DEPARTEMENT DE BIOLOGIE ANIMALE
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UNIVERSITE D’ANTANANARIVO
FACULTE DES SCIENCES
DEPARTEMENT DE BIOLOGIE ANIMALE
MEMOIRE
POUR L’OBTENTION DU
DIPLOME DE MASTER
Parcours : BIOLOGIE DE LA CONSERVATION ANIMALE
Mention : BIOLOGIE
Domaine : SCIENCES ET TECHNOLOGIES
CONTRIBUTION A L’ETUDE DES CARNIVORES
DE LA FORET D’ANJANAHARIBE,
DANS LE PARC NATUREL DE MAKIRA,
NORD-EST DE MADAGASCAR
Présenté par :
Monsieur Ntsoa RAMARONDRAINIBE
Devant le JURY composé de :
Président : Madame Noromalala RASOAMAMPIONONA RAMINOSOA
Professeur d’ESR
Rapporteur : Monsieur Aristide ANDRIANARIMISA
Professeur d’ESR
Examinateurs : Madame Julie RANIVO RAKOTOSON
Maître de Conférences
Monsieur Zafimahery RAKOTOMALALA
Maître de Conférences
Soutenu publiquement le 20 Janvier 2016
ii
UNIVERSITE D’ANTANANARIVO
FACULTE DES SCIENCES
DEPARTEMENT DE BIOLOGIE ANIMALE
MEMOIRE
POUR L’OBTENTION DU
DIPLOME DE MASTER
Parcours : BIOLOGIE DE LA CONSERVATION ANIMALE
Mention : BIOLOGIE
Domaine : SCIENCES ET TECHNOLOGIES
CONTRIBUTION A L’ETUDE DES CARNIVORES
DE LA FORET D’ANJANAHARIBE,
DANS LE PARC NATUREL DE MAKIRA,
NORD-EST DE MADAGASCAR
Présenté par :
Monsieur Ntsoa RAMARONDRAINIBE
Devant le JURY composé de :
Président : Madame Noromalala RASOAMAMPIONONA RAMINOSOA
Professeur d’ESR
Rapporteur : Monsieur Aristide ANDRIANARIMISA
Professeur d’ESR
Examinateurs : Madame Julie RANIVO RAKOTOSON
Maître de Conférences
Monsieur Zafimahery RAKOTOMALALA
Maître de Conférences
Soutenu publiquement le 20 Janvier 2016
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i
REMERCIEMENTS
Le présent travail a été possible grâce à la collaboration de plusieurs personnes et au
soutien d’entités et organismes à qui je tiens à faire part de ma reconnaissance.
Mes sincères remerciements s’adressent donc :
Aux entités de l’Université d’Antananarivo d’avoir autorisé la soutenance, en
particulier la Faculté des Sciences de l’Université d’Antananarivo à travers son Doyen,
Monsieur Marson RAHERIMANDIMBY, Professeur Titulaire, le Département de Biologie
Animale et son Chef du Département, Monsieur Félix RAKOTONDRAPARANY, Maître de
Conférences.
Madame Noromalala RASOAMAMPIONONA RAMINOSOA, Professeur d’ESR, pour
avoir accepté de siéger en tant que président du jury.
Monsieur Aristide ANDRIANARIMISA, Professeur d’ESR, encadreur et rapporteur,
pour ses conseils avisés, ses orientations ainsi que ses critiques constructives. Malgré ses
multiples responsabilités, il n’a pas ménagé son temps pour m’appuyer et m’accompagner dans
l’élaboration et la conception de ce travail afin d’en tirer le meilleur.
Madame Julie RANIVO RAKOTOSON, Maître de Conférences et Monsieur Zafimahery
RAKOTOMALALA, Maître de Conférences, membres du jury et de la commission de lecture,
qui ont bien voulu me faire l’honneur d’examiner, d’apprécier et de corriger ce travail.
Wildlife Conservation Society Madagascar (WCS), en la personne de Madame Alison
CLAUSEN et de Madame Nalisoa RANDRIAMBOLOLONA qui m’ont offert l’opportunité de
réaliser les travaux de recherche au sein du Parc Naturel de Makira et toute l’équipe de WCS
Maroantsetra en la personne de Monsieur Stevens RAMAROSON, Directeur du Parc Naturel
de Makira, ainsi que Monsieur Vonjy ANDRIANJAKARIVELO pour son aide et son assistance
dans la logistique et la réalisation des travaux sur le terrain.
Fondation pour les Aires Protégées et la Biodiversité de Madagascar (FAPBM) sans
qui la réalisation de cette recherche a été impossible.
Le Ministère de l’Environnement, de l’Ecologie, de la Mer et des Forêts pour avoir
autorisé la réalisation des recherches sur terrain.
ii
Tous les enseignants, les personnels administratifs et techniques au sein du
Département de Biologie Animale, Faculté des Sciences, Université d’Antananarivo pour la
mise en disposition des formations académiques et de leurs services.
Ma reconnaissance est pareillement destinée à :
Ma famille pour l’inestimable soutien dont elle a fait preuve durant toutes mes études.
VHF ANDAPARATY pour son accueil et sa sympathie ainsi que les Assistants de
recherche et Guides locaux lors des travaux sur le terrain.
Et Prisca RAZAFY
iii
RESUME
Du fait de leurs fonctions en tant que prédateurs et de leurs influences sur les populations
proies, les Carnivores forment un composant crucial dans la conservation de la structure d’un
écosystème. La présente étude, axée sur les Carnivores malgaches, a été réalisée par le biais de
la méthode de piégeage photographique dans la forêt d’Anjanaharibe du Parc Naturel de Makira
du mois d’avril à juillet 2015. Sur un échantillonnage de 46 jours, 16 caméras ont été utilisées
et reparties en 8 stations formant des grilles, pour un total de 616 nuits pièges. Les 4 espèces
natives Cryptoprocta ferox, Fossa fossana, Galidictis fasciata et Salanoia concolor ainsi que
les 3 espèces invasives Felis silvestris, Canis familiaris et Viverricula indica ont été recensées.
Fossa fossana et Salanoia concolor ont présenté les indices d’abondance les plus élevés, suivis
de Cryptoprocta ferox. Les résultats semblent indiquer une fréquentation relativement
significative de la lisière forestière par les Eupleridae et la structure de la forêt n’influencerait
pas significativement leur présence. Toutefois, la présence humaine qui favorise la présence
des Carnivores introduits, réduit le taux de succès de piégeage photographique des Eupleridae
et affecte négativement la répartition de ces derniers : un phénomène d’évitement est ainsi
apparent. Pour maximiser les résultats obtenus, il serait convenable de réaliser une plus longue
durée d’échantillonnage avec un plus grand nombre de caméras à haute définition permettant
des études quantitatives.
Mots-clés : Carnivores, piégeage photographique, lisière, Eupleridae, présence humaine,
évitement.
iv
ABSTRACT
Due to their functions as predators and their influences on prey populations, Carnivores
form a crucial component on ecosystem structure conservation. The present study, based on
Malagasy Carnivores, was carried out through the camera trapping method in the Anjanaharibe
forest of Makira Natural Park from April to July 2015. On a sampling of 46 days, 16 cameras
were used and divided in 8 stations forming grids, for a total of 616 trap nights. The 4 native
species Cryptoprocta ferox, Fossa fossana, Galidictis fasciata and Salanoia concolor and 3
invasive species Felis silvestris, Canis familiaris and Viverricula indica were recorded. Fossa
fossana and Salanoia concolor have shown the highest indices of abundance, followed by
Cryptoprocta ferox. The results seem to indicate relatively significant attendance of the forest
edge by the Eupleridae and the structure of the forest would not significantly influence their
presence. However, the human presence which favors the presence of introduced Carnivores,
reduces the camera trapping success rate of the Eupleridae and affects negatively the
distribution of these latter: an avoidance phenomenon is thus apparent. In order to maximize
the results, it would be suitable to make a longer sampling time using a greater number of high-
definition cameras allowing quantitative studies.
Keywords : Carnivores, camera trapping, edge, Eupleridae, human presence, avoidance.
v
TABLE DES MATIERES
Liste des figures ...................................................................................................................... vii
Liste des tableaux ................................................................................................................... vii
Liste des annexes .................................................................................................................... viii
Glossaire ................................................................................................................................... ix
INTRODUCTION .................................................................................................................... 1
I. MILIEU ET SITE D’ETUDE ....................................................................................... 4
I.1. Situation géographique ..................................................................................................... 4
I.2. Climat ............................................................................................................................... 5
I.3. Végétation ......................................................................................................................... 5
I.4. Faune ................................................................................................................................ 6
I.5. Pressions et menaces ........................................................................................................ 6
I.6. Site d’étude ....................................................................................................................... 7
II. MATERIELS ET METHODES ................................................................................... 8
II.1. Matériels biologiques ...................................................................................................... 8
II.1.1 Position systématique ................................................................................................ 8
II.1.2 Distribution ................................................................................................................ 9
II.1.3. Statuts de conservation et menaces .......................................................................... 9
II.2. Collecte de données ....................................................................................................... 10
II.2.1. Période d’étude ....................................................................................................... 10
II.2.2. Méthode d’inventaire .............................................................................................. 10
II.2.3. Méthode d’estimation de l’abondance .................................................................... 11
II.2.4. Etude du rythme d’activité des Carnivores............................................................. 12
II.2.5. Etude de l’habitat .................................................................................................... 12
II.2.6. Estimation de l’occupation de l’habitat .................................................................. 14
II.2.7. Influence de l’habitat sur la présence des Carnivores ............................................ 14
III. RESULTATS ET INTERPRETATIONS ................................................................. 15
vi
III.1. Inventaire des espèces de Carnivores .......................................................................... 15
III.2. Indices d’abondance des espèces de Carnivores .......................................................... 16
III.3. Rythme d’activité ......................................................................................................... 17
III.4. Taux d’occupation de l’habitat .................................................................................... 18
III.5. Etude de l’habitat préférentiel des Carnivores ............................................................. 19
III.6. Evaluation des pressions et menaces ........................................................................... 20
IV. DISCUSSION ............................................................................................................... 22
V. CONCLUSION ............................................................................................................ 29
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES ............................................................................. 31
SITES WEB CITES ............................................................................................................... 35
vii
Liste des figures
Figure 1. Localisation géographique du Parc Naturel de Makira ............................................ 4
Figure 2. Courbe climatique de la forêt de Makira du mois d’août 2014 au mois de
juillet 2015 ................................................................................................................ 5
Figure 3. Localisation géographique de la zone d’étude ......................................................... 7
Figure 4. Distribution géographique des espèces natives rencontrées à Makira, Madagascar 9
Figure 5. Schéma simplifié de la disposition d’un plot botanique d’une station ................... 13
Figure 6. Photos des espèces natives repertoriées pendant l’étude ........................................ 15
Figure 7. Modèle d’activité des trois espèces communes ...................................................... 18
Figure 8. Modèle de prédiction de préférence d’habitat des Carnivores endémiques dans les
8 stations ................................................................................................................. 20
Figure 9. Présence de grandes proportions d’Afromomum dans la station 2 ......................... 21
Liste des tableaux
Tableau 1. Statuts UICN des Carnivores natifs susceptibles d’être rencontrés à Makira
(IUCN, 2015) ........................................................................................................ 10
Tableau 2. Espèces répertoriées par station ............................................................................. 16
Tableau 3. Taux de succès de piégeage des espèces répertoriées ........................................... 17
Tableau 4. Estimation de la proportion de l’occupation du site par les Carnivores ................ 19
Tableau 5. Corrélation entre les paramètres écologiques et la présence des espèces natives . 19
viii
Liste des annexes
Annexe 1. Données climatiques de la forêt de Makira d’août 2014 à juillet 2015 ..................... I
Annexe 2. Disposition d’une caméra de la station 2 ................................................................... I
Annexe 3. Informations sur les stations d’étude ....................................................................... II
Annexe 4. Photo de la réalisation du plot botanique de la station 3 ......................................... II
Annexe 5. Réalisation de l’étude de la structure végétale ....................................................... III
Annexe 6. Probabilités d’occupation des différentes stations .................................................. III
Annexe 7. Paramètres écologiques pris en compte pour la réalisation des plots botaniques... IV
Annexe 8. Stations potentiellement favorables aux Eupleridae ............................................... IV
Annexe 9. Présences humaines dans les stations 5 et 8 ............................................................ V
Annexe 10. Présence de Galidia elegans .................................................................................. V
Annexe 11. Présence d’Eupleres goudotii ................................................................................ V
Annexe 12. Exploitation de la litière par Salanoia concolor dans la station 2 ........................ VI
ix
Glossaire
Espèce autochtone ou native : espèce que l’on trouve naturellement dans un endroit.
Espèce endémique : espèce native d’une région particulière et inconnue nulle part ailleurs.
1
INTRODUCTION
Les Carnivores appartiennent aux groupes d’animaux susceptibles d’influencer tout un
écosystème par leur position au sommet de la chaine trophique et de leurs influences directes
ou indirectes vis-à-vis des populations proies (Paine, 1969). Du fait de leur faible densité et leur
taille plutôt grande nécessitant un large domaine vital, les Carnivores sont l’un des groupes les
plus enclins à la perte et la dégradation des habitats forestiers (Crooks, 2002 ; Sergio et al.,
2008). Ces pressions anthropiques, incluant également la chasse et la présence d’espèces
exotiques, affectent négativement les populations de Carnivores et font qu’elles sont sujettes à
de grands risques de perturbation (Gerber et al., 2012a). De ce fait, plusieurs espèces de
Carnivores peuvent être utiles comme indicateurs de la perturbation de l’habitat (Soulé &
Terborgh, 1999). La présence de certaines populations de Carnivores peut ainsi constituer un
indicateur de paysages non fragmentés et peut refléter une riche biodiversité globale (Dalerum
et al., 2008). C’est dans ce sens que les Carnivores entrent dans la catégorie d’espèces pouvant
servir d’« espèces parapluies ». Aussi, vu leurs fonctions et influences sur la structure d’un
écosystème, ils formeraient un composant crucial pour tout plan de conservation (Noss et al.,
1996). Leur conservation serait donc des plus efficientes pour garder l’intégrité écologique de
tout un écosystème.
A Madagascar, la fragmentation des forêts au cours des 50 dernières années (Harper et
al., 2007) a facilité l'occupation des Carnivores exotiques et a présenté des impacts négatifs aux
Carnivores natifs (Gerber et al., 2012a). Selon Gerber et al. (2012b), la diversité et la densité
en Carnivores natifs seraient faibles dans les forêts dégradées de l’Est par rapport aux
Carnivores introduits (chiens domestiques Canis familiaris, chat sauvages et exotiques Felis
catus et Felis silvestris, et civette indienne Viverricula indica). Les interactions concurrentielles
notamment la compétition à l’utilisation des ressources entre Carnivores exotiques et natifs
peuvent conduire à une disparition locale de ces derniers (Mitchell & Banks, 2005). De plus, la
présence des Carnivores exotiques qui sont écologiquement similaires aux Carnivores natifs
peut aussi modifier la dynamique de la prédation, surtout en cas de chevauchement de niche
écologique entre les deux groupes. Ceci se traduit souvent par des changements temporels ou
spatiaux des activités au détriment des espèces endémiques (Palomares & Caro, 1999 ; Phillips
et al., 2007 ; Hunter & Caro, 2008 ; Vanak & Gompper, 2010).
Parmi les 13 espèces de Carnivores vivant à Madagascar, les 10 espèces natives
appartiennent à la famille endémique des Eupleridae (Wozencraft, 2005). Malgré cette
2
appartenance à une seule famille, elles présentent des diversités, tant au niveau de leur
répartition que leur organisation. Ces différences, couplées avec leurs mœurs discrètes, en font
qu’ils sont parmi les taxons faunistiques relativement difficiles à étudier. Ceci englobe l’état
général des Carnivores de la Grande île témoignant des lacunes dans la compréhension de leur
mode de vie. L’exemple le plus remarquable concerne l’espèce Salanoia durelli décrite en
2010, rencontrée au niveau des marais du Lac Alaotra et qui présente un réel déficit
d’informations du fait de sa rareté et de sa distribution seulement connue dans ce secteur
(Durbin et al., 2010). Toutefois, Mungotictis decemlineata du Centre Ouest de Madagascar et
Galidictis grandidieri du bush épineux du Sud ont permis de renflouer plusieurs informations
du fait de leur organisation sociale et leur répartition géographique plutôt restreinte dans une
certaine localité (Goodman, 2012). De même, la compréhension de l’emblématique
Cryptoprocta ferox est facilitée par sa large distribution dans toutes les formations forestières
du pays, en particulier celles du Centre Ouest, ainsi qu’à sa densité plutôt élevée notamment
dans la forêt de Kirindy (Rasoloarison et al., 1995 ; Hawkins et al., 2008). Mais cette espèce
reste cependant moins abondante dans les forêts sempervirentes de l’Est du pays (Gerber et al.,
2010a) comme ça pourrait être le cas de tous les Carnivores malgaches.
L’insuffisance des actions de conservation directes en faveur des Carnivores malgaches
est imputable au défaut des informations bioécologiques leur concernant car la détection de ces
derniers lors de l’inventaire ou le suivi est l’une des tâches assez difficiles vu leurs mœurs et
comportements (WCS, 2009). De ce fait, il est primordial d’assurer des études préliminaires
comme l’inventaire des espèces et l’estimation de l’abondance de chaque espèce rencontrée
dans une aire de conservation.
L’échantillonnage des Carnivores présents dans la partie orientale de Madagascar par
l’intermédiaire des pièges photographiques a commencé par les travaux pionniers de Gerber en
2007 dans les forêts sempervirentes du Parc National de Ranomafana et ses alentours. Puis
s’ensuivaient les études réalisées depuis 2008 dans les forêts de basses et moyennes altitudes
du Parc Naturel de Makira et les forêts du Parc National de Masoala par Farris. Les travaux
réalisés par ce dernier dans la partie Nord Est de Madagascar ont permis de recenser les espèces
de Carnivores présentes dans le bloc forestier de Makira (Farris & Kelly, 2011).
En vue de répondre aux questions de l’influence des habitats et des paysages sur la
communauté de Carnivores, cette étude a été réalisée dans le Parc Naturel de Makira (15°28’
S, 49°27’ E), un grand reliquat de forêt encore intact situé dans la partie Nord-Est de
Madagascar. Il représente probablement une partie significative de Madagascar en terme de
3
biodiversité, étant donné sa position géographique, la diversité de zones bioclimatiques ainsi
que la variété de formations géologiques qu’il contient (Rakotomalala et al., 2003), avec une
vingtaine d'espèces de lémuriens (Rasolofoson et. al., 2007). Il est aussi caractérisé par une
forte richesse spécifique en Carnivores dans les forêts de l’Est ou même dans tout Madagascar
avec six espèces natives dont l’espèce rare Salanoia concolor (Farris & Kelly, 2011). Trois
espèces introduites sont également présentes ainsi que l’espèce de chat sauvage localement
dénommée « Fitoaty » qui y a été décrite comme étant plus grand que Cryptoprocta ferox
(Farris et al., 2014) mais dont l’appartenance est encore à vérifier. L’importance d’y continuer
les recherches est ainsi primordiale pour l’évaluation de la dynamique des Carnivores en marge
d’assurer des plans de conservation efficaces pour ces derniers et leur habitat.
Ainsi, l’objectif de cette recherche est d’analyser l’abondance et la sélection de l’habitat
des Carnivores. Pour ce faire, le « piégeage photographique » a été utilisé. Celui-ci est une des
méthodes indirectes les plus recommandées pour inventorier ce taxon suite à ses mœurs
cryptiques (Lyra-Jorge et al., 2008). De plus, il est utilisé à la fois pour l’étude des espèces non
identifiables individuellement afin d’estimer la taille de la population et d’autres aspects de
l’écologie de ces espèces, mais aussi pour estimer la densité des animaux dont les individus
sont identifiables photographiquement (Carbone et al., 2001).
Pour atteindre cet objectif, les objectifs spécifiques établis sont :
- Inventorier les espèces présentes dans le site d’étude.
- Estimer l’indice d’abondance de chaque espèce répertoriée dans le but de déterminer le
niveau d’occupation des types d’habitat par les Carnivores endémiques.
L’hypothèse nulle émise est que : les Carnivores ne présentent pas de préférences entre
forêts primaires et dégradées.
- Déterminer si les paramètres écologiques comme le recouvrement et la hauteur de la
canopée, les caractéristiques du substrat ainsi que l’épaisseur de la litière pourraient
influencer de manière directe ou indirecte la présence des espèces dans le site d’étude.
L’hypothèse nulle émise est que : la répartition des Carnivores dans un habitat naturel
n’est pas fonction de la structure de la forêt.
- Essayer d’évaluer les éventuelles pressions et menaces pouvant peser sur la
communauté des Carnivores ainsi que leur répartition.
4
I. MILIEU ET SITE D’ETUDE
I.1. Situation géographique
La présente étude a été réalisée dans le Parc Naturel de Makira (Figure 1), localisé au
Nord-Est de Madagascar et géré par la Wildlife Conservation Society Madagascar (WCS).
Etendu sur 376 156 ha de forêt intacte (WCS, 2004) en plus de 351 037 ha de forêt de la zone
tampon gérée par les communautés de base (Farris et al., 2012), ce bloc forestier représente la
plus grande aire protégée de Madagascar et joue un rôle important en tant que réservoir et source
d’eau du Nord-Est. Le Parc Naturel de Makira couvre une gamme d’altitude de 300 à 1 447 m
et est traversé dans sa partie Est par la rivière d’Antainambalana (Farris et al., 2012). La richesse
biologique de cette région, combinée avec celle du Parc National de Masoala, forment la zone
ayant la plus de diversité faunistique et floristique de Madagascar (Crowley & Holmes, 2007).
Figure 1. Localisation géographique du Parc Naturel de Makira (Source : WCS)
5
I.2. Climat
Le climat est de type tropical chaud et humide à perhumide. La pluviométrie reste élevée
tout au long de l’année avec de faibles variations de la température (Figure 2). La précipitation
moyenne est de 960,9 mm et la température moyenne se situe entre 25 et 26°C. (Annexe 1).
Figure 2. Courbe climatique de la forêt de Makira du mois d’août 2014 au mois de
juillet 2015 (Source : WCS)
I.3. Végétation
La végétation du bloc forestier de Makira est caractérisée par des forêts primaires denses
et humides, de basses à moyennes altitudes avec un sous-bois variable : épais avec des
végétations serrées inextricables jonchées de lianes ou de bambous lianescents, ou clair avec la
prédominance des fougères herbacées. Cette végétation varie suivant l’affleurement géologique
et pédologique : un revêtement argileux permet un développement normal de la végétation (12
à 20 m de hauteur) tandis qu’un revêtement dur présente une diminution de la taille de la
végétation devenant clairsemée et rabougrie (1 à 4 m de hauteur).
La structure de la forêt présente des variations de strates bien distinctes au niveau des
bas-fonds, des versants et des crêtes. Elle peut être arborée, arbustive, herbacée ou formant une
savane avec quelques massifs forestiers. Ces stratifications sont mal différenciées au niveau des
crêtes des collines très élevées à 1 200 m car les arbres deviennent petits, très tortueux et
rabougris dont la hauteur varie de 2 à 5 m et où les fûts sont très courts allant de 1 à 3 m de
haut. Les formations secondaires sont variables suivant la région et les propriétés du sol : le «
savoka » constitué principalement par les genres Harungana madagascariensis, Aframomum
6
angustifolium, Vernonia sp., Clidemia hirta, Dombeya, Solanum, Ravenala madagascariensis
et les savanes herbeuses peu boisées avec la présence de Dalbergia sp., Comniphora sp. et
Hildegardi sp. (WCS, 2009).
I.4. Faune
La diversité et la richesse faunistique de la forêt de Makira semblent proportionnelles à
son immensité. Elle est l’un des sites à Madagascar où une vingtaine d’espèces de lémuriens
coexistent, représentant plus de 24% des espèces recensées à Madagascar (WCS, 2003 ;
Rasolofoson et al., 2007 ; Radespiel et al., 2008). En outre, Makira est la seule forêt à
Madagascar où trois (03) des six (06) espèces ayant un statut en danger critique de l’UICN
coexistent (Mittermeier et al., 2012) : Varecia rubra, Indri indri, Propithecus candidus. Pour
l’avifaune, les forêts du plateau de Makira figurent parmi les sites classés comme prioritaires
en matière de conservation pour les Oiseaux malgaches avec la présence d’au moins 101
espèces dont 64% sont endémiques de Madagascar (René de Roland et al., 2003). Entre autre,
des espèces rares (Euryceros prevostii), trois espèces de rapaces strictement forestières dont
l'Aigle serpentaire (Eutriorchis astur), l'Autour de Henst (Accipiter henstii) et l'Epervier de
Madagascar (Accipiter madagascariensis), beaucoup d'espèces de sous-bois, un grand nombre
d'espèces terrestres (Mesitornis unicolor) et l'Ibis huppé de Madagascar (Lophotibis cristata).
Pour la faune micro mammalienne, 18 espèces ont été recensées dont 4 rongeurs et 14 espèces
de Lipotyphla parmi lesquelles 13 sont endémiques (Rakotomalala et al., 2003). Quant aux
espèces herpetofauniques, 177 espèces sont recensées dont 61 espèces de reptiles et 116 espèces
d’amphibiens qui sont toutes endémiques de Madagascar (Razafindrasoa et al. 2003). Les plus
remarquables sont les espèces rares ou à distribution restreinte comme le Colubridae
Micropisthodon ochraceus, les espèces quasi-menacées telle le Boa madagascariensis, des
espèces vulnérables comme Acranthophis madagascariensis, Uroplatus lineatus et Discophus
antongili (Razafindrasoa et al. 2003).
I.5. Pressions et menaces
Comme dans la plupart des aires protégées de Madagascar, la menace principale à
Makira est la dégradation et la perte d’habitat. Cette menace s’avère être de plus en plus
accentuée à Makira du fait des passages cycliques des évènements cycloniques et
l’augmentation des activités anthropiques liées à la croissance de la population. La
transformation des forêts en zones de culture et l’exploitation des ressources primaires sont
7
surtout rencontrées dans les zones périphériques du Parc. De plus, l’exploitation des bois
précieux dans sa partie Sud semble marquer la vulnérabilité de cette localité.
I.6. Site d’étude
Avec un relief généralement accidenté, la région d’Anjanaharibe (Figure 3), située dans
la partie Est du Parc, est particulièrement importante du fait de sa localisation le long d’un
couloir critique assurant la liaison entre les différentes portions de l’aire protégée de Makira
(Farris & Kelly, 2011). Elle est limitée au Sud par la rivière d’Antainambalana.
La station d’Antsahabe (15°11’56,5’’ S, 49°37’15,8’’ E), située à environ 30 km à vol
d’oiseau au Nord-Ouest de la ville de Maroantsetra, a été choisie comme site d’étude du fait de
son hétérogénéité. Elle est caractérisée par la présence de forêts naturelles denses et humides
juxtaposées à des forêts dégradées dont les formations secondaires de « savoka ».
Figure 3. Localisation géographique de la zone d’étude (Source : WCS)
8
II. MATERIELS ET METHODES
II.1. Matériels biologiques
II.1.1 Position systématique
La présente étude concerne les espèces de Carnivores susceptibles d’être rencontrées
dans la zone d’étude, suivant la classification de Goodman, 2012 :
Règne : ANIMALIA
Embranchement : CHORDATA
Sous-embranchement : VERTEBRATA
Classe : MAMMALIA
Ordre : CARNIVORA
Famille : VIVERRIDAE FELIDAE CANIDAE
Sous-famille : VIVERRINAE FELINAE CANINAE
Genre : Viverricula Felis Canis
Espèce : Viverricula indica
(Desmarest, 1804)
Felis silvestris
(Schreber, 1775)
Canis familiaris
(Linnaeus, 1758)
Famille : EUPLERIDAE
Sous-famille : EUPLERINAE GALIDINAE
Genre : Cryptoprocta
(Benneth,
1833)
Eupleres
(Doyère,
1835)
Fossa
(Gray,
1865)
Salanoia
(Gray,
1865)
Galidia
(I. Geoffroy
Saint-Hilaire,
1837)
Galidictis
(I. Geoffroy
Saint-Hilaire,
1839)
Espèce : Cryptoprocta
ferox
(Benneth,
1833)
Eupleres
goudotii
(Doyère,
1835)
Fossa
fossana
(Müller,
1776)
Salanoia
concolor
(I. Geoffroy
Saint-
Hilaire,
1837)
Galidia
elegans
(I. Geoffroy
Saint-Hilaire,
1837)
Galidictis
fasciata
(Gmelin,
1788)
9
II.1.2 Distribution
Parmi les espèces de Carnivores natifs de Madagascar, seul Cryptoprocta ferox est
omniprésent dans toutes les formations forestières, tandis que les autres se trouvent confinés
aux différents types de forêts. Parmi celles qui sont présentes à Makira, Fossa fossana et
Galidictis fasciata sont inféodés aux forêts orientales, Salanoia concolor est seulement localisé
sur la partie Nord Est de Madagascar tandis que Eupleres goudotii et Galidia elegans subsistent
dans de petites parties au Nord-Ouest (Figure 4). Par contre, les espèces introduites à
Madagascar Felis silvestris, Canis familiaris et Vivericula indica, sont présentes et largement
distribuées sur presque l’ensemble de Madagascar à l’exception de la dernière qui pourrait ne
pas subsister dans les régions sèches du Sud-Ouest (Goodman, 2012).
Figure 4. Distribution géographique des espèces natives rencontrées à Makira, Madagascar
(Source : rebioma.net)
II.1.3. Statuts de conservation et menaces
Selon la liste rouge de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature
(UICN, 2015), les Eupleridae ont un statut « menacé » à l’exception de Galidia elegans qui est
une espèce à préoccupation mineure (LC) (Tableau 1).
10
Tableau 1. Statuts UICN des Carnivores natifs susceptibles d’être rencontrés à Makira
(IUCN, 2015)
Espèces Cryptoprocta
ferox
Eupleres
goudotii
Fossa
fossana
Galidia
elegans
Galidictis
fasciata
Salanoia
concolor
Statut
UICN
Vulnérable
(VU)
En danger
(EN)
Quasi
menacé
(NT)
Préoccupation
mineure
(LC)
Quasi
menacé
(NT)
Vulnérable
(VU)
Comme les Eupleridae sont inféodés aux habitats forestiers, la perte et la fragmentation
de l’habitat constituent les principales menaces pour la communauté des Carnivores (Goodman,
2012). Celles-ci sont accentuées par la présence humaine.
II.2. Collecte de données
II.2.1. Période d’étude
La présente étude a été réalisée du mois d’avril à juillet 2015. L’échantillonnage a été
mené du 4 juin au 19 juillet, soit 46 jours, pendant la saison froide et humide de la région (Farris
et al., 2015a).
II.2.2. Méthode d’inventaire
Vu la rareté et la discrétion des Carnivores, la méthode de piégeage photographique ou
« camera trapping » (Kelly & Holub, 2008) a été utilisée pour l’inventaire. Chaque station est
constituée d’une paire de caméras de type Moultrie D40 montées en opposition sur les deux
côtés des sentiers et opérationnelles 24h/24 et 7j/7. L’échantillonnage par grille ou « Grid
Sampling » (Gerber et al., 2010a) est la base de cet emplacement. Le type de caméras est conçu
pour être sensible aux mouvements et à la chaleur des animaux, qui déclenche instantanément
la prise des photos grâce à la présence d’un capteur infra-rouge. Afin d’optimiser la prise de
photo, la cadence a été fixé à trois photos par minute suite aux expériences préalables dans la
forêt de Makira (Farris & Kelly, 2011). Pour éliminer les éventuelles interférences des flashs
entre les deux caméras en opposition sur ce point, elles ont été légèrement décalées l’une de
l’autre.
Basé sur des études antérieures de ce type à Madagascar (Hawkins, 2003 ; Kerridge et
al., 2003), les stations ont été espacées de 500-600 m et les caméras ont été montées à 20-30 cm
11
du sol suivant la direction du laser. Celui-ci doit coïncider, de préférence avec le milieu des
sentiers, légèrement clairsemés, à l’exemple de l’une des stations de la forêt dégradée
(Annexe 2). De même, pour maximiser le nombre de photos de Carnivores, les caméras ont été
placées le long de sentiers ou transects préalablement établis (Farris & Kelly, 2011). Ainsi, avec
16 caméras disponibles, ce dispositif d’échantillonnage a permis d’avoir huit stations. Elles sont
subdivisées en 4 premières stations situées le long d’un transect dans la forêt dégradée et 4
autres stations le long d’un transect dans la forêt primaire (Annexe 3). Les deux types de forêts
se trouvent traversées par un petit ruisseau.
La vérification de ces stations a été réalisée tous les 7 à 10 jours en relevant le niveau
des batteries et l’état des cartes mémoires pour assurer leur bon fonctionnement. Toutes les
photos ainsi obtenues enregistrent automatiquement le temps et la date de chaque capture. Les
coordonnées géographiques de chaque station ont été enregistrées en leurs milieux par un GPS
de type GPSmap Garmin 62sc.
II.2.3. Méthode d’estimation de l’abondance
L’indice d’abondance de chaque espèce a été déterminé par le succès du piégeage (TS)
(Kelly, 2008 ; O’Brien et al., 2003). Ce succès de piégeage représente le pourcentage du
nombre total d’évènements photographiques de chaque espèce par rapport au nombre de nuits
pièges (TN) obtenus durant tout l’échantillonnage. Le « nombre de nuits pièges » est défini
comme le nombre total de périodes complètes de 24 h durant lequel au moins une des 2 caméras
est fonctionnelle (Gerber et al., 2010a).
𝑻𝑺 =𝒏
𝑻𝑵× 𝟏𝟎𝟎
n : nombre d’évènements photographique de chaque espèce
TN : nuits pièges
TS : succès de piégeage
Un « événement photographique » est défini par n'importe quel point au cours duquel
un animal déclenche la caméra soit par le mouvement, soit par la chaleur du corps, fournissant
ainsi une à trois photos de cet individu, selon le modèle de la caméra, pendant un laps de temps
d’une minute (Farris et al., 2012).
12
II.2.4. Etude du rythme d’activité des Carnivores
Pour étudier le rythme d’activité de chaque espèce, la période de 24 h a été divisée en 4
points caractérisant chacun une portion de 6 heures afin de faciliter la délimitation des modèles
d’activités selon le rythme biologique. Ces subdivisions sont : la nuit de 0 h à 6 h, la journée de
6 h à 12 h et de 12 h à 18 h, et le soir de 18 h à 0 h.
A chaque évènement photographique, l’heure de capture a été notée et le pourcentage
des présences pour chaque espèce à chaque subdivision a été calculé. Ce pourcentage est le
rapport entre le nombre d’évènements photographiques suivant les subdivisons et le nombre
total d’évènements photographiques pour chaque espèce.
II.2.5. Etude de l’habitat
La méthode des plots botaniques a été utilisée pour caractériser la structure verticale et
horizontale de la forêt où se trouvent les caméras. La surface de relevé délimitée doit être égale
à l’aire minimale en inventaire botanique. Cette aire est définie comme la plus petite surface
dans laquelle la quasi-totalité des espèces sont représentées (Gounot, 1969). Elle est égale à
0,1 ha pour les forêts tropicales (Andriaharimalala, 2005). Ainsi, la surface échantillon est un
rectangle de 50 m x 20 m, soit 1 000 m² (0,1 ha), subdivisé en 10 quadrats de 10 m x 10 m
chacun (Figure 5). Cette surface a été délimitée à l’extérieur par des cordes soutenues à chaque
coin. Un double décamètre de 50 m a été tendu horizontalement le long de la piste passant par
le milieu de la station et 6 cordes de 20 m ont été placées parallèlement à celui-ci tous les 10 m
afin de délimiter chacun des quadrats de 100 m2 (Annexe 4). Les coordonnées géographiques
ont été relevées sur chaque côté des plots.
13
Figure 5. Schéma simplifié de la disposition d’un plot botanique d’une station
La structure verticale qui exprime l’agencement des végétaux dans le plan vertical a
également été étudiée grâce à l’utilisation d’un échenilloir gradué. L’échenilloir est un piquet
marqué tous les 1 m jusqu’à 7 m de hauteur et au-delà de cette valeur, les hauteurs sont estimées
à l’œil nu. Cet échenilloir est déplacé tous les deux mètres le long du double décamètre
(Annexe 5). A chaque fois que l’échenilloir touche les feuilles ou branches, la hauteur est
marquée sur une fiche de collecte. Ceci permet d’estimer le pourcentage de recouvrement
végétal de chaque hauteur pour 50 m linéaire de la végétation.
Ainsi, pour chaque plot, un DBH mètre a été utilisé pour mesurer le diamètre à hauteur
de poitrine (DBH) de chaque arbre dans chaque plot et celui-ci a été mesuré à 1,3 m du sol. Les
paramètres suivants ont été estimés à l’œil nu :
- Degré de recouvrement de la canopée
- Hauteur de la canopée
- Caractéristiques du substrat
- Epaisseur de la litière
- Marques de la présence humaine
14
II.2.6. Estimation de l’occupation de l’habitat
La rareté et la discrétion des Carnivores forestiers ne permettent d’obtenir que la
présence ou l’absence dans un habitat au cours des sessions de photo-piège. Ainsi, les données
obtenues se limitent à des données binaires de présence-absence. Un tel type de données, grâce
à des modèles mathématiques, peut donner une estimation de la probabilité d’occupation d’un
habitat (Guisan & Thuiller, 2005 ; Moisen et al., 2006). La méthode requiert que le niveau de
l’occupation du site ne change pas durant la période d’échantillonnage et que chaque espèce a
la même probabilité d’être présente dans chaque station d’étude (Mackenzie et al., 2002). Ceci
est dû au nombre limité de jours d’échantillonnage au cours de la période d’étude.
Le logiciel PRESENCE 9.7 (Mackenzie et al., 2002), a été utilisé pour le calcul du taux
d’occupation des habitats par espèce dans la présente étude. D’ailleurs, il est utilisé dans les
études empiriques sur les Carnivores malgaches et s’avère être fiable (Farris & Kelly, 2011).
II.2.7. Influence de l’habitat sur la présence des Carnivores
La relation entre la structure de la forêt et la présence d’une espèce dans le site d’étude
ont été analysées par le modèle de régression logistique sur la plateforme R (R Core Team,
2015). Cette approche permet à la fois de déterminer les variables permettant d’expliquer la
présence/absence des Carnivores et de voir le niveau de relation entre les paramètres de
l’environnement. Ainsi, elle aide à la prédiction du type de site favorable à la conservation de
ces Carnivores, surtout en utilisant le niveau de la contribution de chacune des variables à la
probabilité de présence par le biais de la distance Mahalanobis (Mahalanobis, 1936).
15
III. RESULTATS ET INTERPRETATIONS
III.1. Inventaire des espèces de Carnivores
Sept espèces de Carnivores ont été recensées lors de la présente étude dont quatre
espèces natives de Madagascar à savoir Fossa fossana, Salanoia concolor, Cryptoprocta ferox
et Galidictis fasciata (Figure 6). Les trois espèces introduites sont le chat sauvage Felis
silvestris, le chien sauvage Canis familiaris et la civette indienne Viverricula indica.
c d
b
Figure 6. Photos des espèces natives répertoriées pendant l’étude : a) Fossa fossana – b)
Salanoia concolor – c) Cryptoprocta ferox – d) Galidictis fasciata
a
16
III.2. Indices d’abondance des espèces de Carnivores
Les 46 jours d’échantillonnage se sont traduits en 616 nuits pièges. Sept stations parmi
les huit réalisées ont permis de recenser les 7 espèces de Carnivores (Tableau 2).
Tableau 2. Espèces répertoriées par station
Stations Espèces répertoriées Nombre d’évènements
photographiques
1
Cryptoprocta ferox 1
Fossa fossana 2
Felis silvestris 1
2
Cryptoprocta ferox 5
Fossa fossana 5
Salanoia concolor 13
Galidictis fasciata 1
3 Fossa fossana 5
Salanoia concolor 1
4 Fossa fossana 1
Viverricula indica 1
5 - -
6
Cryptoprocta ferox 1
Fossa fossana 5
Salanoia concolor 1
7 Cryptoprocta ferox 2
8 Canis familiaris 1
Fossa fossana suivi de près par Salanoia concolor puis Cryptoprocta ferox ont été les plus
photographiés par les dispositifs de caméras en termes de taux de succès de piégeage
(Tableau 3). Ces espèces représentent 91,3% (n = 42) des évènements photographiques. Quant
aux espèces introduites, elles ont été rarement recensées durant l’étude avec un seul évènement
photographique pour chaque espèce.
17
Tableau 3. Taux de succès de piégeage des espèces répertoriées
Espèces Nombre total d’évènements
photographiques
Taux de succès de
piégeage
Fossa fossana 18 2,9
Salanoia concolor 15 2,4
Cryptoprocta ferox 9 1,5
Galidictis fasciata 1 0,2
Viverricula indica 1 0,2
Felis silvestris 1 0,2
Canis familiaris 1 0,2
Total 46 7,5
Nombre total de nuits pièges 616
III.3. Rythme d’activité
En termes de rythme d’activité, seul celui des trois espèces les plus communément
rencontrées dans le site a pu être étudié du fait du nombre de captures (Figure 7). Salanoia
concolor présente un pic d’activité important entre 6 h-12 h et aux alentours de 14 h ce qui tend
à prouver que cette espèce présente des mœurs diurnes. Par contre, Fossa fossana a un pic
d’activité de 18 h-0 h et une tendance à des activités avant l’aube dans la portion 0 h et 6 h a
également été remarquée. Cela traduirait des activités nocturnes. Quant à Cryptoprocta ferox,
ses activités entre 12 h-18 h et avant l’aube de 0 h à 6 h témoignent ses mœurs catheméraux
malgré une constatation d’une nette activité le soir dans la portion du temps comprise entre 18 h
et 0 h.
18
Figure 7. Modèle d’activité des trois espèces communes
Un chevauchement du rythme d’activités de ces espèces existe. Il se trouve de 18h à 6h
pour Cryptoprocta ferox et Fossa fossana. Par contre, le chevauchement est moindre entre
Cryptoprocta ferox et Salanoia concolor se situant entre 12 h à 18 h et entre Fossa fossana et
Salanoia concolor dans l’intervalle de 6 h à 12 h.
III.4. Taux d’occupation de l’habitat
Globalement, le taux d’occupation du site d’étude par le biais de la modélisation de
présence/absence pour les Carnivores endémiques est de 62,5% avec une plus forte probabilité
de présence dans les parties dégradées de la forêt par rapport à la partie de la forêt primaire
(75,4% contre 51%) (Tableau 3). Entre les trois espèces, Cryptoprocta ferox a plus de
probabilité d’être rencontré dans la forêt primaire que dans les zones dégradées (Annexe 6).
0
20
40
60
80
100
0h - 6h 6h - 12h 12h - 18h 18h - 0h
Pourc
enta
ge
des
act
ivit
és
Portions de temps
Cryptoprocta ferox Fossa fossana Salanoia concolor
19
Tableau 4. Estimation de la proportion de l’occupation du site par les Carnivores
Espèces Modèle AIC
PAO*
exprimée
en %
psi* exprimée en
% (partie forêt
primaire)
psi exprimée en
% (partie forêt
dégradée)
Endémiques Constant P 55,93 62,5 51 75,4
Cryptoprocta ferox Constant P 34,65 37,5 60 39,4
Fossa fossana Constant P 53,24 62,5 37 100
Salanoia concolor Constant P 34,65 37,5 39,3 60
*AIC : Akaike Information Criterion
*PAO : proportion de l’aire qui est occupée
*psi : probabilité d’occupation
III.5. Etude de l’habitat préférentiel des Carnivores
Avant de déterminer les stations qui pourraient présenter un habitat préférentiel pour les
Eupleridae, les paramètres contribuant le plus à la présence d’un Eupleridae ont été vérifiés
(Tableau 5), ne prenant pas en compte les paramètres nominatifs. L’hypothèse nulle émise a été
que les paramètres « altitude, strate herbacée, litière et recouvrement de la canopée » ne
contribuent pas à la présence d’un Eupleridae au niveau d’une station d’échantillonnage. Les
résultats ont été obtenus sur un intervalle de confiance de 95%.
Tableau 5. Corrélation entre les paramètres écologiques et la présence des espèces natives
Paramètres Altitude Strate
herbacée Litière
Recouvrement
de la canopée
p-values 0,30 0,34 0,57 0,15
Les p présentent toutes des valeurs supérieures à 0,05. Les résultats sont ainsi non
significatifs traduisant que ces paramètres ne contribuent pas à la présence d’une espèce
d’Eupleridae dans une station aussi bien de la forêt primaire que de la forêt dégradée. D’ailleurs,
la structure de la forêt (Annexe 7) ne présente pas de différences significatives entre les 2 types
de forêts au niveau du taux de recouvrement de la strate herbacée (Test t de Student : p = 0,74 ;
IC = 95%) et du taux de recouvrement de la canopée (Test t de Student : p = 0,28 ; IC = 95%).
En tenant compte de cela, il a été déterminé que 2 stations (1 et 6) parmi les 8 sont
20
potentiellement les habitats les plus favorables aux Carnivores natifs avec un taux de 14,7%
chacune (Figure 8 ; Annexe 8).
Figure 8. Modèle de prédiction de préférence d’habitat des Carnivores endémiques dans les
8 stations
III.6. Evaluation des pressions et menaces
Les principales menaces observées durant cette étude ont été la présence humaine et
leurs chiens. Aucune espèce de Carnivore n’a été rencontrée au niveau de la station 5, celle dont
la présence humaine a été la plus élevée marquée par des captures photographiques obtenues
assez régulièrement de personnes passant au niveau des sentiers. A part le chien, aucun
Carnivore n’a également été observé au niveau de la station 8, marquée également par une
présence humaine accompagnée de chiens de chasse. Ainsi, l’empiètement des humains dans
les territoires d’occupation des Carnivores pourrait présenter un certain impact sur la présence
de ceux-ci (Annexe 9). D’autre part, l’influence de l’effet de la dégradation de l’habitat sur les
Eupleridae présente encore des lacunes de compréhension. La station qui présente la plus
grande richesse spécifique en Eupleridae est la station 2 se situant dans la forêt dégradée. Celle-
ci est marquée par une forte proportion en Aframomum (Figure 9) d’à peu près 2 quadrats dans
le plot réalisé, ce qui marque un fort taux de dégradation.
0
5
10
15
20
25
30
1 2 3 4 5 6 7 8
Stations
Taux de favorabilité (%)
21
Figure 9. Présence de grandes proportions d’Afromomum dans la station 2
22
IV. DISCUSSION
Inventaire des Carnivores
Suivant le but des études et des espèces cibles, la méthode de piégeage photographique
présente peu de standard dans son mode d’utilisation. Même pour de mêmes espèces cibles,
l’effort d’échantillonnage, le nombre de caméras utilisées et la distance entre celles-ci peuvent
varier (Kelly, 2008). Ainsi, l’inventaire réalisé n’a permis de recenser que 4 espèces natives
parmi les 6 existantes (Farris et al., 2012). Au total, 7 espèces de Carnivores parmi les 9 espèces
connues dans le site (Farris et al., 2012) ont été répertoriées durant cette étude. En prenant en
compte l’existence du chat noir sauvage (Farris et al., 2014), cela représente 70% des espèces
en 616 efforts d’échantillonnage repartis sur 46 jours. C’est inférieur à ce qui a été observé par
exemple dans la forêt amazonienne du Pérou où 75% des espèces qui occurrent dans ce site ont
été répertoriées en 60 jours d’échantillonnage, soit 1 440 efforts d’échantillonnage. Cela montre
que la fréquence de capture des espèces est corrélée suivant l’échantillonnage réalisé. De plus,
la probabilité de capture des animaux diminue avec la diminution de la taille de ceux-ci (Tobler
et al., 2008). Cette constatation pourrait justifier l’absence des évènements photographiques
pour Galidia elegans (Annexe 10).
De même, un certain niveau d’effort d’échantillonnage est utile pour permettre le
recensement de certaines espèces. L’exemple du jaguar dans la forêt du Belize en Bolivie
l’atteste où seulement 16 à 37 captures photographiques ont été obtenues en 486 à 2 280 efforts
d’échantillonnage suivant les sites (Silver et al., 2004). Ainsi, l’absence d’Eupleres goudotii
pourrait être expliquée par le faible effort d’échantillonnage réalisé durant cette étude. En effet,
les 616 nuits pièges ont dû permettre d’avoir au moins 95% de probabilité pour une seule
détection de la plupart des Carnivores, 423 étant le seuil pour les forêts pluviales (Gerber et al.,
2012a). Toutefois, Eupleres goudotii présente une exception où 1 081 nuits pièges ont été
nécessaires pour avoir au moins une simple détection de celui-ci d’après les études effectuées
par Gerber et ses collaborateurs en 2012 (Annexe 11).
Mais malgré cela, un jeune individu d’Eupleres goudotii a été aperçu au niveau du
campement (15°11’56,5’’ S, 49°37’15’’ E), escaladant un arbre à environs 4 m du sol. Cette
observation complète un peu plus l’information sur ce comportement déjà observé auparavant
dans la forêt de Tsitongambarika au Sud-Est de Madagascar (Ravoahangy et al., 2011) et tend
à confirmer sa présence dans le site. Des individus de Galidia elegans ont été également
observés en train de suivre les pas laissés lors de la vérification des caméras mais ceux-ci n’ont
jamais été observés dans aucune photo. Ainsi, les résultats obtenus lors de cette étude
23
convergent vers ceux des études antérieures où les six espèces natives ont été recensées, malgré
une période différente de celle-ci (Farris et al., 2012). Cela donne une justification de plus que
les Carnivores malgaches n’entrent pas en hibernation et ainsi la saisonnalité n’interfère pas sur
leur présence (Goodman, 2012) malgré que l’hypothèse d’une estivation reste des plus crédibles
vue leur rareté durant la période de cette étude.
Cette rareté pourrait s’expliquer surtout par l’insuffisance des ressources alimentaires
lors de la période d’étude. En effet, cette insuffisance provoque une plus grande difficulté de la
recherche de nourriture amenant ainsi à une plus forte proportion de temps alloué à cette
recherche. De même, la forte proportion de temps alloué à la quête de nourriture augmenterait
le déplacement de chaque individu. Cela pourrait significativement augmenter la distance
parcourue et le territoire occupé par les Carnivores malgaches et par la suite avoir un impact
sur leur présence. Leur probabilité de détection au niveau des caméras d’échantillonnage en
serait alors influencée. Le non fonctionnement de certaines caméras peut également expliquer
les manques dans le recensement de certaines espèces. En fait, certains appareils sont devenus
non opérationnels à cause des conditions très pluvieuses et de la forte humidité durant la période
de cette présente étude. Des anomalies de fonctionnement de certaines caméras se sont
également produites où les photos recueillies ne présentent aucune présence d’animal. Ces
contraintes, ajoutées au nombre restreint de caméras à disposition pour l’étude et la courte durée
d’échantillonnage, n’ont pas permis de collecter assez de données sur la richesse spécifique des
Carnivores dans le site.
Indices d’abondance des espèces de Carnivores
L’étude de l’abondance montre que Fossa fossana est le plus commun dans le site
d’étude, suivi de Salanoia concolor qui a été particulièrement abondant durant cette étude. Ils
sont surtout abondants dans la partie dégradée de la forêt. Un constat inverse a été observé pour
Cryptoprocta ferox avec un plus faible indice d’abondance. Quant à Galidictis fasciata, la seule
occasion de sa présence est survenue dans la forêt dégradée. Ces observations diffèrent de celles
dans la partie Sud-Est de Madagascar avec un nombre réduit de Carnivores endémiques dans
les formations secondaires (Gerber et al., 2010b). D’après les résultats de ces auteurs, Eupleres
goudotii mais surtout Fossa fossana ont une faible présence dans les forêts dégradées et sont
absents dans les forêts fragmentées tandis que Galidictis fasciata et Galidia elegans préfèrent
les forêts dégradées. Par contre, le cas des espèces exotiques a été le même avec la seule
présence de Canis familiaris dans la forêt primaire et de Felis silvestris et Viverricula indica
24
dans les parties les plus dégradées de la forêt. Ces études étant réalisées durant de mêmes
périodes de l’année, le facteur le plus important dans l’abondance des Carnivores serait donc
l’état de la forêt. Le Parc Naturel de Makira pourrait présenter un meilleur état de conservation
de sa couverture forestière, même dans ses parties dégradées par rapport au bloc forestier de
Ranomafana et de ses alentours. Les parties jugées dégradées peuvent en réalité présenter un
état intermédiaire entre une forêt primaire et une forêt dégradée. De même, le fait que ces parties
soient juxtaposées à la partie de forêt primaire sans barrière écologique insurmontable pourrait
jouer un grand rôle dans l’abondance des espèces pouvant ainsi assurer une connectivité entre
les populations. Une forte abondance au niveau de la lisière forestière est ainsi constatée au
niveau du site d’étude.
Rythme d’activité et chevauchement
Les chevauchements de niche temporelle des 3 espèces de Carnivores les plus
communes peuvent être expliqués de la manière suivante. Ceux dont le degré de chevauchement
est élevé (Cryptoprocta ferox et Fossa fossana dans l’intervalle 18 h à 0 h) peuvent supposer
des différences au niveau d’autres paramètres de la niche écologique comme le choix
d’occupation d’autres niches (utilisation de différents habitats) durant une même période. Mais
surtout, la différence entre les mœurs au niveau régime alimentaire des 2 espèces pourrait
donner une information sur ce chevauchement. Fossa fossana est habitué à des endroits
humides à coté de points d’eau ce qui conduit donc à un régime alimentaire plutôt spécialisé
vers les Crustacés et les Invertébrés (Goodman, 2012). Par contre, l’abondance et la diversité
des proies associées à la grande capacité d’adaptation et de dispersion de Cryptoprocta ferox
lui permettent d’avoir un régime plutôt généraliste (Goodman, 2012). Ceci permettrait à cette
espèce de délaisser quelques types de proies afin d’éviter une compétition interspécifique lors
d’une même période d’activité, d’où la possibilité du chevauchement.
Ainsi, 2 espèces apparemment séparées dans leur diète peuvent coexister durant une
même période (Gerber et al., 2012b). Par contre, un phénomène d’évitement pourrait expliquer
le faible chevauchement temporel et l’utilisation de l’habitat entre Fossa fossana et Salanoia
concolor qui sont tous les deux insectivores. D’où, 2 espèces à morphologie identique pouvant
partager un même régime alimentaire présentent un faible chevauchement des activités
conduisant à une divergence des temps d’activité (Gerber et al., 2012b). Mais en général, un
évitement entre le top prédateur Cryptoprocta ferox et les autres espèces est constaté.
25
Taux d’occupation de l’habitat et évaluation des pressions et menaces
L’étude de l’occupation du territoire par les espèces natives montre une forte
concentration dans la partie dégradée du site, surtout au niveau de la station 2 qui est l’une des
stations les plus proches du grand bloc de forêts primaires. Fossa fossana et Salanoia concolor
ont été observés dans différentes stations, que ce soit dans la partie dégradée ou non dégradée
mais privilégieraient cette station 2. En effet, ces 2 espèces avec Galidictis fasciata ont été
particulièrement abondants durant cette étude, surtout dans la partie dégradée de la forêt
contrairement aux résultats antérieurs et à ce qui a été prédit (Farris et al., 2012). Une exception
concerne Cryptoprocta ferox qui est la seule espèce ayant la plus forte chance d’habiter la partie
naturelle, mais cela pourrait ne pas être significatif à cause de sa capacité à recouvrir de grands
territoires. Cette large occupation des forêts dégradées peut s’expliquer de différentes
manières : les conditions à l’intérieur du bloc forestier peuvent présenter des caractéristiques
nuisant au bon fonctionnement de la biologie de ces espèces. Un exemple concerne la baisse de
la température ambiante, associée à la montée en altitude, qui est favorable dans les zones de
lisière du fait d’un gain considérable de rayonnement solaire. Ce gain est accompagné à son
tour de la prolifération des ressources alimentaires comme les insectes qui font partie intégrante
du régime alimentaire des espèces comme Salanoia concolor et Fossa fossana (Goodman et
al., 2003 ; Goodman, 2012). Ce cas peut s’avérer être le même pour les rongeurs et les oiseaux
terrestres vu les résultats des captures photographiques. En effet, une nette présence de rongeurs
et d’oiseaux endémiques a été observée dans les parties de forêts dégradées surtout au niveau
de la station 1. Dans la station 2 ont été répertoriés des rongeurs alors que ces derniers forment
la majeure partie du régime alimentaire de Cryptoprocta ferox surtout lors des moments de
pénurie alimentaire (Hawkins & Racey, 2008). Ainsi, comme le succès de piégeage des oiseaux
endémiques est un des paramètres très importants dans l’occupation spatiale et influence
positivement la présence des Eupleridae (Farris et al., 2015b), cela pourrait expliquer la forte
occupation des parties dégradées du site.
De même, les forêts dégradées peuvent former une sorte de ceinture verte autour des
forêts primaires qui comprennent le noyau dur d’une aire protégée. Elles présentent ainsi des
surfaces moins vastes par rapport aux surfaces de forêts primaires. D’où, la probabilité
d’occuper une plus petite niche et d’en tirer le maximum de bénéfices est plus élevée et semble
être la plus privilégiée par les Eupleridae par rapport à l’occupation d’une plus grande niche
caractérisant le grand bloc de forêt primaire. Et par la juxtaposition des deux types de
26
formations forestières dans le site d’étude, l’effet négatif de la lisière sur les Carnivores (Farris
et al., 2015c) pourrait être moindre.
Des études antérieures ont également montré que le plus grand taux de consommation
de viande de Carnivores survient dans les forêts les moins dégradées, où l’occupation des
Carnivores natifs et l’activité des lémuriens sont les plus élevées (Farris et al., 2015c).
Cryptoprocta ferox avec 31 individus consommés par an figure parmi les plus chassés alors que
Fossa fossana est le moins consommé avec 5 individus par an. Ainsi, d’après ces mêmes
auteurs, la pression de chasse est plus intense dans les parties de forêts intactes. Tout cela
pourrait jouer un rôle primordial dans les proportions d’occupation du territoire des Eupleridae.
Par contre, la station 4 qui se trouve à l’extrémité de la forêt dégradée, en amont des
zones de culture, a permis de recenser la civette indienne et la civette malgache à une seule
reprise, cette partie étant considérée comme la partie la plus dégradée du site et la plus enclin à
l’activité humaine. La station 8 se trouvant dans la partie de forêt primaire n’a donné aucune
image d’Eupleridae et cela serait expliqué par la présence de chiens sauvages et des chiens
domestiqués pour la chasse au niveau de cette localité. De même, la station 5 qui présente un
sentier obligé à passer pour parvenir au campement n’a donné aucun résultat en termes de
Carnivores alors que c’est le site au niveau duquel le plus de captures photographiques a été
obtenu.
La proximité de terrains agricoles étant bénéfique à Viverricula indica, l’empiètement
et les pressions exercées indirectement par la présence humaine provoquent ainsi l’évitement
des espèces natives à coloniser ces milieux. Cela suggère que la présence et l’activité des
espèces introduites présentent des impacts négatifs sur les Eupleridae dans les forêts pluviales
(Gerber et al., 2012a) et ce constat est aussi valable pour la présence humaine. D’ailleurs,
l’augmentation en fragmentation, la présence d’espèces invasives et les activités
anthropogéniques démontrent un grand impact sur le taux de capture et l’occupation des
Eupleridae (Farris & Kelly, 2011). Cette tendance reflète une certaine concurrence entre les
espèces natives et invasives dans les habitats forestiers et les espèces natives ont une utilisation
du site plus élevée en absence des espèces invasives (Farris et al., 2015b).
27
Etude de l’habitat préférentiel des Carnivores
Concernant l’influence de l’habitat sur la présence des Carnivores, il a été constaté que
la station 2 est la plus favorable aux Eupleridae au vue du nombre de captures photographiques
obtenues, notamment avec la présence de toutes les 4 espèces natives. Ensuite viennent les
stations 1 et 3 et la station 6 de la forêt primaire qui se trouve à proximité du réseau de la partie
dégradée. L’étude du plot botanique de la station 2 montre une couverture forestière élevée à
40% (parmi la plus élevée dans la partie dégradée), un taux de recouvrement moyen par la strate
herbacée associé à une litière épaisse et un substrat mou, caractérisant un milieu assez ouvert.
Cela peut expliquer le fait que les Carnivores malgaches, à l’instar de Galidia elegans, préfèrent
des milieux assez ouverts avec des portions ombragées évitant ainsi une trop forte exposition
au soleil et des coups de chaleur (Albignac, 1976). L’influence directe de la lumière peut assurer
une meilleure visibilité du milieu et facilite ainsi la quête de nourriture. Mais également, comme
la composition spécifique des micromammifères est bien distincte suivant l’état de la forêt
(Rakotomalala et al., 2003), les milieux ouverts pourraient privilégier une plus forte pullulation
des espèces proies, comme les rongeurs dans les milieux ouverts ou les insectes et leurs larves
dans les substrats mous.
Malgré cette constatation, les études statistiques ont montré que les stations 1 et 6 sont
les plus favorables à la présence d’Eupleridae. Ces stations qui représentent chacune un type de
forêt sont éloignées à peu près de 500 m et se trouvent sur la partie sommitale des collines,
respectivement à 459 et 525 m d’altitude. Une similarité dans les caractéristiques de leurs
milieux est à noter avec un même taux de recouvrement de la strate herbacée (60%), une litière
peu épaisse associée à un faible taux de couverture de la canopée (respectivement 25% et 20%).
Les paramètres pris en compte durant cette étude à savoir le recouvrement et la hauteur
de la canopée, la strate herbacée ainsi que les caractéristiques du substrat n’influencent pas la
répartition des Carnivores. L’hypothèse nulle est ainsi retenue. Il est difficile de donner une
affirmation sur le véritable rôle de chaque variable environnementale dans la présence et
l’occupation d’une aire donnée par les Eupleridae. D’où, une hypothèse alternative sur l’action
de la saisonnalité et de l’occupation du territoire pouvant influencer la présence des Eupleridae
a été émise. L’emplacement des stations de caméras qui peut se trouver dans le domaine vital
des Eupleridae pourrait ainsi constituer une importance dans leur présence. De même, le rôle
d’autres paramètres écologiques qui n’ont pas été pris en compte durant cette étude comme la
température du milieu pourrait présenter un impact sur le choix d’occupation d’un site.
28
Utilisation de la méthode de piégeage photographique
La méthode de piégeage photographique a également permis de susciter davantage
d’informations sur des aspects éthologiques de certaines espèces, comme l’atteste les photos
recueillies de Salanoia concolor en train d’exploiter la litière. Ce constat pourrait donner plus
d’informations sur ses mœurs alimentaires insectivores (Annexe 12). Cette méthode permettrait
donc de donner des preuves supplémentaires facilitant la compréhension de certains aspects
comportementaux encore mal connus. Ainsi, à part l’étude de la diversité des animaux, cette
méthode est importante dans l’étude de l’écologie des populations et l’étude du comportement
des animaux (Zhang et al., 2014).
Toutefois, la méthode de piégeage photographique présente quelques limites. Durant la
présente étude, avec peu de caméras à disposition, la mise en place de ces dernières n’a été
possible qu’au niveau des stations préalablement établies lors les études antérieures.
L’emplacement des caméras y a été facilité, alors que l’importance d’autres endroits comme
ceux à proximité des cours d’eau, au niveau des vallées mais aussi plus à l’intérieur de la forêt
primaire serait intéressante. Le type de caméra Moultrie D40 utilisé n’a pas également permis
d’effectuer des études quantitatives comme l’étude de la densité ou des études de territoire à
cause de l’identification impossible au niveau de chaque individu. De même, les observations
fournies par la méthode de piégeage photographique se limitent aux passages des individus
devant les capteurs des caméras pendant un laps de temps très réduit par rapport à sa période
d’activité. Enfin, la détection par la méthode de piégeage photographique montre une forte
dépendance par rapport à la masse corporelle des animaux et des comportements d’évitement
sont observés sur les études à long terme (Lyra-Jorge et al., 2008). Puisque la plupart des
Carnivores malgaches sont de petite taille, d’autres méthodes sont ainsi à mettre en place
parallèlement au piégeage photographique pour acquérir davantage d’informations.
29
V. CONCLUSION
Le site d’Antsahabe, compris dans le bloc de forêt d’Anjanaharibe, abrite un très grand
nombre d’espèces animales, à l’image du Parc Naturel de Makira, avec certainement le plus
grand nombre de Carnivores de Madagascar avec 9 espèces. Parmi ces espèces, 7 ont été
répertoriées durant cette étude dont 4 espèces natives à savoir Cryptoprocta ferox, Fossa
fossana, Galidictis fasciata et Salanoia concolor et les 3 espèces introduites Canis familiaris,
Felis silvestris et Viverricula indica. Fossa fossana, Salanoia concolor et Cryptoprocta ferox
ont présenté les indices d’abondance les plus élevés. A l’exception de Cryptoprocta ferox, une
très nette présence est observée notamment dans les parties dégradées du site qui sont
étroitement liées à la partie de la forêt primaire.
De même, de nouvelles informations ont été recueillies sur la capacité d’adaptation de
Salanoia concolor vis-à-vis de l’état de la structure de la forêt. Cryptoprocta ferox a mis en
exergue sa capacité à habiter différents types d’habitats en privilégiant les parties moins
dégradées. Galidictis fasciata n’étant aperçu qu’une fois lors de cette étude, des lacunes
d’informations se posent sur son abondance et sa capacité d’occupation des territoires. Quant à
Viverricula indica et Felis silvestris, leur rareté dans la partie la plus dégradée du site pourrait
présager un bon état de la forêt d’Anjanaharibe. La présence de Canis familiaris associée à celle
des humains dans le grand bloc de forêts naturelles présente un effet néfaste sur la distribution
des espèces natives. Ces dernières tendent à s’extirper de ces milieux et cela explique leur forte
présence dans les parties intermédiaires entre forêts naturelles et forêts dégradées juste à
proximité des forêts naturelles. Dans ces parties, les compétitions interspécifiques seraient
moindres grâce aux conditions environnementales favorables et à l’abondance des ressources.
Ainsi, une préférence de la lisière forestière est constatée et une hypothèse alternative pourrait
être émise sur la préférence pour les Carnivores des formations de forêts dégradées. Par
conséquent, la sauvegarde des parties forestières à proximité de la lisière serait primordiale pour
les Carnivores endémiques malgaches car ces derniers pourraient persister à moyen terme dans
ces lieux de transition.
Les informations récoltées sur l’étude du rythme d’activité et du chevauchement
temporel de la niche écologique exposent une activité strictement diurne de Salanoia concolor.
Ce dernier tend à éviter tout contact avec d’autres Carnivores, surtout ceux qui lui sont
écologiquement similaires. Les caractéristiques nocturnes pour les activités de Fossa fossana
présentent un chevauchement avec le modèle cathémeral de Cryptoprocta ferox dû à une large
30
proportion d’activités nocturnes pour ce dernier. Malgré cela, les différences par rapport aux
mœurs de ces deux espèces ne conduiraient pas à une compétition interspécifique.
Les paramètres écologiques tels que le taux de recouvrement de la canopée, la strate
herbacée, les caractéristiques de la litière et du substrat ne présentent pas d’influence sur la
répartition des Eupleridae dans les forêts malgaches. L’hypothèse nulle stipulant que la
présence des Carnivores n’est pas fonction de la structure de la forêt est ainsi vérifiée. Par
conséquent, davantage d’études sur d’autres paramètres écologiques doivent être entreprises
pour mettre en évidence les effets des variations de l’environnement et la saisonnalité sur la
présence ou l’absence des Carnivores malgaches.
Pour conclure, l’utilisation de la méthode de piégeage photographique permet non
seulement le recensement des animaux élusifs à l’instar des Carnivores malgaches mais
également de donner quelques informations sur certains aspects éthologiques des espèces. Ces
observations peuvent être également utilisées sur un plus large éventail d’environnements. De
même, cette méthode procure des avantages dans la compréhension des effets de l’empiètement
humain et ses conséquences dans un écosystème forestier.
Recommandations
Afin de maximiser la pertinence des résultats obtenus, une plus longue durée
d’échantillonnage avec un plus grand nombre de caméras serait favorable. Dans le but de
réaliser des études quantitatives, il serait profitable d’utiliser des caméras à haute définition
facilitant l’identification des individus. Le choix d’endroits stratégiques ou caractéristiques de
certaines espèces est également recommandé pour parvenir à plus d’informations sur
l’occupation de l’habitat des Eupleridae. De même, l’utilisation de la méthode de piégeage
photographique pourrait être adaptée pour l’étude de certains aspects comportementaux de
Carnivores en enregistrant les activités par l’intermédiaire de séquences vidéos au lieu de
captures photographiques. Cela pourrait également donner plus de précision sur la vie en groupe
et les relations intra spécifiques qui pourraient exister. La comparaison de la composition du
peuplement des Eupleridae suivant les différentes saisons serait également intéressante pour
étudier le rôle de la saisonnalité dans leur présence ainsi que leur répartition. Enfin, l’étude de
l’impact des variations altitudinales et des paramètres environnementaux dans la composition
du peuplement d’Eupleridae serait intéressante pour des études futures.
31
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I
ANNEXES
Annexe 1. Données climatiques de la forêt de Makira d’août 2014 à juillet 2015
Mois Précipitation
moyenne (mm)
Température
moyenne (°C)
Humidité relative
(%)
Août 1019,65 21,985 91,78
Septembre 1018,6 22905 88,48
Octobre 1014,6 25,65 81,76
Novembre 839,22 26,99 80,99
Décembre 821,39 28,65 77,83
Janvier 919,55 27,55 83,66
Février 884,2 26,765 84,2
Mars 907,93 26,535 88,56
Avril 1016,07 26,365 88,95
Mai 1017,74 26,7 ND*
Juin 1020,23 24,8 ND*
Juillet 1021,24 22,075 96,04
MOYENNES 960,95 25,83 86,22
*: Non Disponible
Annexe 2. Disposition d’une caméra de la station 2
II
Annexe 3. Informations sur les stations d’étude
Station Localisation Longitude Latitude Altitude (m)
1 Sommet 50,052778 -15,341111 459
2 Sommet 50.041389 -15,334444 550
3 Crête 50,033333 -15,358611 517
4 Mi-versant 50,0425 -15,360556 405
5 Mi-versant 50,041667 -15.316944 365
6 Sommet 50,040278 -15,319444 525
7 Crête 50,026944 -15.311667 487
8 Crête 50,038333 -15,305278 529
Annexe 4. Photo de la réalisation du plot botanique de la station 3
III
Annexe 5. Réalisation de l’étude de la structure végétale
Annexe 6. Probabilités d’occupation des différentes stations
Espèces psi
(st 1)
psi
(st 2)
psi
(st 3)
psi
(st 4)
psi
(st 5)
psi
(st 6)
psi
(st 7)
psi
(st 8)
Endémiques 1,9 100 100 100 1,9 100 100 1,9
Cryptoprocta ferox 19,2 100 19,2 19,2 19,2 100 100 19,2
Fossa fossana 100 100 100 100 15,8 100 15,8 15,8
Salanoia concolor 19,2 100 100 19,2 19,2 100 19,2 19,2
psi : probabilité d’occupation exprimée en pourcentage
st : station
IV
Annexe 7. Paramètres écologiques pris en compte pour la réalisation des plots botaniques
Annexe 8. Stations potentiellement favorables aux Eupleridae
Stations p Taux de favorabilité (%)
1 0,147 14,7
2 0,044 4,4
3 0,043 4,3
4 0,06 6
5 0 0
6 0,147 14,7
7 0,042 4,2
8 0,001 0,1
p représente la probabilité indiquant le niveau de favorabilité de chaque station suivant la
présence des Eupleridae : si p <0.05, la station n’est pas un habitat favorable et plus p
s’approche de 1, plus la station représente un habitat parfait.
Le taux de favorabilité représente le pourcentage de chaque probabilité p en la multipliant par
100 pour mieux évaluer le niveau de favorabilité de chaque station.
Stations Strate herbacée
(%)
Litière Recouvrement de la
canopée (%)
Caractéristiques du
substrat
1 60 peu épaisse 25 dur
2 45 épaisse 40 mou
3 75 épaisse 28 mou
4 60 épaisse 41 mou
5 30 peu épaisse 38 dur
6 60 peu épaisse 20 mou
7 65 épaisse 23 mou
8 70 peu épaisse 26 dur
V
Annexe 9. Présences humaines dans les stations 5 (à gauche) et 8 (à droite)
Annexe 10. Présence de Galidia elegans (cliché par Farris, Z. J.)
Annexe 11. Présence d’Eupleres goudotii (cliché par Gerber, B.)
VI
Annexe 12. Exploitation de la litière par Salanoia concolor dans la station 2
TITRE : CONTRIBUTION A L’ETUDE DES CARNIVORES DE LA FORET
D’ANJANAHARIBE, DANS LE PARC NATUREL DE MAKIRA, NORD-EST DE
MADAGASCAR
RESUME
Du fait de leurs fonctions en tant que prédateurs et de leurs influences sur les populations
proies, les Carnivores forment un composant crucial dans la conservation de la structure d’un
écosystème. La présente étude, axée sur les Carnivores malgaches, a été réalisée par le biais de la
méthode de piégeage photographique dans la forêt d’Anjanaharibe du Parc Naturel de Makira du
mois d’avril à juillet 2015. Sur un échantillonnage de 46 jours, 16 caméras ont été utilisées et reparties
en 8 stations formant des grilles, pour un total de 616 nuits pièges. Les 4 espèces natives Cryptoprocta
ferox, Fossa fossana, Galidictis fasciata et Salanoia concolor ainsi que les 3 espèces invasives Felis
silvestris, Canis familiaris et Viverricula indica ont été recensées. Fossa fossana et Salanoia concolor
ont présenté les indices d’abondance les plus élevés, suivis de Cryptoprocta ferox. Les résultats
semblent indiquer une fréquentation relativement significative de la lisière forestière par les
Eupleridae et la structure de la forêt n’influencerait pas significativement leur présence. Toutefois, la
présence humaine qui favorise la présence des Carnivores introduits, réduit le taux de succès de
piégeage photographique des Eupleridae et affecte négativement la répartition de ces derniers : un
phénomène d’évitement est ainsi apparent. Pour maximiser les résultats obtenus, il serait convenable
de réaliser une plus longue durée d’échantillonnage avec un plus grand nombre de caméras à haute
définition permettant des études quantitatives.
Mots-clés : Carnivores, piégeage photographique, lisière, Eupleridae, présence humaine,
évitement.
ABSTRACT
Due to their functions as predators and their influences on prey populations, Carnivores form
a crucial component on ecosystem structure conservation. The present study, based on Malagasy
Carnivores, was carried out through the camera trapping method in the Anjanaharibe forest of Makira
Natural Park from April to July 2015. On a sampling of 46 days, 16 cameras were used and divided
in 8 stations forming grids, for a total of 616 trap nights. The 4 native species Cryptoprocta ferox,
Fossa fossana, Galidictis fasciata and Salanoia concolor and 3 invasive species Felis silvestris, Canis
familiaris and Viverricula indica were recorded. Fossa fossana and Salanoia concolor have shown
the highest indices of abundance, followed by Cryptoprocta ferox. The results seem to indicate
relatively significant attendance of the forest edge by the Eupleridae and the structure of the forest
would not significantly influence their presence. However, the human presence which favors the
presence of introduced Carnivores, reduces the camera trapping success rate of the Eupleridae and
affects negatively the distribution of these latter: an avoidance phenomenon is thus apparent. In order
to maximize the results, it would be suitable to make a longer sampling time using a greater number
of high-definition cameras allowing quantitative studies.
Keywords : Carnivores, camera trapping, edge, Eupleridae, human presence, avoidance.
Encadreur
Monsieur Aristide ANDRIANARIMISA
Professeur d’ESR
Département de Biologie Animale
Faculté des Sciences
Université d’Antananarivo
Impétrant
Nom et prénom : RAMARONDRAINIBE Ntsoa
Adresse : Lot VO 8 Bis b Miandrarivo
Tél : +261 33 18 906 63
E-mail : [email protected]