Post on 04-Jul-2015
COURS DE PAROLE VIVANTE (sacredote.fr)
INTRODUCTION
La parole de Dieu n’est pas enchaînée. La parole de Dieu est vivante et efficace.
«Une lampe sur mes pas, ta parole, une lumière sur ma route. Ta parole, en se
découvrant, illumine, et les simples comprennent. » (Ps 119, 105 et 130). Nous
voulons réfléchir, avec beaucoup de respect et d’amour, sur cette Parole divine. Une
réflexion profonde, destinée à soutenir l’intelligence et, principalement, à nourrir
l’esprit pour la transformation de la mentalité et du cœur du lecteur.
Dans l’histoire du salut la Parole de Dieu se déroule en trois grandes étapes : la
Parole révélée, la parole inspirée, la Parole interprétée. Ainsi la révélation,
l’inspiration et l’interprétation de la Parole constituent les concepts de base sur
lesquels s’appuie la compréhension catholique de la Sainte Écriture. Notre réflexion
prétend vous introduire dans chacun de ces trois concepts et, en même temps, dans
d’autres concepts complémentaires et comme leurs satellites. La révélation est en
étroite relation avec la transmission et la tradition ; l’inspiration inclut en son sein la
vérité biblique et la conformité canonique. L’interprétation ne peut se passer de
l’étude des méthodes appropriées et de l’actualisation de la Parole pour l’homme
d’aujourd’hui.
La méthode que l’on suit dans ce cours est narrative, fondée sur les sources de la
théologie, en particulier sur la constitution dogmatique sur la révélation divine (Dei
Verbum) du Concile Vatican II. L’exposition sera accompagnée de brèves lectures de
textes des Pères de l’Église, des théologiens et du Magistère de l’Église. A la fin des
textes de lecture il y aura un bref questionnaire pour inviter à la réflexion. Chaque
chapitre se terminera par l’indication de quelques sujets d’étude pour les
approfondir et les aborder sans difficulté. A la fin du cours est inclus un lexique qui
définit quelques-uns des termes employés ; ceux-ci sont indiqués par un astérisque
(*) lorsqu’ils apparaissent pour la première fois dans le cours ; de même, on trouvera
en annexe un index de sigles.
CHAPITRE 1
LA PAROLE DE DIEU DANS LA PAROLE HUMAINE
En ses desseins éternels et insondables, Dieu a voulu se révéler aux hommes par
l’intermédiaire de la Parole. La révélation divine n’est pas quelque chose de
momentané et fortuit. Dieu s’est révélé une fois pour toutes à une époque de
l’histoire humaine, mais sa révélation est adressée à tous les hommes de n’importe
quelle époque historique. La révélation de Dieu à Abraham a été aussi une révélation
pour le Prophète Jérémie et son temps, pour saint Paul et son temps, pour saint
Augustin et saint Bernard et leur époque, pour saint Maximilien Kolbe, et aussi pour
vous et vos contemporains.
De là découle que la Parole révélée à un certain moment et pour toujours, devait
être communiquée de génération en génération. Cette communication a d’abord été
effectuée sous forme orale, et peu à peu, ensuite elle a été mise par écrit. Ainsi la
révélation de Dieu s’est-elle transmise de siècle en siècle, oralement, de père en fils,
jusqu’à se trouver comme cristallisée dans le texte sacré, ce texte que nous
appelons, nous, aujourd’hui, les chrétiens, l’Écriture Sainte ou la Bible. De cette
façon, la Parole révélée est devenue Parole transmise grâce à laquelle la richesse
infinie de la Révélation est arrivée à tous les hommes.
I. Dieu se révèle par la parole
II. Analyse de la parole humaine
III. L’analogie de la parole
IV. Les hérauts de la parole divine
APERÇUS
Quelle est la différence fondamentale entre la Bible et les écrits sacrés des religions
non chrétiennes ? A la fin de ce chapitre vous pourrez donner une réponse à cette
question.
Quelle est l’importance de la Parole de Dieu dans la vie d’un chrétien ? Parfois nous
l’entendons sans y prêter beaucoup d’attention.
MOTS CLEFS
Révélation analogie
I. DIEU SE RÉVÈLE PAR LA PAROLE
« Au commencement était le Verbe et le Verbe était avec Dieu et le Verbe était
Dieu» (Jn 1, 1)
Dieu commence le dialogue amoureux avec les hommes en un point concret de
l’histoire humaine, et c’est ainsi que commence la révélation de la Parole. Nous
avons ici deux données importantes : la Parole de Dieu se révèle ; la Parole de Dieu
se révèle par l’intermédiaire de la parole humaine.
Dieu n’a prononcé qu’une seule Parole : FILS. Avec cette parole il nous a tout dit. Le
Fils, Parole de Dieu, a commencé son dialogue avec l’homme par l’intermédiaire de
la création, de la rencontre avec les prophètes et finalement par l’incarnation dans le
sein de la Vierge Marie.
Nous pourrions donc définir la révélation en tant que Parole de la façon suivante :
Révélation : La communication amoureuse de Dieu et de son mystère à l’homme
pour qu’il soit participant de son salut.
Cette communication s’est réalisée tout au long de l’histoire, de manière orale ou
écrite, par l’intermédiaire de médiations humaines qui atteignent leur plénitude
dans le Christ. L’homme est invité par Dieu à répondre à cette révélation avec
l’obéissance de la foi. »
II. ANALYSE DE LA PAROLE HUMAINE
1. L’expérience de la parole.
Sciemment ou non, toute parole humaine vient de l’expérience. Dans la Bible,
surtout chez les prophètes, ce passage de l’expérience à la parole est évident et
éclairant. Prenons l’exemple de Jérémie : de l’expérience vivante de Jérusalem
envahie et mise à sac jaillissent ces vers :
« J’ai regardé la terre : un chaos ;
Les cieux : leur lumière a disparu.
J’ai regardé les montagnes : elles tremblent
Toutes les collines sont secouées.
J’ai regardé : plus d’hommes ;
Tous les oiseaux du ciel ont fui,
J’ai regardé : le verger est un désert ;
Toutes les villes sont détruites
Devant Yahvé,
Devant l’ardeur de sa colère » (Jr 4, 23-26)
La Bible a été écrite à partir d’expériences vécues, d’événements immergés dans
l’expérience. La Bible est parole écrite, parole vécue du passé et constamment
vivifiée par l’expérience du présent.
2. La symphonie de la parole.
La parole humaine est polyphonique, comme un chœur aux multiples voix. Leurs
variations musicales bien harmonisées forment la symphonie du langage. Notre
intention est de décomposer la symphonie pour découvrir les divers instruments qui
la composent.
a) La parole est en premier lieu une réalité organique. Elle n’existe pas isolée. Elle
prend vie quand elle fraternise avec d’autres paroles, elle s’organise et se structure
avec elles en une unité de sens. Ce n’est pas la même chose de dire « Louis » que de
dire « Louis court» ou encore « Louis court à l’Église». Même quand une parole est
seule, pour qu’elle soit vivante, elle est unie (reliée) au moins implicitement à une
autre, avec laquelle elle acquiert un sens. La parole tend à l’existence en famille, y
compris quand elle semble être en perpétuel célibat.
b) D’où la parole reçoit-elle son caractère organique ? Sans aucun doute, parce
qu’elle est une réalité sociale. En Dieu lui-même la parole est sociale ; elle requiert
l’existence d’un « je » et d’un « tu » qui créent un dialogue. Dieu est unique, mais en
Dieu il y a trois personnes qui éternellement communiquent entre elles leurs
pensées et leur amour.
Dieu Trine, en créant l’homme, l’a créé à son image et ressemblance, et ainsi il l’a
créé social. C’est socialement que l’homme subsiste, qu’il se perfectionne et domine
la terre ; et le milieu naturel de cette vie sociale est le langage, le dialogue, la parole.
La parole a commencé à être sociale à l’instant où Adam a appelé sa femme pour la
première fois « Ève » et que celle-ci lui a répondu par un sourire.
c) De plus, la parole est créative. Unie à d’autres paroles, elle crée de nouveaux sens
et nuances, révèle des univers nouveaux du cœur humain. L’arrivée de cette parole
jusqu’à un « toi », y crée une résonance en tant que réponse. Le sourire d’Ève est
création de la parole, tout comme le « fiat » (« fais en moi selon ta volonté ») de
Marie. La parole engendre la parole et à travers elles s’établit le fil de la
communication.
La parole crée l’histoire. Dieu a commencé l’histoire avec la Création par
l’intermédiaire de la parole (Gn 1). La parole de l’homme a résonné dans le présent
avec la force d’un futur. Paroles des parents, des éducateurs, des leaders d’un
peuple ou d’une nation. Au dessus de tout, la parole de Jésus, parole de salut,
continue de résonner dans l’esprit humain. La révélation, tout comme la parole est
créative dans la liberté. Elle ne s’impose pas, elle s’expose. C’est un appel à la
recherche d’une réponse donnée par la liberté.
3. Autres caractères de la parole
Nous avons évoqué trois instruments de la symphonie de la parole : son caractère
organique, social et créatif. Prêtons attention maintenant à trois autres caractères :
la parole informe, elle interpelle et elle exprime. Ceci correspond à trois fonctions du
langage
a) L’objet de l’information est un ensemble de faits, de personnes, d’objets et
d’événements. C’est le langage objectif propre à l’historiographie, à la didactique et
aussi aux sciences exactes. Exemple : « Le 12 octobre 1492 fut découvert le
continent américain».
b) La parole exprime des sentiments, des émotions, c’est-à-dire, l’intériorité de
l’homme et sa participation aux événements de la vie. C’est le propre des mémoires
et des confessions, du lyrisme. Exemple : les vers fameux de sainte Thérèse : « je vis
sans vivre en moi-même et j’attends une vie si haute que je meurs de ne pas mourir
» (Poèmes I. Œuvres complètes).
c) Tout homme s’est déjà adressé à un autre homme pour l’interpeller, provoquer sa
réponse et l’influencer. Le fait d’interpeller est le propre de l’art oratoire et de
certaines formes littéraires comme la vocation, le commandement, etc. Exemple : «
Suivez-moi et je vous ferai pêcheurs d’hommes » (Mt 4, 19).
Dans la vie, aucune de ces formes ne fleurit à l’état pur. Elles existent entrelacées et
mutuellement conditionnées. La simple information « Dieu est Amour » (Jn 4, 8)
exprime beaucoup du mystère de Dieu et, en même temps, invite inéluctablement
l’homme. Les paroles de Jésus au scribe « Va et fais de même » (Lc 10, 37) par leur
contenu impératif, nous informent sur la parabole du Samaritain et nous révèlent
quelque chose de l’âme de Jésus-Christ. Quand le Christ dit à Marthe : « Je suis la
Résurrection » (Jn 11, 25), il dévoile pour l’histoire un peu de son intimité, mais nous
informe et nous interpelle par cette définition de lui-même.
III. L’ANALOGIE DE LA PAROLE
« Dieu, dans l’Écriture, a parlé par des hommes à la manière des hommes » (Concile
Vatican II, DV 12). Le véhicule de la communication divine avec l’homme est donc
spécialement la parole, le langage humain. Les musulmans croient que le Coran a été
dicté par l’ange Gabriel à Mahomet. Les Mormons croient que leurs saints
documents ont été trouvés écrits dans une langue inconnue sur des tables d’or. Pour
un chrétien, la parole de Dieu n’est pas venue par l’intermédiaire des anges mais par
des hommes.
La parole divine ne parvient pas aux hommes en sons dépourvus de sens, mais en
phrases et propositions de révélation. Au Paradis, Yahvé adresse la parole à Adam en
termes compréhensibles : « Où es-tu ? »(Gn 3, 9). Dieu n’a pas d’autre manière
d’établir la communication avec l’homme, de se révéler et de lui révéler son dessein
de salut. La parole divine s’est incarnée en parole humaine concrète : hébreu,
araméen, grec. Par ces langues d’hommes, Dieu est entré en dialogue avec des
hommes concrets et avec l’humanité entière. Il est vrai que « la Parole de Dieu n’est
pas enchaînée », mais elle a été versée dans un moule particulier, comme en sa
faisant chair, elle a assumé une race, une famille, une nation.
Jésus Christ est l’Unique Parole du Père, dont toutes les paroles révélées sont le
reflet. La Bible est révélation à partir du Christ, en Christ et par le Christ. « Révélant
le sens de la Bible Jésus y reconnaît le reflet de la lumière qui brille en lui, il y écoute
un écho lointain de la Parole qui résonne en sa conscience humaine », écrit H. de
Lubac.
Si la parole divine est organique et structurée, cela est indubitablement dû à son
caractère public et social. Elle est destinée à une communauté non à des individus
précis (prophètes, sages, voyants, etc.) qui ne sont que des médiateurs et des
porteurs de la révélation divine. C’est la révélation de la société trinitaire à la société
humaine, faite à l’image et à la ressemblance de Dieu. Yahvé parle au peuple,
comme Jésus s’adresse à la multitude ou au groupe des douze, et les apôtres
prêchent dans les synagogues, sur les places publiques ou dans les églises
domestiques. Le cénacle de Jérusalem ou l’aréopage d’Athènes, la plaine au pied du
mont Sinaï ou les sanctuaires du Gilgal et Bethel, sont des lieux où la parole divine
arrive aux hommes réunis en assemblée, en peuple, en communauté, par
l’intermédiaire d’hommes et du langage humain.
La parole possède un souffle créateur. Elle crée le peuple d’Israël et « l’ecclésia*1+* »
chrétienne. Elle crée l’histoire. La création entière est l’œuvre de la parole divine. La
parole divine est créatrice parce qu’elle est efficace, car Dieu est fidèle à sa
promesse, à sa parole. Le psaume 28 nous décrit Yahvé comme un souverain
exerçant son autorité d’une voix puissante sur les éléments de la nature. Et la parole
de Jésus réalise les miracles les plus surprenants chez les malades qu’il a rencontrés
sur son chemin ou sur les forces naturelles, telles qu’une tempête sur la mer de
Galilée.
Voyons maintenant brièvement comment la parole divine réalise les trois fonctions
de la parole humaine. Si Dieu a choisi le langage humain pour communiquer avec les
hommes, la parole de Dieu – sa révélation – devra assumer toutes les fonctions de la
parole. Dieu pourrait-il, se réduire à n’être qu’un simple conteur de faits et de vérités
? Si Dieu est une personne et que la révélation est ouverture de son intimité et
dialogue avec l’homme, Dieu ne prétendra-t-il pas exprimer la richesse de la vie
trinitaire, faire appel aux fibres les plus délicates du cœur humain, pour l’amener à la
vérité du salut ?
Il faut lire la Sainte Écriture comme l’œuvre d’un langage complet par l’intermédiaire
duquel Dieu nous parle. Si la parole divine en reste à une fonction informative, la
Bible ne serait qu’un livre didactique, mais dans la Bible, en plus de l’histoire, il y a du
lyrisme, de la poésie, du drame. Pourra-t-on la réduire au lyrisme ou à l’histoire ?
Absolument pas. La fonction du langage est en étroite relation avec les genres
littéraires et tout le monde sait que la Bible se compose de nombreux livres aux
genres littéraires très divers par lesquels on s’adresse à l’intelligence (information), à
la volonté (interpellation) et au cœur (expression). Dans la Bible, Dieu tout entier,
dans sa plénitude, parle à tout l’homme
.
Prenons un exemple pour éclairer ces idées. Lorsqu’il parle de la naissance de Jésus,
Luc nous donne une information historique très précise : « il arriva qu’en ces jours là
parut un édit de César Auguste ordonnant que tout le monde se fasse recenser » (Lc
2, 1ss). Dans la rencontre de l’ange avec les bergers se dévoile la fonction
d’interpellation : « Ne craignez pas, car je vous annonce une grande joie… » (Lc 2,
10ss) et c’est encore plus clairement que cette fonction apparaît dans l’annonce de
l’ange à Marie : « Tu concevras, tu mettras au monde un fils…Comment cela se fera-
t-il ? … L’Esprit du Seigneur viendra sur toi…Qu’il me soit fait selon ta parole » (Lc 1,
26-38). Le Magnificat de Marie est un exemple de la fonction expressive (Lc 2, 29-
32).
Ce qui est dit sur la parole divine est basé sur le principe d’analogie entre elle et la
parole humaine.
L’analogie dit ressemblance par un aspect, mais dissemblance (ou différence) sur
tous les autres
Ainsi donc, la parole divine s’est humiliée et s’est abaissée jusqu’au langage humain ;
Ainsi, elle l’a non seulement élevé, mais encore elle l’a sublimé et enveloppé de son
mystère. Ne nous arrêtons pas à la lettre, nous recommande saint Jean
Chrysostome, mais considérons qu’à cause de notre faiblesse, Dieu utilise le langage
humble pour réaliser notre salut d’une façon digne de Dieu. Donc, si nous voulions
prendre toutes les paroles à la lettre et non dans un sens digne de Dieu, ne
s’ensuivrait-il pas des absurdités et des contradictions ?
La parole divine passe par la parole humaine, sans s’identifier avec elle, comme la
grâce passe par les sacrements. Elle en fait sa demeure et de là, elle dialogue et
établit la rencontre du salut avec les hommes. Avec condescendance envers
l’homme et son langage, la parole divine, descendue par l’échelle de Jacob (Gn 28,
10-22) jusqu’à son interlocuteur, ne reste pas sur la terre, mais remonte par cette
même échelle jusqu’à la hauteur du mystère caché dans sa propre révélation à
l’intelligence humaine. La lumière de la parole divine ne touche l’homme que d’un
seul de ses rayons infinis, avec une lumière suffisante pour le transfigurer et le
conduire au salut, mais avec une surabondance de lumière inaccessible pour lui faire
voir que Dieu est Dieu et non pas homme, et que sa parole ne reste pas enchaînée
par le langage humain.
IV. LES HÉRAUTS DE LA PAROLE DIVINE
Dans la Constitution dogmatique Dei Verbum, il est dit ouvertement : « Dieu a parlé
par des hommes, à la manière des hommes » (DV, 12). Seule la parole humaine peut
donner corps et forme à la parole divine. La médiation est une condition absolument
nécessaire pour que la parole de Dieu arrive aux oreilles humaines et influence
efficacement leur vie, d’une efficacité salvatrice. Fixons d’abord notre attention et
notre intérêt sur la nature même de la médiation.
En acceptant que la médiation soit nécessaire dans la communication entre le divin
et l’humain, il faudra tout autant admettre qu’il appartient à la nature de la
médiation d’appauvrir la réalité médiatrice. Si dans la médiation entre les hommes,
ou entre la pensée et la parole, l’appauvrissement du message se vérifie, ceci
s’intensifie dans le cas d’une médiation entre Dieu et la parole humaine. C’est la
parole même de Dieu qui nous arrive, mais transformée en parole humaine et
soumise aux limites des capacités d’un langage humain déterminé. Le message
arrive, la parole divine se rend présente et vivante devant les hommes, mais avec
des signes d’expression de l’homme qui parle une langue déterminée et appartient à
une culture déterminée
.
Qu’est-ce qui rend possible cette médiation de la révélation divine ? La présence
active, dynamique de l’Esprit de Dieu chez les médiateurs. Parmi les médiateurs
(comme les patriarches, les juges, les rois, les prophètes, les prêtres, les apôtres
etc…) ceux qui possèdent une conscience plus vive de l’initiative divine sur leurs
personnes et sur leurs paroles sont les prophètes. Dans leurs écrits, ils ont concrétisé
bien souvent le dynamisme divin qui les pénètre et les secoue jusque dans les fibres
les plus intimes de leur personnalité. Cette même force divine agit sur les auditeurs
ou les lecteurs de telle sorte que la parole humaine, pénétrant dans les oreilles et le
cœur des hommes, souffre sous l’action de l’Esprit Saint, la mise à nu du langage
humain et arrive à l’intimité de l’âme comme « Parole de Dieu ».
Les paroles des médiateurs ont été, par conséquent, comme condensées en Jésus
Christ, le Verbe, la Parole de Dieu, l’unique médiateur entre Dieu et les hommes. Les
médiateurs qui l’ont précédé sont une « préparation » ; ceux qui l’ont suivi
constituent le « prolongement » de la seule Parole vivante et efficace par laquelle
Dieu s’est révélé aux hommes, Jésus Christ, Fils de Dieu et de Marie.
[1] * Terme défini dans le lexique final.
Chapitre 2
Transmission-tradition
Au moment historique qu’il nous est donné de vivre, la transmission - tradition qui
nous relie au passé, est dévalorisée, tout comme le passé lui-même. Au milieu des
cendres du passé, cependant, il y a une grande richesse cachée. La découvrir,
l’assumer et l’assimiler est ce qui incombe à chaque génération et à chaque époque.
Chaque génération est une création, mais pas « à partir du néant », mais bien « à
partir de la tradition », à partir de l’accueil purificateur et sélectif du passé proche ou
lointain.
I. Introduction.
II. Le fait de la transmission - tradition.
III. Fonctions de la transmission – tradition.
IV. Le milieu ambiant de la transmission – tradition.
V. Langues et matériaux utilisés pour la transmission de la Révélation.
APERÇUS
- Comment savons-nous que ce qui est écrit dans la Bible est authentique ? L’étude
de la transmission de la Sainte Écriture peut nous aider à répondre à cette question.
- Pourquoi le rejet de la tradition s’oppose-t-il à l’histoire et à la science ? Pensez à ce
qui se passerait si nous nous fiions uniquement à tout ce qui arrive et se dit dans le
moment présent.
MOTS CLEFS :
Transmission : Tradition
I. INTRODUCTION
Si l’on veut s’opposer au rejet de la tradition, il faut mettre en valeur la signification
positive. Tout d’abord, la tradition est une condition d’identité d’une personne ou
d’un groupe humain. Le passé garde nos racines biologiques et culturelles,
religieuses et morales. Le travail de chaque génération n’est pas de couper l’arbre et
de semer une nouvelle plante sur la planète terre, mais de tailler l’arbre pour qu’il
grandisse avec une vigueur nouvelle et donne de nouveaux fruits. Les Pères de
l’Église n’ont pas cessé de regarder la tradition, comme modèle éternel de la foi et
de la conduite chrétienne. Saint Cyrille de Jérusalem, entre autres, dans ses fameux
catéchismes, recommandait aux chrétiens la fidélité à la tradition : « maintenez les
traditions, que vous recevez maintenant et inscrivez-les dans votre cœur... (ici
l’évêque remettait aux chrétiens la formule du credo). On t'a remis un trésor de vie
et le Seigneur te demandera compte de ce dépôt le jour où il apparaîtra ».
Ensuite, la destination universelle de la révélation d’une part et le destin historique
de l’homme d’autre part, exigent la transmission – tradition de la révélation. Si par
impossibilité la chaîne de la transmission - tradition s’était rompue, l’humanité serait
revenue, dans ses relations avec les hommes, aux « hominidés (*) » d’il y a des
millions et des millions d’années, et dans ses relations avec Dieu, au point zéro. La
parole révélatrice de Dieu resterait ensevelie dans la froide caverne d’un passé sans
nom.
Quand nous parlons de transmission - tradition de la révélation nous nous référons à
tout le processus de ce phénomène, depuis le commencement, à travers les
nombreuses générations, jusqu’au présent. Ce qui nous intéresse, nous, c’est la
transmission - tradition depuis la naissance de ce fait jusqu’au moment où le canon
biblique (*) est arrivé à son apogée et à son accomplissement. Il est évident, en
outre, que ce qui nous intéresse n’est pas la totalité de l’étendue de la tradition
humaine, mais uniquement la tradition révélée dans tout le substrat de la Sainte
Écriture. Nous sommes intéressés par la tradition religieuse et par tout le reste en
tant que véhicule de la parole divine.
Après cette brève introduction définissons la transmission et la tradition :
Transmission : c’est l’acte par lequel le peuple de Dieu, guidé par des hommes
choisis, communique à la génération suivante la révélation divine jusqu’au moment
où ladite révélation se fige en texte sacré et canonique.
Tradition : ce sont les événements, coutumes et vérités contenues dans la révélation
et qui, transmis par voix orale ou écrite au long de nombreux siècles, sont restés
définitivement modelés dans la Sainte Écriture
.
II. LE FAIT DE LA TRANSMISSION – TRADITION
1- Constatation du fait.
Le fait de la transmission est un phénomène indéniable, inséré dans la nature
historique et sociale de l’homme. Par l’expérience humaine on transmet ce que l’on
considère précieux pour les générations futures. Dans la Bible, on transmet la Parole
et l’action de Dieu sur la nature et surtout sur l’histoire. Les écrivains sacrés ont eu
conscience de ce fait et nous en ont laissé la trace dans leurs écrits. Ils ont manifesté
cette conscience à différentes époques dans leurs livres au genre littéraire divers et
cela tant dans l’Ancien que dans le Nouveau Testament
Dans le Deutéronome (4, 9), Moïse, se souvenant de la révélation de Dieu à l’Horeb,
adresse la parole à son peuple : « Ne vas pas oublier ces choses que tes yeux ont
vues et ne les laisse, en aucun jour de ta vie, sortir de ton cœur ; enseigne-les, au
contraire, à tes fils et aux fils de tes fils ». Le psaume 78, 3-4, où l’auteur essaie de
mettre devant les yeux de son peuple les leçons l’histoire d’Israël, parle ainsi : « nous
l’avons entendu et connu, nos pères nous ont appris, nous ne le tairons pas à nos
enfants. »
Paul, à plusieurs occasions, emploie la formule : « je vous ai transmis ce que j’ai moi-
même reçu… ». Dans toutes ses épîtres se trouvent des textes provenant de la
tradition apostolique dans laquelle il se trouve lui-même immergé et qu’il
communique à ses communautés. Tout cela parce que Paul est très conscient de ce
que « la foi naît de la prédication et la prédication de la parole du Christ. » (Rom.10,
17 )
2- Exigences de la révélation elle-même.
La transmission - tradition n’est pas seulement un fait vérifiable dans le texte sacré, il
est bien davantage une exigence de la révélation elle-même. La révélation de Dieu
commence par une bénédiction, une promesse et une alliance. Abraham reçoit de
Dieu la bénédiction et la promesse : « Je bénirai ceux qui te béniront et je maudirai
ceux qui te maudiront…(bénédiction). Par toi seront bénies toutes les races de la
terre (promesse) (Genèse 12, 3). Et ensuite l’alliance : « Ce jour là Yahvé conclut une
alliance avec Abraham en disant : à ta descendance j’ai donné ce pays, depuis le
fleuve d’Égypte jusqu’au Grand fleuve, le fleuve Euphrate... » (Genèse 15,18 ).
Dieu est fidèle à son alliance et à sa promesse et le peuple d’Israël n’a cessé de les
transmettre de génération en génération. Comme Dieu est fidèle, la promesse doit
s’accomplir malgré les difficultés et au milieu des vicissitudes de l’histoire et
l’alliance n’est pas rompue par l’infidélité humaine, mais Dieu s’en sert pour lui
montrer son amour et établir une alliance parfaite et définitive dans le sang de
Jésus-Christ.
Le Christ assume en lui-même et personnalise la promesse. Il en fait une réalité et
établit l'alliance par son offrande sacrificielle sur la croix. Avec le Christ on fait un pas
de la promesse de descendance biologique à l’alliance messianique : de l’alliance de
la loi à l’alliance de la grâce.
Une nouvelle tradition et transmission, reliée à la précédente mais nouvelle et
originale s’inaugure avec le Christ Jésus. De cette façon Jésus-Christ est constitué
point d’aboutissement de la tradition d’Abraham et, en même temps, point de
départ de la nouvelle tradition chrétienne.
3- Impératif divin
La transmission - tradition est aussi un impératif divin inéluctable puisqu'il va de
l’identité de chaque israélite et de tout le peule d’Israël. L’impératif divin jaillit
comme une nécessité de sa fidélité sponsale envers Israël : qu’ils n’oublient pas
Yahvé, leur époux ; de même, qu’ils lui soient fidèles.
« Il avait commandé à nos pères de le faire connaître à leurs enfants, que la
génération qui vient le connaisse, les enfants qui viendront à naître ; qu’ils se lèvent,
qu’ils racontent à leurs enfants, qu’ils mettent en Dieu leur espoir, qu’ils n’oublient
pas les hauts faits de Dieu et ses commandements qu’ils les observent». (Psaume 78,
56,7ª ).
Les Apôtres vivent sous ce même impératif divin. Les Actes nous racontent que
Pierre, devant les membres du Sanhédrin qui leur interdisaient de parler au nom de
Jésus, répondit au nom de tous : « Jugez s’il est juste devant Dieu de vous obéir à
vous plutôt qu’à Dieu. Nous, nous ne pouvons pas cesser de dire ce que nous avons
vu et entendu » (Ac 4, 19). Si le salut ne s’obtient que grâce à l’acceptation de
l’Évangile de Jésus-Christ, la transmission de génération en génération est
absolument nécessaire et impérativement obligatoire. « Nous ne pouvons pas ne pas
le faire » comme le disait Pierre lui-même.
III - FONCTIONS DE LA TRANSMISSION - TRADITION
1 - Fonction conservatrice
L’acte de transmettre n’a de signification que s’il est fait pour conserver ce que l’on
transmet (tradition ). Comme l’on transmet la vie pour la conserver et pour que
l’humanité ne s’éteigne pas, de la même façon, on transmet les lois qui régissent la
constitution d’une nation, les coutumes familiales, les traditions religieuses, etc…afin
qu’elles survivent dans l’avenir pour les nouvelles générations.
De ce point de vue la transmission - tradition a une relation avec l’idée de culture,
cet ensemble de principes, de normes, de lois de vie, de coutumes, de valeurs, etc
qu’ont légué à l’humanité l’Égypte, la Grèce, Rome, l’Europe chrétienne, l’empire
inca ou aztèque. Elle est en relation aussi avec l’histoire, maîtresse de vie, de sorte
que l’homme apprenne à vivre dans le présent en voyant comment on a vécu dans le
passé, en l’assumant de façon critique. Ainsi donc, parmi les fonctions de la
transmission - tradition, celle qui se distingue indubitablement le plus est la fonction
conservatrice. Transmettre quelque chose (tradition) implique de façon intrinsèque,
non seulement la volonté de conserver ce que l’on transmet, mais aussi la
conservation elle-même. D’une certaine manière, transmettre c’est conserver.
Au long des siècles de la transmission biblique, celle-ci s’est d’abord réalisée à
l’intérieur de la famille, du clan ou de la tribu. Ce n’est que si la famille, le clan ou la
tribu, étaient capables de conserver leurs traditions qu’ils avaient l’assurance d’une
survie historique. Dans le cas contraire, ils étaient absorbés par d’autres clans ou
tribus, sans laisser de trace dans la succession des événements de l’humanité. Ce qui
vaut pour la famille, le clan ou la tribu, est également valable pour une nation. Si,
durant l’exil babylonien et les siècles qui ont suivi, Israël n’avait pas cherché son
identité en tant que nation dans tout le bagage dogmatique moral et culturel légué
par le passé, il aurait, sans aucun doute, succombé sous la griffe de l’empire assyrien,
babylonien, persan, grec ou romain.
Quand, au Ve siècle, le judaïsme se constitue et déjà la Torah (*) (le Pentateuque :
Genèse, Exode, Lévitique, Nombres, Deutéronome) et une grande partie des écrits
prophétiques acquièrent leur forme définitive, les écoles rabbiniques surgissent afin
de conserver fidèlement le texte sacré et de l’actualiser pour chaque époque et
chaque génération. En plus du texte écrit et des méthodes mnémotechniques (par
exemple répétitions fréquentes à haute voix, formules concises sous forme de
sentences, emploi de la mise en parallèle, mots mnémotechniques, etc.), la fonction
conservatrice de la transmission - tradition se manifestait dans le culte où beaucoup
de textes canoniques de l’Ancien Testament et du Nouveau, ont acquis leur forme
définitive.
2 - Fonction constitutive
Intimement liée à la fonction conservatrice se trouve la fonction constitutive. Ce qui
s’est transmis peu à peu arrive à son moment de maturation, et se transforme en
texte immuable et permanent dans lequel le peuple d’Israël, ou le peuple chrétien,
écoute la parole du Dieu vivant et trouve les modèles de son identité et de son
existence juive ou chrétienne. La transmission - tradition est alors constituée, par la
force de sa valeur permanente et de son origine divine, en Écriture Sainte,
expression définitive de la volonté de Dieu.
Ce que Dieu, révélateur et principal auteur de l’Écriture, a considéré nécessaire au
salut de l’humanité, est resté comme consacré par le canon biblique sous les espèces
de la parole humaine. C’est l’auteur divin lui-même qui a révélé les Écritures, a guidé
et assisté l’Église dans le choix des livres normatifs de son identité et de sa vie qui, en
même temps que l’Eucharistie, constituent sa nature la plus intime et la plus
essentielle. Ce que Dieu a révélé progressivement au long des siècles, une fois
constitué texte sacré, canonisés par l’Église, à des moments précis de l’histoire, se
transforme en Parole vivante, impérissable et éternelle, qui lance son cri d’appel et
de salut aux quatre points cardinaux de la planète.
3 - Fonction rénovatrice
Deux mots pour terminer sur la fonction interprétative et innovatrice de la
transmission - tradition. Les études d’exégèse des deux derniers siècles ont mis en
évidence le travail interprétatif et innovateur interne de la Bible elle-même,
précisément pour que la transmission – tradition soit significative et parlante pour
les destinataires d’un texte à un moment déterminé de l’histoire, antérieur à la
fixation définitive et constitutive de l’Écriture. Le NT, dans son ensemble, interprète
et actualise à partir de la nouveauté du Christ, tout l’AT. L’exode est interprété de
façon nouvelle par le groupe sacerdotal en exil à Babylone, quand Cyrus en l’an 538
leur permit de retourner dans leur propre patrie. L’alliance du Sinaï reçoit un
nouveau souffle avec la promesse d’une nouvelle alliance inscrite non pas sur des
tables de pierre, mais plutôt dans le cœur des hommes. La Pâque juive reçoit une
lumière nouvelle et transformante de la pâque chrétienne dans le sang du Christ. La
tradition de Jésus est méditée et mieux comprise, sous l’action de son Esprit, par la
communauté apostolique après la Pentecôte.
4 - Fonction eschatologique.
La transmission – tradition tend par la force de son dynamisme intérieur même à
atteindre un objectif précis : dans l’Ancien Testament, la permanence, dans
l’histoire, de la présence salvatrice vivante et actuelle du Dieu d’Abraham, d’Isaac et
de Jacob, à travers la Révélation faite par Dieu au peuple d’Israël. Dans le Nouveau
Testament, la présence historique salvatrice du Dieu de Jésus–Christ, vivant et
glorieux, par l’intermédiaire de l’Église, dépositaire de la révélation et de la tradition
chrétiennes. Les vicissitudes politiques, institutionnelles, religieuses, etc., changeront
au long de l’histoire du peuple israélite, mais la relation vitale avec le Dieu des Pères
restera comme élément essentiel de la transmission – tradition. L’Église, à son tour,
traversera historiquement des situations et des époques très différentes, mais dans
la transmission – tradition ecclésiale le centre sera toujours occupé par le Dieu de
Jésus-Christ, l’HommeDieu.
A travers cet « eschaton » (*) historique, la transmission - tradition, une fois
cristallisée dans la Sainte Écriture, se projette vers l’eschaton définitif, dans l’au-delà,
quand le Dieu d’Abraham, d’Isaac, de Jacob et le Dieu de Jésus-Christ sera tout en
tous, et que l’homme atteindra la plénitude de la vérité dans le mystère de Dieu.
C’est la raison pour laquelle la constitution sur la révélation divine affirme : « l’Église
chemine à travers les siècles vers la plénitude de la vérité, jusqu’à ce que
s’accomplissent pleinement en elle les paroles de Dieu ». Dans l’au-delà, la Parole de
Dieu, transmise par les hommes, et qui vit dans l’Écriture et dans l’Église, arrivera à
être pleinement vérité salvatrice et appartiendra à tous les sauvés. Alors, la
transmission - tradition s’achèvera et sera remplacée par le « gaudium » de la
contemplation du mystère de Dieu.
5 - Fonctions coexistantes
De cet exposé on déduit que les fonctions de la transmission - tradition peuvent être
distinguées les unes des autres et que nous pouvons les séparer de façon analytique,
mais sans perdre de vue qu’elles coexistent, qu’elles s’appuient et se complètent
réciproquement, qu’elles sont hiérarchisées et subordonnées à la Parole définitive,
Jésus-Christ, alpha et oméga de toute l’Écriture : oublier ou omettre l’une d’entre
elles c’est mutiler et appauvrir la richesse et le contenu de la transmission - tradition.
Si la tradition juive n’avait pas conservé le souvenir de la première pâque, au pied du
Sinaï, cet événement n’aurait jamais été institué texte canonique et, ni Jésus, ni
l’Église ensuite, n’auraient interprété la passion - mort - résurrection de Jésus-Christ
comme la pâque nouvelle et définitive, le sommet du passage de Dieu dans
l’histoire. L’Apocalypse n’aurait pas non plus, décrit la Jérusalem nouvelle dans
laquelle il n’y aura plus de temple parce que l’agneau est son temple ; il n’y aura pas
besoin de la lumière du soleil, puisque l’Agneau sera sa lampe, il n’y aura pas de
malédiction, parce que le trône de Dieu et de l’Agneau est au milieu d’elle, et ses
serviteurs l’adoreront ; ils verront son visage et porteront son nom sur leur front (Ap
21, 22-23 et 22, 3-4). Sans conservation, il n’y a pas constitution et, en leur absence,
ni l’interprétation, ni l’innovation, ni l’élan eschatologique ne sont possibles.
IV - LE MILIEU AMBIANT DE LA TRANSMISSION -TRADITION
1 - Dans l’Ancien Testament.
Il s’agit de considérer quels ont été les lieux, ou les circonstances, où la révélation
divine s’est réalisée et où la transmission - tradition a été possible. Selon la nature
des livres sacrés, des péricopes ou des cycles de textes (par exemple le cycle
d’Abraham : Gn 12-25 ; ou le cycle des paraboles : Mt 13), comme ambiances plus
propices à la formation des traditions et de leur transmission, on peut distinguer :
a) Les divers sanctuaires israélites (Béthel, Silo, Sichem, Gilgal, Hébron, etc.) et, en
particulier, le culte dans le Temple de Jérusalem.
b) La cour royale, surtout aux moments de splendeur (David et Salomon) ou de
rénovation (Ezéchiel, Josias).
c) Les périodes de crise qui sont éclairées par la parole prophétique et les
fulgurations apocalyptiques (chute de Samarie, exil, persécution à l’époque des
Maccabées).
d) Dans le judaïsme tardif, l’école rabbinique et la synagogue acquièrent une
importance comme lieu de transmission.
2 - Dans le Nouveau Testament
a) En ce qui concerne le christianisme, le lieu par excellence de la transmission est le
culte chrétien. Les textes les plus proches de l’origine, (les plus anciens), du cycle de
la passion et un grand nombre des textes de la vie publique, se sont transmis et fixés
dans l’ambiance du culte dominical.
b) Par rapport au culte, comme chemin de préparation à ce dernier, se trouve la
prédication primitive ou kérygme, dans laquelle on insiste surtout sur le mystère
pascal chrétien selon les Écritures (relecture de tout l’AT à la lumière de la passion -
mort - résurrection de Jésus-Christ et vice versa ).
b) Comme complément du culte, on fait la catéchèse auprès de ceux qui sont déjà
baptisés. Par cette ambiance de catéchèse, on transmet une grande partie des
Évangiles de l’Enfance, de nombreux textes de la vie publique et quelques
particularités du cycle de la passion et des apparitions.
c) Non moins importante pour la transmission - tradition est l’ambiance
missionnaire, soit relative aux juifs (textes surtout polémiques) soit relative aux
païens (discours missionnaires, miracles...).
d) Dans le reste du NT (tout comme, dans une certaine mesure, à l’intérieur des
Évangiles) le milieu ambiant (Sitzim Leben), ce sont les communautés déjà
constituées auxquelles s’adressent le plus fréquemment les apôtres ou leurs
disciples (école apostolique) pour expliquer certains aspects doctrinaux relatifs au
mystère du Christ, pour corriger des déviations, pour écarter et défendre les
communautés des faux prophètes et docteurs, pour enseigner le comportement
chrétien dans certaines situations de la vie personnelle ou sociale, pour soutenir et
encourager dans les moments de persécutions ou de crises.
L’étude de l’ambiance de la transmission - tradition de la Bible met en évidence le
caractère fragmentaire et occasionnel d’un grand nombre d’écrits de l’AT et du NT,
sans que pour cela, il ne soit plus vrai que tout ce qui est nécessaire à notre salut est
contenu dans les textes scripturaires.
V - LANGUES ET MATÉRIAUX UTILISÉS POUR
LA TRANSMISSION DE LA RÉVÉLATION
La révélation ou parole de Dieu à l’homme, a dû « s’incarner » en parole humaine
pour être intelligible et ainsi être transmise. L’histoire de la transmission écrite de la
révélation suit fidèlement l’histoire de la mise en canon des livres sacrés ; il s’agit,
cependant, de deux procédés différents et qui ne coïncident pas nécessairement.
1 - Les langues de la Bible
Les livres canoniques de la Bible ont été écrits en hébreu, en araméen et en grec. La
majeure partie de l’AT a été écrit en hébreu. En araméen on trouve quelques
fragments vétérotestamentaire : Es 4, 8-6, 12-26 ; Dan 2, 4-7, 28. Ont été écrits en
grec : 2M, le livre de la Sagesse et tous les écrits du NT.
La Bible a été écrite en trois langues, parmi elles deux sont sémitiques (*) tandis que
l’autre est indoeuropéenne (*). Dieu est souverainement libre de choisir les langues
par lesquelles faire parvenir sa révélation à l’humanité. Pour autant, il n’est pas licite
de tomber dans la « sémitolâtrie » et de penser que le grec a trahi l’idiosyncrasie de
la langue et de l’âme sémite ; le grec est également apte à transmettre la révélation
divine. Qui opposerait de façon excessive la pensée hébraïque à la pensée grecque
au point d’identifier la révélation avec la première, tomberait dans une impasse et
ne ferait pas honneur à la libre action de Dieu, pour qui le dessein biblique du salut
est susceptible d’être traduit et exprimé en d’autres langues et d’autres cultures.
2 - Le matériau de l’Écriture
On ne compte aucun texte originel de la Bible, pas même du NT. Et même au IIIe
siècle déjà, les textes originaux néotestamentaires avaient disparu. Ceci s’explique
par le fait que le matériau qu’on utilisait couramment au Ier siècle après Jésus-Christ
et pendant les nombreux siècles précédents, était le papyrus beaucoup plus
abondant et plus économique que le parchemin, mais en même temps plus exposé
aux offenses du temps. Le papyrus dut cependant être le matériau employé pour les
autographes aux époques de l’Ancien Testament comme dans celles du Nouveau.
On avait l’habitude de donner au texte écrit sur papyrus la forme d’un rouleau de dix
mètres de long sur 25 à 30 cm de large. Les extrémités étaient renforcées avec deux
baguettes de bois qui permettaient de le dérouler plus facilement. D’ordinaire le
rouleau de papyrus est peu résistant. Sur le rouleau, on avait l’habitude d’écrire
d’une écriture continue sans séparer les mots les uns des autres.
Chapitre 3
L'inspiration
Dieu s’est révélé aux hommes pour en faire l’objet de son amitié et de son Amour
(DV, 2). Étant une révélation de salut engageant le présent et l’avenir définitif de
l’homme et de tout homme, non seulement cette révélation ne peut sombrer dans
l’oubli mais il faut la transmettre soit oralement, soit par écrit. La révélation de Dieu
stabilisée en tradition qui doit se transmettre aux générations futures, parvient à la
fixation écrite à un moment historique donné et forme ainsi la Sainte Écriture.
Qu’est-ce qui caractérise et différencie le texte sacré de n’importe quel autre texte
religieux du christianisme ou des autres religions ? Depuis toujours, le judaïsme
d’abord et le christianisme ensuite, ont vu les Écritures comme inspirées par Dieu.
Parce qu’elles sont inspirées par Dieu, elles sont canoniques, c’est à dire fondations
et normes de notre foi. Parce qu’elles sont inspirées et canoniques, elles contiennent
et sont ce que Dieu a voulu nous communiquer pour notre salut (vérité salvatrice).
Dans ce chapitre nous traiterons de l’inspiration.
I - Le phénomène de l’inspiration.
II - La conscience de l’inspiration dans la bible.
III - La réflexion de l’Église sur l’inspiration
APERÇUS
- Pourquoi disons-nous que la Bible est Parole de Dieu ? Ce qui est certain c’est que
les textes bibliques ont été écrits par des hommes.
- Pourquoi y a-t-il des gens, y compris des chrétiens, qui ne croient pas à la Bible ?
Pour un grand nombre, les livres de la Bible ne sont rien d’autre que des textes
littéraires comme bien d’autres.
MOT CLEF :
Inspiration biblique
I - LE PHÉNOMÈNE DE L’INSPIRATION
Quand on parle d’inspiration biblique, on fait référence aux textes sacrés de l’Ancien
et du Nouveau Testament, mis par écrit sous l’inspiration de l’Esprit Saint.
Maintenant, l’Esprit Saint n’agit plus seulement dans les livres sacrés et chez les
hagiographes (écrivains sacrés ou écrivains des livres de la Bible), mais aussi avec
d’autres personnes, ou les événements antérieurs ou postérieurs aux Livres sacrés
l’histoire du salut, tout le dessein de salut de Dieu depuis le commencement jusqu’à
la fin des temps.
Dans la Bible, en effet, l’Esprit de Dieu se revêt de métaphores variées pour montrer
sa force et sa liberté, sa présence multiple, invisible et dynamique. C’est un vent
divin qui plane sur l’abîme primitif de la création (Gn 1, 2) ; c’est une force
impétueuse qui s’empare de Samson et le pousse à des exploits héroïques (Jg 1, 25)
ou une force vivifiante qui, des quatre points cardinaux, vivifie les ossements
desséchés contemplés par le prophète (Ez 37, 9) ; c’est un souffle divin qui anime
Adam et une brise suave qui adoucit l’angoisse d’Élie (1Ro 19, 12). C’est une langue
de feu le jour de la Pentecôte (Ac 2), c’est une voix murmurant le nom « ABBA » dans
l’intimité de l’âme (Ga 4, 6 ; Rm 8, 15) ; c’est le don de charismes variés dans l’Église
(Cor 12, 4-11).
La Bible met en relief non seulement la présence active de l’Esprit, mais encore
l’efficacité de son action. Par l’œuvre du Saint-Esprit la création entière acquiert un
visage d’ordre et de beauté, de chaos elle se transforme en cosmos. Dieu a soufflé
son Esprit et le peuple d’Israël est passé de l’esclavage à la liberté (Ex 15, 10) ; l’Esprit
de Pentecôte souffle et la Parole de Dieu résonne avec sincérité, suscite la foi de la
multitude, l’Église se construit dans la communion de foi et de charité, le monde
s’ouvre à l’espérance (Ac 2). L’Esprit de Dieu pousse les prophètes à parler : depuis
Balaam, le prophète de Moab (Nb 22, 38 et 24, 2 sv) en passant par Isaïe (Is 59, 21)
jusqu’à l’auteur de la seconde lettre de Pierre (2Pi 1, 21). L’Esprit accorde aussi à
certains hommes le charisme d’écrire les livres sacrés (2Tim 3, 16).
Cette présence multiple et dynamique de l’Esprit divin, et son efficacité, se prolonge
dans l’histoire et dans la vie de l’Église. Toute l’action sanctifiante de l’Église est
œuvre de l’Esprit. Le Magistère de l’Église possède une assistance spéciale de l’Esprit
Saint pour remplir les fonctions qui lui sont propres. Les grands inspirés sont les
saints qui se sont laissés posséder par l’action mystérieuse de l’Esprit. Les Conciles, la
fondation d’institutions religieuses nouvelles ou de mouvements et d’associations de
laïcs, pour citer un exemple, sont la preuve de l’activité et du dynamisme de l’Esprit
dans l’histoire.
En conclusion, l’inspiration est un phénomène de l’histoire du salut qui en parcourt
toutes les étapes, mais qui a son sommet dans l’histoire biblique où se condense la
Parole de Dieu à l’homme dans le Christ, avec le Christ et par le Christ. Malgré tout il
reste clair que l’accent n’est pas mis sur les auteurs, mais sur l’Écriture en tant que
divinement inspirée.
En toutes ces inspirations le même Esprit est présent, mais seule l’inspiration
biblique reçoit stricto sensu, au sens propre, le nom d’inspiration. Dans tous les
autres cas, on ne peut pas parler de Dieu en tant qu’auteur ; par contre Dieu est
l’auteur des livres sacrés. Essayons par conséquent de définir ce que l’on entend par
inspiration biblique.
Inspiration biblique : c’est le résultat de l’action charismatique de Dieu (cause
principale, auteur) sur l’hagiographe (cause instrumentale, auteur) qui, usant de
toutes ses facultés et talents (mode humain) et Dieu œuvrant en lui et par lui (mode
divin), met par écrit tout et uniquement ce que Dieu veut (effet).
Dans cette définition entrent trois éléments constitutifs :
1 - Dieu comme inspirateur de l’Écriture Sainte.
2 - L’hagiographe comme inspiré par Dieu en ce qui concerne les Écritures.
3 - L’Écriture inspirée en tant que résultat de l’action inspiratrice de Dieu sur
l’hagiographe qui met ses facultés et ses talents au service de l’inspiration divine.
II - LA CONSCIENCE DE L’INSPIRATION DANS LA BIBLE
Au n° 9, la Constitution Dei Verbum enseigne que « La Sainte Écriture c’est la Parole
de Dieu en tant qu’elle est consignée par écrit sous l’inspiration de l’Esprit Saint ».
Dans cette phrase nous trouvons deux expressions de grand intérêt : (1) parole de
Dieu, (2) écrite sous l’inspiration de l’Esprit Saint. Notre intention est d’analyser
comment se vérifie, dans la Bible, la conscience du fait que l’Écriture est Parole de
Dieu et qu’elle est écrite sous l’inspiration de l’Esprit Saint.
1 - La Bible est Parole de Dieu.
a) Dans l’Ancien Testament.
La bible juive, ou AT, se divise en trois grandes parties : La Loi, les Prophètes et les
Écrits. Le peuple d’Israël a toujours considéré la Loi comme divine, parce que Dieu la
lui a remise par l’intermédiaire de Moise, prenons deux exemples :
1) Le document du Pacte Sinaïtique (*) : Dieu prononce ses paroles (Ex 20 ss) ; Moise
communique au peuple toutes les paroles du Seigneur et tous ses commandements
(Ex 24,3) et les inscrit (24, 4) ; il lit le livre en présence du peuple et celui-ci répond :
« Tout ce que le Seigneur a ordonné, nous le ferons » (24, 7)
2) Avec le roi Josias (640 à 609 avant Jésus-Christ), la Loi va se transformer en charte
constitutionnelle du roi et de son royaume. Pendant les travaux de restauration du
Temple de Jérusalem on a découvert un livre de la Loi. Dans ce texte on lit ce
passage : « Lorsqu’il (le roi) montera sur le trône royal, il devra écrire sur un rouleau,
pour son usage, une copie de cette Loi sous la dictée des prêtres lévites. Il ne la
quittera pas, il la lira tous les jours de sa vie pour apprendre à craindre Yahvé son
Dieu en gardant toutes les paroles de cette Loi ainsi que ses règles pour les mettre
en pratique. » (Dt17, 18-19)
Cette même conscience se manifeste chez les prophètes. Ceux-ci sont les hommes
de la Parole. Ils ont l’habitude de commencer leur message par des formules comme
celles-ci : La Parole du Seigneur me parvint… ; la Parole du Seigneur qu’il a reçue… ;
Écoutez la Parole du Seigneur ; ainsi parle le Seigneur ; Oracle du Seigneur. Deux
textes sont particulièrement significatifs :
1) Le rouleau de Jérémie jeté au feu par le roi impie Joaquin. Les paroles écrites par
Jérémie sont des paroles du Seigneur ; la destruction du rouleau est interprétée par
le prophète comme un délit contre la Parole de Dieu… Le rouleau est de nouveau
écrit car la Parole de Dieu ne doit pas se perdre (Jr 36 ).
2) Le rouleau dévoré par le prophète Ézéchiel (Ez 2, 8-9) : « Fils d’homme… mange ce
rouleau et va parler à la maison d’Israël » (3, 1). Dans ces textes s’exprime la
conviction de ce que, non seulement l’oracle prophétique, mais aussi le livre - oracle
écrit -, sont Parole de Dieu.
A la fin du second siècle avant Jésus Christ, on ajoute à la Loi et aux prophètes, les
Écrits qui, en majorité, peuvent être rassemblés sous le titre de livres sapientiaux et
didactiques. La sagesse d’Israël qui a commencé à se développer avec l’avènement
de la monarchie, pendant l’exil, s’intériorise et se spiritualise, grâce à une relation
plus étroite avec la foi en Yahvé. Grâce à cette relation, la Sagesse humaine devient
Sagesse de Dieu. Sur cette base, on en vient à l’identifier avec la Torah (Si 24, 22 ; Ba
4, 1), avec la parole des prophètes elle-même (Si 24, 31 ; Sg 9, 17) et, même, elle est
assimilée à la Parole de Dieu (Pr 1, 20-23). Insensiblement, la Sagesse mise par écrit,
est arrivée à être une nouvelle forme de révélation, accueillie par Israël avec la
même autorité que la Torah ou les prophètes.
b) dans le Nouveau Testament.
Durant le judaïsme, comme résultat de l’ensemble du processus décrit jusqu’ici, naît
une vive conscience de posséder une collection de livres sacrés (1M 12, 9) ou
simplement le livre sacré (2M 8, 23 ). Jésus et l’Église primitive s’approprient cette
conscience du judaïsme possédant des livres sacrés. Avec une simple formule : « Il
est écrit », Jésus clôt m’importe quelle discussion (Mt 4, 4-10 ) ou réclame une
autorité indiscutable (Mt 21, 13). L’Écriture apporte un témoignage de sa personne
et de son œuvre, joint à celui du Père et des miracles (Jn 5, 31-40). Pour Jésus, la
Parole de Dieu (écrite) ne peut être annulée (Jn 10, 35).
Dans le Nouveau Testament Jésus est conscient d’être la révélation ultime et
définitive de Dieu. C’est en tant que tel qu’il a parlé et agi. Bien qu’il reconnaisse
l’autorité de l’Ancien Testament, il se situe au dessus de ce dernier : « Il y a ici
quelqu’un de plus grand que le temple, que Jonas et que Salomon… » (Mt 12,6.41-42
). Son autorité se situe même au-dessus de la loi mosaïque (Mt.5, 21-48 ). Quand
l’Église primitive voit en Jésus l’accomplissement de toutes les promesses de Dieu
(Cor.1, 20 ) ou l’ultime - définitive Parole de Dieu aux hommes (Hb.1, 1-2 ) et même
la Parole de Dieu incarnée (Jn.1, 14 ), elle ne fait pas autre chose que de formuler ce
qui existait déjà dans la conscience de Jésus et qu’il avait lui-même manifesté
ouvertement. Avec Jésus naît une nouvelle tradition, la tradition chrétienne.
Les Apôtres, après la Pentecôte, commencent à prêcher le salut avec courage et
liberté, l’Évangile apporté par le Christ, conscients de ce que Jésus est la parole
définitive de Dieu (Ac 4, 29-31), la Parole du Seigneur Jésus (Ac 8, 25 ) tant aux juifs
qu’aux gentils (*). Luc voit dans l’accroissement de la communauté chrétienne, la
croissance de la Parole (Ac 6, 7 ; 12, 24 ; 14, 20 ). Dieu a non seulement prononcé en
Jésus la parole définitive, mais il l’a également manifestée quand le Christ est
annoncé dans la prédication apostolique. Encore mieux, Dieu continue dans la
prédication apostolique à proclamer Sa Parole, la même que celle qu’il avait
prononcée en Jésus Christ.
Paul parle et agit avec la puissance du Christ (2 Cor 13, 3) pour le salut de ceux qui
l’écoutent (Rm 10, 17) et attribue le même caractère d’autorité à sa parole et à ses
écrits (2Th 2, 15). Aussi n’est-il pas étonnant que les épîtres pauliennes soient
placées à côté d’autres textes de l’Écriture (2Pi 3, 14-16). L’auteur de l’Apocalypse,
de son coté, menace de châtiments quiconque oserait ôter ou ajouter quelque chose
aux paroles de son livre prophétique (Ap 22, 18-29).
En conclusion, pour le peuple d’Israël tout comme pour l’Église, les Saintes Écritures
non seulement contiennent la Parole de Dieu, mais elles-mêmes sont Parole de Dieu.
Et parce qu’elles sont Parole de Dieu elles bénéficient du charisme de l’inspiration.
Nous allons parler de ceci maintenant.
2 - La bible est écrite sous l’inspiration de l’Esprit Saint.
a ) En général.
La présence de l’Esprit de Dieu dans les livres sacrés en vient à être une conséquence
de l’action de l’Esprit dans l’histoire et dans la Parole. La Bible étant le moment
privilégié de la conservation et de la transmission de la révélation, l’Esprit de Dieu ne
pouvait être absent à l’instant définitif et décisif où toute l’histoire du salut,
révélatrice du dessein de Dieu, était mise par écrit, au moment d’atteindre, grâce au
livre sacré, les hommes de tous les temps pour la constitution du nouveau peuple de
Dieu.
Le rapport intime entre Esprit de Dieu et Parole de Dieu écrite s’entrevoit déjà en Is
34, 16 : « Dans le livre de Yahvé œuvrent la bouche et l’Esprit de Yahvé ». Dans
l’oraison pénitentielle de Néhémie la parole écrite de la Loi est attribuée à l’Esprit de
Dieu (Né 9, 20). Dans le Nouveau Testament, on dit qu’il est nécessaire que
s’accomplisse tout ce que l’Esprit Saint a prédit dans l’Écriture par la bouche de
David (Ac 1, 16). Jésus cite lui-même un psaume avec la formule : « David lui-même
sous la motion de l’Esprit Saint a dit … » (Mc 12, 36 )
b ) En particulier
Cependant, les textes classiques dans lesquels on parle explicitement de l’action de
l’Esprit de Dieu dans la parole écrite, c’est-à-dire dans les livres sacrés, sont au
nombre de deux : 2Pi 1, 20-21 et 2Tm 3, 16-17.
(1) 2Pi 1, 20-21 : «Avant tout, sachez-le : aucune prophétie de l’Écriture n’est objet
d’interprétation personnelle ; ce n’est pas d’une volonté humaine qu’est jamais
venue une prophétie ; c’est poussés par l’Esprit Saint que les hommes ont parlé de la
part de Dieu ».
- Dans le texte on ne distingue pas entre prophétie orale et prophétie écrite, on
passe de l’une à l’autre sans aucune différenciation.
- Des deux sortes de prophéties, on dit qu’elles ne proviennent pas de l’initiative
humaine, mais qu’elles furent prononcées ou écrites par des hommes mus par
l’Esprit Saint. Par conséquent, leur prophétie n’est apparemment qu’une parole
humaine, mais dans sa nature plus intime, elle est Parole de Dieu, en tant que
consacrée par l’Esprit Saint.
- Étant Parole de Dieu, consacrée par l’Esprit, elle n’admet pas une interprétation
privée arbitraire.
( 2 ) 2Tm 3, 16-17 : « Toute écriture est inspirée par Dieu et utile pour enseigner,
réfuter, redresser, former à la justice : ainsi l’homme de Dieu se trouve-t-il accompli,
équipé pour toute œuvre bonne ».
- L’action de l’Esprit Saint a des retombées sur « toute l’Écriture ».
- De quelle Écriture parle-t-on : de l’AT ou du NT, ou des deux ensemble ?
Directement, Paul se réfère à l’Ancien Testament : il parle en effet, de l’Écriture que
Timothée a connue par sa mère juive. Indirectement il se réfère à tout livre qui se
présente sous le nom d’Écriture (2Tm 5, 17-18).
- Une chose est certaine : au moment où on écrit la 2e épître de Pierre, il existe déjà
une collection des épîtres pauliennes, mises sur le même plan que les autres
Écritures (2Pi 3, 15-16).
III - LA RÉFLEXION DE L’ÉGLISE AU SUJET DE L’INSPIRATION
Au long de l’histoire de l’Église, les chrétiens n’ont cessé de réfléchir sur l’inspiration
et sa nature, se basant sur le fait que la Bible est la Parole de Dieu et qu’elle est
inspirée. Clément Romano désigne les prophètes comme ministres de la grâce de
Dieu, mus par l’Esprit Saint (1Clém 8, 1). Saint Jérôme ajoutera que les Écritures ont
été écrites et publiées par l’Esprit Saint. L’Église a manifesté cette même conscience
dans son magistère et sa théologie.
A ) LE CHEMIN DES ANALOGIES
Pour expliquer les mystères, dans leur sens naturel aussi bien que dans leur sens
surnaturel, les hommes ont toujours eu recours à l’analogie. Grâce à elle, les
hommes essaient de s’approcher du mystère, d’en chercher l’intelligibilité, sachant,
cependant, que l’analogie est un moyen très imparfait et limité. La théologie qui
réfléchit sur les mystères ne peut se passer du langage analogique, aussi impropre
soit-il en face de la réalité qu’il essaie de capter. On a spécialement utilisé deux types
d’analogie : les instrumentales et les littéraires.
1 - Analogie instrumentale
a) A l’époque patristique (*)
« Ces saints hommes-là, écrit Clément d’Alexandrie, n’avaient pas besoin d’artifices
et n’avaient pas à parler dans un but polémique : il leur suffisait de s’offrir avec
sincérité à l’action de l’Esprit Saint, parce que ce divin plectre, descendu du ciel, se
servant des hommes comme d’instruments de musique, cithare ou lyre, nous révèle
les réalités célestes et divines ».
Prenons l’instrument musical. Dieu est le musicien qui prend la flûte dans ses mains
et joue une musique belle et harmonieuse. L’homme est la flûte. La musique est le
résultat de l’action de Dieu et de l’homme. Tout comme la flûte est l’instrument du
musicien pour faire entendre une belle musique, l’hagiographe-prophète est
l’instrument de Dieu pour faire entendre sa parole dans le texte sacré. Il est évident
que dans l’image ce qu’on prétend mettre en relief c’est l’hagiographe comme
instrument de Dieu. L’Esprit Saint meut son instrument humain pour exécuter son
œuvre de langage. C’est lui qui souffle, fait bouger et appuie ; chaque auteur humain
met son timbre, sa note, son langage et son style. La mélodie qui en résulte provient
des deux : de l’Esprit et de l’inspiré, une et indivisible, parfaitement humaine et
mystérieusement divine.
b) A l’époque scolastique (*)
Avec la scolastique on avance de l’image de l’instrument de musique vers une
conceptualisation de celle-ci : cause instrumentale et cause principale. Saint Thomas
expose cette doctrine avec les points suivants :
(1 ) La cause principale agit par vertu propre ; l’instrumentale en vertu de la motion
reçue de la cause principale. L’Esprit Saint est la cause principale, l’homme,
l’instrumentale.
( 2 ) Dans l’instrument, on distingue une double action : la naturelle de l’instrument
et l’instrumentale, qui est la naturelle élevée et appliquée aux capacités propres de
la cause principale. L’homme, qui est instrument, a la capacité naturelle d’écrire
d’une façon logique et raisonnée. Cette capacité naturelle est élevée par l’Esprit
Saint pour qu’il écrive la révélation, ou Parole de Dieu aux hommes.
( 3 ) Le résultat de la coopération entre cause principale et cause instrumentale doit
être attribué entièrement aux deux réunis, mais selon un mode différent. La Sainte
Écriture est œuvre de Dieu, de l’Esprit Saint et de l’homme, mais de façon différente
: Dieu comme cause principale, l’homme comme cause instrumentale.
( 4 ) Les deux causes agissent simultanément pour la production du même effet.
( 5 ) La capacité de l’agent principal a un caractère permanent ; celle de l’agent
instrumental un caractère passager. L’instrument n’est instrument qu’au moment et
pour le but vers lequel tend la cause principale.
2 - Analogie littéraire
Puisque l’inspiration retombe sur un texte littéraire, peut être cette analogie serait-
elle la plus adéquate pour expliquer et approfondir la nature de l’inspiration.
a) Analogie du dicté
Saint Jérôme, par exemple, écrit : « Toute l’Épître aux Romains exige une
interprétation et elle est enveloppée de tant d’obscurités que, pour la comprendre,
nous avons besoin de la grâce de l’Esprit Saint qui a dicté ces choses par
l’intermédiaire de l’apôtre ».
Et saint Grégoire le Grand, d’une phrase sobre et catégorique, jugera « celui qui l’a
dictée, l’a écrite ».Que signifiait « dictare » ou « dictatu » dans la terminologie
patristique ? Qu’ont voulu dire les conciles et les textes du magistère en utilisant ce
terme ? Outre le sens actuel « dictare » peut être traduit par composer, enseigner,
commander ou, simplement, suggérer. Ceci posé, il est facile de penser que dans les
textes patristiques et ceux du magistère l’expression « Spiritu Santo dictante » (sous
la dictée de l’Esprit Saint), ne veut pas dire prononcer des paroles qui vont être
transcrites l’une après l’autre mécaniquement, mais il faudrait plutôt traduire : sous
l’ordre, la prescription, la suggestion de l’Esprit Saint ou, composé par l’Esprit Saint.
Dans le premier cas on souligne l’action de l’Esprit Saint sur la volonté de
l’hagiographe, dans le second l’Esprit Saint en tant qu’auteur de l’Écriture.
Comme dans le Christ il y a deux volontés et deux opérations, sans confusion ni
opposition et, comme la volonté humaine du Christ est soumise à la volonté divine,
de la même façon, dans le mystère de l’inspiration il y a une opération humaine
littéraire ou de langage, soumise et non pas opposée à l’opération de l’Esprit Saint.
Et rabaisser l’opération humaine à celle d’un simple copiste (personne qui écrit ce
qu’on lui dicte), ce n’est pas glorifier l’opération divine.
b) Dieu et l’homme auteurs de la Sainte Écriture
Le Concile Vatican II nous a habitués à parler de Dieu auteur de l’Écriture et des
hommes comme véritables auteurs des livres sacrés. Comment expliquer que le
texte sacré puisse avoir deux auteurs ? Auteur appliqué à Dieu, signifie-t-il la même
chose qu’appliqué aux hommes ?
La lutte contre l’hérésie (*) gnostique (*) avec ses diverses ramifications (marcionites
(*), manichéens (*), etc.) fut l’occasion d’utiliser cette analogie. Les pères de l’Église
eurent à défendre l’unité des deux Testaments ; il faut affirmer que tous les deux
procèdent et sont inspirés par Dieu lui-même. Il a semblé, aux Pères de l’Église, que
l’image la plus appropriée pour exprimer ces idées était celle d’un auteur : Dieu est
auteur aussi bien de l’AT que du NT.
Cette analogie se trouve aussi dans des textes conciliaires et ceux du magistère, et
même dans une définition de la foi du Concile de Florence (Dz-Sch 1334). Le Concile
Vatican II répétera les paroles de Vatican I, en DV 11 et, de son côté, affirmera en DV
16 : Dieu est l’auteur qui inspire les livres des deux Testaments, de sorte que l’Ancien
recouvrait le Nouveau et que le Nouveau révélait l’Ancien.
Peut être qu’un chemin expliquant la relation entre auteur divin et auteur humain de
l’Écriture devrait-il être cherché dans la révélation et l’inspiration. Inspiration et
révélation, écrit Benoît, ne se confondent ni ne s’opposent ; elles ne se succèdent
pas non plus. Elles agissent simultanément et harmonieusement, s’incluant l’une
l’autre, comme l’Esprit inclut la Parole. Le Dieu qui révèle est le même qui inspire,
bien qu’il s’agisse de deux actes différents : « la vérité divinement révélée que
contiennent et présentent les livres de la Sainte Écriture, y a été consignée sous
l’inspiration de l’Esprit Saint » (DV 11).
Dieu est auteur en tant qu’utilisant des hommes choisis et agissant en eux et par
eux. « Ceux-ci mirent par écrit, en vrais auteurs, tout ce qui était conforme à son
désir, et cela seulement », c’est-à-dire la révélation de lui-même et la manifestation
du mystère de sa volonté, pour que les hommes parviennent jusqu’au Père et
participent de la nature divine (DV, 11.2). Dieu est auteur pour autant que le texte
sacré est un texte de révélation divine, mise par écrit par les écrivains sacrés sous
une motion vitale de Dieu lui-même. L’homme est auteur par tout ce qu’il met par
écrit, en pleine possession de ses facultés et capacités intellectuelles et littéraires,
tout et seulement ce que Dieu veut. Tous deux sont auteurs littéraires, mais avec
une spécificité différente. Dieu, en tant que l’Écriture est un texte de révélation de
soi-même et de son dessein d’amour envers les hommes. L’hagiographe, en tant que
l’Écriture est un texte écrit par les hommes, sous l’action et l’inspiration de Dieu lui-
même.
La Constitution dogmatique DV enseigne (n°11) : « Les livres de l’Ancien Testament
comme du Nouveau, rédigés sous l’inspiration de l’Esprit Saint, sont sacrés… ils ont
Dieu comme auteur ». Dieu étant l’auteur de l’Écriture, celle-ci nécessairement ne
peut qu’être inspirée. Étant donné que le cours est une Introduction à la Sainte
Écriture, nous allons terminer par une réflexion sur l’Écriture inspirée.
Sous l’influence de la réflexion philosophique sur la théorie du langage, on a
davantage valorisé l’Écriture elle-même comme inspirée. Il faut continuer d’affirmer
que les textes et les auteurs sont indissociables ; le texte n’est pas un objet fabriqué
auquel le lecteur pourrait lier n’importe quelle signification ; le texte est une parole
adressée par l’auteur aux lecteurs traversant le temps et la distance. La théologie de
l’inspiration doit regarder les livres saints en tenant compte des coordonnées
historiques et culturelles qui ont conditionné la formation du message de Dieu en un
temps et un lieu déterminés, dans une tradition qui s’étale tout au long de
l’économie historique du salut. En bonne logique, il convient d’affirmer que Dieu est
celui qui inspire, l’homme celui qui reçoit l’inspiration et transmet la Parole de Dieu
reçue par l’inspiration, mais seul le texte sacré, au sens strict, est inspiré en tant que
résultat simultané et conjoint de l’action de Dieu et de l’action de l’homme.
Cette valorisation de l’Écriture inspirée est en plein accord avec la Patristique.
L’Écriture, selon saint Irénée, est parfaite, car elle a été dite par le Verbe de Dieu et
par son Esprit.
Le magistère de l’Église utilise aussi fréquemment l’expression « livres inspirés » ou «
Écriture Divine », depuis les premiers siècles jusqu’à nos jours. Un simple exemple : «
L’économie du salut, annoncée d’avance, racontée et expliquée par les auteurs
sacrés, apparaît donc dans les livres de l’Ancien Testament comme la vraie Parole de
Dieu. Par conséquent, ces livres divinement inspirés, conservent une valeur
impérissable » (DV, 14).
B ) DOCTRINE THÉOLOGIQUE SUR L’INSPIRATION.
1. Pour mieux comprendre l’inspiration biblique, il est nécessaire de la considérer en
relation avec la révélation de Dieu à l’humanité, ce don surnaturel, gratuit et à
l’origine de toute l’histoire du salut dans laquelle il faut situer l’Écriture, l’inspiration
et l’Église. Tout concept d’inspiration devra, par conséquent, se mesurer au
caractère gratuit et surnaturel de celle-ci. S’il en était autrement on courrait le risque
de la réduire à une expérience religieuse, purement humaine, à la mesure de
n’importe quelle autre expérience profane ; les livres sacrés deviendraient la mise
par écrit de l’expérience religieuse d’hommes extraordinaires, de génies religieux.
Par l’Écriture, cependant, on constate que les auteurs sacrés, en grande majorité
font partie des hommes normaux de leur peuple, sans qualification humaine
particulière pour l’accomplissement de leur mission prophétique et inspirée. D’un
autre côté, en la mettant en relation avec la révélation qui se transmet au cours du
temps de l’histoire du salut, nous évitons le risque de comprendre l’inspiration d’une
manière mécanique (dictée mot à mot, ce qui ferait de l’auteur sacré un simple
copiste ou secrétaire), ou sous forme d’oracle selon le mode de la culture
hellénistique (*). La chaîne de la transmission révélatrice jusqu’à la fixation en
Écriture inspirée est la négation la plus catégorique de cette façon de concevoir
l’inspiration biblique.
2. De plus, l’inspiration doit être comprise dans l’ensemble de l’action multiforme de
l’Esprit Saint dans l’histoire du salut et en harmonie avec ladite action. Un isolement
de l’inspiration biblique, comme entité en soi, étrangère à toute autre activité de
l’Esprit est insoutenable. Le propre de l’inspiration biblique sera mieux et plus
facilement compris, si nous le plaçons dans le cadre de l’activité multiforme de
l’Esprit. Traiter l’inspiration biblique sans relation à la révélation historique revient à
lui faire perdre sa généalogie et son identité de sens.
3. L’inspiration est une vérité révélée par Dieu dans l’Écriture elle-même. Il suffit de
penser à la conscience que les auteurs sacrés avaient du fait que l’Écriture est Parole
de Dieu et, en tant que telle, est inspirée par l’Esprit Saint. Le Concile de Trente (Dz-
Sch 1504), en la définissant comme dogme de foi, n’a fait que reconnaître ce qui
apparaît clairement dans l’Écriture elle-même. La pénétration dans l’intelligence du
dogme de l’inspiration se réalise à partir de la contemplation et de la réflexion du
croyant, mais surtout grâce à une expérience intime de l’inspiration elle-même au
contact de l’Écriture, sous la direction des Évêques, successeurs des apôtres dans le
charisme de la vérité.
4. L’intelligence de l’inspiration en tant que mystère divin ne peut être menée à bien
sans les approximations analogiques avec les réalités de ce monde ou avec les
mystères entre eux (mystère de l’Incarnation, de l’Eucharistie…), comme aussi par sa
relation avec la fin ultime de l’homme qui est le salut (Dz-Sch 3016). C’est une
exigence de l’entendement humain qui ne peut comprendre les choses invisibles et
au delà des sens, si ce n’est par les visibles et les sensibles. Cependant, il ne suffit pas
de savoir que la réflexion de l’Église s’est servie de l’image de la cithare, de la plume,
de la dictée ou de l’auteur pour expliquer la nature de l’inspiration. Ce qui est
intéressant surtout, c’est de capter l’étincelle de vérité que nous voyons derrière
l’image et d’en acquérir un certain concept. Il ne suffit pas, non plus, de voir
clairement le parallèle établi entre le mystère de l’inspiration et celui de l’Incarnation
ou de l’Eucharistie. Il est nécessaire de découvrir et de conceptualiser la nouvelle
lumière que nous recevons dans la compréhension du mystère. Une plus grande
intelligence du mystère nous sera donnée par la connexion organique de ces
étincelles dans l'unité.
a). Dans l’inspiration interviennent inséparablement trois facteurs : l’Esprit Saint qui
inspire, l’homme qui reçoit l’inspiration, le texte sacré où se trouve mis par écrit ce
que Dieu a inspiré. Une intelligence adéquate de l’inspiration devra toujours
comporter la présence des trois facteurs, même s’il est légitime de faire ressortir l’un
dans un cas et un autre dans un autre cas.
b). L’action spécifique de l’Esprit Saint sur le texte sacré et celle de l’auteur humain
sont passagères ; l’inspiration de la Sainte Écriture, en revanche, est permanente,
fixe et immuable pour le bien de toutes les générations futures. L’écrivain n’est pas
toujours en train d’utiliser la plume, en revanche la lettre écrite demeure. L’Esprit
Saint n’agit pas avec son action inspiratrice, comme auteur de l’Écriture, à chaque
instant, puisque l’auteur humain a écrit le texte sacré dans un laps de temps
déterminé. L’Écriture, au contraire, survit à l’auteur humain et continue d’exister
après l’activité inspiratrice de l’Esprit Saint.
c). L’inspiration est entièrement une initiative de l’Esprit Saint, mais sans la
médiation humaine, le texte inspiré est impossible. Il s’agit d’une médiation
nécessaire pour ne pas tomber dans un concept d’inspiration de type rabbinique,
coranique ou d’oracle. Dans la compréhension catholique de l’inspiration, l’homme
de Dieu, comme pont entre l’initiative de l’Esprit et le texte sacré, est un être qui agit
avec « toutes ses facultés et talents » (DV, 11). L’initiative divine agit sur le texte
sacré, seulement comme révélation de Dieu et, exclusivement, par l’intermédiaire
d’hommes inspirés.
d). L’élévation du texte au niveau du livre sacré et inspiré ne provient pas de la
médiation humaine, comme un génie religieux ou littéraire, mais de l’action de
l’Esprit sur l’auteur sacré pour qu’il écrive tout et seulement ce que Dieu veut.
L’auteur humain, grâce à ses facultés et talents, pourra faire du texte sacré un
morceau merveilleux de littérature ou bien exprimer une expérience religieuse
singulière et sublime, mais n’élèvera jamais ses écrits au niveau d’un texte sacré et
inspiré, si ce n’est par une action surnaturelle de l’Esprit Saint sur lui.
e). L’inspiration biblique est exigée par la révélation divine elle-même, par laquelle
Dieu entre en dialogue amoureux et sauveur avec le genre humain. Sans révélation,
il n’y a pas d’inspiration ; sans inspiration, nous ne saurions pas exactement ce que
Dieu a révélé. Un texte écrit ne se crée pas à partir du néant. A proprement parler,
ce n’est pas une création, mais une naissance. L’inspiration gratuite et surnaturelle
naît de la révélation, surnaturelle et gratuite également.
f). Dans l’inspiration biblique il est impossible de séparer la part de Dieu et la part de
l’homme. Tout le texte inspiré est œuvre de Dieu et de l’auteur sacré, bien que sous
des aspects différents. Le texte inspiré, en tant qu’il est et qu’il contient la révélation,
a Dieu pour auteur. En tant que texte littéraire, médiateur de l’action de l’Esprit, il
est œuvre humaine.
5. L’Église, se basant sur la révélation de l’Écriture, dans la réflexion pluriséculaire sur
l’inspiration, pour en défendre l’intégrité et la véritable nature, l’a définie
dogmatiquement et l’a précisée en tant que concept, repoussant des positions et
des interprétations erronées qui se sont succédées à travers les siècles.
Ci dessous sont indiquées les plus importantes :
a). Dieu lui-même, l’Esprit lui-même, est l’auteur de l’Ancien et du Nouveau
Testament (contre les manichéens et tous les mouvements religieux dualistes), (EB
28, 30, 57, 77, 125, 200).
b). Tous et chacun des livres de la Bible chrétienne sont inspirés. De même, les
canoniques et ceux qu’on appelle deutérocanoniques (contre les protestants). (EB
83, 85, 124, 202).
c) Contre les modernistes (*), l’Église s’est vue obligée à défendre l’inspiration totale
et intègre de l’Écriture (y compris ce que les modernistes appellent des erreurs). (EB
193, 210).
Chapitre 4
Le canon de l'écriture
La Bible est un livre inspiré parce qu’elle a Dieu comme auteur et qu’elle a été écrite
sous la motion de l’Esprit Saint. Il est clair que l’inspiration ne provient pas de
l’homme, ni même de l’Église, mais que l’inspiration est un don surnaturel de Dieu à
l’Église et, à travers Elle, à l’humanité pour qu’elle trouve dans l’Écriture inspirée son
chemin de salut. Devant l’Écriture inspirée surgit dans l’esprit humain une série de
questions. Comment l’homme sait-il qu’un livre est inspiré ? Comment connaître
quels sont les livres inspirés par Dieu ? Pourquoi ces livres, et non d’autres, sont-ils
acceptés par l’Église comme sacrés ? Le canon de l’Écriture essaie de donner une
réponse à ces questions : tous et seuls ces livres-là, ceux que l’Église reconnaît
comme norme et règle de la foi et de la vérité salvatrice, sont inspirés. L’Église ne
mène pas cette opération de façon arbitraire mais, au contraire, par l’application de
critères tant internes qu’externes, par lesquels il lui est permis de discerner et de
découvrir la règle de la foi et de la vérité dans un livre déterminé, comme dans un
miroir.
I. Introduction.
II. Formation du canon
III. Le dogme de la canonicité
IV. Les critères de la canonicité.
APERÇUS.
- Pourquoi les églises chrétiennes évangéliques n’acceptent-elles pas tous les livres
qui sont dans la Bible catholique ? L’étude du processus historique de
reconnaissance de la canonicité des écrits sacrés vous donnera la réponse.
- Tous les livres de la Sainte Écriture ont-ils la même importance ? S’il en est ainsi un
principe de l’AT devrait avoir la même valeur qu’un principe du NT.
MOTS CLEFS :
Canon Livres canoniques
I. INTRODUCTION
1) Nécessité du canon biblique
La fixation du canon biblique a constitué un besoin pour l’Église. En premier lieu, il
était nécessaire de le faire à cause de l’universalité de l’unique Église. Pour maintenir
une même règle de foi dans toutes les églises disséminées sur la terre il était
indispensable de disposer d’un même canon. Face aux hérétiques (*) qui avaient
fréquemment recours à des livres « secrets » (apocryphes) (*), il était en tout point
nécessaire de délimiter clairement les livres normatifs de la foi, en les distinguant de
n’importe quel autre, fut-il apocryphe ou non. En ce qui concerne le judaïsme avec
lequel elle entra en polémique maintes fois, l’Église dut réaliser deux opérations
différentes :
a) Établir le canon chrétien de l’Ancien Testament.
b) Fixer les Écritures chrétiennes, non en concurrence avec l’Écriture juive, mais
comme son complément, son perfectionnement et sa plénitude.
L’existence même d’Écritures chrétiennes dénote la conscience lumineuse qu’avait
l’Église primitive de ce que Jésus était le Messie attendu, préfiguré et prophétisé
dans la Bible hébraïque, de ce que Jésus était la plénitude de la révélation de Dieu.
Avec le temps, cette conscience amènera l’Église à distinguer entre Ancien
Testament et Nouveau Testament, en soulignant la continuité par le nom
(Testament), mais également l’originalité et la nouveauté de l’Écriture chrétienne
(Nouveau).
2) Terminologie.
a) Canon, canonique, canonicité.
Canon : étymologiquement, le mot canon semble provenir du terme grec canon qui
signifie « mesure ». Avec le temps, canon s’est converti en critère de la vérité d’une
affirmation ou mesure, norme ou règle de quelque chose.
Jusqu’au IIIe siècle, il n’y a pas d’usage explicite du terme appliqué à la Sainte
Écriture, même si on présuppose que le contenu de la règle de foi était éminemment
biblique. C’est au IVe siècle que le terme « canon » commence à prendre le sens de
catalogue normatif des livres inspirés. Saint Athanase, peu après 350, dit que le «
Berger d’Hermas ne fait pas partie du canon » (EB 15). La raison en est que ce terme
exprime précisément le caractère de norme fondatrice, c’est à dire le contenu
objectif des livres inspirés comme norme de la vérité chrétienne.
De canon dérive canonique, terme utilisé pour la première fois au Concile de
Laodicée de Phrygie (ca 360). Au canon 59, on établit que «dans l’assemblée on ne
doit pas réciter des psaumes privés ou des livres non canoniques, mais seulement les
livres canoniques du Nouveau et de l’Ancien Testament ». Les livres canoniques, par
conséquent, en viendront à recouvrir l’ensemble des livres qui donnent la norme de
la foi de l’Église. La canonicité, d’autre part, serait cette qualité de l’Écriture Sainte
par laquelle celle-ci se constitue comme norme, règle, canon de la foi et de la vie du
chrétien.
Livres canoniques (canon de la Bible) : ce sont la collection de livres de l’AT et du NT
recueillis par l’Église, parce que, écrits sous l’inspiration de l’Esprit Saint, ils ont Dieu
comme auteur et, par conséquent, sont normatifs de la foi.
b) Proto et deutérocanoniques.
Sixte de Sienne, dans les années postérieures au Concile de Trente, a introduit une
distinction entre les livres de l’Écriture, entre les protocanoniques et les
deutérocanoniques pour distinguer les livres acceptés par les réformateurs de ceux
qu’ils n’acceptent pas. Nous pouvons dire que les livres protocanoniques
correspondent à ceux qui ont été acceptés comme canoniques depuis toujours et
sans discussion par toute l’Église, par contre, les deutérocanoniques sont ceux dont
la canonicité a fait l’objet de quelques discussions.
c) Apocryphes et pseudo-épigraphiques
Étymologiquement, le terme «apocryphe » signifie chose cachée et désignait en
principe ces livres que l’on destinait à l’usage privé des adeptes d’une secte. En ce
qui concerne les livres canoniques, on appelle apocryphes ceux qui ont été rejetés
par l’Église comme non canoniques même si, parfois, certains Pères et écrivains
ecclésiastiques ont pu les considérer comme canoniques. Ces livres sont appelés
pseudoépigraphiques par les protestants.
II. FORMATION DU CANON
Étant donné que l’AT s’est progressivement formé au cours des siècles et que le NT
correspond à une période de 70 ans, le caractère canonique des différents écrits n’a
été découvert et ne s’est imposé que peu à peu dans la vie du judaïsme et de l’Église.
Tenant compte, par ailleurs, de ce que le canon passe par des vicissitudes différentes
pour les juifs et pour les chrétiens, nous devons les analyser séparément. Par
conséquent, nous développons le sujet sur les points suivants :
1) Formation du canon dans le judaïsme.
2) Formation du canon de l’AT dans le christianisme.
3) Formation du canon du NT.
1) Formation du canon dans le judaïsme
Dans Ex 31-32, la Loi se présente comme un texte écrit normatif du peuple d’Israël.
La Torah ou Pentateuque sera, donc, le premier ensemble de livres qui sera accepté
comme canonique. Cependant, dans ce processus de la formation du canon juif, le
texte le plus significatif est constitué par le prologue du Siracide (ou Ecclésiastique),
écrit pour la traduction grecque vers l’an 130 av JC. Il parle de «la Loi, les Prophètes
et les autres (écrits) qui suivent » par l’intermédiaire desquels «nous ont été
communiqués de nombreux et grands biens » et un peu plus loin il se réfère à la Loi,
les Prophètes, et les autres livres de nos Pères. Il est clair qu’avec le mot Loi, il se
réfère au Pentateuque, tandis que lorsqu’il parle des Prophètes, il s’agit sans doute
des Prophètes antérieurs (Josué, Juges, 1 et 2 Samuel, 1 et 2 Rois principalement,
même si d’autres livres peuvent être inclus) et des prophètes écrivains. Le groupe
des "écrits" paraît être encore ouvert. Sous le nom d’Écrits on doit mettre les
Psaumes, les Proverbes, le Cantique des Cantiques et l’Ecclésiastique ; peut-être
aussi le livre de Job.
Pendant le 1er siècle il ne semble pas exister un canon fixe de la Bible hébraïque,
même si on accepte comme livres sacrés la Loi et les Prophètes, à côté de quelques
Écrits, en particulier les Psaumes. La nécessité d’un canon normatif s’est vue
accélérée par la destruction du Temple de Jérusalem en 70 ap JC, qui a provoqué
l’urgence d’une cohésion qui maintiendrait la propre l’identité juive et des
discussions internes au sein du judaïsme, entre les pharisiens et les sectes juives
d’inspiration apocalyptique. L’acceptation, par les chrétiens, de la Bible des Septante
(*) a probablement été l’ultime motif pour que les juifs limitent le canon de l’AT aux
livres les plus anciens et seulement à ceux qui de fait circulaient alors dans leur
langue d’origine hébraïque ou araméenne.
2. Formation de l’AT chrétien.
Comme nous l’avons vu, l’Église n’a pu recevoir de la Synagogue un canon de l’AT
déjà fixement établi. Considérons donc le processus de la formation du canon
chrétien de l’Ancien Testament.
a) Les Pères de l’Église.
L’Église naissante hérite de la communauté juive d’une série de livres sacrés dont la
liste n’était pas définitivement close. L’Église se posa le problème du canon et réalisa
un grand effort d’éclaircissement et de fixation des livres sacrés de l’AT.
Les Pères Apostoliques (*) qui les citent selon la version grecque des septante,
paraissent être familiarisés avec les deutérocanoniques de l’AT, mais ils citent aussi
quelques apocryphes, ce qui permet de penser que le canon proprement dit n’est
pas encore fixé. Origène, par exemple qui vécut entre le IIe et le IIIe siècle, sait très
bien que quelques livres utilisés comme Écriture existent dans l’Église, mais qu’ils
n’appartiennent pas au canon juif.
Origène, comme beaucoup d’autres Pères, distingue deux groupes de livres : celui
des apocryphes, qu’il considère comme utiles, mais que l’on doit utiliser avec
beaucoup de précaution ; et celui des livres scripturaires qui comprennent la Bible
hébraïque et les deutérocanoniques, même si ces derniers ne sont pas lus par l’Église
et ne font pas, non plus, l’objet de commentaires. Rufin d’Aquilée les appellera livres
ecclésiastiques.
b) Le Magistère de l’Église
Avec le décret «pro Jacobitis » du Concile de Florence (1441), l’Église adopte une
position claire sur le canon qui sera ultérieurement défini, «une fois pour toutes »,
par le Concile de Trente (1546), contre les réformateurs protestants qui se basaient
sur le principe de la «solaScriptura » et avaient opté pour le canon juif. Le texte
proclame ainsi « …on juge opportun d’ajouter au présent décret le catalogue des
livres sacrés, pour que nul ne puisse hésiter sur ceux qui sont les livres reconnus
comme sacrés par le Concile lui-même » (Denz-Hun, 1501). Postérieurement Vatican
I se référa au Concile de Trente (EB 77) et la Constitution «Dei Verbum » de Vatican II
ne fait pas autre chose que de citer Vatican I (DV, 11).
3. Le canon du Nouveau Testament.
A l’époque apostolique on ne peut proprement parler de livres canoniques,
puisqu’elle correspond à la période de leur composition. On peut affirmer qu’à la fin
du 1er siècle, il existait une collection d’épîtres pauliniennes, dont l’importance nous
est inconnue. En outre, les quatre Évangiles, bien que destinés à des communautés
particulières, avaient acquis une importance singulière et étaient conservés parce
qu’ils provenaient des apôtres ou de leurs disciples, ou à cause du prestige de la
communauté à laquelle ils étaient destinés (Antioche, Rome, la Grèce, Éphèse).
Finalement, se crée peu à peu une conscience canonique à l’intérieur des écrits
néotestamentaires eux-mêmes (cf. 2Pi 3, 4-16 ; Ap 1, 1-3 ; 22, 18-19).
Dans la vie et la conscience de l’Église est apparu, peu à peu, le concept de
«Nouveau Testament ». Saint Justin témoigne de la lecture des Évangiles dans la
liturgie eucharistique à côté des écrits des prophètes. Méliton de Sardes parle des
écritures juives comme de l’AT, donnant à entendre implicitement qu’il existe déjà
un NT. Enfin, vers la fin du IIe siècle, Tertullien fut le premier à employer l’expression
du NT pour désigner les écrits chrétiens sacrés.
Lorsque la tradition orale commence à devenir incertaine, incontrôlable et
manipulable par les hérétiques, s’impose la nécessité d’écrits qui transmettent
fidèlement cette tradition. Ce phénomène se vérifia dans la seconde moitié du IIe
siècle. Les mouvements hérétiques (*) durent influer notablement sur l’accélération
du canon dans l’Église : Marcion (*) avec son rejet de l’AT et avec la réduction du NT
aux 10 épîtres pauliniennes et à l’Évangile de Luc ; le montanisme (*) avec son
extension de l’inspiration à tout chrétien qui dans l’Église s’ouvrirait à l’Esprit
toujours agissant, s’appuyant sur Jn 14, 16-26 ; 15, 26 ; 16 12-15.5.
L’apparition des premières listes fut décisive pour la constitution du canon
néotestamentaire. Outre celle de Marcion, déjà mentionnée, la plus ancienne est le
Fragment muratorien, qui représente l’emploi du NT à Rome, à la fin du IIe siècle (EB
1-7). Ensuite viennent les listes d’Origène et d’Eusèbe de Césarée. En Occident, les
listes d’Athanase, d’Augustin, des conciles d’Hippone et de Carthage certifient
l’unanimité des Églises, qui offrent déjà un canon complet. Cette liste sera confirmée
par le concile de Florence et définie par le Concile de Trente.
III. LE DOGME DE LA CANONICITÉ
« Si quelqu’un ne reçoit pas ces mêmes livres dans leur intégrité, avec toutes leurs
parties, pour sacrés et canoniques, comme on a coutume de les lire dans l’Église
catholique et tels qu’on les trouve dans l’édition de la Vulgate ; s’il méprise de
propos délibéré les traditions susdites, qu’il soit anathème » (Concile de Trente-
session IV cf EB 79).
1. Il s’agit d’une véritable définition dogmatique, car elle déclare anathème celui qui
n’accepte pas le contenu du paragraphe. La formule employée ici : « Si quelqu’un…
qu’il soit anathème » était le propre de l’époque pour exprimer la volonté de définir
un dogme de foi.
2. Dans le texte, on définit le caractère sacré et canonique des livres mais non leur
authenticité ou leur pureté d’origine ? La qualité des auteurs des livres n’est pas
définie. Un clair indice en est le changement effectué, par rapport au concile
florentin, lorsqu’on nomme les auteurs des Évangiles. On ne dit pas «Évangile de
Marc ou de Matthieu» mais «selon Marc ou selon Matthieu ».
3. L’expression «livres dans leur intégrité, avec toutes leurs parties». « Livres
intégraux » veut dire tous et chacun des livres énumérés, sans aucune exception et
sans aucune addition. « Avec toutes leurs parties » fait allusion à ces fragments
particuliers par exemple de Marc, Jean, Luc dont on doutait de l’authenticité.
4. « comme on a coutume de les lire dans l’Église catholique» ? On fait mention en
premier lieu, de l’usage pluriséculaire du canon biblique dans l’Église, comme le met
en évidence l’histoire même de la formation du canon. La lecture des livres est,
avant tout, la lecture liturgique, mais aussi la lecture théologique et la lecture
spirituelle. Au Concile de Trente on donne un caractère officiel à la Vulgate, mais ce
ne fut pas dans l’intention des Pères d’éliminer n’importe quelle autre traduction ou
le recours à l’original hébreu ou grec.
5. En définissant le caractère sacré et canonique de tous les livres contenus dans la
Bible, le concile désire affirmer, d’une certaine façon, que tous les livres jouissent de
la même valeur et de la même autorité. Si le Christ est la plénitude de la révélation,
les livres où on nous parle de la vie, de la doctrine et de la personne du Christ
occuperont la première place dans une hiérarchie d’autorité. Ensuite, viendront ceux
qui, d’une manière ou d’une autre, ont une relation directe avec le Christ (le reste
des livres du NT). Le troisième rang dans la hiérarchie est occupé par les livres de l’AT
qui enseignèrent et annoncèrent le Christ.
IV. LES CRITÈRES DE LA CANONICITÉ
La formation du canon a montré que la fixation et la reconnaissance définitives de
celui-ci de la part de l’Église, n’a pas été une tâche facile et simple. Cependant, une
chose est la formation, une autre la réalité du canon. Chaque livre sacré est
canonique dès l’instant même où il est définitivement fixé par écrit. L’ensemble de la
Bible jouit de canonicité lorsque le dernier livre qu’elle contient a été mis par écrit.
Le processus pour reconnaître la canonicité de ces livres a été lent, parfois un peu
complexe dans les facteurs qui sont intervenus, mais sûr parce qu’il a été guidé par
l’assistance de l’Esprit Saint. Le même Esprit qui a inspiré les Écritures a assisté
l’Église pour les reconnaître comme inspirées.
Entreprenons maintenant d’exposer les différents critères auxquels l’Église a eu
recours dans la formation du canon biblique, critères qui doivent être vus comme
instruments dont l’Église s’est servie, des uns parfois, des autres d’autres fois, pour
découvrir et fixer le mystère de la canonicité. Parmi eux, cependant, certains ont une
importance majeure : l’usage liturgique, l’orthodoxie (*) et l’origine mosaïque ou
apostolique. Puisque le canon est typiquement chrétien, voyons séparément les
critères appliqués par l’Église à l’AT et ensuite au NT.
1. Ancien Testament.
a) Premier critère : La Bible des septante (LXX). Il est indéniable que, lorsque le
christianisme s’est ouvert à la gentilité et à la culture hellénistique, l’Écriture juive
utilisée par les premiers chrétiens fut le texte grec des Septante (LXX). Pourtant,
dans la Bible des LXX sont inclus aussi bien les livres proto que les livres
deutérocanoniques de l’AT. L’usage officiel et public de la Bible grecque a guidé
l’Église dans le discernement du canon vétérotestamentaire.
b) Second critère : Usage dans le culte. Il semble que dans la liturgie de la synagogue
on lisait de façon cyclique, tous les trois ans, les livres de la Torah et des Prophètes.
Avec le temps la lecture s’étendit aussi aux Écrits. L’usage cultuel (*) d’un livre
signifie une reconnaissance au moins implicite de son caractère sacré. D’autre part,
l’Église primitive a utilisé la Bible juive dans le culte dominical lui-même. Même en
nous plaçant sur un terrain hypothétique, il faut supposer que les juifs de la diaspora
(*)utilisaient pour leur culte tous les livres inclus comme sacrés dans la Bible des LXX.
Cet usage a facilité, pour l’Église, le passage à la canonicité de tout l’AT.
c) Troisième critère : usage dans les écrits du NT. Il est vrai que tous les livres de l’AT
ne sont pas cités dans le NT, mais ce n’est pas parce qu’ils ne sont pas expressément
cités qu’on peut déduire qu’ils n’ont pas été utilisés et pris en compte dans la
rédaction néotestamentaire. Malgré tout, l’usage des livres de l’AT par les apôtres,
qui constituaient le canon vivant étant donné qu’ils transmettaient l’événement et le
mystère de Jésus-Christ, a dû compter aussi dans le discernement du canon
vétérotestamentaire.
2. Nouveau Testament.
a) Premier critère : Origine apostolique. Au début de la vie ecclésiale, les Écritures
chrétiennes n’existaient pas. L’Église n’avait comme référence que l’autorité absolue
de Jésus si transcendante qu’elle était considérée comme supérieure aux livres
sacrés. Les apôtres, considérés comme dépositaires de la révélation historique de
Jésus, étaient le canon vivant, les interprètes autorisés du message et de
l’événement salvateur de Jésus. Durant la seconde moitié du premier siècle, les
églises destinataires de quelques écrits apostoliques les conservèrent jalousement,
et les ont peu à peu diffusés et échangés avec des écrits apostoliques d’autres
églises. Peu à peu le canon vivant est devenu canon écrit.
Le fait que les écrits apostoliques n’aient pas été initialement cités comme écritures,
ne signifie pas qu’ils n’étaient pas considérés comme ayant la même autorité. Encore
mieux, ils étaient acceptés comme ayant une autorité supérieure, puisqu’ils avaient
l’autorité de Jésus lui-même et des apôtres. Par conséquent, étant donné que les
apôtres, et eux seulement, avaient reçu la mission de transmettre de façon
authentique la révélation historique de Jésus, pour qu’un écrit puisse être tenu pour
authentique il fallait qu’il soit d’origine apostolique, c’est à dire, qu’il ait été écrit par
des apôtres ou par quelqu’un de leurs proches collaborateurs, peut-être même à la
demande de l’apôtre.
b) Second critère : L’usage liturgique. C’est un critère valable pour l’AT, donc aussi
pour le NT. Jésus étant le canon vivant par excellence du NT. Les premiers livres qui
ont sûrement commencé à être utilisés officiellement dans la liturgie chrétienne
furent les Évangiles, ou plutôt des textes pré-évangéliques, qui ont ensuite servi de
base aux Évangiles canoniques. Nous savons par 2Pi 3, 14-16, qu’un « corpus » (corps
ou ensemble) des épîtres pauliniennes était lu publiquement vers la fin du siècle. Il
fallait examiner alors si un livre déterminé avait été lu dans les assemblées
chrétiennes depuis les temps apostoliques où s’il y était entré seulement à des
époques récentes. On sait qu’on lisait aussi en public d’autres écrits comme la
Didaché (*), 1-2 Clément, Berger d’Hermas, Henoch, etc… qui n’ont jamais été
recueillis par le canon parce que l’on a tenu compte d’autres critères par exemple
l’orthodoxie ou l’origine apostolique.
c) Troisième critère : L’orthodoxie de l’écrit. Aucun livre ne pouvait être authentique
s’il contenait une interprétation du mystère de Jésus contraire à l’orthodoxie, qui
s’était formée avec la tradition vivante des apôtres. Des doutes sur le millénarisme
(*) ou non de l’Apocalypse ont fait hésiter un temps de sa canonicité. L’Évangile de
Pierre fut tenu pour apocryphe, justement pour raisons doctrinales. Eusèbe nous le
raconte dans son Histoire Ecclésiastique ; Sérapion, évêque d’Antioche, vers l’année
190 a visité Rhossos de Cilicie, où il a trouvé la communauté en désaccord sur la
lecture officielle d’un « Évangile de Pierre ». L’évêque a donné la permission de le
lire, sans l’avoir lu lui-même personnellement. Quand, plus tard à Antioche, il eut la
possibilité d’avoir ledit Évangile entre les mains, il se rendit compte, en le
confrontant avec les Évangiles apostoliques, qu’il était hérétique et l’a interdit.
d) Quatrième critère : Des listes anciennes du canon. La formation d’une liste
implique l’acceptation des livres énumérés comme livres d’un caractère particulier.
Si, avec la liste des livres du NT, il y a une liste de ceux de l’AT, cela implique
l’acceptation des livres néotestamentaires comme Écriture. Par ce critère les listes
les plus anciennes sont celles qui ont le plus de poids, par exemple, le canon bref de
Marcion ; le canon Muratorien : 22 livres sur les 27 (fin du II° siècle) ; la liste d’Irénée
et de Tertullien avec 22 livres également. Dans la lettre écrite par Athanase pour la
Pâque de l’an 367, on énumère déjà, sans hésitation, tous les livres du NT. Ce
catalogue, dix-huit ans plus tard, en l’an 385, sera accepté par Jérôme et il le
répandra lui-même en Occident grâce à sa traduction officielle latine (la Vulgate).
Une fois les critères présentés, il est clair qu’aucun d’eux isolément n’a suffi à l’Église
pour déterminer la canonicité éprouvée d’un écrit. Il a fallut la conjonction de
quelques-uns d’entre eux ou de tous pour donner à l’Église la certitude, sous
l’assistance et la conduite de l’Esprit Saint, d’être en présence d’un livre sacré et, par
conséquent, de devoir le reconnaître comme tel.
Chapitre 5
La vérité biblique
L’Écriture contient la vérité salvatrice parce qu’elle est inspirée par l’Esprit Saint. La
canonicité ne produit pas la vérité, mais la certitude de ce que toute la vérité dont
l’homme a besoin pour être sauvé se trouve dans les livres canoniques, et de ce que,
par là, ces livres sont exempts de toute erreur relative au salut et au dessein sauveur
de Dieu.
I. Introduction.
II. Établissement historique de l’infaillibilité et solutions.
III. Principes fondateurs de la vérité biblique.
APERÇUS.
- Pourquoi dit-on que la Bible contient la vérité s’il est évident qu’il y a des
affirmations qui ne correspondent pas à ce que dit la science ? Le « cas Galilée » est
connu de tous.
- Que faut-il rechercher dans la lecture de la Bible ? Pour une réponse satisfaisante à
cette question quelques critères importants sont à connaître
MOTS CLEFS :
Vérité salvatrice Infaillibilité
I. INTRODUCTION
L’Église a le droit et le devoir de défendre la vérité de la Bible et elle n’a pas cessé de
le faire durant son histoire pluriséculaire. Il est évident qu’en attaquant l’erreur, on
défend implicitement la vérité qu’il faut proclamer, exposer et protéger.
L’Histoire des siècles derniers nous a démontré, d’autre part, qu’on doit chercher un
équilibre entre les deux extrêmes : entre la négation inadmissible de l’infaillibilité et
la crédulité fondamentaliste (*) qui fait rire les non chrétiens.
Il y a deux raisons principales pour lesquelles l’exégèse actuelle, ratifiée par le
Concile Vatican II (DV, 11), préfère le terme « vérité salvatrice » à infaillibilité.
Vérité salvatrice (ou biblique) : c’est le principe par lequel on affirme que Dieu a fait
connaître tout ce dont l’homme a besoin de savoir pour vivre et être sauvé
.
1. Raison théologique :
Dieu ne s’est pas révélé et n’a pas inspiré les livres sacrés pour qu’ils ne contiennent
pas d’erreur, mais pour manifester la vérité concernant le salut de l’homme. Étant,
par son origine même, communication de la vérité divine, elle est exempte de tout
ce qui contient fausseté et erreur quant au dessein sauveur de Dieu.
2. Raison historique :
Dans l’histoire le terme « infaillibilité » est resté uni, durant trois siècles, à des
événements et des situations historiques pénibles pour la vie de l’Église (cas Galilée,
la question biblique relative à la vérité historique de la Bible et surtout des Évangiles)
et avec une position presque uniquement apologétique (*) et défensive. Avec le
Concile Vatican II, la perspective historique a changé. L’Église s’intéresse davantage à
exposer la vérité de l’Évangile qu’à soutenir l’absence de l’erreur dans la Parole
divine.
Éclaircissons, enfin, dans cette introduction du sujet, le concept de vérité biblique et
d’infaillibilité :
Infaillibilité veut dire la qualité de la Bible, par laquelle la révélation de Dieu qui y est
contenue, est exempte de toute erreur
L’infaillibilité, par conséquent, ne regarde pas tant les données scientifiques et
historiques qu’offre la Sainte Écriture, que la révélation de Dieu qui nous est
transmise par elles et en elles.
II. EXPOSE HISTORIQUE DE L’INFAILLIBILITÉ ET SOLUTIONS
Que la Bible ne puisse se tromper ni induire en erreur fait partie de la tradition juive
et du dogme chrétien. Malgré tout, déjà dans le judaïsme, on était conscient des
discordances, au moins apparentes, entre les livres de l’AT. Les difficultés
augmentèrent avec le christianisme, face à la continuité entre l’AT et le NT.
Parcourons l’histoire de ce sujet depuis les commencements de l’ère chrétienne
jusqu’à notre temps.
1. Les quatre premiers siècles.
On pourrait résumer la position des hommes (juifs et païens) en face de l’Écriture
chrétienne, par les paroles de Paul, se référant au Christ crucifié, « scandale pour les
juifs, folie pour les païens » (1Co 1, 23)
a) Scandale pour les juifs : Pour les juifs, particulièrement les rabbins, le
christianisme n’était pas la vérité ultime et définitive, mais une doctrine erronée.
Jésus est vu comme un magicien et un faux messie. La prédication chrétienne sur la
nouvelle alliance, le nouveau culte, la parole définitive, était complètement erronée.
Devant une position si claire du judaïsme, Justin s’efforce de démontrer le
messianisme de Jésus et la nouveauté du christianisme à partir de l’AT, en partant
d’une interprétation exégétique (*) rigoureuse qui démontrerait la réalisation de
tous les oracles de l’AT en Jésus de Nazareth. Justin lui-même, face aux discordances
bibliques, expliquera qu’elles ne sont qu’apparentes ou que, si on trouve des
discordances, c’est simplement parce qu’on n’a pas bien compris le texte. Le
problème de l’infaillibilité ne se pose pas encore, mais uniquement celui de la
discordance entre divers textes bibliques.
b) Folie pour les païens : Le christianisme a dû se défendre vigoureusement contre
les attaques provenant du paganisme. Ceci entraîne un glissement du concept
sauveur de vérité vers la conception grecque. Ce fut un glissement inévitable parce
que, pour pouvoir discuter avec quelqu’un, il faut se mettre dans son propre camp.
Contre les attaques nombreuses et insidieuses de Celse et Porphyre, les apologistes
(*) eurent pour tactique de venir sur le champ de bataille et ils ont indubitablement
réussi à gagner la guerre. Malheureusement, la conséquence en a été que « la vérité
grecque » fut l’unique vérité dans la théologie postérieure et que l’étude de la Bible
ne soit faite que dans cette optique. Pour expliquer les discordances bibliques, cette
conception de la vérité a poussé nombre de Pères à recourir à l’interprétation
allégorique (*) de certaines péricopes (*), comme unique façon de maintenir la
vérité biblique qui, autrement, paraissait compromise. Dans une ambiance païenne,
le problème de l’infaillibilité ne se posait pas non plus ; face aux attaques, on ne dit
pas que la Bible est infaillible, mais on cherche à mettre en relief qu’elle
communique la vérité.
2. De saint Augustin jusqu’au XVIe siècle
Saint Augustin recueille tout l’héritage du passé sur le sujet. D’une part, face au
manichéisme, il souligne le caractère de salut du message chrétien. « (Le Seigneur)
voulait faire des chrétiens, non des scientifiques ». D’autre part, l’absence de
contradictions dans l’Écriture fut répétée avec force par saint Augustin : « Si, dans
ces écrits, je trouve quelque chose qui ait l’apparence d’être contraire à la vérité,
sans le moindre doute je pense ou bien que le manuscrit ancien est défectueux, ou
bien que le traducteur n’a pas été capable d’exprimer fidèlement la pensée ou
encore que je n’ai rien compris ». Il est significatif que Léon XIII, tout comme la
constitution Dei Verbum, aient trouvé dans saint Augustin les principes théologiques
pour formuler la théorie de la vérité salvatrice.
Pendant le régime de la chrétienté (du Ve au XVIIe siècle), la Bible a été considérée
comme le livre par excellence de toutes les vérités : historiques, philosophiques,
scientifiques et religieuses. Pour saint Thomas, la vérité de l’Écriture n’est pas une
question de fait, mais de droit, puisqu’elle dérive de la connaissance prophétique
dont les auteurs sacrés ont joui. En même temps, il a affirmé que cette vérité doit
faire l’objet d’un examen critique. Par exemple, pour résoudre les difficultés du
premier chapitre de la Genèse il enseigne :
a) Qu’il faut maintenir fermement la vérité de l’Écriture.
b) Quand l’Écriture permet diverses interprétations, il faut écarter celles que la
raison démontre être inexactes.
Le temps passant, la vérité biblique s’affirme comme vérité logique ; et ainsi
l’Écriture devient un livre de propositions, dans lequel chacune jouit de la même
rigueur, qu’il s’agisse de sciences naturelles, d’histoire, de religion ou de philosophie.
En science théologique, on a souligné la vérité absolue de la Bible comme attribut
premier de la Parole de Dieu, étant donné que toute la force démonstrative de la
théologie comme science, procédait de la vérité certaine des principes premiers, qui
étaient les affirmations bibliques. Ainsi on en est arrivé à une exclusion sans nuance
de l’erreur dans l’écriture. Non seulement on soutient l’infaillibilité de la Bible, mais
aussi le caractère absolu d’une telle infaillibilité. Par exemple, Jos 10, 13 : « Et le
soleil s’arrêta et la lune s’immobilisa… » est considéré comme une proposition sur
laquelle se fonde le système géocentrique de l’univers.
3. L’époque des conflits avec les sciences.
Du XVIIe au XIXe siècles, le développement des sciences astronomiques,
paléontologiques et historiques a mis en doute une telle infaillibilité, créant entre les
hommes de science, les théologiens et le magistère ecclésiastique un grand nombre
de tensions.
a) Les sciences astronomiques : L’observation astronomique a découvert peu à peu,
des lois qui n’étaient pas en conformité avec les énoncés de la Bible. Tôt ou tard le
conflit devait éclater entre la position des théologiens et l’orientation de la science.
Le cas Galilée constitue la pointe de l’iceberg de ce conflit avec sa théorie du
déplacement de la terre autour du soleil. La mentalité scolastique, formée à base de
lecture logique des textes bibliques, n’était pas en mesure d’effectuer la conversion
mentale qu’exigeait le problème suscité par Galilée. On ne doit pas oublier, malgré
tout, que Galilée n’a pas été condamné parce qu’il exposait sa théorie (on lui a
permis de continuer à la soutenir en privé), mais parce qu’il n’avait pas obéi au
mandement de l’Inquisition Romaine de ne pas l’exposer ni la défendre
publiquement en parole ou en écrit.
b) Les sciences paléontologiques : Au XIXe siècle, le darwinisme, ou théorie de
l’évolution des espèces, augmenta de nouveau la tension entre science et foi, entre
vérité biblique et vérité scientifique. Le polygénisme, dérivé de la théorie de
l’évolution, ne paraissait pas être en conformité avec les données bibliques sur
l’apparition de l’homme sur la terre, selon la Genèse. A la théorie évolutionniste
s’est opposé le concordisme. Ainsi, par exemple, les jours de la création de Gn 1
correspondaient avec les périodes géologiques de la science évolutionniste. Un tel
concordisme s’avéra un échec du point de vue de la science aussi bien que de celui
de l’exégèse.
c) Les sciences historiques : L’affrontement avec les sciences historiques aggrave la
situation. D’un côté, les progrès de l’archéologie et de l’étude des langues orientales
et des littératures extra bibliques permirent une meilleure connaissance de l’Orient
ancien et de son histoire et, en même temps, la réfutation de la valeur de la Bible en
tant que source d’information historique. D’un autre côté, la révélation chrétienne
tant de l’AT que du NT étant éminemment historique, le problème devint plus aigu
parce que la vérité biblique est inséparable de l’histoire, bien qu’il faille éviter de les
identifier.
4) Propositions de solution de l’exégèse catholique.
Devant les problèmes posés par les sciences exactes et historiques à l’infaillibilité
biblique, qu’ont fait les théologiens et le magistère de l’Église ?
a) La première série de réponses des théologiens se concentra sur le maintien de
l’infaillibilité mais en limitant son extension. Par exemple, en la rapportant aux
questions doctrinales de dogme et de morale. (A. Rokling, J.H. Newman, M. D’Hust.).
L’encyclique Providentissimus Deus de Léon XIII (décembre 1893), a répondu à ces
essais imparfaits de solution. Elle affirme : « Il serait absolument funeste de
restreindre l’inspiration uniquement à certaines parties de la Sainte Écriture ou de
considérer que l’auteur sacré s’est trompé. On ne peut, en effet, admettre la
conception de ceux qui se débarrassent de ces difficultés sans hésiter à dire que
l’inspiration divine s’étend uniquement aux questions de foi et de mœurs» (EB 124)
b) Un autre type de réponses se centre principalement sur l’intention des auteurs
sacrés et la mentalité de leur temps. Par exemple, quand les auteurs sacrés citent
des textes d’autres auteurs, ils ne se portent pas garants de leur véracité (F. Prot) ou
quand ils racontent des événements ou des expériences, ils le font à partir de la
réalité phénoménologique (des faits), non intrinsèque (MJ. Lagrange) ou la théorie
des genres littéraires (MJ. Lagrange).
.
Aucune de ces explications n’a paru satisfaisante au Magistère de l’Église. Il n’y a que
celle des genres littéraires, d’abord refusée (EB 161), qui ait été reconnue comme
bonne solution par Pie XII en 1943 (EB 558). La constitution Dei Verbum, enfin, a
réalisé le plus grand changement de perspective qui se soit présenté depuis la
patristique. Elle a dépassé le concept de vérité scientifique et logique appliqué à
l’Écriture et a placé la vérité biblique dans le domaine de l’efficacité salvatrice de la
Parole.
III. PRINCIPES FONDATEURS DE LA VÉRITÉ BIBLIQUE.
Au moment culminant de l’histoire humaine et du drame de la rédemption, un
homme puissant (Pilate) demande, entre l’inquiétude, le scepticisme et l’ironie :
Qu’est-ce que la vérité ? Mais il n’a pas attendu la réponse. Et cette question est
restée comme symbole et figure de l’homme historique qui, au long des générations,
s’affronte lui-même en même temps qu’à la Parole de Dieu vivant dans le Christ
Jésus (cfJn 19, 37-38). Pour nous chrétiens il existe par dessus tout : LA VÉRITÉ.
En passant d’un concept à une personne, la vérité s’unifie et se simplifie, et
cependant elle ne perd ni sa multiplicité ni son universalité, car cette personne est le
Verbe de Dieu, et c’est le Sauveur du monde.
La conception biblique de la vérité est personnelle. Elle est, dira saint Paul : « La
Parole de vérité, l’Évangile de votre salut » (Ep 1, 13). Saint Jean, à son tour, affirme
que « la grâce et la vérité sont venues par Jésus-Christ » (Jn 1, 17). Et Jésus lui-même
confessera à ses disciples : « Je suis le chemin, la vérité et la Vie » (Jn 14, 6). Par sa
mort et sa résurrection Jésus prononce la Parole définitive de la vérité, le salut par la
croix.
Toute science et concept primordial de celle-ci procèdent de principes fondateurs
(principes premiers) à partir desquels se construisent les concepts et la science elle-
même. Quels sont les principes fondateurs de la vérité biblique ? P. Grelot les
résume à trois, un de caractère théologique, l’autre littéraire et le troisième,
historique. Ils seront l’objet de notre exposé.
1. Premier principe : L’objet formel de la vérité biblique est le salut de l’homme. Tout
autre contenu n’est considéré que dans sa relation, plus ou moins grande, avec le
salut. Dans la Bible, soit qu’il s’agisse d’un événement historique, d’une donnée
scientifique ou d’un objet astronomique, on en parle dans la mesure où on y
découvre Dieu, quelque chose qui parle de Dieu. Par exemple, l’attention de l’auteur
sacré s’oriente non tant vers le fait historique de l’Exode, qu’à l’amour et à la
puissance que Dieu a manifestés dans cette victoire d’Israël sur les Égyptiens. Le
détail des chiffres, les noms propres de lieu ou de rois ne l’intéressent pas par eux-
mêmes. L’auteur sacré n’est pas un historien, et il ne veut pas faire œuvre
d’historien dans le sens du positivisme (*) moderne. L’inspiration a été accordée à
l’auteur humain en vue d’un message déterminé qu’il a à communiquer, d’une
révélation pour le salut de l’homme.
Que penser alors de la relation entre Bible et philosophie, ou sciences naturelles, ou
histoire ?
a) Il est certain que la Bible ne cherche absolument pas à donner une explication
rationnelle des choses, mais certaines réalités et valeurs y sont affirmées, même si
elles ne tombent pas sous le sens et, malgré tout, elles illuminent d’une lumière
particulière la nature profonde de l’expérience humaine : par exemple, le concept de
Dieu comme absolu personnel, ou la relation de Dieu et du monde en termes de
création. Ces concepts expriment la vérité biblique, non pas en tant que concepts
philosophiques, mais plutôt en tant qu’ils concernent le salut de l’homme.
b) Pour les sciences, la conception physique du monde rapportée par les auteurs
sacrés nous paraît totalement confuse, plus encore que la physique aristotélicienne
elle-même. Cependant, les sciences (astronomie, paléontologie (*), biologie, etc…)
sont en relation avec les mystères. Il est nécessaire, par conséquent, de distinguer
pour ne pas créer d’équivoque. La vérité biblique concerne le mystère de la création
mais Dieu et les auteurs inspirés laissent entière, et loin de leur intention, la question
du mode de la création, des parties laissées aux causes secondes dans la production
des effets dus à l’acte divin créateur, des étapes à travers lesquelles s’est déroulée
l’histoire de la création, etc…
c) Avec l’histoire on exige une plus grande précision. Nous devons réprouver une
conception positiviste de l’histoire, guidée par le principe : « Histoire vraie égale
histoire exacte. » En réalité l’exactitude des détails, dans la connaissance historique,
est subordonnée à la valeur particulière de cette expérience vivante dans laquelle ils
s’intègrent, et qui constitue, avec les conséquences du fait, la vérité objective de
l’histoire. Comme, en plus, l’objet de l’histoire est l’homme, l’étude historique
réclame une bonne dose d’intuition psychologique et une sympathie compréhensive
envers les hommes du passé, dont il faut revivre l’expérience par la pensée pour
pouvoir la communiquer aux hommes de notre temps.
Grâce à ce qui précède, nous devons reconnaître que le dogme chrétien est
essentiellement historique et qu’il est ancré dans l’histoire : il est donc impossible
d’exclure l’histoire de la vérité biblique. Le point déterminant sera de discerner de
quelle façon l’histoire y prend part.
(1) L’écriture considère l’histoire humaine exclusivement du point de vue des
relations entre les hommes et Dieu. Les événements de la vie d’Israël et de l’Église
primitive manifestent les actions de Dieu dans le temps. L’histoire humaine intéresse
en tant qu’histoire sainte et, en tant que telle, elle est objet de la vérité biblique.
(2) Les auteurs sacrés jugent intentionnellement toute chose en fonction du dessein
divin du salut qu’ils essaient d’évoquer. En réalité ils donnent peu de poids à la
matérialité des faits et soulignent surtout leur relation avec le mystère du salut et
avec ce qu’il signifie.
(3) Les jugements de valeur, au moins implicites, que les auteurs sacrés donnent sur
les événements racontés, ne se réfèrent pas directement aux détails et, par
conséquent, ceux-ci doivent être considérés dans l’ensemble de l’événement ou de
l'expérience rapportés.
(4) Il est nécessaire d’avoir présent à l’esprit que la réflexion sur le sens de l’histoire
suppose toujours la réalité des faits. Sans cette réalité historique on trahirait la
nature de la vérité hébraïque et chrétienne.
2. Second principe : Pour accéder à la vérité biblique, la connaissance et le bon usage
des genres littéraires sont indispensables. La vérité, communiquée par écrit,
s’exprime et se manifeste par l’intermédiaire de genres et formes littéraires. Il est
indispensable, pour capter la vérité biblique, de bien préciser le genre ou la forme
littéraire d’un texte précis car chaque genre ou chaque forme à une qualité
particulière de vérité. Le récit épique présente la vérité sous une forme différente de
celle d’un texte lyrique, et celui-ci le fait sur un mode différent d’un écrit didactique.
La vérité resplendit d’une lumière différente dans une parabole ou dans le récit d’un
miracle.
En parlant de l’herméneutique biblique (*), nous décrirons, même brièvement, les
genres et les unités littéraires de la Bible.
3. Troisième principe : La vérité biblique progresse au cours de l’histoire et arrive à
son apogée et à sa plénitude en Jésus-Christ, chemin, vérité et vie. La vérité de
l’Écriture n’est pas une vérité d’oracle, qui arrive entière et complète à l’homme
inspiré en un moment de transe extatique, ni non plus l’œuvre d’un instant précis où
Dieu infuse d’un seul coup sa vérité chez l’auteur sacré. Non, ces hommes méditent,
à la lumière de Dieu, les faits, les paroles, les événements rendus féconds et
illuminés par l’Esprit Saint et se servent d’une réflexion pluriséculaire. D’autre part,
dans la Bible, Dieu dévoile son dessein, sa doctrine, comme le fait un père quand il
dévoile les mystères de la vie à ses enfants. On peut constater, par-là, un progrès de
la vérité révélée depuis les premières générations jusqu’à la fin du NT. Et non
seulement dans le domaine scientifique, qui ne concerne pas directement le
message, mais aussi dans le domaine dogmatique et moral. Dieu pousse à écrire
certains, quelque mille ans avant le Christ, d’autres au commencement de l’ère
chrétienne, mille ans après. Chacun écrit un chapitre de l’unique et grand livre dont
Dieu, comme seul auteur, a tracé les grandes lignes de développement jusqu’à son
accomplissement final.
L’écriture est le livre de la pédagogie divine et c’est la raison pour laquelle
l’affirmation des vérités révélées s’intensifie à mesure que le temps passe. Dans l’AT,
cependant, on ne trouve pas une base suffisante pour la théologie chrétienne. Jésus
lui-même, dans sa vie terrestre, a voulu laisser dans l’ombre quelques points que
seule la résurrection pouvait éclairer pleinement et que les apôtres ont compris plus
tard, sous l’influence de l’Esprit Saint. Par exemple, le mystère du royaume dans sa
relation avec l’Église ; le mystère du Messie qui devait souffrir et ainsi entrer dans sa
gloire. Il ne s’agit pas de nouvelles vérités, mais de nouvelle lumière qui se projette
sur les vérités déjà acquises.
Il y a aussi un progrès dans la vérité morale. L’AT n’est pas un livre d’histoires
édifiantes, mais il montre au contraire les hommes tels qu’ils sont et non pas
seulement comme ils devraient être. Face aux personnages qui ont un rôle dans
l’histoire sainte, de l’AT ou du NT, on doit procéder avec discernement de l’esprit,
puisqu’ils représentent, selon les cas, la fidélité authentique ou la conduite qu’on
doit éviter. D’autre part, la révélation de la Loi de Perfection nous a été faite par le
Christ (cf Mt 5, 48) en même temps que nous était donné l’Esprit Saint, grâce auquel
la justice de la Loi peut se réaliser en nous (cfRm 8, 3-11). Avant un tel moment, les
commandements n’apparaissent jamais dans une situation parfaite, parce qu’ils
restent extérieurs à l’homme (cfRm 7, 1-13). Les garder dans son cœur (cfDt 6, 6) est
une grâce réservée aux temps de l’alliance nouvelle (cf Jr 31, 33). Certaines
prescriptions de la Loi mosaïque ont été données « à cause de la dureté de cœur »
(Mt19, 8) et Jésus devra les rectifier (cf Mt 5, 20-48), pour porter à leur achèvement
la Loi et les Prophètes (cf Mt 5, 17-19). La vérité de l’Écriture est cependant le fruit
de la totalité des textes sacrés.
Chapitre 6
L'interprétation biblique
La Parole de Dieu fixée et condensée dans un texte définitif il y a de nombreux
siècles, parce qu’elle est Parole de salut, est destinée à tous les hommes de tous les
temps et de toutes les nations. Comment raccourcir la distance entre les siècles
lointains où les textes ont été composés et nous ? Comment faire pour que la Parole
divine continue d’être vivante, actuelle et salvatrice ? C’est ici que s’inscrit
complètement la fonction de l’herméneutique. L’interprétation, ou herméneutique,
est impossible sans une méthodologie adaptée. C’est la raison pour laquelle nous
consacrerons un second paragraphe aux différentes méthodes d’interprétation. Le
dernier concept de l’étude est l’actualisation et l’inculturation (*) de la Bible.
I. Concept d’herméneutique.
II. Histoire de L’interprétation biblique.
III. Principes pour une interprétation catholique de la Bible.
IV. Conclusion.
APERÇUS
- N’importe qui peut-il interpréter la Bible avec l’assurance de l’assistance de l’Esprit
Saint ? Pourquoi ? Les protestants procèdent ainsi.
- Comment savoir si j’interprète correctement et tire un véritable profit spirituel du
texte biblique que je lis ? Sinon, je risque de prendre des décisions préjudiciables à
ma vie.
MOT CLEF
Herméneutique
I. CONCEPT D’HERMÉNEUTIQUE
Que signifie herméneutique ou interprétation biblique ?
Herméneutique : C’est une partie de la science biblique qui a pour objet d’établir
une médiation entre le texte ancien et l’homme contemporain, en recourant à
l’usage des méthodes les plus appropriées, dans le but de rendre le texte vivant et
actuel.
En partant de la définition, il est possible de trouver les éléments qui appartiennent
à la nature de toute herméneutique : le texte et à partir de là, la nécessité de
connaître les langues originelles et la culture ambiante dans laquelle il s’est formé,
avec le conventionnalisme et les formes littéraires, ou au moins de disposer d’une
bonne et fidèle traduction ; l’homme contemporain, avec ses préoccupations
spirituelles et ses questions existentielles, avec la distance des événements qui nous
sont racontés, les façons de s’exprimer à ces époques et un cœur en recherche
constante de tranquillité et de salut ; et, enfin, l’exégète qui, lançant un pont entre
les deux, s’efforce de rendre le texte plus proche de l’homme d’aujourd’hui.
On peut dire que nous ne comprenons vraiment le texte que lorsqu’un événement
déterminé ou le contenu d’un texte, étudié selon une méthodologie exégétique
correcte, retrouve sa signification pour l’homme d’aujourd’hui et l’histoire
contemporaine et, en tant que tel, redonne, ici et maintenant, son message
universel au sein des événements et des mots.
II. HISTOIRE DE L’INTERPRÉTATION BIBLIQUE.
On ne peut passer sous silence le cours de l’histoire de l’herméneutique biblique,
puisque nous y trouvons non seulement la richesse d’interprétation du passé, mais
aussi des critères et des méthodes d’interprétation qui restent de grande valeur dans
l’actualité.
1. L’herméneutique interne à la Bible
L’herméneutique de textes ou de traditions est une exigence de la culture d’un
peuple et de la vie même, spécialement quand de tels textes et traditions doivent
s’adapter aux nouvelles circonstances des modes de vie humaine. Il n’est donc pas
étrange de trouver, à l’intérieur de l’Écriture elle-même, des interprétations
d’anciennes traditions et de textes sacrés écrits avec une antériorité de plusieurs
siècles. Il convient de distinguer trois cas possibles, l’AT est réinterprété par lui-
même ; le NT interprète l’AT ; le NT s’interprète lui-même.
a) L’AT s’interprète lui-même
Les prophètes et les sages d’Israël n’ont pas cessé, dans la succession des siècles, de
réfléchir, d’interpréter et d’actualiser leur histoire passée et les Écritures dans
lesquelles ladite histoire a été recueillie. L’incitation à cette réflexion d’interprétation
et d’actualisation provenait des nouvelles interventions divines dans l’histoire du
salut et des nouvelles exigences et des nouveaux problèmes de la communauté
israélite. Le temps passant, ces interprétations sont accueillies par Israël comme
faisant partie de ses livres sacrés, puisqu’ils proviennent d’une intervention de
l’Esprit de Dieu et sont guidés par lui. Le livre de Sirac représente très bien cette
interprétation interne à la Bible ; Si 3 est un commentaire sur le quatrième
commandement ; Si 15 commente Gn3 et en Si 44-50 on réinterprète toute l’histoire
d’Israël.
b) Le NT interprète l’AT.
Le véritable exégète de l’histoire du salut est Jésus de Nazareth (cfJn 1, 18). Lui, par
sa personne, sa vie, son activité, son enseignement, inaugure une nouvelle
interprétation de l’AT et du plan de Dieu sur la vie et les événements humains.
L’évangéliste Luc nous le présente tandis qu’il interprète dans toutes les Écritures ce
qui le concernait, en commençant par Moïse et tous les prophètes (cfLc 24, 27). Pour
l’Église apostolique le principe herméneutique fondamental et prédominant est
l’événement Jésus-Christ.
Comprendre les Écritures, pour les apôtres, ne signifie pas autre chose que d’y lire le
Christ, ouvrant ainsi leur esprit à l’authentique interprétation des Écritures.
Les paroles de Pierre dans son premier discours après la Pentecôte seront un
exemple suffisant : « Frères, il est permis de vous le dire en toute assurance : le
patriarche David est mort et a été enseveli et son tombeau est encore aujourd’hui
parmi nous. Mais comme il était prophète et savait que Dieu lui avait juré par
serment de faire asseoir sur son trône un descendant de son sang, il a vu d’avance et
annoncé la résurrection du Christ qui, en effet, n’a pas été abandonné à l’Hadès, et
dont la chair n’a pas vu la corruption. Dieu l’a ressuscité, ce Jésus : nous en sommes
tous témoins. » (Ac 2, 29-32).
c) Le NT interprète de lui-même.
L’événement central du NT est Jésus-Christ en personne ou présent au milieu de la
communauté chrétienne. La première interprétation canonique de l’événement
Jésus nous est offerte par Marc à la fin des années soixante. Marc a écrit le premier
Évangile, cependant l’Église nous en a conservé quatre comme canoniques. Les trois
autres postérieurs, d’une certaine manière et en partie, réinterprètent Marc. Ceci
manifeste clairement que les paroles et les actes de Jésus ont été l’objet d’un vaste
dynamisme d’interprétation à l’intérieur des communautés chrétiennes dans
lesquelles sont nés les Évangiles et tout le NT.
2. L’époque patristique.
Pendant les deux premiers siècles, la défense du principe théologique chrétien
prédomine (le Christ est l’interprète décisif de l’Écriture) pour défendre d’un côté la
continuité entre AT et NT contre les marcionites et les gnostiques et, de l’autre, le
sens chrétien de l’AT, contre les juifs, incapables de comprendre le sens profond de
l’Écriture.
A Alexandrie, au début du IIIe siècle, surgit une école théologique, orientée vers
l’interprétation de l’Écriture, influencée par l’exégèse allégorique de Filon
d’Alexandrie. On part de deux présupposés théologiques :
a) Il n’y a rien de superflu dans l’Écriture, même si parfois le sens d’une parole ou un
texte peut être caché. De là apparaît la nécessité d’interpréter la Bible à un double
niveau : celui du sens apparent et celui de sa signification cachée.
b) La parole divine est inépuisablement féconde, de telle sorte que l’être humain ne
peut en épuiser la signification. Origène est le représentant le plus remarquable de
cette école. En partant de Co 2 et Ga 4, 21-34, il systématise sa théorie dans les
termes suivants :
(1) L’écriture admet un sens «selon la chair », qui serait le sens littéral
(2) Elle peut aussi se comprendre «selon l’âme » ce qui nous donne le sens moral.
(3) Enfin elle peut se comprendre «selon l’esprit », qui nous donne accès au sens
spirituel ou mystique.
Le sens littéral est toujours préparatoire tandis que le sens spirituel correspond au
sens authentique de l’Écriture et on y accède grâce à l’interprétation allégorique.
Avec la paix de Constantin (IVe siècle) la situation de l’Église dans la société change
et surgissent de nouveaux projets culturels qui touchent aussi l’herméneutique
biblique. Devant le texte biblique naît l’intérêt de connaître la culture, l’histoire, la
géographie et d’autres aspects semblables de l’antiquité. Cette orientation
favorisera une interprétation plus littérale de l’Écriture sans que jamais ne
disparaisse l’exégèse allégorique. Cette forme d’interprétation sera plus évidente
pour ce que l’on appelle l’École d’Antioche. Là, prédomine l’exégèse littérale, mais
on ne déprécie absolument pas l’interprétation allégorique. Elle a probablement été
fondée par Diodore de Tarse, à la fin du IVe siècle et a trouvé son plus illustre
représentant en Théodore de Mopsuète.
En Occident, le traité «De la Doctrine chrétienne », de saint Augustin, peut être
considéré comme une véritable herméneutique biblique. Il y conseille l’étude des
langues bibliques et insiste sur les dispositions spirituelles de l’interprète. Pour
Augustin, pourvu que la charité soit mise en valeur, n’importe quelle interprétation
du texte est acceptable ; il en arrive même à accepter plusieurs interprétations
différentes et à le considérer comme voulu par la divine providence qui a permis une
telle fécondité du texte sacré.
3. L’exégèse médiévale.
L’exégèse médiévale prolonge la réflexion de l’ère patristique, mais dans une
nouvelle situation de la théologie et de la méthode cette dernière qui ira, aux XIIe et
XIIIe siècles, jusqu’à la séparation entre théologie et Bible.
La méthode d’interprétation la plus caractéristique du Moyen Âge est celle du
quadruple sens de l’écriture. Dans l’ensemble de l’Écriture l’interprète doit avant
tout prêter attention à l’histoire, c’est à dire aux merveilleuses interventions
salvatrices de Dieu (littera). Mais dans toute cette histoire est caché un mystère, le
mystère du Christ. La découverte de ce mystère est recherchée dans trois directions :
a) La référence au Christ et à l’Église dans l’AT. Par rapport au NT, et dans ce dernier,
par rapport à l’Église. (allégorie) ;
b) Les règles morales que nous offre l’Écriture pour régler notre vie sur celle du
Christ selon les critères divins (moralis) ;
c) L’ouverture de l’esprit et du cœur aux fins dernières, objet de notre espérance
chrétienne (anagogie = ce qui nous conduit à la vie éternelle).
Pour atteindre la perception des quatre sens, l’étude minutieuse de l’Écriture est
recommandée, en la lisant plusieurs fois et en l’apprenant par cœur. Ces quatre sens
ont été recueillis dans un fameux vers latin, dont la traduction serait la suivante :
La lettre enseigne les faits, ce que tu dois croire l’allégorie (*) ;
la morale ce que tu dois faire, vers quoi tu tends, l’anagogie.
4. La période moderne jusqu’à Providentissimus Deus (1893)
Avec le XVIe siècle, l’exégèse et l’herméneutique bibliques entrent dans une
nouvelle phase. Quels en sont les facteurs déterminants ? Parmi les plus influents, il
faudra compter :
a) L’humanisme avec son retour aux sources classiques, sa nouvelle méthode
philologique (*) et son net anthropocentrisme (*) ou découverte de l’homme et de
sa vie intérieure.
b) La division interne de l’Église à cause de la réforme (*) protestante qui se
répercute de façon notable sur la façon d’interpréter l’Écriture (les protestants se
fonderont sur le principe de «l’Écriture seule ») et développera chez les exégètes
catholiques une attitude hautement apologétique (l’Église catholique basera son
interprétation sur l’Écriture et sur la Tradition)
c) Les nouveaux mouvements philosophiques qui se succèdent du XVIIe au XIXe
siècles : le rationalisme (*) éclairé (on réduit l’importance de l’inspiration de
l’Écriture) et le positivisme historique (on ne tient plus compte de l’action de Dieu et
on recherche l’explication des faits par la comparaison avec d’autres faits de
l’histoire).
Après le Concile de Trente l’exégèse catholique s’est orientée vers le commentaire
biblique de caractère essentiellement théologique. Le climat qui régnait entre
catholiques et protestants était polémique et antagoniste, d’où l’orientation de
l’exégèse à la controverse et l’apologétique.
5. De Providentissimus Deus à Dei Verbum.
Au cours de ces décennies, il convient de parler séparément de l’exégèse
protestante et de l’exégèse catholique.
a) Exégèse protestante.
Dans l’exégèse protestante, il convient de mettre en relief les critiques de la
théologie libérale : la critique historico-littéraire se trouve embourbée dans la
théorie des quatre documents du Pentateuque et des deux sources de l’Évangile,
surgissent alors les premiers doutes sur l’entière objectivité historique. Ne serait-il
pas nécessaire de recommencer à redécouvrir la composante religieuse de
l’interprétation biblique ? C’est ce qu’essaiera de faire dans les premières décennies
du XXe siècle, l’école de l’histoire des religions.
Dans le domaine critico-littéraire apparaissent de nouveaux courants qui vont
revitaliser l’exégèse critique : l’histoire des formes appliquées à l’AT d’abord, puis au
NT ; face au scepticisme historique qui préconisait la fragmentation du texte
biblique, on prête attention à la transmission et à la conservation des traditions. Au
milieu du XXe siècle naît l’histoire de la rédaction, qui restituait aux livres bibliques
leur caractère d’œuvre littéraire et l’unité de conception et de théologie.
Face aux exagérations et aux abus de la science historico-critique des exégètes de
grande envergure, comme K. Barth, réagissent. Pour lui, l’exégèse critique est un
stade préliminaire de la véritable exégèse, qui est l’exégèse théologique. O.
Cullmann réagit également, avec sa conception de l’histoire du salut comme clef de
compréhension du NT.
b) L’exégèse catholique.
Dans l’encyclique Providentissimus Deus (1893) nous trouvons rassemblés les
critères herméneutiques de l’exégèse catholique. Les critères théologiques
rassemblés par l’encyclique sont :
(1) Il faut interpréter la Bible avec la lumière et la grâce de l’Esprit Saint lui-même qui
l’a inspirée.
(2) La conformité de l’exégèse avec l’interprétation que l’Église a faite et fait de
l’Écriture.
(3) Que l’exégèse ne se trouve pas en contradiction avec le consensus unanime des
Pères de l’Église.
(4) Qu’elle tienne compte de l’analogie de la foi.
De plus, elle admet quelques critères historico-critiques : 1) Elle recommande l’étude
des langues orientales et de la science critique textuelles ou littéraire. 2) Elle admet,
bien qu’encore timidement, la critique historique.
Malheureusement pour l’exégèse le modernisme, à ce moment-là, était déjà en
incubation et la crise moderniste a, d’une part, obligé le magistère de Pie X à une
lutte tenace pour défendre l’intégrité de la foi catholique et, d’autre part, maintenu
l’exégèse catholique dans une certaine léthargie pratiquement jusqu’en 1943, le
Pape Pie XII publia Divino AfflanteSpiritu. Grâce à elle, il ouvre le champ de
l’investigation biblique à l’exégèse catholique, principalement avec l’acceptation des
genres littéraires et la mise en valeur du rôle de l’exégète dans l’Église et la
théologie. Dans la Constitution Dei Verbum, publiée en 1964, est synthétiquement
rassemblée toute la réflexion et l’élaboration des théologiens et des exégètes sur
l’herméneutique biblique.
6. De Vatican II à l’actualité.
Dans les derniers 30 ans, un changement important s’est effectué parmi ceux qui
étudient l’exégèse : on est passé de l’histoire au texte, de l’événement à sa
signification. Ce pas a été fondamentalement franchi grâce à de nouvelles méthodes
de critiques littéraires et grâce à l’herméneutique. En partant de différentes
perspectives, on a critiqué la méthode historico-critique, la regardant comme
insuffisante et ayant des présupposés philosophiques erronés, tout en continuant à
l’utiliser comme quelque chose d’acquis et de nécessaire pour l’exégèse scientifique.
Un effort de synthèse est en train d’aboutir, grâce à quelques exégètes essayant de
faire ressortir le sens spirituel de l’Écriture, mais à partir de l’usage rigoureux de la
méthode scientifique. Le dernier document de la Commission Biblique Pontificale : «
L’interprétation de l’Écriture dans l’Église » (1993), est important et clair.
III PRINCIPES POUR UNE INTERPRÉTATION CATHOLIQUE
DE LA BIBLE.
1. Lecture dans l’Esprit.
Le Concile Vatican II nous donne la clef d’utilisation de ce principe : « La Sainte
Écriture doit être lue avec le même Esprit par lequel elle a été écrite ». La Bible a été
écrite sous l’inspiration de l’Esprit Saint. Lire et interpréter correctement la Bible
n’est pas autre chose que d’y dévoiler l’action de l’Esprit Saint. Comme l’Esprit Saint
agit par l’intermédiaire d’hommes, il est nécessaire de percevoir avec netteté
l’intention des auteurs sacrés pour arriver à dévoiler l’action de l’Esprit. Mais comme
l’Esprit n’est ni lié, ni soumis au texte et à l’auteur sacré, la lecture et l’interprétation
de l’Écriture exigent l’ouverture de l’esprit humain à un sens ultérieur et supérieur
non entrevu par l’auteur humain, et requiert une certaine « connaturalité » et une
certaine familiarité avec l’Esprit, par la foi et à l’ouverture intérieure.
Dans ce contexte, quelles sont les caractéristiques du « sens spirituel » de l’Écriture ?
a) Le sens spirituel exprime la nouveauté de la vie chrétienne : dans ce contexte,
l’ancien peuple d’Israël devient, pour l’Église, l’Israël selon l’esprit : la Torah devient
la loi spirituelle ou loi de charité ; le culte mosaïque se transforme en culte chrétien,
etc… La lecture spirituelle est une lecture chrétienne - centrée sur le Christ - de toute
l’Écriture.
b) La lecture spirituelle par sa nature même et parce qu’elle est centrée sur le Christ,
est une lecture intériorisée et signifie deux choses : (1) que le lecteur entre dans la
connaissance du texte qui se trouve à la base de la compréhension ; (2) que l’exégète
ou le lecteur maîtrise le sens d’un texte biblique, l’assimile et le transforme en vie
d’homme croyant. La conversion de l’homme est inséparable de la lecture spirituelle
de l’Écriture.
c) L’intelligence spirituelle de l’Écriture est intimement liée à l’intelligence d’être
chrétien. Aucune méthode scientifique ne peut entrer dans le sanctuaire du salut,
elle reste sur le seuil. L’intelligence spirituelle a droit de cité dans un tel sanctuaire,
elle permet d’approfondir de plus en plus l’inépuisable richesse de l’Écriture pour le
bien et le progrès spirituel des chrétiens.
d) L’intelligence spirituelle de l’Écriture a comme base et rampe de lancement le
sens littéral, non à la lettre, de l’Écriture, découvert par l’application des méthodes
scientifiques de l’interprétation. Et à l’inverse, les méthodes scientifiques
d’interprétation ne doivent pas en rester au sens littéral du texte, mais se laisser
pénétrer par la bonne odeur de l’Esprit qui l’anime.
2. L’intention de l’auteur.
Dans l’Écriture se fondent sans se confondre deux auteurs : l’auteur humain et
l’auteur divin. La Constitution Dei Verbum nous enseigne que l’interprète de
l’Écriture, pour comprendre ce que Dieu a voulu nous communiquer, doit étudier
avec attention ce que les auteurs voulaient dire et ce que Dieu voulait faire connaître
avec les dites paroles (n 12). Il y a donc, une relation entre le sens spirituel (ce que
Dieu a voulu nous communiquer) et l’intention de l’hagiographe. Pie XII, dans Divino
AfflanteSpiritu, nous dit que la norme suprême d’interprétation est celle qui fait
percevoir et définir ce que l’écrivain veut dire.
a) L’auteur humain.
Dans la Bible nous avons besoin de rechercher l’intention de l’auteur parce que Dieu
veut dire ce que veut dire l’auteur humain : « Tout ce qu’affirment les hagiographes,
c’est l’Esprit Saint qui l’affirme » (DV, 11, b). Comment le lecteur arrive-t-il à
connaître l’intention de l’auteur d’un texte sacré ? La constitution DV répond au n°
12 : « Pour découvrir l’intention de l’auteur, il faut entre autre, tenir compte des
genres littéraires. Car la vérité se présente et s’énonce de différemment dans des
œuvres de nature historique différente, dans des livres prophétiques ou d’autres
genres littéraires. L’interprète recherchera ce que dit l’auteur sacré ou ce qu’il essaie
de dire, selon son temps et sa culture, par l’intermédiaire des genres littéraires
propres à son époque. Pour comprendre exactement ce que l’auteur propose dans
ses écrits, il faut, au plus haut point, tenir compte du mode de pensée, d’expression,
de narration utilisé au temps de l’écrivain et aussi des expressions qui étaient alors le
plus en usage dans la conversation ordinaire ».
b) L’auteur divin.
Avec l’homme, Dieu est aussi l’auteur de la Sainte Écriture. Comment connaissons-
nous l’intention de Dieu ? Pie XII et le Concile Vatican II proposent un moyen clair :
par l’intermédiaire de la connaissance de l’intention de l’auteur humain. Mais nous
avons déjà vu que l’intelligence spirituelle d’un texte ne se réduit pas à l’intention de
l’auteur, même si elle la suppose et la fonde. Dieu parle par les hommes, de façon
humaine, mais aussi au-delà du sens manifeste des textes ou des intentions des
hagiographes. Ici intervient pleinement le sens typique de l’Ancien Testament et le «
sensusplenior », ce « supplément » de sens que l’on découvre dans les événements,
doctrines et expériences racontés dans l’AT et longuement médités et contemplés
par les Pères à la lumière de la pleine nouveauté apportée par Jésus-Christ. Par
exemple, Moïse est une figure du Christ, c’est à dire qu’il préfigure le Christ
prophète, législateur, sauveur, maître ; le Christ est non seulement un nouveau
Moïse, mais surtout il est la perfection accomplie et le couronnement du personnage
de Moïse. La « almah » d’Isaïe (7,14) dans son sens historique et littéral est une
jeune vierge en âge d’être mariée, une jeune fille ou demoiselle. L’auteur divin, dès
le début, a dépassé le simple sens historique et est allé plus loin, il a organisé les
choses de telle manière qu'au cours du temps on découvre ce "supplément" de sens
que contenait le texte (vierge avec l’intention de rester vierge la vie durant).
3. Le contenu et l’unité de toute la Bible.
La pluralité des auteurs, la nécessité de connaître leurs intentions pour accéder à
l’intention divine dans l’Écriture, l’arc pluriséculaire depuis le premier livre de l’AT
jusqu’au dernier du NT, établissent une tension par rapport au principe de l’unité de
toute la Bible. Cependant, cette unité de tendance se pressent déjà au point de vue
littéraire lui-même. Dans le Pentateuque les diverses traditions ont été recueillies
dans une œuvre unitaire commune. Les textes prophétiques en Isaïe appartiennent à
diverses époques et cependant ont reçu une telle unité qu’ils arrivent à constituer un
seul livre. L’exégète, en tant que scientifique, doit être apte à décomposer et
analyser séparément chacune des parties d’un livre ou d’un auteur mais, en tant que
scientifique croyant, il doit savoir aussi, ayant en main les résultats de ses études
scientifiques, recomposer les morceaux de l’écrit biblique et y redécouvrir, dans
toute sa beauté, la vérité du message.
Avec raison, par conséquent, la Constitution sur la Révélation Divine enseigne-t-elle
que : « pour découvrir le véritable sens du texte sacré, il faut tenir compte, avec le
plus grand soin, du contenu et de l’unité de toute l’Écriture » (DV, 12c). Quel est le
contenu de l’Écriture dans son entier ? Le message de salut porté à sa plénitude dans
le Christ et par le Christ. Quelle est l’unité de toute l’Écriture ? Certainement l’unité
de sujet : le salut en Jésus-Christ ; mais aussi l’unité de l’auteur : Dieu est l’auteur des
livres sacrés, et par conséquent la conception de la Bible est unitaire et organique,
en tant que provenant d’un même auteur. Le contenu en souligne le sujet, l’unité en
fixe particulièrement la conception organique et la réalisation progressive.
Par conséquent, la vérité d’un texte ou d’un livre n’a pas de caractère définitif, mais
plutôt un caractère d’ouverture et de complémentarité par rapport à l’ensemble des
livres canoniques. L’AT n’a pas pour nous, chrétiens, une signification absolue et
définitive en lui-même, même pas dans sa globalité ; ce n’est que dans le NT qu’il
reçoit son sens ultime et définitif, sa vérité ultime et définitive.
4. La Tradition vivante de toute l’Église.
Jusqu’à la Réforme le rôle de la Tradition vivante de l’Église dans l’interprétation de
l’Écriture n’a jamais été discuté, pas même par les hérétiques. Les circonstances
particulières de l’Église au temps de la Réforme peuvent, en réaction, expliquer mais
non justifier, l’abandon de la Tradition. L’interprétation de l’Écriture, comme nous
l’avons vu, requiert la découverte de l’Esprit qui habite en elle, mais requiert
également de découvrir le cadre de vie, le contexte vivant, dans lequel l’Écriture est
née, s’est conservée et a « grandi » au cours des siècles. Cette ambiance de vie c’est
l’Église entière, avec sa Tradition vivante.
La Constitution sur la Révélation Divine le montre clairement : on doit interpréter la
Bible en tenant compte de la Tradition Vivante de toute l’Église (cf DV, 12c).
Tradition veut dire d’abord la Tradition apostolique, dans laquelle et de laquelle sont
nés le Nouveau Testament et l’Écriture chrétienne. Tradition VIVANTE, c’est-à-dire,
progression dans l’Église avec l’assistance de l’Esprit Saint.
Toute l’Église constitue la Tradition vivante et, ainsi, toute l’Église contribue à
l’interprétation correcte de l’Écriture. Par conséquent, le concept « toute l’Église »
comprend les Pères, en tant qu’interprètes vivants et les plus proches des
événements du salut ; sont compris aussi les fidèles chrétiens, qui avec leur
sensibilité de croyants et leur vie guidée par la foi, constituent aussi la Tradition
vivante. Sont compris également, sans aucun doute les exégètes, consacrés par leur
profession, à l’intérieur de l’Église, à scruter les Écritures. Est compris enfin et
surtout le Magistère, qui jouit du charisme de l’interprétation « authentique », sous
la conduite de l’Esprit Saint lui-même qui a inspiré le texte sacré.
La Tradition a une fonction herméneutique de guide et de norme parce qu’elle nous
offre un panorama de compréhension. C’est comme le lit dans lequel coule la rivière
de la Parole de Dieu et de sa compréhension incessante. Elle nous guide dans la
conservation fidèle de la Parole divine, dans l’intelligence croissante de son
insondable richesse et dans l’application aux nombreuses et changeantes
circonstances de la vie.
5. L’analogie de la foi.
Dans l’interprétation correcte de l’Écriture, Dei Verbum (n 12) nous dit qu’on doit
tenir compte enfin de l’analogie de la foi. Quelle est la signification de l’analogie de
la foi en tant que norme herméneutique de l’Église catholique ? L’analogie de la foi
est la connexion cohérente de la foi objective de l’Église, le lien interne des mystères
entre eux, dont parle Vatican I (cf DS 3016). Cette foi objective et cohérente,
appliquée à l’herméneutique biblique, regarde comme fausses les interprétations
qui seraient contraires à la totalité de ladite foi (norme négative). Mais la foi
objective et organique est aussi encouragement et illumination pour continuer à
avancer dans la compréhension et la façon de vivre le mystère présent dans
l’Écriture Sainte (norme positive). Par conséquent, n’importe quelle vérité ou
expression de la révélation de la foi doit être vue à la lumière des autres et en
connexion avec elles, pour pouvoir être comprise correctement et rester ouverte à
une compréhension ultérieure et plus profonde.
VI. CONCLUSION
Tous ces principes herméneutiques mettent en évidence le souci et la préoccupation
ecclésiale pour que la Sainte Écriture soit Parole vivante du Dieu vivant dans
l’histoire, au sein de la communauté de foi. L’interprétation de la Bible ne peut être
soumise à l’arbitraire des hommes ou des exégètes, ni à un individualisme féroce. La
Bible appartient à toute l’Église, à tous ses membres et à toute son histoire et, par
conséquent, l’interprétation de celle-ci est également l’œuvre de toute l’Église. Dans
l’Église, comme dans le corps, il y a des membres différents, il y a des charismes
divers, parmi eux le Magistère a reçu le charisme d’interpréter avec authenticité
l’Écriture et de juger de la justesse et de l’orthodoxie de toute interprétation des
membres de la communauté ecclésiale.
Chapitre 7
Méthodes d'interprétation biblique
Interpréter un texte c’est le faire parvenir vivant et parlant à l’homme contemporain.
Quand il s’agit d’interpréter la Bible, l’Église qui en est dépositaire, nous donne
quelques critères ou principes théologiques qui devront conduire une interprétation
correcte. Outre ces principes théologiques, une méthode scientifique
d’interprétation est également requise. L’exégèse catholique par elle-même n’exclut
aucune méthode, mais celle qu’on adoptera devra être confrontée aux principes
théologiques pour voir s’il y a compatibilité entre eux. Dans le cas où cette
compatibilité n’existerait pas, pour appliquer la méthode l’exégète devra d’abord «la
modifier », en l’adaptant aux besoins d’une herméneutique catholique.
I. Introduction.
II. Méthode exégétique diachronique.
III. Méthode exégétique synchronique.
APERÇUS:
- Peut-on interpréter les textes sacrés en découvrant leur véritable sens ? Une
première lecture de la Bible nous montre que c’est un écrit difficile à comprendre et
dans beaucoup de cas étranger à notre mentalité actuelle.
- La science a-t-elle quelque chose à dire en ce qui concerne l’interprétation de la
Bible ? Étudiez ce chapitre et bien qu’il soit très technique, vous y trouverez une
réponse satisfaisante.
MOTS CLEFS :
Méthode diachronique. Méthode synchronique
I. INTRODUCTION
L’histoire de l’exégèse montre ouvertement la pluralité de méthodes utilisées selon
les époques historiques. Il est évident que dans le NT on utilise la méthode
rabbinique d’interprétation dans quelques textes évangéliques et pauliniens. Les
méthodes philosophiques et allégoriques, utilisées dans l’étude des textes profanes,
ont servi aux Pères pour l’exégèse Biblique. Et ainsi, d’époque en époque, jusqu’à
maintenant. Toutes les méthodes sont bonnes et utilisables pourvu qu’elles
respectent la lettre et l’esprit du texte scripturaire. Les unes seront plus
scientifiques, d’autres moins. Les unes s’appliqueront avec un plus grand respect à la
lettre du texte pour en approfondir l’esprit, d’autres feront plus attention à l’esprit
mais à partir du sens littéral et scientifique du texte. Chaque méthode apporte sa
contribution spécifique à la compréhension de l’Écriture et chacune permet une
réflexion de plus en plus grande de la foi des croyants. Aujourd’hui les méthodes
utilisées se divisent en diachroniques (celles qui étudient le texte sacré dans son
processus de formation) et synchroniques (celles qui étudient le texte sacré en tant
que tel.)
II. MÉTHODE EXÉGÉTIQUE DIACHRONIQUE.
Méthode diachronique : c’est celle qui analyse les textes sacrés dans leur processus
de formation
1. La critique textuelle.
La critique textuelle est la science qui essaie de reconstruire à partir des manuscrits
disponibles, le texte original de l’Écriture Sainte. Jusqu’à la découverte de
l’imprimerie, le texte biblique s’est transmis par des manuscrits. Les originaux se
sont perdus ou ont été détruits, et il nous est resté les copies du texte original ou des
traductions, certaines très anciennes. Les manuscrits que nous possédons
actuellement vont du IIe siècle ap JC au XVIe siècle. Les principaux sont constitués
par les papyrus du début du IIIe siècle et les grands codex du IVe siècle. De plus on
trouve quelques témoignages indirects dans les œuvres des Pères.
La critique textuelle est nécessaire pour corriger d’éventuelles transformations
accidentelles ou délibérées de la part des copistes. Par exemple :
- 1S 2, 2 : « Il n’y a pas de Saint comparable au Seigneur (il n’y en a pas d’autre en
dehors de toi), il n’y a pas de roc comme notre Dieu ». La phrase entre parenthèses
rompt le parallélisme poétique que forment les deux autres. Dans les LXX, cette
phrase est ajoutée à la fin du verset. Un commentateur a prétendu donner plus de
force aux affirmations sur l’unité de Yahvé.
- Mc 9, 29. La phrase «cette espèce ne peut être expulsée par aucun moyen, si ce
n’est par la prière », se trouve amplifiée dans la majorité des manuscrits avec
l’adjonction de «et le jeûne ». Il s’agit d’une addition qui révèle l’importance
accordée à la pratique du jeûne par l’Église primitive.
2. La critique littéraire.
a) les sources littéraires.
La critique littéraire analyse les textes bibliques pour détecter et reconstituer
d’éventuelles sources utilisées dans la formation de la Sainte Écriture, mettant en
évidence les insistances théologiques et la vie ambiante. Les buts de la critique
littéraire sont multiples : dans le cas des synoptiques (*), éclairer les relations
d’interdépendance entre les Évangiles et reconstituer les sources ; dans le quatrième
Évangile, mettre en évidence les étapes de la rédaction (nouvelle élaboration de
sources, strates, etc…) ; dans les épîtres pauliniennes, le caractère de compilation ou
non, de certaines épîtres ou la dépendance littéraire des épîtres les plus tardives (par
exemple Éphésiens et Colossiens) par rapport aux premières (par exemple Galates et
Romains).
Par exemple, dans le Pentateuque, se trouvent mélangées ou interposées, quatre
sources littéraires : la source yahviste, l’élohiste, la deutéronomiste et la sacerdotale.
Gn 1-2, 4a, appartient à la sacerdotale tandis que Gn 2, 4b-3, 25 est yahviste.
Dans le NT nous trouvons du matériel de triple tradition, par exemple la parabole du
semeur (Mc 4, 1-9 et ses parallèles) ; de double tradition, commune à Marc et à
Matthieu (Mc 7, 1-13 et Mt 15, 1-9) ou commune à Marc et à Matthieu (Mc 7, 1-13
et Mt 15, 1-9) ou commun à Marc et à Luc (Mc 9, 38-40 et Lc 9, 49-50) et la source
«Q» commune à Matthieu et à Luc (Mt 11, 25-27 et Lc 10, 21-22). Nous trouvons
même des sources propres à chaque évangéliste, par exemple Mc 4, 2-29 ; Mt 18,
23-33 et Lc 19, 41-44.
b). Les genres littéraires.
En plus de l’analyse des sources, la critique littéraire comprend l’analyse des genres
ou formes littéraires de chaque texte. Nous nous limiterons ici à une brève
présentation des genres littéraires les plus importants de l’AT comme du NT.
A. ANCIEN TESTAMENT.
1. Genre historique : narration, sous diverses formes littéraires, d’événements du
passé proche ou lointain, en tant qu’ils constituent le fondement et l’identité d’une
famille, d’une tribu, d’un peuple ou d’une nation. Ce genre se trouve dans le
Pentateuque, le livre de Josué, celui des Juges, les deux livres des Rois, les deux livres
des Chroniques, celui d’Esdras et de Néhémie et les deux livres des Maccabées.
2. Genre juridique : ensemble de matériel légal, de diverses nuances et sous
différentes formulations qui règlent les différents aspects de la vie d’une ville ou
d’une nation. On le trouve surtout dans le Pentateuque, en particulier dans l’Exode,
à partir du chapitre 20, et dans tout le Lévitique, mais des parties juridiques se
trouvent aussi dans d’autres livres historiques.
3. Genre prophétique : narration, souvent poétique, d’expériences de Dieu, sous
forme de révélations et de visions, par lesquelles Dieu manifeste sa domination sur
les hommes et les peuples en jugeant leurs actes et les invitant à la conversion et à
l’espérance. Par exemple, les différents livres prophétiques de l’AT.
4. Genre relatif à la Sagesse : textes poétiques par lesquels on nous transmet la
réflexion religieuse d’un individu ou d’un peuple au sujet des grandes questions de la
vie humaine et de son comportement existentiel : réflexion qui culmine dans la
prière ou la psalmodie. A ce genre appartiennent les Psaumes, Qohelet, Siracide,
Job, Le Cantique des Cantiques, le Livre de la Sagesse.
5. Genre didactique : créations littéraires, à résonances historiques, qui prétendent
édifier leurs lecteurs par leur enseignement, soit religieux soit moral. Appartiennent
au genre didactique Job, Ruth, Esther, Jonas, Tobie, Judith.
6. Genre apocalyptique : écrits qui, par l’intermédiaire de symboles et d’images
audacieuses et catastrophiques, s’adressent à des lecteurs en période de crise, pour
leur redonner force et consolation dans le présent et espérance dans le futur. Dans
l’AT on en trouve dans Daniel et Ezéchiel.
B. NOUVEAU TESTAMENT.
Parmi les écrits du NT on trouve les genres littéraires suivants : Évangiles, Actes des
Apôtres, Épîtres et Apocalypse. Les Épîtres et l’Apocalypse existaient déjà comme
genres littéraires et ont été adoptées par les écrivains du NT, par contre, les
Évangiles et les Actes des Apôtres sont des créations chrétiennes.
(1). Évangile : L’Évangile est une proclamation, basée sur la tradition apostolique et
en forme de narration historique, des paroles et des actes de Jésus de Nazareth, crus
et proclamés comme sauveurs pour tout homme en sa propre situation concrète.
(2). Actes des Apôtres : présentons les traits fondamentaux de ce genre :
1 - Une narration historico-théologique,
2 - ayant pour protagoniste l’Esprit Saint,
3 - qui guide la progression et la diffusion de la Parole Divine jusqu’aux confins de la
terre,
4 - par l’intermédiaire des apôtres et disciples de Jésus-Christ,
5 - en utilisant des traditions orales et écrites existantes dans les premières
communautés chrétiennes.
(3). Épîtres : en général, les Épîtres du NT suivent la formule hellénistique du genre :
1) Nom de l’expéditeur, du destinataire, formule de salutation.
2) Avant de rentrer dans le vif du sujet, on place une action de grâce à Dieu.
3) La lettre se termine par des salutations, ou plus fréquemment, des souhaits de
bénédiction de la main de celui qui représente celui qui signe à la place de
l’expéditeur de la lettre.
(4). Apocalypse : évolution du genre prophétique par son orientation de confiance
dans l’avenir, pénétré d’une vision de Sagesse, qui s’exprime par l’intermédiaire de
symbole audacieux qui parlent de catastrophes et d’événements ultimes, afin de
soutenir et de donner confiance aux croyants dans des périodes de crise et de
persécutions.
3. Critique des traditions.
L’étude des textes bibliques, surtout des Évangiles synoptiques permettent
d’affirmer qu’avant la fixation écrite de quelques textes, des récits sur Jésus, des
paroles de Jésus, des formules de foi, etc… étaient transmises oralement. La critique
des traditions essaie de détecter la préhistoire orale de tels textes. Elle cherche à
découvrir les modifications que les textes, originellement en circulation sous la
forme de péricopes isolées, ont subies au cours de la transmission orale ; de même,
elle prétend découvrir le groupe transmetteur responsable d’éventuelles nouvelles
élaborations déjà au stade de la tradition orale. Ce même processus s’applique aussi
aux traditions orales et écrites de l’AT.
Il est évident, par exemple, que la multiplication des pains a du être initialement un
récit très simple : Jésus, dans le désert a nourri une grande foule, avec quelques
pains et quelques poissons. La tradition liturgique a établi une relation entre le
miracle et l’institution de l’Eucharistie. Ceci se voit clairement en comparant le récit
de la multiplication des pains et les gestes de la Cène du Seigneur avec ses disciples
(Mt 26, 26 ; Mc 14, 22 ; Lc 22, 19). De cette façon le récit primitif a été l’objet d’un
premier développement grâce à la tradition liturgique.
4. Critique de la rédaction.
L’analyse des écrits bibliques selon la critique ou histoire de la rédaction se propose
de reconstituer le processus de rédaction et le rôle du rédacteur. En particulier, on
doit étudier de quelle façon le texte a acquis sa forme définitive, quels étaient les
matériaux à la disposition du rédacteur ; quel point de vue l’a guidé dans la sélection,
le remaniement et la systématisation des matériaux, quels éléments il ajoute, à quels
lecteurs il s’adresse.
C’est non seulement pour les Évangiles, mais encore pour tous les écrits de l’AT et du
NT que vaut l’affirmation de ce que le rédacteur est compilateur, écrivain,
théologien et « évangéliste ». Il recueille et sélectionne le matériel nécessaire, le re-
élabore au point de vue stylistique et thématique, le systématise et le distribue et,
parfois l’intègre avec des additions plus ou moins longues. Ce travail si complexe
crée un nouveau texte au caractère unitaire et personnel.
Si nous en restons à l’exemple de la multiplication des pains, la rédaction de Marc
souligne l’incompréhension des disciples (Mc 6, 62) et la portée christologique de
l’événement (Mt 6, 34). De son côté, la rédaction de Matthieu souligne la
compassion de Jésus pour la foule, comme Marc, mais omet la mention des brebis et
du berger et abrège le dialogue entre Jésus et les Apôtres. Finalement, selon la
rédaction de Luc, le miracle apparaît comme un signe du Royaume de Dieu (Lc 9, 11).
Nous nous trouvons dans l’ultime étape qui correspond au texte canonique de la
multiplication des pains et des poissons.
5. Critique historique.
La lecture d’un texte sous l’angle historique a pour objet d’unir les affirmations d’un
texte et la réalité historique. Elle essaie d’éclaircir la relation entre texte et
événement, le passage du fait historique au texte écrit. Dans la recherche des faits
historiques on interroge les textes bibliques pour savoir, par rapport aux
événements exposés dans le texte, ce qui s’est réellement passé. N’étant pas
d’abord un texte de caractère historique mais plutôt un témoignage de foi, la Bible
ne fournit pas toutes les informations qu’un historien désirerait. Cependant, ces
affirmations permettent d’esquisser une image historiquement certaine des faits ;
dans le cas du NT, on a également une description de Jésus et de l’Église dans ses
origines. Comment est-il possible de remonter du texte à l’histoire avec un procédé
dont la méthodologie est correcte ?
Depuis l’origine même des Évangiles canoniques on a toujours cru sans aucun doute
et affirmé que l’histoire de Jésus s’y exprime. Les Évangiles, par conséquent, ont été
considérés comme historiques. Les divergences entre les évangélistes trouvaient
leurs solutions par d’autres voies, mais ne mettant absolument pas en doute la
vérité historique des textes sacrés. Pendant de nombreux siècles on en est
tranquillement resté sur cette croyance.
Avec le siècle des lumières (*) (illuminisme rationaliste) on est passé d’une histoire
sainte à une véritable histoire de Jésus, préoccupée des problèmes que pose
l’historiographie. La recherche s’est alors engagée sur deux voies :
a) Reconstruction psychologique d’une autre histoire de Jésus libérée de toute
interprétation et dénommée fidéiste (*). Jésus devient l’image de son historien :
maître des lumières, génie romantique, philosophe kantien, moraliste puritain,
révolutionnaire social ou prophète fallacieux de la proclamation de la fin des temps.
b) Situation des Évangiles à l’intérieur du monde des idées religieuses, fréquemment
qualifiées de mythologiques. L’événement historique est affaibli ou nié au bénéfice
de l’histoire des idées et des sujets mythiques qui se dégradent continuellement.
Les deux voies d’accès au Jésus de l’histoire par l’intermédiaire des Évangiles se
basent sur une conception positiviste de l’histoire, dont le postulat fondamental : «
l’histoire comme perception du fait tel qu’il est » pêche par épistémologie (*)
ingénue et naïve. Cette manière de comprendre l’histoire veut se passer
complètement de la vision de foi des événements racontés dans les Évangiles. Si,
comme nous l’avons vu plus haut, nous tenons compte du fait que les actes de la vie
de Jésus sont racontés après leur interprétation à la lumière de la foi, nous
comprendrons à quel point cette vision est dépourvue de la saine et nécessaire
critique dont on a besoin pour comprendre vraiment la signification des écrits
évangéliques.
Il faut un nouveau concept d’objectivité historique. Celle-ci ne signifie pas la
reproduction ou reconstruction parfaite et fidèle du fait dans sa seule matérialité.
Elle consiste, plutôt, à capter l’événement dans l’unité qu’il forme avec la
signification perçue par la personne qui l’a vécu, à rentrer dans les perspectives de la
personne qui le réalise pour en juger dans le cadre d’un projet de vie. Cette
conception historiographique comporte des postulats :
(1) L’affinité et la « sympathie » avec le fait par l’intermédiaire du texte qui abolit la
distance culturelle qui sépare l’historien du texte.
(2) La distanciation temporelle. L’histoire a besoin de prendre du recul pour pouvoir
comparer et passer au crible les multiples documents sur un événement déterminé.
Il faut aussi que l’historien puisse insérer ledit événement dans la trame d’autres
événements et mettre ainsi en évidence son poids et sa valeur historiques.
(3) Tout événement historique implique que son évocation soit fondée sur les faits
qui se transmettent. L’historien doit percevoir cette capacité évocatrice des faits
dans le texte écrit et, de son côté, doit être capable de les évoquer pour ses lecteurs.
L'évocation n'est pas un rajout tardif à l’histoire véritable, mais constitue au
contraire une réalité unie au fait et à son sens.
(4) Derrière chaque parole ou acte de Jésus se cache une revendication d’autorité
divine. La tâche de l’historien sera de rechercher le Jésus de l’histoire dans son
intégrité humano-divine.
Dans cette conception de l’histoire la condition de croyant n’est pas défavorable et
n’a pas non plus à être laissée de côté à l’heure de faire de l’histoire sur Jésus. C’est
plutôt une condition favorable car elle situe l’historien dans la perspective dans
laquelle ont été écrits les Évangiles, la perspective de la foi. La foi ne l’exempte pas
des exigences scientifiques, mais la science historique sur Jésus trouve son
authentique statut herméneutique dans la foi. N’importe quel historien non chrétien
peut aborder le Jésus de l’histoire et son histoire de Jésus pourra offrir des éléments
de valeur, mais il n’arrivera jamais à la réalité historique intégrale de Jésus car il lui
manquera la dimension herméneutique de la foi qui lui permettrait d’entrevoir la
parole ou l’acte de Jésus dans la profondeur de son sens pour Jésus lui-même et la
communauté croyante d’après Pâques.
Si l’on considère du point de vue historique la multiplication des pains, on doit faire
le test d’authenticité historique, en appliquant les critères de l’historicité, valables
pour l’historiographie actuelle : témoignage multiple, discontinuité avec l’ambiance
de l’environnement ou avec la communauté primitive, conformité de l’épisode avec
l’espérance messianique du temps de Jésus, etc… L’application de tels critères donne
garantie et assurance sur le fait historique de la multiplication des pains et des
poissons.
III. MÉTHODE EXÉGÉTIQUE SYNCHRONIQUE
Le document de la Commission Biblique Pontificale, de l’année 1993, intitulé : «
Interprétation de la Bible dans l’Église », expose trois méthodes synchroniques et
une série d’approches de la Bible dans une perspective particulière, comme peut
l’être la tradition, les sciences humaines, etc…
Méthode synchronique : c’est celle qui analyse le texte, non pas dans sa phrase de
formation, mais au contraire à l’état définitif, et, s’agissant de la Bible, canonique
1. Méthodes synchroniques.
Le document du Vatican présente trois méthodes synchroniques : l’analyse
rhétorique, l’analyse narrative et l’analyse sémiotique (*).
a) L’analyse rhétorique se limite à analyser les discours qui se trouvent dans la Bible.
Ces discours sont analysés selon les parties du discours dans la rhétorique classique :
exorde ou entrée, narration, démonstration, réfutation et épilogue. Avec cette
méthode on peut analyser les discours de Jésus dans les Évangiles ou les discours qui
se trouvent dispersés au long des Actes des Apôtres. La méthode peut être
appliquée de la même façon à l’Ancien Testament, par exemple, aux discours de
Moïse dans le Deutéronome, aux discours de la Sagesse dans les livres sapientiaux,
ou aux discours de divers personnages dans les livres historiques.
b) L’analyse narrative étudie uniquement les textes narratifs de la Bible, c’est-à-dire
une grande majorité. En considérant les éléments propres d’un récit, biblique ou
non, l’analyse cherche à révéler qu’une compréhension nouvelle et originale du
texte peut être perçue à travers tel ou tel élément. Quels sont les éléments
principaux de l’analyse narrative ?
(1) Le protagoniste, l’antagoniste et les comparses.
(2) L’analyse du processus narratif, avec le début de l’action, le nœud et le
dénouement.
(3) Les circonstances du récit : le lieu, le temps et l’ordre de déroulement de l’action.
(4) S’agissant d’un récit biblique, qui est l’histoire du salut et qui est ordonné au salut
des hommes, on doit passer de l’exposé au message. Quel est le message perçu par
l’analyse des éléments indiqués ci-dessus ? Prenons, par exemple, Lc 23, 2-25, récit
que nous pourrions intituler le Jugement de Jésus. L’analyse narrative met en
évidence, de manière vigoureuse, la magnifique cohérence de Jésus (protagoniste)
et la terrible incohérence des antagonistes et comparses : les scribes et les
pharisiens, Pilate, Hérode, la foule.
c). L’analyse sémiotique part de deux présupposés :
(1) Lire et interpréter un texte c’est découvrir et établir les différentes relations
existant entre les éléments du même texte.
(2) Les relations fondamentales de n’importe quel texte sont l’opposition ou
l’équivalence. L’opposition se fonde surtout sur les termes antithétiques : mort/vie,
froid/chaleur, lumière/obscurité, maladie/guérison, ancien/neuf, unir/séparer, etc…
L’équivalence se trouve principalement dans les synonymes : vouloir/aimer,
souffler/encourager, temple/sanctuaire. Opposition ou équivalence se basent
surtout sur le parallélisme et constituent la grille la plus simple de l’analyse
sémiotique, qui est le modèle binaire. Le parallélisme est la correspondance qui se
trouve entre un verset et un autre (par exemple Pr. 18, 7 « La bouche du sot est sa
routine, et ses lèvres un piège pour sa vie »), un des termes d’un verset et l’un des
termes d’un autre (par exemple Pr. 16, 3 « Recommande tes œuvres à Yachting, et
tes projets se réaliseront »).
Prenons comme exemple Mc 7, 32-37. On identifie d’abord les répétitions :
sourd/muet, parler/ne pas parler, oreilles/langue, s’ouvrir/dire… ; ensuite on divise
le texte en deux phases parallèles. Le sourd-muet avant le miracle (phase A) et après
le miracle (phase B). En troisième lieu on établit les équivalences entre les deux
phases surdité/audition, mutisme/parole ; oreilles fermées/oreilles ouvertes, non-
communication/communication ; langue liée/langue déliée. Finalement on organise
le récit en séquences parallèles : (1) Situation de non-parole (v.32)- situation de
parole (v.35) ; (2) demande positive : supplique (v.32) demande négative interdiction
(v.36) ; (3) transgression (v.33)-transgression (v.36) ; (4) appel créateur(v.34) : appel
à la reconnaissance (v.37).
2. Quelques approches.
Pour avoir une vision d’ensemble sur les méthodes exégétiques synchroniques, je
me limite à indiquer maintenant les diverses approches que présente le document
du Vatican.
a). Approches basées sur la tradition : l’approche canonique et celle basée sur les
traditions interprétatives juives.
b). Approches basées sur les sciences humaines : approche sociologique, approche
anthropologique culturelle, approche psychologique et psychanalytique.
c). Approches basées sur le contexte historique : approche libérationiste, approche
féministe.
d). Lecture fondamentaliste de la Bible.
(Si vous désirez approfondir la connaissance de ces diverses approches, vous pouvez
lire le document de la Commission Biblique Pontificale.).
Chapitre 8
L'actualisation biblique
Nous avons déjà des principes théologiques et des méthodes scientifiques
d’interprétation. Il nous reste à faire le dernier pas pour faire parvenir le texte au
lecteur, l’actualisation du texte sacré. Actualiser l’Écriture, c’est la rendre présente,
vivante et efficace dans la vie quotidienne des hommes et les situations simples et
complexes des sociétés humaines. Dans le dernier chapitre de DV se trouvent des
textes qui font référence à cette actualisation : « Et dans les Paroles des Apôtres et
des Prophètes, il fait résonner la voix de l’Esprit Saint…Dans les Livres Sacrés, le Père,
qui est au Ciel, sort amoureusement à la rencontre de ses fils pour converser avec
eux" » (DV, 21). L’usage du présent (fait résonner, sort amoureusement) montre que
la Parole de Dieu est vivante dans l’aujourd’hui de l’histoire et renferme un pouvoir
actualisant de grande amplitude. La Constitution elle-même nous offre la finalité de
l’actualisation : « de sorte que se multiplient les ministres de la Parole capables
d’offrir au peuple de Dieu la nourriture de L’Écriture qui éclairera l’intelligence,
confirmera la volonté, embrasera le cœur d’amour envers Dieu » (DV, 26)
I. Conditions pour l’actualisation
II. Actualisation théologique.
III. Actualisation liturgique.
IV. Actualisation pastorale.
V. Actualisation spirituelle.
VI. La « lectiodivina ».
APERÇUS :
- Même si elle a été écrite il y a de nombreux siècles, la Bible continue-t-elle à être
valable pour l’homme contemporain ? Certains considèrent la Bible comme obsolète
et sans valeur pour l’homme de notre époque.
- Comment faut-il lire la Bible aujourd’hui ? Considérez que la Bible, comme on l’a vu
dans les chapitres antérieurs, est parole vivante de Dieu à l’homme de tous les
temps.
MOT CLEF
Actualisation.
I. CONDITIONS POUR L’ACTUALISATION
Actualisation : C’est l’action d’écouter et de se laisser interroger par le Dieu qui se
révèle dans le texte sacré.
Selon cette définition la première condition pour l’actualisation est l’oraison, qui est
dialogue avec Dieu par l’intermédiaire de laquelle vous écoutez le Dieu qui se révèle,
vous interpelle et auquel vous donnez une réponse, exigée par le dynamisme même
de la structure de dialogue de l’oraison. Dieu a non seulement « parlé » mais « il
parle »encore comme un Père à ses enfants.
Dans un climat d’oraison et de dialogue avec Dieu on doit faire une lecture fréquente
et assidue de l’Écriture. Cette lecture permet au lecteur de se familiariser peu à peu
avec un texte précis, un auteur, l’ensemble de la Bible. Grâce à cette familiarité la
voix de Dieu acquiert en chaque personne une plus grande capacité de résonance, et
l’homme une certaine habileté pour établir l’analogie (la ressemblance) entre le
texte et la vie, entre la Parole de Dieu et la situation de l’homme.
La lecture prépare l’esprit à «l’étude attentive » d’une péricope évangélique ou d’un
passage de l’Ancien ou du Nouveau Testament. Ce type d’étude est un
approfondissement du texte en recherchant sa profondeur pour extraire la richesse
par l’application des méthodes les plus appropriées. L’usage et l’application des
méthodes dépendront de la préparation de ceux qui les utiliseront.
Enfin, il y a lieu de mentionner la connaissance de ceux auxquels est destinée
l’actualisation. Plus les destinataires seront connus, plus il sera facile d’actualiser la
Parole divine pour eux, hommes « en situation ». Il faudra tenir compte de l’âge, de
l’état spirituel et religieux, de la culture et de la formation intellectuelle, du champ
de leurs intérêts et de leurs préoccupations. Ceci n’est pas manipuler le texte sacré
ni le réduire aux besoins humains, ce n’est qu’accepter le principe de la poursuite de
la révélation de Dieu à chaque homme et aux hommes « en situation ». La
condescendance de Dieu poursuit son action au long de toute l’histoire du salut.
II. ACTUALISATION THÉOLOGIQUE.
L’actualisation théologique est cette actualisation menée à bien par un théologien,
cherchant dans l’ensemble de la Bible ou dans l’un quelconque des livres sacrés, les
racines à partir et à travers lesquelles la sève vitale de la Parole de Dieu parvient à la
théologie. Quelles sont les fonctions de la Bible grâce auxquelles elle s’actualise dans
la théologie ? La Constitution sur la Divine Révélation (DV 24) les réduit à quatre :
1. Donner une base à la théologie : Si la théologie est la science de Dieu, celle-ci ne
peut avoir d’autre base ; ceci supposerait d’aller contre la nature même de la
théologie et en ferait une science de l’Esprit comme n’importe quelle autre. Le
théologien d’aujourd’hui devra identifier les points qui, dans les divers traités
théologiques, sont d’actualité pour trouver dans la Bible le soutien inébranlable et la
lumière rayonnante de la vérité salvatrice, contenue et concentrée dans le mystère
du Christ.
2. Donner de la solidité à la théologie : ce qui conserve la solidité de la théologie à
travers les siècles et les hommes, c’est la solidité de la Parole de Dieu, qui ne passe ni
ne succombe sous le poids du temps, des attaques idéologiques, des théories
spécieuses imaginées par les hommes pour l’affaiblir. Elle confère aussi de la sûreté
en face des nouveaux problèmes qui surgissent au fil des années et des époques
historiques.
3. Rajeunir la théologie : la Parole de Dieu étant toujours ancienne et toujours
nouvelle, sa nouveauté ne peut cesser d’influencer la théologie. L’Écriture est pour la
théologie comme l’élixir d’éternelle jeunesse, qui la sauve de la décrépitude et du
vieillissement. La théologie est actualisée par la Bible grâce aux nouvelles recherches
et applications de la Parole divine aux grands thèmes du dogme et de la morale
chrétienne. Et surtout grâce à la lumière et à la force de vie qu’elle apporte aux
éternels problèmes de l’existence historique et à ceux qui à chaque époque
inquiètent l’intelligence et le cœur des humains.
4. Être comme l’âme de la théologie : La Bible anime la tradition théologique du
passé, en lui donnant un souffle nouveau à chaque époque, grâce à l’actualité
permanente de la Parole de Dieu. Elle anime également les élaborations
théologiques de chaque phase historique, non moins que les efforts des théologiens
pour répondre de façon adéquate aux interrogations et aux problèmes propres à
chaque génération.
III. ACTUALISATION LITURGIQUE
La liturgie chrétienne est l’actualisation de l’histoire du salut grâce aux rites et à la
Parole. Dans les divers rites sacrés Jésus-Christ continue à réaliser le salut historique
qu’il a apporté par sa présence au milieu des hommes et son œuvre de rédemption.
Sa Parole est force et efficacité pour ceux qui dans la communauté culturelle
l’écoutent et l’intériorisent sous l’action de l’Esprit.
L’actualisation liturgique de la Bible se réalise :
1. Par l’intermédiaire du contexte dans lequel la Parole de Dieu se situe : temps
liturgique, célébration cultuelle communautaire, caractère de l’acte liturgique. Dieu
se sert de ce contexte pour « aujourd’huiser » (rendre contemporaine et actuelle) la
révélation du salut de l’homme qui vit dans une situation particulière.
2. Par l’intermédiaire de la célébration liturgique elle-même, qui revit et rend actuels
le mystère et les mystères du Christ et de toute l’histoire du salut. Dans chaque
action liturgique, c’est le Christ qui agit et, par son action dans l’aujourd’hui de
l’histoire dans laquelle s’insère la liturgie, il se révèle à l’homme dans l’aujourd’hui
personnel de cet homme et de la communauté.
3. Par l’intermédiaire de l’homélie qui doit être l’exposé des textes liturgiques, en
grande partie empruntés à l’Écriture, pour qu’ils deviennent parlants, significatifs et
stimulants pour la communauté croyante qui participe à la célébration liturgique.
IV. ACTUALISATION PASTORALE.
L’actualisation pastorale englobe la catéchèse, l’accompagnement spirituel,
l’accompagnement pastoral et toute autre forme par laquelle le Pasteur sert
d’intermédiaire, avec autorité, entre la Parole de Dieu et les fidèles chrétiens. Par sa
nature même, cette médiation s’exerce dans une variété de lieux, de formes, de
finalité.
Le Pasteur ecclésial, la Bible et les destinataires font partie intégrante de
l’actualisation biblique.
1. La Bible est présente comme « bonum » (bien), c’est-à-dire comme livre de salut
pour l’homme qui a radicalement besoin de cette dernière. De nombreux textes et
surtout, de nombreux personnages bibliques soulignent et manifestent ce caractère
de l’Écriture. Le fait de présenter la Bible comme « bonum » veut dire que c’est toute
l’Écriture qui doit être lue pour le bien de l’homme.
2. Le Pasteur doit être expert en humanité, capable de capter et de conjuguer la
Parole de Dieu dans les situations vitales de l’homme biblique avec la Parole de Dieu
dans la vie des personnes au service desquelles il est comme pontife, personnes qui
doivent se reconnaître héritières de l’homme biblique et du peuple d’Israël. Ainsi
donc, il saura mettre en relation la Parole du Livre avec celle, non moins sonore, des
événements, la Parole d’hier dans l’expérience fondatrice de Jésus et des premiers
chrétiens avec celle d’aujourd’hui dans les vicissitudes de la communauté ecclésiale,
la Parole de la Révélation historique, avec cette autre immanente, bien que quelque
peu confuse, aux avatars de l’homme sur la terre.
3. Le destinataire de la lecture pastorale c’est l’homme concret. Il doit d’abord
chercher à être en syntonie avec la vie et avec les problèmes véritables et
fondamentaux qu’elle pose : les paroles de la Bible sont comme une semence et ne
révèlent leur sens que si nous les faisons descendre vers la terre de la vie. En second
lieu, il doit être ouvert à la contemporanéité de la vie ecclésiale, de la communauté
croyante, puisque le destinataire de la Parole divine et son interlocuteur réel c’est le
peuple de Dieu, l’Église. Finalement, il doit s’efforcer de vivre selon la praxis (*)
chrétienne, parce que c’est à l’intérieur de la praxis que la Parole dévoile son sens et
ses nouvelles résonances, praxis qui est certes un effort humain, mais surtout don de
l’Esprit Saint.
La finalité de l’actualisation pastorale consiste à rendre la Parole de Dieu parlante
dans l’aujourd’hui de l’humanité. Nous atteindrons cet objectif quand la Parole
divine apparaîtra à chaque être humain comme une ouverture à ses propres
problèmes (en effet, une parole vraie en soi mais qui n’entre pas dans le circuit vital
du sujet, reste lettre morte pour lui), une réponse à ses propres interrogations
(réponse qui en même temps interroge et pose des questions à l’intéressé), un
élargissement de ses valeurs et une satisfaction de ses propres aspirations (valeurs
évangéliques, aspirations à la vérité et au bien).
V. ACTUALISATION SPIRITUELLE
Actualisation spirituelle veut dire actualisation de la Bible faite par tout chrétien,
cherchant dans le texte sacré une nourriture pour l’esprit, une lumière pour
l’intelligence, et une force pour la volonté, afin de pouvoir continuer à avancer
fidèlement sur la voie du Seigneur jusqu’à ce qu’il vienne.
La première et la meilleure façon d’actualiser l’Écriture se déroule dans l’homme, de
telle manière que l’homme passe de l’être « animal charnel » à « l’esprit vivifiant ».
En d’autres termes, qu’il cesse de se guider sur les forces de la nature et que sa vie
soit guidée en tout par la force de l’Esprit, qui émane du contact et de la méditation
de l’Écriture.
Aussi bien dans les siècles passée que dans l’actualité, le lecteur prend la Bible entre
les mains dans une situation concrète et avec un ensemble de facteurs inséparables
de son existence : présupposés, expériences, connaissances, interrogations,
dispositions affectives, goûts… Ce sujet est celui qui a mené à son terme et la mène
aujourd’hui aussi, l’actualisation spirituelle pour être interpellé et interprété par la
Parole de vie, car la Parole de Dieu est herméneutique de l’homme, au sens où
l’homme se comprend mieux lui-même en comprenant l’Écriture. Pour que cette
Parole divine soit herméneutique de l’homme, il est indispensable que celui-ci se
pose personnellement les grandes questions de l’existence et les vive comme des
problèmes réels qui demandent une réponse personnelle et concrète. Il est
nécessaire, en outre, que l’on arrive à établir un authentique dialogue religieux entre
le croyant et Dieu, dialogue entamé dans l’ambiance de la communauté ecclésiale,
dont l’Écriture est un élément constituant, un trésor incalculable qui doit être
conservé, une source éternelle de rajeunissement et de vitalité.
VI. LA « LECTIO DIVINA »
Puisque l’usage de cette actualisation spirituelle et pastorale de la Bible s’étend de
plus en plus, je vais exposer brièvement en quoi consiste et comment se réalise cette
méthode d’actualisation spirituelle et pastorale.
La « lectiodivina » est une lecture, individuelle ou communautaire, d’un texte plus ou
moins long de l’Écriture comme Parole de Dieu. Ceci a pour but de pénétrer son
message de salut pour soi même ou pour la communauté dans la situation concrète
et actuelle. La « lectiodivina » suit cinq moments : lecture, méditation, oraison
contemplation, « opération ». Exposons chacun d’eux en peu de mots.
1. Lecture. Elle consiste en la lecture, répétée plusieurs fois, à voix haute si possible,
du texte que l’on a choisi. Cette lecture est destinée à mieux connaître le texte qui a
été choisi, mais surtout à recueillir des messages, des suggestions, des inspirations
qui jaillissent comme des étincelles du texte sacré lui-même. Pour que la lecture soit
fructueuse, elle doit être objective, scientifique, selon les règles de l’herméneutique
biblique. Il n’est pas nécessaire cependant, d’être exégète professionnel. Les notes,
introductions, et commentaires sur le texte des différentes éditions de la Bible
peuvent être suffisantes pour réussir une bonne lecture. Celle-ci doit se transformer
en « audition », en écoute de la Parole divine qui résonne dans la lecture. Tant qu’on
ne sera pas arrivé à l’écoute, on ne peut considérer la lecture comme terminée, ni
passer à la méditation.
2. Méditation. La méditation est la recherche de la richesse intérieure du texte, la
recherche de sa vérité cachée, mieux même, la découverte du trésor caché. Pour
arriver à cette découverte on conseille de faire trois pas :
a) Le ramassage de la récolte, comme fait la fourmi. C’est-à-dire, rassembler les
différents textes de la Bible qui aident à intérioriser plus et mieux le texte sur lequel
on est en train de faire la « lectiodivina ».
b) Une fois les textes rassemblés, comme l’abeille, en tirer le bon miel avec lequel
savourer la Parole de Dieu et nourrir sa vie. Cette élaboration se fait, surtout, en
confrontant les textes les uns aux autres, de telle sorte que de nouveaux éclats de
lumière et de vérité surgissent à leur contact mutuel.
c) Finalement, il est nécessaire que les jets de lumière et de vérité illuminent notre
propre vie dans ses circonstances concrètes, afin que la méditation de la Parole de
Dieu soit en même temps élan de transformation et de rénovation intérieure du
lecteur.
3. Oraison. L’oraison est la réponse à Dieu qui interpelle par sa Parole, lue et
méditée. C’est une oraison du cœur, le lieu où Dieu parle à l’homme et où l’homme
écoute Dieu, où l’homme parle à Dieu et Dieu écoute l’homme. La réponse de
l’homme à Dieu peut être très variée : réponse de douleur et de repentir en se
voyant pêcheur et remplis de défauts et de défaillances ; réponse de supplique
devant la conscience de sa propre petitesse et de sa propre faiblesse ; réponse
d’action de grâce et d’adoration devant les merveilles que Dieu fait dans son plan de
salut sur le genre humain, et à l’intérieur de la petite histoire du salut que nous
sommes chacun, réponse de louanges, en nous rendant compte que la Parole de
Dieu nous remplit de joie et nous surprend par son efficacité silencieuse, mais très
réelle, dans des situations concrètes de notre vie.
4. Contemplation. La contemplation a pour objet non pas notre histoire personnelle
ni l’histoire du salut, mais Dieu lui-même. Le point de départ de cette relation
personnelle avec Dieu est toujours le texte de la Bible, qui sert de base pour la «
lectiodivina ». On a l’habitude de la décrire de différentes manières :
a). Comme un retour au Paradis, où Dieu contemple notre visage et où nous sommes
invités à contempler le visage de Dieu, dans un très haut degré d’intimité et de joie.
b). Comme irruption du divin dans l’histoire personnelle et dans l’histoire des
hommes, en découvrant la présence vivante et amoureuse de Dieu dans tous les
événements et avatars de la vie.
c). Comme vision du Christ crucifié et ressuscité dans l’histoire, selon la phase de
Pascal : « Le Christ crucifié souffre jusqu’à la fin du monde » à laquelle nous
pourrions ajouter : « Le Christ ressuscité triomphe jusqu’à la fin du monde ». Il s’agit
de contempler, de façon continuelle, le Christ comme notre contemporain.
d) Comme transformation, dans la rencontre constante et quotidienne avec la Parole
de Dieu, en un homme nouveau, qui se sent lancé par Dieu même vers
l’évangélisation et la mission. La contemplation de Dieu transforme l’homme et
l’envoie avec force vers l’apostolat dans le monde.
5. « Operatio ». Avec ce dernier moment de la « lectiodivina » on veut indiquer les
fruits que les moments précédents produisent dans l’âme. Ce sont les larmes de
repentir et de conversion, c’est la consolation qui nous vient de l’Écriture pour
maintenir notre espérance vivante, c’est le discernement des esprits qui nous situe
sur la longueur d’onde des pensées divines, c’est la décision de courir avec
persévérance la carrière de la foi et de l’amour jusqu’à atteindre le but, c’est la force
qui nous pousse à construire l’Église et à toutes formes d’action avec lesquelles
l’Église se construit dans l’histoire. Bref, Dieu à travers la « lectiodivina » ne cesse de
transformer notre vie chrétienne et notre tâche pour le bien de l’Église et des
hommes.
Conclusion
Parole Vivante
L’exposé de ce cours a suivi les moments méthodologiques suivants : il a commencé
par présenter l’unité du traité, il a ensuite approfondi le contenu de chacun des
concepts qui le composent. A la fin, il ne reste plus qu’à regarder en arrière pour voir
le chemin parcouru et redécouvrir l’unité dans la multiplicité et la multiplicité dans
l’unité.
La Sainte Écriture est un seul livre, qui contient et qui est la Parole de Dieu. Un livre
que Dieu a confié à l’Église pour sa formation, sa conversation et son interprétation
enrichissante et toujours actuelle. Guidée par l’Esprit de Dieu, l’Église a déterminé
les livres qui composent le grand livre de l’Écriture et a cru, depuis ses origines, qu’il
est inspiré et qu’il renferme dans son sein la vérité qui sauve. Ce livre singulier,
œuvre de Dieu et des hommes, recueille la Parole de Dieu qui s’est révélé dans
l’histoire et au cours de l’histoire. Cette Parole de Dieu n’est pas restée vaine dans la
société des hommes, mais elle a, au contraire, été recueillie et transmise par un
peuple jusqu’à se fixer en Parole écrite.
Notre foi nous dit que la Parole de Dieu est Vivante et efficace, qu’elle est destinée à
l’humanité, qu’elle est, par conséquent, contemporaine de chaque homme et de
tout homme. De là l’urgence à l’interpréter et à l’actualiser à chaque époque et dans
toute culture puisque la Parole de Dieu n’est liée ni au temps, ni à l’espace, ni à la
pensée des hommes.
Le but de ce cours d’introduction à l’Écriture est d’offrir au lecteur l’instrumentation
nécessaire pour lire et méditer avec plus d’efficacité et de profit la Parole de Dieu. Le
cours n’affiche pas d’autre titre sinon celui d’être le portier qui permet l’accès au
sanctuaire de l’Ancien et du Nouveau Testament, afin que la Parole de Dieu soit
nourriture quotidienne des âmes. Dieu veut que ce texte atteigne cette finalité et
facilite de cette façon l’accès des âmes au trésor inépuisable des Écritures Sacrées.
Lexique
Allégorie : Comparaison ou parabole dans laquelle chaque action ou personnage a
une signification particulière. Par exemple, l’allégorie de la vigne et des serments.
Allégorique : Qui a une relation avec l’allégorie.
Anthropocentrisme : Conception selon laquelle l’homme est le centre de la vie et
non pas Dieu. Celui-ci apparaissant comme le rival ou l’ennemi de l’homme.
Apocryphe : Signifie occulte, caché. Fait allusion à ces livres qui n’ont pas été
acceptés comme canoniques, que les hérésies des premiers siècles tenaient pour
inspirés et sur lesquels ils appuyaient une partie de leur doctrine.
Apologétique : Partie de la théologie dont l’objectif est la défense des vérités
chrétiennes et le dialogue entre la foi et la raison.
Bible des Septante (LXX) : Traduction en grec des livres hébreux de l’Ancien
Testament, réalisée à Alexandrie par les juifs de la diaspora.
Canon biblique : Collection de livres de l’Ancien et du Nouveau Testament recueillis
par l’Église parce que, écrits sous l’inspiration de l’Esprit Saint, ils constituent la
norme d’union entre la vérité et la vie chrétiennes.
Cultuel : Relatif au culte religieux, soit juif, soit chrétien.
Diaspora : Nom donné aux communautés juives qui vivaient hors de la Palestine et
qui, au milieu des gentils et des païens, maintenaient la foi de leurs pères.
Didaché : Écrit anonyme de la fin du 1er siècle ap JC, qui rassemble les
enseignements apostoliques et le mode de vie des premières communautés
chrétiennes.
Ecclésia : Mot grec qui signifie textuellement « assemblée de ceux qui prient ». Ce
terme s’applique aux communautés des chrétiens depuis les débuts du
christianisme. C’est de lui que vient le mot « Église ».
Épistémologie : Science qui étudie le problème de la vérité et expose les concepts
sur lesquels sont fondées les sciences, aussi bien les sciences exactes que les
sciences humaines.
Eschatologie : C’est la partie de la théologie qui traite des fins dernières de
l’existence, telles que la mort, le jugement, la résurrection, le retour du Seigneur.
Eschatologique : relatif à l’eschatologie.
Eschaton : S’applique à Jésus-Christ en tant que fin ultime de toute chose.
Exégèse : C’est la science de l’explication des textes anciens par des méthodes
scientifiques. Quand l’exégèse porte sur les livres de la Bible, on l’appelle exégèse
biblique.
Exégètes : Ceux qui étudient et se spécialisent en exégèse.
Exégétique : Relatif à l’exégèse.
Fidéisme : Erreur selon laquelle on ne peut faire appel qu’à la foi, pour expliquer
certaines vérités métaphysiques, morales ou religieuses qui sont, cependant,
compréhensibles par la seule raison.
Fidéiste : La personne professant ou pensant selon le fidéisme.
Fondamentalisme : Tendance à interpréter la Bible de manière exclusivement
littérale, sans tenir compte des genres littéraires ou de la culture dans laquelle furent
écrits les livres de l’Ancien et du Nouveau Testament.
Fondamentaliste : La personne qui pense, vit et agit selon le fondamentalisme.
Gentils : Pour les Juifs du temps de Jésus, tous ceux qui ne professaient pas la loi
d’Israël.
Gnosticisme : Système religieux et philosophique dont les partisans croient que seuls
se sauvent ceux qui parviennent à la « gnose », c’est-à-dire, à une connaissance
supérieure qui les élève jusqu’à Dieu et les rend indemnes de tout péché.
Gnostique : partisan du gnosticisme.
Hellénisme : Se dit de l’ensemble des facteurs qui constituent la culture grecque
développée entre le IIIe et Ie siècles av. JC, dans tout l’empire d’Alexandre le Grand.
Hellénistique : Relatif à l’hellénisme.
Hérésie : Doctrine contraire aux vérités de foi et de morale révélées et professées
par l’Église.
Hérétique : Relatif à l’hérésie.
Herméneutique biblique : La science d’interpréter correctement les textes bibliques.
Hominidés : Mammifères primates évolués, dont descend « l’homo sapiens », c’est à
dire l’être humain.
Inculturation : C’est le travail par lequel les vérités de la foi et les normes de culte se
transmettent et se vivent à l’intérieur d’une culture déterminée. Dès lors qu’il existe
de nombreuses cultures, on trouvera aussi différentes façons de vivre les mêmes
principes et les mêmes normes.
Indo-Européen : Langue ancienne constituant le tronc commun de certaines langues
anciennes, comme le grec et le latin, et d’autres langues actuelles parlées en Europe
et sur d’autres continents, comme par exemple, la langue espagnole et la langue
française.
Manichéen : Qui professe le manichéisme.
Manichéisme : Doctrine de Manès ou Maniché, qui admettait deux principes
créateurs opposés, l’un pour le bien (Dieu) et un autre pour le mal (le démon).
Marcion : Hérétique du II° siècle, qui établissait une contradiction entre le Dieu de
l’Ancien Testament, juste et sévère, et celui du Nouveau Testament, bon et
miséricordieux. Jésus-Christ serait venu libérer l’humanité de la domination
tyrannique du Dieu de l’Ancien Testament et proclamer le Dieu miséricordieux et
bon du Nouveau.
Marcionite : Disciple de la doctrine de Marcion.
Millénarisme : Croyance au retour sur la terre du Christ en gloire, pour régner
pendant une période de mille ans, qui précédera la fin du monde et le jugement
final.
Modernisme : Mouvement religieux de la fin du XIX° siècle qui prétendait adapter le
catholicisme aux doctrines et idéologies positivistes et rationalistes.
Moderniste : Relatif au modernisme.
Montanisme : Doctrine et secte fondées par Montan au II° siècle. Elle enseigne que
la révélation de Jésus n’est pas définitive mais au contraire qu’elle sera dépassée et
complétée par la Révélation de l’Esprit Saint.
Neotestamentaire : Qui a une relation avec le Nouveau Testament.
Orthodoxie : La doctrine correcte contenue dans la révélation et transmise par
l’Église au long des siècles.
Paléontologie, paléontologique : Science qui étudie les origines de la vie en se basant
sur les restes fossiles.
Patristique : Période qui va du II° au VII° et pendant laquelle les Pères de l’Église,
insignes et véritables maîtres de la foi chrétienne, ont vécu, prêché et écrit.
Pères apostoliques : Ce sont les Pères de l’Église qui vivaient en contact avec les
apôtres ou avec leurs successeurs immédiats.
Péricope : Passage de l’Écriture Sainte qui forme un tout en lui-même.
Philologie : Étude des mots d’une langue et de leur histoire au cours du temps,
depuis leurs origines.
Philologique : Relatif à la philologie.
Polygénisme : Doctrine qui affirme, en opposition avec le monogénisme, la
multiplicité des origines de l’espèce humaine. Selon cette doctrine, l’humanité
tirerait son origine de plusieurs couples et non d’un seul.
Positivisme : Théorie philosophique, fondée par Auguste Comte, qui défend
l’expérience issue des phénomènes comme unique source de connaissance,
moyennant le principe de vérification.
Praxis : Pratique ou action ; s’oppose à théorie.
Rationalisme : Courant de pensée selon lequel l’unique source de connaissance est la
raison. Il exclut, par conséquent la connaissance par la révélation et la foi.
Réformateurs : Adeptes du mouvement de la Réforme.
Réforme : Mouvement religieux dû à Luther, dans la première moitié du XVI° siècle,
et qui se propagea, au centre et au nord de l’Europe, aux siècles suivants.
Scholastique : Le mot dérive « d’école » et se réfère à une manière de pratiquer la
philosophie et la théologie, en particulier aux XII° et XIII° siècles ap. J.C.
Sémiotique ou Sémiologie : Théorie ou science générale des signes et de leur
signification.
Sémitique : relatif aux sémites ; on appelait ainsi les israélites appartenant au groupe
humain qui se disait descendants de Sem, fils de Noé.
Siècle des lumières : C’est ainsi qu’on nomme le XVIII° siècle, durant lequel le
rationalisme moderne arrive à son apogée.
Sinaïtique : relatif au Mont Sinaï, lieu de la Révélation de Dieu à Moïse.
Synoptiques : Nom donné aux trois premiers Évangiles (Matthieu, Marc, Luc) parce
qu’ils nous racontent les même événements et suivent le même ordre géographique
et chronologique dans de nombreux textes.
Thora : Nom hébreu qui signifie « loi » ; c’est ainsi qu’on appelle les cinq premiers
livres de la Bible, ou Pentateuque : Genèse, Exode, Lévitique, Nombres et
Deutéronome.
Vétérotestamentaire : relatif à l’Ancien Testament.
Vulgate : Version latine de la Bible réalisée par saint Jérôme à la fin du IV° siècle.
INDEX DE SIGLES.
AT : Ancien Testament.
NT : Nouveau Testament.
DV : « Dei verbum », Constitution sur la Révélation Divine du Concile Vatican II.
DS., Dz.–Sch : Danzinger-Schönmetzer. Collection de documents du Magistère
ecclésiastique au long des XX° siècles de christianisme.
EB. : Enchiridion Biblicum . Collection de documents du Magistère ecclésial sur
l’Écriture Sainte, depuis le II° siècle jusqu’à nos jours.
Autoévaluation du chapitre 1
La parole de Dieu dans la parole humaine.
Travail écrit
Commentez brièvement la signification du premier verset du 1er chapitre de
l’Évangile de Jean.
Questionnaire personnel
1. Pourquoi disons-nous que Dieu se révèle par la parole ?
2. A partir de quelle réalité la Bible a-t-elle été écrite ?
3. Dans quel sens la parole est-elle organique et créative ?
4. Quelles sont les autres caractéristiques de la parole ?
5. De quelle façon la Parole Divine passe-t-elle par la parole humaine sans s’identifier
à celle-ci ?
Points de Réflexion
1. Quelles sont les caractéristiques de la parole ?
2. Quelles sont les trois fonctions de la parole humaine et pourquoi Dieu l’a-t-il
choisie pour se révéler ?
A retenir
1 – « La Bible est parole écrite, parole vivante du passé et constamment vivifiée par
l’expérience du présent ».
2 – « Jésus Christ est la parole unique du Père, duquel sont reflétées toutes les
paroles révélées. »
3 – « La Parole divine est créatrice car elle est efficace, puisque Dieu est fidèle à sa
promesse et à sa parole ».
4 – La médiation est une condition absolument nécessaire pour que la parole de
Dieu arrive aux oreilles humaines et influence efficacement leur vie, avec une
efficacité salvatrice.
Suggestions pour l’étude
- Étudiez l’importance de la parole dans la Bible chez X. Léon Dufour, Éditions du
Seuil : Vocabulaire de Théologie biblique, sous la terminologie « Parole de Dieu »
Livres en espagnol :
- La Tourelle : Teologia de la Revelación, p 404 et suiv. Approfondir l’analogie entre la
parole humaine et la Parole divine.
O. Ruiz Arenas : « Jesus, epifaniadelamordelPadre », P 166-180 : Complétez vos
connaissances de la Révélation en tant que parole par une réflexion sur la « fe,
respuesta a la revelación ».
Autoévaluation du chapitre 2
Transmission-tradition
Travail écrit
- Expliquez et justifiez ce passage de la constitution Dei Verbum du Concile Vatican II
: « La prédication apostolique, qui se trouve spécialement exprimée dans les livres
inspirés, doit être conservée par transmission ininterrompue jusqu’à la
consommation des temps » (DV 8)
Questionnaire personnel
1 - A quoi sert et pourquoi l’importance de la transmission - tradition de la Parole de
Dieu écrite dans la Bible est-elle si grande ?
2 - En quel sens la révélation communiquée dans la Sainte Écriture est-elle exigeante
pour le chrétien ?
3 - Quelles sont les trois fonctions de la transmission - tradition ?
4 - Pourquoi les trois fonctions doivent-elles être coexistantes ?
5 - Quel est le processus historique de la transmission - tradition ?
Points de réflexion
1 - Expliquer le fait de la tradition et sa transcendance pour la vie des peuples en
général.
2 - Comment le processus historique de la transmission - tradition se produit-il et
quelles sont ses fonctions ?
A retenir
1 - « C’est dans la Bible que la Parole et l’action de Dieu dans la nature et surtout
dans l’histoire nous sont transmises ».
2 - « Une nouvelle tradition et transmission, liée à la précédente, mais à la fois
nouvelle et originale, s’inaugure avec le Christ Jésus ».
3 - Si le salut ne s’obtient que par l’acceptation de l’Évangile de Jésus-Christ, la
transmission de génération en génération est obligatoirement nécessaire et
absolument obligatoire.
4 - Une fois constitué en texte sacré et réglé en canon par l’Église à des moments
précis de l’histoire, ce que Dieu a révélé au long des siècles devient Parole Vivante
Suggestions pour l’étude personnelle
- Lire et méditer sur l’article « Tradition » de P. Grelot dans : X. Léon Dufour :
Vocabulaire de Théologie Biblique.
Livres en espagnol :
- R. Fisichella : La revelación, evento y credibilidad (115 121) : approfondir le fait de
la transmission en lisant « la transmisión de la revelation »
- L Coenen, Diccionario Teologico del Nuevo Testamento, Vol II, 78-95. Étendre vos
connaissances de la « Paradosis ».
Autoévaluation du chapitre 3
L'inspiration
Travail écrit
- Expliquer le sens du texte de la Constitution Dei Verbum du Concile Vat. II, n° 11 ; «
En vue de composer des textes sacrés, Dieu a choisi des hommes auxquels il eut
recours dans le plein usage de leurs facultés et de leurs moyens, pour que, lui-même
agissant en eux et par eux, ils missent par écrit, en vrais auteurs, tout ce qui était
conforme à son désir, et cela seulement ».
Questionnaire personnel
1. - Qu’est-ce que l’inspiration ?
2. - En quoi consiste le phénomène de l’inspiration décrit dans la Bible ?
3. - Comment l’Esprit Saint agit-il dans l’inspiration des textes sacrés ?
4. - Quel est le rôle de l’hagiographe, ou auteur sacré, dans la composition des livres
de la Sainte Écriture ?
5. - Quelle est la relation entre l’Esprit Saint et l’auteur sacré ?
Points de réflexion
1. - En quoi consiste le phénomène de l’inspiration et son processus historique ?
2. - Pourquoi la foi est-elle indispensable pour comprendre l’inspiration de la Bible ?
A retenir
1 « L’inspiration est un phénomène de l’histoire du salut, qui en parcourt toutes les
étapes, mais qui culmine dans l’inspiration biblique, où est rassemblée la Parole de
Dieu à l’homme dans le Christ, avec le Christ et par le Christ ».
2 « Les Saintes Écritures non seulement contiennent la Parole de Dieu, mais elles
SONT elles-mêmes Parole de Dieu. Et parce qu’elles sont Paroles de Dieu, elles
jouissent du charisme de l’inspiration »
3 « Dieu est celui qui inspire, l’homme est celui qui reçoit l’inspiration et transmet la
Parole de Dieu reçue par l’inspiration, mais seul le texte sacré, à strictement parler,
est inspiré étant le résultat simultané et conjoint de l’action de Dieu et de l’action de
l’homme ».
4 « Sans révélation il n’y a pas d’inspiration ; sans inspiration, nous ne saurions pas
exactement ce que Dieu a révélé ».
Suggestions pour l’étude personnelle
- Recherchez les termes « Dieu Auteur » et « Livres inspirés » dans la Constitution
Dogmatique sur la Révélation Divine du Concile Vatican II.
Livres en espagnol :
- A. Paul, en : « la inspiración y el canon de las Escrituras », VD 1987, 22-26. Lisez et
réfléchissez sur la doctrine catholique de l’inspiration.
- A. Artola, en : Introducción al estudio de la Biblia. 2. Biblia y Palabra de Dios, VD
1990, 183-191. Approfondissez la signification du mot « inspiration ».
Autoévaluation du chapitre 4
Le canon de l'écriture
Travail écrit .
- Décrivez l’importance et le rôle de la tradition apostolique dans la formation du
canon biblique.
Questionnaire personnel.
1. Comment savons-nous si un livre de la Sainte Écriture est inspiré ?
2. Tout ce qui a été écrit sur Jésus et sur les premières communautés chrétiennes se
trouve-t-il dans la Bible ? Pourquoi ?
3. Qu’est-ce que le canon biblique et pourquoi l’a-t-on fait ?
4. Comment s’est formé le canon biblique ?
5. Quels furent les critères suivis pour élaborer le canon biblique ?
Points de réflexion.
1. Comment le canon de l’Ancien Testament et du Nouveau Testament s’est-il formé
?
2. Expliquez en quoi consiste le dogme de la canonicité et les critères de
l’élaboration du canon biblique.
A retenir.
1. « La canonicité est cette qualité de l’Écriture Sainte grâce à laquelle cette dernière
est constituée norme, règle, canon de la foi et de la vie du chrétien ».
2. « Le même Esprit qui a inspiré les Écritures, a assisté l’Église pour les reconnaître
comme inspirées ».
3. « Étant donné que les apôtres, et eux seuls, avaient reçu la mission de transmettre
la forme authentique de la révélation historique de Jésus, pour qu’un écrit puisse
être tenu pour authentique, il fallait qu’il soit d’origine apostolique ».
Suggestions pour l’étude personnelle.
Livres en espagnol :
- A. Paul. La inspiración y el canon de las Escrituras, VD 1987, 52, 57. Lisez et
réfléchissez sur « La Doctrina Catolica del Canon de las Escrituras ».
- Exposés par J. M. Sanchez Caro en El canon Bíblico : Introduccion al estudio de la
Biblia, 2- Biblia y Palabra de Dios. VD 1990, 63-66. Analysez les éclaircissements
terminologiques relatifs au Canon.
- Article de G. Segalla, « Del canon escrito a su vitalidad en la Iglesia y en la historia »,
en : vitalidad en la Iglesia y en la historia» en : Panoramas del Nuevo Testamento, VD
1989, 473-478. Approfondissez le canon biblique.
Autoévaluation du chapitre 5
La vérité biblique
Travail écrit.
- Donner une définition et une brève explication de « la Vérité salvatrice ».
Questionnaire personnel.
1 - Pendant des siècles, qu’a-t-on compris par « infaillibilité » ?
2 - Quels sont, avec les sciences, les principaux conflits occasionnés par le concept
d’infaillibilité durant les trois derniers siècles ?
3 - Comment comprend-on aujourd’hui la vérité de l’infaillibilité ?
4 - Quels sont les principes fondamentaux de la vérité biblique ?
5 - De quelle manière l’histoire participe-t-elle à la vérité biblique ?
Points de Réflexion en équipe.
1 - Décrire le processus grâce auquel on est arrivé à comprendre l’infaillibilité
comme « vérité de salut ».
2 - Quels sont les principes fondateurs de la vérité biblique et quelle est leur
importance ?
A retenir.
1. Dieu ne s’est pas révélé et n’a pas inspiré les livres sacrés pour qu’ils ne
contiennent pas d’erreur, mais pour manifester la vérité relative au salut de
l’homme.
2. En passant d’un concept à une personne, la vérité s’unifie et se simplifie, et
cependant elle ne perd ni sa multiplicité ni son universalité, car cette personne est le
Verbe de Dieu, et c’est le Sauveur du monde.
3. Les événements de la vie d’Israël et de l’Église primitive manifestent les actions de
Dieu dans le temps.
Suggestions pour l’étude personnelle.
- Réfléchissez sur l’étude de I. de la Potterie, Histoire et vérité, en AH.VV. Problèmes
et perspectives de théologie fondamentale, Ed. Suis-moi.
Livres en espagnol
- L. Alonso Schökel, « En el contexto del Logos : la verdad ». En la Palabra inspirada,
Cristiandad 1986, 297-317. Lisez attentivement ces pages.
- P. Grelot, Los Evangelios y la Historia, Herder 1987,57-72.Etudiez en profondeur «
les directives les plus récentes du Magistère » sur l’historicité
Autoévaluation du chapitre 6
L'interprétation biblique
Travail écrit .
- Écrivez brièvement ce que vous répondriez à une personne qui affirme que chacun
peut interpréter la Bible, puisque c’est Dieu lui-même qui parle par elle.
Questionnaire personnel.
1. Pourquoi l’herméneutique est-elle nécessaire ?
2. En quel sens dit-on que le NT interprète l’AT ?
3. Quels sont les facteurs qui ont eu de l’influence sur l’exégèse et l’interprétation
biblique du XVIe au XIXe siècles ?
4. Quelle différence y a-t-il entre l’interprétation biblique protestante et
l’interprétation biblique catholique ?
5. Quelle est la signification du principe de « l’intention de l’auteur » dans
l’interprétation biblique ?
Points de réflexion.
1. Expliquez les grandes étapes historiques de l’interprétation biblique.
2. Quels sont les principes de l’interprétation biblique et quelle en est la signification
?
A retenir.
1) « Comprendre les Écritures, pour les apôtres, ne signifie pas autre chose que d’y
lire le Christ, ouvrant ainsi leur esprit à l’authentique interprétation des Écritures »
2) « la lecture et l’interprétation de l’Écriture exigent l’ouverture de l’esprit humain à
un sens ultérieur et supérieur non entrevu par l’auteur humain, et requiert une
certaine « connaturalité » et une certaine familiarité avec l’Esprit, par la foi et à
l’ouverture intérieure».
3) « La conversion de l’homme est inséparable de la lecture spirituelle de l’Écriture ».
4) « Toute vérité ou expression de la révélation et de la foi doit être vue à la lumière
des autres et par rapport à elles, pour qu’il soit possible de la comprendre
correctement et qu’elle reste ouverte à une compréhension ultime et plus profonde
».
Suggestions pour l’étude personnelle.
Livres et articles en espagnol :
- J.M. SANCHEZ CARO, « Herméneutica bíblica y metodología exegética », en AA.VV ;
Introduccíon al estudio de la Biblia. 2 . Biblia y Palabra de Dios. VD 199O,331-341.
Pour approfondir le principe herméneutique «la lecture dans l’Esprit ».
- P. Grech, Herméneutica en : AA.VV, Nuevo Diccionario de Teologia biblica, Ed.
Paulinas, Nos VI (la hermenéutica protestante) y VII (El racionalismo). Qui désire
mieux connaître l’herméneutique protestante et celle du rationalisme, peut lire cet
article.
- R. Marlé, « Herméneutica y Escritura », en : Latourelle - O’Collins, Problemas y
perspectivas de teologia fondamental, Salamanque 1982, 105-129. Pour mieux saisir
le rôle de l’herméneutique dans l’Écriture.
Autoévaluation du chapitre 7
Méthodes d'interprétation biblique
Travail écrit.
- Chercher un passage du genre apocalyptique dans l’Évangile de Matthieu.
Questionnaire personnel.
1. En quoi consiste et à quoi sert une méthode exégétique ?
2. En quoi consiste la méthode diachronique ?
3. Quels sont et en quoi consistent les genres littéraires de la Bible ?
4. Comment la critique historique doit-elle se faire ?
5. En quoi consiste la méthode synchronique ?
Points de réflexion.
1. Expliquer, en développant, le genre diachronique.
2. Comment le genre synchronique s’applique-t-il à la Bible ?
A retenir.
1. « Toutes les méthodes sont bonnes et profitables si elles respectent la lettre et
l’esprit du texte scripturaire ».
2. « Chaque méthode apporte sa contribution spécifique à la compréhension de
l’Écriture et elles conduisent toutes à un enracinement de plus en plus grand de la foi
des croyants ».
3. « Dès l’origine même des Évangiles canoniques on n’a pas hésité à croire et à
affirmer que s’y exprime l’histoire de Jésus »
.
Suggestions pour l’étude personnelle.
Livres en espagnol
- W. Stenger, Los metodos de la exégesisbiblica, Herder 1990 pp. 284-301. Lisez et
suivez avec attention l’analyse que W. Stenger fait de l’arbre généalogique de Jésus
selon Saint Matthieu (Mt 1, 1-25).
- J. Caba, De los Evangilios al Jesus historico. BAC 1971 pp. 176-184. Étudiez la
technique de la symétrie de saint Matthieu
- R. Latourelle Milagros de Jesus y teologia del milagro, Ed Suigueme. Réfléchissez sur
la critique historique qu’il donne de la guérison du paralytique de Capharnaüm (Mc
2, 1-12 )
Autoévaluation du chapitre 8
L'actualisation biblique
Travail écrit.
- Essayez de faire une actualisation spirituelle du texte de saint Paul. 1 Co 13, 1-13.
Questionnaire personnel.
1. Que signifie « actualiser » l’Écriture Sainte ?
2. Expliquez quelques-unes des conditions pour l’actualisation.
3. Que signifie « actualisation théologique » ?
4. Qu’est-ce que l’actualisation pastorale ?
5. Comment fait-on l’actualisation spirituelle ?
Points de réflexion.
1. Quelles sont les conditions de l’actualisation de l’Écriture Sainte ?
2. En quoi consiste « la lectiodivina » ?
A retenir.
1. « La liturgie chrétienne est l’actualisation de l’histoire du salut par l’intermédiaire
des rites et de la Parole ».
2. « Les paroles de la Bible sont comme une semence qui ne révèle son sens que si
nous la faisons tomber dans la terre de notre vie ».
3. « La finalité de l’actualisation pastorale consiste à comprendre la Parole de Dieu
dans l’aujourd’hui de l’humanité »
4. « L’homme se comprend mieux lui-même en comprenant l’Écriture. »
5. « Par la « lectiodivina » Dieu ne cesse de transformer notre vie chrétienne et notre
tâche en bien pour l’Église et les hommes. »
Suggestions pour l’étude personnelle.
- Dans votre missel analysez avec attention l’actualisation liturgique élaborée dans
les textes du XXII° Dimanche du temps ordinaire, cycle A.
- Lisez et méditez l’actualisation pastorale que le Pape Jean-Paul II fait de la
conversation du Christ avec le jeune homme (Mc 10, 17-22 ) dans sa lettre
apostolique, à l’occasion de l’Année Internationale de la Jeunesse, en 1985.
- Réfléchissez sur l’actualisation spirituelle de la parabole du fils prodigue, faite par le
P. Martial Maciel dans les « Psaumes de mes jours», chapitre XII, psaume n° 8.