discurso sobre a primeira década de tito lívio de maquiavel

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livro famoso de maquiavel em francês.

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Nicholas MACHIAVEL

Nicolas Machiavel, Discours sur la premire dcade de Tite-Live (1980)PAGE 3

Nicolas MACHIAVEL

(1980) [1531]

DISCOURS

SUR LA PREMIRE

DCADE DE TITE-LIVE

Prface de Claude Lefort

Un document produit en version numrique par Mme Marcelle Bergeron, bnvole

Professeure la retraite de lcole Dominique-Racine de Chicoutimi, Qubec

Courriel: HYPERLINK "mailto:[email protected]" mailto:[email protected]

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Fondateur et Prsident-directeur gnral,

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Nicolas MACHIAVEL

Discours sur la premire dcade de Tite-Live. Prface de Claude Lefort. Traduit de l'Italien par Toussaint Guiraudet. Paris: Bibliothque Berger-Levrault, 1980, 372 pp. Collection: Stratgies.

Polices de caractres utiliss:

Pour le texte: Times New Roman, 12 points.

Pour les citations: Times New Roman 10 points.

Pour les notes de bas de page: Times New Roman, 10 points.

dition lectronique ralise avec le traitement de textes Microsoft Word 2008 pour Macintosh.

Mise en page sur papier format: LETTRE (US letter), 8.5 x 11)

dition complte le 4 janvier 2010, revue et corrige le 4 avril 2011 Chicoutimi, Ville de Saguenay, Qubec.

Nicolas Machiavel

(1980)

Prface de Claude Lefort. Traduit de l'Italien par Toussaint Guiraudet. Paris: Bibliothque Berger-Levrault, 1980, 372 pp. Collection: Stratgies.

Quatrime de couverture

Collection Stratgies

dirige par Grard Chaliand

Dans un monde o, depuis l'apparition du feu nuclaire les antagonismes entre grandes puissances se manifestent sous forme de crises politiques et de confrontations indirectes dans le tiers monde, la stratgie continue de jouer un rle fondamental trop souvent masqu par les idologies.

Cette collection veut renouer avec une tradition de pense stratgique en publiant des classiques internationaux souvent oublis ou mal connus mais toujours de premire importance. Elle entend, par ailleurs, traiter les faits politiques et militaires travers lesquels s'expriment les intrts des tats, rendre compte des situations conflictuelles et des grands enjeux actuels.

DISCOURS

SUR LA PREMIRE DCADE

DE TITE-LIVE

Les Discours sont une uvre d'un intrt exceptionnel. C'est en celle-ci plus encore que dans Le Prince qu'on peut trouver la marque d'une fondation de la pense politique moderne, la matire privilgie d'une rflexion sur l'histoire et la politique. Qui ferait l'effort de s'attacher l'argument sinueux des Discours devrait convenir que tout ce qui fut avanc dans notre sicle sous le signe de l'optimisme bourgeois, du socialisme ou de la "science politique", loin d'effacer l'enseignement de Machiavel, en fait redcouvrir la vigueur et la fracheur.

Claude Lefort, extrait de la prface.

Table

HYPERLINK \l "_Prface" Prface, par Claude Lefort

HYPERLINK \l "_Notice" Notice, par Annick Plissier

HYPERLINK \l "_Nicolas_Machiavel" Nicolas Machiavel Buondelmonti et Rucellai

HYPERLINK \l "_Livre_premier" Livre premier

HYPERLINK \l "_Avant-propos" Avant-propos

HYPERLINK \l "_Chapitre_premier" Chapitre premier. Quels ont t les commencements des villes en gnral, et surtout ceux de Rome

HYPERLINK \l "_Chapitre_II" Ch. II. Des diffrentes formes de rpubliques. Quelles furent celles de la Rpublique romaine

HYPERLINK \l "_Chapitre_III" Ch. III. Des vnements qui furent cause de la cration des tribuns Rome. Leur tablissement Perfectionna la Constitution

HYPERLINK \l "chap_iv" Ch. IV. Que la dsunion du Snat et du peuple a rendu la Rpublique romaine puissante et libre

HYPERLINK \l "_Chapitre_V" Ch. V. qui plus srement confier la garde de la libert, aux grands ou au peuple, et lequel des deux cause plus souvent des troubles, de celui qui veut acqurir ou de celui qui veut conserver

HYPERLINK \l "_Chapitre_VI" Ch. VI. S'il tait possible d'tablir Rome un gouvernement qui fit cesser les inimitis qui existaient entre le Snat et le peuple

HYPERLINK \l "_Chapitre_VII" Ch. VII. Combien d'accusations sont ncessaires dans une rpublique pour y maintenir ta libert

HYPERLINK \l "_Chapitre_VIII" Ch. VIII. Autant les accusations sont utiles dans une rpublique, autant la calomnie y est pernicieuse

HYPERLINK \l "_Chapitre_IX" Ch. IX. Qu'il faut tre seul pour fonder une rpublique ou pour la rformer en entier

HYPERLINK \l "_Chapitre_X" Ch. X. Quautant sont dignes d'loges les fondateurs d'une rpublique ou d'une monarchie, autant mritent de blme les auteurs d'une tyrannie

HYPERLINK \l "_Chapitre_XI" Ch. XI. De la religion des Romains

HYPERLINK \l "_Chapitre_XII" Ch. XII. Qu'il est important de faire grand cas de la religion. Perte de lItalie pour avoir, par les intrigues de la cour de Rome, manqu cette maxime

HYPERLINK \l "chap_xiii" Ch. XIII. Comment les Romains se servaient de la religion pour tablir des lois, favoriser leurs entreprises et arrter les sditions

HYPERLINK \l "chap_xiv" Ch. XIV. Que les Romains interprtaient les auspices suivant les besoins qu'ils en avaient; qu'ils mettaient infiniment de prudence paratre observer leur religion dans les occasions mmes o ils taient forcs de manquer son observance; qu'ils punissaient quiconque avait la tmrit de la mpriser

HYPERLINK \l "_Chapitre_XV" Ch. XV. Comment les Samnites, dans une occasion dsespre, ont recours la religion

HYPERLINK \l "chap_xvi" Ch. XVI. Qu'un peuple accoutum vivre sous un prince conserve difficilement sa libert si par hasard il devient libre

HYPERLINK \l "_Chapitre_XVII" Ch. XVII. Qu'un peuple corrompu qui devient libre peut bien difficilement conserver sa libert

HYPERLINK \l "_Chapitre_XVIII" Ch. XVIII. De quelle manire, dans un tat corrompu, on pourrait conserver un gouvernement libre s'il y existait dj, ou ly introduire s'il ny tait pas auparavant

HYPERLINK \l "_Chapitre_XIX" Ch. XIX. Qu'un tat qui a un excellent commencement peut se soutenir sous un prince faible, mais sa perte est invitable quand le successeur de ce prince est faible comme lui

HYPERLINK \l "_Chapitre_XX" Ch. XX. Qu'une succession de deux grands princes produit de grands effets; et que, comme les rpubliques bien constitues ont ncessairement une succession d'hommes vertueux, elles doivent s'tendre et s'augmenter considrablement

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXI" Ch. XXI. Combien mritent d'tre blms le prince ou la rpublique qui n'ont point d'unit nationale

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXII" Ch. XXII. Ce quil y a de remarquable dans le combat des Horaces et des Curiaces

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXIII" Ch. XXIII. Qu'on ne doit point hasarder toute sa fortune sans employer toutes ses forces et que, pour cela, souvent il est dangereux de se borner garder des passages

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXIV" Ch. XXIV. Les rpubliques bien constitues dcernent des rcompenses et des peines, et ne compensent jamais les unes par les autres

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXV" Ch. XXV. Que si l'on veut changer la constitution d'un tat libre, on doit au moins conserver quelque ombre de ses anciennes institutions

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXVI" Ch. XXVI. Qu'un prince nouvellement tabli dans une ville ou dans une province conquise doit tout renouveler

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXVII" Ch. XXVII. Que tous les hommes sont rarement tout bons ou tout mauvais

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXVIII" Ch. XXVIII. Pourquoi les Romains furent moins ingrats envers leurs concitoyens que ne le.fut le peuple dAthnes envers les siens

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXIX" Ch. XXIX. Quel est le plus ingrat d'un peuple ou d'un prince

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXX" Ch. XXX. Quels moyens doit employer un prince ou une rpublique pour viter le vice de l'ingratitude, et comment un gnral ou un citoyen peuvent viter d'en tre les victimes

HYPERLINK \l "chap_xxxi" Ch. XXXI. Que les gnraux romains ne furent jamais punis rigoureusement pour des fautes commises; ils ne le furent mme pas quand leur ignorance et leurs mauvaises oprations avaient occasionn les plus grands dommages la rpublique

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXXII" Ch. XXXII. Quune rpublique ou un prince ne doivent pas diffrer quand il s'agit de subvenir aux besoins de leurs sujets

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXXIII" Ch. XXXIII. Quand un mal est parvenu au plus haut point dans un tat, il est plus sage de temporiser que de heurter de front

HYPERLINK \l "chap_xxxvi" Ch. XXXIV. Que la dictature fit toujours du bien, et jamais de mal la rpublique romaine. C'est lautorit dont les citoyens s'emparent qui nuit la libert, et non celle qui lui est confre par les suffrages libres du peuple

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXXV" Ch. XXXV. Pourquoi, dans Rome, la cration des dcemvirs fut-elle nuisible la libert, quoiqu'ils eussent t nomms par les suffrages libres du peuple

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXXVI" Ch. XXXVI. Que les citoyens qui ont t revtus des plus grands emplois ne doivent pas ddaigner les moindres

HYPERLINK \l "chap_xxxvii" Ch. XXXVII. Des troubles causs Rome par la loi agraire; qu'il est trs dangereux dans une rpublique de faire une loi qui fasse revenir sur le pass et qui dtruise une ancienne coutume de ltat

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXXIX" Ch. XXXVIII. Les rpubliques faibles sont irrsolues et ne savent ni dlibrer ni prendre un parti, Si quelquefois elles en prennent un, c'est plus par ncessit que par choix

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXXIX" Ch. XXXIX. Les mmes accidents arrivent quelquefois chez des peuples bien diffrents

HYPERLINK \l "chap_xl" Ch. XL. La cration du dcemvirat Rome, et ce qu'il faut y remarquer; o l'on considre entre autres choses comment le mme accident peut sauver ou perdre une rpublique

HYPERLINK \l "chap_xli" Ch. XLI. Il est aussi imprudent qu'inutile de passer sans gradation et de sauter pour ainsi dire de la modestie l'orgueil, de la douceur la cruaut

HYPERLINK \l "_Chapitre_XLII" Ch. XLII. Combien les hommes peuvent aisment se corrompre

HYPERLINK \l "chap_xliii" Ch. XLIII. Ceux qui combattent pour leur propre gloire sont de bons et fidles soldats

HYPERLINK \l "_Chapitre_XLIV" Ch. XLIV. Une multitude sans chef ne peut rien faire; et l'on ne doit pas se porter des menaces avant de s'tre empar de l'autorit

HYPERLINK \l "_Chapitre_XLV" Ch. XLV. Il est de mauvais exemple de ne pas observer une loi, surtout de la part de ceux qui 1'ont faite, et rien de plus dangereux pour ceux qui gouvernent une ville que de renouveler chaque jour les reproches et les punitions de torts anciens

HYPERLINK \l "chap_xlvi" Ch. XLVI. Les hommes s'lvent d'une ambition une autre. On songe d'abord se dfendre, ensuite attaquer

HYPERLINK \l "_Chapitre_XLVII" Ch. XLVII. Que les hommes, quoique sujets se tromper sur le gnral, ne se trompent pas sur le particulier

HYPERLINK \l "chap_xlviii" Ch. XLVIII. Qui veut empcher qu'une magistrature soit dfre un homme vil ou mchant doit la faire demander par un homme plus vil et plus mchant encore, ou par ce qu'il y a dans ltat de plus illustre et de plus vertueux

HYPERLINK \l "_Chapitre_XLIX" Ch. XLIX. Si les villes, libres ds l'origine, comme Rome, ont de la difficult trouver des lois qui les maintiennent en libert, celles qui sont nes de la servitude prouvent l'impossibilit dy russir

HYPERLINK \l "_Chapitre_L" Ch. L. Que nul conseil, nul magistrat ne doit pouvoir arrter la marche des affaires dans un tat

HYPERLINK \l "_Chapitre_LI" Ch. LI. Qu'une rpublique ou un prince doit feindre de faire par gnrosit ce quoi la ncessit le contraint

HYPERLINK \l "chap_lii" Ch. LII. Pour rprimer les excs et le danger d'un ambitieux en crdit dans une rpublique, il n'est pas de plus sr moyen ni qui fasse moins d'clat que d'occuper avant lui le chemin qui conduit celle lvation

HYPERLINK \l "_Chapitre_LIII" Ch. LIII. Qu'un peuple souvent dsire sa ruine, tromp par une fausse apparence de biens, et qu'on le met facilement en mouvement par des esprances sduisantes et des promesses magnifiques

HYPERLINK \l "_Chapitre_LIV" Ch. LIV. Combien est puissante l'autorit d'un grand homme pour calmer une multitude chauffe

HYPERLINK \l "_Chapitre_LV" Ch. LV. Combien il est ais de faire marcher toutes choses dans une rpublique o le peuple n'est pas encore corrompu; o l'galit rgne, il ne peut y avoir de principat; o l'galit ne se trouve pas, il ne peut y avoir de rpublique

HYPERLINK \l "_Chapitre_LVI" Ch. LVI. Que les grands changements qui arrivent dans une ville ou un tat sont toujours annoncs par des vnements, ou prdits

HYPERLINK \l "_Chapitre_LVII" Ch. LVII. Que le peuple en masse est trs courageux; spar, il est trs faible

HYPERLINK \l "_Chapitre_LVIII" Ch. LVIII. Qu'un peuple est plus sage et plus constant qu'un prince

HYPERLINK \l "_Chapitre_LIX" Ch. LIX. qui d'un peuple ou d'un prince peut-on se fier davantage comme alli

HYPERLINK \l "_Chapitre_LX" Ch. LX. Que le consulat et toute autre magistrature Rome se donnaient sans gard l'ge,

HYPERLINK \l "_Livre_second" Livre second

HYPERLINK \l "_Avant-propos_" Avant-propos

HYPERLINK \l "_Chapitre_premier_" Chapitre premier. Laquelle a le plus contribu la grandeur de l'empire romain, de la vertu ou de la fortune?

HYPERLINK \l "_Chapitre_II_" Ch. II. Quels furent les peuples que les Romains eurent combattre, et combien ils furent opinitres dfendre leur libert

HYPERLINK \l "_Chapitre_III_" Ch. III. Rome s'agrandit en ruinant les villes voisines et en accordant facilement aux trangers la qualit de citoyens

HYPERLINK \l "livre2_chap_iv" Ch. IV. Les rpubliques ont employ trois moyens pour s'agrandir

HYPERLINK \l "_Chapitre_V_" Ch. V. Que les changements de religion et de langue, et les accidents des dluges et des pestes effacent la mmoire des choses.

HYPERLINK \l "_Chapitre_VI_" Ch. VI. Comment les Romains faisaient la guerre

HYPERLINK \l "_Chapitre_VII_" Ch. VII. Quelle quantit de terrain les Romains accordaient-ils chaque colon?

HYPERLINK \l "_Chapitre_VIII_" Ch. VIII. Pour quelles raisons les peuples abandonnent-ils leur patrie pour se rpandre dans des pays trangers

HYPERLINK \l "_Chapitre_IX_" Ch. IX. Quels sont les sujets ordinaires de guerre entre les souverains

HYPERLINK \l "livre2_chap_x" Ch. X. Que l'argent n'est pas le nerf de la guerre, quoique ce soit l'opinion gnrale

HYPERLINK \l "_Chapitre_XI_" Ch. XI. Qu'il n'est pas sage de s'allier avec un prince qui a plus de rputation que de force

HYPERLINK \l "_Chapitre_XII_" Ch. XII. Lequel vaut mieux, lorsqu'on craint d'tre attaqu, de porter la guerre chez son ennemi ou de l'attendre chez soi

HYPERLINK \l "_Chapitre_XIII" Ch. XIII. Pour s'lever d'un tat mdiocre un rang lev, la ruse sert plus que la force

HYPERLINK \l "_Chapitre_XIV" Ch. XIV. Que les hommes se trompent bien des fois en croyant qu' force de soumission on dsarme la hauteur

HYPERLINK \l "_Chapitre_XV_" Ch. XV. Que des tats faibles sont toujours indcis, et la lenteur se dterminer est toujours nuisible

HYPERLINK \l "_Chapitre_XVI" Ch. XVI. Combien les armes modernes diffrent des anciennes

HYPERLINK \l "_Chapitre_XVII_" Ch. XVII. Comment on doit apprcier lartillerie dans nos armes modernes, et si l'opinion qu'on en a gnralement est fonde en raison

HYPERLINK \l "_Chapitre_XVIII_" Ch. XVIII. Qu'il est prouv par l'exemple des Romains qu'on doit faire plus de cas de l'infanterie que de la cavalerie

HYPERLINK \l "livre2_chap_xix" Ch. XIX. Que les acquisitions d'une rpublique mal constitue, et qui ne prend pas pour modle de conduite celle des Romains, la mnent plutt sa ruine qu'a un accroissement de puissance

HYPERLINK \l "_Chapitre_XX_" Ch. XX. quel pril s'exposent les princes ou les rpubliques qui se servent de troupes auxiliaires ou mercenaires

HYPERLINK \l "tablelivre2_chap_xxi" Ch. XXI. Le premier prteur que les Romains envoyrent hors de Rome fut pour Capoue, quatre cents ans aprs qu'ils avaient commenc faire la guerre

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXII_" Ch. XXII. Combien sont errons souvent les jugements que les hommes portent des grandes choses

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXIII_" Ch. XXIII. Combien les Romains vitaient les partis mitoyens l'gard de leurs sujets, quand ils croyaient avoir une dcision prendre

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXIV_" Ch. XXIV. Les forteresses sont en gnral plus nuisibles qu'utiles

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXV_" Ch. XXV. Que c'est prendre un mauvais parti que de profiter de la dsunion qui rgne dans une ville pour l'attaquer et s'en rendre matre

HYPERLINK \l "livre_2_chap_xxvi" Ch. XXVI. Les tmoignages de mpris et les injures n'attirent que de la haine, sans profit pour qui les emploie

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXVII_" Ch. XXVII. Les princes et les rpubliques sages doivent se contenter de vaincre, car on perd parfois tout vouloir trop gagner

HYPERLINK \l "_Chapitre_XVIII_1" Ch. XXVIII. Combien il est dangereux pour une rpublique ou pour un prince de ne pas venger les torts faits au public ou aux particuliers

HYPERLINK \l "livre_2_chap_xxix" Ch. XXIX. La fortune aveugle l'esprit des hommes, quand elle ne veut pas qu'ils s'opposent ses desseins

HYPERLINK \l "livre_2_chap_xxx" Ch. XXX. Les rpubliques et les princes vraiment puissants n'achtent pas des allis prix d'argent; c'est par leur courage et la rputation de leurs forces qu'ils s'en attirent

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXXI" Ch. XXXI. Qu'il est dangereux de se fier des exils

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXXII_" Ch. XXXII. De quelle manire les Romains attaquaient les villes

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXXIII_" Ch. XXXIII. Les Romains laissaient leurs gnraux parfaitement matres de leurs oprations

HYPERLINK \l "_Livre_troisime" Livre troisime

HYPERLINK \l "_Chapitre_premier_1" Chapitre premier. Veut-on qu'une religion ou une rpublique durent longtemps, il faut les ramener souvent leur principe

HYPERLINK \l "livre_3_chap_ii" Ch. II. Combien il y a de sagesse jouer pour un temps la folie!

HYPERLINK \l "_Chapitre_III_1" Ch. III. Qu'il est ncessaire pour maintenir une libert nouvellement acquise, comme Brutus, de massacrer ses enfants

HYPERLINK \l "_Chapitre_IV_" Ch. IV. Qu'un prince ne peut vivre en sret dans un tat, tant que vivent ceux qu'il en a dpouills

HYPERLINK \l "_Chapitre_V_1" Ch. V. Qu'est-ce qui fait perdre le trne un roi qui ne jouit par succession?

HYPERLINK \l "_Chapitre_VI_1" Ch. VI. Des conspirations

HYPERLINK \l "livre_3_chap_vii" Ch. VII. D'o vient que le passage de la libert la servitude, et de la servitude la libert, cote quelquefois beaucoup de sang, et que quelquefois il n'en cote pas du tout

HYPERLINK \l "_Chapitre_VIII_1" Ch. VIII. Quiconque veut oprer des changements dans une rpublique doit examiner dans quel tat elle se trouve

HYPERLINK \l "livre_3_chap_ix" Ch. IX. Qu'il faut changer suivant les temps, si l'on veut toujours avoir des succs

HYPERLINK \l "_Chapitre_X_" Ch. X. Qu'un gnral ne peut viter une bataille lorsque l'ennemi veut la livrer quelque prix que ce soit

HYPERLINK \l "_Chapitre_XI_1" Ch. XI. Quiconque a beaucoup d'ennemis combattre est sr de les vaincre, quoiqu'il leur soit infrieur en force, s'il peut soutenir leur premier effort

HYPERLINK \l "livre_3_chap_xii" Ch. XII. Comment un habile gnral doit mettre ses soldats dans la ncessit de se battre, et procurer ceux de l'ennemi tous les moyens de sen dispenser

HYPERLINK \l "_Chapitre_XIII_" Ch. XIII. Qui doit inspirer plus de confiance, ou d'un bon gnral qui a une mauvaise arme, ou d'une bonne arme commande par un mauvais gnral

HYPERLINK \l "livre_3_chap_xiv" Ch. XIV. Effet que produisent au milieu d'une bataille des stratagmes nouveaux et des paroles imprvues

HYPERLINK \l "livre_3_chap_xv" Ch. XV. Il ne faut une arme qu'un seul chef. Un plus grand nombre nuit

HYPERLINK \l "_Chapitre_XVI_" Ch. XVI. Dans les temps difficiles on recherche le mrite, mais quand tout est paisible, la faveur est, non pour les hommes vertueux, mais pour ceux qui ont, ou des richesses, ou des parents puissants

HYPERLINK \l "_Chapitre_XVII_1" Ch. XVII. Un tat, aprs avoir offens un citoyen, ne doit pas lui confier un commandement ou toute autre commission importante

HYPERLINK \l "_Chapitre_XVIII_2" Ch. XVIII. Le plus grand talent d'un habile gnral est de savoir deviner les desseins de l'ennemi

HYPERLINK \l "livre_3_chap_xix" Ch. XIX. Les voies de la douceur sont-elles prfrables aux voies de rigueur pour gouverner la multitude

HYPERLINK \l "livre_3_chap_xx" Ch. XX. Un trait d'humanit fit plus d'impression sur les Falisques que toute la puissance des Romains

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXI_1" Ch. XXI. Pourquoi Annibal avec une conduite oppose celle de Scipion eut en Italie les mmes succs que ce gnral romain en Espagne

HYPERLINK \l "livre_3_chap_xxii" Ch. XXII. Comment la svrit de Manlius Torquatus et la douceur de Valrius Corvinus les couvrirent galement de gloire

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXIII_1" Ch. XXIII. Causes du bannissement de Camille

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXIV_1" Ch. XXIV. La prolongation du commandement militaire fil perdre Rome sa libert

HYPERLINK \l "_Chapitre_xxv_1" Ch. XXV. Pauvret de Cincinnatus et de plusieurs citoyens romains

HYPERLINK \l "livre_3_chap_xxvi" Ch. XXVI. Comment les femmes sont la cause de la ruine d'un tat

HYPERLINK \l "livre_3_chap_xxvii" Ch. XXVII. Moyen de rtablir l'union dans une ville. Il est faux que la dsunion soit ncessaire pour y conserver son autorit

HYPERLINK \l "livre_3_chap_xxviii" Ch. XXVIII. Que l'on doit surveiller les actions des citoyens, parce que souvent celle qui parat vertueuse recle un principe de tyrannie

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXVIX" Ch. XXIX. Les fautes des peuples viennent de celles des princes

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXX_" Ch. XXX. Qu'un citoyen qui veut tre utile sa rpublique par quelque action particulire doit d'abord imposer silence l'envie. Moyen de dfendre une ville l'approche d'un ennemi qui la menace

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXXI_" Ch. XXXI. Les grands hommes et les rpubliques bien constitues conservent le mme courage au sein de la prosprit et dans le revers

HYPERLINK \l "livre_3_chap_xxxii" Ch. XXXII. Moyens employs pour rendre la paix impossible

HYPERLINK \l "livre_3_chap_xxxiii" Ch. XXXIII. Pour gagner une bataille, il faut que les troupes soient remplies de confiance, et en elles-mmes, et en leur gnral

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXXV_" Ch. XXXIV. Comment la rputation, la voix publique, l'opinion concilient d'abord un citoyen la faveur populaire. Le peuple fait-il, pour les places, de meilleurs choix que les princes?

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXXV_" Ch. XXXV. Danger de conseiller une entreprise, toujours proportionn la grandeur de cette entreprise

HYPERLINK \l "livre_3_chap_xxxvi" Ch. XXXVI. Pourquoi a-t-on regard les anciens Gaulois, et regarde-t-on encore les Franais, comme tant plus que des hommes au commencement d'un combat, et moins que des femmes vers la fin

HYPERLINK \l "livre_3_chap_xxxvii" Ch. XXXVII. De petits combats sont-ils ncessaires avant d'en venir une action gnrale? Si on veut les viter, comment faut-il sy prendre pour connatre un ennemi auquel on a affaire pour la premire fois?

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXXVIII" Ch. XXXVIII. Qualits ncessaires un gnral pour obtenir la confiance de ses soldats

HYPERLINK \l "_Chapitre_XXXIX_" Ch. XXXIX. Il faut qu'un gnral connaisse le pays o il fait la guerre

HYPERLINK \l "livre_3_chap_xl" Ch. XL. la guerre, la ruse mrite des loges

HYPERLINK \l "livre_3_chap_xli" Ch. XLI. Il faut dfendre la patrie, soit avec ignominie, soit avec gloire; tous moyens sont bons, pourvu qu'elle soit dfendue

HYPERLINK \l "_Chapitre_XLII_" Ch. XLII. Les promesses arraches par la force ne doivent point tre observes

HYPERLINK \l "_Chapitre_XLIII" Ch. XLIII. Les habitants d'un mme pays conservent toujours peu prs le mme caractre

HYPERLINK \l "livre_3_chap_xliv" Ch. XLIV. L'audace et la prcipitation emportent souvent ce que l'on n'obtiendrait point par des moyens ordinaires

HYPERLINK \l "_Chapitre_XLV_" Ch. XLV. Est-il plus avantageux de soutenir d'abord le choc de l'ennemi, et de l'attaquer ensuite vivement, que de commencer le combat avec imptuosit?

HYPERLINK \l "_Chapitre_XLVI" Ch. XLVI. Pourquoi le mme caractre se conserve-t-il assez longtemps dans les familles d'une mme cit

HYPERLINK \l "livre_3_chap_xlvii" Ch. XLVII. L'amour de la patrie doit faire oublier un bon citoyen les inimitis particulires

HYPERLINK \l "_Chapitre_XLVIII" Ch. XLVIII. Une faute trop marque et trop grossire de la part de l'ennemi doit faire souponner un pige

HYPERLINK \l "_Chapitre_XLIX_" Ch. XLIX. Une rpublique qui veut se conserver libre doit prendre chaque jour de nouvelles prcautions. Services qui mritrent Q. Fabius le surnom de Maximus

[p. 7 sans texte, p. 8 titre, p. 9]

Prface

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Machiavel est aux yeux du grand public l'auteur du Prince. En dehors de cercles dhistoriens, de politologues et d'italianisants, rares sont ceux qui lisent prsent les Discours, qui en connaissent l'objet ou seulement l'existence pour ne pas parler des Histoires florentines et de L'art de la guerre. Pendant des sicles, pourtant, cet ouvrage a t comment, discut, secrtement exploit, mme imit. On l'a priodiquement invoqu pour opposer la lgende de l'inventeur du machiavlisme la figure vraie du penseur qui dmontrait l'excellence des institutions libres, faisait dpendre de la puissance du peuple la grandeur de l'tat, prnait la formule d'une arm compose de citoyens, affirmait la supriorit d'une monarchie rgie par des lois sur la Monarchie absolue et, sur l'une et l'autre, celle d'une Rpublique bien ordonne. Quiconque s'est intress la fortune exceptionnelle de luvre machiavlienne ne peut douter de l'influence qu'ont longuement exerce ses Discours sur des hommes qui cherchaient combattre l'arbitraire, dfendre la fonction d'assembles reprsentatives ou critiquaient la notion mme du gouvernement d'un seul. De cette influence, on trouve les traces les plus vives en France, au cours du XVIe sicle, dans les milieux de parlementaires humanistes et de partisans de la Rforme; en Angleterre, au XVIIe sicle, parmi les premiers thoriciens de la socit civile; la veille et au lendemain de la Rvolution franaise, et tant en Allemagne qu'en Italie la fin du XVIIIe.

D'o vient donc l'oubli dans lequel sont tombs les Discours? Serait-ce que dans un monde o se trouvent effacs jusqu'aux vestiges de la monarchie, on soit devenu insensible au dbat sur les mrites respectifs des diffrents rgimes? Serait-ce qu'on admire Machiavel pour son audace dfinir les diverses techniques de domination et ramener les rapports de pouvoir des rapports de forces, mais qu'on ne se soucie plus de puiser dans [p. 10] ses livres des arguments pour ou contre la tyrannie. Si tel tait le cas, il faudrait convenir que l'ouvrage, qui conserve sa clbrit, ne connat pas un sort plus heureux que celui qu'on voit relgu dans l'obscurit, Car l'auteur du Prince se demande bien comment le Pouvoir peut tre acquis et conserv, mais ce n'est l qu'un point de dpart; il enseigne, certes, brillamment, le calcul rationnel des forces, mais il ne s'agit l que d'un moment de l'argumentation. Son propos est de s'interroger sur l'origine du Pouvoir, sur la nature de la socit, d'o il engendre et qui ne tient que par lui. C'est la division sociale qu'il met en vidence comme fait premier et irrductible. C'est l'antagonisme des dsirs de classe, des Grands et du Peuple, la relation ncessaire qu'ils entretiennent en tant que dsir de commander, d'opprimer de ne pas tre command, opprim , qui sont au centre de sa rflexion. Du Prince, il n'examine les positions qu'en faisant dcouvrir les illusions auxquelles l'expose sa sparation de l'ensemble social soit que l'un s'affirme pleinement pour se figurer invulnrable dans la citadelle qui le met l'abri de ses sujets, soit que l'autre la dnie dans l'espoir de ne pas tre peru par tous comme l'tranger. Enfin, s'esquisse la formule de la politique d'un Prince nouveau, qui, en donnant satisfaction son ambition, saurait soulager le peuple de l'oppression des Grands et le lier, par la confiance qui lui serait faite, la cause de ltat,

Mais plutt que de douter de l'intelligence des lecteurs du Prince, mieux vaut reconnatre que ce petit chef-d'uvre est d'un accs incomparablement plus ais que les Discours. Encore qu'il soit subtil, complexe, sa lecture, seme d'embches, se prsente sous un jour lumineux, L'enchanement des hypothses et des dmonstrations met chacun en confiance. La concision du style, le bonheur des formules enchantent. La brivet des chapitres et leur petit nombre encourage le travail de l'interprtation. Sous l'effet de la sduction, la pense s'exerce sans perdre de vue son but. En revanche, le second ouvrage, dcoup en trois livres, a des dimensions considrables. La fragmentation des analyses est telle qu'on s'inquite de la direction suivie, de la cohrence du dessein. Le rcit d'vnements, ou d'actions prsentes comme exemplaires, s'entremle de considrations thoriques dont l'insertion droute. Le titre des chapitres est souvent dmenti par les dveloppements dans le corps du texte, les digressions; d'un livre l'autre, d'une section l'autre, les retours sur des faits qu'on croyait avrs, les renversements mme de perspective sont innombrables. Enfin et surtout, une pnible incertitude sur le sens gnral de l'argument s'ajoute la rsistance suivre l'auteur [p. 11] dans son exploration de lHistoire de Rome et des Commentaires de Tite-Live. La Rpublique romaine, les textes des grands crivains grecs et latins faisaient partie du patrimoine culturel des hommes de la Renaissance, de lge classique, du XVIIIe, sicle. Nos contemporains ont rompu avec cet hritage. Ils s'accommodent des rfrences au plus lointain pass, dissmines dans Le prince. Ils ne jugent pas ncessaire de sy arrter. Mais le dcor de lAntiquit forme un cran qui leur dissimule l'objet des Discours.

Et pourtant ces Discours sont une uvre d'un intrt exceptionnel. Non seulement c'est en celle-ci, plus encore que dans Le prince, qu'on peut trouver la marque d'une fondation de la pense politique moderne, mais, telle est du moins notre conviction, elle offre ceux qui feraient aujourd'hui l'effort de la connatre la matire privilgie d'une rflexion sur l'histoire et la politique. Rflexion sur la diffrence des temps, et le retour en chaque temps de la mme interrogation, qui sous-tend l'institution du social; sur ce qu'il y a de fantasmatique dans la reprsentation d'un bon pouvoir et d'une bonne socit dlivrs des malfices de ltat; sur l'inluctabilit des antagonismes de classe, sur la dpendance o se trouve la loi des revendications dans lesquelles s'imprime le dsir de libert. Rflexion sur les dangers qu'il y a riger en autorit les penseurs auprs desquels on a cru apprendre lire l'Histoire. Rflexion, enfin, sur les limites du savoir, sur la virt qui consisterait, distance du cynisme, sans complaisance l'gard de l'opinion et des hommes dont on souhaite l'approbation, dans le deuil des rponses dernires, soutenir l o l'on est, ici et maintenant, ce que l'on croit vrai, juste et ncessaire, pour vaincre la pesanteur des intrts, le morne attrait de la rptition, l'accoutumance ou la rsignation la servilit et rveiller le sens du possible.

Il fut souvent crit, au cours des sicles, que Machiavel donnait la cl des vnements dont on tait tmoin, qu'enfin pour la premire fois, son message pouvait se faire entendre. L'artifice qui permet de dguiser sa pense, dans une situation donne, en empruntant l'identit d'un grand auteur, nous-mme l'avons assez dnonc pour ne pas y cder notre tour. Aussi bien ne parlons-nous ni de cls, ni de message. Seulement d'une invitation qu'on trouve dans son uvre dchiffrer le prsent, se remmorer lAncien afin de concevoir le Nouveau, redonner vie au pass scell sous les mythes dont une collectivit a besoin pour ignorer sa libert, lui restituer son indtermination afin de penser celle que nous affrontons, ramener au jour les choix incons-[p. 12] cients qu'impliquent une forme d'organisation sociale, un certain agencement des classes, la reprsentation de leurs divisions et de leur dpendance rciproques. Enfin la place faite au Pouvoir et au statut de la Loi.

Or, que cette invitation-l puisse tre sensible nombre de nos contemporains, nous avons quelque raison de l'esprer parce que les grandes certitudes du sicle se dfont, que sont dcidment fanes les promesses de la rvolution bourgeoise et de la rvolution proltarienne, de 1re industrielle ou dj post-industrielle, du bien-tre ou du dprissement de ltat et qu'aprs avoir perdu les appuis imaginaires de la rationalit conomique ou technique, il faut bien, moins de cder au vertige de la religion, du nihilisme ou la passion morose de l'ascension sociale, retrouver le chemin de la verit effetuale et de cette virt que recommandait Machiavel une virt dont il aurait pu dire, la diffrence de Spinoza, qu'elle exige de comprendre, mais n'interdit ni de rire ni de pleurer, puisqu'elle est manire de vivre dans le monde et non de s'en dtacher.

Ne soyez pas rebuts par la description de Rome et les rfrences Tite-Live, aimerait-on donc dire certains lecteurs que cette dition veut atteindre. Ne vous souciez pas de lAntiquit. Il vous suffit pour entendre le texte de possder ce dsir de savoir et d'agir que l'auteur prtait aux jeunes Florentins de son temps; alors vous serez reconduits au plus prs de votre exprience.

Mais, si fond soit-il, impossible de s'en tenir cet appel qui risquerait dfaire mconnatre l'entreprise des Discours. Car, s'il est vrai que leur lecture ne requiert pas la connaissance des faits, des exemples et des textes anciens dont ils sont nourris, l'on ne saurait sans dommage se dsintresser de la version de l'histoire romaine labore par Machiavel, de la manire dont elle est tablie et de l'usage qu'il fait de la pense de Tite-Live, ou, plus gnralement, des principes des grands auteurs classiques, Cicron, Aristote et Xnophon notamment. Voil qui mrite quelques claircissements.

Apparemment, Machiavel rige en modle les institutions de la Rpublique romaine et il veut persuader ses contemporains de la ncessit d'imiter les hommes qui les ont forges, se sont employs les maintenir ou bien ont su, dans l'action, en tirer les plus heureuses consquences. Apparemment, il veut exploiter l'ouvrage de Tite-Live pour en extraire tout ce qui est de nature faire apprcier l'excellence du modle. Si la Rpublique romaine se prsente comme le meilleur des rgimes, Tite-Live semble tre l'autorit qui nous assure de la validit des faits mentionns. Mais [p. 13] seule une lecture superficielle de l'avant-propos o l'auteur fait part de ses intentions accrditerait cette apparence. De fait, au moment mme o il lance un appel l'imitation des Romains, Machiavel revendique l'originalit de son entreprise en des termes qui interdisent de le prendre la lettre. Il se compare au navigateur partant la recherche de terres et de mers inconnues. Comment le ferait-il si le nouveau continent tait Rome, cette cit si familire ses contemporains que, selon une tradition fermement tablie depuis plus d'un sicle, Florence lui doit sa fondation et en dtient l'hritage? En outre, dans le moment o il formule le dessein de s'appuyer sur les livres de Tite-Live, il prcise que c'est la comparaison des vnements anciens et modernes qui peut en faciliter l'intelligence. Ds le prambule nous souponnons que la restitution des faits romains est subordonne au dchiffrement du texte d'un auteur et que l'enseignement de ce texte n'est pas immdiatement intelligible, mais dpend d'une interprtation fonde sur la double connaissance du prsent et du pass. Encore faut-il signaler que l'avant-propos du second livre conduit plus loin la critique d'une conception raliste de lhistoire, en numrant toutes les raisons qu'on devrait avoir de se mfier des tmoignages auxquels les crivains se rfrent, des mobiles qui poussent ces derniers les accrditer et des mobiles aussi qui poussent les lecteurs contemporains pouser leur reprsentation. Cette critique a pour effet de mettre en vidence le conservatisme qui guide le rcit des vnements et sa transmission.

Qu'on ne s'tonne donc pas de la complexit de la composition des Discours et surtout qu'on ne fasse pas l'conomie d'une rflexion sur le traitement des faits et des commentaires. Tout l'ouvrage le confirme: Machiavel ne se propose pas simplement de rappeler aux hommes de son temps un pass dont ils se seraient dtourns, des exemples dont ils devraient s'inspirer, il s'applique constituer ce pass en mobilisant son exprience de l'histoire florentine et interprter cette exprience la lumire du pass qu'elle claire. La tche implique un va-et-vient constant entre le ple de la Rpublique romaine et le ple de la Rpublique florentine, ou, plus gnralement, entre le ple de lAntiquit et le ple de la Modernit. Mais ni l'un ni l'autre ne sauraient tre dtermins hors la relation qu'ils entretiennent. La diffrence des temps est marque, il ne s'agit jamais de l'annuler, mais elle ne s'inscrit pas dans un champ neutre, un rel en-soi, et, pour la mme raison, ne se laisse pas survoler par un sujet intemporel, ne s'offre pas un savoir dernier.

En outre, puisque ni le pass ni le prsent ne se livrent ltat [p. 14] brut, puisque chacun n'en a notion que dans le langage, par le mdia des livres et des discours des vivants, la tche requiert de prendre en charge ces mdias, de les analyser, de dceler la fonction qu'ils remplissent dans la conservation d'un certain ordre social. Ainsi la dcouverte de la Rpublique romaine passe par la dconstruction d'une reprsentation rgnante qui s'articule dans le systme des reprsentations sociopolitiques de l'poque. L'accs la vrit du monde prsent suppose cette dconstruction. La connaissance de lHistoire s'avre indissociable de la critique de ce que nous nommerions de nos jours l'idologie.

Pourquoi, demandera-t-on, la Rome antique, la Rome rpublicaine constitue-t-elle une rfrence privilgie pour les Florentins? Ceux-ci, nous l'avons mentionn, aimaient s'imaginer hritiers des Romains. De fait, la fin du trecento, sous l'impulsion de Coluccio Salutati, puis au dbut du sicle suivant, sous celle de Leonardo Bruni, un groupe d'humanistes a labor une nouvelle version des origines de Florence. La grande cit de l'Arno tait apparue, dj, dans des chroniques anciennes, comme une cration romaine, mais c'est Csar qu'on l'imputait. En faisant remonter sa naissance aux derniers temps de la Rpublique, les humanistes entendaient prouver que c'tait le sang de citoyens libres qui coulait dans les veines des Florentins; ils s'employaient exciter le patriotisme des bourgeois de l'poque, les persuader de l'excellence de leurs institutions et de la mission universelle que leur avaient lgue leurs lointains anctres. Mais, simultanment, ils composaient un modle singulirement efficace. Ce qui faisait, pour eux, la grandeur de Rome ses dbuts, c'tait la concorde civile, la majest de la loi aux yeux de tous, la puret des murs, le dvouement des citoyens au bien public, leur empressement se sacrifier au salut de la patrie; c 'tait la sagesse du Snat et, d'une faon gnrale, des patriciens, la discipline du peuple; enfin ces vertus auxquelles Cicron attacha son nom: la probit, la prudence, l'amour du juste milieu. ce tableau faisait pendant la description des maux qu'ils tenaient pour responsables de la dcadence de la Rpublique: discorde entre le patriciat et une plbe travaille par l'envie, dveloppement des factions, dchanement des apptits sous l'effet des conqutes, corruption des murs.

Sans doute, cette reprsentation de la Rpublique romaine fut-elle relgue sous la tyrannie des Mdicis, au cours du quattrocento. Les nouveaux matres du pouvoir ne souhaitaient nullement qu'on exaltt les liberts antiques. Mais, sans avoir jamais perdu de son attrait pour une fraction de l'lite bourgeoise, elle [p. 15] fut ractive au temps de Savonarole, puis sous la Nouvelle rpublique dirige par Soderini et servie avec zle par Machiavel pendant une quinzaine d'annes. Et tout incite penser que le modle, forg par Bruni et ses contemporains, hantait encore l'imagination des jeunes rpublicains auxquels s'adressait l'ancien Secrtaire florentin quand il crivit ses Discours. Les liberts se trouvaient alors de nouveau dtruites, la restauration mdicenne triomphait, les opposants s'interrogeaient sur les causes de l'chec du rgime et sur les chances d'un changement, ils invoquaient une tradition qui portait condamnation de la tyrannie.

Que l'idalisation de la Rome rpublicaine ait eu, ds l'origine, une porte politique, ou, si l'on prfre, qu'on doive y reconnatre la marque de l'idologie, on peut le vrifier considrer l'cart entre le discours des premiers humanistes (pour la plupart mls aux affaires publiques) et la ralit sociale. L'essor de ce discours avait concid, non pas avec une extension de la dmocratie, mais avec une raction oligarchique. Aprs l'vnement qui avait branl la socit florentine dans ses fondements la rvolution dclenche par les ouvriers de la laine, les Ciompi (1378) s'tait reforme une solidarit entre toutes les couches de la bourgeoisie, des artisans et petits commerants jusqu'aux grands marchands, aux industriels et aux financiers, mis les principales charges publiques avaient t alors accapares par un petit nombre des reprsentants des grandes familles, faisant dsormais figures de garants de l'ordre. Sans doute, les humanistes exaltaient-ils des valeurs qui avaient t largement reconnues au cours des dcennies prcdentes, et n'taient pas sans rpondant dans la ralit: l'galit devant la loi, le travail comme seule source lgitime de distinction sociale, un pouvoir qui ne soit la proprit de personne, la subordination des intrts privs individuels ou collectifs l'intrt public; mais, simultanment, ils s'attachaient rpandre une mystique de l'unione et prnaient la virt des anciennes institutions florentines comme si les conflits conomiques, sociaux et politiques n'avaient jamais eu d'autre motif que l'agitation de factions composes d'ambitieux et d'envieux.

Ce serait une erreur de croire qu'au temps de Machiavel la nature de ces conflits s'tait profondment modifie et que la phrasologie sous laquelle on les dissimulait avait perdu de son efficacit. Il y a, en effet, des constantes dans l'histoire de Florence. Est-ce surtout le rsultat d'une conomie largement oriente vers le commerce international qui ne permet pas au systme des [p. 16] corporations de se figer, et favorise la mobilit sociale, est-ce plutt l'effet des luttes qui mobilisrent le petit peuple contre la noblesse la fin du dugento et lui donnrent le premier rle dans la fondation de la Rpublique? Le fait est que la grande bourgeoisie ne russit jamais se fermer la manire d'une aristocratie, comme ce fut le cas Venise. Pour l'une et l'autre raison peut-tre, la Cit dut assimiler, par vagues, des trangers; et la couche dirigeante dut la fois faire place des parvenus et composer avec les aspirations de la petite bourgeoisie. Tout au cours du trecento le dbat politique ne cessa de s'amplifier. Pour les uns il s'agissait d'obtenir l'largissement de la dmocratie, la participation aux charges publiques des membres de la moyenne et de la petite bourgeoisie (le popolo minuto), dont bon nombre taient des citoyens de frache date (les novi cives); pour les autres il s'agissait de restreindre la dmocratie, d'affirmer la prminence des grandes familles qui dtenaient la richesse (encore que certains de leurs adversaires pouvaient avoir bti de grandes fortunes), et taient censs dtenir la comptence pour avoir, de gnration en gnration, figur dans les Conseils et les organes dirigeants de la Commune. Dbats politiques, mais dont l'enjeu est aussi conomique. Car participer au Conseil, c'tait gagner le pouvoir de peser sur mille dcisions qui affectaient le commerce et l'industrie de la Cit, favorisaient ou entravaient l'activit de telle ou telle catgorie de ngociants, de boutiquiers ou d'artisans, consolidaient ou supprimaient des privilges; et c'tait principalement pouvoir intervenir dans la rpartition de l'impt. Or, si diffrente soit la situation au dbut du cinquecento (le problme de l'assimilation des novi cives ne se pose plus), les termes du conflit politique et conomique se retrouvent inchangs. C'est sous la pression des revendications dmocratiques que la Rpublique a t rtablie et c'est ensuite la rsistance de la grande bourgeoisie la politique librale de Sodetini, surtout son opposition rsolue la rforme fiscale dont il a pris l'initiative qui provoquent la chute du rgime. En dpit des apparences, la fin des liberts florentines n'est pas due une dfaite militaire. La Rpublique a t dtruite de l'intrieur. Quand les Espagnols ont envahi la Toscane, ramenant dans leurs fourgons la famille Mdicis, une fraction des Grands n'tait dj plus dispose dfendre le rgime, tandis que l'autre complotait avec l'ennemi.

Que fait donc Machiavel, quand il entreprend l'tude de l'histoire romaine? Il parle ses contemporains de leur propre histoire. Son propos est de tirer parti de la foi que mobilise l'image [p. 17] de l'antique Rpublique pour rendre raison du destin de Florence. Certes, Machiavel compose un loge des institutions romaines et des citoyens romains, mais la Rome qu'il prsente ne ressemble en rien celle que vnraient les humanistes du quattrocento. Loin de tenir la concorde pour sa plus grande vertu, il tablit que sa grandeur fut le produit de ses divisions, qu'elle donna le spectacle d'une socit sans prcdent, en ceci que sous la pression d'une plbe ardente conqurir des droits, et toujours mfiante, la classe dominante fut contrainte des concessions et ne put faire du Pouvoir sa proprit. Loin de considrer que de bonnes lois, ds l'origine, permirent d'instituer un tat harmonieux et puissant, et que les conflits civils provoqurent sa dcadence, il met ces conflits au fondement de la loi. Ainsi crit-il dans le chapitre IV du 1er livre: Moi, je dis que ceux qui condamnent les tumultes de la noblesse et de la plbe blment ce qui fut la cause premire de l'existence de la libert romaine et qu'ils sont plus attentifs au bruit et aux cris qu'ils occasionnaient qu'aux bons effets qu'ils produisaient. Et encore, dans le mme passage: Il ny a pas l'ombre d'une raison qualifier de dsordonne une Rpublique qui fut pleine d'exemples de si grande vertu, car s'il est vrai que les bons exemples sont l'effet d'une bonne ducation, et celle-ci l'effet de bonnes lois, ces bonnes lois ce sont les tumultes qui les ont engendres, que la plupart condamnent inconsidrment. Par ce langage, il fait entendre ses contemporains que le malheur de Florence ne fut pas d'tre dchire par la lutte des classes, que c'est au contraire ce signe qu'on reconnat sa parent avec Rome. Si la Rpublique est morte, suggre-t-il, c'est faute d'avoir laiss s'exercer les bons effets des tumultes, c'est en raison de l'impuissance des domins faire valoir jusquau bout leurs droits et de l'obstination des dominants conserver leurs prrogatives et leurs privilges; c'est, enfin et surtout, qu'aux yeux des grands bourgeois florentins, la peur du peuple l'a toujours emport sur celle de l'tranger, la peur de l'ennemi de l'intrieur sur celle de l'ennemi de l'extrieur. Ainsi a-t-on, pour des motifs politiques, remis la dfense de la Cit entre les mains de condottieri et de troupes mercenaires au lieu de la confier ceux dont c'tait l'intrt de lutter pour leur libert.

Mais l ne s'arrte pas la subversion du modle romain. La socit, dont on peut dire qu' la diffrence des autres, commencer par la mieux organise, la plus stable, Sparte, elle sut s'ouvrir l'histoire, cette socit apparat comme le thtre de passions individuelles et collectives dont on voit partout ailleurs la manifestation. Lgende, donc, que la classe dominante dtenait la sagesse; [p. 18] elle tait rapace et, de son propre mouvement, ne voulait rien cder. Lgende, encore, que le peuple se montrait bon et disciplin; on le voit envieux, incapable de tirer de son sein des chefs aviss, ingrat envers ceux qui ont dfendu sa cause. Lgende que la libert ft si sacre que nul n'osait y porter atteinte; les apprentis tyrans ne faisaient pas dfaut. La vrit est seulement que le peuple se soulevait contre eux ou que les tyrans renonaient par peur leurs projets. Lgende mme que les hommes avaient un naturel vertueux et se dvouaient spontanment au bien public; si, par exemple, de grands capitaines, au fate de la gloire, pouvaient redevenir de modestes citoyens, c'est qu'ils en prouvaient la ncessit.

Thtre de toutes les passions, Rome se distingue en ceci qu'elle fut aussi celui du soupon, lequel parat un trait de la dmocratie.

Le soupon a son envers: la crainte qui paralyse l'initiative. Mais quand le soupon tire son origine du peuple, quand il est, au plus profond, associ son dsir de libert, au dsir d'interdire quiconque de s'approprier le pouvoir, alors s'opre une balance, chez les meilleurs, entre l'ambition (ou la passion de la gloire) et la peur du chtiment. Comme ce n'est pas dans les lois tablies, ou dans les hommes qui gouvernent, que rside l'autorit dernire, en dernier ressort, c'est la puissance inconnue, indterminable du peuple qui dcide. La carrire est alors ouverte au risque, des hommes assez audacieux pour transgresser les lois, pour dsobir aux ordres, pour accomplir un dessein dont le succs confirmera le bon motif. La mme raison fait qu'on rponde devant soi-mme de son entreprise et qu'on en rponde devant le peuple. Par ce langage, encore, Machiavel s'adressera aux Florentins: diverses reprises, il les ramne aux circonstances dramatiques de la chute du rgime. Il leur remet en mmoire le caractre de leurs anciens dirigeants, la faiblesse de Sodetini, rformateur vellitaire et timor, obnubil par le respect de la lgalit, jusqu' la dernire heure, incapable de s'appuyer rsolument sur le peuple pour sauver la Rpublique, et de porter le fer contre les adversaires de la dmocratie, ces Grands qui, avant mme l'agression espagnole, commenaient trahir.

C'est en suivant la double interprtation de lHistoire romaine et de lHistoire florentine que nous sommes induits rflchir sur les problmes de la dmocratie. De celle-ci, on n'oserait dire que Machiavel en a fait le premier la thorie. Encore faudrait-il savoir ce qu'on met sous ce terme? Mais ce qui nous parat certain, [p.19] c'est que nul n'avait, avant lui, traqu ainsi les fictions de la pense conservatrice; nul n'avait plus que lui le dsir de ne pas tre opprim par la Loi; nul n'avait montr la frocit d'un rgime o s'exeraient pleinement les effets de la division sociale dans lequel le Pouvoir est toujours en dfaut et le poids des institutions toujours en question.

Qui ferait l'effort de s'attacher l'argument sinueux des Discours devrait convenir que tout ce qui fut avanc dans notre sicle sous le signe de l'optimisme bourgeois, du socialisme ou de la science politique, loin d'effacer l'enseignement de Machiavel, en fait redcouvrir la vigueur et la fracheur.

Claude Lefort

[p. 20, sans texte, p. 21 titre, p.22, sans texte, p. 23.]

Notice

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Au moment o Nicolas Machiavel, vingt-neuf ans, entre la Seigneurie comme secrtaire de la seconde chancellerie de Florence, en 1498, lItalie est factionne en une multitude de rpubliques, de seigneuries et dtats plus ou moins importants qui se font la guerre et qui seront incapables d'opposer une rsistance aux convoitises des tats forts: Allemagne, Espagne, France.

Florence a t gouverne par les Mdicis, Laurent d'abord, dont le pouvoir s'tait accru aprs lchec de la conjuration des Pazzi en 1478, puis Pierre, chass avec sa famille au moment de l'arrive de Charles VIII en Italie en 1494, pour avoir voulu pactiser avec lui, au dtriment de la libert de la ville. Puis, Florence a subi l'influence du dominicain Savonarole, prdicateur la parole ardente, ennemi des Mdicis, qui, sans avoir, de fonction officielle, dirigea les affaires de la Rpublique jusqu'au jour o il fut brl en place publique en 1498.

C'est peu aprs, le 23 mai de la mme anne, que Machiavel commence sa carrire de fonctionnaire de la Seigneurie. Trs vite le secrtaire de la deuxime chancellerie (qui traite des affaires intrieures de ltat) se voit confier des responsabilits au Conseil des Dix, charg des affaires extrieures et des questions militaires. Pendant les quatorze annes o il occupe cette charge, Machiavel va rencontrer, l'occasion de nombreuses ambassades, la plupart des personnalits qui ont influenc la vie politique de lItalie de l'poque.

Ds 1499, il est charg de se rendre Forli, chez la comtesse Catherine Sforza Riario, pour renouveler l'engagement militaire de son fils Ottaviano. son retour, il est envoy Pise (en guerre avec Florence) qui veut rtablir sa domination sur Florence. Il assiste la trahison des condottieri Paolo et Vitellozzo Vitelli, chargs par Florence de faire le sige de la ville. Puis, il est tmoin de la rbellion des troupes franco-suisses que Louis XII, depuis [p. 24] peu matre de Milan, a envoyes au secours de la Rpublique, son allie. Ces troupes prtextant le non-paiement de leur solde et un manque d'approvisionnement s'arrtent de combattre.

Cette rbellion fait l'objet de sa premire lgation en France en 1500, aux cts de Francesco della Casa.

En 1501 et en 1502, il est envoy auprs de Csar Borgia qui a entrepris la conqute des tats du centre de lItalie et dont on craint les vises sur les possessions de Florence. Machiavel est prsent au guet-apens de Senigallia o Csar Borgia par la ruse parvient se dfaire de ses ennemis, les condottieri Orsini et Vitelli. Cette seconde lgation lui a t confie par Pierre Soderini, nomm gonfalonier vie de la Rpublique, en 1502.

L'anne suivante, la mort du pape Alexandre VI, pre de Csar Borgia, il est envoy Rome pour le conclave.

L'accession au pontificat de Jules II, ennemi de toujours des Borgia, marque la fin de la puissance de Csar. Le nouveau pape est un homme ambitieux dont le but est d'accrotre les territoires des tats pontificaux et il n'hsitera pas, cet effet, faire appel aux puissances trangres.

Aprs une seconde lgation en France en 1504, Machiavel rentre Florence o, en plus des affaires courantes de sa charge, on lui confie diverses missions: Prouse, auprs du condottiere Jean-Paul Baglioni, pour renouveler son engagement militaire; Sienne, auprs de Pandolfe Petrucci; puis de nouveau Pise, que Florence cherche prendre, en en faisant le sige, sans y parvenir.

C'est alors que la Seigneurie consciente de l'inutilit des armes mercenaires prte l'oreille aux conseils de son Secrtaire et se dcide former une milice, Les Neuf de la Milice sont crs et Machiavel en est nomm Secrtaire.

Pendant les annes 1506 et 1507, il parcourt tout le territoire de ltat pour lever les troupes dont il se charge de la formation.

Entre-temps, il est envoy auprs de Jules II qui rclame Florence le condottiere Marcantonio Colonna, et il suit le pape dans ses conqutes de Prouse et de Bologne.

L'anne suivante, il part pour l'Allemagne o il doit rgler un diffrend au sujet d'une somme d'argent que Maximilien, en vertu d'un vieux droit, rclame Florence.

son retour, la Rpublique, qui dispose maintenant de sa propre arme, dcide d'en finir avec Pise et donne mission Machiavel de reprendre la ville. Aprs un long sige, Pise capitule, en 1509.

Jules II s'est, entre-temps, ligu avec Louis XII et l'empereur germanique Maximilien (ligue de Cambrai) contre Venise qui [p. 25] perd la bataille dAgnadel, en 1509, et doit cder les territoires de terre ferme qu'elle a acquis depuis des sicles.

Le pape, dont le but est de former un tat fort en Italie, poursuit son objectif qui consiste, une fois Venise affaiblie, chasser les trangers du pays. Il s'allie Maximilien, Venise et aux Espagnols (la Sainte Ligue) pour combattre Louis XII.

Ces vnements procurent l'occasion d'une nouvelle lgation de Machiavel en France, en 1510. Louis XII rclame l'aide des troupes florentines pour dfendre son autre alli, le duc de Ferrare, que Jules II vient d'attaquer. Machiavel, selon les instructions de la Seigneurie, russit lui faire admettre que Florence a besoin de sa milice pour garder ses frontires.

De retour Florence, il parcourt, une fois de plus, le pays pour lever de nouvelles troupes. La Rpublique, en effet, en raison de son alliance avec la France, est menace par la Sainte Ligue, d'autant plus que Louis XII a convoqu Pise un concile pour dposer Jules II Machiavel s'efforce de faire partir les prlats et y parvient. Enfin, dans Florence mme, la politique de Pierre Soderini suscite de vifs mcontentements chez les partisans des Mdicis qui rclament une alliance avec le pape contre les Franais.

Aprs la bataille qu'ils remportent Ravenne, au printemps 1512, les Franais subissent de nombreux revers et sont bientt repousss hors dItalie. Florence, qui perd ses allis, se trouve affaiblie. Machiavel s'adonne alors activement aux prparatifs militaires: on construit des retranchements autour de la ville. En aot les Espagnols pntrent en Toscane, enlvent Prato que l'arme de Florence n'a pas su dfendre. Cette dfaite amne la chute du gouvernement de Soderini et le retour des Mdicis au pouvoir. Machiavel, malgr ses efforts pour rentrer dans leurs bonnes grces, est rvoqu. On l'accuse mme d'avoir particip un complot. Il est conduit en prison d'o il sortira la faveur d'une amnistie dclare la suite de l'accession de Jean de Mdicis (Lon X) au pontificat.

Aprs quatorze annes d'une activit intense pendant lesquelles il s'est entirement dvou ltat et o il a accompli avec habilet et succs des missions difficiles, il se voit contraint l'exil et part dans sa proprit prs de San Casciano d'o il ne cessera de solliciter les Mdicis de lui procurer un emploi la Seigneurie. Si l'on excepte sa Premire dcennale (chronique des annes 1494-1504, compose en 1505), il n'a encore crit que des relations diplomatiques et des lettres officielles.

C'est alors que commence sa carrire d'crivain. Il travaille aux Discours sur la premire dcade de Tite-Live, qu'il inter-[p. 26] rompt en 1513 pour crire Le prince ddi Laurent II de Mdicis, et qu'il reprend et achve vers 1519. Ces deux uvres, qui circuleront sous forme de manuscrit, ne seront imprimes qu'aprs sa mort, en 1532. Il compose La mandragore, sa meilleure pice, puis, vers 1520, L'art de la guerre.

Machiavel, cependant, quitte parfois sa retraite pour rendre visite Florence Cosimo Rucellai et ses amis dont certains seront impliqus, en 1522, dans un complot contre le cardinal Jules de Mdicis. Il continue toujours de solliciter une charge.

En 1520, Jules de Mdicis lui demande d'crire une Histoire de Florence qui l'occupera jusqu'en 1526.

La mme anne, il reoit la modeste mission d'aller Lucques recouvrer certaines crances; l'anne suivante, une autre, tout aussi peu intressante.

En 1525, il se rend Rome pour montrer son Histoire de Florence Jules de Mdicis, devenu pape sous le nom de Clment VII. Il l'incite lever une milice en Romagne ce projet n'aboutira pas un moment o la situation de lItalie est des plus prcaires. En effet, les troupes de Charles Quint, dont l'objectif est d'tendre son hgmonie l'Italie, viennent de battre les Franais Pavie.

Face la puissance de lEmpereur, les tats italiens se dcident former une ligue avec la France (Ligue de Cognac, 1526). Florence, on confie Machiavel l'organisation de la dfense de la ville, de mme que la mission d'observateur militaire en Lombardie o s'affrontent les troupes de la Ligue et les Impriaux. Au cours de leur marche vers le sud, il est plusieurs reprises envoy par la Seigneurie pour s'enqurir des dveloppements de la guerre.

Aprs la prise de Rome par les Impriaux, en mai 1527, la population de Florence, irrite de l'attitude indcise de Clment VII pendant la guerre, se soulve contre les Mdicis et la Rpublique est proclame.

Aprs une ultime mission destine dlivrer le pape des Impriaux, Machiavel revient Florence o il ne se verra confier aucune responsabilit dans le nouveau gouvernement. Il meurt le 22 juin 1527.

Annick Plissier

[p. 27]

Repres bibliographiques majeurs

Ouvrages gnraux:

Claude Lefort, Machiavel, Le travail de luvre, Paris, Gallimard, 1977.

Leo Strass, Thoughts of Machiavelli, Glencoe, The Free Press, 1958.

Gennaro Sasso, Niccoli Machiavelli. Storia del pensiero politico, Naples, Nelle Sede del Instituto, 1958.

Augustin Renaudet, Machiavel (5e d. revue et corrige), Paris, Gallimard, 1966.

Sur les Discours plus particulirement.

Leslie J. Walker (d.), Discourses of N. Machiavelli, Londres, Routledge and Kegan Paul, 1950.

[p. 28 sans texte, p. 29]

Nicolas Machiavel

A Buondelmonti

et Rucellai Cosimo Rucellai, riche Florentin, mort en 1519, organisa dans ses jardins des runions littraires auxquelles participrent Zanobi Buondelmonti et Machiavel. Les deux ddicataires des Discours apparaissent comme interlocuteurs dans L'art de la guerre.

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Recevez cet crit comme un prsent de trop peu de valeur, sans doute, pour m'acquitter de tout ce que je vous dois; mais soyez convaincu que c'est ce que Machiavel a pu vous envoyer de mieux. J'ai tch d'y renfermer tout ce qu'une longue exprience et une recherche assidue ont pu m'apprendre en politique M. dit des choses du monde.. Dans l'impuissance o je suis de faire plus pour vous ni pour qui que ce soit, vous ne pouvez vous plaindre si je n'ai pas fait davantage. N'accusez donc que mon peu de talent du peu de mrite de ces discours ou mon dfaut de jugement des erreurs dans lesquelles je serai sans doute bien souvent tomb. Dans cet tat cependant, je ne sais lequel de nous a plus le droit de se plaindre, ou moi de ce que vous m'avez forc crire ce que je n'eusse jamais entrepris de moi-mme, ou vous de ce que j'ai crit sans que vous ayez lieu d'tre satisfait. Acceptez donc ceci comme on accepte tout ce qui vient de l'amiti, en ayant gard bien plus l'intention de celui qui donne qu' la chose offerte.

J'ai la satisfaction de penser que si j'ai commis des fautes dans le courant de cet ouvrage, j'ai, du moins, bien certainement russi dans le choix de ceux qui je l'adresse. Non seulement je remplis un devoir et je fais preuve de reconnaissance, mais je m'loigne de l'usage ordinaire aux crivains qui ddient toujours leurs livres quelque prince et qui, aveugls par l'ambition ou par l'avarice, exaltent en lui les vertus qu'il n'a pas, au lieu de le reprendre de ses vices rels.

Pour viter ce dfaut, je ne l'adresse pas ceux qui sont princes, mais ceux qui, par leurs qualits, seraient dignes de l'tre; non ceux qui pourraient me combler d'honneurs et de biens, mais plutt ceux qui le voudraient sans le pouvoir.

juger sainement, ne devons-nous pas plutt accorder notre estime celui qui est naturellement gnreux qu' celui qui, raison de sa fortune, a la facult de l'tre? ceux qui sauraient gou-[p. 30] verner des tats, qu' ceux qui ont le droit de les gouverner, sans le savoir?

Aussi les historiens louent-ils bien plus Hiron de Syracuse, simple particulier, que Perse de Macdoine, tout monarque qu'il tait. Il ne manquait Hiron que le trne pour tre roi, et l'autre n'avait du roi que le royaume.

Bon ou mauvais, vous l'avez voulu cet crit: tel qu'il est, je vous le livre, et si vous persistez toujours dans vos favorables prventions M. dit dans votre erreur de vous intresser mes opinions., je continuerai examiner le reste de cette histoire, comme je vous l'ai promis en commenant.

[p. 31]

Livre premier

[p. 32 sans texte, p. 33]

Avant-propos

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Je n'ignore pas que le naturel envieux des hommes si prompts blmer, si lents louer les actions d'autrui, rend toute dcouverte aussi prilleuse pour son auteur que l'est, pour le navigateur, la recherche des mers et des terres inconnues. Cependant, anim de ce dsir qui me porte sans cesse faire ce qui peut tourner l'avantage commun tous, je me suis dtermin ouvrir une route nouvelle, o j'aurai bien de la peine marcher sans doute. J'espre du moins que les difficults que j'ai eues surmonter m'attireront quelque estime de la part de ceux qui seront mme de les apprcier. Si de trop faibles moyens, trop peu d'exprience du prsent et d'tude du pass rendaient mes efforts infructueux, j'aurai du moins montr le chemin d'autres, qui, avec plus de talents, d'loquence et de jugement, pourront mieux que moi remplir mes vues; et si je ne mrite pas d'loge, je ne devrais pas du moins m'attirer le blme.

Si on considre le respect qu'on a pour l'antiquit et, pour me borner un seul exemple, le prix qu'on met souvent de simples fragments de statue antique qu'on est jaloux d'avoir auprs de soi, d'en orner sa maison, de donner pour modles des artistes qui s'efforcent de les imiter dans leurs ouvrages; si, d'un autre ct, l'on voit les merveilleux exemples que nous prsente l'histoire des royaumes et des rpubliques anciennes, les prodiges de sagesse et de vertu Par vertu Machiavel entend un ensemble de qualits, tels le courage, l'nergie, les capacits physiques et intellectuelles, que recouvrait le terme de virtus des Romains, traduit ici le plus souvent par valeur, talents. Cf. Discours, II, 2. oprs par des rois, des capitaines, des citoyens, des lgislateurs qui se sont sacrifis pour leur patrie, si on les voit, dis-je, plus admirs qu'imits, ou mme tellement dlaisss qu'il ne reste pas la moindre trace de cette antique vertu, on ne peut qu'tre la fois aussi trangement surpris que profondment affect! Et cependant M. dit: d'autant plus que, dans..., dans les diffrends qui s'lvent entre les citoyens, ou dans les maladies auxquelles ils sont sujets, on voit ces mmes hommes avoir recours ou aux jugements rendus, ou aux remdes ordonns par les anciens. Les lois civiles ne [p. 34] sont, en effet, que des sentences donnes par leurs jurisconsultes qui, rduites en principes, dirigent dans leurs jugements nos jurisconsultes modernes. Qu'est-ce encore que la mdecine, si ce n'est l'exprience de mdecins anciens, prise pour guide par leurs successeurs? Et cependant, pour fonder une rpublique, maintenir des tats, pour gouverner un royaume, organiser une arme, conduire une guerre, dispenser la justice, accrotre son empire, on ne trouve ni prince, ni rpublique, ni capitaine, ni citoyen, qui ait recours aux exemples de l'antiquit! Cette ngligence est moins due encore l'tat de faiblesse o nous ont rduits les vices de notre ducation actuelle M. dit: o nous a conduits la religion actuelle., ou aux maux causs par cette paresse orgueilleuse qui rgne dans la plupart des tats chrtiens, qu'au dfaut de vritables connaissances de l'histoire, dont on ne connat pas le vrai sens, ou dont on ne saisit pas l'esprit. Aussi la plupart de ceux qui la lisent s'arrtent-ils au seul plaisir que leur cause la varit d'vnements qu'elle prsente; il ne leur vient pas seulement en pense d'en imiter les belles actions; cette imitation leur parat non seulement difficile, mais mme impossible; comme si le ciel, le soleil, les lments et les hommes eussent chang d'ordre, de mouvement et de puissance, et fussent diffrents de ce qu'ils taient autrefois.

C'est pour dtromper, autant qu'il est en moi, les hommes de cette erreur, que j'ai cru devoir crire sur tous les livres de Tite-Live, qui, malgr l'injure du temps, nous sont parvenus entiers, tout ce qui, d'aprs la comparaison des vnements anciens et modernes, me paratra ncessaire pour en faciliter l'intelligence. Par l, ceux qui me liront pourront tirer les avantages qu'on doit se proposer de la connaissance de l'histoire. L'entreprise est difficile; mais aid par ceux qui m'ont encourag me charger de ce fardeau, j'espre le porter assez loin pour qu'il reste peu de chemin faire de l au but.

Chapitre premier

Quels ont t les commencements

des villes en gnral,

et surtout ceux de Rome

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Ceux qui connaissent les commencements de Rome, ses lgislateurs, l'ordre qu'ils y tablirent, ne seront pas tonns que tant de vertu s'y soit soutenue pendant plusieurs sicles, et que cette [p. 35] Rpublique soit parvenue ensuite ce degr de puissance auquel elle arriva. Pour parler d'abord de son origine: toutes les villes sont fondes ou par des naturels du pays ou par des trangers.

Le peu de sret que les naturels trouvent vivre disperss, l'impossibilit pour chacun d'eux de rsister isolment soit cause de la situation soit cause du petit nombre, aux attaques de l'ennemi qui se prsente, la difficult de se runir temps son approche, la ncessit alors d'abandonner la plupart de leurs retraites qui deviennent le prix des assaillants: tels sont les motifs qui portent les premiers habitants d'un pays btir des villes, pour chapper ces dangers. Ils se dterminent d'eux-mmes, ou par le conseil de celui qui, parmi eux, a le plus d'autorit, habiter ensemble dans un lieu de leur choix, qui offre plus de commodit et de facilit pour s'y dfendre. Ainsi, parmi d'autres exemples qu'on pourrait citer, furent bties Athnes et Venise. La premire qui, sous l'autorit de Thse, ramassa les habitants disperss; la seconde qui se composa de plusieurs peuples rfugis dans les petites les situes la pointe de la mer Adriatique, pour y fuir et la guerre et les barbares qui, lors de la dcadence de l'empire romain, se rpandaient en, Italie. Ces rfugis, d'eux-mmes et sans aucun prince pour les gouverner, commencrent vivre sous les lois qui leur parurent les plus propres maintenir leur nouvel tat. Ils y russirent compltement, la faveur de la longue paix qu'ils durent leur situation sur une mer sans issue, o ne pouvaient aborder ces peuples qui dsolaient l'Italie et qui n'avaient point de forces maritimes pour leur nuire. Aussi, quoique avec un si faible commencement, parvinrent-ils l'tat de puissance o nous les voyons aujourd'hui.

Venons-en la seconde origine des villes: celle o elles sont bties par des trangers.

Ces trangers peuvent tre ou indpendants ou bien sujets d'une rpublique ou d'un prince, qui, pour soulager leurs tats d'une trop grande population ou pour dfendre un pays nouvellement acquis et qu'ils veulent conserver sans dpenses, y envoient des colonies. Le peuple romain fonda beaucoup de villes de cette manire dans l'empire. Quelquefois elles sont bties par un prince, non pour y habiter, mais seulement comme monument de sa gloire. Telle Alexandrie fut btie par Alexandre. Mais comme toutes ces villes sont, leur origine, prives de leur libert, rarement parviennent-elles faire de grands progrs et compter au nombre des grandes puissances. Telle fut l'origine de Florence Machiavel raconte les origines de Florence dans les Histoires florentines, II, 2.. Soit qu'elle ait t btie par des soldats de Sylla, ou par les habitants du mont Fiesole, attirs sur la plaine que baigne l'Arno par [p. 36] les douceurs de la paix dont on jouit si longtemps sous Auguste. Btie sous la protection de l'empire romain, Florence ne put recevoir en commenant d'autre agrandissement que celui qu'elle tenait de la volont de son matre.

Les fondateurs de cit sont indpendants quand ce sont des peuples qui, sous la conduite d'un chef ou bien d'eux-mmes, contraints de fuir la peste, la guerre ou la famine qui dsolent leur pays natal, en cherchent un nouveau. Ceux-ci ou habitent les villes du pays dont ils s'emparent, comme fit Mose, ou bien ils en btissent de nouvelles comme fit ne. C'est dans ce cas qu'on est mme d'apprcier les talents du fondateur, et la russite de son ouvrage, qui a des succs plus ou moins brillants, suivant que celui-ci, en la fondant, dveloppa plus de sagesse et d'habilet. L'une et l'autre se reconnaissent au choix du lieu o il assoit sa ville et la nature des lois qu'il lui donne.

On sait que les hommes travaillent ou par besoin ou par choix. On a galement observ que la vertu a plus d'empire l o le travail est plus de ncessit que de choix. Or, d'aprs ce principe, ne serait-il pas mieux de prfrer, pour la fondation d'une ville, des lieux striles o les hommes, forcs tre laborieux, moins adonns au repos, fussent plus unis et moins exposs, par la pauvret du pays, des occasions de discorde? Telle a t Raguse, et plusieurs autres villes bties sur un sol ingrat. La prfrence donne un pareil site serait sans doute et plus utile et plus sage, si tous les autres hommes, contents de ce qu'ils possdent entre eux, ne dsiraient pas commander d'autres. Or, comme on ne peut se dfendre de leur ambition que par la puissance, il est ncessaire dans la fondation d'une ville d'viter cette strilit de pays; il faut au contraire se placer dans des lieux o la fertilit donne des moyens de s'agrandir et de prendre des forces pour repousser quiconque voudrait attaquer et pour anantir qui voudrait s'opposer notre accroissement de puissance.

Quant l'oisivet que la richesse d'un pays tend dvelopper, c'est aux lois forcer tellement au travail que nulle asprit de site n'y et autant ncessit Lorsque l'aridit du site n'est pas l pour le faire.. Il faut imiter ces lgislateurs habiles et prudents, qui ont habit des pays trs agrables, trs fertiles, et plus capables d'amollir les mes que de les rendre propres l'exercice des vertus. Aux douceurs et la mollesse du climat, ils ont oppos, pour leurs guerriers, par exemple, la rigueur d'une discipline svre et des exercices pnibles; de manire que ceux-ci sont devenus meilleurs soldats que la nature n'en fait natre mme dans les lieux les plus pres et les plus striles. Parmi ces lgislateurs, on peut citer les fondateurs du royaume d'gypte. [p. 37] Malgr les dlices la fertilit. du pays, la svrit des institutions y forma des hommes excellents; et si la haute antiquit n'en avait pas enseveli les noms, on verrait combien ils taient suprieurs cet Alexandre et tant d'autres, dont le souvenir est plus rcent. Peut-on examiner le gouvernement du sultan et la discipline de cette milice des Mamelouks, avant qu'elle et t dtruite par le sultan Selim Slim 1er, sultan de Turquie de 1512 1520, annexa l'gypte en 1517., sans se convaincre combien ils redoutaient cette oisivet; sans admirer par quels nombreux exercices, par quelles lois svres ils prvenaient dans leurs soldats cette mollesse, fruit naturel de la douceur de leur climat? Je dis donc que pour btir une ville, le lieu le plus fertile est celui qu'il est le plus sage de choisir, surtout quand on peut, par des lois, prvenir les dsordres qui peuvent natre de leur site mme.

Alexandre le Grand voulant btir une ville pour servir de monument sa gloire, l'architecte Dinocrate lui fit voir comment il pourrait la placer sur le mont Athos. Ce lieu, dit-il, prsente une situation trs forte; la montagne pourrait se tailler de manire donner cette ville une forme humaine, ce qui la rendrait une merveille digne de la puissance du fondateur. Alexandre lui ayant demand: De quoi vivront les habitants? Je n'y ai pas pens, rpond navement l'architecte. Alexandre se mit rire; et laissant l cette montagne, il btit Alexandrie o les habitants devaient se plaire, par la beaut la fertilit. du pays et les avantages que lui procurait le voisinage de la mer et du Nil.

Si on est de l'opinion qu'ne est le premier fondateur de Rome, cette ville peut tre compte au nombre de celles qui ont t bties par des trangers; et si c'est Romulus, elle doit tre mise au rang de celles bties par des naturels du pays. Dans tous les cas, on la reconnatra, ds le commencement, libre et indpendante. On verra aussi (comme nous le dirons plus bas) combien d'institutions svres les lois de Romulus, de Numa et autres, ont contraint les habitants; en sorte que ni la fertilit du pays, ni la proximit de la mer, ni les nombreuses victoires, ni l'tendue de leur empire, ne purent la corrompre pendant plusieurs sicles, et y maintinrent plus de vertus qu'on n'en a jamais vues dans aucune autre rpublique. Les grandes choses qu'elle a opres, et dont Tite-Live nous a conserv la mmoire, ont t l'ouvrage du gouvernement ou celui des particuliers; elles ont trait aux affaires du dedans ou celles du dehors.

Je commencerai par parler des oprations du gouvernement dans l'intrieur que je croirai les plus dignes de remarque et j'en indiquerai les rsultats. Ce sera le sujet des discours qui composeront ce premier livre ou cette premire partie.

Chapitre II

Des diffrentes formes de rpubliques.

Quelles furent celles de la Rpublique romaine

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Je veux mettre part ce qu'on pourrait dire des villes qui, ds leur naissance, ont t soumises une puissance trangre; je parlerai seulement de celles dont l'origine a t indpendante, et qui se sont d'abord gouvernes par leurs propres lois, soit comme rpubliques, soit comme monarchies. Leur constitution et leurs lois ont diffr comme leur origine. Les unes ont eu, en commenant ou peu de temps aprs, un lgislateur qui, comme Lycurgue chez les Lacdmoniens, leur a donn, en une seule fois, toutes les lois qu'elles devaient avoir. Les autres, comme Rome, ont d les leurs au hasard, aux vnements, et les ont reues plusieurs reprises.

C'est un grand bonheur pour une rpublique d'avoir un lgislateur assez sage pour lui donner des lois telles que, sans avoir besoin d'tre corriges, elles puissent y maintenir l'ordre et la paix. Sparte observa les siennes plus de huit cents ans sans les altrer et sans prouver aucune commotion dangereuse. Malheureuse, au contraire, la Rpublique qui, n'tant pas tombe d'abord dans les mains d'un lgislateur habile et prudent, est oblige de rformer elle-mme ses lois. Plus malheureuse encore, celle qui s'est plus loigne en commenant d'une bonne constitution; et celle-l en est plus loigne dont les institutions vicieuses contrarient la marche, l'cartent du droit chemin qui conduit au but, parce qu'il est presque impossible qu'aucun vnement ne l'y fasse rentrer. Les Rpubliques, au contraire, qui, sans avoir une constitution parfaite, mais dont les principes naturellement bons sont encore capables de devenir meilleurs, ces Rpubliques, dis-je, peuvent se perfectionner l'aide des vnements.

Il est bien vrai que ces rformes ne s'oprent jamais sans danger parce que, jamais, la multitude ne s'accorde sur l'tablissement d'une loi nouvelle tendant changer la constitution de l'tat, sans tre fortement frappe de la ncessit de ce changement. Or, cette ncessit ne peut se faire sentir sans tre accompagne de danger. La Rpublique peut tre aisment dtruite avant d'avoir perfectionn sa constitution. Celle de Florence en est une preuve complte. Rorganise aprs la rvolte d'Arezzo, en 1502, et renverse aprs la prise de Prato, en 1512 En 1502, Florence cra un gonfalonier vie la tte du gouvernement et choisit Pierre Soderini (1452-1522) pour remplir cette charge. En 1512, la prise et le sac de Prato par les Espagnols entranent la chute de Soderini et de la rpublique et le retour des Mdicis au pouvoir..

[p. 39] M'tant propos de dterminer la sorte de gouvernement tablie Rome, et de parler des vnements qui le conduisirent sa perfection, je dois d'abord faire observer que la plupart de ceux qui ont crit sur la politique distinguent trois sortes de gouvernement: le monarchique, l'aristocratique, et le dmocratique, et que les lgislateurs d'un peuple doivent choisir entre ces formes celle qui leur parat le plus convenable d'employer.

D'autres auteurs, plus sages selon l'opinion de bien des gens, comptent six espces de gouvernements, dont trois trs mauvais, trois qui sont bons en eux-mmes, mais si sujets se corrompre qu'ils deviennent tout fait mauvais. Les trois bons sont ceux que nous venons de nommer. Les trois mauvais ne sont que des dpendances et des dgradations des trois autres, et chacun d'eux ressemble tellement celui auquel il correspond que l'on passe facilement de l'un l'autre. Ainsi la monarchie devient tyrannie, l'aristocratie dgnre en oligarchie, et le gouvernement populaire se rsout en une licencieuse oligarchie en licence.. En sorte qu'un lgislateur qui donne l'tat qu'il fonde un de ces trois gouvernements le constitue pour peu de temps, car nulle prcaution ne peut empcher que chacune de ces espces, rputes bonnes, quelle qu'elle soit, ne dgnre dans son espce correspondante: tant le bien et le mal ont ici entre eux et d'attraits et de ressemblance.

Le hasard a donn naissance toutes les espces de gouvernements parmi les hommes. Les premiers habitants furent peu nombreux, et vcurent pendant un temps, disperss, la manire des btes. Le genre humain venant s'accrotre, on sentit le besoin de se runir, de se dfendre; pour mieux parvenir ce dernier but, on choisit le plus fort, le plus courageux; les autres le mirent leur tte, et promirent de lui obir. l'poque de leur runion en socit, on commena connatre ce qui est bon et honnte, et le distinguer d'avec ce qui est vicieux et mauvais. On vit un homme nuire son bienfaiteur. Deux sentiments s'levrent l'instant dans tous les curs: la haine pour l'ingrat, l'amour pour l'homme bienfaisant. On blma le premier; et on honora d'autant plus ceux qui, au contraire, se montrrent reconnaissants que chacun d'eux sentit qu'il pouvait prouver pareille injure. Pour prvenir de tels maux, les hommes se dterminrent faire des lois, et ordonner des punitions pour qui y contreviendrait. Telle fut l'origine de la justice.

peine fut-elle connue qu'elle influa sur le choix du chef qu'on eut nommer. On ne s'adressa ni au plus fort, ni au plus brave, mais au plus sage et au plus juste. Comme la souverainet [p. 40] devint hrditaire et non lective, les enfants commencrent dgnrer de leurs pres. Loin de chercher les galer en vertus, ils ne firent consister l'tat de prince qu' se distinguer par le luxe, la mollesse et le raffinement de tous les plaisirs. Aussi, bientt le prince s'attira la haine commune. Objet de haine, il prouva de la crainte; la crainte lui dicta les prcautions et l'offense; et l'on vit s'lever la tyrannie. Tels furent les commencements et les causes des dsordres, des conspirations, des complots contre les souverains. Ils ne furent pas ourdis par les mes faibles et timides; mais par ceux des citoyens qui, surpassant les autres en grandeur d'me, en richesse, en courage, se sentaient plus vivement blesss de leurs outrages et de leurs excs.

Sous des chefs aussi puissants, la multitude s'arma contre le tyran, et aprs s'en tre dfait, elle se soumit ses librateurs. Ceux-ci, abhorrant jusqu'au nom de prince, composrent eux-mmes le gouvernement nouveau. Dans le commencement, ayant sans cesse prsent le souvenir de l'ancienne tyrannie, on les vit, fidles observateurs des lois qu'ils avaient tablies, prfrer le bien public leur propre intrt, administrer, protger avec le plus grand soin et la Rpublique et les particuliers. Les enfants succdrent leurs pres. Ne connaissant pas les changements de la fortune, n'ayant jamais prouv ses revers, souvent choqus de cette galit qui doit rgner entre citoyens, on les vit livrs la cupidit, l'ambition, au libertinage et, pour satisfaire leurs passions, employer, mme, la violence. Ils firent bientt dgnrer le gouvernement aristocratique en une tyrannie oligarchique. Ces nouveaux tyrans prouvrent bientt le sort du premier. Le peuple, dgot de leur gouvernement, fut aux ordres de quiconque voulut les attaquer; et ces dispositions produisirent bientt un vengeur qui fut assez bien second pour les dtruire.

Le souvenir du prince et des maux qu'il avait faits tait encore trop rcent pour qu'on chercht le rtablir. Ainsi donc, quoiqu'on et renvers l'oligarchie, on ne voulut pas retourner sous le gouvernement d'un seul. On se dtermina pour le gouvernement populaire, et par l on empcha que l'autorit ne tombt entre les mains d'un prince, ou d'un petit nombre de grands. Tous les gouvernements, en commenant, ont quelque retenue M. dit: prestige., aussi l'tat populaire se maintenait-il pendant un temps, qui ne fut jamais trs long et qui durait ordinairement peu prs autant que la gnration qui l'avait tabli. On en vint bientt cette espce de licence o l'on blessait galement et le public et les particuliers. Chaque individu ne consultant que ses passions, il se commettait tous les jours mille injustices. Enfin, press par la [p.41] ncessit, ou dirig par les conseils d'un homme de bien, le peuple chercha les moyens d'chapper cette licence. Il crut les trouver en revenant au gouvernement d'un seul; et, de celui-ci, on revint encore la licence, en passant par tous les degrs que l'on avait suivis, de la mme manire et pour les mmes causes que nous avons indiques.

Tel est le cercle que sont destins parcourir tous les tats. Rarement, il est vrai, les voit-on revenir aux mmes formes de gouvernement; mais cela vient de ce que leur dure n'est pas assez longue pour pouvoir subir plusieurs fois ces changements avant d'tre renverss. Les divers maux dont ils sont travaills les fatiguent, leur tent la force, la prudence du conseil, et les assujettissent bientt un tat voisin, dont la constitution se trouve plus saine. Mais s'ils parvenaient viter ce danger, on les verrait tourner l'infini sur ce mme cercle de rvolutions.

Je dis donc que toutes ces espces de gouvernements sont dfectueuses. Ceux que nous avons qualifis de bons durent trop peu. La nature des autres est d'tre mauvais. Aussi les lgislateurs prudents ayant connu les vices de chacun de ces modes, pris sparment, en ont choisi un qui participt de tous les autres, et l'ont jug plus solide et plus stable. En effet, quand, dans la mme constitution, vous runissez un prince, des grands, et la puissance du peuple, chacun de ces trois pouvoirs s'observe surveille. rciproquement.

Parmi les hommes justement clbres pour avoir tabli une pareille constitution, celui qui mrite le plus d'loges, sans doute, est Lycurgue. Il organisa de telle manire celle de Sparte qu'en donnant ses rois, aux grands et au peuple, chacun sa portion d'autorit et de fonctions, il fit un gouvernement qui se soutint plus de huit cents ans dans la plus parfaite tranquillit, et qui valut ce lgislateur une gloire infinie.

Le sort des lois donnes Athnes par Solon Solon (v. 640-v. 558 av. J.-C.) donna Athnes une constitution dmocratique. fut bien diffrent. Celui-ci n'tablit que le gouvernement populaire, et il fut de si courte dure que, avant sa mort, le lgislateur vit natre la tyrannie de Pisistrate. Vainement, quarante ans aprs, les hritiers du tyran furent chasss; vainement Athnes recouvra sa libert, rtablit le gouvernement populaire d'aprs les lois de Solon: celui-ci ne dura pas plus de cent ans, bien que, pour le maintenir, on ft, contre l'insolence des grands et la licence de la multitude, une infinit de lois chappes la prudence