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Les conseillères
et les conseillers
pédagogiques
du collégial
La fonction de CP,
son origine
et son évolution
Lise St-Pierre, professeureUniversité de Sherbrooke / PERFORMA
Janvier 2005
Des copies de ce rapport peuvent être obtenues auprès de Performa/Université de Sherbrooke Performa/Université de Sherbrooke Campus de Longueuil 1111, rue St-Charles Ouest Tour Ouest, 5e étage Longueuil, Québec J4K 5G4 Télécopieur : 450-463-1839 Téléphone : 450-463-1835, poste 1-1742 ou directement auprès de l’auteure : Lise.St-Pierre@USherbrooke.ca Téléphone : 819-821-8000, poste 1029 Éditions de l’Université de Sherbrooke ISBN 2-7622-0154-3
REMERCIEMENTS
Nous remercions Madame Karina Loignon pour la recherche en bibliothèque, le
traitement des références et une première analyse d’une partie de la documentation,
Monsieur J.P. Lefort de la Direction de la recherche, des statistiques et des indicateurs,
Secteur de l’information et des communications du ministère de l’Éducation pour la
transmission et l’explication des statistiques, Monsieur Roland Desrosiers du Centre
d’animation, de développement et de recherche en éducation (CADRE) pour les
documents qu’il nous a fournis et Madame Isabelle Laplante du Centre de documentation
collégiale pour son aide à la recherche documentaire.
Nous remercions également Messieurs Jean-Pierre Goulet et Paul Forcier, conseillers
pédagogiques de la première heure dans les collèges ainsi que Madame Andrée Cantin,
conseillère pédagogique, tous acteurs et témoins du développement de la pédagogie
collégiale au Québec, qui ont bien voulu valider le rapport.
Monsieur André Gaudreau, également conseiller pédagogique maintenant retraité, nous a
éclairée sur l’histoire mouvementée des premiers conseillers pédagogiques et de leurs
précurseurs, les conseillers en recherche et expérimentation.
Nous sommes redevables à monsieur Jean-Pierre Goulet d’avoir gracieusement réalisé la
révision linguistique du document, à Madame Camille Beaulieu pour l’aide à la mise en
pages et les photographies de la page couverture, à Madame Céline Leblond pour le
travail final d’édition et à Image-O-laser pour le graphisme de la page couverture.
Enfin, nous remercions l’Université de Sherbrooke qui a permis la réalisation de ce
travail par une aide financière et PERFORMA pour son soutien matériel.
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TABLE DES MATIÈRES Remerciements..............................................................................................................1 Table des matières.........................................................................................................3 Liste des tableaux..........................................................................................................5 Introduction...................................................................................................................7 Chapitre 1. Aspects méthodologiques .......................................................................11 1.1 Objectifs................................................................................................................11 1.2 Population visée ....................................................................................................13 1.3 Démarche suivie....................................................................................................15 Chapitre 2. La fonction de conseillère ou de conseiller pédagogique au collégial ...17 2.1 Une description large de la fonction .....................................................................17 2.2 Quelques statistiques incomplètes ........................................................................20
2.2.1 Personnel professionnel .........................................................................20 2.2.2 Conseillères et conseillers pédagogiques ...............................................24
2.3 Des conditions d’embauche exigeantes ................................................................25 2.4 Les compétences et les qualités requises ..............................................................27 2.5 Une formation initiale adaptée quasi inexistante ..................................................30 2.6 Une formation continue limitée et non structurée.................................................32 2.7 Une identité professionnelle à définir ...................................................................35 2.8 Des questions sans réponses satisfaisantes ...........................................................38 Chapitre 3. Origine et évolution de la fonction .........................................................43 3.1 Origine de la fonction ...........................................................................................44 3.2 Au collégial, départ hésitant et fébrile (1967-1975) .............................................46
3.2.1 Animation, recherche et expérimentation ..............................................48 3.2.2 La naissance des services .......................................................................51 3.2.3 On fait le bilan........................................................................................55
3.3 Vitesse de croisière (1975-1993) ..........................................................................59 3.3.1 La naissance de Performa.......................................................................60 3.3.2 L’essor de la pédagogie collégiale .........................................................63
3.4 Zone de turbulence (1993-2004)...........................................................................66 3.4.1 Le renouveau au collégial ......................................................................68 3.4.2 De nouvelles tâches pour les CP ............................................................72 3.4.3 Un rôle à recadrer...................................................................................73
3.4 Des modifications amorcées .................................................................................75 3.5 Une évolution de la fonction précisée, une évolution des conceptions et des pratiques à approfondir .....................................................................................78
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Chapitre 4. Tendances et pistes de recherche............................................................83 4.1 Des tendances découlant des modifications amorcées..........................................83
4.1.1 Le paradigme de l’apprentissage............................................................83 4.1.2 Le travail enseignant, une responsabilité individuelle et collective.......84 4.1.3 L’accompagnement des innovations et du développement
professionnel .........................................................................................86 4.1.4 La professionnalisation des métiers de l’éducation ...............................87 4.1.5 L’autonomie des collèges et l’imputabilité ............................................89
4.2 Pistes de recherche................................................................................................92 Conclusion ..................................................................................................................95 Références bibliographiques.......................................................................................99 Annexe 1. Descripteurs ayant servi à la recherche documentaire ............................105 Annexe 2. Grille d’analyse de la documentation ......................................................109
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LISTE DES TABLEAUX Tableau 1. Situation des conseillers pédagogiques de l’enseignement ordinaire parmi les catégories du personnel des collèges publics (cegeps) ...............................14 Tableau 2. Effectif du personnel professionnel (cégeps selon le statut d’emploi et le sexe (en nombre d’individus).............................................................................21 Tableau 3. Âge moyen des personnels enseignant et professionnel selon le statut d’emploi et le sexe en 2001-2002 (cégeps)................................................................22 Tableau 4. Données socio-démographiques (en % ) pour l’ensemble des professionnels des cégeps entre 1996 et 2002 ............................................................22 Tableau 5. Données socio-démographiques ( en % ) pour l’ensemble du personnel enseignant des cégeps entre 1996 et 2002..................................................23 Tableau 6. Nombre de conseillers pédagogiques (cégeps) de 1996 à 2002 (en ETC : équivalent temps complet sur la base des salaires payés) ..........................25
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INTRODUCTION
De nombreuses réformes dans plusieurs pays, et cela à tous les ordres d’enseignement,
caractérisent l’époque actuelle dans le domaine de l’éducation. Pour mettre en œuvre ces
réformes, on compte sur l’innovation, à la fois curriculaire et pédagogique. Les
conseillers et les conseillères pédagogiques sont des personnes clés, au cœur de ces
changements. Pourtant, peu de recherches ont porté sur cette fonction. De plus, les
quelques travaux recensés traitent rarement de la situation des conseillers pédagogiques
du collégial et de l’enseignement supérieur dans son ensemble. Qu’est-ce que la fonction
de conseiller pédagogique exactement ? D’où vient-elle ? De quels besoins est-elle issue ?
Au collégial, comment a-t-elle évolué ? Peut-on distinguer des caractéristiques
particulières à la fonction pour les différents ordres d’enseignement ? Qui sont les
conseillers pédagogiques ? Comment le devient-on ? Quels sont leurs acquis expérientiels
et scolaires ? Quelles sont leurs tâches ? Quels niveaux de responsabilité leur confie-t-
on ? Comment reconnaît-on leur contribution au développement professionnel des
enseignants et au développement institutionnel des établissements ? Comment
perçoivent-ils eux-mêmes leur rôle, leurs difficultés, leur identité professionnelle… ? Ces
questions méritent qu’on s’y attarde pour mieux comprendre les exigences de la fonction
et permettre aux conseillères et aux conseillers pédagogiques de jouer efficacement leur
rôle dans le développement pédagogique des systèmes scolaires.
On demande à ces acteurs clés des réformes, selon les cas, de soutenir l’élaboration des
innovations requises et leur implantation, voire d’en évaluer la mise en œuvre et les
impacts et de stimuler, former et accompagner le personnel enseignant. Ces tâches
exigent des compétences variées, complexes, nouvelles. En effet, les modalités de soutien
au développement professionnel du personnel enseignant et au développement
institutionnel (curriculaire et pédagogique) des établissements subissent elles-mêmes des
modifications importantes. Ces modalités de soutien comprennent, entre autres, des
activités d’accompagnement et des activités de formation qui tendent de plus en plus à se
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fondre l’une dans l’autre. À cet égard, on observe un passage d’activités individuelles,
ponctuelles, sur des thèmes spécifiques, à des activités collectives, dans une perspective
d’accompagnement des changements dans les écoles (Solar, 2001). Les contenus de ces
activités sont objets de négociation entre les acteurs (établissements, enseignants,
universités, consultants…) en lien avec la mise en œuvre de changements, plutôt
qu’objets d’apprentissage souvent décontextualisés faisant partie d’activités pré-
construites. Diverses formes de réflexion sur l’action et d’échanges entre pairs autour de
problèmes du terrain sont privilégiées. Les conseillers pédagogiques se réclament du
socioconstructivisme et tentent d’articuler plus étroitement théories et pratiques
enseignantes. Plutôt que de s’inscrire à des activités isolées, les acteurs négocient un plan
de perfectionnement pouvant s’étendre sur plusieurs années ; ce plan peut même conduire
les formateurs à accompagner l’enseignant dans sa classe.
Ces nouvelles formes d’interventions bouleversent les façons de faire des conseillères et
des conseillers pédagogiques qui doivent s’appuyer sur des cadres conceptuels pertinents,
cohérents avec les orientations des réformes, et développer des cadres opérationnels
efficaces et flexibles pour accompagner le personnel scolaire. Comme pour les autres
acteurs des systèmes d’éducation, il s’agit pour eux de vivre de véritables changements
paradigmatiques modifiant considérablement leurs conceptions et leurs pratiques. Quelles
compétences et quelles qualités doivent-ils posséder pour remplir ces nouveaux rôles ?
Comment se forment-ils, eux ? Comment développent-ils de nouvelles compétences ? De
quelles modalités d’accompagnement et de formation continue disposent-ils, alors que
leurs tâches se sont complexifiées et multipliées ? Jusqu’à quel point partagent-ils les
conceptions qui fondent les réformes qu’ils doivent accompagner ? Qu’en est-il de la
cohérence entre leurs théories professées et leurs théories pratiquées ? Des réponses à ces
questions pourraient permettre de soutenir efficacement le développement professionnel
de cette catégorie de personnel scolaire.
À l’ordre collégial, les conseillères et les conseillers pédagogiques vivent ces
bouleversements de façon plus aigue depuis le début des années quatre-vingt-dix alors
que le ministère de l’Éducation amorçait l’implantation du renouveau au collégial. On
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trouve très peu d’écrits au sujet des impacts de ce renouveau sur la fonction et les tâches
de conseiller pédagogique. On en trouve encore moins sur leurs propres conceptions
pédagogiques et sur la perception qu’ils ont de leur identité professionnelle. Il importe
pourtant de mieux connaître ces aspects étant donné le rôle majeur des conseillères et des
conseillers pédagogiques dans la mise en œuvre et le suivi d’une réforme éducative.
Ce rapport ne répond pas à l’ensemble des questions soulevées. Il propose un tour
d’horizon de l’évolution de la fonction de conseillère ou conseiller pédagogique au
collégial, telle que les écrits recensés permettent de la cerner. Le rapport comprend quatre
chapitres. Les aspects méthodologiques sont présentés en premier lieu. Le deuxième
chapitre porte sur la description de la fonction ; on y trouve aussi quelques statistiques,
les conditions d’embauche de la conseillère ou du conseiller pédagogique ainsi que des
données sur leur formation initiale et sur les moyens de formation continue dont ils
disposent. Le troisième chapitre retrace l’origine de la fonction au collégial et son
évolution depuis 35 ans ; on peut identifier trois périodes distinctes en relation avec
l’évolution du système d’enseignement collégial. Le quatrième chapitre débute avec une
esquisse de quelques tendances déduites de l’évolution de la fonction et de son contexte
d’exercice actuel et se termine avec quelques pistes de recherche pour mieux comprendre
la contribution des CP1 à l’évolution des systèmes éducatifs et soutenir adéquatement leur
développement professionnel. La conclusion propose un résumé des éléments principaux
de cette recension et en relève les forces et les limites.
Les descriptions et les interprétations présentées concernent généralement la fonction de
conseillère ou conseiller pédagogique du secteur de l’enseignement ordinaire à l’ordre
collégial. Les aspects relatifs à l’exercice de cette fonction aux autres ordres
d’enseignement ou dans d’autres sociétés, lorsqu’ils sont mentionnés, servent à éclairer et
à mettre en perspective les particularités de la fonction au collégial. D’autre part, les
spécificités des dossiers attribués à l’un ou l’autre conseiller pédagogique, de même que
la division fréquente, dans la plupart des établissements collégiaux, entre un secteur
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1 Tel que cela est l’usage dans le milieu de l’enseignement collégial, nous utiliserons régulièrement les initiales CP pour désigner les conseillères et les conseillers pédagogiques.
régulier d’enseignement et un secteur de formation sur mesure ont eu pour effet une
segmentation prononcée de la fonction de conseiller pédagogique selon le secteur
d’appartenance. Il est question ici du secteur des programmes réguliers offerts à la
clientèle jeune et adulte, nommé «enseignement ordinaire» dans les documents officiels
du ministère de l’Éducation (MEQ, 2004) et «enseignement régulier» dans certains
collèges, et du secteur des programmes ponctuels, ciblés, offerts à la clientèle adulte et
aux entreprises, nommé «éducation des adultes» par le ministère de l’éducation (MEQ,
2004), et «formation continue» ou «formation sur mesure» dans certains collèges. Le
présent rapport utilise les expressions «enseignement ordinaire» et «éducation des
adultes» pour nommer les deux secteurs. La recherche documentaire n’ayant pas permis
de retracer d’écrits significatifs concernant les conseillers pédagogiques relevant des
services d’éducation des adultes, ce rapport traite presque exclusivement du cas des
conseillères et des conseillers pédagogiques affectés à l’enseignement ordinaire. Enfin, il
faut noter que les écrits recueillis traitent généralement de la situation des conseillers
pédagogiques des cégeps et plus rarement de ceux des autres établissements du réseau
collégial2.
2 En 2002-2003, le réseau collégial comprenait 48 collèges publics (les cégeps : collèges d’enseignement général et professionnel), 24 établissements privés subventionnés, 40 établissements privés avec permis mais non subventionnés et onze autres établissements (conservatoires ou instituts), selon le Rapport de gestion 2002-2003 du ministère de l’Éducation.
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Ce qu’on nommait à l’origine l’enseignement général s’appelle maintenant l’enseignement préuniversitaire, et ce qu’on nommait l’enseignement professionnel est désigné maintenant par l’expression « enseignement technique ». Malgré cela, le substantif « cégep » est conservé pour désigné les collèges publics. L’expression enseignement général réfère maintenant à la composante de formation générale des programmes d’études qui comprend des cours de français, de philosophie, d’anglais et d’éducation physique que tous les élèves sont tenus de suivre et de réussir, peu importe leur programme d’études.
Aspects méthodologiques
Chapitre 1. ASPECTS MÉTHODOLOGIQUES
Cette recherche documentaire a été réalisée entre janvier 2003 et mai 2004. La rédaction
et la validation du rapport se sont terminées à l’automne 2004. Elle vise à mieux cerner la
fonction de conseillère et conseiller pédagogique au collégial pour comprendre sa
contribution à l’évolution du système éducatif québécois, anticiper des tendances dans
son évolution et dégager d’éventuelles pistes de recherche. À l’instar d’autres études en
cours de réalisation à PERFORMA3, ce travail contribue à préciser des modalités de soutien
au développement professionnel des personnes qui exercent la fonction. Voici les
objectifs poursuivis, la population visée et la démarche suivie.
1.1 Objectifs
L’étude vise les objectifs suivants :
1. Décrire la fonction de conseillère ou conseiller pédagogique au collégial ;
2. Décrire les caractéristiques des conseillères et des conseillers pédagogiques du
collégial ;
3. Retracer l’origine et l’évolution de cette fonction ;
4. Mettre en évidence les questions sans réponse ;
5. Dégager des problématiques, des tendances et des pistes de recherches.
Au départ, nous souhaitions aussi comparer la fonction de conseiller pédagogique au
collégial et les caractéristiques de ceux qui l’exercent à ce qu’on trouve à d’autres ordres
d’enseignement ou dans d’autres sociétés. Cependant, au cours des travaux, les
ressources limitées consacrées nous ont conduite à écarter cet objectif. L’atteinte de
chacun des cinq objectifs demande de répondre à plusieurs questions :
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3 PERFORMA est une structurelle organisationnelle, qui existe depuis 30 ans, basée sur un partenariat entre l’Université de Sherbrooke et la quasi totalité des cégeps ainsi que quelques autres établissements collégiaux. Sa mission est d’offrir du perfectionnement pédagogique et didactique principalement au personnel enseignant du réseau collégial. Les conseillers pédagogiques qui agissent en tant que répondants locaux dans les établissements collégiaux pour l’Université de Sherbrooke, sont des acteurs clés de ce partenariat. PERFORMA sera décrit plus en détail au chapitre trois.
1. Description de la fonction :
1.1 Comment les instances officielles présentent-elles cette fonction ?
1.2 Quelles tâches, rôles, responsabilités sont dévolues aux conseillères et aux
conseillers pédagogiques ?
1.3 Quelles sont les exigences officielles et officieuses à l’embauche ?
1.4 Parmi les questions précédentes, lesquelles ne trouvent pas de réponses
satisfaisantes à la suite de la recherche documentaire ?
2. Caractéristiques des conseillères et conseillers pédagogiques :
2.1 Quel est l’effectif des conseillères et conseillers pédagogiques de cégep ?
2.2 Quelles sont les caractéristiques sociodémographiques de ces personnes ?
2.3 Quelle formation initiale mène à cette profession ?
2.4 Quelles compétences et qualités personnelles possèdent les conseillères et les
conseillers pédagogiques ?
2.5 De quelles modalités de formation continue disposent-ils ?
2.6 Quelles sont leurs perceptions relativement à leur identité professionnelle ?
2.7 Parmi les questions précédentes, lesquelles ne trouvent pas de réponses
satisfaisantes à la suite de la recherche documentaire ?
3. Origine et évolution de la fonction :
3.1 Quels besoins ont été à l’origine de la fonction de CP au collégial ?
3.2 Comment a-t-elle évolué depuis 35 ans ?
3.3 Comment se situe cette évolution au regard de l’évolution de l’ordre collégial
lui-même ?
3.4 Parmi les questions précédentes, lesquelles ne trouvent pas de réponses
satisfaisantes à la suite de la recherche documentaire ?
4. Tendances et pistes de recherche futures :
4.1 Quelles tendances peut-on esquisser en ce qui concerne l’évolution de cette
fonction ?
4.2 Quelles recherches pourraient être conduites pour mieux comprendre le rôle
de cette fonction dans l’évolution du système éducatif collégial québécois ?
4.3 Quelles recherches pourraient être conduites pour mieux soutenir le
développement professionnel des personnes qui exercent cette fonction ?
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Aspects méthodologiques
Le rapport fait état des réponses que la recherche documentaire a permis de trouver à
certaines de ces questions et identifie celles qui sont restées sans réponse satisfaisante.
1.2 Population visée
Pour situer nos propos dans leur contexte, mentionnons que le réseau collégial québécois
existe depuis 1967. Il est composé d’établissements d’enseignement postsecondaire.
Après leur onzième année de scolarité obligatoire, les étudiants et les étudiantes y
séjournent deux ans, s’ils sont admis dans un programme préuniversitaire qui les prépare
à des études universitaires, et trois ans, s’ils sont plutôt admis dans un programme de
formation technique qui les conduit au marché du travail, ou dans certains cas, à des
études universitaires. «En 2002-2003, le réseau collégial offrait huit programmes de
formation préuniversitaire, 115 programmes de formation technique et plus de 1000
programmes menant à l’obtention d’une attestation d’études collégiales ainsi que des
sessions d’accueil, d’intégration et de transition» (MEQ, 2004). En 2002-2003, le réseau
comprenait 48 collèges publics (les cégeps : collèges d’enseignement général et
professionnel), 24 établissements privés subventionnés, 40 établissements privés avec
permis mais non subventionnés et onze autres établissements (conservatoires ou instituts).
Selon le Rapport de gestion 2002-2003 du ministère de l’Éducation, le réseau collégial
offrait ses services de formation à 163 056 étudiants à l’enseignement ordinaire et 36 411
étudiants à l’éducation des adultes.
Pour l’année scolaire 2001-2002, le personnel des établissements collégiaux se divise
selon les catégories du tableau 1. Les conseillers et les conseillères pédagogiques font
partie du personnel professionnel et peuvent être affectés au secteur de l’enseignement
ordinaire ou à celui de l’éducation des adultes. La population visée par cette étude est
celle des conseillères et des conseillers pédagogiques, et le plus souvent, comme nous
l’avons mentionné précédemment, les données recueillies concernent ceux de
l’enseignement ordinaire dans les collèges publics (cégeps).
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Tableau 1. Situation des conseillers pédagogiques de l’enseignement ordinaire
parmi les catégories du personnel des collèges publics (cégeps)
Catégories de personnel Et effectif en ETC
Cégeps
(2001-2002) Établissments
privés (automne 2002)
Enseignement ordinaire
(Corps d’emploi du personnel professionnel)
Éducation des adultes
Encadrement 924
Encadrement
280
Conseiller
d’orientation
Conseiller en
inform. scol. et
profession.
Conseiller
pédagogique
Agent de la
gestion
financière
Bibliothécaire
Analyste Psychologue Aide
pédagogique
individuel
Conseiller à la
vie étudiante
Animateur de la
pastorale
Spécialiste en
moyens et
techniques
d’enseignement
Conseiller en
mesure et
évaluation
Professionnel
1137 Professionnel
262
Attaché
d’adminis-
tration
Travailleur
social
Agent
d’information
Des conseillers pédagogiques sont rattachés spécifiquement à ce secteur. Pour ce qui est des autres professionnels, ils exercent souvent leurs fonctions auprès de toute la clientèle des collèges.
De soutien 5220
De soutien
581
Enseignant
13355 Enseignant
1454
Total
20636
Total
2577
Sources des données :
Pour les données quantitatives : Rapport annuel de gestion 2002-2003, (MEQ, 2004)
Pour les dénominations des corps d’emploi du personnel professionnel : Plan de classification – Personnel professionnel – Collèges d’enseignement général et professionnel – 2000. (CPNC, 2000)
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Aspects méthodologiques
1.3 Démarche suivie
Le catalogue de la bibliothèque de l’université de Sherbrooke, les banques de données
habituellement consultées dans le domaine de l’éducation4 et le catalogue du Centre de
documentation collégiale ont été interrogés à partir de diverses combinaisons de
descripteurs (annexe 1). Certains organismes (CADRE5, PERFORMA5, MEQ5) ont
également été sollicités pour enrichir notre banque de documents.
Nous l’avons déjà souligné, il existe peu d’écrits scientifiques sur la fonction de
conseiller pédagogique au Québec, quel que soit l’ordre d’enseignement considéré ; cela
est encore plus vrai de l’enseignement supérieur, dont fait partie le collégial. La
documentation recensée a permis de trouver quelques rares rapports de recherche dans ce
domaine. Nous avons également exploité quelques rapports annuels d’activités des
premiers « Services de recherche et expérimentation » des collèges, du début des années
soixante-dix dont les responsables ont été les premiers conseillers pédagogiques au
collégial. Divers rapports produits par PERFORMA et des comptes rendus de différentes
instances de cet organisme ont servi à mieux retracer l’évolution de la fonction de
certains conseillers pédagogiques à cet ordre d’enseignement. Les rapports de gestion du
MEQ au cours des dernières années ont aussi été consultés, en particulier pour les
statistiques qu’ils présentent.
On trouve plus facilement des témoignages de conseillers pédagogiques sur différents
aspects de leur fonction dans des revues professionnelles comme Vie pédagogique et
Pédagogie collégiale, plus particulièrement pour ce qui est de la fonction de conseiller
pédagogique au primaire et au secondaire. Nous avons aussi utilisé ce matériel pour
illustrer plus efficacement notre propos. Les rapports annuels des services éducatifs des
cégeps, d’autres écrits de différents collèges, des études des syndicats ou d’autres du
4 ERIC (Education Resources Information Centre), FRANCIS et REPÈRE. 5 CADRE : Centre d’animation, de développement et de recherche en éducation PERFORMA : perfectionnement et formation des maîtres MEQ : ministère de l’Éducation du Québec.
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Le CADRE et PERFORMA seront présentés plus en détail au chapitre trois.
MEQ pourraient éventuellement permettre de répondre plus précisément aux questions à
l’origine de ce travail si le besoin s’en faisait sentir.
Une grille d’analyse a servi à faire un choix de documents pertinents, puis à dépouiller les
documents retenus (annexe 2). Cette grille a été construite à partir des questions dérivées
des objectifs de la recherche. Le rapport ne fournit pas d’analyse des dimensions de la
grille pour lesquelles trop peu d’informations a été tirée de l’analyse des écrits.
À la suite de la rédaction de sa version préliminaire, le rapport a été soumis à trois
personnes qui ont exercé la fonction de conseiller pédagogique ou qui ont suivi son
évolution au cours des 35 années de vie du réseau collégial. Nous avons demandé à ces
témoins de relire et valider les données et les interprétations proposées. Leurs
commentaires ont permis de nuancer certains propos, de préciser certaines informations
et d’en ajouter d’autres. Ils ont également fourni des suggestions au sujet de sources
supplémentaires pour enrichir les données.
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La fonction de conseillère ou de conseiller pédagogique au collégial
Chapitre 2. LA FONCTION DE CONSEILLÈRE OU DE CONSEILLER
PÉDAGOGIQUE AU COLLÉGIAL
2.1 Une description large de la fonction
Il ressort des descriptions officielles de leur fonction que les conseillers pédagogiques,
tous ordres d’enseignement confondus, exercent leur activité à la fois auprès du personnel
cadre et du personnel enseignant des établissements scolaires, parfois également auprès
du personnel professionnel. Ils agissent en tant que consultants, animateurs,
coordonnateurs, chercheurs, évaluateurs, développeurs… comme on peut le déduire de la
description de la fonction sur le site Mon emploi (2003, données de Emploi-Québec
(GRICS, 2001)) et dans la Classification nationale des professions (Développement des
ressources humaines Canada (DRHC, 2001)).
Selon Emploi Québec, la personne conseillère pédagogique est celle qui
«renseigne et conseille la direction et le personnel enseignant des établissements scolaires sur les programmes d’enseignement, l’organisation des cours et le choix des méthodes d’enseignement et du matériel scolaire. Elle s’occupe, entre autres, de l’évaluation continue des programmes et méthodes, du perfectionnement du personnel enseignant et des rencontres avec celui-ci. Elle veille à apporter tout le soutien nécessaire au personnel enseignant et s’efforce d’être à l’affût des changements et innovations pédagogiques afin de favoriser le développement et la qualité de l’enseignement». (GRICS, 2001)
Selon la Classification nationale des professions, les conseillères et conseillers
pédagogiques appartiennent à la profession « Agents/agentes de programmes,
recherchistes et experts-conseils/expertes-conseils en politiques de l’enseignement »
(DRHC, 2001). Cette classification propose divers exemples d’appellation pour l’emploi,
entre autres : agent de politiques d’enseignement, agent de programmes d’enseignement,
conseiller pédagogique, coordonnateur de l’éducation spécialisée, de programmes
d’enseignement ou de programmes d’extension des services éducationnels, élaborateur de
programmes d’études, planificateur de programmes d’études, recherchiste en
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enseignement et superviseur de politiques d’enseignement. Ces personnes exercent une
partie ou l’ensemble des fonctions suivantes :
o « Effectuer des recherches, rédiger des rapports et des politiques, et gérer
des programmes d’éducation; o Évaluer les programmes d’étude et recommander des améliorations o Déterminer la structure, le contenu et les objectifs des nouveaux
programmes o Effectuer des analyses statistiques en vue de déterminer les coûts et
l’efficacité des politiques et des programmes d’éducation o Fournir des services permanents de perfectionnement professionnel, de
formation et de consultation aux enseignants et aux autres professionnels dans l’ensemble des secteurs public et privé
o Élaborer le matériel d’enseignement et d’autres ressources en vue de l’enseignement
o Faire des exposés lors de congrès, d’ateliers et de colloques o Surveiller, s’il y a lieu, le travail d’autres agents de programmes,
recherchistes et experts-conseils en politiques de l’enseignement o Administrer, s’il y a lieu, des programmes de tests et d’évaluation
spécialisés. » (DRHC, 2001)
Ces données concernent tous les ordres d’enseignement comme nous l’avons dit
précédemment. Ce qui suit précise la description de la fonction à l’ordre collégial. Le
système de classification des emplois des collèges (CPNC, 1989, 2000) regroupe dans la
catégorie de professionnels, des emplois qui exigent normalement un diplôme
universitaire terminal de premier cycle. La « définition de l’emploi-type de
professionnel », décrit les tâches de cette personne ainsi : elle est chargée de réaliser des
objectifs, des politiques et des programmes définis par le collège selon certains standards,
en ayant le choix des moyens, des méthodes et des processus d’intervention. Pour ce
faire, elle conseille le personnel cadre concerné par le secteur d’activités où elle œuvre,
elle peut être appelée à participer à des études ou des travaux à l’intérieur d’équipes
multidisciplinaires et elle coordonne et participe aux travaux menant à la réalisation des
programmes d’activités dont elle est chargée.
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La fonction de conseillère ou de conseiller pédagogique au collégial
Les conseillères et les conseillers pédagogiques sont chargés plus spécifiquement de
« fonctions de conseil, d’animation, de support et de rétroaction auprès du personnel cadre responsable des services d’enseignement, auprès des enseignants et des autres professionnels. Ces fonctions s’exercent relativement aux dimensions suivantes : o l’implantation, la coordination, le développement et l’évaluation des
programmes d’enseignement ; o l’organisation scolaire ; o la recherche ; o le support et l’animation pédagogique et andragogique ; o le choix et l’utilisation des méthodes, des techniques et du matériel
didactique ; o la reconnaissance des acquis ; o les applications pédagogiques de l’ordinateur » (CPNC, 2000, p. 14-15).
Le Plan de classification mentionne également quelques attributions caractéristiques de
la fonction. L’ensemble de la description (deux pages) n’a pas changé depuis plusieurs
années. En effet, on trouve une description identique dans le Plan de classification de
1989 (CPNC, 1989).
En somme, le conseiller pédagogique du collégial est un « consultant interne » (Denis &
Ducharme, 1988; Pratte, 2001), lié à un établissement ; cela le distingue des conseillers
pédagogiques aux ordres primaire et secondaire. « Cette institution [le collège] s’attend à
ce qu’il endosse ses finalités, orientations et pratiques et qu’il fasse la promotion de
celles-ci. Il doit respecter des règles et des procédures, travailler à l’intérieur de
contraintes particulières et répondre à des commandes institutionnelles ou ministérielles »
(Pratte, 2001, p. 32). C’est aussi un consultant dédié à un vaste domaine, c’est-à-dire tout
ce qui touche l’enseignement et l’apprentissage dans un collège. Ajoutons que, « dans le
domaine de la pédagogie collégiale, il existe peu d’expertise écrite6 sur laquelle baser son
action et la conseillère ou le conseiller pédagogique doit souvent s’engager dans des
démarches caractérisées par l’urgence, l’innovation, le risque et l’incertitude » (Pratte,
2001).
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6 L’auteure veut parler d’une base de connaissances validées, diffusée dans des écrits professionnels ou scientifiques.
Ces descriptions s’avèrent très larges, suffisamment pour justifier une attribution de
tâches qui laisse place à une grande variation du niveau de responsabilités (de l’influence
au contrôle et au choix des orientations), du contrôle exercé sur d’autres membres du
personnel (du soutien à l’évaluation), de l’autonomie ou du contrôle exercé sur son
propre travail (de l’autonomie complète à une étroite supervision), du domaine
d’intervention (des technologies à la pédagogie), des tâches assumées (de la consultation
à la rédaction de politiques), etc. Ce caractère large et vague a pu laisser l’impression que
les conseillères et les conseillers pédagogiques constituent une catégorie de personnel
polyvalent, toujours prêt à répondre à des besoins de tous ordres (Laliberté, 1995b) et
ouvrir possiblement la porte aux modifications fréquentes des tâches attribuées à ces
personnes sans qu’elles puissent exercer le contrôle désiré sur l’évolution de leur
fonction.
2.2 Quelques statistiques incomplètes
Cette section propose d’abord un portrait du personnel professionnel des collèges, puis
celui des conseillères et conseillers pédagogiques. Rappelons que la section 1.2 a déjà
livré quelques données générales sur les établissements collégiaux et leur personnel.
2.2.1 Personnel professionnel
En termes d’individus, les données disponibles se rapportent à l’ensemble du personnel
professionnel des cégeps. Le tableau 2 montre l’évolution de l’effectif du personnel
professionnel permanent et non-permanent pour la période 1997-2002. Ces données
révèlent qu’au cours de ces cinq années le nombre total de personnes, membres du
personnel professionnel au collégial public a augmenté de 29 %, passant de 1485 à 1915.
Page 20
La fonction de conseillère ou de conseiller pédagogique au collégial
Tableau 2. Effectif du personnel professionnel (cégeps) selon le statut d’emploi et le sexe (en nombre d’individus)
statut d’emploi
permanent statut d’emploi non- permanent TOTAL
hommes femmes hommes femmes hommes
femmes TOTAL
1997-1998 503 372 246 364 749 736 1485 1998-1999 481 383 221 333 702 716 1418 1999-2000 499 411 272 415 771 826 1597 2000-2001 485 441 339 571 824 1012 1836 2001-2002 455 447 382 631 837 1078 1915
Source : Statistiques de l’éducation, édition 2003, site du MEQ : http://wwwgouv.meq.qc.ca/stat
Le Rapport de gestion du MEQ 2002-2003 présente l’évolution de l’effectif des cégeps
sur la base des ETC (équivalent temps complet sur la base des salaires). Il mentionne que
si la hausse globale du personnel des cégeps de 1999-2000 à 2001-2002 a été de 3,9 %,
passant de 19 869 à 20 636 ETC, le personnel professionnel est la catégorie qui a connu
la plus forte hausse, à savoir une augmentation de 11,8 %, passant de 1017 à 1137 ETC.
Le même phénomène apparaît dans les établissement collégiaux privés. Une analyse plus
fine nous apprend que le nombre d’employés permanents de sexe masculin a diminué
alors que le nombre d’employées non-permanentes de sexe féminin a presque doublé
(voir les chiffres en caractères gras du tableau 2). Les emplois professionnels s’avèrent de
plus en plus précaires. Depuis l’an 2000, le nombre de personnes ayant un statut d’emploi
non-permanent dépasse celui des individus qui occupent un emploi permanent ; ce sont
les femmes qui occupent en plus grande partie ces emplois non permanents.
Le tableau 3 compare l’âge du personnel professionnel et celui du personnel enseignant
en 2000-2001. Les membres du personnel professionnel non-permanent ont en moyenne
quinze ans de moins que les permanents alors que cette différence n’est que d’une dizaine
d’années pour le personnel enseignant. Le personnel professionnel permanent est
sensiblement du même âge que le personnel enseignant permanent ; par contre l’âge
moyen du personnel professionnel non permanent est inférieur d’environ cinq ans à celui
des enseignants non permanents.
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Tableau 3. Âge moyen des personnels enseignant et professionnel selon le statut
d’emploi et le sexe en 2001-2002 (cégeps)
statut d’emploi
permanent statut d’emploi non-permanent TOTAL
hommes femmes hommes femmes permanent Non
permanent Personnel enseignant 51,4 48,9 40,7 39,3 50,3 40,0
Personnel professionnel
51,2
47,8
34,3
35,3
49,5
35,0
Source : Statistiques de l’éducation, édition 2003, site du MEQ : http://wwwgouv.meq.qc.ca/stat
On peut constater qu’à partir de 1998, l’ensemble du personnel professionnel au collégial
comprend plus de femmes que d’hommes alors qu’on remarque l’inverse pour le
personnel enseignant (tableaux 4 et 5). On note encore qu’à partir de 1999, la proportion
de jeunes professionnels augmente plus rapidement et qu’au même moment, la proportion
de la catégorie des 40-49 ans diminue plus rapidement que chez les enseignants.
Tableau 4. Données socio-démographiques (en %) pour l’ensemble des
professionnels des cégeps entre 1996 et 2002
Ensemble des Données en pourcentage du nombre d'individus Professionnels 1996-1997 1997-1998 1998-1999 1999-2000 2000-2001 2001-2002 sexe fém. 47,9 49,6 50,5 51,7 55,1 56,3 masc. 52,1 50,4 49,5 48,3 44,9 43,7 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 langue français 91,7 91,5 91,3 93,1 93,2 92,3 maternelle anglais 7,5 7,5 7,6 6,4 6,1 7,1 autre 0,8 1,0 1,1 0,5 0,7 0,6 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 âge < 30 12,0 12,1 12,3 14,8 19,5 22,3 30-39 20,7 18,6 18,2 17,3 18,8 17,7 40-49 35,8 36,5 35,2 31,9 28,5 27,8 50-55 20,6 21,9 23,6 22,0 21,1 20,6 56-59 6,9 7,4 7,0 8,4 8,3 7,9 > 59 4,0 3,6 3,7 5,6 3,7 3,8 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0
Source : Système d’information sur les personnels des organismes collégiaux, Direction de la
recherche, des statistiques et des indicateurs, Secteur de l’information et des communications, ministère de l’Éducation du Québec, 2003.
Page 22
La fonction de conseillère ou de conseiller pédagogique au collégial
Tableau 5. Données socio-démographiques (en %) pour l’ensemble du personnel
enseignant des cégeps entre 1996 et 2002
Ensemble des Données en pourcentage du nombre d'individus enseignants et enseignantes 1996-1997 1997-1998 1998-1999 1999-2000 2000-2001 2001-2002 sexe fém. 43,2 43,7 43,8 45,6 46,7 48,1 masc. 56,6 56,3 56,2 54,4 53,3 51,9 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 langue français 87,5 87,0 87,6 89,0 88,1 87,6 maternelle anglais 10,6 10,8 10,3 9,1 10,1 10,6 autre 1,9 2,2 2,1 1,9 1,8 1,8 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 âge < 30 7,8 8,1 8,1 8,3 8,4 8,0 30-39 26,2 26,0 25,3 26,8 24,3 23,9 40-49 37,3 37,1 36,1 33,6 33,4 32,3 50-55 19,2 19,6 20,6 19,4 21,5 22,4 56-59 6,1 5,7 6,1 7,2 8,1 8,9 > 59 3,4 3,5 3,8 4,7 4,4 4,4 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0
Source : Système d’information sur les personnels des organismes collégiaux, Direction de la
recherche, des statistiques et des indicateurs, Secteur de l’information et des communications, ministère de l’Éducation du Québec, 2003.
En somme, la population qui exerce des fonctions professionnelles au collégial augmente
plus rapidement que les autres catégories d’emploi, mais ces emplois sont plus précaires
qu’avant. Cette population se féminise, surtout pour ce qui est des emplois non-
permanents, et rajeunit. Plusieurs professionnels et professionnelles interviennent dans un
rôle de soutien et de conseil auprès de personnes plus âgées qu’elles, et donc,
possiblement, plus expérimentées. Rappelons que nous n’avons pas de données
concernant les caractéristiques sociodémographiques des conseillères et des conseillers
pédagogiques du collégial. Pour le moment, nous ne pouvons pas préciser si ces
conclusions s’appliquent à ce sous-groupe de personnel professionnel.
Page 23
2.2.2 Conseillères et conseillers pédagogiques
En croisant des données provenant de différentes sources, nous obtenons le portrait
suivant des conseillers et conseillères pédagogiques. En 1999, on estimait à 3430 le
nombre de personnes occupant ce poste au Québec (données de Emploi Québec, dans
GRICS, 2001) . Ce nombre comprend autant les personnes qui sont à l’emploi d’un
établissement de formation public ou privé pour tous les ordres d’enseignement qui
relèvent du MEQ que celles qui sont à l’emploi du MEQ lui-même, ou des commissions
scolaires et que celles qui exploitent leur propre entreprise de consultation pédagogique.
Selon les données du tableau 6, un peu moins de 10 % des 3430 conseillers pédagogiques
québécois oeuvraient au réseau public collégial. Il s’agit d’une augmentation remarquable
de l’effectif, car comme on le verra plus loin, en 1969, trois cégeps seulement comptaient
un conseiller pédagogique ou l’équivalent parmi leur personnel, et six ans plus tard, 22
cégeps se partageaient 29 conseillères et conseillers pédagogiques.
Des données fournies par la Direction de la recherche, des statistiques et des indicateurs
du secteur de l’information et des communications du ministère de l’Éducation, montrent
que le nombre de conseillères et de conseillers pédagogiques du collégial (en ETC)
augmente régulièrement depuis quelques années (tableau 6). Nous avons respecté la
classification utilisée par ce service du MEQ pour la présentation des données.
Cependant, parmi les autres corps d’emploi, certains nous paraissent exercer des
fonctions reliées au conseil pédagogique. En 2001-2002, par exemple, 52,6 ETC de
spécialistes en moyens et techniques d’enseignement et 1,2 ETC de conseiller en mesure
et évaluation sont recensés. Dans certains cas, ces fonctions peuvent correspondre à celle
de conseiller pédagogique ; toutefois, on y trouve aussi des bibliothécaires et des
spécialistes de l’audiovisuel qui n’exercent pas un rôle conseil auprès du personnel
enseignant.
Page 24
La fonction de conseillère ou de conseiller pédagogique au collégial
Tableau 6. Nombre de conseillers pédagogiques (cégeps) (en ETC: équivalent temps complet sur la base des salaires payés)
statut temps complet statut temps partiel
1996-1997 322,43 61,31 1997-1998 301,75 54,47 1998-1999 313,57 50,11 1999-2000 329,74 55,74 2000-2001 362,94 66,18 2001-2002 382,60 63,97
Source : Système d’information sur les personnels des organismes collégiaux, Direction de la
recherche, des statistiques et des indicateurs, Secteur de l’information et des communications, ministère de l’Éducation du Québec, 2003.
Des données sociodémographiques précises ne sont pas disponibles au MEQ, ni à la
Fédération des cégeps, pour les conseillers pédagogiques de cégeps seulement. Comme
les conseillers pédagogiques sont fortement représentés parmi le groupe des
professionnels (446 ETC sur 1086 = 41,07 %, en 2001-2002), on pourrait considérer leur
profil comme semblable à celui de l'ensemble des professionnels. Cependant, étant donné
que les conseillers pédagogiques sont souvent d’anciens enseignants, ce qui n’est pas le
cas pour les autres professionnels, on peut penser qu’ils n’ont pas exactement les mêmes
caractéristiques qu’eux, du moins en ce qui concerne l’âge. Étant donné l'absence
d'informations sur ce phénomène, il convient de rester prudent sur la question.
2.3 Des conditions d’embauche exigeantes
Les conditions d’embauche mentionnées lors du recrutement de conseillères ou de
conseillers pédagogiques témoignent de la conception de la fonction selon les
employeurs. Pour occuper la fonction, recherche-t-on un enseignant émérite, un agent de
changement, un coordonnateur, une « courroie de transmission », un animateur, un
consultant, un enseignant pour les enseignants, un chercheur, un « psychothérapeute »
pour les enseignants… ? Les trois écrits mentionnés précédemment rapportent qu’un
diplôme de premier cycle suffit comme condition à l’embauche. Le Plan de classification
(cégeps) mentionne que ce diplôme doit avoir été obtenu dans un champ de spécialisation
Page 25
approprié à l’emploi et Emploi Québec précise qu’il doit s’agir d’une formation en
enseignement, ou en orthopédagogie ou encore en sciences de l’éducation.
Développement des ressources humaines Canada, pour sa part, signale qu’une maîtrise en
éducation ou une formation spécialisée peut être requise et que plusieurs années
d’expérience comme enseignant sont habituellement exigées.
Pour ce qui est des cégeps, quelques exemples de récentes descriptions tirées d’affichage
de postes7 montrent que, les qualifications minimales requises restent un diplôme
terminal de premier cycle dans un champ de spécialisation relié à l’emploi ; on précise
parfois que ce champ doit être en sciences de l’éducation ou encore, dans le cas où on
recherche un conseiller pédagogique à l’éducation des adultes ou dans un secteur
particulier, il peut s’agir d’une formation en administration, en informatique, en sciences
physiques. Il est parfois spécifié qu’un diplôme de 2e cycle serait un atout ou que le
candidat doit posséder une bonne maîtrise de la langue écrite et orale et des nouvelles
technologies de l’information. Souvent, on exige une expérience de trois ans en
enseignement, de préférence au collégial, ou dans le milieu de l’éducation. Même lorsque
cette condition d’embauche n’est pas mentionnée, la liste des exigences particulières pour
le poste, généralement longue, permet de déduire qu’une connaissance approfondie des
dossiers d’actualité au cégep et des façons de les mener, qui ne peut provenir que d’une
expérience significative et engagée dans le milieu collégial, voire dans l’établissement,
est requise. Par exemple, on peut lire :
« Les exigences particulières pour le poste sont : connaissance de l’enseignement collégial et des différents programmes8 ; expérience dans la coordination de travaux d’élaboration, d’implantation,
d’évaluation et de suivi de programmes ;
7 Les affichages de postes consultés proviennent des cégeps François-Xavier-Garneau et Saint-Laurent, depuis 2002. Il ne s’agit pas d’un échantillonnage rigoureux, mais simplement de quelques exemples transmis par des collègues.
Page 26
8 Le réseau collégial dans son ensemble offrait, en 2002-2003, 115 programmes techniques et 8 programmes préuniversitaires (Rapport de gestion du MEQ, 2002-2003). On peut comprendre dans le cas présenté qu’une connaissance des programmes offerts par le collège François-Xavier-Garneau (17 programmes techniques et 4 programmes préuniversitaires) est recherchée. Il faut noter que les postes de conseillers pédagogiques sont souvent comblés par des personnes déjà à l’emploi du collège et qui, par conséquent, connaissent bien un certain nombre des programmes qui y sont offerts, sinon tous.
La fonction de conseillère ou de conseiller pédagogique au collégial
compétence à assurer un soutien pédagogique au personnel enseignant du milieu collégial ;
connaissances relatives aux plans cadres et aux plans de cours élaborés par compétence ;
capacité d’agir comme personne ressource dans l’élaboration et la gestion de projets ;
capacité démontrée de travailler en équipe et d’animer des groupes de travail ; compétence à communiquer efficacement avec des personnes et des équipes de
travail ; capacité d’utiliser un micro-ordinateur et les moyens électroniques de
communication ; grand esprit d’analyse et de synthèse ; excellente maîtrise de la langue française parlée et écrite. »
(Collège François-Xavier-Garneau, 2002, Concours No : 003-03-1119)
Selon deux études (Pratte, 2001 ; Cantin, 1996), la majorité des conseillères et des
conseillers pédagogiques du collégial sont issus des rangs du personnel enseignant. Ces
personnes ont une connaissance approfondie de la réalité de l’enseignement, mais plus
superficielle ou rare au sujet du processus de changement, du counseling, de la gestion
d’activités de perfectionnement, de la gestion de conflits, de l’animation d’équipes de
travail, etc. D’autres personnes ont une formation ou une expérience en psychologie, en
andragogie, en technologie éducative, en conseil pédagogique à d’autres ordres
d’enseignement, etc. Ces personnes possèdent divers acquis reliés au counseling ou à la
gestion, mais sont moins familières avec la pratique de l’enseignement au collégial. Tous
apprennent leur métier sur le tas et de façon plutôt solitaire (Poirier, Lebrun, Savard, &
Lamontagne, 1999; Pratte, 2001). Poirier et al. relèvent que 94 % des conseillers
pédagogiques considèrent que les compétences qu’ils ont développées relativement à
l’élaboration des activités d’apprentissage proviennent d’apprentissages personnels.
2.4 Les compétences et les qualités requises
Page 27
Les conseillers et les conseillères pédagogiques de tous les ordres d’enseignement, pour
leur part, considèrent que des compétences et des qualités personnelles reliées à la
polyvalence, à la capacité d’adaptation, à la disponibilité, au pragmatisme, à la flexibilité,
au respect des rythmes individuels, à l’ouverture aux autres, et même de la considération
pour autrui, sont nécessaires pour exercer cette fonction (Brossard, 1997; Francoeur,
1994b; Laliberté, 1995a; Larivière & Loof, 1986). « Être au service de la pédagogie, au
service des autres […] c’est accepter au départ de vivre des changements continuels, de
rechercher le nouveau, l’inédit, de se remettre en question et, surtout, de se sentir à l’aise
de travailler avec des enseignants. » (Lalongé, 1982) Il faut être prêt à répondre à des
besoins de tous ordres mais aussi construire une grande crédibilité auprès des
enseignants. « Chaque conseiller pédagogique doit construire patiemment sa crédibilité
qui ne saurait reposer sur une forme autoritaire, mais sur une compétence sans cesse à
renouveler, sur une aptitude à l’empathie, à la communication, à l’établissement des
relations humaines harmonieuses. » (Francoeur, 1994b, p. 30) Les témoignages de
conseillers pédagogiques, quel que soit l’ordre d’enseignement auquel ils interviennent,
sont unanimes sur cette nécessaire crédibilité (Brossard, 1994f, 2002; Le Pailleur, 1996a;
Raymond, 1993). Cette crédibilité peut être difficile à construire pour les jeunes
conseillers pédagogiques qui possèdent moins d’expérience que le personnel qu’ils
doivent accompagner, phénomène en émergence comme l’ont démontré les statistiques
présentées plus haut. Enfin, certains insistent sur la nécessité d’avoir « des convictions
pédagogiques » et des « certitudes non négociables » en éducation pour agir en
« cohérence et continuité » (Brossard, 1994a, 1994b, 1997). Cette exigence (convictions
pédagogiques) peut paraître contradictoire par rapport à d’autres mentionnées par Pratte
(2001). Cette chercheure mentionne l’importance de la « grande tolérance à l’incertitude,
voire à l’ambiguïté, ainsi que de bonnes habiletés de discrimination et de décision » que
doivent démontrer les conseillères et les conseillers pédagogiques du collégial.
Selon une enquête réalisée en 1994 auprès d’un sous-groupe de conseillers pédagogiques9
chargés d’organiser et d’animer des activités de perfectionnement pédagogique crédités,
leur formation académique importante, leur expérience de travail dans une autre fonction
(celle à l’enseignement régulier à l’ordre collégial, celle en recherche pédagogique ou
celle à titre de conseiller pédagogique à d’autres ordres d’enseignement) ainsi que leur
connaissance approfondie du milieu local sont les sources de leur expertise qui leur
permettent d’exercer efficacement leur fonction. Par contre, ils déplorent leur manque de
Page 28
9 Il s’agit des CP qui agissent aussi en tant que répondants locaux de l’Université de Sherbrooke dans le cadre des programmes de perfectionnement de PERFORMA dont il sera question au chapitre trois.
La fonction de conseillère ou de conseiller pédagogique au collégial
formation en gestion du changement et, pour plusieurs au moment de l’enquête, leur
expérience réduite à ce poste (Poirier-Proulx, 1995). Ce même sous-groupe de CP,
identifie plus précisément les compétences requises pour assurer le perfectionnement du
personnel enseignant lors d’un travail en atelier se déroulant en 1994 :
« on souligne l’à-propos des compétences suivantes :
animateur : faire émerger les besoins, établir et maintenir les contacts ;
conseiller : avoir une vision cohérente de la psychopédagogie ;
expert : psychopédagogue et spécialiste d’au moins un champ de
[perfectionnement pédagogique ] ;
pédagogue exemplaire dans les activités qu’il ou elle anime ;
formateur : enseigner, induire des processus de formation ;
gestionnaire ». (Laliberté, J., 1994)
Lors de cet atelier, on a signalé également des qualités personnelles et professionnelles
comme la crédibilité, le leadership, l’esprit d’innovation, la capacité de motiver et de
mobiliser, la lucidité, la connaissance pratique de l’enseignement collégial et la capacité
de résoudre des problèmes complexes.
Il ressort de l’examen des conditions d’embauche officielles et des témoignages de
conseillers pédagogiques que la fonction exige que le titulaire soit ou bien une
enseignante ou un enseignant expérimenté dont l’expertise est reconnue dans son milieu
ou bien une personne qui a une grande crédibilité, en particulier aux yeux du personnel
enseignant. Même si le diplôme officiellement exigé est de niveau du premier cycle
universitaire, les compétences particulières recherchées montrent que les cégeps attendent
beaucoup plus qu’une formation initiale et demandent souvent une solide expérience et
une connaissance approfondie du milieu collégial, parfois même de l’établissement lui-
même. Notre étude n’a pas retracé d’écrits scientifiques qui proposeraient un référentiel
de compétences professionnelles explicites et partagées par le milieu. Mentionnons
toutefois qu’une telle étude est en cours pour l’ordre collégial (Pratte et Houle, en cours).
Page 29
2.5 Une formation initiale adaptée quasi inexistante
La formation initiale vise la construction d’un « ensemble de connaissances et de
compétences que l’enseignement permet à une personne d’acquérir antérieurement à son
entrée dans la vie active. […] [Ces connaissances et compétences s’acquièrent dans le
cadre d’un] «premier programme de formation conduisant à l’exercice d’un métier ou
d’une profession » (Legendre, 1993, p. 640). Pour exercer la profession de conseiller
pédagogique, un programme de formation devrait permettre de développer des
compétences dans divers domaines, dont la pédagogie, la psychologie, l’andragogie,
l’administration, le counseling. Il devrait aussi s’appuyer sur un référentiel de
compétences reconnues essentielles pour exercer la fonction. Il n’existe pas de tel
programme de formation qui s’adresserait spécifiquement et exclusivement aux
personnes qui se destinent à la profession de conseiller pédagogique. Bien que nous ne
puissions fournir de données précises à cet égard, nous croyons qu’une proportion
importante de conseillers pédagogiques est issue des rangs du personnel enseignant, en
tout cas pour ce qui concerne les ordres d’enseignement primaire, secondaire et collégial.
Selon cette hypothèse, la formation initiale conduisant à la profession de conseillère ou
conseiller pédagogique au primaire et au secondaire serait donc généralement constituée
d’une formation à l’enseignement : baccalauréats en enseignement préscolaire, primaire
et secondaire, ou en enseignement professionnel et technique. Au collégial, aucune
formation initiale formelle en pédagogie n’étant requise pour enseigner, la formation
initiale du personnel enseignant, et par conséquent d’une grande proportion des
conseillères et conseillers pédagogiques, est souvent celle de la discipline enseignée.
Cependant, un bref survol des sites Internet de quelques universités québécoises permet
d’identifier plusieurs autres programmes de formation initiale de premier cycle qui
satisfont aux conditions d’embauche telles que spécifiées dans les descriptions de la
fonction. On trouve, entre autres, adaptation scolaire, psychopédagogie et
orthopédagogie. Aux cycles supérieurs, mentionnons : administration et évaluation en
éducation, intervention éducative, intervention pédagogique, psychoéducation,
andragogie, didactique, formation à distance, administration et fondements de
Page 30
La fonction de conseillère ou de conseiller pédagogique au collégial
l’éducation. Certaines universités ont déjà offert un programme en technologie
éducationnelle qui devait répondre plus particulièrement à des besoins de formation
semblables à ceux des conseillers pédagogiques. On ne retrouve plus ce programme sur
les sites des universités québécoises que nous avons consultés (Laval, Sherbrooke,
Montréal, Université du Québec). Toutefois, l’Université Laval offre des programmes en
gestion et développement pédagogique et en réussite scolaire. L’Université de
Sherbrooke offre des programmes en gestion de la formation, en administration scolaire
et même un diplôme de 3e cycle en pédagogie de l’enseignement supérieur. L’Université
du Québec à Montréal en offre un en éducation et formation des adultes (sites consultés
en mars 2004).
Bien que la plupart des programmes de 2e et de 3e cycle signalés exigent simplement un
baccalauréat comme condition d’admission, certains mentionnent que la personne doit
avoir acquis une expérience professionnelle dans le domaine ou encore pouvoir
expérimenter les acquis sur le terrain. Pour satisfaire cette exigence, il vaut mieux exercer
déjà une fonction relative à la formation visée. En conséquence, ces programmes
s’avèrent souvent, dans les faits, des programmes de formation continue même s’ils ne
sont pas identifiés comme tels.
Ces diverses formations initiales sont-elles appropriées pour préparer une personne à
assumer les tâches de conseillère ou conseiller pédagogique ? Difficile de répondre à
cette question sans savoir si les conseillères et les conseillers s’en sont prévalus.
Quoiqu’il en soit, les témoignages de certains d’entre eux montrent qu’ils ne se sentent
pas tous bien préparés pour faire leur travail adéquatement lors de leur entrée en fonction
(Saint-Laurent, 1992). Ils acquièrent et développent leurs compétences lorsqu’ils sont en
exercice, souvent de façon solitaire et sur le tas comme nous l’avons déjà mentionné
(Pratte, 2001; Savard, 1999).
Page 31
2.6 Une formation continue limitée et non structurée
L’expression « formation continue » est souvent synonyme de perfectionnement. Parmi
les nombreuses précisions apportées par Legendre (1993), nous retenons les suivantes. De
façon générale, la formation continue comprend les « activités qui permettent à un
individu de développer ses connaissances et ses capacités tout au long de sa vie et
d’améliorer ses conditions d’existence en complétant, par les moyens pédagogiques
appropriés, les données initiales fournies par l’école ou l’enseignement supérieur »
(UNESCO, 1979, dans Legendre, 1993). Plus près du développement professionnel, la
formation continue serait un « processus d’amélioration ou d’acquisition, au-delà de la
formation initiale, des connaissances, des savoir-faire, de la culture et des compétences
personnelles ou professionnelles » (C.M.T.E. (Fr.), 1992, dans Legendre 1993). Selon
(Savoie-Zajc, Dolbec, & Charron-Poggioli, 1999), « la formation continue a pour objet la
mise à jour des compétences de la personne », compétences d’ordre cognitif, métacognitif
ou social. De l’avis du ministère de l’Éducation, la formation continue comprend
l’ensemble des activités qui permettent aux enseignants de « mettre à jour leurs
connaissances, leurs compétences et leurs pratiques éducatives au regard des conditions
d’apprentissage et des réalités changeantes de leur milieu professionnel » (Parent et al.,
1999). Ces activités peuvent prendre diverses formes : programmes formels crédités,
colloques, lectures, groupes de discussion, groupes de tâches, participation à des
recherches collaboratives, formations ponctuelles sur un thème précis, etc. Finalement,
mentionnons que la formation continue peut ne pas être en relation avec l’emploi exercé,
peut faire partie du système formel d’éducation ou non et ne suppose pas nécessairement
qu’il y ait eu formation initiale dans le domaine.
La formation initiale spécifique à la profession de conseillère ou conseiller pédagogique
n’existe pas, on l’a déjà relevé. Au chapitre de la formation continue formelle, on note
comme on l’a évoqué plus haut, que certains programmes de 2e et de 3e cycle offerts par
les universités sont, en pratique, des programmes de formation continue ouverts aux
conseillers pédagogiques. Toutefois, outre le fait que ces programmes ne sont pas
spécifiquement conçus pour répondre au besoin de perfectionnement des conseillers
Page 32
La fonction de conseillère ou de conseiller pédagogique au collégial
pédagogiques, sur le plan des fondements théoriques autant que sur celui des
compétences professionnelles, les conditions de travail de ces professionnels ne leur
facilitent peut-être pas toujours l’accès à une telle formation. On peut penser pour le
moment que la formation continue des conseillers pédagogiques se réalise le plus souvent
au moyen de colloques, congrès, activités courtes organisées par des associations
professionnelles, conférences, lectures personnelles, participation à des activités de
recherche, réalisation de projets collectifs, participation à des groupes de discussion
virtuels ou non… Il y aurait lieu de faire un inventaire systématique des formes de
formation continue dont disposent les conseillers et les conseillères pédagogiques et de
celles qu’ils utilisent réellement.
Quoi qu’il en soit, déjà il y a près de vingt ans, certains conseillers pédagogiques du
collégial insistaient sur le besoin de se perfectionner dans « sa discipline » [de conseiller
pédagogique], exprimant un certain sentiment d’incompétence devant la multiplicité et la
diversité des interventions à accomplir, et un besoin d’approfondir les fondements
théoriques en psychopédagogie tout en déplorant de vivre un contexte qui les « fait courir
d’un dossier à l’autre » (Morin, 1986). Plus récemment, deux écrits identifient le
ressourcement et le perfectionnement pédagogiques comme l’un des besoins prioritaires
exprimés par les conseillères et les conseillers pédagogiques qui agissent comme
répondants locaux pour PERFORMA (Laliberté, J., 1994 ; Poirier-Proulx, 1995). Ce dernier
rapport conclue que les attentes les plus fortes des CP interrogés concernent les
conditions favorisant ce ressourcement et ce perfectionnement. Notons qu’on fait allusion
à des activités courtes, ponctuelles, plutôt qu’à un programme de formation.
Le renouveau au collégial a fourni l’occasion de préciser certains besoins de
perfectionnement reliés à des dossiers spécifiques. Lors d’une enquête10 sur les besoins
de perfectionnement des conseillers pédagogiques relativement à l’élaboration d’un
programmes d’études visant le développement de compétences, la majorité des
conseillers pédagogiques (67,6 %) ont estimé que leurs compétences dans ce domaine 10 Cette enquête a été réalisée à l’automne 1998 dans le réseau collégial; 72,3 % des conseillers pédagogiques répondants locaux de PERFORMA (34 sur 47) ont répondu au questionnaire (Savard, 1999).
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sont « bonnes » ; toutefois, ils souhaitent quand même améliorer leurs compétences en ce
qui concerne l’utilisation de concepts et de notions pédagogiques, de même que
l’élaboration d’outils de travail (Savard, 1999). Les comptes rendus des assemblées
générales de PERFORMA rapportent des besoins de formation liés à l’appropriation des
fondements conceptuels mais aussi à des aspects opérationnels de l’élaboration, de la
mise en œuvre, de l’évaluation et du suivi de nouveaux programmes d’études et
d’innovations pédagogiques. Pratte (2001) fait état de besoin en ce qui concerne la
formation à la consultation pédagogique. Martin, St-Pierre, Lafortune (2003) et
Lafortune, St-Pierre, Martin (2004, en cours) relèvent des besoins de formation reliés aux
traitements de l’affectivité lors de situations d’accompagnement individuelles ou
collectives, en soutien à la réalisation de changements pédagogiques, planifiés ou non,
conceptuels ou pratiques, chez le personnel enseignant. La mise en œuvre des réformes
actuelles semble susciter l’émergence de besoins nombreux et diversifiés. La présente
recherche documentaire n’a pas permis de trouver de données plus précises relativement
aux besoins de perfectionnement des conseillères et des conseillers pédagogiques11.
Les lacunes sur le plan de la formation continue des conseillères et des conseillers
pédagogiques concernent tous les ordres d’enseignement au Québec. Certains conseillers
pédagogiques du collégial sont assurément plus choyés que d’autres par leur
participation, en tant que répondants locaux, à PERFORMA12 qui leur offre une structure
permanente d’échange, de soutien et de ressourcement (le GRA, groupe de recherche-
action composé de conseillers pédagogiques de cégeps et de professeurs d’université)
ainsi que de nombreuses occasions de travail en collégialité avec leurs pairs au sujet de
l’organisation et de la mise en œuvre d’activités de perfectionnement pour les
enseignants. Cela permet à une personne de chaque collège de se ressourcer et d’agir 11 Une étude sur ce sujet, financée par le Regroupement des collèges membres de PERFORMA, est en cours présentement (Pratte, M. et Houle, H., 2002-2004, en cours)
Page 34
12 Rappelons que PERFORMA est une structure organisationnelle qui repose sur un partenariat entre 53 établissements collégiaux du Québec et l’Université de Sherbrooke. Son mandat est d’organiser et de dispenser des activités de perfectionnement crédité principalement au personnel enseignant des cégeps. Un répondant local, généralement un conseiller pédagogique, est nommé dans chaque collège. Cette personne a l’occasion de participer à une dizaine de journées de réunions et de ressourcement par année. Dans le cadre de dossiers plus spécifiques, elle peut être amenée à participer à un groupe de tâche, ce qui multiplie par 2 ou 3 le nombre de journées de travail et de ressourcement dont elle bénéficie.
La fonction de conseillère ou de conseiller pédagogique au collégial
comme agent multiplicateur auprès des collègues conseillers et conseillères pédagogiques
de son établissement. Nous décrirons plus amplement PERFORMA au chapitre 3 et nous
présenterons alors sa contribution au développement professionnel des conseillères et des
conseillers pédagogiques de cégeps.
2.7 Une identité professionnelle à définir L’identité professionnelle peut être « envisagée comme une dimension de l’identité
sociale et associée à un processus d’identification à une profession, ainsi qu’à un réseau
de relation avec les pairs » (Lauzon, 2002). Cette auteure proposent deux composantes
essentielles de l’identité professionnelle pour un enseignant du collégial, à savoir son
« rapport à son rôle professionnel » et son « rapport d’appartenance » à un groupe donné.
Nous proposons ici de retenir les deux mêmes composantes pour plusieurs autres métiers
de l’éducation, en particulier celui des conseillères et des conseillers pédagogiques. Ces
composantes identitaires sont formées des conceptions, des perceptions et des attitudes
que la personne retient comme constitutives de la fonction qu’elle occupe : conception du
rôle, des habiletés, connaissances et compétences nécessaires pour l’exercer, normes,
valeurs, modèles, pratiques… qui lui permettent de s’identifier au groupe ou d’éprouver
un sentiment d’appartenance à son égard ou encore, de tenter de redéfinir ou de modifier
ces conceptions et attitudes.
Cette identité n’est pas statique et déterminée une fois pour toutes ; les composantes
identitaires évoluent et se transforment, ce qui donne vie à la dynamique du
développement professionnel, envisagé comme l’ensemble de « toutes les
transformations individuelles et collectives de compétences et de composantes
identitaires mobilisées dans les situations professionnelles » (Barbier, Chaix et Demailly,
1994, cité par Lauzon, 2002).
Les données présentées précédemment nous apprennent que les conseillères et les
conseillers pédagogiques de cégeps constituent une catégorie de personnel professionnel
hautement qualifié, qui doit détenir une grande crédibilité dans son milieu, dont l’effectif,
Page 35
jusqu’à maintenant, est en croissance parmi le personnel professionnel des établissements
collégiaux. Il s’agit également d’une catégorie de personnel qui possède une formation
initiale et des acquis de compétences très diversifiés et, très souvent, une expérience
importante en enseignement. Mais pour ce qui concerne le conseil et l’animation
pédagogiques, ils sont contraints de se former « dans leur discipline » sur le terrain en
glanant diverses formes de ressourcement plus ou moins structurées. Ils exercent leur
activité auprès du personnel cadre et du personnel enseignant des cégeps, parfois d’autres
professionnels. Leur rôle est lié au développement pédagogique des établissements et au
développement professionnel des enseignantes et des enseignants. Ils n’interviennent pas
directement auprès des élèves. Contrairement à leurs collègues d’autres ordres
d’enseignement, ils ne sont pas non plus des spécialistes d’une discipline : ils agissent
plutôt en tant qu’experts du processus d’accompagnement pédagogique. Ils sont des
« consultants internes » en pédagogie (Pratte, 2001). Selon cette auteure, pour conserver
leur intégrité et leur crédibilité, les conseillers pédagogiques doivent « travailler à ne
s’identifier ni [aux enseignantes et aux enseignants ni aux cadres] ».
Comment se voient-ils eux-mêmes ? Nous disposons de peu de données scientifiques sur
ce sujet, tout au plus certains témoignages, qui proviennent surtout des ordres primaire et
secondaire.
Selon (Francoeur, 1994b), le conseiller pédagogique se distingue de l’enseignant en
contact permanent avec les élèves, du directeur en position d’autorité et de supervision et
continuellement sollicité par les questions d’administration et de gestion, du professeur
d’université dont l’expertise est plus générale, plus lointaine, de la personne-ressource
occasionnelle, sans connaissance de la culture du milieu et sans permanence dans
l’établissement (p. 30). Il est avant tout un agent de l’innovation pédagogique, se
distinguant ainsi de la direction d’une école, principal agent du leadership pédagogique et
de l’enseignant, premier agent de sa propre évolution (Francoeur, 1994b).
La personne qui désire exercer cette fonction vise différents buts : poursuivre sa
démarche pédagogique personnelle, offrir des services à des collègues à la suite d’un
Page 36
La fonction de conseillère ou de conseiller pédagogique au collégial
cheminement personnel, exercer une nouvelle fonction, mettre ses conceptions en
pratique (Larivière & Loof, 1986). Dans les collèges, il s’agit souvent d’une enseignante
ou d’un enseignant qui, dans la poursuite d’objectifs de développement personnel et
professionnel, souhaite transmettre son expertise ou contribuer au développement
pédagogique de son établissement dans un cadre plus large que celui de la classe. Il est
arrivé également que la personne retenue pour le poste ait été réaffectée à la suite de
restrictions budgétaires ou qu’une enseignante à statut précaire décide d’opter pour un tel
poste plus sécuritaire (Cantin, 1996). La première personne souhaite « pousser plus loin
son engagement dans le domaine de la pédagogie », alors que les deux autres visent à
« assurer [leur] survie» sur le plan professionnel (Pratte, 2001).
Mais, une fois affectée à son nouveau poste, elle fait face à plusieurs défis : trouver son
identité, assurer et maintenir sa crédibilité auprès des enseignantes et des enseignants,
négocier son niveau de responsabilité et son champ d’intervention avec la direction
(Larivière & Loof, 1986). Travailler dans un contexte permanent de résistance au
changement de la part de ceux-là même qui demandent du soutien, développer ses
propres compétences en lien avec l’exercice de la fonction font également partie des
difficultés mentionnées dans les témoignages recensés.
Une recherche en cours, à l’ordre collégial13, fournira des résultats plus explicites au sujet
des représentations des conseillers pédagogiques de cégeps concernant leur identité
professionnelle. Pour le moment, selon des données préliminaires issues de cette étude,
« [les conseillères et les conseillers pédagogiques du collégial] font souvent face à des
situations complexes peu définies et problématiques en raison de dossiers liés au
changement. Ils interviennent également dans d’autres dossiers à connotation
prescriptive, d’où leur inconfortable position entre l’innovation et la conformité sans
qu’ils puissent toutefois pouvoir exercer une relation d’autorité » (Houle & Pratte, 2003).
Page 37
13 PRATTE, M., HOULE, H., (en cours 2002-2004), L’analyse de la fonction de conseiller pédagogique au collégial, recherche subventionnée par le Regroupement des collèges affiliés à PERFORMA.
La construction de l’identité professionnelle des conseillères et des conseillers
pédagogiques se réalise au rythme de l’évolution du réseau collégial comme on le verra
au prochain chapitre. Le renouveau au collégial, et peut-être les transformations que
pourrait vivre l’ordre collégial à la suite des consultations du printemps 2004, pourraient
redéfinir le rôle des conseillers pédagogiques et modifier certaines de leurs composantes
identitaires.
2.8 Des questions sans réponses satisfaisantes
Tout au long de ce chapitre nous avons relevé des questions restées sans réponse à la
suite de la consultation des écrits sur la fonction de conseillère ou conseiller pédagogique
au collégial. Rappelons les questions auxquelles nous voulions répondre en faisant
ressortir celles qui ne trouvent pas de réponses satisfaisantes.
1. Description de la fonction
1.1. Comment les instances officielles présentent-elles cette fonction ?
Les descriptions de Développement des ressources humaines Canada (DRHC,
2001), Emploi Québec (dans GRICS, 2001) et Comité patronal de négociation
des collèges (CPNC, 2000) ont été rapportées. La description de poste s’avère
particulièrement large, ce qui explique la complexité et la multiplicité des tâches
attribuées aux conseillères et conseillers pédagogiques.
1.2. Quelles tâches, rôles, responsabilités sont dévolues aux conseillères et aux
conseillers pédagogiques ?
Devant l’absence de recherches et la grande variabilité de ces aspects tels que
rapportés par les témoignages des conseillères et conseillers pédagogiques, il
s’avère nécessaire de conduire une étude scientifique sur ce sujet14. Il existe tout
de même un rapport d’atelier et une enquête faits par PERFORMA sur les
conditions d’exercice de la fonction de répondant local (Laliberté, J., 1994 ;
Poirier-Proulx, 1995) qui fournit des données sur un sous-groupe de conseillers
pédagogiques, ceux qui agissent comme répondants locaux pour PERFORMA.
Page 38
14 Une telle étude est en cours (Pratte et Houle, 2002-2004) comme nous l’avons mentionné.
La fonction de conseillère ou de conseiller pédagogique au collégial
1.3. Quelles sont les exigences officielles et officieuses à l’embauche ?
Les exigences officielles contenues dans les descriptions de fonctions,
mentionnent un diplôme de 1er cycle universitaire dans un champ de
spécialisation approprié. Quelques exemples d’affichages de poste mentionnent
aussi des exigences particulières de haut niveau, dont une vaste connaissance
des milieux d’intervention, des qualités et compétences personnelles variées et
une expérience du domaine ou de celui de l’enseignement. Une étude plus
systématique à partir des affichages de poste montrerait les exigences réelles
liées à l’embauche. Le relevé de ces exigences ferait ressortir la vision de la
fonction du point de vue des directions de collèges.
2. Caractéristiques des conseillères et conseillers pédagogiques
2.1. Quel est l’effectif des conseillères et conseillers pédagogiques de cégep ?
La plupart des données rassemblées donnent des résultats en termes de ETC
(équivalent temps complet sur la base des salaires versés) plutôt qu’en termes
d’individus. Pour l’année 2001-2002, le MEQ dénombre 383 ETC dont le statut
est à temps complet et 64 ETC dont le statut est à temps partiel (voir tableau 6).
L’effectif précis reste à préciser.
2.2. Quelles sont les caractéristiques sociodémographiques de ces personnes ?
Il semble qu’il n’existe pas de données sociodémographiques précises sur le
corps d’emploi des conseillères et des conseillers pédagogiques de cégep. Au
ministère de l’Éducation, ces données sont noyées parmi celles de l’ensemble du
personnel professionnel des cégeps. En général, cette catégorie d’emploi rajeunit,
se féminise et occupe des emplois plus précaires. Pour ce qui est du cas
particulier des conseillers pédagogiques, comme ils sont très souvent issus des
rangs du personnel enseignant au contraire des autres professionnels, on peut
présumer qu’ils se distinguent, du moins en ce qui concerne l’âge et l’expérience.
Une meilleure connaissance des caractéristiques sociodémographiques des
personnes qui exercent cette fonction est à construire.
2.3. Quelle formation initiale mène à cette profession ?
Page 39
Il n’existe pas de programme de formation initiale spécifiquement élaboré pour
répondre aux besoins de formation de ces personnes. On déduit que la formation
initiale des conseillères et des conseillers pédagogiques du collégial, issus en
grande partie des rangs du personnel enseignant, s’avère très variée car elle
concerne la discipline enseignée par ces personnes. Étant donné leur faible
effectif, étant donné aussi la nécessaire expérience que doivent posséder ces
personnes, on peut s’interroger sur le besoin d’un programme de formation
initiale spécifique. Toutefois, une connaissance plus exacte de la formation
initiale des conseillères et des conseillers pédagogiques pourrait permettre de
mieux connaître leurs acquis et serait utile aux concepteurs de programmes ou
d’activités de formation continue.
2.4. Quelles compétences et qualités personnelles possèdent-ils ?
Des témoignages quant aux compétences et qualités personnelles que devraient
posséder les conseillères et les conseillers pédagogiques ainsi que des exemples
d’affichage de poste ont fait ressortir bon nombre de ces aspects du point de vue
des conseillers pédagogiques eux-mêmes et du point de vue de leurs employeurs.
Mentionnons des qualifications de haut niveau, une grande crédibilité et une
bonne capacité d’adaptation. Des données validées dans ce domaine
permettraient de mieux cerner l’identité professionnelle de ces personnes et
d’asseoir la formation continue sur des bases plus solides. Rappelons que la
recherche de Pratte et Houle, en cours, proposera un référentiel de compétences
professionnelles pour les conseillères et les conseillers pédagogiques du collégial.
2.5. De quelles modalités de formation continue disposent-ils ?
La formation continue offerte à cette catégorie de personnel scolaire est peu
structurée, sauf pour ce qui concerne les conseillers pédagogiques répondants
locaux de PERFORMA. Et même pour eux, il n’existe pas de programme formel
construit spécifiquement pour répondre à leurs besoins. Il y a là une piste à
explorer quand on sait le rôle important des conseillers pédagogiques dans le
développement des systèmes éducatifs. Toutefois, il reste à construire des
programmes innovateurs s’harmonisant aux conditions d’exercice de la
profession et répondant aux besoins de développement professionnel propres aux
Page 40
La fonction de conseillère ou de conseiller pédagogique au collégial
CP, lesquels restent à identifier. Les tendances actuelles en formation continue du
personnel enseignant (des formations de type recherche-action ou collaboratives,
qui évoluent à partir d’une formation individuelle et ponctuelle sur des thèmes
spécifiques vers une perspective d’accompagnement prolongé des changements
dans les établissements) (Solar, 2001 ; St-Pierre et Raymond, 2004) pourraient
inspirer les pratiques de formation continue des conseillères et conseillers
pédagogiques. En plus de besoins de formation reliés aux fondements
conceptuels et aux aspects opérationnels de la mise en œuvre et du suivi des
réformes, une formation à l’accompagnement sous toutes ses formes devrait faire
partie d’un programme de formation continue de ces personnes.
2.6. Quelles sont leurs perceptions relativement à leur identité professionnelle ?
Le réseau collégial vit des changements planifiés et imposés que les conseillers
pédagogiques doivent accompagner, parfois gérer et contrôler ; dans ce
contexte, ceux-ci voient leur rôle profondément transformé. L’identité
professionnelle des nouveaux conseillers pédagogiques est à construire, et celle
des plus expérimentés à redéfinir. Il en résulte une incertitude qui peut créer un
malaise chez plusieurs. Toutefois, l’état de la situation sur le sujet n’est pas
documenté par des écrits scientifiques. Ce malaise n’est pas nouveau cependant,
comme on le verra au prochain chapitre ; dès les débuts, la fonction de
conseillère ou conseiller pédagogique au collégial est née dans l’incertitude et la
confusion quant à ses spécificités et ses limites. Il n’est pas unique non plus. Les
conseillers pédagogiques du primaire et du secondaire vivent un semblable
inconfort. Les personnes qui exercent ce type de fonctions dans d’autres sociétés
le subissent également (Altet, Paquay, & Perrenoud, 2002b).
Plusieurs des questions soulevées dans ce chapitre n’ont pas trouvé de réponse
satisfaisante. Ces questions pourraient être investiguées plus en profondeur dans des
études concernant la fonction de conseillère ou conseiller pédagogique, leurs
caractéristiques et leurs besoins de formation continue. Elles pourraient également être
alimentées par les résultats de recherches de type recherche-action-formation. (Houle &
Page 41
Pratte, 2003) signalent « plusieurs éléments [qui] concourent à mettre en évidence la
pertinence [de telles études…] » :
« un renouvellement des effectifs, ce qui implique de devoir former ou perfectionner un grand nombre d’individus appelés à exercer la fonction
le contexte de la réforme [au collégial]qui a non seulement amené les conseillers pédagogiques à intervenir dans de nouveaux dossier mais à exercer des types d’intervention très variés dans leur milieu, d’où leurs besoins accrus de nouvelles connaissances et habiletés
le contexte financier et, partant, la réduction des ressources qui imposent aux conseillers pédagogiques de mener différemment leurs dossiers et de faire preuve d’innovation en termes de méthodes
enfin la fonction de conseiller pédagogique est en évolution dans un système où elle subit de fortes pressions autant extérieures qu’intérieures auxquelles les professionnels praticiens doivent faire face » (p. 20-21).
À cela, ajoutons qu’on peut d’ores et déjà anticiper prochainement de nouvelles
transformations du système, accompagnées de nouvelles tâches ou modifications de
celles-ci pour les conseillères et les conseillers pédagogiques, à la suite du Forum sur
l’avenir de l’enseignement collégial au Québec tenu en juin 2004.
Page 42
Origine et évolution de la fonction
Chapitre 3. ORIGINE ET ÉVOLUTION DE LA FONCTION
Au terme du précédent chapitre, quelques réflexions ont attiré l’attention sur l’identité
professionnelle ambiguë ou constamment à reconstruire des conseillères et des conseillers
pédagogiques. Houle et Pratte (2003) sont d’avis que le contexte actuel d’exercice de la
fonction de conseiller pédagogique au collégial peut conduire à une « crise identitaire ».
Pour notre part, nous préférons parler de « remises en question identitaires » ou de
« malaise identitaire ». Devant les modifications importantes que subit leur fonction, il est
vrai que les conseillers pédagogiques expérimentés peuvent se sentir en déséquilibre et
rechercher de nouveaux repères lorsqu’ils ne se cramponnent pas à une vision passée de
la fonction. Les nouveaux conseillers pédagogiques, quant à eux, peuvent avoir du mal à
« cerner l’étendue et les limites de la fonction qu’ils occupent » (Houle & Pratte, 2003),
tiraillés entre les nouvelles demandes qui leur sont acheminées et la conception qu’ils
avaient construite de cette fonction à partir de leurs expériences personnelles, souvent
celles d’enseignants, et à partir de l’héritage transmis par les conseillers pédagogiques
plus expérimentés.
Cependant, l’origine et les premières années d’existence de cette fonction au collégial se
caractérisent également par un haut degré d’incertitude et de fébrilité. Une période plus
calme s’est soldée par une consolidation de la fonction, rapidement suivie par des
modifications importantes et des exigences nouvelles et complexes. L’évolution même de
la fonction présente une trajectoire d’interrogations, de remises en question et de
bouleversements. Ce chapitre retrace cette trajectoire en relation avec l’évolution du
réseau collégial. Ce parcours permet de mieux comprendre la manière dont s’est forgée la
fragile identité professionnelle des conseillers pédagogiques, les exigences de leur
fonction et les nouveaux défis qu’on peut pressentir.
Page 43
3.1 Origine de la fonction
C’est dans le Rapport Parent15 (1964) que la création de la fonction de conseiller
pédagogique aurait été proposée au Québec16 (Laliberté, 1995a, 1995b). Le phénomène
de la division de plus en plus poussée des tâches reliées au travail scolaire et de la
différenciation des fonctions pour les accomplir remonterait aux années 1930-1960
(Mellouki, 1991). Selon lui, l’évolution des idées pédagogiques, la complexification du
travail due à un accès plus large aux études secondaires ainsi que l’attrait de méthodes et
de tests de toutes sortes sur les acteurs scolaires ont contribué à ce phénomène. Il en
aurait résulté de nouveaux « professionnels de l’éducation » chargés de tâches faisant
jusqu’alors partie du travail enseignant ou de celui de directeur d’école ou d’inspecteur.
Lorsque le Rapport Parent fut publié, cette fragmentation était déjà amorcée. Dans une
recherche exploratoire et descriptive, (Laliberté, 1995b) retrace les besoins qui ont
conduit à la création de la fonction de conseillers pédagogiques ainsi que les tâches que
ces personnes ont effectuées. Cette auteure présente également un résumé des principaux
problèmes qui pourraient justifier la poursuite de recherches ultérieures. La recherche de
Laliberté concerne la fonction de conseillère et conseiller pédagogique au primaire et au
secondaire. Nous en rappelons quelques conclusions pour situer le contexte de la création
de cette fonction au collégial, car nous faisons l’hypothèse que les réflexions au sujet de
la nécessité de « nouveaux professionnels de l’éducation » ont débordé les ordres
scolaires et ont inspiré les décisions relatives aux structures scolaires à tous les niveaux.
Au cours des années soixante, la publication du Rapport Parent et la mise en œuvre de la
plupart de ses recommandations ont changé radicalement le système scolaire au Québec.
Les structures aux niveaux provincial, régional et local, l’organisation scolaire, les
programmes d’études, les règles régissant la formation, l’organisation du travail et
15 Le «Rapport Parent» est une dénomination courante pour le Rapport de la Commission royale d’enquête sur l’enseignement dans la province de Québec, présidée par Mgr Parent au début des années 1960 au Québec. Dû à certains impératifs politiques, les quatre tomes en six volumes du Rapport Parent ont été publiés en plusieurs tranches entre 1963 et 1966 (Corbo, 2002). Nous utiliserons le titre «Rapport Parent» , comme beaucoup d’autres avant nous pour sa simplicité.
Page 44
16 Recommandation 347 du Rapport Parent, tome II, volume 2, p. 292-293
Origine et évolution de la fonction
l’embauche des enseignants… tout a été remis en question et, généralement,
profondément modifié. Ces transformations s’appuyaient sur des visées de
démocratisation de l’accès à l’éducation et sur une ouverture aux nouvelles connaissances
en psychologie de l’apprentissage. À tous les échelons, les différentes catégories des
personnels de l’éducation voyaient leur travail se transformer par la mise en œuvre
d’innovations pédagogiques à grande échelle sans pour autant se sentir préparées à
relever ces nouveaux défis qui n’étaient pas pris en compte par la formation traditionnelle
à l’enseignement. Dans le cadre de ces bouleversements, le Rapport Parent concluait que
le système des inspecteurs d’école ne répondait plus aux besoins ; « face aux besoins
d’animation pédagogique et de contrôle, [il est suggéré que] soit créé un service relevant
du ministère de l’Éducation au sein duquel on retrouverait des conseillers pédagogiques
qui seraient nécessaires pour diverses matières ou qui amorceraient certaines initiatives »
(Rapport Parent, 1964, p. 292-293, cité par Laliberté, A., 1995a, 1995b). Le Rapport
Parent propose que trois fonctions soient rattachées à ce service au ministère de
l’Éducation : des inspecteurs-vérificateurs (pour la comptabilité des commissions
scolaires), des conseillers en organisation scolaire et des conseillers pédagogiques.
En ce qui concerne les conseillers pédagogiques, cependant, le ministère de l’Éducation a
choisi plutôt de créer une fonction d’agent de développement pédagogique (ADP) qui
parcourt la province pour diffuser des connaissances relatives aux nouveaux programmes
et soutenir les innovations pédagogiques. Ce système de soutien pédagogique centralisé
au MEQ n’a pas été très bien accepté dans les milieux et ne semble pas avoir répondu aux
besoins car on observe qu’un système régional et local s’est développé concurremment,
celui des conseillers pédagogiques rattachés à des commissions scolaires. Les premières
personnes à exercer cette fonction ont été formées dans le cadre de projets de
perfectionnement ponctuels visant à préparer des animateurs qui pourraient dispenser
dans les milieux la formation concernant la mise en œuvre d’une pédagogie active et
assurer le soutien technique à l’élaboration et à la mise en place des programmes
institutionnels à partir des programmes-cadres fournis par le Ministère de l’éducation
(Laliberté, A., 1995b). Laliberté, A. (1995b) conclut que plusieurs facteurs ont favorisé la
reconnaissance officielle des conseillères et conseillers pédagogiques dans la politique
Page 45
administrative et salariale du ministère de l’Éducation en 1972. Entre autres, elle
mentionne les pressions du milieu, commissions scolaires et associations d’enseignants,
ainsi que les efforts des conseillères et des conseillers pédagogiques quant à la
reconnaissance de leur statut de professionnels et quant à leur syndicalisation. En somme,
malgré un choix différent fait au départ par le ministère de l’Éducation du Québec, la
fonction de conseillère ou conseiller pédagogique s’est imposée d’elle-même dans les
milieux aux ordres primaire et secondaire parce qu’elle répondait mieux aux besoins des
acteurs de terrain.
L’évolution de la fonction de CP au collégial peut se découper en trois périodes. La
première commence en 1967 avec la création des cégeps et se termine en 1975 avec la
parution du rapport (Lévesque, 1975) qui propose une définition et une reconnaissance
partagées de la fonction de conseiller pédagogique dans les cégeps. Cette période se
caractérise par la confusion et la fébrilité. De 1975 à 1993, début du renouveau au
collégial, la fonction connaît un essor et une consolidation remarquables autour des
mandats d’animation et de perfectionnement du personnel enseignant. Enfin, depuis le
début du renouveau jusqu’à ce jour, la fonction est en train, non pas de se redéfinir, mais
de s’adapter aux nouvelles conditions de son exercice et aux transformations que vit le
réseau collégial.
3.2 Au collégial, départ hésitant et fébrile (1967-1975)
De même que la fonction de conseiller pédagogique, les cégeps sont issus directement
des recommandations du Rapport Parent17 (1964). Pour augmenter l’accès aux études
supérieures et hausser le taux de scolarisation de la population tout en rationalisant les
structures du système scolaire (Gingras, 1992), la commission Parent recommande la
création d’un cycle autonome d’études préuniversitaires et techniques distinct du
secondaire et de l’université. Le ministère de l’éducation retient cette recommandation et
17 Recommandation 83 du Rapport Parent, tome II, volume 1, p. 172-173.
Page 46
Origine et évolution de la fonction
c’est en 1967 que le gouvernement du Québec adopte une loi qui confirme la création du
réseau des cégeps18 (Collèges d’enseignement général et professionnel).
Au collégial, les phénomènes de démocratisation de l’enseignement et d’expansion de
l’innovation pédagogique, présents également au primaire et au secondaire à la fin des
années soixante, se conjuguent au chantier de la mise sur pied d’un nouvel ordre
d’enseignement. La création et l’évolution de la fonction de conseiller pédagogique au
collégial sont étroitement associées aux soubresauts de la courte histoire des cégeps. Tout
était à construire pour mettre en place cette nouvelle institution, à commencer par la
structure administrative et pédagogique des établissements.
Dès les premières années, les directeurs des services pédagogiques (maintenant directeurs
des études) commandent une étude pour les aider à mettre au point leur structure
organisationnelle, en particulier leur structure pédagogique. En 1970, le Centre
d’animation, de développement et de recherche en éducation (CADRE)19 produit un
rapport qui décrit les rôles et fonctions à prévoir dans une telle structure, en se basant sur
un « Guide pour l'administration d'un CEGEP, document préliminaire de 1967 »
(document cité par CADRE, 1970) l’outil de travail des directions de collège. Le Guide
pour l’administration d’un cégep distingue une « fonction » d'un « poste administratif ».
Ainsi, une fonction peut être remplie par plusieurs personnes. Il n'est pas nécessaire de
créer un poste pour chaque fonction ; cela dépend des caractéristiques particulières à
l'établissement : sa taille, sa localisation, les services qu'elle offre, son plan de
développement, etc. Ce guide soutient le point de vue que chaque collège doit définir sa
structure et décrire ses fonctions et postes en réponse à ses besoins particuliers plutôt que
de se conformer à un modèle universel. En accord avec cette conception, la fonction
d’animation pédagogique ne sera pas, dans un premier temps, attribuée à une personne en
particulier.
18 Pendant quelques années, l’acronyme CEGEP sera utilisé pour nommer ces établissements jusqu’à ce que le substantif «cégeps» passe définitivement dans l’usage.
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19 Le CADRE est un organisme qui offre un service centralisé de soutien au développement pédagogique des établissements d’enseignement privé depuis 1968. La Fédération des cégeps y adhère dès 1970 et, en 1981 alors qu’elle se redéfinit elle-même, retire son adhésion (CADRE, 1993).
3.2.1 Animation, recherche et expérimentation
On remarque, à cette époque, que le terme « conseiller pédagogique » est utilisé pour
nommer les aides pédagogiques individuels auprès des élèves et non les personnes qui
apportent un soutien pédagogique aux enseignants, lesquelles portent différents titres
selon les endroits. On nomme plutôt « agent de changement pédagogique » la personne
qui influence et accompagne le changement, qui, sur le plan pédagogique, fait le lien
entre les pratiques des établissements et les universités, productrices de connaissances, et
qui tente de communiquer ces connaissances à ceux qui pourraient en avoir besoin tout en
soutenant ceux qui tentent d’adopter de nouvelles pratiques (Cooke, 1972). C’est en fait
d’animation pédagogique dont il est question ici.
Au cours des premières années de vie des cégeps, il n’apparaît pas nécessaire de créer un
poste pour une telle fonction. Plusieurs personnes, de leur point de vue, (par exemple, les
directeurs des services pédagogiques (DSP), les chefs de secteurs, les adjoints au DSP,
les coordonnateurs de départements, certains enseignants qui ont un certain leadership
dans ce domaine) considèrent qu’elles jouent déjà ce rôle dont la responsabilité première
revient au personnel de direction. Quant au concept d’animation pédagogique, il n’est pas
précisément circonscrit et il semble s’appliquer à tout discours ou toute activité qui tente
d’influencer la qualité de l’enseignement. Le rapport du CADRE présente la
responsabilité d'animation pédagogique comme relevant en premier lieu de la direction
pédagogique (DSP et chefs de secteur20) et des responsables de département21, mais cette
fonction est exprimée en terme de leadership et de contrôle (« consultation, stimulation et
contrôle ») plutôt que d'animation et de conseil.
20 Il s’agit probablement de cadres intermédiaires chargés de la coordination des deux secteurs de l’ordre collégial : le secteur général (nommé maintenant le secteur préuniversitaire) conduisant aux études universitaires, et le secteur professionnel (nommé maintenant le secteur technique) conduisant au marché du travail. Certains établissements prévoient dans leur structure organisationnelle de tels postes de cadres intermédiaires.
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21 La personne responsable de département est un enseignant dégagé d’une partie de sa tâche d’enseignement pour coordonner les travaux du département dont il fait partie.
Origine et évolution de la fonction
Dans le contexte où un nouvel ordre d’enseignement est créé et où une pédagogie, des
instruments d’évaluation, du matériel pédagogique et didactique, des procédures et des
démarches spécifiques à cet ordre d’enseignement sont à construire, c’est la fonction de
coordination à la recherche et à l’expérimentation qui a semblé la plus pertinente à
plusieurs. D’autant plus que tout cela devait se faire dans un contexte où l’on cherche non
seulement à appliquer de nouvelles connaissances psychopédagogiques, mais aussi à en
produire, pour améliorer significativement la qualité de l’enseignement. Les cégeps ont
voulu dès le début de leur existence asseoir leur développement pédagogique sur des
fondements scientifiques. La recherche et l’expérimentation pédagogiques se sont
développées et structurées dans ce contexte. Il est devenu rapidement clair qu’une
personne devait assurer la coordination de ces activités. Le rapport du CADRE propose
un poste de coordonnateur de la recherche et de l’expérimentation ; cette personne
pourrait être un « spécialiste de la pédagogie agissant comme conseiller auprès des
professeurs ».
« Acceptant le principe que l'animation pédagogique est la première responsabilité de la direction pédagogique (chefs de secteurs et DSP) et des chefs de département, il nous semble que le « coordonnateur de la recherche et expérimentation » pourrait être un spécialiste de la pédagogie agissant comme conseiller auprès des professeurs. (…) Lien normal entre l'équipe de recherche au niveau provincial22 et les professeurs du collège, (…) cette fonction pourra comprendre la coordination de la recherche et de l'expérimentation, et plus particulièrement l'implantation et l'évaluation des nouvelles technologies de l'enseignement et des nouvelles méthodes pédagogiques » (CADRE, 1970, p. 160).
Cette fonction de coordonnateur de recherche et d'expérimentation présente une grande
parenté avec celle de conseiller pédagogique actuel, malgré l’insistance sur les activités
de recherche. Précisons que la « recherche au collégial » est un concept flou en 1970. Elle
semble être comprise au sens restreint d’expérimentation pédagogique structurée et
rigoureuse.
À titre d’exemple, le CADRE propose la description de tâche suivante pour ce qui
concerne le coordonnateur en recherche et expérimentation : conseil technique auprès du
Page 49
22 Peut-être est-il fait référence au CADRE, mais nos recherches n’ont pas permis de le confirmer.
DSP, assistance technique auprès des départements, coordination des travaux théoriques.
Même s'il doit se mettre au service de la direction pour le développement de programmes
d’études, il est prioritairement à la disposition du personnel enseignant. On compte sur
une personne ayant une formation poussée en sociologie, connaissant les techniques de
recherche de cette science et ayant une expérience du milieu scolaire. Les tâches qu’on
lui attribue sont principalement celles qui touchent l’expérimentation pédagogique et
l’élaboration de matériel pédagogique.
Parmi les principes à respecter pour établir une structure administrative et créer les
fonctions et les postes appropriés, il est suggéré de donner la priorité aux exigences
découlant des objectifs pédagogiques : « des fonctions essentielles se retrouveront partout
dans la mesure où elles sont une réponse à des besoins essentiels » (CADRE, 1970, p. 9).
On constate que la fonction de conseiller pédagogique, non prévue au départ dans la
structure organisationnelle, s’est imposée d’elle-même comme essentielle au collégial
pour atteindre les objectifs pédagogiques souhaités. L’« euphorie des bâtisseurs »
(Gingras, 1992) suscitait nombre d’expériences pédagogiques dans les cégeps à peine
nés. Dans plusieurs cas, des expériences négatives ou décevantes d’innovation
pédagogique, autant que les recommandations de groupes de réflexion, ont conduit à la
décision de créer une fonction pour soutenir l’expérimentation pédagogique. Par
exemple, un rapport interne d’un collège au sujet d’une expérience pédagogique
abandonnée regrette que « le manque de structures solides, le manque de coordination,
l’absence d’un responsable guidé par autre chose que le zèle, le manque d’évaluation
approprié, furent des facteurs déterminants pour l’abandon de cette expérience
pédagogique, … » (Bastien, 1971). Cet auteur poursuit :
«Déjà certaines expériences pédagogiques ont été tentées par nos enseignants, soit individuellement, soit par des équipes de travail ; mais ces efforts sont souvent dispersés et risquent de rester stériles, faute de coordination, d’un plan d’approche systématique, de moyens de vérification et de contrôle de la valeur pédagogique des expériences réalisées. (…) Pour ces diverses raisons, il est nécessaire que le Collège s’adjoigne les services d’un conseiller en recherche et en expérimentation. » (Bastien, 1971).
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Ces extraits d’un rapport d’un comité de travail montrent que dans certains cégeps, dès le
début des années soixante-dix, on explique le peu de succès, en termes de résultats ou de
Origine et évolution de la fonction
retombées, des expériences liées à la construction d’une pédagogie collégiale par le
manque d’encadrement et de soutien pédagogiques par une personne spécialement dédiée
à cette fonction.
3.2.2 La naissance des services
Un service chargé spécifiquement de jouer ce rôle émerge dans quelques établissements.
Ainsi, au début de la décennie soixante-dix, on retrace dans les cégeps divers rapports qui
recommandent la création d’un service de recherche et d’expérimentation (Bastien,
1971; Chabot, 1971; Cégep régional Saguenay-Lac-St-Jean, 1973) ou d’un service de
recherche et développement sur une base permanente (Aylwin, 1974). D’autres cégeps
font le bilan des premières années d’exercice d’un tel service (Aylwin, 1974; Gariépy,
1972; Giroux & Dandurant, 1972; Goulet, 1976; Lajoie, 1972). Les premières réflexions
autour de l’animation pédagogique font un lien très étroit entre cette fonction et la
recherche pédagogique (collégial, 1972). Les coordonnateurs ou conseillers en recherche
et expérimentation deviendront les premiers conseillers pédagogiques de cégeps. Ceux-ci
conserveront le dossier de la recherche et de l’expérimentation pédagogique dans la
majorité des cas, mais l’animation et la consultation pédagogiques ainsi que le
perfectionnement du personnel enseignant accapareront une part de plus en plus grande
de leurs activités, au moins jusqu’au début des années quatre-vingt-dix.
Les premiers établissements collégiaux à créer un service d’animation pédagogique
estiment qu’il importe de mettre au service des enseignantes et des enseignants une
personne chargée de les informer, les conseiller, les soutenir sur le plan pédagogique,
mais aussi de contrôler et de surveiller les expériences faites dans ce domaine (Gariépy,
1972). Diverses raisons sont à la source de la création de cette fonction, toutes liées au
dynamisme de la vie pédagogique à cette époque, à cause du peu de formation
pédagogique du personnel enseignant des cégeps et de l’absence de matériel pédagogique
et didactique ainsi que de la nécessité de trouver des démarches et des procédures
adaptées au collégial. Soulignons la reconnaissance par plusieurs professeurs de leurs
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lacunes et de leurs besoins au plan pédagogique23 (besoin de formation et de
perfectionnement), le besoin de toute institution d’améliorer ses connaissances et ses
méthodes (besoin de recherche), le besoin complémentaire d’essai d’application et
d’évaluation (besoin d’expérimentation) (Lévesque, 1975). Soulignons d’autre part
l’ampleur des innovations et des expérimentations naissantes, la volonté de leur donner
du corps et des garanties, le besoin d’un contrôle professionnel de ce dynamisme pour le
faire progresser positivement, la nécessité de canaliser les énergies, le besoin de
recherche et de documentation, le désir de réveiller le milieu, d’élargir le cercle des
innovateurs, d’améliorer l'enseignement. Mentionnons également le besoin des
professeures et des professeurs d'être informés sur les théories, les approches, les
méthodes et les expériences (CADRE, 1970; Gariépy, 1972). Enfin, à la suite de la
passation du test PERPÉ24 (Perceptions étudiantes de la relation professeur-étudiants),
plusieurs demandes de soutien individuel venant du personnel enseignant sont
acheminées au CADRE, responsable de l’administration et du suivi du test, qui ne suffit
pas à répondre à cette demande. Les responsables de ce test croient qu'il y a suffisamment
de besoins pour un poste d'animateur pédagogique dans chaque cégep du réseau collégial
et plaident pour la création d’un tel poste au niveau local (Gariépy, 1972).
En 1969, trois cégeps ont un conseiller en recherche et expérimentation ; en 1971, huit
cégeps sur vingt-cinq ont un service d’animation pédagogique ou un poste de conseiller
en recherche et expérimentation qui s’occupe de plusieurs dossiers ; six cégeps prévoient
la création de ce poste en 1972-1973 et six autres, en 1973-1974 (Gariépy, 1972).
Pendant cette période on remarque une certaine confusion : au sujet de la notion
d’animation pédagogique, au sujet de qui doit l’exercer, au sujet de la répartition des
tâches liées à cette fonction, entre les notions de recherche, d’expérimentation et 23 Rappelons que les enseignants des cégeps sont souvent engagés sur la base de leur compétence dans la discipline enseignée et, au secteur technique, sur la base de leur expérience de travail dans le domaine de formation. Encore à ce jour, aucune formation pédagogique n’est formellement exigée pour enseigner au collégial. On estime qu’au début des cégeps, 80% des enseignants n’avaient bénéficié d’aucune formation pédagogique (Gingras, 1993b).
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24 Test offert sur une base volontaire aux enseignants et enseignantes du collégial depuis environ 1968. Le test permet un diagnostic de forces et de lacunes de l’enseignant en comparant les perceptions des étudiants et leurs attentes relativement à différentes dimensions de l’enseignement. Les enseignants qui l’utilisent reçoivent, de façon confidentielle, un rapport qui leur fournit des pistes de développement professionnel.
Origine et évolution de la fonction
d’animation pédagogiques, ainsi que des hésitations entre les réponses à donner à des
besoins à l’échelle du réseau et ceux à l’échelle locale.
Un groupe de travail formé pour clarifier la situation du soutien pédagogique propose de
créer une équipe permanente de recherche au plan du réseau et de distinguer chercheur
(niveau réseau) et conseiller-animateur (niveau local) pour faire le lien entre l'équipe de
recherche provinciale, et les professeurs (Gariépy, 1972)25. Ce groupe cherche à préciser
la fonction d'animateur pédagogique en y proposant un regroupement de tâches
effectuées par diverses personnes. En effet, la tâche d'animation reste souvent partagée
entre plusieurs personnes de différents statuts (DSP, adjoints, chefs de secteur, chefs de
département, coordonnateurs de bibliothèque, ou de l'audio-visuel), alors que la tâche
spécifique du coordonnateur en recherche et expérimentation est de conseiller les
professeurs. Le groupe de travail tente de cerner le sens d'animation pédagogique dans
une perspective large et de distinguer l’animation elle-même de la tâche assumée par une
personne attitrée officiellement, spécifiquement et exclusivement à cette responsabilité.
En réponse à un sondage auprès des Directeurs des services pédagogiques des cégeps, la
tâche de la personne affectée à cette fonction devrait être de « promouvoir, coordonner et
suivre les innovations et les expériences pédagogiques reliées au renouveau continu de la
pédagogie ; conseiller et assister les professeurs en dehors de la ligne d'autorité ; fournir
les informations sur les expériences faites ailleurs et les données nécessaires à
l'expérimentation ; évaluer scientifiquement les expériences pédagogiques et développer
les instruments d'évaluation nécessaires » (Gariépy, 1972). Les résultats de ce sondage
corroborent les conclusions tirées par les directeurs généraux des cégeps quelques mois
plus tôt.
« Que le titre soit changé ou pas, il semble nécessaire que les CEGEP mettent auprès des professeurs une personne chargée de : les conseiller au plan pédagogique, informer l'équipe de recherche sur les besoins du milieu, traduire les résultats de recherche de l'équipe auprès des professeurs, être un ferment de réflexion et d'organisation dans le milieu, contrôler, surveiller les expériences faites dans le CEGEP et « relativiser » les recherches locales » (Procès-verbal de la 3e réunion de l’exécutif de la Fédération des cégeps, janvier 1970, annexe 3 de Gariépy, 1972) .
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25 La recherche documentaire n’a pas permis de trouver ce qu’il est advenu de cette proposition.
La vision centralisée de l’animation pédagogique issue du Rapport Parent qui a conduit à
l’organisation, à l’ordre primaire et secondaire, d’un système d’agents de développement
pédagogique qui parcourent la province pour « diffuser la meilleure pratique et en suivre
l’évolution ou l’émergence » (Marsolais, 1994) se reflète au collégial par l’idée d’un
centre de recherche à l’échelle du réseau, comme le CADRE26. Ce modèle d’animation
pédagogique repose sur deux postulats : il existe des pratiques et des innovations
pédagogiques fructueuses à diffuser dans les milieux de pratique ; il revient à des experts
d’assurer cette diffusion et d’en soutenir les applications. Mais, au début des années
soixante-dix, la pédagogie au collégial étant à construire, les postulats se formuleraient
plutôt ainsi : les pratiques et les innovations fructueuses viennent des établissements, plus
spécifiquement des acteurs sur le terrain de l’enseignement ; la pédagogie collégiale est à
définir à partir des innovations conçues et expérimentées sur le terrain. Très rapidement,
des enseignants des cégeps vont exprimer des besoins de soutien et d’animation
pédagogiques à l’échelle locale pour élaborer leurs propres pratiques pédagogiques et en
apprécier les résultats, pour mieux connaître ce qui se fait ailleurs, dans un but
d’adaptation, et pour se former aux nouveaux courants pédagogiques. Les cégeps
naissants s’inscrivent dans une dynamique de construction d’une pratique pédagogique
plutôt que dans une dynamique de diffusion et d’application d’une pratique importée d’un
autre contexte.
Le mandat de recherche et d’expérimentation pédagogique tel que compris à certains
endroits s’avère trop restreint pour répondre à ce besoin. L’éparpillement de la fonction
d’animation pédagogique entre plusieurs personnes et le flou entourant le concept lui-
même contribuent à la décision de faire un bilan et de revoir les orientations du dossier du
soutien au développement pédagogique.
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26 Il importe de signaler le rôle très important qu’a joué le CADRE dans le développement de la pédagogie collégiale, notamment par le biais de la publication de la revue Prospective dont l’impact a été considérable.
Origine et évolution de la fonction
3.2.3 On fait le bilan
En 1974-1975, vient l’heure d’un premier bilan. Pour soutenir les travaux de la
Commission des conseillers en recherche et expérimentation27 mandatée par la Fédération
des cégeps, Lévesque mène une étude dans le but de décrire la situation et d’analyser la
pertinence de la fonction. Il s’agit de mieux connaître les caractéristiques des services
offerts par les cégeps dans le domaine du soutien pédagogique pour prendre conscience
de l’état de la situation, mieux définir ce service et l’améliorer. Le rapport est le résultat
de l’étude des documents recueillis auprès des 22 cégeps qui offrent un tel service,
d’entrevues téléphoniques de 29 membres de la Commission des conseillers en recherche
et expérimentation répartis dans ces 22 cégeps et de deux rencontres de groupes de
conseillers en recherche et expérimentation à Montréal et à Québec. On peut conclure que
le rapport fournit un portrait exact de la situation.
Il en ressort que 16 dénominations différentes sont utilisées pour ce service, par exemple,
service de recherche et expérimentation, service de développement pédagogique, service
d’animation et de recherche pédagogique, service du perfectionnement pédagogique,
conseiller pédagogique, adjoint au DSP… Ces services peuvent être rattachés à trois
endroits différents dans la structure organisationnelle, directement ou indirectement à la
direction des services pédagogiques, ou encore directement à la direction générale du
collège. La formation des personnes affectées à ce service est très diversifiée : treize
personnes ont une formation initiale en sciences de l’éducation, en pédagogie, en
docimologie ou en audio-visuel ; six personnes ont été formées en sciences sociales,
sociologie, anthropologie, sciences politiques ou administration publique ; six autres en
psychologie, orientation scolaire ou relations humaines ; huit, en sciences humaines,
philosophie, lettres, géographie, théologie et trois28 en sciences pures et appliquées,
27 Cette Commission fut un lieu très important de rassemblement des conseillers pédagogiques et, de l’avis de ceux qui y ont participé (en particulier Jean-Pierre Goulet et André Gaudreau qui ont bien voulu nous éclairer à ce sujet), sûrement le creuset de leur identité professionnelle. Elle a existé pendant la première décennie de vie des cégeps. Elle sera présentée plus en détail à la fin de la section 3.2.3.
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28 Certaines personnes possèdent plus d’une spécialisation.
mathématiques, biologie, pêcheries, technologie alimentaire. Onze personnes ont un
statut de personnel cadre et 18 appartiennent au personnel professionnel.
Le rapport conclut à une grande variabilité dans la forme (titres des personnes, noms des
services, structures) mais à beaucoup de similitude quant au contenu (activités, objectifs).
La préoccupation principale des services est reliée à l’aide pédagogique aux professeurs
(consultation, animation, assistance pour la rédaction, supervision de projets
d’expérimentation pédagogique, information, documentation, assistance à des groupes),
au perfectionnement des professeurs et, de façon plus marginale, à la recherche
institutionnelle et à la création d’instruments29. L’auteur établit un portrait type du
service : une situation confuse, de l’insatisfaction de la part des conseillers pédagogiques,
un titre et un mandat prestigieux mais peu de moyens concrets pour les réaliser, une
crédibilité à construire auprès des professeurs, un malaise du conseiller en recherche et
expérimentation qui provient de sa situation dans le collège ; par contre, beaucoup de
satisfaction quant à son travail, beaucoup d’autonomie, parfois trop, car il n’y a pas
toujours de cadre pour la délimiter (Lévesque, 1975).
Par ailleurs, l’auteur critique le nom souvent attribué à ce service (Service de recherche et
expérimentation) car il s’y fait très peu de véritable recherche scientifique, mais il se fait
beaucoup d’aide pédagogique aux professeurs. En peu de temps, quelques années à peine,
le soutien à la recherche et à l’expérimentation pédagogiques s’est transformé en soutien
pédagogique, souvent individualisé. Il s’agit donc davantage de « conseillers
pédagogiques » que de « conseillers en recherche et en expérimentation ».
Enfin, il propose de déterminer l’orientation d’un tel service, de délimiter les tâches des
personnes qui y sont rattachées, de fournir les ressources pour atteindre les objectifs, de
se centrer sur cinq mandats : l’aide pédagogique aux enseignants (consultation,
animation, perfectionnement), la recherche pédagogique, la recherche institutionnelle,
l’expérimentation pédagogique et la création d’instruments de travail. Pour assurer
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29 Il n’est pas précisé de quel type d’instruments il s’agit : instruments de collecte de données? d’évaluation? d’observation?
Origine et évolution de la fonction
l’efficacité des interventions des conseillers pédagogiques, il recommande le respect des
principes d’autonomie, de confidentialité, de liberté de consultation et de crédibilité
(Lévesque, 1975). Ces principes prennent la forme de ce que les conseillers pédagogiques
du collégial nomment maintenant « la zone franche » nécessaire à l’exercice efficace de
leur fonction (Lamontagne, 1999; Pratte, 2001; Raymond, 1993),
« […] zone d’intervention où ils ne sont pas confondus avec la direction, cette zone qui correspond à la marge de manœuvre qui leur permet de conserver la confiance des enseignants et des enseignantes et ainsi, conserver la possibilité d’exercer adéquatement leur rôle de soutien par rapport à ceux-ci » (Pratte, 2001, p. 32).
Cette « zone franche » évoque aussi l’idée d’une frontière étanche entre l’évaluation
administrative du personnel enseignant et le service d’aide pédagogique auquel les
enseignants font librement appel. Les conseillers pédagogiques considèrent incompatible
la réalisation de ces deux mandats par une même personne.
À la suite du rapport (Lévesque, 1975), on peut penser que la majorité des collèges30 ont
mis sur pied un service d’animation et de perfectionnement pédagogiques. Les rapports
annuels de ces services permettent toutefois de constater que la fonction de conseiller
pédagogique, ses responsabilités, ses mandats, son champ d’intervention ne sont pas
toujours clairement distingués de ceux d’autres membres du personnel. Par exemple, un
conseiller pédagogique d’un collège privé relève le flou et la confusion qu’amène le fait
qu’il soit une personne-ressource au service des enseignants, lesquels fixent les priorités
d’action et attribuent même les ressources allouées au service, alors que dans la ligne
organisationnelle, il relève de la direction. De même selon lui, la direction entretient une
confusion entre la fonction conseil et la fonction contrôle, ce qui est source potentielle de
conflits. Enfin il déplore le recoupement des mandats de la direction, des directions de
secteurs, de l’animateur pédagogique en ce qui concerne les responsabilités de chacun
dans le domaine de l’animation pédagogique (Goulet, 1976). Bien que ce témoignage ne
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30 Le nombre exact n’est pas précisé dans les écrits consultés. Selon l’Annuaire des cégeps 2002-2003 (Fédération des cégeps), en 1974, 38 cégeps avaient été fondés et 22 collèges qui offrent un tel service ont répondu à l’enquête de Lévesque (1975).
puisse être généralisé, la confusion à la fois conceptuelle et organisationnelle concernant
la fonction ne semble pas complètement dissipée.
Malgré le travail qu’il reste à faire, on peut considérer qu’à la suite du rapport (Lévesque,
1975), la fonction de conseiller pédagogique est définie, reconnue et exercée dans la
plupart des établissements collégiaux. Généralement, un poste est créé pour la fonction
qui s’articule à partir des mandats suivants : l’animation pédagogique, la consultation
pédagogique, le perfectionnement du personnel enseignant, ainsi que l’information et le
soutien concernant les activités de recherche et d’expérimentation pédagogiques. En ce
qui concerne ce dernier mandat, mentionnons qu’à cette époque, 80 % de la recherche au
collégial est pédagogique et vise à «créer l’institution» (développement institutionnel) et
à «inventer la pédagogie collégiale» (Gingras, 1993c, 1994). Le rôle des conseillers
pédagogiques dans ce dossier est d’exercer une veille en ce qui concerne les recherches
pédagogiques, de soutenir la production de demandes de subvention des chercheurs de
collèges, de participer eux-mêmes à des travaux de recherche, de diffuser des résultats, de
soutenir l’expérimentation et l’application de résultats de recherche. Une frontière est
tracée entre le rôle de soutien et celui de contrôle. Le ou la CP joue un rôle de soutien
auprès du personnel enseignant, alors que le contrôle relève de la direction des collèges.
Le ou la CP peut aussi exercer son action auprès du personnel cadre et de ses collègues
professionnels. Il agit comme généraliste en pédagogie et il est attaché à un
établissement, dont il est issu le plus souvent en tant qu’ex-enseignant.
Avant de terminer cette section, il convient de rappeler le rôle qu’a joué à cette époque la
Commission des conseillers en recherche et en expérimentation. Au début de son
existence, lors de la création des cégeps, la Fédération des cégeps comprenait plusieurs
commissions, généralement une pour chacun des corps d’emploi des cadres et des
professionnels. À ce titre fut créée une « Commission des conseillers en recherche et en
expérimentation ». La plupart de ces commissions ont été dissoutes à la fin des années
soixante-dix lorsque la Fédération des cégeps s’est elle-même restructurée. La
Commission des conseillers en recherche et en expérimentation a été le premier lieu de
rassemblement des conseillers pédagogiques du collégial. Ceux-ci éprouvaient un grand
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Origine et évolution de la fonction
sentiment d’appartenance à leur groupe et ils y ont construit une identité professionnelle
assez forte malgré le flou entourant la définition de leur titre et de leur mandat, malgré la
confusion qu’entraînait l’appartenance de certains d’entre eux à la fois au personnel cadre
et au personnel professionnel. Ils constituaient un groupe fermé qui jouissait d’une grande
indépendance par rapport à d’autres groupes et qui prenait et défendait des positions
souvent divergentes lorsqu’ils produisaient des réflexions et des plans d’action pour
penser et accompagner des projets institutionnels de développement pédagogique. On
verra plus loin qu’à la fin des années soixante-dix lorsque cette commission fut dissoute,
un groupe de ces conseillers pédagogiques ont alors fondé l’Association québécoise de
pédagogie collégiale (AQPC) pour recréer un lieu d’appartenance, de partage, d’entraide
et de discussion pédagogiques31.
3.3 Vitesse de croisière (1975-1993)
Au Québec, cette période en est une d’abord de consolidation pour ce qui est du réseau
des cégeps, puis de consultation et de réorganisation (1985-1993) dans le monde scolaire
en général. Après 1975, on trouve peu de documentation sur la fonction de conseiller
pédagogique au collégial. Un inventaire systématique des tâches auxquelles se sont
consacrés les conseillers pédagogiques de cette époque pourrait être produit à partir des
rapports annuels des services pédagogiques des cégeps. Ce recueil serait un moyen
efficace d’apprécier l’évolution de la fonction. En l’absence d’une telle étude, nous avons
retracé et examiné quelques rapports écrits par des conseillers pédagogiques. Ces rapports
montrent que les CP organisent leur plan de travail selon les thèmes proposés par le
rapport Lévesque (1975). Ainsi, ils mentionnent des activités liées à la mise sur pied d’un
service de documentation pédagogique, d’animation pédagogique, de consultation
individuelle et de groupe ainsi que de divers mécanismes d’information pédagogique. Ils
rapportent également le soutien aux activités de recherche et d’expérimentation, soutien
toutefois qui semble moins important que la consultation et l’animation pédagogiques. Ils
Page 59
31 Nous remercions Messieurs Jean-Pierre Goulet et André Gaudreau pour nous avoir éclairée au sujet du rôle qu’a joué la Commission des conseillers en recherche et expérimentation dans l’histoire des conseillers pédagogiques du collégial.
offrent également diverses formules de perfectionnement pédagogique (Beaulieu &
Bouchard, 1982; Matteau, 1989).
En même temps que la fonction se stabilise, les qualités nécessaires pour l’exercer se
précisent : fort en relations humaines, ouvert aux nouvelles idées, à jour dans des
connaissances de toutes sortes, psychologue à ses heures, « omnipraticien » de la
pédagogie, disponibilité de tous les instants (Matteau, 1989). Au primaire et au
secondaire, certains conseillers pédagogiques définissent leur tâche principale à partir de
l’animation pédagogique ; on attend du conseiller pédagogique qu’il inspire, mobilise,
anime, informe et soutienne le milieu (Larivière et Loof, 1986). Ces aspects de la tâche
peuvent aussi être déduits des commentaires des conseillers pédagogiques de collège ;
toutefois, ils accordent une place grandissante au perfectionnement du personnel
enseignant (Beaulieu & Bouchard, 1982; Goulet, 1976; Matteau, 1989; Morin, 1986;
Tremblay, 1989). Ces témoignages et comptes rendus laissent entendre, qu’à cet ordre
d’enseignement également, leur rôle en est un de leader pédagogique dans leur
établissement, leadership d’influence plutôt que de gestion et de contrôle. La pédagogie
collégiale est en train de se définir de diverses façons dans les établissements et il s’avère
nécessaire de suivre et de soutenir le mouvement.
3.3.1 La naissance de PERFORMA
L’effervescence de projets pédagogiques dans les collèges de même que la responsabilité
nouvelle de dispenser des activités créditées de formation continue dans le cadre de leur
participation à PERFORMA32 conduisent les conseillers pédagogiques à la recherche de
façons plus efficaces de s’informer, de s’alimenter et de travailler ensemble. Pendant la
deuxième période (1975-1993), le perfectionnement deviendra à son tour un moteur
essentiel de l’animation pédagogique avec la naissance et la croissance rapide de
PERFORMA. Il s’agit d’un partenariat entre la quasi totalité des collèges publics, quelques
collèges privés et instituts d’une part, et l’Université de Sherbrooke d’autre part. Son
mandat est de fournir du perfectionnement pédagogique et didactique, principalement au
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32 PERFORMA sera présenté en détail un peu plus loin.
Origine et évolution de la fonction
personnel enseignant des établissements membres. Ce partenariat est né d’une initiative
du Collège de Sherbrooke qui cherchait un moyen original d’ancrer l’animation
pédagogique dans la réalité de l’enseignement, en fournissant des réponses adaptées à des
besoins de perfectionnement nés de problématiques locales. Le projet PERFORMA
comprend un volet de formation créditée pour les enseignants et un volet de recherche-
action pour étudier, améliorer et assurer un suivi au projet de formation et analyser ses
impacts sur l’animation pédagogique dans les collèges (Stringer, 1996). Très rapidement,
PERFORMA s’est étendu à la grandeur de la province. Avec l’AQPC, la revue Pédagogie
collégiale et l’ARC, PERFORMA est vite devenu un lieu important de diffusion des
pratiques, de formation continue et de construction de la pédagogie au collégial; les
conseillers pédagogiques y ont œuvré activement et s’y sont eux-mêmes alimentés.
L’organisation et la prestation d’activités de perfectionnement deviennent une
préoccupation centrale pour plusieurs collèges avec l’avènement de PERFORMA (Matteau,
1989; Morin, 1986). La participation d’un collège à ce partenariat implique qu’une
personne, généralement un conseiller pédagogique ou un conseiller en recherche et
expérimentation, doive agir comme responsable de programme de formation pour
l’Université dans son collège. Cette personne doit procéder à des analyses de besoins,
élaborer une programmation d’activités, effectuer le suivi administratif et pédagogique de
ces activités et, également agir elle-même comme personne-ressource lors d’activités de
perfectionnement créditées. Enfin, comme nous l’avons souligné au chapitre 2, elle doit
aussi participer à des groupes de travail au sujet de dossiers particuliers et participer, une
dizaine de jours par année, à des assemblées générales consacrées à des échanges sur les
orientations de PERFORMA ainsi qu’à diverses activités de ressourcement. La personne
répondante locale jouit d’un avantage considérable par rapport aux autres CP par son
appartenance à un réseau qui offre un partage de ressources et des occasions de
ressourcement uniques.
Sous l’influence, sans doute, du modèle pédagogique de PERFORMA qui prévoit la mise à
contribution des participants eux-mêmes, invités à agir en tant que personnes-ressources
pour leurs collègues sur des aspects pédagogiques, certains bilans des services
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d’animation pédagogique dégagent une tendance à se tourner vers l’utilisation de
ressources internes plutôt qu’externes (Beaulieu & Bouchard, 1982). Les conseillères et
les conseillers pédagogiques, en particulier les personnes répondantes locales, constituent
une part importante de ces ressources internes. À partir du moment où un conseiller
pédagogique devient aussi répondant local de PERFORMA, il lui faut intégrer de nouvelles
responsabilités, en particulier celle d’assumer la prestation d’activités de formation
créditées, avec tous les aspects administratifs qui en découlent. Cela devient parfois lourd
et difficile pour certains d’entre eux.
La place grandissante que prend PERFORMA dans l’animation pédagogique par le biais du
perfectionnement crédité des enseignants remet en cause la façon habituelle de travailler
des conseillers pédagogiques qui, parfois, vivent diverses tensions par rapport à ce
changement.
« Au cours des dix dernières années, nous sommes graduellement passés d'une fonction d'animateur pédagogique à celle de gestionnaire d'une approche institutionnelle plus ou moins définie du perfectionnement et du développement pédagogiques. Ce fut la mutation d'un rôle de counseling avec une large autonomie en celui de fonctionnaire plus ou moins volontaire, occupé ou affecté à de nombreux dossiers tant à PERFORMA que dans nos autres zones de performance. Il en résulte un éparpillement et une difficulté importante quant à l'efficacité de l'intervention professionnelle et en particulier au plan psychopédagogique » (Morin, 1986).
Ce conseiller pédagogique exprime au nom de certains de ses collègues, son malaise pour
concilier polyvalence, « omniscience », besoin d’approfondissement et maîtrise de plus
en plus grande des connaissances et des outils pédagogiques. Il attribue la
complexification de sa tâche à la participation à PERFORMA. Il propose à ses collègues de
redéfinir le rôle du conseiller pédagogique de cégep par rapport à un modèle
institutionnel du perfectionnement plutôt que par rapport à une approche individuelle
d’animation pédagogique.
Toutefois, il n’est pas établi que ce sentiment soit partagé par tous les conseillers
pédagogiques – répondants locaux. D’autres peuvent considérer que leur participation à
PERFORMA, malgré les tâches supplémentaires qu’elle occasionne, facilite et soutient leur
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Origine et évolution de la fonction
action. En fait, PERFORMA, grâce à l’Assemblée générale et au groupe de recherche-
action (GRA), fournit l’une des principales sources de formation continue des conseillers
pédagogiques. Chaque cégep, par son répondant local, est relié à un réseau où l’on se
forme, mais aussi où des groupes de tâches en approfondissant des thématiques
pédagogiques produisent des démarches et des instruments, réalisent de la recherche
pédagogique, soumettent à l’examen de leurs pairs leurs réalisations pour les valider et
les améliorer, mettent au point des procédures et des interventions dans les domaines de
l’animation et du perfectionnement pédagogiques. Le répondant local peut ensuite agir
comme agent multiplicateur dans son établissement lorsque plus d’un conseiller
pédagogique se partagent les dossiers. À cet égard, les conseillers pédagogiques des
cégeps bénéficient de l’appartenance à un réseau que pourraient leur envier les autres
ordres d’enseignement.
3.3.2 L’essor de la pédagogie collégiale
Le réseau collégial s’émancipe et invente ses propres véhicules de développement
pédagogique. En 1981, lors de la restructuration de la Fédération des cégeps, devant la
menace d’abolition de la Commission des conseillers en recherche et en expérimentation,
la Commission se saborde et ses membres créent l’Association québécoise de pédagogie
collégiale (AQPC), lieu important de partage et de ressourcement pour le personnel
enseignant et pour les conseillers pédagogiques. Au cours des premières années, bien que
l’AQPC soit ouverte à tous, ce sont presque exclusivement des conseillers pédagogiques
qui vont occuper les postes d’officiers de l’association. Cette association agira comme un
ferment pour les idées pédagogiques et comme le moyen idéal pour se « réseauter » avec
des collègues. Elle sera vite reconnue comme l’un des lieux privilégiés où puiser des
idées et du soutien pour l’animation et l’innovation pédagogiques ainsi que pour faire
connaître ses propres réalisations. Les conseillers pédagogiques y participeront
régulièrement et se serviront également de la revue Pédagogie collégiale, éditée par
l’AQPC à partir de 1987, pour s’alimenter et diffuser leurs réflexions et réalisations
pédagogiques.
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En 1984, le gouvernement québécois crée un ministère de l’Enseignement supérieur et de
la Science (MESS) et y rattache le réseau collégial confirmant ainsi son appartenance à
l’enseignement supérieur. Ce ministère sera aboli en 1993 mais le réseau collégial
continuera de relever du secteur de l’enseignement supérieur, postsecondaire, non
obligatoire du ministère de l’Éducation.
En 1986, les États généraux sur la qualité de l’éducation génèrent différents efforts
d’amélioration de la pédagogie (Lemieux, 1995). On vise à augmenter la réussite scolaire
et améliorer les pratiques pédagogiques des enseignants sans pour autant y consentir des
ressources supplémentaires. C’est l’ère de la consolidation du réseau collégial, là aussi,
comme aux autres ordres d’enseignement, centrée sur l’amélioration de la pédagogie.
C’est, entre autres, par le perfectionnement des enseignantes et des enseignants et le
soutien aux activités de recherche pédagogique que les conseillers pédagogiques
relèveront ce défi. Selon Gingras (1992) « le perfectionnement des enseignants et la
recherche sont, sans contredit, ce que les cégeps ont fait de mieux durant les années
soixante-dix ».
Les conseillers pédagogiques du collégial ont été associés de très près à ces deux dossiers
depuis les débuts. On se souvient que les premiers conseillers pédagogiques des cégeps
étaient en fait des conseillers en recherche et expérimentation. Au cours de la première
période de l’évolution des cégeps (1967-1975), la recherche et l’expérimentation ont agi
comme principaux moteurs de l’animation pédagogique. Lorsque naît l’ARC
(Association pour la recherche au collégial) en 1988, il existe déjà une tradition de
recherche dans les collèges même si cela ne fait pas officiellement partie de la mission
des cégeps. Les conseillers pédagogiques ont été et sont encore, selon leurs tâches, des
acteurs importants dans la production de travaux de recherche, soit par la diffusion qu’ils
en font, soit par leur participation active aux travaux de recherche, soit par le soutien
qu’ils fournissent aux autres membres du personnel qui souhaitent élaborer une demande
de subvention, soit encore par leur collaboration pour certaines étapes d’une recherche,
par exemple, l’échantillonnage, la collecte de données, la validation, la révision de
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Origine et évolution de la fonction
rapports. Plusieurs tentent d’ancrer le plus possible leur activité d’animation pédagogique
dans les résultats de la recherche.
Historiquement parlant, l’essor de l’animation pédagogique au collégial est redevable en
grande partie et d’abord à la contribution du CADRE, puis à la naissance et au
déploiement de PERFORMA dans le réseau collégial, ensuite à la création de l’AQPC et de
Pédagogie collégiale, puis, enfin, à celle de l’ARC. Vers la fin des années quatre-vingts,
tout en reconnaissant la vitalité pédagogique du réseau collégial, certains chercheurs
déplorent l’éparpillement, l’éclatement et le cloisonnement auxquels ont donné naissance
les divers projets d’innovation réalisés dans les collèges indépendamment les uns des
autres. Ils plaident pour définir la spécificité de la formation collégiale à partir du concept
de formation fondamentale (Gingras & Laliberté, 1988). Les conseillers pédagogiques
s’approprient ce concept, le circonscrivent dans le contexte de la formation collégiale
québécoise et le diffusent dans leur collège. Le Pôle de l’Est, un groupe de conseillers
pédagogiques, le définit ainsi :
« ensemble des apprentissages qui favorisent le développement intégral de la personne et qui sont nécessaires à toute activité humaine pleinement assumée; cet ensemble réfère à deux axes de formation : l’axe 1, principalement les habiletés intellectuelles, les techniques d’étude et d’apprentissage, les buts de formation, la maîtrise des langages et les attitudes, et l’axe 2, les concepts et les méthodes propres à une discipline » (Pôle de L’Est, 1996, p. 335).
Cette façon de concevoir la finalité de l’enseignement collégial remet en question les
pratiques « privées » de chaque enseignant et confère à la profession enseignante un
caractère collectif. En effet, nul ne peut prétendre assurer le développement intégral
d’une personne par l’apprentissage de sa seule discipline, sans référence aux autres
apprentissages à faire. On recherche donc plus de concertation et d’intégration des
matières. Les CP et leurs équipes d’enseignantes et d’enseignants inventent et
expérimentent diverses manières de donner forme au concept de formation fondamentale.
Parmi les pistes qui semblent les plus fructueuses, celle de «l’approche-programme»
s’impose de plus en plus. Toujours selon le Pôle de l’Est (1996), l’approche-programme
est un «modèle d’organisation pédagogique axé sur la concertation entre les divers
intervenants en vue d’assurer une meilleure intégration des apprentissages et la cohérence
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du programme » (p. 328). Il s’agit d’un ensemble de démarches pour faciliter la
concertation entre les enseignantes et les enseignants qui oeuvrent dans un même
programme d’études en vue de l’harmonisation des orientations et des pratiques
éducatives dans ce programme. Une nouvelle ère de vitalité pédagogique s’amorce. Mais
certains leaders de l’éducation cheminent en partie dans une autre direction et s’affairent
à mettre en forme le « renouveau au collégial ».
3.4 Zone de turbulence (1993-2004)
Au début des années quatre-vingt-dix, les conseillers pédagogiques se divisent en deux
catégories : les conseillers pédagogiques affectés aux programmes de formation continue
des adultes33, perçus davantage comme des gestionnaires, et ceux qui sont affectés aux
programmes réguliers de l’enseignement ordinaire, perçus davantage comme des
animateurs (Raymond, 1993). Ce sont de ces derniers, comme on l’a souligné
précédemment, dont il est surtout question ici. Contrairement aux conseillers
pédagogiques du primaire et du secondaire, ils ont la particularité d’intervenir auprès des
enseignants de toutes les disciplines ; ils agissent donc en tant qu’experts de processus et
experts de la pédagogie. Ils exercent des fonctions de perfectionnement du personnel
enseignant, d’animation, de consultation, d’information, de promotion et de soutien à la
recherche (Deshaies, 1994; Raymond, 1993).
Parmi les conseillers pédagogiques affectés à l’enseignement régulier, ceux qui sont
rattachés à PERFORMA réalisent leur mandat d’animation pédagogique en grande partie
par le biais du perfectionnement. (Raymond, 1993), elle-même conseillère pédagogique–
répondante locale, résume bien la pensée de plusieurs CP-répondants locaux de l’époque
pour lesquels le perfectionnement pédagogique est le principal véhicule de l’animation
pédagogique. Elle défend le point de vue que le perfectionnement pédagogique agit
comme un instrument privilégié de développement pédagogique des collèges, principe
sous-jacent au modèle PERFORMA. Elle propose toutefois qu’on effectue, comme l’avait
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33 Les écrits consultés n’ont pas permis de situer le moment précis où des conseillers pédagogiques ont été spécifiquement affectés à la formation continue dans le réseau collégial. On sait que ce type de conseiller pédagogique existait déjà depuis plusieurs années au début des années quatre-vingt-dix.
Origine et évolution de la fonction
déjà suggéré Morin (1986), un passage d’une conception individuelle à une conception
institutionnelle du perfectionnement et qu’on développe l’expertise nécessaire pour
répondre aux nouveaux besoins de perfectionnement. La problématique du
perfectionnement pédagogique en 1993 transcende les besoins d’un programme ou d’une
discipline, n’est plus spécifique à un établissement mais appartient à un réseau
(Tremblay, 1989, cité par Raymond, 1993). Elle rappelle également que l’efficacité du
travail de conseiller pédagogique repose sur sa crédibilité et son expertise. Pour exercer
une action stratégique dans le développement pédagogique, le conseiller pédagogique
doit disposer d’une « zone franche », « dégagée des lignes de force qui s’exercent au
niveau des relations de travail (…) ni partie prenante des zones de décisions, ni liée
directement aux intérêts du personnel enseignant ; il doit disposer de l’initiative et de
l’autonomie nécessaires pour agir de façon stratégique, et non devenir une « courroie de
transmission d’un groupe à l’autre » (Raymond, 1993).
Malgré cet accent mis sur le perfectionnement, la fonction de conseiller pédagogique
reste telle que la proposaient les rapports qui ont permis de cerner cette nouvelle fonction
et de la créer (Gariépy, 1972 ; Lévesque, 1975). Nous faisons l’hypothèse que c’est le
moteur qui donne force et direction à la fonction de CP qui a changé au fil des ans.
D’abord centrée sur le soutien et la diffusion de la recherche et de l’expérimentation
pédagogiques lors des premières années d’existence des cégeps, leur fonction s’est
ensuite exercée autour de l’animation pédagogique et du perfectionnement du personnel
enseignant pendant une vingtaine d’années comme nous venons de le rappeler. Avec le
renouveau au collégial, amorcé il y a maintenant plus de dix ans, l’accompagnement de
changements importants à concevoir et à implanter collectivement à l’intérieur d’un cadre
imposé, nécessaire à l’élaboration, la mise en œuvre, l’évaluation et le suivi des
programmes d’études deviendra prédominant dans la fonction de conseiller pédagogique
au collégial.
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3.4.1 Le renouveau au collégial
Pour la décennie 1993-2004 comme pour la période précédente, peu d’écrits scientifiques
ont été retracés au sujet de la fonction de conseillère ou conseiller pédagogique. Divers
rapports et comptes rendus publiés dans le cadre des activités de PERFORMA permettent
tout de même de suivre les effets du renouveau au collégial sur la fonction de CP. Une
mise en garde s’impose toutefois : l’analyse de la fonction de conseiller pédagogique à
partir de ces rapports pourrait être biaisée par l’accent mis sur le rôle du perfectionnement
dans l’exercice de cette fonction alors qu’une cinquantaine de CP seulement sont des
répondants locaux de PERFORMA. Cependant, de par leur rôle d’agent multiplicateur
auprès de leurs collègues et des contacts réguliers qu’ils entretiennent avec ces derniers,
nous croyons que leurs points de vue sont représentatifs des préoccupations de
l’ensemble des CP au secteur régulier.
Au début des années quatre-vingt-dix, la société québécoise, et les leaders politiques, sont
préoccupés par l’état des finances publiques. On scrute la productivité et l’efficacité dans
différents domaines, dont l’éducation, pour mieux répondre à des impératifs
d’assainissement des finances publiques. Il s’ensuit d’importantes réductions des
ressources humaines et financières dans le réseau collégial.
Quelques années plus tôt, les États généraux de 1986 avaient mis en lumière la nécessité
d’accorder la formation aux standards internationaux et, en ce qui concerne l’ordre
collégial, aux exigences de la démocratisation d’un enseignement supérieur de masse. On
conclut que l’efficacité du système dépend, entre autres, du degré d’autonomie laissée
aux établissements et de l’obligation de rendre des comptes qui en découle (Gingras,
1989). En 1992, la Commission parlementaire de l’éducation sur l’avenir de
l’enseignement collégial québécois ouvre une large consultation. Prenant en
considération « les diagnostics, les problématiques et les stratégies qui ont été
abondamment discutés », le gouvernement du Québec propose un « renouveau de
l’enseignement collégial » (Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Science,
1993).
Page 68
Origine et évolution de la fonction
Ce renouveau implique des changements importants à la fois sur les plans organisationnel
et pédagogique, changements qui auront des répercussions sur le travail des CP. Certaines
structures sont éliminées (Conseil des collèges, Commission pédagogique locales),
d’autres sont créées (Commission des études locales, Commission d’évaluation).
D’aucuns ont porté un jugement sévère sur cette réforme qui n’est pas encore
complètement implantée. « Le temps fort de 1992-1993 constitue un tournant
caractéristique pour la gestion des cégeps, car cette époque, est plus inspirée par une diète
économique et un malaise bureaucratique que par celle d’une [sic] volonté sociopolitique
comme celle de la Commission Parent d’antan » (Lemieux, 1995). À notre avis, ce
jugement ne tient pas suffisamment compte des réflexions sur les enjeux et les exigences
d’une formation postsecondaire moderne en cette fin de XXe siècle et sur les assises
théoriques pédagogiques qui ont fondé le renouveau au collégial. Un certain
rapprochement peut être fait avec la période du début des cégeps, en ce sens que la
société québécoise doit composer avec le défi et les exigences de la démocratisation de
l’enseignement supérieur ; toutefois, alors qu’en 1967 il s’agissait de démocratiser l’accès
aux études supérieures, on parle maintenant de démocratiser l’accès à la réussite des
études supérieures. Cet enjeu se conjugue à celui, à certains égards contradictoire, des
standards de qualification élevés à faire atteindre par une plus grande partie de la
population.
À travers le bouleversement des règles et des structures, les intentions du renouveau au
collégial sont surtout d’ordre pédagogiques. On visait quatre cibles stratégiques : 1)
accroître la réussite des étudiantes et des étudiants, 2) adapter davantage les programmes
aux besoins du marché du travail et aux standards de compétence internationaux, 3)
responsabiliser davantage les établissements tout en mettant en place des dispositifs
d’évaluation plus rigoureux et 4) resserrer les partenariats entre le réseau collégial, le
monde du travail et les autres ordres d’enseignement (MESS, 1993). L’atteinte des
objectifs liés à ces quatre cibles allait exiger des collèges de définir de nouvelles priorités
et d’affecter des membres du personnel à de nouveaux dossiers car le renouveau devait se
réaliser avec les membres du personnel en place (MESS, 1993). L’intention de
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responsabiliser les établissements en leur donnant plus d’autonomie et en créant des
mécanismes de reddition de compte s’est traduite par la délégation à chaque
établissement de responsabilités et de tâches jusque-là assumées par des professionnels
du ministère de l’Éducation, par exemple, l’élaboration de programmes. Les conseillères
et les conseillers pédagogiques ont été parmi les premiers à être sollicités pour réviser
leurs priorités et inclure ces nouvelles tâches dans leur plan de travail pratiquement du
jour au lendemain. Dans certains cas, des conseillers et des conseillères pédagogiques ont
eu le sentiment de devenir « des adjoints des adjoints », car ils devenaient coordonnateurs
d’équipes de travail chargées d’élaborer des politiques et d’assurer le suivi de leur
application dans le respect de règlements gouvernementaux et de politiques locales. Il
faut dire que les coupures de postes de cadres, lors des restrictions budgétaires du milieu
des années quatre-vingt-dix, sont sans doute parmi les facteurs qui ont fait des CP des
« adjoints » et des « adjointes » sans le titre. Pour plusieurs, un rétrécissement de leur
« zone franche » en a résulté (Raymond, 1993). Certains conseillers pédagogiques ont le
sentiment d’avoir perdu beaucoup d’autonomie et de marge de manœuvre. Ils doivent
exercer un rôle d’expert, d’intermédiaire dans un réseau, de formateur, de personnes-
ressources (Boucher, 1995) dans un contexte où les changements qu’ils doivent
accompagner « viennent d’en haut ».
Pour chacune des quatre cibles visées par le renouveau, voici quelques exemples de
dossiers qui se sont retrouvés prioritaires dans les tâches des conseillers pédagogiques du
collégial.34 Premièrement, au chapitre de l’aide à la réussite, il s’agissait de mettre sur
pied des sessions d’accueil et d’intégration, de préparer des plans pour accroître la
réussite, de s’approprier et d’élaborer des outils et des démarches de suivi des cohortes
étudiantes et de soutenir le travail des enseignants dans ces domaines. En ce qui concerne
la révision des programmes, deuxième cible du renouveau, il a fallu élaborer une
politique de gestion des programmes, déterminer des règles, construire des outils et
animer, souventes fois coordonner, les travaux des équipes d’enseignants et
d’enseignantes. Troisièmement, sur le plan de l’autonomie et de l’évaluation, les
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34 Ces exemples sont tirés de notre propre expérience de conseillère pédagogique à cette époque. Il conviendrait de les valider ainsi que les interprétations qui suivent auprès d’un échantillon suffisant de conseillers pédagogiques.
Origine et évolution de la fonction
conseillers pédagogiques ont été mis à contribution pour développer des politiques et des
processus nouveaux, comme on l’a dit, et pour participer à l’évaluation des programmes
et des politiques elles-mêmes. Enfin, la quatrième cible, le resserrement des partenariats,
a demandé des activités de concertation et de coordination avec différents organismes
selon des règles nouvelles ou de façon plus intensive. Par exemple, il arrive que des
employeurs soient sollicités pour participer à la collecte de données et pour formuler des
suggestions relatives à la formation dans le cadre de la démarche d’évaluation de
programme, d’autant plus que la révision des programmes accordent souvent une place
plus importante aux stages. Les programmes étant révisés selon une approche par
compétences, les activités pédagogiques à caractère « authentique » sont recherchées, ce
qui amène à solliciter la collaboration de groupes culturels ou communautaires.
Le renouveau au collégial arrive en même temps qu’une période intense de restrictions
budgétaires dans les cégeps comme ailleurs. Les restrictions budgétaires ainsi que la
redéfinition des responsabilités des enseignants quant à l’encadrement des élèves, la
définition puis la mise en œuvre de plans de réussite, par exemple, ou l’élargissement de
leurs responsabilités quant à l’élaboration, l’implantation et l’évaluation de programmes
d’études inquiètent certains conseillers pédagogiques en ce qui concerne la survie de leur
fonction. Pendant ce temps, au primaire et au secondaire, l’affirmation du rôle
prépondérant des directions d’école dans le leadership pédagogique et le désir de
responsabiliser davantage les enseignants dans la détermination des orientations
pédagogiques de l’école ont menacé la survie des conseillers pédagogiques. D’ailleurs
certaines commissions scolaires ont carrément éliminé ces postes (Francoeur, 1994a,
1994b). Ce phénomène ne semble pas s’être produit dans les cégeps si l’on se fie aux
statistiques présentées au chapitre deux. Au contraire on note une hausse continuelle de
l’effectif depuis 1996. Cela s’explique selon nous par les nombreux dossiers
pédagogiques, tout à la fois complexes et nouveaux qui ont été confiés aux collèges à ce
moment-là. Toutes les personnes en place devenaient indispensables à la mise en œuvre
du renouveau et l’on comptait sur les ressources locales, en particulier les conseillères et
les conseillers pédagogiques pour assurer la formation de tous.
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3.4.2 De nouvelles tâches pour les CP
Le soutien efficace du travail des équipes d’enseignantes et d’enseignants, auxquelles se
sont adjoints des membres du personnel professionnel, nécessite une appropriation des
fondements théoriques à la base de la révision des programmes, en particulier le
développement de compétences et l’approche-programme, puis la conception et la mise
en place des processus pour faire vivre la démarche. Cet aspect s’est avéré très exigeant
pour les conseillers pédagogiques car ils ont dû faire ces apprentissages par eux-mêmes :
étant chargés du développement pédagogique, ils doivent animer, informer, accompagner
les enseignants, mais ils disposent eux-mêmes de peu de soutien structuré pour
s’alimenter, à l’exception des services offerts par PERFORMA et l’AQPC.
Dans son rapport intitulé Des collèges pour le Québec du XXIe siècle (1993), le ministère
de l’Enseignement supérieur et de la Science réaffirmait que l’enseignement collégial
appartient à l’enseignement supérieur et que, par conséquent, il doit disposer de plus de
responsabilités académiques quant à la gestion de ses programmes d’études. Autrefois
élaborés et gérés par le ministère de l’Éducation, les programmes sont maintenant en
grande partie sous la gouverne des collèges. Non seulement ces responsabilités sont-elles
nouvelles pour les membres du personnel des collèges, mais en plus, elles doivent être
exercées selon de nouvelles bases conceptuelles issues de connaissances récentes sur
l’enseignement et l’apprentissage, peu maîtrisées par plusieurs conseillers pédagogiques,
comme le développement de compétences, l’intégration, l’interdisciplinarité et la
contextualisation des apprentissages, l’évaluation authentique, la dimension collective du
travail enseignant et la professionnalisation de l’enseignement.
Ces nouvelles responsabilités associées au renouveau ont modifié en profondeur le travail
des conseillers pédagogiques des collèges et ont fait dire à certains que leurs tâches se
sont complexifiées alors qu’ils estiment ne pas avoir suffisamment de soutien pour
développer les nouvelles compétences requises pour les assumer efficacement (Savard,
1999). Il est question ici de compétences sur le contenu (psychopédagogie, théories de
l’apprentissage, approches par compétences…), sur les processus (démarche d’approche-
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Origine et évolution de la fonction
programme, démarche d’élaboration et d’évaluation de programme…) et sur le traitement
d’aspects relationnels (gestion des conflits, traitement des résistances…). Finalement,
rappelons que, comme pour la plupart des professions, le développement rapide des
technologies de l’information et des communications vient modifier radicalement
l’exécution de la plupart des tâches quotidiennes. En plus de l’appropriation de nouvelles
façons de faire pour eux-mêmes, les conseillers pédagogiques reçoivent aussi le mandat
d’appuyer l’intégration pédagogique des technologies dans l’enseignement et
l’apprentissage par la production de plans d’action dans ce domaine et par diverses
activités de formation pour mieux soutenir le personnel enseignant.
3.4.3 Un rôle à recadrer
Lors de l’élaboration ou de la révision d’un programme, « le conseiller pédagogique est
en quelque sorte un acteur à la fois externe et interne à l’équipe par les diverses fonctions
qu’il assume : animation de rencontres, production de documents de travail ou d’outils
pour faire progresser les travaux, écriture et synthèse de certains textes » (Lebrun, 1999).
Le ou la CP est aussi chargé du perfectionnement crédité ou non des enseignantes et des
enseignants de l’équipe-programme, lequel doit s’intégrer au changement souhaité dans
l’établissement et le soutenir. Considéré comme une personne-ressource pour l’équipe
(Lamontagne, 1999), le conseiller pédagogique agit souvent en fait comme le
coordonnateur de l’équipe dont la responsabilité administrative revient à une personne
adjointe à la direction des études. Il est à la fois chargé du contenu et du processus ; il
doit intervenir sur les croyances et les attitudes, sur l’appropriation de concepts et le
développement d’habiletés, sur la conception, la mise à l’essai et l’évaluation d’outils et
de démarches tout en gérant des problèmes liés aux relations interpersonnelles, dans le
contexte de changements rapides, imposés, planifiés.
« Avec l’approche par compétences, de l’acte individuel qu’il était, l’acte d’enseigner devient une stratégie collective. Par le biais de la révision de programmes, le conseiller pédagogique oblige en quelque sorte les personnes à se consulter, à se concerter, à partager leur vécu d’enseignant. Par ses compétences pédagogiques, il agit comme un catalyseur de changement et devient par le fait même un intervenant précieux qui aura à son tour besoin d’être outillé. » (Savard, 1999)
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L’un d’entre eux exprime « le sentiment que ces dernières années, dans l’urgence de faire
face à leurs nouvelles obligations, bien des collèges ont perdu de vue le rôle premier du
répondant local [conseiller pédagogique] » (Lamontagne, 1999). Précédemment,
Lamontagne affirmait que
« la tâche principale du répondant local est l’identification, l’analyse de besoins et l’animation pédagogique de son milieu. Par animation pédagogique, j’entends l’aide aux nouveaux professeurs, les rencontres individuelles pour discuter des problématiques d’enseignement (la gestion de classe, par exemple), les rencontres avec les départements et les collègues pour l’identification et l’analyse de besoins de perfectionnement, l’élaboration d’activités de perfectionnement, le rôle de personne-ressource pour certaines [de ces] activités au regard [de l’évaluation des apprentissages et de l’évaluation des programmes] sur la planification, l’apprentissage, les stratégies d’enseignement et l’évaluation, la mise à jour de la documentation pédagogique de la bibliothèque du collège, la diffusion d’information sur la pédagogie auprès des professeurs, des collègues et des cadres de la direction des études. Pour bien remplir cette tâche, il a besoin de temps, de stabilité et d’une zone franche. Il lui faut aussi l’appui de sa direction des études et la reconnaissance de l’importance de répondre aux besoins de perfectionnement des professeurs pour assurer la qualité de l’enseignement. » (Lamontagne, 1999)
La conception du rôle de CP-répondant local traduite par ce point de vue correspond plus
à la manière dont la fonction était exercée avant le renouveau. Cette réflexion montre que
dans leur tentative d’adaptation au nouveau contexte d’exercice de leur fonction, certains
CP sont peut-être portés à promouvoir les façons de faire qui prévalaient avant le
renouveau.
Entre la direction, première responsable du leadership pédagogique et les enseignants
premiers responsables de leur propre développement professionnel, le conseiller
pédagogique doit soutenir le développement pédagogique des deux parties tout en
délimitant sa propre zone d’intervention. Cette double mission soulève l’importance
d’asseoir sa crédibilité, de tisser des liens de confiance et de développer la coopération et
l’entraide (Foucault, 1994). Cette crédibilité peut sembler plus difficile à assurer dans le
contexte de changements planifiés qui prévaut depuis le début de l’implantation du
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Origine et évolution de la fonction
renouveau au collégial parfois vus par le personnel enseignant comme décrétés par le
ministère et transmis par les conseillères et les conseillers pédagogiques.
Les nouvelles tâches évoquées plus haut impliquent la maîtrise de nouveaux objets et
processus de la part des CP. Elles exigent aussi un recadrage de leurs façons de conduire
leurs actions d’animation, de consultation et de perfectionnement pédagogiques. Habitués
à exercer une influence dans le cadre de projets dont ils définissent les orientations, les
visées et les processus, en concertation avec des petits groupes d’enseignants volontaires
qui sont souvent, d’ailleurs, les instigateurs de ces projets, il leur est plutôt demandé
maintenant de soutenir l’implantation d’une réforme planifiée et imposée par le ministère
de l’Éducation en y associant tous les acteurs concernés. Or, le respect d’un cadre
ministériel prescriptif, la nécessité de concertation pour la prise de décisions collectives et
l’obligation de reddition de comptes bouleversent la conception de l’autonomie
professionnelle chère à plusieurs enseignants et enseignantes du collégial. La
confrontation de conceptions et de valeurs qui en résulte pose de nouveaux problèmes
aux CP en ce qui concerne les façons de traiter les résistances, de gérer les conflits
interpersonnels et de situer les limites de leur rôle dans le cadre de ce renouveau. Plutôt
que des animateurs du milieu, ils ont parfois l’impression de devenir des «courroies de
transmission».
3.4.4 Des modifications amorcées
Si la fonction reste globalement la même, le renouveau au collégial a modifié le type
d’intervention, les tâches et le rôle de conseiller pédagogique de même que le partage du
temps entre les divers dossiers. Ainsi, le conseiller pédagogique consacre moins de temps
à la prestation d’activités de perfectionnement créditées. À titre d’exemple, la proportion
d’activités de perfectionnement créditées dans le cadre de PERFORMA assumées
majoritairement par les conseillers pédagogiques répondants locaux n’est plus que de 8 %
en 1993 (Gingras, 1993b), alors que dix ans plus tôt, ils en animaient eux-mêmes la plus
grande partie. Par ailleurs, ils considèrent qu’ils consacrent plus de temps à la gestion et à
l’administration des programmes d’études collégiaux (élaboration de politiques, de plans
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d’action et leur suivi) et ils disposent de très peu de temps pour leur propre ressourcement
(Raymond, 1993). La diminution des activités de formation créditées résulte peut-être en
partie des nouvelles attributions et priorités assumées par les conseillères et conseillers
pédagogiques en lien avec la mise en œuvre du renouveau (Délégation collégiale de
PERFORMA, 2000).
En même temps l’influence du conseiller pédagogique répondant local de PERFORMA et
l’enracinement local du perfectionnement seraient compromis par la tendance à faire des
répondants locaux des gestionnaires de programmes plutôt que des animateurs
pédagogiques. Une part du perfectionnement pédagogique des enseignants leur échappe
(Gingras, 1993b)en même temps que d’autres dossiers pour lesquels ils ne se sentent pas
préparés leur sont attribués. Ces éléments de contexte amènent les conseillers
pédagogiques répondants locaux à réfléchir sur les conditions d’exercice de leur fonction.
Les seuls documents que nous ayons retracés sur la fonction de conseiller pédagogique au
collégial à cette époque ont pour auteurs des membres de PERFORMA. Il s’agit de
documents produits par des répondants locaux et de documents de travail et de comptes
rendus de l’Assemblée générale de PERFORMA (Deshaies, 1994; PERFORMA, 1995, 1997;
Raymond, 1993). Toutefois, ils nous semblent tout de même rapporter fidèlement la
situation vécue par l’ensemble des conseillères et conseillers pédagogiques.
« Dans le travail des conseillères pédagogiques et des conseillers pédagogiques, on observe des changements significatifs : le service direct à l’enseignement tend à diminuer ; on met davantage d’énergie dans des démarches d’élaboration et d’évaluation de programmes ; on manque de temps pour assurer un suivi aux opérations d’implantation et d’évaluation de programmes ce qu’exigerait pourtant un souci d’animation et de développement pédagogiques ; de plus en plus, la répondante locale ou le répondant local met ses compétences au service de décisions et d’orientations de l’administration et ce qu’on appelle traditionnellement la « zone franche » tend à disparaître. […] ils sont en passe de devenir des « agents de programmation » plutôt que des «agents de terrain » ». (PERFORMA, 1997)
Page 76
On s’inquiète du fait que l’action du conseiller pédagogique devient de plus en plus
affectée au développement des programmes alors que le développement professionnel des
Origine et évolution de la fonction
enseignants, sur la base du Profil de compétences du personnel enseignant du collégial,
(Laliberté et Dorais, 1998) exige pour une bonne part un soutien individuel des
enseignants qui souhaitent se sentir plus à l’aise en classe et avec leurs élèves. Les
changements qui affectent les conditions d’exercice des conseillers pédagogiques
répondants locaux nous semblent bien résumés par cette synthèse faite dans le cadre
d’une Assemblée générale de PERFORMA :
« 1. Réduction des ressources : Moins de conseillères pédagogiques et de conseillers pédagogiques ; Plus de dossiers par conseillère pédagogique ou conseiller
pédagogique ; Remise en question des dossiers et actions qui ne sont pas ou ne
semblent pas essentiels immédiatement ; Hypothèses de regroupements [d’établissements] pour économiser ;
2. Explosion des besoins : besoins issus des NTIC ; besoins issus de la réforme ; arrivée des nouvelles enseignantes et des nouveaux enseignants ; réorganisation à tous les niveaux ; morcellement des clientèles entre divers programmes [de
formation] ; augmentation des besoins [de formation] non créditée ;
3. Glissement des préoccupations de perfectionnement de l’individuel vers le collectif et vers l’institutionnel : le client devient la direction [du collège] ; les dossiers jugés prioritaires par le client (i.e. la direction) ne sont
pas le fruit d’analyse de besoins de perfectionnement des enseignants.
[Il résulte de l’interaction de tous ces phénomènes] un effet catalyseur : devant la réduction des ressources et l’explosion des besoins, les commandes institutionnelles prennent toute la place ou presque. » (PERFORMA, 1997)
Face aux changements qui les affectent, les conseillers pédagogiques répondants locaux
proposent différents moyens pour maintenir les conditions essentielles à la survie de
PERFORMA et par là, continuer de stimuler et de nourrir l’animation pédagogique par le
perfectionnement du personnel enseignant. Par exemple, ils signalent la nécessité de
développer leurs compétences de CP, de résister à ce qui semble incompatible ou inutile,
d’innover dans le sens d’une action plus efficace, de faire preuve de souplesse en
acceptant de nouvelles tâches tout en essayant de lier le perfectionnement des enseignants
aux dossiers de développement institutionnel, et de redéfinir le rôle du répondant local
Page 77
(PERFORMA, 1997). On propose de décrire les tâches de conseiller pédagogique en termes
de « zones de performance ». On identifie, d’une part, celles où le conseiller pédagogique
s’alimente pour développer son expertise : le perfectionnement du conseiller pédagogique
et les activités de recherche et développement, et, d’autre part, celles où le conseiller
pédagogique exerce son expertise : l’animation pédagogique, le conseil et le soutien
pédagogiques, le perfectionnement des enseignants et l’information pédagogique. De
plus, il est suggéré de considérer ces diverses tâches en « vases communicants », c’est-à-
dire, de les voir comme se nourrissant l’une de l’autre et contribuant l’une à l’autre
(Deshaies, 1994).
Au début des années 2000, les facettes traditionnelles de la fonction de conseiller
pédagogique du collégial (animation, consultation, perfectionnement, soutien à la
recherche et à l’expérimentation) paraissent sous certains égards encore difficiles à
concilier et à intégrer avec le nouveau contexte d’exercice de la fonction redessiné par le
renouveau au collégial. C’est qu’il faut tenir compte aussi de l’ajout de nouvelles tâches
et de nouveaux dossiers, maîtriser des cadres conceptuels plus récents, concevoir et
implanter des cadres opérationnels efficaces, conjuguer les impératifs de l’augmentation
de l’autonomie des collèges avec ceux de la reddition de comptes, adapter ses pratiques
d’intervention plutôt individuelles à des collectivités, garder un équilibre entre les aspects
administratifs de la fonction et l’influence pédagogique à exercer, etc. Toutefois ces
exigences s’accordent avec certaines tendances observées également sur le plan
international.
3.5 Une évolution de la fonction précisée, une évolution des conceptions et des
pratiques à approfondir
Ce chapitre visait à répondre à la troisième série de questions présentées au chapitre 1.
Ces questions concernent l’origine, l’évolution et les tendances qu’on peut discerner
relativement à la fonction de conseillère ou conseiller pédagogique des collèges
québécois. Nous rappelons les questions posées et quelques éléments de réponse qui ont
été apportés.
Page 78
Origine et évolution de la fonction
Questions 3. Origine et évolution de la fonction
Malgré le nombre peu élevé de travaux scientifiques sur cette fonction, la recherche
documentaire a permis de bien cerner et documenter l’origine et l’évolution de la
fonction, surtout à partir de comptes rendus, de rapports et de témoignages.
3.1 Quels besoins ont été à l’origine de la fonction ?
La fonction s’est développée en lien avec le développement du réseau collégial
lui-même, créé en 1967 à la suite des recommandations du Rapport Parent. Il
s’agissait de créer un nouvel ordre d’enseignement et une pédagogie spécifique à
cet ordre. Pour fonder cette pédagogie sur les connaissances scientifiques les plus
à jour en enseignement et en apprentissage, des conseillers en recherche et
expérimentation sont apparus dès les premières années dans les cégeps. Leur rôle
s’est élargi à l’animation et à la consultation pédagogiques et leur titre s’est
modifié pour devenir celui de conseiller pédagogique. En 1975, un rapport
proposait des fonctions, des rôles et des tâches particulières pour ce nouveau titre
emploi. Presque tous les cégeps, dès 1975, inscrivent la fonction de conseiller
pédagogique dans leur structure pédagogique et s’emploient à mettre sur pied un
tel service.
3.2 Comment la fonction a-t-elle évolué depuis 35 ans ?
et
3.3 Comment se situe cette évolution au regard de l’évolution de l’ordre collégial lui-
même ?
On peut identifier trois périodes dans l’évolution de la fonction de conseiller
pédagogique en lien avec l’histoire des cégeps eux-mêmes. De 1967 à 1975, des
débuts effervescents en ce qui concerne la création du réseau collégial et hésitants
pour ce qui est de la création d’une fonction de conseiller pédagogique, se soldent
par une proposition claire du rôle et des tâches de conseiller pédagogique
(Lévesque, 1975). La fonction est centrée sur cinq mandats : 1) l’aide
Page 79
pédagogique aux enseignants (animation, consultation et perfectionnement
pédagogiques), 2) la recherche pédagogique, 3) la recherche institutionnelle, 4)
l’expérimentation pédagogique et 5) la création d’instruments de travail, le tout au
service du personnel enseignant, en priorité, et du personnel cadre. Au cours de
cette première période, ce sont le soutien et la diffusion de travaux de recherche et
d’expérimentation pédagogiques qui alimentent l’animation pédagogique.
La deuxième période, de 1975 à 1993 peut être qualifiée d’un âge d’or de
l’animation pédagogique. Les structures et les façons de faire se consolident. Au
collégial, cette période est marquée par l’émancipation de la pédagogie collégiale.
D’abord soutenue par les documents de réflexion, les démarches et les outils
produits par le CADRE ainsi que par la Commission des conseillers en recherche
et expérimentation, elle se solidifie par la structuration et le déploiement du
perfectionnement des enseignants à l’échelle provinciale avec la naissance et le
développement de PERFORMA. Ce partenariat entre le réseau collégial et
l’Université de Sherbrooke vise à soutenir l’animation pédagogique dans les
collèges par le biais du perfectionnement du personnel enseignant. Cette
innovation aura une grande influence sur la fonction, les tâches et le
ressourcement des conseillers pédagogiques, en particulier ceux qui font partie de
l’Assemblée générale des répondants locaux de PERFORMA. La fonction s’oriente
davantage vers l’aide pédagogique aux enseignants : animation, consultation et
perfectionnement pédagogiques. Les conseillers pédagogiques soutiennent des
travaux reliés à des changements non planifiés qui proviennent souvent
d’initiatives d’enseignantes et d’enseignants. Cette deuxième période, caractérisée
par le travail des CRÉ et le soutien du CADRE au départ, puis par le
perfectionnement pédagogique assuré par PERFORMA, et, enfin, par la création de
l’AQPC et de l’ARC comme moteurs de l’animation pédagogique, se termine
avec le début du renouveau au collégial.
Le renouveau au collégial a des répercussions très importantes sur la tâche des
conseillers pédagogiques qui se voient attribuer des dossiers complexes
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Origine et évolution de la fonction
supplémentaires pour lesquels ils ne se sentent pas toujours compétents. Certains
ont le sentiment que leurs tâches deviennent davantage administratives que
pédagogiques. On note une diminution des activités de perfectionnement créditées
offertes aux enseignants dans le cadre de PERFORMA et assumées par des
conseillers pédagogiques ; les manières traditionnelles de faire l’animation
pédagogique semblent se modifier sous la pression des principes à la base du
renouveau au collégial. Mentionnons à cet égard, la place importante que prend la
dimension collective du travail des enseignants et la nécessité de soutenir sur une
période prolongée des changements planifiés, imposés, fondés sur le partage d’un
nouveau paradigme en enseignement et en apprentissage. L’accompagnement de
projets collectifs pour implanter et suivre ces changements caractérise la fonction
de CP. Ceci pourrait constituer l’amorce d’une plus grande intégration des tâches
de CP à la vie des programmes d’études.
3.4 Parmi les questions précédentes, lesquelles ne trouvent pas de réponse
satisfaisantes à la suite de la recherche documentaire ?
De notre point de vue, la recherche a permis de bien comprendre l’origine et
l’évolution de cette fonction au collégial. Sa contribution au développement d’une
pédagogie spécifique à cet ordre d’enseignement resterait à préciser pour ceux qui
voudraient approfondir la question. En effet, les écrits consultés documentent bien
l’évolution du rôle et des tâches des conseillers pédagogiques, mais ne donnent
pas d’information précise sur l’évolution des conceptions pédagogiques et des
pratiques éducatives, celles du personnel enseignant autant que les leurs, à la suite
des interventions des conseillers pédagogiques, non plus que sur les façons dont
ils s’y sont pris pour soutenir cette évolution et assurer en même temps leur propre
développement professionnel au cours de ces 35 ans de vie des cégeps.
Page 81
Tendances et pistes de recherche
Chapitre 4. TENDANCES ET PISTES DE RECHERCHE
L’étude de la fonction de conseillère ou conseiller pédagogique de cégeps, des
caractéristiques des personnes qui l’exercent et de l’histoire de cette fonction en parallèle
avec l’évolution du système d’enseignement collégial nous inspire certaines conclusions
quant aux tendances qui semblent se dessiner relativement à cette fonction. Elle suggère
également quelques pistes de recherche qui pourraient permettre de mieux comprendre la
contribution de ces personnes au développement des systèmes éducatifs et de penser des
modalités de formation continue propres à soutenir leur développement professionnel.
4.1 Des tendances découlant des modifications amorcées
L’évolution de la fonction de conseillère ou conseiller pédagogique est étroitement liée à
l’évolution du système d’enseignement collégial mais aussi à l’évolution de la profession
enseignante. Dans cette section, nous esquissons certaines tendances, déduites de
phénomènes concernant à la fois les deux professions. Ces phénomènes affectent toutes
les composantes de la fonction de CP. Il y sera question de l’influence des connaissances
en enseignement et en apprentissage, de celle d’une conception de l’enseignement
comme activité collective, du phénomène de l’accompagnement, de celui la
professionnalisation des métiers de l’éducation, des effets de l’augmentation de
l’autonomie des collèges et de l’obligation de rendre des comptes qui y est associée.
4.1.1 Le paradigme de l’apprentissage
Le renouveau au collégial, comme l’ensemble des réformes actuelles aux autres ordres
d’enseignement et sur le plan international, propose une redéfinition des programmes
d’études basée sur les nouvelles connaissances au sujet de l’apprentissage et de
l’enseignement. On parle du « paradigme de l’apprentissage » faisant référence à des
approches curriculaires et pédagogiques qui mettent l’accent sur l’activité d’apprentissage
de l’élève qui construit activement ses connaissances et développe des compétences
Page 83
complexes définies à partir d’analyse de situations de travail ou de situations de
formation. L’élève doit être placé devant une situation complexe, dite authentique, qu’il
doit identifier et traiter à l’aide de ressources internes et externes. Le rôle de l’enseignant
et ses pratiques de planification, d’intervention, d’encadrement et d’évaluation des
apprentissages s’en trouvent profondément modifiés. Le travail d’animation, de
consultation et de perfectionnement pédagogiques des conseillers pédagogiques de même
que celui de diffusion et de soutien de la recherche et de l’expérimentation pédagogiques
doivent épouser ces modifications. Non seulement, le personnel enseignant attend-il du
CP que celui-ci l’aide dans l’appropriation de ces nouvelles conceptions et dans
l’amélioration de ses pratiques, mais il s’attend également à ce que les interventions du
CP soient elles-mêmes exemplaires à cet égard. La conseillère ou le conseiller
pédagogique doit maîtriser les cadres conceptuels, construire des cadres opérationnels et
intégrer les principes prônés dans sa propre pratique ; dans le cas contraire, il risque
l’incohérence, la perte de crédibilité et l’inefficacité de son action.
Sur le plan des tendances, on retient donc pour les CP un rôle évoluant vers celui de
soutien à la construction de connaissances et au développement de compétences
professionnelles chez le personnel enseignant, en exploitant eux-mêmes les savoirs
nouveaux concernant l’apprentissage.
4.1.2 Le travail enseignant, une responsabilité individuelle et collective
En définissant les finalités des programmes d’études qui concernent le développement de
compétences personnelles, transversales et professionnelles complexes et le
développement intégral de la personne, le renouveau au collégial donne un nouveau sens
au travail enseignant et affirme son caractère collectif. En effet, les propositions du
renouveau pour la formation exigent la concertation et l’harmonisation des orientations et
des pratiques, ce qu’on nomme au collégial « l’approche-programme », qui ont pour effet
de rendre publiques et collectives les décisions et les façons de faire des enseignants et
des enseignantes.
Page 84
Tendances et pistes de recherche
Du côté de l’animation et du perfectionnement des enseignants, les enjeux ont changé
ainsi que les conditions pour le soutenir. Au départ, il s’agissait d’assurer la qualité de
l’enseignement et de définir une pédagogie collégiale. Le perfectionnement était plutôt vu
comme une affaire individuelle qui devrait avoir des retombées sur le développement
pédagogique institutionnel. Les écrits sur l’évolution de la formation continue soulignent
une tendance qui fait passer d’une conception individuelle à une conception
institutionnelle (Solar, 2001; Tremblay, 1989). Les besoins actuels transcenderaient les
problématiques d’un département ou de l’enseignement d’une discipline : hétérogénéité
de la clientèle, plans de réussite, développement de l’approche-programme,
développement de compétences. L’animation et le perfectionnement pédagogiques se
font dorénavant auprès d’équipes, à l’échelle des programmes et à l’échelle des
établissements, formées d’enseignants volontaires parfois enthousiastes, parfois aussi
avec des personnes plutôt réticentes qui y défendent des points de vue divergents. Il a
déjà été signalé l’importance et la dimension particulières que prennent maintenant les
habiletés relationnelles des conseillères et des conseillers pédagogiques dans ce nouveau
contexte.
Ce phénomène induit un besoin aussi de perfectionnement pour les conseillers
pédagogiques eux-mêmes qui encadrent les démarches du personnel enseignant,
influencent le passage d’une vision individuelle à une vision collective du travail
enseignant, tout en ancrant davantage les projets de formation continue qu’ils proposent
et pilotent dans la réalité locale pour la poursuite de projets pertinents dans
l’établissement. Il n’est pas sûr cependant que les enseignants eux-mêmes voient le
perfectionnement sous ce jour (St-Pierre et Raymond, 2003), ce qui peut contribuer à
nourrir les tensions dans les équipes de travail.
Sur le plan des tendances, autant en animation et en consultation que dans le domaine du
perfectionnement pédagogique, on retient donc une transformation des interventions des
CP qui deviennent davantage collectives et doivent prendre en compte des facteurs
affectifs liés non seulement au processus de changement mais aussi à la gestion des
relations entre les personnes.
Page 85
4.1.3 L’accompagnement des innovations et du développement professionnel
L’évolution de conceptions et de pratiques, et la mise en place d’innovations sur une
large échelle demandent de longues périodes d’accompagnement de même que des
pratiques qui favorisent des changements durables. Certains types d’intervention
semblent fructueuses à cet égard ; par exemple les groupes de recherche et
développement, les groupes de recherche-action-formation (Brossard, 1994a, 1994b), les
groupes d’échanges réflexifs… Ces types d’intervention nécessitent un accompagnement
particulier caractérisé par la continuité.
En ce qui a trait au perfectionnement, ce développement d’approches de « formation
accompagnante », ou d’« accompagnonnage », et ces analyses de pratiques
professionnelles (Robo, 2002) supposent un changement de posture autant chez les
formateurs, conseillères et conseillers pédagogiques, que chez les personnes en formation
(le personnel enseignant). Le but visé est l’amélioration de l’enseignement bien sûr, mais
on cherche également à définir une base de connaissances solide et partagée en
enseignement. Il y a une dizaine d’années, on déplorait la faiblesse du suivi lors de
l’implantation de changements : « Nous sommes faibles en ce qui concerne
l’implantation des choses. Nous sommes de bons informateurs, de bons diffuseurs et
probablement de bons formateurs, mais nous n’avons pas assez réfléchi aux stratégies
d’implantation » (Paquette, 1995). Du côté de certaines commissions scolaires, on semble
avoir précisé en ce sens le mandat des conseillers pédagogiques et les activités
d’accompagnement sur une longue durée semblent se multiplier et paraissent très
fructueuses (Brossard, 2002; Caron et al., 1995). Au collégial, c’est le mode de pilotage
du renouveau qui a généralisé ce rôle d’accompagnateur sur une longue durée. Ainsi, par
l’obligation qui leur a été faite d’élaborer localement leurs propres programmes d’études
et de rendre compte de leur efficacité, les collèges ont rédigé des politiques de gestion des
programmes d’études (PGPÉ) qui réglementent la vie des programmes d’études à partir
de l’étape d’élaboration jusqu’à celle de l’évaluation et du suivi de l’évaluation en
passant par l’implantation. À chacune de ces étapes, dont un cycle complet s’étend sur
Page 86
Tendances et pistes de recherche
plusieurs années, plusieurs PGPÉ, pour ce que nous en savons, donnent aux CP ce rôle
d’accompagnateurs d’équipes d’enseignants tout au long de la vie des programmes
d’études. Cet accompagnement d’équipe s’ajoute au rôle de soutien individuel que les CP
exercent dans le cadre de la consultation pédagogique individuelle.
Enfin, signalons qu’après 35 ans de vie, le réseau collégial vit un renouvellement massif
du personnel enseignant, professionnel et de direction. Le CP, concerné à divers titres,
par le développement professionnel de ces groupes, doit prendre en compte dans ses
interventions les impératifs du transfert d’expertise de ceux qui quittent vers ceux qui
s’insèrent dans leur profession.
Sur le plan des tendances, on observe donc autant dans le mandat de l’animation et de la
consultation pédagogiques que dans celui du perfectionnement du personnel enseignant,
une évolution du rôle qui devient celui d’un accompagnateur, sur une longue durée de
projets d’innovation qui visent des changements durables. Un tel accompagnement
suppose la continuité dans l’exercice du rôle du CP et la prise en compte des contraintes
liées au renouvellement du personnel qui participe à ces projets.
4.1.4 La professionnalisation des métiers de l’éducation
Les métiers de l’éducation se professionnalisent, en particulier celui de l’enseignement.
Cette modification entraîne une réflexion au sujet des compétences requises pour exercer
la profession. La définition de référentiels de compétences professionnelles pour le
personnel enseignant vient modifier les véhicules de la formation continue offerte aux
enseignants, et par là, le travail des CP. En particulier, les analyses de besoins,
l’élaboration des programmations, les objectifs poursuivis, la façon d’évaluer les
compétences développées en cours de formation et la reconnaissance des acquis
antérieurs… en somme, tout ce qui concerne le perfectionnement doit être vu de manière
différente en accord avec le développement de compétences professionnelles pertinentes
en enseignement au collégial. D’autre part, la professionnalisation du métier d’enseignant
et le suivi d’un programme de formation par un nombre de plus en plus grand de
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nouveaux enseignants ont pour effet de produire des enseignants mieux formés sur le plan
pédagogique ; cela remet en question le rôle habituel des CP du collégial, qui devaient
assurer le perfectionnement d’un personnel enseignant qui n’avait à peu près aucune
formation initiale en pédagogie. Il faudrait toutefois analyser les effets de ce nouveau
contexte sur les compétences pédagogiques du personnel enseignant à l’entrée dans la
fonction, car ils diffèrent sans doute selon les disciplines enseignées et selon les régions.
D’autres éléments reliés à la professionnalisation du travail enseignant et aux
compétences nouvelles que les enseignants développent en élargissant leurs champs de
responsabilité risquent de changer le rôle des CP. Au primaire et au secondaire, deux
recherches ont montré que les enseignantes et les enseignants demandent rarement
conseil au personnel professionnel (de 2,1 % à 7,3 % des cas) ; la plupart du temps ils
s’adressent plutôt à des pairs, à cause de la proximité des collègues (recherches citées par
(Lessard, 1995) : Berthelot, 1991 et Lessard, 1992). Aucune recherche semblable n’a été
réalisée au collégial, mais il se peut que les pratiques collectives autour de la réalisation
de projets de même que celles du tutorat, du mentorat, et de groupes de pratique
réflexive, conduisent les enseignantes et les enseignants du collégial à demander plus
souvent conseil à leurs pairs. D’autre part, au primaire et au secondaire, les enseignants
demandent un plus grand leadership pédagogique de la part des directions d’école. Cette
attente, encore marginale, a aussi été mentionnée par des membres de la communauté
collégiale (St-Pierre et Raymond, 1993). Il est légitime de se demander de quelle manière
ces phénomènes pourraient changer la tâche et le rôle des CP. À cet égard, Lessard
(1995) propose « trois voies prometteuses de changement », pour redéfinir le travail des
CP dans ce contexte de professionnalisation du travail enseignant :
1. utiliser l’animation et le conseil pédagogique pour soutenir l’insertion
professionnelle des jeunes enseignants et les accompagner au cours de leurs
premières années de pratique ;
2. considérer l’animation pédagogique comme indissociable de la formation
continue des enseignants et d’une dynamique de développement professionnel ;
3. nourrir l’animation pédagogique par le développement de partenariats en
recherche-développement.
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Tendances et pistes de recherche
D’autres auteurs évoquent diverses manières de redéfinir le rôle des conseillers
pédagogiques dans ce contexte. (Laliberté, 1995a) invite les conseillers pédagogiques à
redéfinir leur rôle, à lui donner un nouvel essor, en particulier dans le dossier de la
réussite éducative. Selon Francoeur (1994a), le CP devrait être un expert qui accompagne
de petites équipes, qui fournit un regard critique, qui soutient des démarches réflexives.
En somme, la professionnalisation des métiers de l’éducation concerne également la
fonction de conseillère ou conseiller pédagogique. Dans diverses sociétés (Altet, Paquay
et Perrenoud, 2002a; Altet, Paquay, & Perrenoud, 2002b; Wilcox, 1998) et à différents
ordres d’enseignement (Pratte et Houle, en cours), on s’interroge sur cette fonction, ses
caractéristiques et les compétences professionnelles qu’elle exige. Ces efforts de
définition pourraient peut-être influencer le recadrage de la fonction.
Sur le plan des tendances, la professionnalisation des métiers de l’éducation, y compris
celui de conseillère ou conseiller pédagogique, amène une réflexion sur les rôles et les
compétences professionnelles du CP, laquelle favorisera à tout le moins le
développement d’une conception renouvelée de la fonction en lien avec l’évolution des
systèmes éducatifs et du développement des compétences professionnelles du personnel
enseignant.
4.1.5 L’autonomie des collèges et l’imputabilité
La revendication d’une plus grande autonomie de la part des collèges et l’imputabilité qui
en découle ont pour conséquence que de nouveaux dossiers, autrefois sous la
responsabilité du ministère de l’Éducation, relèvent maintenant des établissements. Les
personnels en place, en particulier le personnel professionnel dont font partie les
conseillers pédagogiques, héritent de plusieurs de ces nouveaux dossiers. Ceux-ci
présentent souvent à la fois un aspect pédagogique et un aspect administratif. C’est
notamment le cas pour l’élaboration de programmes d’études, leur implantation et leur
évaluation, l’élaboration de diverses politiques et de divers règlements et le suivi de leur
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application, l’insertion professionnelle des nouveaux enseignants, le développement
professionnel du personnel enseignant et son évaluation, formative et administrative. La
liste pourrait s’allonger avec d’autres dossiers comme celui des plans de réussite scolaire,
celui du suivi de la clientèle, celui de l’intégration des technologies dans l’enseignement
et dans l’apprentissage, etc. Le danger est grand, selon certains, d’y perdre en crédibilité
et en marge de manœuvre. Un équilibre viable est à trouver entre l’administratif et le
pédagogique, d’abord pour conserver cette crédibilité, mais aussi pour disposer de la
disponibilité requise par l’accompagnement de changements durables.
Par ailleurs, l’obligation de rendre des comptes accompagnant une plus grande autonomie
des établissements a pour conséquence une plus grande prise en charge par le personnel
de direction et le personnel enseignant de l’évolution du système. En outre, les démarches
de pratique réflexive, de mentorat ou de tutorat, de plus en plus populaires pourraient
stimuler le recours aux pairs pour ce qui est du soutien pédagogique. Ces phénomènes
amènent une redéfinition du rôle et du type d’intervention du CP en ce qui concerne la
consultation et l’animation pédagogiques.
Sur le plan des tendances, cette plus grande autonomie des collèges associée à des
exigences précises de reddition de comptes, a pour effet de déposer sur la table de travail
des CP de nouveaux dossiers qui présentent à la fois un aspect administratif et un aspect
pédagogique. Dans le contexte du recadrage du rôle de CP, il reste à préciser l’équilibre
optimal entre ces deux aspects.
En somme, la fonction de conseillère ou de conseiller pédagogique au collégial évolue au
rythme des changements dans le réseau de l’enseignement collégial. Ceux-ci sont au
diapason des innovations curriculaires et pédagogiques actuelles en éducation à l’échelle
internationale. Ces innovations sont influencées par différents phénomènes. D’abord, de
nouvelles connaissances en enseignement et en apprentissage modifient les manières
d’enseigner ; dans ces modifications, le rôle de modèle de l’enseignant ou du formateur
prend une grande importance. Les CP intègrent ces connaissances dans leurs propres
pratiques car ils souhaitent jouer eux-mêmes ce rôle de modèle auprès des enseignants
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Tendances et pistes de recherche
qu’ils contribuent à former et ainsi y gagner en crédibilité. Deuxièmement, les réformes
accentuent le passage du caractère individuel au caractère collectif du travail enseignant.
Les CP orientent leurs pratiques pour soutenir ce passage, d’autant plus que le renouveau
au collégial les y invite en proposant une approche-programme pour le développement et
la gestion des programmes d’études. Troisièmement, la continuité requise par une
transformation durable des pratiques donne naissance au phénomène de
l’accompagnement impliquant le suivi de projets spécifiques sur une longue période de
temps. L’accompagnement diffère de la consultation pédagogique dont l’objectif est le
traitement de problèmes ponctuels, souvent individuels. Il est d’un autre ordre que la
formation en ce qu’il est centré sur la réalisation d’un projet défini35 et qu’il transforme le
formateur en un acteur de ce projet. L’accompagnement se caractérise également par la
continuité et la durée. Les CP inventent de nouvelles formes d’accompagnement collectif.
Quatrièmement, la professionnalisation des métiers de l’éducation entraîne un recadrage
des rôles respectifs des acteurs et appelle des interventions différentes en animation
pédagogique, orientées vers les compétences professionnelles à développer plutôt
qu’exclusivement vers la résolution d’un problème ou la transmission de connaissances.
Enfin, les effets de l’augmentation de l’autonomie des collèges et de l’obligation de
rendre des comptes qui y est associée viennent ajouter de nouveaux dossiers au plan de
travail des CP, nouveaux dossiers qui risquent d’augmenter l’aspect administratif de la
fonction au détriment de l’aspect pédagogique.
Ces tendances restent évidemment des déductions et des interprétations à raffiner et à
vérifier au fil du temps et de l’évolution du système lui-même.
Page 91
35 On observe toutefois une tendance en formation continue du personnel enseignant à l’effet que les programmes de formation continue visent de plus en plus l’accompagnement de projets collectifs dans les établissements (Solar, 2001).
4.2 PISTES DE RECHERCHE
Ce travail a permis de retracer l’origine et l’évolution de la fonction de conseiller
pédagogique au collégial. Toutefois, nombre de questions restent à approfondir. Ainsi on
connaît de façon très partielle les caractéristiques des personnes qui exercent cette
fonction ; on dispose de fort peu de données sociodémographiques sur elles, les données
fournies par le ministère de l’Éducation ne présentant que des résultats globaux pour
l’ensemble des professionnels de cégeps. On apprend toutefois de l’examen des
statistiques disponibles que le personnel professionnel des cégeps rajeunit, se féminise et
occupe des emplois plus précaires qu’avant. On connaît mal les acquis dont ils disposent
à l’entrée dans la fonction et il semble y avoir relativement peu de véhicules pour soutenir
leur propre développement professionnel. On ne sait rien de leurs propres conceptions en
enseignement et en apprentissage, et presque rien de leurs pratiques qui semblent se
développer sur le tas. Aucune étude ne permet d’apprécier la contribution exacte du
travail des CP à l’évolution des conceptions et des pratiques du personnel enseignant
ainsi que les effets de leur travail sur l’implantation et le suivi des innovations à l’échelle
locale et à l’échelle du réseau collégial. La recherche documentaire n’a retracé aucune
étude portant sur leurs propres perceptions au sujet de leur identité professionnelle et de
leur rôle. Enfin, aucune comparaison en profondeur n’a été faite avec la situation de
l’animation pédagogique à d’autres ordres d’enseignement et dans d’autres sociétés.
Beaucoup de travail reste donc à faire pour mieux connaître la fonction de conseiller
pédagogique au collégial et plus largement, à l’enseignement supérieur. Deux questions
générales nous intéressent plus particulièrement : quelles recherches pourraient être
conduites pour mieux comprendre la contribution de cette fonction dans l’évolution des
systèmes éducatifs ? et quelles recherches pourraient être conduites pour mieux soutenir
le développement professionnel des personnes qui exercent cette fonction ?
Pour répondre à ces questions, on pourrait recenser et comparer les caractéristiques des
personnes qui occupent la fonction, à différents ordres d’enseignement et dans différentes
sociétés et déterminer les rôles exercés selon les contextes, les tâches effectuées
Page 92
Tendances et pistes de recherche
concrètement et les responsabilités attribuées dans ces différents milieux. On pourraient
aussi s’interroger sur les compétences professionnelles requises pour exercer la fonction.
Les conceptions pédagogiques et les pratiques d’intervention en lien avec les cinq
mandats principaux de la fonction seraient à explorer en profondeur pour soutenir le
développement professionnel de cette catégorie de personnels scolaires. Des recherches
de type recherche-développement, études de cas, recherches collaboratives et recherche-
action-formation semblent appropriées à cet objectif. Les effets de différentes
interventions en contexte de changement et d’innovation pourraient être davantage
investigués, inventoriés et connus.
On pourrait aussi préciser les perceptions qu’ont ces personnes des composantes de leur
identité professionnelle et retracer des trajectoires de développement professionnel
vécues par des CP. À partir d’une meilleure compréhension de leurs besoins et des
contraintes qu’ils doivent subir, diverses modalités de formation continue ou
d’accompagnement pourraient être développées et expérimentées pour mieux soutenir
leur développement professionnel, notamment en consultation pédagogique, en
accompagnement d’équipes et gestion du changement, en traitement de situations
conflictuelles et en implantation de nouvelles avenues de formation continue pour les
enseignants, comme les démarches de pratique réflexive, les communautés apprenantes,
la réalisation de projets collectifs, le travail collaboratif à distance, etc. Ces avenues
pourraient d’ailleurs fournir des pistes à explorer pour la formation continue des CP eux-
mêmes.
En somme, les connaissances incomplètes concernant la fonction de CP, les tendances
observées en ce qui concerne son évolution autant que celles qui concernent la formation
continue du personnel enseignant peuvent inspirer des projets de recherche et
d’expérimentation pertinents pour la connaissance de la profession de conseillère ou de
conseiller pédagogique et pour le développement professionnel de cette catégorie de
personnel scolaire.
Page 93
CONCLUSION
Les conseillères et les conseillers pédagogiques sont des personnes clés au cœur des
changements dans le domaine de l’éducation. On compte sur cette catégorie de personnel
scolaire pour soutenir la mise en œuvre d’innovations curriculaires et pédagogiques, en
assurer le suivi et l’évaluation, pour stimuler, former et accompagner le personnel
enseignant, mais aussi pour conseiller le personnel cadre. Ces tâches exigent des
compétences nouvelles et complexes. Les connaissances récentes sur l’apprentissage,
qualifiées de « nouveau paradigme » et les nouvelles modalités de formation continue du
personnel enseignant ajoutent à la complexité du travail des conseillers pédagogiques.
On en sait peu sur les caractéristiques de ces personnes, sur leur fonction, sur son origine
et son évolution. Les chercheurs commencent à peine à se pencher sur cette fonction.
Cette recherche documentaire contribue à une meilleure connaissance de la fonction de
conseillère ou conseiller pédagogique à l’ordre collégial québécois. Rappelons-en
quelques éléments.
La fonction de conseiller pédagogique au collégial a émergé des premiers travaux
d’édification de l’ordre collégial au Québec dans la foulée des recommandations du
Rapport Parent. Il s’agissait de construire un nouvel ordre d’enseignement et une
pédagogie qui lui soit propre, fondée par les résultats de la recherche en éducation. Au
cours des premières années de vie du réseau collégial, ce besoin de connaître, de diffuser
et de soutenir la recherche et l’expérimentation pédagogiques dans les collèges a fait
naître une nouvelle fonction de conseiller en recherche et en expérimentation. La fonction
s’est rapidement transformée en celle de conseiller pédagogique, car le besoin
d’animation, de consultation et de perfectionnement pédagogiques a vite pris une grande
ampleur, d’autant plus que peu d’enseignantes et d’enseignants du collégial avaient reçu
une formation initiale en pédagogie. Pendant une vingtaine d’années, le perfectionnement
pédagogique a agi comme le moteur principal de l’animation pédagogique. Depuis le
renouveau au collégial, l’accompagnement sur une longue durée d’équipes
d’enseignantes et d’enseignants dans le but d’implanter et d’assurer le suivi des
innovations requises par ce renouveau accapare une part importante du travail des
Page 95
conseillers pédagogiques et devient souvent la source des activités d’animation
pédagogique, qui ne sont cependant pas limitées à cet aspect. La consultation
pédagogique individuelle, par exemple, reste une dimension importante de la tâche des
conseillers pédagogiques.
Les conseillères et les conseillers pédagogiques au collégial sont des « consultants
internes » en pédagogie, rattachés à un établissement et spécialistes de la pédagogie
générale et des processus de soutien au développement pédagogique des personnes et des
établissements. Bien qu’au fil du temps, la fonction de CP au collégial reste définie par
cinq mandats principaux – la consultation, l’animation et le perfectionnement
pédagogiques, ainsi que le soutien à la recherche et à l’expérimentation pédagogiques et
institutionnelles – les tâches des conseillers pédagogiques se sont profondément
modifiées, en ce qui concerne le partage du temps entre ces tâches, les manières de les
réaliser et le moteur principal qui fonde les interventions du CP. Elles se sont aussi
complexifiées en intégrant les principes des changements actuels dans le monde de
l’enseignement : approches socioconstructivistes, pratiques d’analyse réflexive, passage
de l’individuel au collectif, accompagnement de projets planifiés, professionnalisation
des métiers de l’éducation et autonomie et imputabilité accrues pour les collèges.
Il importe de mieux connaître cette fonction pour apprécier sa contribution à l’évolution
des systèmes éducatifs, mais aussi pour que puissent être pensés des véhicules et des
modalités de soutien à leur développement professionnel qui répondent adéquatement à
leurs besoins et contraintes.
Cette recherche documentaire contribue à cet objectif en se centrant sur les conseillères et
les conseillers pédagogiques du collégial au Québec, lequel appartient à l’enseignement
supérieur. Cependant, peu d’écrits scientifiques ont été recueillis ; les résultats et les
interprétations présentés reposent en grande partie sur des rapports de pratiques ou de
services, des comptes rendus et des témoignages divers. Ce matériel n’est pas
systématiquement répertorié dans les banques de données usuelles et un recueil plus
exhaustif du matériel existant dans les établissements et organismes, ainsi que le
Page 96
traitement de ce matériel, auraient demandé des ressources beaucoup plus grandes que
celles dont nous disposions. En outre, en se centrant sur un sous-ensemble relativement
restreint de conseillers pédagogiques, le portrait obtenu manque probablement de
nuances, voire d’à propos pour ce qui est des particularités de la fonction dans d’autres
milieux. Ainsi, peu de données concernent spécifiquement les conseillers pédagogiques
affectés au secteur de l’éducation des adultes et ceux des collèges privés, alors qu’une
grande partie de la documentation traite du contexte particulier d’un sous-groupe, les
conseillers pédagogiques répondants locaux de PERFORMA. Il serait intéressant, par
ailleurs, de comparer la fonction au collégial et ses caractéristiques avec la manière dont
elle est exercée dans d’autres sociétés et à d’autres ordres d’enseignement. Cet exercice
pourrait être révélateur de constantes ou d’invariants propres à circonscrire la fonction et
soutenir la construction de l’identité professionnelle des personnes qui oeuvrent dans ce
domaine.
L’un des buts de cette étude consistait à dégager des pistes de recherche en vue de mieux
comprendre la contribution de cette fonction à l’évolution des systèmes éducatifs et de
soutenir adéquatement le développement professionnel des personnes qui l’exercent. Les
résultats obtenus permettent d’identifier à la fois des thèmes de recherche et des
modalités pour la réaliser. Le champ d’investigation s’avère large et ces avenues
prometteuses de recherches émergent à la fois des chercheurs et des praticiens.
Page 97
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Page 103
LISTE DES MOTS-CLÉS UTILISÉS POUR LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE
dans les bases de données
ERIC FRANCIS REPERE Counselor-training
Counselor-educators*
Resource-staff continuing- Education
Explode "tutoring"
Mentor*
Professional-training
Educational advisors in service training
Educational advisers in service training
Educational advis*
Staff develop*
Postsecondary education
Educator
Instructional consultation
Assistant principal
Deputy principal
Teaching improvement offices
Guidance counselor
Conseiller* pedagogique*
Formateur* de formateur*
Formation continue
Consultant* education
Consultant* en education
Agent* de developpement pedagogique
Animation pedagogique
Service* d'aide pedagogique
Formation* de formateur*
“les metiers de l’education”
Tuteur pedagogique
Staff development
Deputy principal
Assistant principal
Conseiller* pedagogique*
Consultant* en education
Animation pedagogique
Service* d'aide pedagogique
Consultation pedagogique
Formation continue
Accompagnement
Soutien pedagogique
Colleg*
Tuteur pedagogique
Staff development
Deputy principal
Assistant principal
LISTE DES MOTS-CLÉS AJOUTÉS À LA RECHERCHE DANS ERIC, FRANCIS ET REPERE
Academic adviser ou Academic advisor Conseil pédagogique Educational counselor Educationalist Faculty consultant Inspector of education Pedagogical staff
Profession de l’éducation Service des ressources pédagogiques Staff development manager Technologie éducative Technologue de l’éducation University supervisors
Page 107
Les conseillers pédagogiques au collégial, ici et ailleurs GRILLE DE LECTURE
PAYS 36:
Europe
francophone France, Belgique,Suisse
Amérique du Nord anglophone
Canada anglais, USA
Québec
ORDRE D’ENSEIGNEMENT :
Lycées
Collèges Ens. supérieur
Community 2-years colleges Higher éducation
Primaire et secondaire Collégial
Université
1. Caractéristiques générales
a) Nombre (par catégories)
b) Socio-démographiques
c) Formation initiale réelle
d) Expériences de travail
2. Historique
a) Origine
b) Besoins à la base
c) Évolution
d) Niveaux de responsabilité
Page 111
36 Au départ, le projet prévoyait une analyse comparative de la situation des conseillers pédagogiques de l’enseignement supérieur dans différents pays et de la situation des conseillers pédagogiques des divers ordres d’enseignement au Québec. Il a fallu revenir à des objectifs moins ambitieux étant donné les ressources disponibles pour ce projet.
3. Définition de la fonction
a) Définition
b) Classification
c) Catégories, types
d) Conditions d’embauche
e) Contexte de travail
f) Lieux d’intervention
4. Domaines d’intervention et tâches
a) animation pédagogique
b) consultation pédagogique
c) accompagnement individuel ou collectif
d) perfectionnement des enseignants
e) recherche & développement
5. Compétences et qualités requises
Page 112