Fukushima cinq ans après, retour à l’anormale...TEPCo peine à réduire les fuites en mer et...

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Fukushima cinq ans après, retour à l’anormale David Boilley (ACRO) pour Greenpeace Belgique Février 2016

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Fukushimacinqansaprès,retouràl’anormale

DavidBoilley(ACRO)pourGreenpeaceBelgique

Février2016

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L’auteur remercie Reiko Hasegawa, Kazumasa Aoki, Kurumi Sugita etGreenpeacepourleurssuggestionspertinentes.Cerapport,lespublicationsdiscutéesetlesconclusionssontdelaseuleresponsabilitédel’auteuretdel’ACRO.

ACRO138,ruedel’Eglise

14200HérouvilleSaintClairFrance

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RésuméLa catastrophe nucléaire à la centrale deFukushima daï-ichi (FDI), classée auniveau7del’échelleinternationaleINES-le niveau le plus élevé - est largementreconnue comme étant d’originehumaine. Elle a contaminé un grandterritoire au Japon et est responsable dudéplacement de 160000 personnesenviron, selon les statistiques officielles.Les territoires contaminés qui n’ont pasétéévacuéssontaussifortementaffectés.Les rejets radioactifs de la centraleaccidentée perdurent, parfois à desniveaux anormalement élevés. Cela a étécaché pendant plusieurs mois, générantainsi une forte confusion. De mauvaisespratiques ont ainsi conduit à des rejetsimportants de poussières radioactives età une contamination significative à desdizaines de kilomètres de la centrale.TEPCopeineàréduirelesfuitesenmeretl’eau contaminée continue à s’accumulerdansdescuvessanssolutionenvue.Lacompagnieenest toujoursà tenterdestabiliser la centrale et de réduire lesmenaces. Le démantèlement àproprement parler n’a pas encorecommencé. Alors que les territoires quientourentlacentraleontétéévacués,ilyaunecraintedereprisedesrejetsmassifsen casdenouvelle catastrophenaturelle.Les personnes déplacées se demandents’il est raisonnable de rentrer une foisl’ordre d’évacuation levé. En effet, lesréacteursaccidentésdelacentraledeFDIsont plus fragiles que des réacteursnormauxet leurenceintedeconfinementfuit. Ilspourraientnepas tenirencasde

séisme et tsunami, entraînant ainsi denouveauxrejetsradioactifsmassifs.

LesévacuésDenombreusespersonnesontdûévacuerpendant la phase d’urgence, suivies pard’autresdurantlespremiersmoisàcausede la contamination radioactive. Denombreuses autres personnes sontpartiesd’elles-mêmespourseprotégerouprotégerlesenfants.Cinqansplustard,laplupart restent évacuées et ontdumal àimaginerleuravenir.Le nombre total de personnes déplacéesn’estpasbienconnu.Cependant,selonlesdonnées officielles, environ 160000personnes ont fui les territoirescontaminés.Cinqansplustard,lenombrede personnes déplacées est toujours de100000 environ alors que l’ordred’évacuer n’a été levé que dans troiscommunes.Cellesquisesontréinstalléesailleurs ne sont plus comptées bienqu’ellessouffrentencore.Au-delàdeceschiffres,ilyadenombreuxindividus dont la vie a été fortementperturbée. Les catastrophes nucléairesmajeures sont d’abord des catastropheshumainesquiconduisentaudéplacementde nombreuses personnes qui perdenttout:lelogement,laviedefamille,leliensocial, jusqu’à leur avenir. L’évacuationgénère de grandes difficultés et de lasouffrancepourlespopulationsaffectées,mais elle était nécessaire. Les personnesqui n’ont pas été évacuées et qui viventtoujours en territoire contaminés’inquiètent aussi beaucoup pour leur

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santé; leur vie quotidienne est aussifortementperturbée.Pour définir le devenir des territoiresévacués, les autorités japonaises les ontdiviséentroiszonesenfonctiondudébitde dose ambiant: les zones oùl’exposition externe annuelle devraitdépasser vingt millisieverts (20 mSv)pendantcinqansetlàoùelledépasse50mSv actuellement sont classées en«zones de retour difficile». L’ordred’évacuation ne sera pas levé avantplusieurs années et la réinstallation desrésidents est aidée. Les zones oùl’exposition externe sera sûrementinférieure à 20mSvpar an sont classéesen zones où l’ordre d’évacuer est prêt àêtrelevé.Entrelesdeux,làoùl’expositionexterneest compriseentre20et50mSvpar an, les résidents ne peuvent pasrentrer, mais la décontamination devraitpouvoirlafairepassersouslalimitede20mSvparan.

Laprotectioncontrelesradiations

Aussi bien la politique d’évacuation quecellede retourdespopulationsestbaséesur une interprétation laxiste desrecommandations internationales deradioprotection qui ne sont pas trèscontraignantes. 20 mSv par ancorrespond à la valeur la plus haute desniveaux de référence introduits par laCommission internationale de protectionradiologique (CIPR) pour ce qu’elleappelle les «situations existantes» quiincluent le post-accident. La CIPRrecommandedebaisserceniveauà1mSvparan.Lesautorités japonaisesontdoncadopté cette valeur comme un objectif àlong terme,sanscalendrierd’application.Pour le moment, elles maintiennent unniveauderéférencede20mSvparanquiesttropélevépournombredeJaponais.

En ce qui concerne la contamination del’alimentation, la stratégie estcomplètement différente: les niveaux decontaminationmaximauxadmissiblesontété fixés en dessous desrecommandations internationales pourretrouver la confiance desconsommateurs et soutenir l’agriculturedanslesterritoirescontaminés.Le contraste entre la protection contrel’exposition externe liée au rayonnementambiant et l’exposition interne liée àl’alimentation est saisissant. Dans lepremier cas, les autorités refusent debaisser lesniveauxde référencequi sontau plus haut des recommandationsinternationalesetdansl’autre,lesniveauxmaximumadmissiblessontdivisésparunfacteur5aprèsunan.Une telle différence montre que le soucipremier des autorités concerne lesconséquences économiques de lacatastrophe nucléaire. La diminution desniveaux dans l’alimentation avait pourbut de rassurer les consommateurs quiévitent les produits de Fukushima.Inversement, l’indemnisation despersonnes évacuées représente un lourdfardeau économique et les autoritésn’envisagent rien d’autre que le retourdespopulationsdéplacées.Afind’obtenir l’assentimentdes citoyens,les autorités répètent à l’envi que descancers radio-induits n’apparaissent pas,ou s’ils apparaissent ils sontindétectables, en dessous d’une dosecumulée de 100 mSv, bien que lesrecommandations internationales soientbasées sur l’hypothèseque lenombredecancers et les effets héréditaires sontproportionnelsàladosereçue,sansseuil.Avecunelimiteà20mSvparan,100mSvcumulés peuvent être rapidementatteints.

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Ainsi, lesautorités japonaisesontchangéleur politique et ont introduit unenouvelle façon de mesurer la dose. Leszones d’évacuation ont été définies àpartirdudébitdedoseambiantquipeutêtre mesuré simplement à l’aide dedifférents appareils, dont de simplesradiamètres. Puis, pour estimer la doseannuelle, il est supposé que chaqueindividupasse enmoyenne8heuresparjour à l’extérieur et qu’à l’intérieur,l’exposition est réduite de 60%. Mais,pour le retour des populations, lesautorités vont fournir des dosimètresindividuels, appelés glass-badges auJapon, pour enregistrer les doses reçuesparchacun,sansmentionnerquece typed’appareildonneunevaleurglobale30à40% inférieure à l’autre méthode demesureavecdesradiamètres.Cette nouvelle politique repose aussi surun changement de paradigme: chacundevient responsable de sa propreprotection contre les rayonnementsionisants. A l’inverse des travailleurs dunucléaire qui doivent être contrôlés,personnenevavérifierquelapopulationutilisebiencedosimètre individuel.C’estparticulièrement problématique pour lesenfants qui sont plus sensibles auxradiations. Contrôler sa vie au quotidien,apprendre à minimiser la dose reçue,constituent des fardeaux qui ne sont pasacceptés,surtoutquandilyadesenfantscarcen’estpasunaveniràleurproposer.Trente ans après la catastrophe deTchernobyl, les règlesde radioprotectiondéfinies au niveau international ne sontpas adaptées aux personnes qui viventdanslesterritoirescontaminés.Ellessontparticulièrement confuses pour lespopulations et difficiles à mettre enœuvre. Cela permet aux autorités de lesadapter à leur propre avantage plutôtqu’àceluidespopulationconcernées.Lesrèglesdevraient êtreplus contraignantesen terme de limites, d’évolution

temporelle et de mise en œuvreopérationnelle.

Contaminationdel’alimentation

En ce qui concerne la contamination del’alimentation, les autorités japonaisesont d’abord sous-estimé l’ampleur desproblèmesetontétéfréquemmentprisespar surprise dans les premiersmois. Parconséquent, la confiance envers lesautoritésetlegouvernements’estérodéeet les populations préoccupées par lasécurité alimentaire ont reconsidéré leurrelationàl’Etatetàl’alimentation.Mais les citoyens japonais, lesproducteurs, les vendeurs et lesconsommateurs ont mesuré laradioactivité dans les aliments, forçantainsi les autorités à introduire descontrôlessystématiques.Lasituations’estdonc rapidement améliorée et, àl’exception des plantes sauvages, dugibier, des poissons et des potagers, lacontamination de l’alimentation venduesur les marchés reste faible. Lacontamination interne des enfantscontrôlés par anthropogammamétrie estsuffisamment faible pour considérer quel’exposition externe est le problèmeprincipaldans les territoires contaminés.Ce succès a un coût: de nombreuxagriculteurs ne peuvent pas reprendreleurs activités et certaines productionstraditionnellespourraientdisparaître.Le cas japonais montre l’intérêt d’unprocessusouvertdanslequelchacunpeutcontrôlerlacontaminationetadaptersonrégimealimentaireàsesproprescritères.Cependant, les consommateursrechignent toujours à acheter desaliments en provenance des territoirescontaminés. Les producteurs et lesagriculteurs, éleveurs, pêcheurs,

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forestiers… en particulier souffrentencorecinqansplustard.La politique gouvernementale s’estfocalisée sur la sécurité alimentaire(anzen en japonais), sans se préoccuperdeladimensionculturelleetduclimatdeconfiance vis à vis des aliments (anshin,en japonais). Imposer des standards nesuffit pas à surmonter la défiance desconsommateurs et le défi est de garantirla sécurité alimentaire et la tranquillitéquivaavec.

Quelavenirpourlesterritoiresévacués?

Le gouvernement japonais a décidé delever tous les ordres d’évacuation avantmars2017etd’arrêterlesindemnisationsavant mars 2018, sauf dans les zonesdites de retour difficile. Même J-Village,un ancien centre d’entraînement defootball transformé en base pour lestravailleurs à la centrale de FDI, va êtrerendu aux sports avant les jeuxolympiquesde2020.Les autorités japonaises rêvent d’unecatastrophe réversible et lesrecommandations internationales sur lagestion post-accidentelle se préoccupentsurtoutde retourà lanormale.Avecunedemi-viede30ans,lecésium-137décroîttrop lentement. Le gouvernementjaponaisadonclancéunvastechantierdedécontamination aussi bien dans lesterritoires évacués que dans ceux quin’ont pas été évacués, partout oùl’exposition externe pourrait dépasser 1mSvparan,àl’exception,unefoisencore,deszonesderetourdifficile.Celaconsisteà gratter la terre, couper les herbes,émonder les arbres et les buissons etlaver les toitsdeshabitations, les routes,trottoirs… dans les environs immédiatsdes zones de vie, transformant ainsi les

villes et villages en oasis au milieu d’unvasteterritoirecontaminé.Pourleszonesévacuées, les plans prévoient ladécontamination de 24800 ha et rienn’est prévu au-delà, dans les forêts etmontagnes qui couvrent 70% de laprovincedeFukushima.Ladécontaminationn’estpastrèsefficaceet engendre une grande quantité dedéchets radioactifs pour lesquels lessolutions envisagées sont des échecs àcausede l’oppositiondespopulations.Defait, lagestiondesdéchetsradioactifsesttrès complexe dans tous les pays qui enont accumulé une quantité significative.Maisaprèsunaccidentgrave,c’estencoreplus complexe et les volumes sontgigantesques. Dans la seule province deFukushima,environ20millionsdemètrescubes sont attendus et le centred’entreposage prévu va couvrir unesuperficiede16km2.Pourlemoment,lesprojets de stockage sont bloqués àFukushima et dans les autres provinces,mais les autorités s’accrochent à leurapproche autoritaire qui est un échec:Décider, Annoncer et Défendre (DAD).Pendant ce temps là, les déchetss’accumulent dans des sacs qui sedétériorentrapidement.Ladécontaminations’estrévéléeêtretrèsdécevante alors que le niveau de doseambiant n’a pas baissé de façonsignificativeparrapportàcequel’onapuobserverdanslesforêtsoùaucuntravauxn’ont eu lieu. Mais les autoritéscontinuent à favoriser le retour despopulations.

Lesrésidentssontréticentsàrentrer

Jusqu’à présent, les ordres d’évacuationontété levésdansdespartiesdeTamuraet de Kawauchi en 2014, et à Naraha en

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2015. Tous ces territoires sont dans lesparties lesmoinscontaminéesde lazoned’évacuation de 20 km. Lesrecommandations à l’évacuation autourdenombreuxpointschaudsrépartisçàetlàonttoutesétélevées.Maisleshabitantsrechignent à rentrer et les territoirescontaminés font face aux problèmes dedépopulationetdevieillissement.LacommunedeHirono,parexemple,quiestentre20et30kmdelacentraledeFDIa été incluse dans la zone dite depréparation à l’évacuation d’urgence en2011.Leshabitantspeuventrentrer,maisselon le dernier recensement de 2015,une grande partie des résidents estengagée dans les travaux à la centraleaccidentée: la population masculine aaugmenté de 2,3% depuis 2010 et lapopulation féminine, au contraire, abaissé de 42,3%. A Minami-Soma, lapopulation a baissé de 66% depuisl’accident et l’âgemoyen des habitants aaugmenté de 14 années, un niveauattendupour2025.Un retour à la normale est impossibleaprès un accident nucléaire de grandeampleurcommeceuxdeTchernobyletdeFukushima. Les principes directeurs desNations Unies relatifs aux personnesdéplacées à l’intérieur de leur paysenjoignent les autorités à associerpleinement ces personnes à laplanificationetàlagestiondeleurretouret de leur réinstallation. Mais au Japon,cette participation est réduite à des«réunions d’explication» (seitsumeikai) àhuis clos, sans la présence de médias,d’associations,oud’experts, laissantainsilespopulationsdésarmées.Lescommunautésnevoientpaslafindesdifficultésauxquelleselles font faceetensouffrent. Rester ou partir, rentrer ou seréinstaller sont autant de choix difficilessanssolutionsatisfaisante.Lenombredepersonnes souffrant de troubles

psychologiques, comme le stress post-traumatique ou la dépression, est plusélevéque la normale, aussi bien chez lespersonnes évacuées que chez lespersonnes non-évacuées. Le nombre desuicides liés à la triple catastrophe estplus élevé à Fukushima que dans lesprovinces de Miyagi et d’Iwate,sévèrementtouchéesparletsunami.

ConclusionsLes conséquences de l’accident nucléairesont toujours présentes et des réponsesacceptables pour les populations sontindispensables. Les personnes affectéessont toujours en train de se battre pours’enremettre.Ellescontinuentàfairefaceà de fortes inquiétudes relatives à leursanté,à laséparationde leur famille,auxruptures dans leur vie et à lacontaminationdel’environnementsurdevastes territoires. Et comme unecatastrophe nucléaire dure pendant desdécennies, les populations ne voient pasla fin des difficultés auxquelles elles fontface.Après un tel accident, de nombreusespersonnesnecroientplusenlaparoledesautorités et des experts qui n’ont pasréussi à les protéger. Mais les cheminsvers la résilience requièrent une bonnecoordination entre les autorités et lespopulations. Les solutions envisagées etexpérimentéesnepeuventpasignorerlesbesoins et demandes spécifiques despersonnes concernées, ainsi que leurssuggestions. Cela implique de trouveraussi de nouvelle méthode dedélibération et de prise de décision. Lessolutionspeuventdifférerd’unefamilleàl’autre ou d’une communauté à l’autre.Comme il n’y a pas de bonne solution,chaque décision doit être évaluée etadaptée. En plus de la souffranceengendrée, un accident nucléaire remetencauselesfondementsdeladémocratie.

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Les citoyens japonais ont fait montred’initiative à propos de la mesure de laradioactivité. Une cartographie de lapollution radioactive a été effectuéepartout et la surveillance des aliments apoussé les autorités, producteurs etvendeurs à renforcer leurs propres

contrôlespourfinalementconduireàunebaisse significative de l’ingestion deradioéléments.Pourquoiuntelprocessusouvertquia fait sespreuvesnepeutpasêtremisenplacepourdéciderdel’avenirdes territoires contaminés et de leurspopulations?

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SommaireRésumé..............................................................................................................................3Lesévacués............................................................................................................................................................................3Laprotectioncontrelesradiations.............................................................................................................................4Contaminationdel’alimentation..................................................................................................................................5Quelavenirpourlesterritoiresévacués?................................................................................................................6Lesrésidentssontréticentsàrentrer........................................................................................................................6Conclusions............................................................................................................................................................................7

Sommaire..........................................................................................................................9

Introduction.....................................................................................................................12

Lesrejetsradioactifscontinuent......................................................................................14Termessource....................................................................................................................................................................14Lesfuitesperdurent.........................................................................................................................................................16Impactsurlamer..............................................................................................................................................................17Certainespratiquesontconduitàdesrejetssignificatifsdepoussièresradioactives.......................18LacentraledeFukushimadaï-ichireprésentetoujoursunemenace........................................................19Conclusions..........................................................................................................................................................................20Contaminationradioactiveetévacuation.........................................................................21Déroulementdel’évacuation.......................................................................................................................................21Nombredepersonnesdéplacées...............................................................................................................................24Cinqansplustard.............................................................................................................................................................25Conclusions..........................................................................................................................................................................27Revuedesniveauxdeprotectionaprèsunaccidentnucléaire..........................................28Lesprincipesdelaradioprotection..........................................................................................................................28Politiqued’évacuation....................................................................................................................................................31Grandeursdeprotectionetgrandeursopérationnelles...................................................................................32Leslimitespourlacontaminationdel’alimentation.........................................................................................35Conclusions..........................................................................................................................................................................36

Contaminationdel’alimentationcinqansaprès..............................................................37Leserreursinitialesdanslecontrôledesaliments............................................................................................37Descontrôlesétendusdel’alimentation.................................................................................................................39Expositioninternedesconsommateurs.................................................................................................................40Lesrestrictionssurlaproductionmenacentcertainesactivités.................................................................41Lesconsommateursrestentprudents.....................................................................................................................42Conclusions..........................................................................................................................................................................43Laréhabilitationdesterritoirescontaminés.....................................................................45Lapolitiquederéhabilitation......................................................................................................................................45Leseffetslimitésdeladécontamination................................................................................................................46Unegrandequantitédedéchetsproduite..............................................................................................................47Lesdéchetsnesontpasbienentretenusetsécurisés.......................................................................................50Conclusions..........................................................................................................................................................................51

Lapolitiquederetour......................................................................................................53Lesdécisionsgouvernementales................................................................................................................................53

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Leshabitantssontréticentsàrevenir......................................................................................................................54Lesproblèmesdedépopulationetdevieillissementdesterritoirescontaminés................................55Lapolitiquederetour.....................................................................................................................................................56Violationdesdroitshumains.......................................................................................................................................57Lespersonnesévacuéessouffrent.............................................................................................................................59Conclusions..........................................................................................................................................................................60

Conclusions......................................................................................................................62

Abréviations....................................................................................................................64

Unités..............................................................................................................................64

Bibliographie...................................................................................................................65

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IntroductionL’accidentnucléaire en cours à la centraledeFukushimadaï-ichi (FDI) au Japonn’estpas d’origine naturelle mais est clairement considéré comme un accident d’originehumaine[NAIIC2012].Classéauniveau7del’échelleinternationaledeclassementdesévénements nucléaires (International Nuclear Event Scale, INES), le plus élevé, il aentraînél’évacuationde160000personnesdanslaprovincedeFukushimaenplusdesévacuationsliéesauxséismesettsunami[NAIIC2012,IOM2015].Cinqansplustard, lenombre de personnes déplacées à cause de la radioactivité est toujours d’environ100000 alors que la majeure partie des zones évacuées n’est pas habitable, mais legouvernementjaponaisadéciderdeleverlesordresd’évacuationavantmars2017etdecesserlesindemnisationsavantmars2018[Asahi19/5/2015].Aprèsavoirdéclaréle16décembre 2011 l’arrêt à froid des réacteurs de FDI, les conséquences des retombéesradioactivessurunvasteterritoiredevraientdisparaîtred’iciquelquesannées.MêmeJ-Village,uncentred’entraînementdefootballsituéprèsdelacentraleaccidentéequisertdebaseauxtravailleursengagésdanslestravauxdesécurisationdesréacteurs,devraitêtrerenduauxsportsavantlesjeuxolympiquede2020auJapon[FMinpo16/1/2015].LacentraledeFDIestprésentéecommeuncentredeformationaudémantèlementetvadevenirunevitrinedelatechnologiejaponaise.Mais les faits montrent que le retour à la normale est impossible après un accidentmajeurcommeceluiquiaeulieuàTchernobyletFukushimaetlespopulationstouchéessouffrent encore. La rupture du lien social et le déplacement à long terme despopulations et des communautés sont des caractéristiques communes de ces deuxcatastrophes, qui sont avant tout, des catastrophes humaines encore en cours. LacentraledeFDIrejettetoujoursdesradioélémentsdansl’environnementetlesréacteursaccidentés sont toujours menaçants. Leur sécurisation et démantèlement devraientprendredesdécennies.Lacatastrophenefaitquecommencer.Les autorités japonaises ont privilégié le retour des populations dans la plupart deszones évacuées. A cette fin, elles ont lancé un vaste programme de décontaminationdont les résultats sont décevants. Le débit de dose ambiant n’a pas baissé autantqu’espéréetlesautoritésontdesdifficultéspourtrouverdessolutionspourl’importantvolumededéchetsengendréparcesopérations.En ce qui concerne la politique d’évacuation et de retour, les autorités ont uneinterprétation laxiste des recommandations internationales en radioprotection. Ellesont choisi la valeur la plus élevée des valeurs de référence de la Commissioninternationaledeprotectionradiologique(CIPR)pourcequ’elleappelleles«situationsexistantes»quisontcomprisesentre1et20mSvparan.Parconséquent,danslestroiscommunesoùl’ordred’évacuationaétélevé,letauxderetourrestetrèsfaible.Lessolutionsproposéesparlesautoritésnesontpasacceptablespourbeaucoupetlespopulationstouchéesontdumalàimaginerleuravenir.Lefosséentrelescitoyensetles

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autorités s’agrandit. Le gouvernement considère que les populations sont victimes de«rumeurs néfastes» et espère finir par obtenir un accord pour sa politique à forced’explications.Pourlemoment,c’estunéchec[Shirabe2015].Les Japonais s’inquiètent pour les conséquences sanitaires de l’exposition auxrayonnementsionisants,l’éclatementdelacellulefamiliale,lesperturbationsdeleurvieet la contamination de vastes territoires. Pour nombre d’entre eux, les solutionsproposéesparlesautoritésnesontpasacceptableset letauxderetourdansleszonesoù l’ordre d’évacuer a été levé reste faible. L’absence d’avenir contribue aussi auxsouffrancesdespopulations.Lesrecommandations internationalesconcernant lespersonnesdéplacéesà l’intérieurdeleurproprepaysnesontpasrespectées:lesautoritésdoiventproposerleretouretlaréinstallationsansdiscriminationetsoutenirlespopulationstouchées,quellequesoitlasolutionretenue.

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LesrejetsradioactifscontinuentL’accidentdemars2011à la centraledeFukushimadaï-ichi a entraînéde fortsrejetsradioactifsdansl’atmosphèreetdansl’Océanpacifique.Laquantitérejetéedépenddelaméthoded’évaluation.Lesrejetsatmosphériques,quiontduréplusd’unedizainedejours,sontestimésàenviron10%deceuxdelacatastrophedeTchernobyl [Steinhauser2014]. Ils sont responsables de la contamination d’unvaste territoire pour des décennies et ont entraîné le déplacement d’environ160000personnes[NAIIC2012,IOM2015].Quantauxrejetsdansl’océan,cesontles plus forts jamais enregistrés.Mais la pollution radioactive a rapidement étédiluée grâce aux courants marins Kuroshio et Oyashio. Des traces de césiumradioactifenprovenanceduJaponontétédétectéesdansl’eaudemerprèsdelacôtedel’AmériqueduNord[WHOI2015].Enrevanche, lessédimentsmarinsontaccumuléunegrandequantitédecésiumradioactiflelongdescôtesjaponaisesetlapêcheesttoujoursinterditepourdenombreusesespècesmarines.Les rejets continuent à moindre échelle et la Tokyo Electric Power Company(TEPCo) a tenté de cacher cette information. Il lui a fallu des mois pourreconnaîtrecertainesnégligencesquiontprovoquédesscandales.Par ailleurs,TEPCoa accumuléune grandequantitéd’eau contaminéedansdescuvessurlesitedelacentrale.Ellecontientessentiellementdutritiumquin’estpasfiltréparlesystèmedetraitement.Unedessolutionsenvisagéesestderejetercetteeaudansl’océanbienquecelanesoitpaspossiblepourlemoment.Cinqannées après ledéclenchementde la catastrophedeFukushima,TEPCoenestencoreàtenterdecolmaterlesfuitesetlimiterlesrelâchements.Alorsqueleshabitants des environs ont été évacués durant les premiersmois de l’accident,quand les rejets étaient à leur maximum, TEPCo doit encore stabiliser lesréacteursetdenombreusespersonnes craignentquede forts rejets reprennenten casdenouvelle catastrophenaturelle. Est-ce raisonnablede rentrerune foisl’ordred’évacuationlevé?

TermessourceLaCommissiond’investigation indépendantesur l’accidentnucléaire(NuclearAccidentIndependentInvestigationCommission,NAIIC)mise enplacepar leparlement japonaisrapportequeletermesource,oulaquantitéderadioélémentsrejetésdansl’atmosphèreparl’accidentdemars2011,estestiméeàenviron900PBq,dont500PBqd’iode-131et

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10PBqdecésium-137,enexcluantlesgazrares1.Lepremierradioélémentpeutaffecterlathyroïdemaisdisparaîtrapidement,alorsqueledeuxièmeentraînedesconséquencesàlongtermecarilaunedemi-viede30ans.Enéquivalentradiologiqued’iode-131,c’estapproximativementunsixièmedes5200PBqrejetés,selonlescalculs,parl’accidentdeTchernobyl [NAIIC2012]. Ledernier rapportduComité scientifiquedesNationsUniessurlesconséquencesdesémissionsradioactives(UnitedNationsScientificCommitteeofthe Effects of Atomic Radiations, UNSCEAR) confirme que les estimations vontgénéralementde100à500PBqpourl’iode-131et6à20PBqpourlecésium-137.Lesmoyennesdesestimationspubliéessontenvironà10et20%respectivementdesrejetsatmosphériques correspondants de l’accident de Tchernobyl [UNSCEAR2015]. Uneautre revue de la littérature scientifique suggère 150 PBq d’iode-131 et 12 PBq decésium-137commemeilleuresestimations.Letermesourcetotal,sanslesgazrares,estestimé à 520 PBq. C’est à peu près un dixième du terme source de l’accident deTchernobyl[Steinhauser2014].Cesestimationssontbasées surdesmesuresdans l’environnementetdesmodèlesdedispersion pour quantifier le terme source qui correspond à ce qui est observé. Lescodesen champprocheauniveaudu territoire japonais et ceuxen champ lointainnedonnentpaslemêmerésultat.Quelquesoitlerésultat,celacorrespondauniveau7del’échelle internationale de classement des événements nucléaires INES, bien qu’il aitfalluunmoisauxautoritésjaponaisespourlereconnaître.Touteslesestimationss’accordentpourdireque80%desrejetsaérienssontallésversl’Océan pacifique et 20% sont retombés sur le territoire japonais. Les rejetsatmosphériquesmassifsuneduréplusd’unedizainedejoursàlacentraledeFDI,cequiest beaucoup plus long que ce qui est généralement prévu dans les plans d’urgencenucléaire.SelonleMinistèredel’environnementduJapon,lasurfacecontaminéedelaprovincedeFukushima avec un niveau de dose potentielle de 5mSv ou plus lors de la premièreannée s’étend sur plus de 1778 km2. Sur quelques 515 km2, cette dose potentielledépassait 20 mSv la première année [NAIIC2012]. Comme ce sera expliqué plus endétail, ladoseannuellereçueparlepublicnedoitpasdépasser1mSvparanpourlesexpositions planifiées. 20 mSv correspondent à la valeur la plus élevée desrecommandationsinternationalesensituationpost-accidentelle.Enplusdecesrejetsatmosphériques, leJaponadûfairefaceauplusfortrejetenmerjamaisenregistré.TEPCoaestiméque520m3d’eautrèsradioactiveonfuidansl’océanenavril2011,cequicorrespondàuntermesourcede4,7PBq,dont2,8PBqd’iode-131et 0,94 PBq de césium radioactif. L’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire(IRSN) a estimé que le rejet était 20 fois supérieur pour le césium [IRSN2001b]. Sil’estimation de ce rejet radioactif enmer était jugée au regard de l’échelle INES, celacorrespondraitàunniveau5ou6.

1Lesunitéssontdéfiniesenfindedocument

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LesfuitesperdurentTEPCoaprétenduavoirstoppélesfuitesenavril2011,maislacentraledeFDIcontinuede fuir enmer àmoindre échelle,mais à un niveau qui dépasse largement ce qui estgénéralement autorisé pour une centrale nucléaire. L’eau souterraine est contaminéeavantdes’écoulerversl’océan.L’eau souterraine près des réacteurs accidentés est fortement contaminée: lasurveillance effectuée par TEPCo montre des niveaux de concentration atteignant670000 Bq/L en bêta total en décembre 2015 [TEPCo2015b]. La compagnie faitbeaucoupd’effortpourlimiterlesécoulementsverslamer,maislesmesuresadoptéesnesontpastrèsefficaces.Sur lesquelques7000travailleursengagéschaque jourà lacentraledeFDI,lamoitiéenvironestaffectéeàlagestiondel’eaucontaminée.Lefaitquelesfuitesenmern’aientjamaiscesséétaitévidentquandonregardaitdeprèslesdonnéessurlacontaminationdel’eaudemer,commecelaaétémisenévidencedansla littérature scientifique. En mars 2013, une étude a estimé que le rejet moyenjournalierdecésium-137étaitde93GBqdurantl’été2011etde8,1GBqpendantl’été2012 [Kanda2013]. Ces chiffres peuvent être contestés, pas le fait que la centralecontinuaitàavoirdesrejetsenmer.Cependant,TEPCoapersistéàniercesfaits,malgréles fortesvaleursde la contamination relevéesdans l’eau souterraineetdans l’eaudemer près de la centrale. La compagnie a fini par reconnaître un niveau anormal encésiumdansunpuitsd’observationsituéprèsdelacôteenmai2013.Etcen’estquele22 juillet 2013, qu’elle a reconnu que les fuites étaient possibles car le niveau desnappes phréatiques évoluait en lien avec les marées et les précipitations[AP22/7/2013].Danssacommunication[TEPCo2013],TEPComentionnequelaconcentrationentritiumdans l’eau demer a atteint 2300 Bq/L dans le port devant la centrale. Et comme letritiumnepeutpass’accumulerniprovenirdelacontaminationdessédimentsmarins,ilnepeutvenirquedelacentraleaccidentée.Depuis,plusieursmesuresontétémisesenplacepourcontenircesfuitesdepuislesgaleriessouterrainespleinesd’eaucontaminéeet lesnappesphréatiques.Lesdonnéessur la surveillancede l’eaudemermettentenévidenceuneamélioration,maisc’esttoujoursunenjeumajeurpourTEPCo.Quelleestl’origineduproblème?TEPCoaraséunepartiedelafalaisepourconstruirelesréacteursdelacentraledeFDIplusprèsduniveaudelamer.Celaaétéunedécisionfatale. Les sous-solsdesbâtiments réacteur et turbine sont sur lepassagedesnappesphréatiques qui s’écoulent depuis les terres vers la centrale et puis l’océan. Avant lacatastrophe, TEPCo devait pomper environ 1000m3 par jour d’eau souterraine pourrabattrelesnappesetéviterl’inondationdessous-sols.Cespompesontétéarrêtéeslorsdel’accidentetenviron400m3parjourd’eausouterrainesesontinfiltrésdanslessous-solsdesbâtimentsréacteuroùilssemélangeaientàl’eauextrêmementcontaminéequiestutiliséepourrefroidirlesréacteurs.Bienentendu,unefractiondecetteeaus’infiltreaussi dans les aquifères avant de rejoindre l’océan. Durant l’été 2013, TEPCo devaitpomperchaque jourdans lessous-solsenviron400m3deplusquecequ’elle injectaitpour le refroidissement afin d’éviter de nouveaux débordements en mer. Sur les1000m3 quotidiens qui pénétraient sur le site de la centrale, les 600 m3 restants’écoulent vers l’océan. TEPCo et les autorités ont estimé, de façon arbitraire, que la

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moitiésecontaminait. Ilestdoncofficiellementreconnuque300m3d’eausouterrainecontaminées’écoulaientquotidiennementdanslamer[JT7/8/2013].TEPCoetsessous-traitantsonttestéplusieursméthodespourréduirecesrejetsenmer,avec un effet limité jusqu’à présent. La compagnie a commencé par pomper l’eausouterraineplusenamontdesréacteurs,maisl’effetestdécevant.Enseptembre2015,elle a commencé à pomper l’eau au pied des réacteurs, avant de la décontaminerpartiellementpour le rejeterenmer.Depuis, la compagnieestimeque les infiltrationsdanslessous-solsdesbâtimentsréacteuretturbinesesontréduitesà150m3parjouretque400m3finissentdirectementdansl’océan[ACRO2015d].Ladernièremesuremiseenplacepourcontenircesfuites,estunebarrièresouterrainetoutlelongdulittoraldevantlesréacteurs.Maiscettebarrièrearapidementcommencéàpencherducôtédelameràcausedelapressiondel’eau[TEPCo2015a].Etenjanvier2016,TEPCoareconnuqu’ellenepouvaitplusdécontaminerl’eausouterrainepompéeprès des réacteurs avant de la rejeter en mer à cause de sa salinité et de sacontaminationquiontaugmenté.Elleestdoncreverséedanslessous-solsdesbâtimentsturbineavantd’êtrerepompéeversdescuvesdestockage.Enconséquence,laquantitétotaled’eauquipénètredanslessous-solsestpasséeàunemoyennede600m3parjour,cequiestplusqu’en2013[TEPCo2016].La compagnie a réussi à réduire les relâchements vers l’océan mais a accrul’accumulation d’eau contaminée dans des cuves, sans solution ultérieure en vue. Unautreprojetencoursconsisteenlegeldusous-soltoutautourdesréacteursaccidentés,mais c’est plus complexe qu’attendu, surtout en aval des réacteurs où il y a denombreusesgaleriessouterrainespleinesd’eaucontaminéequ’ilestimpossibledegeler.Pendant ce temps, TEPCo continue d’accumuler de grande quantité d’eau contaminéedansdescuvessituéessurlesitedelacentralenucléaire.Enmai2015,lacompagnieaannoncéavoirtraitépresquetoutecetteeau:ellearetirélestrontiumpour620000m3etplus60autresradioélémentspour440000m3.Le tritiumn’estpasretiréetTEPCon’apasd’autresolutionàproposerpourcetteeaupartiellementdécontaminée,que lerejetenmeroul’évaporation[ACRO2015b].En prenant en compte le tritium dans les cuves (875 TBq) et celui encore dans lecombustible fondu (2500 TBq), le stock total de tritium est évalué à 3400 TBq[TEPCo2014]. L’autorisation de rejet en mer étant limitée à 22 TBq par an pour letritium,ilfaudraplusde100anspourtoutévacuer,saufsicettelimiteestrelevée.

ImpactsurlamerEnavril2011,quandlesfuitesvers l’océanétaientà leurparoxysme, lacontaminationen césium-137 de l’eau de mer devant la centrale a atteint environ 100000 Bq/L[NRA2013a].CommelacentraledeFDI fait faceàungigantesqueocéan,sesrejetssontrapidementdilués.Lacontaminationdel’eaudemerrestefaible,mêmeàproximitédelacentrale.Plus loin, des tracesdepollution liée auxpremiers rejets ont étédétectéesprèsde la

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côtenordaméricaine.Leplusfortevaleurrelevéepourlesdeuxcésiumsradioactifsestde11mBq/L[WHOI2015].L’impactseraitbeaucoupplusgravesidesfuitessimilairesavaient lieudans laMéditerranée, laMerduNordou lesGrandsLacsenAmériqueduNord.Al’inverse,lessédimentsmarinsàproximitédelacentraleaccidentéeetàl’embouchuredes fleuves sont toujours contaminés à cause des rejets initiaux. Cela entraîne lacontaminationdes chaînes trophiques àpartir de la faunebenthique. Par conséquent,certainesressourceshalieutiquessonttoujourscontaminées.

CertainespratiquesontconduitàdesrejetssignificatifsdepoussièresradioactivesDemême,lesrejetsatmosphériquessontsupérieursàcequiestgénéralementacceptépour une centrale nucléaire. Des pratiques peu précautionneuses dans ledémantèlement de la partie supérieure du réacteur n°3 ont conduit aux rejetsadditionnels de poussières radioactives qui ont été détectées à des kilomètres.DouzetravailleursàlacentraledeFDIontaussiétécontaminésdurantl’été2013.Làencore,ilafalluplusd’unanpourreconnaîtreleproblème.Cen’estqu’endécembre2014quel’onaapprisqueTEPCoavaitdiluélesrésinesfixatrices,lesrendantinefficaces,provoquant,ainsi,desrejetsdematièresradioactives.Ellenes’estpascontentéedediluerlesrésinesbien en dessous des prescriptions du fabricant, elle s’est abstenue de les aspergerquotidiennement quand elle retirait les débris. Ces pratiques douteuses ont perdurépendantunanenviron[Asahi31/12/2014].TEPCo a fini par reconnaître que le 19 août 2013 le rejet a été de 110 GBq. Deschercheurs ont estimé ce terme source à partir d’un modèle de dispersionatmosphériqueetsuggèrentquelaquantitérejetéeaétéplusélevéed’unfacteur3,61auminimumpour le césium-137. Ilsmentionnent aussi un échantillon de sol prélevé aucentredupanachecalculéavecuneconcentrationélevéeenstrontium-90.Cetélémentestbeaucoupplusradiotoxiquequelecésium[Steinhauser2015].Ces faits seraient restés secrets sans la surveillance indépendante effectuée par deschercheursetdesONG.Uneéquipedechercheursainstallédespréleveursd’airentroiszoneshabitéesdeFukushimaetamesurélaconcentrationencésiumchaquesemaineàpartir de septembre 2012 pour évaluer l’exposition des populations. A partir deséchantillonsprélevésentreles15et22août2013,ilsonttrouvé1,28mBq/m3àSoma,à48kmauNordde la centraledeFDI.Un telniveauétait6 fois supérieurauxniveauxhabituels.C’était20à30foisplusàMinami-Soma,à27kmauNord-Ouestdelacentrale.Enrevanche,iln’yapaseudechangementàKawauchi,à22kmversl’Ouest,Sud-Ouest.Apartirdesdonnéessurladirectionetlavitesseduventàcetteépoque,ainsiquesurlatailledesparticules, leschercheursontestiméquelecésiumradioactifprovenaitdelacentraleaccidentée.CesmêmeschercheursontaussitrouvédespicsdecésiumMinami-Soma en mai, juin et août 2013. Ils ont présentés leurs résultats au ministère del’environnementenmars2014[Asahi16/7/2014].

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Selon une autre équipe universitaire, des poussières radioactives émises lors destravauxderetraitdesdébrisàlacentraledeFDIontétédétectésjusqu’àMarumoridansla province voisine deMiyagi, située à 60 km de la centrale, à sept occasions depuisdécembre2011.L’équipeadéterminéqu’ilyaeu8caspourlesquelslaconcentrationencésiumétaitaumoins10foissupérieureauxvaleurshabituellesetquel’originedevaitêtrelacentralenucléaire,étantdonnéladirectionetlavitesseduvent.Leniveauleplusélevé correspond à un prélèvement effectué entre les 16 et 20 août 2013, avec unevaleur50à100 foisplus élevéequ’habituellement. Les chercheursont transmis leursdonnéesauministèredel’agricultureenmai2014[Asahi31/7/2014].Cependant,lesJaponaisontdûattendrejuillet2014pourapprendrequeledéblaiementdes débris à la centrale de FDI en août 2013 a entraîné des rejets de poussièresradioactivessur14rizièresdeMinami-Somasituéesau-delàde lazoneévacuéede20km. La concentration en césiumdans le rizmoissonné à l’automne2013 adépassé lalimitedemise sur lemarchéqui estde100Bq/kg.Un tel dépassementde la limite aaussi été relevé pour 5 autres rizières situées dans la zone évacuée. En 2012, le rizrécoltédansceszonesnedépassaitpaslalimite.LesrésidentsdeMinami-Somasontencolèredenepasavoirrapidementinformés[Asahi14/7/2014,Asahi15/7/2014].L’Autoritéderégulationnucléaire(ARN)considèremaintenantqu’il trèspeuprobableque des poussières radioactives de la centrale de FDI aient contaminé le riz à unevingtainedekilomètres.Elleestimelesretombéesà30Bq/m2surunedesrizièreset12Bq/m2 sur une autre. Mais l’IRSN, en France, a calculé que ces dépôts auraient puatteindre100à1000Bq/m2àMinami-Soma,contribuantainsiàlacontaminationduriz[IRSN2014].Unepublicationscientifiqueplusrécentecontreditaussilesconclusionsdel’ARN[Steinhauser2015].LeconseilmunicipaldeMinami-Soman’estpassatisfaitdesexplicationsofficielleset,enréponseàunepétitioncitoyenne,adécidé,à l’unanimité,d’enquêtersur la façondontl’ARN est arrivée à ses conclusions. L’ARN n’explique pas l’augmentation de lacontamination du riz et le gouvernement a arrêté les investigations. La pétitionréclamait que «le gouvernement continue les investigations scientifiques pour que lesagriculteurspuissentcontinueràproduiredurizsansinquiétudeetpourtransmettreuneinformationpréciseauxcitoyensévacués»[Asahi9/12/2015].

LacentraledeFukushimadaï-ichireprésentetoujoursunemenaceLes réacteurs accidentés à la centrale de FDI sont plus fragiles que des réacteursordinairesetlesbarrièresdeconfinementsontpercées.Encasdecatastrophenaturelle,des rejets massifs pourraient reprendre et menacer les communautés environnantes.Les risques liés au réacteur n°4 ont été réduits alors que le dernier assemblage decombustibleaétéretiréendécembre2014.MaisTEPCofaitfaceàundéfibeaucouppluscomplexepourleretraitdescombustiblesdestroisréacteursoùilyaeufusionducœurdurant l’accident, à cause des forts niveaux de débit de dose ambiant. L’accès aucombustiblefondudanslesenceintesdeconfinementestencoreplusdifficileetdevraitprendredesdécennies.

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L’eauaccumuléedans lescuvesn’estpassécuriséenonplus.CommeTEPCofait faceàdesdifficultésfinancièresinsurmontables,ellefavoriselesoptionslesmoinschèresaudétrimentdelasûreté.

ConclusionsDes pratiques peu précautionneuses ont conduit à des rejets radioactifs dansl’atmosphère qui sont venus s’ajouter aux retombées de l’accident. L’eaucontaminée à la centrale est devenue le cauchemar de TEPCo. Les efforts pourréduirelesfuitesenmerontconduitàl’accumulationd’énormesquantitésd’eaucontaminéedansdescuvessanssolutionenvue.IlafalludesmoisàTEPCoetauxautorités pour reconnaître les problèmes qui ont d’abord été révélés par deschercheursfaisantdesmesuresauxalentoursdelacentraledeFDI.TEPCodoitencorestabiliserlesréacteursaccidentésetsaprioritéesttoujoursderéduirelamenacequ’ilsconstituent.Ledémantèlementàproprementditn’apasencorecommencé.Alorsque lescommunautésautourde lacentraleontétéévacuéesàcausede lapollution à long terme de l’environnement, beaucoup craignent que des rejetsimportants puissent reprendre en cas de nouvelle catastrophe naturelle. Lesréacteurs accidentés sont plus fragiles que des réacteurs ordinaires et leurenceintedeconfinementestpercée.Ilspourraientnepaspouvoirfairefaceàunnouveau séisme ou un tsunami, entraînant ainsi un nouveau rejet massif deradioéléments.

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ContaminationradioactiveetévacuationDe nombreuses personnes ont été forcées d’évacuer dans le chaos à cause desretombées radioactives. De nombreuses autres personnes sont parties d’elles-mêmespourseprotégerouprotégerleursenfants.Cinqansplustard,laplupartd’entreellesrestentévacuéesetontdumalàimaginerleuravenir.Le nombre total de personnes évacuées n’est pas bien connu. Cependant, il estgénéralement admis qu’environ 160000 personnes ont quitté les territoirescontaminés. Après cinq ans, le nombre de personnes déplacées est encore de100000environalorsquel’ordred’évacuern’aétélevéquedanstroiscommunes.Lespersonnesquisesontréinstalléesnesontpluscomptées.

Déroulementdel’évacuationPendantlaphased’urgencedel’accident,lespopulationsontreçul’ordred’évacuerdansun rayon de 20 km de la centrale, par phases successives. Il est important de noter,commelesoulignelerapportdelaNAIIC,quelerayonde10kmad’abordétéchoisitoutsimplementcarcelacorrespondaitàladistancelaplusgrandedelazonedepréparationàl’urgence.«Iln’apasétédéterminéàpartirdecalculsousurunebaserationnelle.»Encequiconcernelazoned’évacuationsuivante,décidéeplustardsuiteàl’évolutiondelasituation, «un rayon de 20 km a été décidé simplement à partir de l’avis subjectif dequelquespersonnes.Celanepeutpasêtrequalifiédedécisionrationnelle» [NAIIC2012].Leshabitantsontétéforcésàpartir«avecàpeineplusqueleurshabitssurledosetilsnesavaientpasquec’étaitdûàunaccidentnucléaire»[NAIIC2012].Plus tard, à partir du 15mars 2011, un ordre demise à l’abri a été énoncé pour leshabitantsrésidantentre20et30kmdelacentraledeFDI.Ceuxquin’étaientpaspartisd’eux-mêmes ont dû rester sans sortir pendant plus de dix jours, jusqu’à ce qu’unenouvelle recommandation gouvernementale, non officielle, à évacuer volontairementsoitémisele25mars2011.Leshabitantsquinesontpaspartisàcemomentlà,ontdûresteràl’intérieurjusqu’àlalevéedel’ordredemiseàl’abrile22avril.Le rapport de la NAIIC souligne que «les encouragements à partir par soi-même,communiqués via les communes, signifient que la décision d’évacuer a été reléguée auxhabitantseux-mêmes»[NAIIC2012].Ilajoutequeleconcept«d’évacuationvolontaire»a

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entraînédelaconfusionparmilesrésidents,carils’agissaitd’unnouveauconceptnonprévu dans les plans d’urgence. Le rapport ajoute qu’il «s’agit d’un droit naturel descitoyens de décider des endroits potentiellement contaminés par des substancesradioactives afin de protéger leur santé, et ainsi, reléguer la décision peut apparaîtrecommeunedécisionquirespecteleurliberté.Ondoitconclure,cependant,quereléguerladécision d’évacuer aux citoyens n’était pas approprié. Il est du devoir des Etatsdémocratiquesdeprotégerlaviedeleurscitoyens,celafaitpartieducontratsocialentreavecl’Etat»[NAIIC2012].Legouvernementadoncfailliàsondevoirdeprotégerlavieetlasantédescitoyens.Lesretombéesradioactivesontcontaminédesterritoiresàdesniveauxsignificatifs,bienau-delà de la zone d’évacuation de 20 km. Le 22 avril 2011, plus d’unmois après lesrejets massifs, de nouveaux ordres d’évacuation ont été émis par le gouvernementcentraldanscequiaétéappeléla«zoned’évacuationdélibérée»quicouvreunerégionsituée au Nord-Ouest de la centrale nucléaire où la contamination entraînerait uneexpositionexternepouvantdépasser20mSv suruneannée (voir la cartede la figuren°1).CelainclutdespartiesdeKatsuraoetdeNamie,toutIitate,ainsiquedespartiesdeKawamata(ledistrictdeYamakiya)etdeMinami-Soma.Figure n°1: Carte des zones évacuées en septembre 2011 (carte extraite de[DEVAST2013])

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Environ 10000 personnes vivaient dans cette zone additionnelle. Selon les autoritésmunicipales, il restait environ6000habitantsquand l’ordred’évacueraétéémis.Lesautresétaientdéjàpartispareux-mêmes[Yomiuri23/4/2015].Lespersonnesquiontreçuunordred’évacuerenavril2011ontpasséplusd’unmoisdansune zoneoù elles auraientdû être évacuéesplus rapidement.Durant lepremiermois, lesradioélémentsàviecourtedominaientcommelemontrentlesanalysesfaitespar l’ACRO sur des échantillons prélevés à Iitate en mars 2011 [ACRO2011]. Parconséquent,cespersonnesontétéexposéesàdesdosesindues.Lafigure2,extraited’unrapportdel’IRSN,montrel’évolutiondedébitdedoseambiantenfonctiondutemps.Ilétait jusqu’à10foisplusélevéque lavaleurrésiduellequand ilaétédécidéd’évacuer[IRSN2012].Figuren°2:Evolutiondudébitdedoseambiantdûauxretombéesradioactives,mesuréà Namie (Akougi Teshichiro), à 31 km au Nord-Ouest de la centrale de FDI (figureextraitede[IRSN2012])

Par conséquent, de nombreux Japonais ont ressenti un sentiment d’abandon par lesautoritésquinelesontpasprotégés.Celaaengendrédeladéfianceenverslesautoritésquiestencoreprésente.LaNAIICrapportequ’àladatedu29août2011,lenombredepersonnesquiontreçuunordreouunerecommandationd’évacueraatteintuntotalapproximatifde146520.Celainclutenviron78000personnesdela«zonederestriction»situéeàmoinsde20kmdelacentraledeFDI,10010delazoned’évacuationdélibéréesituéeàplusde20km,làoùil y a un risque que la dose annuelle dépasse 20mSv, et approximativement 58510personnes de la zone comprise entre 20 et 30 km, en excluant celles de la zone

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d’évacuation délibérée, là où un ordre de mise à l’abri a été émis le 15 mars 2011[NAIIC2012].Enmai2011,l’IRSNaexpliquéqu’ilauraitrecommandél’évacuationdesterritoiresoùlacontaminationdessolsdépasse600000Bq/m2,cequicorrespondàunedoseexternede10mSv lapremièreannée.Unetellemesureauraitentraîné l’évacuationde70000personnesau-delàdelazonederestriction,dontdeshabitantsdegrandesvillescommeFukushima[IRSN2011a].Puis, jusqu’en septembre 2011, les autorités ont établi des zones autour de pointschauds où il était seulement recommandé d’évacuer, à l’extérieur des zones derestrictionetd’évacuationdélibérée,làoùl’expositionexternepouvaitdépasser20mSvdurant la première année de l’accident. La recommandation s’est faite maison parmaison.Leshabitantsconcernésavaientlechoixdepartiretdevenaientéligiblesàuneassistance(indemnisationdelapartdeTEPCo,exemptiondel’assurancemédicale,delasécuritésociale,delaretraiteetc).En fait, un plus grand nombre de personnes ont quitté les territoires contaminés.L’Organisationinternationaledesmigrations(OIM)explique,qu’enplusdel’évacuationobligatoire liée aux ordres gouvernementaux, de nombreuses personnes vivant endehors des zones évacuées ont décidé de partir d’elles-mêmes par crainte desradiations,malgrélesproposrassurantsdugouvernement.«Cesauto-évacuéscommeonles appelle (jishu-hinansha en japonais) ne sont pas officiellement reconnus comme desévacués nucléaires et ne sont pas comptés comme tels dans les statistiques officielles.Dénigréscommeayantprisunedécisioncapricieusebaséesurunevisionégoïste–commel’insinuentsouventlesofficielsdugouvernementdanslesinterviews–cesauto-évacuésnebénéficientqued’uneassistanceréduitedelapartdesautorités»[IOM2015].Le programme de recherche sur le terrain DEVAST a montré qu’ils sont souventregardéscommedeslâchesoudesfraudeursquiontabandonnéleurscommunautésetdesfauteursdetroublequifontapparaîtreFukushimacommeunerégionoùiln’estpassûrdevivre,mettantainsienpérill’effortcollectifdereconstructiondeFukushima.Bienquecettevisionnégativesesoitamélioréecesdernièresannées, le traumatismed’unetellefractureentrelescommunautéestencoreprésent[DEVAST2013].

NombredepersonnesdéplacéesLenombretotaldepersonnesévacuéesn’estpasbienconnu,carilestdifficileàétablir.Les rapports officiels donnent des chiffres différents qui dépendent de la façon decompter. Le premier tableau complet du nombre de personnes évacuées à cause dutsunamietdel'accidentnucléaireaétépubliéennovembre2011.Le nombre total d’évacués dans des abris à cause des séismes, du tsunami et del’accident nucléaire estmonté, durant les premières semaines, à plus de 450000 surtout le pays, dont 400000 dans les trois provinces les plus touchées, à savoir Iwate,Miyagi etFukushima [DMC2012].AFukushima, lenombredepersonnesayant trouvérefugedansdesabris,hôtelsouchezdesamisoudelafamilleaculminéenjuin2012à163404[RA2012].

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Commenousl’avonsdéjàsignalé,laNAIICrapportequ’au29août2011,lenombretotalde personnes qui ont reçu une recommandation ou un ordre d’évacuation à cause del’accidentnucléaireaatteintuntotalde146520personnes[NAIIC2012].Tousnesontpaspartis.Tousnesontpasrentrésquandlarecommandationàévacuerlabandesituéeentre20et30kmaétélevée.Lenombretotald’auto-évacuéscomptésparlesautoritésdurant les6premiersmoisaatteintenviron50000enseptembre2011 [MEXT2011],plusdelamoitiéayantfuiendehorsdelaprovincedeFukushima.Certainsauto-évacuéssontrentrés;d’autressesontréinstallésailleursetiln’yapasdestatistiques officielles. La plupart ne peuvent pas décider quant à leur avenir. Lesévacués«forcés»nepeuventpasrentrerchezeuxàl’exceptiondetroiszonesoùl’ordred’évacuationaétélevé:cesontdespartiesdeTamuraetKawauchien2014,ettoutleterritoiredeNarahaen2015.Voirlacartedelafigure3.Peusontrentrés.Plus de lamoitié des familles qui ont évacué suite à la catastrophe nucléaire ont étéséparéesd’aprèsuneétudedesautoritésrégionalesdeFukushima.Sur20680réponsesreçues, 16965 foyers, ou 82%, concernent des personnes qui vivaient dans les zonesévacuées,alorsque3683 foyers,ou18%,concernentdesauto-évacués. Il ressortquedans 44,7% des foyers, tous les membres de la famille vivent ensemble dans leurnouvellehabitation.Celainclutlescélibataires.Mais48,9%desréponsesindiquentquelesmembresdu foyerviventmaintenantsurplusieurs lieux,dont15,6%suraumoinstroislieuxdifférents[Asahi29/4/2014].

CinqansplustardPrèsdecinqansplustard,lapopulationdeFukushimaadécrude5,7%selonledernierrecensement national. Au 1er octobre 2015, il y avait 1,9 millions d’habitants àFukushima. C’est 115000 de moins qu’en 2010, lors du recensement précédent. Ceschiffres sont basés sur le nombre de personnes vivant réellement dans la province,qu’ellesysoientenregistréesounon.Labaissedelapopulationestdueprincipalementaux évacuations qui ont fait suite à la catastrophe nucléaire comme cela peut êtreobservésurl’écartentrelessexes:laprovincedeFukushimaaperdu39715hommeset75743femmes,soitunebaisserespectivede4et7,3%depuis2010.Lestravailleursàlacentrale de FDI et autour pour la reconstruction, sont surtout des hommes et denombreuses femmessontpartiespourprotéger lesenfants.LavilledeHirono,oùunegrande partie de la population actuelle est employée sur le chantier de la centraleaccidentée,aunepopulationmasculinede2746personnes,avecuneaugmentationde2,3%depuis2010.Lapopulation féminine,aucontraire,estàpeuprès lamoitié,avecunebaissede42,3%.Dansquatrecommunesoùtoutelapopulationaétéévacuée,ilyazéropersonnerecensée.Ils’agitd’Okuma,Futaba,TomiokaetNamie.DanslevillagedeKatsurao, où l’ordre d’évacuer devrait être levé au printemps, 18 habitants sontrecensés[Asahi25/12/2015].Cinq ans plus tard, le nombre total de «réfugiés nucléaires» est toujours de 100000environ,selonuneenquêtedelaprovincedeFukushima:56463personnesdemeurentdanslaprovince,alorsque43497autresrésidentendehorsau10décembre2015.Ledevenir de 31 personnes est inconnu. Cette enquête couvre les personnes qui vivent

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dansunlogementprovisoireoudansdelafamille.Elleexclutcellesquiontretrouvéàseloger en devenant propriétaire ou dans le parc locatif public dédié aux personnesdéplacées [JT9/1/2016]. Cela signifie que c’est le type du logement qui définit lacatégoriestatistiqueutiliséepourcompterlespersonnesdéplacées.Figuren°3:Zonesaffectéespardesordresd’évacuationàladatedu5septembre2015(Carteextraitede[METI2015])

Bénéficier d’un nouveau logement est un réel progrès pour les personnes déplacées,maiscelanesignifiepasqu’ellesnedoiventplusêtrecomptéescommeévacuées.Elles

Hirono Town

Date City

Iwaki City

Naraha Town

20km

Kawauchi Village

Tamura CityFukushimaDai-ichi NPS

FukushimaDai-ni NPS

Okuma Town

Minamisoma City

Iitate Village

Areas to which evacuation orders have been issued (September 5, 2015)

Katsurao Village

Namie Town

Tomioka Town

Legend

Area1: Areas to which evacuation orders are ready to be lifted

Area2: Areas in which the residents are not permitted to live

Area3: Areas where it is expected that the residents have difficulties in returning for a long time

Futaba Town

Kawamata Town

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seconsidèrentsouventelles-mêmescommepersonnesdéplacéesquisouffrentde leurstatut et qui font le deuil de leur vie d’avant la catastrophe. Quand une personneréinstallée cesse d’être considérée comme évacuée? C’est une question difficile àlaquellelaréponsedoitêtreapportéeenconcertationaveclespersonnesaffectées.Finnovembre2015,ilyavaitencore30293logementspréfabriquésàIwate,MiyagietFukushima,avecuntotalde62798habitantsyrésidantsuiteàlatriplecatastrophe.Aumoins14000deceslogementsprovisoiresdevraientencoreêtreoccupésenavril2016.C’est le tiers du nombre d’unités culminant à 48628 en avril 2012. Ces unitéstemporairesontunedurabilitéréduiteetlaplupartmontredessignesdedétérioration.Mais le tauxdeconstructionduparcde logementspublicsprévusestactuellementde18% pour les personnes qui ont fui suite à la catastrophe nucléaire[Yomiuri11/1/2016].

ConclusionsEnviron160000personnesont fuidurablement les territoirescontaminés.Cinqansplustard, lenombredepersonnesdéplacéesest toujoursd’environ100000alors que les ordres d’évacuation ont été levés en trois lieux seulement. Lespersonnesquisesontréinstalléesnesontpluscomptées.Derrière ces chiffres, il y a des individus dont la vie a été chamboulée. Lesaccidentsnucléairesmajeurssontd’aborddescatastropheshumaines,entraînantle déplacement de nombreuses personnes qui ont tout perdu: leur habitation,leurviedefamille,leliensocial,jusqu’àleuravenir.Ledéplacementengendredegravesdifficultésetdelasouffrancepourlespopulationstouchées.Lespersonnesnon-évacuées dans les territoires contaminés craignent pour leur santé et leuravenir,leurviequotidienneestégalementgravementaffectée.Il appartient à l'Etat de leur fournir une protection et un soutien digne deconfiancepourreconstruireleuravenir.

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RevuedesniveauxdeprotectionaprèsunaccidentnucléaireLes autorités japonaises ne cessent de répéter qu’il n’y a pas de cancer radio-induit, ou qu’il est indétectable s’il apparaît, sous une exposition cumulée de100mSv,bienquelesrecommandationsinternationalessurlaprotectioncontreles radiations sont basées sur l’hypothèse centrale de l’absence de seuil et unerelation linéaire dose-réponse en ce qui concerne les cancers et les effetshéréditaires.Les politiques d’évacuation et de retour sont toutes les deux basées sur uneinterprétation laxistedesrecommandations internationalesquinesontpas trèscontraignantes. C’est la valeur la plus élevée de l’intervalle de référence de laCommission internationale de protection radiologique (CIPR) qui a été retenue.Deplus, comme la radioprotection est basée sur une grandeur quene peut pasêtremesurée,lesautoritésontchangédegrandeuropérationnellepourréduireladoseapparentesansl’expliquerclairementauxpopulations.Celaaggravelapertede confiance envers les autorités et ce que les Japonais appellent les «goyo-gakusha», à savoir les experts spécialement nommés par les autorités pourconvaincrelespopulationsqu’iln’estpasdangereuxdevivredanslesterritoirescontaminés[Shirabe2015].En ce qui concerne la contamination de l’alimentation, la stratégie étaitcomplètementdifférente:lesautoritésontfixélesvaleursmaximalesadmissiblesbien en-dessous des standards internationaux pour retrouver la confiance desconsommateursetrelancerlaproductiondanslesterritoirescontaminés.

LesprincipesdelaradioprotectionLa radioprotection est basée sur trois principes clés qui sont les principes dejustificationetd’optimisationquis’appliquentàtouteslessituationsd’exposition,et leprincipe de limitation qui ne s’applique aux doses qui devraient être engagées aveccertitude dans le cadre d’une exposition planifiée. La CIPR définit ces trois principesainsi[ICRP103]:«• leprincipede justification: toute décisionquimodifie la situation d’expositionauxrayonnementsdoitfaireplusdebienquedemal;

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• le principe d’optimisation de la protection: la probabilité d’être exposé, le nombre depersonnesexposéesetleniveaudeleursdosesindividuellesdoiventtousresteraussifaiblesqu’ilestraisonnablementpossible,comptetenudesfacteurséconomiquesetsociétaux;• le principed’applicationdes limites dedose: la dose totale reçueparun individu, dueauxsourcesréglementéesdanslessituationsd’expositionplanifiée,autresquel’expositionmédicale de patients, ne doit pas dépasser les limites appropriées indiquées par laCommission.»Comment justifier la vie dans les territoires contaminés? Quels sont les bénéficesattendus?Leprinciped’optimisation,quantà lui, impliquedecontrôlerchaqueactionquotidienne pour réduire la dose. C’est une lourde contrainte qui est difficilementacceptablepourbeaucoup.En ce qui concerne les doses de référence, la publication 103 de la CIPR [ICRP103]introduit trois typesdesituations.Pour lesexpositionsprogrammées,où laprotectionradiologiquepeutêtrepréparéeàl’avance,avanttouteexposition,etoùleursamplitudeet étendue peuvent être raisonnablement prédites, la limite pour le public est fixée à1mSv par an. Pour des expositions spécifiques, comme celles aux rejets autorisésd’éléments à vie longue dans l’environnement, des limites plus basses ont étéintroduites.La CIPR considère aussi ce qu’elle appelle des «situationsd’expositionexistantes» quiexistentdéjàquandunedécisionsurlecontrôledoitêtreprise.Ellesincluentlagestionpost-accidentelle. Lesniveauxde référencepour ces situationsd’exposition existantesdoivent être fixés typiquement dans l’intervalle de dose prévue compris entre 1 et20mSv.Finalement,lederniercascorrespondauxsituationsd’urgence:lesniveauxderéférence pour la dose résiduelle d’une exposition planifiée doivent être typiquementcomprisentre20et100mSv.

Pour lessituationsexistantescommeàFukushima, laCIPRa introduit«desniveauxderéférence»plutôtquedelimitesetpréciseleurapplication.Cesniveauxnesontpasdeslimites strictes et des doses individuelles peuvent être parfois plus élevées, mais laplupart d'entre elles doivent être inférieures aux niveaux de référence. Les dosesindividuellesreçues,enraisonduprocessusd'optimisation,doiventdiminueraucoursdutemps.LesexplicationsdelaCIPRsontaccompagnéesdesgraphesdelafigure4.Untelpointdevuen’estpastoujoursaccepté.DenombreuxJaponaisattendentqueleprincipede limitationsoitappliquéauxsituationsexistantesdetellesortequechaqueindividu ne soit pas exposé à des doses supérieures à la limite. Anand Grover,

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rapporteurspécialduConseildesdroitsdel’hommedel'ONU,noteégalementque«lesrecommandationsdelaCIPRsontbaséessurleprinciped’optimisationetdejustification,selon lesquels toutes les actions du gouvernement devraient donc être fondées sur lamaximisationdubiensurlemal.Cetteanalysebénéfice-risquen’estpascompatibleavecledroit à la santé, car il donne la priorité aux intérêts collectifs sur les droits individuels.Danslecadredudroitàlasanté,ledroitdechaqueindividudoitêtreprotégé.Enoutre,detelles décisions, qui ont un impact à long terme sur la santé physique et mentale despersonnes, doivent être prises avec leur participation active, directe et efficace»[HRC2013].Figure n°4: Utilisation d’un niveau de référence dans une situation d’expositionexistanteetévolutiondeladistributiondesdosesindividuellesavecletempsenraisonduprocessusd’optimisation(Figureextraitede[ICRP103]).

Ces recommandations internationales de protection contre les radiations n’ontjamaisétédiscutéesaveclespartiesprenantesetlespopulations.Lespersonnes

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touchéeslesontdécouvertesaprèsl’accidentetellesnesaventpascommentcesvaleurs de référence ont été fixées. Elles attendent des limites strictes pourprotégerchacun,enaccordavecledroitàlasanté.

Politiqued’évacuationLesautoritésjaponaisesontfocaliséleurpolitiqueetcommunicationsurladoseexterneàproposde l’évacuation.Au-dessusd’unedoseexterneestiméeà20mSv lapremièreannée, lespopulationsontdûévacuer.Lesmesuresdeprotectioncomme l’évacuationsontaussiterriblespourlespopulationstouchéesquiperdenttout,maisdanslecasdel’accidentdeFukushima,c’étaitpleinementjustifiécarladoseestiméeauraitdépassélavaleur de 200mSv à partir de laquelle ce n’est plus considéré comme «faible dose»selonladéfinitiondel’UNSCEAR.Les autorités japonaises ont expliqué que 20mSv correspond à la valeur basse del’intervalledesvaleursderéférencedelaCIPRencasd’urgence.Maisquandcettelimited’évacuationaétéintroduitepourlespopulationssituéesau-delàdelazonedes20km,laphased’urgence était terminée. Cettemême limite est utilisée actuellementpour leretourdespopulationsdanslesterritoiresévacués,bienqu’ellecorrespondeàlavaleurla plus élevée de l’intervalle de référence pour ce que la CIPR qualifie de situationd’exposition existante. Les autorités omettent généralement de mentionner ce point.Commecelaadéjàétédit,l’IRSNauraitchoisid’évacuertouteslespopulationsdeszonesoùl’expositionexterneauraitpudépasser10mSvparan[IRSN2011a].Il convient de rappeler qu’en «temps de paix», la valeur d’exposition maximaleautoriséepourlepublicestlimitéeà1mSvparan.Lanouvellevaleurde20mSvparancorrespondàlavaleurd’expositionmaximalepourlestravailleursdunucléaire.Elleestmaintenant appliquée à tout lemondedans les territoires touchés, dont lesnouveauxnés, les bébés, les enfants… qui sont plus sensibles aux radiations. De nombreuxJaponaisnel’acceptentpas.A titre de comparaison, selon le code de l’assurance introduit en 1976 pour lestravailleursdel’industrienucléaireauJapon,legouvernementdoitindemniserceuxquiauraientétéexposésàplusde5mSvenunanetauraientdéveloppéuneleucémieplusd’unanaprèsavoirétéengagépourunetâchesousrayonnementsionisants,sid’autresfacteurspeuventêtreexclus.Enoctobre2015,pour lapremière fois, legouvernementjaponais a reconnu un cancer comme étant lié au travail à la centrale de FDI, aprèsqu’uneleucémieaitétédiagnostiquée,enjanvier2014,chezunhommeâgéde41ans,qui a travaillé 15mois à la centrale accidentée et a reçu une dose totale de 20mSv[JT20/10/2015]. En1976, 5mSv correspondait à la limite annuellemaximalepour lepublic.C’est1mSvdenosjours.Unetellerèglecontreditl’affirmationofficiellequelesradiations sont sans danger en dessous de 100mSv et de nombreux habitants sedemandents’ilsbénéficierontdesmêmesgarantiesencasdecirconstancessimilaires.Ilest importantdenoterque laCIPRrecommandedediminuer lavaleurderéférenceavec le temps dans le cas de situations d’exposition existante: «Dans la plupart dessituations d’exposition existante, l’individu exposé, ainsi que les autorités, souhaitentréduire les expositions à des niveaux qui sont proches de ou sont similaires à ceux de

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situations jugées comme «normales »» [ICRP103]. Par conséquent, le gouvernementjaponais a adopté la valeur guide de 1mSv comme objectif à long terme, sans pourautantfixerdecalendrier.Al’inverse,ilaclairementétabliuncalendrierderetourversleszonesévacuéesenannonçantqu’illèveraitlesordresd’évacueravantmars2017etcesserait lesindemnisationsavantmars2018.Etilmaintientlavaleurderéférencede20mSvpendantcetemps.LaCIPRnemetpasdefrontièresgéographiqueettemporellepourdélimiterlaphasedetransitiond’unesituationd’urgenceàunesituationd’expositionexistante.«Engénéral,un niveau de référence utilisé pour la phase d’urgence n’est pas accepté comme valeurguideàlongterme,carcesniveauxd’expositionnesontpasacceptablesd’unpointdevuesociétal et politique. Ainsi, les gouvernement et/ou les autorités de contrôle vont, à uncertain moment, identifier un nouveau niveau de référence pour gérer la situationd’expositionexistante,typiquementdanslapartiebassedel’intervallerecommandéparlaCommission,quiestde1à20mSv/an»[ICRP109].Enrevanche,lesdirectivesétatsuniennesimposentlaréinstallationendehorsdelazonetouchéequandlapopulationpeutêtreexposéeàunedosesupérieureouégaleà20mSvdurantlapremièreannéeetà5mSvoumoinsàpartirdeladeuxièmeannée.L’objectifàlongtermeestdegarantirqueladosecumuléesoitendessousde50mSvsur50ans.Leguided’actionsurlaréinstallationprendencomptel’expositionexterneauxretombéesradioactives et l’inhalation de poussières radioactives remises en suspension[FEMA2013].LaCIPRsouligneaussiquelesdosesinférieuresauniveauderéférencenepeuventpasêtre ignorées. Les circonstances des expositions doivent aussi être évaluées pourvérifier si la protection est bien optimisée ou si d’autresmesures de protection sontnécessaires. Les individus concernésdoivent recevoirune information générale sur lasituationd’expositionetsurlesmoyensderéduirelesdosesreçues.Danslessituationsoù lesmodesdeviedes individussont lesprincipauxresponsablesdesexpositions, lasurveillance ou l’évaluation individuelle, de même que l’éducation et la formation,peuventêtredesexigencesimportantes[ICRP103].En conclusion, le gouvernement japonais a choisi la valeur de référence desrecommandations internationales la moins contraignante pour décider de sapolitiqued’évacuation.Cettevaleurestmaintenuepourlapolitiquederetourcarlespersonnesnon-évacuéesnecomprendraientpaspourquoiellesn’ontpasétéprotégéesaumêmeniveau.

GrandeursdeprotectionetgrandeursopérationnellesAu-delàdesvaleursderéférenceetdes limitesquisont trèscontroversées, lamiseenœuvreestaussidifficile.Defait,deuxtypesdegrandeurssontdéfiniesspécialementenradioprotection: les grandeurs de protection qui sont définies par la CIPR, et lesgrandeurs opérationnelles qui sont définies par la Commission internationale sur lesunité et mesures de radiation (International Commission on Radiation Units andMeasurements, ICRU) pour le contrôle des zones et des individus. Ces dernières sontdéfinies pour donner une estimation des premières. La relation entre ces deux

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ensemblesdegrandeurs fait l’objetd’unenorme internationaledeplusd’unecentainedepagesquin’estpasaccessibleenligne[IRCU1998].Dit autrement, les valeurs limite et de référence de dose sont définies à partir degrandeursdeprotectionquinepeuventpasêtredirectementmesuréesetlerespectdeces valeurs est démontré par une détermination de la quantité opérationnelleappropriée.AuJapon,lapolitiqued’évacuationétaitbaséesurledébitdedoseambiantquipeutêtrefacilement mesuré par divers moyens, dont de simples radiamètres. Ensuite, pourestimerladoseannuelle,ilaétésupposéquelesindividuspassaient8heuresparjouràl’extérieuretqu’àl’intérieur,l’expositionétaitréduitede60%.Parconséquent,undébitdedoseambiantde0,23µSv/hconduitàuneexpositionannuellede1mSvaprèsavoirsoustrait le rayonnement naturel estimé à 0,04 µSv/h. Cette estimation grossière estsupposée surestimer la dose car personne ne passe 8 heures par jour à l’extérieur. Al’inverse le débit de dose ambiant à l’intérieur est parfois plus élevé que ce qui estsupposé dans ce modèle. De plus, certaines personnes peuvent avoir descomportementspénalisantquinesontpasprisencomptedanscescénariocommeallerdans la forêt ou rester à proximité d’un point chaud sans le savoir, etc… C’est unepratiquegénéraleenradioprotectionquedegarderunemargepourêtresûrdeprotégertoutlemonde.Ladéterminationduniveaudedoseambiantdépendaussidelaméthodedemesureetdesappareilsutilisésavecdegrandesdifférencesobservéessurleterrain.Ilpeutyavoirjusqu’à un facteur 3 entre les valeurs données par un appareil statique et par unappareilembarquédansunvéhiculeouunhélicoptère.Cen’estpasencorecompris.Plutôt que de réduire la limite utilisée pour l’évacuation, les autorités ont demandéqu’uneévaluationplusréalistedesdosesréellementreçuesparlespersonnesrésidanten territoire contaminé soit menée ainsi qu’une étude par type de métier. En juillet2013, l’Institut national des sciences radiologiques (National Institute of RadiologicalSciences, NIRS) et l’Agence du Japon pour l’énergie atomique (Japan Atomic EnergyAgency, JAEA) ont été mandatés pour faire des relevés de débit de dose ambiant etestimer les doses individuelles sur43 sites, incluant7 typesde lieuxde vie, dontdesrésidencesprivées,desterresagricolesetdesécolesàTamura,KawauchietIitate.Lesmesures ont été effectuées en septembre 2013 et les résultats étaient plus élevésqu’attendu. Par conséquent, les autorités ont demandé aux deux organismes derecalculer les doses annuelles en abandonnant l’hypothèse qu’un individu passe huitheuresparjouràl’extérieuretenutilisantàlaplacelesdonnéesde2010surlesbudgetstemps des personnes. Ainsi, un agriculteur est supposé passer 6 heures par jour enmoyenneàl’extérieur.Lesnouveauxrésultats,inférieursauxprécédents,ontétésoumisànouveau enmars2014.En attendant, le gouvernement a gardé cesdonnées sous leboisseaupendantsixmois[Mainichi25/3/2014].L’étudeafinalementétépubliéeenlignele18avril2014,aprèsquel’ordred’évacuerledistrictdeMiyakojiàTamuraaitétélevé[METI2014].Seloncesnouveauxrésultats,lescalculs montrent que les personnes qui travaillent dans l’industrie forestière de cedistrict recevront une dose annuelle de 2,3 mSv. Le rapport estime aussi que lesagriculteursdudistrictrecevrontunedoseannuellecompriseentre0,9et1,2mSv,etles

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enseignants0,7mSv.DansunautredistrictàKawauchi, ladoseannuelleestiméepourunagriculteurestde3mSv.Mêmedans leszonesnonévacuées, ladoseestiméepeutdépasser1mSvparandanslecasdepersonnesâgéesvivantdansunemaisonenbois.Sur les 43 sites explorés, 27 points dépassaient 1 mSv par an. En revanche, la doseannuelle de 20mSv n’était jamais dépassée. Seuls les adultes ont été pris en comptedans cette étude. Il ressort aussi que les doses enregistrées par des dosimètresindividuels sont globalement à 70% des niveaux estimés à partir du débit de doseambiant.Par conséquent, les autorités japonaisesveulentpasserde l’estimationgrossièrede ladosereçueàpartirdudébitdedoseambiant,commec’étaitlecaslorsdel’évacuation,àunenouvelleméthodebaséesurdesdosimètresindividuels[NRA2013].Cesdosimètres,appelés«glass-badges»,ontdéjàétéadoptésdansdeszonesoù lespopulationsn’ontpas été évacuées. C’est le cas à Date, par exemple, où les autorités locales ont aussiadoptéunniveauderéférencede5mSvparanpourladoseintégréeenregistréeparcesappareils.Cependant, les «glass-badges» donnent une valeur globale qui est de 30 à 40%inférieure à ce qui peut être déduit à partir d’un appareilmesurant le débit de doseambiantparcequ’ilsnemesurentpaslamêmegrandeuropérationnelle.Ledéploiementdesdosimètresindividuelsaétéfaitsansexpliquercepointimportantauxpopulationsconcernées. Bien que des spécialistes internationaux conseillent lemaire de Daté surtouscesproblèmes,ilsn’ontpasprislapeinedeluiexpliquercettedifférence.Leconseilmunicipall’adécouvertelorsd’uneréunionavecuneONG.Leprésidentdelacompagniequi fabrique ces «glass-badges» était présent et a dû s’excuser de ne l’avoir jamaismentionnée [ShukanAsashi28/1/2015, ACRO2015a]. C’est maintenant expliqué sur lesiteInternetdelacompagniequiprécisequelavaleurdonnéepar les«glass-badges»fournitunemeilleureestimationdelagrandeurdeprotectionquecelleobtenueàpartirdes appareils qui mesurent le débit de dose ambiant, qui eux, surestiment la dose[Chiyoda2015].Les règles et les normes en radioprotection sont très déroutantes pour lespopulations.Lesautoritésontchangédegrandeuropérationnelleafind’avoirdesvaleurs plus faibles que celles utilisées lors de l’évacuation. Cela aurait dû êtreexpliqué clairement. Cette nouvelle politique constitue aussi un changement deparadigme en terme de protection des citoyens. Le devoir régalien de l’Etat deprotégerlespopulationsesttransféréauxindividus.Al’inversedestravailleursdunucléairequidoiventêtrebiencontrôlés,personnene contrôle si les habitants portent bien leur dosimètre individuel. C’estparticulièrement problématique pour les enfants qui sont plus sensibles auxradiations. Les règles et les pratiques de radioprotection ont été développéespourdestravailleursquisontexposésdurantunepériodelimitéeetsurunezonerestreinte. Il est donc possible d’évaluer la dose avant l’intervention et de lacontrôler après. De plus, les mesures de protection sont contrôlées par uneautoritéexternederégulationoudesûretéet lesemployeurssontresponsablesde la protection de leurs employés. Cela n’est pas possible après un accidentnucléaire.Quiestresponsabledelaprotectiondescitoyens?Unofficieldel’ARNaexpliqué à une chercheuse qu’avec la loi actuelle, ce sont les exploitants du

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nucléairequisontresponsablesdelaprotectiondescitoyensquiviventautourdeleurs installations [Hasegawa2015]. Actuellement, c’est le ministère del’environnement qui est responsable de la protection des populations touchéesparlacatastrophenucléaireàlacentraledeFDI.Trente ans après la catastrophedeTchernobyl, les règles et les pratiques de laradioprotectionnesontpasadaptéesauxpopulationsvivantdanslesterritoirescontaminés.Ellessontdéroutantesetimpossiblesàimposer.

Leslimitespourlacontaminationdel’alimentationEn ce qui concerne la contamination de l’alimentation, les niveaux maximauxadmissibles adoptés par le gouvernement japonais durant la première année de lacatastrophe étaient inférieurs aux recommandations internationales du Codexalimentarius[CODEX2009].Ilsontensuiteétéréduitsd’unfacteur5auboutd’unanafinderetrouverlaconfiancedesconsommateurs.Letableau1résumeleslimitesadoptéesauJaponpourlecésiumradioactifencomparaisonavecd’autreslimites.Lespremièreslimitesontétédéfiniesenattribuant1mSvàchaquecatégoried’aliment:1)l’eaudeboisson,2)lelaitetleslaitages,3)leslégumes,4)lescéréaleset5),laviande,lepoisson,lesœufs…Puis,enprenantencomptelerégimealimentairedesadultes,desenfantsetdesbébés,desniveauxmaximauxadmissiblesontétédéfinis,enretenantlavaleurlaplusstrictepourchaquecatégorie.Lesautoritésjaponaisesconsidéraientainsique la sécurité alimentaire était garantie. Cependant, pour retrouver la confiance desconsommateurs, le Japon a réduit la dose de référence de 5 à 1mSv en divisant cesniveauxpasunfacteur5[MHLW2011b].Lesnouvelleslimitesontétéintroduitesle1eravril2012. Il fautnoterqu’ellessont inférieuresaux limitesadoptéesenEuropeaprèsl’accidentdeTchernobyl[EC2008].Tableau n°1: Comparaison entre les niveaux maximaux admissibles pour le césiumradioactifdansl’alimentation(Références:[CODEX2009],[MHLW2011b],[EC2008])

Césiumradioactif

Alimentspourbébés

Laitetlaitages Autresaliments

CodexAlimentarius

1000Bq/kg

Japon,17/3/2011–31/3/2012

200Bq/kg 200Bq/kg 500Bq/kg

Japon,depuisle1/4/2012

50Bq/kg 50Bq/kg(lait)

100Bq/kg

UE,depuisle15/07/2008

370Bq/kg 600Bq/kg

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ConclusionsLecontrasteenlaprotectioncontrel’expositionexterneetl’expositioninternevial’alimentationestsaisissant.Danslepremiercaslesautoritésjaponaisesrefusentderéduirelesniveauxderéférencequisontmaintenuauniveauleplusélevédesrecommandations internationales, alors que dans le deuxième cas, les valeursmaximales admissibles ont été divisées par 5 au bout d’un an. Elles sont aussiinférieuresàcequiaétéadoptéenEuropeaprèsTchernobyl[EC2008].Untelcontrastemontrequelesoucipremierdugouvernementjaponaisconcerneles conséquences économiques de la catastrophe nucléaire. Les limites decontamination des aliments ont été baissées pour retrouver la confiance desconsommateurs qui évitent les produits de Fukushima. A l’inverse,l’indemnisation des personnes évacuées représente une charge financièreimportante et les autorités ne proposent pas d’autre solution que le retour despersonnesdéplacées.Les recommandations internationales restent confuses pour les populations, cequipermetauxautoritésde lesadapterà leurpropreavantageplutôtqu’àceluides personnes affectées. Les règles devraient plus contraignantes en terme delimites,d’évolutiontemporelleetdegrandeuropérationnelleutilisée.

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Contaminationdel’alimentationcinqansaprèsComme nous l’avions souligné dans le rapport de Greenpeace de 2012 sur lesenseignementsdel’accidentdeFukushima[GPI2012],lesautoritésjaponaisesontéchoué à prévoir l’ampleur des problèmes liés à la contamination del’alimentation et elles étaient régulièrement prises par surprise durant lespremiers mois, sans pouvoir faire face. Leur programme de surveillance et decontrôleétait inadapté, cequi a conduit àdes scandalesquiontébranléencorepluslaconfiancedupublicetcausédesdommageséconomiquesinutilespourlesagriculteurs et les pêcheurs. En conséquence, la confiance des consommateursenvers le gouvernement en a pâti et la population préoccupée par sa sécuritéalimentaire a reconsidéré sa relation à l’Etat et à la nourriture [Sternsdorff-Cisterna2015].Mais les citoyens, les agriculteurs, les producteurs, les vendeurs et lesconsommateurssesontmisàcontrôlerlanourriture,poussantainsilesautoritésàintroduiredescontrôlessystématiques.Lasituations’estrapidementaméliorée,et, à l’exception des plantes et des animaux sauvages, des poissons et del’autoproduction, lacontaminationdel’alimentationtrouvéesurlemarchérestefaible.Lacontaminationinternedesenfantscontrôlésparanthropogammamétrieestsuffisammentfaiblepourconsidérerquel’expositionexterneestleproblèmedominantpour leshabitantsdes territoirescontaminés.Cesuccèsauncoût:denombreux agriculteurs ne peuvent plus cultiver et certaines productionstraditionnellespourraientdisparaître.

LeserreursinitialesdanslecontrôledesalimentsAu tout début de la catastrophe, les autorités japonaises ont décidé d’autoriser laproduction d’aliments dans les zones contaminées et leur vente, à l’exception desproduits qui dépassaient les limites de mise sur le marché. Une telle politique a desfaiblessescarilestimpossibledetoutcontrôleretcelaaentraînéunegrandeconfusion.Les institutionsn’ontpas été capablesdeprévoir etd’éviterdenombreuxproblèmes,commelacontaminationde laviandedebœufdueà l’alimentationdubétailàbasedepaille de riz contaminée. Elles n’ont pas imaginé non plus que des feuilles de thépouvaientdépasser la limiteaussi loinqu’àShizuoka,àenviron300kmde lacentralenucléairedeFDI.Unealternativeadoptéedansdenombreuxpaysestd’interdiretoute

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production d’aliment sur une zone étendue, à l’exception des produits contrôlés quisatisfontauxrèglesdesécurité[GPI2012].Bien entendu, lemanquedemoyensdemesure entraveun tel programmedurant lespremiersmoisdel’accident.Enplusdumanquedemoyens,lerapportdelaNAIICnotequ’au Japon, lesautorités localesétaientsouventpeuenthousiastesà l’idéed’effectuerdes contrôles car elles craignaient que cela puisse nuire à leur réputation. Ainsi, leniveau de contrôle a varié en fonction des volontés locales. «Si l’on considère ceproblèmeàlalumièredelavolontédedévelopperunsystèmedecontrôleuniformesurunevaste zonepourgarantir la sécurité des résidents, nous concluonsqu’il y aunproblèmeaveccesdifférencesparmidesgouvernementslocaux»[NAIIC2012].Laconfiancedenombreusespersonnesenversl’expertisegouvernementales’estérodéeàcausedesfaiblessesdans lecontrôlede lanourrituredurant lespremiersmoisde lacatastrophe[Sternsdorff-Cisterna2015].Lesautorités japonaisesontfixédesvaleurs limitesà lacontaminationdesaliments le17 mars 2011 à un niveau inférieur aux recommandations internationales du CodexAlimentarius,commecelaadéjàétémentionné.Ceslimitesontétéétenduesàlahâtele5 avril pour inclure les produits marins, en réponse à l’inquiétude suscitée par lacontaminationdelamer.Plustard,pourretrouverlaconfiancedesconsommateurs,lesautoritésjaponaisesontdécidéderéduired’unfacteur5ceslimitesàpartirdu1eravril2012.Parconséquent,laconcentrationmaximaleautoriséepourlescésiumsradioactifsdansl’alimentationestdescenduede500à100Bq/kg.Certainescommunesontfixédeslimitesplusstrictespourlesrepasdanslescantines.Lescoopérativesdepêcheontaussifixéunelimiteplusstrictepourleursprises:50Bq/kg.Denombreusespersonnesontutilisécesvaleurspourfixerleurspropresstandardsdanslebut,engénéral,d’avoirlacontamination la plus faible possible, surtout quand il y a de jeunes enfants dans lafamille.Maiscelan’estpassuffisant.Lapolitiquegouvernementaleétaitfocaliséesurlasécuritédesaliments(anzenenjaponais),etellenes’estpaspréoccupéeduclimatdeconfiance(anshin en japonais) à propos de la nourriture de Fukushima. Imposer des limitesstrictes ne suffit pas pour surmonter la défiance des consommateurs. Le défi est degarantiràlafoislasécuritédesalimentsetlatranquillitéd’espritquidoitl’accompagner[Sternsdorff-Cisterna2015].UneétudedeInstitutderecherchesurlasécuritéalimentairedel’universitédeTokyoatrouvé que la suspicion envers les aliments cultivés à Fukushima a augmenté avec letemps. En 2011, seulement 10% des personnes qui ont répondu nemangeraient pasd’alimentsdeFukushimamême s’ils étaient gratuits et ce chiffre estmonté à20%en2012. De plus, les prix des aliments produits à Fukushima continuent d’être environ20% moins chers que des produits équivalents d’autres provinces [Sternsdorff-Cisterna2015].L’eau du robinet, qui est généralement captée en surface au Japon, a surtout étécontaminéepar l’iode-131au toutdébutde l’accidentavecdesconcentrationsquiontdépassé les limites provisoires dans plusieurs provinces du Japon. Grâce à la courtedemi-viedecetélément,ceproblèmearapidementdisparu[MLHW2011a].Acausede

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cettecontamination,legouvernementademandéàcequecetteeaunesoitpasdonnéeaux nourrissons pendant une période assez courte, entraînant ainsi une grandeconfusionparmilescitoyens.Lesderniersrésultatspubliésparl’autoritéderégulationnucléairemettentenévidencedes traces de césiumdans l’eau du robinet de plusieurs villes au Japon. La plus fortevaleur est de 0,0044Bq/L àUtsunomiya, dans la province de Tochigi [NRA2015]. Leministèredelasanté,dutravailetdesaffairessocialesrapportequ’aucuneeaupotablecollectéedanslaprovincedeFukushimaen2015nedépasselavaleurderéférencede10Bq/kgpourlasommedesdeuxcésiumsradioactifs.Parconséquent, iln’yaaucunerestrictionsurl’eaudistribuéeparlescompagnies[MLHW2015c].

Descontrôlesétendusdel’alimentationDefait, lasituations’estrapidementamélioréeauJaponàproposdelanourriture.Deséchantillonsquidépassentleslimitesautoriséessontraresetlacontaminationinternedelapopulationestgénéralementfaibleouindétectable.Ilyaplusieursraisonsàcela.Toutd’abord, letransfertderadioélémentsvers lesplantesestassezélevéquandilsefaitvia le feuillage,alorsqu’ilest faiblequandc’estvia lesracines.Parconséquent, leslégumesfeuilleetlelaitétaientparmilespremiersalimentscontaminésaudébutdelacriseàcausedesretombéesdirectessur les feuilles.Ceproblèmedisparaît lesannéessuivantes.Deplus,unmeilleurcontrôledesalimentsaconduitàuncontextestabilisé.Durantl’annéefiscale2014,selonlesdonnéesduministèredelasanté,dutravailetdesaffaires sociales, 565 items parmi 314216 contrôles avaient une concentration encésium radioactif au-dessus de la limite. Il s’agissait surtout de gibier (349 items), deplantes sauvages et de champignons (104 items) et de poissons (100 items). Sesrapportsmontrentquelesdépassementsdela limiteconcernentsurtout lesplantesetlesanimauxsauvages[MHLW2015b].Lesmanquedeconfianceenverslescontrôlesofficielsaconduitlescitoyensàmettreenplacedescircuitsd’approvisionnementalternatifspourgarantirlasantédesgénérationsfuturesàtraversledéveloppementdelasurveillancecitoyenne:lesconsommateurs,lesproducteurs,lesécoles,lescommunesontinvestidansdesimplesdétecteurs,ettoutlemondepeutaccéderàunestationdemesure.Ceprocessusouverts’estrévéléêtretrèsperformant[ACRO2012,Sternsdorff-Cisterna2015].Une telle surveillance privée n’a pas été bien vue par les autorités. Le rapport de laNAIICexpliquequ’enréponseauxcontrôlesvolontaireseffectuésparlesecteurprivéetaux valeurs limites inférieures introduites par certains magasins, le ministère del’agriculture,de laforêtetdelapêcheaémisundocument le20avril2012envers lesresponsables des associations de l’industrie alimentaire pour leur notifier qu’ilsdevaientrespecter lesvaleursstandardsstipuléesdans la loi,afind’éviterunexcèsderégulationetdeconfusionpourlesconsommateurs.LaNAIICestime«qu’auJapon,quiestunpayslibre,iln’yaaucuneraisonquedesorganesdel’Etatrestreignentdesgroupesprivésquimettentenplacedesvaleursderéférenceplusstrictesquecellesstipuléesdansla loi. Cette réponse du ministère de l’agriculture, de la forêt et de la pêche pose unproblèmefondamental.Cependant,cettenotificationavaitpourbutderefléterlesintérêts

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desproducteursetunepossibleatteinteàleurréputation,cequimontrelacomplexitéduproblème»[NAIIC2012].Lescontrôlesprivésontentraînéundéveloppementdescontrôlesofficiels.Laprovincede Fukushima a environ 190 stations de mesure spécialement dédiées au riz, ce quipermetde contrôler chaque sac avant samise sur lemarché. Si le résultatdu test estinférieur à la limite de 100 Bq/kg, le sac reçoit une étiquette confirmant qu’il a étécontrôlé.En2014,plusde10millionsdesacsontétéainsicontrôlésetseulementdeuxd’entreeuxontdépassélalimite.En2015,pourlapremièrefois,tousontsatisfaitautest[FMinpo9/1/2015,FMinpo8/1/2016].LaprovincedeFukushimaaaussieffectué5850contrôles sur des produits alimentaires en 2015, et aucun d’entre eux n’a eu uneconcentration supérieure à la limite. Cette surveillance officielle ne couvre pasl’autoproduction.Il y a aussi une volonté de contrôler toute la production d’ampo-gaki, une spécialitélocaleàbasedekakisséchés.Lamisesurlemarchéareprisen2014àDate.Il y a aussi 530 détecteurs conventionnels dans 59 communes de Fukushima. Il y aencoreplusdedétecteursexploitéspardesONG,desproducteurs,desconsommateurs,maiscesstationsdemesuresnon-officiellesnesontpasreconnuesparlesautorités,nicomptées.Leursrésultatssontignorés,bienquecertainséluslocauxreconnaissentcettesurveillance quand ils sont alertés sur des problèmes spécifiques. Par conséquent lesrésultatssontdisperséssurdenombreuxsitesInternet2et iln’yapasd’efforteffectuépour collecter et analyser lesdonnées.Au-delàdu résultat individuel, il y aunbesoind’analyserlestendancesdelacontamination.

Expositioninternedesconsommateurs30 ans après la catastrophedeTchernobyl, les populations vivant dans les territoirescontaminés continuent à ingérer quotidiennement des radioéléments, et certainespersonnesontunecontaminationinternepersistante.LasituationesttrèsdifférenteauJapon. Des contrôles sur les urines [Chikurin2015] montrent que la contaminationinterne des enfants japonais est faible ou indétectable. Des anthropogammamétrieseffectuées sur 2700 bébés et enfants en bas âge dans les provinces de Fukushima etvoisinesentre33et49moisaprès l’accidentmontrentqu’aucund’entreeuxavaitunecontamination détectable en césium. L’activitéminimale détectable chez les 0 – 1 anétaitde3,5Bq/kgetdescendaità2Bq/kgchezles10–11ans.Sil’onprendencomptelacontributionducésium-134,celasetraduitparunedoseeffectivemaximalede16µSvparanselonlesauteurs.Celaestgénéralementbieninférieuràl’expositionexternequiestlapréoccupationprincipaledanslesterritoirescontaminés[Hayano2015].L’intérêtde cette étude est qu’elle n’est pas limitée aux parents inquiets qui font attention àl’alimentation de leurs enfants. Elle inclut un contrôle systématique des enfantsscolarisésdeDaigoetMiharu.Uneanalyseduquestionnairerempliparlesparentsdes

2Parexemple,lesrésultatsdelaprovincedeFukushimasontici:http://www.new-fukushima.jp/monitoring/en/Unréseaude28ONGsadéveloppésespropresprocédured’assurancequalitéetd’essaisinter-laboratoire,ainsiqu’unebasededonnéescommune:http://en.minnanods.net/

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enfants contrôlés concernant la consommation d’eau et de nourriture montre que lamajoritédesenfantsdeMiharuconsommerégulièrementdeslégumesetdurizproduitslocalementouàlamaison.Il y a bien-entendu des exceptions liées à un régime alimentaire basé surl’autoproduction et les plantes sauvages qui échappent à tout contrôle. Il est difficiled’évaluer l’étendue de ce problème. Cependant, le contrôle volontaire de lacontamination internemis en place à l’hôpital général deMinami-Soma et à l’hôpitalcentral de Hirata montre que sur 30622 participants, la contamination interne encésium-137varieentre2130et15918Bqpourlecorpsentier.Lecésium-134doitêtreajouté. Neuf personnes avaient une contamination interne supérieure à 50 Bq/kg carellesconsommaientdesproduitsdeleurjardinsanscontrôleetramassaientsouventdeschampignons sauvages ou cultivés chez eux. Après leur avoir conseillé de réduire laconsommationdecesproduits,unnouvelexamenamontréuneréductiondrastiquedela contamination interne quelquesmois plus tard. L’article précise, cependant, que leprogrammededépistageadesbiaispossiblesdans la sélectioncar il étaitbasé sur levolontariat. Et comme les personnes qui craignent le plus pour leur contaminationinternesontcellesquisont lesplussusceptiblesdeparticiper, lenombrederésidentsavecunecontaminationinterneélevéeestprobablementsous-estimé[Tsubokura2014].De nombreuses personnes craignent que la vigilance se relâche avec le temps et quel’impactdelacontaminationdel’alimentationaugmenteavecletemps.

LesrestrictionssurlaproductionmenacentcertainesactivitésLeprixàpayerdecettepolitiqueestquel’agricultureresteinterditesurdenombreuxsites et des agriculteurs ont décidé d’arrêter leurs activités. A la fin 2015, il y avaitencore54ordresderestrictionsurlaproductionalimentaire[MLHW2015d].29espècesde poissons marins ne sont pas mises sur le marché, mais il y a un espoir quel’interdiction soit levée petit à petit. Les pêcheurs de la région attrapent 64 espècesdifférentesaudelàd’unrayonde20kmdevantlacentraleàtitreexpérimental.En 2011, la culture du riz était interdite dans 12 communes de Fukushima. Laproduction de la province, avec 450000 tonnes par an, était la quatrième la plusimportante du pays avant l’accident nucléaire, mais en 2012, elle était descendue à370000tonnes,classantlaprovinceàlaseptièmeplace.Laproductionderizvientjustede reprendre à titre expérimental sur un nombre limité de rizières des territoiresévacués.Les plantes sauvages et le gibier peuvent être encore très contaminés avec desconcentrationsquidépassent la limitedemisesur lemarchédansdesprovincesaussiéloignées que Nagano ou Shizuoka [MHLW2015a]. Les interdictions de mise sur lemarché et les restrictions volontaires continuent d’affecter les plantes sauvages et leschampignons de 15 provinces. Celamenace certaines activités traditionnelles commecellesdeszonesmontagneusesde lapartie laplusméridionalede laprovinced’Iwate.Leschampignons,l’angéliquejaponaise,lesfougères,lesfougèresroyales,lespoussesde

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bambou…nesontplusvendussuiteàdesinterdictionsoudesrestrictionsvolontairesàcause de leur contamination radioactive. Seulement quelques plantes peuvent êtrevendues, comme les pétasites, les feuilles de wasabi et les «shidoke». La provinced’Iwateétaitungrosproducteurdelentinsduchêne(shiitake)deculture.Saproductionétaitde201tonnesdeproduitssecset385tonnesenfraisen2010,maiscesvaleursontplongé àmoins de lamoitié en 2012. C’est dû en partie au fait que ces champignonsétaientcultivésàl’extérieuretenpartieparcequeleboisquisertdesubstratavaitunecontamination en césium supérieure à la limite de 50 Bq/kg car les champignonsconcentrentlecésium[Asahi24/7/2014].Laculturedelentinsdechênesurdestroncsestcomplexeetlareprisevaprendredesannées. La récolte n’a lieu qu’à la fin de deux étés après que les bûches aient étéinoculéesenhiver.Lorsd’uneenquêteeffectuéepar lacommuned’Ichinoseki,plusde70%desproducteursdeshiitakeontdéclarénepasvouloirreprendreleurculture.Lenombre de producteurs été divisé par plus de 5 à Fukushima et plus de 3 à Miyagidepuis l’accident nucléaire. La province de Fukushima était un des principauxproducteurs de chênekonara qui sert de substrat à la culture des champignons danstout le pays. Mais l’accident a rendu les bûches inutilisables à cause de leurcontamination. La production de ce substrat a chuté à 6% de son niveau d’avantl’accident.Cetteculture,préservéedepuisdesgénérations,estsurlepointdes’effondrercarilfautentre20et30ansàdesjeunespoussespourgrandirsuffisammentpourservirde substrat. Les autorités veulent donc contrôler systématiquement toutes les bûchesproduitesàFukushimapourfavoriserlareprise[Asahi24/7/2014].Denombreuxagriculteurstestentdenouvellesméthodesdeproductionafinderéduirelacontaminationdeleurproduction.LeCentredetechnologiqueagricoledeFukushimaétaitparmilesgroupesquiontmontréque,quanddegrandesquantitésdefertilisantsaupotassiumsontétendues,lesplantsderizincorporentmoinsdecésiumcarcesdeuxéléments ont des propriétés chimiques similaires. La recherche a aussi montré quel’ajout de zéolites dans le sol permet d’absorber le césium, réduisant ainsi la partincorporéeparleriz.Leniveaudecésiumdiminueaussiquandlapaillederizestlaisséedanslechampaprèslamoisson[Mainichi17/11/2013].Les agriculteursbio, qui ont l’habituded’expérimenterdenouvellespratiques, étaientpionniers.Lasolidaritéet lacoopérationsontaussi indispensablespours’ensortircarunagriculteurnepeuttesterqu’uneméthodeparan.Cesagriculteurssontsouventenliendirectaveclesconsommateurs,cequipermetdemaintenirlaconfiance[GC2013].

LesconsommateursrestentprudentsDenombreuxconsommateurssontencoreréticentsàacheterdesproduitsalimentairesdeFukushimaetdesprovincesvoisines.Certainsconsidèrentquel'alimentationdevraitêtreexemptedetoutecontaminationaucésiumcariln'yapasdeseuilpourl'impactdesfaiblesdoses.Ladéfianceenvers lesautorités resteaussibienancrée.Ladétressedesagriculteurs semble être sans fin et le gouvernement semble impuissant. Quand lesagriculteursparlentdedignitéetd’avenir,laréponsedesautoritésestlimitéeàl’argentetàlaluttecontreles«rumeursnéfastes».

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Selon le ministère de l’agriculture, de la forêt et de la pêche, en 2011, 44 pays outerritoires ont soit interdit l’importation d’aliments produits au Japon, soit exigé descontrôles,mêmes’ilsétaientdéclaréssainsetvendussurlemarchéintérieurjaponais.Ilsétaientencore41en2014.Lesautoritésjaponaisesexercentunlobbyingauprèsdespayspourqu’ilslèventlesrestrictionsàl’importation.En janvier 2016, l’Europe a allégé les règles d’importation pour certains aliments enprovenance du Japon, mais maintient une exigence de contrôle pour certainesproductions dans 13 provinces du pays. Il s’agit essentiellement de champignons, deplantes sauvages comestibles et de produits de la mer. Des produits agricoles de 7provincessontaussiconcernés[EU2016].La sécuritédesaliments requiertplusquedes contrôlesen laboratoire.C’est aussiunliensocial.Ilfaut,bienentendu,quelapopulationaitconfiancedanslesproduitsqu’ellevend, produit ou mange [Sternsdorff-Cisterna2015]. De fait, les citoyens japonaispeuvent être classés en trois catégories. Certains n’ont pas changé leurs habitudesalimentairesetdeuxautresgroupeslesontmodifiées.Ungroupe,minoritaire,aachetéplusdeproduitsdesrégionsaffectéespourlessoutenir.Unautregroupe,aucontraire,évitecesproduitsdansuncontextededéfiance[GC2013].Comme cela a déjà étémentionné, la politique gouvernementale était focalisée sur lasécuritédesaliments(anzenenjaponais)maisn’apassurétablirunclimatdeconfiance(anshinenjaponais)encequiconcernelesalimentsdeFukushima.«Anshinserapporteauxréactionsémotionnellespositivesque lesgensontàproposde lanourriture. Il s’agitd’une façon subjective et personnelle de comprendre la sécurité des aliments qui metl’accent sur la tranquillité d’esprit ressentie à propos des produits» [Sternsdorff-Cisterna2015].En cas d’incertitudes et de doutes, les populations préfèrent les options les plusprotectrices, surtouten cequi concerne l’expositionaux radiations, car iln’yapasdeseuil d’innocuité. Les habitudes alimentaires et la culture qui leur sont associées sontplus complexes que quelques limites uniformes. Certaines personnes évitent certainsproduits pour des raisons religieuses ou à cause d’allergies. D’autres préfèrent lesalimentsissusdel’agriculturebiologiquealorsqued’autresencorenefontpasattention.La cultureet legoût jouentun rôle important.L’industrieagroalimentaire japonaiseadéjà fait face à de nombreux scandales alimentaires par le passé et de nombreuxcitoyenssesonttournésversdescoopérativesenverslesquellesilsontplusconfiance.La reprise requiert un lien direct entre les producteurs et les consommateurs pourrétablir laconfiance.Detelscircuitscourtsdevraientêtresoutenus,mêmes’ilsdéfientlesgrandescompagniesagroalimentaires.

ConclusionsLaquestionde lanourrituremontre l’intérêtd’unprocessusouvertdans lequelchacun peut contrôler la contamination et adapter son régime à ses proprescritères. La contamination internedes consommateurs reste faible à l’exceptiondespersonnesquiconsommentleurpropreproduction,desplantessauvagesoudu gibier. Cependant, les consommateurs rechignent à acheterdesproduits des

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territoirescontaminés.Pourretrouverleurconfiance,lesautoritésjaponaisesontadoptédesniveauxmaximauxadmissiblesquisontplusbasqueceuxadoptésenEuropeaprèslacatastrophedeTchernobyl.Maislesagriculteurs,lespêcheursetles forestiers souffrent encore, cinq ans plus tard. Ce n’est pas un problème de«rumeursnéfastes»,maisplutôtlerésultatdeserreursinitiales.La reprise nécessite de la confiance, des contrôles et de nouvellesméthodes deproduction,deventeetdeconsommationquidoiventêtredéfiniesavectouteslespartiesprenantes.

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LaréhabilitationdesterritoirescontaminésLes autorités japonaises rêvent d’une catastrophe réversible et lesrecommandations internationales sur la gestion post-accidentelle se focalisentsurun retourà lanormale.Avecunedemi-viede30ans, le césium-137décroîttrop lentement.Legouvernement japonaisadonc lancéunvasteprogrammededécontamination aussi bien dans les territoires évacués que dans ceux non-évacués.Celaconsisteengratterlesol,couperlesherbes,émonderlesarbresetarbustes,laverletoitdeshabitations,lesruesetlestrottoirs…BienquelaNAIICaitrecommandélamiseenœuvrede«mesuresquicorrespondentauxbesoinsdesrésidents»[NAIIC2012],cevasteprogrammeaétédécidésansconcertation.La décontamination n’est pas très efficace et engendre de grandes quantités dedéchets radioactifs pour lesquelles toutes les solutions proposées ont échoué àcause de l’opposition des populations. Mais les autorités conservent leurapproche, qui consiste en décider, annoncer et défendre et compte sur lacommunicationdes risquespour convaincre les riverainsd’accepter les centresdestockageprévus.

LapolitiquederéhabilitationLesautoritésjaponaisesontdivisélesterritoiresévacuésentroiszonesenfonctiondudébitdedoseambiant.Voirlacartedelafigure3.Lespartiesoùladosetotalesurunanestsupérieureà50mSvetoùellepourraitresterau-dessusde20mSvparanpendant5ans,sontclasséesenzonesderetourdifficile.Lespartiesoùilestconfirméqueladoseannuelleintégréeestbieninférieureà20mSvsontclasséesenzonedepréparationàlalevéedel’ordred’évacuer.Entrelesdeux,làoùladoseexternesurunanestcompriseentre20et50mSv,lesrésidentsnesontpasautorisésàyhabiter.Le gouvernement a lancé un vaste programme de décontamination dans les deuxdernièreszonesafinderéduirel’expositionexternebienendessousde20mSvparan.Dans les territoiresévacués,ceprogrammecouvreàpeuprès24800hectares,mais ilfaut bien noter qu’il est limité aux environs immédiats des sites où les autoritéspréparent le retourdeshabitants. Le gouvernement est responsabledes travauxdansles territoires évacués et les méthodes de décontamination varient grandement enfonctiondescaractéristiquesdeslieux.A la fin 2014, la décontamination était officiellement terminée à Tamura, Naraha,Kawauchi et Okuma. Mais, quand les autorités japonaises annonce l’achèvement destravaux, il faut comprendre que seules les zones incluses dans les plans ont étédécontaminées. Il n’est pas prévu de décontaminer au-delà, dans les forêts ou les

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montagnes qui couvrent 70% de la province de Fukushima. En décembre 2015, legouvernementaannoncénepasvouloirdécontaminerlesforêts.Fin décembre 2015, la décontamination dans les zones visées dans les plans est diteachevée à Tamura, Naraha, Kawauchi, Okuma, Katsurao et Kawamata. A Okuma, parexemple,oùlamajeurepartiede lacommuneestclasséeenzonederetourdifficile, lesitedécontaminénefaitque400ha.LadécontaminationdelarouteexpressJobanestaussiterminée[ME2016].Danslesterritoiresnonévacués,104communesde8provincesquiontdeszonesoùledébitdedoseambiantdépasse0,23µSv/h(cequicorrespondàunedoseannuellede1mSv)ontdûétablirdesplansdedécontamination.Danscinqcommunesladécroissancenaturelle a suffit à passer sous cette limite. A la fin 2015, 94 communes sur les 99restantesavaientétabliunplandedécontamination. Ilétaitachevéoupresqueachevédans49d’entreelles[ME2016].

LeseffetslimitésdeladécontaminationEn2012déjà, laNAIICsoulignaitquelesopérationsdedécontaminationréduisaientledébitdedoseambiant,maisqueleseffetsétaientlimités[NAIIC2012].Globalement,leniveaudecontaminationabaissénaturellementdurantcescinqannées.Une grande partie de cette baisse est due à la décroissance du césium-134, quireprésentait environ la moitié de la pollution durant les premiers mois et qui a unedemi-viede2ans.Lelessivagedessolsparlapluieetlaneigeaaussicontribuéàcettebaissesurdegrandessurfaces,maisaussiàunehaussedansdeszonesd’accumulation.Dans les forêts non-décontaminées, une baisse de 57%du débit de dosemoyen étaitobservéeenjuin2015.Maintenant,commelecésium-137,quiaunedemi-viede30ans,domine,lacontaminationdécroîttrèslentement.En comparaison, la décontamination affiche de faibles performances. Une réductionsupérieure à70%n’est que très rarementobservée.Dans les zonesnon-évacuées, lespremiersrésultatssurlesdosesexternesmontrentunebaissemoyennede61%pourlesadultes et de 64% pour les enfants entre août 2011 et août 2013. Dans les zonesrésidentiellesévacuées,unediminutionde54%dudébitdedoseambiantestobservéequand il est supérieur à 1 µSv/h. Ce n’est que 23% quand les débits de dose sontinférieurs. En ce qui concerne les habitations, l’IRSN expliqueque la décontaminationdestoitsestinefficace(baisseinférieureà35%)[IRSN2015].La décontamination coûte très cher et requiert beaucoup de main d’œuvre. Dans lesterritoiresévacués,cesontdegrandescompagniesquienontlacharge,maiscesontdessous-traitants qui effectuent les travaux. Les travailleurs doivent porter un dosimètreindividueletladoseenregistréenedoitpasdépasser50mSvsuruneannéeet100mSvsur5ans,commepourlestravailleursdunucléaire.Lesdonnéesofficiellessur26000travailleursmontrentqueceslimitessontrespectées.Ladoseeffectivemoyenneestde0,5mSvparanet14%destravailleursontunedoseenregistréesupérieureà1mSvparan.34ontreçuplusde10mSvenunanet laplus fortedoseestde13,9mSvsuruneannée[REA2015].

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Il convient de noter que les données précédentes, compilées par l’Association sur lesEffets des Radiations, donnent un nombre total de travailleurs inférieur à celui desdonnées du ministère de l’environnement. Certains travailleurs ne semblent pasenregistrés.Actuellement,ilyaàpeuprès12000travailleursengagésquotidiennementdans des travaux de décontamination. Des scandales médiatiques ont révélé que despersonnessans-abriontétéenrôléessurceschantiers[ACRO2015c].Les violations de la législation du travail demeurent fréquentes. Entre janvier et juin2015, le Bureau du travail de Fukushima a contrôlé 342 employeurs et a trouvé 233violationsdesloisetdesrèglementsliésaudroitdutravail(tauxdeviolationde68,1%).Sur364 casde violation, 134 étaient liés aux conditionsde travail (salaire, heuresdetravail…) et 230 à la sécurité et à la santé (évaluation préliminaire du chantier,dosimétrie,équipementsdeprotectionindividuels…)[FPLB2015].Il faut noter que 30000 bénévoles ont aussi été engagés dans des travaux dedécontaminationdeszonesévacuéessansaucunsoutiendugouvernementàproposdeleurdosimétrie.Pourlestravailleurssurceschantiersdedécontamination,lamesureetl’enregistrementde ladosereçuesont imposéspar la loi,maispaspour lesbénévolesquinesontpassoumisauxmêmeslimitesquelestravailleursdunucléaire.Deplus,leurassurancenecouvrepasl’expositionauxradiations[Mainichi9/3/2015].

UnegrandequantitédedéchetsproduiteLes autorités ont du mal à faire face à l’énorme quantité de déchets radioactifsengendrésparlacatastrophenucléaire.Durantlapremièrephasedel’accident,lapailledenombreusesfermesaétédirectementexposéeauxretombéesradioactives.Lefumiercontaminés’estaussirapidementaccumulécommeilnepouvaitplusêtreutilisécommefertilisant.Dans les villes, l’eaudepluie a lessivé les sols et a contaminé lesbouesdestations d’épuration. Les cendres des incinérateurs de déchets peuvent aussi êtrecontaminéesàdesniveauxquirequièrentunepriseenchargespécifique.Enfin,levasteprogramme de décontamination lancé par les autorités japonaises engendre de bienplus grandes quantités de déchets radioactifs pour lesquels le gouvernement esttoujoursàlarecherchedesolutions.Certaines communes n’ont pas soumis de demande au gouvernement pour plus de36000 tonnes de déchets radioactifs afin de ne pas avoir la responsabilité de lesentreposer [Yomiuri2/4/2015]. Il s’agit surtoutdepaillede riz oud’herbesdepâtureentreposéesdirectementdanslesfermes.Lesdéchetsengendréspar l’accident sont classésen trois catégoriesen fonctionde lacontamination.Endessousd’uneconcentrationencésiumde8000Bq/kg,ilssontgéréscommedesdéchetsordinaires.Ceniveauest supérieurauxvaleurs internationalesderéférencepour l’exemptionet la libération.EnEurope, cesconcentrations limitessontfixéesà100Bq/kgpourchacundescésiums[EURATOM2013].Leseuilde8000Bq/kgaétédéduitdelalimitede1mSvappliquéeàuntravailleurpassantunanàproximitédusitedestockage.

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Le Japon doit trouver des sites pour isoler les déchets de l’environnement dans descentres de stockage dédiés pour les déchets ayant une concentration en césiumsupérieure à 8000 Bq/kg et 100000 Bq/kg. Pour les premiers, des «déchargescontrôlées»sontprévuesetpourlesdeuxièmes,unenfouissementsimilaireàcequiestprévupourlesdéchetsnucléairesestenvisagé.A la fin 2015, 12 provinces, dont Fukushima, avaient accumulé un total de 170000tonnes de déchets radioactifs. Voir le tableau n°2 pour plus de détails[Yomiuri4/2/2016].Larègleestquechaqueexécutifrégionaltrouveunsitedestockagedéfinitifpourlesdéchetsradioactifs issusdutraitementdesorduresménagèresetdesstationsd’épurationde sa juridiction.Parailleurs, le gouvernement centralprévoitdereprendre les autres déchets des sites d’entreposage temporaire où ils s’accumulentpour les stocker définitivement dans 5 provinces qui sont Miyagi, Ibaraki, Tochigi,GunmaetChiba[JT5/1/2015].Tableaun°2:Quantitédedéchetsradioactifsentonnesparprovinceau31décembre2015[Yomiuri4/2/2016]

Fukushima Tochigi Chiba Ibaraki Miyagi Gunma142139 13533 3690 3533 3409 1187Niigata Tokyo Iwate Shizuoka Kanagawa Yamagata1018 982 476 8,6 2,9 2,7

Le gouvernement a déjà sélectionné des sites potentiels pour le stockage définitif àTochigietMiyagi,maislesprojetssontdansleslimbesàcausedelaforteoppositiondesélus locaux et riverains. Pour plusieurs sites, l’accès a été bloqué pour empêcher lesinvestigations géologiques et des pétitions ont été adressées au gouvernement. Desréunionspubliquesontétéorganisées,maisils’agissaitplutôtderéunionsd’informationayant pour but de convaincre les participants, comme d’habitude. Le gouvernements’accrocheàsastratégie«DAD»,quiconsisteàdécider,annonceretdéfendre.C’estunéchectotalpourceproblème.Le13décembre2013,troiscommunesdeMiyagiquiavaientétésélectionnéescommecandidates pour accueillir le site de stockage ont informé le ministère del’environnementqu’ellesretiraientleurcandidaturecarlesautoritésn’ontpaspumenerd’investigation durant deux années consécutives. Elles considèrent donc que les troissitespressentisnesontpasappropriés.Leministèrearefusécettedécisionetasollicitéun renouvellement de l’autorisation d’y effectuer une étude détaillée[Mainichi14/12/2015].Dans la province de Tochigi, le gouvernement lorgne sur 3ha d’un site dont il est lepropriétairesituédanslacommunedeShioyapouryinstallerlestockage.Aseulement4km,ilyalasourceShojinzawaYusui,classéeparmiles100meilleureseauxminéralesdu Japonpar le gouvernement en1985, qui est au centredes effortsde revitalisationéconomique.AChiba, les bouesdes stationsd’épuration et les cendresdes incinérateurs attendentsur des terrains qui appartiennent à la province. Le gouvernement envisage d’utiliserdes terrains privés pour les stocker par manque de terrains lui appartenant dans la

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région.Quand leministèrede l’environnementadésignéunsiteappartenantàTEPCodanslavilledeChiba,ungroupelocals’est immédiatementconstituépours’yopposercarilyadesécolesetdesquartiersrésidentielsàmoinsde3km.LesprovincesdeGunmaetd’Ibaraki sontà la traînecarellesn’ontpasencoredécidécomment sélectionner les sites. A Iwate, une campagne citoyenne est en cours pours’opposeràlaconstructiond’unincinérateurdédié.C’est dans la province de Fukushima qu’il y a la plus grande quantité de déchetsradioactifs.LegouvernementprévoitunentreposagetemporaireàFutabaetOkuma,oùla plus grande partie de ces communes est classée en zone de retour difficile, pour ymettrelesdéchets,dontlessolstrèscontaminés,lescendresetlesautresdéchetsayantune concentration en césium supérieure à 100000 Bq/kg. Couvrant une surface de16km2 toutautourde lacentraledeFDI, lesitedoitêtrerenduet lesdéchetsstockésdéfinitivement en dehors de la province de Fukushima avant 30 années. La JapanEnvironmental Safety Corporation (JESCO) est en charge du projet. Voir la carte de lafigure5.Le ministère de l’environnement estime que les sols issus des travaux dedécontaminationvontengendrerentre16et22millionsdemètrescubeaprèsréductiondes volumes par incinération [ME2015a]. Par conséquent, plus d’un million detransports par camion seront nécessaires pour apporter les déchets. Et comme lesautoritéssedonnenttroisanspourterminerletransfert,plusde1000voyagesparjourserontnécessaires.Quipeutcroirequecesdéchetsserontreprisaprès30années?Deplus, les autorités n’ont pas la moindre idée sur la méthode à adopter pour trouverd’autressitesendehorsde laprovincedeFukushima.Garantirunetellepromesseparuneloinerésoutpasleproblème.Legouvernementaterminésaconsultationdesanciensrésidentsdesdeuxcommunesconcernéesenjuin2014.Untotalde2605personnesauraitparticipéaux16réunions.SelonlequotidienAsahi,denombreuxrésidentsauraientexpriméleurscraintescar lesitedéfinitifprévupouraccueillirlesdéchetsendehorsdeFukushima,30annéesaprèsle débutde l’entreposage, n’a pas encore été sélectionné. Leprix des terrains a été leproblème le plus difficile. Très peu seraient sortis satisfaits de cette série deconsultations.Malgrélesdemandesrépétéesd’explicationàproposdesétapesconcrètesàvenir,lesreprésentantsgouvernementauxn’ontpasréussiàrépondreprécisémentsurleur projet [Asahi16/6/2014]. Ces derniers ont, par ailleurs, répété que le prix desterrainsseradéterminéaucasparcas.Mêmeleséluslocauxetlesrésidentsquipensentqu’un tel projet est indispensable pour permettre la décontamination et lareconstructiondelaprovince,ontestiméquelesexplicationsdugouvernementétaientinsuffisantes.Nobuteru Ishikawa,quand il étaitministrede l’environnement, a suggéréque l’argentviendraitàboutdesréticencesdesrésidentsdelaprovincedeFukushimapourtrouverun site:«à la fin, celava finirparunequestiond’argent» [Asahi16/6/2014]. Les faitsmontrentquec’estbienpluscompliquéquecepointdevuearrogant.Lespropriétairesterrienssouffrentencorede lapertede leurpropriétéetn’ontpasreçud’explicationsclairesrelativesàl’avenir.Ledeuiln’estpaspossibledansdetellesconditions.

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Legouvernementdoitconvaincreenviron2365propriétairesterriensdevendreoudelouer leurs terrains pour le centre d’entreposage des déchets, mais les négociationsn’avancent pas. Le ministère n’a pas pu entrer en contact avec 990 d’entre eux, soitenviron40%dutotal.Alafinjanvier2016,seulement44propriétairesavaientsignéuncontratavec legouvernement.Cescontratsnecouvrentqu’unesurfacede0,15km,cequin’atteintmêmepas1%delasurfacetotalequidoitêtreacquise[Asahi14/2/2016].Lespremierssacsdedéchetsontdéjàététransportésdevant lesmédiasauprintemps2015.Maislesdeuxpremierssitesaménagésparlesautoritésn’ontunecapacitéquede20000m3.Commelescitoyensneveulentpasdesitedestockage,ladernièreidéedesautoritésestde «recycler» les sols radioactifs commematériel de construction sur des chantierspublics.Leseuild’exemptionoudelibérationn’estpasencoreconnu,maisilseraplusélevéque les standards internationaux.Lesdocumentsofficielsmentionnent3000ou8000Bq/kg[ME2015b].Cettesolutionrisqued’êtreaussirejetéealorsquel’impactdesinstallationsdetraitementpourréduire laconcentrationenpolluantsdans lesoln’estpas connu. Les résidents vivant à proximité des chantiers publics où ces déchetsdevraient être utilisés s’opposeront aux projets. Mais ils ne seront probablement pasinforméspuisquelessolsradioactifsneserontplusclasséscommedéchets.Cependant, le ministère de l’environnement espère «développer la compréhensionpublique nationale à travers la diffusion d'informations concernant la réutilisation desmatériaux faiblement radioactifs et l'élimination finale hors de la préfecture deFukushima»[ME2016].

LesdéchetsnesontpasbienentretenusetsécurisésPendantcetemps,lessacsdedéchetsradioactifss’entassentsurdenombreuxsitessansaucune garantie relative à leur sûreté. A l’automne 2013, le quotidien Mainichi arapportéqu’unehabitantedeShirakawaaappelélesautoritésrégionalesquandelleavudesenfantsjouersurunepiledesacsdedéchetsradioactifsdansleparcd’uncomplexede logements publics. Selon cette personne, l’administration régionale n’a rien fait. Etquand le journaliste a posé un radiamètre près des sacs proches de la rue, l’appareilaffichait un débit de dose de 2,23 µSv/h. Ailleurs, deux collégiens bavardaient juste àcôté d’un tas de sacs [Mainichi16/12/2013]. Dans certaines écoles, les déchets sontsimplementenfouisauboutdelacour,réduisantainsil’espacedejeudesenfants.Il y a des sacs de déchets répartis sur 54000 sites des zones non-évacuées deFukushima.Cesontlescommunesquienontlaresponsabilité,letempsdetrouverunesolutionpluspérenne.Ellesdoiventajouterdessacsdesablepourréduirel’expositionàproximitéetinstallerdesbâchespourprévenirquel’eaudepluieentreencontactaveclesradioéléments.Lecontratdelocationduterrainquiaccueillecesdéchetsaétésignépour trois ans. Les contrats ont donc expiré sans calendrier pour leur reprise. Lescommunesnesaventpaspourcombiendetempsellesdoiventétendrelescontrats.Lenombretotaldesacsauraitatteint9,16millionsàlafinseptembre2015àcausedesefforts de décontamination autour de la centrale de FDI. Ces sacs d’un mètre cube

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chacun étaient répartis sur quelques 114700 sites d’entreposage ou dedécontaminationdanstoutelaprovince[Mainichi10/12/2015].Ces sacs en plastique sont garantis trois ans seulement, sans prendre en compte lesdommages dus aux radiations et leur contenu n’est pas connu et enregistré. Nombred’entre eux sont déjà endommagés. Des herbes poussent sur d’autres. Cela est bienconnudes populations et denombreusesphotos circulent sur les réseaux sociaux. Enjuin2015,uneenquêtemenéeparleministèredel’environnementatrouvéquelessacsétaientdétérioréssurdesdizainesdesitesenzonenon-évacuée[NHK17/6/2015].Lesfonctionnaires du ministère ont affirmé que des sacs et des bâches étanches ont ététrouvésendommagéssur78sites.Sur113sites, lesolsur lequelsontempilés lessacsétaiteffritéàcausedelapluieoupourd’autresraisons.En septembre 2015, les pluies torrentielles du typhon Etau ont inondé sept sitesd’entreposage de déchets radioactifs issus de la décontamination. A Iitate, dans laprovincedeFukushima,plusde400sacsontétéemportésparlarivière.C’étaitplusde300sacsdanslaprovincedeTochigi.D’autressacsdedéchetsentreposésprèsdurivagenesontpasprotégésencasdetsunami.Ilestdoncurgentdetrouverdessolutionspourcesdéchets.Figuren°5:Carteavecleprojetd’entreposageintermédiaireàFutabaetOkuma[extraitde[ME2016])

ConclusionsLagestiondesdéchetsradioactifsestunproblèmedifficiledanstouslespaysquienont accumulédesquantités significatives.Aprèsunaccidentnucléaire grave,c’estencoreplusdifficileetlesvolumessonténormes.Lesprojetssontbloquésau

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Japon et les autorités s’accrochent à leur attitude autoritaire qui est un écheccomplet: décider, annoncer et défendre. Pendant ce temps là les déchetss’entassentdansdessacsquis’abimentrapidement.Le vaste programme de décontamination, qui est à l’origine de la plus grossepartiedesdéchetsproduits,n’apasétébienjustifiéauprèsdespopulations.Est-cenécessairededécontaminerleszonesoùleshabitantsnesouhaitentpasrentrer?Dans les territoires évacués, la décontamination est limitée aux environsimmédiats des habitations et des autres bâtiments, transformant les villages etvillesenoasisaumilieudegrandesétenduesdeterrescontaminées.Mêmelà,ladécontaminations’estrévéléedécevantealorsquelesdébitsdedosen’ontpasétéréduits de façon significative par rapport à ce qui a pu être observé dans lesforêts.Malgrécela,lesautoritéspoussentauretourdeshabitants.

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LapolitiquederetourQuelles que soient les performances de la décontamination et le devenir desdéchets radioactifs, lapolitiquedugouvernement japonais consisteen le retourdespopulationsdanslesterritoiresévacuées,àl’exceptiondeszonesclasséesenretourdifficile,oùl’expositionexternepeutdépasserunedosede50mSvparan.Saméthodepourconvaincre lespopulationsest lamêmequecelleutiliséepourlescentresdestockage,décider,annoncer,défendre.Lecontactaveclesrésidentsestlimitéàdesréunionsd’information.Pouratteindresonbut,legouvernementprévoitd’arrêterlesindemnisationsavantmars2018.Unetellepolitiqueviolelesprincipesdirecteursdel’ONUconcernantlespersonnesdéplacéesàl’intérieurdeleur pays, lesquels leur garantissent le droit de choisir entre le retour et laréinstallation.Lespopulationsévacuées font faceàdegrandesdifficultés et souffrentde leursconditionsdevie.Lespersonnesquin’ontpasétéévacuéess’inquiètentpourleuravenir etpour la santéde leursenfants. Laplupartnepeuventpasaccepter lesdécisions gouvernementales. Les communautés où les ordres ourecommandations à évacuer ont été levées font face aux problèmes dedépopulation et de vieillissement. Comment rebâtir une communauté dans detellesconditions?Parconséquent,lespopulationssouffrentdeleursconditionsetdel’absenced’aveniracceptable.

LesdécisionsgouvernementalesLecalendrierderetourest fixé: lesordresd’évacuationdoiventêtre levésavantmars2017. Cela concerne 55000 personnes, dont 23000 issues des zones où il y a unerestriction de résidence et 32000 issues des zones se préparant à lever l’ordred’évacuer.Lesindemnisationsvontcesseruneannéeplustard[Asahi19/5/2015].Iln’estpassûrque lesniveauxderadiationsaientdiminuéautantqueprévuenmars2018.Maismêmesil’ordred’évacuerestmaintenuparendroitàcausederetardsdansladécontamination,l’indemnisationcesseraen2018pourcesdeuxzones.Encequiconcernelesauto-évacués,25000environbénéficientd’unlogementgratuit,dont20000endehorsdeFukushima.Cetteaidecesseraenmars2017.Lesautresauto-évacuésquinebénéficientd’aucuneaidesontsimplementignorésetpasprisencomptedanslesdonnées.Jusqu’àprésent,l’ordred’évacueraétélevésurunepartiedescommunesdeTamuraetde Kawauchi en 2014, et pour toute la commune de Naraha en 2015. Toutes cesterritoires sont parmi les moins contaminées de la zone d’évacuation de 20 km. Lesrecommandationsàévacueràproximitédespointschaudsrépartisçàet làont toutesétélevées.

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LeshabitantssontréticentsàrevenirLa levée de l’ordre d’évacuation est précédée d’une période d’essai qui finit toujoursselonleschoixgouvernementaux,endépitdel’oppositiondespersonnesconcernées.ATamura, legouvernementasimplementprolongé lapérioded’essai,après laquelle iladécidé unilatéralement qu’il lèverait l’ordre d’évacuer en avril 2014. A l’époque,seulement 6,7% des habitants concernés avaient exprimé leur volonté de rentrer et34,5%yétaientfavorablessicertainesconditionsétaientremplies[IOM2015].Une telle tendanceestgénéraleàFukushima.Desenquêteseffectuéespar l’Agencedereconstruction,lesautoritésrégionalesdeFukushimaetlesmunicipalitésdeTomiokaetd’Okumamontrent que moins de 15% des foyers veulent rentrer. Ce nombre est enbaisse.Al’inverse,50,8%desfoyersdeTomiokaet63,5%deceuxd’Okumaontdéclarénepasvouloirrentrer.Ceschiffressontenhausse[Asahi28/10/2015].Le5 septembre2015, l’ordred’évacuationdeNaraha, situéedansun rayonde20kmautourdelacentraledeFDIaétélevé.Narahaestunedes11communesayantreçuunordre d’évacuer entièrement ou partiellement en 2011. Comme cela a été mis enévidence dans la revue «Policy Brief Series» de l’Organisation internationale desmigrations,uneenquêted’opinionaétémenéesurlaquestionduretourdecesévacuésen2014.Avecuntauxderéponseprochede60%,lesrésultatsmontrentqueseulement8%desévacuéssouhaitentrentrerleplusvitepossibleetque60%d’entreeuxétaientindécisounevoulaientpasrentrer.Danslequestionnaire, iln’yavaitaucunequestionrelativeàleurintégrationlocaleouàleurréinstallation[IOM2015].Unefoisl’ordred’évacuerlevé,moinsde200personnessurplusde7000sontrentréesdurantlespremièressemaines.Cependant,quelques1100personnestravaillantsurleschantiers de décontamination ou de démantèlement vivent dans une dizaine delogements préfabriqués qui ont été installés à Naraha, remplaçant ainsi les anciensrésidents.Ledernierrecensementde lapopulationdeFukushima,quiestbasésur lenombredepersonnes vivant dans la province à la date du 1er octobre 2015, qu’elles y soientenregistréesounon,montreque976personnesvivaientàNaraha,cequireprésenteunebaissede6724habitants,ou87,3%depuis2010[Asahi25/12/2015].LacommunedeHirono,situéeentre20et30kmdelacentraledeFDI,avusonlittoralravagé par le tsunami. La ville a aussi été incluse dans la zone de préparation àl’évacuation, car elle est juste au-delà de 20 km. Cependant, la municipalité arecommandéà tous leshabitantsdepartir et tous les servicespublicsontété fermés.Bien que le gouvernement ait jugé qu’il était sûr de rentrer en septembre 2011, lamunicipalitéamaintenularecommandationd’évacuationjusqu’enavril2012.Lamairiearouvertle1ermars2012,pourpréparerleretourdeshabitantsetladécontaminationdesécoles.Selonledernierrecensement,unegrandepartiedelapopulationactuelleestengagée dans les travaux de démantèlement des réacteurs nucléaires: la populationmasculineestenhaussede2,3%parrapportà2010,avec2746personnes,alorsquelapopulationféminine,d’unautrecôté,estd’environlamoitié,avec1577personnes,soitunebaissede42,3%[Asahi25/12/2015].

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LapopulationdeKawauchi,oùl’ordred’évacuationaétépartiellementlevéenoctobre2014, a baissé de 28,3% en passant de 2820 à 2021 habitants. A l’inverse, d’autrescommunes qui accueillent de nombreuses personnes déplacées et des travailleurs dunucléaire ont vu leur population augmenter. C’est le cas d’Iwaki et de Soma dont lenombred’habitantsaaugmentéde2,1%etde2%respectivement.C’estlapremièrefoisen 20 ans que le nombre d’habitants augmente dans ces communes[Mainichi25/12/2015].Tousceschiffressoulignentlefosséquiexisteentrelapolitiquejaponaiseetlesouhaitdes populations touchées. Pourquoi sont-elles réticentes à rentrer chez elles alorsqu’ellessouffrentcommepersonnesdéplacées?Lesinfrastructuresdebasecommeunaccèsàdescentresmédicauxoucommerciauxnesontpasencorerestaurées.ANaraha,l’écolen’apasencorerouvertetlenouveaumuranti-tsunamidoitencoreêtreconstruit.Dans certaines villes, le nombre de travailleurs du nucléaire surpasse celui deshabitants,lesrendantmoinsattractives.Descamionstraversentrégulièrementd’autresvilles.Au-delà de ces problèmes, il y aussi une crainte des conséquences sanitaires desradiations.Commecelaadéjàétésouligné, ladoseexterneestconsidéréecommetropélevéepardenombreusespersonnesdéplacées,surtoutquandilyadesenfants.koko

LesproblèmesdedépopulationetdevieillissementdesterritoirescontaminésDans en entretien au quotidien Asahi, le maire de Kawauchi pense qu’il n’est pluspossible de restaurer le village comme il était. Ce village est situé à une distancecomprise entre 20 et 30 km de la centrale de FDI. Sur les 3000 habitants d’avant lacatastrophe, quelques 1600 sont rentrés. La population actuelle de 1600 âmescorrespond à ce qui était prévu aux alentours de 2030. Mais l’accident nucléaire abrusquementtransformécesprévisionsenréalité.Seulement20%despersonnesâgéesdemoinsde40anssontrentrées.Lesfamillesnesontpluscommeavant.Commeellesont dû être séparées quand elles étaient évacuées, le nombre de foyers est passé de1100avantl’accidentà1500.Lesjeunesonttrouvédutravaildansleszonesurbainesoùilsavaienttrouvéunabri.Lesenfantssesonthabituésàlanouvelleécoleoùilsontété transférés. Ces personnes sont en train de refaire leur vie, mais sont toujoursqualifiées d’«évacués». Elles en sont arrivées à penser un retour comme une«réinstallation»carrentreràKawauchinécessiteraitdemodifierune foisencore leurenvironnement quotidien. Le maire considère les solutions pour faire face à ladépopulation en cours représentent une problème crucial quimontre la vraie natured’une catastrophe nucléaire. Il pense que ce n’est pas l’argent mais les ressourceshumaines qui ont le pouvoir de changer les communautés locales. ReconstruireKawauchinécessiteaussid’assisterceuxquiontquittélevillage,carilsontbesoind’unecommunautéd’origineverslaquelleilspourrontseretournerquandilslesouhaiteront[Asahi19/03/2015].Commelemontreaussiuneétudescientifique,«l’émigrationdesrésidentsquifaitsuiteàl’accident nucléaire de Fukushima a entraîné des problèmes de vieillissement et de

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dépopulationdans leszonescontaminées.Laréhabilitationdeceszones touchées,mêmecelles avec de faibles niveaux de pollution, est fortement affectée par ce phénomène»[Zhang2014]. La diminution et le vieillissement rapide de la population ont desrépercussionsprofondessurtouslesaspectsdelasociété.LesauteursontétudiélecasdeMinami-Somaoùlapopulationadiminuéde66%parrapportàavantl’accidentetoùl’âgemoyen des habitants a augmenté de 14 années, un niveau attendu en 2025. Lenombre de personnes âgées qui ont besoin de soins spécialisés a augmentéd’approximativement 29% entre février 2011 et mai 2013 alors que la moitié deshôpitauxetdescliniquesontdûfermeretquelenombredemédecinsetd’infirmièresabaissé de 15% et 19% respectivement. Plus généralement, la population en âge detravailler a baissé de 33% à Minami-Soma alors que la reconstruction demandebeaucoupdemaind’œuvre.Lesauteursidentifienttroiscausesàl’émigration:1)lesrisquessanitairesliésàlavieen zones faiblement irradiantes ne sont pas connus; 2) les troubles psychologiquespost-traumatiques et le manque de confiance envers les informationsgouvernementales;3)uneabsencedevitalitééconomiqueetd’industriemotricerendlarégionmoinsattractiveauxindividusrésidantendehorsdelaville[Zhang2014].

LapolitiquederetourCommecelaadéjàétéexpliqué, legouvernement japonaisvaautoriser leretourde lapopulation vers les zones où la dose externe est inférieure à 20 mSv par an, ensupposantqueleshabitantspassent8heuresparjouràl’extérieur.C’estlamêmelimiteque celle fixée lors de l’évacuation. Cela signifie qu’au cours des années les habitantsvontêtreexposésàunedosecumuléequivadépasser100mSv,àpartirdelaquellelesautoritésjaponaisesconsidèrentque«l’incidenceducanceretdutauxdemortalitéaunetendanceàaugmenterproportionnellementàl’exposition»[NRA2013].Dans un tel contexte, l’Autorité de régulation nucléaire (ARN) du Japon et d’autresorganisations ont formulé des mesures pratiques de protection pour les personnesévacuées [NRA2013]. Elles rappellent que«ladoseadditionnelleà laquelleun individuest exposé après être rentré chez lui doit être inférieure à 1 mSv/an (objectif à longterme).»Maisaucuncalendriern’estdonné,ni recommandé.Les recommandationssefocalisent sur la dose individuellemesurée avec un «glass-badge» «afin de répondreaux anxiétés due à l’exposition aux radiations et réduire la dose individuelle après êtrerentréàlamaison».Legouvernementjaponaisaadoptécettepolitiquedanslebutderassurerlespersonnesévacuées et obtenir leur consentement. Les autorités s’attendent à ce que la doseexterneenregistréeparles«glass-badges»soitbieninférieureàl’estimationgrossièrebasée sur le débit de dose ambiant. Elles espèrent aussi que les populations quiretournentchezellesapprendrontàréduireladosedanslesterritoirescontaminés.Enplusduchangementdeparadigme, ilyaaussiunchangementde laquantitémesuréequi réduit le résultat final, comme cela a déjà été expliqué. Le document de l’ARN nementionnejamaiscepoint.

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Cette nouvelle politique n’a jamais été discutée ni débattue avec les populationsconcernées.Denombreusesfamillesconsidèrentquecontrôlersaviequotidiennen’estpasunaveniràproposerà leursenfantsetellespréfèrentse réinstallerailleurs.Ellescraignent aussi que les enfants ne portent pas toujours les dosimètres individuels,surtout s’ilsdécidentd’aller jouerdans lieux interdits comme la forêt.A l’inverse,despersonnes âgées veulent absolument rentrer chez elles et c’est un fardeau qu’ellesacceptent.L’ARNsouligneaussique«legouvernementjaponaisrespectecomplètementlesdécisionsdesindividusdéplacésindépendammentdufaitqu’ilsretournentdansleurfoyeroupas»[NRA2013],maislesfaitsmontrentquelegouvernementencourageplutôtleretour.Par exemple, les personnes évacuées pour lesquelles il est prévu qu’elles puissentrentrer, sont inéligibles aux logementspublicsdédiés à la réhabilitation à long terme.Lespersonnesévacuéesoriginairesdeszonesjugéesderetourdifficilesontlesseulesàêtre éligibles à ces logements en cours de construction. Mais comme de nombreusesfamilles éligibles ont reçu une indemnisation suffisante de TEPCo pour acheter unnouveaulogement,lenombrededemandesesttrèsinférieurauxprévisions.Pendantcetemps, celles qui ne sont pas éligibles feront face à une décision difficile quand ellesdevrontquitterleurlogementprovisoire.Ellessontperduesparrapportàcequ’ilfaudrafairequandletempsseravenudepartir[Mainichi2/12/2015].LeComitéderéconciliationàproposdel’indemnisationdesdégâtsnucléairesaproduitlesupplémentn°4desesprincipesdirecteursle26décembre2013quirecommandeàTEPCo d’indemniser la reconstruction ou l’achat du logement pour toutes les zonesévacuées sans discrimination, à un niveau proche du coût réel, quel que soit le choixentreleretouretlaréinstallation[DRC2013].Celarendladécisiondeseréinstallerplussimplepourdenombreusespersonnesdéplacées.Maisleproblèmedemeurepourcellesqui n’ont pas encore pris de décision définitive. La province de Fukushima a aussiaffirméqueleslogementstemporairesserontprolongésenfonctiondel’avancementdelaconstructiondeslogementspublicsderéhabilitationàlongtermepourleshabitantsoriginaires des trois zones évacuées. Cela concerne 7 communes: Naraha, Tomioka,Okuma,Futaba,Namie,KatsuraoetIitate[FP2015].

ViolationdesdroitshumainsLapolitiquejaponaiseaétécritiquéeparAnandGrover,lerapporteurspécialduComitédes doits de l’Homme des Nations Unies qui note: «Comme les effetsnégatifspour lasantésontpossiblespourdesfaiblesdosesderadiation,ilnedevraitêtrerecommandéauxévacuésderentrerqu’àpartirdumomentoùladosederadiationsaétéréduiteautantquepossible et à un niveau inférieur à 1 mSv/an. En attendant, le gouvernement devraitcontinueràfournirunsoutienfinancieretdequoivivreàtouteslespersonnesévacuéesdefaçonàleurpermettrededécidervolontairementderetournerdansleurfoyerouderesterévacuées»[HRC2013].LesNationsUniesdéfinissentlespersonnesdéplacéesàl’intérieurdeleurpayscommedespersonnesoudesgroupesdepersonnesquiontétéforcéesouobligéesdefuiroudequitter leur foyer ou leur résidence habituelle pour plusieurs raisons, dont les

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«catastrophes naturelles ou provoquées par l'homme, et qui n'ont pas franchi lesfrontières internationalement reconnues d'un État». Les personnes évacuées des lieuxcontaminés par l’accident nucléaire entrent donc dans cette catégorie et devraientbénéficier des droits garantis par les principes directeurs concernant les personnesdéplacéesàl’intérieurdeleurpays[UNESC1998].Rappelant que «le déplacement cause presque toujours de grandes souffrances auxpopulations touchées», ces principes directeurs leur fournissent des garanties. Enparticulier,«c'estauxautoritéscompétentesqu'incombentenpremierlieuledevoiretlaresponsabilité de créer des conditions propices au retour librement consenti, dans lasécuritéet ladignité,despersonnesdéplacéesà l'intérieurde leurproprepaysdans leurfoyerouleurlieuderésidencehabituel,ouàleurréinstallationvolontairedansuneautrepartiedupays,ainsiquede leur fournir lesmoyensnécessairesàceteffet.» Ils ajoutentque«lespersonnesdéplacéesàl'intérieurdeleurproprepaysontledroitd'êtreprotégéescontreleretouroularéinstallationforcésdanstoutlieuoùleurvie,leursûreté,leurlibertéet/ou leur santé seraient en danger» et que «des efforts particuliers seront faits pourassurerlapleineparticipationdespersonnesdéplacéesàl'intérieurdeleurproprepaysàlaplanification et à lagestionde leur retourou réinstallation et de leur réintégration»[UNESC1998].Cen’estabsolumentpaslecasauJapon.Larevue«PolicyBriefSeries»del’Organisationinternationaledesmigrationsnotequ’ily aunmanquede reconnaissancedu statutdepersonnedéplacéeà l’intérieurde sonpays dans les discours officiels. Il n’est jamais fait référence au cadre normatifinternational et aux instruments de protection des droits humains existants, qui sontainsirarementappliquésquandils’agitdesproblèmesdespersonnesévacuéesàcaused’unaccidentnucléaire.Aulieudecela,laquestionesttraitéedifféremmentquepourlesautrescasdedéplacement,etenparticulierceuxdusauxséismesettsunamide2011auJapon.«LesprogrammesderecherchesurleterrainDEVASTetSHINRAIonttrouvé,parexemple,que lesaffairesrelativesauxpersonnesévacuéesàcausedes séismeet tsunamisont gérées par l’Agence de reconstruction, alors que celles relatives aux évacués dunucléaire sont prises en charge par le ministère de l’économie, du commerce et del’industrie(METI)oupardesagentsdel’AgencedereconstructionquisontalorssecondésparleMETI»[IOM2015].De nombreuses décisions concernant l’avenir, comme le calendrier de retour, sontsouvent prédéterminées par le METI et seulement communiquées aux évacués dunucléaire à la dernière minute, leur laissant souvent pas d’autre choix que de lesaccepter. «En outre, ces «réunions d’explication» (setsumeikai en japonais) sontgénéralementorganiséesàhuisclossanslaprésencedesmédias,l’ONGs,d’expertsofficielsou indépendants, et ne produisent aucun compte rendu de ce qui a été discuté, laissantainsilesévacuéssansressources»[IOM2015].De nombreux citoyens considèrent qu’au lieu de dépenser beaucoup d’argent dans ladécontamination, la gestion des déchets et la réhabilitation des territoires évacués, ilpourrait être plus efficace d’utiliser ces fonds pour soutenir la réinstallation. Certainsontmêmeproposédeconstruiredesvillesnouvellespourmaintenir les liensdans lescommunautés.Ilssontsimplementignorésparlegouvernement.

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LespersonnesévacuéessouffrentLa politique japonaise entraîne beaucoup de souffrances pour les communautéstouchéesparl’accidentnucléaire.Le JapanTimesrapporteledilemmeauquelfontfaceles mères vivant dans les territoires contaminés de toutes les provinces touchées:«Rester ou partir. […] Celles qui restent là vivent la crainte permanente à propos de lasanté de leurs enfants. Mais choisir de partir les expose aux accusations d’être demauvaisesépousesquiontabandonnéleurfamille, leurcommunautéet leurmari liéparleurtravail.C’estunesituationoùl’onnepeutpasgagner.»Rentreroupasestuneautrequestiondifficile[JT29/9/2015].Lenombredepersonnesquisouffrentdetroublespsychologiquescommeladépressionou les troubles post-traumatiques est plus élevé que la normale aussi bien chez lespersonnesévacuéesquechezcellesquine l’ontpasété.Lesdonnéescompiléespar leCentre des études psychologiques des catastrophes de l’université de Fukushimamontrentque le stresspsychologiquedû à l’accident à la centraledeFDI est resté en2015aumêmeniveauqu’en2014chezlesmèresetlesenfantsquiviventdanslavilledeFukushima.Leniveaude stress abaissédepuis2011, l’annéedudéclenchementde lacatastrophe,mais a apparemment touché le fond en 2014. Les personnes interrogéesontdûrépondreàunesériedequestionsetleschercheursontquantifiéleurniveaudestresssuruneéchelleallantde0à3.LeniveaudestressmoyensdesmèresdelavilledeFukushimaétaitde1,34,commeen2014.C’était1,63en2011.Lesmèresquiontquittéleszonesoùunordred’évacuationaétéémisavaient leniveauleplusélevé,à1,85.ASoma, ce niveau était de 1,48, et 1,29 à Iwaki. Dans les provinces de Hyogo et deKagoshima,quinesontpastouchéesparl’accidentnucléaire,leniveaumoyendestressétaitde1,06[Asahi2/10/2015,Mainichi2/10/2015].Ilyaaussiunedifférencesignificativeentrelasituationdespersonnesaffectéesparlacatastrophenucléaireetcellesaffectéesparletsunami.LenombredesuicidesreliésauxcatastrophesestplusélevéàFukushimaqu’àMiyagiouIwate,commeonpeutlevoirsurlafigure6.Pourdéterminersiunsuicideestliéàlacatastropheetauxévacuationsquis’ensontsuivies,lapolicelocaleparleauxfamillesendeuillées.Atitredecomparaison,ennovembre2015,environ24000personnesàIwateet55000àMiyagivivaientdansdes logements provisoires loin de chez elles. A Fukushima, ce nombre est d’environ103000. Les victimesdes catastrophesontuneplus grandeprobabilitéde souffrirdedépression ou de troubles post-traumatiques à Fukushima qu’à Iwate et Miyagi[Asahi28/12/2015].Lesdécèsreliésauxcatastrophessontgénéralementdéfiniscommedesdécèsdusàunemaladieouà ladétériorationd’unemaladiechroniqueprovoquéespar la fatiguepost-traumatique ou traumatismes psychologiques, incluant des suicides. Les personnesâgées sont particulièrement vulnérables après des catastrophes majeures. En mars2015, le décès de 2007 personnes à Fukushima a été reconnu comme lié au séisme,tsunami et à la crise nucléaire. Parmi les trois provinces les plus touchées, c’estFukushimaquialeplusgrandnombredevictimesreliéesauxcatastrophes.Ilyenavait455àIwateet918àMiyagi[Mainichi28/12/2015].Pourêtrereconnucommereliéàlacatastrophe, un décès doit être considéré comme tel par un groupe de médecins,d'avocats et d'autres experts. Certaines familles font appel quand le lien n’est pasreconnu.

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Figure n°6:Nombredesuicides liésaugrandséismede l’Estdu Japonetà l’accidentnucléairedeFukushima(extraitde[Asahi28/12/2015]).

Uneétudescientifiquemontrequel'inefficacitédescontre-mesuresrelativesàcesdécèspeutêtreprincipalementattribuéeauxfacteursdecomplicationdel'accidentnucléairequiasuiviletremblementdeterreetletsunami[Tanaka2015].L’auteurexpliquequ’encomparaison à une catastrophe naturelle typique, les personnes déplacées de lacatastrophenucléaire ont connuuneplus longuepérioded’évacuation avecun avenirincertain. La gravité du tremblement de terre combiné au tsunami et à l’accidentnucléairealimitél'efficacitédescontre-mesuresquiontétémisesenœuvresurlabaseduretourd’expériencedescatastrophesprécédentes,enparticulierencequiconcerneles personnes âgées. Il conclut qu’«ilyaunbesoinurgentdereconnaître lessituationsstressantesdesréfugiés,quipeuventmêmeprovoquerlamort,etdeleurfournirdessoinsmédicauxdehautequalité,dontdessoinspourleursantémentaleàlongterme.»

ConclusionsAprès une catastrophe quelle qu’elle soit, les personnes déplacées souffrent.Cependant, dans le cas de l'accident nucléaire de Fukushima beaucoup sontréticentes à revenir à lamaison une fois que l'ordre d'évacuation est levé. Unetelleattitudeestdueaufaitqu'ellesfontfaceaumêmedilemmequelespersonnesnon évacuées vivant dans les territoires contaminés qui se demandent si ellesdoiventresteroupartiretsesoucientdelasantédesenfants.Quelle que soit l'opinion des populations touchées, les autorités japonaises ontfocaliséleurréponsesurleurretour:lesordresd'évacuationdevraientêtrelevésavantmars2017,saufdans leszonesditesderetourdifficile.Lespersonnesqui

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rentrentvonttrouverunevilledépeupléeavecunvieillissementdelapopulation.Les personnes hésitantes se sentent abandonnés par les autorités. Cet avenirincertaingénèreunstresssupplémentaireaustresspost-traumatiquecommunàtoutecatastrophe.Le gouvernement japonais devrait plutôt fonder sa politique sur les Principesdirecteursrelatifsaudéplacementàl’intérieurdupaysquirequièrentdeseffortsparticulierspourassurerlapleineparticipationdespersonnesdéplacéesdanslaplanificationetlagestiondeleurretourouréinstallationetréintégration.

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ConclusionsEn 2012, la NAIIC a averti que «l’impact de l’accident continue et que des réponsesurgentes sont nécessaires, pour la vulnérabilité des bâtiments et des équipements à lacentrale nucléaire de Fukushima dai-ichi et aussi pour les dommages subis par lesrésidents»[NAIIC2012].C’estencorevraien2016.Elleaaussiavertique«lesrésidentsdeszonesaffectéesontencoredumalàseremettredeseffetsdel’accident.Ilscontinuentàfairefaceàdegravespréoccupations,commecellesliéesauxeffetssurlasantédel'expositionauxrayonnements,ladissolutiondesfamilles,laperturbationdeleurvie,etdelacontaminationdel'environnementdevastesterritoires»[NAIIC2012]. De nouveau, c’est encore vrai en 2016. Comme les effets des accidentsnucléaires durent des décennies, les populations touchées ne voient pas la fin desdifficultés auxquelles elles font face. Dans le cas des réacteurs de Fukushima, il estgénéralementadmisqueledéclassementetdémantèlementvaprendreplusde40ans.Les réacteurs vont être encore menaçants pendant des années car personne ne saitcommentaccéderaucombustiblefondu.Mais le gouvernement japonais se dépêche de tourner la page et affirme que lacatastrophe est presque terminée. La population souffre encore et, à Fukushima, lenombrededécèsreliésàlacatastrophedépasselenombredevictimesdirectesduesauxséismes et tsunami [Tanaka2015, Mainichi28/12/2015]. Des solutions durables quipeuvent être acceptées par les communautés et les individus doivent être trouvéesrapidement.Laviedans les territoires contaminéspeutaussi conduireàbeaucoupdestress.Denombreuxenfantsnejouentplusdehors.Lesfamillesontbesoinderéponsesàleursproblèmesspécifiques,etdesoutien.Unecatastrophenucléaireestd’abordunecatastrophehumaine.Cependant,laréponsedesautoritésjaponaisessefocalisesurleretourdespopulationsdans les territoires évacués, à l’exception des plus contaminés. Les recommandationsinternationalesproposentdesconditionspourrétablirunevie‘normale’dansleszonescontaminées, ce qui est impossible. Quelle que doit la solution, elle sera différente decelle qui prévalait avant la catastrophe. Il doit être reconnu qu’un retour à une vienormale n’est pas possible après un accident nucléaire grave avec rejets radioactifsmassifs.Lesautoritésdoiventaussiexpliquerclairementquedanslesterritoireslespluscontaminés,leretourestsimplementimpossible.Aprèsunaccidentnucléaire,denombreuxrésidentsnefontplusconfianceauxautoritésni aux experts officiels qui ne les ont pas protégés. La défiance est exacerbée par lesscandales quand TEPCo et les autorités échouent à reconnaître des rejetssupplémentaires dans l’environnement. Pourtant, les chemins vers la réhabilitationnécessitentunebonnecoordinationentrelesautoritésetlespopulations.Lessolutionsnepeuventpas ignorer leursdemandesspécifiqueset leurssuggestions.Cela implique

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de nouvelles façons de délibérer et de décider. In fine, les solutions peuvent êtredifférentesenfonctiondesfamillesetdescommunautés.Iln’yapasdebonnesolutionetchaquedécisiondoitdoncêtreévaluéepuisadaptée.Pourtant, les autorités japonaises poussent leur unique solution en ignorant lesdemandesdespopulationstouchées.Encequiconcerneladécontamination,lagestiondes déchets et la politique de retour, la méthode appliquée est limitée à décider,annoncer et défendre (DAD). Les familles et communautés qui n’acceptent pas lessolutions envisagées sont abandonnées dans une situationdouloureuse. Au-delà de lasouffrancedespopulationsaffectées,unaccidentnucléairefaitaussivacillerlesbasesdeladémocratie.Convaincuesqueladéfiancedupublicestdueàleurmanquedeculturescientifique,lesautorités ont mis en place une stratégie pour améliorer leur communication sur lesrisques radiologiques et leur impact sur la santé [NRA2013]. Mais, au contraire, lesrisques ne peuvent pas être proprement définis sans une réelle compréhension desinquiétudesdespopulationsetsansunepriseencomptedescontroversesscientifiquesetdesincertitudes.Dansuntelcontexte, ilyaunbesoindeprocessusparticipatifsoùlesrisquesetlessolutionssontdébattusparlesdifférentespartiesprenantesetacteurs,enincluantdesexpertsindépendantsetdestiercespartiescommedesONGs,etdéfiniescollectivementplutôtquepardesdécideursseuls,àsavoirlesautoritésetleursexpertsaffiliés[Shirabe2015].Lescitoyensjaponaisontfaitpreuved’initiativeetd’ingéniositéàproposdelamesurede la radioactivité [ACRO2012].Une cartographie citoyennede la contaminationa étéfaite un peu partout et la surveillance de l’alimentation a poussé les autorités, lesproducteurs, lesvendeursàrenforcer leurscontrôlespour, finalement,conduireàunebaissede l’ingestionde radioéléments. Ils y aussi denombreuses autres initiatives enfaveurde la réhabilitationdes territoires. Certains agriculteurs ont décidéde changerleurproduction.D’autresinvestissentdanslesénergiesrenouvelables.Pourquoiuntelprocessusquis’estrévéléêtreefficaceneseraitpluspossiblequandils’agitdedéciderdudestindesterritoirescontaminésetdespopulationstouchées?

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AbréviationsFDNPP FukushimaDaiichiNuclearPowerPlantICRP InternationalCommissiononRadiologicalProtectionIDP InternallydisplacedpersonsIOM InternationalOrganizationforMigrationIRCU InternationalCommissiononRadiationUnitsandMeasurementsIRSN InstitutdeRadioprotectionetdeSûretéNucléaireNAIIC Nuclear Accident Independent Investigation Commission of the

NationalDietofJapanNRA NuclearRegulationAuthorityTEPCo TokyoElectricPowerCompany

Unités1Bq unbecquerelouunedésintégrationparseconde1mBq=10-3Bq unmillièmedebecquerel1MBq=106Bq unmilliondebecquerels1GBq=109Bq unmilliarddebecquerels1TBq=1012Bq millemilliardsdebecquerels1PBq=1015Bq unmilliondemilliardsdebecquerels1Sv unsievert,unitédedoseeffective1mSv=10-3Sv unmillièmedesievert1µSv=10-6Sv unmillionièmedesievert

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