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L’HUMEUR DE FARO ÉCONOMIE Le métier d’entraîneur ou de manager sportif a fortement évolué au cours des dernières années. Le staff sportif d’un club est de plus en plus important. Le recours à de nouvelles méthodes d’analyse des performances par l’utilisation de la vidéo ou le traitement des stats est, par exemple, l’une des compétences devenues indispensables. Parmi les obligations d’un entraîneur, la communication externe est là encore une activité qui entre dans le champ de compétences du technicien moderne. Il n’y a pas encore de formation dédiée à la communication d’un entraîneur qui pourrait être généralisable. Le recours aux techniques de media training est parfois utilisé par le biais des clubs, des fédérations pour une équipe nationale ou directement par le coach à titre personnel. Le contexte des clubs, la personnalité des entraîneurs, leur parcours d’ancien joueur, leur expérience de consultant médias et surtout une manière de s’exprimer en public font que chaque cas est unique. Il existe des cas d’école comme celui de José Mourhino pour qui la communication est clairement sa marque de fabrique et probablement un atout dans sa stratégie de management de sa réputation. En France, le cas d’école est celui de Marcelo Bielsa, véritable idole du Vélodrome et principal sujet traité par l’ensemble des médias français. Bielsa est l’un des rares entraîneurs à avoir évité les obligations de présentation aux médias de début de saison, ses prises de parole et sa manière de s’exprimer ne font pas ressortir une compétence de communicant modèle... Pourtant, sa réputation personnelle est exceptionnelle si bien que certains observateurs se demandent si, en plus de ses compétences sportives reconnues par ses pairs et ses joueurs, il ne serait pas aussi un expert en communication. Nous pensons que ce n’est pas le cas, mais qu’il est possible de démontrer par la théorie que le contexte positif en termes de résultats sportifs, couplé à la forte attente d’un redressement de l’équipe olympienne, en fait l’entraîneur le plus attractif actuellement en Ligue 1. Parmi les théories les plus opérationnelles, les techniques de management de la réputation d’un individu, d’une entreprise ou d’une ville et d’un pays sont de plus en plus à la mode. Le Reputation Institute, créé et dirigé par le professeur Charles Fombrun, est la référence en la matière. Selon cet institut, il existe cinq leviers communicationnels pour développer une bonne réputation. 1. Être visible. Bielsa l’est malgré lui, compte tenu de sa fonction, du contexte de son arrivée et du fait que l’OM est un club extrêmement médiatique. 2. Être transparent. Bielsa est peut-être même trop transparent en ce qui concerne ses choix, le recrutement, son contrat ou bien encore sa relation avec les dirigeants de l’OM. 3. Être authentique. Bielsa est un personnage totalement authentique. Son histoire personnelle en Argentine aux Newell’s Old Boys, son club de cœur, en est une parfaite illustration. 4. Être cohérent. Bielsa fait ce qu’il dit, il a une logique de travail connue et une approche tactique du football qu’il applique partout où il est passé. 5. Être distinctif. Son surnom « el Loco » est une marque de fabrique, sa relation distante avec ses joueurs, les résultats et sa célèbre glacière devenue un objet identitaire au personnage. Bielsa fait parler et parle peu mais ce qui se dit sur lui est positif et attractif. En tant que personnalité authentique du football, l’entraîneur argentin est réputé naturellement. Lorsque les résultats sportifs sont là, ses traits de personnalité sont mis en lumière et surexprimés dans un stade et une ville réputés pour sa passion pour son club. n LIONEL MALTESE MAÎTRE DE CONFÉRENCES AIX-MARSEILLE UNIVERSITÉ - KEDGE BUSINESS SCHOOL BIELSA, UNE RÉPUTATION AU NATUREL T out le monde devrait regarder notre clasico national. Même certains joueurs concernés ? Qui sait... Fiction. « Mario, tu viens, on va boire un coup ? – Où ça ? – Au Clasico, près du Parc ? – T’es fou? On va nous repérer. Et puis, si ça se trouve, on va quand même jouer ! – Ah ouais? Tu crois ça, toi? Tu as combien de temps de jeu derrière toi ? – Euh... 237 minutes ! Six bouts de match. Et toi, Clément ? – 62 ! J’te bats ! Quatre bouts de match. Qui dit mieux ? – Euh... Rabiot ? – T’as raison. En attendant, allons nous en jeter un petit. Garçon ! Au fait, qu’est-ce que tu bois ? – Un chouchen. Pour me rappeler le temps où j’étais titulaire à Lorient. Ça fait déjà deux ans. Quand je pense que mon président m’a alors vendu à la dernière minute du dernier jour du mercato à son pote marseillais. – J’en ai entendu parler à l’époque, oui. Moi, j’ai été prêté au TFC car que je ne jouais plus au PSG. J’ai trouvé du temps de jeu. Mais je suis revenu et là, je crois que je vais connaître une saison à peu près vierge. Ma traversée du désert qatari. Garçon : un draquito mojito. Une spécialité de là-bas... À la tienne ! C’est sûr que ce PSG-OM, c’est la Guerre des étoiles. – Nous ce serait plutôt Camping 2, non ? – Tu te fais du mal; tu nous fais du mal. Garçon ! Un autre ! On sera bien ici, dimanche soir, pour regarder le match sur grand écran, non? Cool. Les Ibra, Verratti, David Luiz, les CHRONIQUE Au bar du clasico «Les Ibra, Verratti, Nkoulou, Gignac, on ne les aura jamais vus d’aussi près.» PAR JEAN-MARIE LANOË Mandanda, Nkoulou, Gignac pour nous tout seuls. On ne les aura jamais vus d’aussi près, en match. Avec la “palette à Doudouce” pour bien nous faire comprendre comment on joue. – Et nos entraîneurs, donc… La touillette de Laurent Blanc dans le café de Bielsa... – Pas mal... C’est de toi ? – Non, j’ai vu Ruquier la faire l’autre samedi sur On n’est pas couché. Je t’arrête tout de suite, on jouait le lendemain, dimanche, à Lyon. C’est pour ça... Mais, dis donc, Clément, tu n’as pas peur que Canal+ nous invite quand même sur le plateau pour quelques commentaires ? – Pas de danger. On n ‘intéresse plus personne. Un autre, garçon ! – Attends ! Mon iPhone 6 Plus crépite ! Waouh ! Je suis convoqué pour dimanche par Bielsa ! – Moi aussi ! Regarde mon Samsung Galaxy Note 4 ! Signé Laurent Blanc ! Tu crois qu’on va jouer au moins quelques minutes l’un contre l’autre sur le terrain? Tiens? Voilà Rabiot! Qu’est-ce qu’on t’offre ? » n FF _ MARDI 4 NOVEMBRE 2014 _ 15

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L’HUMEUR DE FARO ÉCONOMIE

Lemétier d’entraîneur ou demanager sportif a fortement évoluéau cours des dernières années. Le staff sportif d’un club est de plusen plus important. Le recours à de nouvellesméthodes d’analysedes performances par l’utilisation de la vidéo ou le traitement desstats est, par exemple, l’une des compétences devenuesindispensables. Parmi les obligations d’un entraîneur, lacommunication externe est là encore une activité qui entre dans lechamp de compétences du technicienmoderne. Il n’y a pasencore de formation dédiée à la communication d’un entraîneurqui pourrait être généralisable. Le recours aux techniques demedia training est parfois utilisé par le biais des clubs, desfédérations pour une équipe nationale ou directement par lecoach à titre personnel. Le contexte des clubs, la personnalité desentraîneurs, leur parcours d’ancien joueur, leur expérience deconsultant médias et surtout unemanière de s’exprimer en publicfont que chaque cas est unique. Il existe des cas d’école commecelui de JoséMourhino pour qui la communication est clairementsamarque de fabrique et probablement un atout dans sastratégie demanagement de sa réputation. En France, le casd’école est celui deMarcelo Bielsa, véritable idole du Vélodromeet principal sujet traité par l’ensemble desmédias français. Bielsaest l’un des rares entraîneurs à avoir évité les obligations deprésentation auxmédias de début de saison, ses prises de paroleet samanière de s’exprimer ne font pas ressortir une compétencede communicant modèle...Pourtant, sa réputation personnelle est exceptionnelle si bienque certains observateurs se demandent si, en plus de sescompétences sportives reconnues par ses pairs et ses joueurs, ilne serait pas aussi un expert en communication. Nous pensonsque ce n’est pas le cas, mais qu’il est possible de démontrer parla théorie que le contexte positif en termes de résultats sportifs,couplé à la forte attente d’un redressement de l’équipeolympienne, en fait l’entraîneur le plus attractif actuellement enLigue 1. Parmi les théories les plus opérationnelles, lestechniques de management de la réputation d’un individu,d’une entreprise ou d’une ville et d’un pays sont de plus en plusà la mode. Le Reputation Institute, créé et dirigé par le professeurCharles Fombrun, est la référence en la matière. Selon cetinstitut, il existe cinq leviers communicationnels pour développerune bonne réputation.1. Être visible. Bielsa l’est malgré lui, compte tenu de sa fonction,du contexte de son arrivée et du fait que l’OM est un clubextrêmement médiatique.2. Être transparent. Bielsa est peut-être même trop transparenten ce qui concerne ses choix, le recrutement, son contrat ou bienencore sa relation avec les dirigeants de l’OM.3. Être authentique. Bielsa est un personnage totalementauthentique. Son histoire personnelle en Argentine aux Newell’sOld Boys, son club de cœur, en est une parfaite illustration.4. Être cohérent. Bielsa fait ce qu’il dit, il a une logique de travailconnue et une approche tactique du football qu’il appliquepartout où il est passé.5. Être distinctif. Son surnom «el Loco» est une marque defabrique, sa relation distante avec ses joueurs, les résultats et sacélèbre glacière devenue un objet identitaire au personnage.Bielsa fait parler et parle peumais ce qui se dit sur lui est positifet attractif. En tant que personnalité authentique du football,l’entraîneur argentin est réputé naturellement. Lorsque lesrésultats sportifs sont là, ses traits de personnalité sont mis enlumière et surexprimés dans un stade et une ville réputés poursa passion pour son club. n

LIONELMALTESEMAÎTRE DECONFÉRENCES AIX-MARSEILLEUNIVERSITÉ - KEDGE BUSINESS SCHOOL

BIELSA, UNE RÉPUTATIONAUNATUREL

Tout le monde devrait regarder notreclasico national. Même certainsjoueurs concernés? Qui sait... Fiction.

«Mario, tu viens, on va boire un coup?– Où ça?– Au Clasico, près du Parc?– T’es fou? On va nous repérer. Et puis, si ça setrouve, on va quandmême jouer!– Ah ouais? Tu crois ça, toi? Tu as combien detemps de jeu derrière toi?– Euh... 237 minutes! Six bouts de match. Et toi,Clément?– 62! J’te bats! Quatre bouts de match. Qui ditmieux?– Euh... Rabiot?– T’as raison. En attendant, allons nous en jeterun petit. Garçon! Au fait, qu’est-ce que tu bois?– Un chouchen. Pour me rappeler le temps oùj’étais titulaire à Lorient. Ça fait déjà deux ans.Quand je pense que mon président m’a alorsvendu à la dernière minute du dernier jour dumercato à son pote marseillais.– J’en ai entendu parler à l’époque, oui. Moi,j’ai été prêté au TFC car que je ne jouais plusau PSG. J’ai trouvé du temps de jeu. Mais jesuis revenu et là, je crois que je vais connaîtreune saison à peu près vierge. Ma traversée dudésert qatari. Garçon: un draquito mojito. Unespécialité de là-bas... À la tienne! C’est sûr quece PSG-OM, c’est la Guerre des étoiles.– Nous ce serait plutôt Camping 2, non?– Tu te fais du mal; tu nous fais du mal.Garçon! Un autre! On sera bien ici, dimanchesoir, pour regarder le match sur grand écran,non? Cool. Les Ibra, Verratti, David Luiz, les

CHRONIQUE

Aubardu clasico

«Les Ibra, Verratti,Nkoulou, Gignac,on ne les aurajamais vusd’aussi près.»

PAR JEAN-MARIE LANOË

Mandanda, Nkoulou, Gignac pour nous toutseuls. On ne les aura jamais vus d’aussi près,en match. Avec la “palette à Doudouce” pourbien nous faire comprendre comment on joue.– Et nos entraîneurs, donc… La touillette deLaurent Blanc dans le café de Bielsa...– Pas mal... C’est de toi?– Non, j’ai vu Ruquier la faire l’autre samedisurOn n’est pas couché. Je t’arrête tout desuite, on jouait le lendemain, dimanche, àLyon. C’est pour ça... Mais, dis donc, Clément,tu n’as pas peur que Canal+ nous invite quandmême sur le plateau pour quelquescommentaires?– Pas de danger. On n ‘intéresse pluspersonne. Un autre, garçon!– Attends! Mon iPhone 6 Plus crépite! Waouh!Je suis convoqué pour dimanche par Bielsa!– Moi aussi! Regarde mon Samsung GalaxyNote 4! Signé Laurent Blanc! Tu crois qu’on vajouer au moins quelques minutes l’un contrel’autre sur le terrain? Tiens? Voilà Rabiot!Qu’est-ce qu’on t’offre?» n

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