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  • L'ENTREPRENEURIAT AU SERVICE DES POLITIQUES SOCIALES : LAFABRICATION DU CONSENSUS POLITIQUE SUR LE DISPOSITIF DEL'AUTO-ENTREPRENEUR

    Sarah Abdelnour

    Presses de Sciences Po | Socits contemporaines

    2013/1 - n 89pages 131 154

    ISSN 1150-1944

    Article disponible en ligne l'adresse:--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

    http://www.cairn.info/revue-societes-contemporaines-2013-1-page-131.htm--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

    Pour citer cet article :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

    Abdelnour Sarah, L'entrepreneuriat au service des politiques sociales : La fabrication du consensus politique sur ledispositif de l'auto-entrepreneur , Socits contemporaines, 2013/1 n 89, p. 131-154. DOI : 10.3917/soco.089.0131--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

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  • Sarah ABDELNOURLentrepreneuriat au servicedes politiques sociales :La fabrication du consensus politique sur le dispositifde lauto-entrepreneur

    Le rgime de lauto-entrepreneur, mis en place en 2009, marque un inflchisse-ment des politiques dencouragement la cration dentreprise dune logiquedemploi celle de cumul des revenus. Cet article vise saisir les conditionsstructurelles et discursives qui ont permis llaboration de ce rgime au sein deltat au croisement de plusieurs logiques librales. Il se base sur des sourcesofficielles ainsi que sur une trentaine dentretiens raliss avec les acteurs, sou-tiens et opposants, du dispositif. Il sintresse aux convergences dintrt qui ontpermis lintgration dun projet du tous entrepreneurs initi par un secrtairedtat libral dans la loi programmatique de lconomie de la nouvelle adminis-tration politique franaise. En faisant de lentrepreneur la nouvelle figure delhrosme populaire en temps de crise, et ainsi en transfrant le rfrentiel entre-preneurial dans le domaine des politiques sociales, Herv Novelli et ses colla-borateurs ont pu obtenir des soutiens politiques stratgiques, et ainsi surmontercertaines rsistances venues des administrations uvrant pour la rigueur budg-taire, en proposant un projet qui dconstruit un modle social fond sur le statutsalarial et ltat social.

    Dsormais, pour sen sortir, les Franais ne se tournent plusvers la collectivit, ils se tournent vers... eux-mmes. Quelleplus belle rponse donner tous ceux qui croient encoreque, face la crise, la seule rponse, cest lassistanat ?

    Herv Novelli, 2009 1

    INTRODUCTION 2

    En aot 2008 est adopte par le Parlement franais la loi dite de modernisation de lconomie , loi programmatique du gouverne-ment mis en place aprs llection de Nicolas Sarkozy la prsidencede la Rpublique en 2007. Le premier chapitre du titre premier decette loi instaure un statut de lentrepreneur individuel , quirpond lobjectif nonc dans le projet de loi de crer un rgimeincitatif et simplifi pour lauto-entrepreneur qui souhaite mener uneactivit indpendante, titre principal ou de faon accessoire unstatut de salari ou de retrait . Au premier janvier 2009 entre alors

    1/ Folch A., Novelli H., 2009, Lauto-entrepreneur, les cls du succs, Paris : ditions du Rocher, p. 112.

    2/ Je remercie Isabel Boni et Sylvain Laurens pour leurs conseils aviss tout au long de lcriture de cetarticle qui a galement bnfici dans ses versions antrieures de relectures stimulantes de collgues duCMH, et notamment de la part de Jrme Greffion et de Yohann Morival.

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  • en vigueur un rgime drogatoire de travail indpendant sous le nomdauto-entrepreneur, rgime social, fiscal et rglementaire pourlequel peuvent opter les entreprises individuelles sous conditions dechiffres daffaires (voir encadr 1).

    ENCADR 1 : LE RGIME DE LAUTO-ENTREPRENEUR DANS LA LOI DE MODERNISA-TION DE LCONOMIE

    Dans la version initiale du texte de loi, le rgime de lauto-entrepreneur consisteen un rgime social, fiscal et rglementaire pour lequel peuvent opter les entreprisesindividuelles dgageant des chiffres daffaires annuels infrieurs certains seuils :80 000 euros pour les activits de vente, 32 000 euros pour les activits de ser-vices et les professions librales (non rglementes). Les modalits du rgime sontalors :

    La franchise de TVA, dimpt sur les socits et de taxe professionnelle.

    Labsence dimmatriculation (une dclaration auprs dun centre de forma-lits des entreprises, ou sur internet, suffit), ce qui signifie lexonration des fraisdinscription mais aussi la dispense du stage de prparation linstallation pourles artisans.

    Des cotisations sociales strictement indexes sur le chiffre daffaires (12 %pour la vente, 18,3 % pour les professions librales, 21,3 % pour les services), cequi revient supprimer le forfait incompressible de cotisations qui existaitjusqualors.

    Une option pour le prlvement libratoire de limpt, sous conditions deressources du foyer fiscal (le revenu de rfrence du foyer fiscal doit tre infrieur 25 926 euros par part de quotient familial). Dans ce cas, lauto-entrepreneurrgle limpt sur son activit en mme temps que les cotisations sociales, aux tauxfixes de 1 % pour la vente, 1,7 % pour les services et 2,2 % pour les professionslibrales.

    Le rgime de lauto-entrepreneur poursuit une tendance de pro-motion de lauto-emploi (Darbus, 2008) amorce par le premier dis-positif daide la cration dentreprise pour les chmeurs, lACCRE(Aide aux Chmeurs Crateurs et Repreneurs dEntreprises) 3, ins-titu sous lgide de Raymond Barre et Alain Madelin entre 1976 et1979, et qui sest maintenu depuis, tout en subissant des modifica-tions rgulires au gr des alternances politiques et des transforma-tions des politiques conomiques. Lauto-entrepreneur est toutefoisbien davantage prsent comme une innovation, voire comme unervolution. Si cela peut sembler contestable au vu de dispositifs pro-ches dj existants 4, la mesure marque toutefois des dplacements

    3/ Voir Aucouturier, 1996.

    4/ Nous pensons au rgime micro-fiscal de 1991, au rgime micro-social de 2003, ou encore au boucliersocial mis en place en 2007.

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  • significatifs en termes techniques (la suppression de limmatricula-tion et des cotisations sociales forfaitaires notamment), en termesdorientation gnrale (les aides la cration dentreprise cdent laplace une logique de cumul des revenus) et en termes de succsnumrique (un million dinscriptions en trois ans). Et lhomme decette rvolution semble clairement identifi : il sagirait de HervNovelli, secrtaire dtat charg du Commerce, de lArtisanat, desPetites et Moyennes entreprises, du Tourisme, des Services et de laConsommation. Ce reprsentant de la droite librale au sein du gou-vernement a en effet t dsign, sur la scne publique comme ausein de la sphre politique et institutionnelle, comme tant le predu rgime de lauto-entrepreneur.

    Si le secrtaire dtat a effectivement port ce projet, on ne sauraittoutefois cder la vision hroque de la dcision politique dnoncepar Michel Dobry (2009) 5. Deux paradoxes nous incitent alors adopter une grille danalyse de laction publique dpassant largementle cadre des acteurs individuels et de leurs intentions. Le premierparadoxe oppose la validation du projet de loi la capacit dactionde Herv Novelli relativement limite, du fait de sa position poli-tique. En effet, il est un secrtaire dtat, plutt domin au sein dela hirarchie gouvernementale, et appartenant la fraction libralede la droite, qui ne fait pas ncessairement consensus au sein delUMP comme du gouvernement. Or le rgime de lauto-entrepre-neur est pass du stade de projet celui de la loi en lespace dequelques mois, parvenant rassembler un large consensus autourde lui sur les diverses scnes politiques et institutionnelles. Le cercledes entrepreneurs de rforme , ces acteurs qui revendiquentlintention et sont en position de transformer les rgles dune insti-tution en faisant montre de comptences et de ressources pour la-borer des diagnostics, promouvoir des solutions et constituer descoalitions favorables leur projet (Bezes et Le Lidec, 2011 : 58)doit dabord dpasser les frontires des professionnels de la politiquepour intgrer les travailleurs de lombre, membres des cabinets etfonctionnaires des services. Ce niveau semble encore insuffisant,puisque dans le cas qui nous intresse, Herv Novelli sappuie surune direction plus faible que les mastodontes du Trsor ou duBudget. Il faut alors prendre en compte des configurations de rformeplus larges, ces systmes dinterdpendances entre trois groupesdacteurs collectifs majeurs qui participent de manire rcurrente la construction des rformes : les excutif et lgislatif politiques ; les

    5/ La vision hroque est dfinie comme vision qui procde de lide que les priodes de crise politiquesopposent aux conjonctures routinires ou stables en ce quelles relvent davantage que ces dernires duneanalyse dcisionnelle, analyse privilgiant le choix, et plus gnralement, laction des individus ou desgroupes. (Dobry, 2009 : 75).

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  • ministres et hauts fonctionnaires rformateurs ; les experts au senslarge, offreurs de formulations du problme, de diagnostics et desolutions (Bezes, 2009 : 50). Cet largissement de la perspectivepermet de mieux comprendre le second paradoxe qui oppose latrajectoire politique librale de Herv Novelli un dispositif prsentcomme mesure sociale. Le rgime de lauto-entrepreneur est en effetpromu en tant quinstrument de cumul des revenus, destin touset notamment aux plus vulnrables. Herv Novelli va alors jusqule prsenter comme la politique sociale la plus efficace qui ait tmise en uvre depuis des dcennies 6 .

    Ces paradoxes soulignent linsuffisance des analyses de la dci-sion politique en termes dintentions ou mme dappartenances par-tisanes. Ils invitent alors mener une analyse processuelle de lactionpublique, afin de saisir les transformations des contours et des jus-tifications dun dispositif au fil de son parcours institutionnel.Lobjectif consiste ds lors intgrer dans lenqute des niveaux sou-vent tudis de manire disjointe : les professionnels de la politique,leurs conseillers, les hauts fonctionnaires, les experts et les groupesdintrt. Si larticle se concentre sur lexcutif et ses ramifications, illaisse dans lombre le travail parlementaire. Ce parti a t pris dansla mesure o le dispositif ayant t intgr dans une loi program-matique de dbut de mandat, le vote par un Parlement majoritaire-ment acquis au parti gouvernemental ne constituait pas un enjeufort. Lanalyse de lactivit parlementaire nen reste pas moins richedenseignements, permettant de saisir les assembles comme des lieux o les lus mobilisent des ressources, forgent de nouvellescomptences, endossent des rles indits, transforment leurs faonsde faire et de voir la politique (Nay, 2003) ainsi que comme desespaces daffichage du lien qui unit lhomme politique ses man-dants (Gaxie et al., 1990). Si elle a t mene dans le cadre de lathse, faisant apparatre le rle des groupes dintrt et les rhtori-ques tant promotionnelles que contestataires du rgime (Abdelnour,2012), elle ntait pas ici pleinement ncessaire pour tudier lesenjeux de la fabrique de laction publique.

    La saisielongitudinaleet multisituede la gensedu rgime de

    lauto-entrepreneurpermet de

    comprendre ladiffusion de la figure

    de lentrepreneurdans le champ des

    politiquesconomiques et

    sociales.

    La saisie longitudinale et multisitue de la gense du rgime delauto-entrepreneur permet de comprendre la diffusion de la figurede lentrepreneur dans le champ des politiques conomiques etsociales, par le biais du modle dactivation des politiques demploiqui permet de fdrer des intrts a priori non aligns. Le rgime de

    6/ Discours de Herv Novelli la Fondapol, juin 2010. Voir Lagneau-Ymonet 2004, qui analyse la Fondapolcomme une structure manant de lUMP, visant lgitimer et diffuser des ides librales, en runissantpersonnalits de droite et de gauche, politiques et chercheurs au sein dun mme espace.

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  • lauto-entrepreneur marque une volution notable des sphressociales dans lesquelles le discours entrepreneurial prend sens etsapplique dsormais sans mdiation aux individus, censs devenir entrepreneurs eux-mmes et dans une certaine mesure entrepre-neurs deux-mmes (notamment afin de sortir du chmage).Lambition de cet article est de saisir comment ce nouveau dispositifa pu se structurer au croisement de transformations structurelles delaction publique concernant lemploi et lactivation des politiquessociales, et de configurations politiques et administratives plusconjoncturelles, lies lquilibre du rapport de forces sous la pr-sidence de Nicolas Sarkozy. Il donne alors voir comment le passagedun projet entre les mains des experts, des cabinets, des conseillerset des hauts fonctionnaires a donn une dimension technique lamesure, ce qui a contribu llaboration dun consensus ncessaire sa validation politique. En faisant de lentrepreneur la nouvellefigure de lhrosme populaire en temps de crise, et ainsi la figureantinomique de lassist, Herv Novelli et ses collaborateurs ont puobtenir des soutiens politiques stratgiques, et ainsi surmonter cer-taines rsistances venues des administrations uvrant pour larigueur budgtaire.

    En faisant delentrepreneur lanouvelle figure delhrosme populaireen temps de crise, etainsi la figureantinomique delassist, HervNovelli et sescollaborateurs ontpu obtenir dessoutiens politiquesstratgiques.

    Cette sociogense du dispositif repose dune part sur lexploita-tion des rapports, projets et dbats parlementaires portant sur la loide 2008 ainsi que sur les lois qui lont prcde. Lanalyse reposeensuite sur une trentaine dentretiens mens avec les acteurs insti-tutionnels et politiques qui ont particip llaboration et la miseen uvre du rgime 7. Ont ainsi t enqutes les personnalits etinstitutions intgres dans le processus de concertation : le secrtairedtat et ses services, les cabinets et administrations des ministres concurrents , les dirigeants des rseaux consulaires (chambres decommerce et chambres de mtiers) et des organisations dartisans,ainsi que des membres des agences de distribution. Les entretiensmens taient semi-directifs, individuels et de nature ethnogra-phique, au sens o ils avaient moins une vise informative que celledaller au-del du produit fini et fig de linstitution, en revenant surles conditions de production de cette position officielle et sur ce quecette dernire ne laisse pas voir, les contradictions et ngociationsqui lont modele dune part, les carts des acteurs leur rle delautre (voir Laurens, 2007).

    Nous verrons dabord que le projet initial sinscrit lintersectiondune tradition librale de simplification de la cration dentreprise

    7/ Il faut ici rappeler que cette communaut de politique est une construction, et ainsi garder lesprit lacapacit des promoteurs du dispositif circonscrire une sphre de dcision propice.

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  • et dun objectif de cumul des revenus, laissant apparatre le nouvelobjet consensuel de laction publique que constitue lentrepreneuriatpopulaire. Nous tudierons ensuite la progression du texte Bercy,qui doit tant lorientation entrepreneuriale des ministres de lco-nomie et du Budget qu la rencontre entre un agenda politiquedactivation des politiques sociales et un agenda administratif de sim-plification des prlvements sur les activits conomiques. Nous ana-lyserons enfin les ressorts pragmatiques et idologiques du sommetde ltat, qui ont permis au projet de dpasser lopposition des admi-nistrations gardiennes des comptes publics.

    LE RAPPORT : LE LIBRALISMEAU SERVICE DES PETITS

    Le rgime de lauto-entrepreneur est vraiment prsent comme le bb de Novelli lexpression tant apparue dans plusieursentretiens. Si son arrive au gouvernement, le secrtaire dtataffiche sa volont duvrer pour la simplification de la crationdentreprise, en concertation avec les acteurs institutionnels denca-drement du travail indpendant, le rgime de lauto-entrepreneursinscrit bien davantage dans la ligne du rapport rdig par FranoisHurel, qui fait de lentrepreneuriat une solution la crise et unmoteur dascension sociale.

    Dun projet classique de simplification du travailindpendant...

    Afin dasseoir sa lgitimit sur le projet, mais galement en vuede sassurer un primtre dcisionnel restreint et favorable, HervNovelli prsente dabord la mesure comme portant sur la simpli-fication de la cration dentreprise . Le secrtaire dtat est une desfigures du libralisme la franaise. Sa carrire politique officiellecommence en 1986 sous lgide dAlain Madelin, alors ministre delIndustrie, des PTT et du Tourisme, dont il est le chef de cabinetpendant deux ans. Son engagement est toutefois plus ancien,puisquil partage avec dautres personnalits du libralisme un mili-tantisme de jeunesse dans les mouvements dextrme-droite 8. Herv

    8/ Franois Denord repre ce renouvellement des carrires politiques des dirigeants de la droite dans lesannes 1980, pour les gaullistes comme pour les libraux : Quand ils sont libraux, leur engagement droite a souvent dbut lpoque du libralisme avanc et des premires avances significatives de lagauche (Jean-Pierre Raffarin), moins que comme une minorit ils aient fait leurs dbuts lextrme droite(Alain Madelin et Grard Longuet). Ces nouveaux dirigeants politiques, qu lpoque on appelait les cadets,sont ainsi souvent en premire ligne pour promouvoir le libralisme conomique, rejeter ltatisme et louerles vertus de la rvolution conservatrice amricaine (Denord, 2004 : 21).

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  • Novelli connat une carrire politique ascendante par le biais de cemilitantisme de jeunesse, qui linscrit dans le giron dAlain Madelin,dont il dirige la campagne prsidentielle en 2002. Aprs les lectionsde 2002, il fonde au sein de lUMP le courant des rformateurs ,aussi appel rformateurs libraux , pass sous statut associatif en2006. Peu de textes officiels rassemblent ce courant, mais plutt desdclarations dintention visant combattre ltat-providence, lexcsde normes et de rglementations, et restaurer la libert et la res-ponsabilit individuelle. Dans la tradition librale, ces luttes pren-nent la forme de la promotion de linitiative prive et individuelledans le domaine conomique 9, et ainsi la dfense du travail ind-pendant contre le salariat. Le secrtaire dtat explique qu uneforme trs souple dactivit est mieux adapte, dans de nombreuxcas, quun classique contrat de travail (Novelli, 2009 : 107), tandisquun de ses conseillers regrettait en entretien le choix collectif quia t fait en faveur du salariat 10 . Si la cration dentreprise et lasimplification administrative relvent des registres daction tradition-nels de la droite librale, ces objectifs se sont diffuss de manireplus large depuis la fin des annes 1970 et leffritement de la socitsalariale (Castel, 1995). Ainsi, le mouvement lgislatif dassimila-tion des travailleurs indpendants aux salaris semble relativementessouffl. La tendance parat mme sinverser : le statut des salaristant peru comme contraignant, insuffisamment souple et flexible,il sagit de privilgier le statut dindpendance (Chaumette, 1998).En se fixant lobjectif de simplifier la cration dentreprise, HervNovelli jouait ainsi dans un registre et dans un espace politiquesquil matrise.

    La prsentation de la mesure comme visant la simplification dela cration dentreprise a galement permis de circonscrireune sphre dcisionnelle rduite et favorable a priori. Ainsi, finjuillet 2007, quelques semaines aprs son arrive au gouvernement,Herv Novelli met en place trois groupes de travail sur la simplifi-cation de la cration dentreprise. La concertation reste strictementlimite des acteurs qui saccordent dnoncer les complexitsadministratives comme un des principaux freins la cration dentre-prise. Bien que les rapports contiennent essentiellement des prco-nisations concernant les PME, ils sont suffisamment courts et leursauteurs suffisamment proches pour que Herv Novelli puisse sur-jouer lunanimit sur la reconnaissance du statut de lentrepreneur

    9/ Pour Michel Foucault, la forme de lentreprise et la figure de lentrepreneur constituent les points dappuidu nolibralisme, incarnant la diffusion totale de la logique de march sur lensemble des scnes sociales(Foucault, 2004 : 154).

    10/ Entretien avec des membres du cabinet de H. Novelli, juillet 2010.

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  • individuel. Cette premire consultation pose galement le primtrelgitime de la sphre dcisionnelle de cet instrument politique,autour des syndicats patronaux (Medef et CGPME), des rseauxconsulaires (chambres de commerce et chambres de mtiers) et dessyndicats dartisans. Ce faisant, le secrtaire dtat limine du dbatsur son dispositif les reprsentants notamment syndicaux dessalaris, alors mme que les frontires du salariat sont modifies parce nouveau rgime, qui fonctionne largement comme dispositif decumul de revenus. Linflexion vers le cumul, ainsi que vers des ciblesplus populaires, est le produit de la consultation dexperts qui infl-chissent le sens du dispositif.

    la promotion de lentrepreneuriat populaire

    En septembre 2007, Herv Novelli commande un rapport Franois Hurel, dlgu gnral de la Compagnie nationale descommissaires aux comptes. Les deux hommes suivent des carrireset des engagements politiques proches. Franois Hurel a tconseiller technique, charg des affaires juridiques et europenneset de la simplification administrative, au cabinet dAlain Madelin,alors ministre des Entreprises et du Dveloppement conomique (demars 1993 mai 1995). En entretien, Herv Novelli date sa ren-contre avec Franois Hurel en 1995, lorsque ce dernier taitconseiller technique, charg des professions librales et de la crationdentreprises au cabinet de Jean-Pierre Raffarin (ministre des PME,du Commerce et de lArtisanat), et que lui-mme tait dput. Lechoix de Franois Hurel dtermine de manire nette la suite duprocessus, puisque celui-ci milite alors depuis une dizaine dannespour la mise en place dun statut dentrepreneur occasionnel 11.

    Lorientation se modifie et lobjectif de simplification de la vie desentreprises assign aux groupes de travail devient finalement objectifdune meilleure reconnaissance du travail indpendant . Onobserve ds lors un recentrement sur les entreprises individuelles audtriment des socits, sur la pluriactivit aux dpens de linvestis-sement dans une entreprise, ce qui ne sera pas ncessairement dugot des organisations reprsentes dans les groupes de travail. Cerapport marque rellement lacte de naissance du rgime de lauto-entrepreneur, puisque sa logique et son intitul apparaissentpour la premire fois de manire claire. La logique dune activit

    11/ Franois Hurel faisait partie du groupe d experts du Livre blanc de la cration dentreprise de 1998et tait lauteur du rapport de 2002 remis Jean-Pierre Raffarin, textes prnant linstauration dun statutdentrepreneur occasionnel et insistant pour cela sur la dimension sociale de la proposition.

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  • occasionnelle, ventuellement en complment dune autre situationprofessionnelle ou sociale, et ainsi de cumul des revenus, est posedans le prambule : limportant est de crer une activit, quecelle-ci soit lalternative, le prolongement ou un complment leursituation conomique et sociale actuelle . Laccessibilit de ce typedactivit aux classes populaires (qui ne sont pas dsignes commetelles) constitue le fil rouge du rapport, qui met en avant les vertussociales dun rgime de lauto-entrepreneur. Les registres de justifi-cation sont en effet multiples, oscillant entre des arguments cono-miques de contribution la croissance dans un contexte de socitde services et dconomie de la connaissance , et des argumentssociaux visant linsertion ou la rinsertion de ceux qui lavie a jou un mauvais tour ou qui la naissance na pas donn toutesles chances .

    Le rgime social des auto-entrepreneurs tel quil est prconisconsiste approfondir le rgime micro-social en supprimant le forfaitincompressible de cotisations sociales. Cette proposition est embl-matique du croisement des logiques qui faonnent le dispositif. Ellesadresse clairement aux trs petites activits, pour lesquelles le forfaitde cotisations sociales peut tre dcrit comme dmesur. Ce mlangede logique librale et de cible sociale explique que la prconisationbnficie de soutiens divers. La proposition reflte ainsi la multipo-sitionnalit de son auteur, puisquelle est appuye tant par les compa-gnons politiques de Franois Hurel, que par lassociation dont il esttrsorier, lAdie (Association pour le droit linitiative conomique).La prsidente de lassociation de microcrdit milite en effet depuisdes annes pour baisser les cotisations sociales sur les petites acti-vits gnratrices de revenus pour reprendre sa terminologie. Ellea ainsi pris part au travail de construction du problme public 12 queconstitueraient les prlvements obligatoires sur les trs petites entre-prises, problme auquel le rgime de lauto-entrepreneur entendapporter une solution. La figure de lentrepreneur populaire permetde contenter les divers segments de cette coalition relativement inha-bituelle. Elle constituait dj depuis quelques annes un terrain deconsensus entre droite et gauche de gouvernement.

    Le tournant duXXIe sicle marque lerenforcement dunconsensus politiqueautour de la figurede lentrepreneur.

    En effet, si les politiques daide la cration dentreprise appa-rues dans les annes 1970 ont t depuis marques tant par leurprennit que par leurs constants dplacements, le tournant duXXIe sicle marque le renforcement dun consensus politique autourde la figure de lentrepreneur, par le biais de la thmatique de la

    12/ Voir Gusfield, 1989 ; Neveu, 1999.

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  • dmocratisation de lentrepreneuriat, laquelle se rallient droite etgauche de gouvernement autant que certains acteurs associatifs.Cette convergence sinscrit dans une dynamique de libralisation dela gauche socialiste, qui peut tre pense comme une dsidolo-gisation (Bergounioux et Grunberg, 2004 : 290) et par un certaindplacement de la ligne dfendue par la droite, qui passe par lint-gration dun discours plus social sur les vertus intgratrices de lacration dentreprise. Les deux tendances peuvent raliser une jonc-tion via la rhtorique de la dfense des petits entrepreneurs etle combat contre les gros acteurs du capitalisme. Les librauxtirent alors profit de lhritage poujadiste de la droite, tandis que lagauche y ractualise un discours critique sur un systme cono-mique ingalitaire. La promotion dun entrepreneuriat populaire estalors assure par les courants libraux de la droite, mais aussi de lagauche (voir les rapports dric Besson ou de Jean-Marie Bockel 13).Le rapport Hurel a ainsi rorient lobjectif initial proclam parHerv Novelli dans le sens dun dispositif autorisant le cumul desrevenus via le travail indpendant, cens complter des salaires fai-bles ou des minima sociaux, dans une logique dactivation des poli-tiques sociales (Barbier, 2002). Une fois ce consensus labor, ilfallait transformer le rapport en projet de loi, ce qui supposait deconvaincre les ministres de tutelle et de faire travailler les services,tout en maintenant un primtre de ngociation serr, afin de tenir distance les oppositions.

    LE PROJET DE LOI : LE LIBRALISMECOMME SAVOIRPRATIQUE ET SENSCOMMUN

    Lagenda politiquede promotion de

    linitiativeindividuelle comme

    palliatif dutraitement du

    chmage va entreren convergenceavec un agenda

    administratif ddi la simplification des

    prlvementsobligatoires sur les

    entreprises.

    Lcriture du projet de loi a suppos une co-construction avecdautres acteurs, politiques et administratifs. Herv Novelli et sesallis ont alors essentiellement bnfici du soutien de ministres detutelle sensibles, en raison de leur parcours politique comme de leursproximits avec le secteur priv, la thmatique de linitiative co-nomique individuelle. Lagenda politique de promotion de linitiativeindividuelle comme palliatif du traitement du chmage va entrer enconvergence avec un agenda administratif ddi la simplificationdes prlvements obligatoires sur les entreprises.

    13/ Le rapport dric Besson en 1999, rdig au nom de la Commission des Finances de lAssemblenationale, plaide ainsi pour un plan durgence daide la cration de trs petites entreprises , tandisquun rapport sur la simplification de la cration dentreprise, de la vie des crateurs et de la gestion deleurs entreprises est remis au Premier ministre le 23 janvier 2001 par Jean-Marie Bockel.

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  • Un libralisme dexprience, mis au servicedu plus grand nombre

    Les promoteurs du dispositif de lauto-entrepreneur ont fait deleur libralisme un savoir pratique issu de leur exprience de lapetite entreprise. Herv Novelli a alors essentiellement jou la cartede sa connaissance pratique de la position de petit patron, tandisque Franois Hurel a davantage dfendu lextension de ce modleconomique vers une cible plus populaire, faisant alors rentrer ledispositif dans le cadre de lactivation des politiques sociales. Si lesecrtaire dtat a pu dfendre et faire aboutir une mesure au nomde son libralisme, cest en se prsentant, lui et ses partenaires,comme des passeurs entre lunivers de la cration dentreprise et lemilieu politique, faisant remonter les revendications des profession-nels et connaissant eux-mmes les difficults de la petite entreprise.Il utilise alors comme ressource sa trajectoire atypique, renversantainsi le stigmate dune carrire politique tardive et relativement peuvalorise, puisquil na pas fait Sciences Po ni lENA, et a entamsa carrire politique 37 ans comme chef de cabinet. Ds lors, ilprfre mettre en avant le fait quil soit le seul membre du gou-vernement avoir un CAP 14, et cela alors mme quil a obtenu parla suite une matrise de gestion Dauphine. Il mobilise galementson exprience de direction des entreprises familiales 15, quil areprises la mort de son pre en 1982. Ainsi, lorsque je luidemande ce qui a pu convaincre ses ministres de tutelle, il rpond jai gr moi-mme des botes pendant un quart de sicle, desbotes familiales, des petites botes [...] javais t le rapporteur pen-dant cinq ans, pendant tout le quinquennat prcdent, de tous lessujets industrie et PME 16 . Au-del de son exprience de petitpatron , il valorise la reconversion politique de celle-ci, indiquantdans un livre dentretien sans doute faut-il avoir soi-mme dirigne serait-ce quune journe une entreprise pour mesurer le poidscrasant des responsabilits qui psent sur le dos dun patron (Novelli, 2009 : 48).

    Le mme mcanisme de lgitimation est opr concernantFranois Hurel, reprsentant institutionnel de la profession descommissaires aux comptes et ancien conseiller politique sur les th-matiques de la cration dentreprise. Contrairement Herv Novelli,il ne fait pas de son origine familiale ni de son parcours personnel

    14/ Il a en effet un CAP de mcanique de prcision.

    15/ Deux botes, une de 25 personnes Paris, et une de 35 personnes environ en Touraine, qui faisaientdu paramdical (entretien avec H. Novelli, janvier 2012).

    16/ Entretien avec H. Novelli, janvier 2012.

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  • une ressource pour fonder sa lgitimit. Sa position institutionnellelui procure une forme dautorit, les commissaires aux comptesconstituant une profession de service aux entreprises, et plus parti-culirement aux PME (Ramirez, 2003) 17. En entretien, FranoisHurel a davantage inscrit son action dans le registre du militantismepolitique que dans celui de lexpertise professionnelle. Il contre ainsilargument de la socialisation familiale par la rplique politique-ment, jai une vision politise , et indique quil croi[t] vraiment cette cause de lentrepreneuriat. Et cette cause a pour lui unedimension fondamentalement sociale, puisquil dfinit lobjectif dudispositif comme tant lascension sociale de personnes disposant detrs peu de ressources. La transposition du modle entrepreneurial une cible sociale largie a finalement constitu un argument effi-cace auprs de ministres de tutelle forms par le monde de lentre-prise et voyant dans lentrepreneuriat la cl dune politique socialemisant sur linitiative individuelle.

    La transpositiondu modle

    entrepreneurial une cible sociale

    largie a finalementconstitu un

    argument efficaceauprs de ministresde tutelle forms par

    le monde delentreprise et voyant

    danslentrepreneuriat lacl dune politiquesociale misant sur

    linitiativeindividuelle. Le soutien des ministres de Bercy : proximits de parcours

    et dides

    Ce libralisme dentreprise mis au service de tous a rencontr uncho favorable auprs des ministres de tutelle du secrtaire dtat :Christine Lagarde au ministre de lconomie, de lIndustrie et delEmploi, et ric Woerth au ministre du Budget, des Comptespublics et de la Fonction publique. Les deux ministres ne sont pasdes purs professionnels de la politique, dans la mesure o leur car-rire est largement partage entre lexercice de fonctions politiqueset celui dune profession dans le secteur priv. Ne en 1956,Christine Lagarde est avocate, et a men de 1981 2005 une carrireexclusive davocate au sein dun grand cabinet amricain. La ministreappartient llite conomique internationalise, tudie par Anne-Catherine Wagner, comme symbole de la redfinition des rapportsde classe en contexte de mondialisation (Wagner, 2003 : 33). Laposition dric Woerth est relativement similaire. N en 1956 ga-lement, il est quant lui licenci de droit priv de Paris II-Assas,diplm de lInstitut dtudes Politiques de Paris et dHEC. Il dbutesa carrire comme conseiller juridique et fiscal Arthur AndersenInternational. Son entre en politique date de 1995, lorsquil devientconseiller parlementaire au cabinet du Premier ministre Alain Jupp,

    17/ Carlos Ramirez dcrit une division du travail entre commissaires aux comptes et cabinets daudit, quisuit une homologie entre les entreprises auditrices et leurs clients audits. Les commissaires aux comptessoccupant essentiellement des PME, tandis que les cabinets daudits ont pour clients des grandes entreprises,voire des firmes multinationales.

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  • ainsi que maire de Chantilly. Il mne alors, ensemble et successive-ment, parcours politique et carrire dans le priv 18.

    La proximit des ministres de Bercy avec le secteur conomiquepriv reflte une tendance qui sobserve quand la majorit politiqueest droite, ce que concluait dj Brigitte Gati en 1985 : La slec-tion sociale des professionnels de la politique, toujours trs en faveurdes classes suprieures, soriente davantage vers le capital cono-mique et vers le secteur priv quand la droite est au pouvoir (Gati,1985 : 60). Leurs parcours rvlent nanmoins des modificationsde la slection et des parcours des personnels politiques, et notam-ment ceux en charge des questions conomiques, se formant deplus en plus frquemment par des coles de commerce (Eymeri,2001 : 18) et accordant une place croissante leur carrire profes-sionnelle prive (Mathiot et Sawicki, 1999). Parmi lensemble desmembres du gouvernement Fillon II, Christine Lagarde et ricWoerth sont les plus proches du monde de lentreprise, se posi-tionnant lintersection du secteur priv et de lespace politique.En effet, bien que ce gouvernement ne soit exceptionnellement dotque dun seul narque (Valrie Pcresse) parmi les quinze ministres le Premier ministre et le Prsident ntant pas non plus passs parlENA , peu sont toutefois passs par le priv 19, et cette carrire alaiss place leur professionnalisation politique. Les deux ministresde Bercy partagent donc avec Herv Novelli une socialisation co-nomique forge par lentreprise prive, ce qui les rapproche politi-quement, tant en termes de position institutionnelle que de positionidologique. Selon un conseiller de llyse, le secrtaire dtat a pucompter sur une ministre des Finances qui avait une culture, donccest Christine Lagarde, qui avait une culture assez amricaine, assezentrepreneuriale, etc., et qui donc a trouv lide assez sdui-sante 20 , ce que confirme lintress en entretien : Jai t soutenuy compris par mon ministre de tutelle Christine, Lagarde, qui nesest jamais oppose.

    ric Woerth quant lui partage une proximit politique forteavec Herv Novelli puisquil a adhr au groupe des Rformateursque le secrtaire dtat a contribu fonder. Ce dernier explique enentretien quil a reu de la part du ministre un blanc-seing quiljustifie de la manire suivante :

    18/ Il devient directeur associ au cabinet Arthur Andersen en 1997 et jusqu la chute du groupe, suiteau scandale financier Enron.

    19/ Nous pouvons signaler parmi eux Christine Albanel, Roselyne Bachelot, Xavier Bertrand, ChristineBoutin et Rachida Dati.

    20/ Entretien avec Emmanuel Moulin, janvier 2012.

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  • Woerth a une formation qui nest pas, enfin dabord il nest pasnarque, il nest pas fonctionnaire, il vient du priv, il a fait de laudit touta, et donc il ma plutt spontanment fait confiance, au titre de lexp-rience que javais, on se connaissait davant, on tait la commission desfinances tous les deux, bon bref, il ma cout, il ma dit ok, il a arbitr.

    Si Herv Novelli a ainsi bnfici dun soutien de ses ministresde tutelle, il a galement largement pu sappuyer sur ses allis struc-turels, membres de son cabinet et des services sa disposition, quiont assur des soutiens politiques autant quils ont dessin lescontours prcis dun instrument vu comme laboratoire de simplifi-cation fiscale et sociale.

    La rencontre avec lagenda administratif

    Plutt quadopter comme acquis la technocratie dune part ou lapolitisation croissante de la fonction publique de lautre (Lagroye,2012 : 501), laction publique contemporaine doit tre envisagecomme rsultant de collaborations troites entre les membres dugouvernement, leurs cabinets ainsi que les hauts fonctionnaires desservices. Herv Novelli a ainsi pu compter sur le soutien de soncabinet, dont les interrelations avec les cabinets des ministres detutelle ont renforc le soutien de ces derniers, ainsi que sur la col-laboration des services, qui ont envisag le rgime de lauto-entre-preneur comme un terrain dexprimentation et en ont ainsi largiles contours. Le cabinet est par dfinition une sphre de soutienforte, ses membres tant recruts la convenance du ministre, enraison de leurs comptences technocratiques mais aussi de leurproximit idologique avec les gouvernements (Dreyfus, 2009 :288). Si les membres du cabinet de Herv Novelli ont constitu desappuis essentiels au projet, cela sexplique tant par leurs affinitsavec le secrtaire dtat que par leurs proximits avec les ministresde Bercy. En 2007, Herv Novelli choisit comme directeur de cabinetMichel Guilbaud, un ingnieur des Mines alors g de 43 ans, ayanttravaill pour EDF et Elf, avant de passer dans la haute fonctionpublique. Sa proximit avec le secteur priv se double dune certainespcialisation sur la thmatique des PME via la fonction de directeurgnral dlgu du groupe Oso, rapprochement de lAnvar (Agencenationale de valorisation de la recherche) et de la Banque de dve-loppement des PME quil occupe de 2005 2007 21. Alors quil estdirecteur de cabinet de Herv Novelli (de 2007 2010), il prendsimultanment la fonction de directeur adjoint du cabinet de

    21/ Notons quil passera ensuite directeur gnral du Medef en 2010.

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  • Christine Lagarde de 2008 2010, ce qui a certainement facilitlobtention du soutien de la ministre de lconomie. Une autre figurecentrale du cabinet de Herv Novelli est Philippe Gravier, nommdirecteur adjoint en 2008 et pass directeur de cabinet en 2010. Nen 1977, Philippe Gravier est un narque multidiplm, cumulantles diplmes de lIEP de Paris, de lESSEC, mais aussi un DEA definance de Paris-I, et plus tonnamment, un doctorat de japonais. Ilfait sa sortie de lENA la direction du Trsor, devient conseillertechnique de Jean-Louis Borloo puis de Christine Lagarde au minis-tre de lconomie, avant de rejoindre le cabinet de Herv Novelli.Lui aussi cumule des fonctions dans les deux cabinets, faisant letrajet inverse de celui de Michel Guilbaud, en devenant directeuradjoint auprs de Christine Lagarde lorsquil passe directeur ducabinet de Herv Novelli, renforant encore les liens entre les deuxministres. Le fait quil soit rest directeur de cabinet de FrdricLefebvre lorsque celui-ci a repris le portefeuille de Herv Novelli ennovembre 2010 marque sa spcialisation, et certainement son intrtpour ces sujets. Lentretien men avec des membres du cabinet deHerv Novelli 22 confirme leur adhsion, du moins fonctionnelle, la vision librale de leur ministre. Les conseillers inscrivent la mesure,et sinscrivent ainsi de fait, selon leurs termes, dans un courantidologique minoritaire, le courant libral , mentionnant Schum-peter comme tant lauteur prfr dans ces murs .

    Lentretien avec les membres du cabinet du secrtaire dtat apermis de saisir la hirarchie qui structure les relations entre cabi-nets et services : les membres des cabinets sattribuent nettementlimpulsion des politiques, considrant lactivit administrativecomme soumise et routinire, opposant ainsi la capacit innovatricedes cabinets au conservatisme des services 23. Cette division entretechnique et politique a t remise en cause par des enqutes mon-trant la contribution des services la politisation du monde social,par leurs rles d crivains publics , de slection des questionsqui remontent au ministre et de mise en forme des propositions(Eymeri, 2003 : 48-73). Concernant le rgime de lauto-entrepre-neur, il semble en effet que la contribution des services les plusproches du cabinet de Herv Novelli, la DGCIS (Direction Gnralede la Comptitivit, de lIndustrie et des Services) 24 a induit un

    22/ Qui ont souhait rester anonymes.

    23/ Il a alors fallu une certaine insistance pour que le personnel politique moriente vers les hauts fonc-tionnaires avec lesquels je souhaitais mener des entretiens, ou pour quils acceptent de discuter des enjeuxlis la recomposition des portefeuilles et des services.

    24/ Il sagit dune direction rcente, cre en 2009, rsultant de la fusion de la DGE (Direction Gnraledes Entreprises), de la DT (Direction du Tourisme) et de la DCAS-PL (Direction du Commerce, de lArtisanat,des Services et des professions librales).

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  • largissement des propositions du rapport Hurel. Ltablissementde solutions techniques au problme politique conduitncessairement au dplacement de ce dernier, et a en loccurrenceparticip lapprofondissement du dispositif. Concernant la cibledu dispositif, le flou du rapport Hurel, promouvant la fois unrgime universel et un dispositif social, a donn aux services unecertaine libert quant la dfinition du primtre du dispositif. Le

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    politique conduitncessairement audplacement de ce

    dernier, et a enloccurrenceparticip

    lapprofondissementdu dispositif.

    passage par les services a dvelopp la cible sociale vise par FranoisHurel, puisque la commande politique a t interprte dans le sensplus large et qui les intressait davantage de la simplification dela cration dentreprise. Ce sont ici probablement les dispositionsdes fonctionnaires de la DGCIS, plus habitus travailler au servicedes PME, voire des grandes entreprises aprs la fusion avec la DGE,qui expliquent cette volont dextension du rgime. Celle-ci ne rentretoutefois pas en contradiction avec les vues des quipes de HervNovelli, et le rgime de lauto-entrepreneur sest alors constitu enlaboratoire de mesures librales, testes sur un rgime pour activitsrduites, avec lide dune ventuelle extension des entreprises plusconsquentes. Les fonctionnaires de la DGCIS ont ainsi tendu lesprconisations du rapport, sur deux aspects essentiels : ils ont misen place une imposition taux fixe sur les revenus des auto-entre-preneurs (devant alors trouver des solutions techniques permettantde satisfaire le principe constitutionnel de progressivit de limptet ainsi dviter lopposition du Conseil dtat) et la parfaite linaritdes cotisations sociales. Il semble ainsi que la volont dinnovationtechnique de ces fonctionnaires, combine leur posture de soutienau cabinet, a induit un approfondissement de la dimension droga-toire du projet ministriel.

    LE SOMMET DE LTAT AU-DESSUS DES COMPTESPUBLICS

    Si la rhtorique entrepreneuriale a pu sduire les services pro-ches du secrtariat dtat et les ministres de Bercy, elle a moins pluaux autres services ministriels, en tte desquels la Direction de laScurit sociale (DSS). Le secrtaire dtat na pas mnag les admi-nistrations, les excluant des groupes de travail de 2007, et ne seprivant pas de dclarations critiques voire virulentes contre labureaucratie. Une partie de la communication publique sur lergime de lauto-entrepreneur vise spcifiquement les administra-tions, Herv Novelli estimant que la logique du crateur dentre-prise est aux antipodes de celle de ladministration (Novelli, 2009 :34). Le projet a suscit lopposition des tenants de la rigueur

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  • budgtaire, qui a pu tre surmonte par le soutien de Matignon etde llyse, au nom de la lutte pour le pouvoir dachat, dans lecontexte du dbut du mandat prsidentiel.

    Lopposition des budgtaires

    Si Herv Novelli et son cabinet se sont largement appuys sur lesfonctionnaires de la DGCIS, ils ont rencontr en revanche de fortesrsistances de la part des tenants de la rigueur budgtaire, dans lescabinets et services concurrents, sur des arguments de pertes derecettes, mais aussi en raison de socialisation conomique et de posi-tionnement politique divergents des fonctionnaires de ces services.Ainsi, sils ont pu obtenir laccord dric Woerth, cela sest fait endpit de lopposition de son cabinet, et spcifiquement de son direc-teur de cabinet, Jean-Luc Tavernier. Les membres du cabinet deHerv Novelli mont fait part de cette opposition de la part du minis-tre du Budget :

    Le cab du Budget a t contre nous chaque fois sur ce dossier, chaque modif [...] Cest structurel, ils sont forms a 25.

    Jean-Luc Tavernier est un haut fonctionnaire, n en 1961, ancienlve de lcole Polytechnique et diplm de lEnsae (cole nationalede la statistique et de ladministration conomique). Il a men pen-dant plus de dix ans une carrire dadministrateur Insee au ministrede lconomie et des Finances, avant de devenir en 1995 directeurde lEnsae. La mme anne, il fait galement son entre en politiquecomme conseiller, charg des comptes sociaux et de la loi de finan-cement de la Scurit sociale au cabinet de Jacques Barrot, alorsministre du Travail et des Affaires sociales. Il reprend ensuite le filde sa carrire dadministrateur, passe directeur gnral de lAcoss(Agence centrale des organismes de Scurit sociale) et rejoint en2007 le cabinet dric Woerth. Sa fonction comme son parcours les deux tant indissociables lloignent de Herv Novelli. Il estainsi dans son rle quand il marque ses rticences vis--vis du projet,parlant de batailles de posture, les libraux du monde des PME,contre les budgtaires en gros , dtaillant :

    Bon, il vaut mieux que les personnes correspondent aux fonctions,mais, de toute faon, y a une logique de fonction. Si le ministre du Budget,il garde pas les finances publiques, qui le fera ? Si le ministre des PME ilpropose pas de baisser les prlvements sur les PME, qui le fera ? Voil.

    25/ Entretien avec deux membres du cabinet de H. Novelli, juillet 2010.

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  • La lgitimit quil dtient dans ses fonctions de directeur decabinet tant essentiellement technique, cest sur le registre de leffi-cacit conomique, pris plus spcifiquement par le biais de limpactsur les finances publiques, quil monte un argumentaire critique vis--vis du rgime de lauto-entrepreneur. Selon Jean-Luc Tavernier, lergime consiste subventionner des activits indpendantes trsfaible productivit (ce qui ne les rend pas rentables sous la formedactivit salarie), ce qui est nfaste tant pour lauteur de cette acti-vit que pour les comptes publics.

    La rigueur budgtaire a galement constitu largument doppo-sition des fonctionnaires de la DSS, attachs fonctionnellement voirepersonnellement lquilibre des comptes sociaux. Les promoteursdu rgime de lauto-entrepreneur expliquaient leur position par lavolont de prserver les plus petits entrepreneurs dun taux marginalde cotisations sociales extrmement lev du fait du forfait incom-pressible. Le dbat a alors pris des tours surprenants de prime abord,les promoteurs libraux de la mesure prnant une couverture socialeaux allures gnreuses pour les auto-entrepreneurs, et les membresde la communaut du Welfare (Mathiot, 2006) sy opposant. Le pointdachoppement rside dans le fait que cette couverture sociale soitassure en labsence de cotisations pralables. Les fonctionnaires dela DSS dfendent dune part lquilibre des comptes des systmes deprotection sociale, et dautre part un modle assurantiel de couver-ture sociale. Lquilibre des comptes est prserv court termepuisque ltat compense les pertes enregistres par les rgimessociaux. Le fonctionnaire de la DSS interrog rapproche ainsi la posi-tion de la DSS dun combat de principe dailleurs plus que de calculfinancier, puisque tout a est compens la Scurit sociale. Onnaime pas les exonrations parce quon naime pas que lassiette duprlvement social soit mite .

    En dpit du poids institutionnel consquent de cette administra-tion, lopposition de la DSS na pas vritablement pes dans llabo-ration du dispositif. Le dcoupage institutionnel des administrationsconstitue une cl dexplication au pouvoir acquis par le secrtariatdtat face aux services hostiles durant la phase dcriture du projetde loi. Le fait que la DSS ait pour tutelle le ministre du Budget 26

    dans un contexte o ric Woerth avait accord sa confiance au projetde Herv Novelli, constitue un fondement puissant de cette vic-toire du secrtariat dtat. Notons que la DSS a progressivement

    26/ Patrick Hassenteufel voit dans la cration du ministre des Comptes publics en 2007 une tape sup-plmentaire de lintgration des politiques de protection sociale la politique budgtaire, et ainsi unerduction de lautonomie budgtaire de la Scurit sociale (Hassenteufel, 2012 : 357).

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  • contribu dfaire le rgime partir de 2010, via ses outils dactionque constituent les projets de loi de financement de la Scuritsociale. Mais en 2008, le secrtaire dtat se battait avec la puissancede Bercy comme soutien, ce qui lui permettait de se dfendre demanire plus solide durant les ngociations interministrielles. Lesoutien du sommet de ltat constitue enfin la cl de la validationdu projet de loi au niveau gouvernemental.

    Le soutien du sommet de ltat : le pouvoir dachatet la valeur travail

    Ltat se dgage dela responsabilit decrer des emploisou dagir sur lessalaires, en incitantles individus trouver des revenuscomplmentairesdans la valorisationdactivits exercesen dehors de leuremploi salari.

    Les tensions suscites par le projet, au sein mme des administra-tions dpendant de Bercy, ont rendu dautant plus ncessaires lesarbitrages au niveau deMatignon et de llyse. Les interlocuteurs sontalors le Premier ministre et le Prsident, ainsi que les conseillers quicomposent leurs cabinets. Les arguments de type technique sur lacroissance et le pouvoir dachat ont alors ctoy des discours pluspolitiques, inscrivant le rgime de lauto-entrepreneur dans les slogansprsidentiels du courage individuel et de la valeur travail . Largu-ment du cumul des revenus permet de contourner la question delemploi, en proposant un instrument cens permettre laccroissementdu pouvoir dachat en temps de crise. Plus fondamentalement, cetargumentaire sappuie sur une lecture critique de la socit salarialequi serait elle-mme responsable de la crise et de ses consquencessociales. La promotion du cumul va directement entrer en rsonanceavec lobjectif politique affich du gouvernement daugmenter le pou-voir dachat des Franais via le slogan travailler plus pour gagnerplus , apparu dans de nombreux entretiens. Franois Hurel se flicitedavoir ainsi donn une chance quelquun de se dire un momentdonn si je veux travailler plus, je peux gagner plus , prcisantdailleurs : cest ce que jai dit Sarko[zy] quand je lui ai remis monrapport 27 . Lauto-entrepreneur constitue alors une manire decomplter son revenu par une activit indpendante accessoire, ven-tuellement en reconvertissant des comptences prives, ce quillustrele slogan du rgime faites fructifier votre talent . Cette rhtoriquerpond une lecture de la crise qui se focalise davantage sur desstratgies individuelles daugmentation du pouvoir dachat que sur lamise en uvre dune politique demploi. Ainsi, ltat se dgage de laresponsabilit de crer des emplois oudagir sur les salaires, en incitantles individus trouver des revenus complmentaires dans la valorisa-tion dactivits exerces en dehors de leur emploi salari. Franois

    27/ Entretien avec F. Hurel, juillet 2009.

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  • Hurel dclare : je rfute totalement lide que dans ce pays, pourgagner plus, il faut obligatoirement aller voir unpatron , dlgitimantles luttes salariales au profit dactivits complmentaires.

    Si largument du pouvoir dachat est utile pour la communicationpublique, celui plus traditionnel de la croissance se maintient tou-tefois dans le cadre des arbitrages interministriels notamment. Aucours de llaboration du texte et au vu des rticences de certainsservices ministriels, les arbitrages ont parfois eu lieu au niveau duPremier ministre ou du Prsident. Ils ont alors t soumis au juge-ment de conseillers plus jeunes, la plupart du temps passs par lENAet dont la lgitimit repose ainsi davantage sur les comptences tech-niques. Cest le cas notamment du directeur adjoint de cabinet duPremier ministre, Antoine Gosset-Grainville, n en 1966, pass parlENA et Inspecteur des Finances. Largumentaire doit alors se faireplus technique. Il sagit de rassurer sur les risques de fraude, etsurtout, de reprendre les argumentaires plus classiques afin dedmontrer que le rgime va crer de lemploi et contribuer la crois-sance. Les entretiens mens auprs de ces conseillers laissent moinsapparatre le discours sur le cumul des activits que celui sur la libration de la croissance . Antoine Gosset-Grainville justifie lefait quil ait t convaincu par la vocation du rgime tre lapremire marche avant de passer sous un rgime plus durable, plusprenne, dentreprise de plein exercice, si lactivit se dveloppaitbien 28 , notamment pour les chmeurs. Cet argumentaire saccom-pagne souvent de la comparaison avec dautres pays, le discours du retard franais en termes de cration dentreprise tant sans doutecelui qui a le plus et le mieux circul, depuis le cabinet de HervNovelli jusquau Parlement, en passant par llyse et Matignon. Lesvaluations internationales sont alors mobilises, via le principe dubenchmarking, cet outil de la science managriale visant reprer un talon ou un parangon, cest--dire un modle aveclequel se comparer, dans le but de combler lcart de performancequi vous en spare (Bruno, 2008 : 29), afin dtablir un lien entremanque de comptitivit et faiblesse de la cration dentreprise 29.En dpit de ces arguments censs dnoter du pragmatisme cono-mique de la mesure, les conseillers reconnaissent que limpact surles finances publiques ntait pas tabli et que le soutien la mesure tait plus une dcision politique quune dcision comptable 30 .

    28/ Entretien avec A. Gosset-Grainville, novembre 2010.

    29/ Ainsi, quand Christine Lagarde dfend le texte de loi devant lAssemble nationale, elle indique quece projet de modernisation de lconomie est un alignement sur les mesures prises par lAllemagne desannes 2000 ou par les tats-Unis des annes 1990.

    30/ Entretien avec E. Moulin, janvier 2012.

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  • Ainsi, pour Emmanuel Moulin, conseiller conomique de llyse,le Prsident aurait soutenu la mesure car tout ce quil y avait danslauto-entrepreneur comme symbolique lui [au Prsident] parlaitbien en termes dinitiative, de cration, deffort, de culture du travail,etc. 31 , et cela en dpit du risque lectoral pris en faisant passerune mesure qui suscitait lopposition des artisans, opposition quiparviendra sorganiser progressivement et qui contribuera, aveccelle des instances de Scurit sociale, rduire la porte du rgimede lauto-entrepreneur partir de 2011. Le soutien prsidentiel lamesure prend sens dans le cadre dun dbut de mandat ax sur larevendication dune rupture et sur des actions politiques privilgiantles rductions de prlvements lquilibre budgtaire.

    CONCLUSION

    Cet article a propos danalyser llaboration du rgime de lauto-entrepreneur comme une activit intentionnelle, initie par unsecrtaire dtat libral, co-construite par son cabinet et ses serviceset dont les contours se sont prciss au long du passage du projetdans les divers espaces politiques et administratifs de ltat. Laconvergence des intrts au niveau politique et administratif sestfaite sur lambivalence dun dispositif proposant de mettre la cra-tion dentreprise au service de tous : le rgime de lauto-entrepre-neur est prsent comme une solution pragmatique en contexte de crise et trouve des registres de justification dans la libration des forces conomiques tout comme dans le rformisme social etla capacit intgratrice du dispositif lgard des populations exclues . Ces registres de justification ambivalents, caractristi-ques de lidologie dominante (Boltanski et Bourdieu, 2008) ontpermis de crer un consensus politique autour dun dispositif pour-tant issu dun lieu de pouvoir limit et fortement marqu par latrajectoire politique librale de ses principaux acteurs. Ltude pro-cessuelle de ce dispositif permet alors de saisir les ressorts de lexten-sion du domaine de lentrepreneuriat et lexportation de ce motdordre vers les politiques sociales.

    Larticle met en lumire les sinuosits de la dcision politique ausein mme de ltat, en faisant apparatre en loccurrence llargis-sement du rgime de lauto-entrepreneur conscutif des coalitionsdintrts ambivalentes. Cette conclusion incite alors lapprofon-dissement du dialogue entre la sociologie de la gense, de la diffusion

    31/ Ibid.

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  • et des usages des politiques publiques (voir Belorgey, 2012 ; Dubois,2012). Lobservation de la seule gense dune politique publiquepeut faire courir le risque de mconnatre les rappropriations quien sont faites et qui changent son sens, prsumant alors une formede performativit des politiques publiques. Symtriquement, lana-lyse des seules pratiques engendres par une rforme politique sem-blerait opposer un produit univoque une pluralit dusages, ngli-geant les ambiguts dun dispositif politique transform au fil destapes de son institution. Les transformations des contours dun dis-positif politique ne se produisent en effet pas seulement au cours desa diffusion par la street-level bureaucracy (Lipsky, 1980) et de sesusages par ses destinataires, mais doivent galement tre apprhen-des par le prisme de lambivalence constitutive de laction publique.

    Sarah AbdelnourCentre Maurice Halbwachs

    (CNRS-EHESS-ENS), quipe [email protected]

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