qui furent désavoués par la C.N.T., parurent les 4 et 5 mai, durant les com
precor (22 mai) dĂ©clare quâils parurent le 3 mai, avant les combats, et ajoute que, Ă©sence de ces faits » (la parution de diffĂ©rents tracts) :
« La police, avec Ă sa tĂȘte le prĂ©fet de police en personne, occupa le Ce
Ă©phonique au cours de lâaprĂšs-midi du 3 mai. Des coups de feu furent tirĂ©s sur la p
ns lâexercice de ses fonctions. Ce fut le signal pour les provocateurs qui se mirent Ă r toute la ville pour dĂ©clencher des Ă©chauffourĂ©es. » Et voici ce que dit Inprecor du 29 mai : « Ă trois heures de lâaprĂšs-midi le commissaire Ă la SĂ©curitĂ© publique, le cama
las, se rendit au Central téléphonique qui avait été occupé la nuit précédentenquante membres du P.O.U.M. et divers éléments incontrÎlables. »
VoilĂ qui paraĂźt plutĂŽt curieux ! Lâoccupation du Central tĂ©lĂ©phonique par cinquembres du P.O.U.M. est ce que lâon peut appeler un dĂ©tail pittoresque et on se sendu Ă ce que quelquâun lâeĂ»t remarquĂ© au moment mĂȘme. Or il apparaĂźt quâon ncouvert que trois ou quatre semaines plus tard ! Dans un autre numĂ©ro dâInpreco
nquante membres du P.O.U.M. deviennent cinquante miliciens du P.O.U.M. Il sfficile de rassembler Ă propos dâun mĂȘme fait plus de contradictions que ntiennent ces quelques courts extraits. Une fois ce sont les membres de la C.N.Taquent le Central, une autre fois ce sont eux qui y sont attaquĂ©s ; tour Ă tou
Ă©tend quâun tract paraĂźt avant la saisie du Central tĂ©lĂ©phonique et quâil est causle-ci, ou quâil paraĂźt aprĂšs cette saisie et quâil en est la consĂ©quence ; tantĂŽcupants du Central sont des membres de la C.N.T., et tantĂŽt ce sont des membreO.U.M. â et ainsi de suite. Et dans un numĂ©ro ultĂ©rieur du Daily Worker (celuuin), M. J.-R. Campbell nous informe que le gouvernement nâa fait saisir le CeĂ©phonique que parce quâon avait dĂ©jĂ Ă©levĂ© des barricades !
Faute de place, je nâai fait ici Ă©tat que des comptes rendus se rapportant Ă uncident, mais les mĂȘmes contradictions entre les rĂ©cits se retrouvent Ă travers touesse communiste. En outre maintes relations de faits sont de toute Ă©videncestoires inventĂ©es Ă plaisir. Voici, par exemple, ce que rapporte le Daily Worker (7
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qui aurait Ă©tĂ© dit Ă lâambassade dâEspagne Ă Paris : « Lâun des traits les plus significatifs du soulĂšvement fut quâau balcon de plus
aisons de Barcelone on fit flotter le vieux drapeau monarchiste, dans la convirtainement que les agents du soulĂšvement sâĂ©taient rendus maĂźtres de la situation.
Le Daily Worker a trÚs probablement reproduit en toute bonne foi cette déclara
ais ceux qui, Ă lâambassade dâEspagne, en sont les auteurs ne peuvent quâavoir m
libĂ©rĂ©ment. On ne me fera pas croire quâaucun Espagnol puisse ĂȘtre aussi maurant de la situation intĂ©rieure ! Un drapeau monarchiste Ă Barcelone ! Mais câeĂ»seule chose capable dâunir en un rien de temps les factions rivales ! MĂȘme
mmunistes sur place nâont dĂ» pouvoir sâempĂȘcher de sourire en lisant cela ! Et il emĂȘme pour les rĂ©cits publiĂ©s dans les divers journaux communistes au sujet des ant le P.O.U.M. est censĂ© sâĂȘtre servi pendant lâ« insurrection ». Ne peuvent y croireux qui ont tout ignorĂ© des faits rĂ©els. Dans le Daily Worker du 17 mai, M. Ftcairn dĂ©clare :
« Ils se servirent effectivement de toutes sortes dâarmes pour leur attentat. De ce depuis des mois ils volaient et cachaient, et mĂȘme de tanks quâils volĂšrent dansernes tout au dĂ©but de lâinsurrection. Il est Ă©vident que des vingtaines de mitrailleplusieurs milliers de fusils sont encore en leur possession. »
Inprecor du 29 mai déclare également : « Le 3 mai le P.O.U.M. avait à sa disposition quelques douzaines de mitrailleus
usieurs milliers de fusils... Sur la place dâEspagne, les trotskystes mirent en actiontteries de canons de 75 qui Ă©taient destinĂ©es au front dâAragon et que les miaient soigneusement cachĂ©es sur place dans leurs locaux. »
M. Pitcairn ne nous dit pas comment et quand il devint Ă©vident que le P.O.
ssĂ©dait des vingtaines de mitrailleuses et plusieurs milliers de fusils. Jâai fanombrement des armes que contenaient trois des principaux locaux du P.O.U.Mviron quatre-vingt fusils, quelques bombes, aucune mitrailleuse, autrement dit,
ste ce qui Ă©tait nĂ©cessaire pour armer les gardes quâĂ cette Ă©poque tous les plitiques plaçaient dans leurs locaux. Il paraĂźt curieux que, ensuite, lorsque le P.O.t Ă©tĂ© supprimĂ© et tous ses locaux saisis, ces milliers dâarmes nâaient jamaiscouvertes, en particulier les tanks et les canons qui ne sont pas prĂ©cisĂ©ment le genroses qui se peuvent cacher dans une cheminĂ©e ! Mais ce qui est rĂ©vĂ©lateur danux dĂ©clarations ci-dessus, câest la totale ignorance des conditions locales dont moignent. Selon M. Pitcairn, le P.O.U.M. vola des tanks « dans les casernes ». Il ne pas dans quelles casernes. Les miliciens du P.O.U.M. qui se trouvaient Ă Barceloativement en petit nombre Ă cette Ă©poque, car lâon avait cessĂ© de recruter directemur les milices de partis â partageaient la caserne LĂ©nine avec des troupes de lâar
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pulaire considĂ©rablement plus nombreuses. M. Pitcairn nous demande de croirensĂ©quent, que le P.O.U.M. fut, pour voler ces tanks, de connivence avec lâarpulaire ! MĂȘme remarque au sujet des « locaux » dans lesquels furent cachĂ©snons de 75. Aucune indication pour nous apprendre oĂč se trouvaient ces locauxmbreux journaux ont parlĂ© de ces batteries de canons qui auraient Ă©tĂ© mises en acr la place dâEspagne, mais je crois que nous pouvons dire avec certitude quâelles nmais existĂ©. Comme je lâai dĂ©jĂ relatĂ©, je nâai entendu moi-mĂȘme aucun tir dâartilrant les troubles, et pourtant je nâĂ©tais guĂšre quâĂ un mille de la place dâEspa
uelques jours plus tard jâai examinĂ© la place dâEspagne et nâai pu trouver sur aumeuble la moindre trace dâĂ©clats dâobus. Et un tĂ©moin oculaire qui Ă©tait danisinage pendant toute la durĂ©e des troubles dĂ©clare formellement quâon nây a jamaraĂźtre aucun canon. (Soit dit en passant, cette histoire de canons volĂ©s pourrait oir eu pour auteur le consul gĂ©nĂ©ral russe, Antonov-Ovseenko. Câest lui, en tout cascommuniqua Ă un journaliste anglais bien connu qui, ensuite, la rĂ©pĂ©ta en toute b
dans un hebdomadaire. Depuis, Antonov-Ovseenko a Ă©tĂ© « Ă©purĂ© ». Dans qesure cela porte atteinte Ă sa crĂ©dibilitĂ©, je ne sais.) La vĂ©ritĂ©, bien entendu, câest
s contes Ă propos de tanks, canons de campagne et le reste ont Ă©tĂ© inventĂ©s pousoins de la cause, car sinon il eĂ»t Ă©tĂ© bien difficile de concilier dans la version offics Ă©vĂ©nements lâampleur des troubles de Barcelone avec la faiblesse numĂ©riquO.U.M. Or, sâil Ă©tait nĂ©cessaire de crier bien haut que le P.O.U.M. Ă©tait entiĂšremsponsable des troubles, il Ă©tait non moins nĂ©cessaire de crier non moins haut que c
parti insignifiant, sans base, et, selon Inprecor, « ne comptant que quelques mimembres ». Le seul espoir de rendre croyables Ă la fois les deux assertions câĂ©ta
Ă©tendre que le P.O.U.M. possĂ©dait tout lâarmement dâune armĂ©e moderne motorisĂ©Il est impossible, quand on parcourt tous les comptes rendus dans la pr
mmuniste, de ne pas sâapercevoir quâils ont Ă©tĂ© sciemment fabriquĂ©s Ă lâadresse blic ignorant des faits, et quâils nâont dâautre but que de crĂ©er une prĂ©vention. De lĂ emple, des affirmations telles que celles de M. Pitcairn qui, dans le Daily Workemai, prĂ©tend que lâ« insurrection » fut rĂ©primĂ©e par lâarmĂ©e populaire. Lâintentionst de donner Ă lâĂ©tranger lâimpression que la Catalogne tout entiĂšre
goureusement dressĂ©e contre les « trotskystes ». En rĂ©alitĂ©, lâarmĂ©e populaire utre pendant toute la durĂ©e des troubles ; tout le monde Ă Barcelone le savait et ifficile de croire que M. Pitcairn a Ă©tĂ© le seul Ă ne pas le savoir. De lĂ aussi, dans la p
mmuniste, les tours de passe-passe avec les statistiques des tuĂ©s et des blessĂ©s, dat de donner une idĂ©e exagĂ©rĂ©e de lâĂ©chelle des dĂ©sordres. Ă en croire Diaz, le secrĂ©nĂ©ral du parti communiste espagnol, que la presse communiste cite abondammenmbre des morts aurait Ă©tĂ© de neuf cents et celui des blessĂ©s de deux mille cinq clon le ministre de la Propagande, un Catalan, il y eut (et il nâest guĂšre probable us-Ă©value) quatre cents morts et mille cinq cents blessĂ©s. Le parti communiste domise et ajoute encore quelques centaines Ă tout hasard.
Les journaux capitalistes Ă lâĂ©tranger rejetĂšrent en gĂ©nĂ©ral la responsabilitĂ©oubles sur les anarchistes ; quelques-uns cependant adoptĂšrent la « lignmmuniste. Lâun de ceux-ci fut le journal anglais News Chronicle, don
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rrespondant, M. John Langdon Davies, se trouvait Ă Barcelone Ă lâĂ©poque. Voicitraits de son article :
UNE SĂDITION TROTSKYSTE
« ... Non, il ne sâest pas agi dâun soulĂšvement anarchiste ; mais bien dâun pu
ureusement dĂ©jouĂ©, du P.O.U.M. « trotskyste » ayant pour agents dâexĂ©cutionganisations quâil contrĂŽle : les Amis de Durruti et la Jeunesse libertaire... La trag
mmença le lundi aprĂšs-midi, lorsque le gouvernement envoya de la police armĂ©ntral tĂ©lĂ©phonique pour en dĂ©sarmer les employĂ©s, hommes pour la plupart dN.T. De graves irrĂ©gularitĂ©s dans le service y faisaient depuis un certain temps scanne grande foule se rassembla Ă lâextĂ©rieur du Central, sur la place dâEspagne, cepene les hommes de la C.N.T. rĂ©sistaient, se retirant dâĂ©tage en Ă©tage jusquâen hau
mmeuble... Ce nâĂ©tait quâun obscur incident, mais le bruit courut que le gouvernemait sur pied contre les anarchistes. Les rues se remplirent dâhommes armĂ©s... mbĂ©e de la nuit, tous les centres ouvriers et tous les immeubles du gouvernem
aient barricadĂ©s, et Ă dix heures les premiers coups de feu Ă©clatĂšrent, et les premmbulances commencĂšrent Ă sillonner les rues en se frayant passage Ă coups de sirĂšube la fusillade avait gagnĂ© tout Barcelone. Vers la fin du jour, et alors que le noms morts dĂ©passait la centaine, on commença Ă saisir ce qui se passait. La Carchiste et lâU.G.T. socialiste nâĂ©taient pas prĂ©cisĂ©ment, au sens techniquexpression, « descendues dans la rue ». Tant quâelles restĂšrent derriĂšre les barrices sâen tinrent Ă une attitude dâattente vigilante, attitude qui nâexcluait pas le droer sur tout passant armĂ©... Les fusillades qui se dĂ©clenchaient un peu partout fumanquablement aggravĂ©es par des pacos â des individus isolĂ©s, cachĂ©s, des fasciste
nĂ©ral, qui tiraient du haut des toits sans viser rien en particulier, mais dans leaccroĂźtre autant quâils le pouvaient la panique gĂ©nĂ©rale. Mais le mercredi soirmmença Ă comprendre quels Ă©taient les instigateurs de cette sĂ©dition. Tous les maient Ă©tĂ© tapissĂ©s dâune affiche incendiaire, appelant Ă la rĂ©volution immĂ©diaclamant lâexĂ©cution des chefs rĂ©publicains et socialistes. Elle portait la signatureAmis de Durruti ». Le jeudi matin le quotidien anarchiste nia toute connivence drt au sujet de cette affiche, dĂ©clarant nâen avoir pas eu connaissance et la dĂ©sapproais La Batalla, le journal du P.O.U.M., en reproduisit le texte, avec force Ă©loges. A
rcelone, la premiĂšre ville dâEspagne, fut jetĂ©e au carnage par des agents provocateurvant de cette organisation subversive ! »Tout cela ne sâaccorde guĂšre avec les versions communistes que jâai prĂ©cĂ©demm
Ă©es, mais on va voir que mĂȘme en ne considĂ©rant que ce texte, on y trouventradictions. Lâaffaire est tout dâabord dĂ©peinte comme une « sĂ©dition trotskyste »,Ă©sentĂ©e comme rĂ©sultant du raid sur le Central tĂ©lĂ©phonique et de la croyance gĂ©nĂ©e le gouvernement « Ă©tait sur pied contre les anarchistes ». La ville se couvrrricades et derriĂšre ces barricades se trouvent Ă la fois la C.N.T. et lâU.G.T. ; deux jrĂšs paraĂźt lâaffiche incendiaire (un tract en rĂ©alitĂ©), et lâon y veut voir par implicatiint de dĂ©part de toute lâaffaire â un effet prĂ©cĂ©dant la cause, quoi ! Mais voici, en fa
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Ă©sentation erronĂ©e des faits, quelque chose de trĂšs grave : M. Langdon Davies parlmis de Durruti et des Jeunesses libertaires comme dâ« organisations contrĂŽlĂ©es » pO.U.M. Or elles Ă©taient, lâune et lâautre, des organisations anarchistes et nâavcun lien avec le P.O.U.M. Les Jeunesses libertaires, câĂ©tait, au sein des anarchi
Union des Jeunes ; elle Ă©tait aux anarchistes ce quâĂ©taient, par exemple, au P.S.U.CS.U. Quant aux Amis de Durruti, câĂ©tait un petit groupement Ă lâintĂ©rieur de la F.A.i Ă©tait gĂ©nĂ©ralement animĂ© Ă lâĂ©gard du P.O.U.M. dâune Ăąpre hostilitĂ©. Je nâai jamaentendu dire que personne fĂźt Ă la fois partie des deux organisations. Il ne serait g
us faux de prĂ©tendre quâen Angleterre lâUnion socialiste est une organisacontrĂŽlĂ©e » par le parti libĂ©ral ! Est-ce quâil y a lĂ de la part de M. Langdon Danorance ? Dans ce cas, il eĂ»t au moins dĂ» faire preuve dâun peu plus de prudencordant ce sujet trĂšs complexe.
Je nâaccuse pas M. Langdon Davies de mauvaise foi ; mais, il ne sâen cache pitta Barcelone aussitĂŽt aprĂšs la fin des troubles, câest-Ă -dire prĂ©cisĂ©ment au momen
eĂ»t pu commencer une enquĂȘte sĂ©rieuse ; et Ă travers tout son rĂ©cit il apparaĂźt de fdiscutable quâil a acceptĂ© la version officielle dâune « sĂ©dition trotskyste »
ffisante vĂ©rification. Cela crĂšve les yeux, mĂȘme en sâen tenant au passage que jâai Ă la tombĂ©e de la nuit les barricades Ă©taient Ă©levĂ©es », dit-il, et « Ă dix heures emiers coups de feu Ă©clatent. VoilĂ ce que nâeĂ»t certes pu dire un tĂ©moin oculaaprĂšs cela, nous devrions en conclure que câest lâhabitude dâattendre que son adver
construit des barricades pour commencer Ă lui tirer dessus. De ce passage on rmpression quâil sâest Ă©coulĂ© quelques heures entre le moment oĂč lâon a Ă©levrricades et le dĂ©but de la fusillade â alors que, naturellement, câest lâinverse qui u. Jâai Ă©tĂ© tĂ©moin avec beaucoup dâautres des premiers coups de feu Ă©changĂ©s, câĂ©tanne heure dans lâaprĂšs-midi. Et de mĂȘme pour ce qui est de ces « individus isol
des fascistes en gĂ©nĂ©ral » qui tiraient du haut des toits, M. Langdon Davies ne nous comment il put savoir que ces hommes Ă©taient des fascistes. Il est probable quâis grimpĂ© sur les toits pour le leur demander. Tout simplement il a rĂ©pĂ©tĂ© ce quâon, et, comme cela cadre avec la version officielle, il ne le met pas en doute. Ă vrai dirbut de son article, une allusion imprudente au ministre de la Propagande trahit s sources probables de la plupart de ses informations. En Espagne les journalrangers furent immanquablement manĆuvrĂ©s par le ministĂšre de la Propagandeurrait pourtant croire que le nom mĂȘme de ce ministĂšre devrait suffire Ă re
Ă©fiant. Il va sans dire que le ministĂšre de la Propagande Ă©tait aussi dĂ©signĂ© pour fous informations objectives sur les troubles de Barcelone que, disons, le dĂ©funt rson aurait pu lâĂȘtre pour donner un compte rendu objectif du soulĂšvement de Du1916.
Jâai indiquĂ© quelles raisons lâon a de ne pouvoir prendre au sĂ©rieux la vermmuniste des troubles de Barcelone. Je dois en outre ajouter quelque chose au sujccusation gĂ©nĂ©rale portĂ©e contre le P.O.U.M. dâĂȘtre une organisation fasciste secrsolde de Franco et de Hitler.
Cette accusation a été mille et mille fois répétée dans la presse communiste, surpartir du début de 1937. Cela faisait partie de la chasse mondiale que le
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mmuniste officiel menait contre le « trotskysme », dont le P.O.U.M., Ă lâen croire, nsĂ© ĂȘtre le reprĂ©sentant en Espagne. Le « trotskysme », selon Frente Rojo (le joummuniste de Valence), « nâest pas une doctrine politique. Le trotskysme estganisation capitaliste officielle, une bande de terroristes fascistes sâoccupant de crde sabotages contre le peuple ». Le P.O.U.M. Ă©tait une organisation alliĂ©e aux fascfaisant partie de la « cinquiĂšme colonne de Franco ». Ce qui est Ă remarquer d
but, câest quâaucune preuve ne fut jamais fournie Ă lâappui de cette accusation ; ontenta dâaffirmer la chose sur un ton dâautoritĂ©. Et lâattaque fut menĂ©e tant quâon p
ups de diffamations personnelles, et avec une totale insouciance des rĂ©percussionsa pourrait avoir sur le cours de la guerre. Beaucoup dâĂ©crivains communraissent avoir estimĂ© sans importance, comparĂ©e Ă la tĂąche de diffamer le P.O.U.M
ahison de secrets militaires. Dans un numĂ©ro de fĂ©vrier du Daily Worker, par exempermit Ă un Ă©crivain (Winifred Bates) de dĂ©clarer que le P.O.U.M. nâavait, dans
cteur au front, pas mĂȘme la moitiĂ© des troupes quâil prĂ©tendait avoir. Ce qui nâĂ©taiai ; mais vraisemblablement cet Ă©crivain croyait dire vrai. Elle-mĂȘme et le Daily Wot donc de leur plein grĂ© publiĂ© cette dĂ©claration, sachant que ce faisant ils passaie
nnemi lâune des plus importantes informations qui peuvent ĂȘtre communiquĂ©es poyen dâun journal. Dans le New Republic, M. Ralph Bates dĂ©clara que les troupeO.U.M. « jouaient au football avec les fascistes dans le no manâs land », et cela emps oĂč, en fait, les troupes du P.O.U.M. subissaient de lourdes pertes,rsonnellement jâeus un grand nombre dâamis tuĂ©s et blessĂ©s. Et puis il y eut ce deurieux, que lâon fit circuler partout, dâabord Ă Madrid, puis plus tard Ă Barcelone
prĂ©sentait le P.O.U.M. sous lâaspect dâun homme qui, ĂŽtant un masque dĂ©corarteau et de la faucille, dĂ©couvre un visage marquĂ© de la croix gammĂ©e. Suvernement nâavait pas Ă©tĂ© en rĂ©alitĂ© dominĂ© par les communistes, il nâaurait ja
rmis que lâon fĂźt circuler une chose de ce genre en temps de guerre. CâĂ©tait polibĂ©rĂ©ment un coup au moral non seulement des milices du P.O.U.M., mais Ă celuutes les troupes qui venaient Ă sâen trouver voisines ; car cela est peu propre Ă do
courage que dâapprendre que les hommes qui sont Ă cĂŽtĂ© de vous sur le front sonaĂźtres. Je ne crois pas, il est vrai, que les injures quâon leur prodigua Ă lâarmoralisĂšrent vraiment les milices du P.O.U.M. Mais ce qui est certain, câest quaient calculĂ©es pour les dĂ©moraliser et que lâon doit tenir ceux qui en furent les autur des gens qui ont fait passer lâanimositĂ© politique avant le souci de lâu
tifasciste.Lâaccusation portĂ©e contre le P.O.U.M. revenait Ă dire ceci : quâun groupemenusieurs vingtaines de milliers de personnes, appartenant presque toutes Ă la cvriĂšre, et en outre de nombreux auxiliaires et sympathisants Ă©trangers, pour la plufugiĂ©s de pays fascistes, et enfin des milliers de miliciens, Ă©taient puremenmplement une vaste organisation dâespionnage Ă la solde des fascistes. Ăa nâavait pns commun et lâhistoire passĂ©e du P.O.U.M. suffisait Ă rendre la chose incroyableaders du P.O.U.M. avaient tous derriĂšre eux un passĂ© rĂ©volutionnaire. Certains avis part au soulĂšvement de 1934 et la plupart dâentre eux avaient Ă©tĂ© emprisonnĂ©s urs activitĂ©s socialistes sous le gouvernement Lerroux ou sous la monarchie. En 193
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ader du P.O.U.M. Ă cette Ă©poque, JoaquĂn MaurĂn, avait Ă©tĂ© lâun des dĂ©putĂ©s qui,rtĂšs, avertirent de la rĂ©bellion imminente de Franco. Peu de temps aprĂšclenchement de la guerre, il fut fait prisonnier par les fascistes alors quâil te
organiser la rĂ©sistance Ă lâarriĂšre de Franco. Quand la rĂ©bellion Ă©clata, le P.O.U.M. rĂŽle marquant dans la rĂ©sistance, et Ă Madrid, en particulier, un grand nombre d
embres furent tuĂ©s dans les combats de rues. Il fut lâun des premiers groupemenrmer des colonnes de miliciens en Catalogne et Ă Madrid. Comment serait-il posexpliquer tout cela comme les actes dâun parti Ă la solde des fascistes ! Un parti
lde des fascistes eĂ»t tout simplement rejoint lâautre camp.Et il nây eut aucun signe dâactivitĂ©s pro-fascistes durant la guerre. On pou
utenir â mais en dĂ©finitive je ne suis pas de cet avis â quâen rĂ©clamant avec insiste politique plus rĂ©volutionnaire le P.O.U.M. divisait les forces du gouverneme
dait les fascistes ; je pense que nâimporte quel gouvernement de type rĂ©formiste sndĂ© Ă considĂ©rer un parti tel que le P.O.U.M. comme une peste. Mais il sâagit lĂ detre chose que de trahison ! Il nây a pas moyen dâexpliquer pourquoi, si le P.O.U.M.ellement un groupement fasciste, ses milices restĂšrent loyales. VoilĂ huit ou dix m
mmes tenant dâimportants secteurs du front dans les conditions terribles de lâh36-1937. Beaucoup dâentre eux restĂšrent dans les tranchĂ©es quatre ou cinq affilĂ©e. On nâarrive pas Ă comprendre pourquoi ils ne quittĂšrent pas tout bonnemeont ou ne passĂšrent pas Ă lâennemi. Il fut toujours en leur pouvoir de le faire,rtains moments cela eĂ»t pu avoir une consĂ©quence dĂ©cisive. Cependant ils continuĂše battre ; bien plus, ce fut aprĂšs la suppression du P.O.U.M. en tant que parti politalors que chacun avait encore le souvenir tout frais de cet Ă©vĂ©nement, que les milicn encore rĂ©parties dans lâarmĂ©e populaire â prirent part Ă lâoffensive meurtriĂšre Ă Huesca dans laquelle, en un jour ou deux, plusieurs milliers dâhommes trouvĂšre
ort. On se serait pour le moins attendu Ă des fraternisations avec lâennemi et ntinuelles dĂ©sertions. Or, comme je lâai dĂ©jĂ indiquĂ©, celles-ci furent en nomceptionnellement faible. Et on se serait aussi attendu Ă une propagande pro-fascis« dĂ©faitisme », etc. Cependant, rien de tout cela ne se produisit. Il doit Ă©videmm
oir eu dans le P.O.U.M. des espions fascistes et des agents provocateurs ; il y en ns tous les partis de gauche, mais rien nâautorise Ă penser quâil y en ait eu davanns le P.O.U.M. quâailleurs.
Il est vrai que, dans certaines de ses attaques, la presse communiste a dit, avec a
mauvaise grĂące, que seuls les leaders du P.O.U.M. Ă©taient Ă la solde des fascistes, simples membres. Mais ce nâĂ©tait lĂ quâune tentative pour dĂ©tacher de leurs dirigemembres du P.O.U.M. La nature mĂȘme de lâaccusation impliquait la participatio
us au complot. Celle des simples membres et des miliciens aussi bien que celleaders ; car, de toute Ă©vidence, si Nin, Gorkin et les autres dirigeants du P.O.U.M. Ă©tellement Ă la solde des fascistes, il Ă©tait plus que probable que leurs partisansaient en contact avec eux, devaient ĂȘtre les premiers Ă le savoir, plutĂŽt queurnalistes de Londres, de Paris ou de New York. Et, en tout cas, au moment dppression du P.O.U.M., la police clandestine contrĂŽlĂ©e par les communistes nformĂ©ment Ă lâhypothĂšse que tous fussent pareillement coupables, et elle arrĂȘta
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ux, ayant quelque lien avec le P.O.U.M., sur qui elle put mettre la main, y compressés, les infirmiÚres, les femmes des membres du P.O.U.M. et, dans quelques cafants.
Finalement, les 15 et 16 juin, le P.O.U.M. fut supprimĂ© et proclamĂ© organisaĂ©gale. Ce fut lâun des premiers actes du gouvernement NegrĂn qui prit le pouvoai. Une fois le comitĂ© exĂ©cutif du P.O.U.M. jetĂ© en prison, la presse commubriqua ce qui fut donnĂ© comme Ă©tant la dĂ©couverte dâun complot fasciste monndant un temps la presse communiste du monde entier publia de façon flamboy
s communications du genre de celle-ci ( Daily Worker du 21 juin), résumé sommaiusieurs journaux communistes espagnols :
LES TROTSKYSTES ESPAGNOLS CONSPIRENT AVEC FRANCO
« Ă la suite de lâarrestation dâun grand nombre de dirigeants trotskystes Ă Barce
ailleurs... on a appris Ă la fin de la semaine les dĂ©tails dâune des plus abominafaires dâespionnage qui se soient jamais vues en temps de guerre, et eu rĂ©vĂ©lation
us vile trahison trotskyste jusquâĂ ce jour... Les documents qui sont en la possessiopolice, ainsi que les aveux complets de pas moins de deux cents personnes miseat dâarrestation, prouvent, » etc.
Ce que « prouvaient » ces rĂ©vĂ©lations, câĂ©tait que les leaders du P.O.
mmuniquaient par radio au gĂ©nĂ©ral Franco des secrets militaires, quâils Ă©taienpports avec Berlin et agissaient en collaboration avec lâorganisation fasciste clandeMadrid. On donnait en outre des dĂ©tails sensationnels sur des messages secrets Ă©crncre sympathique et sur un mystĂ©rieux document signĂ© de la lettre N (mise pour
sait-on), etc.Et finalement tout cela se rĂ©duit Ă ceci : six mois aprĂšs lâĂ©vĂ©nement, au momen
cris ces pages, la plupart des leaders du P.O.U.M. sont toujours en prison, mais nmais passĂ© en jugement, et les accusations dâavoir communiquĂ© par radio avec Frac., nâont mĂȘme jamais Ă©tĂ© officiellement formulĂ©es. Sâils avaient Ă©tĂ© vĂ©ritablemupables dâespionnage, ils eussent Ă©tĂ© jugĂ©s et fusillĂ©s en lâespace dâune semmme tant dâespions fascistes lâavaient dĂ©jĂ Ă©tĂ©. Mais on ne produisit jamais la moieuve ; il nây eut jamais que les affirmations, non confirmĂ©es, de la presse commun
uant aux « deux cents aveux complets » qui, sâils avaient existĂ©, eussent sunvaincre tout le monde, on nâen a jamais plus entendu parler. Ce fut, en vĂ©ritĂ©, nts produits de lâimagination de quelquâun !
Qui plus est, la plupart des membres du gouvernement espagnol se sont refusouter foi aux accusations portĂ©es contre le P.O.U.M. RĂ©cemment le Cabinet ononcĂ© par cinq voix contre deux en faveur de lâĂ©largissement des prisonnlitiques antifascistes ; les deux voix opposĂ©es Ă©tant celles des ministres communi
n aoĂ»t, une dĂ©lĂ©gation internationale conduite par James Maxton, membrerlement, se rendit en Espagne pour enquĂȘter au sujet des accusations lancĂ©es cont
O.U.M. et de la disparition dâAndrĂ©s Nin. Prieto, ministre de la DĂ©fense nationale, I
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nistre de la Justice, Zugazagoitia, ministre de lâintĂ©rieur, Ortega y Gasset, procunĂ©ral, Prat GarcĂa, et dâautres encore, rĂ©pondirent tous quâils se refusaient absolumcroire que les leaders du P.O.U.M. fussent coupables dâespionnage. Irujo ajouta ait parcouru le dossier de lâaffaire, quâaucune desdites preuves ne supportait lâexaque le document que lâon prĂ©tendait avoir Ă©tĂ© signĂ© par Nin Ă©tait « sans valeurtrement dit, un faux. Personnellement Prieto tenait les leaders du P.O.U.M sponsables des troubles de mai Ă Barcelone, mais Ă©cartait lâidĂ©e quâils fussentpions fascistes. « Ce qui est trĂšs grave, ajouta-t-il, câest que lâarrestation des leader
O.U.M. nâa pas Ă©tĂ© dĂ©cidĂ©e par le gouvernement, câest de sa propre autoritĂ© que la pprocĂ©dĂ© Ă ces arrestations. Les responsables ne sont pas ceux qui sont Ă la tĂȘte lice, mais leur entourage que, selon leur tactique habituelle, les communistesyautĂ©. » Et il cita dâautres cas dâarrestations illĂ©gales par la police. Irujo, de mclara que la police Ă©tait devenue « quasi indĂ©pendante » et quâelle Ă©tait en rĂ©alitĂ©
contrĂŽle dâĂ©lĂ©ments communistes Ă©trangers. Prieto, Ă mots couverts, ffisamment clairs, fit comprendre Ă la dĂ©lĂ©gation que le gouvernement ne pouvarmettre de mĂ©contenter le parti communiste au moment oĂč les Russes fourniss
s armes. Quand une autre dĂ©lĂ©gation, conduite par John McGovern, membrrlement, alla en Espagne en dĂ©cembre, elle reçut la mĂȘme rĂ©ponse, et Zugazagoitnistre de lâintĂ©rieur, donna Ă entendre la mĂȘme chose, en termes plus nets enc
Nous avons reçu lâaide de la Russie et nous avons dĂ» permettre certains actes quus plaisaient pas. » Ă titre dâexemple de cette autonomie de la police, voici un fnnaĂźtre : mĂȘme en montrant un ordre signĂ© du directeur des prisons et du ministJustice, McGovern et les autres ne purent obtenir de pĂ©nĂ©trer dans une des « pri
andestines » entretenues Ă Barcelone par le parti communiste{21}.Je crois que cela suffit, quâĂ prĂ©sent lâaffaire est claire. Lâaccusation dâespion
ncĂ©e contre le P.O.U.M. nâa jamais eu dâautre fondement que les articles parus daesse communiste et que lâactivitĂ© dĂ©ployĂ©e par la police secrĂšte aux ordresmmunistes. Les dirigeants du P.O.U.M. et des centaines ou des milliers de lrtisans sont toujours en prison et depuis six mois la presse communiste nâa cessclamer lâexĂ©cution des « traĂźtres ». Mais NegrĂn et les autres nâont pas cĂ©dĂ© etfusĂ© dâorganiser une tuerie en masse de « trotskystes ». Vu la pression quâon a exer eux, cela leur fait grand honneur. Et en face de toutes les dĂ©clarations que jâassus rapportĂ©es, il devient trĂšs difficile de croire que le P.O.U.M. Ă©tait rĂ©ellement
ganisation fasciste dâespionnage, Ă moins de croire du mĂȘme coup que MaxcGovern, Prieto, Irujo, Zugazagoitia et les autres sont tous Ă la solde des fascistes. Venons-en enfin Ă lâaccusation de « trotskysme » portĂ©e contre le P.O.U.M
odigue Ă prĂ©sent ce terme avec de plus en plus de facilitĂ© et il est employĂ© daniĂšre qui est extrĂȘmement trompeuse, et qui souvent vise Ă tromper. Cela vaut doine de prendre le temps de le dĂ©finir. On emploie le terme trotskyste pour signifier oses distinctes :
1) Quelquâun qui, comme Trotsky, prĂ©conise la « rĂ©volution mondiale » et quntre le « socialisme dans un seul pays ». En termes moins prĂ©cis : un rĂ©volutionntrĂ©miste.
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2) Un membre de lâorganisation effective dont Trotsky est le dirigeant.3) Un fasciste dĂ©guisĂ© se donnant pour un rĂ©volutionnaire, et dont lâaction con
écialement à faire du sabotage en U.R.S.S., mais, en général, à diviser et minerces de gauche.
Au sens 1) le P.O.U.M. peut probablement ĂȘtre considĂ©rĂ© comme trotskyste. mme lâI.L.P. dâAngleterre, le S.A.P. dâAllemagne, la gauche rĂ©volutionnaire du cialiste de France, etc. Mais le P.O.U.M. nâavait aucun lien ni avec Trotsky ni rganisation trotskyste (« bolchevik-lĂ©niniste »).
Quand la guerre Ă©clata, les trotskystes Ă©trangers qui vinrent en Espagne (au nomquinze Ă vingt) militĂšrent dâabord avec le P.O.U.M., parce que câĂ©tait le parti le
pprochĂ© de leur propre point de vue, mais sans en devenir membres ; par la otsky ordonna Ă ses partisans dâattaquer la politique du P.O.U.M. qui, alors, Ă©purreaux des trotskystes qui sây trouvaient, mais quelques-uns cependant restĂšrent milices. Nin, qui devint le leader du P.O.U.M. aprĂšs que MaurĂn eĂ»t Ă©tĂ© fait prisonr les fascistes, avait Ă©tĂ© dans le temps secrĂ©taire de Trotsky, mais il y avait plusinĂ©es quâil lâavait quittĂ© ; il avait ensuite formĂ© le P.O.U.M. par le fusionnemen
vers communistes oppositionnels avec un parti déjà existant, le Bloc ouvrier et payfait que Nin avait autrefois fréquenté Trotsky fut exploité par la presse commuur démontrer que le P.O.U.M. était en réalité trotskyste. En employant un argumette sorte, on pourrait démontrer que le parti communiste anglais est en réalitéganisation fasciste parce que M. John Strachey a dans le temps fréquenté Sir Ososley !
Au sens 2) â le seul qui soit tout Ă fait prĂ©cis â le P.O.U.M. nâĂ©tait certainemenotskyste. Il importe dâĂ©tablir cette distinction, parce que les communistes sont pous grand nombre persuadĂ©s quâun trotskyste au sens 2 est immanquablemen
otskyste au sens 3 â autrement dit, que lâorganisation trotskyste tout entiĂšre nâest qste appareil dâespionnage fasciste. Le mot trotskysme nâattira lâattention du publicpoque des procĂšs de sabotage en Russie ; aussi qualifier quelquâun de trotskvient, ou peu sâen faut, Ă le qualifier dâassassin, dâagent provocateur, etc. Mais en mmps quiconque critique la politique communiste dâun point de vue de gauche couque dâĂȘtre traitĂ© de trotskyste. Mais alors, soutient-on que quiconque proxtrĂ©misme rĂ©volutionnaire est Ă la solde des fascistes ?
Dans la pratique, tantĂŽt on le soutient, et tantĂŽt non, suivant que cela est ou
portun Ă©tant donnĂ© la situation locale. Lorsque Maxton alla en Espagne avelĂ©gation dont jâai parlĂ© prĂ©cĂ©demment, Verdad , Frente Rojo et dâautres jourmmunistes espagnols le traitĂšrent immĂ©diatement de « trotskyste-fasciste », dâes
la Gestapo, etc. Mais les communistes anglais se gardĂšrent bien de rĂ©pĂ©ter cusation. Dans la presse communiste anglaise, Maxton devint seulement un « enactionnaire de la classe ouvriĂšre », ce qui est dâun vague commode. Et cela ponne raison que plusieurs leçons cuisantes ont inspirĂ© Ă la presse communiste ange crainte salutaire de la loi sur la diffamation ! Le fait que cette accusation ne fu
pĂ©tĂ©e dans le pays oĂč lâon eĂ»t pu avoir Ă en prouver le bien-fondĂ© est un suffisant sa faussetĂ©.
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Peut-ĂȘtre trouvera-t-on que jâai parlĂ© des accusations portĂ©es contre le P.O.U.M.nguement quâil nâĂ©tait nĂ©cessaire. ComparĂ©e aux grandes souffrances dâune guvile, cette sorte de querelle intestine entre partis, avec ses injustices inĂ©vitables eusses accusations, peut paraĂźtre sans importance. Mais en rĂ©alitĂ© elle ne lâest paois que les Ă©crits diffamatoires et les campagnes de presse de ce genre, et la touresprit que cela dĂ©note, sont de nature Ă faire le plus grand tort Ă la cause antifascist
Quiconque a donnĂ© un instant dâattention Ă la question sait que cette tactiquemmunistes Ă lâĂ©gard des opposants politiques, qui consiste Ă utiliser des accusat
rgĂ©es de toutes piĂšces, nâest pas une nouveautĂ©. Aujourdâhui, le mot-clĂ©trotskyste-fasciste » ; il Ă©tait hier « social-fasciste ». Il y a Ă peine six ou sept ansands procĂšs dâĂtat russes « prouvaient » que les dirigeants de la IIe Internationampris, par exemple, LĂ©on Blum et des membres Ă©minents du parti travailliste angrdissaient un complot monstre en vue de lâinvasion militaire de lâU.R.S.S. Ce
empĂȘche pas aujourdâhui les communistes français de ne pas demander mieuxavoir LĂ©on Blum pour leader, et les communistes anglais de remuer ciel et terre trer dans le parti travailliste. Je doute que le jeu en vaille la chandelle, mĂȘme dâun p
vue sectaire. Tandis quâon ne peut douter de la haine et de la dissension quâengeccusation de « trotskysme-fascisme ». Partout on lance les membres du mmuniste dans une absurde chasse Ă lâhĂ©rĂ©tique contre les « trotskystes » etmĂšne ainsi les partis du type du P.O.U.M. Ă la position dĂ©plorablement stĂ©rile de nus que des partis anticommunistes. DĂ©jĂ sâannonce une dangereuse scission daouvement ouvrier mondial. Quelques Ă©crits diffamatoires de plus contre des sociali lâont Ă©tĂ© toute leur vie, quelques coups montĂ©s de plus du genre des accusat
ncĂ©es contre le P.O.U.M., et ce sera la scission sans possibilitĂ©s de rĂ©conciliationul espoir est de maintenir la controverse politique sur un plan oĂč une discus
profondie est possible. Entre les communistes et ceux qui sont, ou se targuent dus Ă gauche quâeux, il y a une diffĂ©rence rĂ©elle. Les communistes soutiennent queut battre le fascisme en sâalliant avec des fractions de la classe capitaliste (cela sâapont populaire) ; leurs opposants soutiennent que cette manĆuvre nâaboutit quâĂ foufascisme de nouveaux terrains oĂč croĂźtre. La question avait Ă ĂȘtre posĂ©e ; car prend
auvaise voie peut nous valoir des siĂšcles de demi-esclavage. Mais tant quâen garguments on ne saura que crier « Trotsky-fasciste », la discussion ne peut mĂȘmemmencer. Il me serait impossible, par exemple, dâexaminer la question des droits e
rts dans les troubles de Barcelone avec un membre du parti communiste, pâaucun communiste â jâentends communiste « bien-pensant » â ne pourrait adme jâai prĂ©sentĂ© un compte rendu vĂ©ridique des faits. Sâil suivait consciencieusemeigne » de son parti, il aurait le devoir de me dĂ©clarer que je mens, ou, au mieux, q
e suis lamentablement fourvoyĂ©, et que quiconque a seulement jetĂ© un coup dâĆi en-tĂȘtes du Daily Worker Ă mille kilomĂštres du thĂ©Ăątre des Ă©vĂ©nements sait me moi ce qui sâest passĂ© Ă Barcelone. Dans de telles conditions, il nây a pas de discusssible, le minimum dâaccord indispensable ne peut ĂȘtre obtenu. Quel but poursudisant que des hommes comme Maxton sont Ă la solde des fascistes ? Uniquemui de rendre impossible toute discussion sĂ©rieuse. Câest comme si au milieu
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urnoi dâĂ©checs lâun des compĂ©titeurs se mettait soudain Ă crier que lâautre est coupcrime dâincendie ou de bigamie. Le point qui est vĂ©ritablement en litige reste inabdiffamation ne tranche pas la question.
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otes______________
Cf. Appendice I et Appendice II.Jeu de mots intraduisible en français : Le « D.S.O. » ( Distinguished Service Ordere mĂ©daille dont on ne dĂ©core que les officiers de lâarmĂ©e et de la marine britanniq
ais les soldats ont donné aux initiales D, S, O, une autre signification : « Dickie
f », et lorsque quelquâun a le sexe emportĂ© par un obus, ils disent quâil a reçD.S.O. »Les patrouilles dâouvriers auraient, dit-on, fait fermer 75 % des bordels.Une once Ă©gale 28,35 g.Police militaire crĂ©Ă©e en Irlande par le gouvernement britannique Ă la fin de la Gr
uerre et qui Ă©tait connue pour ses cruautĂ©s.Textuellement : « The dog it was that died », câest-Ă -dire : « Ce fut le chien
ourut » ; Ă cette citation tirĂ©e dâun poĂšme de Goldsmith (un chien mordit un hom
ais lâhomme survĂ©cut et ce fut le chien qui mourut), fait exactement pendanançais lâĂ©pigramme de Voltaire sur FrĂ©ron.Voir Appendice II.Voir les rapports sur la dĂ©lĂ©gation Maxton auxquels je me reporte Ă la fin de ce
ppendice II).Au temps du premier gouvernement socialiste, en 1924, les journaux conservat
glais avaient publiĂ© une lettre de Zinoviev Ă Ramsay Mac Donald dâaprĂšs laquemblait que Mac Donald prĂźt ses ordres chez les Russes. On appelait cette lettre «d Letter », « La Lettre rouge ». Il est Ă peu prĂšs certain que cette lettre avai
sifiĂ©e par la police secrĂšte, mais Ă cette Ă©poque-lĂ on avait grand peur des bolchevisa avait provoquĂ© la chute du gouvernement, et les conservateurs Ă©taient revenuuvoir.} Le « Colonel Blimp » est un type caricatural familier aux lecteurs de lâ Eveandard : ancien militaire qui a longtemps servi aux Indes, il symbolise tout ce quâstupide et de rĂ©actionnaire dans les classes moyennes de lâAngleterre.
} Quiroga, Barrios et Giral. Les deux premiers refusĂšrent de distribuer des armesndicats.}
Comité central des milices antifascistes : le nombre des délégués était pour chganisation proportionné au nombre des membres. Les syndicats étaient représentéuf délégués, les partis libéraux catalans par trois, et les différents partis marxO.U.M. Communiste, etc.) par deux.
} Câest pourquoi il y avait si peu dâarmes russes sur le front dâAragon, oĂč les troaient en majeure partie anarchistes. Jusquâen 1937 â Ă lâexception de quelques avi Ă©taient peut-ĂȘtre russes, mais ce nâest mĂȘme pas sĂ»r â je nâai vu quâune arme ruseul et unique fusil-mitrailleur.
} Ă la chambre des dĂ©putĂ©s, mars 1935.} Pour le meilleur exposĂ© de lâeffet rĂ©ciproque de cette lutte entre les partis du
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uvernemental, voir The Spanish Cockpit de Franz Borkenau. Parmi les livres suerre dâEspagne qui ont jusquâici paru, câest de beaucoup celui qui est Ă©crit avec lecompĂ©tence.
} Quant au nombre de membres du P.O.U.M., voici les chiffres donnés : en juillet 1000 ; en décembre 1936, 70 000 ; en juin 1937, 40 000. Mais ce sont là les chi
nnĂ©s par le P.O.U.M. ; une estimation hostile les diviserait probablement par quatrule chose que lâon puisse dire avec certitude au sujet des effectifs des partis politipagnols, câest que chaque parti majorait les siens.} Je voudrais faire exception pour le Manchester Guardian. Pour Ă©crire ce livre, jâarcourir les collections dâun bon nombre de journaux anglais. De tous nos plus gr
urnaux, seul le Manchester Guardian mâa laissĂ© un respect accru pour son honnĂȘte} Dans un rĂ©cent numĂ©ro, Inprecor affirme le contraire : il prĂ©tend que La Banna aux troupes du P.O.U.M. lâordre de quitter le front ! Il est facile dâĂ©claircir ce po
nây a quâĂ se reporter Ă La Batalla de la date en question.} New Statesman (14 mai).} Au dĂ©but de la guerre, les gardes civils sâĂ©taient partout rangĂ©s du cĂŽtĂ© du plus
ans la suite, en plusieurs occasions, à Santander, par exemple, les gardes civilndroit passÚrent en masse aux fascistes} Pour les comptes rendus au sujet des deux délégations, voir Le Popuseptembre), La flÚche (18 septembre), le « Rapport sur la délégation de Maxto
blié par Independent News (219, rue Saint-Denis, Paris) et la brochure de McGo