DE CONSTANTINOPLE À ISTANBUL UN LIEU DE CONTACT …€¦ · Constantinople elle-même, afin que...

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Henri Simonneau L’élargissement du monde (XV e -XVI e siècle) DE CONSTANTINOPLE À ISTANBUL : UN LIEU DE CONTACT ENTRE DIFFÉRENTES CULTURES ET RELIGIONS Carte de Constantinople au milieu du XV e siècle Christoforo Buondelmonti, Liber insularum Cicladorum, copie du milieu du XV e s. BnF, cartes et plans, Ge FF 9351 Évolution de la population de Constantinople (en nombre d’habitants) 1453 36 000 1478 75 000 1566 600 000 Document 1 : la disparition de l’Empire byzantin et l’expansion ottomane Source : Wikipédia Source : Memo.fr

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Henri Simonneau L’élargissement du monde (XVe-XVIe siècle)  

DE CONSTANTINOPLE À ISTANBUL :

UN LIEU DE CONTACT ENTRE DIFFÉRENTES CULTURES ET RELIGIONS

Carte de Constantinople au milieu du XVe siècle Christoforo Buondelmonti, Liber insularum Cicladorum, copie du milieu du XVe s. BnF, cartes et plans, Ge FF 9351 Évolution de la population de Constantinople (en nombre d’habitants)

1453 36 000 1478 75 000 1566 600 000

Document 1 : la disparition de l’Empire byzantin et l’expansion ottomane

Source : Wikipédia Source : Memo.fr

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Henri Simonneau L’élargissement du monde (XVe-XVIe siècle)   Document 2 : la description de Constantinople par Bertrandon de la Broquière en 1433 « Pera [le quartier nord de Constantinople] est une très grande ville qui appartient à la seigneurie de Gênes […]. Dans cette ville, la plupart des habitants sont des Génois : ils y pratiquent le commerce et le gouvernent. C’est une ville très commerçante et que fréquentent beaucoup les Turcs. Le deuxième jour de mon arrivée à Pera, je traversai le port pour aller voir la cité de Constantinople. Là, se trouvaient des marchands vénitiens, génois et catalans. Constantinople est une cité très grande et étendue […]. Tout le tour de la ville est très bien ceinturé par de très bonnes murailles, et notamment la partie qui est vers la terre. Cette cité-ci est constituée par des villages et il y a beaucoup plus d’espaces vides que de pleins. Il y a de très belles églises, comme l’église de Sainte-Sophie qui est l’église principale […]. La soumission de l’Empereur de Constantinople envers le Grand Turc est extrême car, me dit-on, il lui paie tous les ans dix mille ducats de tribut, et seulement pour la ville de Constantinople elle-même, afin que celui-ci n’exige rien de lui. »

Bertrandon de la Broquière, Le voyage d’Outre-mer, 1433. Document 3 : deux témoignages sur la prise de Constantinople en 1453 « Constantinople semblait avoir été visitée par quelque ouragan. Les Turcs saccagèrent les églises, les chapelles, les tombeaux, les cryptes, toutes les cachettes les plus reculées ; ils retirèrent de leurs cachettes toutes les personnes et toutes les choses. Toute l’armée, celle de terre et celle de mer, inondant la ville de puis le point du jour jusqu’à la nuit tombante, la pilla et la saccagea, emportant tout le butin. C’est ainsi que cette ville entière fut vidée, dépeuplée, et que, comme par un incendie, elle fut détruite et changée en un tombeau. »

Michel Critopoulos d’Imroz, Histoire de Mehmet II, 1470.

« Avec la permission du sultan, les troupes pillèrent la ville pendant trois jours et trois nuits, et firent jouir l’œil de leur espoir de la vue des beautés grecques, au rire doux comme le sucre. Le troisième jour, les hérauts de la cour sublime firent connaître la volonté de Mehemet ; c’était que les soldats cessassent le pillage. Par les soins du monarque fortuné, la poussière du combat fut abattue, l’épée de la guerre suspendue. Par ses efforts généreux, on entendit, au lieu du bruit détestable des cloches, la profession de foi musulmane et le cri, cinq fois répété par jour, de la religion du prophète. Les églises de Constantinople furent dépouillées des viles idoles qui les souillaient ; elles furent purifiées des impuretés abominables des cérémonies chrétiennes. »

Mohammed Hoca Saadeddin, Diadème des histoires, fin du XVIe siècle. Document 4 : description de la ville par Nicolas de Nicolay, géographe français

« Pera ou Galata […] est cité non trop antique, édifiée par les Genevois [Gênois], qui y envoyèrent une de leurs colonies […]. Quant au port, c’est l’un des plus beaux et plus commodes, que je pense, qui soit au monde […]. Cette cité de Pera […] est séparée de murailles en trois parties : en l’une desquelles habitent les vrais Perots [descendants des premiers Génois installés] ; en l’autre les Grecs, en la troisième les Turcs […] et quelque peu de Juifs. […] Les Français et les vrais Pérots vivent selon la loi de l’Église romaine, à la différence des Grecs […]. Se tiennent ordinairement dedans la ville les Ambassadeurs de France et les bailes [chef de communauté] des Vénitiens, et Florentins […] tant pour entretenir les ligues et considérations d’amitié, qu’ils ont avec le Grand Seigneur, que pour le trafic de marchandise, qu’ils exercent là, et par toutes les autres parties du Levant.

Nicolas de Nicolay, Les Navigations, 1576-1577.

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Henri Simonneau L’élargissement du monde (XVe-XVIe siècle)   Document 5 : les diverses populations de la ville par Jean Chesneau en 1555

« La ville est habitée principalement de Turcs, puis de Juifs innombrables […] qui ont été chassés d’Espagne, Portugal et Allemagne […] et la plupart des boutiquiers sont Juifs. Il y a aussi beaucoup de Grecs et plusieurs chrétiens marchands étrangers qui commercent par tout le pays du Levant : des Vénitiens, Florentins, Ragusois et quelques Français, qui habitent en une petite ville qu’ils appellent Galata, séparée de Constantinople par un grand canal de la mer qui est le plus grand port de Constantinople, le plus sûr, le plus beau et le plus aisé qui soit au monde. […] À Constantinople se trouve le monastère où se tiennent le patriarche grec et des moines. […] Le patriarche paye chaque année trois mille ducats au Grand Seigneur et à d’autres petites églises où il y a certains prêtres grecs mariés. […] Et dans la ville de Pera, il y a un couvent de cordeliers et un autre de Jacobins à la façon de ceux d’Italie ou de France. »

Jean Chesneau, Le voyage de Monsieur d’Aramon, 1555. Document 6 : Sainte-Sophie, basilique devenue mosquée

Questions :

1. À partir du document 1, montrez que l’Empire ottoman s’impose au XVe et au XVIe siècle comme la grande puissance méditerranéenne.

2. Quelles différences voyez-vous entre les deux descriptions de la prise de Constantinople de 1453 (document 3) ?

3. Que vous apprennent ces documents sur les différentes communautés qui habitent la ville au XVe et au XVIe siècle ?

4. Quelle est l’activité principale des étrangers présents à Constantinople ? 5. À l’aide des documents, montrez que Constantinople est restée un lieu de contact et

d’échanges après sa conquête par les Ottomans.