CORÉE DU NORD LE GOULAG DE LA FAIM - Amnesty · DE LA FAIM AVRIL 2007 – N°433 – LE MENSUEL...

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CORÉE DU NORD LE GOULAG DE LA FAIM AVRIL 2007 – N°433 – LE MENSUEL D’AMNESTY INTERNATIONAL MOUVEMENT BORDERTOWN CIUDAD JUÁREZ BURUNDI CORRUPTION DÉPOT À BRUXELLES X BELGIQUE- BELGIE PP 1/2345 BXL X Ne paraît pas aux mois de juillet-août. 9, rue Berckmans 1060 Bruxelles CORÉE DU NORD LE GOULAG DE LA FAIM

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CORÉE DU NORD

LE GOULAGDE LA FAIM

AVRIL 2007 – N°433 – LE MENSUEL D’AMNESTY INTERNATIONAL

MOUVEMENTBORDERTOWNCIUDAD JUÁREZ

BURUNDICORRUPTION

POT

À B

RU

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LLE

SXBELGIQUE-

BELGIE

PP

1/2345

BXL X

Ne paraît pas auxmois de juillet-août.

9, rue Berckmans1060 Bruxelles

CORÉE DU NORD

LE GOULAGDE LA FAIM

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ACTUEL� Burundi : Sale temps pour les femmes politiques� Paroles : «Être reconnus par l’ONU ne fait pas

de nous des privilégiés»� Insolites-Brèves

DOSSIERCORÉE DU NORD : LE GOULAG DE LA FAIM� «Telle qu’en elle-même l’éternité la change»� Nucléaire : un accord à qui perd gagne?� Une crise alimentaire qui fait système� Les femmes, victimes de choix� Une saignée démographique

MOUVEMENT� Femmes : Le Mexique s’invite à Bruxelles� Irene Khan : Un honoris causa pour Amnesty� Foire du Livre : Amnesty a un prix

ACTION� Lettres du mois� Bonnes nouvelles

CULTURE/AGENDA� La ville des femmes perdues� Un mort de plus� Sinistre cuillette

É D I T O R I A L

S O M M A I R E

Libertés ! • Rue Berckmans, 9 – 1060 Bruxelles • Tél : 02 538 81 77 Fax: 02 537 37 29 • [email protected] • www.libertes.be • Éditeur respon-sable : Sven Pitseys • Rédacteur en chef : Pascal Fenaux • Comité de rédaction : Bruno Brioni, Valérie Denis, Véronique Druant,Claude Gouzée, Samuel Grumiau, Anne Lowyck, Brian May, Suzanne Welles • Ont collaboré à ce numéro : Gilles Bechet, Sabina Jaworek(st.), Emmanuel Ngendanzi, Pierre Rigoulot • Iconographie : Brian May • Maquette : RIF • Mise en page : Gherthrude Schiffon •Impression : Remy Roto • Couverture : Des militaires nord-coréens défilent à Pyongyang devant le monument dressé à la gloire du GrandLeader, Kim Il Sung, fondateur du régime décédé en 1994 et père de Kim Jong Il. © PANOS / Dermot Tatlow

CHANGEMENT D’ADRESSE – ATTESTATION FISCALE – MODIFICATION, ANNULATION OU NOUVELLE COTISATION DE

MEMBRE/DONATEUR(TRICE)Madame Michele Ligot : [email protected]

� je change d’adresse (inscrire uniquement la nouvelle adresse)Nom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Prénom: . . . . . . . . . . N° de membre: . . . . . . .Adresse: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . N° . . . . . bte . . . . . . . . . .Code postal: . . . . . Localité: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Tél (obligatoire): . . . . . . . . . . . . . . . E-mail: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .� Oui, j'adhère aux objectifs d'Amnesty et souhaite devenir membre

� Je répartis le montant de : � ma cotisation � de mon abonnement sur toutel’année en complétant ce coupon et en le renvoyant à Amnesty International, 9 rue Berck-mans à 1060 Bruxelles. Tout montant qui dépassera 14,87€ (prix de la cotisation oude l'abonnement), sera considéré comme un «don», et par là-même jouira de la déduc-tibilité fiscale pour autant que ce supplément soit de 30 € ou plus.Je verse tous les mois, au départ de mon compte n° . . . . . . . . . . – . . . . . . . . . . . . . . lasomme de : � 2,5 € � 5 € � . . . . . . . . € (toute autre somme de mon choix)au profit du compte 001-2000070-06 de Amnesty International à partir du . . . . . . .. . . et jusqu’à nouvel ordre. Je conserve le droit d’annuler ou de modifier cet ordreà tout moment. ou je verse en une fois le mandat de . . . . . . . . . . . . . . au compte 001-2000070-06Nom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Prénom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Date de naissance: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Adresse: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . N° . . . . . . . . bte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Code postal: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Localité: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Tél (obligatoire): . . . . . . . . . . . . . . . . E-mail: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Profession: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Date: . . . . . . . . Signature:

Ne rien inscrire dans cette case s.v.p. (réservé à l'organisme bancaire)

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Le 30 mars, le Haut commissariat des Nations unies pour lesréfugiés (HCR) annonçait qu’outre des dizaines de morts,57 000 Somaliens avaient fui leurs foyers depuis la reprise

des combats début février entre l’armée éthiopienne, le gouverne-ment de transition et les rebelles des Tribunaux islamiques chassésdu pouvoir à la fin du mois de décembre 2006. Au total, ce seraientdésormais quelque 400 000 personnes qui seraient déplacées àl’intérieur de la Somalie, plusieurs dizaines de milliers d’autresayant fui vers les pays voisins. De son côté, le CICR publiait lemême jour un communiqué déplorant que «la population de Moga-discio [soit] prise dans les pires combats depuis 15 ans» et appelait lesbelligérants à épargner les civils. Pour boucler la boucle, GhanimAlnajjar, l’expert indépendant de l’ONU pour la situation desdroits de l’Homme en Somalie, parlait lui ni plus ni moins «traite-ments inhumains et dégradants» commis durant les combats partoutes les parties.Neuf jours plus tôt, le 21 mars, lors d’une conférence de presse àl’ambassade d’Allemagne à Kinshasa, le nouveau représentantspécial de l’Union européenne pour la région des Grands Lacs, leNéerlandais Roeland Van de Geer, s’inquiétait publiquement de la

situation en République démocratique du Congo (RDC) et réaffir-mait l’appui de l’UE à une réforme de l’armée congolaise. «Lapriorité de l’UE est d’appuyer la consolidation de la paix et de la démocratieen RDC. Et pour cela, la priorité est la réforme du secteur de la sécurité, dela police, de l’armée». Deux jours, plus tard, des combats éclataiententre l’armée régulière congolaise et les miliciens non désarmésdu chef de l’opposition et ancien chef rebelle Jean-Pierre Bemba.En l’absence d’une enquête indépendante, nul ne peut prétendrereconstituer le fil des événements. Surtout qu’en Belgique, lesmédias ont été principalement mobilisés par l’inquiétude (légitime)quant au sort des expatriés belges. L’inquiétude une fois dissipée,c’est dans une indifférence assez incroyable que le bilan dramatiquedes affrontements de Kinshasa a été accueilli. Loin de l’alignementapparent de la diplomatie belge sur le discours des autoritéscongolaises et en l’absence d’estimations belges, l’ambassadeur d’Al-lemagne en RDC, Karl-Albrecht Wokalek, appuyé par sonhomologue britannique, a parlé, lui, d’un chiffre oscillant entre200 et 500 morts, essentiellement des civils des quartiers populairestouchés par les obus de l’armée. Une armée dont, depuis années,les rapports d’Amnesty disent qu’elle est davantage (et à l’instar demilices péniblement «brassées») un facteur d’insécurité que desécurité. Il nous reste à nous demander quelles leçons la Belgique– et l’UE – tireront de ce gâchis politique et sécuritaire. e PascalFenaux

Le Libertés ! de mars (n° 432) est arrivé très tard dans les boîtesaux lettres. Cela est dû à une accumulation de problèmes tech-niques. Veuillez nous en excuser.

TRAGÉDIESINAUDIBLES

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Burundaises sur un marché proche de Mugongomanga. Ijenda, juillet 2006 © AFP / Bertrand Rieger

L’une après l’autre, des femmes qui occu-paient de hauts postes dans lesinstitutions burundaises ont été desti-

tuées ces dernières semaines et remplacées pardes hommes. Des mesures qui suscitent de vivespolémiques. Certains estiment que le gouverne-ment fait la chasse aux femmes, d’autres n’yvoient que des règlements de compte politiques,d’autres enfin la juste et nécessaire sanction d’in-compétences notoires. Les associations fémininessont en colère, les citoyennes burundaises déçuespar celles qui représentaient un espoir à leursyeux.Le 16 mars, c’est Immaculée Nahayo, présidentede l’Assemblée nationale burundaise, qui a étédémise de ses fonctions par 80 % des députés.Elle était principalement accusée de ne pas asso-cier les membres du bureau à la gestion del’institution et d’avoir opéré des opérations frau-duleuses. Arrivée in extremis d’une mission àl’étranger, elle a voulu brutalement interromprela séance qui statuait sur son limogeage. Unedes parlementaires qui s’opposait à sa destitutiona perdu son sang froid au point d’en venirpresque aux mains avec ses collègues !Fin février, Yolande Nzikoruriho, vice-présidentedu Sénat, avait été remerciée dans des conditionssemblables. Quelques jours auparavant, c’était lavice-présidente de la République, Marina Baram-

pama, qui avait été limogée pour insubordinationet incompétence, selon le décret de destitution.Elle est en outre accusée de détournements defonds publics. En août dernier, alors queplusieurs parlementaires s’y étaient opposés,elle avait remplacé, sous la pression d’HusseinRadjabu, alors secrétaire-général du CNDD/FDD(1),le parti au pouvoir, Alice Nzomukunda deuxièmevice-présidente de la République, démissionnairebien que compétente.

CHASSE AUX PARTISANS D’HUSSEINRADJABUEn fait, depuis l’éviction de Radjabu de la tête duCNDD/FDD au congrès de Ngozi début février, onassiste à un grand coup de balai parmi ses parti-sans au sein du parti. Tous les hauts responsablesqui ont boycotté le congrès de Ngozi ont étédémis de leurs postes. Pas seulement les femmesdéjà citées, mais aussi des ministres, des gouver-neurs de province et de hauts cadres de l’État.Au Parlement, les Burundaises occupent 30 %des sièges, mais elles sont divisées. Il existe ainsideux associations de femmes parlementaires, laSofepa (Solidarité femmes parlementaires)dirigée par une députée tutsie de l’Uprona etl’Afepabu (Association des femmes parlemen-taires burundaises) pilotée par une députéehutue du CNDD/FDD, ce qui recrée les deux

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A C T U E L

VIETNAMRÉPRESSIONSigne d’une nouvelle vague de répression, le pèreNguyen Van Ly, un prêtre catholique de 60 ans qui avaitaidé à la mise en ligne sur Internet d’une pétition enfaveur d’un changement démocratique, a étécondamné le 30 mars à huit années d’emprisonne-ment pour «propagande hostile». Quatre de sescollègues, Nguyen Phong, Nguyen Binh Thanh, HoangThi Anh Dao et Le Thi Hang, ont également étécondamnés. Le père Ly est prisonnier d’opinion pourla quatrième fois en vingt ans. e

GUANTÁNAMOCONDAMNATIONLe 30 mars, David Hicks, un citoyen australien de 31ans détenu illégalement à Guantánamo depuisjanvier 2002, a été condamné à 9 mois de prison parun tribunal militaire d’exception américain. Il purgerasa peine en Australie. Il est le premier prisonnier deGuantánamo à être jugé par les nouveaux tribunauxmilitaires d’exception. Suite à un accord intervenuavec l’accusation, Hicks a plaidé coupable et retiréses accusations de torture à l’encontre des autoritésaméricaines. e

ONURÉGRESSIONSous la pression de plusieurs États, le Conseil desDroits de l’Homme de l’ONU va «réexaminer» les«procédures spéciales», à savoir les représentants,rapporteurs spéciaux, experts indépendants etgroupes de travail du Conseil. Amnesty International,Human Rights Watch, la FIDH, l’Organisationmondiale contre la Torture et Forum Asie ont protestéet lancé un appel à pétition. Pour s’informer et signer :www.amnesty.be e

SOUDANRÉSOLUTIONLe 30 mars, le Conseil des Droits de l’Homme de l’ONUa adopté une résolution sur le Darfour. Cette résolu-tion, adoptée à l’unanimité, indique que le Soudann’est plus assuré du soutien des États africains. Unbémol : la résolution ne dénonce pas le rôle du gouver-nement, de ses alliés Janjawids et d’autres groupesarmés les massacres du Darfour. e

ISRAËLDISCRIMINATIONLe 9 mars, le Comité des Nations unies pour l’Élimina-tion de la Discrimination raciale a reçu le rapportd’Israël quant à l’application de la Convention inter-nationale sur l’Élimination de toutes les Formes deDiscrimination raciale (ICERD), une Convention dontl’État juif considère qu’elle ne s’applique pas aux terri-toires occupés palestiniens ni au Golan syrien annexé,d’où une série de mesures discriminatoires à l’en-contre des Palestiniens en matière d’habitat et decirculation. Le Comité pointe également denombreuses discriminations envers les citoyens israé-liens non juifs. e

ÉGYPTECONSTITUTIONUne série d’amendements à la Constitution ont étéadoptés par le Parlement le 19 mars et approuvés lorsd’un référendum suspect de fraude le 26 mars. Enouvrant la voie à une nouvelle législation antiterroriste,ces amendements officialisent arrestations et mises endétention arbitraires, actes de torture et procès inéqui-tables, érodant plus encore la protection des droitshumains et violant les obligations internationales del’Égypte en matière de droits humains. e

BURUNDI

SALE TEMPS POUR LESFEMMES POLITIQUESAu Burundi, plusieurs femmes qui avaient été promues à de hautes responsabilités ontrécemment été destituées. En cause, leur proximité politique avec Hussein Radjabu,ancien homme fort du parti au pouvoir, lui aussi écarté en février. Outre une sérieusehypothèque sur l’émancipation politique des femmes, cette évolution en fait craindreune autre : le retour aux vieux clivages ethniques.

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L’INSOLITE

A C T U E L

LA KERMESSE AUX SINGESAussi intelligents que les enfants humains, lesGrands Singes (primates hominidés) doiventse voir reconnaître des droits identiques. C’esten tout cas la décision controversée que vientde prendre la Communauté autonome desBaléares (Espagne). Une décision à laquelle,semble-t-il, le parlement espagnol devraitbientôt emboîter le pas. Pour Pedro Mozas,directeur exécutif du Great Apes Project pourl’Espagne, cela ferait de l’Espagne le premierpays au monde à poser un acte législatif quireconnaît et définit des «droits simiesques» auxgorilles, orang-outangs et autres bonobos.«Cela fait des années que les scientifiques répètentque les Grands Singes éprouvent des sentimentscomme la peur, la colère, le chagrin et le bonheur,tout comme ils ont conscience du passé et sont capa-bles d’enseigner à leurs jeunes comment ‘parler’.»Parmi les opposants à cette décision, oncompte l’Église catholique. L’archevêqueFernando Sebastian considère ainsi que c’estaussi aberrant que «nier les droits de l’embryonque l’on vient d’avorter.» Ambiance. e (D’aprèsDie Beeld, Johannesburg)

Gabriel Rufyiri lors deson passage auSecrétariat nationald’Amnesty à Bruxelles. © AIBF / Sabina Jaworek

grandes tendances politico-ethniques du pays. PourCatherine Mabobori, députée de l’Uprona, c’estnavrant. Elle en impute la faute à la présidente de l’As-semblée nationale déchue, qui n’a pas su rassemblerles femmes parlementaires.Selon Barbara Ndimurukundo, présidente du Rassem-blement national des femmes burundaises (Ranafebu),les femmes sont incapables d’harmoniser leurs vuesne fût-ce que sur des questions d’intérêt commun.«Nous avons besoin de femmes compétitives, capables etresponsables, qui soient d’abord femmes avant d’être militantesdes partis politiques», estime-t-elle. «Je n’ai pas apprécié lecomportement des femmes au Parlement, ajoute-t-elle.Quand elles s’énervent et manquent de sérénité, cela les discré-dite et fait voler en éclats toutes les bonnes perceptions que lesgens avaient envers elles.»

CHOISIR DES FEMMES COMPÉTENTESNéanmoins, elle a été déçue et choquée que ceux quiont gagné les élections en 2005 et avaient la volontéde promouvoir les femmes les chassent aujourd’huide cette manière. Et surtout ne les remplacent pas pard’autres, cette fois compétentes, afin de conserver lesquotas dévolus aux femmes, estiment de leur côtéles associations féminines. Pour Marie-Rose N.,députée du parti au pouvoir, cette situation a mis augrand jour le préjugé selon lequel les femmes sontincapables de gouverner. Elle invite cependant les

femmes à oeuvrer pour mériter les places qu’ellesréclament.Celles qui avaient été promues n’ont pas pris cons-cience qu’elles occupaient ces fonctions parce qu’ellesétaient des femmes, estime notamment JoséphineNyiraneza, enseignante. Esclaves de l’esprit de clien-télisme qui a présidé à leurs nominations, elles en ontoublié de travailler convenablement pour ne pastrahir ceux qui les ont mandatés et éviter de servir defusibles en cas de problèmes. C’est aussi l’analyse decertains spécialistes pour qui le manque de maturitépolitique et l’incompétence sont les causes premièresde ces destitutions en série.Dans une correspondance récente, les associationsféminines demandent au chef de l’État de les assurerqu’il ne se livre pas à une chasse aux femmes. Et,pour le prouver, d’en nommer d’autres plus capableset qui ne leur fassent pas honte comme celles quiviennent d’être révoquées. Ces requêtes seront-ellesentendues par les autorités qui ont célébré le 25 marsla Journée de la femme au Burundi ? e EmmanuelNgendanzi, correspondant à Bujumbura

(1) Conseil national de Défense de la Démocratie / Front de Défense

de la Démocratie, ancien mouvement rebelle hutu. Au sommet du

CNDD/FDD, un conflit violent a opposé le président burundais

Pierre Nkurunziza et Hussein Radjabu, jusqu’à la destitution de ce

dernier en février 2007.

4 Libertés ! Avril 2007

Gabriel Rufyiri est le président de l’ONG burundaise de l’Observatoire deLutte contre la Corruption et les Malversations Économiques,l’OLUCOME. Il était de passage à Bruxelles le 15 mars dernier.

Arrêté de manière arbitraire en août 2006 et détenu illégalement pour avoirdénoncé les détournements de fonds auxquels se seraient livrés desmembres du gouvernement burundais, Gabriel Rufyiri a finalement été

placé en liberté provisoire en décembre 2006. Reconnu prisonnier d’opinion parAmnesty, il est toujours menacé, comme en témoignent les appels anonymes etles assauts répétés menés par des inconnus sur les locaux de l’OLUCOME.«L’OLUCOME est une organisation créée en 2002 et qui lutte contre la corruption et les malver-sations économiques au Burundi. Nous avons également entamé des actions en Afrique et nousavons plusieurs antennes en Afrique Centrale, dans 11 pays pour être exact. Nous sommes accré-dités auprès de l’Union africaine et de l’ONU pour informer et agir contre la corruption.«Depuis notre fondation en 2002, nous avons déjà produit 324 rapports. Mais, au lieu de donnerune suite à ces rapports, leurs auteurs sont harcelés, menacés, intimidés, poursuivis par unejustice burundaise qui n’a pas encore conquis son indépendance depuis la transition de2005. Le problème, c’est qu’avant les élections multipartites de 2005, le Burundi était régi pardes gouvernements de transition qui faisaient franchement n’importe quoi et n’avaient de

comptes à rendre à personne. Aujourd’hui, nous avons un gouvernement démocratiquementélu mais ce pouvoir élu, au lieu de s’attaquer aux problèmes qui empoisonnent la populationburundaise, a fait se décupler le phénomène de la corruption. Le nouveau président affirmerégulièrement sa volonté de s’attaquer à la corruption, mais rien ne change fondamentalement.Les lois censées ordonner et objectiver l’attribution des marchés publics et les appels d’offre sonten fait incomplètes et d’autant plus facilement détournées, pour le plus grand bonheur depromoteurs et de politiciens peu scrupuleux. Il semble en fait qu’autour du pouvoir exécutif,il se soit constitué un groupe d’influence qui échappe à tout contrôle démocratique et béné-ficie de la corruption.«Bien que je sois toujours poursuivi au Burundi, ma présence à Bruxelles s’inscrit dans le cadred’une conférence internationale, le Forum mondial sur la Lutte contre la Corruption, qui setient à Johannesburg du 2 au 5 avril 2006, une conférence à laquelle participe évidemmentle Burundi. Je suis venu pour présenter à nos interlocuteurs européens une série de recomman-dations élaborée par le Forum africain sur la Lutte contre la Corruption début mars, dans laperspective du Forum mondial.«Être reconnus par l’UA et l’ONU ne signifie hélas pas que nous ayons un statut “privilégié”face aux autorités burundaises, comme en témoignent les poursuites dont je fais l’objet et lesattaques contre les membres d’OLUCOME. À vrai dire, je suis sceptique sur l’efficacité réelle deces forums. C’est d’actes que nous avons besoin, pas de rapports pointus remisés au placard.»e Propos recueillis à Bruxelles le 15 mars 2007.

P A R O L E S

BURUNDI

«ÊTRE RECONNUSPAR L’ONU NE FAITPAS DE NOUS DESPRIVILÉGIÉS»

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À la frontière entre les deux Corées, un proche d’une famille de Sud-Coréens enlevés par des militaires nord-coréens accroche des foulards jaunes aux branches d’un pin dans l’espoir qu’ils reviennent sains et saufs.Paju, janvier 2007 © AFP / Jung Yeon-Je

Libertés ! Avril 2007 5

D O S S I E R

La Corée du Nord est-elle à lacroisée des chemins ? L’accordconclu le 13 février 2007 sur ledossier nucléaire fera-t-il date,en dépit des premiers ratés déjàenregistrés ? Difficile à dire. Unechose est sûre, en acceptant,sous la pression du grand frèrechinois, de s’engager dans desnégociations avec ses voisinsimmédiats (Corée du Sud, Japon,Russie) et les États-Unis, lerégime nord-coréen est revenudans le «concert» internationalet, ce qui n’est pas sansimportance pour la population, laperfusion alimentaireinternationale devrait reprendre.Pyongyang va peut-être ouvrirson territoire aux inspecteurs del’AIEA, mais les droits humains,eux, risquent de devoir attendre.Malgré de nombreusesdemandes, le régime nord-coréenrefuse toujours l’accès auRapporteur spécial des Nationsunies sur la situation des droitsde l’homme et au Rapporteurspécial sur le droit àl’alimentation, ainsi qu’àAmnesty International et àd’autres observateursindépendants des droits humains.Bref, l’accord du 13 février sur lenucléaire est sans doute unecondition nécessaire mais passuffisante pour susciter uneouverture du régime le plusfermé de la planète et l’amener àun meilleur respect de droitsfoulés aux pieds par ungouvernement accusé par l’ONUet les ONG d’exécutions, d’actesde torture, de détention deprisonniers politiques et deconditions de détentioninfrahumaines. État des lieux.

Les négociations sur le nucléaire nord-coréen et l’angoisse qui caractérise tout ce qui touche à lamenace atomique ont remis sur le devant de la scène le «mystère» de la Corée du Nord. Le«chantage» pratiqué par le régime pour assurer sa pérennité n’est pas en soi de bon augure pourl’avenir des droits humains sous cet ultime régime stalinien. Un passage en revue.

«TELLE QU’EN ELLE-MÊMEL’ÉTERNITÉ LA CHANGE»

Le 13 février 2007, les participants aux négociationsqui se déroulent depuis des années entre la Coréedu Nord (1), ses voisins immédiats (Corée du Sud,

Japon, Chine, Russie) et les États-Unis (dont les forcesarmées sont présentes au sud de la péninsule coréenne),parvenaient à un accord sur la dénucléarisation durégime de Pyongyang.Les négociateurs se montraient satisfaits, comme l’en-semble de la presse mondiale. La méthode des «petitspas» (mise en place de commissions de discussions inté-ressant la paix, la sécurité et la coopération dans l’Asie duNord-Est et règlement du gel des avoirs coréens; fermeturede la centrale nucléaire de Yongbyon et envoi de 50 000tonnes de fuel lourd par les États-Unis à la Corée duNord, etc.) était nouvelle.

Les réactions négatives de la communauté internatio-nale à l’explosion d’un engin nucléaire et en particulierle vote unanime en faveur de sanctions du Conseil de sécu-rité de l’ONU confirmaient le caractère nouveau de laconjoncture et permettaient d’espérer davantage quepar le passé, un résultat positif de ces négociations. Hélas,comme en septembre 1965, il semble bien que l’on aitchanté victoire un peu tôt.

DU NUCLÉAIRE AUX DROITS HUMAINSLes négociations ont été interrompues, des difficultésapparaissant dès la mise en œuvre du premier pointd’accord, en l’occurrence le règlement du litige financieraméricano-nord-coréen. Comme l’accord ne fait nullemention des engins nucléaires existant déjà et implique

CORÉE DU NORD

LE GOULAG DE LA FAIM

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de surcroît la reprise d’une aide massive à la Corée du Nord, les défenseursdes droits humains ont des raisons de se montrer inquiets : même si cetaccord peut-être jugé par certains comme un premier pas utile, il n’estguère réjouissant puisqu’il aboutit au renforcement d’un pouvoir qui, surle plan des libertés, suscite de nombreuses critiques.Bien qu’elle ait signé de nombreux accords et conventions sous l’égide del’ONU en faveur des droits humains, la Corée du Nord ne respecte ni lesdroits humains fondamentaux ni ne donne à sa population la possibilitéde pouvoir en jouir pleinement.

DROITS FONDAMENTAUXÀ l’intérieur du pays, la liberté de circulation est limitée par l’exigenced’autorisation accordée par les pouvoirs locaux, comme par la faiblessedes moyens de transport. Le départ du pays ne peut s’effectuer en généralque clandestinement. Même les cadres, les étudiants ou les travailleursautorisés à sortir ne peuvent le faire que très surveillés, comme on a pule constater récemment avec les ouvrières nord-coréennes transférées enRépublique tchèque, et de plus coupées du reste de leur famille.

La liberté d’information est limitée par le contrôle absolu qu’exercel’État sur la radio, la télévision, les journaux. Le blocage des postes de radiosur les longueurs d’onde autorisées et les punitions qu’encourent ceuxqui écoutent des émissions venues de l’étranger illustrent bien le sort faità ce droit humain fondamental. Même les classiques du marxisme-léni-nisme ont été retirés au profit de la seule Parole qui vaille : celle de KimJong Il, le dirigeant actuel, ou de son père, décédé en 1994, Kim Il Sung.La liberté d’expression est très limitée dans la mesure où le régime nord-coréen prône le système de parti unique promoteur d’une idéologieunique et obligatoire. L’unité organique affirmée entre le leader (suryong)et le peuple rend impossible l’expression de toute réserve sans s’exposerà l’accusation de contre-révolution.La liberté religieuse n’existe pas malgré quelques lieux de prières montrésaux visiteurs. On notera cependant les liens qui existent entre la directionnord-coréenne et les «moonistes», qui apportent une aide active aurégime.

DISETTE CHRONIQUE ET ENTÊTEMENT POLITIQUELa volonté de la direction nord-coréenne de maintenir un système deproduction qui a fait depuis longtemps la preuve de son inefficacité, lapriorité accordée aux efforts militaires, les obstacles mis à l’aide interna-tionale, dont on ne sait si elle va effectivement à ceux qui en ont le plusbesoin et le détournement d’une partie de cette aide, ont eu des consé-quences graves sur une majorité de la population. L’état physique decelle-ci, soumise à des conditions d’hygiène et d’alimentation précaires,rend même impensable qu’elle puisse jouir pleinement des droits fonda-mentaux ou qu’elle puisse seulement les revendiquer.L’état physique de la population donne une des clefs du maintien durégime, mais d’autres considérations concernant la situation dans lepays comme sa position régionale doivent être pris en considération.

LE RÉGIME ET SON ASSISELa coupure avec le monde extérieur et l’ignorance dans laquelle la popu-lation est tenue restent importantes. Sans doute, cette ignorance seréduit-elle grâce notamment aux réfugiés qui, après être passés clandes-tinement en Chine puis y avoir travaillé un temps, reviennent en Coréedu Nord pour porter assistance à leur famille. Les postes de radio adaptésà l’écoute du monde extérieur et même des téléphones portables, lelong de la frontière avec la Chine, mettent à mal – encore très partielle-ment – l’isolement du pays et rendent plus difficile pour le pouvoir ladiffusion de sa propagande. Des moyens plus ordinaires d’asseoir sonpouvoir sont mis en œuvre par la direction nord-coréenne.1) Des manifestations récurrentes de soutien au régime et à son Leadersont organisées avec un grand concours populaire. Elles animent enquelque sorte un décor dressé à leur gloire avec ses statues, ses banderoles,ses mots d’ordre, ses chansons et ses légendes diffusées par la presse etles discours.2) La Corée du Nord est un champ d’exercice de l’opposition entre «eux»(les étrangers, les impérialistes, les forces du Mal) et «nous» (les nationaux,le Peuple, les Purs Coréens), parsemé de lieux sacrés (statues du leader,mausolée, lieu de naissance, Musée des Cadeaux, etc.) qui appellentdifférents rituels.3) Cette opposition comme la maîtrise des lieux sacrés et l’organisationdes rituels supposent un contrôle de la population par des services de sécu-rité et des relais importants. Il existe une police politique (Kuk GaboWibu, l’Agence de la Sécurité nationale) à côté d’une police plus «généra-liste» (Inminbo Anseong, l’Agence pour la Sûreté du Peuple).4) Un système de prisons et de camps permet d’isoler les récalcitrants maisaussi de les éliminer, voire de les exterminer. Les estimations concernantle nombre de détenus sont très vagues. 100 et surtout 150 ou 200 000personnes sont les plus courantes. Mais le camp de Yodok, dans le centredu pays, étant de loin le plus important par le nombre de détenus et lenombre total des camps de concentration n’étant plus aujourd’hui quede six ou sept (contre une douzaine dans les années quatre-vingt), ilvaut mieux adopter l’estimation la plus basse, de 100 000 personnes, cequi n’est pas négligeable pour une population qui se situe entre 22 et24 millions de personnes (à titre de comparaison, l’URSS, le goulag sovié-tique abritait à la fin des années cinquante un million de détenus pourune population de 230 millions d’habitants).Ces camps de travail forcé pour détenus politiques (Kwan Li So) visent àpunir, «redresser» par le travail et rejeter des détenus qui sont le plussouvent internés sur décision administrative, leur peine leur étant signi-fiée bien après leur entrée au camp. Ces camps sont pour certains des lieuxd’internement définitifs. Certains détenus sont en effet considéréscomme «irrécupérables». Ils ne sont pas condamnés à mort mais obligésde vivre dans des conditions de travail, d’hygiène et d’alimentation tellesqu’ils meurent en grand nombre.Une estimation naturellement imprécise du Centre pour la promotion desdroits humains en Corée du Nord, basé à Séoul, avance le nombre de400 000 morts dans ces camps. D’autres détenus peuvent être «récupéra-bles» aux yeux des autorités, notamment les familles de détenus politiques– personnes âgées et enfants compris – regroupés au camp de Yodok. Ilstravaillent dur, également, mais une part est donnée à la rééducation parl’enseignement de l’histoire révolutionnaire du pays, la lecture de lapresse officielle, des séances régulières de critique et d’autocritique.Ces camps ne ressemblent pas à l’image que nous, Européens, avec notremémoire des camps nazis, voire des camps soviétiques, en avons : ilsressemblent davantage à des zones de plusieurs dizaines de kilomètrescarrés avec leurs sections ou «villages», habités par telle ou telle catégoriede détenus.Comme en Chine, un deuxième réseau de camps complète le premier, descamps plus petits et destinés à des détenus purgeant des peines plusréduites que dans les grands camps, souvent fixées après un procèsappliquant le code criminel en vigueur en Corée du Nord et en principenon susceptible d’être reconduites. Administrés par la police «normale»,ces petits camps sont, comme les grands, des lieux de travail particuliè-rement pénible : coupe d’arbres, mines, briqueteries, cimenteries, etc.).D’autres lieux de détention provisoires (un provisoire qui peut allerjusqu’à six mois) existent. On y est détenu pour des délits relativementmineurs comme un déplacement sans autorisation ou une tentative defuir le pays).

UN CAS EXCEPTIONNELLes quelques témoignages recueillis font état de mauvais traitements, detortures, d’internement dans des cachots disciplinaires et d’exécutions

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lDes militairessud-coréens(avant-plan)et nord-coréensmontent lagarde sur lazonedémilitariséequi fait figurede ligned’armisticedepuismars 1953.Panmunjom,février 2007.© AFP / JungYeon-Je

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Libertés ! Avril 2007 7

publiques à l’intérieur du camp (par exemple pour tentative d’évasion).Le maintien de ce système concentrationnaire comme la fréquence depratiques violentes comme les avortements forcés sur des réfugiées captu-rées lors de leur retour de Chine, au nom de la pureté ethnique de la Corée,ou bien l’exil intérieur de handicapés ou de nains font sans aucun doutede la Corée du Nord un cas tout à fait exceptionnel en matière de respectdes droits humains.La connaissance de ces manquements actuels au respect de la dignitéhumaine mais aussi le souvenir d’actions plus anciennes – à savoir l’impli-cation des services secrets nord-coréens dans des attentats comme àRangoon en 1980 et dans un avion de ligne sud-coréen en 1987, l’enlève-ment de plusieurs dizaines de citoyens japonais, la production et le traficde drogue ou encore la fabrication et le blanchiment de fausse monnaiepar État nord-coréen, composent un contexte difficile à toutes les négocia-tions entreprises avec les Nord-Coréens.Les résolutions de la Commission des droits de l’homme de l’ONU, les appré-ciations du rapporteur spécial de l’ONU pour les droits de l’homme en Coréedu Nord, le Thaïlandais Vitit Munttarbhorn, comme sa demande de visitede la Corée du Nord ont d’ailleurs été rejetées par le gouvernement de Pyon-gyang.La puissance de feu de l’armée nord-coréenne, le nombre de missiles dontelle dispose, les charges conventionnelles, chimiques ou biologiques dontelle peut les équiper, la proximité de la capitale sud-coréenne du territoirenord-coréen mais aussi la protection dont ce pays a jusqu’ici bénéficié dela part de la Chine – même si celle-ci a condamné l’essai nucléaire d’oc-tobre 2006 et a voté en faveur de sanctions au Conseil de sécurité del’ONU, rendent difficile l’usage de pressions sur État nord-coréen mais nedispensent pas les défenseurs des droits humains de faire partager leursconnaissances et leur indignation à l’ensemble de la communauté inter-nationale. e Pierre Rigoulot, Directeur de l’Institut d’Histoire sociale et dela revue Histoire et Liberté (anciens Cahiers de l’Histoire sociale).

(1) Cinq «rounds» de négociations ont eu lieu entre août 2003 et septembre 2005.

Il s’agissait là d’une issue plutôt positive à un interminable brasde fer, jalonné de percées diplomatiques et de claquements deportes. Mais, apparemment, les pourparlers à six (Corée du

Nord, Corée du Sud, États-Unis, Chine, Russie et Japon) entamés le25 juillet 2005 à Pékin étaient cette fois «les bons». Ce n’était pourtantjamais que la cinquième tentative de parvenir à un accord en dépit dela reconnaissance faite par Pyongyang en 2005 de la possession del’arme nucléaire. Le compromis prévoit l’arrêt, la fermeture et, àterme, la désactivation des installations nucléaires de la Corée duNord sous libre contrôle des inspecteurs des Nations unies. Avant d’in-terpréter l’accord, un rappel chronologique s’impose.Octobre 2002 : les États-Unis affirment que la République populairedémocratique de Corée (RPDC) enrichit de l’uranium, en violation deses accords.Décembre 2002 : la Corée du Nord enlève les scellés placés par l’ONUdans la centrale nucléaire de Yongbyon et démantèle les dispositifs desurveillance – «les yeux et les oreilles» de l’Agence internationale del’énergie atomique (AIEA) –, avant d’expulser les inspecteurs de l’AIEA.Janvier 2003 : la Corée du Nord annonce son retrait du Traité denon-prolifération nucléaire (TNP).Février 2003 : la Corée du Nord affirme qu’elle a réactivé ses installa-tions nucléaires et que leurs activités progressent désormais«normalement». L’AIEA déclare que la Corée du Nord bafoue les garantiesnucléaires et en appelle au Conseil de sécurité de l’ONU.Avril 2003 : Le Conseil de sécurité se déclare préoccupé par leprogramme nucléaire de la Corée du Nord, sans aller jusqu’à dénoncerson retrait du TNP. La Chine accueille les pourparlers entre la Corée duNord et les États-Unis. Ces discussions s’achèvent dans un climat dereproches mutuels, les États-Unis ayant soutenu que la Corée du Nordavait pour la première fois admis posséder des armes nucléaires.Mai 2003 : la Corée du Nord annonce qu’elle abroge son dernieraccord international de non-prolifération nucléaire – accord signé en1992 avec la Corée du Sud, excluant les armes nucléaires de la pénin-sule coréenne.Août 2003 : les pourparlers à six s’ouvrent à Pékin, entre les Corées duNord et du Sud, les États-Unis, le Japon, la Russie et la Chine (qui en estl’hôte).Décembre 2003 : la Corée du Nord propose de «geler» son programmenucléaire en échange d’une liste de concessions présentées aux États-Unis. S’ils refusent, elle ne participera pas aux futurs pourparlers.Les États-Unis rejettent cette proposition. Le président américainGeorge Bush déclare que la Corée du Nord doit purement et simplementdémanteler son programme.Février 2004 : la deuxième série de pourparlers à six a lieu à Pékin etse termine sans grand progrès. Les États-Unis invitent la Corée duNord à s’engager en faveur d’un démantèlement complet, vérifiable etirréversible. Ils lui demandent de démarrer concrètement le démantè-lement avant qu’ils ne présentent leur feuille de route des engagementsréciproques, afin de fournir une aide en matière de sécurité et dedéveloppement à la Corée du Nord.

NUCLÉAIRE

UN ACCORD À QUIPERD GAGNE?Après cinq années de tensions américano-nord-coréennes et alors quePyongyang est toujours inscrite par Washington sur l’«Axe du Mal»,Américains et Nord-Coréens sont pourtant parvenus, le 13 févrierdernier, à un accord diplomatique sur le nucléaire.

jUn garde-frontière nord-coréen menace un photographe le long de la frontièrequi sépare la Chine de la Corée du Nord, frontière à travers laquelle 100 000civils auraient déjà fui. Sinuiju, octobre 2006. © AFP / Frederic J. Brown

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Juin 2004 : le troisième cycle des pourparlers à six se déroule à Pékin ;les États-Unis proposent de fournir une aide énergétique à la Corée duNord si elle gèle puis démantèle ses programmes nucléaires.Juillet 2004 : le secrétaire d’État américain de l’époque, Colin Powell,rencontre le ministre nord-coréen des Affaires étrangères, Paek Nam-sun,dans le cadre des pourparlers de plus haut niveau entre les deux paysdepuis le début de la crise nucléaire. La Corée du Nord rejette les propo-sitions des États-Unis, à savoir suivre l’exemple de la Libye enabandonnant ses ambitions nucléaires.Septembre 2004: s’adressant à l’Assemblée générale des Nations unies,le vice-ministre nord-coréen des Affaires étrangères, Choe Su-hon,déclare que la Corée du Nord a achevé le processus de transformationdu plutonium extrait de 8000 barres de combustible irradié en armesnucléaires. La Corée du Nord se justifie en invoquant la nécessité de «sedéfendre» contre «la menace nucléaire américaine».Janvier 2005 : Condoleezza Rice, alors désignée par le président Bushau poste de Secrétaire d’État, inclut la Corée du Nord dans les six «avant-postes de la tyrannie», où les États-Unis doivent contribuer à amener laliberté.Février 2005: la Corée du Nord déclare qu’elle suspend sa participationaux pourparlers concernant son programme nucléaire «pour une duréeindéterminée», accusant le gouvernement américain de vouloir «s’opposerà la République démocratique populaire de Corée, l’isoler et l’étouffer à toutprix». Dans cette déclaration, la Corée du Nord affirme également qu’elles’est dotée d’armes nucléaires par mesure d’autodéfense.Avril 2005 : Selon des sources sud-coréennes, la Corée du Nord a fermésa centrale nucléaire de Yongbyon, ce qui pourrait lui permettre d’ex-traire plus de combustible destiné à des armes nucléaires.Mai 2005 : la Corée du Nord tire un missile de courte portée en mer duJapon, à la veille de sa rencontre avec des membres du TNP. La Corée duNord affirme qu’elle a achevé le processus d’extraction de barres decombustible irradié de son réacteur de Yongbyon, dans le cadre de sonprogramme visant à «renforcer son arsenal nucléaire».Juillet 2005 : la Corée du Nord se dit prête à reprendre les pourparlerssur le nucléaire, alors que la Secrétaire d’État américaine CondoleezzaRice entame une tournée dans la région. Faisant une offre généreuse, laCorée du Sud propose de fournir à la Corée du Nord d’importantesquantités d’électricité afin de l’inciter à mettre fin à son programmed’armes nucléaires. Le quatrième cycle des pourparlers à six s’ouvre àPékin, après une interruption de 13 mois.Septembre 2005: la Corée du Nord s’engage à rejoindre le TNP et à aban-donner son arsenal atomique militaire contre une énergie nucléaire àdes fins civiles.Novembre 2005: Pyongyang exige l’abandon des sanctions financièresaméricaines contre des sociétés accusées de financer l’armementatomique, avant de reprendre les discussions à six.Juillet 2006 : tir raté de sept missiles nord-coréens dont un à longueportée Taepodong-2, susceptible d’atteindre l’Alaska et la côte ouest

des États-Unis, ce qui suscite l’adoption à l’unanimité du Conseil de Sécu-rité des Nations unies (c.à.d. y compris la Chine et la Russie) de mesurescontraignantes.Octobre 2006 : Pyongyang procède à son premier essai nucléaire. Enconséquence, le Conseil de Sécurité de l’ONU vote des sanctions écono-miques et commerciales à l’encontre de la Corée du Nord.Décembre 2006 : reprise des pourparlers à six.Février 2007: le mardi 13 février, les Six rendent public le contenu d’unaccord portant sur le «gel» du programme nucléaire nord-coréen.Désormais, les questions vont bon train. L’accord conclu entre Pyongyanget «le reste du monde» est-il une victoire pour un régime qui, en entamantses essais, serait parvenu à se «sanctuariser» et à contraindre ses voisinschinois et russes et ses adversaires sud-coréens, japonais et américainsde parvenir rapidement à un accord problématique pour ce qui concerneles droits humains ? Qui plus est, officiellement en tout cas, le régimenord-coréen n’a pas encore fait savoir s’il comptait renoncer à sonarsenal nucléaire, et à partir de quand.Ou, au contraire, cet accord est-il le fruit des sanctions économiques etfinancières imposées conjointement par la Chine et les États-Unis ?Certains analystes(1) considèrent que les dirigeants nord-coréens, «enprocédant à un essai nucléaire dans des montagnes proches de la frontière chinoise,ont commis une erreur stratégique. Les Chinois, qui ont passé les soixante dernièresannées à protéger la dynastie Kim, ont réagi en lui coupant leur aide militaire eten coopérant avec Washington pour sanctionner les banques qui financent lemode de vie fastueux du dirigeant nord-coréen.»Si c’est le cas, nombreux sont ceux qui estiment néanmoins que «lacommunauté internationale» n’est pas au bout de ses peines. La récentesuspension du dialogue Pyongyang pour cause de différend financier etde manoeuvres conjointes américano-sud-coréennes semblent attesterque le plus dur reste à venir : négocier une ouverture de ses frontièreset de ses sites nucléaires avec le régime le plus fermé et le plus para-noïaque du monde. e Pascal Fenaux

(1) David Sanger, «Outside Pressures Broke Korean Deadlock», The New York Times, 14 février

2007.

Immense peinture murale représentant Kim Jong Il, le Cher Leader. Pyongyang, octobre 2006. © EyePress / Tex

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Un hommed’affaires sud-coréen litun journalannonçant quela Corée du Nordvient deprocéder à desessais de tirsnucléaires.Séoul,octobre 2006. © AFP Photo /Jung Yeon-Je.k

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iUn ouvrier nord-coréenjette une pierre vers lesjournalistes chinois qui leprennent en photo lelong du Yalu, la rivièrequi sépare la Chine de laCorée du Nord. Sinuiji,octobre 2006. © AFP / Liu Jin

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La crise alimentaire persistante en Corée du Nord n’est pas seule-ment due à des facteurs comme l’isolement du pays ou à unegéographie essentiellement montagneuse. Elle est largement due

au maintien d’une politique économique catastrophique et aux restric-tions permanentes imposées par le gouvernement à la liberté demouvement et d’information, l’absence de transparence, les obstaclesdressés devant les observateurs indépendants et le personnel international.Avec pour conséquence que l’aide alimentaire ne parvient pas toujoursà ceux qui en ont le plus besoin.En décembre 2005, le PAM a mis fin à dix ans d’aide d’urgence à laCorée du Nord, après que le gouvernement nord-coréen ait déclaré qu’iln’accepterait désormais que l’aide destinée aux besoins de moyen etlong terme. Le régime se justifiait en annonçant de meilleures récoltesmais aussi son inquiétude de voir se développer une «culture de la dépen-dance» et l’«ingérence» des observateurs du PAM. Cette décision a conduità une réduction du personnel international, de 46 (nombre le plus élevé)à dix seulement, et à une diminution drastique du nombre de visites desurveillance. En février 2006, le PAM a approuvé un plan de deux ansévalué à 102 millions de dollars, comprenant la livraison de 150 000tonnes de denrées alimentaires à 1,9 million de Nord-Coréens, et lefinancement d’une production nationale de nourriture enrichie en vita-mines et minéraux destinée aux femmes et aux enfants. La mise enœuvre de ce plan, qui a débuté en juin 2006, s’est heurtée à des problèmes

de financement ; en octobre 2006, le PAM n’avait ainsi reçu que 10 % des102 millions de dollars requis.La FAO (Organisation des Nations unies pour l’Alimentation et l’Agricul-ture) estimait le déficit en céréales pour l’année 2006 à 900 000 tonnes,soit moins de 20% du minimum requis. Cette projection a été faite avantles graves inondations qui ont frappé le pays en juillet et août 2006.Après ces inondations, le gouvernement nord-coréen a signalé la mort oula disparition de centaines de personnes, et la destruction des maisonsde dizaines de milliers d’autres. Selon des estimations préliminaires, laperte des récoltes due aux inondations avoisinerait les 90 000 tonnes decéréales. De graves dégâts aux infrastructures, notamment aux routes,ponts et voies ferrées, ont été signalés sur des zones importantes.Après les tests de missiles nord-coréens en juillet 2006, la Corée du Sud –l’un des principaux pays donateurs – avait radicalement réduit ses dona-tions alimentaires, dont la Corée du Nord dépendait pour compenser unmanque de plus d’un million de tonnes de riz. La Corée du Sud a cédélorsque la Corée du Nord a demandé de l’aide après les graves inondationsdu mois d’août, mais Séoul a envoyé seulement la moitié des 100000tonnes qu’elle avait annoncées au titre de l’aide d’«urgence» – par compa-raison avec les 500000 tonnes de l’année précédente. À la suite de l’essainucléaire nord-coréen d’octobre 2006, la Corée du Sud avait suspendu l’aidealimentaire, tandis que la Chine diminuait également son aide de 60%.Fin 2005, le gouvernement nord-coréen avait procédé à des distribu-tions mais de nombreuses personnes n’avaient reçu aucune ration. ÀPyongyang, certains habitants continuaient à souffrir de malnutrition auprintemps 2006. La réimposition du système de distribution public à lafin 2005, combinée à la baisse de l’aide humanitaire internationale et auxinondations d’été, risquaient de provoquer le retour de la famine et unnouvel exode vers la Chine. Sans doute faut-il voir dans l’évaluation de cerisque (tant pour la Chine et la Corée du Sud que la Corée du Nord) l’ex-plication (ou l’une des explications) de la percée diplomatique defévrier 2007. e Pascal Fenaux

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UNE FAMINE QUI FAIT SYSTÈMEEn une décennie, plusieurs centaines de milliers de personnes sont mortesde faim à cause des catastrophes naturelles, de la perte de l’aide soviétiqueet d’une mauvaise gestion économique, tandis que plusieurs millionsd’enfants souffrent de malnutrition chronique. Le régime nord-coréen estd’autant plus responsable que la nourriture est distribuée de façoninéquitable, privilégiant les populations économiquement actives etpolitiquement loyales.

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D O S S I E R

Selon des estimations récentes de l’International Crisis Group, lenombre total de Nord-Coréens vivant en Chine serait aux alen-tours de 100 000, dont un peu plus de 9 000 seulement ont

gagné la Corée du Sud et s’y sont installés ; un petit nombre de Nord-Coréens ont gagné le Japon, l’Europe et les États-Unis, où ils ont pourbeaucoup reçu le statut de réfugié.La Chine ne souhaite pas que le flux régulier de Nord-Coréens franchis-sant la frontière prenne une ampleur incontrôlable. Outre une politiquerépressive inaugurée en décembre 2002, la Chine construit actuellementune nouvelle barrière de barbelés le long du fleuve Yalu dans leDandong, après les dégâts infligés aux récoltes et à l’infrastructurenord-coréennes par les crues d’été. Des panneaux côté chinois déclarent:«Il est interdit d’assister financièrement, d’héberger ou d’aider l’installation depersonnes du pays voisin qui ont franchi la frontière illégalement». Le «Traité d’ex-tradition réciproque relatif aux criminels en fuite» de 1960, ainsi que l’«Accordrelatif aux affaires frontalières» de 1986 déterminent la politique chinoiseofficielle à l’égard des Nord-Coréens qui franchissent la frontière. La clas-sification de ces personnes comme migrants économiques illégauxpar les autorités chinoises les soumet à un rapatriement forcé, auxtermes de ces accords bilatéraux, et leur refuse la protection internatio-nale ou l’accès au Haut-commissaire aux réfugiés des Nations unies.Le grand nombre de «fugitifs» nord-coréens rapatriés de force par laChine a incité le gouvernement nord-coréen à adoucir les peines pronon-cées et à modifier le code pénal. Sa version de 1999 établissait unedistinction entre le «franchissement illégal de la frontière» et son franchis-sement «dans l’intention de renverser la République». Dans sa version réviséede 2004, le code pénal opère une distinction supplémentaire entre le«franchissement» et le «franchissement fréquent». Selon cette dernière version,le «franchissement fréquent» de la frontière sans permission constitue unacte délictueux passible de deux ans maximum de camp de travail(trois dans la version de 1999). Les actes de trahison, comme «la reddition,

le changement d’allégeance, [et] la diffusion d’informations confidentielles» sontpassibles de cinq à dix ans de travaux forcés, voire de dix ans à laperpétuité dans les cas les plus graves.De nombreux prisonniers profitent des opportunités d’évasion quandils sont transférés de camps de travail vers des centres de détentionprovinciaux, ou retournent en Chine après leur libération. Jusqu’à40 % des rapatriés retournent en Chine dès que possible.La Corée du Nord aurait renforcé la sécurité sur la frontière au cours desdeux dernières années, visant les passeurs et les Nord-Coréens qui envi-sagent de quitter le pays. Les enregistrements vidéo clandestinsd’exécutions publiques en 2005 montrent notamment des personnesinculpées de trafic d’êtres humains et de franchissement illégal de lafrontière. En février 2006, 300 personnes auraient été arrêtées dans laville frontalière septentrionale de Hoeryong pour avoir prévu de quitterla Corée du Nord, ou pour leurs liens avec la Corée du Sud ou la Chine.En mai, selon certaines rumeurs, 217 agents nord-coréens se faisantpasser pour des demandeurs d’asile auraient été déployés en Chine dansle cadre d’une importante opération de renseignement. La Chinecontinue d’arrêter et de rapatrier de force des Nord-Coréens, sans lesdéférer au Haut-commissariat aux réfugiés.La Chine s’en prend également aux missionnaires, aux personnestravaillant pour l’aide et aux passeurs qui hébergent ou transportent desNord-Coréens. Des observateurs en Chine et en Corée du Sud attri-buent les récentes opérations répressives menées près de la ville deShenyang, au nord-est de la Chine, à une campagne de «nettoyage» en vuedes Jeux olympiques de 2008. Des Nord-Coréens ayant vécu en Chinependant plusieurs années ont mentionné ces mesures préparatoires auxJeux olympiques comme facteur les ayant incité à fuir récemment enCorée du Sud. Selon des estimations, 150 à 300 Nord-Coréens seraientrapatriés de force par la Chine chaque semaine.En juin 2004, le Comité des Droits de l’Enfant (CDE, un des raresorganes de l’ONU obtenant un accès relatif) s’inquiétait d’informa-tions relatives à la présence d’enfants des rues nord-coréens dans les villeschinoises frontalières. Le CDE s’est également exprimé contre le fait queles enfants (et leurs familles) forcés de retourner en Corée du Nordétaient considérés par le régime nord-coréen non comme des victimes,mais comme des délinquants.En mars 2006, Lee Kwang-soo rejoignait la Corée du Sud par la mer avecsa femme, ses deux enfants et un ami. En août de la même année, il adécouvert que 19 membres de sa famille restés en Corée du Nord étaientintrouvables. Ils avaient «disparu» entre le mois de mars (date de sa fuiteen Corée du Sud) et août 2006. Lee Kwang-soo a également apprisqu’une réunion avait été organisée par des responsables nord-coréens,consacrée spécifiquement à la «trahison de l’État et du peuple nord-coréens»par ces familles… e P.F.

RÉFUGIÉS

UNE SAIGNÉEDÉMOGRAPHIQUEDans les années 1990, l’effondrement économique et la famine en Corée du Nord ont poussé des dizaines demilliers de personnes à chercher refuge en Chine ouplus loin.

10 Libertés ! Avril 2007

LES FEMMES, VICTIMES DE CHOIX

En juillet 2005, le Comité des Nations unies pour l’Élimination de toutes lesformes de violence à l’égard des femmes a exprimé ses craintes que la famine etles catastrophes naturelles ayant affecté le pays au cours de la décennie précédente

puissent rendre les femmes vulnérables à la traite et à d’autres formes d’exploitation,comme la prostitution. Le Comité s’est déclaré particulièrement préoccupé par la situa-tion des femmes en zones rurales, de celles qui sont la source de revenu principale du foyer,et des jeunes filles. e

iDes transfuges nord-coréens se couvrent le visage alors

qu’ils sont emmenés dans un centre de rétention pourimmigrants en Thaïlande. S’ils sont reconnus, leurs familles

risquent gros. S’ils n’obtiennent pas le statut de réfugiés, ilsseront renvoyés en Corée du Nord. Bangkok, octobre 2006.

© AFP / Saeed Khan

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Marisela Ortiz lors du rassemblement organisé devant l’ambassade du Mexique.Bruxelles, 8 mars 2007. © AIBF / Sabina Jaworek

M O U V E M E N T

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LE FANTASTIQUE CONTRE LA TORTURE

La 25e édition du Festival internationaldu Film fantastique de Bruxelles (BIFFF)se déroule du 5 au 17 avril sur le site deTour & Taxis et au Cinéma Nova. À cetteoccasion, le BIFFF s’associé à lacampagne «Devenez le cauchemar desbourreaux» lancée par Amnesty.Le BIFFF et Amnesty offrent aux lecteursde Libertés ! des places gratuites pourassister à la projection de 2 films.Pour obtenir ces places, il suffit d’en-voyer un courriel avec toutes voscoordonnées à l’adresse [email protected].

HOW TO GET RID OF THE OTHERS (DK)La loi martiale vient d’être décrétée au Danemark : l’armée a reçules pleins pouvoirs pour juger, condamner et exécuter tous lescontrevenants à la nouvelle loi sociale. La solution, venue du fondle plus obscur de l’administration gouvernementale – tellementobscur que personne ne veut en assumer la responsabilité :éliminer tous les fumeurs, alcoolos, drogués, handicapés, fraudeurs,crétins et feignants de toutes sortes; bref, tous ceux dont la balancecommerciale envers l’État est dans le rouge.Le jeudi 12 avril à 20h30 au Cinéma NovaLe vendredi 13 avril à 18h30 au Cinéma NovaPour chacune de ces séances, le BIFFF offre 5 X 2 places

BROKEN (UK)Au point où elle en est, Hope pourrait intenter un procès en diffa-mation à ses parents pour lui avoir donné un prénom pareil : ellevient en effet de se réveiller au fond d’un cercueil, sous 2 mètresde terre ! Après plusieurs heures passées à hurler, quelqu’un vientenfin la sortir de sa tombe, mais uniquement pour la laisser selibérer du cercueil par ses propres moyens. Elle découvre alorsqu’elle est au fond d’une forêt. Seule. Et que sa fille a disparu.Perdue au milieu des bois, elle finit pourtant par rencontrer quel-qu’un: son bourreau, qui lui apprend que sa fille est morte. Ne restealors à Hope qu’à servir d’esclave à cet homme, subir l’humiliation,la violence, la dégradation jusqu’à ce qu’elle trouve le moyen dese venger.Le vendredi 13 avril à 00h00 à Tour & TaxisPour cette séance, le BIFFF offre 20 X 2 placesInfos sur le festival : www.bifff.org et 02 201 17 13

FORMATIONS 2007

19/04 Découvrir Amnesty de 19h00 à 22h00 BXL21/04 Le commerce des armes de 10h00 à 16h30 Namur21/04 La peine de mort de 10h00 à 15h00 BXL21/04 Découvrir Amnesty de 09h30 à 12h30 Mons26/04 Découvrir Amnesty de 19h00 à 22h00 Namur05/05 Mission et fonctionnement de 09h30 à 16h30 BXL02 et Prendre la parole de 09h30 à 17h00 BXL03/06 en public09/06 Parler de la peine de mort de 10h00 à 15h00 BXL14/06 Découvrir Amnesty de 19h00 à 22h00 BXL16/06 Les violences conjugales de 10h00 à 16h30 BXL16/06 Découvrir Amnesty de 09h30 à 12h30 Luxembourg30/06 Homosexualité et de 10h00 à 16h30 BXL

droits humains

Pour vous y inscrire et consulter le programme de toute l’année,rendez-vous sur notre site Internet à l’adresse suivante : http://www.amnestyinternational.be/doc/rubrique7.html

Pour tout renseignement, n’hésitez pas à nous contacter par e-mailà l’adresse [email protected] ou par téléphone au 02/538 81 77,de préférence les mercredi, jeudi et vendredi. e

Ciudad Juárez, dans l’État mexicain deChihuahua, est une ville frontalièredu Texas qui vit des fameuses «maqui-

ladoras» (usines d’assemblage, sous-traitantesde multinationales). L’emploi occupe en majo-rité des femmes jeunes, sous-payées et nonsyndiquées. Le tourisme liée à la prostitutionet au trafic de drogue et d’alcool est contrôlépar la mafia locale. Depuis 1993, plus de400 filles et jeunes femmes ont été assassi-nées à Ciudad Juárez, dont au moins un tiersaprès avoir subi de graves violences sexuelles,sans que les autorités enquêtent sur ces assas-sinats appelés «féminicides» par la pressemexicaine (1).Cependant, depuis 2003, grâce aux pressionsdes familles de victimes et des organisationslocales de défense des droits des femmes,conjuguées aux campagnes lancées par desONG comme Amnesty International, leschoses commencent à changer.Le gouvernement fédéral a institué unecommission spéciale destinée à faciliter lescontacts avec les familles des victimes et lesONG de défense des droits humains. Cepen-dant, la commission ne semble pas prendre lamesure de l’ampleur des crimes et sous-entendque plaignants et ONG sont victimes d’une«perception différente de ce qui se passe en réalité».Ainsi, 177 fonctionnaires ont été identifiéscomme présumés responsables de négligenceou d’omission lors des premières enquêtes,mais aucun n’a été traduit en justice pourcause de prescription. La justice mexicainene tient pas compte des recommandationsdes organisations nationales et internatio-nales, ni de celles de la commission spéciale.

Celles-ci voulaient que les crimes soientanalysés sous un angle qui tienne compte desquestions de genre.Pour dénoncer cette situation intolérable,Marisela Ortiz, présidente de Nuestras Hijas leRegreso a Casa était présente à Bruxelles, dansle cadre de la Journée internationale de laFemme, les 7 et 8 mars. Marisela Ortiz Riveraest psychologue de formation, institutriceprimaire et pédagogue, mère de famille etmilitante sociale depuis 2001, quand une deses élèves de 17 ans, Lilia Alejandra GarciaAndrade, a été assassinée par des inconnus.À Bruxelles, elle a participé au lancement dufilm Bordertown, rencontré les responsablesd’Amnesty International et sensibilisé lesopinions et les partenaires européens duMexique sur la tragédie des «féminicides»perpétrés depuis une décennie à CiudadJuárez. e

Pour continuer surcette lancée, 10 X 2places sont offertesaux membres d’Am-nesty et lecteurs deLibertés !. Ces placessont valables dans tousles cinémas de Wallonieet de Bruxelles proje-tant Bordertown, saufle samedi et le diman-

che. Il suffit pour les obtenir d’envoyer uncourriel à [email protected] avec la mention«Places Bordertown».

(1) Voir Libertés ! n° 416 de septembre 2005.

JOURNÉE INTERNATIONALE DE LA FEMME

LE MEXIQUE S’INVITE ÀBRUXELLESLe 8 mars dernier, Marisela Ortiz, présidente de Nuestras Hijas le Regreso a Casaétait présente à Bruxelles pour participer au lancement du film Bordertown,sensibiliser les opinions et interpeller les partenaires européens du Mexique sur latragédie des «féminicides» perpétrés depuis une décennie dans la ville de CiudadJuárez.

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Le 23 mars dernier, Irene Khan,Secrétaire générale d’AmnestyInternational, était faite docteur

honoris causa par l’Université de Gand. «Enreconnaissant le mérite du travail des collabo-rateurs d’Amnesty en Belgique comme dans lemonde, l’Université de Gand a donné un signalimportant à l’Union européenne», a déclaréIrene Khan. Au cours de la conférencequ’elle donnait la veille à Gand, elle s’estintéressée en particulier à la relation deduplicité entre l’Union européenne et lesEtats-Unis depuis le 11 septembre 2001.«L’UE manque à son devoir de pionnier enmatière de défense des droits humains. Elledevrait agir plus concrètement pour promouvoirpartout les valeurs dont elle se réclame.» Cesvaleurs dont l’UE se réclame sont désor-mais menacées dans trois domaine : leracisme, la lutte contre le terrorisme et les

réfugiés. «L’Union doit respecter les valeursqu’elle veut promouvoir. Peut-elle demander à laTurquie de changer ses pratiques, notamments’agissant du respect des droits de l’homme et dela torture, si elle-même les trahit ? Avec cescamps de transit installés aux frontières del’Union, en Ukraine, au Mali, enMauritanie, etc., l’Europe fait travailler ces payssous contrat, pour qu’ils sous-traitent ses réfu-giés.» Enfin, Irene Khan a accusé l’UE de«collusion» avec les États-Unis dans le casde Guantánamo : «L’Union européenne doitprendre ces pratiques au sérieux car il s’agitd’un réel déni de droit…» e

UN HONORISCAUSA POURAMNESTY

Irene Khan reçoit le titre de docteurhonoris causa de l’Université de Ganddes mains du recteur Paul VanCauwenberge. Gand, 23 mars 2007. © Universiteit Gent

12 Libertés ! Avril 2007

FOIRE DU LIVREAMNESTY A SON PRIX

Le 3 mars, au Forum de la Foireinternationale du Livre deBruxelles, Amnesty a décerné son

«Prix Droits humains Littérature» à Domi-nique Sassoon pour son livre Il y a plusieursmanières de prendre des photos. Paru dans labelle collection d’Actes Sud Un endroit oùaller, c’est un précieux recueil dû à un«médecin du monde» qui s’est souventdemandé «comment trouver la foi devant tantde malheurs, comment garder un peu d’espoir,approcher le bonheur». Dominique Sassoonest spécialiste en chirurgie de la main eten microchirurgie, diplômé en sciencepolitique comparative. Des territoireslointains où l’ont appelé une trentaine demissions humanitaires, il offre des«instantanés», décrit des rencontres, posedes questions sans réponse et porte unregard désenchanté sur l’abandon danslequel sont laissés des milliers d’êtreshumains. Mais il raconte aussi le courageet la solidarité.Dominique Sassoon est venu chercherson prix, une lithographie de PierreAlechinsky. C’est une personnalité forte etattachante, pleine d’attention, modeste et

chaleureuse, qui nous a captivés avec lerécit touchant de l’«enfant qui dort», ingé-nieux stratagème qui, chez les Mauresberbères, permet à la communauté d’ac-cueillir un enfant dont on ne connaît pasle père. On prétend que l’enfant s’estendormi dans le ventre de sa mère et celapeut durer des années… Chacun semble ycroire et ainsi tout est bien. Il nous a ditaussi l’angoisse qui saisit celui qui estvenu pour soigner et qui – parce que lafile est trop longue et que le temps estcompté – doit s’en retourner sans avoir pufaire plus…«On peut rêver qu’un jour, un illuminé mettrasur le marché une puce pour la santé. Une petitecarte, si possible colorée, avec un numéropermettant l’accès à tous les hôpitaux. Une coti-sation modeste répartie entre tous, garantiraitla vie et même soignerait la maladie, tous lesjours qui finissent par – di». Et aussi : «Faut-ilparler ? Faut-il se taire ? Je ne sais. En tout cas,ce qui est sûr, c’est qu’il faut faire.» C’est trèsbeau. Et très utile. e Suzanne Welles

Amnesty tient à remercier pour leur soutien, à l’oc-casion de la Foire du Livre de Bruxelles, la librairieTropismes, ainsi que les éditions Luc Pire, De Boecket Complexe.

M O U V E M E N T

CERCLE BENENSON

L’ART ET LES DROITS HUMAINSL’art bouge, s’interroge et s’investit dans la défense des droits humains. Desartistes se joignent à Amnesty et mettent leur créativité et leur énergie enmouvement pour exprimer leur combat en faveur des droits humains.Première partie : Lecture du discours d’Harold Pinter lors de la remise deson prix Nobel de littérature par Pietro Pizzuti et Jacqueline Bir, accom-pagnés par Jean-Philippe Collard-Neven au piano.Deuxième partie : Chorégraphie sur le thème de la torture par la compa-gnie Nyanga Zam. eLe dimanche 22 avril à 15h00 à BruxellesLieu : Petit Théâtre Mercelis – rue Mercelis 13, 1050 BruxellesEntrée : 10 € (adultes) — 7,5 € (étudiants et demandeurs d’emploi)Réservation souhaitée au 02 538 81 77 ou [email protected]

ÉDUCATION À LA CITOYENNETÉ : LE RÔLE DE L’ENSEIGNEMENTL’école est un lieu d’apprentissage du vivre ensemble et de l’ouverture surle monde. À l’heure actuelle, l’éducation à la citoyenneté est intégrée dansles programmes scolaires et elle doit, selon un nouveau décret de lacommunauté française, être appliquée de manière transversale. Commentréaliser cette tâche de manière appropriée et continuer son apprentissageà chaque niveau de l’enseignement? Les écoles reçoivent-elles des moyenssuffisants pour le faire? Doit-on envisager des collaborations entre mondeenseignant et secteur associatif pour réaliser cette éducation citoyenne ?Avec Philippe Béague (psychologue, psychanalyste, membre fondateur dela Fondation Françoise Dolto et intervenant de l’émission «Quand lesjeunes s’en mêlent» sur la Première) ; Michel Scheuer (recteur des FUNDPde Namur, criminologue et ancien directeur d’une institution d’héberge-ment de mineurs placés) ; Rudy Wattiez (Secrétaire général, formateur etresponsable de l’équipe politique de CGé, Changements pour l’égalité,mouvement socio-pédagogique pour et avec les acteurs de l’éducation etde la formation en vue de l’égalité et de l’émancipation sociale. eLe lundi 30 avril à 20h00 à NamurLieu : l’Arsenal (Grenier), rue Bruno 11, 5000 NamurEntrée : 5 € (adultes) 2 € (étudiants et demandeurs d’emploi)Réservation souhaitée au 02 538 81 77 ou [email protected]

Ce sont aussi 80 groupes locaux qui, sur le terrain, font un travail d’action et desensibilisation aux droits humains. Pour vous y joindre, contactez votre régionale.

SECRÉTARIAT NATIONAL AIBFRue Berckmans 9, 1060 Bruxelles – 02 538 81 77 — Fax: 02 537 37 29 – www.amnesty.beSECRÉTARIAT INTERNATIONALEaston Street 1, London WC1X ODW – United Kingdom – 00 44 207 413 5500AMNESTY INTERNATIONAL VLAANDERENKerkstraat 156, 2060 Antwerpen 6 – 03 271 16 16RESPONSABLES RÉGIONAUX D’AMNESTYBRABANT WALLONJean-Philippe Chenu – chemin de la Terre Franche 13, 1470 Genappe – 010 61 37 73– [email protected] Pinxteren – Rue de la Flèche 16 A – 1000 Bruxelles – 02 513 77 10 –[email protected] OCCIDENTALMyriam Dellacherie – rue Basse Couture 20, 7500 Tournai – 069 22 76 18 – [email protected] ORIENTALNicole Grolet – av. Elisabeth 6, 6001 Marcinelle – 071 43 78 40 – [email protected]ÈGEChristiane Pivont – rue Sous l’Eau 23, 4020 Liège – [email protected] – 04 343 89 76Christine Bika – Responsable de la gestion de la permanence – C/O Bureau régionald’AI – rue Souverain Pont 11, 4000 Liège – du lundi au samedi de 13h00 à 17h30 –04 223 05 15LUXEMBOURGDaniel Libioulle – Avenue de la Toison d’Or 26 – 6900 Marche en Famenne – 084 3151 31 – [email protected] Van Gulck – Rue Vivier Anon 8, 5140 Sombreffe – 071 88 92 51 –[email protected]

jDominique Sassoon (g.) enprésence de la journaliste MichèleCédric, membre du jury, après queSven Pitseys, présidentd’Amnesty International BelgiqueFrancophone, lui ait remis le «PrixDroits humains» de la Foire duLivre 2007. Bruxelles, 3 mars2007. © Bruno Brioni

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Gary Tyler, un Afro-Américain de48 ans, est en prison en Louisianedepuis l’âge de 17 ans à la suite d’un

procès inéquitable manifestement entaché depréjugés raciaux. En 1975, il a été condamné àmort pour le meurtre de Timothy Weber, unécolier blanc de 13 ans tué par balle à l’exté-rieur de son école lors d’incidents à caractèreraciste. Gary Tyler se trouvait parmi plusieursétudiants noirs dans un bus attaqué par desblancs qui leur jetaient des pierres et desbouteilles et c’est de ce bus que le tir seraitparti. Une fille assise à côté de Gary Tyler dansle bus avait affirmé l’avoir vu tirer sur la foule.À la suite de ce témoignage, la police a alors«trouvé» une arme fourrée à travers une longuedéchirure dans un siège. Ce siège et le restedu bus avaient pourtant déjà été fouillés sans

succès. À cette époque, les tensions racialesétaient maximales car les communautés blan-ches tentaient de résister à l’intégration raciale.Il existe des preuves formelles que Gary Tyler aété violemment frappé durant les interroga-toires au poste de police. Il a été jugé par unjury entièrement blanc et sa défense a étémollement assurée par un avocat blanc. Depuisson procès, des indices prouvent que Gary Tylern’a pas tiré sur la victime et plusieurs témoinsà charge (dont la fille qui était assise à côté delui) affirment avoir été forcés par la police defaire des déclarations. Sa condamnation à morta été commuée en prison à vie en 1977, lorsquela Cour suprême a déclaré inconstitutionnellela peine de mort de l’État. Autrement, il estplus que probable que Gary Tyler aurait étéexécuté. e

MODÈLE DE LETTRE

Madame la Gouverneure,Gary Tyler, un Afro-Américain de 48 ans, est en prison en Louisiane depuis l’âge de 17 ans suite à

un procès inéquitable entaché de préjugés raciaux. En 1975, il a été condamné à mort pour le meurtre deTimothy Weber, un écolier blanc de 13 ans tué par balle à l’extérieur de son école lors d’incidents àcaractère raciste. Gary Tyler a été violemment frappé durant les interrogatoires et les témoins à charge sesont rétractés en affirmant avoir été contraints par la police. De plus, il a été jugé par un juryentièrement blanc et défendu mollement par un avocat blanc. En 1977, sa peine a été commuée en prisonà vie à la suite d’un arrêt de la Cour suprême des États-Unis déclarant la peine de mortinconstitutionnelle. En tant que membre/sympathisant(e) d’Amnesty International, je vous demande derectifier ce simulacre de justice par une grâce à effet immédiat accordée à Gary Tyler, et d’organiser uneenquête exhaustive et indépendante sur ce cas de telle sorte que quiconque s’étant trouvé impliqué dansdes mensonges ou des abus soit déféré en justice.

Espérant que mon appel sera pris en considération, je vous prie d’agréer, Madame laGouverneure, l’expression de mes sentiments distingués.

Signature : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Nom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

LETTRE À ADRESSER À :Madame la Gouverneure Kathleen Babineaux Blanco – Bureau du GouverneurPO Box 94004 – Baton Rouge – LA 70804-9004 – USAFax : +1 225 342 7099 – E-mail : www.gov.state.la.us

COPIE À ENVOYER À :Ambassade des États-Unis – Boulevard du Régent 27 – 1000 BruxellesFax : 02 511 27 25 – E-mail : [email protected]

Libertés ! Avril 2007 13

RECEVOIR LES LETTRES DU MOISVous pouvez recevoir les lettres du mois par e-mail en envoyant directement un e-mail vide à [email protected]

BONNES NOUVELLESDans tous les pays du monde, des gens sont libérésgrâce au travail des membres d’Amnesty. Destémoignages émouvants nous parviennent desprisonniers libérés ou de leur famille. Ils montrentqu’une action de masse peut avoir des résultats pourun meilleur respect des droits humains.

SOUDANINCULPATIONLe 27 février, le Procureur de la Cour pénale internationale(CPI) a assigné deux Soudanais soupçonnés de crimes contre l’hu-manité et de crimes de guerre au Darfour. Amnesty a néanmoinsdemandé au Conseil de Sécurité que, non seulement, le gouver-nement soudanais arrête les deux suspects mais d’adopter etd’exécuter une loi nationale lui permettant de déférer à la CPIles suspects présents et à venir. e

BRÉSILDROITS SOCIAUXUn juge de l’État de São Paulo a étendu de soixante jours, soitjusqu’au 10 mai, la date définitive d’expulsion des 468 famillesvivant dans l’immeuble de Prestes Maia. À la suite de ce juge-ment, et face aux fortes pressions exercées par des manifestantsrassemblés dans le centre de la ville de São Paulo depuis le1er février, ainsi qu’à l’inquiétude exprimée par la communautéinternationale, la municipalité a signé le même mois un accordavec les habitants de cet immeuble. Elle s’est engagée à relogertoutes les familles dans le cadre d’un programme d’urgence.Amnesty International se félicite de l’engagement de la muni-cipalité à réinstaller de façon permanente les habitants dans deslogements décents. L’organisation continuera à veiller au respectde cet accord. e

VÉNÉZUÉLAPROTECTION ASSURÉEMaria del Rosario Guerrero Galluci, défenseure des droitshumains, son époux Adolfo Martinez Barrios et leurs prochesbénéficieraient désormais d’une protection officielle. Uneenquête aurait été ouverte sur la tentative d’assassinat perpétréecontre ce couple, et deux personnes auraient été inculpées detentative de meurtre. Amnesty International salue les mesuresmises en œuvre pour protéger Maria del Rosario Guerrero et sesproches, ainsi que l’enquête ouverte sur la tentative d’assas-sinat dont cette femme et son époux ont été victimes. AmnestyInternational demande néanmoins aux autorités de veiller à cequ’une enquête indépendante et approfondie soit menée sansdélai sur tous les cas signalés de violations des droits humainscommises par des policiers dans l’État de Guarico, et à ce que lesauteurs présumés de ces actes soient déférés à la justice. e

RUSSIEOUZBEKS RELÂCHÉSTreize hommes appartenant à l’ethnie ouzbèke et détenus dansun centre de détention provisoire situé dans la région d’Iva-novo depuis juin 2005 ont été relâchés et peuvent désormaiscirculer librement en Russie. L’organisation salue la libérationde ces hommes, qui étaient détenus dans un, une ville russe,depuis juin 2005. Cependant, ils risquent toujours d’êtrerenvoyés de force en Ouzbékistan d’y être victimes de graves viola-tions des droits humains. Les autorités ouzbèkes les accusentd’avoir participé aux manifestations qui ont eu lieu le 13 mai2005 à Andijan, une ville de l’Ouzbékistan oriental. Au cours deces événements, des centaines de manifestants pacifiquesauraient été tués par les forces de sécurité. e

ÉTATS-UNIS :

SIMULACRE DE JUSTICE

A C T I O N

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14 Libertés ! Avril 2007

A C T I O N

Le célèbrejournalisted’opposition

Sakit Zahidov a étécondamné à troisans de prison à lasuite d’un procèsinéquitable. SakitZahidov écrit dans lejournal d’opposition Azadliq (Liberté). Il aété arrêté le 23 juin 2006 et accusé par lesautorités policières de la brigade des stupé-fiants de «possession de narcotiquesprohibés avec intention de les distribuer».Les journalistes connus et les militantsdes droits humains considèrent que sonarrestation a un motif politique : SakitZahidov a été condamné à cause de sesarticles satiriques et de sa critique dugouvernement. Ils soutiennent SakitZahidov quand il déclare que les droguesont été cachées sur lui alors qu’il étaitemmené de force dans une camionnette

par des inconnus pour ensuite être arrêté.Au procès de Sakit Zahidov qui s’est tenuen août 2006, beaucoup de témoins et deconnaissances ont été empêchés d’assisterà l’audience préliminaire qui a eu lieudans un petit local d’une capacité de seule-ment 25 personnes. Un enregistrementde l’audience n’a pas été autorisé, appa-remment des preuves médicales ont étéavancées et il y a eu un certain nombred’irrégularités de procédure. Enoctobre 2006, Sakit Zahidov a étécondamné à trois ans de prison sur incul-pation réduite de «possession de droguesà usage personnel». Il est actuellementdétenu dans une colonie pénitentiaire dehaute sécurité de la région de Qobustan,dénoncée par les ONG de défense desdroits humains comme un lieu de viola-tion de droits humains. AI est convaincuequ’il est en prison pour l’unique raisond’avoir exercé pacifiquement son droit à laliberté d’expression. e

TARIFS POSTAUXLettres (jusqu’à 50 grammes) Europe :0,80€ (Prior) ou 0,70€ (Non Prior). Reste dumonde: 0,90€ (Prior) ou 0,75€ (Non Prior)La surtaxe aérienne est incluse (étiquetterequise).

COMMENT AGIR EFFICACEMENT ?Les cas exposés concernent des victimes de violations des droits humains dont s’occupe Amnesty International. Chaque appelcompte. Un texte (à écrire ou à photocopier) vous est proposé pour chaque cas. Dans l’intérêt des victimes, écrivez en termesmesurés et courtois aux adresses indiquées. Ces lignes sont lues partout dans le monde par les quelque 1800000 membres d'Am-nesty International. Elles sont reproduites dans de nombreux pays par des dizaines de journaux et constituent la clé de voûtede l'action du mouvement.

MODÈLE DE LETTRE

Monsieur l’Inspecteur général,Sanjiv Kumar Karna pique-niquait avec une dizaine d’amis le 8 octobre

2003 lorsqu’ils ont été arrêtés par trentaine d’agents des forces de sécurité àJanakpur. Brutalement frappés lors de leur interrogatoire, six d’entre eux ont étérelâchés, mais Sanjiv Kumar Karna et quatre amis, Durgesh Kumar Labh, PramodNarayan Mandal, Shailendra Yadav et Jitendra Jha ont «disparu» depuis lors.L’arrestation de Sanjiv Kumar Karna est sans doute liée à son militantisme ausein de la All Nepal National Independent Student Union (ANNISU-R) liée au Particommuniste du Népal (CPN) de tendance maoïste. Il a pourtant quitté l’ANNISU-Ren 1998. La police et l’armée se rejettent mutuellement la responsabilité del’arrestation et de la disparition des cinq étudiants. En tant quemembre/sympathisant(e) d’Amnesty, je prie les autorités de retrouver la trace deSanjiv Kumar Karna et de ses quatre amis et de rendre public le résultat de leursrecherches. S’ils sont en vie, je demande leur libération immédiate et s’ils ont ététués, les responsables doivent être déférés à la justice.

Signature : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Nom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

LETTRE À ADRESSER À :Monsieur l’Inspecteur général de la Police Om Bikram Rana – Quartiergénéral de la Police – GPO Box 407 – Naxal – Kathmandou – NépalFax : +977 14 415 593 ou 594

COPIE À ENVOYER À :Ambassade du Népal – Avenue Brugmann, 210 – 1050 BruxellesFax : 02 344 13 61 – E-mail : [email protected]

MODÈLE DE LETTRE

Monsieur le Président,Sakit Zahidov, célèbre journaliste du journal d’opposition Azadliq, a été

condamné en octobre 2006 à trois ans de prison pour «possession de droguesprohibées à usage personnel» à la suite d’un procès inéquitable où nombre detémoins n’ont pas été admis à une audience préliminaire entachée d’irrégularitéset où auraient été avancées des preuves médicales. Sakit Zahidov affirme que lesstupéfiants auraient été cachés sur lui lors de son arrestation. En tant quemembre/sympathisant(e) d’Amnesty International qui est convaincue que SakitZahidov a été condamné pour avoir exercé son droit à la liberté d’expression parcequ’il tenait une rubrique satirique critiquant le gouvernement, je vous demandeinstamment qu’il soit rejugé lors d’un nouveau procès en accord avec les normesinternationales. Espérant que vous ferez droit à ma requête, je vous prie de croire,Monsieur le Président, à l’assurance de ma haute considération.

Signature : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Nom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

LETTRE À ADRESSER À :Monsieur le Président Ilham Aliyev – Bureau du Président de laRépublique d’Azerbaïdjan – 19, Rue Istiqlaliyyat – Bakou AZ1066 –AzerbaïdjanFax : +994 12 492 0625

COPIE À ENVOYER À :Ambassade de la République d’Azerbaïdjan – Avenue Molière, 464 – 1050 BruxellesFax : 02 345 91 58 – E-mail : [email protected]

Sanjiv Kumar Karna, un étudiantde 24 ans, pique-niquait avec unedizaine d’amis le 8 octobre 2003

lorsqu’ils ont été arrêtés par trentained’agents des forces de sécurité à Janakpur.Durant leur transfert vers la prison, ilsont été brutalement frappés avant d’êtreinterrogés. Six d’entre eux ont été relâ-chés, mais Sanjiv Kumar Karna et quatreamis – Durgesh Kumar Labh, PramodNarayan Mandal, Shailendra Yadav etJitendra Jha – n’ont jamais réapparu. L’ar-restation de Sanjiv Kumar Karna est sansdoute liée à son militantisme au sein de laAll Nepal National Independent Student Union(ANNISU-R) liée au Parti communiste duNépal (CPN) de tendance maoïste. Il apourtant quitté l’ANNISU-R en 1998. Après

avoir porté plainte auprès des autoritéscompétentes, la famille de Sanjiv KumarKarna a, à plusieurs reprises, été informéeque des enquêtes étaient en cours etqu’elle sera mise au courant lorsqu’ellesseront terminées. Cependant, selon laCommission des droits de l’homme duNépal, la police et le ministre de l’Inté-rieur nient toute implication de la policedans l’arrestation de Sanjiv Kumar Karnaet de ses amis, tandis que l’armée népalaiseaffirme que les cinq jeunes ont été tuéslors de l’opération policière. Police etarmée se renvoient la balle. Cependant, AI demande que soient vérifiésles témoignages selon lesquels SanjivKumar Karna aurait été détenu parl’armée. e

NÉPAL

CINQÉTUDIANTS«DISPARUS»

AZERBAÏDJAN

PROCÈS INÉQUITABLED’UN JOURNALISTE

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LA VILLE DESFEMMESPERDUES

Le journaliste qui lutte seul contretous pour dénoncer une injusticesociale est un classique du film

noir. À Ciudad Juarez, ville mexicaine,proche de la frontière américaine, laréalité dépasse la fiction: en dix ans, prèsde 400 femmes travaillant dans les usines d’assemblages, sous-traitant pour les multinationales, ontété assassinées et violées dans l’indifférence quasi totale des autorités. Bordertown, un thriller indé-pendant qui dénonce ces faits a pu voir le jour après 7 ans de préparation grâce au soutien et à laparticipation de Jennifer Lopez et d’Antonio Banderas, les deux stars hispaniques les plus en vued’Hollywood. On peut regretter que l’intrigue policière soit souvent cousue de fil blanc. Et sourireen voyant Miss Lopez abandonner son brushing pour prendre la place d’une ouvrière à la chaîneafin de confondre un des tueurs. On dira aussi que ça permet à l’histoire d’aller vite sans se soucierde trop d’explications superflues. Ces coutures apparentes ne sont pas trop gênantes, car l’attraitet l’intérêt du film sont ailleurs, dans les faits dénoncés et dans la très forte présence de la ville etde ses habitants. Tourné pour l’essentiel au Nouveau-Mexique et dans la ville frontière de Nogales,le film brosse, dans des images qui oscillent entre expressionnisme et néo-réalisme, un portrait saisis-sant de cet avant poste de la globalisation où les ouvrières ne sont vraiment plus que des ressourceshumaines corvéables et remplaçables à merci. e Gilles BechetBordertown, de Gregory Nava, sortie nationale le 25 avril.Voir aussi nos pages «Mouvement»

UN MORT DE PLUS

Narcisse, prof dans un lycée d’une ville d’Afrique non identifiéemène une vie sans trop de questions, rythmée par sesnombreuses conquêtes féminines. Lorsqu’une de ses

maîtresses l’appelle en pleine nuit pour qu’il l’aide à se débarrasser ducadavre d’un colonel, beau-frère du Président et chef d’état-majoradjoint de l’armée, c’est la fin de la tranquillité. Pour éviter de porterle chapeau qui lui tombe sur la tête, Narcisse, le naïf, fait exactementce qu’on attend de lui. Emporté dans un jeu de pouvoir qui le dépasse,il aimerait croire qu’il contrôle toujours la situation. Mais le seulpouvoir est celui de la violence. Et tous ces politiciens qu’il croyait puis-sants ne le sont finalement pas autant que ça. Dans ce deuxièmeroman d’un jeune écrivain togolais, le suspense nonchalant prend desallures de fable. Démarrant comme un polar en mode mineur, le récit est emporté par l’agitationpopulaire qui s’enfle avec rumeurs de coup d’état. Après le crescendo vient une finale étrangementdécalée que Narcisse partage avec son collègue Zupitzer, un beau personnage qui se révèle sur le tard.L’air de ne pas y toucher, Ananissoh place les Africains devant leurs responsabilités et avec ladélectation du romancier fait patauger ses personnages dans la mare aux crocodiles. e G.B.Un reptile par habitant, Théo Ananissoh, Gallimard, Continents noirs, 11,90€

SINISTRE CUILLETTE

«Des arbres du Sud portent un fruit étrange, Du sang sur des feuilles,Et du sang aux racines, Un corps noir oscillant à la brise du sud,Fruit étrange pendu dans les peupliers.» Écrit par Albel Meeropol

(connu pour avoir plus tard adopté les enfants Rosenberg), le poèmeBitter Fruit, vibrant réquisitoire contre les lynchages de Noirs dans lesÉtats du sud, est présenté en 1937 à la chanteuse Billie Holiday. Elle vadès lors le présenter au public, malgré le boycott des radios et malgréqu’elle sera elle-même chassée d’un de ses concerts. Elle finira cepen-dant par l’imposer et c’est ainsi que Strange Fruit entrera dans l’histoiredu jazz et l’histoire tout court. Portée par cette voix superbe et déchi-rante, la chanson a fait prendre conscience du racisme et aussi de lacapacité de l’art à améliorer les choses. Autour de Strange Fruit, le Théâtre Varia présente une créa-tion théâtrale et musicale mise en scène par Michel Dezoteux. On n’y verra pas Billie Holiday, pasplus que sa vie n’y sera racontée. Mais le spectacle fouille à travers textes et musique ce qui reste dece passé. Et pose la question. De tout cela que retenons – nous ? Bien plus qu’une musique et desparoles qui s’envolent ? e Suzanne WellesStrange Fruit, au Théâtre Varia, rue du sceptre 78, 1050 Bruxelles, du 29 mars au 21 avril (02 640 82 58)

A G E N D AINSTALLATIONAUTO-DA-FE

Le B.P.S.22, espace de créa-tion contemporaine de laProvince de Hainaut,accueille la première expo-sition solo, en Belgique, del’artiste sud-africain Ken-dell Geers, figure majeurede la scène internationale.Traditionnellement inspirépar la région qui accueilleses créations, cet artisteafrikaans contestataire aopté, à Charleroi, pour lethème du feu en intitulant

son exposition «Auto-Da-Fe», en référence à la fondationde la ville, par Charles II d’Espagne, en 1666. Artistepluridisciplinaire (installations, œuvres vidéo et perfor-mances), Kendell Geers a participé à de nombreusesexpositions internationales comme la dernière Biennalede Lyon, Documenta XI, Dionysiaque au CentrePompidou, la première Biennale de Johannesburg etl’exposition Hardcore. Vers un nouvel activisme au Palaisde Tokyo. Cette exposition est une coproduction entrele B.P.S.22 (Charleroi), le SMAK (Gand), le Baltic (Centerfor contemporary art, Gateshead – Grande-Bretagne) etle Musée d’Art Contemporain de Lyon. eB.P.S.22 espace de création contemporaine, Secteur des Arts plas-tiques, Province de Hainaut, Site de l’Université du Travail,Boulevard Solvay 22, 6000 CharleroiDu 17 mars au 3 juin 2006, du mercredi au dimanche, de 12h00 à18h00Prix d’entrée : individuels : 3€ / Groupes d’adultes, seniors et visi-teurs du SMAK: 2€ / Groupes scolaires : gratuit. Visites guidées sur réservation.Infos : 071 27 29 71 et http://bps22.hainaut.be

CINÉMAAFRIQUE TAILLE XL

L’objectif des quatre joursdu festival Afrique Taille XLest de partager un regardpassionné sur la diversitédes cinémas africains et decélébrer avec le public, aucoeur d’Ixelles, la richesseafricaine de cet art des24 images par secondes. Auprogramme, les derniersfilms ayant marqué lescinémas africains, desséances dédiées au courtmétrage, une section docu-

mentaire, une rétrospective proposant six grands filmsmaghrébins et égyptiens s’étant distingués à Cannes,une rencontre consacrée aux adaptations littéraires, encollaboration avec le CEC, un atelier de critique cinéma-tographique destiné aux jeunes journalistes culturelsafricains, l’édition d’un DVD de courts métrages afri-cains en collaboration avec Africalia et le Studiol’Équipe, des séances scolaires, un programme familialinvitant parents et enfants à se réunir autour d’unfilm et d’une séance de contes. Sans compter unepléiade d’invités, des rencontres avec le public, unfoyer, des concerts, etc. e

Théâtre Molière & Cinéma Vendôme, du 17 au 22 avril 2007, 1050Bruxelles (Ixelles)Infos et réservations : 02 652 35 66 – [email protected] –www.afriquetaillexl.com

Libertés ! Avril 2007 15

C U L T U R E

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BoÎte

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sur les droits des enfants, à

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