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A qui se fier quand les aliments font peur ?
Le pouvoir de « décontamination
symbolique » des supermarchés au Vietnam
Cirad-Moisa12.01.2007
Muriel Figuié - Julie Mayer
Contexte de Hanoi, Vietnam
Conclusion RésultatsContexte
Fin des années 80Adoption de la politique dite du Renouveau
Un taux de croissance annuelle de l’ordre de 7%
Le marché de l’alimentation a doublé en 10 ans (Moustier et al 2003)
L’ensemble du système alimentaire est affecté par ces évolutions
« ensemble des structures technologiques et sociales qui, de la collecte, jusqu’à la cuisine en passant par toutes les étapes de la production–transformation, permettant à l’aliment d’arriver jusqu’au consommateur et d’être reconnu comme mangeable », Poulain 2002
Conclusion RésultatsContexte
Du magasin d’État à l’hypermarchéAbondance et « modernisation » du système de distribution
1986: autorisation de l’entreprise individuelle• La production vivrière connaît une forte croissance• Ex: le riz
Le commerce individuel se développe× Réseau de magasins d’État, système de tickets de rationnement, pour
gérer les pénuries alimentaires Maillage dense de vendeuses ambulantes, marchés de plein air, et
échoppes « marchés spontanés »
Années 90: implantation dans les principaux centres urbains• Aujourd’hui < de 1% du marché de l’alimentation (Moustier et al,
2006a)• Cependant: une croissance élevée
(+ 30% pour la chaîne Intimex entre 2003 et 2004, +40% pour Cop-Mart en 2001-2002)
Les consommateurs urbains se montrent plus exigeants sur la qualité des produits qu’ils achètent, en particulier,
sur leur qualité sanitaire
Conclusion RésultatsContexte
Résidus de pesticides, grippe aviairedes risques alimentaires nouveaux
Usage massif de produits chimiques • Pour intensifier la production vivrière• Engrais, pesticides, produits de conservation,… mal maîtrisés
Cas nombreux d’intoxications alimentaires• Enquête menée à Hanoi en 2002: 60% des personnes interrogées
considèrent que les aliments commercialisés présentent aujourd’hui un risque pour la santé, le danger principal étant associé à la présence de résidus de pesticides dans les légumes (Figuié, 2004a)
Grippe aviaire, depuis fin 2003• Intensification des échanges à l’échelle nationale et internationale:
expansion du virus
Sentiment d’anxiété alimentaire parmi les consommateurs• Non atténuée par les systèmes de contrôle sanitaire
gouvernementaux
Conclusion RésultatsContexte
Des contrôles sanitaires peu fiablesDes signes de qualité peu crédibles
Peu de confiance dans les systèmes de contrôle mis en place par l’État• Seules 5% des volailles mises sur le marché à Hanoi seraient
contrôlées • Le tampon même quand il est présent est peu crédible
(Ghinoux, 2001)
Conclusion RésultatsContexte
Certificat de contrôle des poulets
Conclusion RésultatsContexte
Des contrôles sanitaires peu fiablesDes signes de qualité peu crédibles
Mise en place dès 1995 du programme de "légumes propres", par le Comité populaire de la ville de Hanoi• Vise à certifier une production de légumes• Là encore: contrôles peu nombreux,
consommateurs très peu confiants. le label « légumes propres » apparaît comme manquant de crédibilité (Moustier et al 2006b)
Conclusion RésultatsContexte
Label « légumes propres »
Conclusion RésultatsContexte
Des contrôles sanitaires peu fiablesDes signes de qualité peu crédibles
Certificat inutile, selon certaines vendeuses (entretiens avec des vendeuses du marché Long Bien, 30 janvier 2004)
Des acheteurs très confiants dans la qualité sanitaire des légumes vendus en supermarchés, convaincus que les légumes y sont des « légumes propres » même si aucun label ne l’indique (Figuié, 2004b)
Le lieu d’achat (vendeuse habituelle, supermarché) peut être de nature à rassurer le consommateur sur la qualité des produits, soit qu’il appuie le signe de qualité, soit qu’il s’y substitue
Conclusion RésultatsContexte
Résultats1Enquête qualitative
2Enquête quantitative
Conclusion RésultatsContexte
Le mode de distribution comme garantie sanitaire
1 Représentations des consommateurs des modes de distribution, des labels et des contrôles
sanitaires
Conclusion RésultatsContexte
Le supermarché: représentations
Discours rapportés lors de 30 entretiens semi directifs• « Chaque fois que je vais au
supermarché je suis assurée, je peux choisir n’importe quoi. »
• « J’ai une grande confiance dans la qualité sanitaire »
Conclusion RésultatsContexte
Grande structure = Responsabilité accrue
« Au supermarché, ils investissent beaucoup, ils choisissent leurs fournisseurs et ne peuvent pas mettre n'importe quoi. »
« Ce sont des grandes structures. Elles ont de la visibilité, elles sont internationales. Elles suivent des règles internationales. »
« Les produits des supermarchés sont plus fiables. Car il faut garder le prestige. Les acheteurs du supermarché sont plus nombreux que les acheteurs des marchés. S'il y a une intoxication alimentaire, cela touche beaucoup plus de personnes. Le supermarché a plus de responsabilités vis à vis des clients. »
Représentations desContrôles sanitaires
Des représentations plus ou moins proches de la réalité • « De plus il y a toujours un service de contrôle du
supermarché en plus du service de contrôle de l'État. »• « Au supermarché, en plus, il y a un service avec des
gens qui contrôlent et vérifient la qualité. »
Remise en cause de l’efficacité des contrôles• « Dans les petits marchés d'abord il y a moins de
contrôles, et ensuite, les inspecteurs, s’il y en a, ne travaillent pas beaucoup. Ils sont là et ils laissent faire! »
• « Au marché Hom, après avoir enlevé des plumes, on tamponne, voilà on ne peut pas avoir confiance. »
Conclusion RésultatsContexte
Le mode de distribution comme garantie sanitaire
2 Confiance des consommateurs dans la qualité sanitaire, selon le mode de
distribution
Conclusion RésultatsContexte
Questionnaire N=707
« Pouvez-vous, s’il vous plaît, donner des notes, en %, sur votre propre niveau de confiance dans la qualité sanitaire des légumes vendus dans les endroits suivants: marché spontané, marché officiel, supermarché? »
Cas où le produit est porteur du label « propre » / Cas où il ne l’est pas
Mesure de l’impact plus ou moins fort du mode de distribution sur la confiance dans la qualité sanitaire + Comparer à l’impact du label « propre »
Conclusion RésultatsContexte
Confiance dans la qualité sanitaire des légumes non porteurs de labels "propres" N=507
05101520253035404550556065707580859095100
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% Confiance
% C
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ulé
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po
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s
Confiance lég marché spontané
Confiance lég marché officiel
Confiance lég supermarché
Confiance dans la qualité sanitaire des légumes avec/sans labels "propres" N=507
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100
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% Confiance
% C
um
ulé
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on
se
s
Confiance lég marché spontané
Confiance lég marché off iciel
Confiance lég supermarché
Confiance lég propre marché spontané
Confiance lég propre marché off iciel
Confiance lég propre supermarché
Une confiance sur le lieu de venteQuand on introduit le label
Augmentation de la confiance quelque soit le lieu de vente
Confiance croissante du marché spontané au supermarché en passant le marche officiel avec et sans label
Dans les situations extrêmes, de très faible ou très forte confiance, le label a un effet moindre
Avec ou sans label, le marche spontané reste le lieu de moindre confiance
Et Le supermarché reste le lieu de confiance maximale
Conclusion RésultatsContexte
Une confiance sur le lieu de venteQuand on introduit le label
Faible impact du label propre sur la confiance des consommateurs dans la qualité sanitaire des produits vendus
Le supermarché semble se suffire à lui-même pour donner confiance aux acheteurs
Conclusion RésultatsContexte
Variation de confiance Avec/ Sans label
La même pour tous les individus?
Conclusion RésultatsContexte
Nuage de confiance qualité légumes avec/sans label "propre" au marché officiel
N=507
0%
5%
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25%
30%
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95%
100%
0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% 35% 40% 45% 50% 55% 60% 65% 70% 75% 80% 85% 90% 95% 100%
% Confiance sans label "propre"
% C
on
fia
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1 répondant 10 répondants 15 répondants
Nuage de confiance qualité légumes avec/sans label "propre" au supermarché
N=507
0%5%
10%15%20%25%30%35%40%45%50%55%60%65%70%75%80%85%90%95%
100%
0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% 35% 40% 45% 50% 55% 60% 65% 70% 75% 80% 85% 90% 95% 100%
% Confiance sans label "propre"
% C
on
fian
ce a
vec
lab
el "
pro
pre
"
3 répondants 25 répondants 35 répondants
Consensus / Diversité de confiances
• Dans les deux cas la confiance du label permet d’augmenter la confiance des répondants
• Les légumes porteurs du label au marché inspirent des niveaux de confiance très divers: le nuage de points est plus étalé alors qu il y a un consensus sur la qualité des légumes avec sans au supermarché
Limites
Comparaison de catégories institutionnelles: négligence d’autres points d’appui de la confiance
Confiance interpersonnelle non prise en compte (proximité entre vendeurs et acheteurs) Considérer comme lieu de vente «votre
vendeur habituel » Biais de l’ordre des questions
Conclusion RésultatsContexte
Le pouvoir de « décontamination symbolique » des supermarchés
au Vietnam
Conclusion RésultatsContexte
Pensée magique et décontamination symbolique
Confiance ne repose pas sur l’expérience des consommateurs 1% Vietnam, 5% milieu urbain 3/4 échantillon « jamais, quelques x / an » Ne repose pas sur des données objectives sanitaires La confiance accordée aux supermarchés par les consommateurs
vietnamiens dépasse le cadre de la pensée rationnelle du mangeur
Référence à la pensée magique (Fischler 1994, Rozin 1994, Chiva 1994)
• « la pensée magique longtemps considérée comme une des caractéristiques de la mentalité primitive apparaît comme un mode de fonctionnement normal de la cognition alimentaire cohabitant avec la pensée rationnelle chez le mangeur contemporain » (Poulain 2002 : 175)
• Pensée magique à l’œuvre dans les processus de contamination symbolique décrits par Rozin (1994)
Lorsque deux entités sont en contact, des propriétés sont transmises entre elles de façon définitive ; ainsi un verre de lait dans lequel a baigné un cafard, même après stérilisation reste « imbuvable » aux yeux de la plupart d’entre nous
Conclusion RésultatsContexte
Achat et alimentation: fondateurs d’une identité collective
Un aliment - - - - - - - - - - - - - - - - >La table du consommateur contribue à la définition de sa qualité, même si cela n’affecte pas
les caractéristiques intrinsèques du produit final
Potentiel de « décontamination symbolique » de certains éléments de la filière du supermarché
Le supermarché au Vietnam: des symboles• Accès du pays à l’abondance après la pénurie• Accès au luxe après la sobriété• Accès au monde après l’enfermement culturel
L’acte alimentaire est fondateur de l’identité collective ou de l’appartenance sociale (Bourdieu 1979, Poulain, op.cit.,), selon l’adage « je deviens ce que je mange »
L’acte d’achat est également fondateur de l’identité collective
Conclusion RésultatsContexte