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MSGDDCC - Fiche de lecture
« La nature est un champ de bataille, essai d’écologie politique »
Matthieu VINCENT – Décembre 2014
FICHE DE LECTURE
LA NATURE EST UN CHAMP DE BATAILLE, ESSAI D’ECOLOGIE POLITIQUE
RAZMIG KEUCHEYAN
Aux Editions ZONES - 2014
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L’AUTEUR :
Razmig Keucheyan, est docteur en sociologie, Maître de
conférences à l'Université Paris Sorbonne-Paris IV et membre du
Groupe d'Étude des Méthodes de l'Analyse Sociologique de la
Sorbonne (GEMAS). Razmig Kecheuyan commença ses études à
Genève. Puis après avoir obtenu sa maîtrise en 2000, il arriva à
Paris où il passa son DEA en 2001 puis son doctorat de sociologie
en 2005 sous la direction de Raymond Boudon (ce dernier était un
des plus importants sociologues français du dernier quart du XX
siècle et du début du XXI siècle). Razmig Keucheyan a adhéré au
Nouveau Parti anticapitaliste dès sa création en 2008 où il participa
à son courant unitaire. En mai 2011 il cosigna un appel pour une
candidature unitaire de la gauche de transformation sociale et
écologique pour les présidentielle de 2012. Razmig Keucheyan est connu pour la cartographie des
nouvelles pensées critiques qu'il a réalisé dans son ouvrage Hémisphère gauche. Il est aussi reconnu
comme spécialiste de la pensée de Antonio Gramsci. De plus, il est également l’auteur de quelques
tribunes dans des journaux comme le Monde Diplomatique ou la revue Contretemps ainsi que sur des
sites internet tels que Europe Solidaire Sans Frontières. Enfin, Il fait aussi partie des personnalités
issues de la société civile qui sont signataires du manifeste du Mouvement pour la 6ème République.
Bibliographie de l’auteur :
Le constructivisme : Des origines à nos jours – 2007 – Hermann
Hémisphère gauche : Une cartographie des nouvelles pensées critiques 1° édition – 2010 – Zones
Hémisphère gauche : Une cartographie des nouvelles pensées critiques 2° édition – 2013 – Zones
La nature est un champ de bataille, essai d’écologie politique – 2014 – Zones
« L’Expérience de notre génération : le capitalisme ne
mourra pas de mort naturelle » Walter Benjamin
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Avant-Propos :
Dans ce livre, l’auteur fait œuvre de futurologie :
c’est-à-dire qu’il choisit de développer, en fonction
de l’étude de notre civilisation contemporaine
globale et de sa construction socio-économique, une
branche de l’arbre des futurs possibles qui lui semble
la plus probable. Ce qui ne signifie pas forcément
souhaitée… La thèse défendue par l’auteur dans ce
livre prend le contre-pied de l'opinion dominante où les « bonnes âmes » appellent l’humanité à
« dépasser ses divisions » pour s’unir dans un « pacte écologique ». L'auteur s’attaque dans cet essai
à cette idée reçue et explique comment la nature est un véritable champs de bataille, un théâtre
d'opérations politico-économico-militaires où les acteurs ont des intérêts divergents. Par conséquent,
selon lui, un consensus environnemental est loin d’être à l’ordre du jour. Son analyse passe par une
critique du système capitaliste qui entretient tout cela. Un exemple : que ce soit à l’échelle locale ou
mondiale, les populations ne subissent pas uniformément les conséquences de la crise écologique, on
peut même parfois parler de « racisme environnemental », et la réponse politique qui est faite à cette
crise environnementale, jusqu'à présent est : financiarisation de la nature et militarisation
grandissante en réponse à la raréfaction des ressources... Une grille de lecture des arguments de
l’auteur tout au long de ce livre est l’agrégation des intérêts du triptyque Capital – Etat – Nature qui
sera précisé plus loin.
Sommaire :
INTRODUCTION
I - LE RACISME ENVIRONNEMENTAL
II - FINANCIARISER LA NATURE : L’ASSURANCE DES RISQUES CLIMATIQUES
III - LES GUERRES VERTES, OU LA MILITARISATION DE L’ECOLOGIE
CONCLUSION
INTRODUCTION
« À l’automne 1982, les habitants du comté de Warren, dans le nord-est de la Caroline du Nord, se
sont mobilisés pendant six semaines contre l’installation d’une décharge de déchets toxiques. Quatre
ans plus tôt, en 1978, une entreprise de gestion des déchets industriels avait entreposé illégalement
dans la région d’importantes quantités de biphényles polychlorés (BPC ou PCB), une substance utilisée
notamment dans les transformateurs électriques et la peinture ». C’est d’ailleurs une substance qui a
le plus pollué les océans (et qui les pollue toujours) au XX siècle. « Une fois découvertes, l’État de
Caroline du Nord décida d’acquérir un terrain pour les y enfouir. Plusieurs endroits furent envisagés,
et on opta finalement pour un terrain à proximité de la ville de Warrenton. Les résidents du lieu,
comme c’est souvent le cas dans ce genre de circonstances, s’y opposèrent, craignant pour leur santé,
le BPC étant une substance cancérigène. Ils entamèrent une action en justice afin d’empêcher que les
déchets soient entreposés à cet endroit. Deux ans plus tard, le tribunal du district rejeta leur requête.
C’est alors que la protestation prit une forme extrajudiciaire : manifestations, sit-in, boycotts,
désobéissance civile, marches, meetings, coupures de routes… Ces actions conduisirent à l’arrestation
« La futurologie ou prospective est censée procéder à partir
des données technologiques, économiques ou sociales du
passé et du présent, et affirme se fonder sur des techniques
et des modèles scientifiques. Le terme exclut les prédictions
obtenues par des moyens surnaturels, ainsi que celles
concernant le court terme ; par exemple les estimations sur
les fluctuations boursières, celles-ci sont des sciences
spéculatives» wikipedia
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de plus de cinq cents personnes, parmi lesquelles des élus locaux et fédéraux. Le mouvement n’obtint
pas l’abandon du projet dans l’immédiat et le site ne fut décontaminé que dans les années 2000. » Il
va sans dire que la région du comté de Warren à proximité du site choisi pour l’enfouissement, était
peuplé de « Noirs pauvres » à 75 %. Selon les résidents de l’époque et leurs alliés, la décision de
d’installer la décharge à cet endroit a un fondement raciste. Dans ce cas précis, le conflit est la
résultante d’une injustice appelée le racisme. Cependant, tout n’est pas si simple, on verra plus loin
que la question de la classe et du genre, en ce sens que l’impact du changement Climatique (CC) n‘est
pas également distribué dans la population, fait partie également des facteurs décisifs car « la nature
n’échappe pas aux rapports de force sociaux : elle est même la plus politique des entités. ». Dans la
continuité de cette réflexion, la réponse actuelle de nos dirigeants à la crise écologique est un appel à
un rassemblement mondial autour de la cause environnementale sans tenir compte de la construction
capitaliste de la plupart de nos sociétés contemporaines, dont découlent les oppositions entre classes
sociales qui les constituent depuis la 1ère Révolution Industrielle à nos jours. C’est à partir de ce constat,
et à contre-courant de « l’establishment », que l’auteur suppose au contraire que la solution serait
plutôt « la radicalisation de ces oppositions. En d’autres termes, la radicalisation de la critique du
capitalisme. En dépit de cela, l’auteur consent volontiers que cette crise environnementale est cet
enjeu suprême nous permettant de vivre notre 1ère expérience en tant qu’ « espèce », dans le sens où
la réponse à y donner appelle une action commune de l’humanité. Pourtant, comme on peut s’y
attendre les réponses apportées par le capitalisme sont toutes autres ; puisque le but recherché par
ce dernier n’est pas la survie de l’espèce en tant que telle, mais le maintien du niveau de ses taux de
profits mis à mal par l’enchevêtrement des crises sociales, économiques et environnementale. En effet,
frappé de plein fouet par la crise écologique qu’il a engendrée et nourrie de par la surexploitation des
ressources, laquelle aggrave à son tour les inégalités socio-économiques, le capitalisme
répond financiarisation (via l’assurance des risques climatiques principalement) & guerre verte ou
militarisation de l’écologie. En fait, rien d’innovant, ce sont les deux solutions que le capitalisme
applique aux situations de crise depuis qu’il existe. « La financiarisation et la guerre : ce sont les deux
solutions que le capitalisme, depuis qu’il existe, applique aux situations de crise qu’il traverse et à
l’aggravation des inégalités qu’elles engendrent. En générant du capital « fictif », la finance permet de
reporter dans le temps, et donc d’atténuer provisoirement, les contradictions inhérentes à la
production capitaliste (comme l’a encore illustré récemment le mécanisme des subprimes). La guerre
est, quant à elle, le fruit des inévitables conflits que génèrent périodiquement ces contradictions.
L’amenuisement des opportunités de profit, la nécessité d’assurer le contrôle sur l’extraction et la
circulation des ressources, mais aussi l’accroissement de la contestation du système tendent à conférer
à la conflictualité politique un caractère plus aigu. En détruisant – littéralement - du capital, la guerre
permet aussi de relancer l’accumulation sur de nouvelles bases »
I – LE RACISME ENVIRONNEMENTAL
Le mouvement pour la justice environnementale est au
racisme environnemental ce que la lutte pour les droits
civiques est au racisme primaire… Tout comme la lutte
pour les droits civiques, le mouvement pour la justice
environnementale est principalement originaire des
Etats-Unis. Cependant, on verra que ces protestations
se sont rapidement internationalisés. Prenons pour
exemple le mouvement contemporain pour la justice climatique. Ce dernier prend son fondement
dans le lien entre crise climatique et inégalités Nord-Sud. Il appelle d’ailleurs à la reconnaissance de la
La question de la gestion des déchets s’était d’ailleurs déjà
manifestée au sein du mouvement pour les droits civiques.
La veille de son assassinat, en avril 1968, Martin Luther
King était allé soutenir une grève des éboueurs à
Memphis, dont la plupart des protagonistes étaient noirs.
Ces éboueurs protestaient contre la dangerosité et
l’insalubrité de leurs conditions de travail, ainsi que contre
les bas salaires
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dette écologique « contractée par les pays du Nord envers ceux du Sud tout au long des périodes
coloniales et postcoloniales ». La notion de racisme environnemental tend à démontrer les liens entre
les rapports sociaux – classe, genre, race – et la nature. Aux Etats-Unis, la naissance du mouvement
pour la justice environnementale a eu un impact considérable sur la suite des luttes
environnementales (l’auteur parle même « d’événement philosophique » de par son influence tant sur
« le plan politique que dans l’ordre de la pensée ») puisque dans le sillage des mobilisations populaires,
comme celles du Comté de Warren, paraît une étude qui fera date : Toxic Waste and Race in the
United States (« Déchets toxiques et race aux États-Unis »). « Cette étude établit pour la première
fois analytiquement ce que les manifestants de Caroline du Nord avaient observé sur le terrain : que
la race est un facteur explicatif, et dans bien des cas le principal facteur explicatif, de la localisation des
décharges toxiques aux États-Unis. Si vous voulez savoir où un stock de déchets donné a le plus de
chances d’être enfoui, demandez-vous où vivent les Noirs, les Hispaniques, les Amérindiens et autres
minorités raciales. Demandez-vous par la même occasion où se trouvent les quartiers pauvres. Cette
étude a été réalisée par la United Church of Christ, une Église progressiste noire, déjà très active dans
le mouvement des droits civiques dans les années 1950. Dans le mouvement pour la justice
environnementale comme dans celui des droits civiques, les Églises jouent un rôle crucial. Les Noirs
ayant été dépossédés de toute institution politique autonome aux États-Unis depuis la période de
l’esclavage, elles ont une fonction organisatrice de l’émancipation, elles sont des vecteurs de lutte.
Certaines d’entre elles se trouvent à l’avant-garde des problématiques écologiques. »
La couleur de l’écologie : en plus d’être une émanation du mouvement des droits civiques, le
mouvement pour la justice environnementale prend sa source dans l’absence totale de soutien et de
prise en considération de la dimension classe, race & genre au sein des organisations
environnementalistes américaines traditionnelles du XIX siècle à la fin du XX siècle. La plupart de ces
associations, dont les membres sont évidemment blancs à une écrasante majorité, refusèrent de se
joindre aux mobilisations du mouvement pour la justice environnementale car « développer des
politiques spécifiquement destinées aux pauvres et aux minorités revenait à contredire l’argument
couramment avancé qui énonçait que la nature est un bien universel, dont tout le monde peut jouir
sans distinction… ». Ce qui fait dire à l’auteur que la couleur de l’écologie n’est pas le vert… mais le
blanc. Nous avons encore récemment pu faire la malheureuse expérience de ce racisme
environnemental via la catastrophe lié à l’ouragan Katrina : parmi les 2000 victimes, deux catégories
de populations sont surreprésentées ; les personnes âgés & les noirs. Ceci s’explique par l’histoire des
quartiers et du climat de la Nouvelle-Orléans. En effet, historiquement, les zones humides de la ville
directement situées derrière le front de mer sont les zones les plus fréquemment inondés, et sans
surprise, ce sont dans ces zones que l’on va retrouver les quartiers les plus ségrégués au plan racial.
Les « classes dominantes » , quant à elles, ont pris l’habitude de s’installer sur les hauteurs de la ville,
majoritairement à l’abri des inondations. Par voie de conséquence, on comprend aisément que le
degrés d’exposition aux événements climatiques revêt un facteur racial et social.
« Katrina n’est pas la première inondation qu’a connue La Nouvelle-Orléans. Il y a une mémoire
collective des catastrophes, qui se traduit spatialement par une répartition particulière des classes
sociales, qui y expose certaines d’entre elles et en protège d’autres. Les Noirs ont par ailleurs été moins
fréquemment secourus et moins vite lorsqu’ils l’ont été. Ils ont en revanche été plus souvent pris pour
cible par la Garde nationale lors des opérations de « pacification » de la ville. Le facteur race est en
outre étroitement lié au facteur classe. Or les pauvres ont une propension moindre à posséder une
voiture, ce qui rend la fuite plus difficile en cas de catastrophe. »
A partir de ces constats, on peut établir une « spatialité du racisme » environnemental, c’est-à-dire la
répartition dans l’espace rural ou urbain des populations exposées aux aléas climatiques et/ou aux
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catastrophe environnementales (pollution, intoxication, …) en fonction de la race et de la classe
sociale. « À l’époque moderne, le racisme environnemental a une dimension systémique. Cela signifie
qu’indépendamment de ce qu’elles pensent, certaines catégories d’individus tirent – involontairement
– avantage de la logique raciste, du fait qu’elles sont du « bon » côté des discriminations et que d’autres
en pâtissent. Cette dimension systémique du racisme se décline elle-même de plusieurs façons. Dans
le cas qui nous occupe, elle s’exprime par le fait que le racisme a une spatialité, qu’il se déploie dans
l’espace. L’espace en question est à la fois social et naturel, les ressources naturelles étant comme on
l’a vu happées par la logique du capital. Le racisme est un phénomène « multiscalaire », qui se déploie
à plusieurs échelles : celle de l’individu et de son idéologie, celle du marché et de sa logique d’allocation
des biens, celle de l’État et des politiques publiques qu’il met en œuvre, par exemple en matière de
gestion des déchets toxiques, celle enfin des relations internationales et de l’impérialisme. Ces échelles
ne cessent d’interagir et de s’entrechoquer les unes contre les autres. Plus on passe du niveau
microsocial au niveau macrosocial, plus les forces à l’œuvre sont abstraites, plus elles s’éloignent de
l’intentionnalité des individus – sans pour autant cesser d’être racistes. Imaginons une entreprise
polluante qui s’installe près d’un quartier noir aux États-Unis, ou d’une cité en banlieue d’une grande
ville française où vit une majorité d’immigrés et de descendants d’immigrés. La décision de l’entreprise
de s’installer à cet endroit est motivée, par hypothèse, par un seul critère : le prix du foncier, qui défie
toute concurrence à cet endroit. C’est donc un choix « rationnel », au sens de l’économie néoclassique
(de la théorie dite du « choix rationnel »). S’agit-il d’une décision raciste ? Pas si le critère retenu est
l’intention, puisque la seule intention de l’entreprise est de minimiser ses coûts. Le problème est que
le prix du foncier à cet endroit est étroitement corrélé à la « sédimentation spatiale des inégalités
raciales » (Laura Pulido). S’il défie toute concurrence, c’est du fait de la proximité de populations
ségréguées et des significations sociales négatives attachées à ces populations et aux quartiers où elles
vivent. Ces significations ont elles-mêmes pu donner lieu à des infrastructures et des services publics
plus ou moins défaillants. Le marché, en ce sens, est un mécanisme d’allocation tout sauf neutre. Le
processus de formation des prix de l’immobilier internalise non seulement les pollutions, mais aussi la
logique raciste. C’est pourquoi en matière de compréhension du racisme, s’intéresser aux opinions et
aux intentions ne suffit pas. Un point de vue systémique est requis, car il est seul à même
d’appréhender la dimension multiscalaire du
phénomène. » Malgré l’angle très américain choisi
par l’auteur pour expliquer la genèse du racisme
environnemental, sa logique se déploie aux 4 coins de
la planète. En voici quelques exemples : en Grande-
Bretagne, la ségrégation entre l’aristocratie (la
« gentry »), laquelle a accès à la nature (le
« countryside ») et à la propriété terrienne face aux
classes populaires qui s’entassent dans des banlieues
typiques anglaise ; on peut également signaler le cas
de l’île de France, où comment en superposant la
carte des variables sociologiques caractéristiques des
communes et la carte des ressources & handicaps
environnementaux, on observe la traditionnelle
séparation géographique entre l’ouest parisien,
plutôt riche et les quartiers de l’est plutôt populaires. Alors, même si dans les faits la situation est plus
complexe que cela, on peut affirmer que ces inégalités environnementales comportent une dimension
raciale comme le démontre la géographie du saturnisme infantile : « la reconnaissance de cette
géographie a été lente. Qu’elle concerne principalement des populations subsahariennes a donné lieu,
dans un premier temps, à des explications « culturalistes » de la part des médias et des autorités. Le
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plomb se trouve dans les objets africains qui ornent ces logements, a-t-on par exemple entendu, ou
encore la structure des familles africaines concernées – famille nombreuse, polygamie, etc. – conduit
les enfants à être livrés à eux-mêmes. L’épidémiologie comparative a battu ces allégations en brèche.
Si en France les Africains subsahariens sont affectés par ce mal, en Grande-Bretagne il s’agit des
enfants d’origine indienne ou pakistanaise et aux États-Unis des enfants noirs. Conclusion : la culture
n’y est pour rien, le statut de minorité immigrée, la ségrégation spatiale et la position de classe y sont
pour tout ». Enfin, je terminerai sur un exemple que vous pourrez vérifier à Toulouse, et plus
précisément dans le quartier du Mirail, lequel est exposé aux risques industriels et pollutions en tout
genre plus que tout autre quartier de Toulouse, comme on a pu le voir après la catastrophe d’AZF. Ce
quartier a dû attendre de nombreux mois voire plusieurs années pour être « reconstruit » alors que
d’autre parties plus bourgeoises de la ville avaient été réhabilitées depuis longtemps. Juste pour
information, si vous voulez visiter l’incinérateur à déchets de la ville de Toulouse, il faut vous rendre…
au Mirail… Il convient cependant de souligner que cet incinérateur, via un système de conduites,
chauffe tout le quartier, malgré les 670 kg d'air pollué, 30 kg de Mâchefer, 30 kg de REFIOM et 50 kg
d’eau saturée en sels toxiques pour seulement 100 Kg de déchets brûlés. « Cette situation n’est pas
propre à Toulouse. Il existe en France 670 sites industriels classés Seveso. La plupart se trouvent à
proximité de quartiers populaires, pour la raison simple que le prix du foncier y est au plus bas. »
Post-colonialisme : Ensuite, comme exemple marquant du fait que le racisme environnemental
s’exprime sous ses formes les plus cruelles dans un contexte postcolonial, on ne peut manquer de
souligner le cas du Darfour ; pour lequel le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, a déclaré
dans une tribune du Washington Post de juin 2007 : « le conflit au Darfour est lié à des paramètres
climatiques : Ce n’est pas un hasard, déclare-t-il, si les violences ont commencé en période de
sécheresse». « Comme tous les conflits postcoloniaux, la guerre au Darfour est la résultante de
plusieurs facteurs enchevêtrés. Mais sur ce point au moins Ban Ki-moon a raison : l’écologie du conflit
est déterminante pour en comprendre le déclenchement et le déroulement. Plus précisément, le point
de vue de l’écologie politique est le plus adapté pour cerner la dynamique des facteurs en question. »
Au Darfour, le conflit a lieu entre fermiers sédentaires et nomades forcés de se sédentariser par une
sécheresse extrême accentuant ainsi la pression sur des terres et des ressources toujours moins
productives…
Racisme environnemental et esclavagisme : « la persistance du racisme environnemental dans le monde
social contemporain suppose de le replacer dans une perspective historique, une perspective de longue durée. À
l’époque moderne, le caractère inextricablement mêlé de la race et de la nature se manifeste dans un écosystème
particulier : la plantation esclavagiste. La plantation est un fait social total, qui ne laisse aucune sphère intacte.
La nature elle-même est saisie par sa logique, en tirer profit étant après tout sa finalité. Dans Misère de la
philosophie, Marx écrit ceci à propos de l’esclavage : L’esclavage direct est le pivot de notre industrialisation
contemporaine autant que les machines, les crédits, etc. […] Sans esclavage il n’y a pas de coton et sans coton
il n’y a pas d’industrie moderne. C’est l’esclavage qui a donné de la valeur aux colonies ; ce sont les
colonies qui ont créé le commerce mondial ; c’est le commerce mondial qui est la condition sine qua
non de l’industrie mécanisée à grande échelle. L’esclavage n’est pas un phénomène d’un autre âge,
que la logique du capital aurait définitivement surpassé. Il est l’une des matrices de la civilisation
industrielle dans laquelle nous évoluons. À ce titre, le type de rapports sociaux qui s’y développe
conditionne encore les sociétés actuelles. »
De plus, on peut également faire un lien clair entre impérialisme, colonisation, décolonisation et
inégalités environnementales dans le tiers-monde. En fait, l’attitude paternaliste des empires
coloniaux au moment de la décolonisation se fonde sur le fait que les populations de ces pays ne sont
pas capables de prendre soin de la nature. Mais cela n’est en fait qu’un discours de façade permettant
de garder la mainmise sur les ressources inestimables des anciennes colonies afin de pouvoir organiser
leur circulation vers la métropole. Impérialisme & écologie, même combat ?? On comprend à travers
ce cheminement dans l’histoire de la construction de l’écologie occidentale pourquoi cette dernière
est réticente à reconnaître la dimension sociale de l’environnement. Par conséquent, il est aisé de
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comprendre pourquoi le mouvement ouvrier entretien depuis les origines « un rapport ambivalent
avec les problématiques environnementale ». L’opposition entre Emploi & environnement est
destructrice, comme si se préoccuper de l’un ne pouvait se faire qu’au détriment de l’autre. Pour
autant, ces dernières années, dans les pays industrialisés, on assiste à un développement important
des politiques de Santé Sécurité au travail encouragées par les syndicats. Ne resterait-il plus qu’à
élargir cette notion au « cadre de vie hors travail » pour réconcilier emploi & environnement ? Lesquels
font partie du même écosystème… Ce serait, selon l’auteur, la naissance d’un mouvement « d’écologie
politique », dont le fondement résiderait dans « l’hybridation entre luttes syndicales &
environnementales et la construction d’alliances inédites, avec des associations de quartiers par
exemple. » Au travers de cet historique du racisme environnemental, l’auteur veut démontrer que les
inégalités environnementales & socio-économiques induites par le développement capitaliste sont
enchevêtrées et aggravées par la crise écologique. A partir de ce constat, on va voir ensuite les moyens
que le capitalisme met en œuvre, via son idéologie néolibérale, pour se prémunir contre les conflits
que génèrent ces inégalités écologiques. Anticorps #1 = La financiarisation de la nature.
II – FINANCIARISER LA NATURE : L’ASSURANCE DES RISQUES CLIMATIQUES
« La nature s’arrête de respirer dans le corps des marchandises » Alfred Sohn Rethel
Nous allons voir dans ce chapitre en quoi et pourquoi
les marchés financiers tendent de plus en plus à se
« brancher » sur la nature, avec une prolifération de
produit financiers tels que : marchés carbone, dérivés
climatiques, obligations catastrophe… Ces produits
ont pour rôle d’amortir les effets de la crise
écologique et de ses pendants socio-économiques sur
la valeur du capital et surtout l’évolution de ses taux
de profit. Nous verrons au fur et à mesure à quel point
le capitalisme est obnubilé par un niveau élevé de ses
taux de profits. Cette financiarisation de la nature
découle en droite ligne de la financiarisation du
capitalisme qui a explosé depuis la fin des années 1970 1. « De la part du capitalisme, la nature est
aujourd’hui l’objet d’une stratégie d’accumulation. L’assurance est une pièce centrale dans ce
dispositif. Le capitalisme est un système ambivalent. D’un côté, il est instable, car il génère de
l’innovation (la « destruction créatrice » chère à Joseph Schumpeter), de la mondialisation, de la lutte
des classes et des processus qui exercent un effet corrosif sur l’ordre social. D’un autre côté, le
capitalisme requiert de la stabilité, sans laquelle l’investissement ou la construction de marchés
rentables seraient inconcevables. Comment ces deux caractéristiques contradictoires du système,
l’instabilité et la stabilité, sont-elles réconciliées ? En bonne part grâce au mécanisme de l’assurance.
Celle-ci permet la prise de risques financiers, tout en protégeant l’investissement lorsqu’elle tourne
mal. Or, qu’arrive-t-il à ce mécanisme de l’assurance dans un contexte rendu de plus en plus incertain
par la crise environnementale ? » En fait, il en résulte une véritable fuite en avant, toujours plus vite &
toujours plus loin… Avant tout, un peu d’Histoire, « l’assurance des risques naturels remontent au seuil
de l’époque moderne voire de l’antiquité où on assurait les bateaux et leur marchandises contre les
naufrages. » En guise d’entrée en matière, une petite, mais non moins cruelle, « anecdote » : en 1781,
en plein océan Atlantique, un bateau négrier, le Zong, jette par-dessus bord 133 esclaves en justifiant
1 pour approfondir ce phénomène je vous conseille de lire « Homo Economicus » de D. Cohen
Stratégie d’accumulation : L’accumulation du capital est
un phénomène économique qui revêt deux aspects
principaux :au niveau macroéconomique, l'accumulation
du capital, comme facteur de production, et qui permet
d’augmenter la production totale de l’économie ; au
niveau individuel, ou au niveau d’une hypothétique « classe
possédante » selon la terminologie marxiste, l’épargne
accumulée porte aux mains de quelques-uns l'ensemble
des biens d’un pays. Ce concept est issu de l'économie
politique classique chez Adam Smith et David Ricardo.
Selon Marx, l'accumulation du capital entraîne une baisse
à long terme du taux de profit, d'où une baisse
tendancielle du taux de profit. wikipedia
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ce geste par le fait qu’en raison d’imprévus au cours de la traversée les vivres et l’eau venaient à
manquer, c’était donc une question de survie pour l’équipage… Les propriétaires du bateau réclament
donc un dédommagement pour la « marchandises » perdu en se prévalant de la police d’assurance
souscrite sur ce voyage. Les assureurs commandèrent alors une enquête. En 1783, un procès eut lieu ;
lequel, soit dit en passant, traita cette affaire non pas comme le meurtre de 133 personnes mais
comme un litige assurantiel. Les propriétaires du bateau furent déboutés car il fut fait la démonstration
que le stock de vivres résiduels étaient en fait suffisant au moment des faits et que le retard pris par
le bateau était imputable à des erreurs de pilotage du capitaine. Mais détrompez-vous, rien
d’involontaire ou de fortuit ; en fait, le capitaine avait fait le calcul suivant : « le montant de l’assurance,
que ce dernier espérait toucher, serait supérieur à celui qu’il aurait obtenu en vendant les esclaves à
son arrivée aux Amériques. Ce massacre suscita l’émotion de nombre de contemporains. C’est l’un des
actes fondateurs du mouvement pour l’abolition de l’esclavage ». Cette anecdote résume bien le fait
que la colonisation et l’esclavage sont depuis toujours lié au secteur de l’assurance. C’est d’ailleurs le
commerce triangulaire qui fut la première source de revenus importants pour le secteur de l’assurance,
lui permettant par la même le développement de son activité. Depuis l’origine, l’expansion mondiale
du capital expose ce dernier aux aléas naturels et climatiques qui mettent en péril l’investissement. Il
faut donc trouver un moyen pour protéger l’investissement de ces risques : on élabore donc le
dispositif de l’assurance qui suppose que si une marchandise vient à être détruite dans certaines
conditions, l’investisseur percevra un dédommagement, c’est-à-dire que quelque chose de la valeur
capitaliste du bien subsiste. « L’expansion du capitalisme, donne lieu à une sophistication croissante
des techniques assurantielles. L’émergence d’un marché mondial, l’impérialisme auquel il donne lieu
et l’assurance contre les risques naturels (et d’autres types de risques) sont en ce sens
inextricablement liés. » Quand l’assurance engendre la finance et vice versa : étant donnée l’expansion
du commerce mondial depuis le XVIIème siècle à nos jours, la condition indispensable à sa survie est
l’avènement de la finance ou la capacité à « anticiper sur des profits futurs ». Ce qui signifie ni plus ni
moins le fait de spéculer sur des gains hypothétiques pour encourager l’investissement. Or cette
finance ne peut survivre sans l’appui de l’assurance, d’une part parce que cette dernière couvre le
risque financier et d’autre part parce que l’assurance représente un domaine d’investissement
rentable en soi en raison de la quantité des capitaux qui affluent vers ce secteur. Enfin ce phénomène
est augmenté par la croissance économique puisque plus il y a de bien produits et en circulation, plus
la valeur à assurer est grande et plus le besoin en investissement nécessaire au soutien de cette
économie devient important… Il est donc facile d’en déduire que l’accroissement de biens génère une
exposition accrue de ces derniers aux risques climatiques (ouragans, tremblements de terre,
inondations, sécheresses, incendies, ou pandémies,…). A ce même titre, la croissance démographique
mondiale du XXème siècle a permis de « soumettre » les personnes au développement du marché de
l’assurance via l’assurance vie. Même si on a assisté à des oppositions à cette « quantification de la
vie » entre la fin du XIX et la moitié du XX siècle, la marchandisation capitaliste a, depuis lors, fait son
œuvre. D’ailleurs depuis deux ou trois décennies le marché de l’assurance des catastrophes naturelles
est en pleine expansion ; ce qui a donné naissance encore plus récemment « aux titres financiers de
transfert des risques climatiques », dont les « dérivés climatiques » (weather derivatives) ou les «
obligations catastrophe » (catastrophe bonds, ou cat bonds) qui en sont des exemples. Ces titres
témoignent de l’imbrication croissante de la finance et de la nature. Ils relèvent de ce secteur de la
finance désormais connu sous le nom de finance environnementale. Ils confient l’assurance des
risques climatiques, et tout ce qui l’entoure – primes d’assurance, évaluation des risques,
dédommagement des victimes… – aux marchés financiers. Là où, précédemment, le marché de
l’assurance reposait sur les trois composantes que sont les assureurs, les réassureurs, et l’État comme
organisateur du marché au plan légal et assureur en dernier ressort, un quatrième acteur est venu
s’ajouter à la liste : la finance. ». La montée en puissance de cette finance environnementale prend sa
10
source dans l’enchevêtrement de la crise économique de longue durée dans laquelle nous nous
trouvons depuis le début des années 1970 et la fin des trente glorieuses (dont la crise de 2008 n’est
autre que son expression la plus récente) et de la crise écologique qui « accroît l’instabilité du
capitalisme et requiert par conséquent que le dispositif de protection de l’investissement qu’est
l’assurance – la finance plus généralement – soit renforcé». Cette imbrication engendre une
diminution marquée et durable du taux de profit (ce qui est parfaitement inacceptable dans l’idéologie
néolibérale) et l’augmentation des inégalités. Face à cet état de fait, le capitalisme applique deux
« anticorps » à ce phénomène : la privatisation massive, c’est-à-dire « l’assujettissement à la logique
de profit » de tous les pans de nos vies et de la société qui échappaient auparavant à la loi des marchés
(services publics, biodiversité, les savoirs, la génétique humaine & animales,…) et la financiarisation :
c’est-à-dire le fait d’investir dans l’économie fictive et la réalisation de profits tout aussi fictifs
(expliquant du même coup les crises économiques cycliques inhérentes à l’explosion des bulles
financières) en lieu et place de l’économie réelle dont le taux de profit est déclinant. Du fait de la
multiplication et de l’aggravation des désastres naturels, la crise écologique conduit à un gonflement
du coût global de l’assurance. Ce qui, à nouveau, exerce une pression négative sur le taux de profit.
Ceci conduit les compagnies d’assurance et de réassurance à développer de nouvelles stratégie
assurantielles en s’appuyant sur la titrisation des risques climatiques pour disperser le risque. Par la
même occasion, elle permet au capitalisme de trouver de nouvelles opportunités de profit…
Tout ceci nous amène à préciser les mécanismes et
les principes de l’assurance pour en cerner les
tenants & aboutissants. Le système assurantiel
repose sur deux piliers fondateurs qui permettent sa
pérennité :
- 1) La mutualisation des risques : « le
nombre d’assurances contractées par l’assureur doit être suffisamment important pour
que les primes qu’il perçoit soient supérieures aux montants des indemnités qu’il doit
verser à ses assurés en cas de sinistre. Le remboursement des sinistres ne doit en d’autres
termes pas conduire à son insolvabilité, ce qui implique qu’il possède à tout moment les
liquidités suffisantes. Il est également nécessaire que les risques assurés soient faiblement
corrélés, autrement dit que la survenue des aléas soit statistiquement indépendante. » Or,
avec le changement climatique, on assiste à la multiplication de nouveaux risques et donc
à une « hypercorrélation » de ces derniers faisant peser la menace de l’insolvabilité sur les
assureurs (par exemple, un attentat terroriste, un accident nucléaire ou un ouragan
peuvent toucher des milliers voire des millions de personnes, et de plus, ils impactent
plusieurs lignes assurantielles simultanément : assurance vie, rente invalidité, interruption
d’activité économique, dommages aux biens et aux personnes). On assiste d’ailleurs
souvent à des menaces de retrait des assureurs de certains secteurs de l’assurance (trop
coûteux) comme cela a été le cas aux Etats-Unis après les attentats 11 septembre. En fait
cette menace n’est qu’une manœuvre pour faire pression sur l’Etat (qui est l’assureur
souverain en dernier ressort) pour qu’il prenne en charge une part plus grande du risque.
Ceci est tout simplement le reflet du dogme du capitalisme néolibéral : « privatisation des
bénéfices, socialisation des pertes ».
- 2) L’inversion du cycle de production : « Ce principe stipule que l’assuré paie la prime
avant la survenue de l’aléa, sans savoir si ce dernier surviendra, quand il surviendra et à
combien s’élèvera le montant des pertes. Il est naturellement par définition exclu
La financiarisation de l’assurance résulte de l’apparition au
cours du dernier siècle de « nouveaux risques », parmi lesquels
le changement environnemental. Non que ces risques aient
été absents de l’histoire du capitalisme jusque-là, bien au
contraire. Mais leur intensification et leur concomitance
confèrent à notre époque un caractère inédit.
11
d’assurer un aléa déjà survenu, ou dont on sait à coup sûr qu’il surviendra. Le caractère
incertain de ce qui fait l’objet de l’assurance est par conséquent décisif. »
L’hypercorrélation des risques liés au changements climatique et aux catastrophes naturelles a amené
les assureurs et les Etats - car la structure du système assurantiel fait peser en dernier recours le poids
du risque sur l’Etat - à développer un système de titres financiers des risques climatiques dont un des
plus marquant est appelé Cat Bonds ou Obligations catastrophe.
Assurance Réassurance Etat
Ce genre de titre existe depuis 1994 et Ils portent sur les catastrophes naturelles mais aussi sur les
événements engendrant une surmortalité (type pandémie). Voici comment ils fonctionnent : « une
instance – assureur, réassureur, État… – émet une obligation par le biais d’une banque
d’investissement, obligations qui sont vendues par elle à des investisseurs. Comme pour toute
obligation, l’instance en question verse des intérêts à ces derniers, en contrepartie de l’argent qu’ils
lui prêtent. Si la catastrophe survient, les investisseurs perdent leur argent, qui servira à rembourser
les sinistrés, c’est-à-dire plus précisément les assureurs et réassureurs qui eux rembourseront les
sinistrés. Au cas où elle ne survient pas, l’investisseur empoche les intérêts. Plus précisément,
l’instance qui émet un cat bond crée une société dédiée ou un « fonds commun de créance ». Cette
société, en général localisée dans un paradis fiscal, part
à la recherche d’investisseurs, dont les montants qu’ils
lui versent sont placés en titres. En cas d’événement
catastrophique déclencheur, l’argent investi et les
bénéfices issus du placement vont à l’instance émettrice.
Le déclencheur peut être de plusieurs types : des
dommages plus élevés qu’un seuil prédéterminé, une
cascade d’événements, par exemple la succession de trois cyclones dans un temps rapproché au même
endroit… Parmi les sociétés spécialisées dans la mise en place de cat bonds, on trouve notamment
Goldman Sachs Asset Management, Credit Suisse Asset Management, Axa Investment
Managers… Comme tout titre financier, les cat bonds sont évalués par des agences de notation :
Standard and Poor’s, Fitch et Moody’s principalement.» Il existe même une bourse pour ces titres,
Catex, située dans le New Jersey. Cela permet d’échanger ces titres sur un marché financier pour en
disperser les risques et ainsi créer des opportunités de profit. De plus, les marchés financiers ont une
capacité d’absorption des chocs plus importantes que le simple marché de l’assurance &
réassurance : « On estime à 350-400 milliards de dollars les montants globaux destinés à l’assurance
et à la réassurance à l’échelle globale aujourd’hui. Or le marché obligataire aux États-Unis dépasse à
lui seul 29 000 milliards de dollars. Le marché mondial des actions capitalise quant à lui 60 trillions de
dollars ». En cas de cataclysme de type Katrina (estimé à ce jour à 100 milliards de dollars), la titrisation
financière du risque en le dispersant permet d’éviter la faillite de plusieurs assureurs voire même d’un
Etat2. Il va sans dire que pour émettre des titres financiers à des prix cohérents les assureurs ont besoin
de « pricer » les risques, c’est-à-dire de probabiliser l’incertitude afin de donner un prix au risque. Dans
ce cadre, les sociétés d’assurance font appel à des agences de modélisations du CC (parfois basée au
Bermudes et pour la plupart états-uniennes) qui elles même font appel à des scientifiques. Ce qui
apparaît donc ici, c’est l’interpénétration sournoise du monde financier et scientifique, laquelle prête
largement à caution et fait peser de gros risques de conflits d’intérêts puisque ces agences de
2 Pour plus de précisions sur le programme multi cat bonds du Mexique, le livre « La Nature est un champ de bataille » est en libre accès sur internet
Swiss Re a mis en place un programme de titrisation
intitulé « Vita Capital IV Ltd. », qui lui permettrait de
recevoir jusqu’à 2 milliards de dollars de
dédommagement en cas de surmortalité liée à ce type
de maladie. L’assureur français Axa possède un
programme similaire, intitulé « Osiris Capital ».
12
modélisations sont rémunérés par les sociétés d’assurance… Cela résume le phénomène de
« marchandisation de la nature via la modélisation».
Ensuite, il existe aussi une autre possibilité de formation de valeur capitaliste basé sur la nature : les
marchés carbone, ou marchés des droits à polluer et leur système de quotas et compensation. Je ne
rentrerai pas dans le détail du marché du carbone que l’on a déjà largement vu en classe. L’auteur en
fait une assez large critique dans ce livre. Selon lui, sans pourtant le considérer comme une bonne
solution, mais afin qu’il soit, à minima, contraignant et peut-être efficace (c’est-à-dire, à tout le moins,
empêcher les firmes de réaliser du profit avec les quotas trop généreusement alloués), il faudrait
réduire drastiquement le nombre de quotas alloués, ou faire pression sur les industriels pour
relocaliser en Europe des activités de production afin
qu’elles soient soumises à une législation
environnementale plus stricte. Mais pour ce faire, il
faut un ingrédient de poids qui ne court pas les rues
de nos jours, j’ai nommé : le courage politique (qui
plus est à l’échelle continentale)…
Dans un troisième temps, j’évoquerai le cas de la
microassurance dans les pays en développement
(PED) : « La microassurance, comme son nom
l’indique, porte sur de petits montants et concerne
des populations pauvres, qui toutefois peuvent
encourir des pertes importantes du fait de désastres naturels. Comme dans le cas du microcrédit, la
gestion est communautaire, au sens où la responsabilité du paiement des primes est collectivement
contrôlée. Elle concerne divers aléas : santé, pertes de récoltes ou de bétail, inondations… et inclut
entre 150 et 200 millions de personnes à ce jour ». La microassurance part aussi de l’idéologie de
« l’empowerment ou responsabilisation » des pauvres dans le but de leur faire reprendre le contrôle
sur leur destinée. Etant donnés, les principes de l’assurance évoqués plus haut, les conditions pour
rendre viable ce marché sont que les primes d’assurance soient relativement modiques afin que les
pauvres puissent y avoir accès et que le marché concerné soit composé de millions de personnes. Ceci
afin que l’agrégation des primes puisse couvrir les risques, rende l’opération faisable et surtout
rentable financièrement. De plus, pour sécuriser l’opération, les assureurs exigent la plupart du temps
que l’Etat subventionne ces primes d’assurances afin de définitivement permettre aux populations
défavorisées d’accéder à ce marché. Ce système de subvention repose sur le mécanisme qui est la
marque de fabrique du néolibéralisme : le Partenariat Public Privé (PPP) soit la privatisation des
bénéfices et la socialisation des pertes. Pour convaincre les Etats, les sociétés d’assurance use d’un
argument implacable : «Un paysan non assuré est par exemple moins productif. Sujet aux aléas de la
nature ou de la maladie, il aura tendance à moins investir dans l’outillage et les engrais et donc sa
productivité à stagner. En outre, il est de toute façon en dernière instance à la charge de l’État, car si
sa récolte est détruite ou s’il tombe malade, c’est son soutien qu’il sollicitera. C’est la raison pour
laquelle Swiss Re suggère que l’État rende ces assurances privées obligatoires. Les cat bonds dits «
souverains », qui sont émis par des États en partenariat avec des assureurs privés sont l’une des façons
dont se nouent ces partenariats public-privé. Comme l’a montré Michel Foucault, le néolibéralisme a
peu à voir avec le « laisser faire » et tout à voir avec l’intervention permanente de l’État en faveur
des marchés ». Et pour pousser les Etats en développement à conclure ces partenariats on peut bien-
sûr compter sur toutes les grandes institutions internationales telles que : les Agences Nationales de
Développement, le FMI, la Banque Mondiale, le Programme Alimentaire Mondial. D’ailleurs, souvent,
au sein de ces organisations internationales « la gouvernance est ainsi faite que les intérêts des pays
pauvres sont (supposés être) représentés par des pays riches ». Malgré tout, Il convient de nuancer
Le plus volumineux système d’échange des droits à polluer
au monde est le « Système communautaire d’échange des
droits à polluer de l’Union européenne », ou European Union
emission trading system (EU ETS), qui vise à atteindre les
objectifs de réduction des gaz à effets de serre auxquels s’est
engagée l’UE dans le cadre du protocole de Kyoto. Le
Chicago Climate Exchange, créé en 2003, est le plus ancien.
Selon la Banque mondiale, le marché des droits à polluer à
l’échelle globale est passé de 10 milliards de dollars en 2005
à 144 milliards en 2009, la crise l’ayant ensuite stabilisé à
autour de 142 milliards
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légèrement le propos de l’auteur, bien que celui-ci soit tout-à-fait fondé. Ce que l’auteur décrit est le
régime néolibéral en matière d’assurance adossé aux risques du CC, lequel est largement majoritaire.
Néanmoins, en termes de microassurance on peut aussi donner l’exemple suivant qui permet d’allier
la gestion d’un problème de collectivité à l’accès au soin : comme dans ce pays d’Asie du sud-est où le
remboursement des soins hospitaliers est soumis au fait que la personne n’abandonne pas n’importe-
où ces propres déchets afin qu’ils soient triés. En tout état de cause, on peut toujours argumenter sur
le fait que dans une économie globale non-capitaliste, ces PED pourrait développer des politiques
publiques plus fortes et indépendantes et ainsi se doter d’infrastructures solides en termes de gestion
de l’eau, des déchets, de l’industrie,…
Enfin, pour conclure cette seconde partie, l’auteur explique les liens de cause à effet qui existent entre
la crise écologique et la crise fiscale qui frappe les Etats. « La financiarisation de l’assurance des
catastrophes climatiques par les États a une raison profonde, dont l’examen permet de mettre en
rapport les questions écologiques avec le capitalisme et ses crises. Un objectif du programme « multi-
cat » mexicain, de l’aveu même de ses concepteurs, est de « protéger les finances publiques » du pays
émetteur, ou encore, d’« immuniser leur politique fiscale » ». On parle ici de « résilience financière »
des Etats face aux risques du CC. Une caractéristique de la crise économique actuelle est
l’accroissement exponentiel de la dette souveraine des Etats, et particulièrement de celles des Etats
du «centre de l’économie mondiale », Etats-Unis & Europe en tête. Ce n’est donc pas une coïncidence
si ces programmes obligataires ont été finalisés en 2009 alors même que la plus grave manifestation
de la crise capitaliste depuis la Grande Dépression de 1929 faisait rage… «Cet endettement est le fruit
de baisses d’impôts massives, d’inspiration néolibérale, pour les plus riches, de diminutions
significatives des rentrées fiscales du fait du ralentissement de la croissance et du sauvetage des
banques et d’autres institutions financières par l’État au moment de la crise. La crise des dettes
souveraines intervient dans le contexte de ce que certains auteurs, parmi lesquels James O’Connor et
Wolfgang Streeck, ont appelé la « crise fiscale de l’État ». Cette expression désigne le fait que les États
n’ont plus les moyens financiers de leurs politiques et qu’il s’agit là d’une donnée structurelle, et non
pas seulement passagère, apparue depuis le dernier quart du XXe siècle. Cette donnée structurelle a
été encore aggravée par la crise des dettes souveraines. » Cette analyse permet de mettre en avant
les 2 « obligations mutuellement contradictoires » auxquelles font face les Etats depuis le début de
années 1970 : d’un côté, ils doivent consolider leurs finances publiques afin de pouvoir emprunter à
des taux toujours plus bas, et ainsi éviter d’être submergés par le poids du paiement des intérêts de la
dette. Les marchés, eux, se chargent d’imposer aux Etats la réduction des déficits et de la dette. De
l’autre, les Etats ont pour mission supérieure de continuer à procurer à leurs peuples des niveaux de
service élevés dans les services publics (l’Education, la Santé, les Retraites,…) via un investissement
public soutenu et régulier. En effet, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale au moins, les exigences
des populations en termes de bien-être ne cessent de croître. Le point d’achoppement entre ces deux
missions se situe dans le fait que le taux de croissance reste historiquement bas depuis plusieurs
décennies, rendant par conséquent impossible la conciliation de ces deux obligations. « C’est ce qui
conduit Streeck, à affirmer que le capitalisme et la démocratie ne seront plus compatibles pour
longtemps ». Ce sont donc ces éléments qui plongent les Etats dans une crise fiscale durable, laquelle
est étroitement liée avec la crise environnementale. De ce fait, les Etats ont de plus en plus de mal à
faire face aux coûts des catastrophes climatiques de façon traditionnelle, autrement dit par l’impôt.
Ce qui sera aggravé par la multiplication des phénomènes dus au dérèglement climatique. « C’est là le
point de fusion de la crise écologique et de la crise financière ». On peut donc aisément comprendre
que les PED sont doublement plus exposés que les pays riches étant donnée leur fragilité financière et
le fait qu’ils se trouvent souvent dans des régions du monde plus sujettes aux phénomènes climatiques
extrêmes (Exemple du Pays-Bas et du Bangladesh qui font face au même type de problèmes mais qui
14
n’ont pas les mêmes moyens pour y répondre). De plus, lorsque se produit une catastrophe, le
territoire concerné et son activité économique sont durablement impactés. La croissance ralentit,
diminuant de façon subséquente les rentrées fiscales qui lui sont inhérentes. S’ajoute à cela les
dépenses en termes d’assurance chômage et autres prestations sociales qui augmentent
proportionnellement. La crise écologique et le dérèglement climatique qui en découle ne manqueront
donc pas de dégrader la résilience financière des Etats. « La crise fiscale de l’État le conduit à emprunter
de plus en plus sur les marchés financiers, afin de financer ses dépenses et investissements et de
rétablir fictivement l’équilibre de ses comptes. C’est l’une des causes de la financiarisation du capital.
Cette financiarisation procède – notamment – du renchérissement des conditions de production et
des coûts croissants générés par l’exploitation de la nature » (d’autant plus que du fait de la raréfaction
des ressources leurs prix augmentent). « Le capitalisme exploite la nature, ce qui occasionne des
dépenses de plus en plus importantes pour l’État, qui s’en remet aux marchés financiers pour y faire
face. […] La crise fiscale de l’État, la crise environnementale et la financiarisation sont donc trois
phénomènes étroitement liés ».
La financiarisation, comme on vient de le voir est donc une des réactions du système capitaliste face à
la crise écologique. Dans la troisième partie qui va suivre, nous verrons comment le capitalisme tente
de se prémunir contre les effets de cette crise. «Du fait de l’accroissement des inégalités qu’elle
suscite, la crise écologique induit des conflits armés d’un type nouveau. Elle suscite des évolutions dans
les modalités de la violence collective, qui inaugurent une ère nouvelle dans l’histoire de la guerre. En
plus de se financiariser, la crise écologique se militarise. Les militaires sont d’ailleurs conscients de
cette évolution. Depuis quelques années, ils intègrent en effet les conséquences du changement
climatique dans leurs analyses stratégiques… »
III – LES GUERRES VERTES, OU LA MILITARISATION DE L’ECOLOGIE
Dans cette partie, l’auteur affirme qu’à la différence des politiques qui sont enfermés dans un « court-
termisme » dévastateur, les militaires, comme la finance d’ailleurs, sont deux des seules « fractions
des élites » à se projeter à moyen et long-termes et donc en mesure de prendre en compte la
dimension climatique dans leurs analyses stratégiques, lesquelles portent en moyenne sur des
périodes de 30 à 50 ans. « C’est par
exemple le temps qui sépare
généralement la conception d’une
nouvelle arme de son emploi sur le champ
de bataille. » « En revanche, la classe
politique est actuellement inapte à
intégrer le changement climatique dans
ses calculs. L’objectif quasi exclusif de ses
représentants est en effet de se faire
réélire à l’occasion de scrutins électoraux
espacés de quelques années tout au plus,
ce qui fait qu’elle est peu à même de
prendre en considération des problèmes de plus long terme ». De plus, elle est également incapable
de faire face à des situations d’incertitude qui paralyse totalement ses prises de décisions et créent
ainsi un immobilisme et un populisme destructeur. A contrario, l’incertitude est inscrite dans les gènes
des militaires, ce qui renforce leur capacité à se confronter aux conséquences du CC, comme le
« En 2010, le document de National Security Strategy (NSS) américain, signé
de la main de Barack Obama, inclut pour la première fois une section
consacrée aux implications militaires du changement climatique. En 2009,
la CIA a inauguré un Center for Climate Change and National Security. Il a
pour vocation de réfléchir aux effets du changement climatique sur la «
sécurité nationale », et de pourvoir en informations stratégiques les
négociateurs américains qui participent aux réunions internationales sur la
question. En 2010, la Quadriennial Defense Review (QDR) publiée par le
Pentagone a consacré un chapitre au changement environnemental. Ce
rapport est le principal document de doctrine militaire élaboré par le
département de la Défense»
15
montrent, depuis la deuxième moitié des années 2000, les nombreuses publications3 dans les revues
et rapports militaires états-uniens, français, britanniques, chinois, indiens…(Revue de défense
nationale française, Armed Forces Journal,…). « L’un d’eux, états-unien, s’intitule « The age of
consequences. The foreign policy and national security implications of global climate change ». L’« âge
des conséquences » dont il est question dans son titre – en référence à une phrase de Winston
Churchill prononcée à la veille de la Seconde Guerre mondiale – est défini comme celui qui verra «
l’intersection du changement climatique et de la sécurité des nations ». En fait, les militaires
imaginent trois scénarios pour le XXIème siècle :
1) un changement climatique « prévisible », avec augmentation des températures globales de 1,3 ºC d’ici 2040
2) un changement climatique « sévère », avec accroissement des températures de 2,6 ºC, donnant lieu à des événements naturels « non linéaires », c’est-à-dire imprévisibles
3) un scénario « catastrophique », fondé sur une augmentation des températures de 5,6 ºC d’ici 2100, menaçant la « cohésion interne » des nations.
Il ne faut pas sous-estimer le poids de ces publications, notamment celles de Foreign Affairs, qui n’est
autre que le reflet de la politique diplomatique en vigueur à Washington… C’est d’ailleurs dans cette
revue que Samuel Huntington a annoncé le « choc des civilisations » au début des années 1990. En fait
le CC touche très physiquement les Armées lorsqu’il fait planer le risque d’engloutissement de bases
militaires au milieu du Pacifique ou de l’océan Indien, mettant en péril la capacité des troupes et
bâtiments de guerres à se déployer rapidement sur toute la surface du globe. Cela pousse les militaires
à développer de nouvelles stratégies de déploiement telle que le « seabasing4 ». Les militaires étudient
déjà les possibilités d’évolution tactiques et logistiques pour s’adapter au CC. De plus, depuis 2008,
même l’OTAN considère le CC comme l’un de ses nouveaux « horizon stratégiques » car selon
l’organisation transatlantique, aucun pays n’a les moyens nécessaires pour affronter seul les défis du
CC étant donné ses menaces qui, par nature, sont
transnationales. «C’est pourquoi, selon ses dirigeants,
l’OTAN pourrait à l’avenir jouer un rôle clé dans la gestion
des effets du changement climatique sur la « sécurité
collective ». Après la fin de la guerre froide, l’organisation
transatlantique se cherchait une raison d’être : elle
semble l’avoir trouvée ». Pour contrer les effets du CC,
les militaires sont d’ailleurs partisan de la géo-
ingénierie5. A ce jour, avec raison et au regard de la
morale, il convient de raison garder sur ces technologies
car nul ne sait, au vu de la complexité du système
climatique, quels effets secondaires cela pourrait
entraîner. Nonobstant, faut-il pour autant rejeter en bloc
3 en 2010, numéro spécial sur la « géostratégie du climat » ainsi que sur la notion de « sécurité naturelle ». Ce dossier, préfacé par Michel Rocard, contient des articles aux titres évocateurs : « Quand la sécurité devient verte » ou « Climat : enjeu de sécurité ou contrôle stratégique ? » ; Le Conseil de sécurité des Nations unies a dédié une séance au climat comme « problème de sécurité » en avril 2007. […] L’ONU examine aussi l’opportunité de créer des « casques verts », visant à désamorcer les conflits liés au changement climatique. Le secrétaire général Ban Ki-moon s’est exprimé en faveur de cette initiative. 4 Pour des précisions sur la notion de seabasing, le livre « La Nature est un champ de bataille » est en libre accès sur internet 5 Voir lien dans section « pour aller plus loin » à la fin de cette fiche de lecture
16
toutes ces propositions si, pour ne pas engendrer une fuite en avant, elles étaient conjuguées avec de
vraies politiques de réduction des émissions de GES et de mitigation du CC ? La question reste, selon
moi, ouverte au débat.
En fait, à travers ces premiers éléments, on se rend bien compte que le climat est devenu un enjeu
diplomatique et géopolitique stratégique pour toutes les nations du monde et notamment pour les
puissances occidentales et les autres grandes puissances telles que la Chine, l’Inde, le Brésil, la Russie
et l’Arabie Saoudite. Dans ce cadre, les forces armées pourraient jouer le rôle de « spécialistes du
chaos », puisque, comme la recrudescence des phénomènes extrêmes conjuguée à la croissante
exposition de populations à ces aléas le laisse présager, la crise écologique devrait conduire à la
fragilisation des institutions étatiques, et tout particulièrement dans les PED. Dans ces cas-là, l’armée
sera certainement la force la plus efficace et la plus à même d’intervenir dans les situations de chaos
et de désordre qui résulteront de ces catastrophes naturelles. « Des évolutions de cet ordre sont en
particulier attendues dans les trois zones d’intérêt stratégique de l’Union européenne : le bassin
méditerranéen, l’Asie du Sud-Ouest et l’Arctique». Pour remettre en perspective cette analyse avec la
doctrine du tout capitaliste, on peut signaler que le néolibéralisme fonctionne sur une « stratégie
d’accumulation » du capital, laquelle est mise en péril en temps de crise (économique, sociale &
environnementale). Cela nécessite donc qu’une partie de la classe dominante ou « hyperclasse »6,
dont les haut responsables militaires font partie intégrante, en défende les intérêts. Le niveau de
préparation et les moyens à la portée des militaires pour faire face aux défis de cette crise semblent
leur conférer une longueur d’avance pour prendre le leadership dans la gestion des événements. A ce
sujet, l’auteur cite le philosophe Hans Jonas, lequel défend l’argument que « l’humanité devra peut-
être à l’avenir « accepter comme prix nécessaire pour le salut physique une pause de la liberté». En
liberté, l’humanité court à sa perte, car elle ne peut s’empêcher d’infliger des dommages
irréparables à son milieu. Seule une « dictature bienveillante » est à même de prendre les mesures
qui s’imposent pour que son « salut physique » soit assuré. C’est ce que Jonas appelle « la tyrannie
comme alternative à l’anéantissement physique ». Rien n’indique a priori que cette tyrannie sera
militaire. Mais le degré de préparation des armées face à la crise écologique laisse supposer qu’elles
pourraient être de sérieux candidats pour en prendre la tête. L’adaptation au changement
environnemental, en tous les cas, comportera une dimension militaire décisive ». Et ceci notamment
parce que le CC agit comme catalyseur de risques ou autrement dit comme « multiplicateur de
menaces » (raréfaction des ressources en eau, expansion d’épidémies, accroissement des inégalités,
corruption,…) et que les pénuries liées à la multiplication de ces menaces entraîneront des
déplacement de populations massifs intra et inter-nations. Ces flux de populations déplacés génèrent
une urbanisation grandissante, on peut par exemple se concentrer sur les conséquences de la pénurie
d’eau dans les PED pour illustrer ce phénomène : en rendant l’accès à la ressource en eau aléatoire,
ces pénuries réduiront drastiquement la productivité de l’agriculture locale et poussera les paysans à
l’exode rural pour s’installer dans le « bidonville global ». La crise climatique participe donc à
l’urbanisation de la guerre contemporaine. Et par voie de conséquence, cette urbanisation galopante
et non-maîtrisée dans les PED, et de façon encore plus marquée dans les « failed states ou Etats
faillis »7, fournit un terreau fertile à tous les extrémismes et au terrorisme par le mécanisme qui suit :
la raréfaction des ressources élémentaires et les catastrophes naturelles affaiblissent encore plus les
Etats faillis, ce qui permet aux réseaux terroristes d’avoir une emprise grandissante sur les populations
et les économies de ces pays. On appelle parfois ce phénomène « extrémisme opportuniste » car les
terroristes tirent profits de l’interaction des conditions sociales et naturelles des populations
concernées ». Enfin, le terrorisme et le CC ont en commun la particularité d’être des phénomènes
6 Pour une définition plus en profondeur de cette notion, voir « Homo Economicus » de D. Cohen 7 Voir lien dans la rubrique « pour aller plus loin » à la fin de cette fiche de lecture
17
transnationaux - avec des rapports de causes à effet – que les militaires pensent donc conjointement.
Et cet élément se voit renforcé par le fait que le terrorisme nuit au commerce mondial en mettant en
danger les chaînes d’approvisionnement ; le « paradigme stratégique » de la lutte contre le terrorisme
(qui date de l’après-guerre Froide) est donc intimement liée à la protection des intérêts capitalistes.
CQFD : on reconstitue ici le triptyque : Capital – Etat (ici les forces armées) – Nature…
On retrouve plus ou moins les mêmes causes produisant les mêmes effets dans le cas des «réfugiés
climatiques» : la crise écologique entraîne l’apparition d’une crise socio-économique et politique
capable de déstabiliser gravement tant les pays de départ comme les pays d’accueil. «On estime à
l’heure actuelle à 25 millions le nombre de réfugiés climatiques dans le monde. Les prévisions
divergent sur les perspectives d’avenir, mais certains analystes prévoient entre 50 et 200 millions de
réfugiés de ce type à l’horizon 2050». Point important à signaler, la notion de réfugié climatique n’est
pas reconnue par toutes les organisations internationales ; pour exemple, la Haut Commissariat des
Nations Unies pour les Réfugiés ne reconnaît pas à ce jour cette catégorie de réfugiés alors que, de son
côté, le Programme des Nations Unies pour l’Environnement a mentionné pour la première fois ce
terme en 1985. Dans le cas du GIEC, le terme apparaît dans le rapport de 2007, et on retrouve aussi
cette notion dans le « rapport Stern » de 2006. Il faut aussi préciser la différence entre migrant et
réfugié climatique : dans le 1er cas, il s’agit d’une volonté personnelle alors que dans le second cas,
l’individu est forcer de migrer. En général, les causes de cette migration sont les catastrophes
naturelles, la hausse du niveau des mers, ou encore la raréfaction de ressources, hydriques en
particulier. C’est d’ailleurs montée des océans qui aura le plus d’impact sur ces migrations si le
réchauffement climatique continue sur cette tendance étant donné que les 2/3 de la population de la
planète vivent sur où à proximité du littoral. A la différence de ce que l’on pourrait penser, l’essentiel
des migrations climatique se feront de façon interne aux pays de départ et non vers l’étranger.
Aujourd’hui on assiste à de nombreuses initiatives nationale ou continentale afin de se prémunir
contre l’afflux massifs de réfugiés : comme en Inde ou aux Etats-Unis, pays dans lesquels on a élevé
des murs long de plusieurs milliers de kilomètres respectivement avec le Bangladesh et le Mexique, ou
encore en Europe où des parlementaires français
préconisent pour assurer la « sécurité » de l’Europe
une surveillance navale européenne de la
Méditerranée en vue de « gérer les flux migratoires.
Dans tous les cas susdits, on ne s’occupe de traiter que
la conséquence et pas la cause de ces migrations
climatiques…
Cependant, comme on peut le voir depuis la fin des
années 1980, nous assistons à la fin des guerres
« conventionnelles », c’est-à-dire que les nouveaux
conflits s’accompagnent la plupart du temps
d’interventions non-combattantes afin de pacifier la
population autochtone et ainsi limiter les risques de
naissance de foyers de terrorisme. De plus, les forces
armées interviennent aussi de plus en plus sur le terrain de catastrophes naturelles pour des
opérations humanitaires (Haïti, les Philippines, Katrina,…). On assiste aussi à une privatisation des
armées liant parfois de façon tendancieuse des intérêts nationaux à des intérêts privés (on le voit par
exemple avec le poids économique et politique que peut avoir le complexe militaro-industriel aux
USA). «Le néolibéralisme n’est pas étranger à cette tendance. La dynamique de la sous-traitance qui
le caractérise conduit les grandes entreprises à déléguer une partie de leur activité, afin de réduire
leurs coûts. Il en va de même dans le domaine militaire ».
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Avant de passer à la géopolitique des ressources et à la notion de géostratégie du climat et de clore
cette 3ème et dernière partie, il convient de signaler que les militaires sont impactés par le CC à bien
d’autres égards :
- la déstabilisation des océans par le réchauffement climatique. La modification des grands
courants marins pourrait modifier de façon substantielle la navigation des sous-marins,
tout comme l’altération de la densité de l’eau due à la fonte des glaces pourrait
compromettre leur stabilité et le bon fonctionnement des sonars.
- le renchérissement des énergies fossiles, quand on sait que «80 % du pétrole consommé
par l’État américain l’est par les forces armées». Imaginez-vous l’impact sur la
déforestation & le prix des denrées alimentaires si l’armée américaine décidait d’opter
pour le biocarburant…
« Au début des années 1980, le président Jimmy Carter énonce une doctrine qui a conservé son nom :
la « doctrine Carter ». Celle-ci stipule que les États-Unis interviendront militairement chaque fois que
leurs circuits d’approvisionnement énergétiques seront menacés, en particulier au Moyen-Orient.
Deux tiers des réserves de pétrole mondiales connues se trouvent dans la région. Cette doctrine
devient cependant de plus en plus difficile à appliquer. La « surextension impériale » qui affecte
l’armée américaine implique que sa capacité de réaction à une nouvelle crise géopolitique est
amoindrie. C’est la raison pour laquelle les appels à diversifier les sources d’approvisionnement et les
carburants se multiplient au sein même de l’armée. » Cet appel militaire à une transition énergétique
et la résistance de l’industrie pétrolière qui est loin d’avoir dit son dernier mot (émergence des sables
bitumineux, gaz de schistes, forage en eaux profondes et fonte du Pôle Nord) nous font entrer donc
de plein fouet dans le secteur stratégique de la géopolitique… En effet, les liens quasi « congénitaux »
entre les multinationales des énergies fossiles et le complexe militaro-industriel américain sont la
cristallisation des luttes internes qui tiraillent aujourd’hui les classes dominantes occidentales,
partagées entre « nouvel âge des hydrocarbures » et « projets énergétiques alternatifs ».
« Il n’est de document militaire consacré aux conséquences militaires du changement climatique qui
ne comporte un chapitre sur l’Arctique. La fascination qu’exerce le pôle Nord sur l’esprit militaire n’a
d’égal que les incertitudes qui entourent les conséquences politiques et économiques du
réchauffement climatique dans cette région. L’Antarctique ne suscite pas la même séduction, parce
qu’il est éloigné des principales routes maritimes et des conflits qui ont structuré le XXe siècle et qui
promettent de jalonner le XXIe. Les militaires ne sont pas les seuls à être fascinés par l’Arctique. James
Lovelock, le père de l’« hypothèse Gaïa », a émis l’hypothèse en 2006, dans une tribune dans The
Independent, que lorsque le réchauffement de la planète aura atteint des niveaux insoutenables, les
derniers humains survivants iraient se réfugier en Arctique». Le fait que l’Arctique soit convoité ne
date pas d’hier. En effet, l’Alaska et la Sibérie sont deux régions frontalières qui sont seulement séparés
par le détroit de Bering ; le Pôle Nord fait donc l’objet de toutes les attentions depuis le début de la
Guerre Froide il y a 60 ans environ. Depuis, la guerre froide s’est achevée. Pourtant, durant les deux
dernières décennies, l’accélération de la fonte des glaces due au CC a aiguisé encore plus les
convoitises autour de l'Arctique, de ses réserves fossiles et de ses nouvelles routes commerciales. Ces
routes maritimes commencent à être empruntées mais elles ne sont que temporairement « ouvertes »
pour le moment. D’ici 15 à 20 ans et grâce au réchauffement de la planète, ces routes seront beaucoup
plus durablement accessibles, « et le temps de voyage entre les continents sera fortement raccourci.
Cela réduira d’autant les quantités de carburant employées, le prix des marchandises acheminées, et
accélérera d’autant – toutes choses égales par ailleurs – la mondialisation». Ces 2 perspectives,
énergétique et commerciale, pourraient très rapidement et fondamentalement transformer toute la
géopolitique mondiale. Ce n’est pas « une bonne nouvelle pour tout le monde... Cela entraîne donc
19
déjà des conflits diplomatiques sur
l’appartenance territoriales des fonds
sous-marins de l’Arctique, en particulier
entre le Canada, la Russie et le
Danemark. La possibilité d’exploiter ces
nouveaux gisements aiguise aussi les
appétits des plus grandes
multinationales de l’énergie
(ExxonMobil, Gazprom, BP, Total,…).
D’autre part, on voit aussi apparaître un
nationalisme nouveau, appelé
« éconationalisme », comme c’est le cas
des Inuits du Groenland qui seraient
prêts à demander leur indépendance
vis-à-vis du Danemark eu égard à la
manne financière que pourrait représenter l’exploitation de l’énergie hydroélectrique et l’exploitation
agricole d’un Groenland « fondu ». On peut facilement se rendre compte de la remise en cause des
alliances existantes et des jeux diplomatiques ; toute la géopolitique contemporaine serait bouleversée
avec des conséquences qu’il est difficile d’évaluer. Il suffit de prendre quelques exemples on ne peut
plus parlant : que dire de de la possibilité d’éviter le Détroit D’Ormuz et la signification pour le poids
de l’Iran dans les conflits au Moyen-Orient ? Et que dire des répercussions économiques que
constituerait la possibilité d’éviter le Canal de Suez ou le Canal de Panama respectivement pour
l’Egypte et le Panama ? Enfin que dire de la course folle aux forages en eaux profondes à laquelle sont
sur le point de se livrer des pays comme la Russie, les Etats-Unis, la Chine & le Canada ? D’ailleurs,
l’Arabie Saoudite voit tout cela d’un très mauvais œil car cela pourrait rendre les puissances
occidentales indépendantes de la fourniture en or noir en provenance de la péninsule arabique. Tout
ceci étant sous-tendu par la course à l’armement entre la Chine et les Etats-Unis dont la rivalité
grandissante fait craindre une nouvelle polarisation militaire du monde pour la répartition des
ressources avec pour toile de fond le Changement Climatique. Ici se retrouve une nouvelle fois mêlés
les intérêts privés du capital, les intérêts des Etats via la sécurisation des ressources énergétiques, et
la nature qui va à nouveau se retrouver prise en otage avec des risques environnementaux telle que la
possibilité de marées noires avec des conséquences encore jamais vues.
A la lumière de ces éléments, on comprend aisément la difficulté, voire l’hypocrisie des négociations
internationales sur le climat dont l’impact, au vu des enjeux mentionnés ci-dessus , apparaît
malheureusement comme dérisoire… Et selon l’auteur, «l’étude de la stratégie militaire est un passage
obligé pour la compréhension de la transformation de la société dans laquelle nous vivons ».
Selon Marx : Le capital doit tendre à abattre toute barrière locale au trafic, c’est-à-dire à l’échange,
pour conquérir le monde entier et en faire un marché, il doit tendre, d’autre part, à détruire l’espace
grâce au temps, c’est-à-dire réduire au minimum le temps que coûte le mouvement d’un lieu à un
autre. Plus le capital est développé, plus vaste est donc le marché où il circule ; or plus est grande la
trajectoire spatiale de sa circulation, plus il tendra à une extension spatiale du marché, et donc à une
destruction de l’espace grâce au temps
L’Égypte empoche à ce jour annuellement cinq milliards de dollars en frais de
transit grâce au canal de Suez, un montant qui diminuera inévitablement à
mesure que des alternatives plus courtes et moins chères apparaîtront Le
voyage de Rotterdam à Yokohama, deux ports commerciaux de première
importance au plan mondial, qui s’effectue à l’heure actuelle via le canal de
Suez, sera raccourci de 40 % s’il emprunte le passage du Nord-Est. Naviguer
de Seattle à Rotterdam en traversant le passage du Nord-Ouest, plutôt que
le canal de Panama, accélérera le voyage de 25 %. La Convention des Nations
unies sur le droit de la mer (UNCLOS), adoptée dans les années 1970, stipule
qu’un pays en mesure de démontrer que son territoire s’étend à plus de 200
milles nautiques sous la mer dispose de droits sur l’exploitation des
ressources qui s’y trouvent. En juillet 2007, une expédition sous-marine russe
plante un drapeau de titane, à grand renfort de communication, sur la
dorsalenote de Lomonossov, par 4 000 mètres de fond. La Russie considère
cette dorsale, longue de 1 800 km, comme une extension sous-marine de son
territoire.
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CONCLUSION :
L’auteur dans ce livre tend à démontrer pourquoi la société contemporaine dans laquelle nous vivons,
et ses attributs sociaux, économiques et géopolitiques, rend impossible le « pacte écologique »
international. L’accélération quotidienne que l’on peut tous ressentir dans nos vies n’est autre que
l’accélération de l’histoire du capital et de sa fuite en avant. L’auteur propose de porter un projet de
changement social radical, tout en se demandant si un « tel projet n’appartient pas à une époque
révolue. Le capitalisme ne mourra pas de sa propre autodestruction comme on pourrait le croire au vu
de son exploitation effrénée des ressources planétaires (humaines ou naturelles). En fait, l’Etat qui
joue le rôle d’interface entre le Capital et la Nature , paradoxalement à la doctrine néolibérale qui
prône le marché comme seul loi face à l’Etat providence. « Si le capitalisme a besoin de l’État, c’est
donc d’abord dans un but d’autolimitation. » pour assurer sa survie. Par conséquent, l’auteur affirme
que sans mobilisation massive des masses dominés par la classe dominante, le capitalisme perdurera…
L’auteur ne croit pas au catastrophisme car le capitalisme est résilient, « il a la capacité de s’adapter à
la crise environnementale » En fait, la crise écologique sert d’alerte au capitalisme qui développe en
réaction des « solutions durables au déclin du taux de profit , en marchandisant des secteurs de la vie
sociale et naturelle jusque-là à l’abri de la logique du capital. Une crise sert donc à résoudre l’autre. »
Razmig Keucheyan propose tout de même des solutions possibles à cette impasse : hybridation des
luttes entre mouvements sociaux, mouvements écologistes et mouvances politiques à l’instar de ce
qu’a pu réaliser le mouvement pour la justice environnementale. D’ailleurs, Il insiste sur la nécessité
de « politiser la crise » en organisant la désagrégation des intérêts du Capital et de l’Etat afin de
développer de nouveau des politiques publiques en accord avec la notion d’Intérêt Commun (par
exemple, en terminer avec les partenariat public privé et réinvestir dans des services publics forts. En
résumé, à nous, en tant qu’acteur du changement de casser le « Too big to fail » du capitalisme et de
contredire la loi de Murphy…
Pour aller plus loin :
http://www.europe-solidaire.org/spip.php?page=recherche&recherche=razmig+keucheyan
Racisme environnemental
http://www.20minutes.fr/toulouse/39452-20041117-toulouse-l-
incinerateur-du-mirail-inquiete-ses-riverains
Financiariser la nature : l’assurance des risques climatiques
http://www.monde-diplomatique.fr/2012/01/STREECK/47162
Les guerres vertes, ou la militarisation de l’écologie
http://www.bastamag.net/Geo-ingenierie-scientifiques
http://www.economist.com/node/17414216
http://fr.wikipedia.org/wiki/G%C3%A9o-ing%C3%A9nierie
http://www.ffp.statesindex.org/rankings-2013-sortable