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CHAPITRE III – MATERIEL ET METHODES
S’il est vrai que les macrophytes sont, plus ou moins, faciles à identifier à l’œil nu, à
l’exception de certains bryophytes, il est cependant peu aisé de trouver la méthode
d’étude adéquate, en fonction des conditions du milieu et de la problématique
envisagée; Guinochet (1973) a démontré la difficulté d’échantillonnage et de
représentativité d’une surface floristiquement homogène. Par ailleurs, on peut
s’interroger sur la pertinence de cette notion d’homogénéité dans le cas des cours
d’eau.
Deux niveaux d’approche sont à envisager : l’étude stationnelle et le choix des
stations.
Etude stationnelle
Après d’autres comme Corre (1970), Jensen (1977) a adapté la méthode du
transect pour avoir une bonne estimation des espèces caractéristiques d’un plan
d’eau en fonction du gradient de distance au rivage et de profondeur.
En travaillant sur le lac d’Annecy, Dubois et al. (1984) ont repris et adapté la
méthode de Jensen.
La méthode des points-contacts, appliquée initialement aux écosystèmes terrestres,
notamment aux prairies (Long, 1958 ; Daget et Poissonet, 1971) ou aux landes
(Forgeard et Touffet, 1979), a été reprise et modifiée par Haury (1982, 1985) pour
l’étude des macrophytes dans les cours d’eau.
La méthode des placettes permanentes a été utilisée par Wright et al. (1981) pour
cartographier les secteurs prospectés, puis par Haury (1982).
Choix des stations d’étude
Le protocole « Milieux et végétaux fixés » (M.E.V.) (Léglize et al., 1990), initialement
prévu pour une surveillance des proliférations végétales puis défini pour identifier des
phytocénoses représentatives, a été repris par Haury et al. (1998) pour une première
caractérisation des phytocénoses macrophytiques françaises.
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Ainsi il est apparu nécessaire d’adapter les protocoles en fonction des objectifs de ce
travail et des conditions particulières du milieu méditerranéen.
1. Mise au point d’une unité d’étude
L’absence de méthodes standardisées pour l’étude spécifique des communautés
macrophytiques a donc exigé de définir une stratégie d’échantillonnage et d’analyse
des stations appropriée aux cours d’eau méditerranéens.
La définition de l’unité d’échantillonnage se pose pour dresser les inventaires
floristiques. Le choix de travailler sur des secteurs aussi homogènes que possible
d’un point de vue hydrodynamique (profondeur, vitesse du courant), a été privilégié
afin de pouvoir analyser de manière comparative la variabilité des phytocénoses des
cours d’eau méditerranéens. Le problème essentiel a résidé dans le choix du milieu
et de la taille du secteur à analyser. Les sites privilégiés ont été ceux dans lesquels
le recouvrement végétal est le plus significatif du double point de vue qualitatif et
quantitatif.
Deux protocoles ont été testés tels que celui des transects (largeur = 1 m), distants
de 50 m et divisés en quadrats de 1 m de côté et celui de la méthode des points-
contacts. Ces méthodes d’échantillonnage s’adaptent mal aux cours d’eau
méditerranéens du fait du caractère épars de la végétation et de l’hétérogénéité des
herbiers. Du point de vue de leur composition floristique, beaucoup d’informations
semblent perdues.
Aussi avons nous mis en place une méthode qu’on a nommée méthode d’aire
significative d’étude des macrophytes en petit cours d’eau méditerranéens. Elle
permet de régler, à la fois, le problème de l’espacement des herbiers sur les cours
d’eau et celui de leur hétérogénéité. Ainsi la surface de 120 m2 minimum a été
choisie comme unité significative d’étude. Cette surface a été retenue en fonction de
nos observations sur le terrain. Chaque station a donc été découpée en mailles de
4m2 au sein desquelles l’intégralité de la flore a été inventoriée et le pourcentage de
recouvrement des espèces évalué.
Pour s’assurer qu’aucune information n’est perdue, une prospection avec évaluation
du pourcentage de recouvrement et récolte des espèces, a été étendue à une
longueur de 50 puis de 100 m, selon le protocole de la norme IBMR (AFNOR 2003).
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En outre, pour chaque station, une marge d’une largeur de 0.5 m, a été prospectée
le long des deux berges. Les données ainsi recueillies sont ajoutées à celles
obtenues pour le lit du cours d’eau pour fournir un inventaire floristique total.
L‘inventaire des macrophytes, établi pour chaque station, porte sur une longueur
linéaire de 100 m.
Pour délimiter la surface de l’unité d’étude (longueur, largeur), un décamètre est
tendu à partir d’un repère permanent et fixe sur l’une des deux rives, vers la rive
opposée perpendiculairement à l’axe amont-aval du chenal de la rivière. La largeur
ainsi déterminée, le même décamètre est déroulé à partir du repère permanent, déjà
fixé sur l’une des deux rives, vers l’aval, dans le sens de l’écoulement du cours d’eau
et donc parallèlement à l’axe amont aval du chenal de la rivière. La longueur et la
largeur étant ainsi évaluées, la surface du secteur d’étude est fixée dans ces limites.
Cette surface (120 m2 environ) est divisée en mailles carrées de 4 m2 en tendant et
fixant, d’un côté à l’autre du quadrilatère, des ficelles, tous les deux mètres. Pour
plus de précision, les côtés de chaque maille sont marqués par des points distants
de 0.5 m. Les sommets du quadrilatère sont soutenus par quatre piquets en fer haut
de 1.20 m qu’on enfonce dans le sédiment au niveau des deux berges (2 piquets par
berge). De chaque côté des berges, une cellule de 0.5 m de large qui couvre
chacune des deux rives exondées sur toute la longueur du secteur d’étude est prise
en considération durant l’étude (Figure 12).
2. Analyse des paramètres de l’écosystème
L’étude des compartiments, abiotiques et biotiques, est réalisée à l’échelle de la
station qui couvre une aire d’environ 130 m2 (+/- 10 m2), surface hétérogène mais
représentative du cours d’eau.
2.1. Paramètres abiotiques
Quelle que soit l’échelle d’étude, les paramètres abiotiques jouent un rôle essentiel
dans la définition de l’habitat. Ainsi, la profondeur, la vitesse du courant, la
granulométrie des fonds, la température, la lumière et les composantes physico-
chimiques de l’eau ont été analysés pour chaque unité d’étude.
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Figure 12. Dispositif utilisé pour l’évaluation du pourcentage de recouvrement des macrophytes. (a) présentation schématique du découpage en quadrats, (b) vue générale d’une station découpée, (c) vue d’un quadrat.
Mesures réalisées sur le terrain
2.1.1. Profondeur de la rivière
(a)
(b) (c)
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Les profondeurs sont mesurées au milieu de chaque maille de l’unité d’étude, avec
une tige graduée ; elles sont exprimées en centimètres. Ces relevés permettent de
tracer la bathymétrie générale du lit.
2.1.2. Vitesse du courant
Le débit, la morphologie et la pente du lit déterminent directement la vitesse du
courant, paramètre essentiel dans la répartition des macrophytes. La vitesse joue
aussi un rôle majeur dans le fonctionnement, la structuration, la sélection et la
modification des substrats (Butcher 1933).
Les vitesses du courant sont, comme la profondeur, mesurées au milieu de chaque
maille de l’unité d’étude, à l’aide d’un courantomètre électromagnétique Flow-Mate,
modèle 2000 portable. Pour chaque maille seulement deux mesures de vitesses sont
retenues du fait de la faible profondeur des différents cours d’eau: une en surface et
une autre à 5 cm du fond.
L’échelle de Berg (1948) est utilisée comme référence pour qualifier les vitesses du
courant :
- courant très lent : v < 10 cm.s-1.
- courant lent : 10< v < 25 cm.s-1.
- courant modéré : 25 < v < 50 cm.s-1.
- courant rapide : v > 50 cm.s-1.
2.1.3. Granulométrie des fonds
La granulométrie des fonds est une résultante de la vitesse du courant, de la
profondeur et de la nature géologique du bassin versant. Un pourcentage
approximatif des substrats apparents est estimé, in situ, pour chaque unité.
On admet cinq classes de taille selon Cailleux (1954) : la taille des blocs est
supérieure à 20 cm, celle des cailloux et des galets, comprise entre 2 et 20 cm, celle
des graviers, entre 0.2 et 2 cm, celle de sables, entre 0.2 et 0.02 cm et celle des
limons et vases, inférieure à 0.02 cm. On considère que les galets ont la même taille
que les cailloux mais leur forme est arrondie et lisse.
2.1.4. Lumière
La lumière est un facteur déterminant dans le développement des macrophytes. Elle
contrôle ainsi le cycle de développement des différentes composantes biotiques du
milieu à savoir l’épilithon, le phyto-plancton, le macrobenthos ainsi que certains
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paramètres de l’habitat piscicole, comme la température et l’oxygène dissous (via la
photosynthèse) (Haury, 1991). La luminosité est modulée en fonction de la présence,
de l’absence et du type de couvert végétal de la ripisylve.
Dans les cours d’eau prospectés, la lumière pénètre complètement dans les couches
d’eau de faible épaisseur, c’est la raison pour laquelle une estimation visuelle est
réalisée pour donner une idée des degrés de l’ensoleillement de chaque station
selon trois niveaux d’ensoleillement :
- faible : pour les secteurs ombragés par une canopée dense et fermée qui couvre le
cours d’eau.
- moyen : pour les secteurs dégagés avec une canopée moyenne réduisant
partiellement l’éclairement.
- fort : pour les secteurs dégagés (absence totale de canopée) et totalement
ensoleillés.
2.1.5. Température, oxygène dissous et conductivité
La température (°C), la concentration en oxygène dissous (mg.l-1) et la
« conductivité » (µS.cm.-1) sont mesurées avec un analyseur multisonde VTW.
La température, comme la lumière, conditionne par ses variations l’activité
physiologique des organismes vivants et plus particulièrement les mécanismes
photosynthétiques.
L’oxygène dissous est un élément indispensable à la respiration des être vivants.
Son absence entraîne des réactions de fermentation et la mort par asphyxie des
organismes. La quantité d’oxygène dissous dans l’eau résulte de la balance entre les
apports en oxygène dissous liés à l’activité photosynthétique des végétaux
aquatiques et aux échanges de surface avec l’oxygène de l’air d’une part, et la
consommation d’oxygène nécessaire à la respiration, aux réactions biochimiques et
chimiques pour dégrader la matière organique, d’autre part. Les rejets polluants
entraînent, le plus souvent, un déficit en oxygène.
La conductivité permet d’évaluer la minéralisation totale du milieu. Son augmentation
peut être liée au lessivage du substrat de nature géologique différente; ici elle résulte
d’une pollution d’origine anthropique.
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Les échantillons d’eau, destinés à l’analyse des éléments chimiques sont prélevés à
10 cm de la surface, au centre du chenal, étiquetés, aussitôt traités (filtrés, acidifiés
ou formolés) et conservés au frais et à l’obscurité.
Analyses réalisées au laboratoire
2.1.6. Les échantillons d’eau
L’analyse de 11 éléments physico-chimiques a été réalisée au laboratoire :
- le pH est mesuré à l’aide d’un pH mètre Métrohm équipé d’une sonde au calomel
(KCl) saturée (précision 0,05).
Le pH renseigne sur le degré d’acidification des eaux. Il est régulé par le système
CO2/ bicarbonate/carbonates. Il varie en fonction du substrat géologique, des apports
exogènes provenant des activités humaines mais aussi selon des mécanismes
physiologiques tels que l’activité photosynthétique des végétaux. Ainsi pendant les
périodes de fort ensoleillement, les végétaux consomment le CO2 dissous dans l’eau
puis décomposent les bicarbonates pour s’approvisionner en CO2 ce qui provoque
une élévation du pH ; au cours de la nuit se produit la réaction inverse (Prins et
Elzenga, 1989).
En milieu basique, les métaux sont précipités ce qui permet leur détoxification dans
les eaux dures. En revanche, la toxicité de l’ammoniac (NH3) est exacerbée en milieu
alcalin car il s’y trouve sous forme non dissociée, alors qu’à pH bas, il est sous la
forme ionisée NH4+, utilisable par les végétaux comme source d’azote (Rolland et
Trémolières, 1995).
- l’oxydabilité exprimée en mg d’O2.l-1, ou dosage de la quantité d’oxygène
consommée par les matières organiques dissoutes, a été mesurée par
manganimétrie à froid, en milieu acide (M.O.D.F.).
- l’alcalinité (en mg HCO3-.l-1) est évaluée par dosage volumétrique à l’acide
chlorhydrique, en présence d’un indicateur coloré (rouge de méthyle + vert de
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bromocrésol), à un pH de 4,5. Elle permet la détermination des concentrations en
bicarbonates.
- le calcium (en mg Ca2+. l-1) est dosé par complexométrie à l’EDTA ;
l’indicateur utilisé est la murexide.
- le magnésium (en mg Mg2+. l-1) est évalué en effectuant la différence entre la
valeur de la concentration du [Ca] + [Mg], dosée à l’EDTA, en présence
d’ériochrome noir T, et la teneur en Ca.
- les chlorures (en mg Cl-. l-1) sont dosés par la méthode au nitrate mercurique
(méthode de Schales).
- les sulfates (en mg SO4-.l-1): Il s’agit d’un dosage gravimétrique par précipitation
des sulfates par le chlorure de baryum (Rodier, 1984).
Dans les rivières prospectées, l’origine des sulfates peut être, soit d’origine
industrielle, soit issue de l’activité agricole. Généralement les organismes ont besoin
de sulfates, mais un excès de cet élément peut limiter la richesse spécifique et la
production biologique. Par ailleurs, dans un milieu pauvre en oxygène, les bactéries
transforment les sulfates en sulfures ou en hydrogène sulfuré qui sont des composés
toxiques.
Les substances azotées sont dosées sur Technicon (autoanalyseur) :
L’azote est présent dans l’eau sous forme de gaz (N2), d’anions ou de cations (NO3-,
NO2-, NH4+) et de divers composés organiques. Les végétaux assimilent directement
l’azote sous forme d’ions nitrate (NO3-) et ammonium (NH4+).
La présence dans l’eau de quantités importantes de ces deux composés azotés, plus
précisément des ions ammonium et nitrate, indique une contamination par des rejets
d’origine anthropique qu’elle soit d’origine domestique, agricole ou industrielle
(Toureille-Vercier, 1992). Ainsi le dosage des substances azotées traduit le statut ou
le stade trophique de l’eau. Une carence en ces éléments caractérise un milieu
oligotrophe, une quantité moyenne, un milieu mésotrophe alors qu’un excès définit
un milieu eutrophe.
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- les nitrites (en mg NO2-. l-1) sont dosés par diazotation de la sulfanilamide en
milieu acide et sa réaction avec la N.Naphtyl-éthylènediamine. Ceci donne un
complexe coloré pourpre, analysé au spectrophotomètre, à la longueur d’onde de
543 nm (Rodier, 1984).
- Les nitrates (en mg NO3-.l-1) sont dosés par réduction des nitrates en nitrites sur
une colonne Cadmium – Cuivre.
L’ion nitrate est la forme la plus commune et la plus stable dans les eaux bien
oxygénées. Il est peu toxique pour les macrophytes, un minimum écophysiologique
de l’ordre de 0.1 mg.l-1 est nécessaire pour la croissance végétale (Westlake 1975,
Carbiener et al., 1990).
- l’azote ammoniacal (en mg NH4+.l-1) est dosé par la méthode dite « au bleu
d’indophénol », en présence d’un catalyseur, le nitrate de sodium. L’ion NH4+ réagit
avec le chlore et le salicylate, en milieu basique, en donnant une coloration bleue.
L’azote ammoniacal est le produit principal d’excrétion des animaux aquatiques ; il
provient également de la décomposition de la matière organique par les bactéries et
les champignons.
L’ion ammonium est rapidement réabsorbé par les organismes vivants ou transformé
en nitrates. Il est présent en faible quantité dans les eaux bien oxygénées (Lacroix,
1991). Lorsqu’il est en excès, il agit comme un toxique très actif vis-à-vis de certaines
plantes et de certains animaux, notamment en milieu neutre et basique (Carbiener et
Herrscher, 1989 ; Dendène et al., 1993 ; Rolland et Trémolières, 1995).
- Les orthophosphates dissous (en mg PO43-.l-1) sont dosés d’après la méthode
de Deniges et Atkins, après filtration de l’échantillon sur filtre Millipore (0,45 µm). En
milieu acide, les orthophosphates forment avec le molybdate d’ammonium un
complexe phosphomolybdique. La réduction de ce complexe par les chlorures
stanneux provoque une coloration bleue dont l’intensité est analysée au
spectrophotomètre.
Comme pour les composés azotés, le dosage des orthophosphates traduit le statut
trophique de l’eau.
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Les orthophosphates proviennent progressivement de la minéralisation du
phosphore par les micro-organismes et sont relativement rares sur terre et dans la
matière vivante. On trouve 0.2 à 1.8 % de P total dans les plantes aquatiques en
fonction du niveau trophique de l’eau (Weiss-Schmitt et Trémolières, 1993).
Actuellement la principale source des composés organiques phosphorés se trouve
dans les lessives phosphatées, les eaux usées et les engrais.
- La DBO5 (en mg d’O2.l-1) traduit la quantité d’oxygène dissous consommée dans le
milieu naturel par les micro-organismes aérobies pour assurer la décomposition, par
oxydation, des matières organiques contenues dans l’eau, et ce, pendant 5 jours, à
20 °C (méthode de Winkler).
- Les teneurs en matières en suspension (M.E.S.) exprimées en mg.l-1 sont
quantifiées pour chaque station de prélèvements, parallèlement aux relevés de
végétation aquatique. Pour l’analyse des teneurs en M.E.S, 1,5 litre d’eau est
collecté dans une bouteille en plastique. Au laboratoire, 1 litre d’eau est filtré sur un
filtre Whatman GF/C (0,45 µm) prépesé, puis séché dans une étuve à 105°C,
pendant 24 heures, avant d’être, de nouveau pesé. Le filtre est ensuite passé au four
à moufle (550°C pendant 2 heures) pour déterminer, par simple calcul de différence,
la part des matières organiques (M.E.S.org.) et la part des matières minérales
(M.E.S.mn.) contenues dans l’eau.
2.2. Paramètres biotiques
Dans les écosystèmes aquatiques l’épilithon, le phytoplancton et les macrophytes
représentent les trois grands groupes producteurs de matière organique (Wetzel,
1975 ; Westlake et al., 1980).
Pour réaliser un suivi des différentes communautés macrophytiques, des
observations et des prélèvements sont effectués sur chaque station. La prise en
compte des autres composantes biotiques du milieu, à savoir les communautés
d’invertébrés benthiques et les microalgues épilithiques et en dérive a été réalisée à
partir de prélèvements stationnels d’échantillons de ces différentes communautés.
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2.2.1. Les macrophytes
L’analyse de la flore, à chaque campagne, avec la quantification spécifique des
recouvrements macrophytiques au niveau des quadrats permet l’étude de la
dynamique spatio-temporelle du peuplement macrophytique en termes de
biodiversité et d’abondance.
Pour chaque campagne, un inventaire stationnel de toutes les espèces est dressé.
Au niveau de chaque maille, les espèces qui ne posent pas de problème
d’identification sont déterminées sur place. Pour les espèces non identifiables sur le
terrain, du fait de la nécessité d’observation des critères microscopiques pour mener
à bien cette démarche, des codes symboliques sont attribués afin d’évaluer
visuellement, avec le minimum d’erreur, leur % de recouvrement. La détermination
de certaines espèces difficiles à identifier in situ, appartenant surtout aux bryophytes
et aux macroalgues est réalisée, ultérieurement, au laboratoire.
La vérification et la détermination des phanérogames et des bryophytes ont été
réalisées par Le Dr. J.P. Hébrard Jean-Pierre et le Pr J. HAURY. La nomenclature
utilisée se réfère aux ouvrages suivants :
- Flora Europaea (1964, 1968, 1972, 1976, 1980), pour les phanérogames ;
- Grolle et Long (2000), pour les hépatiques ;
- Corley et al. (1981) et Corley et Crundwell (1991), pour les mousses.
La vérification et la détermination des macroalgues ont été réalisées par Le Pr. A.
CAZAUBON. Il faut mentionner qu’à l’exception de quelques rares algues comme les
characées (après une première identification des espèces présentes) et de quelques
Rhodophytes comme Hildenbrandia rivularis, il est impossible d’identifier, à l’œil nu
ou à la loupe, les macroalgues. Ainsi les algues filamenteuses qui présentent des
gammes de variations de couleurs très étendues, y compris au sein de la même
espèce (dues à l’âge, à l’état physiologique), se trouvent fréquemment en mélange.
Si un examen microscopique n’est pas effectué, le risque est important d’en omettre,
et donc de faire des erreurs, en termes de richesse spécifique et de recouvrement.
La méthode de recouvrement, appliquée dans cette étude, prend en considération
les espèces (ou groupes d’espèces) présentes dans les mailles de 4 m2 des
différentes stations des six cours d’eau. Les pourcentages de recouvrement des
macrophytes sont évalués (0 à 100 %) pour les différents taxons répertoriés, avec
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des intervalles d’estimation des valeurs de 5%. Les espèces présentant un
recouvrement très réduit (< à 5%) sont représentées par la valeur de 0,2%.
Les indications de la norme de l’ « Indice Biologique de Macrophytes en Rivière »
(I.B.M.R.) (AFNOR, 2003) ont été respectées au cours de l’étude, en vue d’une
application ultérieure de cet indice dans ce type de cours d’eau. Les prélèvements
destinés à l’application du protocole I.B.M.R. ont été réalisés à des périodes
significatives du cycle biologique des plantes aquatiques (mai et septembre 2003 ;
mars 2004).
2.2.2. L’épilithon
L’épilithon est un complexe composé de bactéries, d’algues, de protozoaires, de
détritus et de polysaccharides, qui recouvrent, en une mince pellicule, les substrats
du lit des rivières. Il joue un rôle important dans la transformation de l’énergie
primaire et des nutriments de l’écosystème (Lock et al. 1984).
La technique d’échantillonnage (Cazaubon, 1988 ; Aloi, 1990) consiste à prélever au
centre du chenal, cinq galets plats dont la taille est comprise entre 10 et 20 cm..
Au laboratoire, la surface du bioderme qui recouvre la face supérieure des galets est
grattée soigneusement avec un scalpel. Cet échantillon algal (100 cm2) est fixé avec
du formol neutre à 5%.
Quelques gouttes de l’échantillon préalablement homogénéisé sont déposées sur
des lamelles rondes de 18 mm de diamètre et grillées durant trois heures afin
d’éliminer toute la matière organique cellulaire qui peut masquer les caractéristiques
de l’identification du frustule de chaque espèce de diatomées (Chromophytes). Ces
préparations sont montées avec du Naphrax (résine naturelle de pin ayant un indice
de réfraction IR = 1,74). L’identification des diatomées est réalisée au microscope
optique (grossissement 100 à immersion) avec les Süβwasserflora de Krammer et
Lange-Bertalot (1986, 1988, 1991a et 1991b), les autres groupes à partir des flores
de Bourrelly (1966, 1968 et 1970) et de quelques autres flores spécifiques.
Les indications de la norme de l’Indice Biologique des Diatomés (I.B.D.) (AFNOR,
2000) ont été respectées au cours de l’étude afin d’évaluer la qualité de l’eau de ces
différents cours d’eau.
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2.2.3. Les macro-invertébrés
Une étude quantitative de la macrofaune benthique a été effectuée, par récolte
standardisée au filet Surber selon la méthode normalisée de « l’Indice Biologique
Global Normalisé » (IBGN) (AFNOR 1992) en vue de calculer l’IBGN pour évaluer la
qualité biologique des cours d’eau.
La faune recueillie est fixée, sur place, au formol. Le tri, la détermination et le
comptage des macro-invertébrés sont réalisés au laboratoire en se servant d’une
loupe. Suivant les recommandations du protocole IBGN, l’unité taxinomique retenue
est la famille à l’exception de quelques groupes faunistiques (définis au niveau de
l’embranchement ou de la classe). La note de l’indice est calculée à partir d’un
tableau d’analyse standard comprenant, en ordonnée les neufs groupes faunistiques
indicateurs (GI) et en abscisse, 14 classes de variétés taxinomiques (AFNOR, 1992).
Ce protocole I.B.G.N. a été appliqué sur les prélèvements effectués en mai et
septembre 2003 et en mars 2004.
3. Evaluation de la biomasse et de la production des macrophytes
Le développement des macrophytes dépend des caractéristiques de leur biotope
qu’il faut prendre en compte, notamment quand on évalue la biomasse
macrophytique du rhithral. Dans les cours d’eau prospectés, la couverture
macrophytique est très peu développée dans les secteurs initiaux du crénal. De ce
fait, elle n’a pas été étudiée en terme de biomasse dans ces secteurs de l’amont du
cours d’eau. En revanche le rhitral est très fortement colonisé avec des phénomènes
de prolifération, à certaines périodes de l’année. Dans ces secteurs les biomasses
végétales ont été évaluées au cours des campagnes de mai et septembre 2003 et en
mars 2004.
Pour l’évaluation de cette production primaire, le choix des dates retenues a pris en
considération les critères suivants :
- la période de transition entre le printemps et l’été qui correspond au début de la
période de la croissance active des macrophytes en mai;
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- la période de croissance maximale des macrophytes qui se situe dans cette
région au début du mois de septembre;
- la période de préparation à l’installation et à la croissance des macrophytes en
mars.
Le choix des stations et des dates de prélèvements est justifié par le fait qu’après un
suivi du % de recouvrement des macrophytes pendant 18 mois, on a remarqué
durant les périodes définies ci-dessus une variation importante du recouvrement
notamment au sein des stations de l’aval qui sont apparues comme les plus
perturbées. C’est pourquoi on a effectué trois campagnes pour l’étude de la
biomasse des macrophytes (essentiellement les phanérogames et les macroalgues)
dans ces secteurs qui présentent une grande hétérogénéité en fonction du temps et
des perturbations. Les bryophytes n’étant présents qu’au niveau d’une seule station
et avec un recouvrement très faible, ils n’ont pas été pris en compte dans l’évaluation
de la biomasse.
La méthode de prélèvement a consisté à appliquer, dans un premier temps, la
méthode de recouvrement sur des transects découpés en quadrats de 0.5 m de
côté. Trois transects sont ainsi définis pour chacune des stations en dehors de la
surface de 120 m2, définie plus haut, afin de préserver l’herbier d’origine, tenu ainsi à
l’écart de tout prélèvement de notre part, durant toute la période d’étude (Photos
13).
La surface de prélèvement ainsi définie, le recouvrement des macrophytes est
ensuite évalué, visuellement, dans cette surface ainsi que la granulométrie du
substrat; la vitesse du courant, l’oxygène dissous et la profondeur de l’eau sont
mesurés; puis le prélèvement des macrophytes est réalisé manuellement au niveau
de cinq quadrats. Les pertes sont soigneusement évitées au cours de l’opération
grâce à un filet placé à l’aval immédiat du quadrat choisi. En raison de la texture
souvent fine du substrat, les végétaux sont intégralement récoltés, aussitôt
grossièrement lavés dans l’eau de la rivière, puis égouttés avant d’être emballés
dans des sacs de polyéthylène étiquetés. De retour au laboratoire, ils sont aussitôt
stockés, pour une durée de 48 heures maximum dans une chambre froide afin
d’éviter toute dégradation.
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(a)
Photos 13. Vue des limites de l’aire d’échantillonnage et de la disposition des quadrats pour l’évaluation de la biomasse des macrophytes. (a) présentation schématique des transects utilisés pour la mesure et l’évaluation des différentes composantes du milieu; X désigne les quadrats où ont eu lieu les prélèvements de biomasse, (b) vue générale d’un transect découpé, (c) vue d’un quadrat avant prélèvement de la biomasse.
Les végétaux sont ensuite nettoyés minutieusement à l’eau courante. Ceci permet
d’enlever les restes de sédiments, de cailloux et d’animaux avant la pesée. D’après
(a)
(b) (c)
70
Jupp et Spencer (1977) le poids total de ces matériaux peut excéder celui des
végétaux. Après lavage, les végétaux sont séparés en sous-échantillons des
différentes espèces, puis posés dans des bacs en aluminium prépesés. Le poids sec
évalué sur une balance de précision après stabilisation du poids, est obtenu par
passage à l’étuve (70°C), pendant environ 4 jours. La biomasse est exprimée en
g.m-2 de matière sèche.
4. Cartographie
Pour cartographier la distribution des espèces au niveau de chaque station et
montrer la dynamique spatio-temporelle des macrophytes la méthode de
« cartographie thématique » a été utilisée (Haury, 1982 ; 1985). Elle consiste à
s’appuyer sur des relevés de recouvrement réalisés sur les quadrats déterminés,
chaque quadrat considéré comme tâche, est analysé séparément. Divers symboles
sont attribués selon l’importance des recouvrements de l’espèce cartographiée. Ces
symboles sont reportés sur un plan, carré ou rectangulaire, qui correspond à une
maquette réduite de la surface étudiée sur le terrain. Ce même plan est partagé en
sous-plans carrés qui représentent les quadrats présents sur le terrain (Figure 14).
La forme des plans et le nombre des sous-plans varient d’une station à une autre.
Les communautés de macrophytes présentant une grande diversité, il était difficile de
représenter l’ensemble des espèces de chaque groupe sur un même plan. La
cartographie a été réalisée en prenant en considération les espèces qui représentent
le recouvrement et les variations spatio-temporelles les plus importantes, une couleur
différente étant attribuée à chacune de ces espèces. Pour rendre ce travail moins
lourd, seules 9 à 10 présentations correspondant aux dates qui expliquent le mieux
l’évolution des communautés végétales ont été retenues.
71
Figure 14. Modèle d’une cartographie thématique réalisée sur une station donnée.
5. Traitement des données
5.1. Calculs d’indices
Différents types d’indices ont été utilisés pour évaluer, d’une part, la qualité trophique
de l’eau et, d’autre part, la structure de communautés.
5.1.1. Indice de qualité d’eau et indices biologiques
Afin d’évaluer et de comparer la réponse des différentes composantes abiotiques et
biotiques utilisées pour le diagnostic de la qualité trophique des cours d’eau, un
indice basé sur les données physico-chimiques de l’eau et trois indices basés sur
des données biotiques ont été appliqués. Il s’agit de :
Légende :
Absence de l’espèce
Recouvrement < 5%
5%< Recouvrement < 25%
25%< Recouvrement < 50%
50%< Recouvrement <75%
75%<Recouvrement < 90%
Recouvrement > 90%
Sens du courant
R.D. = Rive droite
R.G. = Rive gauche
R.D. R.G.
Surface exondée
Hydrophytes
Hélophytes
Hygrophytes
Espèces terrestres
Radier
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a- l’indice SEQ-EAU (1999).
b- l’« Indice Biologique Diatomées » (I.B.D.) (norme AFNOR, 2000).
c- l’« Indice Biologique Global Normalisé » (IBGN) (norme AFNOR, 1992).
d- l’Indice Biologique des Macrophytes en Rivière » (I.B.M.R.) (norme AFNOR,
2003).
5.1.2. Diversité spécifique et structure de communautés
Les indices de diversité ou de structure sont issus de la théorie de l’information
(Pielou, 1975). Leur but est d’étudier les communautés en les caractérisant par leur
diversité. D’après la littérature, ces indices servent pour formaliser la diversité du
monde vivant, des structures génomiques aux structures écosystémiques (Franc et
Gouyon, 1997).
A partir des relevés de végétation réalisés sur les différentes stations ont été
calculées :
- la richesse spécifique, ou nombre d’espèces rencontrées dans les relevés.
- la diversité grâce à l’utilisation de l’indice de Shannon, l’indice de Margalef et le
calcul d’Equitabilité associé. Ces indices ont été évalués à partir des formules
suivantes :
● Indice de Shannon : H = Σ Pi ln Pi (Pi = Abondance relative de l’espèce i)
(Shannon, 1948).
● Indice de Margalef: H = S-1 / ln N (S = nombre total d’espèces ; N =
nombre total d’individus de l’échantillon ou de la population étudiée)
(Margalef, 1958).
● Equitabilité : j = H / lnS (S = nombre de taxa ; H = indice de Shannon)
(Pielou, 1966).
5.1.3. Analyses multivariées
Des analyses multivariées ont été utilisées afin de synthétiser l’information contenue
dans les données sous forme de tableaux matriciels (individus x variables). Les
individus (en colonne) sont ici les tableaux des relevés réalisés au cours des
différentes campagnes. Les variables (en ligne) sont ici les paramètres mésologiques
73
(milieu physique), la qualité chimique de l’eau et les données de recouvrement
végétal.
L’Analyse en Composantes Principales (ACP) qui utilise des variables quantitatives,
permet d’évaluer la ressemblance entre les individus, et la liaison entre les variables,
et de les visualiser graphiquement dans l’espace. Les variables représentées avec
un fort coefficient de corrélation déterminent des axes principaux (portant la plus
grande variance des données) auxquels une signification écologique peut être
attribuée (Escofier et Pagès, 1998).
L’Analyse Factorielle des Correspondances (AFC) traite des tableaux de
contingence : L’individu (secteurs) décrits par des variables qualitatives (espèces,
classe de facteurs).
A partir de la distribution des individus et des variables, l’ordinateur calcule, pour
chaque couple de lignes ou de colonnes, une distance dite de Chi2. La
représentation plane correspond à la projection des éléments sur les plans
successifs formés par les axes factoriels les plus significatifs. Les résultats attendus
sont la mise en évidence de groupements d’espèces et d’ensembles de secteurs.
6. Dates des campagnes de prospections
Vingt et une campagnes de prélèvements ont été menées sur chaque station
accessible de mars 2002 à mars 2004. Dans la mesure du possible, le rythme des
campagnes est mensuel, d’avril à octobre, période qui inclut la phase de croissance,
la floraison et la dégénérescence d’un nombre important de végétaux. Les
campagnes sont bimestrielles durant la période qui correspond à la phase de latence
de la majorité des végétaux (de fin octobre à fin février) (Figure 15).
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Figure 15. Présentation détaillée des dates des différentes campagnes menées sur les différentes stations.
Printemps
avril
mai
juin
Hiver
janvier
mars
Automne
octobre
décembre
Hiver
juillet
août
septembre
Cadière St1C Raumartin StR Huveaune St1H Huveaune St2H Siagne St2S Frayère StFr
Cadière St2C Huveaune St3H Fauge StF Siagne St1S Siagne St3S
mai 2003
septembre 2003
mars 2004