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Douleur provoquée par les soins
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« Douleur provoquée par les soins : 1ère journée du CNRD » 17 octobre 2006
ESPACE CONGRES INSTITUT PASTEUR 8h00 – Accueil des participants 9h00 – Introduction de la journée
Mme Danièle Cullet, représentant le Ministre de la Santé et des Solidarités Dr Alain Serrie, président de la SFETD Dr Christine Ricard, représentante de la SFETD au Comité Scientifique du CNRD Mme Jocelyne Legall, représentante Commission infirmière SFETD Dr Daniel Annequin, président du Comité Scientifique du CNRD
Modérateurs : C. RICARD/B. MARCHAND 9h20 – Présentation générale du CNRD : missions, activités, site Internet Dr Ricardo Carbajal – Mme Pascale Thibault - Paris (75) 9h35 – Epidémiologie de la douleur post-opératoire chez l’adulte Pr. Dominique Fletcher - Garches (92)
9h50 – EPIPPAIN, analyse épidémiologique de 60 000 gestes douloureux chez le nouveau-né Dr Ricardo Carbajal - Paris (75) 10h05 – Douleur provoquée chez la personne âgée : données épidémiologiques Dr Henri-Pierre Cornu – Sevran (93) 10h20 – Questions 10h50 – Pause – Visite des Stands Modérateurs : D. ANNEQUIN/ S. DURAND 11h20 – MEOPA (Mélange 50/50 d’oxygène et protoxyde d’azote) chez la personne âgée Mme Anne Caillaud, Infirmière ressource douleur – Boscamnant (17) 11h35 – Résistances à l’utilisation du MEOPA (Mélange 50/50 d’oxygène et protoxyde
d’azote) chez la personne âgée et en soins palliatifs Dr Pierre Basset - Chambéry (73)
11h50 – Stratégies thérapeutiques de la douleur liée aux soins en réanimation adulte Dr Luc Brun - Mme Nelly Marti, Infirmière – Béziers (34) 12h05 - Anesthésie loco-régionale pour les patients artéritiques : une nouvelle qualité de
vie à domicile Dr Eric Bures – Mme Dominique Arnel, Infirmière - Angoulême (16)
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12h20 – Questions 12h30 – Pause déjeuner – Visite des Stands
Modérateurs : C. HIBON-RICARD/T. MOREAUX 14h00 – CD-Rom de présentation pratique des pompes PCA Morphine chez l'enfant Mme Chantal Khan, Cadre de Santé - Poissy/Saint Germain (78) 14h15 – Implication médicale dans l’élaboration et la mise en place d’un « protocole
Morphine » utilisable par les infirmières aux urgences pédiatriques Dr Yves Meymat – Bordeaux (33) 14h30 – Comment pérenniser l’utilisation des protocoles antalgiques aux urgences par les
infirmières ? Mme Christine Duringer, Cadre Supérieur de Santé - Nantes (44)
14h45 – Rôle des aides-soignantes dans l’évaluation de la douleur de la personne âgée à domicile
Mme Claudine Arnoult, Aide-soignante - Rugles (27) 15h00 – Questions 15h15 – Pause – Visite des Stands Modérateurs : G. LEBRETON/M. BRESSAND 15h45 – Soins douloureux chez les personnes âgées : comment les croire et les comprendre ? Dr Jean-Marie Gomas – Paris (75) 16h00 – Prise en charge des douleurs provoquées lors des ponctions lombaires, osseuses et
sanguines chez l’adulte atteint de cancer (SOR - FNCLCC) Dr Ivan Krakowski – Nancy (54) 16h15 – Prise en charge des douleurs provoquées lors des ponctions lombaires, osseuses et
sanguines chez l’enfant atteint de cancer (SOR - FNCLCC) Dr Perrine Marec-Bérard – Lyon (69) 16h30 – Douleurs provoquées par les soins : politique du Réseau douleur Dr Claire Delorme – Mme Aline Le Chevalier, infirmière ressource douleur - Bayeux (14) 16h45 – Questions
17h00 – Clôture de la journée
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Douleur provoquée ou douleur liée aux soins ?
Dr Daniel Annequin
Président du Comité Scientifique - CNRD
Chef de projet du second programme national de lutte contre la douleur (2002 – 2005)
Responsable Unité « Douleur » Hôpital d’enfants Armand Trousseau 75012 Paris
Faut il caractériser la douleur des ponctions, des ulcérations cutanées, des actes invasifs comme étant
« provoquée » ou « liée » aux soins ?
Ce débat sémantique pourrait paraitre superflu voire inutile. En réalité des enjeux non négligeables sous-
tendent ce débat.
En 2002, lors de la création du CNRD1, nous avions, en choisissant le terme de « provoquée » la volonté
d’affirmer clairement la responsabilité des soignants (médecins, infirmières…) qui prescrivent, exécutent
ces soins générateurs de douleur ; Cette situation est paradoxale à plus d’un titre : alors que dans la grande
majorité des cas, cette douleur pourrait être efficacement contrôlée, elle est majoritairement « oubliée »
par ces mêmes soignants qui omettent de mettre en place une démarche préventive ou thérapeutique.
Ces insuffisances, ces carences s’expliquent par deux phénomènes interdépendants :
- un niveau de connaissance très faible lié à des difficultés majeures pour identifier la douleur (que
nous infligeons). La douleur provoquée par les soins a été très peu étudiée ; autant la littérature
abonde d’articles concernant la douleur post opératoire et la douleur chronique (cancer,
lombalgie, douleurs neuropathiques…) autant les articles sur la douleur quotidienne provoquée
par les escarres2, les pansements, les actes invasifs font singulièrement défaut.
- Ce manque de connaissances va alimenter les phénomènes de déni qui constituent l’autre obstacle
majeur au changement. Reconnaître, admettre la réalité de la douleur reste encore un exercice difficile
pour beaucoup d'équipes car cette reconnaissance impliquerait des remises en cause (passées et présentes)
incompatibles avec une représentation idéale de soignant « œuvrant inlassablement au soulagement de la
souffrance et au combat contre la maladie ». L’absence d’émotions (les défenses) vis-à-vis de la maladie,
de la souffrance a été longtemps cultivée et valorisée, la sensiblerie n’était pas de mise ; la jeune
infirmière qui ne supportait pas d’assister impuissante à la souffrance des patients se heurtait aux
classiques réponses (« c’est l’infirmière qui a besoin de calmants, faut changer de métier… »). Rappelons
1 Merci encore au Dr François Bourdillon à Danièle Cullet et à Chantal De Singly sans qui le CNRD n’aurait
pas pu voir le jour. 2 La revue « objectif soins » n° 145 Avril 2006 pp 24-27 , consacre un article très complet sur les escarres sans
qu’une seule ligne soit consacrée à la prise en charge de la douleur La revue Soins n° 702 (janv-fév 2006) consacre un dossier intitulé « optimiser la prise en charge des plaies à
l’hôpital et au domicile » sans évoquer la douleur.
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que cette non reconnaissance de la douleur est encore plus facile chez l'enfant et chez la personne très âgée
car leurs moyens d'expression sont limités et leur plainte est beaucoup moins crédible.
Les phénomènes de déni sont essentiels à repérer et à analyser car la qualité de la prise en charge en
découle directement. Telle équipe satisfaite (malgré la médiocrité de sa prise en charge) et confortée par
un déni massif, ne fera aucun effort pour modifier ses pratiques. Telle autre équipe insatisfaite sera au
contraire nettement plus motivée pour chercher de nouvelles réponses antalgiques. Face à la détresse d’un
patient plusieurs types d’arguments sont mis en avant pour éviter d'aborder une réflexion sur la douleur et
sa prise en charge. Le déni peut être massif, le problème n’existe pas, « Ce n’est pas de la douleur, c’est de
la peur, de l'anxiété, de la nervosité, de l’agitation ». Ces qualificatifs sont les plus souvent avancés. De
fait, en invoquant uniquement la peur, l’argument est doublement rassurant pour les soignants : ils font
l’économie de leur « culpabilité » — le patient est seul responsable de son comportement.
Enfin rappelons que cette thématique fait partie des trois priorités nationales du second programme
national de lutte contre la douleur (2002 – 2005) ; la création du Centre National de Ressources de lutte
contre la Douleur (www.cnrd.fr) dont la mission prioritaire est la prévention et la prise en charge de la
douleur provoquée par les soins, a constitué une des mesures pivot de ce programme national.
Une simple fibro….
Au guichet on vous regarde avec apitoiement quand vous venez pour une fibro, les secrétaires savent de
quoi il retourne, derrière les portes elles ont entendu les hoquets, les cris de protestation, les crises
d’étouffement, de larmes ou de nerfs, les vomissements, les déglutitions syncopées, les spasmes. Dans la
salle d’attente, une jeune femme demande si ça fait mal .« Non, ce n’est pas douloureux, a-t-on coutume et
l’ordre de répondre parmi les infirmières, mais c’est un peu désagréable. » Un peu, tu parles, c’est
atrocement douloureux, oui, c’est insupportable, c’est le cauchemar, la violence de cet examen fait
immédiatement surgir la nécessité du suicide…Hervé Guibert décrivait ainsi son expérience de la
fibroscopie bronchique3 . Ce témoignage illustre parfaitement la somme des violences infligées aux
patients : la douleur présente et massive (alors qu’elle avait été annoncée absente) se superpose aux
sentiments d’avoir été trompé, de ne pas avoir été considéré comme un être humain , de demeurer
impuissant. De manière quasi expérimentale, on réalise ainsi une spirale infernale où la détresse, la peur
renforcent la perception de la douleur. Alors que la même endoscopie pratiquée sous anesthésie générale
ou sous sédation profonde accompagnée d’une véritable information aurait donné des résultats opposés.
La mise en perspective de ces deux possibilités, souligne parfaitement l’injustice fondamentale pour les
patients qui bénéficieront ou non d’analgésie satisfaisante selon l’endroit où sera pratiqué l’acte.
3 Le protocole compassionnel Hervé Guibert - Editions Gallimard 1991
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SOMMAIRE DES COMMUNICATIONS Page
• Présentation générale du CNRD : missions, activités, site Internet Docteur Ricardo Carbajal, Madame Pascale Thibault (Paris 75) 6
• Epidémiologie de la douleur post-opératoire chez l’adulte
Professeur Dominique Fletcher Hôpital Raymond Poincaré (Garches 93) 11
• Etude EPIPPAIN : analyse épidémiologique de 60 000 gestes douloureux chez le nouveau-né Docteur Ricardo Carbajal Hôpital Trousseau (Paris 75) 14
• Douleur provoquée chez la personne âgée : données épidémiologiques
Docteur Henri-Pierre Cornu Hôpital R. Muret (Sevran 93) 27
• MEOPA (mélange 50/50 oxygène-protoxyde d’azote) chez la personne âgée Madame Anne Caillaud, Centre Hospitalier de Boscamnant (17) 30
• Résistance à l’utilisation du MEOPA
(mélange 50/50 oxygène-protoxyde d’azote) en gériatrie et en soins palliatifs Docteur Pierre Basset Centre hospitalier de Chambéry Hôtel Dieu (Chambéry 73) 35
• Stratégies thérapeutiques de la douleur provoquée par les soins en
réanimation adulte Docteur Luc Brun Centre hospitalier de Béziers (34) 38
• Anesthésie loco-régionale pour les patients atteints d’artérite : une nouvelle qualité de vie à domicile
Docteur Eric Bures Clinique chirurgicale St JOSEPH (Angoulême 16) 51
• Utilisation pratique des pompes PCA Morphine chez l’enfant : supports multimédia Madame Chantal Khan Hôpital de Poissy/St Germain (Poissy 78) 68
• Implication médicale dans l’élaboration et la mise en place d’un
«protocole morphine » utilisable par les infirmière aux urgences pédiatriques Docteur Yves Meymat CHU de Bordeaux (33) 75
• Comment pérenniser l’utilisation des protocoles antalgiques aux urgences par les infirmières ? Madame Christine Duringer CHU de Nantes (44) 83
• Rôle des aides-soignantes dans l’évaluation de la douleur de la personne âgée à domicile Madame Claudine Arnoult Hôpital local André Couturier (Rugles 27) 86
• Soins douloureux chez les personnes âgées : comment les croire et les comprendre !
Docteur Jean-Marie Gomas Hôpital Sainte Perrine (Paris 75) 93
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• Prise en charge des douleurs provoquées lors des ponctions lombaires, osseuses et sanguines chez l’adulte atteint de cancer (SOR-FNCLCC) Docteur Ivan Krakowski Centre Alexis Vautrin (Vandoeuvre les Nancy 54) 98
• Prise en charge des douleurs provoquées lors des ponctions lombaires,
osseuses et sanguines chez l’enfant atteint de cancer (SOR-FNCLCC) Docteur Perrine Marec-Berard Centre Léon Bernard (Lyon 69) 102
• Douleur provoquée par les soins : politique du réseau Basse-Normandie 106 Docteur Claire Delorme Réseau, Mme Aline Le Chevalier réseau douleur Basse Normandie (Bayeux 14)
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Présentation du Centre National de Ressources de lutte contre la Douleur
Ricardo Carbajal, médecin responsable
Pascale Thibault, cadre supérieur de santé
CNRD - Hôpital Trousseau – Paris
Le Centre National de Ressources de lutte contre la Douleur (CNRD) a été créé par le Ministère de la
famille et des personnes handicapées dans le cadre du programme national de lutte contre la douleur 2002-
2005.
Il a comme objectif principal la prévention et l’amélioration de la prise en charge de la douleur provoquée
par les soins chez l’enfant, l’adulte et la personne âgée.
Il s’adresse aux personnels soignants médicaux et paramédicaux de tous les secteurs d’activité : public,
privé et libéral.
La création de ce centre permet d’assurer la continuité et la pérennité de l’engagement contre la douleur
mis en place par le Ministère de la Santé.
Cet engagement se poursuit dans le 3ème plan de lutte contre la douleur 2006-2010, et tout
particulièrement en ce qui concerne la douleur des soins des personnes les plus vulnérables : enfants,
personnes handicapées, âgées, etc…
Les missions du CNRD :
• Recueillir et diffuser les informations auprès de tous les professionnels de santé grâce à
l’existence de la médiathèque et du site Internet dédiés spécifiquement à la prise en charge de la
douleur provoquée par les soins ;
• Apporter une aide logistique aux professionnels de santé, notamment aux professionnels en charge
de la douleur (équipes hospitalières, référents douleur et Cluds) pour la réalisation d’audits clef en
main, la réalisation de protocoles, etc… ;
• Développer la recherche paramédicale sur la douleur au quotidien, telles que les méthodes
complémentaires non pharmacologiques de prise en charge de la douleur grâce à l’existence d’un
appel à projet ;
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• Faire connaître et valoriser les initiatives et les actions réalisées sur le thème de l’amélioration de
la prise en charge de la douleur et du confort du patient (prévention de la douleur liée aux soins et
aux gestes techniques).
Le personnel du CNRD :
Docteur Ricardo Carbajal : médecin responsable
Pascale Thibault : cadre supérieur de santé
Patricia Cimerman : infirmière, assistante de recherche clinique
ODILE PERRIN : DOCUMENTALISTE
Sandra Martinez : secrétaire
Le Comité scientifique :
Le comité scientifique est composé de personnalités reconnues dans la prise en charge de la douleur ; il
participe à l’élaboration, la validation et la mise en place des missions du CNRD.
Il est présidé par le Docteur Daniel Annequin et constitué de 12 personnes :
2 représentants permanents du CNRD : le Dr Carbajal et P. Thibault
1 représentant de la SFAR, Société Française d’Anesthésie -Réanimation
1 représentant de la SFETD, Société Française d’Etude et de Traitement de la douleur,
2 médecins,
3 infirmières,
1 kinésithérapeute,
1 psychologue.
Un manipulateur en électro-radiologie doit prochainement intégrer le groupe.
Un comité de suivi, piloté par le Ministère de la Santé donne un avis sur le règlement intérieur et les
perspectives annuelles d’activités du CNRD.
Chaque année le CNRD produit un bilan d’activités.
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Activités actuelles :
• Gestion de la médiathèque :
Le CNRD possède une base documentaire de près de 200 ouvrages et 25 abonnements à des revues
professionnelles.
Tous ces documents sont référencés.
Des bibliographies thématiques peuvent être proposées en fonction des demandes.
Les professionnels et étudiants sont accueillis sur place, de préférence sur rendez-vous, par un des
membres de l’équipe.
• Gestion du site Internet :
Le site comprend 19 rubriques accessibles et actualisées.
Ces rubriques présentent des articles originaux, des informations contrôlées, des synthèses et traductions
réalisées à partir d’articles issus de la littérature internationale.
Tous les articles sont relus, vérifiés et actualisés par le Docteur Carbajal et au moins un membre du comité
scientifique.
• Participation à la réalisation de supports multi-média :
La conception et la réalisation de supports vidéos pour la formation des personnels de soins a abouti à la
réalisation et/ou à la diffusion de documents :
« Soins d’abcès chez l’enfant, comment les infirmières peuvent modifier les pratiques
médicales »,
« Clips vidéo pour l’amélioration de l’utilisation des pompes PCA Morphine » : version
destinée aux personnels et version destinée à l’information de l’enfant,
« Anesthésie loco-régionale pour les patients atteints d’artérite : une nouvelle qualité de
vie à domicile ».
• Accompagnements d’étudiants pour les travaux de fin d’études (thèses, mémoires, travaux de
recherche)
• Participation à des congrès
Les membres du CNRD sont amenés à participer à de nombreux congrès en qualité d’orateur, d’auditeur
ou pour faire connaître le CNRD (congrès mondia l de l’IASP, SFETD, SFAP, journées régionales de
cancérologie, Congrès de pédiatrie, néonatologie, pneumologie, etc…).
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• Aide logistique :
Actuellement, les soignants sollicitent l’équipe du CNRD pour :
Un questionnement ponctuel sur un problème pratique,
Un éclairage sur les orientations de la politique douleur au niveau d’un Clud, d’une direction de
soin,
L’aide à la mise en place des formations douleur,
La réalisation d’audits, d’enquêtes : afin de satisfaire les besoins, l’aide dans ce cadre peut se
situer dès la formulation du questionnement de départ jusqu’à l’accompagnement dans l’élaboration des
résultats, en passant par la réalisation d’un masque de saisie pour le traitement des données.
Les contacts se font par téléphone, par mail ou sur rendez-vous.
• Appel à projet :
Chaque année depuis 2003 le CNRD propose un appel à projet de recherche.
A ce jour, 30 projets environ ont été accompagnés par le CNRD.
Le détail de ces travaux et l’appel à projet 2007 sont disponibles dans la rubrique du site Web intitulée
« appel à projet ».
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Audit de la douleur postopératoire chez l’adulte
Dominique Fletcher 1.2, Alain Mardaye 3, C Fermanian 3, P Aegerter 3 1 Anesthésie hôpital Raymond Poincaré 104 bd Raymond Poincaré - 92380 Garches
2 EMI 792 Hôpital Ambroise Paré - Boulogne, 3 URC Hôpital Ambroise Paré - Boulogne
Introduction :
La chirurgie est responsable d'une douleur postopératoire qui occasionne de l’inconfort et
participe peut être à la morbidité péri-opératoire. En France, l'analgésie postopératoire est gérée par le
médecin anesthésiste réanimateur (MAR) le plus souvent. De nombreux textes légaux ont insisté sur la
nécessité d’une prise en charge de la douleur qu’il s’agisse de textes régissant l’exercice professionnel
(Décret N° 2004-11-28-802 du 29 juillet 2004 relatif à l’exercice de la profession d’infirmier), de
recommandations sur la prise en charge du patient hospitalisé (charte du malade hospitalisé N°95-22 du 22
mai 1995) ou d'incitation des centres hospitaliers à développer un certain nombre d' actions pour améliorer
la prise en charge de la douleur (circulaire ministérielle du 29 mai 1997). L’amélioration de la prise en
charge de la douleur et l’évaluation de cette démarche sont donc des obligations légales puisque nous
devons traiter la douleur (loi du 4/02/95) et évaluer nos pratiques (loi hospitalière du 31/07/91). Plus
récemment, le programme de lutte contre la douleur 2002/2005 a proposé la création de postes
d’infirmières référentes douleur (circulaire DHOS/E2 n° 2002-266 du 30 avril 2002). De plus, dans la
démarche d’accréditation engagée dans les établissements de santé, la prise en charge de la douleur est un
point spécifiquement évalué.
Pourtant, la qualité de prise en charge de la douleur postopératoire reste médiocre avec environ 50
% des patients qui décrivent une douleur intense après la chirurgie dans des enquêtes Nord Américaines
ou Françaises.
Les recommandations sur le traitement de la douleur postopératoire sont apparues successivement
en Australie, Grande Bretagne, Etats-Unis, Allemagne et en 1998 en France grâce à la Conférence de
Consensus de la Société Française d'Anesthésie Réanimation (SFAR) sur la prise en charge de la douleur
postopératoire. Il apparaît, dans ces différentes recommandations, la nécessité d'une auto évaluation de la
douleur avec recueil écrit, l'utilisation de morphiniques adaptée aux besoins des patients au mieux par
analgésie auto contrôlée (AAC), l'utilisation d'analgésiques non morphiniques en association dans le cadre
d'une analgésie balancée et l'utilisation des techniques de loco-régionales dans des indications spécifiques.
Ces recommandations proposent une organisation basée soit sur le modèle Nord Américain de l’Acute
Pain Service soit sur le modèle Européen de l’infirmière référente comme dans les recommandations de la
SFAR. Les Acute Pain Service Nord Américains ou Européens en place depuis la fin des années 80 ont
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montré dans certaines enquêtes une efficacité sur la qualité de la prise en charge, mais la démarche d’auto
évaluation et d’assurance qualité est rarement implantée dans ces structures ce qui rend difficile
l’appréciation précise du fonctionnement et du service rendu au patient.
L'opinion de la population française sur l’analgésie postopératoire a changé. Il est apparu, dans
une enquête téléphonique Française réalisée à 6 ans d’intervalle, que la prise en considération de
l’analgésie postopératoire était plus importante, la crainte des morphiniques avait reculé et que la
population était surtout informée par les médias. La première enquête d’ambition nationale sur la pratique
de l’analgésie postopératoire en France date de 1992. Il s’agissait de colliger les déclarations de 239
médecins anesthésistes réanimateurs (MAR) lors du congrès de la SFAR. Cette enquête retrouvait un
niveau acceptable des pratiques, mais les données obtenues à partir des déclarations des MAR semblaient
peu fiables et non confirmées par une évaluation des patients. Il n'existe qu’une seule enquête française de
grande envergure concernant l'analgésie postopératoire analysée à partir des données obtenues sur le
patient. Elle date de 1994 et a été réalisée par un audit externe de 96 services de chirurgie situés dans les
hôpitaux de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris. Cette enquête a montré que 46 % des patients
décrivaient des douleurs sévères 24 heures après la chirurgie, que les techniques les plus efficaces (AAC,
locorégionale), étaient rarement utilisées et que les analgésiques étaient prescrits selon des modalités peu
conformes aux recommandations. Quelques équipes ont publié des enquêtes nationales en Italie,
Allemagne, Danemark, Etas-Unis, Grande Bretagne ou une Enquête Européenne. Les résultats de ces
enquêtes par déclaration sur questionnaires restent peu fiables. Elles montrent globalement que l'analgésie
postopératoire est encore souvent insuffisamment prise en compte et traitée. Par ailleurs, une évaluation
allemande récente des structures qualifiées d'Acute Pain Service a donné des résultats troublants avec très
peu d'auto-évaluation et un décalage entre le niveau allégué de sophistication dans les techniques
d'analgésie postopératoire et la pratique imparfaite de la simple évaluation de la douleur postopératoire.
Une enquête monocentrique Française réalisée à l'hôpital Ambroise Paré par une équipe ayant un
investissement ancien et marqué dans la prise en charge de la douleur postopératoire montre un résultat
décevant avec une qualité d'analgésie insuffisante, une information du patient peu efficace et une qualité
d'évaluation mal établie. L'introduction d’un processus d'assurance qualité a néanmoins permis une
amélioration significative de certains paramètres. Cette auto évaluation et ce processus continu de
correction semblent de nature à améliorer les résultats selon d'autres travaux.
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Résultats de l’audit national douleur postopératoire chez l’adulte :
L'enquête nationale que nous venons de finir grâce au soutien de la DHOS, de la Fondation CNP
Assurances et de la SFAR avait pour objectifs :
L'évaluation des pratiques de l'analgésie postopératoires dans un échantillon important de patients
hospitalisés à 24 heures d’une chirurgie dans des établissements publics et privés, avec des données
quantitatives (évaluation des dossiers, évaluation du patient) et qualitatives grâce à un questionnaire
général validé lors de la visite des établissements audités.
Cette enquête a inclus 1900 patients sur 2 ans dans 76 établissements répartis en cinq groupes
(CHU, CHG > et < 5000 interventions par an ; structure libérale > et < à 5000 interventions par an).
Sur une analyse intermédiaire partielle (n=500, 10 items ; septembre 2005), on retrouvait :
Une EVA au repos en moyenne à 2.8±2, au mouvement 5.2±2.5, EVA maximale 6.8±2.3.
L’information douleur est inexistante pour le patient dans 34 % des cas. Le délai d’obtention d’un
antalgique est inférieur à 5 min dans 64 % des cas ; les traitements antalgiques sont responsables d’effets
secondaires dans 27 % des cas ; On retrouve un recueil écrit douleur en SSPI dans 61 % des cas, un
recueil écrit d’au moins un score douleur en chirurgie sur 24 heures dans 92 % des cas ; un traitement
morphinique est prescrit dans 78 % des cas ; une analgésie spinale dans 1.2 % des cas ; un bloc
périphérique dans 3.9 % des cas.
Conclusion :
Un audit national sur la douleur postopératoire chez l’adulte donne des résultats préliminaires
intéressants qui permettront d’orienter les responsables politiques et les sociétés savantes pour réactualiser
leurs recommandations et mieux cibler les efforts de formation et les plans d’action.
RÉFÉRENCES 1. Poisson-Salomon, AS, Brasseur L, Lory C, Chauvin M and Durieux P. [Audit of the
management of postoperative pain]. Presse Med 1996; 25: 1013-7. 2. Galinski, M, Fletcher D, Gaude V, Guirimand F and Chauvin M. [Periodic evaluation of
practices in postoperative pain management]. Ann Fr Anesth Reanim 2000; 19: 725-33. 3. Ready, LB, Oden R, Chadwick HS, Benedetti C, Rooke GA, Caplan R and Wild LM.
Development of an anesthesiology-based postoperative pain management service. Anesthesiology 1988; 68: 100-6.
4. Rawal, N and Berggren L. Organization of acute pain services: a low-cost model. Pain 1994; 57: 117-23.
5. Miaskowski, C, Crews J, Ready LB, Paul SM and Ginsberg B. Anesthesia-based pain services improve the quality of postoperative pain management. Pain 1999; 80: 23-9.
6. Rawal, N and Allvin R. Acute pain services in Europe: a 17-nation survey of 105 hospitals. The EuroPain Acute Pain Working Party. Eur J Anaesthesiol 1998; 15: 354-63.
14
7. Larue, F, Fontaine A and Brasseur L. Evolution of the French public's knowledge and attitudes regarding postoperative pain, cancer pain, and their treatments: two national surveys over a six-year period. Anesth Analg 1999; 89: 659-64.
8. Brasseur, L, Larue F and Charpak Y. [Postoperative analgesia in France. A study of the prescribing doctor's approach]. Presse Med 1992; 21: 463-7.
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Premiers résultats de l’étude EPIPPAIN : analyse épidémiologique de 60000 gestes inconfortables ou douloureux pratiqués en réanimation
chez le nouveau-né
Ricardo Carbajal, André Rousset, Claude Danan, Sarah Coquery, Paul Nolent, Sarah Ducrocq, Carole Saizou, Alexandre Lapillone, Michèle Granier, Philippe Durand, Richard Lenclen, Anne Coursol, Philippe
Hubert, Laure de Saint Blanquat, Patricia Cimerman, Daniel Annequin pour le Groupe Epippain Ile De France1.
1Les coordonnées des participants à l’étude Epippain figurent à la fin de l’article
Introduction : Il a fallu longtemps à la communauté médicale pour prendre conscience de la capacité du nouveau-né à
ressentir la douleur. Durant les 15 derniè res années, il y a eu une augmentation significative de nos
connaissances sur la douleur du nouveau-né et de vastes terrains de recherche ont été traités dans la
littérature médicale, infirmière, psychologique, neuroscientifique, sociale, bioéthique, et philosophique.
Malgré ces avancées, un nombre considérable de problèmes persistent et un travail important est encore
nécessaire pour changer les mentalités et pour trouver des moyens analgésiques adaptés à toutes les
situations cliniques en néonatologie.
Les nouveau-nés subissent habituellement des gestes douloureux, même après un accouchement normal.
Pour des raisons évidentes ces gestes sont plus fréquents chez des nouveau-nés admis dans des unités de
réanimation néonatale. Les nouveau-nés en bonne santé subissent un certain nombre de gestes douloureux
inévitables. Parmi ces gestes, on compte les injections de vitamine K et des prises de sang, parfois
répétées, pour des tests diagnostiques et des dépistages systématiques. Pour les nouveau-nés malades,
bien que les chiffres de l’incidence réelle ne soient pas clairement définis, quelques études ont montré une
haute incidence des gestes douloureux pendant leurs séjours dans les unités de réanimation néonatale, tout
particulièrement pour les nouveau-nés prématurés ; ces gestes ont lieu surtout pendant la première
semaine de vie[1-3].
Quelques études épidémiologiques sur la douleur des gestes ont été publiées dans quelques pays. En
France ce type d’étude n’a pas encore été rapporté. On trouve dans la littérature, une enquête publiée en
2000 et réalisée auprès de services de réanimation néonatale de niveau II et III destinée à identifier les
facteurs liés aux variations des traitements dans les différentes unités françaises[4]. Un questionnaire fut
adressé aux 143 unités concernées et le taux de réponse fut de 81%. Trente-cinq (30%) unités signalaient
qu’ils n’utilisaient pas d’échelle d’évaluation de la douleur ; dans 40% de ces unités la raison invoquée a
été le manque de connaissance de ces échelles. Parmi les unités qui évaluaient la douleur, 78% utilisaient
des échelles validées de la douleur aiguë et 73% des échelles validées de la douleur prolongée. Des
protocoles écrits existaient dans 65% d’unités pour la prise en charge de la douleur aiguë et dans 36%
d’unités pour la douleur prolongée. Une grande variation entre les unités fut trouvée pour la prise en
16
charge de 5 situations cliniques. Il n’existe pas d’épidémiologie plus précise de la douleur des gestes dans
les unités de réanimation néonatale en France. Aucune étude prospective d’utilisation réelle de moyens
analgésiques n’a été publiée.
Maintenant qu’il est universellement admis que les nouveau-nés peuvent ressentir et réagir à la douleur, il
est urgent de rétrécir le fossé existant entre l’état actuel des connaissances et les pratiques courantes dans
les unités de néonatologie et de réanimation néonatale concernant la prévention et le traitement de la
douleur du nouveau-né. Un élément indispensable à l’amélioration des pratiques est la connaissance
précise du problème. C’est pourquoi l’étude épidémiologique de la douleur du nouveau-né est une étape
indispensable si l’on veut assurer un progrès solide dans ce domaine.
But de l’étude : Le but de l’étude Epippain a été double. D’une part, décrire l’incidence des gestes douloureux ou
inconfortables chez le nouveau-né pris en charge dans les unités de réanimation néonatale et de
réanimation pédiatrique ainsi que lors du transport par le SAMU de la région Ile de France ; et d’autre
part, connaître l’avis du personnel médical et paramédical travaillant dans ces unités sur la douleur du
nouveau-né et les moyens utilisés pour le soulagement de celle -ci. Cette communication présente les
premiers résultats concernant l’incidence des gestes douloureux ou inconfortables pratiqués chez le
nouveau-né en réanimation.
Matériels et méthodes : Toutes les unités de réanimation néonatale et de réanimation pédiatrique de la Région Ile de France ont été
invitées à participer. Ont été inclus dans l’étude tous les enfants admis dans chaque unité des secteurs de
réanimation et de soins intensifs pendant deux mois. Les enfants inclus ont été suivis dès leur admission
jusqu’à leur sortie de l’unité de réanimation avec un maximum de 14 jours d’inclusion pour ceux qui
étaient encore hospitalisés au 14ème jour. Pour chaque enfant admis, un cahier de suivi a été établi
comportant tous les gestes douloureux ou inconfortables qui lui ont été pratiqués ainsi que les traitements
administrés, le mode de respiration, le traitement analgésique ou sédatif de fond, le nombre de tentatives
pour effectuer le geste et la présence éventuelle de parents lors de la réalisation du geste. Le contrôle de
qualité et l’exhaustivité du recueil des données ont été effectués dans chaque centre par un coordonnateur
médical et un coordonnateur infirmier. Par ailleurs, une assistante de recherche clinique est passée 2 fois
par semaine dans chaque centre pour vérifier les inclusions et le remplissage des cahiers d’observation.
Les données ont été entrées en double saisie avec un masque créé avec le logiciel Epidata puis l’analyse
statistique a été effectuée avec le logiciel SPSS 14. Le projet a été soumis au CCPPRB de Saint-Antoine.
Celui-ci a signalé que cette étude n’entrait pas dans le cadre de la Loi Huriet, puisqu’elle concerne
17
uniquement l’observation des pratiques sans aucune modification de la prise en charge des enfants. Une
déclaration a été faite également à la CNIL.
Résultats : L’étude a été réalisée entre septembre 2005 et janvier 2006 dans 13 centres. Au total, 431 nouveau-nés ont
été inclus dans l’étude. Le tableau 1 montre la répartition des enfants par centre. La population comportait
237 (55%) garçons. Deux cent trente neuf (55,5%) enfants étaient nés dans les centres où l’étude a été
réalisée.
Tableau 1. Distribution des enfants par centre participant
N % Bicêtre 23 5.3 Clamart 40 9.3 Créteil 46 10.7 Evry 26 6.0 Montreuil 91 21.1 Poissy 23 5.3 Pontoise 22 5.1 Cochin- Paris 35 8.1 Necker-Paris 15 3.5 Robert Debré- Paris 34 7.9 St Vincent de Paul (réa néonatale) 27 6.3 St Vincent de Paul ( réa chirurgicale) 12 2.8 Trousseau-Paris 37 8.6 Total 431 100.0
Le tableau 2 montre les caractéristiques démographiques des enfants inclus. La médiane (interquartile)
d’âge au moment de l’inclusion dans l’étude a été de 2,6 (0,5-27,9) heures. Trois cent trois enfants ont été
ventilés. Trente enfants ont subi une intervention chirurgicale pendant leur période d’inclusion dans
l’étude. Cent vingt-six enfants étaient encore hospitalisés au 14ème jour de suivi ; 27 enfants sont décédés
pendant la période de suivi. La médiane (interquartile) de jours de participation dans l’étude a été de 8 (2-
14) jours.
18
Tableau 2. Age gestationnel, poids de naissance, score Apgar à 1 et 5 minutes et score CRIB des 431 inclus dans l’étude Epippain Ile de France
Age gestationnel (semaines
d'aménorrhée )
Poids de naissance
(grammes) Apgar à 1minute
Apgar à 5 minutes score CRIB
N Valide 431 431 425 421 423 Manquante 0 0 6 10 8 Moyenne 33,02 1964 6,96 8,80 2,20 Médiane 32,29 1745 8,00 10,00 1,00 Ecart-type 4,65 957 2,92 1,76 3,00 Minimum 24,00 490 0 0 0 Maximum 42,00 4760 10 10 16 Interquartile 25 29,00 1160 5 8 0 75 37,00 2750 10 10 3
Gestes : Basés sur le caractère invasif du geste ou sur l’expérience et cotation des soignants, les 60 975 gestes
pratiqués chez les 431 nouveau-nés ont été classés en deux groupes : douloureux (30 161) et
inconfortables (30 814). Ces gestes sont présentés sur les tableaux 3 et 4. La médiane, interquartile et les
extrêmes du nombre de gestes douloureux et inconfortables sont montrés sur la figure 1.
19
Tableau 3. Gestes DOULOUREUX ou invasifs N % aspiration trachéale 10015 33,2 ponction talon 8396 27,8 retrait autres adhésifs 5377 17,8 sonde gastrique pose 1038 3,4 ponction veineuse prise de sang 758 2,5 ponction artérielle prise de sang 756 2,5 voie veineuse périphérique pose 574 1,9 kinésithérapie respiratoire 551 1,8 retrait voie d'abord 491 1,6 soins de plaie 368 1,2 extubation 281 ,9 cathéter veineux central voie percutanée 240 ,8 ponction doigt 239 ,8 cathéter veineux ombilical pose 208 ,7 expression globe vésical 195 ,6 intubation trachéale 104 ,3 kinésithérapie mobilisations 75 ,2 injection sous cutanée 69 ,2 réfection pansement 56 ,2 cathéter artériel périphérique pose 47 ,2 cathéter artériel ombilical pose 38 ,1 ponction lombaire 38 ,1 sondage vésical 36 ,1 stimulation corporelle pour bradycardie 29 ,1 retrait collecteur urine 23 ,1 drain pleural retrait 22 ,1 exsufflation 18 ,1 drain pleural pose 16 ,1 injection IM 14 ,0 examen ophtalmo 12 ,0 réfection pansement KTC 12 ,0 canulation, décanulation AREC 10 ,0 ablation de sutures 9 ,0 mobilisation KTC KTVO 9 ,0 ponction péritonéale 8 ,0 pose sonde duodénale 7 ,0 ablation sonde U 7 ,0 mobilisation drain thoracique 5 ,0 ponction vésicale 3 ,0 biopsie cutanée 2 ,0 fibro ORL 2 ,0 ponction pleurale 2 ,0 LBA (lavage broncho alvéolaire) 1 ,0 Total 30161 100,0
20
Tableau 4. Type de gestes INCONFORTABLES potentiellement douloureux
N % aspiration nasale 12133 39,4 soins nursing 7267 23,6 aspiration buccale 4989 16,2 toilette 1585 5,1 prise tension 1584 5,1 radiographie 1121 3,6 pesée 1075 3,5 pose sonde nasale ou PEP, VNI, CPAP, PPC, lunettes O2
497 1,6
traite de drain thoracique 155 ,5 EEG 139 ,5 massage stimulant 123 ,4 ETF 63 ,2 réfection lit 59 ,2 DRP 14 ,0 aérosol 6 ,0 pose sonde thermique 3 ,0 prélèvement oeil 1 ,0 Total 30814 100,0
21
Gestes inconfortables
Gestes douloureux
Gestes douloureux et inconfortables
700
600
500
400
300
200
100
0
Fig. 1. Total de gestes pratiqués durant la période de l’étude chez 431 nouveau-nés admis en réanimation. Les boites indiquent les intervalles interquartiles, les barres horizontales indiquent les moyennes et les barres verticales les valeurs extrêmes. Il faut noter que le chiffre de 60 975 gestes ne tient pas compte de tentatives qui ont été réalisées pour
terminer les gestes. Le tableau 5 montre les nombre de tentatives pour quelques gestes pratiqués chez les
nouveau-nés.
22
Tableau 5. Nombre de tentatives pour terminer quelques gestes pratiqués chez 431 nouveau-nés en réanimation
1 tentative 2 3 > 3 Ponction talon 8171 191 28 2 Aspiration trachéale 7534 2121 283 76 Retrait autres adhésifs 4874 316 91 96 Sonde gastrique pose 1007 29 2 0 Ponction veineuse prise de sang 532 140 59 27 Kiné respiratoire 502 38 9 2 Retrait voie d'abord 482 7 0 1 Ponction artérielle prise de sang 469 163 75 49 Soins de plaie 324 39 5 0 Voie veineuse périphérique pose 264 129 75 106 Ponction doigt 235 3 1 0 Expression globe vésical 166 19 7 3 Cathéter veineux central voie percutanée 98 34 37 71 Intubation trachéale 75 19 8 2 Kiné mobilisations 74 1 0 0 Ponction lombaire 25 10 3 0 Cathéter artériel périphérique pose 20 12 6 9
Sur les 30 161 gestes douloureux, 8245 (27,3%) ont été réalisés avec une analgésie spécifiquement
donnée pour le geste. Sur les 21 916 enfants qui n’ont pas reçu de traitement analgésique pour le geste,
9916 recevaient une sédation analgésie en continue. Au total, 18 161 (60%) gestes douloureux ou invasifs
ont été pratiqués soit avec une analgésie spécifique pour le geste soit avec une sédation analgésie
administrée en continu. A titre d’illustration, les traitements administrés pour les ponctions au talon sont
donnés ci-après. Sur les 8396 ponctions au talon pratiquées, 3699 (44,1%) furent pratiqués avec une
analgésie spécifique pour le geste. Sur les 4697 ponctions ayant été pratiqué sans analgésique pour le
geste, 1654 ont été effectués alors que l’enfant recevait une sédation analgésie en continu. Au final, 5353
(63,8%) de 8396 ponctions au talon ont été pratiquées soit avec une analgésie spécifiquement donnée pour
le geste soit avec une sédation analgésie administrée en continu.
Sur les 30 161 gestes douloureux ou invasifs, 1563 (5,2%) ont été réalisés avec la présence des parents.
Les 6 principaux gestes réalisés avec la présence parentale ont été l’aspiration trachéale (n=538), la
ponction au talon (n=479), le retrait des adhésifs (n=290), la pose de sonde gastrique (n=58), la
kinésithérapie respiratoire (n=55), et les soins de plaie (n=22).
23
L’étude Epippain a également comporté une enquête auprès de soignants qui a permis de connaître leur
avis sur la douleur qui est engendrée par les gestes couramment pratiqués chez le nouveau-né.
L’estimation par les soignants de la douleur des gestes est montrée sur la figure 2.
24
Perspectives : Des synthèses seront effectuées sur les données de chaque centre et transmises à chaque coordonnateur
afin d’être présentées aux différentes équipes ayant participé à ce travail dans le but de susciter des
discussions locales visant à améliorer la prise en charge de la douleur du nouveau-né.
Références : 1. Barker D P and Rutter N. Exposure to invasive procedures in neonatal intensive care unit
admissions. Arch Dis Child Fetal Neonatal Ed, 1995. 72(1): p. F47-8. 2. Johnston C C, Collinge J M, Henderson S J, and Anand K J. A cross-sectional survey of pain and
pharmacological analgesia in Canadian neonatal intensive care units. Clin J Pain, 1997. 13(4): p. 308-12.
3. Southall D P, Cronin B C, Hartmann H, Harrison-Sewell C, and Samuels M P. Invasive procedures in children receiving intensive care. Bmj, 1993. 306(6891): p. 1512-3.
4. Debillon T, Bureau V, Savagner C, Zupan-Simunek V, and Carbajal R. Pain management in French neonatal intensive care units. Acta Paediatr, 2002. 91(7): p. 822-6.
25
Dr Ricardo Carbajal Investigateur principal Centre National de Ressources de Lutte contre la Douleur Hôpital d’enfants Armand Trousseau. 26, Av du Dr. Netter 75012 Paris. France. Tél 0144735421 [email protected] Liste de centres participants à l’étude Epippain Ile de France avec les coordonnateurs médicaux et infirmiers 1) SERVICES DE REANIMATION
CENTRES Coordonnateurs médicaux et infirmiers 01 Hôpital de Bicêtre 78 rue du général Leclerc 94275 Le Kremlin Bicêtre Service de réanimation pédiatrique et néonatale
Dr Philippe Durand Mme Ghislaine Laigle
02 Hôpital Antoine Béclère Hôpital Antoine Béclère 157 rue de la porte de Trivaux 92141 Clamart cedex Service de réanimation néonatale
Dr Sarah Coquery Mme Betty Sgaggerro
03 Centre hospitalier général intercommunal de Créteil 40, av de Verdun 94000 Créteil Service de réanimation néonatale
Dr Claude Danan Mme Béatrice Marchand
04 Hôpital Louise Michel Service de réanimation néonatale Rue du Pont Amar Quartier du Canal-Courcouronnes 91014 Evry Cedex Service de réanimation néonatale
Dr Michèle Granier Mme Elisabeth Gasq
05 Centre hospitalier général de Montreuil Hôpital André Grégoire 56 boulevard de la Boissière 93105 Montreuil Cedex Service de réanimation néonatale
Dr André Rousset Mme Valérie Dubuche
06 CHI Poissy Saint Germain en Laye (Site Poissy) 10, rue du Champ Gaillard 78300 Poissy Service de réanimation néonatale
Dr Richard Lenclen Mme Anne Marie Ferreira
07 Centre hospitalier René Dubos 6 avenue de l'Ile de France 95303 Cergy Pontoise Cedex Service de réanimation néonatale
Dr Anne Coursol Mme Corinne Rose
26
08 Hôpital Cochin-Port Royal 123 boulevard de Port Royal 75679 Paris cedex 14 Service de réanimation néonatale
Dr Sarah Ducrocq Mme Nicole Minart
09 Hôpital Necker Enfants Malades 149 rue de Sèvres 75743 Paris Cedex 15 Service de réanimation pédiatrique et néonatale
Pr. Philippe Hubert Mme Martine Dervillers
10 Hôpital Robert Debré (AP-HP) 48 boulevard Serrurier 75935 Paris Cedex19 Service de réanimation pédiatrique et néonatale
Dr Carole Saizou Mme Delespine
11 Hôpital Saint Vincent de Paul 74-82 avenue Denfert Rochereau 75674 Paris Cedex 14 Service de réanimation pédiatrique et néonatale
Pr Alexandre Lapillone Mme Laurence Riquier
12 Hôpital Saint Vincent de Paul Paris Réanimation Chirurgicale. 74-82 avenue Denfert Rochereau 75674 Paris Cedex 14 Service de réanimation chirurgicale
Dr. Laure de Saint Blanquat Mme Karine Pouvelle
13 Hôpital d’enfants Armand Trousseau 26, av du Dr Netter 75012 Paris Service de réanimation néonatale et pédiatrique
Dr. Paul Nolent Mme Marie Christine Nanquette
2) SMURS PEDIATRIQUES
SMUR pédiatriques Coordonnateurs médicaux et infirmiers 1 Hôpital Necker Enfants Malades SMUR pédiatrique (SAMU de Paris) 149 rue de Sèvres 75743 Paris Cedex 15
Dr Jean Lavaud
2 Hôpital Robert Debré SMUR pédiatrique (SAMU de Paris) 48 boulevard Serrurier 75935 Paris Cedex19
Dr Noëlla Lode Dr Katia Kessous Mme Isabelle Siejak
3 Hôpital Antoine Béclère SMUR pédiatrique (SAMU 92) 157 rue de la porte de Trivaux 92141 Clamart cedex
Dr Jean Louis Chabernaud Mme Jocelyne Alexandre
4 CHI André Grégoire SMUR pédiatrique SAMU 93) 56, Bd de la Boissière 93105 Montreuil Cedex
Dr Azzedine Ayachi
27
5 Centre hospitalier René Dubos SMUR pédiatrique (SAMU 95) 6 avenue de l'Ile de France 95303 Cergy Pontoise Cedex
Dr Véronique Henry-Larzul
GESTION ET MONITORAGE DE L’ETUDE
Centre National de Ressources de lutte contre la Douleur Hôpital d’enfants Armand Trousseau 26, av du Dr Netter 75012 Paris
Dr Ricardo Carbajal (médecin responsable du CNRD) Mme Patricia Cimerman (infirmière de recherche clinique) Mlle Rebecca Shankland (Assistante de recherche clinique de l’étude Epippain) Mlle Nathalie Cohen (Assistante de recherche clinique de l’étude Epippain) Mme Karine Robin (Assistante de recherche clinique de l’étude Epippain) Mme Pascale Thibault (cadre supérieur du CNRD) Dr Daniel Annequin (président du conseil scientifique du CNRD)
Hôpital Saint-Antoine Département de Santé publique
Dr Pierre Yves Boëlle (Biostatisticien)
"Ce travail a été réalisé grâce au soutien de la Fondation de France et de la Fondation CNP assurances"
28
Douleur Provoquée chez la personne âgée : données épidémiologiques
Dr Henri-Pierre Cornu∗ Hôpital René-Muret Bigottini – 93270 SEVRAN
Il existe peu de données concernant les douleurs provoquées par les soins chez le sujet âgé et
notamment sur leur prévalence.
La personne âgée, poly-algique en dehors de toute période de soins est également poly-pathologique ce
qui multiplie les risques de douleurs induites. Nous allons donc retrouver chez le suje t âgé, les mêmes
étiologies que chez l’adulte jeune, avec les mêmes intensités et les mêmes fréquences, l’avancée en âge
n’étant pas un facteur de diminution des douleurs, mais simplement un facteur de diminution de la
plainte : outre l’image bien réelle du « vieillard stoïque », il existe aussi une modification de l’expression
de la douleur, notamment en cas de troubles cognitifs associés. Enfin portons-nous assez d'attention à la
personne âgée et à sa symptomatologie douloureuse ? Ce vieillard qui a mal ne se plaint-il plus parce qu'il
n'a pas été écouté les nombreuses fois où il s'est plaint ?
Les seuls résultats de prévalence sont ceux d’enquêtes réalisées localement, généralement sur l’initiative
des CLUD, dans un but d’évaluation des pratiques professionnelles et non publiées. Nous insisterons sur 4
situations particulièrement fréquentes dans la prise en charge de patients âgés :
1/ Les pansements :
Fréquents en gériatrie (escarres, ulcères, plaies, etc..), générateurs de douleur tant du fait de l’acte
technique lui-même, que par la fragilité cutanée rendant difficile le décollement des pansements adhésifs
et la mobilisation nécessaire de patients parfois rétractés et toujours arthrosiques.
A l’hôpital René Muret-Bigottini (Darées V., 2004). Une enquête un jour donné a permis d’interroger 254
patients (court séjour, SSR et SLD). Les résultats montrent 52 % de patients douloureux dont
16 % (21 patients) pendant les pansements. De plus cette douleur n’était signalée dans le dossier de soins
que dans 45 % des cas.
Le même type d’enquête a été réalisé à l’hôpital Emile Roux (Cornu HP, 2002). Sur 246 patients, 71
(64.8%) ont un pansement. Pendant le pansement, 28 % sont « un peu » douloureux en hétéro-évaluation
et 18.5% « beaucoup ». Pour ces derniers, il faut noter que bien que l’infirmier(e) ait déclaré lors de
∗ AP-HP - Hôpital René Muret-Bigottini – 93270 Sevran ; coordinateur de « l’inter-clud gériatrique »
29
l’enquête que le pansement était « beaucoup » douloureux, cette douleur n’est signalée dans le dossier que
dans 38.5% des cas.
A l’hôpital Vaugirard (Lhuillery D., 2006), la prévalence de la douleur lors des pansements est relevée
depuis 5 ans. Cette prévalence ne cesse de croître d’année en année (32 % en 2002, 73.5% en 2006)
témoignant probablement d’une sensibilisation à la reconnaissance de cette douleur.
Enfin à l’hôpital Broca (Abitbol G., 2006), les pansements représentent 43.5% des prescriptions
d’antalgiques de palier III.
Bien que la « lésion tissulaire » de la définition de la douleur par l’IASP soit évidente lors des pansements,
la prise en charge antalgique en est nettement insuffisante et nécessite, en gériatrie, une véritable réflexion
autour de la reconnaissance, l’évaluation et la transmission, mais aussi l’organisation des soins et
l’appropriation par les équipes de techniques antalgiques adaptées aux sujets âgés.
2/ La rééducation :
Les soins gériatriques comportent une part importante de rééducation, elle -même parfois génératrice de
douleur.
Lors de l’enquête réalisée à Emile Roux, 67 patients (27 %) avaient une prise en charge en rééducation
physique. Pour 24 (35.8%) cette rééducation était « un peu » douloureuse, et pour 10.5 % elle était
« beaucoup » douloureuse, avec encore ici toutes les limites de l’hétéro-évaluation.
La rééducation pose le problème de la « douleur utile » permettant au rééducateur de trouver les limites de
ses gestes.
3/ La mobilisation :
La fréquence des handicaps nécessite des aides pour les mobilisations au lit et les transferts lit/fauteuil.
Ces soins sont eux aussi source de douleurs notamment en cas de rétractions ou de pathologies ostéo-
articulaires aiguës ou chroniques. Ces douleurs sont souvent moins bien appréhendées que celles liées à un
« soin technique ».
Ce sont les premières causes de douleur lors des enquêtes réalisées à l’hôpital Rothschild (Bellamy V.,
2005) : elles représentaient 50% des causes en 2001, 2002 et 2005.
A Emile Roux, 181 patients (73.6%) étaient aidés pour les transferts ; 26 % « un peu » douloureux, 11.6 %
« beaucoup » douloureux.
Ces douleurs à la mobilisation font partie du quotidien de la prise en charge des patients âgés. Il serait
intéressant de vérifier l’impact du développement des aides matérielles (verticalisateur, lève-malade) ; en
30
effet si elles permettent plus de confort pour les soignants et limitent les risques de chute, il n’est pas
évident qu’elles améliorent le bien-être des patients qui n’ont souvent pas toujours les capacités cognitives
pour comprendre ce qui se passe.
4/ Les soins d’hygiène
La dépendance des patients âgés vis-à-vis des activités de la vie quotidienne est très fréquente pour des
actes de base : toilette et habillage. Au cours de ces actes nous allons retrouver, bien entendu les douleurs
à la mobilisation, mais aussi les douleurs neuropathiques (passage du gant de toilette dans la zone atteinte,
notamment chez l’hémiplégique, frottement des habits, etc..) et des douleurs psychogènes liées à la pudeur
et à la perte d’estime de soi.
De plus le caractère répétitif de ces soins, moins valorisants pour les équipes soignantes que les « soins
techniques », les transforment souvent en soins routiniers. En outre, si plus le patient est soumis à la
répétition d’un geste invasif, plus il le classe comme douloureux, qu’en est-il pour ces soins douloureux
répétitifs, mais non invasifs ?
La toilette, geste de bien être chez tout un chacun, peut devenir un moment redouté, d’autant plus si ce
geste est pratiqué sans préparation ni préambule, par une équipe pressée au personnel notoirement
insuffisant.
Une enquête menée en soins de longue durée (Brasseur C., Cornu HP, Sachet A. ; 1994 ) retrouvait sur un
questionnaire simple d’hétéro-évaluation une douleur présente dans 64 % des toilettes, à laquelle il faut
ajouter 38 % de sensation d’inconfort (froid, savon dans les yeux, pudeur) ; au total, pour les ¾ des
patients la toilette est un moment pénible.
Encore à Emile Roux : 80% des patients étaient aidés pour la toilette ; 24 % « un peu » douloureux, 12 %
« beaucoup ». Ici encore seule la moitié des « beaucoup » était signalée dans le dossier, ce qui montre la
banalité de ce phénomène.
Enfin, pour reprendre l’étude réalisée à l’hôpital Broca, 61,1 % des prescriptions d’antalgiques de palier
III ont été réalisées pour des soins d’hygiène de vie.
La douleur provoquée par les soins en gériatrie dépasse de loin les gestes habituellement reconnus
comme étant douloureux ; de plus ils s’inscrivent dans une prise en charge longue (2 à 3 mois en SSR, 1 à
2 ans en SLD). Cette durée est souvent facteur d’émoussement de l’attention et de perte d’information sur
les pathologies « algogènes » du patient ; à contrario cette durée peut permettre de mieux connaître le
patient et ainsi mettre en place des protocoles individualisés tant médicamenteux que non médicamenteux.
31
L’utilisation du MÉOPA chez la personne âgée
Anne CAILLAUD
Infirmière Diplômée d’Etat
Centre Hospitalier de Boscamnant « Les Bruyères » - 17360 BOSCAMNANT
Introduction :
La douleur est une "expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée à un dommage
tissulaire présent ou potentiel, ou décrite en termes d’un tel dommage".
International Association for the Study of Pain ( IASP )
La personne âgée en gériatrie présente fréquemment des pathologies multiples et se trouve de ce
fait souvent polymédicamentée. Quelques chiffres : 60 % des personnes âgées ont des douleurs
chroniques, 80 % des personnes âgées ont des douleurs en fin de vie selon l’ANAES4 (Agence Nationale
d’Accréditation et d’Evaluation en Santé). La prévalence de la douleur en institution serait de 45 à 80 %
selon l’AGS (American Geriatrics Society) 2002.
Sur le plan juridique, selon le Code de la Santé Publique "Toute personne a le droit de recevoir
des soins visant à soulager la douleur. Celle -ci doit être en toute circonstance prévenue, évaluée et traitée"
(Article L.1110-5, alinéa 3). En ce qui concerne l’exercice infirmier, il est précisé dans la loi que "les
soins infirmiers ont pour objet… de participer à la prévention, à l’évaluation et au soulagement de la
douleur et de la détresse physique et psychique des personnes." (Article 2 du décret n° 2002-194 du 11
février 2002, relatif aux actes professionnel et à l’exercice de la profession d’infirmier).
Le CH de Boscamnant, situé en Charente-Maritime comprend 2 secteurs d’activité (un secteur
sanitaire de médecine et de soins de suite et de réadaptation et un EHPAD).
Présentation du MEOPA :
Le MEOPA, Mélange Equimoléculaire d’Oxygène et de Protoxyde d’Azote est un gaz médicinal,
inscrit sur la liste 1, réservé à l’usage hospitalier,
Il est incolore, inodore, constitué d’un mélange de 50% d’oxygène et 50% de protoxyde d’azote,
4 HAS : évaluation et prise en charge thérapeutique de la douleur chez les personnes âgées ayant des troubles de la communication – rapport ANAES octobre 2000
32
Il est commercialisé sous le nom de Médimix® 50 et de Kalinox®. Il a obtenu une AMM
(autorisation de mise sur le marché) récente (2001) pour le gaz et la bouteille.
Le Médimix® 50 se présente en bouteille de 135 bars de 1m3 (5 litres) et 3m3 (15 litres) avec un
robinet détendeur débitlitre intégré (AMM du 18/06/04).
Le Kalinox® 170bar se présente en bouteille de 170 bars de 1,5m3 et 6m3 (à 15°C)
Propriétés pharmacologiques : le MEOPA a un effet analgésique, un effet anxiolytique, il entraîne
un état de sédation consciente. C’est une analgésie comparable à celle obtenue par 10mg de morphine.
Indications : l’AMM précise que le MEOPA est indiqué pour :
l’analgésie lors de l’aide médicale d’urgence : traumatologie, brûlés, transport de patients
douloureux ;
la préparation des actes de courte durée, chez l’adulte et l’enfant : ponction lombaire,
myélogramme, petite chirurgie superficielle, pansements de brûlés, réduction de fractures
simples ;
les soins dentaires à l’hôpital :enfants, patients anxieux, patients handicapés, obstétrique :
attente de péridurale, refus ou impossibilité de la réaliser.
en gériatrie : pansements d’escarre et d’ulcères, ponctions et biopsies, ponctions veineuses
difficiles, sondage vésical difficile, extraction de fécalome, sutures, toilette…
Contre indications : selon l’AMM les contre-indications sont : le pneumothorax, la bulle
d'emphysème, l’embolie gazeuse, la distension gazeuse abdominale, l’hypertension intra crânienne, le
patient nécessitant une ventilation en oxygène pur, toute altération de l'état de conscience empêchant la
coopération du patient, accidents de plongée, traumatisme de la face.
Des contre indications relatives : peurs, phobies, agitation, précautions chez les patients sous
opiacés, benzodiazépines ou psychotropes.
Effets indésirables : le MEOPA peut provoquer des nausées et vomissements, une agitation,
angoisse, excitation, des sensations vertigineuses, paresthésies, modifications des perceptions sensorielles,
rêves, céphalées.
Déroulement d’un soin sous MEOPA :
Il est nécessaire de prévoir la présence d’une personne disponible pour l’administration du
MEOPA et la surveillance du patient pendant le soin. Les personnes habilitées à réaliser l’acte : médecins
33
ou soignants assurant une surveillance continue du patient, consacrés exclusivement à cette tâche, aux
connaissances périodiquement réévaluées.
Le MEOPA doit faire l’objet d’une prescription individuelle ou d’un protocole de service, écrit,
daté et signé par le médecin prescripteur.
Le jeûne est inutile.
Matériel : La bouteille de MEOPA (Médimix®50 ou Kalinox®) avec son détendeur intégré.
Vérifier la quantité de gaz dans la bouteille : si < 30 bars, prévoir une 2ème bouteille si le soin doit durer
plus de 15 minutes. Vérifier le bon arrimage de la bouteille. Vérifier le branchement du tuyau
d’alimentation à la bouteille et au ballon. Choisir un masque transparent adapté à la morphologie du
patient. Assembler le masque sur le raccord en « T » du ballon, en interposant un filtre anti-bactérien (à
usage unique) entre les deux.
Expliquer le soin : la première explication se fait avant d’amener le matériel dans la chambre ;
éviter d’utiliser le mot « gaz » ainsi que « obus » parfois mal accepté par les patients. Expliquer le
déroulement du soin. Prévenir des sensations ressenties, notamment : fourmillements, rêves, distorsion des
sons, euphorie. Dire que c’est normal et disparaîtra à l’arrêt de l’inhalation. Décrire l’utilisation du
masque et son utilité. Habituer le patient au masque : lui montrer, lui faire manipuler et essayer.
Réalisation : installer confortablement le patient pour permettre le déroulement du soin et
l’administration du MEOPA. Ouvrir la bouteille, régler le manomètre entre 6 et 12 l/mn, le ballon doit se
gonfler. Favoriser autant que possible l’auto-administration.
Faire respirer 3 minutes, avec un masque parfaitement étanche sur le visage ; si la personne enlève
le masque, recommencer 3 minutes. Régler le débit du gaz pour que le ballon reste gonflé mais souple.
C’est la personne qui administre le gaz qui donne le feu vert pour le début du soin.
Poursuivre l’inhalation pendant toute la durée du soin.
Surveiller en permanence la pression de la bouteille.
Parler avec le patient et le rassurer pendant toute la durée geste.
Il est souhaitable de réaliser le soin dans un environnement calme et d’éviter les bruits car le
produit peut provoquer une distorsion des sons.
Arrêter l’administration dès la fin du geste.
Surveillance : pendant toute la durée du soin, garder un contact verbal pour repérer l’apparition
d’un endormissement. Dans ce cas, enlever le masque et la sédation se dissipe.
34
En cas de vomissements, enlever le masque et mettre le patient en position latérale.
Après le soin : dès le retrait du masque, l’effet du MEOPA se dissipe et la personne retrouve son
état initial en quelques minutes.
Asseoir le patient quelques minutes avant de le lever.
Le patient peut manger normalement.
Evaluer la satisfaction du patient, la douleur pendant le soin, les effets indésirables et les noter sur
la feuille prévue à cet effet (« Fiche de suivi d’un patient traité par MEOPA »).
Vérifier la pression dans la bouteille, si le manomètre est dans la zone rouge, faire venir une 2ème
bouteille de la pharmacie.
Fermer la bouteille, puis le mano-détendeur quand la pression est redescendue à 0.
Jeter le filtre.
Nettoyer le masque à l’eau et au savon, le sécher et le laisser sur la table de nuit du patient
(masque réutilisable pour le même patient).
Le circuit (raccord, ballon, tuyau) ou kit sont réutilisables 15 fois. Cocher chaque utilisation sur le
ballon avec le marqueur.
L’expérience au centre hospitalier de Boscamnant :
Mise en place du MEOPA :
Septembre 2004 : décision du CLUD Intercommunautaire de mettre en place le MEOPA dans les
services. Dernier trimestre 2004 : recherche documentaire.
Janvier 2005 : présentation du MEOPA aux médecins, à la pharmacienne et aux cadres de
l’établissement ; esquisse d’un projet ; appel aux laboratoires.
Février 2005 : présentation du Médimix®50 (laboratoire AGA Médical), l’information générale a
été assurée par le fournisseur de gaz médical à l’ensemble du personnel médical et paramédical de
l’établissement ; rédaction du protocole de soins.
Mars 2005 : formation des référents douleurs du secteur sanitaire, mise en place dans les services
de soins.
Décembre 2005 : validation du protocole par les instances de l’établissement.
35
Bilan de l’utilisation :
En mars 2006, soit après 1 an d’utilisation :
7 infirmières et 10 aides-soignants ont été formés
21 soins ont été réalisés concernant 7 Patients dont 1 à l’EHPAD
19 soins réalisés avec satisfaction du patient et des soignants en ce qui concerne la prise
en charge de la douleur
2 échecs : 1 patiente douloureuse avant le soin, 1 patiente qui n’a pas supporté le MEOPA
En septembre 2006, soit après 18 mois d’utilisation :
12 infirmières et 10 aides-soignants ont été formés
42 soins ont été réalisés concernant 12 Patients dont 3 à l’EHPAD
38 soins réalisés avec satisfaction du patient et des soignants en ce qui concerne la prise
en charge de la douleur
4 échecs : 2 patientes douloureuses avant le soin, 1 patiente qui n’a pas supporté le
MEOPA et 1 patient pour lequel le MEOPA n’a pas été suffisant (3ème soin sous MEOPA).
Difficultés rencontrées
Sur le secteur sanitaire, la difficulté est liée au nombre insuffisant de bouteilles actuellement
disponibles (1 pour le bâtiment) et au stockage du matériel éloigné des services de soins. Mais ce
problème sera résolu prochainement lors de l’emménagement dans une structure neuve qui
permettra le stockage de la bouteille dans chaque service, tout en respectant la réglementation en
vigueur.
L’autre difficulté est liée à la technique, qui à l’EHPAD et parfois même sur le secteur
sanitaire a été un frein à l’utilisation du MEOPA : elle était assimilée à une technique
d’anesthésie. Ce frein a été levé dès l’utilisation du produit par la formation pratique et
l’encadrement systématique par l’infirmière référente douleur lors des premiers soins sous
MEOPA.
La dernière difficulté est le retard à l’utilisation du MEOPA ; les soignants y pensent mais très
rarement en première intention (ils demandent plus facilement une prémédication du patient).
Points positifs
Le soignant s’approprie assez rapidement la technique dès qu’il constate l’efficacité du produit
et le soulagement de la douleur qu’il procure aux patients lors du soin.
Les soignants de l’EHPAD ont adapté leur organisation des soins pour l’utilisation du
36
MEOPA sur le temps de relève infirmier : c’est un binôme infirmier qui réalise le soin , à la
différence du secteur sanitaire où le soin est réalisé le matin par le binôme IDE/AS.
Conclusion :
Le MEOPA est un outil thérapeutique dans la prise en charge de la douleur provoquée par les
soins qui ne dispense pas d’un traitement antalgique de fond.
Il permet de réaliser des soins douloureux avec un effet antalgique rapide, ne présentant pas
d’effets secondaires et peu d’effets indésirables.
Il participe au soulagement des patients lors des soins et permet par voie de conséquence une
satisfaction des soignants.
37
RRéé ssiiss ttaannccee ss àà ll’’uuttiilliiss aattiioonn dduu MM EEOOPPAA ee nn ggéérriiaattrriiee ee tt ee nn ssooiinnss ppaalllliiaattiiffss
Pierre Basset *, Patricia Dompnier **,Evelyne Cruz** service douleur et soins palliatifs, 73011 Chambéry cedex, B.P. 1125
[email protected] * Médecin , ** IDE référente douleur / soins palliatifs
L’utilisation du MEOPA en milieu adulte et gériatrique est de développement récent ou reste
encore anecdotique et confidentielle.
Par une étude randomisée, méthodologiquement rigoureuse, nous avons confirmé l’efficacité du
MEOPA dans les soins d’escarres et d’ulcères douloureux, chez l’adulte et la personne âgée, ainsi que sa
bonne tolérance et la rareté des effets indésirables.
L’utilisation du MEOPA n a pas été une perte de temps pour le soignant et si l’on prend en compte
uniquement la durée du soin, celle-ci est plus courte sous MEOPA. Le patient étant mieux calmé,
l’infirmière peut travailler plus sereinement et plus efficacement. Par expérience, au cours de l’étude, nous
avons constaté que la durée de l’inhalation préalable au soin devait être suffisante.
Le MEOPA a été utilisable aussi chez des patients non communicants et présentant des troubles
des fonctions supérieures avec une coopération plus ou moins aléatoire, sans différence significative sur
l’efficacité de l’antalgie pendant les soins.
Cette méthode nécessite un personnel sensibilisé au fait de prendre le temps de familiariser le
patient au masque, de l’adapter au visage souvent amaigri, l’encourageant à respirer calmement lors des
premières minutes d’inhalation. Nous retrouvons ici les conduites à tenir en pédiatrie lors de
l’administration au petit enfant. Compte tenu de ces réserves, les patients présentant un syndrome
démentiel acceptent le masque sans problème particulier par rapport à une population non démente.
Les effets indésirables constatés (sensation d’ébriété, euphorie, logorrhée, somnolence, agitation)
ont toujours été bénins et transitoires, cédant en quelques minutes tout au plus après la fin de l’inhalation
et n’ont jamais entraîné l’arrêt prématuré d’un soin.
Nous avons pu constater plusieurs fois, qu’après des soins indolores sous MEOPA, il était
possible de s’en passer comme si le patient avait moins peur d’avoir mal. Par ses propriétés anxiolytiques,
le MEOPA a probablement agi sur cette composante psychique de la sensation douloureuse et sur
l’anticipation de l’anxiété liée au soin.
Par son efficacité, sa facilité d’emploi, sa rapidité de mise en action, ses contre-indications
restreintes, et en respectant les règles d’usage, le MEOPA peut être considéré comme un traitement
efficace qui devrait désormais faire partie de notre « arsenal » thérapeutique pour lutter contre la douleur.
38
Cependant, ce n’est pas parce qu’une méthode a prouvé son efficacité de manière
méthodologiquement rigoureuse qu’elle est facilement adoptée dans les services ou par les équipes de
soins. Durant ces dernières années nous avons ainsi pu repérer un certain nombre de freins et d’obstacles à
l’utilisation de la méthode. Ceux ci peuvent être d’ordre techniques, pédagogiques, psychologiques,
socioculturels, institutionnels, économiques, organisationnels.
En premier lieu l’idée de faire des soins moins douloureux demande une remise en cause de nos
pratiques, et il a fallu attendre qu’elle constitue un axe prioritaire du plan de lutte contre la douleur pour
faire l’objet d’une attention particulière au sein de nombreuses équipes, tant l’idée de la douleur
inévitablement liée au soins était ancrée dans les esprits.
Même quand une idée est intellectuellement comprise par les soignants, ce n’est pas pour autant
qu’elle est appliquée, tant que son utilité n’est pas ressentie. S’agit-il d’une réelle « résistance », car quel
soignant ne veut-il pas le bien du malade ? ou plutôt d’un manque de réceptivité à une idée nouvelle ?
Pour que les professionnels de santé soient réceptifs au changement, il faut que non seulement ils
en comprennent le bénéfice pour le malade mais aussi pour eux mêmes et l’équipe, d’autant plus que cette
méthode demande une certaine contrainte. Il faut que l’effort nécessaire pour intégrer cette pratique
nouvelle soit compensé par le bénéfice qu’ils comptent en tirer.
Un certain nombre de conditions sont nécessaires pour réussir à obtenir une « masse critique »
suffisante de personnels formés, l’implication des instances institutionnelles, des messages clairs,
constants et répétés et le maintien suffisamment longtemps de la priorité donnée à la réalisation de soins
non douloureux.
Bien qu’elle soit simple d’application, cette méthode nécessite un personnel bien formé à son
utilisation qui doit se faire avec rigueur pour être efficace. Le non respect d’une technique rigoureuse (être
deux pour réaliser le soin, application du masque, temps d’inhalation suffisant avant la réalisation du soin,
explication de la méthode au malade et aux soignants réalisant le geste) peut conduire à son inefficacité.
Il faut insister sur la nécessité d’un encadrement et d’un accompagnement pédagogique par une
équipe douleur rompue à son utilisation pour former les soignants au moins durant les premiers soins.
Comme toute nouvelle méthode, en aucun cas il ne faut la banaliser trop facilement dans une équipe de
soins, s’il n’est pas possible de réaliser un accompagnement pédagogique dans lequel le rôle de l’équipe
douleur référente est essentiel pour les conseils dans l’organisation des soins.
Les idées liées à la connotation particulière d’un produit gazeux avec les références historiques et
culturelles qui peuvent lui être associées doivent être bien prises en considération, d’autant plus qu’elles
ne sont pas verbalisées. Certains termes doivent être évités comme « gaz » ou « obus ».
39
Les contraintes économiques prendront à l’avenir de plus en plus d’importance. La demande de
l’institution est de moins dépenser et les choix financiers doivent se faire de la manière la plus judicieuse
possible. Un soin de 20 mn sous MEOPA revient à environ 10euros, une ampoule de 10 mg de morphine
coûte 0,19euros, un patch d’Emla® 2,4euros. Un vieillard qui reçoit une benzodiazépine pour un soin peut
somnoler plusieurs heures après le soin mais il difficile de chiffrer et de prouver le coût de la perte
d’autonomie, de la baisse de vigilance, du risque de chutes, de la dénutrition.
En ce qui concerne les contraintes organisationnelles à la pharmacie, le MEOPA est un produit
spécifique à gestion particulière, soumis à la réglementation des stupéfiants, nécessitant des connaissances
spécifiques, un local de stockage. La gestion en est plus lourde que la gestion des morphiniques.
Pour les services économiques (qui achète quoi ?), la bouteille, le détendeur, les ballons, les
masques, le matériel à usage unique, le chariot ne sont pas commandés et achetés par le même service et
posent le problème des frontières et des relations entre les services.
Enfin, le service de médecine du travail peut être amené à intervenir pour information auprès du
personnel sur les risques ou surtout la peur des risques encourus par le personnel au cours d’une utilisation
épisodique.
La diffusion d’une telle méthode au sein d’un hôpital ou d’une institution sanitaire concerne de
nombreux acteurs : services de soins, équipe douleur et soins palliatifs, services économiques, médecine
du travail, service de brancardage et ambulancier, Clud, pharmacie, service bio médical…
A chaque niveau peuvent se rencontrer des obstacles, des réticences, voire des résistances de tous
ordres : économiques, psychologiques, organisationnels, humains…
En ce sens on peut avancer l’hypothèse que l’utilisation courante du MEOPA dans une institution
révèle la qualité de la communication institutionnelle entre les différents services et entre les
professionnels de santé.
Références :
Horvath R., Thierry S., Le mélange équimoléculaire oxygène - protoxyde d’azote (MEOPA) :
intérêt au cours des soins d’escarre et d’ulcères douloureux chez l’adulte et la personne âgée,
étude pilote. Thèse Médecine, Grenoble, 2002.
40
DOULEUR PROVOQUEE EN REANIMATION CHEZ L’ADULTE
Dr Luc Brun ; Equipe douleur Centre Hospitalier Béziers
Service de réanimation polyvalente Définitions – Mécanismes : La douleur en réanimation correspond à la définition de l’International Association Study of Pain : c’est
une « expérience sensorielle et émotionnelle désagréable liée à une lésion tissulaire existante ou
potentielle ou décrite en termes d’une telle lésion ».
Les dimensions de la douleur en réanimation concernent donc :
La composante sensorielle ou somatique, c’est à dire l’activation des voies de la douleur depuis le
nocicepteur périphérique jusqu’à l’intégration corticale cérébrale, et l’ensemble des systèmes facilitateurs
et inhibiteurs.
La composante affective et émotionnelle, c’est la relation à double sens entre la douleur et l’état
de l’humeur, l’expérience désagréable.
La composante cognitive, c’est la représentation psychique de la douleur par rapport aux
expériences douloureuses antérieures (mémorisation implicite et explicite) et aux événements associés aux
épisodes douloureux. C’est l’ensemble des idées associées à l’expérience douloureuse.
La composante comportementale, c’est le comportement adopté par l’individu en cas de situation
douloureuse. Il est à la base des échelles comportementales.
Les mécanismes mis en jeu par toute expérience douloureuse concernent la stimulation nociceptive
périphérique (activation des nocicepteurs cutanés) ou profondes (douleurs musculo-squelettiques,
viscérales) ; l’altération des voies de conduction de la douleur (douleur neuropathique) et une participation
psychogène (aggravation de la sensation de douleur par un état anxio -dépressif).
Les patients de réanimation sont le plus souvent traités par morphiniques à forte dose (cf chapitre
principes d’une sédation analgésie en réanimation), des effets de tolérance à la morphine et d’hyperalgésie
induite peuvent donc apparaître au cours du séjour du patient. Etiologie : Les origines de la douleur en réanimation sont multiples :
Les facteurs liés au patient : antécédents de pathologies algogènes : polyarthrite rhumatoïde,
arthrose, lombalgies, zona…
Les facteurs liés à la pathologie : intervention chirurgicale, pancréatite, traumatisme, lésion
nerveuses (plexus brachial, hémiplégie douloureuse, traumatisme médullaire)…
41
Les facteurs liés à la réanimation :
Alitement prolongé (complications du decubitus), rétention d’urines, iléus réflexe, fièvre,
défaillances d’organes (acidose…)
Facteurs liés aux soins et actes douloureux (tableau 1)
Stress et facteurs psychologiques : anxiété puis dépression.
Tableau 1 : Actes douloureux en réanimation
Conséquences de la douleur en réanimation :
De nombreuses études se sont intéressées aux conséquences sur la morbidité et la mortalité liées à la
douleur en réanimation [1, 2].
Les conséquences à court terme de la douleur sont dues à l’activation du système sympathique par les
stimulus nociceptifs répétés : tachycardie, hypertension artérielle, augmentation de la consommation en
oxygène du myocarde, état d’hypercoagulabilité, hyperglycémie et catabolisme. Une immunodépression
est également associée.
Les effets respiratoires d’une douleur abdominale (post opératoire ou non) ou thoracique (traumatisme ou
chirurgie thoracique) mal contrôlées peuvent accélérer une décompensation respiratoire ou retarder la
prise en charge par le kinésithérapeute d’autant plus qu’une insuffisance respiratoire sous jacente
préexiste.
La douleur est un facteur majeur d’agitation[3]. Les complications liées à l’agitation sont une extubation
accidentelle, une désadaptation du respirateur avec les complications respiratoires consécutives, un patient
non coopérant pour les soins qui peut être dangereux pour lui même et l’équipe soignante. L’agitation en
réanimation est multifactorielle (médications par psychotropes, éthylisme, fièvre et sepsis,
dysnatrémies…) et est associée avec une prolongation de la durée de séjour en réanimation et des
infections nosocomiales.
Dans un contexte de neuroréanimation, la douleur mal contrôlée peut faire augmenter la pression
intracranienne et majorer les complications cérébrales. Une analgésie efficace est indispensable et fait
partie du traitement neurologique (associé à la sédation)[4].
§ Pose de cathéter artériel et veineux central § Prélèvement artériel § Ponction lombaire § Pose et retrait drain pleural § Trachéotomie, intubation trachéale, aspiration bronchique § Fibroscopie bronchique § Pose de cathéter sus pubien § Kinésithérapie, nursing, pansement…
42
La douleur intense et répétée en réanimation ne doit pas être sous estimée et une véritable chronicisation
de la douleur peut donner des complications à long terme. Ces éta ts et sensations désagréables dans un
environnement psychologique hostile, l’association à l’anxiété et à la dépression peuvent conduire à de
véritables états de stress post traumatique avec hallucinations et reviviscences de faux souvenirs plusieurs
semaines et mois après la sortie de réanimation[5].
La chronicisation de la douleur en réanimation a été étudiée. Des études récentes retrouvent que 44% des
patients se plaignent de douleurs plus intenses et d’inconfort 18 mois après leur sortie de réanimation par
rapport à leur état avant la réanimation[6]. L’incidence des douleurs est plus importante 6 ans après la
sortie de réanimation par rapport à une population témoin appariée sur l’âge[7]. Epidémiologie : La prévalence de la douleur est importante en réanimation : entre 50 et 63% des patients expérimentent
une douleur lors de leur séjour en réanimation et plus de 15% des patients déclarent avoir perçu une
douleur très intense[8-10]. L’aspiration trachéale, la ponction artérielle, l’ablation des drains thoraciques
et la mobilisation du patient sont les gestes les plus douloureux dans le souvenir des patients de
réanimation[10, 11].
Les enquêtes effectuées auprès des patie nts survivants montrent qu’outre la douleur liée aux soins,
l’impossibilité de communiquer aux soignants ou aux proches cet état douloureux est traumatisant[12].
Par ailleurs, le manque de sommeil, les cauchemars, l’anxiété, les hallucinations, la solitude,
l’impossibilité de communiquer ou parler sont des éléments générateurs d’inconfort.
Une enquête française réalisée en 2004 auprès de 30 services de réanimation d’Ile de France montre que
tous les services utilisent une analgésie par morphiniques, mais pour les soins douloureux seuls 8 sur 30
donnent un traitement préventif ; pour les aspirations bronchiques seuls 3 sur 30[13].
Une enquête nord américaine récente montre que 63% des patients de réanimation ne reçoivent aucun
antalgiques pour des soins douloureux, moins de 20% reçoivent des morphiniques, et pratiquement aucun
lors d’aspiration trachéale [14]. Principes d’une sédation analgésie en réanimation : Les habitudes dans les réanimations européennes sont l’association intraveineuse continue d’un
hypnotique (dont le but est de diminuer l’état de vigilance et de mémorisation du patient) et d’un
morphinique puissant (dont le but est d’entraîner une analgésie)[15]. L’hypnotique seul permet de
diminuer les signes de douleur mais n’empêche pas les mémorisations implicites de douleur qui peuvent
avoir des conséquences à court et moyen terme par activation des relais sous corticaux des voies de la
douleur[16].
43
L’association hypnotique et morphinique est synergique et permet d’adapter au mieux la sédation et
l’analgésie en modulant ces deux composantes. Une administration plus adaptée est rendue possible par
leur évaluation distincte : évaluation de l’état de vigilance et évaluation de la douleur.
Les sociétés savantes en France ont écrit des recommandations sur l’utilisation de la sédation et de
l’analgésie en réanimation[17].
Les hypnotiques les plus couramment utilisés sont les benzodiazépines (midazolam) ou le propofol ; et les
morphiniques sont le fentanyl, le sufentanil, la morphine et plus récemment le rémifentanil[13, 15, 18].
Le fentanyl et le sufentanil sont des morphiniques liposolubles puissants, de délai d’action court (moins
de 5 minutes) et de durée d’action modérée (en moyenne une heure) après un bolus. Il n’y a pas
d’accumulation de métabolites actifs en cas d’insuffisance rénale. Les avantages du sufentanil sur le
fentanyl sont sa moindre accumulation après une perfusion continue de longue durée et le fait qu’il
nécessite moins d’adaptation des posologies chez le sujet agé [19]. Le coût est cependant plus élevé. La
morphine a un délai d’action court (moins de 5 minutes) et une durée d’action plus prolongée (3 à 7 h)
après un bolus. Les effets indésirables sont une histaminolibération et une accumulation de métabolites
actifs en cas de fonction rénale altérée (morphine-6-glucuronide).
Le rémifentanil est un morphinique aussi puissant que le fentanyl mais de demi-vie plus courte et dont le
métabolisme est dépendant d’estérases plasmatiques jamais déficitaires. L’administration se fait en
perfusion continue, jamais en bolus qui expose au risque d’hypotension artérielle sévère et de rigidité
thoracique. Il s’agit d’un médicament qui permet d’adapter en permanence l’intensité de l’analgésie en
fonction de l’intensité des stimulus nociceptifs. Par ailleurs, il possède des capacités de modification de
l’état de conscience qui ont conduit au concept d’analgo-sédation (sédation basée sur l’analgésie)[20].
Les recommandations des sociétés savantes proposent de contrôler la douleur de fond par une
administration continue de morphiniques par voie intraveineuse. Les douleurs liées aux soins doivent être
prévenues et anticipées par plusieurs moyens médicamenteux ou non médicamenteux.
Les objectifs d’une sédation sont d’améliorer le confort et la sécurité du patient et de son entourage, de
permettre la réalisation d’actes thérapeutiques ou d’investigations dans des conditions optimales de
confort et de sécurité pour le patient.
Le traitement antalgique peut être mis en échec dans certaines situations. Il convient de rechercher une
douleur neurogène associée pour laquelle un traitement par antiépileptique ou antidépresseur tricyclique
est nécessaire.
La tolérance aux morphiniques se traduit par une augmentation majeure des posologies de morphiniques
pour obtenir un effet antalgique et à l’apparition d’effets secondaires. Dans ce cas, on peut associer la
44
clonidine ou la kétamine à dose « antihyperalgésique » en l’absence de contre indication (défaillance
hémodynamique et clonidine par exemple)[21]. Obstacles à une analgésie optimale en réanimation : Le contexte de réanimation n’est pas favorable à une prise en charge optimale de la douleur. L’urgence
vitale relègue en arrière plan la gestion de la douleur, parfois l’équipe soignante peut être tentée de
penser « le patient a mal ou souffre, oui, mais il est vivant ! ».
Nous avons vu que cette attitude outre le problème éthique qu’elle pose, n’est pas sans conséquences sur
le plan somatique et psychologique[22].
Le patient aillant plusieurs défaillances d’organes, notament respiratoire et hémodynamique, les effets
secondaires des médicaments de la douleur sont plus souvent redoutés, ce qui peut freiner leur utilisation.
Les morphiniques sont connus comme hypotenseurs et dépresseurs respiratoires. Des études ont démontré
qu’une sédation trop intense pouvait conduire à une augmentation de la durée de ventilation mécanique et
du séjour en réanimation[23, 24]
Les antiinflammatoires non stéroïdiens ont une action délétère sur la fonction rénale et plaquettaire et sont
agressifs pour la muqueuse gastrique. Les anti-inflammatoires selectifs de la cyclo-oxygénase de type 2
(Coxibs) sont moins agressifs pour la muqueuse gastrique au long cours[25] et n’entraînent pas de risque
hémorragique accru (pas d’action antiagrégante plaquettaire). Cependant, les complications
cardiovasculaires qui ont récemment entraîné le retrait du marché du rofecoxib (Vioxx) méritent des
études complémentaires avant de pouvoir recommander les coxibs chez le patient de réanimation.
Les corticoïdes à posologie anti-inflammatoire ont des effets immunitaires et digestifs qui limitent leur
utilisation comme antalgiques purs. Ils seront utilisés en réanimation pour le traitement de pathologie
comme les maladies inflammatoires (SDRA en phase proliférative, décompensation de BPCO, fibrose
pulmonaire évolutive, maladie de système…).
Les techniques d’analgésie locorégionale périmédullaire (péridurale) exposent au risque d’infection et de
compression médullaire par hématome en cas de trouble de la crase sanguine.
L’évaluation de la douleur chez le patient de réanimation non communicant est un réel problème qui a été
solutionné en grande partie ces dernières années par le développement d’échelles comportementales[26-
29].
45
Les solutions pour une meilleure prise en charge de la douleur en réanimation : Comme dans toute douleur, l’évaluation est le pivot d’une prise en charge efficace et la réanimation
n’échappe pas à cet axiome. Longtemps, l’évaluation a été (et reste encore) le frein le plus important à la
reconnaissance de la douleur, à son traitement et au suivi de l’efficacité du traitement.
L’évaluation par les soignants qui n’utilisent pas d’échelle spécifique sous estime de 35 à 55% les patients
douloureux[30].
Les patients de réanimation adulte sont très hétérogènes : depuis le post opératoire de chirurgie cardiaque
où le trouble hémodynamique est réel ou potentiel mais où le patient est le plus souvent réveillé et
coopérant, jusqu’au patient en phase tardive d’un traumatisme crânien où la collaboration avec l’équipe
soignante est d’autant plus limitée qu’une agitation survient au réveil, en passant par le patient en
défaillance respiratoire sous assistance respiratoire majeure avec une sédation profonde et une
curarisation… Les recommandations des sociétés savantes françaises et nord-américaines préconisent l’auto évaluation
dans la mesure du possible [17, 31]. La préférence va à l’échelle numérique (EN) mais l’échelle visuelle
analogique (EVA) et l’échelle verbale simple (EVS) peuvent être utilisées. Un outil a été développé pour
l’autoévaluation du patient de réanimation : c’est une règle de grande dimension graduée avec de gros
chiffres de 0 à 10 et le patient montre au soignant avec son doigt le chiffre qui correspond à l’intensité de
sa douleur.
Lorsque le patient est intubé et ventilé et non coopérant, une hétéroévaluation s’impose. Des échelles
comportementales ont été développées, à l’instar des échelles utilisées chez l’enfant de moins de 6 ans qui
ne peut s’autoévaluer. La plus utilisée en France actuellement est l’échelle Behavioral Pain Scale (BPS)
ou Echelle de Douleur en Réanimation développée par l’équipe de JF Payen[28]. Cette échelle est valide
et est basée sur l’observation de 3 items : la mimique, le tonus des membres supérieurs, la compliance au
respirateur (tableau 2). Le score varie de 3 à 12 et le patient est considéré comme douloureux à partir de 6.
Le problème qui persiste actuellement est l’évaluation de la douleur chez le patient non ventilé et non
coopérant (du fait d’une agitation ou d’une encéphalopathie) : il n’est pas accessible à l’autoévaluation et
le BPS n’est pas adapté (item compliance au respirateur inutilisable). Ces patients sont nombreux en
réanimation. Des échelles spécifiques devront être développées dans l’avenir.
Les méthodes objectives de mesure de la douleur ne sont pas appropriées au patient de réanimation :
pupillométrie, indice bispectral, électroencéphalogramme, potentiels évoqués n’ont pas leur place.
Chanques et al ont démontré que l’évaluation systématique de la douleur par autoévaluation quand cela
est réalisable ou l’hétéroévaluation par le BPS dans le cas contraire diminue la prévalence de la douleur
46
dans un service de réanimation de 63% à 43%[32]. L’adaptation de la sédation et de l’analgésie est
optimisée et les consommations d’antalgiques morphiniques et d’hypnotiques diminuent ainsi que la durée
de ventilation mécanique. La formation des équipes médicales et paramédicales est indispensable à
l’utilisation effective de ces échelles, donc au diagnostic positif de douleur lorsqu’elle survient et par
conséquent à l’instauration rapide d’un traitement efficace.
Ces outils d’évaluation de la douleur peuvent être utilisés dans le cadre de protocoles de sédation et
d’analgésie. Des algorithmes précis autorisent les infirmières à adapter en permanence (notament pendant
les soins) la sédation et l’analgésie en fonction des scores de douleur et de sédation. Plusieurs équipes ont
démontré que l’utilisation de ces algorithmes par les infirmières diminuait les sédations prolongées et
donc la durée de ventilation mécanique[23, 27, 33].
Item Observation score
Visage Détendu, relaché 1 Partiellement crispé (froncement de sourcils) 2 Crispé (fermeture des yeux) 3 Grimaçant 4 Membres supérieurs Pas de mouvements 1 Partiellement fléchi 2 Flexion complète avec fermeture des mains 3 Rétraction permanente 4 Adaptation à la ventilation
Adaptation complète 1
Tousse de temps en temps mais se laisse ventiler la plupart du temps
2
Lutte contre le respirateur 3 Impossible à ventiler 4 Tableau 2. BPS ou Echelle de douleur en réanimation[28] Stratégie de prise en charge de la douleur provoquée : Dans tous les cas il convient d’évaluer la douleur avant et pendant le soin douloureux. Si la douleur est
présente malgré le traitement instauré, il conviendra de modifier le traitement (escalade thérapeutique)
pour le prochain soin. C’est l’évaluation systématique qui permet de faire le diagnostic de douleur et de
prouver l’inefficacité ou l’efficacité d’un traitement. De ce fait la prise en charge anticipée des soins
douloureux limite le plus possible la répétition des expériences vécues comme douloureuses par le patient.
Les complications de la douleur en réanimation seront donc limitées.
La stratégie la plus efficace est de lister les soins douloureux dans un service (tableau 1), et de définir pour
chaque soin une thérapeutique anticipée de la douleur. L’évaluation de la douleur selon une échelle
appropriée sert de point de départ à des protocoles de gestion anticipée de la douleur provoquée par le
47
soin. Les protocoles écrits et validés par les responsables médicaux et paramédicaux du service sont
ensuite diffusés à l’intégralité de l’équipe médicale et paramédicale.
Plusieurs cas sont à envisager :
- le patient en post opératoire d’une chirurgie lourde
- le patient avec plusieurs défaillance d’organe intubé ventilé et sédaté
- le patient de post réanimation en sevrage de morphiniques et d’hypnotiques.
Le patient coopérant et qui peut s’autoévaluer :
En général, ce type de patient bénéficie d’une analgésie post opératoire multimodale à base de
morphinique et au mieux par PCA de morphine. Une analgésie locorégionale peut être associée : une
péridurale thoracique par exemple pour une chirugie thoracique ou abdominale sus mésocolique. Dans ce
cas, la douleur de fond liée à la chirurgie est bien contrôlée.
Chez ce type de patient coopérant, la qualité de la relation avec le soignant sera prépondérante.
L’information et l’explication avant les soins feront diminuer l’anxiété et donc la composante affectivo-
émotionnelle de la douleur.
Les accès douloureux liés aux soins doivent conduire à un traitement anticipé selon le type de soin :
- Anesthésie locale (lidocaïne) pour la pose d’une voie veineuse centrale ou d’un drain thoracique[34] ;
- Patch ou crème EMLA pour les ponctions ou cathétérisations artérielles une heure ou deux heures
avant la ponction[35] ;
- Bolus de morphinique par l’infirmière (cf tableau 3) ou par le patient si une PCA est en place avant la
kinésithérapie respiratoire, un nursing ou un pansement douloureux, une aspiration bronchique…
Il faut tenir compte du délai d’action du produit avant d’effectuer le geste douloureux. Les
recommandations de la Société Française d’Anesthésie Réanimation (SFAR) et de la Société de
Réanimation de Langue Française (SRLF) retiennent l’alfentanil (Rapifen) comme morphinique de
choix pour les actes de courte durée du fait de son délai d’action court et de sa durée d’action
courte[17](grade C).
- Administration de MEOPA pour la pose ou l’ablation d’un drain thoracique, d’une kinésithérapie ou
d’un nursing douloureux, d’une réfection de pansement.
- La kétamine est un hypnotique avec des propriétés analgésiques à dose anesthésique. Cependant s’il est
utilisé pour un geste douloureux (classiquement, un pansement chez un brûlé), il convient d’associer une
benzodiazépine (midazolam par exemple) pour limiter les effets psychodysleptiques de la kétamine.
L’avantage est de garder une ventilation spontanée et des voies aériennes supérieures libres, ainsi qu’une
stabilité hémodynamique. Une bronchodilatation peut être un intérêt supplémentaire chez le patient
asthmatique.
48
Adaptation des posologies
Posologie Concentration plasmatique
efficace (ng.mL-1)
Sujet âgé Insuffisance rénale
Insuffisance hépatique
Kétamine B : 1 à 2 mg.kg-1 P : 0,15 à 3,5 mg.kg-1.h-1
100 à 1000 - -
Morphine B : 0,03 à 0,1 mg.kg-1
P : 1 à 5 mg.h-1 - - 0
Fentanyl B : 1 à 3 µg.kg-1 P : 1 à 5 µg.kg-1.h-1 1 à 2 - 0 0
Sufentanil B : 0,1 à 0,3 µg.kg-1 P : 0,1 à 0,5 µg.kg-1.h-1 0,05 à 0,2 - 0 0
Alfentanil B : 3 à 10 µg.kg-1 P : 20 à 50 µg.kg-1.h-1
25 à 75 - 0 -
Tableau 3 : Posologies et concentrations plasmatiques efficaces des principaux agents hypnotiques et morphiniques. B : bolus; P : perfusion ; 0 : posologie inchangée ; - : diminution de la posologie. D’après[17]
Le patient intubé ventilé sédaté ne pouvant s’auto évaluer : C’est le prototype du patient de réanimation. L’évaluation se fera par le BPS.
Les études récentes ont démontré qu’une sédation trop profonde avec des patients aréactifs en réanimation
induisait des complications (augmentation de la durée de la ventilation mécanique et des infections
bronchopulmonaires). La tendance actuelle est donc d’alléger la sédation avec un objectif de patient calme
et confortable mais réactif à la stimulation. Le risque est de sous doser l’administration d’antalgiques,
notament lors d’une recrudescence de la nociception au cours des soins.
La stratégie d’anticipation de la douleur consiste à administrer un bolus de morphinique 2 à 5 minutes
avant le soin douloureux. Les posologies sont variables en fonction de la dose de morphinique
quotidienne, et sont données dans le tableau 3 à titre indicatif.
Les anesthésiques locaux pour les ponctions gardent leur place.
Il est rare qu’à ce stade de la réanimation un cathéter périmédullaire soit laissé en place du fait du risque
infectieux ou d’hématome périmédullaire.
La PCA n’a pas sa place dans le contexte.
Dans le cas particulier d’une analgésie par rémifentanil par voie intraveineuse continue, il faut souligner
que ce médicament est idéal pour le traitement des douleurs provoquées. En effet, il s’agit d’augmenter la
vitesse d’administration du produit (de 50 à 100% de la vitesse de base) 2 minutes avant le soin
douloureux (aspiration bronchique, nursing, pansement, ponction) pour être au pic d’action du produit et
de revenir à la vitesse de base une fois le soin effectué.
49
Les injections de bolus ou les modifications de vitesse en cas de rémifentanil peuvent être faites par les
infirmières de réanimation sous la responsabilité du médecin sous réserve que des protocoles aient été
établis et que les équipes aient été formées à ces pratiques et aux méthodes d’évaluation de la douleur[36].
Le patient de post réanimation Ce type de patient est sujet à l’hyperalgésie liée au morphiniques, au sevrage morphinique et des
benzodiazépines s’il a été sédaté. Il est donc très fragile face à la douleur provoquée par les soins.
L’hyperalgésie aux morphiniques a été décrite récemment comme un des effets indésirables des
morphiniques. Dans cette situation, les patients qui reçoivent des morphiniques pour le soulagement d’une
douleur deviennent, d’une façon un peu paradoxale, plus sensibles à la douleur comme conséquence
directe du traitement morphinique.
Il est impératif d’obtenir une analgésie de fond parfaite. L’analgésie balancée trouve sa place ici en relais
des morphiniques : l’association de palier 1 et de palier 2 de l’OMS, l’administration de clonidine en cas
de sevrage morphinique, sans oublier l’administration de coantalgiques en cas de douleur neurogène
associée (antiépileptiques et antidépresseurs tricycliques en respectant les contre indications).
L’anxiété doit être combattue par la relation avec le soignant et des aides pharmacologiques:
benzodiazépines par exemple. Un syndrome dépressif doit être recherché et traité. Il est impératif de
respecter le sommeil de ces patients : diminution du bruit et des actes invasifs pendant la nuit, induction
pharmacologique du sommeil en cas de besoin : hydroxyzine, zolpidem…
Les soins douloureux seront précédés des mêmes traitements que pour le premier type de patient mais
adaptés en fonction de la collaboration du patient. Il est évident que s’il est agité et opposant, il ne pourra
pas bénéficier d’administration de MEOPA dans de bonnes conditions. Dans ce cas des bolus de
morphiniques voire d’hypnotiques seront nécessaires. L’utilisation d’anesthésiques locaux pour les
ponctions associée à la sédation garde toute sa place.
Il ne faut surtout pas oublier qu’un patient peut être agité à cause de la douleur, et qu’une sédation chez un
patient agité ne traite pas la douleur liée aux soins ! Une analgésie associée à la sédation est obligatoire
pour accomplir des gestes douloureux sinon la mémorisation implicite de la douleur apparaîtra.
Conclusion : La douleur en réanimation est fréquente et sous estimée. Des échelles d’évaluation de la douleur
spécifiques ont été développées et tout soignant travaillant en réanimation doit apprendre à les utiliser.
Des évaluations systématiques de la douleur permettent de mettre en place un traitement adapté et de
limiter la chronicisation de la douleur. Au mieux, des protocoles avec des algorithmes de pilotage de
50
l’analgésie par les soignants permet de diminuer la durée de ventilation mécanique et peut être l’incidence
des infections bronchopulmonaires.
Les bolus de morphiniques, les anesthésiques locaux et le MEOPA sont la base du traitement anticipé de
la douleur provoquée par les soins.
Il ne faut pas oublier qu’un patient sédaté peut être mal analgésié et vivre inconsciemment une expérience
douloureuse (mémoire implicite).
Enfin, des progrès doivent être faits pour évaluer la douleur chez les patients de post réanimation non
communicants. BIBLIOGRAPHIE 1. Bonica, J.J., Importance of effective pain control. Acta Anaesthesiol Scand Suppl, 1987. 85: p. 1-
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36. Ministère de l'Emploi et de la solidarité Direction générale de la Santé, CIRCULAIRE N° DGS/DH/DAS/SQ2/99/84 du 11 février 1999 relative à la mise en place de protocoles de prise en charge de la douleur aiguë par les équipes pluridisciplinaires médicales et soignantes des établissements de santé et institutions médico-sociales. 1999.
Equipe Douleur de la réanimation du Centre Hospitalier de Béziers Dr Luc Brun, praticien hospitalier Mme Delphine Ramajo, Cadre de Santé
52
Mme Nelly Marti, Mme Michèle Simonin, Mme Cathy Le Caignec, Mme Stéphanie Gumiel, Mme Valérie Geudin, Mme Catherine Galland, Mme Christine Tonello, Infirmières Diplômées d’Etat Mme Christiane Massol, Mme Corinne Diguet, Melle Cécile Compain, Aides soignantes
53
Prise en charge de la doule ur chronique à domicile par bloc nerveux périphérique continu.
E. Bures*, J.F. Quillet*, L. Schneider*, P. Rivet*, J.M. Constantin**, G. Etienne**, J.P. Estebe***. *Service d’Anesthésie, Clinique Saint Joseph, Angoulême
** Service de Chirurgie Vasculaire, Clinique Saint Joseph, Angoulême *** Département d’Anesthésie du CHU de Rennes
L’emploi des blocs nerveux continus est en augmentation constante en chirurgie orthopédique. Des
malades autrefois hospitalisés pendant plusieurs jours pour des interventions réputées très algiques (hallux
valgus, ligamentoplasties du genou ou de l'épaule) sortent actuellement en ambulatoire (1,2). Il a été
montré que les blocs nerveux continus réduisaient la douleur postopératoire (3). Il n’a pas été observé
d'effet secondaire en ambulatoire chez des groupes de malades considérés à risque de douleur sévère (4).
Ces techniques d'analgésie par infusion continue d'anesthésiques locaux permettent aussi une
déambulation plus précoce, une meilleure efficacité de la kinésithérapie et des soins d’où probablement de
meilleurs résultats chirurgicaux.
Malgré tous ces bénéfices, Choquet et coll. ne placent l'analgésie par blocs péri nerveux continus à
domicile que dans les perspectives d’avenir (5), ce mode d'analgésie n'étant pratiqué en routine que par
quelques équipes françaises.
Notre établissement reçoit toute la chirurgie vasculaire de la Charente. L’évolution de l’encadrement
financier des institutions favorise les établissements à DMS (durée moyenne de séjour) courtes. Certains
patients artéritiques ont été identifiés comme consommateurs de soins médicaux, parce qu’ils restaient très
longtemps hospitalisés, uniquement pour des soins locaux et de l'analgésie. La maladie artéritique
(oblitération progressive du calibre des artères) génère deux types de douleur : la douleur continue liée à
l’ischémie tissulaire et surtout des douleurs particulièrement sévères lors des pansements répétés plusieurs
fois par semaine. Ces malades étaient refusés partout : à leur domicile, en centre de rééducation ou en
maison de convalescence. Ces douleurs représentent un véritable défi à traiter car les morphiniques
puissants sont peu efficaces ou très mal tolérés (somnolence…) chez ces patients âgés, fragiles et poly-
médicamentés. L’absence de traitement efficace est souvent à l’origine de « syndrome de glissement » car
ces patients perdent leur autonomie et tout espoir d’amélioration. Un véritable problème de santé publique
est posé par ces milliers de patients dont beaucoup sont diabétiques, en échec thérapeutique. Nous avons
décidé d'organiser la prise en charge de ces malades à domicile ou en structure alternative à
l’hospitalisation en cours séjour.
Période d’essai : 2001 à 2004 : La première observation de malades à domicile munis d’un cathéter péri nerveux a été publiée en
1998. Mais il faut attendre 2003 pour voir paraître une première série de patients traitée par
cathéter péri nerveux dans des syndromes régionaux douloureux complexes (6). En janvier 2005,
54
DADURE publie une étude dans laquelle quelques enfants, atteints de cette même pathologie, ont
été traités par des dispositifs antalgiques identiques avec d’excellents résultats (7).
Aucune publication ne s’est intéressée au traitement de l’artérite par cathéter péri nerveux. De petits
tuyaux (cathéter) sont placés au contact des nerfs qui véhiculent l’information douloureuse vers le cortex
cérébral. Une pompe (à usage unique) diffuse en permanence un produit analgésique (anesthésique local)
qui réalise un blocage du signal douloureux. La douleur n’est alors plus ressentie par le malade et le
traitement local peut être réalisé en toute quiétude par le personnel soignant.
Matériel et méthodes :
1. Patients
Pendant cette période, nous avons implanté 124 cathéters, dont 77 pour 44 patients artéritiques,
stade III (douleur de décubitus) ou IV (troubles trophiques, gangrène) de LERICHE et
FONTAINE.
2 Technique de pose et de validation du cathéter
Les cathéters poplités (Contiplex D B Braun, Allemagne) étaient posés par voie postérieure. Chez 78%
des malades, l’infusion d’anesthésique local a été continue. Des diffuseurs portables stériles
élastomériques de 270 ml à vitesse constante de 5 ml/h (B Braun de 270 ml Easypump 5 ml/h) ont été
utilisés, remplis avec de la Ropivacaine à 2mg/ml.
3 : Formation des infirmières libérales et en institution :
Lorsqu'une infirmière devait prendre en charge un malade, une formation a été donnée. Le point de
ponction était surveillé toutes les 48 heures. À l'ablation du dispositif, le cathéter était mis en culture. Les
infirmières visitaient le malade tous les jours et changeaient le diffuseur toutes les 48 heures en alternance
avec le pansement.
4 : Sortie du malade du service de chirurgie :
La sortie de ces malades était programmée soit à domicile (50 %), en maison de retraite (25 %) ou en
maison de convalescence ou centre de rééducation (25 %), après accord et sensibilisation de ces structures.
Une permanence téléphonique 24 h sur 24 a été mise en place permettant au patient, à son infirmière
libérale ou au médecin traitant de rentrer en contact avec le médecin anesthésiste d’astreinte. Un
chirurgien vasculaire était également joignable. Le patient pouvait être hospitalisé si son état le nécessitait.
55
Résultats :
1. Données générales
Age moyen 75 ans Hommes 29 Femmes 15 Durée de vie d’un cathéter 22,7 j (2 à 76 j) Durée du traitement 30 j (2 à 101 j) Ablation du cathéter 66% fin du traitement 14% accident 14% inefficaces
Dose Par 24 heures Totale / malade Injection continue Ropivacaïne 300 mg / j 2787 mg Injection discontinue Ropivacaïne 80 mg / j 1395 mg
2. Incidents
Le principal problème technique observé pendant l’étude est une déconnection accidentelle du cathéter
d’avec le bouchon adaptateur vissable (100% des cathéters). Un protocole de désinfection et de connexion
a été mis en place.
Aucun signe clinique de surdosage n’a été observé pendant cette étude. Des dosages ont été
prélevés chez 2 malades insuffisants rénaux.
Malade N° 1 Insuffisant rénal dialysé Ropivacaïnémie avant dialyse 2,8 µg/ml Ropivacaïnémie après dialyse 2,9 µg/ml Malade N° 2 Insuffisant rénal (créatininémie 182 µmol/l) Ropivacaïnémie maximale 4,1 µg/ml (suivi de 30 jours) Seuls 22% des cathéters ont été mis en culture. Nous rapportons 6 infections : 4 staphylocoques
dorés, un Pseudomonas Aeruginosas et un colibacille. Aucun décès n’est lié à la technique
d’analgésie.
Propre Inflammatoire Septique Point de ponction du cathéter 91% 5% 4% Infection 6 Décès 5
56
Entre 1998 et 2002, une baisse du nombre des malades amputés de 23 à 15% a été observée. Nous avons diminué de 33% la durée d’hospitalisation de ces malades entre 1998 et 2002. Durées moyennes de séjour à l’hôpital (DMS) 1998 2002 Variation DMS Pontages distaux 14,1 j 9,4 j - 33% Amputations de membres > pied 22,2 j 14,5 - 35% Amputations de pied 15 j 9,8 j - 35% Discussion :
1. Analyse des résultats
Le seul changement dans la prise en charge des artéritiques entre 1998 et 2002 a été la mise en place
systématique d’un cathéter péri nerveux à l’entrée. Ces patients étaient essentiellement calmés par de la
morphine orale. Ce traitement antalgique était peu satisfaisant, puisqu’il ne permettait pas de réaliser les
soins sans douleur et qu’il induisait des effets secondaires bien connus : nausées, vomissements, prurit,
somnolence et encombrement, constipation (8). L'infusion continue d'anesthésique local permet un niveau
d'analgésie compatible avec les soins.
Gangrène du membre inférieur droit De plus, de façon transitoire, le bloc sympathique permet une vasodilatation et l'amélioration de
la micro circulation. Des mesures de TCPO2 effectuées sur un malade qui allait être amputé de la
jambe ont montré une augmentation de cette valeur de moins de 10 mm HG à 30 au niveau du
pied. Cet effet qui dure pendant plusieurs semaines ne peut que favoriser une cicatrisation, soit
57
d'un moignon d'amputation soit de lésions cutanées distales lorsque celles-ci ne sont pas
irréversibles.
Évolution de la cicatrisation d’une plaie malléolaire externe droite en 6 mois
L'analgésie obtenue avec une faible concentration d’anesthésiques locaux est également compatible avec
la déambulation. Hormis les patients initialement grabataires, les malades retrouvent une autonomie. La
conséquence directe de cette autonomie retrouvée est une certaine reprise d'activité, et une amélioration de
la qualité de vie.
La toxicité des anesthésiques locaux a été une de nos préoccupations pendant ce suivi. Contrairement à la
Bupivacaïne, les signes de début de surdosage de la Ropivacaïne sont moins constants : goût métallique,
troubles digestifs et visuels. ESTEBE et col. ont suivi des patients bénéficiant d'un cathéter péri nerveux
sur des durées de 22 +/- 8 jours pour des syndromes régionaux douloureux complexes sans noter
d'accident toxique (6).
CAPDEVILLA rapporte l’expérience de blocs nerveux périphériques, en continu, chez 13 enfants
âgés de 9 à 16 ans, atteints de la même pathologie. Une perfusion continue de Ropivacaïne, à
l’aide de diffuseurs portables stériles, était débutée pour une durée de 96 heures de façon à
réaliser une kinésithérapie sans douleur. Aucun accident n’est survenu à domicile pendant cette
période (7).
Étude Durée Taux plasmatiques Commentaire
Ropivacaïne 2mg/ml WIEDMAN (9) 120 heures 2,39 à 6,08 µg/ml Péridurale 12 mg/h EKATODRAMIS(10) 48 heures 2,7 µg/ml Épaules : 9 ml/h De la BRIERE et ESTEBE (11)
1,28 à 2,67 µg/ml Infiltrations pariétales
Ces données concordent avec notre série où aucun signe de surdosage n’a été rapporté sur des
durées dépassant 100 jours.
58
De la BRIERE et ESTEBE rapportent que, dans les études concernant les infiltrations pariétales continues
sur cathéter, le risque infectieux se situe autour de 2% (11). Dans ces séries, le cathéter est introduit et fixé
par le chirurgien, de manière aseptique, en fin d’intervention.
Dans notre série, 7,7% des cathéters ont présenté une culture positive. Trois malades sur les 6 avaient des
cathéters dans le cadre de soins palliatifs. L'infection ayant diffusé sur l'ensemble du membre inférieur, les
cathéters ont été infectés par continuité, de façon prévisible. Ces cathéters n'ont pas été enlevés pour des
raisons éthiques et humanitaires. Les 3 autres patients ont présenté une infection non prévue du cathéter
soit 3,8 % de l'ensemble des cathéters. Aucun de ces 3 malades n'était hospitalisé en ville. L'infection des
cathéters ne s'est pas exprimée cliniquement et aucun traitement antibiotique n'a été nécessaire en dehors
de l'ablation. Les cathéters de longue durée présentent un taux d'infection faible dans notre étude, même si
22% seulement ont été mis en culture. Les raisons paraissent multiples. La Ropivacaïne, comme la plupart
des anesthésiques locaux, semble avoir des propriétés bactériostatiques, voire bactéricides. De plus, il est
imaginable que la tunélisation sous-cutanée qui permet au cathéter de sortir à distance du point de
ponction pourrait diminuer l'incidence des infections, comme cela a été démontré pour les voies veineuses
centrales sous-clavières (12). Enfin, et c'est probablement un élément déterminant, la qualité des soins
dispensés à domicile par les infirmières libérales a été équivalente à celle des infirmières des
établissements hospitaliers. Des protocoles d'entretien précis ont été adaptés des protocoles d'entretien des
voies veineuses centrales, issus de la réanimation.
La réduction des dépenses de santé réalisée a été évidente, même si elle est difficile à quantifier. Il serait
hasardeux d'attribuer à la seule pose des cathéters péri nerveux le mérite de la diminution des amputés
dans notre série, d'autant plus que ces chiffres doivent être vérifiés pour 2004 et 2005. Il est plus simple
d'expliquer la baisse des durées moyennes de séjours. La qualité de l'analgésie a permis les soins
infirmiers à domicile ou en maison de retraite. Certains patients, bénéficiant d’amputation trans-
métatarsienne, ont à nouveau été acceptés dans les centres de rééducation et appareillés. Il est très difficile
de chiffrer le bénéfice du maintien à domicile de ces patients sur le plan économique. Il est réaliste de
penser qu'une amélioration de la qualité de vie du malade diminue la mortalité et la morbidité et donc
permet d'éviter des jours d'hospitalisation.
2. Analyse des obstacles pour la continuité de la prise en charge extra hospitalière
Nous avons rencontré de nombreuses difficultés pendant cette période. Différents blocages sont
apparus, certains par une interprétation restrictive des textes, d’autres par leur méconnaissance,
d’autres enfin par peur d’utiliser des produits ou des techniques réservées jusqu’ici à l’hôpital.
La nomenclature des actes infirmiers a constitué l’obstacle majeur. Aucun remboursement n’est prévu par
les Caisses Primaires d’Assurance Maladie (CPAM) pour la gestion des cathéters péri nerveux à domicile.
59
Il est tentant de procéder par assimilation. Mais cela peut aboutir à un refus catégorique des caisses de
rembourser ces soins. Même si certains pensent que ces obstacles disparaîtront naturellement, cette
réglementation induit un certain nombre de conséquences pour l’infirmière contrevenante et le médecin
prescripteur : sanctions financières et judiciaires. L’utilisation d’un prestataire de service ne résout rien car
le problème de la rémunération des infirmières reste entier, et il n’est pas possible de déléguer les actions
de formation. Ce vide juridique a constitué le plus grand des obstacles. Il a amené les syndicats infirmiers
à s’opposer à ces traitements à domicile et la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de la Charente à
bloquer les remboursements. Certains collègues ont contourné ce problème en faisant revenir les patients
toutes les 48 heures pour la réfection de pansement et le remplissage du diffuseur, seule la surveillance
étant assurée par l’infirmière à domicile. Ceci nécessite une organisation lourde et n’est envisageable que
pour les cathéters de courte durée.
L’absence de remboursement des diffuseurs portables stériles dans l’indication de l’analgésie a longtemps
freiné le développement de ces traitements en ambulatoire. Ce problème a été réglé par l’arrêté du
20/9/2004, qui inscrit ces dispositifs dans l’indication de l’analgésie postopératoire, pendant 3 jours.
Une autre difficulté est venue de la Ropivacaïne. Pour les détracteurs de ce traitement à domicile, un
médicament anesthésique local ne doit être utilisé que par un Médecin Anesthésiste ou un Infirmier
Anesthésiste. Cet argument a été beaucoup utilisé par certains cadres infirmiers généraux pour bloquer le
développement de ces traitements dans leur hôpital.
Le produit n’est apparu qu’en début d’année 2005 sur la liste des médicaments rétrocédables en
ville (site AFSSAPS, dossier rétrocession).
L’article 8 du décret des actes relatif à l’exercice de la profession d’infirmier de février 2002 a été mal
interprété (13). Il précise : « l'infirmier est habilité à accomplir, sur prescription médicale écrite,
qualitative et quantitative, datée et signée, les actes et soins suivants, à condition qu'un médecin puisse
intervenir à tout moment : injections de médicaments à des fins analgésiques dans des cathéters périduraux
et intrathécaux ou placés à proximité d'un tronc ou d'un plexus nerveux, mis en place par un médecin et
après que celui-ci a effectué la première injection ».
Alors que cet article constitue une réelle avancée dans les moyens donnés à la lutte contre la douleur, la
Caisse Nationale d’Assurance Maladie (CNAM) l’a interprété de façon restrictive : médecin
physiquement présent (sur place).
Ce décret précise également le caractère obligatoire de la formation des infirmières ou infirmiers diplômés
d’état. Ceci est encore plus vrai lorsque l’on entreprend de développer ces traitements au domicile du
patient.
60
3. Nos réponses pour continuer l’analgésie à domicile
En 2001 nous avons débuté ces traitements de façon confidentielle. Un petit groupe d’infirmières libérales
charentaises réunies en association (INFI 16) a accepté de ne pas être rémunéré et d’apprécier la faisabilité
de cette prise en charge extra hospitalière. Pendant 3 ans, nous avons recueilli des données et perfectionné
les protocoles d’analgésie et de soins à domicile. Nous avons recherché une organisation compatible avec
les exigences de la médecine libérale pour le suivi médical et infirmier. Nous avons analysé les difficultés
rencontrées, tant sur le plan logistique que médico-légal.
Il nous est apparu que la réponse adaptée aux problèmes rencontrés était la création d’un réseau
de santé : l’absence de cotation dans la nomenclature était réglée, le réseau se substituant à la
CPAM pour rémunérer les infirmières libérales. Les aspects médico-légaux ont été analysés par
les experts de l’URCAM (Union Régionale des Caisses d’Assurance Maladie) et de l’ARH
(Agence Régionale d’Hospitalisation). Enfin, la constitution d’une association permettant de
promouvoir ces traitements, nous donnait des possibilités pour discuter avec les CPAM, le
Conseil de l’Ordre et même le Ministère.
L'URCAM a accordé un budget de 60 000 € pour le dernier trimestre 2004 à « SOS Douleur
Domicile » afin d'organiser la prise en charge de ces patients à domicile en créant un réseau
douleur dans notre région.
L'expérience s’est poursuivie en 2005 avec un budget de 300 000 €, puis 280 000 € /an jusqu’en
2008.
Un secrétariat a été mis en place, ce qui permet un suivi du patient. Une base de données est régulièrement
alimentée par les dossiers de soins remplis par les infirmiers libéraux et la secrétaire qui contacte les
malades 2 fois par semaine.
Les problèmes qui n’ont pas été réglés par la création de ce réseau de santé ont pu obtenir une réponse par
contact direct avec le Ministère des affaires sociales : M. MATTEI concernant les problèmes posés par
l’article 8 du décret des actes relatifs à l’exercice de la profession d’infirmier et
M. DOUSTE-BLAZY concernant la rétrocession du Naropeine. En septembre 2005, une réunion a été
organisée par la DHOS (Direction de l’Hospitalisation et de l’Organisation des Soins) et l’AFSSAPS
Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé) pour encadrer la rétrocession du Naropeine.
61
2005 et 2006 : mise en route de la seconde étape d’évaluation
1. Résultats
L’année 2005 a été l’année de démarrage effectif du réseau : 78 patients ont été traités dont 45 patients
artéritiques (71 cathéters) stade III ou IV de LERICHE et FONTAINE, permettant d’éviter 2272 jours
d’hospitalisation.
Il n’y a eu aucune déconnection accidentelle de cathéters.
La proportion d’amputés est de 17% dans cette étude.
Le point de ponction du cathéter était inflammatoire dans 13 cas (18% des cathéters). Seuls 5 cathéters ont
présenté une culture positive (7% des cathéters). Les germes retrouvés sont : 2 staphylocoques dorés, 1
bacille pyocyanique et 2 protéus mirabilis.
Aucun des 12 décès observés n’est lié à la technique utilisée.
Les DMS des patients artéritiques ont été comparées à la moyenne nationale en 2005.
Lésion / DMS en Jours Clinique Saint Joseph Moyenne Nationale Amputation MI > orteil GHM léger 10,7 j (- 51%) 22 j GHM lourd 15,1 j (- 51%) 31,1 Amputation MI > orteil GHM léger 5,7 j (- 60%) 14,5 j GHM lourd 9,6 j (- 55%) 21,4 Ulcères 3 j (- 83%) 17,8 j DMS par intervention en fonction des groupes homogènes de malades (GHM)
2. Analyse des résultats
En un an, nous avons pris en charge autant d’artéritiques que pendant les trois années de la série
préliminaire.
Age moyen 75 ans Hommes 30 Femmes 15 Durée de vie d’un cathéter 32,4 j Durée du traitement 51,2 j Ablation du cathéter 62,5% fin du traitement 15% accident 12% inefficaces Infection 5
62
Les résultats ont été améliorés, en ce qui concerne la durée des traitements (+ 41%) et de façon moins
marquée pour la durée de vie des cathéters (+ 30%). L’absence de déconnection des cathéters vient du
changement du bouchon adaptateur des cathéters B BRAUN.
L’amélioration des protocoles de prise en charge de ces malades n’a pas permis de diminuer sensiblement
l’incidence des infections. Seulement 22% des cathéters avaient été mis en culture dans notre précédente
série. Ces malades étant constamment infectés, il est probablement difficile d’optimiser ce type de
résultat. L’ablation du cathéter a été suffisante à chaque fois, et il n’a pas été nécessaire de prescrire un
antibiotique. Il est intéressant de noter que dans près de 40% des cas, lorsqu’un point de ponction de
cathéter est inflammatoire, le cathéter est infecté. Ceci renforce notre conviction de la nécessité absolue de
l’entretien du cathéter, de la surveillance de leur orifice de sortie par les infirmières à domicile.
L’incidence des amputations : 15% dans la première série est de 17% en 2005. Il est difficile de
l’interpréter, car des malades arrivent d’emblée avec des lésions irréversibles. Il semble stable depuis
2002.
Les DMS sont entre 50 et 80% moins élevées dans notre établissement que la moyenne nationale. La
Caisse Régionale d’Assurance Maladie du Centre Ouest (CRAMCO) nous a interpellé sur cette
« anomalie ».
Les formations d’infirmières libérales se sont accélérées (35% des infirmières sont formées en Charente
en 2004, 55% en 2005).
3. Procédure d’inclusion des malades
Lorsque l’indication d’un cathéter est posée, le malade et sa famille sont reçus en consultation
d’anesthésie. Cette consultation permet une information sur la technique, les effets secondaires et les
risques possibles. Le protocole complet de prise en charge du cathéter est remis au patient, ainsi qu’une
feuille de consentement éclairé qu’il devra ramener signée. Au cours de cette entrevue, l'infirmière libérale
du patient est identifiée et le secrétariat du réseau la contacte pour s’assurer de sa formation. Si elle n’est
pas formée, une formation d’urgence est programmée. Si elle ne souhaite pas se former, le patient est
averti. Il a le choix entre refuser la technique ou changer d’infirmière. Nous lui proposons alors
l’infirmière du réseau la plus proche de chez lui. La date de l’intervention est définie. Cela permet au
secrétariat coordonateur d’organiser la sortie du patient : sélection de l’infirmière, évaluation des
conditions de vie du malade, livraison du matériel par un prestataire de service : diffuseurs, sets,
médicaments et courrier au médecin traitant.
4. Mise en place du cathéter et organisation de la sortie du patient
Le cathéter est mis en place au bloc opératoire, sous sédation et surveillance monitorée.
63
Les précautions d’asepsie chirurgicale usuelles sont appliquées. Le site du cathéter est choisi en
fonction de la pathologie. Il est tunélisé lorsqu’il est dans une région difficile d’accès : sciatique
poplité, ou chez l’obèse (plis de l’aine). Le cathéter est fixé par un fil TI CRON 0 en cas de
longue durée prévisible. S’il s’agit d’une analgésie de courte durée (analgésie postopératoire), un
clamp à usage unique (Lockit, Sims) est utilisé. Les pansements sont réalisés avec des
compresses et du Méfix. Une dose de charge de 0,5 ml/Kg de Ropivacaine à 4,75 mg/ml est
injectée par le cathéter. Le diffuseur portable stérile (B BRAUN Easypum / 270 ml, 5 ml/h) est
branché secondairement.
Les patients restent en salle de surveillance post-interventionnelle (SSPI) au moins une ½ heure. Cela
permet de surveiller l’apparition éventuelle de signes toxiques, la survenue d’un bloc moteur (qui est
constant avec ces doses). Une fois le score de sortie de SSPI correct, les patients retournent dans le service
d’hospitalisation.
L’infuseur est branché 6 heures après la pose du cathéter. L’analgésie est alors : 300 ml de Ropivacaïne à
2 mg/ml.
Le patient sort après avoir vérifié l’efficacité du diffuseur portable stérile pendant 24 heures. Il est revu
avant sa sortie par le médecin anesthésiste qui lui a posé le dispositif. Le point de ponction a été vérifié par
l’infirmière du service.
Au moment de sa sortie, le patient est en possession du protocole, de son exemplaire signé de la feuille de
consentement, des ordonnances et courriers nécessaires. Sa famille ou son ambulancier va à la pharmacie
centrale de l’hôpital de secteur afin de s’approvisionner en poches de Ropivacaïne. Sa pharmacie
habituelle lui fournit les compléments de médicaments (analgésie de secours) et de petit matériel. Les
diffuseurs portables stériles (DPS) ainsi que les sets d’entretien et de changement de DPS sont directement
livrés à domicile. Son médecin généraliste est prévenu de la sortie.
L’infirmière libérale se rend chez le patient le jour même, puis le revoit tous les jours, pour faire le
pansement de ses lésions ischémiques, alternativement avec le pansement du cathéter et le changement de
diffuseur.
La sortie du malade est également signalée au centre 15. Une convention a été signée avec l’hôpital.
L’équipe de régulation du SAMU est informée de l’existence du réseau, de la nature des dispositifs mis en
place et des risques possibles d’un surdosage accidentel en anesthésique local. En cas d’appel du patient
au centre 15, un message d’alerte s’affiche sur l’écran : « protocole Naropeine ». L’anesthésiste d’astreinte
du réseau est alors prévenu d’un éventuel problème lié au dispositif.
64
5. Surveillance à domicile
L’infirmière libérale formée dispose d’un dossier de soins qu’elle peut consulter. En dehors des
coordonnées du malade, tous les intervenants extérieurs : médecin anesthésiste, chirurgien, médecin
traitant, pharmacien, kinésithérapeute ..., sont répertoriés ainsi que leurs coordonnées respectives. Les
renseignements concernant le cathéter (site de pose, type de cathéter et motif du traitement) et le protocole
utilisé, daté et signé, sont indiqués en seconde page. Une rubrique d’évaluation initiale est à remplir par
l’infirmière le premier jour. Elle comprend des indices concernant les pansements, la mobilisation, la vie
sociale et le confort général du patient avant la mise en place du cathéter.
La surveillance quotidienne du patient à domicile repose sur des critères essentiellement
cliniques. Evaluation de la douleur (mesure de l’Echelle Visuelle Analogique) au repos, à la
mobilisation, recherche des signes cliniques toxiques, prise du pouls et de la pression artérielle,
mesure de la température. Le pansement est ensuite réalisé et la douleur provoquée par le soin est
mesurée.
Le patient dispose d’une fiche d’autoévaluation de la douleur qui permet d’élargir la surveillance, de faire
le point avec lui et de modifier le traitement si nécessaire.
Une attention toute particulière concerne le point de ponction. Lorsqu’un cathéter est posé pour 3 jours
d’analgésie postopératoire, la réfection du pansement du cathéter n’est pas obligatoire. Le pansement peut
être refait lors de son ablation. Pour des cathéters de plus longue durée, parfois laissés en place plus de
100 jours, la surveillance de ce point de ponction est fondamentale et les soins du cathéter réalisés toutes
les 48 heures. La détection d’un écoulement, d’une douleur, d’une rougeur du point de ponction doit faire
alerter le médecin anesthésiste du réseau.
Les protocoles d’entretien de ces cathéters sont dérivés de ceux appliqués aux voies veineuses centrales,
issus de la réanimation.
La surveillance du bloc-moteur et du bloc sensitif est particulièrement importante. Les patients
devant bénéficier d’une rééducation intensive, soit en postopératoire d’une chirurgie
orthopédique douloureuse (genou, épaule) soit en raison d’une pathologie particulière (syndrome
régional douloureux complexe) ne doivent pas présenter de bloc-moteur. Ils sont prévenus de la
possibilité de clamper le diffuseur quelques heures si la motricité est difficile. De plus,
l’apparition d’un bloc-moteur qui n’existait pas doit faire penser à une complication et à contacter
le médecin de garde du réseau. Il est fréquemment observé au bout de quelques semaines de
perfusion continue d’anesthésiques locaux des phénomènes de tachyphylaxie. Il est donc
également nécessaire de surveiller leur évolution.
La surveillance est adaptée à chaque bloc.
65
Une feuille particulière est réservée au suivi et au devenir des plaies. Elle rapporte les dimensions des
plaies et l’évolution de la proportion de nécrose, de fibrine, de bourgeonnement et d’épithélialisation.
Cette feuille est à remplir une fois par semaine par l’infirmière.
Les malades atteints de douleur chronique sont revus tous les mois. La consultation consiste à faire le
point sur le traitement, visualiser le point de ponction, apprécier l’évolution de la plaie. Le dossier de soins
est vérifié. Un mot d’observation est écrit dans le dossier. Il servira de liaison entre l’équipe d’infirmière
libérale et le médecin généraliste. D’une manière générale, le dossier de soin suit le patient. De cette
façon, tous les praticiens peuvent prendre connaissance du traitement en cours et évaluer son efficacité.
Le secrétariat coordinateur contacte le patient à son domicile en début et en fin de semaine. L’infirmière,
le médecin ou le malade appellent le secrétariat en cas de problème. En fonction de la nature du problème,
l’appel est basculé vers le médecin anesthésiste d’astreinte du réseau.
6. Hospitalisation et fin du traitement
En cas de problème, le patient peut être revu avant, ou être hospitalisé pour quelques jours, à la demande
du médecin, de l’infirmiè re libérale ou de la famille. Il s’agit d’hospitalisations courtes, comme cela se fait
pour les malades pris en charge dans le cadre des soins palliatifs. Elles permettent au médecin anesthésiste
de coordonner la réévaluation des traitements. On profitera de ce séjour pour montrer la lésion au
chirurgien vasculaire et au dermatologue. Le point concernant les pathologies associées (cardiaque,
respiratoire ou diabète) peut être refait à ce moment.
Le retrait du cathéter est protocolisé à domicile. Il est systématiquement mis en culture (ordonnance jointe
au dossier de soins). La formation des infirmières insiste particulièrement sur ce geste. Le retrait ne doit
rencontrer aucune résistance. Si une anomalie est détectée par l’infirmière, le patient doit être revu par le
Médecin du réseau pour procéder lui-même au retrait. Des nœuds ont été retrouvés lors de l’ablation de
cathéters, ce qui a conduit à réaliser une petite incision pour les retirer.
66
Nœuds retrouvés sur 2 cathéters cruraux
La prise d’antalgiques supplémentaires de palier 1 ou 2 est possible et notée.
Un questionnaire de satisfaction est envoyé au patient pour évaluation de la prise en charge de sa douleur.
L’ensemble du dossier est retourné au secrétariat après la fin du traitement. Les infirmières libérales ne
sont rémunérées que si le dossier est correctement rempli.
L’organisation : On ne peut concevoir la prise en charge de l’analgésie postopératoire à domicile sans consensus sur le
traitement de la douleur postopératoire dans son établissement. C’est un travail de toute l’équipe
anesthésique et chirurgicale. Chacun va devoir adapter sa façon de travailler.
Il est impossible d’envisager de laisser partir des patients à domicile avec des cathéters péri nerveux sans
expérience de la pratique de l’anesthésie locorégionale. La réalisation de l’anesthésie locorégionale en
routine, la connaissance des problèmes engendrés par la gestion infirmière de ces cathéters sont
indispensables. Les exigences des chirurgiens et des médecins rééducateurs, en fonction des interventions,
sont autant d’éléments à prendre en compte.
Le patient doit bénéficier d’une première sélection par le chirurgien. Elle doit être validée par le médecin
anesthésiste lors de la consultation. Elle doit tenir compte des conditions de vie du patient, du degré de
compréhension de la technique, de la possibilité d’accompagnants ou d’un entourage familial présent.
Le réseau de santé permet de décharger le médecin anesthésiste de toutes les formalités
administratives qu’implique la sortie du malade avec ces traitements. Le contact de l’équipe
médicale et paramédicale libérale du malade, la gestion du prestataire de service, le suivi à
domicile du patient, la facturation et le règlement des infirmières, les courriers, la récupération du
dossier et l’analyse statistique est organisée par le secrétariat coordinateur. Toute la logistique
concernant l’organisation des formations infirmières ou des informations des médecins est gérée
par les secrétaires. Les bilans mensuels envoyés à l’URCAM et à l’ARH, l’organisation de
l’accréditation pour 2007 leur incombent également.
67
Les demandes d’information sont à l’origine de nombreux appels.
Le médecin anesthésiste, qu’il exerce dans les secteurs privé ou public, ne peut s’occuper seul de toutes
ces missions en plus de sa charge de travail : clinique (consultations, visites, bloc opératoire) et
administrative (CLIN, CLUD, hémovigilance, matériovigilance, accréditation …).
Cette gestion peut effectivement apparaître lourde sans l’appui d’une structure administrative
adaptée aux besoins définis plus haut ou sans consensus d’équipe. Le plus difficile est la création
du premier réseau de santé. Les autres peuvent ensuite bénéficier de cette expérience et surtout
s’inspirer des dossiers existants pour la rédaction de l’imposant dossier nécessaire à l’obtention
des subventions soit par la dotation régionale de développement des réseaux (DRDR) soit par le
fonds d’aide à la qualité des soins de ville (FAQSV).
Ces dossiers sont disponibles sur notre site internet : www.sos-douleur-domicile.org. Le Docteur
ADAMON, médecin anesthésiste de la Clinique CHENOVE (région de Bourgogne) a pu s’inspirer de ce
dossier pour monter le premier réseau de santé entièrement consacré à l’analgésie postopératoire, par
cathéter péri nerveux, à domicile (http://catheter-a-domicile-chenove.bourgogne-sante.fr).
Enfin, les objectifs du SROS de troisième génération, à l’intention des ARH, sont clairs : » … Veiller à ce
que cette organisation des soins réponde aux objectifs de santé publique ... La prise en compte des « soins
préventifs, curatifs et palliatifs » à partir des « besoins de santé de la population », par l’ordonnance du 4
septembre, permet au SROS de placer la dimension de santé publique comme principe fondateur de son
action. Dans cet esprit, vous inciterez fortement le développement des réseaux de santé ́» (14).
La formation des infirmières et l’information des médecins
Elle est la condition nécessaire et essentielle à la sortie du malade. Les infirmières devant prendre
en charge un patient sont contactées. Une formation d’urgence est organisée en moins de 48
heures. Cette formation porte sur les anesthésiques locaux : indications, contre-indications, signes
de surdosage. La voie péri nerveuse est expliquée. Une démonstration de la technique de pose de
cathéter poplité est faite, soit avec le malade qu’elles ont à prendre en charge, soit à l'aide d'un
film (Cdrom). La description des complications immédiates et retardées est développée. Les
diffuseurs portables stériles sont manipulés dans les services de chirurgie : changement et
remplissage.
Des protocoles de soins sont remis aux infirmières.
La surveillance locale du point de ponction est développée et au moindre doute, nous insistons sur la
nécessité de nous contacter pour revoir le patient en consultation et si besoin l’hospitaliser. Les infirmières
68
doivent rendre visite au malade tous les jours et changer le diffuseur toutes les 48 heures en alternance
avec le pansement.
Pendant ces trois années, une formation complémentaire a été dispensée chaque année, qui permettait la
mise à jour des protocoles et donnait l'occasion aux chirurgiens de définir les modalités de prise en charge
des pansements. Cette formation est rémunérée par le réseau sur la base de 200 € par jour.
L’information des médecins est plus complexe. Les généralistes sont très sollicités et ne répondent qu’à
des invitations qui permettent une réelle amélioration de leur pratique. Leurs méthodes de formation sont
sensiblement différentes des nôtres. Ils ont aboli les conférences magistrales au profit de travail en sous-
groupe avec mises en situation clinique. Malgré une incitation financière de 15 C (300 €) une seule
formation a pu être organisée pour les médecins généralistes. Une autre approche consiste à profiter des
FMC des chirurgiens vasculaires pour informer les praticiens de ville . Si 71% des infirmières libérales
sont aptes à prendre en charge ces malades à domiciles, seulement 30% des médecins de ville sont
informés de ces techniques en Charente.
L’ensemble du budget formation est de 37 000 € par an.
Conclusion
La prise en charge à domicile de l’analgésie postopératoire, en plus des indéniables avantages d’ordre
clinique et socio environnementaux, permet des économies de santé. Des études pharmaco économiques
sont en cours pour les évaluer de façon précise. L’économie réalisable pour la douleur chronique rebelle
devrait être encore plus importante. Ceci a incité les CPAM de la Charente et de Bourgogne à nous suivre.
Le rôle de coordination du médecin anesthésiste, associé au médecin généraliste et à l’infirmière libérale,
permet de prendre en charge globalement ces malades. Cela n’est sans doute pas sans rapport avec les
résultats obtenus.
L’organisation nécessaire à la gestion de ces patients est complexe et nécessite d’être standardisée avant
d’être validée. Les deux expériences en cours ne suffisent pas à légitimer ce mode de traitement.
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10. EKATODRAMIS G., BORGEAT A., HULEDAL G., JEPPSON L., WESTMAN L., SJOVALL J.
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11. De la BRIERE FP., ESTEBE JP.
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Salpétrière (JEPU), Pitié-Salpétrière Ed 2005: pp 235-44.
12. Mimoz O. Rayeh F, Debaene B. Infections liées aux cathéters veineux en réanima tion.
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13. Décret n° 2002-194 du 11 février 2002 relatif aux actes professionnels et à l'exercice de la profession
d'infirmier.
14. CIRCULAIRE N°DHOS/O/2004/101 du 5 mars 2004 relative à l’élaboration des SROS de troisième génération, p 1-2.
70
Amélioration de l’utilisation des pompes PCA Morphine chez l’enfant par l’intermédiaire des clips vidéo
Ricardo Carbajal1, Chantal Kahn2, Patricia Martret2, Pascale Thibault1
1Centre National de lutte contre la Douleur, Hôpital d’enfants Armand Trousseau, Paris, 2Service de Pédiatrie, Centre Hospitalier Poissy Saint Germain,
3Unité Douleur, Hôpital d’enfants Armand Trousseau, Paris, Introduction : Les pompes de PCA constituent une grande avancée dans l’amélioration du traitement de la douleur. Chez
l’enfant, elles sont utilisées fréquemment depuis plusieurs années dans les salles de soins post-opératoires
et dans les services d’hématologie et d’oncologie pédiatrique. En revanche, leur utilisation dans les
services de pédiatrie générale est beaucoup plus modeste. Pourtant beaucoup de ces services en France ont
reçu des pompes PCA qui souvent restent dans des placards. Ceci est dû en grande partie au manque de
formation du personnel médical et paramédical au maniement de l’analgésie par PCA en pédiatrie
générale, aux difficultés techniques pour la maîtrise par tout le personnel de pompes PCA, au manque
d’un référent local pouvant motiver et former le reste de l’équipe à l’utilisation de la PCA, au manque de
protocoles clairs sur les indications et l’utilisation de ces pompes dans le cadre de la pédiatrie générale.
Or, nous considérons qu’il y a une place importante pour ce mode d’administration de la morphine dans
un service de pédiatrie générale.
Objectif : L’objectif du présent projet a été de réaliser une série des clips multimédia de formation et d’utilisation
pratique de la PCA morphine chez l’enfant. Nous avons choisi trois types de pompes pour montrer en
détail leur utilisation. Les clips vidéo présentés sont destinés au personnel soignant qui devrait pouvoir
s’en servir à tout moment car les clips devraient être accessibles sur les ordinateurs du service, sur des
CD-rom, sur un réseau Internet et probablement sur des organisateurs de poche (Palm, Pocket PC). Le but
de ce travail est de contribuer à une meilleure utilisation de la PCA morphine. Bien que les clips soient en
principe destinés aux services de pédiatrie générale, ils pourront très certainement aussi être utilisés par
tout service ayant l’usage des pompes PCA Morphine (service de chirurgie ou d’une spécialité médicale).
Clips disponibles :
Ø Une version destinée exclusivement aux soignants et intitulée
«Comment bien utiliser une pompe PCA morphine chez l’enfant, explications destinées aux
soignants » comprend la présentation des pompes :
§ Gemstar de Abbott
§ Graseby 3300
71
§ Graseby 9300
Pour ces pompes, des séquences sur les principales fonctions ont été enregistrées. L’accès direct à la
section souhaitée permet l’obtention immédiate d’une réponse aux questions que le soignant se pose.
La présentation de ces clips est précédée d’une section qui présente les principes communs de l’utilisation
de la PCA. Une version bas débit est disponible sur le site du CNRD : www.cnrd.fr
Ø Une version destinée aux enfant et intitulée :
« C’est quoi une pompe PCA morphine ? explications destinées aux enfants »
Ce clip séparé a été préparé pour expliquer à l’enfant le fonctionnement de la PCA et comment
faire pour mieux l’utiliser. Des versions bas débit et haut débit de ce film seront disponibles sur le
site du CNRD : www.cnrd.fr
Ce projet a été réalisé grâce au soutien de la Fondation CNP Assurances. Des copies d’écran sont présentées ci-dessous :
72
Ecran du sommaire
73
Principes communs : principes de la PCA
74
Principales sections du fonctionnement d’une pompe PCA
75
Clips destinés aux enfants
76
77
Implication médicale dans l’élaboration et la mise en place d’un "protocole morphine" utilisable par les infirmières aux urgences pédiatriques
Y. Meymat*, L. Pesdespan**, M. Capdupuy***
*Praticien Hospitalier, Département d'Anesthésie Réanimation IV, ** Praticien Hospitalier, Service des Urgences Pédiatrique,
*** Cadre de Santé, Service des Urgences Pédiatrique, Hôpital des Enfants, Centre Hospitalier Pellegrin, CHU de Bordeaux
Des enfants porteurs de nombreuses pathologies douloureuses, tant médicales que chirurgicales
sont susceptibles d'être admis aux Urgences. La douleur peut s'inscrire dans des contextes aigus très
différents [1] :
- La douleur "symptôme d'accompagnement" (traumatologie, brûlures, drépanocytose, otites…)
doit être traitée d'emblée.
- La douleur "maître symptôme", utile au diagnostic (syndromes douloureux abdominaux…) a été
classiquement respectée ou seulement atténuée. Cette notion doit être révisée, des travaux ayant
en effet montré que la sédation d'une douleur abdominale chez l'adulte [2] [3] comme chez
l’enfant [4] ne remettait jamais en cause ni le diagnostic, ni son délai.
- La douleur "liée aux soins" (mobilisations, pansements, sutures…) doit être prévenue. L’évaluation et la prise en charge de la douleur en urgence :
L'évaluation et la prise en charge de la douleur aiguë de l'enfant de 1 mois à 15 ans fait l'objet de
recommandations de l'ANAES [5]. Ces recommandations précisent les indications et les différentes AMM
des thérapeutiques utilisables chez l'enfant.
On peut dégager un certain nombre de principes :
1. Appréciation rapide de la douleur dès l'arrivée aux urgences (voire dans la voiture ou
l'ambulance) par le médecin ou l'infirmier (e) (score, échelle visuelle analogique…).
2. Application d'un traitement de niveau adapté à priori en privilégiant les techniques les
moins invasives possibles et l'anesthésie locorégionale si elle est indiquée.
3. Réévaluation de la douleur dans un deuxième temps, toujours avec les mêmes outils que
pour l'évaluation initiale pour adaptation éventuelle du traitement.
4. Prévention antalgique pour tout geste aggravant une douleur existante ou pouvant en
générer.
5. Prise en charge "psychologique". Toutes les explications nécessaires doivent être données
à l'enfant et ses parents. La douleur ne doit pas être niée, ni minimisée. La présence des parents lors des
soins doit être privilégiée [6] [7].
78
Élaboration d'un protocole de service :
Le problème crucial de la prise en charge des phénomènes douloureux dans un service d'urgence
est celui d'une perte de temps liée à la possible (et fréquente) non disponibilité du médecin par qui passe
obligatoirement le processus de diagnostic et de prescription. Pour privilégier la prise en charge la plus
précoce possible de la douleur de l'enfant aux urgences, des protocoles de soins peuvent être élaborés pour
permettre aux infirmiers de mettre en place des traitements antalgiques sans prescriptions et sans délais.
La mise en place de ces protocoles s'appuie sur la circulaire DGS-DH-DAS n° 99-84 du 11 février
1999 [8]. Celle-ci autorise les infirmiers à utiliser certains antalgiques, conformément aux dispositions de
l'article 8 du décret relatif aux actes professionnels et à l’exercice de la profession d’infirmier n° 93-345
du 15 mars 1993. Ces dispositions ont été reprises dans les articles R 4311-2 et R 4311-8 du décret n°
2004-11-28-802 du 29 juillet 2004 du Code de la Santé Publique (Livre 3) [9]. L’expérience du CHU de Bordeaux :
Dans le cadre des Urgences Médico-Chirurgicales Pédiatriques du CHU de Bordeaux, un
protocole a été élaboré pour permettre l'administration de morphine dès l'admission, à des enfants
présentant des douleurs évaluées comme moyennes ou sévères.
1) Une première étude prospective a permis de familiariser l’équipe soignante des Urgences
avec l’utilisation de la morphine [10]. Entre août 1999 et octobre 2000, 40 enfants âgés de 6 mois à 15 ans
(29 de plus de 5 ans et 11 de moins de 5 ans), présentant des fractures des membres, ont été traités par
administration de chlorhydrate de morphine. L’antalgique était administré en bolus intraveineux de 100
µg.kg-1 suivi d’une administration continue lente de 20 µg.kg-1.h-1 à l’aide d’infuseurs mécaniques (de
type Baxter®) dès l’arrivée, après évaluation et prescription médicale. Cette étude a montré l’utilité et la
faisabilité de protocoles intraveineux de morphine, sans risque majeur, aux Urgences Pédiatriques. Chez
les plus de 5 ans, la douleur a été contrôlée de manière satisfaisante dans 58 % des cas, 1 heure après le
début du traitement. Cependant, les puéricultrices avaient besoin d’un délai moyen d’une demi-heure pour
la préparation du protocole et seulement 52 % des enfants ont été pris en charge en moins de 15 minutes
(35 % entre 16 et 30 minutes) ; il fallait donc, dans le meilleur des cas, 90 à 105 minutes pour contrôler la
douleur de manière satisfaisante.
2) La nécessité est apparue de raccourcir les délais de prise en charge. Dans ce dessein, nous
avons privilégié l’évaluation par l’infirmière d’accueil et l’utilisation d’une forme orale de morphine ayant
l’AMM à partir de 6 mois (sulfate de morphine Actiskénan®) administrée à l’enfant, sans préparation, par
l’infirmière elle-même sans prescription médicale, au titre de la réglementation sur les protocoles de
service pour administration d’antalgiques [8] [9].
79
Le sulfate de morphine n’existant pas en gélules dosées à moins de 5 mg, le service des Urgences
a bénéficié du concours du service de Pharmacie du CHU de Bordeaux pour disposer d’un re-
conditionnement en gélules de 1 et 2 mg.
Pour évaluer cette procédure, une étude prospective a été menée pendant les 3 premiers mois de
2001 [11] [12]. Elle a concerné 122 enfants de 6 mois à 15 ans, admis pour un traumatisme isolé et divisés
en 2 groupes (Groupe I comportant 101 enfants de plus de 5 ans et Groupe II comportant 21 enfants de
moins de 5 ans). L'évaluation de la douleur a été réalisée par l'Echelle Visuelle Analogique (EVA) pour
les sujets de plus de 5 ans (Groupe I). La difficulté d’évaluation chez les sujets de moins de 5 ans (Groupe
II) en situation d’urgence a conduit à choisir une méthode d'hétéro évaluation (dérivée de l'Objective Pain
Scale, de la Children Hospital of Eastern Ontario Pain Scale et de l'échelle Douleur Enfant Gustave-
Roussy) comportant 9 critères cotés de 0 à 3 (tableau 1) [13].
Une EVA supérieure à 30 mm, 3 critères de niveau 1, ou 2 critères de niveau 2, ou 1 critère de
niveau 3 sur l'échelle d'hétéro évaluation impliquait l'administration orale de 200 µg.kg-1 de sulfate de
morphine dès l'arrivée et avant tout soin. Une réévaluation de la douleur était effectuée à 45 minutes puis à
120 minutes. Les effets secondaires étaient notés.
Les résultats de l’étude sont résumés dans le tableau 2.
80
Tableau 1 : échelle d’hétéro évaluation utilisée chez l’enfant < 5 ans [13]
0 1 2 3 1-
Pleurs et cris Absence Pleurs Gémissements Épuisé, s’arrête
de pleurer 2-
Sociabilité Contact normal Contact difficile Contact
impossible DESINTERET AFFECTIF
3-Expression du visage
Détendu et expressif
Grimace de douleur
Menton tremblant
Visage prostré, inexpressif
4-Position antalgique
Pas de position antalgique
Evite une position
S’installe dans une position antalgique
Cherche en vain une position antalgique
5-Mobilisation
Se mobilise sans douleur
Mobilisation possible avec précaution
Mobilisation impossible avec précaution
Evite spontanément toute mobilisation
6- Tonus postural
Adaptation posturale
Maintenu avec effort
Inadapté Hyper ou hypotonie
7-Mobilité spontanée
Normale Agitation, mais retour au calme possible
Agitation sans retour au calme possible
Rejet en arrière ou immobilité
8-Réaction à l’examen clinique
Se laisse faire Demande des précautions d’examen
Réticence, retient la main, blocage respiratoire
Examen impossible
9-Localisation des zones douloureuses
Pas de zone douloureuse
Description imprécise du siège
Désigne la zone par geste ou parole
Description précise du siège de douleur
81
Tableau 2 : résultats de l’étude
Groupe I (> 5 ans)
Groupe II (< 5 ans)
Patients (total = 122)
101 patients
âge moyen : 11,1 ans (5-15 ans) 60 garçons (59,4 %) 41 filles (40,6 %)
21 patients
âge moyen : 2,6 ans (1-4,5 ans) 13 garçons (61,9%)
8 filles (38,1 %)
Circonstances cliniques (intensité douloureuse non dépendante de la lésion en cause)
Fractures déplacées Fractures non déplacées Entorses Luxations Brûlures Plaies ou contusions Traumatisme crânien Douleur abdominale
16 27 12
4 2
36 2 2
5 7 7 1 1
Effets secondaires
Nausées Vomissements Vertige Somnolence
1 2 1 1
0
Pourcentage d’efficacité
91,3 % Test de Wilcoxon (p = 0,00001)
100 % Test de Wilcoxon (p = 0,0001)
Délais de prise en charge
Dans les 5 minutes : 92 = 91 % Entre 5 et 10 minutes : 9
Dans les 5 minutes : 21 = 100 %
Cette étude a permis de montrer que le sulfate de morphine, administré par voie orale à l'accueil
des urgences par une puéricultrice, après évaluation rapide de la douleur, permet une prise en charge
précoce et dans 90 % des cas, une diminution dans de brefs délais des scores de douleur après dose
unique. Il y a peu d'effets secondaires, toujours minimes, aucun effet secondaire grave.
La puéricultrice d’accueil a un rôle essentiel car la délégation de soins a pu permettre de réduire le
délai de prise en charge thérapeutique de la douleur aiguë traumatique modérée ou sévère à moins de 5
minutes dans la plupart des cas. De plus, cette prise en charge rapide, bien que nous ne puissions pas le
démontrer formellement, a été un facteur primordial à l’établissement d’une relation de confiance entre
familles, enfants et soignants.
Ce travail a débouché sur la mise en place d’une procédure de prescriptions « protocolisées »,
appliquée, depuis, quotidiennement et avec satisfaction par des infirmières dans le service des Urgences
Pédiatriques du CHU de Bordeaux.
82
Évaluation du protocole à 2 ans (février 2004) :
Ce protocole a été évalué 2 ans après sa mise en place avec 4 objectifs :
- Identifier les difficultés de la prise en charge de la douleur des enfants lors de leur séjour aux
Urgences puis en Radiologie,
- Sensibiliser les équipes soignantes de ces 2 unités à la prise en charge de cette douleur,
- Unifier les outils utilisés par les équipes dans l'objectif d'améliorer leur collaboration dans
cette prise en charge,
- Élaborer une démarche commune de cette prise en charge, pour une continuité de l'évaluation
dans les diverses étapes à partir des Urgences (imagerie, secteur d'hospitalisation…), condition d'une
garantie de continuité des soins.
Une étude a donc été menée d'octobre à novembre 2003 par les équipes des Urgences et de
l’Imagerie Pédiatriques et avec l’aide de l’USPPD (Unité de soutien à la Prise en charge Pluridisciplinaire
de la Douleur) du CHU de Bordeaux et du CCECQA (Comité de Coordination de l’Evaluation Clinique et
de la Qualité en Aquitaine). Elle a porté sur 114 enfants de 2 à 15 ans (72 % de plus de 8 ans), 58 garçons
et 56 filles présentant un traumatisme isolé (62 % au membre supérieur, 29 % au membre inférieur...). Ce
travail a montré pour le service d'Urgences que :
- Le délai entre admission et 1er score d'évaluation était inférieur à 5 minutes pour 80 % des
enfants.
- Le délai entre 1er score d'évaluation et traitement initial était inférieur à 10 minutes pour 90 %
des enfants.
- Le délai entre admission et traitement initial était de moins de 10 minutes pour 78 % des
enfants. Il était de plus de 20 minutes pour 7 % des patients.
- Il existait une inadéquation entre score initial et action thérapeutique entreprise chez 23
enfants : 1 enfant a reçu de la morphine en l'absence de douleur ; 3 enfants ont reçu de la morphine pour
une douleur cotée "faible" ; 19 enfants du paracétamol pour une douleur "cotée" sévère (tableau 3).
Tableau 3 : actions réalisées après score d'évaluation
Score et Traitement Morphine orale Paracétamol Aucun traitement EVA = 0 1 0 4 0 < EVA < 40 3 10 0 EVA > 40 66 19 0 - 49 % des enfants seulement ont été réévalués au bout d'une heure.
- Lorsque le score de douleur était toujours supérieur à 40 (EVA), seulement 21 % d'entre eux
ont bénéficié d'une nouvelle administration d'antalgiques.
83
Cette évaluation de la procédure de prise en charge de la douleur aux Urgences montre donc :
- Des points positifs :
ü Une évaluation systématique à l'admission
ü Un délai de prise en charge de la douleur le plus souvent inférieur à 10 minutes
- Des points négatifs :
ü Une inadéquation des traitements
ü Un défaut d'utilisation des outils d'évaluation, en particulier pour l'hétéro évaluation
ü Une réévaluation et une mise en place de nouvelles actions insuffisantes.
Ces constatations ont amené un groupe de travail composé (selon les recommandations de la
circulaire du 11 février 1999) de cadres de santé, d'infirmières puéricultrices de l'Unité des Urgences, de
manipulateurs en électro-radiologie de l'unité d'imagerie pédiatrique, de médecins pédiatres, anesthésistes
et chirurgiens et de représentants de l'USPPD, à proposer des axes d'amélioration au protocole "morphine"
en cours. Il s'est agi essentiellement de préconiser :
- l'utilisation de formes galéniques plus adaptées aux enfants les plus jeunes (sirop de
morphine),
- l'utilisation d'une échelle d'hétéro évaluation plus simple pour les enfants les plus jeunes
(Objective Pain Scale [13] en l'absence d'échelles validées à l'époque pour l'urgence),
- le développement de la formation initiale et régulière des personnels,
- la nouvelle rédaction de la procédure "morphine" au format "assurance qualité" adopté par le
CHU de Bordeaux,
- les réévaluations et corrections annuelles comme prévu par la circulaire du 11 février 1999.
Cette démarche devrait permettre périodiquement de corriger les dérives dues à la routine et à la
banalisation du protocole. Elle doit également tenir compte des améliorations récentes en particulier en
matière d'évaluation (échelle EVENDOL en cours d'évaluation, échelle Alder Hey [15]).
Enfin, une fiche de suivi "douleur" a été réalisée ; elle permet la continuité de l'évaluation et des
soins antalgiques au cours du "parcours" hospitalier de l'enfant qu'elle accompagne. Cette fiche est validée
par le médecin responsable.
Conclusion :
Pour conclu re, des progrès certains ont été réalisés dans la prise en charge de la douleur de l'enfant
aux Urgences. Les moyens existent pour soulager l'enfant en phase aiguë. Il reste cependant à résoudre des
problèmes d'organisation, sources de perte de temps et de délais inacceptables de soulagement.
L'incitation à rédiger des procédures de service peut apporter une solution à ces difficultés. Cependant
l'évaluation de ces procédures objective, dans notre expérience, des dérives qu'il est essentiel de corriger
de manière régulière pour éviter toute prise en charge inadaptée.
84
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[7] Galland F, Carbajal R, Cohen-Salmon D. Soins douloureux en pédiatrie : avec ou sans les parents ? Vidéo SPARADRAP, Paris, 2000
[8] Circulaire DGS/DH/DAS 99-84 du 11 février 1999 relative à la mise en place de protocoles de prise en charge de la douleur aiguë par les équipes pluridisciplinaires médicales et soignantes des établissements de santé et institutions médico-sociales. Texte disponible sur le site web http://www.sante.gouv.fr/htm/pointsur/douleur/6-reglementa/611-circ9984.htm
[9] Code de la Santé Publique. Livre III. Titre Ier. Articles R 4311-2 et R 4311-8 Texte disponible sur le site web http://www.sante.gouv.fr [10] Audo B. La morphine aux Urgences Pédiatriques : problème ou solution ? A propos de 40
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[12] Pedespan L, Ferreira N, Meymat Y, Pillet P, Llanas B. Prise en charge de la douleur de l'enfant à l'accueil des urgences.
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85
Comment pérenniser les protocoles d’antalgiques au niveau des infirmières
C. DURINGER - Cadre Supérieur de Santé
Pôle des Urgences – CHU DE NANTES
L’amélioration de la prise en charge de la douleur est un des objectifs de la cellule Qualité du pôle des
Urgences du Centre Hospitalier Universitaire de Nantes (au même titre que le respect de la confidentialité
et de la dignité, l’information donnée au patient…).
La prise en charge de la douleur aux urgences médicales du C H U est régie par des protocoles depuis
1994 et a connu depuis cette date, des évolutions, des évaluations régulières et des modifications.
La conception de la prise en charge de la douleur aux urgences : Suite à la troisième conférence de consensus en médecine d’urgence en 1993, le Professeur Baron, alors
chef de service a initié une réflexion sur les protocoles intégrant dans un groupe de travail médecins et
infirmières.
Le but était d’utiliser « en routine » des méthodes standardisées pour évaluer la douleur et aider à la
prise de décision du traitement symptomatique analgésique.
La première étape a été d’établir des protocoles écrits, validés par le corps médical et qui doivent
être utilisés par l’infirmière dès l’arrivée du patient.
La conférence de consensus de 1993 préconise l’utilisation pour les services d’Urgences de l’échelle
numérique. Aux Urgences Adultes du CHU de Nantes, elle est utilisée dès l’entrée du patient et sa douleur
est réévaluée tout au long de la prise en charge dans le service.
Le postulat de départ est de considérer la douleur comme une manifestation subjective et donc un
symptôme d’une étiologie quelle qu’elle soit. La démarche médicale d’exploration de la cause n’étant
plus prioritaire, l’infirmière d’accueil se doit de repérer dès l’arrivée du patient l’urgence de la prise en
charge.
Elle est formée à la reconnaissance de la douleur, elle en évalue l’intensité et décide de la priorité de prise
en charge immédiate dans une salle de soins, par l ’attribution au patient d’un code en fonction de
l’urgence de son état.
86
L’élaboration et l’actualisation des protocoles
Afin d’améliorer la prise en charge de la douleur il paraît indispensable que l’actualisation des protocoles
soit assurée en permanence par un référent médical et un référent soignant. Le réfèrent soignant est l’un
des cadres de l’unité.
La cellule Qualité de l’Urgence (regroupant médecins, infirmiers, cadres soignants) travaille sur différents
thèmes qui émanent du projet de service et d’établissement.
La prise en charge de la douleur constitue l’un de ces thèmes. Les médecins « urgentistes », également
membres du Comité de lutte contre la douleur au C.H.U. de Nantes, y sont impliqués.
Le lien avec les autres services de l’Hôpital est nécessaire pour questionner les pratiques des Urgences.
Pour cela, il existe des staffs médicaux qui permettent d’aborder, en autre, le partage des protocoles au
niveau institutionnel.
Tous les protocoles médicaux et paramédicaux sont mis en ligne sur le site Intranet du service d’Urgence
et à chaque réactualisation, un bandeau « nouveau » surligné en jaune apparaît.
La formation des personnels infirmiers :
Chaque infirmier, dès son intégration dans le service est informé et formé à la prise en charge rapide des
patients.
Un livret d’accueil lui est remis dès son arrivée dans le service. Il contient les codes de priorités de prise
en charge des patients pour l’infirmier d’orientation et d’accueil (IOA), les protocoles antalgiques,
l’utilisation du matériel (pompe PCA…).
Une formation d’une heure par atelier de 10 à 15 personnes est réalisée par le médecin référent douleur.
Elle comprend l’utilisation des pompes de morphine et un rappel des protocoles douleur et leur utilisation
dans le service.
Evaluation de la prise en charge de la douleur :
La connaissance des différents protocoles par les infirmiers est évaluée lors de leur évaluation annuelle
par le cadre au même titre que les formations aux gestes d’urgence, à la transfusion, au respect de la
confidentialité et de la dignité , etc..
Une évaluation mensuelle est effectuée sur 5 dossiers et auprès de 5 patients, dans tous le s secteurs de
l’Urgence sur une vingtaine de critères dont 4 sont consacrées à la prise en charge de la douleur.
87
Q12. L’évaluation initiale de la douleur est tracée
Q13. Le traitement de la douleur est précisé
Q14. L’évaluation du traitement de la douleur est réalisée
Q15. Le patient est satisfait de la façon dont sa douleur a été prise en compte
Cette évaluation peut être faite par les cadres et/ou les infirmières. Elle prend en moyenne 2 heures par
dossier pour évaluer l’ensemble des 20 critères.
Il nous paraît important de le faire ensemble, car chacun à son niveau peut évaluer son travail.
Les résultats sont transmis aux agents par affichage. C’est un outil facile à utiliser car il permet de
manière très rapide d’avoir une vue d’ensemble de la prise en charge des patients dans son secteur. Ces
évaluations sont faites depuis deux ans au SAU adultes et pédiatriques avec une évolution des critères
entre les deux années, hormis pour les critères relatifs à la douleur. Les résultats sont plutôt en faveur
d’une amélioration de la prise en charge des patients.
Conclusion :
Pour pérenniser des protocoles, un objectif commun à toute l’équipe soignante est de ne jamais « baisser
la garde » en considérant qu’il faut toujours remettre en question nos pratiques. La nécessité d’une
formation avec une réactualisation des connaissances annuelle permet de garder « le cap ». La
reconnaissance médicale de l’expertise infirmière en terme de capacités à évaluer, coder, utiliser des
protocoles permet de lever les réticences des infirmières à l’utilisation de ceux-ci sans validation
immédiate du médecin.
88
Démarche d’amélioration de la prise en charge de la douleur chez les personnes âgées à domicile ROLE DES AIDES SOIGNANTES DANS L’EVALUATION DE LA DOULEUR
C. Arnoult, aide-soignante
G. Conventz, agent de développement gérontologie F. Buisson, infirmière coordinatrice
Présentation du S.S.I.A.D. : Le Service de Soins Infirmiers à Domicile (S.S.I.A.D.) est composé d’une équipe comprenant 12 aides
soignantes et une infirmière coordinatrice. Il est intégré dans l’hôpital local de Rugles. Il travaille en
collaboration avec les médecins et infirmiers libéraux.
Le service a une capacité d’accueil de 42 patients
- 35 patients par jour en moyenne le matin
- 8 patients pris en charge le soir du lundi au samedi.
- le dimanche : service restreint : environ 12 patients le matin et 7 à 8 le soir.
Les intervenants du S.S.I.A.D. proposent des prestations de qualité qui se réfèrent à la charte de la
personne âgée dépendante et aux compétences qu’apporte le diplôme professionnel d’aide soignante :
§ Le respect du patient,
§ La compétence du soignant (application d’une prise en charge globale du
patient).
Ainsi, le S.S.I.A.D. répond à plusieurs objectifs :
§ Assumer les implications d’une politique de maintien à domicile,
§ Répondre aux besoins croissants de demande de prises en charge à domicile,
§ Ecourter le séjour sanitaire des personnes âgées après la phase aiguë de leur prise
en charge,
§ Permettre le retour à domicile des malades présentant un lourd handicap.
1/ Rôle : Le S.S.I.A.D. assure sur prescription médicale des soins d’hygiène, des soins techniques infirmiers (en
collaboration avec les infirmières libérales) auprès de personnes âgées malades ou dépendantes, de
personnes adultes handicapées de moins de 60 ans.
Le S.S.I.A.D. est une alternative à l’hospitalisation favorisant le maintien et le soutien à domicile.
2/ Vocation essentielle : Les cinq objectifs principaux sont :
89
§ Eviter une hospitalisation lorsque les conditions médicales le permettent,
§ Abréger une hospitalisation,
§ Faciliter le retour à domicile dans le but de maintenir la personne âgée au sein de
son tissu social,
§ Préserver ou retarder la perte d’autonomie,
§ Aider et soutenir le conjoint, la famille ou les proches dans l’accompagnement
d’une personne âgée et/ou dépendante et/ou malade. 3/ Fonctionnement du S.S.I.A.D. : Le S.S.I.A.D. est géré par l’hôpital local de Rugles (27). Des conventions sont signées avec les différentes
caisses d’assurances (Maladies, Artisanales, Commerciales, Industrielles, Professions Libérales, Mutualité
Sociale Agricole) ainsi qu’avec les infirmières libérales.
Il a été ouvert en 1992 et disposait alors d’un agrément de fonctionnement de 20 places, qui a bénéficié
d’une extension de :
§ 6 places, soit un total de 26 lits en Juin 2001
§ 8 places, soit un total de 34 lits en Juin 2003
§ 8 places, soit un total de 42 lits en Mars 2005
§ L’infirmière coordinatrice est l’interlocuteur principal des patients, des familles et des
professionnels. Elle organise les admissions sur prescription médicale, définit un plan de
soins, assure un rôle de coordination avec le patient, la famille, l’environnement et les
différents intervenants médicaux, paramédicaux et sociaux (A.D.M.R : Service de portage de
repas), organise et gère les plannings des aides soignantes, encadre les aides soignantes dans
la démarche et la réalisation des soins et contrôle la qualité.
§ Les soins sont réalisés par les aides soignantes dont les compétences sont les suivantes :
- Dispenser des soins sous la responsabilité de l’infirmière coordinatrice : hygiène,
confort, soutien relationnel et psychologique, conseils éducatifs et préventifs dans le
cadre du retour à l’autonomie ou de l’accompagnement en fin de vie,
- Transmettre et noter les informations dans le dossier de soins du patient,
- Assurer une surveillance et prendre des initiatives en cas d’urgence : appel de
l’infirmière, du médecin, du SAMU…
90
Les soins infirmiers sur prescription médicale (injections, perfusions, prise de sang, lavements,
pansements, alimentation par sonde gastrique…) sont réalisés par les infirmières libérales choisies par le
patient.
Projet douleur : Durant l’année 2003, nous avons reçu la circulaire émanant de la D.D.A.S.S. signalant que dans
le cadre du 2ème Plan de lutte contre la Douleur (2001/2005), un appel à projets était mis en place
par le C.N.R.D.
Nous avons donc décidé de travailler sur
« La Douleur provoquée par les soins : Prévention et amélioration de la prise en charge ».
Objectifs du projet
Améliorer la prise en charge de la douleur provoquée par les soins chez les personnes suivies à domicile
par :
L’intégration de ce projet »douleur »dans le projet de service du SSIAD en améliorant le dossier patient
dans le but de transmettre des informations pertinentes sur la douleur à tous les soignants (médicaux et
non médicaux).
Les participants au projet
§ L’infirmière coordonnatrice
§ Les aides soignantes
§ Les auxiliaires de vie
§ L’agent de développement gérontologie (Il est chargé du développement des
projets d’établissement dans le but d’améliorer le quotidien des personnes âgées)
§ La psychologue (Elle intervient tous les lundis au moment des transmissions avec
l’équipe, elle apporte un soutien à l’équipe et une écoute)
§ Les médecins généralistes des patients
§ Les infirmières libérales à domicile
Questionnements de départ :
§ Que faire lorsqu’on identifie un patient douloureux?
§ Comment savoir réellement si le patient souffre pendant les soins ?
§ Comment évaluer la douleur, à qui transmettre le résultat de l’évaluation ?
§ Quand doit on appeler le médecin si la douleur persiste ?
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Les différentes étapes du projet :
- Recueil d’informations relatifs à la douleur, documents existants, articles (Décret
2002.793 du 3 Mai 2002)
- Septembre 2003 : contact avec P. Cimerman , Envoi du projet au CNRD
- Décembre 2003 : dossier retenu par le CNRD
- Janvier à avril 2004 : divers contacts téléphoniques avec le CNRD, choix d’une
échelle d’évaluation de la douleur : « Echelle DOLOPLUS », plan de travail…
- Mai 2004 : réunion et rencontre avec Mme P. Cimerman afin d’effectuer un 1er bilan
et rencontrer l'équipe. Les objectifs fixés étant d'intégrer le projet de prise en charge
de la douleur dans le projet de service du S.S.I.A.D. Au cours de cette réunion, il est
décidé de rajouter systématiquement l'évaluation de la douleur dans le plan de soins
des aides soignantes. L'échelle DOLOPLUS n'étant pas adaptée à la douleur des soins
et après réflexion de chacun, le choix de l'échelle E.C.P.A (Echelle Comportementale
de la Personne Agée) est retenu. Outre les résultats des scores de l'E.C.P.A, seront
également notés dans tous les dossiers patients, les antalgiques prescrits et le moment
de prise des antalgiques. Lors de cette entrevue, l'équipe fait part de difficultés
relationnelles entre infirmières, aides-soignantes et médecins.
- Juillet 2004 : mise au point téléphonique sur l'état d'avancement du projet,
standardisation de l'évaluation (à l'arrivée de l'aide soignante pour le temps
d'évaluation avant les soins). Un bilan est établi après chaque fin de tournée des AS
pour évaluer, dans un premier temps, si le choix de l’outil est judicieux et si la douleur
des patients est mieux identifiée et mieux gérée.
- Février 2005 : il est décidé d'écrire le bilan de ce qui a été mis en place, la réflexion
de l'équipe, la démarche d'amélioration de la prise en charge de la douleur en
l'illustrant par un cas concret.
- De mai à Août 2005 : divers contacts téléphoniques avec le CNRD pour aide à la
rédaction
- De septembre à décembre 2005 : finalisation du projet afin de pouvoir élaborer un
PROTOCOLE S.S.I.A.D
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Les apports du plan douleur et de l’appel à projets : La mise en place de ce projet a permis :
- une identification beaucoup plus précise de la douleur grâce à l’observation : avant, pendant et après
les soins pour tous les patients. L’ ECPA est systématiquement établie par l’aide soignante qui fait la
première prise en charge. L’évaluation est reconduite ou non, selon les observations faites et le score
qui en aura découlé.
- Une vérification systématique par les AS de l’existence ou non de la prescription d’un traitement
antalgique quand le patient est douloureux
- Une modification de l’organisation du travail avec passage de 2 aides-soignantes en même temps
chaque jour pour les personnes en fin de vie ou très douloureuses afin de générer le moins de douleur
possible lors des mobilisations
- Une coordination du travail AS/infirmière libérale pour les personnes en fin de vie ou très algiques
afin que la toilette et les pansements (escarres ou autres) soient le moins générateurs de douleur
- Une sollicitation de la famille pour une aide lors des soins
- Un meilleur dialogue entre AS et famille, une meilleure information (si le patient n’a pas de famille, le
médecin est appelé automatiquement)
- Un meilleur respect du délai d’action des antalgiques : par exemple, prise d’un antalgique dans l’heure
qui précède la toilette
Les perspectives :
- Mise en place prochainement d’une réunion d’information pour les médecins et
infirmières libéraux sur le trava il d’observation et d’évaluation effectué par les aides
soignantes
- Utilisation de la grille ECPA par les infirmières
- Élaboration de protocoles de prise en charge de la douleur (procédure d’évaluation par
ECPA, protocole de mobilisation d’un patient...)
- Intégration de la grille ECPA dans tous les dossiers laissés à domicile
Exemple d'un patient suivi au SSIAD : Monsieur L
Né le 5 Août 1930
1ère prise en charge au SSIAD le 28 Août 2002
Indication de la prise en charge : hémiplégie côté droit
Soins dispensés : Soins d’hygiène, toilette complète
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Patient douloureux à la mobilisation, douleurs niveau jambe et bras droit, douleurs de type neurologique
- Traitement antalgique avant prise en charge : Oxycontin® 10 mg au moment des douleurs intenses.
Traitement non efficace, soulagement partiel après délai de 3 h 00
- Traitement antalgique après prise en charge : Neurontin® 400, 1 le soir, Dantium® 25, 1 le matin,1 le
soir, Rivotril®, 3 gouttes le matin et 3 gouttes le soir si douleurs intenses.
Nous avons choisi le cas de Monsieur L car il présente des douleurs quotidiennes. Grâce aux évaluations
avec E.C.P.A., à une meilleure adaptation des traitements, nous réussissons à mieux observer et
reconnaître les signes de douleur chez ce patient.
Scores ECPA octobre 2004
score moyen e plus bas : 3
score moyen le plus haut : 21
Scores ECPA novembre 2004
score moyen le plus bas : 3
score moyen le plus haut : 16
Scores ECPA Décembre 2004
Score moyen le plus bas : 0
score moyen le plus haut : 18
Lorsque nous observons une douleur plus forte qu’à l’habitude, nous en parlons à son épouse, vérifions la
prise du traitement (traitement en fonction du rythme du sommeil, bonne répartition des prises…).
A l’heure actuelle, Monsieur L. est moins douloureux qu’au début de la prise en charge. Ceci s’explique
certainement par l’amélioration de la communication avec son épouse. Celle -ci prend en compte les
observations de l’équipe soignante et donne le traitement en conséquence. La prise en charge se fait
toujours avec l’intervention de 2 aides soignantes afin de faire face aux difficultés lors des transferts et de
la mobilisation du patient
Conclusion
Le personnel du S.S.I.A.D est très motivé, il est présent au quotidien auprès des personnes prise en charge
à domicile. Les scores de douleur sont significatifs, objectifs, comparables. Nous ne sommes plus dans
« l’à peu près » L'amélioration du dossier « douleur » laissé au domicile pourra servir de support de
transmission à tous les soignants.
Écouter, Entendre, Faire confiance, Croire le malade, Comprendre, Ne pas délaisser la famille,
Évaluer et Réévaluer la douleur, telles sont les priorités et les réflexions permanentes de l'équipe.
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Hôpital Local de Rugles S.S.I.A.D Rue de l’Hôpital 27250 Rugles ℡0232246322 Fax0232246875 E-MAIL [email protected]
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Croire le malade…. avec les grilles d’hétéro-évaluation de la douleur
Jean-Marie GOMAS, médecin
Annie PETROGNANI, infirmière clinicienne Consultation de la douleur chronique, Hôpital Sainte Perine, Paris 16ème
Il existe deux types d’évaluation pour le patient douloureux :
- L’autoévaluation qui requiert de sa part la pleine possession de ses capacités verbales, cognitives et
sensitives afin de spécifier les différentes caractéristiques de cette «expérience sensorielle et émotionnelle
désagréable» (1).
- L’hétéroévaluation qui est utilisée pour des personnes qui ont des déficits plus ou moins importants au
niveau de leur capacité à communiquer ou pour les enfants de moins de 6 ans qui n'ont pas encore acquis
toutes leurs compétences de symbolisation.
Pour évaluer cette population, que nous qualifierons de « dyscommunicante », nous nous appuierons
essentiellement sur la composante comportementale de la douleur.
Pour organiser les observations et pouvoir les transmettre, il existe des grilles qui répertorient un certain
nombre d’attitudes dysfonctionnelles qui sont autant de signaux d’alarme pour les soignants (mimique
douloureuse, position antalgique, troubles de l’humeur).
Ces grilles sont quasiment toutes structurées selon le même principe :
1. Observations du patient en dehors des soins et des sollicitations
2. Observations du patient pendant les soins et les sollicitations
3. Retentissements de la douleur sur ses activités de la vie quotidienne (AVQ) . I – Avant l’évaluation : 1 - L’interprétation et le jugement sont chronophages et faussent l’évaluation
Pour gagner en temps et en efficacité, il faut :
§ CROIRE LE PATIENT DANS CE QU’IL DIT OU M ONTRE
§ Croire les collègues dans leurs évaluations
§ Mettre les évaluations en syne rgie plutôt qu’en opposition
2 - La douleur est une expérience sensorielle ET émotionnelle . Quelles que soient nos habiletés, il y aura
toujours de l’émotion dans les signes physiques que nous décodons (peur, appréhension, tristesse…).
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3 - L’intensité douloureuse est fluctuante en fonction de différents facteurs :
§ Organiques
§ Psychiques
§ Environnementaux
§ Culturels et sociaux Pour limiter ces variables, pensez à :
§ Réaliser une évaluation par équipe
§ Choisir un moment de la journée (ex : la toilette, la kinésithérapie, un change…)
4 - Pour un grand nombre de patients susceptibles d’être hétéroévalués, le comportement habituel ne doit
pas être confondu avec un comportement « dit » normal (ex : patients atteints de démence ou de troubles
psychiatriques).
5 - Une autre difficulté rencontrée est celle reliée au risque de coter sur ces échelles les signes de démence
ou de dépression (surtout en gériatrie).
Il s’agit de garder à l’esprit, tout au long de l’évaluation, la question suivante :
Est-ce que le signe observé est un signe de douleur physique ?
§ Si oui, l’item est chiffré ;
§ Si non, il ne l’est pas.
§ S’il existe un doute, il est possible de barrer l’item et d’ôter son score maximal du
score total pour ne pas désavantager le patient.
C’est une étape très importante de l’hétéroévaluation. Rappelons-nous comment, durant des décennies, les
enfants n’étaient pas soulagés car leurs signes de douleur physique étaient confondus avec les signes de
l’hospitalisme. Grâce aux travaux de SPITZ et de ses successeurs, nous savons mieux discriminer les deux
sémiologies. 6 - Quand la personne présente des troubles du comportement sévères ou quand ses capacités physiques
ou psychiques sont très réduites, il vaut mieux choisir une grille simplifiée type Echelle Comportementale
Simplifiée ECS* (ex : malades intubés, ventilés ou malades en phase terminale de démence).
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A contrario, certains adultes, personnes âgées (comme les enfants de moins de 6 ans) ont un potentiel
physique et d’intérêt pour l’environnement que les soignants peuvent repérer. Dans ce cas, une grille
moins simple est davantage adaptée (Doloplus, ECPA* chez le sujet âgé, DEGR* chez l’enfant).
II - Pendant l’évaluation : 1) Une seule exigence 2) Supprimer l’item, si le patient ne peut pas nous montrer le signe que nous recherchons (ex : la position
antalgique pour les patients intubés, ventilés, la mimique pour les patients atteints de Parkinson…).
3) S’autoriser à ne pas remplir toute la grille.
Il est préférable d’avoir 3 ou 4 signes dont nous sommes sûrs qu’ils sont reliés à la douleur physique,
que d’en avoir 10 et qu’il existe un doute entre douleur physique, dépression et démence.
4) Parfois les comportements inhabituels douloureux de la personne ne correspondent à aucun de ceux
proposés par les échelles. Il suffit alors de créer une « grille » spécifique pour le patient.
Un exemple : Mme M. âgée de 87 ans, atteinte de démence sévère, présente sur une quinzaine de jours
des attitudes psysiques qui alertent les soignants :
§ Cris différents de ceux reliés à la démence
§ Oscillation du buste d’avant en arrière, en position assise dans son lit
§ Agitation motrice durant les repas
Mme M. semble encore moins encline que d’habitude à rester en position assise. Le diagnostic principal est une démence type Alzeimer qui n’est pas réputé, en phase évolutive, pour
donner des douleurs physiques. La clinique ne retrouve aucune cause claire à ce tableau.
L’équipe médico-soignante se fait confiance et en collaboration avec l’EMSP un traitement antalgique est
initié.
Grâce à une surveillance de chacun, Mme M. va bénéficier d’un test thérapeutique qui aboutira à
l’administration d’un morphinique. Dès lors, Mme M. retrouve son comportement habituel et conserve
toute sa vigilance lors de ses déambulations et de sa participation aux animations. Environ 3 semaines
après la mise en route de ce traitement, Mme M. présente… une hématurie qui permettra à l’équipe
médicale de poser le diagnostic de cancer du rein au vu de l’échographie.
§ Observer § Se faire confiance § Poser la question
« ce signe est-il révélateur d’une douleur physique ? »
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III - Après l’évaluation :
1) Pour en finir avec la fameuse notation : «douleur ++++», un petit truc mnémotechnique pour les
transmissions :
A VQ : Activités de la Vie Quotidienne Qu’est ce que le patient est empêché de faire ?(dormir, manger, jouer…)
I ntensité obtenue grâce au score de la grille D urée : Combien de temps la douleur s’installe ? (le temps du soin, toute la
journée, la nuit) O ù ? : Quels endroits sont douloureux ?
Observation pendant les soins et à l’examen clinique C omment ? : Quelles sensations sont ressenties par le patient ?
En hétéroévaluation, c’est très souvent la question à laquelle les soignants ne peuvent pas répondre. Seul le patient pourrait le dire.
Q uand ? : L’heure et la date des évaluations nous permettent de cibler les
moments pénibles pour la personne .
Cette liste parcourt l’essentiel de l’évaluation, elle peut ainsi remplacer le « Eh ! doc(teur) » par le « A.I.D.O.C.Q. ! ! ».
2) La transmission du score est souvent plus parlante en fractions.
Exemple : ECS 4/10
Ce score peut ne pas déclencher un traitement antalgique en urgence car il paraît assez faible. Hormis le
fait que, si les 4 points sont obtenus pendant les soins et les mobilisations, « 4/4 » cela devient une priorité
absolue de traitement pour cette période de mobilisation. Et l’on sait les dégâts psychiques reliés à la
mémoire de la douleur.
3) Conserver la même grille pour le patient, la comparaison des scores sera ainsi facilitée.
Le Docteur François BOURREAU dit que l’ « on met toute une vie à savoir évaluer la douleur »
alors respectons nos étapes d’apprentissage respectives dans l’équipe.
Les uns : ne connaissent pas l’outil, ni l’évaluation. Ils ne manifestent aucun intérêt, c’est explicable.
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Les autres : connaissent le principe mais ne savent pas se servir des outils, c’est explicable.
Certains : ont franchi les deux premières étapes et appliquent les principes de l’évaluation avec
concentration. C’est l’étape la plus difficile à franchir, ne pas se décourager.
Tous, nous finissons par maîtriser l’outil et c’est la relation avec le patient que nous enrichissons de notre
écoute et de notre présence pour un meilleur soulagement de la douleur.
Il y a des risques à l’utilisation de ces outils, comme avec tous :
§ Oublier la relation soigné/soignant
§ Vouloir faire rentrer le patient dans la grille ! Plutôt que de l’adapter à ses besoins
§ Evaluer pour évaluer sans initiative thérapeutique ultérieure.
Mais les avantages sont là
§ Diminuer la subjectivité de chacun
§ Optimiser les transmissions pour l’équipe médicale
§ Assurer la continuité des soins
§ Avoir des éléments pour les réévaluations
Et quand « ça bloque »… RECOMMENCONS ! !
* ECS : Echelle Comportementale Simplifiée * ECPA : Echelle Comportementale Personne Agée * DEGR : Douleur Enfant Gustave Roussy Bibliographie : Hirzowski F, Boureau F. Nécessité d’évaluer la douleur en pratique quotidienne. Douleurs 2000,1,1, 16-18; Wary B et collectif DOLOPLUS. Plaidoyer pour l’évaluation de la douleur chez le sujet âgé. Gérontologie et Société, 1997, 78,89-98 Jean A , Morello R Alix M. Evaluation de la douleur du sujet âgé hospitalisé en long séjour. Revue de gériatrie 1998, 23,253-256 Le Quintrec JL, Maga M Baulon A. L’échelle comportementale simplifiée ECS : un nouvel outil, d’évaluation de la douleur en long séjour gériatrique, 1995,20,6,363-368 Pichard Leandri, E Gauvain-Picard A. La douleur chez l’enfant MEDSI McGraw Hill 1989 Petrognani A, Gomas JM. Quel bilan avant la morphine chez le sujet âgé ?. Revue de gériatrie, 2000, t. 25 n°6 Gomas JM Petrognani A&coll. Prise en charge de la douleur chez le sujet âgé. Soins et gérontologie. 2002,37 Gros JP. Un nouveau défi gérontologique : la systématisation de l’évaluation de la douleur. Mémoire de Capacité de gérontologie, paris V, 1999
100
Synthèse des Standards, Options et Recommandations pour la prise en charge des douleurs provoquées lors des ponctions sanguines, lombaires et osseuses chez l’adulte atteint de cancer.
Validation du rapport original : janvier 2005
Membres du groupe de travail : I. Krakowski, Oncologue médical, Centre Alexis Vautrin, Vandoeuvre-lès-Nancy (coordonnateur) S. Theobald, Méthodologiste, Centre Paul-Strauss, Strasbourg N. Fabre , Méthodologiste, FNCLCC, Paris T. Delorme , Médecin généraliste douleur, Institut Curie, Paris M. Binhas , Anesthésiste réanimateur, Hôpital Henri Mondor, Créteil E. Collin, Médecin généraliste douleur, Hôpital Pitié -Salpétrière, Paris R. Duclos , Néphrologue, CHG, Le Mans D. Jaulmes, Hémobiologiste clinicienne, Hôpital Saint-Antoine, Paris M. Luu, Médecine générale, Hôpital Avicenne, Bobigny S. Rostaing-Rigattieri, Anesthésiste réanimateur, Hôpital Saint-Antoine, Paris H. Rousselot, Médecin généraliste douleur - soins palliatifs, Centre Alexis Vautrin, Vandoeuvre-Lès-Nancy G. Torloting, Anesthésiste réanimateur, Centre hospitalier du Parc, Sarreguemines N. Vuillemin, Médecin généraliste douleur, Centre hospitalier, Mulhouse Membres associés au groupe de travail L. Balp, Anesthésiste réanimateur, CHG Pavillon la Ferté, Lons Le Saunier G. Chvetzoff, Oncologue médical, Centre Léon Bérard, Lyon M. De Beauchene , Anesthésiste réanimateur, Centre Hospitalier, Poissy L. Geoffrois, Oncologue médical, Centre Alexis Vautrin, Vandoeuvre-lès-Nancy F. Lakdja, Anesthésiste réanimateur, Institut Bergonié, Bordeaux P. Marec-Bérard, Oncologue pédiatre, Centre Léon Bérard, Lyon C. Minello , Anesthésiste réanimateur, Centre G.F Leclerc, Dijon C. Ricard, Anesthésiste réanimateur, CHU Hôpital Lapeyronie, Montpellier B. Richard, Interniste, CHU Caremeau, Nîmes C. Schmitt, Oncologue pédiatre, CHU Hôpital Brabois, Vandoeuvre-lès-Nancy Ces recommandations de bonne pratique, qui relèvent de l’opinion d’experts cliniciens, s’ajoutent à
l’ensemble des recommandations de pratique clinique présentées pour chaque geste invasif :
Ø il faut systématiquement évaluer la nécessité d’effectuer un geste invasif douloureux ;
Ø tout geste invasif doit être exécuté par une personne formée utilisant un matériel adapté ;
Ø avant l’exécution du geste, le patient doit être informé de son caractère douloureux et doit pouvoir
exprimer ses préférences quant au choix d’une stratégie antalgique ;
Ø la mise en oeuvre d’une intervention à visée antalgique et/ou anxiolytique doit impérativement
respecter le délai d’action et tenir compte de la durée d’action de l’intervention retenue (cf. libellés
d’AMM sur www.theriaque.org) ;
Ø la mise en oeuvre d’une intervention à visée anxiolytique répond aux mêmes principes. Des molécules
à durée d’action courte doivent être privilégiées dans ce contexte (Annexe 5).
Ø une évaluation systématique de la pénibilité du geste pour le patient doit être effectuée. Le résultat de
101
chaque évaluation devra orienter le praticien sur la nécessité éventuelle de reconsidérer la stratégie
antalgique à proposer au patient pour le geste suivant. Concernant les modalités d’évaluation de la
douleur, les experts orientent le lecteur vers le chapitre « Douleur aiguë liée aux actes » des
recommandations pour la pratique clinique « Standards, Options et Recommandations pour
l’évaluation de la douleur chez l’adulte et l’enfant atteints de cancer » [DELORME2004].
Prise en charge de la douleur liée à la ponction lombaire chez l'adulte atteint de cancer : Pour effectuer la ponction lombaire, il est recommandé :
Ø d’utiliser des aiguilles fines à section atraumatique de type Sprotte rounded, ou Whitacre pencil-point
(recommandation, accord d’experts).
Ø Un pansement de lidocaïne/prilocaïne doit être apposé 120 minutes avant la ponction (standard,
accord d'experts).
Ø Le mélange équimolaire oxygène/protoxyde d’azote (MEOPA) peut être utilisé (option, accord
d’experts). Il est alors recommandé :
- d’effectuer une surveillance accrue de la sédation pour un patient
sous opioïde (recommandation, accord d’experts) ;
- de maintenir un contact verbal avec le patient durant l’exécution
du geste (recommandation, accord d’experts).
Les anxiolytiques et les techniques non médicamenteuses (contrôle cognitif de la douleur, relaxation,
hypnose) ne s’envisagent qu’au cas par cas pour des actes répétés, si l’antalgie était jugée insuffisante
avec les moyens définis (recommandation, accord d’experts). Le développement de la recherche clinique
pour ces interventions est recommandé (recommandation, accord d'experts).
Prise en charge de la douleur liée aux ponctions osseuses chez l'adulte atteint de cance r : Aucun standard n’a pu être défini dans cette indication.
Trois options antalgiques ont été définies dans cette indication :
Ø MEOPA + infiltration d’un anesthésique local (option, accord d’experts). Il est alors recommandé
d’effectuer une surveillance accrue de la sédation pour un patient sous opioïde (recommandation,
accord d’experts). Il est aussi recommandé de maintenir un contact verbal avec le patient durant
l’exécution du geste (recommandation, accord d’experts) ;
Ø Application topique d’un mélange de lidocaïne/prilocaïne 120 minutes avant le geste + opioïde +
infiltration d’un anesthésique local +/- anxiolytique (patient anxieux) (option, accord d’experts).
- Si le patient est sans traitement antalgique ou sous traitement antalgique de niveau 1 ou 2,
102
l’opioïde est un opioïde de niveau 3 à libération immédiate par voie orale (recommandation, accord
d’experts).
- Si le patient est déjà sous opioïde, il s’agit d’une interdose avec un délai suffisant selon la
voie d’administration (recommandation, accord d’experts). Concernant l’administration d’un
anxiolytique, l’utilisation d’une molécule de durée d’action courte donnée dans un délai suffisant est
recommandée (recommandation, accord d’experts) ;
Ø Anesthésie générale (notamment en cas de ponctions osseuses répétées, de possibilité de regrouper
plusieurs gestes invasifs, etc.) (option, accord d’experts). Il est recommandé de mener une étude
approfondie de la balance bénéfice/risque et de recueillir les préférences du patient (recommandation,
accord d’experts).
Pour des ponctions osseuses répétées, en cas d’échec antalgique révélé lors de la dernière ponction, il est
recommandé de proposer au patient une des options antalgiques alternatives pour le(s) geste(s) suivant(s)
(recommandation, accord d’experts).
Le développement de la recherche clinique dans ce domaine est recommandé (recommandation, accord
d’experts).
Prise en charge de la douleur liée aux prélèvements à l’artère radiale pour la mesure des gaz du sang chez l'adulte atteint de cancer : Les indications de ponctions radiales doivent être limitées aussi souvent que possible au profit
d’oxymétries transcutanées, c'est-à-dire chaque fois que la mesure de la PCO2 n’est pas indispensable
(standard, accord d'experts).
Pour une mesure de la PCO2, en cas d’impossibilité de prélèvement à l’artère radiale, un prélèvement
capillaire au lobe de l’oreille après application d’un produit rubéfiant est possible (option, accord
d’experts).
Lorsqu’une ponction radiale est envisagée, il est possible :
Ø d’injecter un anesthésique local de type lidocaïne en regard de la goutière radiale avant le prélèvement
(option, accord d’experts) ;
Ø d’appliquer un mélange lidocaïne/prilocaïne en regard de la goutière radiale 120 minutes avant le
prélèvement (option, accord d’experts).
Il est recommandé d’évaluer l’efficacité du mélange lidocaïne/prilocaïne dans ce contexte car cela pourrait
éviter une piqûre au patient (recommandation, accord d’experts).
103
Prise en charge de la douleur liée aux prélèvements veineux chez l'adulte atteint de cancer : Aucun standard n’a pu être défini dans cette indication.
Lorsque des prélèvements veineux répétés sont programmés, il est possible :
Ø de n’envisager aucune stratégie à visée antalgique (option, accord d’experts) ;
Ø d’utiliser un mélange de lidocaïne/prilocaïne 60 à 120 minutes avant la ponction (option, accord
d’experts).
Il est cependant recommandé de proposer au patient le mélange de lidocaïne/prilocaïne 60 à 120
minutes avant le geste prévu et pour chaque geste suivant : le patient doit participer à la décision
thérapeutique (recommandation, accord d’experts).
Le développement de la recherche clinique dans ce domaine est recommandé (recommandation,
accord d’experts).
Le rapport intégral de la prise en charge des douleurs provoquées lors des ponctions lombaires,
osseuses et sanguines chez l’adulte atteint de cancer est téléchargeable sur le site internet des SOR :
http://www.fnclcc.fr/sor.htm
Fédération Nationale des centres de lutte contre le cancer Standards, Options, Recommandations :
101, rue de Tolbiac 75 654 Paris cedex 13 tél : 01 44 23 04 04 / Fax : 01 44 23 04 17
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Standards, Options et Recommandations pour la prise en charge des douleurs provoquées lors des ponctions sanguines, lombaires et osseuses chez l’enfant atteint de cancer
C. Schmitt (Hôpital d’enfants, Nancy), P. Marec-Bérard (Centre Léon Bérard, Lyon), S. Theobald (Centre
Paul Strauss, Strasbourg), N. Fabre (FNCLCC, Paris), C. Kasparian , P. Boutard (CHRU, Caen) , L. Mansuy (CHU, Nancy),C. Monvillers (CH, Compiègne), M. Munzer (CHRU, Hôpital américain, Reims),
D. Orbach (Institut Curie, Paris),C. Ricard (CHU Hôpital Lapeyronie, Montpellier), C. Sakiroglu (CTP, Margency), G. Tumerelle (CH, Compiègne), D. Annequin (Hôpital Trousseau, Paris),
R. Carbajal (Hôpital Trousseau, Paris), M. Luu (Hôpital Avicenne, Bobigny), G. Torloting (Centre hospitalier du Parc, Sarreguemines), C. Wood (Hôpital Debré, Paris)
Introduction : Dans le cadre des « Standards, Options et Recommandations » (SOR), et en collaboration
avec la Société Française d’Etude et de Traitement de la douleur (SFETD), est né un projet de
rédaction de recommandations pour la pratique clinique (RPC) concernant les règles de prise
en charge des douleurs provoquées par les gestes invasifs chez l’adulte (document publié
en Janvier 2005) et chez l’enfant (document en cours de publication) atteint de cancer . Ces
recommandations concernent la douleur immédiate provoquée pas les ponctions sanguines
(PS), lombaires (PL) ou osseuses. La prise en charge des céphalées post-ponctions lombaires,
de la douleur liée à la canulation veineuse ou artérielle impliquant l’utilisation d’un matériel
différent, ne sont pas abordées dans ce travail. Ces recommandations concernent les enfants y
compris les nouveau-nés. Les nouveau-nés prématurés (âge < 37 semaines) sont exclus de
cette étude.
Ces recommandations s’adressent aux spécialistes concernés par la prise en charge des
nouveau-nés et des enfants atteints de cancer.
Méthodologie des SOR :
La méthode d’élaboration et d’actualisation des SOR repose sur l’analyse critique des meilleures
données scientifiques disponibles et le jugement argumenté des experts au sein d’un groupe de travail
pluridisciplinaire représentatif des modes d’exercice et des disciplines concernées par la prise en
charge des patients atteints de cancer. Cette méthode dite «mixte» combine le niveau de preuve
scientifique et l’accord d’experts. Le rapport intégral est revu par des experts indépendants à l’aide
d’une grille de lecture basée sur la grille AGREE. Les commentaires sont compilés et analysés par le
groupe de travail et la nature des modifications engendrées est décrite dans le processus de relecture.
Les Standards, Options et Recommandations accompagnés du niveau de preuve reposent sur les
meilleures preuves scientifiques disponibles au moment de leur rédaction (best available evidence),
pouvant être selon le sujet des méta-analyses, des essais randomisés ou des études non randomisées.
Lorsque les preuves scientifiques font défaut pour un point particulier, le jugement est basé sur
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l'expérience professionnelle et le consensus du groupe d'experts (« accord d'experts »). Le niveau de
preuve est fonction du type et de la qualité des études disponibles ainsi que de la cohérence ou non de
leurs résultats ; il est explicitement spécifié pour chacune des méthodes/interventions considérées
(pour plus de détails, cf. Méthodologie de développement des SOR : www.fnclcc.fr/sor.htm)
Définition des niveaux de preuve : Niveau A : Il existe une (des) méta-analyse(s) « de bonne qualité » ou plusieurs essais randomisés
« de bonne qualité » dont les résultats sont cohérents.
Niveau B : Il existe des preuves « de qualité correcte » : essais randomisés (B1) ou études
prospectives ou rétrospectives (B2). Les résultats de ces études sont cohérents dans l'ensemble.
Niveau C : Les études disponibles sont critiquables d’un point de vue méthodologique ou leurs
résultats ne sont pas cohérents dans l'ensemble.
Niveau D : Il n'existe pas de données ou seulement des séries de cas.
Accord d’experts : Il n'existe pas de données pour la méthode concernée mais l’ensemble des experts
est unanime.
Synthèse des standards, Options et Recommandations : 1/ Recommandations de bonne pratique pour l’exécution de gestes invasifs chez l’enfant atteint de
cancer
• Il faut systématiquement évaluer la nécessité d’effectuer un geste invasif douloureux et se
demander s’il n’existe pas une alternative à celui-ci
• Tout geste invasif doit être exécuté par une personne compétente utilisant un matériel adapté.
• Lorsque l’indication du geste est posée, les parents et l’enfant (en fonction de son développement
cognitif) doivent être informés de son caractère douloureux et doivent pouvoir exprimer leurs
préférences quant au choix d’une stratégie antalgique. Il est en revanche déconseillé d’insister
sur l’aspect douloureux du geste au moment exact de son exécution afin d’éviter une anticipation
de la douleur ;
• La mise en œuvre d’une intervention à visée antalgique ne doit jamais entraîner de retard de prise
en charge de l’enfant, en cas d’urgence vitale.
• La mise en œuvre d’une stratégie à visée antalgique doit impérativement respecter le délai d’action
et tenir compte de la durée d’action de l’intervention retenue (Cf. libellés d’AMM sur
www.theriaque.org) ;
• La mise en œuvre d’une stratégie à visée anxiolytique répond aux mêmes principes. Des
molécules à durée d’action courte doivent être privilégiées dans ce contexte ;
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• Une évaluation systématique de la pénibilité et/ou de la douleur du geste pour l’enfant doit être
effectuée après le geste. Le résultat de chaque évaluation devra orienter le praticien sur la nécessité
éventuelle de reconsidérer la stratégie antalgique à proposer à l’enfant pour le geste suivant.
• En pédiatrie, les experts recommandent la tenue d’une fiche de suivi de l’analgésie propre aux
gestes douloureux subis par l’enfant. Cette fiche de suivi devra faire partie du dossier de soins.
2/ Prise en charge de la douleur liée à la ponction lombaire chez l'enfant atteint de cancer • Pour l’enfant âgé de moins de 8 semaines, le standard est l’association d’une solution sucrée
(glucose ou saccharose) à 0,3 mL/kg donnée 1 à 2 minutes avant le prélèvement et d’un moyen de
succion lente (seringue, tétine, allaitement maternel). L’option proposée est d’ajouter un mélange
de lidocaïne/prilocaïne avant le prélèvement. Il est recommandé de renouveler la dose de solution
sucrée étant donné que la durée d’action d’une solution sucrée n’excède pas 5 minutes.
• Pour les enfants de plus de 8 semaines, aucun standard n’a été établi. Les options proposées sont :
1) Mélange de lidocaïne/prilocaïne + MEOPA ;
2) Mélange de lidocaïne/prilocaïne +/- benzodiazépine (ex : midazolam) par voie Intra
veineuse (IV) : de 6 mois à 5 ans : Dose initiale : 0,05 à 0,1 mg/kg. Dose totale : < 6 mg de 6 à
12 ans : Dose initiale : 0,025 à 0,05 mg/kg. Dose totale : < 10 mg. Par voie rectale, pour les
enfants au dessus de 6 mois : de 0,3 à 0,5 mg/kg.
3) Mélange de lidocaïne/prilocaïne + association solution sucrée et moyen de succion en dessous de 6 mois.
3/ Prise en charge de la douleur liée aux ponctions osseuses (myélogrammes et biopsies osseuses) chez
l'enfant atteint de cancer
Aucun standard n’a été établi.
L’option proposée est l’anesthésie générale ou une sédation profonde pour les biopsies osseuses
quelque soit l’âge et pour les myélogrammes en dessous de 8 semaines.
Pour les myélogrammes au delà de 8 semaines plusieurs options sont proposées :
1/ mélange de lidocaïne/prilocaïne + MEOPA +/- xylocaïne +/- opioïde fort (par exemple,
morphine orale à 0,4-0,5 mg/kg 45 minutes avant le geste, ou nalbuphine intraveineuse à
0,2 mg/kg, ou nalbuphine intrarectale à 0,3-0,4 mg/kg)
2/ en cas d’échec antérieur du MEOPA ou de refus du masque : Benzodiazépine par voie IV : de
6 mois à 5 ans : Dose initiale : 0,05 à 0,1 mg/kg. Dose totale : < 6 mg. de 6 à 12 ans : Dose
initiale : 0,025 à 0,05 mg/kg. Dose totale : < 10 mg. OU par voie rectale, pour les enfants au
dessus de 6 mois : de 0,3 à 0,5 mg/kg.;
3/ en cas de gestes multiples, la stratégie est celle proposée pour les biopsies osseuses.
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4/ Prise en charge de la douleur liée aux prélèvements sanguins chez l'enfant atteint de cancer
• Pour l’enfant âgé de moins de 8 semaines, le standard est l’administration d’une solution sucrée
(30 % de glucose ou saccharose) à 0,3 mL/kg, 1 à 2 minutes avant le prélèvement et d’un moyen
de succion lente. L’option est d’ajouter un mélange de lidocaïne/prilocaïne. Il est recommandé
d’appliquer l’anesthésique topique sous forme de crème, contenu par une tétine coupée. D’autre
part, la durée d’action d’une solution sucrée n’excédant pas 5 minutes, il est recommandé de
renouveler la dose.
• Pour l’enfant au dessus de 8 semaines, le standard est le mélange de lidocaïne/prilocaïne. Les
options sont :
1/ Ne rien faire, uniquement si c’est le souhait de l’enfant, lorsqu’il peut l’exprimer ;
2/ une administration de MEOPA s’il existe une urgence à effectuer le prélèvement ;
3/ Associer un anesthésique topique + MEOPA en cas d’échec révélé de l’anesthésique topique
seul, si l’enfant est difficile à piquer, ou si l’enfant présente une phobie du geste ;
3/ la sédation en cas d’échec révélé de l’association anesthésique topique + MEOPA.
4/ Mélange de lidocaïne/prilocaïne +/- solution sucrée (glucose ou saccharose) à 0,3 mL/kg
donnée 1 à 2 minutes avant le prélèvement en association +/- moyen de succion lente (seringue,
tétine, allaitement maternel) à proposer jusqu’à 6 mois.
Il est recommandé, si les veines sont peu visibles, de faciliter le prélèvement en plongeant
l’avant-bras de l’enfant dans l’eau chaude pour entraîner une vasodilatation (T C < 40°C).
Le rapport intégral de la prise en charge des douleurs provoquées lors des ponctions lombaires,
osseuses et sanguines chez l’enfant atteint de cancer est téléchargeable sur le site internet des
SOR : http://www.fnclcc.fr/sor.htm
Fédération Nationale des centres de lutte contre le cancer Standards, Options, Recommandations :
101, rue de Tolbiac 75 654 Paris cedex 13 tél : 01 44 23 04 04 / Fax : 01 44 23 04 17
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Douleur provoquée par les soins : politique du réseau régional douleur en Basse Normandie
Aline LE CHEVALIER, infirmière ressource douleur
Claire DELORME, médecin Réseau régional Douleur de Basse-Normandie
Imaginé dès 1995 par les professionnels de santé investis dans la douleur, aidé et porté par les
tutelles, le Réseau Régional Douleur a été officialisé en juin 2001 : réseau inter hospitalier, réunissant
actuellement 32 établissements . Il s’est donné comme objectif principal de développer et d’améliorer
la prise en charge de la douleur dans les établissements, mais aussi d’obtenir une couverture
géographique des consultations de douleur chronique rebelle.
L’organisation est simple : un médecin-une infirmière référents douleur dans chaque établissement
hospitalier ; un comité opérationnel ou comité scientifique qui élabore les projets, les actions du
réseau et une cellule de coordination (médecin, infirmière, puéricultrice, secrétaire à temps partiels)
pour animer, coordonner et aider à la mise en place des objectifs et des actions. De plus un certain
nombre de groupes de travail en particulier groupe infirmiers, groupe puéricultrices se sont
organisés. La douleur aux urgences : Fort du constat que le service des urgences est la « porte d’entrée » de l’hôpital et très souvent le lieu
du premier soin douloureux, en particulier pour les enfants, nous avons priorisé la prise en charge de
la douleur aux urgences. Pour ce faire, une démarche projet a été mise en place avec la réalisation
d’une enquête de prévalence dans 18 services d’urgences des établissements adhérents en
2002 (enquête patients, soignants, institutionnelle). Cet état des lieux a permis de mettre en exergue
certaines lacunes, difficultés liées au mode de fonctionnement, au manque de protocoles, aux
insuffisances de formation, aux défauts de traçabilité. Fort de ces constats, un groupe de travail s’est
créé et la nomination d’un binôme médecin-infirmière référents aux urgences a aidé à la mise en place
de ce projet, ainsi que le financement de diplômes universitaires pour ces référents. Des réunions de
formation ont été organisées pour harmoniser les pratiques, informer, sensibiliser notamment à la
douleur des enfants et au retentissement à long terme du 1er soin douloureux. Cette enquête de 2002
va à nouveau être réalisée à l’automne 2006 pour l’évaluation des actions. La douleur dans les services de réanimation : La priorité a également été donnée à la douleur des soins dans les services de réanimation polyvalente.
Une équipe composée de médecins, cadre de santé, infirmières très impliqués en réanimation et en
douleur a élaboré un projet d’harmonisation de l’antalgie en réanimation dit « PHARE », qui a
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obtenu le financement de la Fondation de France. Ce projet a consisté en une enquête de prévalence
institutionnelle auprès des soignants et un audit des pratiques sur l’évaluation de la douleur des
patients sédatés, dans 7 services de réanimation polyvalente de Basse Normandie. A la suite de cette
démarche, des priorités ont été déterminées en particulier la formation de tous les soignants médecins,
infirmières, aides-soignantes sur l’évaluation, la prévention et le traitement des soins
douloureux en réanimation, la mise en place de protocoles sur l’évaluation et sur le traitement
de ces douleurs ainsi qu’une information des patients et de leurs proches. Ce projet a mobilisé
203 soignants pour 8 journées de formation, puis une journée de rencontres de référents
médecin-infirmière-aides soignants, et permis une réelle modification des pratiques. Bien sûr
une évaluation est nécessaire et devra être faite dans l’année qui vient.
La douleur de l’enfant : La douleur de l’enfant a toujours été une priorité pour le réseau, aussi le groupe pédiatrique, aidé par le
comité opérationnel, a élaboré des recommandations et des protocoles sur l’utilisation des solutions
sucrées pour les soins, sur les outils d’évaluation de la douleur de l’enfant, essayant ainsi dans chaque
service de pédiatrie d’avoir une prise en charge de la douleur la plus égalitaire possible. La douleur en service de radiologie : La douleur en radiologie est également une des priorités. Avec une méthodologie identique à celle
utilisée pour les services d’urgences, nous venons d’effectuer une enquête sur la prise en charge de la
douleur liée aux actes de radiologie. Cette enquête est en cours d’analyse et sera prochainement
publiée. Nous souhaitons bien sûr sensibiliser les acteurs des services de radiologie, nommer des
référents, proposer des formations à la prévention des actes douloureux en radiologie.
Les travaux du groupe infirmier : Le groupe infirmier, outre des travaux sur la douleur chronique, a souhaité réfléchir sur l’amélioration
de la prise en charge de la douleur aiguë, et a élaboré des recommandations sur l’utilisation de la
PCA, dans le cadre des douleurs aiguës sur la prise en charge de la douleur liée aux réfections de
pansement, aux soins de nursing, liée à la rééducation, liée aux gestes invasifs. Ces recommandations
sont en cours de validation par le comité opérationnel, ensuite chaque référent devra faire en sorte que
les équipes s’approprient ces recommandations.
L’harmonisation des pratiques : En ce qui concerne la douleur des soins dans les services hospitaliers, le réseau a pour mission de
mutualiser, développer les démarches réalisées par un établissement ou par les membres du réseau
pour harmoniser les pratiques. Aussi le protocole d’utilisation du KALINOX®, élaboré par le CHU
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de CAEN, a été diffusé à tous les établissements, à chacun de se le réapproprier en fonction de sa
propre organisation. Une fiche de recommandations sur l’utilisation des opioïdes destinée au
soignants, des recommandations sur l’utilisation de la crème EMLA® ; l’élaboration d’un livret la
douleur n’est pas une fatalité ont été distribuée dans les établissements adhérents.
La formation : La formation est un des axes prioritaires du Réseau : formation par le réseau et formation pour les
référents du réseau. Dans ce cadre la première journée régionale du Réseau (environ 300 personnes
présentes) a porté sur la douleur des soins. Par ailleurs, les infirmières référentes douleur viennent
d’être formées l’utilisation des techniques dérivées de l’hypnose pour la prise en charge de la
douleur aigue.
En conclusion, les douleurs provoquées par les soins, de part leur fréquence dans tous les services,
quel que soit l’âge des patients, est une priorité à la fois de formation, sensibilisation, prévention de la
prise en charge de la douleur chronique. Les actions entreprises ont été adaptées au contexte de nos
établissements, de notre région. Il nous faut continuer à développer cette prévention des douleurs liées
aux soins en particulier dans les services de gériatrie ; il nous faut également évaluer qualitativement
et quantitativement ces actions.
Références :
- Décret n° 2002-1463 du 17 décembre 2002 relatif aux critères de qualité et conditions
d'organisation, de fonctionnement ainsi que d'évaluation des réseaux de santé et portant
application de l'article L. 6321-1 du code de la santé publique
- www. douleur-rrdbn.org
- « Enquête sur la prise en charge de la douleur aiguë dans les services d’urgences adultes du
Réseau Régional Douleur de Basse Normandie » Douleurs vol 6 N°3 p 131 – 139 juin 2005
- « Les réseaux Douleur : une réponse au besoin d’améliorer la qualité de la prise en charge de
la douleur ? L’exemple du réseau français de Basse Normandie (Calvados, Manche, Orne)»
THERAPIE 2001 ; 56 : 719-22 (Journal de la Société Française de Pharmacologie)