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Buckminster Fuller and Shoji Sadao, Dome over Manhattan, 1960 Mis en forme par S.Shiraishi & S. Formery, sous la dir. de R. Ménard 2015 -2016 // ENAC ARCHITECTURE FUTURS // FORMES // ÉNERGIES ATELIER DU PROF. RAPHAËL MÉNARD E P F L 1.10 FORMES #3

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EPFL ENAC SAR Publication de l'atelier R. Ménard Enseignants: R. Ménard, S.Formery, S.Shiraishi Réalistation graphique S.Shiraishi Imprimé à l'EPFL, janvier 2016

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Buckminster Fuller and Shoji Sadao, D

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a. Arborescence de l’énergie, RM, EPFL 2015

a.

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soleil en villeou comment les formes

urbaines dictent le potentiel de récolte

énergétique

Nous arrivons au terme du parcours, et pour ce dernier fascicule, un écho à notre introduction : la capacité déterminante des formes urbaines à contrôler les densités de quantité et de qualité de nos futures productions énergétiques renouvelables. C’est le présupposé de notre atelier, les Infrastructures Solaires Urbaines.

Pour clore les révolutions autour de notre trilogie futurs –énergies –formes, nous nous attacherons à décrire dans ce qui suit deux mouvements. Le premier complétera l’arborescence des différentes formes de solaire direct, le solaire passif . Cette forme de production (essentiellement située sur le plan vertical des façades exposées en situation hivernale) entretient un lien étroit avec les questions urbaines et, en particulier, les problématiques afférentes au prospect solaire. Le second mouvement se tournera vers d’autres futurs, pour faire un état des capacités d’intégration du solaire photovoltaïque (et dans une moindre mesure du solaire thermique) en situation de densité morphologique importante.

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1. Pour un bâtiment contemporain, les parois opaques disposent en général de valeur de conductivité surfacique inférieure à 0,3W/m².°C tandis que pour une fenêtre, en considérant l’ensemble du châssis menuisé, il faut retenir des valeurs comprises entre 1 et 1,5W/m².°C

Le soLaire passif : L’émergence du vitrage isoLant et Les conditions de sa pertinenceLe solaire passif est très étroitement associé aux vertus du bioclimatisme. Il en constitue l’un des piliers : l’art de positionner judicieusement les fenêtres afin de bénéficier des apports solaires hivernaux. Le solaire passif peut être associé à une stratégie de réduction de la demande plutôt qu’à un productible particulier de l’offre : les bâtiments passifs exploitent massivement cette ressource pour afficher des besoins de chauffage très limités. Mais nous considérerons ici que cette production d’énergie correspond à une forme dérivée du solaire thermique, en disposant d’un plan de captage vertical essentiellement orienté au sud dans l’hémisphère nord (et au nord dans l’hémisphère sud). Il suppose par ailleurs une bonne irradiation solaire directe, sans quoi le capteur solaire généré par la baie vitrée n’est pas compétitif par rapport à une paroi opaque (cette dernière étant en général bien plus isolante1). Enfin, des études doivent être conduites pour éviter tout risque d’inconfort thermique en situation estivale voire de mi-saison : il ne s’agirait pas d’engendrer une demande énergétique de rafraîchissement !

Dans le fascicule 1.03 Futurs #1, nous rappelions cet enseignement de Delirious New York : l’invention des taquets anti-recul de l’ascenseur d’Otis comme condition nécessaire à la viabilité du gratte-ciel. Le solaire passif doit sans doute sa pertinence climatique, et donc les conditions de son expansion, à l’invention du vitrage isolant à l’orée des années 30 avec l’arrivée du Thermopane. Avec son volume d’air intérieur isolé

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2. Soit le passage d’un coefficient U d’environ 5W/m².°C à environ 2-3 W/m².°C pour les premières générations de vitrage isolant. Des valeurs de 1W/m².°C deviennent courantes de nos jours grâce aux couches à basse émissivité, au remplissage par des gaz rares et la limitation du pont thermique généré par le joint de scellement.

et la limitation de la convection de la couche d’air intérieur grâce à une épaisseur réduite, le vitrage isolant permet la division par deux des déperditions d’un simple vitrage traditionnel2. Voilà donc réunies les conditions nécessaires à l’émergence de la fenêtre comme capteur solaire en puissance : elle ferait donc rentrer plus d’énergie qu’elle n’en perdrait du fait de ses qualités isolantes médiocres. Nous allons analyser plus en détail cette assertion en tachant de déminer les raccourcis de pensée qu’offrent parfois la pensée unique de la durabilité. Nous nous poserons dès lors les questions suivantes :

- En décidant d’observer l’architecture et ses baies comme capteur solaire en puissance, quels sont les rendements solaires typiques du solaire passif ? - En tenant compte du changement climatique, quelles sont les géographies pertinentes pour cette forme particulière de production ?- Enfin, quelles sont les formes urbaines adaptées comme celles optimisant la récolte du solaire passif ? Les contraintes géométriques liées au prospect solaire ne sont-elles pas génératrices… d’ennui formel ?

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#3 Le soLaire passif : une première anaLyse du rendementPour cadrer le sujet, attaquons par quelques ordres de grandeur. Celle d’un récit d’une journée d’hiver normal sous nos latitudes, quelque part entre 45 et 50 degrés Nord. En ce mois de décembre, le thermomètre flirte avec le gel ; il est 11 heures du matin et le flux solaire récupérable en façade sud est d’environ 200W par mètre-carré de façade exposée ; à l’intérieur du logis, règne une douce température de 20°C ; la fenêtre au sud dispose d’un vitrage isolant, installé dans les années 2000. Dressons maintenant un premier bilan. D’un côté les apports : environ 150W/m² (en effet le vitrage possède un facteur solaire de 0.75, une valeur assez classique). De l’autre, les déperditions : environ 50W/m² (en considérant que le U de l’ensemble fenêtre est d’environ 2,5W/m².°C). Les apports nets sont d’environ 100W/m² à comparer aux 200W/m² incidents. Le rendement de conversion est dans cette situation est de 50%. Mais n’oublions pas qu’en hiver, il fait très souvent nuit… et le rendement sur la journée est alors bien plus faible ! Dans le fascicule précédent, et lorsque nous décrivions le solaire thermique, nous notons que ce dernier limite cet inconvénient en stoppant le mouvement du fluide caloriporteur lorsque la ressource solaire n’est plus là.

Comment donc éviter cette « pathologie » du solaire passif ? Avec une isolation variable, pardi ! Sous nos contrées, il devrait être obligatoire de prévoir un volet ou un rideau intérieur isolant pour renforcer l’isolation de notre fenêtre quand le feu soleil est parti se coucher. En 1973, Steve Baer proposait un magnifique archétype pour sa maison située à b. Baer, S., Zomes, New Mexico,

1970s

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Corrales dans le Nouveau-Mexique. Du solaire passif diablement efficace : des volets, tels des ponts levis, qui réfléchissent le soleil de la journée pour augmenter le flux solaire capté ; qui se referment la nuit pour limiter les pertes thermiques pendant la nuit ; des bidons d’eau stockés dans les étagères intérieures pour augmenter l’inertie thermique et diffuser doucement la chaleur solaire accumulée pendant la journée. Notre ‘Duc de Lille’ est un hommage à Baer et il illustre comment le solaire passif peut prendre l’échelle de l’infrastructure urbaine.

c. Lille 2050, Concours EDF Bas Carbonne, Extrait du rendu de 169 architecture + Obras + Elioth

c.

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Le soLaire passif : une récoLte spécifiqueLe logigramme ci-dessus explicite les prérequis pour récolter l’énergie solaire selon la technique du solaire passif. A la différence d’autres récoltes de flux comme le solaire thermique ou le solaire photovoltaïque, le solaire passif ne constitue certainement pas une solution globale. Il n’a de sens que pour les climats induisant des besoins chauds élevés et situés dans les latitudes dont la valeur absolue dépasse 45 à 50 degrés. Or, une partie minoritaire de la population mondiale vit à ces latitudes : rappelons en effet qu’en 2015, plus des deux tiers de la population mondiale vit et habite dans la bande tropicale. Autrement dit dans des géographies où les courses solaires sont presque toutes similaires: un soleil situé l’essentiel de son temps au zénith! En cela, le solaire passif est une récolte spécifique, un peu comme le sont solaire à concentration, éolien et hydraulique.

d. logigramme des critères de récolte de l’énergie solaire en solaire passif. RM, EPFL 2015.e. diagramme «royaume du solaire passif», RM, EPFL 2015f. diagramme de course solaire, mise en évidence de la zone où la hauteur est supérieure à 45° par rapport à l’horizontale, pendant 6 heures les plus chaudes et quand le rayonnement est le plus important ! RM, EPFL 2015

d. e.

f.

C’est là, le royaume du solaire passif

Hauteur supérieure à 45° par rapport à l’horizontale, pendant 6 heures les plus chaudes et quand le rayonnement est le plus important !

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Le soLaire passif : évaLuation pLus fine du rendementRevenons à notre calcul précédent et maintenant que nous avons compris la logique, entrons plus précisément dans la métrique des rendements. Prenons la ville de Nancy et des données climatiques représentatives de son climat. Zoomons sur la période de temps correspondant habituellement à la période de chauffe dans les logements : du 15 octobre au 15 avril d’une année. En abscisse, les températures extérieures ; en ordonnée, le flux solaire impactant un mètre-carré d’une paroi verticale orientée au sud. A chaque intersection, nous mentionnons le pourcentage de temps correspond à cette situation climatique. Evidemment, une grande partie de ces évènements correspondent à des situations pendant lesquelles le flux solaire est nul (les cases plus grises correspondent aux évènements les plus denses dans le temps).

Première information : entre le 15 octobre et le 15 avril, le flux moyen solaire frappant la façade sud est d’environ 55W par m² exposé (en comptant la nuit) ; en journée, il est en moyenne de 205W par m². Pour un simple vitrage, le bilan est alors négatif : il perd plus d’énergie par conduction qu’il n’en gagne avec les apports solaires gratuits ; pour un double vitrage3, le rendement serait alors d’environ 30% ; et pour un triple vitrage4, il s’approcherait des 40%.

Mais ce rendement doit être comparé à la totalité de l’énergie solaire reçue au cours de l’année par le bâtiment. Et dans ce cas, le rendement équivalent devient très faible. En effet, pendant la période de chauffe hivernale, la façade sud (sans masque)

3.. U ~ 1,8W/M².°C Et FS ~0.75 (FS POUR FaCtEUR SOLaiRE)4. U ~1W/M².°C Et FS ~0.65

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recevra environ5 250kWh par m². Imaginons alors un bâtiment cherchant à maximiser le solaire passif, et dont la façade sud est vitrée aux deux-tiers et dont le rendement moyen des vitrages est supérieur à 50% (nous avons vu précédemment qu’un triple vitrage atteignait difficilement cette valeur sous le climat nancéen et que cela supposait sans doute de mettre en place une isolation variable comme un volet par exemple). Si les façades d’un étage font environ 2,5 mètres et que la profondeur du bâtiment est de 10 mètres (ce qui est assez étroit), le solaire passif générera alors annuellement environ 20kWh par mètre-carré de plancher. Vu que le gisement solaire horizontal est d’environ 1000kWh/m².an, le rendement rapporté au plancher tendrait vers un très modeste 2%... Nous sommes bien loin des performances du solaire

5. 55W x 6 MOiS x 30j/MOiS x 24h

g.

g. Statistiques climatiques à Nancy pendant la période de de chauffe (entre 15 octobre et 15 avril )

analyse comparée entre flux solaire incident en façade sud et température d’air extérieure: occurrence des évènements en % du temps global

Etude RM, novembre 2015. Base Meteonorm, climat actuel.

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thermique, surtout quand ce dernier est couplé à des systèmes de stockage.

Toutefois, vu que ce rendement est rapporté à la surface d’un plancher d’étage, construisons donc un bâtiment haut ! Et s’il dispose de dix étages, le rendement passera alors à 20%. Mais il fera alors de l’ombre en hiver sur une valeur correspond à peu près à trois fois sa hauteur totale (le soleil est environ à 30° au-dessus de l’horizon). Dès lors, à l’échelle urbaine, nous concevons que le rendement global du solaire passif ne sera pas très élevé…Et pour effectuer ce rapide calcul, nous comprenons que notre bâtiment épais d’une dizaine de mètres et qui disposait d’une hauteur de 25 mètres, doit être éloigné d’environ 75 mètres de son prochain pour respecter les règles de masque mutuel : dans ce cas, le rendement urbain du solaire passif chute donc à moins de 3%6...

6. 20% x (10m/75m)

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ci-contre: dessin RM.

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#3 L’urbanisme du soLaire passif

« Le recours aux principes de l’architecture bioclimatique est souvent rappelé aux concepteurs lorsqu’il s’agit de parvenir à la définition de bâtiments énergétiquement vertueux. Cette grammaire sous-tend un jeu savant des volumes qui optimise le fonctionnement naturel du bâtiment pour des conditions climatiques données. En matière de logement par exemple, cela suppose de privilégier au maximum les baies vitrées au sud afin de bénéficier d’apports de chaleur gratuits en hiver ; des systèmes de protection solaire extérieure réduisent conjointement le flux incident hors de la période de chauffe. Qu’en est-il cependant quand l’horizon est partiellement masqué du côté méridional ? Comment parvient-on à répartir de façon équitable le droit au soleil lorsqu’il s’agit de constituer un fragment de ville ? Comment passe-t-on de l’optimum individuel à la maximisation globale ? BedZed (Beddington Zero Energy Development), dessiné par l’agence de Bill Dunster, a fourni une première réponse en organisant les logements selon des barrettes orientées essentiellement est-ouest et dont l’épannelage en coupe nord-sud est tel que chaque barrette ne produit pas de masque en hiver à celle située en aval dans la direction septentrionale. Comment généraliser ce principe aux différentes formes urbaines ? […] Le problème posé se résume dès lors à cette interrogation : pour un spectre urbain donné, quelle forme urbaine se fait le moins d’ombre à elle-même ? Énoncé différemment, quel arrangement spatial des volumes permet de maximiser les apports solaires en période de chauffe ? Quelle grammaire morphologique est susceptible d’assurer un

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fonctionnement équitable du bioclimatisme ? Dans le cas d’une intervention au sein d’une morphologie déjà constituée et donc avec des conditions de masque données, quelle géométrie optimale maximise l’ensoleillement hivernal du programme ? »

Extrait de l’articule Ménard R., Mutations des programmes dans Architecture = Durable, catalogue de l’exposition, Pavillon de l’Arsenal, Paris, 2008.

Dans la veine des travaux de Ralph Knowles, les recherches conduites autour des Villes Solaires Aléatoires tachaient d’explorer des grammaires de formes évitant le recours à des tracés urbains triviaux, privilégiant les vides (et donc les voiries) selon des orientations est-ouest, et générant ainsi des prospects solaires propres à faire bénéficier de façon homogène les bienfaits du solaire passif. Avant Bedzed ou encoure le quartier solaire dessiné par Rolf Disch au sein du quartier Vauban à Freiburg-im-Brigsau, John Perlin rappelait dans Let It Shine , les prémices de l’urbanisme solaire par Bernhard Christoph Faust en 1826 et sa Sonnenstadt qui obéissait déjà aux lois solaires.

Mais à quelles fins ? Les contraintes formelles que supposent l’optimisation du solaire passif en valent-elles la chandelle au regard de la faiblesse des rendements urbains annoncés ? N’est-il pas plus efficace de maximiser la production en toiture, en recourant par exemple au binôme solaire thermique et stockage intersaisonnier ? Avant de fermer les voies d’exploration du solaire passif, la conclusion des algorithmes générant les Villes Solaires Aléatoires montrait qu’il existe bien un « espace de formes possibles » plus

h.

h. Knowles R. L., Energy and Form, An ecological approach to urban growth, Mit Press, Cambridge Ma, 1974.i. Freiburg-am-Brisgau (D).j. Sonnenstadt, Bernhard Christoph Faust, 1826.

i.

j.

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#3 complexe et plus riche que l’ « urbanisme trivial du solaire passif », à savoir des formes bâties continues s’étendant d’ouest en est. Nous pourrions donc composer une ville d’Infrastructures Solaires Urbaines non canonique (au sens mathématique du terme) permettant de bénéficier d’une récolte optimale du solaire passif. Voilà pour un programme d’investigation pour le futur !

k. « Villes Solaires aléatoires». un outil de production de formes urbaines solaires.Elioth.

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Le soLaire passif, en concLusion.

A l’échelle de la baie : • Prévoir une isolation variable de la baie et faire en sorte que le vitrage devienne plus isolant quand le soleil n’est pas là (quitte à devenir opaque)• Prévoir une porosité solaire variable de la baie et savoir éviter les apports estivaux et de mi-saison.• Evaluer le surcoût en énergie grise du solaire passif : attention à ne trop consommer de ressources pour optimiser un gisement faible (rappelez-vous le fascicule 1.05 Formes #1…). Le solaire passif doit rimer davantage avec low tech que double-peau hyper-technologique.

A l’échelle de l’architecture : • Anticiper la question inertielle et voir comment les apports diurnes génèrent un doux confort hygrothermique pendant la nuit.• Evaluer les gains solaires rapportés à la surface de plancher pour dépenser l’énergie constructive aux bons endroits.• Comparer le solaire passif au gain du solaire thermique (ou au solaire photovoltaïque couplé à une pompe à chaleur) avant toute décision.

A l’échelle du paysage et du tissu urbain : • Se poser la question des masques à incidence basse• Imaginer le futur et la volatilité des conditions de masque• Evaluer le rendement solaire urbain équivalent

l. volatilité des masques solaires urbains. RM.

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#3 type de production pour Le soLaire passif

• Chaleur à basse température pour le chauffage.• Rendement max. ~ 50%• Contenu exergique < 10%• Baies de captage situées en général sur les façades exposées pendant la saison de chauffe (peut également s’implanter en toiture)• Plutôt faible emprise bâtie pour éviter les masques sur les orientations exposées en situation hivernale (hauteur solaire à basse incidence)• Latitudes plutôt élevées en valeur absolue

et si Les formes urbaines gouvernaient davantage L’offre que La demande ?De fait, le « catéchisme de la durabilité » peut avoir tendance à parer de vertus la ville dense et compacte. Sans doute pour deux raisons sous-jacentes. En premier lieu, la fameuse courbe des australiens Newman et Kenworthy qui montrait à la fin des années 80 la corrélation entre densité urbaine et demande énergétique associée à l’usage de l’automobile: l’habitant d’une zone peu dense était plus dépendant de son automobile et sa consommation annuelle de carburant était dès lors plus élevée que l’habitant d’une ville dense.

En second lieu, la ville dense peut correspondre à une situation de bâtis contigus, relativement haut et donc plus compact que le pavillon typique de la condition suburbaine. Les diagrammes (d,e) établis dans Reforme quantifient cet effet tout en circonscrivant la portée de l’impact de la densité urbaine.

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Reforme retournait aussi la question en interrogeant au contraire l’impact de la forme urbaine sur la capacité d’un tissu à générer sa propre production d’énergies renouvelables.

« A l’orée de la dernière partie de Reforme, nous interrogeons à présent la question de l’épiderme de récolte des territoires urbains. Dès lors, dans le déploiement de notre stratégie consistant à concentrer une partie de l’offre en paysage urbain, comment récolter efficacement sur une collection de toitures disparates, sans cohérence de taille et produisant des ombres réciproques ? Le soleil est en haut, l’agriculture se récolte à plat : champs de céréales, maraîchage, etc. Il est aisé de passer entre les sillons pour semer, récolter. Idem pour nos récoltes électriques : champs photovoltaïques, miroirs paraboliques des centrales à concentration… : il est facile de passer entre les panneaux pour l’entretien7. […] Le photovoltaïque déteste les masques partiels. Actualité récente, la publication du cadastre solaire8 de Paris a révélé que le potentiel maximum de toitures solaires était de 300 000 à 400 000 m² : soit 0,3% de l’aire urbaine! Rappelons-nous que le Grand Paris à 2000W réclamait-lui déjà au moins 5% de la surface… Toitures, pignons et refends de nos toits parisiens proposent une skyline pittoresque mais fabriquent une géométrie globale peu propice à la production énergétique. Ce chaos géométrique de l’épiderme urbain est un point de départ de nos réflexions sur les Infrastructures Solaires Urbaines. »

Extrait de Reforme.

7. La production sur des plans verticaux est mauvaise, a fortiori dans la bande tropicale où vit la majorité de la population mondiale.8. Cadastre solaire de Paris récemment mis en ligne par l’aPUR.

m. Reforme, rapport final.292p, avril 2014.Programme de recherche ignis Mutat Res. Session 1

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bruit géométrique, masques parties et potentieL soLairePour corroborer ce dernier point, l’étude récente effectuée par Elioth pour l’Atelier Parisien d’Urbanisme illustre la difficulté des tissus urbains traditionnels à optimiser la récolte solaire, cette dernière étant soit du solaire thermique, soit du solaire photovoltaïque dans le cadre de cette étude. Rappelons-nous aussi les conclusions de la présentation de Nahid Mohajeri le 10 novembre 2015, Urban Density and Solar Energy. Lorsque le cadastre solaire de Paris a été produit en 2013, il avait été estimé que 3 à 4 % de la surface de toiture pouvait être équipée, soit 1,2 millions de m², l’objectif formulé à l’époque étant de 400 000 m². Un résultats de l’étude réalisée par Elioth pour l’APUR présente un potentiel deux fois plus grand, à 2,2 millions de m², soit 6 à 7 % des toits parisiens : cette proportion limitée est le fruit du bruit géométrique de nos canopées urbaines traditionnels.

n. une image d’une simulation de cadastre solaire sur le tissu haussmannien, étude Elioth pour l’aPUR

n.

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concLusion Dans la préface à l’édition française de Something New under the Sun9, John R. Mc Neill écrit :

« Lorsque j’ai commencé à travailler sur ce livre au début des années 1990, je pensais que l’élément qui avait le plus fortement marqué l’histoire environnementale mondiale du 20ème siècle avait été l’accroissement de la population. Lorsque j’eus achevé ce travail, mon opinion avait changé, et c’est le système énergétique basé sur les énergies fossiles que je considérais comme la variable essentielle dans l’histoire environnementale moderne ; j’ai tâché de souligner son importance dans ce livre. Je pense maintenant, dix ans plus tard, que si c’était à refaire, j’insisterais plus encore sur les énergies fossiles. »

Au lendemain de la signature de l’Accord de Paris sur le Climat (COP21), l’intention sous-jacente à l’atelier 2050, Sous le soleil exactement était la suivante: comment passer d’ une ère d’ «architectures fossiles» à des «architectures renouvelables» ? Comment bâtir des formes pérennes dont l’essentiel du mix énergétique -sur la totalité de leur cycle de vie- est issu des énergies renouvelables ? Dans une situation de demande énergétique intense, ce que sont les villes, il était donc aussi nécessaire de reposer la question des lieux résilients et efficaces pour faciliter nos récoltes en situation de densité. Et dans un éternel recommencement, le manifeste des Infrastructures Solaires Urbaines (ISU) clôt ainsi les fascicules :

« Avant, en ville, l’énergie venait du sol. Avant, c’était avant le gaz à tous les étages, avant la fée électricité

o. article du New York times. Photo: Christina Figueres (g), Ban Ki Moon, Laurent Fabius et François hollande (d) à l’annonce de l’adoption de l’accord sur le climat au Bourget, le 12 décembre 2015, Crédit photo: Christophe Petit Tesson/European Pressphoto Agency

9. Du nouveau sous le soleil, une histoire de l’environnement mondial au 20ème siècle, Champ Vallon, 2010 pour la traduction. Date de parution de l’édition originale, 2000.

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#3 dans toutes les pièces. Jadis, les combustibles de nos logis arrivaient depuis la rue. Ils fournissaient nos âtres, nos poêles, nos fourneaux et parfois nos éclairages. C’étaient le bois, le charbon, le pétrole à lampe. Une fois consommée, la chaleur fatale s’évacuait vers le ciel ; les toitures se devaient d’incorporer les échappements permettant la salubre évacuation de ces combustions.

Aujourd’hui, nos canopées bâties conservent les traces de ces systèmes énergétiques. Paris et ses refends, ponctués par des conduits de cheminée en terre cuite. Le sol dictait la canopée urbaine. Le sol devait être accessible et idéalement plat pour faciliter transport, logistique et livraison de combustibles qui venaient de l’extérieur de la cité. Quels usages subsistent ? Les feux de bois deviennent suspects. A la limite, les conduits non comblés participent à la ventilation naturelle en été.

Dorénavant, la ville doit être résiliente pour assurer tout ou partie de ses besoins énergétiques. Produire ne serait-ce que le dixième des besoins, c’est sans doute la garantie de pouvoir assurer les fonctions vitales en cas de défaillance de la distribution d’énergie. Autoproduction et micro-réseaux sont nos indispensables garde-fous. Du fait de sa densité humaine, des besoins individuels stables ou croissants mais aussi de la raréfaction des combustibles externes, la ville se doit de produire localement une fraction de son énergie. Ne nous fions pas à la baisse très provisoire du prix des hydrocarbures : le ‘contre-contre-choc’ arrivera.

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Dans le futur, seules les énergies de flux (le soleil et ses dérivés, et dans une moindre mesure la géothermie) pourront assurer un approvisionnement pérenne. La ville doit alors faire descendre l’énergie directement depuis ses toits. Et, dans ce cas alors, le ciel impose la forme. Le soleil se capte à plat ; les cheminées empêchent cette nouvelle relation. La ville doit retourner sa forme : sa canopée doit dorénavant être homogène, douce et régulière pour faire entrer efficacement l’énergie vers l’intérieur. Les ISU commencent comme cela. »

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