Curie-jphystap_1894_3_393_0

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 393 SUR LA SYMÉTRIE DANS LES PHÉNOMÈNES PHYSIQUES, SYMÉTRIE D’UN CHAMP ÉLECTRIGLUE ET D’UN CHAMP MAGNÉTIQUE; PAR M. P. CURIE. 1. Je pense qu’il y aurait intérêt à introduire dans l’étude des phénomènes physiques les considérations sur la symétrie fami- lières aux cristallographes. Un corps isotrope, par exemple, peut être animé d’un mouve- ment rectiligne ou de rotation; liquide, il peut être le siège de mouvements tourbillonnaires; solide, il peut être comprimé ou tordu ; il peut se trouver dans un champ électrique ou magnétique; il peut être traversé par un courant électrique ou calorifique ; il peut être parcouru par un rayon de lumière naturelle ou polarisée rectilignement, circulairement, elliptiquement, etc. Dans chaque cas, une certaine dissymétrie caractéristique est nécessaire en chaque point du corps. Les dissymétries seront encore plus com- plexes, si l’on suppose que plusieurs de ces phénomènes coexis- tent dans un même milieu ou si ces phénomènes se produisent dans un milieu cristallisé qui possède déjà, de par sa constitution, une certaine dissymétrie. Les physiciens utilisent souvent les conditions données par la symétrie, mais négligent généralement de définir la symétrie dans un phénoméne, parce que, assez souvent, les conditions de symétrie sont simples et presque évidentes a priori ( ~ ). , Dans l’enseignement de la Physique, il vaudrait cependant mieux exposer franchement ces questions : dans l’étude de l’électricité, par exemple, énoncer presque au début la symétrie caractéristique du champ électrique et du champ magnétique; on pourrait ensuite se servir de ces notions pour simplifier bien des démonstrations.  Au point de vue des idées générales, la notion de symétrie peut être rapprochée de la notion de dtmension : ces deux notions fondamentales sont respectivement caractéristiques pour le n1iliell ( 1 ) Les cristallographes qui ont à considérer des cas plus complexes ont établi la théorie générale de la symétrie. Dans les traités de Cristallographie physique (qui sont en même temps de véritables traités de Physique), les questions de sy- métrie sont exposées avec le plus grand soin. Voir les traités de lVlallard, de Liebisch, de Soret.  

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    SUR LA SYMTRIE DANS LES PHNOMNES PHYSIQUES, SYMTRIEDUN CHAMP LECTRIGLUE ET DUN CHAMP MAGNTIQUE;

    PAR M. P. CURIE.

    1. Je pense quil y aurait intrt introduire dans ltude desphnomnes physiques les considrations sur la symtrie fami-lires aux cristallographes.Un corps isotrope, par exemple, peut tre anim dun mouve-

    ment rectiligne ou de rotation; liquide, il peut tre le sige demouvements tourbillonnaires; solide, il peut tre comprim outordu ; il peut se trouver dans un champ lectrique ou magntique;il peut tre travers par un courant lectrique ou calorifique ; ilpeut tre parcouru par un rayon de lumire naturelle ou polariserectilignement, circulairement, elliptiquement, etc. Dans chaquecas, une certaine dissymtrie caractristique est ncessaire enchaque point du corps. Les dissymtries seront encore plus com-plexes, si lon suppose que plusieurs de ces phnomnes coexis-tent dans un mme milieu ou si ces phnomnes se produisentdans un milieu cristallis qui possde dj, de par sa constitution,une certaine dissymtrie.

    Les physiciens utilisent souvent les conditions donnes par lasymtrie, mais ngligent gnralement de dfinir la symtriedans un phnomne, parce que, assez souvent, les conditions desymtrie sont simples et presque videntes a priori ( ~ ).

    ,

    Dans lenseignement de la Physique, il vaudrait cependant mieuxexposer franchement ces questions : dans ltude de llectricit,par exemple, noncer presque au dbut la symtrie caractristiquedu champ lectrique et du champ magntique; on pourrait ensuitese servir de ces notions pour simplifier bien des dmonstrations.Au point de vue des ides gnrales, la notion de symtrie peut

    tre rapproche de la notion de dtmension : ces deux notionsfondamentales sont respectivement caractristiques pour le n1iliell

    ( 1 ) Les cristallographes qui ont considrer des cas plus complexes ont tablila thorie gnrale de la symtrie. Dans les traits de Cristallographie physique(qui sont en mme temps de vritables traits de Physique), les questions de sy-mtrie sont exposes avec le plus grand soin. Voir les traits de lVlallard, deLiebisch, de Soret.

    Article published online by EDP Sciences and available at http://dx.doi.org/10.1051/jphystap:018940030039300

  • 394on se passe un phnomne et pour la ~wccrz~lem qui sert en va-luer lintensit.Deux Inilieux de mme dissymtrie ont entre eux un lien parti-

    culier, dont om peut tirer des consquences physiques. Une liai-son du mme genre existe entre deux grandeurs de mme dimen-sion. Enfin, lorsque certaines causes produisent certains effets, leslments de symtrie des causes doivent se retrouver dans leseffets produits. De mme, dans la mise en quation dum phno-mne physique, il y a une liaison de cause effet entre les gran-deurs qui figurent dans les deux membres et ces deux membresont mme dimensions.

    II. OPRATIONS DE RECOUVREMENT ET LMENTS DE SYMTRIE. -Ltablissement des divers types de symtrie peut tre divis endeux grands Chapitres, suivant quil sagit de dfinir la symtriedun systme limit ou dun systme qui peut tre regard commetant illimit. Nous ne nous occcuperons ici que dun systmelimit 1 ) .

    Considrons un systme dfini laide de donnes analytiqueset de trois axes coordonns rectangulaires, par exemple. Le sys-tme possdera une certaine symtrie si, en se servant dautresaxes coordonns rectangulaires, il se trouve encore dfini avec lesmmes donnes analytiques.

    Les lments (points, droites, plans, etc.) dfinis avec lesmmes donnes analytiques et rapports ces divers groupesdaxes sont des lments

    ~LOn2olo~ ices ou c~le mme espce.- --------------- -

    ( _ ) La thorie de la constitution des corps cristalliss nest autre chose quela thorie gnrale de la symtrie dans un milieu illimit ayant une constitu-tion priodique. Cest une thorie admirable qui a t difie par Bravais (recher-ches cristallographiques), par Jordan (Annali di Matematica, p. 167, 1868; p.322,r86g) et par de Fedorow ( ,Socit minralogique de ,Saint-Ptersbourg, 1879 x884, en langue russe; Zeitsc7zri~"~fi.ir~ I~rystaZZograplzie, t. XX, p. 25, t8g~}. Rcem-ment, Schoenflies a donn un excellent Trait didactique de cette thorie (I(rys-tallsysteme und Krystallstruktur; Leipzig, 1891).

    Les corps cristalliss peuvent tre diviss en 32 groupes, si lon considre seu-lement la symtrie de la 1orme extrieure; mais la thorie prvoit, pour la struc-ture interne de ces substances, 23o types de symtrie distincts. Si tous ces typesse trouvent raliss dans la nature, cest pour les physiciens une vritable richesse,car ils ont alors leur disposition 23o milieux dous de symtries diffrentes.

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    Lopration qui reprsente le passage dun premier systme un second sera une opration de recouvrement ( 1 ).

    Il existe deux espces daxes coordonns rectangulaires sym--triques lun de lautre. On aura une opration de recouprenlenldu premier genre dans le systme, quand lopration reprsentele passage dun systme daxe un autre identique. Loprationest alors quivalente un simple dplacement dans lespace. Il ya rptition des mmes lments dans le systme.On aura ume opration de zecozcvrem2ent du deuxinle genre

    ou trans/or,nation syvntrze~ue pt~opnerr2ent dite, lorsque lopra-tion reprsente le passage dun sys tme daxes un autre sym-trique du premier. Le systme est alors identique son imageobtenue par mirage.On dmontre facilement que, pendant les oprations de recou-

    vrement t dun sys tme limit, un point au m oin s reste toujoursfixe dans lespace. Il en rsulte qutablir tous les types de sym-trie possibles dun systme limit revient tablir tous les typesde syn2tnie cczetozcn dzcn point qui est le centre de figure dusystme.

    Les oprations de recouvrement du premier genre peuvent tou-jours tre obtenues par une simple rotation autour dun axe derptition (plus gnralement appel axe de ~~jntrie), passantpar le point. Laxe dordre j (q nombre entier) donnera le recou-vrement du systme pour des rotations dangles o, 1, 2, ... ,1) fois 27, ,q - lOIS qNous considrerons une direction et un sens chaque axe dit

    systme, ce qui double le nombre des axes; car, dans un axe, nousen compterons deux dirigs en sens contraires lun de lautre. Sices deux axes de sens contraires sont despce diffrente au pointde vue des rptitions (par exemple laxe dune pyramide rgulire)et dordre q, nous les dsignerons par ( Lc~ 1~~.

    Si ces deux axes de sens contraires sont de mme espce parrptition (exemple laxe principal dun prisme) et dordre ~, nousles dsignerons par ( 9-Lq). On a alors un axe doubl. Dans cecas, il existe ncessairelnent dans le systme un axe de rptition

    (1) Deck Operation des cristallographes allemands.

  • 396dordre pair normal laxe doubl qui permet de renverser celui-ci sur lui-mme par une rotation de 1$o faisant partie des op-rations de recouvrement du systme.

    Les oprations de recouvrement du deuxime genre peuventtoujours tre obtenues par un mirage accompagn dune rotationautour dun axe normal au plan de mirage. Plusieurs cas sont considrer :

    10 La rotation est nulle; on a un simple mirage et le systme aun plan de syn t~Le, - P.

    2 La rotation est gale 1800; on a un centre de syjntrte,- C.

    30 Laxe normal au plan est un axe de rptition dordre q etlon a q transformations symtriques; chacune de ces oprationsconsiste en un mirage suivi dune des rotations

    on a alors un plan de symtrie direct dordre q, nous le dsi-gnerons par Pg.

    4 Laxe normal au plan est un axe de rptition dordre q, etlon a q transformations symtriques ; chacune de ces oprationsconsiste en un mirage suivi d une des rotations

    autour de laxe. On a alors un plan de symtrie alterne dor-dre q : nous le dsignerons par q.Le modle reprsent (fig. 1) a un axe dordre 4 avec un plan P4 de symtrie

    directe dordre 4. Les quatre flches infrieures sont obtenues par miragedirect des quatre flches suprieures et rciproquement. On restitue lesystme par mirage simple ou accompagn dune rotation dun certainnombre de fois 90.Le modle ( f g. 2 ) a un axe dordre 4 avec un plan r, de symtrie al-

    terne dordre 4, normal sa direction. Les quatre flches infrieures alter-nent en position avec les images obtenues par mirage direct des quatreilches suprieures. On restitue le systme par un mirage suivi dune rota-tion dun nombre impair de fois ~5.

  • 397On peut remarquer que le modle de la f~y. ~ est superposable son

    Iiig. r.

    image vue dans une glace, bien quil ne possde ni plan ni centre de sym-trie. Il a seulement un plan de symtrie alterne (1 ).

    fi 1~. 2.

    ( 1 ) P. CURIE, Bulletin de la Soc. minral. (Sur les questions dordre, t. VII,p. 89; 1884. - Sur la symtrie, t. VII, p. 4,8; ~88!~ ).

  • 398III. LES GROUPES DOPRATIONS DE RECOUVREMENT. --- Toutes

    les oprations de recouvrement dun systme sont dfinies laidedes lments de symtrie que nous venons dnumrer.Un groupe doprations de recouvrement sera une runion

    doprations telles que deux quelconques des oprati ons effectuessuccessivement donneront le mme rsultat que celui quon obtientpar une opration unique faisant partie du groupe.Nous donnons ici le Tableau complet de tous les groupes dop-

    rations de recouvrement autour dun point. Ces oprations sontcompltement spcifies par lnumration des lments de sym-trie.

  • 399Dans ce Tableau,

    ( L~, Zq ) dsignent, un axe dord re ~ et celui de sens contraire dune autreespce, .

    ( 2 h q ) un axe dordre c~ doubl,C un centre de symtrie,P un plan de symtrie,P ~ un plan de symtrie di lecte dordre q,7i.q un plan de symtrie alterne dordre q.On voit que les groupes dlments de symtrie peuvent t tre partags

    en sept classes cl se distinguant les unes des autres par la nature du groupedaxes quelles contiennent. Chaque classe peut exister avec ou sans trans-formation symtrique proprement dite. Il y a gnralement plusieurs ma-nires de donner la symtrie proprement dite un groupe qui ne contientque des axes. On obtient en tout Ig~amzlles,f. Considrons, par exemple,la classe III et supposons = 3, on aura le groupe daxes 2 L3, ( 3 L~, 3 L2),cest- -dire un axe principal doubl dordre 3, avec trois axes binaires etceux de sens contraire dune autre espce 3 (Lz, L~,~; ces trois axes sont nor-maux laxe principal et forment entre eux des angles de 120. Ce systmepeut exister sans autre lment de symtrie [ famille (8), forme cristalline duquartz], ou avec un plan de symtrie dordre 3 normal laxe principal (P3)et 3 plans de symtrie 3 P passant par laxe principal et par les axes bi-naires [famille (9) prisme triangulaire. On peut encore avoir un systmesymtrique [famille (10), rhombodre~ avec un plan de symtrie alterne 7:3normal laxe principal, 3 plans de symtrie passant par laxe principal etnormaux aux axes binaires et un centre de symtrie.Chaque famille des classes II et III contient une infinit de groupes, ~

    peut tre un nombre entier quelconque. Les familles des autres classes necontiennent chacune quun seul groupe.Dans les familles (5) et (9) il y a un centre de symtrie quand est

    dordre pair. Dans les familles (6) et (10), il y a un centre de symtriequand q est dordre impair.Dans la classe III, les axes L2 et L~ se confondent, mais sont de sens con-

    traire lun de lautre si q est impair. On a, au contraire, des axes binairesdoubls de deux espces diffrentes si q est pair.

    Les valeurs N donnent lordre de chaque groupe. N est le nombre depoints homologues entre eux dans le systme, lorsque les points considrsne sont situs sur aucun axe ni sur aucun plan de symtrie. N est en-core le nombre de systmes daxes coordonns rectangulaires pour lequelle systme se prsente sous un mme aspect.

    Les systmes ayant la symtrie des familles i, ~l, 8, 11, r4, 16, 18 qui necontiennent que des axes ne sont pas superposables leur image obtenuepar mirage, ils possdent la dissymtrie nantion?,oi-phe (1 ).----------~-------~---~-----------------

    ------- -- ---

    -- -

    ---

    ( 1) Pour dtails plus complets, voir les traits de cristallographie. t in aussi

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    Une notion trs importante au point de vue qui nous occupe estcelle des intergroupes. Un groupe dlmenus de symtrie est unintergroupe dun groupe de symtrie plus leve lorsque toutes lesoprations de recouvrement du premier groupe font partie desoprations de recouvrement du second.

    Cest ainsi, par exemple, que le groupe ( i 3 ) symtrie ttradrique estun intergroupe du groupe (i5) symtrie cubique. Le groupe (L616), 6 Pde la famille (7) ( symtrie dune pyramide hexagonale rgulire) est uninter grou pe du groupe 2 ~~6 , 6 L2 6 L~ C de la famille (9) (prisme hexago-P6 6 " 6 P~nal rgulier). Un groupe de ( 4 est un intergroupe des groupes ( 5 ), (6),(7), (8), (9), (io) pour une mme valeur de q, etc.

    IV. DISSY1VITI~lE CARACTRISTIQuE DES PHNOMNES PHYSIQUES.Considrons maintenant un point quelconque dun milieu dansun tat physique quelconque. La symtrie en ce point sera nces-sairenienl caractrise par un des groupes du Tableau qui pr-cde ( 1 ).Nous noncerons les propositions suivantes :La symtrie caractristique dittiphnomtie est la symtrie

    niaxin2cc con1patible avec lexistence dit phnomne.Un phnonlne peut exister dans un t2ilieit qui possde sa

    symtrie caractristique ou celle dun des intergroupes de sasyrntrie caractristique.

    Autrement dit, certains lments de symtrie peuvent coexisteravec certains phnomnes, mais ils ne sont pas ncessaires. Ce quiest ncessaire, cest que certains lments de symtries nexistentpas. Cest la dissymtrie qui cre le phnomne.

    BRAVAIS, Recherches cristallographiques,. JORDAN, Sur les groupes de mouve-ments (Annali di Matematica, 1888); P. CURIE, loc. cit.

    ( ) Certains esprits peuvent hsiter transporter un milieu dans un tatphysique quelconque une classification qui a t tablie dabord au point de vuede la Gomtrie pure. Nous ferons remarquer que lon peut ramener tous les rai-sonnements qui servent ltablissement des groupes la forme suivante : soientA, B, C trois systmes daxes coordonns rectangulaires pour lesquels un systmese prsente sous un mme aspect, soit D un quatrime systme daxes coordon-ns rectangulaires qui est plac par rapport C de la mme faon que B par rap-port A; D sera encore un systme daxes coordonns pour lequel le systme seprsentera sous le mme aspect que pour A, B, C. Le mode de raisonnement neprjuge rien sur la nature du systme.

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    Il serait beaucoup plus logique dappeler plan de dissymtrietout plan qui ne serait pas un plan de symtrie; axe de dissymtrietout axe qui ne serait pas un axe de symtrie, etc., et, dune ma-nire gnrale, de donner la liste des oprations qui ne sont pasdes oprations de recouvrement dans ce systme. Ce sont ces op-rations-l qui indiquent une dissymtrie et, par consquent, uneproprit possible dans le systme. Mais, dans les groupes quenous avons considrs, il y a un nombre infini doprations name-nant pas le recouvrement et gnralement un nombre fini dopra-tions de recouvrement : il est donc beaucoup plus simple de don-ner la liste de ces dernires oprations.On peut encore voir que quand plusieurs phnomnes de natures

    diffrentes se superposent dans un mme systme, les dissymtriessajoutent. Il ne reste plus alors comme lments de symtrie dansle systme que ceux qui sont communs chaque phnomne prissparment.

    Lorsque certaines causes produisent certains e~ts, les l-ments de symtnie des causes doivent se retrouver clans les ef-fets produits.

    Lorsque certains effets rvlent une certaine dissymtrie,cette dissymtrie doit se retrouver dans les causes qui lui oJ2tdonn naissance..

    La rciproque de ces deux propositions nest pas vraie, au moinspratiquement, cest--dire que les effets produits peuvent tre plussymtriques que les causes. Certaines causes de dissymtrie peu-vent ne pas avoir daction sur certains phnomnes ou du moinsavoir une action trop faible pour tre apprcie, ce qui revientpratiquement au mme que si laction nexistait pas.

    Il y a intrt, au point de vue des phnomnes physiques, con-sidrer part les groupes contenant un axe disotropie. Cesgroupes sont au nombre de cinq; nous les dsignerons par (a),(b), (c), (d), (e).

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    Le groupe cylindrique (a), le plus symtrique, possde leslments de symtrie du cylindre circulaire droi t : cest--dire unaxe disotropie doubl 2Loo avec une infinit daxes binaires dou-bls 00 L~ normaux laxe principal et passant par le centre defigure, un plan de symtrie directe P, dordre cc normal laxeprincipal, une infinit de plans de symtrie directe 00 P2, dordre 2, ypassant par laxe principal, un centre de syntrie C.

    Lorsque lon comprime dans un sens un corps isotrope, il devientanisotrope et possde la symtrie du groupe cylindrique (a). Onsait duun corps ainsi comprim a les proprits optiques descristaux un axe optique; la symtrie ( a) est prcisment lasymtrie maxima cornpatible avec lexistence de ce phnomne.Les corps cristalliss un axe optique ont des symtries qui sontdes intergroupes de la symtrie (a).

    Les autres groupes ( b ), (c), (d), (e), axe disotropie, sont desintergroupes du groupe cylindrique (a).Le groupe (b) possde toujours laxe disotropie doubl et les

    axes binaires ; mais il ne possde plus ni centre ni plans desymtrie. Le groupe ( b) est lintergroupe holoaxe du groupe (a).Le groupe (b) a la symtrie dun cylindre ou dun fil que lon atordu autour de son axe. Cest la symtrie du centre de figure dunsystme form de deux cylindres identiques ayant leurs axes dansle prolongement lun de lautre et tournant chacun autour de cetaxe avec des vitesses angulaires gales et de signes contraires. Lasyn1trie de torsion ( b) ne contenant que des axes de rptition,possde la dissymtrie non superposable (nantiomorphie) qui est

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    ncessaire pour le phnomne de la polarisation rotatoire ordinairedes corps actifs. On peut encore dire que la symtrie ( b) estralise lorsque lon remplit un cylindre dun liquide dou de lapolarisation rotatoire. La forme cristalline du quartz 2 Lg, 3 (L, L,)a la symtrie dun intergroupe de (b).

    Le yj~oic~e (c) possde un axe disotropie et celui de sens con-traire dune autre espce (Loo L ao); cet axe nest donc plus doubl,(autrement dit, laxe ne se prsente plus de la mme faon par lesdeux bouts). Le groupe (c) a encore une infinit de plans desymtrie passant par laxe disotropie; mais il iie possde plus, nile plan de symtrie normal laxe, ni le centre de symtrie, ni lesaxes binaires du groupe cylindrique. Cest la symtrie en un pointquelconque de laxe dun tronc de cne circulaire droit. Cest lasymtrie dune force, dune vitesse, dun champ o sexercelattraction universelle; cest encore la sYl1ltrie du chan2p lec-trique. Tous ces phnomnes sont trs convenablement repr-sents par une flche au point de vue spcial de la symtrie.

    Considrons, par exemple, le champ de lattraction universelle;une sphre matrielle M, dont le centre est en un point 0, agit enun point extrieur A, de manire y crer un champ o peutsexercer laction de lattraction newtonienne. Si nous supposonsque la matire M napporte par elle-mme aucune dissymtrie,nous voyons que la ligne OA est un axe disotropie, que tout planpassant par OA est un plan de symtrie, et ce sont l les seulslments de symtrie passant par le point A. Cest la symtrie dugroupe (c). Donc le champ de lattraction newtonienne pourra serencontrer dans un milieu possdant la symtrie de ( c) ou dun deses intergroupes; du reste, on ne peut ilnaginer que la symtriepuisse tre suprieure (c), car elle devrait tre dans ce cas la sy-mtrie du groupe cylindrique (c~) ou celle du groupe sphrique (ig)et le champ naurait pas de sens et il en serait de mme des forceset des vitesses. Si nous plaons en A une sphre matrielle, onaura une force agissant sur cette matire. Le corps pourra semettre en mouvement dans la direction AO et prendre une cer-taine vitesse et rien l dedans ne troublera la symtrie du systme ;donc (c) reprsente en mme temps la symtrie dune forceagissant sur la matire pondrable et la symtrie de la matireanime dune certaine vitesse.

  • 404Pour tablir la symtrie du champ lectrique, supposons que ce

    champ soit produit par deux plateaux circulaires de zinc et decuivre placs en face lun de lautre, comme les armatures duncondensateur air. Considrons entre les deux plateaux un pointde laxe comm un, nous voyons que cet axe est un axe disotropieet que tout plan passant par cet axe est un plan de symtrie. Leslments de symtrie des causes doivent se retrouver dans les effetsproduits; donc le champ lectrique est compatible avec la symtriede (c) et de ses intergroupes.

    Le groupe ( a) symtrie cylindrique et le groupe (1 g) symtriesphrique sont les seuls ayant pour intergroupe (c). Il nest doncpas vraisemblable que le champ lectrique puisse avoir une s.ym-trie suprieure (c). Ce dernier point peut du reste tre dmontrrigoureusement si lon admet, comme nous lavons vu plus haut,que la force agissant sur un corps pondrable a elle-mme poursymtrie caractristique le groupe (c). Supposons, en effet, quunesphre conductrice charge dlectricit soit isole dans lespace,puis que lon fasse natre un champ lectrique par une cause quel-conque. Une force agira sur la sphre dans la direction du champ.La dissymtrie des effets doit se retrouver dans les causes qui luiont donn naissance ; la force ne possdant pas daxe de symtrienormal sa direction, le systme de la sphre charge et du champne doit pas non plus possder cet lment de symtrie. IVTais lasphre charge, considre isolment, possde des axes disotropiedans toutes les directions; la dissymtrie en question provientdonc du champ lectrique qui ne doit pas possder daxe de sy-mtrie normal sa direction. Le champ lectrique ne peut doncpas avoir la symtrie cylindrique ou sphrique, et sa symtrie carac-tristique est celle du groupe (c). La symtrie du courant lec-trique et celle de la polarisation dilectrique est ncessairement lamme que celle du champ qui donne naissance ces phnomnes.

    Les phnomnes pyrolectriques et pizolectriques viennentapporter un nouvel appui aux conclusions qui prcdent sur lasymtrie caractristique du champ lectrique. Un cristal de tour-maline, par exemple, se polarise lectriquement dans la directionde son axe ternaire lorsque lon chauffe le cristal ou lorsquonle comprime dans la direction de laxe. Or lchauffement ou cettecompression ne modifient en rien la symtrie du cristal qui est

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    (L;{, ~)3P, un axe ternaire (avec laxe de sens contraire duneautre espce) par lequel passent trois plans de symtrie; cest l unintergroupe de (c)(Looloo)ooP, la symtrie est par consquentcompatible avec lexistence dune polarisation dilectrique sui-vant laxe.

    Enfin, nous remarquerons que le champ lectrique dterminedans les liquides les mmes phnomnes optiques que ceuxdonns par compression des solides (phnomnes de Kerr).La symtrie caractristique de ces phnomnes est la symtriecylindrique (a) dont le groupe ( c~ est un intergroupe; on voitdonc quune partie seulement de la dissymtrie caractristique duchamp lectrique est rvle par le phnomne de Kerr. Les ph-nomnes de dilatation lectrique (phnomne Duter) ne rvlentde mme que la dissymtrie du groupe (a).Le groupe (d) possde un axe disotropie et laxe de sens con-

    traire dune autre espce (Loo Zao) : cet axe nest donc pas doublpar rptition ; mais le systme possde un centre de symtrie etun plan de symtrie dordre ce normal laxe. Les axes Loo et loide sens contraires sont donc symtriques lun de lautre, et lonpeut dire que laxe disotropie est doubl par symtrie. Le groupene possde ni les axes binaires, ni les plans de symtrie passantpar laxe principal du groupe cylindrique (a). Le groupe (d)donne la symtrie ou centre de figure dun cylindre circulaire droitqui tourne autour de son axe avec une certaine vitesse. Cestencore cette symtrie quil faut rapporter un couple, une vitesseangulaire, un clzccm~ magwtic~zce.

    tablissons, par exemple, la symtrie caractristique du champmagntique. Considrons pour cela le champ magntique quiexiste au centre dune circonfrence parcourue par un courantlectrique; le champ est dirig normalement au plan de la circon-frence. Cherchons la symtrie des causes, cest--dir e la symtrieau centre de la circonfrence parcourue par le courant. On auradabord un axe disotropie normal au plan du courant. Le courantlectrique est compatible avec lexistence de plans de symtriepassant par la direction du courant; le plan de la circonfrencesera donc un plan de symtrie. Le courant lectrique nadmet niaxe de rptition, ni plan de symtrie normal sa direction. Il nya donc pas daxe dans le plan du cercle ni de plans de symtrie

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    passant par laxe disotropie. La symtrie des causes est donc legroupe (~) 2013~p2013 C. Ces lmen ts de symtrie sont compatiblesavec Inexistence du~i champ magntique passant par laxe diso-tropie ; puisque les lments de symtrie des causes se retrouventdans les effets produits.On voit quun champ magntique peut possder un plan de

    symtrie normal sa direction. Le champ magntique est, au con-traire, incompatible avec la prsence dun axe binaire normal sadirection. Pour le prouver, nous allons noms servir des phnomnesdinduction. Considrons, par exemple, un fil rectiligne animdune certaine vitesse normale sa direction. Un pareil systmepossde un axe binaire dans le sens de la vitesse. Supposonsmaintenant quun champ magntique existe dans la direction nor-male au fil et la vitesse de dplacement; une force lectro-motrice dinduction natra dans le fil. Ce phnomne est incom-patible avec la prsence dun axe binaire dirig dans le sens dudplacement, cest--dire normal au fil. La dissymtrie des effetsdoit se retrouver dans les causes ; la disparition ncessaire delaxe binaire dont nous avons parl ne peut provenir que de laprsence du champ magntique; celui-ci ne peut donc pas avoirdaxe binaire normal sa direction. (La mme dmonstrationpourrait se faire en considrant un circuit circulaire normal unchamp magntique. On supposerait que ce circuit se dilate sanschanger de forme en donnant naissance un couran t dinduction. )

    Les groupes cylindriques (cz) et sphriques (1 g) ont ponrinter-groupe 1), mais lexistence des axes normaux entre eux dans cesgroupes montre quils ne peuvent convenir pour reprsenter lasymtrie du champ magntique. Le champ magntique est doncseulement compatible avec le groupe (d) et ses intergroupes ( ).Le phnomne de la polarisation rotatoire magntique vient

    encore confirmer cette conclusion (:1).__ -

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    (1) P. CURIE, loc. cit., i88j, et Arclzives des Sc. phys. et nat., t. XXIX; 1893.Lord Kelvin a t amen supposer que laimantation est due une dfor-

    mation dun milieu particulier. Cette dformation est simplement une rotation,qui, dans ce milieu tout spcial, provoque la naissance dun couple lastiqueantagoniste. Voir Traduction des Confrences de Sir Tlzomson, Note de 1B1. I3ril-louin. Cette conception est en complet accord avec la symtriequi prcde.

    ( 2) Pour traiter convenablernent la question de la polarisation rotatoire au

  • 407Un corps polaris magntiquement possde la mme symtrie

    que le champ magntique.Les phnomnes de dilatation magntique du fer rvlent 5eu-

    lement la dissymtrie du groupe cylindrique (a) dont (d) est unintergroupe.Un grand nombre de cristaux sont caractriss par des groupes de

    symtrie qui sont des intergroupes de la symtrie magntique, telsque ceux dapatite 1J6 Z~ C, de gypse, de chlorure de fer, damphi-P, ~;bole

    ~~ l~, C. Il pourrait se faire que ces cristaux fussent aimantsnaturellement de par leur constitution ; jai cherch sans succs constater cette polari t par exprience.On a coutume de reprsenter un champ magntique par une

    flche; cette reprsentation, qui noffre souvent aucun incon-vnient, est dfectueuse au point de vue spcial de la symtrie,puisque le champ magntique nest pas modifi par un mirage parrapport un plan normal sa direction et quil est chang de senspar um mirage par rapport un plan passant par sa direction. Cestprcisment le contraire qui se passe pour la flche reprsentative.Le groupe (e) possde seulement un axe disotropie (Loo ~c~)

    non doubl. Le groupe (e) est un intergroupe commun aux quatregroupes (a), (b), (c), (d ) ; il possde les dissymtries runies deces quatre groupes. Il est, par consquent, compatible avec lexis-tence des phnomnes qui ont pour symtrie caractristiques lunquelconque des quatre autres groupes. Le groupe (e) possde ladissymtrie nantiomorphe.

    Les cinq groupes (a), (b), (c), (d), ( e ) sont relis entre eux la maniredes types de symtrie dun mme systme cristallin. Si nous empruntonsle langage des cristallographes, nous dirons que le groupe (c~) donne la sy-mtrie complte ou holodrique du systme cylindrique. Le groupe (b)correspond hmidrie holoaxc (hmidrie plagidre ou hmidrie nan-tiomorphe). Le groupe (c), lhmidrie hmimorphe (hmidrie facesinclines). Le groupe (d), la parahmidrie (hmidrie faces parallles);enfin, le groupe ( e ) correspond la ttartodrie.

    point de vue de la symtrie, il faut faire intervenir les lments de symtriepropres aux milieux illimits dont nous navons pas parl. Un corps parcourupar un rayon de lumire polaris circulairement possde par exemple un axehlicodal disotropie.

  • 408Bien que chaque groupe contienne un nombre infini de transformations

    de recouvrement, on peut cependant dire que les groupes ( b ), ( c ) et (d)ne renferment que la moiti et le groupe ( e ) que le quart des oprationsde recouvrement du groupe (a).Le modle reprsent dans les f g. 3, 4, 5, 6, 7 donne pour diverses

    orientations des flches les divers intergroupes axe principal dordre @des groupes (a), (b), (c), (d), (e).

    Lafig. 3 donne [famille (9) q ---- 4] lintergroupe du groupe (a) cylindrique ;cest la symtrie du prisme droit base carre. Par laxe principal passentquatre plans de symtrie, deux dune premire espce passent par les fl-ches, les deux autres dune deuxime espce sont bissecteurs des anglesque forment entre eux les premiers. Les positions des axes binaires doublsL2 et L2 et du plan Pi normal laxe sont indiques sur la figure.

    La f g. 4 [famille (8) nantiomorphe, ~ = 4] donne un intergroupe dela symtrie de torsion ( b ) ; cest la symtrie dun cristal de sulfate de stry-chnine.La fig. 5 ( famille ( ; ), ~ = 4] donne un intergroupe de la symtr ie du

    champ lectrique (c), il y a quatre plans de symtrie passant par laxe : cestprcisment le type de symtrie dun cristal de calamine qui est la foispizolectrique et pyrolectrique.

    Fig. 3.1

    Fy. 4. Fi~;. 5. ~ig. 6. Fig. ~.

    La fig. 6 [famille ( 5 ), y == 4] donne un intergroupe de la symtrie ma-gntique ( d) ; cest la symtrie des cristaux de schelite et drythrite.

    Enfin la flg. 7 ( famille (4) nantiomorphe, g = 4] donne un intergroupedu groupe (e), axe disotropie (cristal de penta-rythrite). Dans la fi~-. 7,les ilches du bas entranent la dissymtrie du champ magntique, les fl-ches du haut celle du champ lectrique. La runion de ces flches entranelide dune dissymtrie de torsion, car un mobile qui tournerait autour delaxe dans le sens des flches infrieures, tout en avanant paralllement laxe dans le sens des flches suprieures, dcrirait une hlice.

  • 409V. SUPEIIPOSITION DES CAUSES DE DISSYMTRIE DANS UN MME

    MILIEU. 2013 Lorsque deux phnomnes de nature diffrente sesuperposent dans un mme milieu, les dissymtries sajoutent. Silon superpose les causes de dissymtrie de deux des trois groupes(b), (c), (d), en faisant cependant concider les axes disotropie,on obtient le groupe ( e ), car laxe disotropie sera le seul lmentde symtrie commun aux deux groupes superposs. Or (e) possdeles dissymtries runies des trois groupes. Donc, en faisant con-cider, comme nous venons de le dire, les causes de dissymtrie dedeux des trois groupes (b), (c), (d), on obtiendra la dissymtriecaractristique du troisime groupe.

    .

    Supposons, par exemple, que nous superposions dans un corpsM/2 champ lectrique ( c) et un chalnp magntique ( cl) de rnmedirection, laxe disotropie subsistera seul; la prsence du champlectrique est incolnpatible avec lexistence dun centre et dtireplan de symtrie normal laxe, et la prsence du champ magn-tique ncessite la disparition des plans de symtrie passant parlaxe. La symtrie est donc celle de (e) qui est un intergroupede (b) : on aura donc la dissymtrie de torsion dans le corps.Prenons, par exemple, un fil de fer, aimantons-le dans le sens desa longueur; puis faisons-le parcourir par un courant, le fil setord (exprience de Wiedemann).

    Il est peut-tre possible de crer un milieu capable de donnerla polarisation rotatoire des corps actifs en superposant dans uncorps symtrique un champ lectrique et un champ magntique.Du moins, ceci ne serait pas en contradiction avec les conditionsde symtrie. Dans le sens de laxe, on pourrait avoir super-position dun phnomne de polarisation rotatoire magntique(cest--dire changeant de sens avec le sens de la propagation dela lumire) et dun phnomne de polarisation rotatoire ordinaire.Normalement laxe, on pourrait avoir un pur phnomne depolarisation rotatoire ordinaire. Un pareil milieu symtrienan tiomorphe permettrait peut-tre encore de raliser certainesractions chimiques dissymtriques, ou de sparer les corps droitset gauches dans une combinaison racmique, ou encore de fairedposer dune solution sous une forme unique, les corps mol-cules symtriques, comme le chlorate de soude, qui se dposentordinairelnent en cristaux dissymtriques droits et gauches m-langs.

  • 4I0

    Au contraire, un champ lectrique ou un champ magntiquene sauraient isolment provoquer une raction dissymtrique,puisque ces phnomnes sont compatibles avec lexistence dunplan de symtrie.

    Supposons maintenant que nous superposions une ~~/7~/~ede torsion (b) et une dissymtrie magntique (d), on obtiendraencore la symtrie (e) qui est un intergroupe de la symtrie duchamp lectrique (c).

    Prenons un fil de fer, aimantons-le et tordons-le. Au momento la torsion se produit, une force lectromotrice prend naissancedans le fil qui est parcouru par un courant sil est plac dans un circuit ferm (exprience de ~riedemann~.

    Les conditions de symtrie nous montrent quil pourrait se fairequun corps molcules dissymtriques (dou de pouvoir rotatoireordinaire) se polarist dilectriquement lorsquon le place dansun champ magntique.

    Enfin, supposons que nous superposions une dissymtrie detorsion (b) et un champ lectrique (c), on aura de mme la sy-mtrie de (e) qui est un intergroupe de la symtrie magntique.Un fil de fer parcouru par un courant saimante dans le sens desa longueur quand on le tord (exprience de Wiedemann).

    Les conditions de symtrie nous permettent dimaginer quuncorps molcule dissymtrique se polarise peut-tre magnti-quement lorsquon le place dans un champ lectrique.

    Phnomne de Hall. - Superposons encore un champ lec-trique (c ) et un champ magntique (d) dans un mme milieu,mais en orientant angle droit lun de lautre la direction desdeux champs. Dans ces conditions, le seul lment de symtriecommun aux deux champs est un plan de symtrie passant par ladirection du champ lectrique et normal au champ magntique.On aura donc pour toute symtrie un plan P [groupe 41.De part et dautre du plan, les phnomnes devront tre sym-

    triques, mais, dans le plan, la symtrie nindique plus aucune con-dition. Considrons, par exemple, trois axes rectangulaires etune lame mtallique rectangulaire normale un axe 0 x qui passepar son centre de figure, ses cts tant parallles aux autres axesOy et ~ 2 . Si un courant parcourt la lame suivant laxe des z, iJne saurait y avoir une force lectromotrice suivant laxe des y,

  • 4II

    puisque le plan z 0 x est un plan de symtrie pour le courant etpour la lame. Si lon na pas de courant, mais si lon a, suivantlaxedes x, normalcment la lame, un champ magntique, il ne peutpas non plus y avoir de courant suivant laxe desy, puisque laxe,des x est un axe binaire pour le champ et pour la lame et, de,plus,il a un centre de symtrie. Si, mainuenant, on a la fois lechainp magntique suivant laxe des x et le courant suivant laxedes 2, laxe, le centre, le plan de symtrie disparaissent et rienne soppose plus, au point de vue de la symtrie, ce quuneforce lectromotrice se montre suivant laxe des y.La thorie de la propagation de la chaleur et de llectricit

    dans les corps cristalliss (Stokes, Thomson, Minnigerode, Bous-sinesq) montre que, pour certains cristaux, il y a lieu de tenircompte de certains coefficients dits rotationnels. Les cristaux en

    question sont ceux des familles (5) ~~~ Z~ et (6) L~ Z~ et de leursPq ~ qintergroupes (1), ( 2 ), (3), (4). Ces cristaux possdent t au maxi-mum un axe dordre q normal un plan de symtrie direct oualterne dordre c~, q tant un nombre entier quelconque. Un corpspolaris magntiquement possde la symtrie (~)-p2013? qui estp ccun cas limite des groupes (5) et (6) pour ~ _ Tous les cristauxqui, daprs la thorie, peuvent avoir des coefficients rotationnelsont pour type de symtrie un des intergroupes de la symtrie ma-gntique.La thorie difie pour les corps cristalliss sapplique admira-

    blement la symtrie magntique, et lexistence des coefficientsrotationnels explique toutes les particularits du phnomne deHall, sans quil soit ncessaire de faire intervenir autre chose quela symtrie du champ dans la thorie de la conductibilit.

    Si lon fait arriver llectricit par le centre dun disque mtal-lique plac normalement au champ magntique et si cette lectri-cit est recueillie uniformment sur les bords du disque, les lignesdcrites par le flux lectrique doivent tre des spirales (Boltz-mann) ( ).

    ( 2 ) Ce qui est fort curieux, cest que les cristaux pour lesquels la thorie deStokes avait t faite se montrent rfractaires, et M. Soret a, sans succs, re-cherch les effets des coefficients rotationnels dans le gypse pour la conductibilit

  • 4I2

    Phnomnes ~~.~rolectrigues et pizolectriques. --- Les cris-

    taux pyrolectriques ont ncessairement la symtrie dun inter-groupe du champ lectrique, puisque lchauffen1ent supposuniforme namne par lui-mme aucune dissymtrie. Les cristauxpizolectriques sont plus nombreux que les cristaux pyrolectri-ques. Ils comprennent, en effets, tous ceux-ci, puis ils renfermentdes cristaux qui prennent seulement, sous linfluence des effortsmcaniques, une symtrie infrieure celle dun champ lectrique.La blende par exemple ( cristal ttradrique) et le quartz ont dessymtries qui ne sont pas des intergroupes du champ lectrique.Le quartz a la symtrie 2 L3, 3 (L2 L~, ), un axe principal ternairedoubl et trois axes binaires non doubls normaux cet axe. Encomprimant suivant un axe binaire par exemple, on ajoute la dissy-mtrie cylindrique ( a) celle du quartz; il ne reste plus commelments que (L2, L~), un axe binaire non doubl qui peut deve-nir une direction de polarit lectrique.On peut montrer de mme quen comprimant dans la direction

    normale la fois un axe binaire et un axe ternaire, on feranatre encore une polarit suivant laxe binaire et que les coeffi-cients qui intervienent pour caractriser ces deux modes de dve-loppement de la polarit sont gaux et de signes contraires. Onpeut ainsi prvoir certaines particularits du phnomne; rmais cesconditions de symtrie ne sont pas les seules qui interviennentdans la thorie gnrale ( ).

    VI. LLAISONS ENTRE LES SYMTRIES CARACTRISTIQUES 1)ES DIVERS~VI1LIE~UX. - Nous avons suppos que la matire non cristallise et

    calorifique. Le phnomne de Hall a t seulement constat avec des mtaux etle gypse est un dilectrique. Les coefficients rotationnels se feraient peut-tresentir avec un corps mtallique cristallis prsentant la dissymtrie ncessaire;mais je ne crois pas que lon possde actuellement une substance convenablepour tenter lexprience.Pour la thorie de la conductibilit calorifique dans les cristaux, voir le rcent

    article de M. Soret dans le Journal de Physique, 1893; t. II, 2e sr., p. 24 ~ .Lord Kelvin a t le premier remarquer que le phnomne de Hall donnait unedmonstration de lexistene des termes rotationnels (W.THOMSON,Af~Ae/~.x/K~Pl-tys. Papers, t. 1, p. 281).

    () La thorie gnrale complte des proprits pizolectriques des cristauxa t tablie par Voigt (All. Ges. der Wiss., Gbttingen, isgo. -- Wied. Ann.,t. XLV, p. 523; 1892).

  • 4I3non doue de pouvoir rotatoire napportait par elle-mme aucunedissymtrie dans un systme ; nous avons fait implicitement lamme supposition pour le milieu qui remplit les espaces vides dematire. Cette supposition bien naturelle, mais toute gratuite, estindispensable; elle montre bien que nous ne pouvons avoir notionde la symtrie absolue; nous devons choisir arbitrairement une sy-mtrie pour un certain milieu et en dduire la symtrie des autresmilieux. Cette syntrie relative est, du reste, la seule qui nous int-resse. Si, par exemple, tout un systme est anim dune certainevitesse et que nous considrions un certain corps A dans le systme,il nous sera utile de connatre en gnral la symtrie du corps Apar rapport au systme, sans tenir compte de la dissymtrie com-mune cre par ltat de mouvement de tout le systme.

    Supposons que nous connaissions seulement en lectricit lesphnomnes gnraux de llectricit statique, de llectricit dy-namique, du magntisme, de llectro-magntisme et de linduc-tion, rien ne nous indiquerait exactement le type de symtrie qullconvient dattribuer au champ lectrique et au champ magntique.Nous pourrions, par exemple, choisir pour le champ magntiquela symtrie (c) ( que nous avons attribue plus haut au champ lec-trique) et, en raisonnant comme nous lavons fait, nous serionsconduits alors ncessairement prendre pour symtrie du champlectrique le groupe (d) (que nous avons attribu plus haut auchamp magntique). Il ny aurait aucune absurdit un pareilsystme, ni aucune contradiction avec notre hypothse initiale surla symtrie complte de la matire.

    Les phnomnes gnraux de llectricit et du magntismenous indiquent donc seulement une liaison entre les s,~mtuzesdu champ lectrique et du champ magntique, de telle sorte que,si lon adopte (c) pour la symtrie de lun, il faut admettre (d)pour la symtrie de Fautre, et rciproquement. Pour lever cetteindtermination, il faut faire intervenir dautres phnomnes, lesphnomnes lectrochimiques ou dlectricit de contact, les ph-nomnes pyro ou pizolectriques, ou encore le phnomne deHall, ou celui de la polarisation rotatoire magntique.

    Les dimensions des grandeurs lectriques et magntiques nousprsentent un exemple dindtermination tout fait comparable celui que nous venons de citer pour la symt~ie des milieux lec-

  • 4I4

    triques et magntiques. Les phnomnes gnraux de llectricitet du magntisme sont de mme incapables de lever cette indter-mination : il faudrait, pour y parvenir, faire intervenir dautres ph-nomnes, les phnomnes lectrochimiques, par exemple ( ~ ).

    VII. EN RSUM, les symtries caractristiques des phno-mnes ont un intrt gnral incontestable. Au point de vue desapplications, nous voyons que les conclusions que nous pouvonstirer des considrations relatives la symtrie sont de deuxsortes :

    Les premires sont des conclusions fermes mais ngatives, elles.rpondent la proposition incontestablement vraie : Il nest pasdeffet sccns causes. Les effets, ce sont les phnomnes qui nces-sitent toujours, pour se produire, une certaine dissymtrie. Sicette dissymtrie nexiste pas, le phnomne est impossible. Cecinous empche souvent de nous garer la recherche de phno-mnes irralisables.

    Les considrations sur la symtrie nous permettent encorednoncer une deuxime sorte de conclusions, celles-ci de naturepositive, mais qui noflrent pas la mme certitude dans les rsul-tats que celles de nature ngative. Elles ;rpondent la proposi-tion : Il nest pas de cause sans effets. Les effeus, ce sont les ph-nomnes qui peuvent natre dans un milieu possdant une certainedissymtrie; on a l des indications prcieuses pour la dcouvertede nouveaux phnomnes,; mais les prvisions ne sont pas desprvisions prcises comme celles de la Thermodynamique. On naaucune ide de lordre de grandeur des phnomnes prvus : onna mme quune ide imparfaite de leur nature exacte. Cette der-nire remarque montre quil faut se garder de tirer une conclusionabsolue dune exprience ngative.

    Considrons, par exemple, un cristal de tourmaline qui possdeune symtrie qui est un intergroupe de la symtrie du champ lec-trique. On en conclut que le cristal est peut-tre polaris lectri-quement. Plaons le cristal dans un champ lectrique, laxe orient- go du champ; la polarisation ne se montre en aucune sorte, on_

    __

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    ( 1 ) M. Abraham a dj fait une tentative dans ce sens ( Comptes rendus dessances de lAcadmie des Sciences, t. CXVI, p. I I 23 ; I8g3 ) .

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    na pas de couple apprciable agissant sur le cristal, et lon seraitport penser que le cristal nest pas polaris ou que, si la polari-sation existe, elle est plus petite que celle que lon pourraitvaluer. Cependant la polarisation existe et, pour la faire appa-ratre, il faut modifier lexprience, chauffer le cristal uniform-ment, par exemple, ce qui ne change cependant rien sa symtrie.

    SUR LA POSSIBILIT DEXISTENCE DE LA CONDUCTIBILIT MAGNTIQUEET DU MAGNTISME LIBRE;

    PAR M. P. CURIE.

    Le paralllisme des phnomnes lectriques et magntiquesnous amne naturellement nous demander si cette analogie estplus complte. Est-il absurde de supposer quil existe des corpsconducteurs du magntisme, des courants magntiques (1), dumagntisme libre?

    Il convient dexaminer si des phnomnes de ce genre ne seraientpas en contradiction avec les principes de lnergtique ou avecles conditions de symtrie. On constate quil ny aurait aucunecontradiction. Un courant magntique dgagerait de la chaleur;il aurait la symtrie du champ magntique qui lui a donnnaissance et jouirait de la curieuse proprit, pour un courant,dtre symtrique par rapport un plan normal sa direction. Lecourant de magntisme crerait un champ lectrique comme lecourant lectrique cre un champ magntique et suivant lesmmes lois.Une sphre isole dans lespace et charge de magntisme libre

    serait caractrise par le groupe sphrique (i8)ooLoo, nan-tiomorphe, cest--dire une infinit daxes disotropie doublspassant par le centre de la sphre dans toutes les directions; maispas de centre et aucun plan de symtrie. En eiet, la sphre estentoure de champs magntiques tous orients suivant les rayons------

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    (? ) M. Vaschy a dj pos cette question ( Trait dlectricit et de ?l~agne-tisme ) .