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L'ARCHITECTURE
DU
TEMPLE DE SALOMON
ET LE CANTIQUE DES CANTIQUES
IMPRIMERIE
D. DUMOULIN ET G'S A PARIS
L'ARCHITECTURE
uu
TEMPLE DE SALOMON
I5T LB CANTIQUB DES CANTIQUES
Plusieurs motifs nous obligent relever, sur ce pointspcial, les ignorances d'un faux sage, de Renan, pu-blies dans la liante des Deux Mondes (n du 1er aot
1888). Ignorances o son entire mauvaise foi impliquele mensonge volontaire : talage de dclamations quivisent obscurcir, de sa part prcisment, les travaux
du prtendu obscurantisme . Ce n'est donc pas pourclairer un aveugle d'apostasie que nous prenons la
plume, mais, d'abord, pour montrer la voie aux espritsgars par lui. Nous nou
2 l/AKCIIITECTURE DU TEMPLE DE SALOMON
par leur profondo connaissance do toute l'antiquit etle gnie do leur exgse. C'est surtout dans l'ouvragedu second (Monographie du Temple de Salotnon, Hogcret Chcrnoviz, 1885), qui rsume et complte son devan-
cier, que nous puiserons les lments substantiels donos conclusions,
Nous la devons nos propres convictions, qui n'ont
pas seulement leur base sur de telles autorits, mais quireposent sur une tude personnelle, refaite et dve-
loppe en suivant ces guides, il est vrai, mais en nous
permettant de vrifier, de contrler, jusqu' la moindre,chacune des parties de leur enseignement. Go que nousen produirons sera donc le fruit d'une dmonstration
scientifiquement acquise nos yeux.Nous la devons enfin, pourquoi no pas le dire ?
plus d'uno thorie sduisante de l'archologie mo-
derne, ft-elle reprsente par des crivains croyantset catholiques. Thories dont l'origine, au moins sus-
pecte, remonte aux textes plus ou moins falsifis de
tel historien profane, cl dont l'effet est de jeter la con-
tradiction, suivie du discrdit, dans nos textes
sacrs.
1
Les donnes du Temple de Jrusalem nous sont
fournies, soit par les Livres historiques de la ttible,soit par la prophtie d'zchiel : plan du sanctuaire,indication des parvis et portiques dans les uns ; des-
cription explicite des deux enceintes de portiques, des
cours des parvis et du sanctuaire, dans la seconde.
L'ARCHITECTURE DU TEMPLE DE SALOMON 3
Or, ces deux sources de documents nous conserventles plans rels du Temple do Salomon, et do celui do
Zorobabcl, qui no put tre, par ordre divin, que la
reproduction architecturale du premier.Le plan du Temple fut inspir par Dieu au roi David.
Nous lisons dans le premier livre des Paralipomncs(ch. xxviu, v. 19) : Qmnia vnrant scripta manuDomini ad me, tous ces dtails m'ont t transmis,
indiqus par la main du Seigneur, aprs la descrip-tion mme, rsume, du Temple, que David laisse excuter par Salomon son fds : Ddit au te m David..,
descriptionem portivus et templi... (Iid.f v. 11). Do
plus, Salomon lui-mme, au livre de la Sagesse (ch. ix,v. 8), rapproche cet ordre donn par Dieu David decelui qui fut intim a Mose pour la construction duTabernacle : Dixisti me tvdi/icare templum... et.,,
allure^ similitudinem Tabernaculi sancti tui, quodproe*par asti ab initio.
La vision d'Kzchicl, atteste par le rcit sacr, maismise en suspicion d'autorit par divers critiques, nefut ni purement corporelle, ni seulement intellectuelle.
D'aprs le sentiment le plus commun des interprtes,ce fut une vision imaginaire, prsente au prophtedans un ravissement hors de ses sens : infaillible quant l'exactitude, celle du crayon divin ; irrprochabledans sa transmission immdiate l'esprit et au coeurdu voyant; l'amc de celui-ci fut comme le miroir o
put se rflchir sans trouble l'image du Temple, commela plaque mtallique o s'en gravrent, sans rsistanceni altration, tous les traits lumineux
\ I/ARCIUTECTURISDU TEMPLE DE SALOMON
Le sens mystique do cette vision n'exclut nullementson sens rel, pas plus que le second terme idal d'une
allgorie n'exclut le caractre ralisable du premier,Les plans circonstancis qu'elle renferme indiquent,
outre sa destination symbolique, une autre destination,l'excution mme du Temple.
D'aprs les Pres, et suivant la doctrine de saint
Paul, le Temple de Salomon figurait l'Kglisc en rap-port de symbolisme parfait. La seule utilit mystiquedes plans d'JSzchicl fut donc la reproduction, pierrepar pierre, coude par coude, de ce mme Temple,alors dtruit, dont il fallait conserver les dispositionset les plans la Synagogue et l'Kglisc.
L'obscurit de la vision d'zchicl est inhrente lanature de nos Saints Livres, pleins de mystres qu'unexercice laborieux et humble, sous l'autorit interpr-tative de l'glise, peut seul pntrer ; elle est communeaux prophties, naturelle aux descriptions architectu-rales par l'emploi de termes techniques dans un devisde trois mille ans d'existence, crit en une langue de
quatre mille; insuffisamment claire, ou mme accrue
par les Versions, dont aucune, mme notre Vulgale, chef-d'oeuvre pourtant de discrtion et d'rudition
humaine, dont aucune, disons-nous, ne sonda, pourles rsoudre, toutes les difficults des plans d'Ezchicl.
Le Prophte, enfin, dut viser cette obscurit; car son
regard embrassait la fois la Synagogue prsente et
l'glise future. Les promesses faites l'une restaient
en partie subordonnes la fidlit d'Isral, qui allaitdevenir le peuple prvaricateur; celles qui concer-
I/ARClUTKCTURE DU TEMPLE DE SALOMON 5
naicnt l'autre, renfermant surtout des biens spirituels,ne pouvaient tre comprises que de quelques mesd'lite.
Ces objections cartes, nous prouvons directementle caractre rel de ces mmes plans, au point do vuedo rarebiteelure.
Bien ne saurait tre plus formel que l'ordre intimau prophte : Fils de l'homme, regarde do tes yeux,coute de tes oreilles, et grave dans ton coeur tout ce
que je te montrerai, car tu as t conduit ici pour leconsidrer. Et tout ce que tu auras vu, tu l'annonceras la maison d'Isral. (Ezeh., ch. XL, V. 1.) Et plusloin : Fils de l'homme, montre la maison d'Isral le
Temple, et qu'ils soient confondus au souvenir de leurs
iniquits; qu'ils mesurent ses constructions... Tu leurmontreras la figure de la Maison, sa distribution et ses
plans... Tu les traceras de la main, et les exposeras leurs regards,.. (lbidn ch. XLIII, VV. 10 et II.)
Il en rsulte qu'Ezthiel eut faire quatre opra-tions importantes :
1 Comprendre et dchiffrer les plans qu'offrait son esprit la srie des visions ;
2 Les dchiffrer et se les rendre familiers au pointde se les approprier ;
3 S'en pntrer au point de pouvoir les reproduireen dessins voyants, ou en relief, pour frapper les
regards du peuple ;4 Les tudier assez profondment pour en tracer
les plans d'excution et toutes les lignes architectu-rales.
6 l/ARCHITECTURE DU TEMPLE DE SALOMOX
Or, si nous en jugeons par l'ide que se formaientles anciens de l'architecte, cultiv par des tudes mub
tiples et orn de toutes les sciences ( Vitruve, liv. 1*\ch. ier), juge et matre habile dans tous les arts...
philosophe en un mot (Platon, De rgna, De philos. ),ou le Sage par excellence (Isre, ch, m, v. I... 3),vers notamment dans l'histoire, celle des peupleset celle des arts, quel architecte ne dut pas tre
Kzehiel, pour entendre et retenir les explications sisuccinctes et si spciales de son cleste guide, les
mystres d'une telle construction! pour noter les
traits, tracer l'esquisse des lieux sacrs, et s'appro-prier dans l'ordre de l'excution, qu'il aura diriger,ces mmes plans! pour reproduire aux yeux du peuple,non les plans, indchiffrables au vulgaire et d'autres
qu'aux savants de l'art, mais une vue du Temple,dessin en perspective, chantillon en peinture, oumieux modle en relief! pour faire enfin le plan archi-
tectural, c'est--dire l'ensemble des plans, indispen-sables l'excution mme, des terrains, des mesures
gnrales, des diffrentes enceintes et des difices,avec leurs motifs et accessoires sparment achevs!
Kn vue d'une pareille tche, ce n'est pas trop d'attri-buer au Prophte-Architecte les mmes dons de sa-
gesse, d'intelligence et de science dpartis, soit auxouvriers de Mose levant le Tabernacle montr au
Sina, soit Salomon lui-mme ralisant les pres-
criptions inspires de son royal pre. D'autant que la
reconstruction du Temple n'exigeait pas moins de
gnie et de connaissances pour en diriger les travaux,
(/ARCHITECTUREDU TEMPLE DK SALOMON 7
que les monuments clbres de l'art dans les mmescontres orientales : difices existant la plupart au
temps de la Captivit, et auxquels personne n'oseraitrefuser l'initiative de la conception et la suite desolorts d'un matre d'oeuvre. Il est donc vrai qu'Kzchicldut tre un architecte, et de premier ordre, sans compterl'assistance divine de sa mission.
La mme conclusion s'impose, si nous rflchissons l'emploi qu'on dut faire de es plans au retour desJuifs de la Captivit. Car, pour entreprendre d'immenses
labeurs, tels que cette restauration du Sanctuaire, or-donne aussi par Cyrus, il ne suffisait pas des sou-venirs lointains de quelques vieillards, tmoins de la
gloire du vieux Temple : souvenirs prcieux pourtant,et soigneusement recueillis. Les descriptions laissesm livre des Hois, ou consignes aux Paralipomnes,dont l'auteur fut Ksdras, mais sans doute en abrvia-tion de documents plus anciens, tels que les prophtesGad et Nathan : autrement, comment admettre, par
exemple, les longues gnalogies des douze premierschapitres? ces descriptions taient incompltes etsommaires. Zorobabel fit donc tudier la clbre pro-phtie d'Ivzchiel, connue alors, universellement rpan-due alors, et qui renfermait les indications prcises et
techniques d'un projet de rdification. Aid de ces
secours, il mit la main son entreprise, sr d'lever,dans le Temple nouveau, moins la richesse et les orne-
ments, la vraie maison de Dieu dcrite David, enconformit avec les lois liturgiques et les prescrip-tions immuables du culte d'Isral.
8 L'ARCHITECTURE DU TEMPLE DE SALOMON
C'est dire que nous n'avons pas d'autre marche suivre nous-mme pour ressaisir le fil de ces devis du
Temple : complter, en les rapprochant et les compa-rant, partie par partie, les Hcits historiques et la Vision
prophtique, supplant la concision de ceux-l,
tmoignages contemporains, par le dtail circonstancide celle-ci, destine en remplir les lacunes. C'est ce
qu'ont fait les Pres Villalpand et Pailloux, dont nous
reproduisons plus loin [les travaux. L'expos prcdentdonne les bases de leur dmonstration, tendant tablirla ralit dos constructions mystrieuses du Temple,telles que les formulent nos critures.
Un dernier mot, pour rpondre une objection
spcieuse. La parole, disions-nous tout l'heure, est
inhabile reproduire un plan d'difice propre a tre
excut. Ds lors, sommes-nous surs de la traduire
aujourd'hui en plan rgulier? Pouvons-nous garantir la
ressemblance ?Ni la connaissance du Temple, exigeant des recher-
ches, des tudes multiples, des annes de labeurs et de
calculs, n'est dans l'ordre pratique, mme pour lecommun des rudits ; ni les plans, qui reprsentent la
physionomie et les dispositions gnrales du Templene sont eux-mmes d'un ordre essentiellement pratique.Un plan fait de mmoire ou sur des documents crits,tout en restant reconnaissablc et authentique, peut ne
pas tre susceptible de mise en oeuvre immdiate; ou
bien, srs de la ressemblance, nous ne le serions pas del'identit.
Ce qui explique dj comment le prtendu Temple
L'ARCHITECTUREDU TEMPLE DE SALOMON 9
d'IIrode, s'il et t une reconstruction complte, n'et
pas t le Temple de Zorobabcl : le plan manquait.Et pourquoi le troisime Temple rv par les Juifs, a
la fin des ges, ne saurait tre le Temple d'zchiel : le
plan fera dfaut.Nos lecteurs sont mme de se convaincre, par ces
premires notions, de la fatuit d'un autour qui a critles lignes suivantes : Les efforts des architectes
modernes, pour reconstruire le Temple de Jrusalem,
d'aprs les donnes des livres historiques, prises comme
exactes, ont chou et choueront toujours. Ces descrip-tions, faites de souvenir par des narrateurs trangers toute notion d'architecture, sont pleines d'impossi-bilits et de contradictions : pas un seul chiffre n'y est
juste..., etc. (Art. cit.)Nous allons maintenant prouver, malgr le ddain
facile de M. Kcnan, et appuy sur nos autorits magis-trales, que l'ensemble des chiffres des plans du Temple,aussi bien que leur dtail, prsente a l'exgse et la
science les caractres d'une irrfutable exactitude.Nous suivrons surtout la Monographie du Temple de
Salomon, dont l'auteur, le P. Xavier Pailloux, mort a
Lyon au commencement de 1887, deux ans aprs la
publication de son ouvrage, a laiss une mmoire bnie
pour son dvouement apostolique dans les missions des
bagnes, et pour les illustres services, trop peu connusencore et apprcis parmi nous, qu'il a rendus la
science sacre, matresse de toutes les autres l
Dj nous avons observ que l'unit des plans de
l'ancien et du nouveau Temple s'imposait au point de
10 L'ARCHITECTUREDU TEMPLE DE SALOMON
vue du symbolisme, que reconnat la tradition toutentire. Ajoutons que le but avou d'exciter les Isralitesau regret du pass oblige l'interprte ne voir, dans les
descriptions d'Ezchiel, que l'image, la photographieidentique du Temple mme bti par Salomon, le mmeencore c'est de l'histoire qui fut dtruit par lesChaldcns. En outre, Dieu, qui inspira l'un et l'autre,n'tant pas sujet la variabilit des desseins humains,et ayant rsolu de produire, dans un Temple dtermin,l'exemplaire, le type parfait de son Eglise qui est son
Temple spirituel sur la terre et aux cieux, tel que l'in-
dique mme l'Apocalypse de saint Jean (ch. xi, vv. 1-2;ch. xv, v. 5 ; ch. xxi, vv. 9-27 ), avait dot ce mme Templeet tous ses plans des accomplissements et des harmonies
multiples qui convenaient son caractre figuratif. D'ol'inutilit d'un changement quelconque dans le modle
qu'il en retrace aux yeux du Prophte. Du reste, la
comparaison raisonnc des chiffres amne l'accord
intgral des mesures salomonicnncs et des mesures
postrieurement dveloppes.On no s'tonnera donc pas, encore une fois, que nous
runissions en principe les deux questions du Temple deSalomon et du Temple d'Ezchicl, et que nouspuissionsdfier l'adversaire de nous rfuter en dtruisant nos
preuves; c'est lui, et non pas nous, qui se donne le tort,
par ignorance et dloyaut surtout, de diviser ce qui neforme qu'un seul et unique problme.
En abordant les constructions salomonicnncs, il est reconnatre que M. Renan prcise bien tin point de
topographie l'emplacement de la ville de David, qui
L'ARCHITECTUREDU TEMPLE DE SALOMOK 11
occupait la partie sud du prolongement du Moria, jus-qu'aux pentes d'Ophel. C'est la colline orientale, citadelle
jadis des Jbusens, dont la ville, comprenant la colline
occidentale, et la valle qui les spare, s'tendit succes-sivement au Nord et au Nord-Ouest, jusqu' l'enceintede Manasss, et plus tard, au Nord-Est, celle d'Hrode.Aussi bien cette prcision est-elle emprunte au docteurv. Ricss, chanoine de Rottcmbourg, qui l'tablit l'ar-ticle Zion de sa Gographie btlif/uc (llcrdcr). Il s'ensuit
(pic l'emplacement mme des tombeaux des rois de Judaet de la maison de David, et celui du palais de Salomon,est bien fix au sud de l'aire du Temple, le second occu-
pant l'endroit o s'lve actuellement la mosque Kl-
Aksa, l'ancienne glise de la Prsentation de la ViergeMarie.
Nous rencontrons d'abord le palais du Roi et celuide la Reine. Rien que secondaires dans notre sujet, nous
pouvons en fournir des plans approximatifs.Leur architecture dpend entirement de celle du
Temple ; leurs mesures et la distribution de leurs dificessont comme un extrait de ses plans, qui les ont fournies.Selon les indications du P. Pailloux, et d'aprs lestextes (Rois, III, ch. vu, vv. 1-11) compars notammentau livre d'Ksther, ils taient forms de quatre ailes de
portiques, composes chacune de trois portiques carrs
mitoyens (celles de l'Ist et de l'Ouest fermes d'un mur),et relies angle droit par trois autres portiques con-tinus formant faade (les uns et les autres trois
tages). Au milieu s'ouvrait le porche, symtrique aux
porches sud du Temple. Longueur, cinq cents cou-
12 I/ARCHITECTURE DU TEMPLE DE SALOMON
des, comme les portiques d'Isrnl; celle des portiquess'chappant l'intrieur, cent trente environ. Largeurde ces mmes portiques, et des autres qui les relient
(ainsi que la longueur de ces derniers), gale celle des
portiques du Temple. Extrieurement, et se ratta-chant au mur de faade jusqu' l'alignement du murdes Gentils, une enceinte semblable ce dernier por-tique couronnait, l'Orient, au Midi et l'Occident, les
grands murs des soubassements prolongs de ce ct.
L'espace entre ce mur et les portiques tait rservaux jardins. L'ensemble mesurait six cents coudesde long, sur deux cent cinquante de large. Les quinze colonnes rptes en trois tages sont les entre-colonncments des traves, compts de chaque ct du
portique d'entre, en laissant part ce portique.La destination des difices, distribus de l'Ouest
l'Est, serait la suivante : Arsenal du bois du Liban et
archives; salles royales et tribunal; demeure et appar-tements du roi, salles des rceptions solennelles et du
trne; palais de la reine et des pouses du roi; sallesde la reine et de sa cour; habitation des femmes et des
vierges.L'auteur fantaisiste qui n'attribue Salomon que des
btisses frivoles et disproportionnes avec les res-sources de la nation convient plus loin que l'onexcuta de grands travaux publics, l'enceinte con-tinue de la Ville de David et In maison royale, qu'il
compare aux pnlnis de Karnak et de Mdinct-boti.Nous reviendrons sur le style des difices.
Le plan qu'il donne des portiques offrirait une suite
L'ARCHITECTUREDU TEMPLE DE SALOMON 13
de propyles et de salles, dont la disposition nous paratarbitraire, car ni l'espace rserv aux constructions
royales, ni le style surtout, en harmonie avec celui du
Temple lui-mme, ne s'y prteraient. 11 les entoured'une enceinte de trois ranges de pierres de taille,surmontes de poutrelles de cdre, formant proba-blement une sorte d'auvent . Que le lecteur s'en sou-vienne, a Ce grand ensemble de btiments , appelencore plus loin les grandes constructions de Jrusa-lem , se compltait, suivant Renan, par la foret duLiban dont nous avons parl, et dont il fait la des-
cription suivante : Cour rectangulaire, presque sans
fentres, avec une seule porte, en pierres colossales.
Quatre rangs de colonnes de cdres, dresses parall-lement au mur, dessinaient de chaque ct quatrealles. Ce promenoir, recouvert d'un plancher, servaitde support trois tages de chambres (chiffreemprunt Josphe, comme les quinze chambres chaque tage,en tout quarante-cinq) qui montaient le long du mur,Les fentres taient encadres de linteaux de cdre.
Ht l'audacieux littrateur, qui s'tonne de la singularitde ces btiments bizarres , produit de son imaginationsauf quelques chiffres intercals, croit racheter l'incoh-rence de son narr architectural, s'il a eu la prtentiond'en offrir un, parla comparaison de la demeure royaled'un prince, le plus glorieux et le plus magnifiquede l'histoire, avec les constructions plus ou moins
anciennes en usage a dans l'Asie Mineure , ou
peut-tre, dirons-nous, avec les misrables habitationsdes campagnes de la Syrie, plafonnes en torchis ml
14 L'ARCHITECTUREDU TEMPLE DE SALOMON
de troncs de peupliers! Qu'on juge du reste par ce dbut 1Il donne, il est vrai, pour typo*parfait de cegenre, maissans tude suffisante l'appui, la grande eicinte'd?H-bron (salomoniennc, d'aprs M. de Saulcy), armature
extrieure, peut-tre, d'un palais analogue celui do
Salomon, construite d'appentis accols des murs colos-
saux, un seul bloc formant toute leur paisseur, laysur toutes ses faces. Les bases en pierres de huit oudix coudes, soit : le chiffre est de la Bible. Les assises
suprieures en pierres... toutes gales, ranges selonle modo que les Grecs appelaient isodme : sens gnraldes textes encore, mais l'difice reste mal dfini.
11 lui manque donc un fil conducteur pour sortir duddale de ces portiques royaux et de ceux du Temple,auxquels nous arrivons. 11lui manque la mesure exactedes dimensions des uns et des autres, pour fixer leurdistribution.
Encore le vaste dveloppement des portiques du
Temple appellc-t-il son tour une vaste tendue r-serve aux btiments sacrs, que tous les textesmontrent excluant ou subordonnant la maison du roi :en particulier, les reproches faits aux rois impiesd'avoir juxtapos leurs demeures et leurs tombeauxaux parois du Temple (Ezch., ch. XLII, VV. 7 et 8).
L'espace mme qui s'offre sur le Moria ne permet pasde supposer que le sanctuaire constitut, a lui tout seul,le Temple, contre les tmoignages les plus explicitesdes critures, interprts parles plus clbres exgtescatholiques (Cornlius a Lapide Mnochius, Tirinus,
iMariana). Aussi le Temple fut-il tout mitre chose
L'ARCHITECTUREDU TEMPLE DE SALOMON 15
qu'une chapelle do palais , et les prtres n'taient
pas davantage de simples fonctionnaires du roi .C'est fouler aux pieds l'histoire que nier le caractrevraiment et uniquement national du Temple ! Snlomon
lui-mme, dans la prire touchante conserve aux Para-
lipomnes ( II Par., ch. vi ), ne pouvait mieux traduire lecri et le voeu de tout son peuple ddiant l'ternelcette demeure, plus encore afin d'y trouver un accueilfavorable ses supplications, que pour offrir une habi-tation terrestre Celui dont la majest surpasse les cicuxdes cicux. Cela est tellement rel, que le grand parvisportait le nom, conserv par les commentateurs juifs,de Grand Parvis du Secours, atrium magnum auoeilii :car c'tait lu que tout Isral venait implorer le secoursdivin.
II
Venons donc aux mesures. C'est la plus sobre partiede l'expos de Ucnan. 11y en aplusicurs raisons. ^
Dans une autre diatribe, parue il y a quelques annes,l'auteur prenait a partie notre prophte t/chicl, posen rformateur du culte sacr d'Isral, inaugurant sa
liturgie, avec l'ordre de son pontificat et ses annales
dfinitives. M. Renan, toujours a propos du Temple, se
moquait fort des tours et dtours du kalam pris
pour une mesure d'architecte, et signifiant plus modes-
tement la plume, calamus, de l'crivain. Ses gots
littraires, ou ses rpugnances artistiques firent tort, en
l'occurrence, la rflexion de l'orientaliste ; il lui advint
de montrer sa ngligence d'une langue qu'il paraissait
16 L'ARCHITECTUREDU TEMPLE DE SALOMON
citer, et de transformer, la place du terme hbreu, unmol latin en orthographe grecque, car ce n'est pas kalam qu'emploie la Bible, mais quanch middah,la canne mesurer ! Tels sont les procds de sa cri-
tique si firc. Il va sans dire que M. Henan n'a jamais suce qu'tait cette canne, ou cette mesure, traduite en bon
franais par calamc . Il a simplement trait de hautefantaisie ce qu'il tait plus ardu et dangereux poursa fausse thse d'lucider.
Pour nous, l'valuation de cette mesure est capitale.On le comprendra par notre description du Temple,cho de nos matres, de l'cole entire des docteurs de
l'glise, et mme des talmudistes.Le Temple de Jrusalem tait form de quatre corps
de btiments spars par trois parvis carrs concen-
triques, reposant sur un mle galement carr de sou-bassements gigantesques : d'aprs Josphe, de quatrecents coudes de haut, depuis les racines du Moria et le
Cdron, et de huit cents coudes de ct; soit, avecle noyau de roches de la montagne, quatre fois le cubede la grande pyramide.
Couronnant ces fondations normes, au-dessus du solactuel et des sous-sols du Temple ( s'levant eux-mmesd'au moins quatre-vingt-dix coudes, /ornicea superforniveS) rpte la Mischnah), premier portique trois
rangs de colonnes, sans tages, sauf aux portes et aux
tourelles ( cinq chaque lace et aux angles), et premierparvis des Gentils. Ce portique fut semblable, moins la
grandeur, aux autres 4, son existence est unanimementreconnue : Josphe et les rabbins (ces derniers pour le
L'ARCHITECTUREDU TEMPLE DE SALOMON 17
Temple cl'IIroclc, identique a celui de Zorobabel) le
signalent, malgr les confusions du premier dans ses
plans du Temple. Cependant le texte inspir fait tout au
plus allusion, en quelques passages, cette partie,rpute profane, de la maison de Dieu. Les blocs du
Ji/nian, cots au calame (ou canne) cubique, audbut de la vision prophtique, lui appartiendraient,dfinissant ainsi l'aire idale du sol du sanctuaire et detoutes les colonnes; car le calame, nous le verrons, ren-fermait six coudes et un quart, ou vingt-cinq quarts decoude.
Tels furent les terrassements et le dgagement en
perspective du Temple quant ses bases.Puis s'lvent, sur un niveau suprieur de sept
marches, ou quarts de coude, trente coudes dedistance du premier portique, les portiques d'Isral,hauts de soixante coudes nu moins, en trois tages dechambres et de colonnes. Au milieu de chaque faadeorientale, septentrionale et mridionale, s'ouvre un
porche qui donne accs, travers le mur et le portique,aux parvis rservs d'Isral t immense carr de cinqcents coudes a chaque face, inscrit lui-mme dans ledouble carr plus extrieur des Gentils.
Ces portiques ont cinquante coudes de largeur t di-mension qu'ils imposent, sinon au portique du dehors,
large de trente, du moins la projection de ses louishors de l'enceinte, tours correspondant leurs proprespro/jugnetcuta* Descoursintrieurcs, au nombre desept,de cent coudes carres chacune, les sparent d'uhcseconde enceinte de portiques, au. mme niveau et de
/ \* t : \
18 L'ARCHITECTUREDU TEMPLE DE SALOMON
mme hauteur, qui de ses trois ailes, Nord, Est et Sud,enserre la cour carre centrale des prtres, plus levede huit marches (quarts de coude) elle-mme, o sedresse l'autel. Ce sont les portiques rservs aux chantressacrs et aux prtres en fonctions, avec leurs colonnades jour le long de la barrire qui clture celle cour sacre.
Larges aussi de cinquante coudes, avec des porchessymtriques aux premiers, ils sont relis au grand por-tique d'Isral par des portiques de jonction semblables,
s'chappant deux deux sur chaque ct de leurs anglesou portiques carrs, joints de la sorte trois ou quatreales de portiques.
Ce que les Livres saints appellent l'Kctficc spar, oule Temple proprement dit, occupe partiellement le
prolongement de cent cinquante coudes, laiss libre
par la suppression de l'aile occidentale des prtres,de la cour de cent coudes de leur parvis : soit une
longueur de cent cinquante coudes sur cent de
large, en comprenant la marge de vingt coudes, quile spare des portiques et de la barrire de ce parvisintrieur.
L se dresse le sanctuaire, sur un niveau plus levde huit quarts de coude (et deux marches encore pourle seuil sacr). Ses dimensions, les mmes que celles dulivre des Kois dans Kzchicl, moins les contreforts
pour la largeur [(cinq coudes), et ajoutant ici en lon-
gueur le Vestibule et les appendices (plus les paule*ments de la tour, soixante-dix coudes de large),offrent un paralllogramme de cent coudes sur cin-
quante (l'chelle mme du parvis du tabernacle, notons*
L'ARCHITECTURE DU TEMPLE DE SALOMON 19
le en passant). La hauteur est formellement cote cent vingt coudes pour la tour frontale dans les
Paralipomncs (Liv. II, ch. m, v. 1) : chiffre confirm
par Josphe, lequel tmoigne aussi de l'lvation totalede quatre-vingt-dix coudes au-dessus du Saint et duSaint des saints. Car il y avait deux compartiments : le
Temple mme ou les deux pices sacres que nousvenons de nommer : trente coudes sous plafond, s'le*vaut davantage pour former vote et sparation de
l'espace sacr; et la salle du Cnacle, d'gales mesures,qui avec sa toiture en terrasse doublait le chiffre de
l'tage infrieur.Le plan du sanctuaire tait le suivant : vestibule
large de vingt coudes ( largeur de l'Kdifice moins les
murs), long de dix, haut de cent vingt avec les deux
tages du Cnacle et de la tour. Le Saint, quarante cou-des sur vingt, spar du vestibule par un mur de six
coudes, celui du Temple, et Une porte gale la pre-mire en hauteur; un second mur de deux coudes,aussi dans oeuvre, le sparant du Saint des saints, quin'offre, lui, que vingt coudes en tous sens. Enfin,
l'extrieur du gros mur, entre celui-ci et le mur de cinqcoudes enveloppant l'Edifice, flanqu des latraux ou
piliers faisant fonction de contreforts et trois fois demurs de refend, sur cinq coudes de large et vingt de
haut tout autour du Saint et du Saint des saints, trois
tages de chambres, dites Lieu de la prire, pour les
dvotions des pitres. C'est ainsi que s'explique le bis
triginta tria (zch., ch. XLI, V. 0), car les entre-
colonncmcnts permettent de compter onze de ces latc-
20 L'AKCUITUCTURISDU TMPL1SDE SALOMON
raux sur chaque ct du pourtour de PKdifco. ( Para-
phrase chaldaque : Undcna per ovdinem.)Une autre difficult de chiffres, qui aurait interrompu
notre description, est celle des trente gazophylaecs
compts par l'ange au sortir du porche oriental (eh. XL,v. 17), et confondus avec les chambres prcdentes parJoscphc. Ce sont autant de traves des portiques entou-rant la cour Orientale, carr de cents coudes comme
toutes les autres; soit sept chaque faade o s'ou-
vrent les porches d'Isral et des Prtres, et huit chaqueretour des portiques de jonction qui relient les deux
enceintes des grands portiques. Les soixante coudesde froutes (ch. XL, V. 14) sont, en hauteur, la triplecolonnade des' tages des portiques, qui avec leurs
planchers et terrasses s'levaient, selon nous, quatre-vingts coudes (environ, et quatre-vingt-quinze, hau-
teur du Cnacle, aux tours des angles, aux jonctionsdes portiques, et tut dessus de leurs porches. Les mu-
railles et les portes d'Kcbatanc, au Livre de Judith ( Vul-
gate et Septante), peuvent donner une ide de la faadede celles du Temple de Salomon.
Toutes ces mesures sont essentiellement inscrites,soit dans les relevs des livres historiques, soit dans le
devis prophtique. Mais qui nous en donnera la clef?Nous l'avons dit : le plan inspir lui-mme.
Ht
La premire pierre mesure par la canne de l'angeoilre un calame en hauteur et en largeur ( fzch., ch. XL,
L'AHCIUTECTUREDU TEMPLE DE SALOMON 21
v. 6), et, d'aprs les Gotlhes lleghts et Compfulensis, uncalame en longueur. Aussitt aprs, le mur (jambagesde la porte) extrieur du porche oriental, et son murintrieur du ct des parvis d'Isral, un calame d'pais-seur. Les trois loges de portiers, droite et gauche,offrent aussi un calame carr en dimensions, sparespar des piliers l'entour, vestittla pergyrnm (c'estainsi que l'hbreu ulani se traduit couramment : saint
Jrme, Quwst. hehi\ in Gcn.) de cinq coudes, parcequ'ils sont vids sur deux faces, en fait, d'un calame
toujours comme stylobates, et de vingt-cinq coudes dehauteur. Cette srie de loges, soit symtrie oblige, soitmotifs d'entrc-colonncment, soit total des mesures, est
termine, de chaque ct, par deux demi-massifs d'un
demi-ealame, relis aux murs. Il s'ensuit que le calameest la* mesure de prcision employe comme unit.D'autre part, ce porche compte cinquante coudes de
long. \l\\ largeur, il en a vingt-cinq, d'un toit des cham-
bres ou loges a l'autre toit, hors-d'oeuvre : soit un ca-
lame de loges d'un ct, huit coudes, largeur du pas-sage ou porche entre les colonnes frontales appliquesaux huits piliers, dix coudes avec ces colonnes (exac-tement, deux calmes), et un autre calame de loges.
Or, le calame est spcifi, quant sa valeur, dans
notre texte (Kzch., eh. XL, V. 5, et ch. xu, v. 8) : cettevaleur est de six coudes, dans la coude qui mesure un
tophach en plus. Tel est le sens do l'original, des
Septante, de la Paraphrase chaldaquc, reproduit pourles mesures de l'autel d'airain (ch. XLVIII, V. 13), mais
plus clairement traduit alors par saint Jrme. Notre Vul-
22 I/ARCIUTECTUUKDU TGMPMi DK SALOMON
gte, ici, sans lo contredire, laisse ce sens indtermin :se.r cubitis et pal/no, Yillalpand et le P. Pailloux tradui-sent : six coudes cl un palme ou quart de coude
(un quart au lieu d'un sixime, palme vrai ), et dmon-
trent, comme nous le ferons aprs eux, que tel est lechiffre du calamedu Temple. Ce chiffre est exact, maisla traduction ne l'est pas, avouons-Ic franchement.
Il s'agit, en effet, on le reconnat, de la coudesacre primitive, meiisara prima (11 Paralip., ch. m.v. l), mosaque et babylonienne (0W,525), ^alc dureste la coude persique ou royale, sauf le fractionne-ment en doigts, trente au lieu de vingt-quatre. Mais le
tophach yterme chalden (Gcsenius), employ aussi dansl'xode ( ch. xxv, v. 25 ; ch. XXXVIII,v. 12 ) et dans Kz-chiel (ch, XL, V. 13), n'est pas identique tcphavhmot hbreu, qui partout est l'quivalent, palme grecou persique, de quatre doigts (cf. Bois III, ch. vu, v. 2(i;Par. II, ch. iv, v. 5; Jr., ch. m, v. 2), bien (picconfondu, dans la version vulgate de l'Kxode, aux pas-sages cits, avec tophach (Gesen.) Que si tophach peuttre traduit par palme, babylonien de cinq doigts, ou
persique de quatre doigts (mais non grec ou commun),les passages de l'Kxode s'expliquent dans la Vulgate :mais alors, d'aprs l'habitude de l'Kcriturc, qu'ontsuivie nos matres, la fraction, trois doigts, est exprimepar le nombre entier le plus proche. Car pour lamesure de la coude sacre, employ avec cette
prcision mtrique tophach ne peut signifier qu'unexcdent conventionnel : celui de la coude sacre surla coude commune, qui est de trois doigts, ou d'un
1/AltCIUTRCTimti DU TlttJPLK DIS SA.OMON 23
dixime, d'aprs Hrodote (1, 178), L'historien parle,il est vrai, en contemporain, de la coude royale, maisleur longueur concidait. Du reste, seuls trois doigtsbabyloniens fournissent un nombre entier pour le rap-port des deux talons de coude, pour celui du calamc
grec (commun), infrieur au calamc sacr de deux tiersde coude (Gesen.), et pour le rapport des stades ba-
byloniens ((|iiatrc cents coudes) au mille romain (d-riv du pied et de la coude grecque) : sept et demi
pour un, selon le Talmud ( Huxt. /.c.r,, 2253 ; Lvy, Dt.
c/ia/(t,, II, 121), chifire s'accordant avec lespropoilionsquadruples de la parasange persique, trente stades
(lier., II, (i).Le calamc du texte sacr mesure donc six coudes
en principe; et puisque la somme des coudes a
obtenir, en longueur, est cinquante, nous aurons unreste gal deux, en divisant cinquante par six. Mais
l'unit de dimensions architecturales restant le ca-
lame, ce surplus doit tre distribu en appoint dechacun des huit calmes, d'autant que le plein des
murs et le vide des chambres imposent ncessairement
ce mme espace du calamc ou de ses multiples pour les
cntre-colonncmcnls et les massifs rgulateurs de toutes
les autres parties des difices. Donc, chacun des huit
calmes aura six coudes et un quart ; ce qui peut cire
exprim dans l'quation suivante :
(6x8) +*= 50; d'o : (C>x8.r) + ~W>0x^.
Consquences. La largeur se trouve fixe naturel-lement quatre calmes ou vingt-cinq coudes.
2 I/ARCIIITBCTVRE DU TEMPLE DE SALOMON
Ce porche oriental devient le modle oblig des deuxautres porches d'Isral, et des trois porches desPrlressemblablement et uniformment dcrits, en style d'ar-
chitecte, indiquant seulement la plupart des motifs
dj cots et dessins dans un membre symtrique :comme les diffrentes cours des parvis.
Bien plus, les porches faisant partie du systme des
portiques, dont ils sont l'amorce intermdiaire, l'pais-seur de leurs piliers et massifs de sparation, et l'espa-cement de leurs colonnes, une fois fixs, se reproduisentdans tout l'ensemble des portiques du Temple, sous
peine de dtruire l'quilibre lmentaire, et de violertoutes les rgles de l'art de btir. Hssayez cinquanteautres combinaisons des piliers et des colonnes, vouschouerez contre les difficults architecturales.
Partout, a chaque tage, au-dessus des portiques
trois alles, forms d'un mur, de deux ranges de
colonnes libres, et d'une range de piliers, les colonneslibres seront, d'axe en axe, la distance de deux
calmes; partout, lesjpiles qui supportent les tages
suprieurs, du ct des cours des parvis, et dans les
portiques carrs, seront spares par un calame. Les
contreforts latraux du Temple, notre avis, suivent lamme rgle, en correspondance des portiques, bien quele P. Pailloux hsite l'affirmer. Les corridors et les
pices divises par des colonnes auront deux calmes
de largeur comme l'entre du porche. Les escaliers
vis, pratiqus dans les blocs angulaires, ces pierres de huit ou dix coudes (Rois III, eh. vu) auront en
diamtre six coudes et un quart, soit leur axe un
1/ARCIJlTgGTUREDU TKMPLI?DE SAKOMON 25
demi-calamo do celui des colonnes ; nous pourrions le
dmontrer si nous entrions dans plus de dtails. Quantaux hauteurs, les mmes proportions seront suivies. Kn
sparation des tages, caissons des plafonds et plan-chers ensemble seront pais d'un calamc ; les chambres,a l'exemple des trois tages de cellules, s'levant lahauteur d'un calamc chacune, autour de l'Edifice spar,seront de mmo leves d'un ou de plusieurs calmes,suivant l'ordre des diffrents tages des btimentssacrs. Partout c'est l'unit, l'harmonie mme.
Unit et harmonie divines, assurment, car les plansfurent et restrent divins: scripta manu Domini,.. in
visio/tibus Dei\ mais aussi, unit et harmonie accessibles la science humaine, puisque nous sommes mmed'en vrifier tous les calculs, et de justifier, par leur
application, jusqu'au dernier des chiffres de nos saintesEcritures. La clef du Temple, en un mot, est dans celte
description du porche oriental, et le secret de ces me-
sures redoutables dans la transformation de l'unit
sexagsimale en chiffres dcimaux.
lt disons-le, comme nous le pensons avec une convic-
tion profonde, le principe originel detoutcslcs sciences
exactes, gomctrales et mathmatiques, depuis l'anti-
quit jusqu' nos temps, git dans cette drivation du
systme dcimal ou mtrique (metrios, dit Hrodote
de la coude usuelle), par voie de fractionnement et de
rduction du systme sexagsimal, restant subordonn
dans la cration, l'ordre naturel et cosmique, et dans
l'histoire son devancier. L est spcialement l'ex-
plication de toute l'architecture ancienne, comme
26 l/ARCIlITtiCTURK DU TKMIM.K1)15SAIOMON
du Temple de Salomon, son incomparable chef-d'oeuvre.
Que nous dit M. Henan des mesures du Temple? L'difice, en forme de rectangle, occupait l'espaceactuel de la mosque d'Omar, De tous les crtts, iltait serr par d'autres constructions, C'cst-a-dire
qu'il rduit la maison de Dieu au seul difice du sanc-
tuaire, sans rechercher ou sans dire si ces autresconstructions ne taisaient pas, elles aussi, partie int-
grante du Temple. Observons encore que- le Pamirou grand march, faubourg de Jrusalem, la Vorstadl ,dit le docteur v. Hiess, occupait prcisment les abordsdu Temple, l'ouest du portique des Gentils. Au lieude n'tre que trs peu en rapport avec la ville ,comme Henan l'affirme, le Temple y touchait.
Il numerc le vestibule form par les antes, l'archi-
trave, et deux grosses colonnes d'airain...; l'paisseur du
mtal tait de quatre doigts...; l'architrave... posaitdessus ; sans s'expliquer davantage sur les chiffres
que lui fournissaient l'un et l'autre rcit biblique, lar-
geur ou hauteur : c'est sommaire et peu risqu. De mme
pour la cclla ou hcal . Le dbit* avait une
hauteur, ce semble, moindre que celle du hcal,...clair... on ne sait comment,... peut-tre pas du
tout ... Ni les kroubs , ni les trois tages de
chambres, destines aux prtres, entourant, dans
presque toute sa hauteur, le mur extrieur de la cella
ne sont relevs en chiffres. Mais attendez, lecteur ! Tout cet ensemble tait entour, au moins de trois
cts, d'une cour peu large, dont le pourtour c'est
r/ARClUTKCTUUKDU TKMI'MSDE SALOMOX 27
la fameuse enceinte- du palais royal tait marqupar trois rangs superposs do gros blocs quarris, sur
lesquels posait un auvent on poutrelles de cdre, procurant do l'ombre l'intrieur.
C'est ainsi que l'acadmicien joyeux interprte lestrois ordres de pierre taille, avec un ordre de bois decdre travaill, pour chaque ordre de pierres (Kois III,cb. m, v. 12, et (tairas, I, cb. vi, v. 1), tnumrs pourtous les portiques du Temple, soit de Salomon, soit de
Zorobabel. Le simple bons sens du traducteur, outreles tmoignages de Josphc, des rabbins, de la saine
exgse catholique, suffit faire entendre ces ordres de
pierres et de bois de plusieurs tages surajouts, avecle plancher mtvnianum (Jtalras, III, vi, 25, document
historique dans la question) propre a chacun d'eux.Pareille enceinte de trois rangs de pierres superposes,non ! jamais [ce phnomne ne parut aux regards, pasplus que son couronnement de cdres en auvent !auvent plus expos in pluie que propre ombragerl'intrieur de cette cour par une disposition originale!
Notons encore, l'adresse de M. l'abb Vigourouxsurtout, copi par Hcnan, l'impossibilit d'lever, pourles soixante coudes (tout au moins) des portiques, etles cent vingt de la tour du Temple, une constructionou un pylne compos de trois fondations de pierres, etle reste en planches de cdre. D'aprs les tmoignagesd'Ksdras(Liv. I, oh. vi, vv. 3-4) et de Josphc (Antiq., xi,
108), qui le portent trois, ce seul ordre de bois, avecles trois ordres de pierre, interprt par l'historien juif,indique des tages avec leurs planchers respectifs. Ht
28 L'ARCHITECTUREDU TEMPLE DE SALOMON
comment en faire de simples palissades, ou cloisons dobois, pour un tel difice ?
Cette cour peu largo , et ainsi abrite contre les
intempries, fut avec le temps rserve aux prtresqui y avaient leurs demeures , Gomment le temps fit-il de cette marge do vingt coudes autour du sanctuaireun lieu d'habitation rserv aux prtres ? Comment les
prtres et les lvites, cpii se succdaient chaque semaine
par mille ou douze cents, avec leurs familles, soit aumoins trente-cinq mille personnes en comptant lesautres serviteurs du Temple (tmoinsles listes volumi-neuses de la tradition juive et les renseignements de la
liturgie consigns par elle), y trouvaient-ils place?M, Renan s'en inquite aussi peu que de la suffisance
d'une seconde cour qui se forma plus tard pour lesfidles , ainsi qu' un second portique extrieur.
Car, outre la singulire donne qui fait surgir ex ma-china cours et portiques, avec leurs amnagements,laisss d'ailleurs dans un vague prudent, commentrecevoir encore les multitudes, par dix mille et cinquantemille, qui remplissent lcTcmplc d'Isral aux jours de sessolennits? comment y installer toutes les institutions
religieuses, juridiques, administratives et politiquesmme de la nation? comment faire droit aux tmoi-
gnages de l'histoire, nous montrant et les immenses
approvisionnements du Temple, trsor de tous les
impts, comme des offrandes et des dmes du peuple
juif, et ses espaces ouverts la cit entire qui s'y
rfugie, avant le dernier sige, avec ses richesses, et
les armes en occupant les diverses parties, ou trou\;mt
I/AHCIIITUCTURKUV TKMl'M? DK SALOMOS 29
s'y drober aux vainqueurs par la fuite ? En ralit,M. Renan spare, pour le besoin do sa cause, le petitdifice que Ton mit pourtant sept ans a btir, il en
convient, et tout ce qui, l'entourant et faisant corps avec
lui, constituait vraiment le Temple, in portis vastrorum
Domini) est-il dit au rgne d'Ezchias, comme proposdu tabernacle mosaque.
C'est ainsi qu'on fait voir les impossibilits cl les contradictions des chiffres de la Bible, dont pasun seul n'est juste ,
On continue : La physionomie gnrale du Temple, au contraire,
apparat avec certitude. C'tait un temple gyptien de
moyennes dimensions... Plus haut, il avait dit : J-rusalem put rivaliser avec les villes gyptiennes et
phniciennes les plus brillantes... rien de trs ori-
ginal... l'Egypte donna les modles, Tyr... les tailleursde pierre, architectes, ornemanistes, fondeurs debronze... l'poque tait bonne. Un style, svre dansles ensembles, trs lgant dans les dtails, s'taitform en Phnicie, sous l'influence de l'art gyptien.Des murs lisses, trs soigns, en formaient l'Ame. Desrevtements de bois sculpt et dor, d'innombrables
appliques d'airain, une vigoureuse polychromie, deriches tentures donnaient ces constructions infinimentde grce et de vie... Ailleurs, propos de Tyr : L'le
se couvrait de constructions imites de l'Egypte... le
temple... de Mclkarth, comme son frre jumeau de J-
rusalem. De mme pour les ouvriers : l'lment phni-cien, selon Renan, dominait. Les colonnes, oeuvre
30 I/AKCHITECITUE DU TEMPLE DE SALOMON
suppose de Hiram, en tout cas lyrienne... c'uaientdes colonnes gyptiennes, du galbe qu'on trouve au Hn-messum . Il appelle le Saint, la cella gyptienne;le dbir est obscur comme dans les templesgyptiens . Il trouve dans les sculptures des Heursde lotus ; les t kroubs , l'poque de Salomon, taient des sphinx, plus tard... des monstres assyriens .
Nous n'avons pas craint la longueur de ces citations;encore moins sommes-nous embarrass pour rfuterles assertions systmatiquement fausses qu'elles ren-ferment.
IV
La question du style du Temple, qui se prsente ici,
appelle de notre part une double observation.Nous ne suhons, pas plus que le P. Pailloux, Villal-
pand, qui eut la faiblesse d'orner le Temple dans le
style grec et romain que lui suggraient Yitruve et l'gede la renaissance . Ce serait trancher contre toute
raison, vu l'antriorit de l'art salomonien, inspirateurde la Grce et des Plolmes, comme nous le dirons,un problme dont la rvlation nous a refus les notions
compltes et l'ide prcise. Ce que nous ont conservles critures, en efTct, suffit seulement nous montrerles diffrences des ornements sacrs d'avec les usagesde la gentilit, leur concordance avec tout le culte
prescrit Mose.Les mmes critures protestent, toutes leurs pages,
contre la thorie de l'imitation gyptienne, quant l'ide inspiratrice du Temple. La tradition rabbinique,
I/AKCIUTKCTURBDU TKMPLKDE SALCMOX 31
ici encore, leur fait cho. Demandez aux Juifs de tousles sicles de l'histoire, si leur Temple national, ce
Temple si exclusivement rserv aux observateurs do la
Loi, d'o sont loigns jamais les yeux et les pas des
gentils profanes, put tre impos quant aux plans, et
par suite ncessaire, quant la destination de culte,
par les adorateurs de Haal ? Leur rponse vous donnera
le plus formel dmenti. Car c'est prcisment de la
Phnicie, et jadis des peuplades de Chanaan, comme de
l'Kgypte, terre de la pantoltrie, qu'taient sorties les
pratiques abominables et les superstitions paennes,causes tant de fois des chtiments infligs Isral. Dieului avait dfendu toute alliance avec ces peuples, quil'entraneraient dans l'infidlit (Deut., eh. vu, vv. Mi).Le peuple, cependant, sacrifiait sur les hauts lieux,
l'poque o fut bti le Temple, et jusqu'au temps de la
captivit, du moins en exceptant les rgnes d'Lzchias
et de Josias, par exemple, qui dtruisirent les idoles
(Hois IV, ch. xviii, v. 4, et ch. xxxui, vv. 19-20); qu'enconclurez-vous? Que l'idoltrie resta, mme alors, l'ini-
quit d'Isral, trop souvent gar par ses princes, et parSalomon lui-mme au dclin de son rgne. Mais Dieu
ne se proposa-t-il pas expressment de ramener ce
peuple sa Loi sainte, l'observation de sa mission
providentielle : garder les promesses divines du Messie
et les annales sacres du monde, avec sa parole ter-
nelle, en se faisant lever au milieu d'eux une demeure
qui en ft le mmorial durable? N'est-ce pas ce qu'Ivz-chicl fut charg de lui rappeler dans l'exil, par ordre
d'en haut?
32 I/ARCIIITECTUIIB DU TEMPLE DE SAIOMON
A la suite de cette thorie toute rationaliste, noustrouvons celle des caractres prtendus de filiation oud'affinit entre les monuments de l'Kgypte et l'archi-tecture salomonienne.
C'est regret que nous rencontrons ici, dans les
rangs de nos adversaires, des crivains catholiques,mme de ceux qui ont sur d'autres points victorieu-sement rfut Henan cl les tenants de sa fausse science.Soit influence du principe mme de celte imitation
profane qu'ils ont subie, soit irrflexion et lgret, ilsn'ont pas compris, les uns, que dans une question toutentire du ressort de l'criture sainte les textes de laBible doivent passer les premiers; ils se sont laiss
imposer, les autres, avec les premiers, telle affirmationde leurs amis, orientalistes trs aventureux, incom-
ptents comme critiques d'une matire qu'ils n'enten-daient pas.
De plus, on a voulu trouver dans les crils de l'histo-rien Josphc, crits offrant plus d'une trace d'altration
par des mains hostiles la vrit et aux traditions reli-
gieuses, et d'ailleurs justement souponns de partialitpour certains matres, une description d'un nouveau
Temple bti par Hrodc. C'est celui que reproduitM. de Vogu (Temple de Jrusalem) ; et soit M. l'abb
Vigouroux (qui a peut-tre modifi son chapitre de
La Bible et les Dcouvertes modernes), soit le sophisteRenan, qui le leur emprunte sans mot dire, acceptentces donnes informes, dont la responsabilit, vrai
dire, remonte aussi, par l'Anglais Lightfoot, aux rveriesles plus invraisemblables de la Mischnah. Toutefois,
I/AHCIUT1SCTUHEDU TBMl'U DE SALOMON 33
M. Hcnan prend soin de ne donner aucun chiffre, nous
l'avons vu.Ces thories libres ont fait l'objet d'une rfutation en
rgle par l'auteur de la Monographie du Temple de
Salomon. Le P. Pailloux, epic nous suivrons en fidle
disciple, nous donne tous les arguments qui les d-
truisent de fond en comble. Dj, cependant, l'exposedes plans vritables du Temple, retracs nos lecteurs,leur permettrait, en regard des plans gyptiens, de pro-noncer o est la vrit : du ct qui affirme, ou du ct
qui nie toute ressemblance caractristique et indivi-
duelle entre ces modles. Nous devons le reprendre de
plus haut encore.
Hcnan va plus loin que la thse protestante de Spenceret de Marsham, qui fait Dieu lui-mme initiateur ou
dpendant de l'imitation des rites paens, car il ne tient
compte d'aucune injonction faite par Dieu pour l'difi-
cation de son Temple. iMais au fond, plagiaire selon
son habitude, il s'appuie sur cet emprunt fait aux templeset aux rites idoltriques, car il laisse driver de cette
origine soit la distribution, soit la dcoration compltedes difices. Nous rpondons.
Le type original du Temple fut la Jrusalem des
cieux, dont les plans, tracs avant la cration, s'ex-
cutent jusqu' la fin des temps par ses ouvriers, quisont les anges et les hommes. En eflet, dans l'ordre
logique, la fin prcde les moyens; et le Verbe de Dieu
eut pour but dans l'Incarnation de composer de tous
ses lus son glise, dont il se ferait, en outre de
son corps de chair, un autre corps, rel aussi, que
m I/ARGlIITKGTUnii DU TOJPLB K SALOMON
nous appelons son corps mystiquo, a l'imago et ressem-blance de son corps naturel qu'il appelle lui-mme un
Tcmplo : Solvite Templum hoc, Puisque son corpsnaturel fut un Temple, son corps mystiquo, ou son
Kglisc, dut tro un Temple aussi. Corps, nous sommes
prdestins en former les membres; Tcmplo, en troles pierres. Or, le Temple, comme le Tabcrnaclo, ne
pouvait tre que la figure de ce mmo corps, de ce mmo
Temple, que l'Egypte ne pouvait certes connatre!
Puisque nous avons parl du Tabernacle, notons celtecontradiction des partisans do l'imitation gyptienne :ils prtendent quo son modle fut emprunt l'Kgyptoaussi; mais, selon eux, le sanctuaire comprenant la le
pronaos, le naos et Padyton, avec une ceinture de
chambres, comment le Tabernacle n'oflre-t-il que deux
compartiments, le naosetl'adyton? Que s'ils modifientla formule, le Temple du Moria, son tour, no peutplus tro compar, d'aprs eux, aux temples de Mcsram.
La ressemblanco avec le temple gyptien, soit du
Tabernacle, soit du Temple, se rduit une ressemblance
gnrale do destination, non d'imitation. Un sanctuaireressemble tous les sanctuaires du monde. De mme
de l'Arche sacre d'alliance, par rapport la Barquegyptienne; de mmo du grand prtre, du rational
compar au pectoral gyptien (l'un emblme sacr, dou
par Dieu mme d'une vertu sacramentelle et proph-tique, en dpit des blasphmes de Renan : l'autre simpleinsigne funraire); de mme des sacrifices, de la tabledes pains de proposition : ressemblances gnriques et
diffrences spcifiques, comme tout ce qui est d'ordre
I/ARCMTECTURK DU T1MPM3DE SALOMON 35
universel. Lo sang des animaux inondait les autels cheztous les peuples*, d'autre part, Isral immolait ce quel'Egypte adorait; Jsral tenait pour immonde et ban-nissait do son culte comme une profanation ce queTKgypto immolait. De mme du chrubin gnsiaque,contrefait par le gnie aile des cultes antiques, soit en
Kgyptc, soit Babylone et a Chorsabad : tradition pri-mitive universelle sur les relations des existences imma-trielles avec cellcdc notre humanit; sa source bibliqueest reste pure, comme les symboles des animaux mys-trieux, dj contemporains du culte mosaque; mais les
coulements, varis l'infini, en furent troubles par le
paganisme. Ignorance, ici encore, c'est mauvaise foi.Une autre contradiction o tombent certains adeptes
de l'imitation gyptienne, c'est d'attribuer son in-fluence sur le Temple de Jrusalem deux causes qui se
neutralisent : d'une part, la ressemblance avec le Taber-
nacle, qui eut un plan gyptien; d'autre part, l'cole et
la main-d'oeuvre tyriennes, qui imposrent les rgles de
l'art de l'Kgypte : pas n'tait besoin de cette dernire,
puisque le plan s'imposait dj.Venons l'imitation matrielle des plans de l'Egypte
qu'on se serait propose Jrusalem.Nous l'avons montr : de certains usages communs,
soit naturels, soit issus d'une rvlation primitive, soit
mixtes ( telsque la circoncision, d'abord prcaution d'hy-gine, leve la dignit de sacrement lgal, comme
signe de l'alliance avec Dieu), on ne saurait conclure
lgitimement une imitation. On le peut bien moins s'il
s'agit du peuple juif, que Dieu spara formellement, sous
36 L'ARCHITECTUREDU TEMPLE DE SALOMOiN
des menaces terribles, des corruptions du polythisme,et qui d'ailleurs, par ses grands hommes, Joseph, Mose,David, Salomon, prouva qu'il tait capable de toutes lesinitiatives qu'on lui conteste; comme, depuis sa disper-sion, jamais ce peuple tte dure n'a fondu sa natio-nalit avec aucun autre peuple du monde.
11 faudrait donc, pour rsoudre notre question, con-natre et comparer les deux temples en totalit, attri-buer au temple modle ses caractres nationaux et
distinctifs, en dmontrer la reproduction exacte par le
Temple qu'on donne pour en tre l'imitation, s'assurerde l'antriorit du temple imit sur le temple imitateur.
Incontestables, ces conditions sont pourtant ngli-ges par plus d'un savant, M. de Saulcy, entre autres
(Art judaque)^ un des plus affirmatifs. Si l'on dit aveclui que le temple gyptien avait un pronaos plaqucontre le naos et double de la hauteur de ce dernier,nous rpondons qu'il n'existe pas un seul temple en
%yptc avec pylne formant sa faade propre : une ou
plusieurs cours les sparent.Si, avec M. de Vogtt, on prtend que les trois parties
principales, pylne, Saint et Saint des saints, et une qua-trime accessoire, la ceinture de chambres latrales, se
retrouvent dans les temples de Khons, Karnac, de
Louqsor, de Dendrah, auxquels on pourrait ajouterceux d'Edfou, d'bydos et de Karnac, nous prouvons,
par la seule comparaison des plans de ces temples, queles grands difices ont tous plus de deux compartiments,sans compter le vestibule; et les petits, un ou deux com-
partiments sans aucun vestibule ; que tel temple n'a qu'un
L'ARCHITECTUREDU TEMPLE DE SALOMON 37
sanctuaire, tel autre trois de front, et tel autre jusqu'sept. L o se rencontre la a ceinture de chambres,comme Dendrah, il n'y a ni pylne, ni vestibule; etces chambres ouvrent sur le sanctuaire, tandis que cellesdeSalomon n'offrent aucune communication avec lui.
Outre qu'il faudrait comparer sanctuaire sanctuaire,
parvis parvis, portique portique, ce compte, fouteconstruction religieuse, ou habitation honnte, ayantun vestibule, une pice commune, une cuisine et des
chambres, possderait excellemment les caractris-
tiques du temple gyptien !
Strabon, comparant le temple grec et le temple gyp-tien, dcrit ainsi ce dernier : Tmnos, enceinte
sacre,... avenue de sphinx ou Dromos,... plusieurspropyles portiques, une cour et le Naos ou temple, se
composant du pronaos ou salle hypostyle avec les
ptres ou ailes des murs qui l'entourent et se rattachentau scos ou sanctuaire; ce pronaos est souvent rptderrire le scos (flanqu lui-mme de quelqueschambres), comme l'opisthodome des Grecs. Ni py-lne plaqu contre le naos, ni vestibule propre celui-
ci, ni ceinture de chambres tout autour; exemple: le
temple de Khons ( Perrot et Chipiez, Histoire de l'artdans Vantiquits tome Ier, Egypte).
Que fut donc ce temple gyptien ? Chacun le sait :
panthon et mnagerie tout ensemble ; car la luzerne
et le boeuf, le serpent et l'ibis, le crocodile et le mo-
narque, dont volontiers il ne ferait qu'une bouche,
y avaient leurs autels. Or, tels dieux, tels temples
juge/ donc de \P convenance des difices auxquels ce
38 L'ARCHITECTUREDU TEMPLE DE SALOMON
culte traa leurs dispositions! Ce fut le culte avrde la bte, travestissement satanique et fastueux, maisinsens comme le gnie tomb du mal, du type im-
prim au monde par le Verbe en voie de revtirnotre humanit. Les prtendus emblmes de la divi-nit qu'on a cru y trouver n'avaient pour but quede la masquer. Le masque seul resta objet d'adora-
tion, et les temples ne durent gure aboutir qu' de
mystrieuses grottes ou de splendides tablcs, car le
temple revt le caractre de l'hte qu'on y adore.Confusion matrielle aussi, et excentricit, on peut
dire mathmatique, la plus dsobligeante. Les groupesimportants, entrepris sans plans d'ensemble, qu'ils'agisse de Karnac, de Dendrah, ou de Philoe, surles deux rives du Nil, n'offrent l'observateur qu'unenchevtrement d'difices dont la disposition, l'orien-
tation, l'alignement et les communications brisent avectoutes les lois de l'architecture ordonne et rgulire.L'alle de sphinx de Karnac est oblique l'axe du
groupe de Louqsor qu'elle rejoint t Karnac mme,onze temples se tournant le dos, entrecroisant leurs
colonnades; ailleurs, mme incohrence; ic tout au
gr des princes qui en firent partiellement commenceret continuer les travaux. D'ailleurs, le dfaut d'unitmorale en est peuttre la meilleure explication.
A Jrusalem, au contraire, cette unit morale res-
plendit et prside a l'unit matrielle. Au lieu d'unsanctuaire rlgu, l, loin des regards, l'extrmitd'un vaste champ de manoeuvres, Je dromos gyptien,srie opulente et grandiose seulement de pylnes, de
L'ARCHITECTUREDU TEMPLE DE SALOMON 39
cours, de portiques, de salles et d'oblisques, o les
cortges royaux entranent les foules ; c'est, ici, au-tour du point central de tous les btimens sacrs, del'autel des holocaustes, que conflue des quatre vents lamultitude des adorateurs. Ici encore, sous des portiquesnon moins somptueux, un peuple entier trouve une
place toute prte au milieu des parvis immenses o il
s'tablit, o il demeure, d'o il contemple avec respectles crmonies saintes et la gloire de Jhovah : imagedu ciel et du batique repos au sein de Dieu dans l'ter-nit. Le Temple est le centre de la vie religieuse pourtoute une nation qui prfre un jour pass dans les
parvis du Seigneur mille ans dans les palais desrois.
Ide plus spcialement divine el diamtralement oppo-se a celle de l'autre temple. Les peuples primitifs enaltrrent l'inspiration, qui donna naissance aux templesde l'humanit) comme la rvlation du sacrifice auxautels et aux cultes. Le type divin de la Jrusalem c-
leste, ils en furent les continuateurs, et presque toujoursles faussaires, l o Dieu ne maintint pas son inspira-tion, comme au Sina, comme au Moria, comme dans
l'Kglisc, comme au Ciel.
Ds le principe des choses, en eflet, ds le temps des
patriarches, le Verbe imprimait son image au monde,
y gravant sur la pierre la figure du corps qu'il devaitrevtir pour en faire la forme de son tglise. Aussi ta
gravitation concentrique, pour ainsi dire, des partiesdu Temple qu'il traa rcfltc-t-cllc l'organisation quasivitale d'un corps anime, comme l'me, dans l'homme,
40 L'ARCHITECTUREDU TEMPLE DE SALOMON
se rflchit sur le corps, dont l'organisme se conforme
elle, son principe d'unit, d'action et d'harmonie,tte de sa tte, coeur de son coeur, oeil de ses yeux, sens
de ses sens. Ainsi de l'organisation du Temple. Corps,chef et coeur du Christ, pierre angulaire, souverain
prtre et victime, cette image naissait et s'levait le
Temple, se dressait l'autel; les parvis destins au peupled'Isral, leurs sublimes portiques compltaient ces op-rations du sacerdoce, en vue du sacrifice, par le spectacleet la participation multiple de ce sacrifice et des gloiresdu Temple; et ce dveloppement naturel des membres
du Christ s'tendait extrieurement, par attraction et
bientt assimilation, jusqu'au parvis des Gentils.Nous pouvons d'ailleurs signaler des diffrences, au
lieu de ressemblances, entre les deux Temples.Ce sont, notamment, les murs d'enceinte : ici, en
briques crues ; l, forms du mole colossal des sou-
bassements, couronn, sur ses quatre faces gales, d'un
portique monumental trois ranges de colonnes ; les
portiques plusieurs tages sur le Moria, et plusieursalles entre les colonnades, sans salles hypostyles ;l'absence de propyles, de pylnes : simples baies ou*vertes dans l'paisseur d'un mur, sans appartementsni vestibule en Egypte, au contraire du vestibule vri-table donnant accs au sanctuaire, et flanqu de deux
colonnes, Jrusalem; les monolithes employs pourles fts de colonnes salomonicns, et les demi-colonnes
appliques aux faades extrieures, remplaces sur leNil par les hiroglyphes ; enfin les fentres, presquetotalement absentes du temple gyptien, tandis que 1c
L'ARCHITECTUREDU TEMPLE DE SALOMON 41
Saint en avait clans celui de Salomon, non moins quetous les difices sacrs.
Quant aux colonnes d'airain, la rponse est plusfacile encore. Nous la rsumons en deux remarques.
Le fut de la colonne salomonicnnc avait plus ou moins
les proportions du ft de la colonne gyptienne; car
l'habitude, les matriaux utiliss, le mode de construc-
tion suivi alors, imposaient les mmes proportions de
colonne aux nations des contres orientales, les pre-mires civilises du monde. Usage commun, et nonimitation.
Le chapiteau d'airain ressemble certains chapiteaux
multiplis profusion en Egypte. Nous n'en discon-
venons pas. Oui, il y eut imitation; mais qui appartientla priorit?
Les temples gyptiens de l'poque antrieure
Salomon sont caractriss par des colonnes, de tous
diamtres, avec chapiteaux en forme de lotus panouiou de bouton tronqu. Ceux de la seconde poque,
postrieure, et de longs sicles, a Salomon, offrent des
chapiteaux revtus de palmes, reproduisant les bran-
chages et treillis indiqus par nos saintes Ecritures.
Une date : Karnac, bti ou rpar par Thoutms II,
Hamss II et Ssac, de IGOO 900 avant l're chr-
tienne : dernier de l'ancienne poque.Or, vers l'an 285 seulement, monta sur le tronc
Ptolmc Philadelphe II, qui fit excuter pour sa biblto*
thque d'Alexandrie la traduction des Livres sacrs
d'Isral en grec. Il envoya, en reconnaissance du travail
des Septante interprtes, au prince des prtres, des
42 L'ARCHITECTUREDU TEMPLE DE SALOMON
vases d'or cisel, reproduction exacte, nous dit Josphe,des descriptions faites aux Livres des Hois et des Pnra-
lipomncs. Et sur ces entrefaites, le mme prince se fitle fondateur du temple clbre de Philoe, o l'on vit
apparatre pour la premire fois dans la valle du Nil le
chapiteau palm en forme de lis, les plantes et lesfeuilles nouvelles tresses, inconnues au ciseau indi-
gne, qui taient l'ornement du temple de Jrusalemet l'emblme favori des prosprits d'Isral! Ce fut donc
l'Egypte qui imita.Le temple construit par Onias en Egypte mme, sous
PtolmePhilomtor, tait, nous assure Josphe, sem-blable en tout au temple de Salomon, moins la grandeuret la richesse .
Nous ignorons absolument si l'cole de Tyr s'inspirade l'architecture gyptienne; nous ne savons pas davan-
tage si Iliram tait architecte ou s'il en remplit lesfonctions en sous-ordre; mais c'est une normit de
supposer qu'il dicta, de son chef, le plan du Temple auroi d'Isral; la nationalit trangre surtout ne saurait
expliquer une telle influence. Quant aux ouvriers,ce semble, en faible minorit, eux aussi, trangers(puisque David en avait form deux cent mille) : cise-
leurs, sculpteurs, peintres, tyriens peut-tre. Mais l'ar-tiste on trace un modle, un emblme, on lui fait une
maquette, et son ciseau, qui peut avoir un dialecte,non un style propre, reproduit aveuglment le modle,sans mme s'informer de In destination. A coup sur, larvlation divine y avait pourvu, sans avoir empruntera l'idoltrie. Moins que nous, M. Hcnan est endroit de
L'ARCHITECTUREDU TEMPLE DE SALOMON 43
suppler son silence. Et s'il tient citer les ornementsdu sanctuaire dcrits par les Livres historiques, nous
avons prouv que leur provenance n'tait pas plusgyptienne que celle des plans du Temple.
V
Reste le prtendu temple d'IIrode, dont Renan s'est
videmment inspir, tout on mprisant les architectes
modernes, et parmi eux M. le comte de Vogu.Gomme pour la question d'imitation gyptienne, nous
empruntons les arguments mmes du P. Pailloux ( Mono-
graphie >ch. v, xx-xxiu).Quels plans M. de Vogu trace-t-il du Temple?Selon lui, les soubassements des difices sacrs
seraient les murs d'enceinte actuels du Haram-cch-
Chrif, monumentaux, mais grossirement aligns, for-mant un rectangle trapzodal irrgulicr. Rpars parHrode, ces murs taient couronns du portique des
Gentils, galerie double ou triple couloir, entre deux
outrois ranges de colonnes, sauf la face Sud, qui en
avait quatre ranges; portique subissant les moines res-sauts et les brisures du primtre, avec des portos oncertains points souterraines, vu les niveaux diflerontsdu sol.
l'intrieur do ce vaste emplacement, une roche,
dsigne seulement par les traditions cabalistiques(peut-tre l'ancienne aire d'Oornan le Jbuscn), en
dehors de tout centre d'quilibre, lui parat tre l'endroito s'lve le sanctuaire trs saint, le Temple proprement
44 L'ARCHITECTUREDU TEMPLE DE SALOMON
dit. Dimensions et proportions, en plan par terre, peuprs conformes celles de nos saints Livres, en modifiantla tour frontale, large de moins et haute de plus decent coudes, et en surlevant le Temple de la hauteurdu cnacle, qui l'amne, en outre du chiffre de soixante
coudes, pris d'Esdras (liv. Ier, ch. vi,v. 3) et dcJosphc,et d'aprs ce dernier encore, quatre-vingt-dix ou centcoudes. Vestibule, Saint et Saint des Saints, chambreslatrales s'y trouvent, mais les colonnes d'airaindevraient tre a l'intrieur de la porte du vestibule, etla Bible leur donne trente coudes, au lieu de dix-huit,d'lvation, base et chapiteau compris.
Un parvis des Prtres limit par des salles consistanten un rez-de-chausse, en guise de portiques, o s'ou-vrent neuf portes, accost d'un microscopique parvisd'Isral de onze coudes I qui prcde la cour des
Femmes, scmblablemcnt entoure de salles : c'est le
portique intrieur. L'ensemble est cltur par un mur
perc d'une porte faisant suite aux deux premires : la
porte des Prtres et la porte de Corinthe ou d'airain.Puis la marge sacre Hcl , enfermant un autre parvissans nom; et au dehors, l'immense encadrement, tou-
jours irrgulier, du parvis des Gentils et de son por-tique.
Pour une semblable disposition, l'archologie nefournit a M. de Vogu que des pans de mur retouchs
par Hrode probablement, selon lui, mlangs de ro-
main, de juif et de grec byzantin revenant a l'poquejustinienne, comme les portes Double et Triple, et ht
porte Dore des soubassements ; enfin des rparations
L'ARCUITISGTUHBDU TEMPLE DE SALOMON 45
grossires, soit turques ou arabes : rien de plus. Ni fon-
dations, ni vestiges salomoniens, car les terrains ex-
hausss, et les substructions dominaient le roc, qui au-
jourd'hui affleure partout .Ce temple, qui est, d'aprs M. de Vogu, une recon-
struction, reproduisait en partie le temple de Salomon,dont l'auteur ne traite qu'incidemment, en le mal-traitant . Car il se constitue juge des donnes tiresdes Kcriturcs par Josphe lui-mme, et ne discerne pas,dans les crits de l'historien juif, les tmoignages de
l'antiquit en faveur du temple salomonien, ni le senssouvent obscur des descriptions relatives aux restaura-tions d'Hrode.
Les crits de Josphe renferment un double prcishistorique en contradiction avec l'esquisse de ces plansmodernes. Nous en donnerons quelques preuves, fai-sant observer d'avance que Josphe mrite une con-fiance tout autre lorsqu'il reproduit, avec les chiffresuniversellement connus de la Bible, les traditions nonmoins universelles et pures alors touchantjc temple de
Salomon, que lorsqu'il dcrit de mmoire, sans aucunenotion d'architecture, le temple d'Hrode, dans le but
avou de flatter les Homains ou leurs cratures.
Quant l'organisation du Temple, Josphe, en trois
passages, ngligs par M. de Vogu (Antifj. jucL, in, 3;
xv, 11; n, 9), affirme que Salomon construisit les troisenceintes du Temple, un double portique extrieur, le
Temple en son entier ! sampan jerdn. On prfre citer
celui (//. /., v, T>)o il morcelle les travaux du vieux
Temple commenc par Salomon, achev par ses succs-
46 L'AKCHITECTUIllSDU TEMPLE DE SALOMON
scurs et par le peuple, aprs des sicles; quoique, lamme, Josphe reconnaisse trois enceintes de portiquesau Temple.
M. de Vogii n'en admet que deux, la plus int-rieure seule acheve par Salomon. 11 dit de plus quele Temple avait un plan gyptien (nous avons assezrfut cette assertion); que pylne, Saint, Saint des
saints, et chambres latrales, sont en rapport de d-croissances proportionnelles ; que le trs ordiues
lapidum s'entend de trois ranges parallles de pierresquadrangulaircs, disposition trs frquente dans toute
l'antiquit ! sans aucun exemple, il est vrai ; que lessix coudes de mur d'Ezchicl rsultent le croi-rait-on ? de la juxtaposition de trois pierres, de deuxcoudes chacune 1ni plus, ni moins ! il l'affirme.*.
Les dcroissances proportionnelles , si on lesadmet entre soixante, trente, et vingt, sont malheureu-sement impossibles entre les chiffres, pris hors*d'oeuvrc,avec les planchers et parapets, de soixante-sept au
moins, trente-sept, et vingt-deux coudes, pour la tour,le Saint, et l'Oracle (d'aprs M. de Vogtt), et les cham-bres latrales ne s'y prtent pas. En Egypte celte d-croissance est masque par un mur continu, et on yobserve la gradation ascensionnelle du sol. Enfin l'as-sertion de M. de Saulcy (An judaque)) rpte parM. de Vogu son ami, qui fait Josphe le reproche dedoubler toutes les hauteurs, eu assignant un chiffre absurde , cent vingt coudes, au vestibule du
Temple, est aussi gratuite que l'attribution supposede soixante coudes aux fondations, et de soixante cou*
L'AHCUITISCTUREDU TEMPLE DE SALOMON \1
dcs au Temple, par le mme Josphc. qui entend l'difice suprieur du Cnacle, et lui donne ( tort) unelvation gale celle de la tour Frontale, dont le
chiffre, cent vingt coudes, tax d'absurde, est celuides Paralipomncs !
Ilrodc est-il l'auteur d'un agrandissement du Temple,comprenant la partie sud de l'esplanade du Moria ? Onse croit en droit de le dire, d'aprs la description del'historien Josphc. Nous rpondons :
Que les deux mille quatre cents coudes, acceptespour l'enceinte salomoniennc par M. de Vogu, par-font les six stades attribus par Josphc l'enceinte
hrodienne, sans le prolongement Sud ;
Que Josphc, attribuant chaque cot du carr des
portiques d'Isral quatre cents coudes ou un stade,chiflre talmudiquc, mais pris dans oeuvre, au lieu de
cinq cents coudes avec les portiques, et comparant cechiflre mal compris avec le dveloppement prim-
trique de six stades, en conclut logiquement, mais faus-
sement, l'agrandissement double de la plate-formesalomoniennc ; d'autant que l'Antonia occupait seule-ment la place de la tour Baris, dans la mme enceinte,btie par Salomon ;
Que si le portique Sud, dit d'Ilrode, fut recul pouragrandir l'enceinte, il n'tait pas besoin de l'Antonia
pour amener son chiflre six stades, qu'elle dpassait;Que les terrains au sud du Temple, compris dans les
grands murs des soubassements, sans l'tre dans le
carr des portiques rguliers, avaient t de tout tempsla proprit, soil des rois aprs Salomon, jusqu' la
>i8 L'AltCUITECTUREDU TEMPLE DE SALOMON
captivit, soit du Temple ensuite; et qu' l'poqued'Hrode mme ils taient occups par le Gynce ouInstitution des dames Isralites destines l'entretiendes ornements et des vases sacrs, et l'ducation des
jeunes filles issues des princes d'Isral (l'obier, Quarcs-mius, P. Bonifacio, etc.).
Quant au parvis des Gentils et son portique,Josphc les a confondus avec le portique et le parvisextrieur d'zchicl, c'est--dire les portiques d'Isral,comme il attribue ceux-ci la dnomination de parviset portique intrieur, rserve au Parvis des prtres et son portique ; et ce dernier, Josphc l'appelle intime,ou plus intrieur. D'o les quivoques continuelles deses descriptions et de ses plans.
La cause de son erreur est, d'une part, d'avoir at-tribu au parvis d'Isral les trois ailes des portiquesdes Prtres qui s'levaient au mme niveau que ce
parvis, et d'autre part, dans le silence des Livres saintssur le portique des Gentils, d'avoir pris pour ce dernierles portiques d'Isral eux-mmes, et dans leur nombrele fameux portique Sud ou Hoyal, attribu Hrode. Or,ce dernier portique, amalgam des deux enceintes, est
pourtant reconnu par Joscphe comme carr concen-
trique un portique intrieur : la seconde (enceinte)place au milieu et carre...., un faible intervalle... sans distinguer une faade d'une autre. Mais il dotin
cinq cents coudes ce portique d'Hrode, soit
quatre cents en prlevant les marges des deux cts,
cinquante coudes, parvis et portique des Gentils, selon
Josphc; des lors, comment y inscrire les cinq cents
L'ARCHITECTUREDU TEMPLE DE SALOMON 49
coudes, dimension relle hors d'oeuvre des portiquesd'Isral ? longueur de cinq cents coudes qu'atteintpniblement le ct sud du trapze turc, si nous recu-lons jusqu' sa limite extrme, avec M. de Vogu, le
portique dit d'Hrodc. Sans compter les diffrences dehauteur et largeur, du calibre des colonnes, et de leur
espacement, non moins que le nombre des couloirs quirend toute jonction angulaire avec les faces est et ouestdu portique des Gentils impossible, mme au moyendes tours qui en reproduiront fatalement la difformit
de figure.Le portique Royal ne fit donc jamais partie du por-
tique des Gentils. Joscphe le confondit avec l'aile mri-dionale des portiques d'Isral, absolument comme il fithonneur au portique des Gentils du portique de Salo-
mon, ou aile orientale des mmes portiques, tout en
prcisant qu'il tait construit sur un terrassement int-rieur plus lev. D'ailleurs ce sont six cents coudes
que rclamerait la faade sud du portique des Gentils;et les mesures releves par Josphe dans le fameux por-
tique d'Hrodc se trouvent concider presque merveil-leusement avec le ct du portique d'Isral, en ajoutantdeux colonnes, et rformant l'espacement des autres.
M. de Vogd, qui attribue au terme Basilica de la
Vulgate un sens tout moderne, rduit une seule ailede colonnades le portique de Salomon, et croit ainsi
traduire la Bible. Mais il parait ignorer que dans toute
l'antiquit btisiliva prsente l'acception prcise de
parvis entour de portiques , acception connue et
certainement vise par saint Jrme, comme elle fut en-4
60 I/ARCIUTKCTURKDU TEMPLE HK SALOMON
tendue par l'auteur juif; ce qui contribuo encore luidonner le change sur la distribution des parvis et por-tiques intrieurs, en dsaccord complet avec Josphe.
Il fait du chemin de ronde des rabbins, de dix cou-
des, un vaste parvis irrgulicr de forme carre, sansnom ; et son mur de quarante coudes, qui devrait le
dlimiter, d'aprs.1 osphc (Dell, jud., v, 5), est refoul l'intrieur pour clore d'autres parvis rectangulaires.
Il accumule dans cette secondo enceinte la cour des
Femmes, le parvis d'Isral et le parvis des Prtres, clouvre dans les portiques de ces trois parvis ainsi r-duits les neuf portes mentionnes par Josphe avecune confusion remarquable, qu'il nous est possible ce-
pendant de dmler, en comparant de prs tous sestextes. Disons seulement ici : la dixime porte n'tait
pas celle qui faisait communiquer la cour des Femmesavec celle des Isralites, puisque cette dixime porte d'airain ou de Gorintbe tait place sur un terras-sement infrieur celui de la Grande Porte d'or et d'ar-
gent, faisant, d'ailleurs, celle-ci, partie de l'enceinteintrieure des parvis sacrs, tandis que l'autre tait endehors non seulement des portiques rservs spcia-lement aux ministres sacrs et confondus avec ceuxd'Isral par M. de Vogtt, mais encore, selon Josphe,du temple tout entier, ns : c'tait la porte orientaledes portiques d'Isral.
Les cours des Femmes, dans le temple salomonien,taient, au nombre de trois, celles du milieu des fa-
ades, rpondant aux porches des entres, mais ce-
pendant communes aux femmes et aux hommes. Ces
I/ARGIUTBGTURBDU TEMPLE DE SALOMON 51
derniers avaient la jouissance exclusivement rservedes quatre cours des angles, sur les sept formant les
parvis d'Isral, sans autres sparations que celles des
portiques intermdiaires.
Quant aux porches, leur forme architecturale, nonmoins que celle des exdres, sur les portiques, les flan-
quant droite et gauche, d'aprs Jospho, rpond celle des plans d'Kzchiel, sauf do lgres diffrences
venant des mesures, prises hors d'oeuvre ou dans oeuvrede part et d'autre.
M. de Vogii ne doit pas, nanmoins, s'en autoriser
pour encombrer leur vestibule de deux lourdes co-
lonnes, de douze coudes de circonfrence, formant
quatre entres au lieu de deux, ni pour supprimer les
loges des portiers. En outre, tant cause de leur dfautde correspondance avec l'axe du Temple et des parvis,tels qu'il les conoit, qu'en raison des exdres, hauts
et larges comme des tours , dit Josphe, ces portes nesauraient tre les portes modernes du Haram, gauche-ment introduites, voire souterraines ! dans l'enceintedont il ose faire, avec ces portes, l'enceinte de Salomon,ou mme d'Hrode !
Avec un espace aussi odieusement restreint, soit pourle dveloppement des portes autour du primtre de
ces portiques hrodiens qu'elles absorberaient, soit pourrenfermer les multitudes d'Isral, dans une cour de
cent quarante coudes sur onze, avec neuf portes s'youvrant, tandis que le plan divin excut par Salomon
en imposait juste autant aux trois enceintes runies,soit pour contenir aussi et les provisions du Temple et
52 L'ARCHITECTUREDU TEMPLE DE SALOMON
les familles sacerdotales ; dans de telles conditions, le
peuple de Dieu n'et eu qu'un seul local, mle aux paenseux-mmes et aux impurs, d'o il put assister, do loin,aux crmonies cpii lui cachaient les murs du Temple :c'est--dire le portique et le parvis des Gentils. Ht c'estdans ce mme espace, accessible aux trangers et aux
infidles, qu'il et reu de l'estrade du Prince ou du
Prophte, place dans l'aile orientale du mme portique,appel tort portique de Salomon, les secrets du gou-vernement, et les enseignements des mystres de la re-
ligion !
Le nombre des portes, tel qu'il rsulte de l'examendes divers passages de Joscphc, est de dix, dont trois
pour chaque enceinte des Gentils, d'Isral et des Pr-
tres ; une dernire, l'ouest de la premire enceinte est
nglige (A/M., xv, Il ; vin, 1 ; Bell, /W., v, 5; vont.
Ap., H). Il les accumule en apparence, il est vrai, dansune seule enceinte, mais en dsignant suffisamment, parses descriptions, une porte qui faisait partie de chacune
de ces enceintes, et distincte des deux autres : les
portes Orientale extrieure, d'Airain, et la Grande
Porte ; de plus, il leur applique la notion de diastase
ou disposition sur le mme axe, s'ouvrant travers des
priboles concentriques.Pour les tages existant au-dessus des portiques,
l'histoire des nombreux siges du Temple et la tradition
universelle nous apportent leur tmoignage ; de mme
pour les agrandissements de la plate-forme du Moria,de l'Est l'Ouest, par les travaux du Royal Architecte.
L'auteur du Temple de Jrusalem ne respecte pas da-
l/ARCIUTECTURE DU TEMPLE DE S.VLOMON 53
vanlngo, dons la reconstruction d'Ilrode, les pres-criptions hiratiques du Temple, relatives la formedu Saint des saints, et aux amnagements du sanc-
tuaire, malgr Josephe toujours ! Car Ilrode lui-mmene put modifier la plus inviolable des prescriptions duculte, qui faisait du Saint des saints un cube parfait de
vingt coudes, ferm a tout autre jour qu' celui du feu
sacr, impntrable tout autre qu'au grand prtre :cube insr dans le rcit des Ecritures, aprs la descrip-tion, rpte par Joseph, des soixante coudes renfer-mant le Saint et le compartiment rserv au Saint des
saints, qui fut spar du premier par un mur devant
lequel retombait le voile. M. de VogCi leur donne en-semble une hauteur de soixante coudes, sur soixante-
cinq de longueur et trente de largeur, et aux chambresde ceinture une largeur de quinze coudes, dans son
Temple d'Hrodc.Crature de l'empereur, Ilrode, devant qui, par flat-
terie pour ses matres, Josephe rduit la taille de pyg-mes Salomon et Zorobabel, ne put que restaurer, r-
parer le Temple. Comme sanctuaire d'Isral, et figurede l'Eglise, ses plans, remis par Dieu David, ne pou-vaient tre retouchs sans profanation; seul il avait
aussi la promesse faite par Agge de la venue du Dsirdes nations.
Hrode, malgr les affirmations intresses et contra-
dictoires de Josphe, ne reconstruisit pas intgralementle Temple : les quarante-six annes employes le
btir, que les Juifs objectent au Sauveur, leur parlant de
la rdification du Temple de son corps en trois jours
5't I/ARCIIlTKCTimK DU TEMPLE DE SALOMON
(Joan.y ch. u, vv. 19-22), sont celles des travaux de Zoro-babcl, Ilrode mit aux siens, selon Josphe, neuf ans etdemi.
Les murs du Unram n'offrent pas trace des ouvragesd'art gigantesques donnant accs, sur les flancs du mole
salomonicn, aux portiques du Temple ; leurs pierres n'at-
teignent pas les dimensions normes signales par Jo-
sphe, jusqu' vingt coudes, comparables a celles do
Balbck; et l'inclinaison de leurs matriaux, obtenue parle retrait des assises successives, procd indigne durevtement mme des pylnes gyptiens, laisse croire
qu'ils furent emprunts une dmolition de murs ant-rieurs parement vertical. Leur style donc est post-rieur Ilrode, nous l'avons insinu, comme nousavons signal l'inconvenance liturgique et utilitaire des
plans qu'attribue aux btiments sacrs l'cole moderne :
quinze chambres en tout, par exemple, au lieu des
quatre ou cinq cents d'Kzchiel !
Que put faire Ilrode, de l'aveu mme de M. de Vogil ?
Rparer et embellir, outre la premire enceinte, les
portiques de l'encciiilo d'Isral, extrieurs, et non int-rieurs l'enceinte sacre, et limitant le parvis contigudes Gentils ; rparer seulement les portiques des Pr-
tres, qu'il n'eut pu dmolir et reconstruire en deux ans,en supprimant le ministre et les sacrifices du Lieu saint ;exhausser le temple de Zorobabel, non le renverser etle rtablir, comme le dit Josphe, qui donne pour preuveun agrandissement faux : cent coudes sur soixante sont
dj les chiffres salomoniens relevs par Kzchiel ; l'ex-
hausser, en rtablissant l'lvation, non de cent vingt
I/ARG111TECTITREDU TBMlMD12SALOMON 55
coudes, rduite, selon Josphe, par un tassement dodix mtres dans les fondations, fable monumentale !mais do cent coudes pour la Tour, et do quatre-vingt-dix pour le Saint et le Saint des saints surmonts de
l'tage du Cnacle : hauteur do l'difice do Salomon, etdo la tour sous son plafond, continuation de celui duSanctuaire. La hauteur totale do soixante coudes,
qu'avait fixe l'dit de Cyrus, fut prise pour une hauteursous plafond du Saint et do la partie recouvrant leSaint des saints par Josphe, malgr sa disproportionavec vingt et quarante en largeur et en longueur. Aussilvc-t-il du double son Cnacle, qui, en ralit, par-tir du plafond infrieur, quarante-cinq coudes, futlev do quarante-cinq coudes, en surcroit, par lesrestaurations d'IIrodc.
Il n'y eut donc pas de troisime temple. Une der-
nire preuve sera la diffrence de la main-d'oeuvre.Outre les prparatifs faits par David pour la construc-tion de la Maison de Dieu, Salomon, son fils, y employaau moins deux cent mille ouvriers pendant sept annesconscutives ; Ilrode n'occupa, dans le cours de dix
ans, que dix mille ouvriers. Or, deux cent mille hommes,travaillant sept ans, sont dix mille, travaillant dix
ans, comme quatorze est a un. Donc, Ilrode ne putaccomplir que l'quivalent tout au plus du quator-zime des oeuvres de Salomon.
VI
Nous avons longuement prouv les contradictions
56 I/ARCHITECTURE DU TEMPLE DE SALOMON
et les erreurs do l'cole moderne, reprsente parM. do Vogl. Notre dmonstration tombe de tout son
poids sur un autre livre plus rcent que le Temple de
Jrusalem^ et qui a d s'en inspirer, tout en puisantdirectement aux autres sources, les ttabbins et Josphc,Ce sont les chapitres consacrs au premier, au secondet au troisime temple, de VArchologie biblique du
docteurSchcgg, dite parle docteur Wirthmttller, tousdeux professeurs de thologie Munich (Hcrder). Usn'admettent pas pour le Tabernacle (chapitre prc-dent) une imitation idoltrique, et attribuent juste-ment Salomon l'ensemble monumental des travauxdu premier temple ; mais ils mritent tous les reprochesque nous avons faits a M. de Vogd, et en aggraventles torts en ce qui concerne le prtendu troisime
temple.Ce savant ouvrage, en eff